RSR = fe à es x : < vs ‘ : = à « ns PRE et & .. LE "À Dog So DATE 4 " ; D + La ess — : = RS nn 2 SIR WILLIAM CROOKES, D.Sc. FRS. ' t ' ( ‘ “ : ° Ld £ L » 4 À y . r " * “ Al Ps h à L L D 4 unit gà + OR ON PT PPT TT ’ : ra i “4 ns T ë “à 2 ue, Ê | - 4 = Fe Le * we” a LE ï # ’ ; ' pe dr ’ À LR ui = : F x F2 x Reoue générale des Sciences pures et appliquées TOME DIX-HUITIÈME MATIERE 20108 "# À 94 où our 2. x. 5 < ei Revue générale des S'ciences pures el appliquées PARAISSANT LE 145 ET LE 30 DE CHAQUE MOIS Directeur : Louis OLIVIER, Docreur Ès Sciences TOME DIX-HUITIÈME 1907 AVEC NOMBREUSES FIGURES ORIGINALES DANS LE TEXTE Mibrairie Armand Colin 5, rue de Mézières, Paris ATRAUE PNEU BE Ë ND ‘ 18° ANNÉE [l 15 JANVIER 1907 Revue générale des DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. SCIENCES pures et appliquées publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Astronomie Détermination spectrographique des élé- ments de l'orbite terrestre. Le Professeur Küstner, directeur de l'Observatoire de Bonn, vient d'employer une méthode spectrographique pour déter- miner les éléments de l'orbite de la Terre". Tout mouvement se passant dans l'espace universel et qui s'accompagne d'un accroissement ou d'une décroissance de la distance entre l'observateur ter- restre et un astre donné produit, comme on le sait, un déplacement des lignes spectrales de ce dernier, dépla- cement réglé par le principe dit de Düppler. C’est ainsi que l’on constate que certaines étoiles fixes s'approchent continuellement du système solaire, alors que d’autres s’en éloignent sans cesse, suivant que les lignes spec- trales, données par comparaison avec celles des élé- ments chimiques, se déplacent, soit vers le bleu-violet, soit vers le rouge. Ces déplacements, enfin, sont pério- diques dans le cas de certaines étoiles, appelées «étoiles doubles spectroscopiques ». On peut appliquer de semblables déterminations au mouvement de translation de la Terre autour du Soleil et l'on devra constater une périodicité annuelle dans le déplacement des lignes spectrales : même, en toute pré- ‘ cision, il faudra tenir compte du mouvement de rota- tion de la Terre sur elle-même. Nous n'indiquerons pas, au reste, le détail des déterminations faites par le Professeur Küstner en suivant ce principe, pour aboutir aux conclusions mêmes de ces recherches. La constante de la vitesse de la Terre se trouve égale, par ce procédé, à 29.617 kilomètres par seconde, avec une erreur probable de + 0,057 kilomètre; mais, comme les déplacements des lignes donnent le rapport de la vitesse de la Terre à celle de la lumière, ce chiffre implique une hypothèse par rapport à cette dernière : la valeur adoptée par M. Küstner est celle que donnent les déterminations physiques les plus récentes, à savoir 299.865 kilomètres, avec une erreur probable de + 26 kilomètres. Ces mesures donnent également la parallaxe du Soleil, ‘ Ciel et Terre, n° 13, p. 31, 1906. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. à savoir l'angle sous lequel le rayon de la Terre appa- raît de ce dernier à la distance moyenne des deux astres : le chiffre trouvé est de 8,844 secondes, soit un peu supérieur à la valeur généralement adoptée de 8,80 secondes. On peut aussi trouver la vitesse avec laquelle Arcturus, par exemple, approche du système solaire : la valeur déterminée par M. Küstner est de 4,85 kilomètres par seconde. De pareilles déterminations de la parallaxe du Soleil, au moyen de mesures spectrographiques, sont d'autant plus remarquables qu'elles constituent un nouveau lien entre les recherches astro-physiques et astro-métriques, lien qui, sans doute, poussera à réunir ces deux branches de l'Astronomie, qui, dans ces derniers temps, ten- daient à s'éloigner de plus en plus l'une de l’autre. S 2. — Art de l’Ingénieur La Loire navigable. Essais du système Audouin. — Un nouveau système d'amélioration des rivières, inventé par le capitaine Audouin, vient d’être expérimenté sur la Loire, à 3 kilomètres en amont du confluent de la Maine, près du Port-Thibaut,. Ce procédé consiste en barrages obliques à vannes suspendues, c'est-à-dire en digues longitudinales obli- ques au courant et formées de vannes maintenues à une certaine distance au-dessus du fond. Il a pour but de con- centrer l’eau dans le chenal, tout en écartant latérale- ment les sables quiroulent sur le fond et peuvent, par suite, passer sous les vannes. L'essai qui vient d’en être fait, conformément au projet dressé par M. l'ingénieur en chef Chemin et approuvé par décision ministérielle du 26 août 1905, a déjà donné des résultats satisfaisants, qui ont été constatés par les plans de sondages officiels établis par l'Admi- nistration des Ponts et Chaussées. Le barrage a une longueur totale de 450 mètres. Il se divise en deux parties: la première, longue de 250 mè- tres, constitue une rectification de la rive gauche. Cette rive, qui offre en amont une courbure concave favorable à la formation d'un bon chenal, passait brusquement en ce point à une direction convexe; il en résultait un seuil, un mauvais passage. Le barrage 1 LR CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE prolonge la concavité de la rive: la photographie ci- jointe, prise près de l'extrémité amont, permet de se Dans son ensemble, le barrage a été construit de la manière la plus simple et la plus économique, avec des rendre compte de cette direction concave de l'ouvrage (fig. 1). chenal s'est creusé le long du barrage et les sables, passant sous les vannes, sont allés se dé- poser derrière le bar- rage. L'intervalle entre l'ancienne rive et cette rive artificielle régulière s'est colmaté en quel- ques semaines; On ÉVa- lue à 100.000 mètres cubes environ la quan- tité de sable qui s'y est déposée. C'est autant de moins dans le chenal. D’encombrant qu'il était, ce sable devient utile, en reconstituant une importante étendue de terrain qu'il y a tout avantage à reconquérir sur le fleuve; car cette partie du lit s'était élar- gie outre mesure depuis un certain nombre d'an- nées, au détriment des riverains. La deuxième partie du barrage, longue de 200 mètres, avait pour but la formation d'un che- nal au travers du seuil, au passage d’une rive à l’autre. Cette seconde section n’a été mise en place que le 16 mai der- nier par des eaux bas- ses. Dès lors, la force d'affouillement n'a pas pu être jusqu'ici aussi grande sur ce point que pour la première sec- tion, qui avait été placée deux mois plus tôt et par des eaux moyennes. Cette moins provoqué la formation d’un bon chenal. . — Vue d'ensemble du barrage. Les effets prévus se sont produits rapidement : le 2, — Manœuvre des vannes pieux distants de 2 mètres, réunis par des moises portant des glissières, qui servent à guider les vannes. La cons- truction s’est faite sans difficulté. Les vannes ont été mises en place en quel- ques heures; un homme suffit pour les soulever ou les abaisser, et cela sans effort, à la main (fig. 2). Il y a lieu de com- pléter aujourd'hui ces premiers résultats en prolongeant le barrage vers l'aval, avec un dis- positif particulier, des- tiné à étreemployé pour les barrages obliquess’a- vançant davantage dans le milieu du lit. Un pro- jet de prolongement du barrage au moyen de « bateaux-vannes tour- nants » est en Ce mo- ment soumis à l'Admi- uistration des Ponts et Chaussées.Le cinquième Congrès du Sud-Ouest- Navigable a émis un vœu en faveur de ce nouvel essai, pour lequel les Conseils généraux de Maine-et-Loire, de la Vienne et d'Indre-et- Loire ont voté des sub- ventions, en demandant que l'Etat participe éga- lement à la dépense. Ce nouveau dispositif parait devoir rendre des services, non seulement pour le creusement du chenal sur les seuils, mais aussi pour la fer- meture des bras secon- daires.Ce dernier emploi est un des plus importants, selon l'avis des Chambres de Commerce d'Angers et d'Orléans. E. Audouin, Professeur à l'Université de Poitiers. * CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 3 $ 3. — Physique La photographie à distance. — Dans notre numéro du 30 octobre 1906, nous entretenions nos lec- teurs des expériences faites par M. Carpini sur l'effet photo-électrique du sélénium, c’est-à-dire sur l'in- fluence exercée par la lumière sur la conductibilité électrique de ce corps. M. le Professeur Korn, de Munich, vient d'appliquer cette propriété du sélénium à la solution d’un pro- blème des plus intéressants : la transmission à dis- tance d’une image photographique. Le dispositif employé est des plus simples. Le poste expéditeur comprend une lampe de Nernst, dont les rayons lumineux sont concentrés par une lentille sur une toute petite ouverture pratiquée dans la paroi d’un cylindre métallique. A l'intérieur de ce cylindre, s’en trouve un autre en verre, qu'actionne un mouvement hélicoïdal et sur lequel est enroulée la pellicule photo- graphique portant l’image à reproduire. Après avoir traversé la pellicule, le rayon lumineux passe à tra- vers un prisme qui le fait diverger sur une plaque de sélénium. Or cette plaque fait partie d’un cireuit élec- trique fermé, qui est ainsi rendu plus ou moins con- ducteur selon que le sélénium reçoit un rayon d'une intensité lumineuse plus ou moins grande : les cou- rants électri- ques du circuit traduisentdonc les variations de la lumière envoyée par le poste expédi- teur. Au poste ré- cepteur se trou- Presque en même temps que la découverte de M. le Professeur Korn est portée à la connaissance du publie, on annonce qu'un inventeur américain, M. J. B. Fowler, de Portland (Orégon), aurait trouvé le moyen, par d'in- termédiaire d’un appareil auquel il a donné le nom de « Télévue », de transmettre simultanément les paroles et l'image d'une personne parlant au téléphone. Si cette invention, sur laquelle les détails manquent encore, donne bien les résultats indiqués par M. Fowler, on voit qu'elle serait un heureux complément de la découverte du Professeur Korn. En tout cas, cette der- nière découverte, à elle seule, fait faire un grand pas au problème si passionnant de la vision à distance, dont la solution complète ne peut maintenant se faire attendre longtemps. $ 4. — Electricité industrielle Une station géante de télégraphie sans fil. — Une station de télégraphie sans fil aux dimen- sions imposantes, destinée à assurer les communi- cations avec les vaisseaux naviguant sur l'Atlantique d’une part et avec le reste des stations radio-télégra- phiques européennes de l’autre, vient d’être construite par la Compagnie allemande de Télégraphie sans fil (exploitant le système dit « Téléfunken ») à Nauen, près Berlin. . Cette station, dont un groupe d'ingénieurs vient de visiter l'installation, est, en son es- pèce, la plus considérable du continent ; ve également une lampe de Nernst, dont les rayonssontcon- centrés par une lentille sur un cylindre en verre animé du même mou- vement que celui du poste expéditeur et recouvert de la pellicule à impressionner. Mais, entre ce cylindre et la pellicule est interposé un galvanomètre à corde, servant d'obturateur intermittent. Ce dernier appareil se compose d'une mince feuille d'aluminium placée entre les deux fils du circuit : les variations de l'inten- sité du courant électrique se manifestent par des déplacements de la feuille d'aluminium, qui, intercep- tant plus ou moins le rayon lumineux, règle l’admis- sion de la lumière sur la pellicule; cette dernière est ainsi plus ou moins éclairée, suivant que le courant est plus ou moins intense et que, par conséquent, la plaque de sélénium a recu, à travers la pellicule du poste expéditeur, une intensité lumineuse plus ou moins grande. On peut ainsi reproduire point par point au poste récepteur la pellicule du poste expé- diteur. Evidemment, cette reproduction ne se fait que pro- gressivement, au fur et à mesure de l'avancement du cylindre qui porte la pellicule à reproduire; mais on ne peut nier l'importance du résultat obtenu, lorsqu'on saura qu'avec le procédé du Professeur Korn on peut transmettre ainsi une épreuve photographique à 1.800 kilomètres avec une netteté parfaite. « Donnez- moi des milliers de fils télégraphiques ou télépho- niques, à dit l'inventeur, et je vous ferai voir instan- tanément la personne qui vous parle de l’autre côté du monde ». C'est faute d’avoir ces milliers de fils conducteurs que M. Korn n'a pu faire la transmission que progressivement. .Il est intéressant de rappeler que ces premières expé- riences furent faites à Paris dans le laboratoire de M. Carpentier, le constructeur bien connu, et qu'en mai 1903 un compte rendu en était donné par M. Cail- letet à l'Académie des Sciences. Fig. 3. — Antenne de la station elle comprend 200 mètres une (our en fer de télégraphie sans fil de Nauen. AR A LE RAS de 100 mètres pour supporter l'antenne (fig. 3). Comme le cloisonnage en fer de cette tour offre une section triangulaire dont les côtés ne sont que de 4 mètres, on comprendra les grandes difficultés qu'il a fallu vaincre dans la construction, pour que les fondations pussent en supporter l'énorme poids et les grandes tensions qu'il entraine. Les trois montants latéraux sont reliés entre eux par des entretoises, parallèles les unes aux autres jusqu'à quelques mètres du sol, et qui, à partir de ce niveau jusqu'au pied de la tour, se fusionnent et se perdent dans une sphère en fonte; les pressions sont {transmises aux fondations de béton au travers de couches isolantes très épaisses. L'ascension de la tour s'effectue au moyen d’un esca- lier; à la hauteur de 96 mètres, on à disposé une plate- forme, de laquelle on commande et contrôle le jeu des trois paires de rouleaux fixés au sommet de la tour pour enrouler et dérouler les fils de lantenne. À la hauteur de 75 mètres, on a disposé les bandes assurant, à elles seules, la position verticale de la tour et qui sont amarrées à trois blocs en maçonnerie disposés aux angles d’un triangle, à 200 mètres de distance des fon- dations de la tour. Comme, en raison des tensions électriques énormes, il fallait compter avec des étins celles d'une longueur allant jusqu'à 4 mètre, les troi- systèmes isolants supérieurs ont dû être plongés dans de l'huile. L'antenne affecte la forme d'un parapluie, compre- nant six segments; chäque groupe de deux segments placés en regard l’un de l’autre s’équilibre à travers les trois paires de rouleaux dont il vient d’être question et qui réduisent à un minimum la tension exercée sur la tour par les fils de l'antenne. La surface totale cou- verte par ces derniers est d'environ 60.000 mètres carrés. La mise à la terre consiste en un réseau analogue de fils immergés dans le sol et qui couvrent une super- ficie d'environ 126.000 mètres carrés. S CHRON IQUE ET CORRESPONDANCE Le bâtiment attenant à la tour contient la salle des machines, la salle du télégraphiste et les habitations des employés au rez-de-chaussée, et la salle des hautes tensions au premier. Toutes ces salles sont chauffées par la vapeur d'échappement d'une locomobile. La locomobile actionnant la dynamo est du type normal; son rendement est de 35 chevaux sous sept atmosphères, pour une vitesse de 120 tours à la minute; du charbon où du coke sert comme combustible. L'eau lui est fournie directement par une pompe aspirant l’eau souterraine. Pour économiser du combustible, on maintient la locomobile, dans le cas d'un service con- üinu, à un quart de sa charge pendant les intervalles prolongés; la pression restante suffit alors pour trans- mettre des dépêches courtes. Toutes les fois qu'il s'agit d'émettre des dépêches pendant un temps assez long, on admet la vapeur tout entière, ce qui se fait facile- ment en cinq minutes. Le service assuré par la loco- mobile est ainsi à la fois simple et économique. Le volant de la locomobile entraine l’alternatrice monophasée au moyen d’une transmission à courroie ; le courant d'excitation est fourni à cette dernière par une excilatrice montée en bout d'arbre. La génératrice a un rendement d'environ 25 kilowatts pour 750 tours à la minute et 50 périodes. Ses bobines sont protégées contre les tensions à haute fréquence par des disposi- tifs de süreté. De la génératrice, des conducteurs se rendent à la table de distribution installée dans la salle de service et où se trouvent tous les dispositifs de süreté, les commutateurs et les instruments de mesure. . Le.courant alternatif engendré par la dynamo ali- mente, à travers quatre bobines de réaction primaires, les quatre bobines d'induction disposées, comme le reste des appareils à haute tension, au premier étage du bâtiment. Le circuit de transmission comprend une surface de 400.000 centimètres, formée par 360 grandes bouteilles de Leyde. L'éclateur annulaire est du type simple, sans ventilation; la self-induction consiste en un serpentin de cuivre argenté avec des connexions pour le circuit d'excitation et pour accoupler l'antenne et les conduc- teurs de mise à la terre. Un circuit stationnaire permet de mesurer la longueur des ondes et de déterminer le couplage. Les bouteilles de Leyde sont chargées par le circuit secondaire des quatre bobines d'induction disposées en série avec quatre bobines de réaction à haute ten- sion. En raison de la résonance précise, cette capacité énorme est chargée par une quantité d'énergie relati- vement peu considérable. On passe de la position de transmission à celle de réception par une manipulation simple, en actionnant un commutateur au moyen duquel l'antenne et la mise à la lerre sont connectées avec le circuit de réception, en même temps que le circuit à courant alternatif est verrouillé par un relai rendant toute transmission im- possible. Celle précaution est nécessaire pour protéger les piles et les cohéreurs, si sensibles, contre les effets de haute intensité du circuit d’excitation. Les télé- grammes sont reçus soit simullanément avec le récep- teur téléphonique et l’inscripteur Morse, soit indépen- damment, suivant l'un ou l’autre de ces deux procédés. Un parafoudre protège l'installation contre les dé- charges atmosphériques. Les télégrammes transmis de cette station ont été recusil y à quelque temps parle vapeur transatlantique «Bremen», du Norddeutscher Lloyd, jusqu'à une dis- tance d'environ 2.400 kilomètres de Brême. Ce résultat est d'autant plus remarquable que les ondes électriques avaient à traverser le continent sur la moitié environ de cette distance. D'autre part, on communique facile- ment de Nauen avec la station radio-télégraphique de Saint-Pétersbourg, distante de 1.350 kilomètres, et avec celle de Righi-Scheidegg, à travers la chaine des Alpes. Après avoir achevé l'installation de la tour, qui n'était que provisoire au moment de ces expériences. on espère atteindre des distances de 4.000 kilomètres. D'une façon générale, on peut affirmer que la question. des distances à franchir avec la télégraphie sans fil est essentiellement une question de puissance des appareils. de transmission. Or, les quantités d'électricité dé- chargées à la Station de Nauen sont si énormes que le fonctionnement des appareils s'accompagne d'un bruit tonitruant rappelant celui d'une série de coups de canon. Alfred Gradenwitz. $ 5. — Botanique Tératologie végétale : anomalies prove- quées par quelques Urédinées. — Au dernier Congrès de la Société helvétique des Sciences natu- relles!, les Sociétés suisses de Botanique et de Zoologie ont consacré plusieurs séances communes aux études de Tératologie végétale et animale. Comme on le sait, la Tératologie est la partie de la Biologie qui s'occupe des anomalies, allant mème jusqu'aux monstruosités, que peuvent présenter les organismes vivants. M. Fischer, de Berne, a fait une communication très intéressante sur le rôle joué, à ce point de vue, par quelques Uré- dinées, champignons inférieurs, parasites. L'auteur a cru pouvoir reconnaitre ce premier fait : pour que l'action des Urédinées entraine un développe ment anormal, soit des rameaux, soit des inflorescences,. il est nécessaire que le mycélium ait envahi les organes végétaux alors qu'ils étaient encore à l’état de jeunes bourgeons. M. Fischer appuie cette constatation sur l'observation de quelques anomalies très nettes : les balais de sorcière du sapin blanc, provoqués par le Melampsorella Caryophyllacearum, les pousses anor- males d'Euphorbia cyparissias L., dues à l’action de l'Uromyces Pisi, et les nombreuses variations de l'Euphorbia amygdaloïdes L., causées par l'Endophyllum Euphorbiæ silvaticæ. ’ Les anomalies observées portent sur les organes axiles,. sur les feuilles végétatives et sur les inflorescences. Pour les organes axiles, l’action des Urédinées citées se traduit par des modifications dans la fonction de croissance (balai de sorcière du sapin, du Berberis), par l'allongement irrégulier des entre-nœuds (Ceu- taurea montana L. sous l'influence de Puceinia montana), par l'hypertrophie des organes axiles. La ramification: est exagérée, soit qu'elle devienne plus abondante, ou qu'elle soit, au contraire, réduite (balai de sorcière, poussesirrégulières d'Euphorbia cyparissias). | Pour les feuilles végétatives, cette action nest pas moins manifeste; elle provoque des variations anor- males dans leur orientation ou leur forme. Les balais de sorcière ont la feuille tournée en tous sens. Les résultats des altérations morphologiques paraissent se: rapprocher de ceux qui sont dus à l’étiolement; ils. sont très variés. Mais le fait le plus intéressant, ce sont les métamorphoses des feuilles végétatives florales. M. Fischer a observé un pied d'Aremone nem0r0sa QUI, sous l'influence de l'Ochropsora Sorbi, présentait une de ses feuilles involucrales partiellement développée en sépale blanc. LITRES Enfin, sur les inflorescences, l’action des Urédinées est bien moins significative; dans la plupart des cas connus, elle est purement négative : la floraison est supprimée. Toutefois, il y a des exceptions, et les modi- fications de certains organes floraux ne sont pas très rares. , Bien que très isolées, quelques-unes des observations. de M. Fischer méritent de ne pas passer Inaperçues; elles ont une signification beaucoup plus: générale qu'elles ne le paraissent a priori. Et l'on ne manquera sans doute pas de les invoquer, d’ailleurs avec raison, comme des arguments en faveur des théories expli- quant l'origine du sexe par l'influence du parasitisme, Ernest Fleury. RE EE 1 Tenu à Saint-Gall du 31 juillet au 1er août 1906. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 5 $S 6. — Zoologie Inffuences déterminant la sexualité des œufs chez le Dinophilus. — Le Dinophilus apatris est un petit animal marin, intermédiaire entre les Roti- fères et les Annélides primitifs, qui possède la curieuse particularité de pondre des œufs de deux tailles diffé- rentes : les plus gros donnent toujours naissance à ‘des femelles; les autres, près de trois fois plus petits, donnent toujours des mâles; normalement, dans les pontes, le nombre des gros œufs est à peu près le double du nombre des petits œufs. Chezle Dinophilus, la détermination irrévocable du sexe est donc extrème- ment précoce, bien antérieure à la fécondation, et le ‘spermalozoïde n'a vraisemblablement aucun pouvoir déterminant. Afin de voir si l’on pourrait influer sur la déter- mination sexuelle, von Malsen! divise des Dino- philus en trois lots : le premier est laissé à une tem- pérature relativement basse, 15° environ; le deuxième est placé dans une chambre, à la température nor- male, 19° en moyenne, et le troisième est maintenu pendant un temps assez court dans un thermostat à 26°. Dans chaque lot, les pontes sont recueillies avec soin, et l'on compte les œufs gros et petits pour établir leurs proportions relatives. L'expérience donne les résultats suivants : Œufs mâles Œufs femelles Dinophilus du lot froid . . . 10 pour 35 — — moyen . . 10 — 2% — — chaud. . . 10 — 17 11 semble done que la température à une influence déterminante; elle agit aussi, du reste, en diminuant le nombre des œufs pondus chez les Dinophilus main- tenus à 15°. Von Malsen interprète les résultats de la façon suivante : dans les cultures tenues au chaud, la formation des œufs est très activée ; ceux-ci, trop nom- breux, sont moins bien nourris, restent petits, d'où ‘abondance d'œufs mâles. Pour vérifier cette hypothèse, il affame des cultures de Dinophilus laissées à la tempé- rature ordinaire et il obtient la mème proportion de 40 petits œufs pour 17 gros œufs. Ces expériences, qui s'accordent assez bien avec celles Al’Issakowitsch sur les Daphnies, semblent prouver que la détermination du sexe de l'œufse produit dans l'ovaire même de la mère, sous l'influence des bonnes ou mau- waises conditions de nutrition; si l'œuf réussit à accu- muler beaucoup de réserves, à avoir un cytoplasme abondant (ce qui peut arriver quand la mère est mal nourrie et forme très peu d'œufs), il est déterminé comme femelle; s'il est mal nourri (ce qui peut arriver quand la mère recoit une abondante nourriture, qui provoque une rapide multiplication des œufs), il est déterminé comme mâle. On doit donc perdre l'espoir d'agir avec certitude sur le sexe des œufs en nourrissant “plus ou moins abondamment les parents, comme l'avait du reste démontré des expériences antérieures sur les Souris, puisque la nutrition de l'ovaire et des éléments qu'il renferme se règle d'une façon spéciale, relative- ment indépendante de l'état général. $ 7. — Sciences médicales Doigts en lorgnette chez un nègre du Sou- dan *. — Au cours de la Mission du Bourg de Bozas, à travers l'Afrique tropicale, M. le Dr Brumpt a eu l’oc- -casion d'observer dans le Haut Nil un cas curieux d’atrophie musculaire accompagné de lésions particu- 4 Vox MaLsex: Geschlechtshbestimmende Einflüsse und Æibildung des Dinophilus apatris (Arch. fur mikr. Anat., £. LXIX, 1906). ? Revue neurologique,, 30 mai 1906. lières des mains, lésions qui, jusqu'ici, ne semblent pas avoir été signalées, Il s'agit d'un homme de race Chouilli, âgé d'environ trente-cinq ans. Vers l’âge de quinze ans, il a été at- teint d'un bouton de pian, maladie cutanée répandue dans toutes les régions intertropicales. Chez ce malade, l'inoculation fut suivie, comme d'habitude, de fièvre et de douleurs articulaires, mais l’éruption caracté- ristique ne « sortit pas ». Pendant plusieurs mois, incapable de se mouvoir, il resta couché, souffrant de céphalalgie et de douleurs musculaires et articu- laires. Dans le cours de cette maladie, il se produisit un épaississementnotable des tibias, puis de l’ankylose des doigts de la main. En l’espace de plusieurs années, le squelette de certains doigts se résorba, les phalanges se luxèrent les unes sur les autres, la main devint tout à fait impotente. Pendant les premiers mois de la ma- ladie, le côté gauche de la figure s’atrophia; puis les forces revinrent un peu, et le malade put se déplacer; mais l'atrophie de tous les muscles du corps continua à suivre une marche progressive. Tels sont les renseignements que le D' Brumpt à pu recueillir sur ce malade, renseignements fournis en grande partie par le chef du village, car le sujet était considéré comme « simple » par les gens du pays. D'un commun accord, les indigènes attribuaient Ja maladie de leur compatriote à un cas de Pian rentré, l'éruption qui ne s'était pas produite à l'extérieur ayant été la cause des accidents. Actuellement, l'individu a un aspect squelettique; il marche péniblement en s'appuyant sur un bâton. La figure présente une asymétrie manifeste, due à l’atro- phie des muscles du côté gauche. Cet homme à l'air hébété et indifférent. Le rire accentue encore son asymétrie faciale; il a un peu d'exophtalmie, et ferme mal ses paupières. Le squelette semble partout normal, sauf les tibias, qui sont régulièrement hypertrophiés ; la peau ne pré- sente aucune cicatrice à leur niveau. Les doigts des mains présentent des modifications curieuses : ils sont raccourcis, rétractés; la peau est plissée comme en accordéon ; mais elle est normale et souple; on sent au-dessous d'elle des parties résis- tantes, qui semblent être les restes de phalanges atro- phiées et luxées. En tirant ces doigts ainsi emboîtés «en lorgnette », on déplisse la peau, on peut leur faire reprendre leur longueur normale et même plus. L'impotence fonctionnelle est complète. Cependant, l'annulaire de la main droite, le pouce et l’auriculaire de la main gauche, ne sont pas emboîtés, mais pré- sentent seulement un amincissement notable du sque- lette ; cette main peut être utilisée. Il n'existe aucun trouble de la sensibilité ;les muscles sont très affaiblis, mais non paralysés. Le réflexe rotu- lien existe des deux côtés; pas de contractions fibril- laires des muscles atrophiés. Pas de troubles des sphincters. L'intelligence, avons-nous dit, est rudimentaire; le sommeil est mauvais et le malade se plaint de maux de tète et de douleurs diverses. Ses cheveux, au lieu d'être laineux et brillants, sont ternes, mal implantés et mal frisés, ce qui, chez un nègre, indique souvent un état cachectique assez avancé. Le boy qui servait d'infirmier à M. le D' Brumpt et qui était originaire de Zanzibar lui a affirmé qu'il n'avait jamais vu semblables déformations des mains, mais que l’on rencontrait assez souvent des cas d’atro- phie musculaire dans son pays, où cette affection serait désignée sous le nom de kiaroussi. 5 D'ailleurs, au cours de cette même Mission du Bourg de Bozas, M. le Dr Brumpt lui-même a rencontré deux cas d’atrophie musculaire progressive myélopathique, l'un chez une femme Somalie, l’autre chez un indigène du Congo belge. Cette maladie est attribuée par les uns à des sortilèges, par les autres aux excès de toutes sortes. 6 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 8. — Géographie et Colonisation La transformation de l'Océanie'. — Une récente Convention franco-anglaise vient de donner à l'archipel des Nouvelles-Hébrides la constitution qui leur manquait ét dont l'absence nuisait gravement au développement économique de ces régions. La Consti- tution déclare que ces îles forment un territoire d’in- fluence commune entre la France et l'Angleterre, et que les nationaux des deux pays y jouissent de droits égaux. Cette Convention n'a été signée par l'Angleterre qu'après avoir été soumise aux deux Gouvernements d'Australie et de Nouvelle-Zélande et avoir obtenu leur approbation. Ce consentement officiel n’a, d’ailleurs, point satisfait l'opinion publique : non seulement la Confédération entend être consultée sur toutes les ques- tions à régler dans son voisinage, mais encore elle espère bien absorber un jour prochain quelques-unes de ces îles. Un membre du Parlement australien expo- sait récemment aux lecteurs du Tr1mes les raisons de cette politique : « Ce groupe d'îles, sur la route future ouverte par le canal de Panama, comprend les ports les plus beaux et les plus sûrs peut-être de tous ceux qu'on peut trouver dans le Pacifique méridional. Ces vastes rades, abritées par des terres, n’ont pas les dangereux récifs de corail qu'on rencontre dans tant de ports des îles du Pacifique et qui en rendent l'entrée si périlleuse par le mauvais temps. Port-Sandwich, Mallicolo, Havan- nah sont particulièrement désignés pour constituer des bases navales. La nation qui possédera les Nouvelles- Hébrides tiendra la clef de toute la route commerciale de Panama à l'Australie ». A côté de ces prétentions australiennes, d’autres ambitions se font jour. Cette lutte pour le Pacifique, dont nous avons déjà entretenu nos lecteurs, à propos du canal de Panama, réunit encore le Japon et les Etats-Unis. Les Japonais, juste- ment fiers de leurs récentes victoires, essaiment de plus en plus vers les terres océaniennes, en même temps qu'ils y dirigent leur commerce.Par leur annexion des îles Hawaï, puis des Philippines, par leur récent achat des Galapagos, par le percement prochain de l'isthme de Panama, les Etats-Unis s’orientent chaque Jour davantage du côté du Grand Océan, déjà sillonné par leurs navires et leurs câbles sous-marins. L'An- gleterre et l'Allemagne ont bien comme nous des pos- sessions dans ces régions lointaines, mais elles pré- sentent plus de cohésion que les nôtres et, surtout, elles sont beaucoup mieux défendues par leur métro- pole. Nos colonies du Pacifique, trop isolées, trop éloignées les unes des autres, sont en train de subir les « fatalités géographiques » de leur situation, c’'est-à- dire de tomber sous la dépendance économique des grandes puissances prépondérantes, si nous n'y portons remède à brève échéance. Comme le dit si justement M. Ch. Lemire, avec sa grande compétence des choses océaniennes, nous n'avons plus là-bas que des « satel- lites, gravitant les uns autour des Etats-Unis, qui sont prêts à nous les acheter, les autres autour de l'Australie, qui veut les accaparer ». Nous possédons la Nouvelle-Calédonie depuis cin- quante-trois ans; son climat favorable aux Européens, ses grandes richesses minières, et aussi la décision très heureuse qui y a supprimé la transportation, lui permettraient de devenir une colonie de peuplement, Sa situation présente est déplorable. Le développement économique des Nouvelles-Hé- brides — où les colons français ont la prépondérance du nombre et de l'étendue des terres cultivées — res- tera entravé, malgré la Convention récente, tant que ! Bulletin de la Société de Géographie commerciale de Paris, mai 1906, no 5. durera la dualité politique de ces iles et l'opposition des intérêts australiens. Le groupe de Tahiti et des îles Sous-le-Vent nous appartient depuis 1842. Et, dans ces soixante ans, nous n'avons pas même su rattacher ce groupement à la Nouvelle-Calédonie. Mais, comme le climat de ces îles — malgré de terribles cyclones — est extrémement favorable à toutes les cultures tropicales, qu'on y pêche la nacre et les perles, que Papeete constitue une excel- lente escale sur la future route de Panama, des Com- pagnies étrangères se sont chargées d'établir les communications : des vapeurs américains viennent mensuellement de San-Francisco, et des steamers anglais organisent des services avec laNouvelle-Zélande. Le pavillon francais n’est représenté que par trois voi- liers du port de Bordeaux, de telle sorte que, sûr les. 7 à 8 millions de francs de trafic extérieur annuel, notre part ne s'élève qu'à 5 ou 600.000 francs. La situa— tion politique que nous avons exposée commence à marquer sérieusement son empreinte sur la situation économique; c'est la meilleure preuve qu'il est temps. d'agir si nous voulons maintenir en Océanie l'influence que nous confèrent nos droits légitimes d'occupation. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole Supérieure de Commerce de Lyon. Les Pigeons voyageurs aux Colonies. Une application de la poste par Pigeons voyageurs va être faite au Congo. Dans quelques jours, en effet, un colombier sera installé à Brazzaville. Cette poste fonc- tionnera d'abord dans une zone restreinte, puis elle: s'étendra progressivement pour gagner le Tchad. Souhaitons qu'elle relie mieux et plus sûrement que- le télégraphe, dont les fils sont souvent coupés, le Tchad et le Chari avec Brazzaville. Les ministères de la Guerre et des Colonies, la Société de Géographie ont promis leur aide matérielle et morale à cette œuvre qui mérite d'être encouragée. $ 9. — Enseignement et Sociétés Proiet de monument à Lamareck. — L'homme qui a été le véritable créateur de la doctrine transfor- miste, qui, le premier, a posé sur le terrain physiolo— gique le problème de l’origine des formes organiques, c'est l'illustre naturaliste et philosophe Lamarck, membre de l'Académie des Sciences et professeur au Muséum d'Histoire naturelle. Tandis que Darwin cherchait à expliquer pourquoi la chaine des êtres était discontinue et brisée en espèces, Lamarck montrait comment il était possible d'expli- quer les procédés par lesquels les formes organiques: s'étaient constituées et continuaient à se transformer. Darwin repose àWestminster. Lamarck n'a pas encore de statue. Les professeurs du Muséum, estimant que le moment est venu de réparer cet injuste oubli, se proposent d'élever dans le Jardin des Plantes, où toute sa vie scientifique s'est passée et où il a élaboré ses immor- tels travaux, un monument à la gloire de l’auteur de la Philosophie zoologique, du Système des animaux sans vertèbres, de la Flore française, des Fossiles des en- virons de Paris, du Système des connaissances posi- tives, de l'Hydréologie et de tant d'autres ouvrages. Avec l'approbation de M. le ministre de l'Instruction publique, ils prennent l'initiative d'une souscription universelle, à laquelle tous sont priés de donner leur concours pour honorer celui que, dans tous les pays, l'on considère comme le père de la conception mo- derne de l'évolution du monde. Les souscriptions sont reçues par M. Joubin, profes- seur au Muséum, secrétaire du Comité, 55, rue de Buffon, à Paris. VICTOR CRÉMIEU — LE PROBLÈME DE LA GRAVITATION 7 LE PROBLÈME DE LA GRAVITATION I. — LES IDÉES ACTUELLES. Lorsqu'en 1687 Newton publia la loi de l’attrac- tion universelle, deux courants d'opinion se for- mèrent dans le monde savant. Les uns, séduits par la simplicité de la loi nouvelle, l'acceptèrent d'enthousiasme et y virent /a loi de la nature des- tinée à tout expliquer. Les autres, très nombreux au-début, tout en reconnaissant la valeur de fait de la Joi, n'y virent qu'une manière nouvelle d'expri- mer des faits dont la cause demeurait inexplicable. A cette époque, en effet, le monde savant, res- treint à une élite très peu nombreuse, était préoc- cupé surtout de la cause des phénomènes. Les tourbillons de Descartes, qui plaçaient la cause universelle dans des « esprits subtils » répandus partout, avaient de nombreux partisans; la tendance générale était de trouver partout ces esprits ou fluides. Le monde savant de l'époque n'élait pas disposé à admettre, dans la nature des principes directeurs, des vertus occultes; il concré- tisait dans les fluides subtils la cause des phéno- mènes. Aussi ! «attraction », dont Newton précisa l'idée, mais à laquelle Kepler et bien d’autres avaient déjà pensé, ne fut pas comprise comme elle l’est aujourd'hui. Mais, lorsqu'il fut bien établi que « tout se passe comme si » les corps s’atliraient à distance, suivant la loi de Newton; lorsque la Mécanique céleste et toutes les branches de la Science eurent fait, par les applications de cette loi, des progrès considé- rables, l'idée d'attraction à distance s'imposa peu à peu. Les expériences de Cavendish, qui firent, en 1798, toucher du doigt l'existence de la force attrac- tive, contribuèrent puissamment à créer un élat d'esprit nouveau. Il en résulte qu'à l'heure actuelle la notion d'attraction à distance est devenue pri- mordiale et domine toute préoccupation de chercher comment une attraction peut se faire sentir à dis- tance. On peut même dire que le principe de causalité de la Mécanique rationnelle appliquée à la Physique théorique n'est pas le principe d'inertie qui définit | la force, mais bien « le principe de l'attraction à distance ». Qu'on cherche, en effet, dans toutes les théories physiques, on trouvera toujours, à la base, une force due à une attraction (ou à une répulsion) entre masses petites ou grandes. L'évolution de la théorie de la lumière est, à cet égard, particulièrement frappante. Les ondulations de l’éther, agissant de proche en proche, avaient | remplacé l'émission des particules. Aujourd'hui, les actions à distance entre électrons tendent à rem- placer les ondulations. Et il est bon de noter que le rapport des dimensions des électrons aux distances qui les séparent est si petit qu'on postule vraiment des actions à grande distance, n'ayant aucun rapport avec des effets se transmeltant de proche en proche. Si l’on songe à l'unité présentée par les théories physiques, on ne peut que se louer de cet élat d’es- prit. Le principe de la conservation de l'énergie, conséquence directe du principe d’altraction à dis- tance, semble bien être le couronnement de l'œuvre. Le jeu de forces immuables, car elles sont im- muables de par leur origine, ne peut faire interve- nir qu'une « somme de causes » immuable elle- même : c'est l'énergie. Il y acependantun point où l'unité semble cesser. Dans l'étude de la chaleur, on rencontre, en effet, à côté du principe de l’équivalence, cas particulier du principe de la conservation de l'énergie, le principe expérimental de Carnot. Débarrassé de tout l’appa- reil analytique dont on l'entoure pour ses appli- cations, et qui contribue certainement à en dimi- nuer et à en obseurcir la portée physique, ce principe correspond aux faits d'expérience sui- vants : Un phénomène calorifique est toujours décelé par une variation de température. Cette variation a pour origine ou bien l’action directe du Soleil, ou bien des actionschimiques, mécaniques, électriques, etc., etc. On sait que, dans ces derniers cas, il y à équivalence entre l'énergie calorifique apparue et les quantités disparues de l'énergie dont la mise en jeu a provoqué le phénomène caloritique. Or, le fait d'expérience dont Carnot et Clausius ont fait un principe, c'est qu'une différence de tem- pérature apparue, pour une cause quelconque, dans un système donné, s’annule toujours. On n'a jamais constaté ni que l’état d’un système dans lequel des différences de température ont été introduites cons- titue un état d'équilibre stable, ni que l'équilibre se rétablisse par une augmentation de la différence de température introduite, ce qu'on peut exprimer en disant : « La chaleur passe d'elle-même des corps chauds sur les corps froids et jamais, d’elle- même, des corps froids sur les corps chauds ». On peut donc dire aussi qu'un phénomène calorifique est « l'évolution » d’une quantité de chaleur dirigée toujours dans un même sens. Il y a, de plus, ce qu'on appelle l'augmentation de l’entropie d'un système isolé, qui se démontre à l'aide du principe 8 VICTOR CRÉMIEU — LE PROBLÈME DE LA GRAVITATION de Carnot. Imaginons un système isolé du reste du monde, et à une température uniforme f. A un moment donné, une cause extérieure instantanée quelconque introduit dans le système une quantité d'énergie W, quise traduit par le fait qu'une portion du système passe de la température { à la tempé- rature {> {. Une quantité finie de chaleur va donc passer de cette portion du système dans tout l’en- semble, où elle se répartit uniformément. Le système, étant isolé, est, par suite, fini, sa capacité calorifique aussi; sa température finale se trouvera donc élevée à {”, et l’on aura : LUE Imaginons maintenant qu'une cause identique introduise de nouveau une quantité d'énergie W, qui amènera la mise en liberté d'une quantité de chaleur Q, à température /’. Cette quantité Q tom- bera vers le système dont la température est deve- nue /';la « hauteur dela chute » sera donc moindre et, par suite, l'énergie libre, représentée par la quan- tité de chaleur Q, sera moindre aussi. Voilà, dans un langage forcément imprécis, à quoi revient l’« irréversibilité » des phénomènes calorifiques. On pourrait, il me semble, résumer ce qui pré- cède en formulant le « principe de causalité » sui- vant : Quand de la chaleur est mise en liberté, elle disparait toujours, et la cause de cette disparition est toujours une chute de chaleur dirigée des corps chauds vers les corps froids. On sait’ que des mathématiciens illustres : Clau- sius, Helmholtz, Bollzmann ont essayé vainement de faire rentrer dans les équations générales de la Mécanique rationnelle lesphénomènes irréversibles. Récemment, au cours du développement donné aux théories cinétiques pour les appliquer à la théorie des électrons, on a cherché à interpréter ce désaccord à l’aide de la loi des grands nombres. Dans les théories cinétiques, où le « principe d'attraction » règne en maitre, on fait des hypo- thèses non sur les faits, mais sur leur probabilité. Ces hypothèses de probabilité portent sur les mou- vements de particules extrêmement petites par rapport à la molécule chimique, et dont le nombre est extrêmement grand. Les sens du physicien, très grossiers par rapport à ces particules, ne perçoivent. pas d'effetsisolés; ils enregistrent, à chaque instant, un effet moyen. La marche apparente d'un phéno- mène est, en réalité, la succession de ces effets moyens; et c'est la moyenne qui, en dernière ana- lvse, nous apparaît comme irréversible. Mais l'effet élémentaire de chaque moyenne serait réversible. La probabilité pour que la moyenne perçue coïncide avec l'effet élémentaire est infiniment petite. Donc 1 PoINCARÉ : Thermodynamique, chap. xvur. nous ne percevons jamais que l'irréversibilité. Néanmoins, il pourrait arriver que, par extraor- dinaire, nous percevions une fois la réversibilité. C’est ainsi que le plus illustre des cinétistes a écrit qu'il ne faudrait pas nous étonner outre mesure si plaçant sur un fourneau allumé une bouilloire pleine d'eau, nous voyions cette eau se congeler au lieu de bouillir. Tout le monde n'accepte pas cette manière de voir. Maxwell avait fait observer que les hypothèses cinétiques entrainaient quelques restrictions; M. Lippmann*, reprenant la restriction de Maxwell, en a fait une objection à laquelle il a donné une forme très frappante. Il a montré que, dans un gaz à constitution cinétique, on pourrait, avec des mécanismes de dimensions visibles, obte- nir un transport de chaleur sans dépense de tra- vail. Ce qui est bien certain, c'est que, dans un milieu à constitution cinétique, il exisierait indé- finiment des particules en mouvement. Nous savons que c'est le contraire qui a lieu dans les milieux réels; cela est si vrai qu'on en a tiré la généralisa- tion universellement admise du principe de Carnot : le principe de la dégradation de l'énergie. Il s'ap- plique même aux phénomènes d'ordre purement mécanique que nous observons à la surface de la Terre. Envisageons, en effet, la chute d'un corps, par exemple une masse rocheuse tombant du som- met d'une montagne au fond d'une vallée. Cette chute entraine d’abord une dégradalion d'énergie par suite du frottement contre l'air et du choc contre le fond dela vallée. Mais il y a plus : après la chute, le niveau moyen du fond se trouve élevé, en sorle que la quantité d'énergie libre résultant de la pré- sence au sommet de la montagne d'une masse rocheuse égale à la première, a diminué. Ainsi, à tous les degrés, il y a incompatibilité entre l'irré- versibilité des phénomènes et la causalité réversible à laquelle les explications mécaniques les font remonter. Seuls, les phénomènes astronomiques semblent faire exception. Le dilemne qui se pose est donc le suivant : Ou bien la loi des grands nombres est la loi de la Nature, ou bien le « principe d'’attraclion à dis- tance » n'est qu'une première approximation. Il y a là un ensemble de raisons qui mettent le problème de la gravitation au premier rang des questions actuelles. IT. — LES DEUX ESPÈCES D'INERTIE. Mais il y a des raisons nouvelles dues aux déve- loppements les plus récents des théories électro- cinétiques. Dans ces théories, on a été amené à envisager deux espèces d'inertie très différentes : 1 Congrès de Physique, t. 1, p. 546. VICTOR CRÉMIEU — LE PROBLÈME DE LA GRAVITATION 9 l'inertie ordinaire, due à la masse des corps en mouvement, el l'inertie électromagnétique, due à la charge électrique que ces corps peuvent porter. Il y aurait donc une masse électromagnélique, mais elle n’obéirait pas à la gravitation ; elle serait, de plus, fonction de la vitesse. Or, en expérimentant sur les rayons 6 du radium, M. Kauffmann à cru constater que la masse des particules en mouvement qui consliluent ces rayons est purement électroma- gnétique. On aurait ainsi isolé l’une de l’autre ces deux choses jusqu'ici inséparables : la charge élec- trique et son support pondérable; par suite, on pourrait concevoir l'énergie cinétique abstraction faite de l’invariante masse. Avec la virtuosité que les cinétistes déploient dans l’art des hypothèses, ils ont immédiatement retourné les conséquences de ce fait et se sont demandé si la masse gravilante ne serait pas, tout comme l'augmentation de l’entropie, une appa- rence trompeuse, ce qui les a inévitablement amenés à supposer que la gravitation serait d'origine élec- tro-magnétique. Ces hypothèses et plusieurs autres qui en sont dérivées soulèvent de nombreuses dif- ficultés. Elles amènent même à des impossibilités. C'est ainsi que, dans les théories cinétiques, on se sert d'une facon permanente des équations de la Mécanique rationnelle et en particulier du théo- rème des forces vives. Or, que deviennent ces équa- tions si la masse dépend de la vitesse? que deviennent-elles s’il n’y a plus de masse du tout, au sens invariant de ce mot? Que devient la notion d'énergie dans un système où il n'y a plus de masse ? Comment peut-on appliquer à cette notion nou- | velle d'inertie sans masse gravitante, les raisonne- ments implicitement contenus dans toutes les équa- tions de la Mécanique, qui n'ont de sens précis que lorsque l’inertie et, par suite, l'énergie ciné- tique ont pour origine une masse gravitante. D'ailleurs, ces particules à inertie purement élec- tromagnélique émaaent de corps pesants. Certains croient que l’'émanation de ces corps se transforme en corps pesants eux-mêmes. Il y aurait donc une période où la gravitation disparaïitrait pour réappa- raitre ensuite. Il n'est pas douteux qu'avec un nombre fini, mais grand, d'hypothèses nouvelles, la théorie cinétique tournera les difficultés. Mais il est indis- pensable d'aborder la question par un autre côté. Si l’on pouvait jeter quelque lueur sur la facon dont l'attraction se fait sentir à distance, on trouverait peut-être, sans accumuler les hypothèses, le moyen de résoudre quelques-uns de ces problèmes. On pourrait probablement substituer au « principe d'attraction à distance », causeinitiale des difficultés actuelles, un principe plus en accord avec la réalité, et en particulier avec le fait expérimental de l’irré- versibililé. Pour atteindre ce but, on peut soumettre à l'expé- rimentalion directe certaines hypothèses relatives à la facon dont la gravitation peut se faire sentir à distance, et que nous allons développer. III. — LA GRAVITATION ET L'EXPÉRIENCE. Voyons d'abord ce que nous savons sur la gra- vitation. Les seules expériences faites ont consisté dans la déterminalion de la densité de la Terre, et l'étude des variations de l'accélération de la pesan- teur. Ces recherches, qui ont exigé l’eflort continu de plusieurs générations de savants, présentent des difficultés considérables. En ce qui concerne la densité moyenne de la Terre, le résultat n’est pas même connu au millième. Aucun autre genre d'expé- rience na d’ailleurs été tenté. Les idées théoriques relatives à la cause de Ja gravilation auraient pu servir de guide à l’expéri- mentalion. Mais elles se réduisent à très peu de chose. Au xvrn siècle, la question fut abordée dans un grand nombre de « dissertations ». Les plus intéressantes furent publiées à la suite des con- cours ouverts sur ce sujet par différentes Académies. En particulier, l'Académie française, en 1720, mit au concours « la cause de la pesanteur ». A la distri bution des récompenses de ce concours, Montes- quieu, président de l'Académie, fit un résumé des différents Mémoires". Le discours récompensé, celui de Bouillet, médecin à Béziers, est intéres- sant à lire : tout imprégné des idées de Descartes, Bouillet attribue la pesanteur à des tourbillons coniques de l’éther. Il calcule mème la vitesse que devraient avoir ces tourbillons. Ce travail est très curieux comme document sur les idées de l’époque au sujet de la notion d'attraction. On connaît la théorie, plus récente, des cor- puscules ultramondains de Lesage et la tentative, toute contemporaine, de C. A. Bjerkness. Dans aucune de ces théories on ne peut puiser l'idée de vérifications expérimentales réalisables. Notons seulement que, malgré leur rareté, les essais théo- riques ont cependant tenté les chercheurs, tandis qu'aucun n'a abordé l'expérimentation directe. C'est que non seulement la petitesse des actions en jeu rend les expériences très délicates, mais encore la singularité des propriétés de la gravita- tion, révélées par l'observation directe, brise l'effort de l'imaginalion expérimentale. Aucune matière connue n'échappe à la gravita- tion, et cette forme d'énergie universelle échappe cependant à toutes les aclions qui influent sur les SR EEE PER PR 1 Œuvres posthumes de Montesquieu. 10 VICTOR CRÉMIEU — LE PROBLÈME DE LA GRAVITATION autres formes d'énergie. La lumière, par exemple, se propage, se réfléchit, se réfracte, se diffracte. Elle admet des écrans, on peut la dissocier. La gravitation n'est arrêlée, déviée ou altérée d’une manière quelconque par aucune substance connue. Elle se fait sentir à distance, mais il ne semble pas qu'elle se propage; ou, si elle le fait, c'est avec une vitesse sur l’ordre de grandeur de laquelle nous n'avons que les notions les plus contradic- toires. On sait, par exemple, que les anomalies de la théorie de certaines planètes inférieures condui- sent à attribuer à cette vitesse des valeurs qui sont tantôt de l’ordre de celle de la lumière, tantôt un million de fois plus grandes. En tout cas, n'ayant aucun écran à opposer au flux de gravitation, aucune substance sur laquelle le faire réfléchir, il est impossible d'imaginer une expérience directe destinée à mesurer la vitesse de celte propagation problématique. L'analogie expé- rimentale, guide si souvent précieux dans l'étude des phénomènes physiques, nous laisse donc, dans le cas de la gravitation, aussi désarmés que les essais théoriques. IV. — LA GRAVITATION ET LE PRINCIPE DE LA DÉGRADATION DE L'ÉNERGIE. On a vu plus haut que l'intérêt actuel du pro- blème de ja gravitation provient, en partie, de l'incompatibilité entre deux principes de causalité. Or, cette incompatibilité peut, à défaut d'autres guides, servir de point de départ à une série de recherches expérimentales. Si l'on admet à priori qu'il n'y a, pour les phé- nomènes naturels, qu’un seul principe de causalité, il y à lieu de rechercher si la causalité physique, dérivée du « principe d'attraction », n’est pas sim- plement une première approximation, que des termes complémentaires ramèneraient au principe de causalité irréversible exprimé par la loi de la dégradation de l'énergie, loi dérivée, comme on sait, du principe de Carnot. La question expérimentale revient alors à étu- dier l'attraction newlonienne dans des conditions où l’on puisse voir si ses effets obéissent ou non au principe de dégradation de l'énergie. Quelques remarques vont nous permettre de préciser la nature de ces expériences. Les phénomènes qui ont pour siège la matière pondérable ont pour origine l'évolution, au sein de cette matière, d'une quantité d'énergie libre de forme déterminée, évolution accomplie toujours à partir d'un certain niveau initial vers un niveau final plus bas. Or, celte évolution entraine inévi- tablement une transformation partielle en une énergie de forme différente, et c'est cette transfor- mation qui provoque la dégradalion d'énergie ré- sultant du phénomène considéré. Par exemple, de l'énergie mécanique, évoluant au sein d'une masse isolée d'un gaz, y provoque non seulement une réaction élastique, mais encore une transformation partielle de travail en énergie calorifique. L'effet de cette transformation s'ajoute à la réaction élas- tique du gaz pour s'opposer à l'évolution perturba- trice. Le résultat final est tel que l’entropie du système a augmenté. La quantité d'énergie libre qu'il contient a diminué. En fait, en dehors de la gravitation, on ne connaît aucun phénomène qui ne mette en jeu qu'une seule forme de l'énergie. V. — EXTENSION A LA GRAVITATION DE QUELQUES HYPOTHÈSES DÉJA FAITES POUR D'AUTRES PHÉNO- MÈNES. Cela posé, nous admettrons d’abord que la gra- vitalion est due à quelque propriété encore inconnue de l’étrer du vide, de ce milieu impondérable dont les physiciens ont été amenés à remplir tout l’es- pace et qu'ils font pénétrer dans tous les corps. D'autre part, considérons deux observateurs hypothétiques : Le premier, antérieur à Archimède, connaïtrait le fait de la poussée hydrostalique sans en con- naître la loi; il ignorerait le fait et la loi de l’attrac- tion newtonienne. La poussée lui apparaïitrait alors comme due à une attraction des corps plongés dans le liquide par la surface supérieure de ce liquide; et il constaterait qu'aucun écran n'arrête ou ne modifie les effets de cette pseudo-altraclion. Le second observateur, postérieur à Archimède, mais antérieur à Newton, connaïtrait le principe d’Archimède, el ignorerait l'attraction newto- nienne. Il attribuerait logiquement la poussée hydrostatique à une tendance du liquide à occuper, à l'exclusion de toute autre matière, la portion d'espace qui lui est offerte. Pour lui, la poussée serait due à une propriété résullant en chaque point de la présence du liquide. Nous sommes, vis-à-vis du fait expérimental et des propriétés connues de l'attraction newtonienre, que nous altribuons par hypothèse à une propriété inconnue de l’éther, dans une situation analogue à la fois à celle de nos deux observateurs. Nous pouvons done faire des hypothèses ana- logues à celles qu'ils auraient faites, et imaginer que l'attraction newtonienne est due à une ten- dance de l'éther à chasser de son sein tous les corps hétérogènes; seulement, comme l'éther oc- cupe tout l'espace imaginable, il ne peut que tendre à rendre minimum l'hétérogénéité due aux diffé- rentes porlions de malière en les réunissant en une seule. C'est à cela que revient l'extension à VICTOR CRÉMIEU — LE PROBLÈME DE LA GRAVITATION 11 l'éther gravifique du principe de la dégradation de l'énergie. On imaginera que, par suite d'une orien- tation initiale du système du monde, occupé au début par un chaos d’éther et de matière, ce sys- tème tend vers un état d'équilibre final qui sera atteint lorsque l'éther aura réduit à une seule toutes les portions de matière pondérable encore isolées. On fait ainsi remonter l'attraction newtonienne à une causalité irréversible. La notion d'énergie gravilique libre en découle immédiatement. Pour deux masses m et m', à distance r, susceptibles d'occuper, une fois réunies entre elles, un volume sphérique V de rayon a, elle aura pour expression : mm! (r— a). ra ‘ Nous allons voir que la légitimité de ces hypo- thèses, ou plus exactement de leur extension à la gravitation, est susceptible de se prêter à un con- trôle expérimental. $ 1. — Recherche d'une transformation de l'énergie gravifique. En premier lieu, l'évolution au sein de l'éther d'une quantité donnée d'énergie gravifique pourra entrainer une transformation partielle intervenant d'après le processus que nous avons rappelé. Soient deux masses maintenues immobiles et séparées par une distance finie. Au moment où on les laissera libres d'obéir à leur attraction mutuelle, une transformation devra intervenir qui ajoute ses effets à l'inertie de ces masses pour s'opposer à l'évolution commencçante, c'est-à-dire à la variation du flux gravifique qui traverse l’éther d'une masse à l’autre. De même, si une des masses est brusque- ment lancée avec une grande vitesse qui lende à l’éloigner de l'autre, un supplément d'attraction interviendra au moment de l'impulsion. On devra donc observer une impulsion de la masse laissée fixe dans le sens du mouvement communiqué à l’autre masse. L'expérience a été tentée, il y a quelques années, sous la forme suivante : Sous le plateau d'une balance très sensible, sans couteau‘, on suspen- dait une sphère équilibrée par des poids conve- nables. En approchant de cette sphère une très grosse masse de plomb, on obtenait une déviation de quelques millimètres, due à l'attraction newto- nienne. Quand l’équilibre était rétabli, un système de déclic très puissant lançait brusquement vers le bas la grosse masse de plomb. (Les appareils étaient installés de telle façon que la projection de cette masse ne communiquait aucune trépidation à la balance). L'effet attendu était une impulsion de la L 4 Voir, pour ces balances, Journal de Physique, juillet 1902, sphère, dans le sens du mouvement communiqué à la masse attirante, tout comme si un supplément d'attraction se produisait à l'instant où l'accéléra- tion de haut en bas était communiquée. Les résul- tats ont été négatifs. Mais les variations de flux mises en jeu étaient très faibles, et l'inertie de la balance trop considérable. Il y a lieu de reprendre ces expériences avec des appareils mieux appro- priés. $ 2. — Variation de l'énergie gravifique libre avec l’état de la matière. Les hypotnèses faites plus haut placent l'énergie gravifique au sein de l'éther qui provoque la gravi- tation. Il est donc logique de s'attendre à ce que l'énergie gravifique libre varie quand les propriétés de l’éther varient, par suite de la coexistence avec lui de matière sous des états différents. On sait que les gaz ne modifient pas sensiblement la plupart des propriétés électriques où optiques de l’éther; en tous cas, les modifications sont les mêmes, quelie que soit la nature du gaz. Au con- traire, les liquides modifient considérablement les propriétés de l'éther, et de façon fort différente suivant leur nature. Il y a donc lieu de s'attendre à voir les lois de la gravitalion se modifier quand on les étudiera au sein d'un liquide, bien que les liquides ne fassent pas écran aux forces newto- niennes. Une objection se présente cependant tout de suite, tirée du principe d'Archimède. En y comprenant le fait de la pesanteur et le principe de Pascal, l'énoncé d'Archimède devient le suivant : « Les liquides transmettent la pression qui résulte de leur pesanteur en tous les points deleur masse; les corps baignés dans celte masse seront soumis à la diffé- rence entre cette pression et l’action directe que la pesanteur exerce sur eux ». Or, les expériences les plus courantes confirment le principe d’Archimède. En particulier, les densités des solides, déterminées par la méthode du flacon d'une part, et par la balance hydrostatique d'autre part, coïncident au moins au dix-millième près. Il semble donc que la gravitation obéit, à moins d'un dix-millième près, à des lois identiques dans le vide, dans un gaz ou dans un liquide; et, comme on ne peut pas espérer, dans des expériences de gravitation, une précision supérieure au millième, il n'y a pas lieu d'essayer de l'obtenir. En réalité, cette objection ne résiste pas à une analyse faite à l’aide des hypothèses qui nous guident. L'éther se trouve, dans le cas de la pesan- teur, soumis à un champ gravifique très sensiblement uniforme. Dans une expérience de gravilation, au contraire, on opère sur des masses infiniment plus faibles que celle de la Terre; le champ gravifique VICTOR CRÉMIEU — LE PROBLÈME DE LA GRAVITATION qui les sépare est extrèmement convergent; l'état de l’éther soumis à ce champ peut différer notable- ment de ce qu'il est dans le champ uniforme’ en ajoutant à cette modification la modification très grande due à la présence d’un liquide, il n'y a rien d'absurde à espérer que la variation résultante sera supérieure au degré d'approximation que com- portent les expériences et, par suite, visible. Si la coïncidence entre les valeurs des densités des solides délerminées par les deux méthodes était parfaite, on pourrait évidemment prévoir que la va- riation cherchée serait nulle; mais celte coïncidence parfaite n'a pas encore élé démontrée; et il suffit d'une différence, si petite soit-elle, pour que l’on puisse légitimement s'attendre à la voir augmenter en modifiant les conditions expérimentales aussi profondément qu'on peut le faire. , Voici les deux expériences qui ont été entreprises dans ce but. 1. Expériences sur des gouttes liquides. — On peut obtenir des liquides non miscibles et de densités identiques. Les propriétés calorifiques, électriques et optiques de ces liquides, par suite l’état de l’éther eoexistant, sont, au contraire, très différentes. Considérons une grande masse d'un li- quide À au sein duquel nous immergerons deux gouttes d'un liquide B, de même densité que A et non miscible avec lui. En vertu du principe d'Ar- -chimède, et dans la théorie du potentiel newtonien, les gouttes B sont en équilibre indifférent. Au con iraire, si nous envisageons l'énergie gravifique libre de l’éther coexistant avec le liquide À, nous voyons qu'elle n’est pas nulle. Pour cet éther, en effet, les gouttes B, dans lesquelles l’état de l'éther est très différent, constituent une hétérogénéité que, par hypothèse, il tendra à rendre minimum. Les gouttes ne seront donc pas en équilibre; elles se rapprocheront jusqu'à se réunir en une seule; le minimum sera alors alleint. L'expérience, très délicate, a été réalisée il y a quelques années. On en trouvera les détails ail- leurs ‘. Le résultat a été positif. Les gouttes d'huile d'olive, placées dans un mélange d'eau et d'alcool, se rapprochent lentement, etles trajectoires de leurs mouvements cadrent assez bien avec l'interprétation proposée. Toutefois, ces expériences ne sont que qualitatives. Elles ne comportent pas de mesures. Leurs résultats n'ont été qu'un encouragement à | entreprendre l'expérience plus difficile de la mesure des effets de la gravitalion au sein des liquides. 2. Essais de mesure de l'attraction newtonienne { Comptes rendus, t. CXL, p. 80, 1905, et Journal de Phy- Sique, 4e Série, t..V,p. 25. au sein des liquides. — D'après les idées courantes, si l’on répète l'expérience de Cavendish dans l'air, puis dans un liquide, sans rien changer par ail- leurs aux conditions de l'expérience, on devra observer dans l’eau des déviations plus faibles que dans l'air; si d est la densité du corps attiré, d' celle du liquide, elles seront diminuées dans le rapport : Ne Tai Au contraire, d'après les considérations précé- dentes et les résultats de l'expérience des gouttes liquides, il y aura non seulement la poussée hydrostatique, mais un terme de signe contraire, fonction de l’état de l’éther au sein du liquide et au sein des masses immergées. Si à est la déviation observée dans l'air, la déviation calculée d'après les idées actuelles serait : d—d! d o X D'après les hypothèses ci-dessus, elle devait être plus grande. Des expériences ont été poursuivies dans cetle voie depuis cinq ans. Trois années ont été néces- saires pour obtenir une installation et des appareils convenables. Au cours des deux dernières années, des séries d'observations assez nombreuses ont été effectuées. Toutes concordent àmontrer que la force mesurée au sein de l'eau est supérieure à la force prévue par la théorie de l'attraction à distance et le principe d'Archimède. Les écarts ont été de l’ordre de 1/8 en 1905 et de 1/12 en 1906. La différence entre les sphères mobiles employées au cours de ces deux séries suffit à rendre compte de Ja différence de ces écarts d'une année à l’autre. On trouvera dans les publications techniques‘ les détails relatifs aux recherches déjà faites. Avant de conclure, il est nécessaire de dire que ces expériences sont extrèmement difficiles. Elles exigent une installation spéciale, une stabilité mécanique parfaite, des appareils coûteux et dé- licats. On ne peut donc faire tout ce qui serait nécessaire, et la valeur des résultats s'en ressent. De plus, à côté de causes d'erreur connues, et qu'on peut arriver à éliminer, il y a certainement des causes inconnues; elles sont d'autant plus à redouter qu'on opère sur des forces qui atteignent à peine quelques centièmes de dynes, dans les cas les plus favorables. Aussi n'est-ce que sous les réserves résultant de ce qui précède que nous tirerons la conclusion provisoire suivante : Au sein de l'eau, dans des 1 Comptes Rendus, tome CXLIII, p. 887, 1906; Journal de Physique, loc. cit. G. DE LAMARCODIE — LE RÉGIME FUTUR DE L'ÉLECTRICITÉ A PARIS 13 camps graviliques très convergents, il semble que les solides soient soumis à quelque chose de plus que la différenee entre la poussée hydrosta- tique et la force gravilique. En résumé, et quoi qu'il en soit des résultats déjà obtenus, l'étude expérimentale de la gravita- tion, longtemps paralysée, pourrait peut-être en- trer dans une voie nouvelle par l'application de principes déjà posés et d’hypothèses déjà faites dans d’autres branches de la Physique, où elles ont produit de nombreuses découvertes. Victor Crémieu, Docteur ès sciences, Préparateur à la Sorbonne LE RÉGIME FUTUR DE La question du régime futur de l’électricité à Paris semble approcher d'une solution. Cette question, plus encore que celle du gaz, est délicate et complexe. [l n’y a, en effet, pour le gaz, qu'une Compagnie concessionnaire et qu'un mode de canalisation, tandis que, pour l'électricité, il y a, sans compler le Secteur municipal, six Secteurs administrés par six Compagnies distinctes, n'ayant pas le même système de distribution et dont les concessions prennent fin à des dates différentes. Pour le gaz, presque toutes les voies sont cana- lisées : pour l'électricité, la distribution reste encore à faire dans bien des rues. On voit done qu'indé- pendamment des difficultés communes aux régimes du gaz et de l'électricité, le régime de l'électricité à Paris soulève beaucoup d'autres questions, qui lui sont propres. Dans ces conditions, il ne faut pas s'étonner si, sollicités par tant d'intérêts en jeu, obligés d'examiner de près tant de points de vue différents, le Conseil municipal de Paris et le Con- seil général de la Seine hésitent encore avant d'adopter une décision définitive. Examinons, en quelques mots, quelle est la situation. Actuellement, les six Compagnies concession- naires de la distribution de l'énergie électrique sont : la Société d'éclairage et de force par lélec- tricité, la Compagnie continentale Edison, la Com- pagnie de T'Air comprimé, la Compagnie du Secteur de la place Clichy, la Compagnie du Secteur des Champs-Elysées et celle du Secteur de la Rive gauche. Les concessions de ces Sociétés expirent aux dates suivantes : f Société d'éclairage et de force par l'élec- tricité, el Cie continentale Édison. Compagnie de l'Air comprimé. Cie, du Secteur de la place Clichy . Cie du Secteur des Champs-Élysées . Cfe du Secteur de la Rive gauche. 8 Avril 1907 9 Avril 1907 48 Avril 1907 13 Avril 1908 11 Décembre 1908 La Société d'éclairage et de force distribue du L'ÉLECTRICITÉ À PARIS courant continu à 110 volts dans un réseau à deux fils. Une partie du courant est engendrée directe- ment dans trois usines situées dans Paris, rue d'Alexandrie, rue de Bondy et quai de la Loire. Une autre parlie est engendrée sous forme alter- native diphasée à 6.000 volts, fréquence 40, dans une autre usine, située à Saint-Ouen, et commutée dans les sous-stations de la gare du Nord et du boulevard Barbès. La Compagnie Edison à une usine à Saint-Denis, et deux usines à Paris : l'une faubourg Montmartre, l’autre avenue Trudaine. Ces deux dernières produisent directement du courant continu à à 2 X 110 volts, tandis que l'usine de Saint-Denis fournit du courant continu à 2 X 2.200 volts, qui est transformé en courant continu à 2 X 110 volts dans des sous-stalions. Sur le Secteur de la Compagnie de l'air comprimé, le courant est engendré à 440 volts dans l'usine principale du quai Jemmapes : trois sous-stations se bornent à régler et à subdiviser la tension dans le réseau à 5 fils et 4 X 110 volts. Pour une faible part, les vieilles usines du boulevard Richard- Lenoir et de la rue Saint-Fargeau envoient du cou- rant continu à haute tension, qui est converti dans les sous-stations. Le Secteur de Clichy engendre, dans son usine de la rue des Dames du courant continu à 440 volts, qui est porté par des feeders à 2 fils sur les fils extrêmes d'un réseau à 5 fils à 4 X 110 volts. Huit sous-stations d'équilibrage, dispersées sur leréseau, égalisent la tension entre les 4 ponts. L'usine à vapeur de la rue des Dames étant insuffisante, le secteur de Clichy achète à la Compagnie du Triphasé du courant triphasé à 5.000 volts, fréquence 95, produit à l'usine d’Asnières. Ce courant arrive à l'usine de la rue des Dames, où il est commuté en courant continu à 440 volts qui est débité en paral- lèle avec le courant engendré directement. Le Secteur des Champs-Elysées ne possède éga- lement qu'une usine, située à Levallois-Perret ; celte usine produit du courant alternalif mono- phasé à 3.000 volts et à la fréquence 40. Des trans- 14 G. DE LAMARCODIE — LE RÉGIME FUTUR DE L'ÉLECTRICITÉ A PARIS formateurs, placés chez les abonnés, abaissent la tension à 110 volls. Tout le réseau du Secteur de la Rive gauche est alimenté par son usine d'Issy. Le courant fourni est alternatif monophasé à 3.000 volts, fréquence 22: Ja tension est réduite à 110 volts par des trans- formateurs installés dans des sous-stations ou chez le consommateur lui-même. L'ensemble du réseau desservi par les six Com- pagnies concessionnaires a une longueur de plus de 600 kilomètres. Les cahiers des charges ont fixé à 1 fr. 50 pour la lumière et à 0 fr. 70 pour la force motrice le prix maximum du kilowatt-heure; mais, en réalité, les tarifs appliqués aux consommateurs sont compris en général entre 1 francet1 fr. 30 le kilowatt-heure pour la lumière et entre 0 fr. 50 et O fr. 60 pour la force motrice. À ces prix, il faut ajouter les dépenses de branchements, de colonnes montantes et de locations de compteurs. Le Secteur municipal, très peu important, a une usine aux Halles et de petites usines à l’Hôtel-de- Ville, au square Saint-Pierre, au boulevard Mor- land, aux Buttes-Chaumont et au Parc-Monceau. La puissance totale n'est que de 1.000 kilowatts environ. La production comprend à la fois du courant continu à 2 xX 110 volts, 3 fils, et du courant alternatif monophasé à 2.400 volts, avec transfor- mateur chez l'abonné. II Avant de songer au régime définitif à adopter, il fallait d'abord organiser un régime transitoire, rendu absolument nécessaire par suite du peu de temps restant à courir jusqu'aux dates d'expiralion desconcessionsdesdifférents Secteurs, ce qui ne per- mettait pas d'établir tout de suite une organisation de longue durée. Mais, là, on se heurtait à de nom- breuses difficultés. Si l’on traitait avec les Secteurs pour assurer le service de l'éclairage pendant celte période de transilion, il fallait proroger leurs con- cessions, et cette prorogation était trop courte (puisqu’elle n'avait qu'un but provisoire) pour leur permettre, d’une part, d'amortir les dépenses de nouvelles canalisations, et, d'autre part, d'abaisser le prix courant. Dès maintenant, les Secteurs élec- triques, arrivant à la fin de leurs monopoles, ne canalisent plus de voies nouvelles et exigent pour les nouveaux abonnés, au lieu de redevances pour la location des branchements et colonnes mon- tantes, les prix de ces travaux payés comptant. Ces débours, relativement élevés, découragent presque toujours le client, qui préfère renoncer à l'éclairage électrique. Un régime provisoire avec les Secteurs ne pouvait que laisser se continuer un pareil état de choses. En admettant que les futurs concessionnaires assurassent ce régime provisoire avec les usines et canalisations actuelles des Secteurs, comment ces concessionnaires pourraient-ils s'entendre avec la Ville et avec les Secteurs pour l'usage d’un matériel disparate et déjà ancien et de canalisations de sys- tèmes différents, le tout destiné à être transformé ou remplacé? En tous cas, et en admettant même d'autres combinaisons, on comprend que ce pre- mier problème n'était pas facile à résoudre. III Quant au projet définilif, il soulevait les plus graves questions, puisqu'il fallait concilier à la fois l'intérêt du consommateur, celui de la Ville et celui du concessionnaire, et qu'il entrainait des considé- rations, non seulement d'ordre technique, mais aussi d'ordre économique et financier. La première de ces questions, celle qui touche de plus près le consommateur, était celle de la fixation du prix courant. Les tarifs actuels sont environ le double des tarifs appliqués dans la plupart des villes de province et dans presque toutes les grandes villes de l'étranger, où le prix du kilowatt-heure varie entre 0 fr. 50 et O fr. 75 pour la lumière et entre 0 fr. 20 et O fr. 25 pour la force motrice. En banlieue, aux portes mêmes de Paris, le courant se vend 0 fr. 50 à 0 fr. 70 le kilowatt-heure pour l'éclairage. À Paris, lorsqu'il s’agit de gros consom- mateurs, tels que les Compagnies de chemin de fer et le Métropolitain,les Secteurs abaïssent leurs prix jusqu’à 0 fr. 12 et au-dessous, et certaine Compagnie de tramways obtient même le courant à un prix qui n’atteint pas O0 fr. 05 le kilowatt-heure : on peut en conclure que le prix de revient est inférieur à ce chiffre. De l'avis de tous les gens compétents, les prix de 50 centimes pour la lumière et de 25 centimes pour la force motrice seraient suffisamment rémunéra- teurs pour le concessionnaire, après paiement des redevances. Il en résulterait un accroissement de consommation qui ferait plus que compenserl'abais- sement du tarif, et, finalement, tout le monde y gagnerait : le consommateur, l'entrepreneur et la Ville. Surtout depuis l’abaissement du prix du gaz à O fr. 20 le mètre cube, il y a actuellement une trop grande différence entre le prix de l'éclairage électrique et le prix de l'éclairage au gaz pour que le consommateur ne donne pas, la plupart du temps, la préférence à ce dernier. En nous basant sur le prix moyen actuel de l'hecto-watt-heure, qu'on peut considérer comme étant de 12 centimes, la consommation d'une lampe à incandescence de G. DE LAMARCODIE — LE RÉGIME 10 bougies coûte environ 4 centimes l'heure. Or, un bec papillon consommant 150 litres de gaz à l'heure, un bec Bengel 100 litres et un bec Auer 60 à 70 litres, leurs dépenses horaires sont respec- tivement de 3 centimes, 2 centimes et 1,2 centime à 1,4 centime. De plus, il faut ajouter aux frais courants de consommation de l'énergie électrique ceux de loca- tion et d'entretien de compteur, de branchement et de colonne montante. Ces prix sont tellement élevés qu'ils représentent à peu près la moitié du prix de ces compteur, branchement et colonne montante, prix que l’abonné paie pendant toute la durée de son abonnement, sans avoir l'espoir de voir’‘un jour cette dépense s’éteindre par amortis- sement. Ajoutons à cela, indépendamment des frais de renouvellement des lampes à incandescence, les dépenses d'installation de l'éclairage électrique, que l'on peut considérer comme étant, dans les conditions les plus modestes, de 20 à 30 francs par lampe à incandescence, et l’on comprendra facile- ment comment, avec les tarifs actuels, un consom- mateur préférera renoncer à ce mode d'éclairage que grever si lourdement son budget. L'électricité, qui présente une supériorité si incontestable au point de vue de la propreté et de l'hygiène, mérite bien quelques sacrifices de la part de l’abonné; mais il faut limiter l'étendue de ces sacrifices, pour que l'électricité puisse lutter avec avan- tage contre la concurrence du gaz. Les tarifs actuels de lumière et de force devraient être abais- sés au moins de moitié; les prix de location et d'entretien de compteurs, de branchements et de colonnes montantes devraient être notablement réduits, de façon à éviter les abus qui se produisent actuellement, et l’abonné devrait pouvoir se libérer en quelques années par amortissement. Le mini- mum de consommation devrait disparaître. Enfin, la concurrence entre les entrepreneurs d'’installa- tions permeltant seule au consommateur de se faire installer l'énergie électrique dans les meilleures conditions, il faut éviter la constitution de tout monopole de fait pour les entreprises d'installation. C'est seulement dans ces condilions qu'on verra la lumière électrique pénétrer dans les apparte- ments les plus modestes, et, grâce à la force motrice à bon marché, l'industrie des petits façonniers à domicile se développer progressivement. D'où une production intense d'énergie permettant au conces- sionnaire d'obtenir une meilleure utilisation de son matériel et de réaliser des bénéfices plus impor- tants. IV Quant aux considérations d'ordre technique et d'ordre administratif relatives à la production et à FUTUR DE L'ÉLECTRICITÉ À PARIS 15 la distribulion de l'énergie électrique, elles étaient très nombreuses. La Ville devait-elle adopter la régie simple ou la régie intéressée? Fallait-il un seul producteur distribuant le courant, sinon avec une seule usine, du moins avec deux ou trois usines seulement et un seul mode de canalisation ? Quelle espèce de courant produirait-on et distri- tuerait-on : du courant continu ou du courant alternatif? Quel mode de canalisation fallait-il employer ? Abstraction faite de toute considération d'ordre politique, il semblait que la Ville ne fût pas apte à exploiter elle-même une entreprise industrielle de cette importance, et l'exemple du Secteur des Halles n'était pas fait pour militer en faveur de la régie simple. Le principe d’un concessionnaire étant admis, il était incontestable que l'adoption d'un seul producteur, pouvant centraliser ainsi toute la production et toute la distribution de l'énergie électrique nécessaire à la Ville, était la condition la plus favorable pour l’abaissement du prix de revient. Maintenant, comment produire ce courant? Il a été question, à ce propos, d’une solu- lion très intéressante, consistant à utiliser les forces motrices du Rhône; ce projet, qui est cer- lainement le projet de l’avenir, n'élait pas encore assez mûr : le délai pour l'application était trop court, et trop de champ était laissé à l'imprévu pour qu'il pût être pris en sérieuse considération ; mais les applications les plus récentes montrent qu'avec des turbines à vapeur, on peut,en utilisant de grandes unités, abaisser considérablement les frais de pro- duction de l'énergie. On peut même se demander s'il n’y aurait pas lieu de suivre l'exemple que nous donne l'Angleterre, où, dans de grandes villes, la combustion des ordures ménagères a permis de réduire dans de vastes proportions les dépenses de combustibles des usines électriques. Un concessionnaire unique étant choisi, et le nombre des usines à construire dépendant de la réparlition de la consommation dans différents quartiers, il reste à déterminer la forme de courant et le mode de canalisation à adopter. La vogue a été en ces dernières années pour le courant alternatif, transporté à haute tension dans des sous-stations de transformation ou jusqu'aux transformateurs placés chez les abonnés. Actuellement, il se pro- duit, semble-t-il, un revirement en faveur du cou- rant continu, applicable à des usages qui ne tolèrent pas le courant alternatif et que des expériences très concluantes démontrent pouvoir être pratique- ment transporté à des tensions allant jusqu'à 100.000 volts. Les avantages et les inconvénients de ces deux modes de courants sont l’objet de vives discussions dans les milieux techniques. En tous cas, si le transport se fait par courants alternatifs, 16 G. DE LAMARCODIE — LE RÉGIME FUTUR DE L'ÉLECTRICITÉ A PARIS il faudra assurément opérer la transformation dans des sous-stalions et ne placer le transformateur chez l'abonné lui-même que dans le cas d'établis- sements importants : sauf exceptions, le danger réel que peut courir le consommateur, l’encombre- ment causé par l'emplacement du transformateur et qui constitue souvent une impossibilité radicale d'adopter l'éclairage électrique, sont des raisons qui doivent faire rejeter définitivement le système consistant à placer le transformateur au domicile même de l’abonné. Quant à la fréquence à adopter, il semble qu'il n’y ait pas lieu de changer celles de 40 à 42 périodes adoptées par les Secteurs parisiens. Des courants à basses fréquences, telles que 25 ou 15, con- viennent aux alternateurs, moteurs et commuta- trices, mais seulement dans le cas où les courants alternatifs ne doivent pas être directement utilisés pour l'éclairage; car ces basses fréquences ne sont pas compatibles avec le bon fonctionnement de lampes à arc. L'exemple des Secteurs des Champs-Élysées et de la Rive gauche montre, au contraire, que ce fonctionnement est parfaitement assuré par l'emploi de courants à la fréquence 40 ou 42. La Commission technique avait prévu l'emploi de courants primaires polyphasés à la fréquence 50; mais l'emploi de cette fréquence nécessiterait la” transformation du matériel de provenance fran- caise des usines de Paris et favoriserait nos con- currents allemands et suisses, qui ont adopté Ja fréquence 50. En ce qui concerne le courant continu, les théo- riciens sont très divisés sur les avantages et les inconvénients du système à 3 fils et du système à 5 fils. Les partisans du système à 3 fils semblent l'emporter. C'est celui qui a été recommandé dans le Rapport fait par M. Picou au nom de la Commis- sion technique, en se basant sur ce principe qu'il y avait lieu de tendre idéalement vers une uniformi- sation du système à courant continu pour le centre de Paris. C’est surtout une question d'école, ainsi que le fait remarquer à juste titre M. Sartiaux. Les adversaires du système à 5 fils disent qu’il pré- sente des difficultés pour le maintien d’une tension régulière chez les abonnés. Ses partisans disent que l'expérience ne justifie pas ces craintes, qu'il permet des sous-stations moins nombreuses et, par conséquent, simplifie l'exploitation, qu'il réduit la section des conducteurs et qu’en outre le système cumule Jes avantages des deux systèmes à fils (2X 110 volts et 2 X 220 volts), enfin qu'il permet de mettre à la disposition des abonnés aussi bien la tension de 410 volts, généralement adoptée en l’état: de construction des lampes ordinaires à incandescence;, que les tensions de 220 et 440 volts. souvent préférables pour les installations nécessi- tant de grandes longueurs de cäbles. Mais, en admettant que tel ou tel système soit préférable en théorie, il faut, comme le disait sagement la Com- mission, « tenir compte des exploitations actuelles dont on ne peut oublier les données et les condi- tions d'exploitation ». On ne peut faire table rase de ce qui existe déjà et assumer les aléas d’une transformation complète des canalisations. On ne peut se dispenser de faire état de trois millions environ de lampes à incandescence existantes, ainsi que des installations intérieures sur lesquelles sont ces lampes et dont la plupart seraient à refaire complètement. Le système à 5 fils existe sur plus des deux tiers de la surface de la rive droite à courant continu et représente environ 280 kilo- mètres de canalisalion sur un total de 420 kilo- mètres alimentés par ce courant. Serait-il possible et raisonnable de faire une transformation eom- plète sur une si longue étendue? L'évaluation dela dépense atteindrait 12 millions pour le Secteur de l'Air comprimé et 9 millions pour le Secteur de Clichy, sans compterles difficultés que présenterait cette substitution pour exécuter les travaux sans interrompre le service des abonnés. En résumé, en tenant compte de l’état de choses actuel, il y avait lieu de maintenir le courant alter- natif direct avec transformateurs sur les Secteurs des Champs-Élysées et de la Rive gauche: pour ce qui est des réseaux à courant continu, il y élait rationnel de les diviser en deux zones : l’une com- prenant le Secteur Edison et le Secteur d'éclairage et de force, installés avec un réseau à 3 fils: l’autre, comprenant les Secteurs de Clichy et de l'Air com- primé conservant la canalisation à 5 fils. V Après ces considéralions générales d'ordre tech- nique, examinons maintenant en quelques mots quelle fut la série des négociations engagées entre la Ville de Paris et les auteurs des différentes pro- positions ayant {rait à la concession de la distribu- tion d'énergie électrique. Dans le courant de l’année 1904, M. le Préfet de la Seine demanda à une Commission technique, composée de savants et de professionnels de l’élec- tricité, en même temps que de membres du Conseil et de représentants de l'Administration, d'élaborer le programme technique du régime futur de l’élec- tricité. Le Rapport de cette Commission technique, dont M. Mascart fut nommé président et M. Picou rap- porteur, fut porté à la connaissance du Conseil Municipal le 3 août 1905, et, à partir de ce moment, de nombreuses demandes de concession furent adressées au Conseil. se fit G. DE LAMARCODIE — LE RÉGIME FÜTUR DE L'ÉLECTRICITÉ À PARIS 17 Le principe dela régie directe ayant été repoussé, il fut voté, en juin 1906, une proposition présentée par M. Deville et à laquelle s'était rallié M. Sauton, portant que la première Commission élait invitée “ à présenter au cours de la session ses conclu- sions sur le Mémoire préfectoral et à'saisir le Conseil d'un projet d'exploitation de l'énergie élec- trique en régie intéressée ». Les demandes de concession furent examinées avec le plus grand soin. Les unes furent rejetées comme n’offrant que des solutions incomplètes au point de vue technique ou administratif, les autres” comme n'offrant pas les garanties financières suffi- santes. Deux de ces propositions avaient élé rete- nues particulièrement : l’une émanant de la Société d'études Schneider et CY et Mildé et C*, l'autre émanant des Secteurs. Dans leur projet, MM. Schneider et Mildé fai- saient leur affaire du rachat des usines des Secteurs ets'engageaient, en outre, à créer des installations, des usines et un réseau de distribution conformes au programme de la Commission technique. La durée de la concession, devant expirer le 31 dé- cembre 1938, élait de trente années après la date de l'expiration de la dernière des autorisations données aux Secteurs. L'Union des Secteurs, de son côté, proposait une concession de dix ans plus courle que celle pro- posée au projet Schneider et Mildé; mais elle ne s'obligeait à construire ni usines neuves, ni sous- stations, se réservant le droit de se procurer le courant au mieux de ses intérêts. Les tarifs des prix à payer par les abonnés et les redevances à ia Ville différaient peu dans l’un et dans Pautre projet. Dans son Rapport au Conseil Municipal, M. Félix Roussel indiquait que, lout en considérant ces deux projets comme acceptables, il y avait lieu de présenter en première ligne le projet Schneider- Mildé. M. le Préfet de la Seine, dans son Mémoire du 6 juin dernier, était arrivé d’ailleurs à la même conclusion. A la fin de sa dernière session, le Conseil Muni- cipal, appelé à délibérer sur la question, adopla, le. 23 juillet, deux résolutions d'ordre général, qui lui avaient élé soumises, l’une par M. Sauton, l’autre par M. Quentin-Bauchart. Dans la première, M. le Préfet de la Seine était invité « à préparer'pen dant l'intersession et à pré- senter au Conseil Municipal un projet d'accord entre les Secteurs en vue d'assurer provisoirement le service de l'électricité, après l'expiration de leurs traités, jusqu’à ce que la Ville ait adopté un régime définitif ». Dans la seconde résolution, on considérait qu'il n'existait plus entre les deux demandeurs « qu'une REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. question de nuances »; on décidait de leur sou- mettre le nouveau cahier des charges et on invilait l'Administration « à préparer une adjudication sur les bases arrètées par le Conseil, portant sur les avantages nouveaux qui pourraient étre obtenus à la fois pour la Ville de Paris et pour les conces- sionnaires ». | ” Il y avait tout lieu d'espérer qu'un accord inter- viendrait entre l'Union des Secteurs et la Sociélé d'études Schneider-Mildé. Cet accord effectivement eut lieu et fut porté à la connaissance de M. le Préfet de la Seine par les intéressés dans le courant du mois d'octobre dernier. Gràce à cet arrangement, l'Union des Secteurs devant assurer le service pen- dant la période transitoire, la Ville se trouvait déchargée de toutes les difficultés inhérentes à cette période. Un cahier des charges destiné à être soumis aux groupes fusionnés fut aussitôt préparé. M. le Préfet de la Seine prit comme base des clauses à sou- mettre aux intéressés le projet Schneider-Mildé, modifié sur certains points, nota mment Ja réduc- lion à vingt ans de la durée de la concession, pri- mitivement demandée par MM. Schneider et Mildé pour une durée de trente ans. Le 12 novembre, M. le Préfet de la Se ine adres sait au Conseil Municipal de Paris un nouveau” Mémoire sur le régime futur de l'électricité à Paris, rédigé sur les bases de l'entente intervenue entre l'Union des Secteurs et la Société d'études Schneider- Mildé. Les principales conditions du lraité étaient les suivantes : L'exploitation, pour la période de six ans du ré- gime transitoire, allant du 4° janvier 1908 au 31 dé- cembre 1913, sera assurée par le Consortium des Secteurs. Ce Consortium et la Société d’études Schneider- Mildé s'engagent solidairement à constituer, dans le délai de six mois après approbation du traité par les pouvoirs compétents, et à se substituer une Société anonyme, constituée suivant les lois fran- caises, au capital d’au moins 50 millions de francs, qui sera désignée sous le nom de Compaguie parisienne de distribution d'électricité. L'exploitation pour la période définitive de vingt ans, allant du 1° janvier 1914 au 31 décembre 1933, sera assurée par celte Compagnie. La Ville de Paris donne en location au Consor- tium des Secteurs pour la période provisoire et à la Compagnie parisienne pour la période délini- tive : 1° les canalisations, le matériel et les appa- reils devant revenir à l'Administration municipale à l'expiration des permissions actuelles des Sec- teurs; 2° l'usine municipale des Halles, avec les canalisations qui la desservent et le matériel et les L* + 18 G. DE LAMARCODIE — LE RÉGIME FUTUR DE L'ÉLECTRICITÉ A PARIS appareils appartenant à la Ville de Paris pour le service de ladite usine. Les dits Consortium et Compagnie parisienne, chacun pendant sa période d'exploitation, paie- ront à la Ville de Paris un loyer égal à 10 */, des recettes brutes provenant de la vente du courant aux abonnés autres que la Ville. Le loyer ne pourra être inférieur à 5.500.000 francs par an pendant la durée du régime transitoire et à 7.000.000 de francs pendant la durée du régime définitif. Le minimum de loyer garanti sera abaissé pour la première période à 4.000.000 de francs, dans le cas où, ainsi qu'il est indiqué plus tard, les tarifs de vente maxima de l'énergie électrique viendraient à être abaissés à 7 centimes l'hectowatt pour la première période et à 6 centimes pour la seconde. La Ville se réserve le droit de résilier le contrat le 1‘ janvier 1923 et chacune des années suivantes, moyennant préavis donné deux ans à l'avance. Elle aurait à payer à la Compagnie, non seulement les amortissements restant à faire, mais une in- demnité de 3.000.000 de franes par année restant à courir. Le service sera assuré par la Compagnie pari- sienne, à* partir du 1° janvier 1913, par deux usines, qui seront immédiatement établies. L'une, de 50 à 60.000 kilowatts, sera au nord de Paris; l’autre de 25.000 kilowatts au sud-ouest : toutes deux seront placées sur le bord de la Seine et rac- cordées à la voie ferrée. Ces usines, conformes aux derniers progrès de l'industrie mécanique et élec- trique, produiront des courants diphasés ou triphasés à 10 ou 12.000 volts environ de tension et à la fréquence de 42 à 50 périodes. Le courant primaire ainsi produit pourra être distribué, soit directement par transformateurs placés chez les abonnés en cas de faible densité de la consomma- tion, soit au moyen de sous-stations de transfor- mation, donnant, les unes du courant continu sur cinq fils sous 4 X 110 volts, les autres du courant continu sous 2 X 110 volts, enfin d’autres du cou- rant alternatif, le tout suivant les zones détermi- nées par le Préfet de la Seine. Pendant la période provisoire, les canalisations seront alimentées par les usines des Secteurs fonc- tionnant actuellement, par l'usine du Secteur des Halles et par tels moyens supplémentaires que le Consortium jugera utiles. Pendant la période du régime transitoire comme pendant celle du régime définitif, la tension devra être maintenue à 110 volts par pont, avec tolérance maxima de 3 °/,en plus ou en moins. Er chaque point du réseau, la tension devra être maintenue constante à moins de 4 1/2 °/, en plus et 41/2 °/, en moins de la moyenne relative à ce point. Là où il sera distribué du courant alternatif, la fréquence ne devra pas varier de plus de 3 °/, en plus ou em moins de sa valeur normale. La Compagnie établira à son choix au moins 400 kilomètres de canalisations nouvelles en sus des canalisations existant au 1° janvier 1906 et en sus des canalisations primaires allant des usines centrales aux sous-stations, et, le cas échéant, des canalisations intermédiaires à 3.000 volts. Cent ki- lomètres de ces canalisations nouvelles seront élablies avant le 31 décembre 1909 et le surplus à raison de 400 kilomètres par an pendant les trois années suivantes, Il y aura obligalion de desservir tous abonnés qui, individuellement ou collectivement, garanti- raient pendant cinq ans une recette brute annuelle égale à 20 francs par mètre courant de canalisation compté à partir du réseau existant ou des 400 mètres de canalisations nouvelles indiquées ci-dessus. Le Consortium et la Compagnie seront maitres de leurs tarifs, sous la condition de ne pas dépasser les. maxima suivants par hectowatt-heure : 1° Période du régime transitoire, allant du 1°" janvier 1908 au 31 décembre 1913 : Pouriléclarage 42 0 URETADIR Pour tous autres usages 2% Période du régime définitif, à partir du 1‘ jan- vier 4914 : Pourdéclairase ere E- 0-0 NOTE Pour tous autres usages . . . . . . 0 fr. 035 Ces prix pourront être abaissés, si la Ville le demande, à 0 fr. 07 et 0 fr. 035 pendant la période du régime iransiloire, et à 0 fr. 06 et 0 fr. 03 pen- dant la période du régime définitif. Les tarifs fixés pour la période du régime définitif seront réduits. de 25 °/, pour les abonnés alimentés directement par le courant primaire. La Ville bénéficiera d'une réduction de 30 °/, sur l'ensemble des tarifs, cette réduction étant portée à 35 °/, pour les installa- tions qui, par leur mode de fonctionnement, ne pourraient causer aucun déséquilibre des ponts. Les redevances mensuelles de location et d’en- trelien de branchements, de colonnes montanteset de compteurs, subissent une réduction assez im- portante par rapport aux anciens tarifs. Quant aux minima de consommation, ils ne pourront être inférieures à 600 heures par an pour les emplois commerciaux de l'électrité et à 100 heures pour les emplois domestiques. Les clauses relatives au personnel comportent : 1° La reprise des agents du Secteur municipal des Halles, les situations actuelles étant respectées; 2% l'assimilation du personnel de la future exploi- talion au personnel municipal dans tous les cas où la situation de ce personnel est supérieure, tant en. D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM 19 ce qui concerne les traitements et salaires qu'au point de vue des conditions du travail; 3° enfin, la rétro-activité des retraites. \'AIl Telle est, en résumé, la convention sur laquelle auront à se prononcer les pouvoirs compétents et dont certaines clauses sont sujettes à critique. Tout en comprenant fort bien que la Ville n'ait pas voulu se lier pour un temps trop long, la durée de vingt ans, à laquelle serait réduite la concession, paraîtra à certains trop courte pour les amortisse- ments. En revanche, dans son Mémoire du 12 no- vembre, M. le Préfel de la Seine trouve ävec raison que l'indemnité annuelle de 3.000.000 de francs, réclamée à la Ville en cas de résiliation anticipée, est par trop exagérée, qu'elle rend cette résiliation inexécutable et que les demandeurs en concession devront, sur ce point, abandonner une partie de leurs prétentions. On peut regretter que l’abaissement des tarifs de consommation n'ait pas été plus important. D'autre part, les taux de location et d'entretien de branche- ments, de colonnes montantes et de compteurs sont encore trop élevés, sans que l'abonné puisse jamais se libérer par amortissements. Enfin, il est regrettable que l'on n'ait pas renoncé à exiger un minimum de consommation. Quoi qu'il en soit, les conditions futures du régime de l'électricité à Paris constitueront cerlai- nement, sous la nouvelle organisation, un progrès réel, el l’abaissement du prix de l'hectowatt-heure va assurément développer dans de vastes propor- tions la consommation de l'énergie électrique : la propreté el l'hygiène y gagneront. Après avoir réclamé quelques modifications de détail, M. le Préfet de la Seine termine son Mémoire du 12 novembre en constatant qu'avec quelques retouches, l'adoption du projet constituerait la solution aceceptable d'un problème difficile, « [la l'avantage, ajoute-t-il, de résoudre sûrement et sim- plement les difficultés industrielles du régime tran- sitoire et d'assurer à la Ville, après une concession dont la durée est aussi courte que possible, la pro- priété d'un actif considérable dont elle pourra ensuite user à son gré. » L'échéance étant brülante, il appartient mainte- nant aux Corps élus et à l'Administration de ter- miner définitivement et au mieux des intérêts de tous cette question si importante et si complexe. G. de Lamarcodie, Aucien élève de l'École Polytechnique, Professeur à l'Ecole d'Electricité et de Mécanique industrielles de Paris. MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM Tout homme, quelles que soient sa condition et sa race, demande à cerlains poisons une force factice, un soulagement à ses souffrances phy- siques et morales, une habitude qui tue l'oisiveté ou chasse l'ennui. Les substances enivrantes auxquelles les hommes s'adressent sont nombreuses, mais c'est surtout l'alcool et l'opium qui se partagent leurs faveurs. L'idéal du blanc, c'est l'activité, qu'il s'agisse de labeur ou de plaisir; celui des Orientaux, c'est la passivité, l'inertie. Le choix du toxique préféré par ces deux catégories d'hommes découle de cette différence primordiale. Le blanc demande à l'alcool un surcroît de force passagère, qu’il obtient quand la mesure n'est pas dépassée. L'Hindou et le Chi- nois cherchent dans l'opium l’annihilation de la personnalité, la volupté du néant. Si les peuples de l'Orient n’abusent pas ordinairement de l'alcool, ce n’est pas que la funeste liqueur leur fasse défaut. Ne savent-ils pas faire des boissons fermentées avec le riz, le maïs, l'orge, le blé, le sorgho? Mais ils trouvent dans l'opium une ivresse qui satisfait mieux leurs goûts et leurs aplitudes ethniques‘. L'opium, dont les propriétés médicinales sont connues depuis une très haute antiquité, est le suc extrait des capsules du Pavot, plante herbacée qui croit dans toutes les régions où les pluies ne sont pas excessives, mais de préférence sous le climat tropical. I. — PRINCIPAUX CENTRES DE PRODUCTION DE L'OPIUM. La variété Papaver glabrum est cultivée en Asie- Mineure. Quand les capsules ont environ 4 centi- mètres de diamètre, on les incise en évilant que la lame pénètre dans l'intérieur du fruit, car l'opium s’accumulerait au dedans etles graines dont on tire ! La distinction que je viens d'établir n’est pas absolué. Il y a de grands buveurs d'alcool en Chine, en particulier sur le littoral, où les coolies sont en contact avec les Euro- péens, et la morphinomanie fait des progrès menacants en Occident. Sous cette réserve, on peut tenir pour exactes les vues que je viens d'exposer. 20 D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM de l'huile ne parviendraient pas à maturité. L'inci- sion ne doit pas dépasser la couche moyenne, ou mésocarpe, qui contient les vaisseaux lalicifères. L'opéralion se fait d'habitude après la chaleur du jour et se poursuit jusqu'à la tombée de la nuit. Le suc exsudé est recueilli le lendemain matin avec un grattoir. On distingue dans le commerce trois sortes d’opium d’Asie-Mineure : l'opium de phar- macie, l'opium de manufacture et l’opium de navi- gation. Ce dernier contient une grande quantité d'extrait et laisse peu de résidu insoluble quand on le dissout dans l’eau; aussi est-il préféré dans les pays où l'on mange et fume l'opium. On l'exporte en Chine, au Pérou, aux Antilles, dans les Guyanes et le Brésil. La variété cultivée en Perse est le P. somniferum ou album. Depuis 1870, de grandes quantités d'opium persan sont dirigées des ports de Bouchir et Bender-Abbas, surle golfe Persique, vers Londres, les établissements du Détroit (presqu'ile de Malacca) et la Chine. A lui seul, le marché chinois absorbe les einq sixièmes de l’opium exporté. En Egyple, on cultive la même variété qu'en Asie- Mineure, le ?. glabrum. Les essais de culture tentés en Algérie, au Mozam- bique, en Australie, aux Etats-Unis, en Europe ont donné de belles récoltes. Mais le prix de la main-. d'œuvre, dans les pays tempérés, est trop cher pour que Fopium puisse y être rémunérateur. Les deux centres de production les plus consi- dérables sont assurément l'Inde anglaise et la Chine. La variété la plus commune dans l'Inde est le P. somniferum où album, dont les tiges sont hautes de 1*,20 et quelquefois 1",50, et dont les capsules ont le volume du poing. Maisil existe dans l'Himalaya une variété à fleurs rouges et à graines noires. C'est en février qu'a lieu la floraison, et presque aussitôt on procède à la cueillelte des pétales qui, désséchés, serviront plus tard à empaqueter les pains d'opium. Cinq jours après la cueillette des pétales, alors que la capsule est à peine jaunàtre, les r pots ou cultivateurs scarifient les têtes de pavot avec un zashlar, espèce de canif à quatre ou cinq lames légèrement divergentes. Les incisions sont verticales. Le lendemain, les larmes d'opium sont recueillies avec un grattoir ou une cuiller. L'opium, déposé dans des vases de terre, laisse exsuder un liquide appelé passewa, semblable à une infusion de café. Il faut le décanter avec précaution, car sa présence modifie la consistance, la couleur, l'arome et, par conséquent, la valeur marchande du produit. La majeure partie de l’opium de l'Inde provient de la partie moyenne de la vallée du Gange, depuis Dinapur {près de Patna) à l'Est, jusqu'à Agra à l'Ouest, et de Gorakhpur au Nord jusqu'à Hazari- bagh au Sud; c'est une aire qui a plus de 1.000 kilo- mètres de longueur sur 320 de largeur”. Le plateau de Malwa et les pentes des monts Vindyas, dans l'Indore, fournissent aussi beau- coup d'opium. Dans le premier de ces deux centres, l’industrie est un monopole du Gouvernement, et les districts producteurs sont divisés en deux agences, Béhar et Bénarès, qui sont sous le contrôle de fonctionnaires résidant respectivement à Patna et à Ghazipur. En 1883, 463.829 acres furent plantés en pavot dans l'agence de Béhar et 412.625 dans celle de Bénarès. Quiconque veut entreprendre la culture est libre de le faire, mais tout l’opium récollé doit être cédé à l'agent du Gouvernement, moyennant un prix fixé d'avance, par ce dernier, à environ 3 shil. 6 pence la livre (4 fr. 375). Le Gouvernement revend la livre d'opium à peu près 41 shil. (13 fr. 75). À Malwa, Etat protégé, la cullure est libre et très rémunératrice. À son entrée sur le territoire anglais, l’opium est frappé d'un droit élevé, de manière à égaliser son prix avec celui de l’article gouverne- men al. La culture du pavot gagne les plaines du Penjab. Elle s'étend dans la vallée du Bias, à l’est de Lahore, et monte sur le versant de l'Himalaya jusqu'à 2,250 mètres, où l'opium de Kulu est renommé. Au Népal, à Bashar et Rampur, ainsi qu'à Doda Kasht- war, dans le terriloire du Cachemire, on produit de l'opium et on l’exporte vers Yarkand, Khotan, Aksu et différentes provinces chinoises. Dans les factoreries gouvernementales, l'opium recueilli est soumis à diverses manipulations. Quand il a acquis la consistance normale et qu'il ne con- tient plus que 30 °/, d’eau, il est réparti dans des auges où il est pétri jusqu'à ce que la masse soit bien homogène. Cela fait, l'opium de provision, destiné à être exporté, est mis en balles, c'est-à- dire divisé en boules du poids de 1.400 grammes, qu'on entoure d'une coque épaisse de pétales de pavots tassés et agglutinés. Celui qui est destiné à la consommation indigène, connu sous le nom d'Abkari ou opium divisable, est exposé au soleil jusqu'à ce qu'il ne contienne plus que 10 °/, d'eau. On le divise en gäteaux carrés de deux livres cha- cun, qu'on enveloppe dans du papier huilé. Sous cette forme, le produit n’a pas le même arome que l'opium en balles. 1 Ce territoire, qui fait partie de l'Inde britannique, est situé dans le Bengale et les provinces du Nord-Ouest. ? L'Indore est un État tributaire de l'Empire anglais. — En 1516, Pyres mentionne l'opium comme un produit du royaume de Cous (Kuch Behar situé au Sud-Ouest du Boutan) et de Malwa. Son introduction dans l'Inde parait liée aux progrès de l'Islam. Le monopole de l'opium était la proprié'é du Grand Mogol. D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM 21 À Malwa, le suc frais est recueilli dans des vases de terre et couvert d'huile de lin. Puis l'opium est mis dans des sacs suspendus au plafond, à l'abri de la lumière et de l'humidité, pour laisser l'excès d'huile s'écouler. La masse est ensuite pétrie jus- qu'à ce qu'elle soit assez dure pour être faconnée en gâteaux rectangulaires ou ronds de 8 à 10 onces, qu'on roule dans des feuilles de pavot. On suppose que l’opium fut introduit en Chine par les Arabes, vers la fin du x siècle, sous le règne de Taitsu. Dans un traité chinois de Botanique, composé il y a plus de deux siècles, on trouve la description du pavot et de son sue épaissi. Dans l’histoire générale des provinces du sud du Yunnan, revisée et rééditée en 1736, on parle de l’opium comme d'une drogue usuelle. Mais, jusqu'à l'époque contemporaine, les Chinois n'importaient que des quantités relativement petites d'opium et ne s'en servaient que comme remède contre la dysenterie, la diarrhée et les fièvres. Après la victoire de Robert Clive, à Plassey (1757), la Compagnie anglaise des Indes Orientales com- mença à introduire de l'opium en Chine. En 1773, la quantité exportée annuellement ne dépassait pas 200 caisses; mais, en 1776, elle s'élevait à 1.000 et en 1790 à 4.054 caisses. Bien qu’en 1796 l'empereur Keaking interdit l'importation et fit défense à ses sujets de fumer l’opium, sous peine de la déporta- tion et même de la mort, le commerce de l'opium s'accrut constamment et, de 1820 à 1830, le nombre des caisses introduites en Chine fut de 16.877 par an. e. Au printemps de l'année 1839, des vaisseaux anglais chargés d’opium stationnaient dans la rivière de Canton. Le Gouvernement chinois leur enjoignit de prendre le large. Cet ultimatum n'ayant élé suivi d'aucun effet, le 22 avril, Lin tse, vice-roi du Hon-Kouang, fit saisir la cargaison des navires anglais; 20.291 caisses d'opium, dont la valeur peut être évaluée à une cinquantaine de millions, furent jetées à la mer. De cet incident naquit la Guerre de l'opium, qui se termina par le traité de Nanking (1842). La Chine vaincue cédait à l'Angleterre, en toute propriété, l’île de Hong-Kong; en outre, elle consentait à indemniser les contrebandiers anglais et à ouvrir quatre nouveaux ports au trafic de l'opium indien. Jamais, peut-être, des conditions aussi dures, aussi déshonorantes, n'avaient été imposées par les Européens aux Asiatiques! Depuis cette époque, malgré les remontrances du Gouvernement chinois, l'exportation de l'opium de l'Inde en Chine a eonlinué, passant de 53.935 piculs (de 133 1/3 livres), en 1850, à 96.839 piculs.en 1880. Pendant que la cour de Pékin s'opposait à l'entrée de l'opium étranger, elle s’efforçait d'en- traver la culture du pavot indigène. Mais, en dépit de toutes les défenses, celle-ci s'acclimatait en Chine. En 1830, un censeur chinois faisait savoir au Gouvernement impérial que la moitié de la province du Tehe-Kiang était couverte de champs de pavot. En 1836, Cho-Tsung établissait que la production annuelle du Yunnan atteignait déjà plusieurs mil- liers de piculs. Après le traité de Nanking, la Chine élait con- damnée à fumer l'opium, de par la loi du vain- queur; elle avait donc tout intérêt à encourager la culture du pavot sur son propre terriloire pour diminuer, autant que possible, la perte considérable en numéraire que lui faisait subir l'achat de l'opium indien. Il y a vingt-cinq ans, déjà 9 des 18 pro- vinces de l'Empire faisaient de l'opium; la Chine du Sud-Ouest, y compris le Sze-Lchouen, produisait 224.000 piculs, tandis que l'importation de l'Inde restait stationnaire ou rétrogradait. Le bon marché relatif de l'opium chinois, les impôts plus légers qui le frappentet le &oin toujours plus grand que l’on prend pour sa culture, lui per- mettent de lutter avec avantage contre le produit indien, même dans la Chine orientale, et les Chinois anticipent avec confiance le temps prochain où l'opium indien sera entièrement supplanté par l’opium indigène”. Actuellement, la Chine tire de son sol les quatre cinquièmes de l’opium qu'elle consomme. La culture du pavot a pris une grande extension dans les provinces centrales et méridionales, le Sze-tchouen, le Yunnan et le Kouei-tchéou. Elle a moins bien réussi dans les provinces du Nord, le Chan-si, le Chen-si et le Chan-tong, la Mongolie orientale et la Mandchourie. Au Yunnan, dans les régions où le sol est propice, le paysan chinois fait chaque année, sur sa rizière, pendant la saison sèche, une récolte d'opium. La plante cultivée dans celte province et le sud de la Chine est un pavot blanc d'une espèce très petite, dont la hauteur ne dépasse guère 80 centimètres. Les capsules ont la grosseur d'une noix. En avril, quand la maturité du fruit est complète, on fait sur les capsules, avec un couteau spécial bien aiguisé, des incisions longues et profondes. Souvent, on pra- tique de nouvelles scarifications quelques juurs plus tard. Puis, pour épuiser les capsules, on les brise et on les jette dans des bassines pleines d'eau, où elles sont soumises à une ébullition prolongée. La liqueur ainsi obtenue est filtrée, évaporée en con- sistance d'extrait et réunie au suc obtenu par scari- fication. Dans certaines localités, on pèle les cap- sules de manière à enlever la euticule superficielle. La surface d'exsudation est alors plus grande. CS Re 4 En 1891, l'importation indienne s'est élevée à 17.445 piculs, tandis que la production chinoise a fourni 330.000 pi- culs. 22 D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM L'opium de Chine est de couleur plus foncée et de consistance moindre que celui de Perse, mais son arome est bon. Une cerlaine quantité d'opium pro- venant du Sze-tchouen semble avoir été mélangée avec de l'huile. Dans cette province et au Yunnan, ilest vendu sous forme de pains à peu près cubiques, du poids moyen de 3 kilogrammes, et enveloppés dans plusieurs feuilles de papier blanc. Au Tche- kiang, où il a l'aspect de mélasse, on en fait des calottes du poids de 2 à 4 livres. Le produit du Chen-si, est fort estimé parce que son arome res- semble à celui de Patna et parce qu'il donne 85 à 90°/, d'extrait. Puis viennentcomme valeur l'opium du Yunnan et enfin celui du Sze-tchouen. L'opium de Patna est préféré le long de la côte sud-est jusqu'au Yangtse. Le Malwa est surtout demandé dans les provinces du Nord, y compris une parlie du Kouang-si, du Kiang-si et du Ngan- hoei. Le Bénarès a son principal marché à Formose et dans la province du Fo-Kien. Le Persan remplace le Malwa, dans une certaine mesure, à cause de son prix inférieur; il se rend surtout au Kouang-si. II. — CARACTÈRES ORGANOLEPTIQUES ET COMPOSITION CHIMIQUE DE L'OPIUM. — SES FALSIFICATIONS. Quelle que soit sa provenance, l’opium se recon- nait à sa couleur brune plus ou moins foncée, à son odeur forte et vireuse, à sa saveur âcre et amère, à sa consistance visqueuse. Les principes actifs contenus dans l'opium sont des alcaloïdes. La liste en est fort longue. La chi- | mie n’en a pas isolé moins de 23°. Celui qui occupe la première place est la morphine, puis vien- nent la codéine, la narcotine, la narcéine, la thé- baïne, elc. La leneur des diverses sortes d'opium en mor- phine est variable. L'analyse des échantillons de même provenance accuse des écarts assez considé- rables. L'Æncyclopédie britannique donne les pro- portions suivantes * : Opium d'Asie-Mineure : Provenance de Smyrne . + . : - "9 à 120 — de Constantinople. . . S à 9 Opium d'Egypte . 3409 — de Perse . PR NS ee ÿ à 12 — de l'Inde (Patna, Bénarès). Del — de Chine AEMO NT G. Pouchet danne des chiffres qui diflèrent nota- bleinent des précéaents : Smyrne, 15 à 17 °/, de 4 CL. Bernard a divisé ces poisons en 3 grandes catégories : les toxiques, thébaïne, codéine, papavérine, narcéine, mor- phine, narcotine; — les excitants ou convulsivants, thé- baïne, papavérine, narcotine, codéine, morphine, narcéine ; — les narcotiques, narcéine, morphine, codéine. ? Encyclopédie britannique, vol. XVII, p. 187-794. morphine; Constantinople, 10 à 11 °,,; Inde et Chine, 2à7°/,. Outre les alcaloïdes, l'opium contient des acides et des substances neutres : caoutchouc, gomme, albumine, cire; un principe volatil auquel est due, en majeure partie, l'odeur vireuse de l’opium; enfin des sels minéraux, parmi lesquels le sulfate de potasse et Le sulfate de chaux. La proportion d'eau contenue dans l'opium brut varie suivant la provenance. Elle est de 30 ?/, dans le produit livré par le Gouvernement de l'Inde. De tout temps, la valeur vénale de l’opium a en- couragé la fraude. Le suc de réglisse, le jus de raisin, la pâte de figues, la gomme adragante, les capsules et les tiges de pavot pilées et mélées à du blanc d'œuf, les résidus de l'extraction de la mor- phine, tout a été employé par les sophisticateurs ; mais aucun de ces procédés, plus ou moins ingé- nieux, ne résiste à l'épreuve du litrage‘. III. — Les MANGEURS D’OPIUM (AFFIONDII, TuéRIAKIS). Dans certaines régions de la Chine, mais sur- tout parmi les populations musulmanes de l'Inde, de la Perse, de l’Asie-Mineure et de la Turquie d'Europe, l'habitude d'avaler des boulettes d'opium est très répandue. L'opium calme la faim et la soif, il dissipe la fa- tigue; aussi, depuis une époque fort reculée, les Arabes nomades du désert prennent de l'opium à dose modérée et en font absorber à leur monture. La conquête musulmane paraît avoir introduit cel usage en Perse. En 1660, le P. Raphaël écrit : « Le kokenar, pavot blanc, est une drogue permise par la loi: l'odeur du suc, au moment de l'incision des capsules, suffit pour meltre les gens hors d'eux- mêmes. Dans Hispan et la Perse, il y a des acadé- mies pour les gens : ce sont les kokenar krone, petites cahuettes où s'assemblent ces messieurs : on y voit ces grands personnages qui pleurent ou qui rient aux anges, font contes à la cigogne, dis- courent et prennent mille postures. Ceux qui sont les plus honnêtes font cela dans leurs propres de- Voici, d'après l’article Orruu de l'Encyclopédie britan- nique, vol. XVII, p. 787-194, l'énumération des substances qui servent à falsifier lopium de l'Inde : le sable, la boue, la poussière de charbon, la suie, la bouse de vache, les pétales de pavot pulvérisés, diverses graines réduites en poudre, la farine, la fécule, le beurre fondu, le ghoor (sucre de dattes brut), le jus de la prickly pear, des extraits de tabac, de stramoine et de chanvre, la pulpe des fruits de tamarinier et de bael, les fleurs de mahwah et diverses espèces de gommes, — Les Chinois additionnentsouvent l'opium avec une résine appelée Saicao. 2 E. Mar {L'opium, ses abus, etc.) cite divers exemples d'animaux, en particulier de chevaux, chiens, chats, singes, qui sont devenus opiomanes. mimi nes D: E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM 23 meures et en leur particulier : pour la drogue, ils l'envoient chercher à leur heure dans des bou- teilles au kokenar krone. Quant à l'extrait pur ou Enfon, ils y sont si accoutumés que, s'ils s'abs- tiennent à l'heure habituelle, infailliblement après trois ou quatre heures de souffrance, les voilà morts, et, s'ils vont aux champs oubliant la drogue, ils sont en danger de passer le pas avant de reve- -nir chez eux‘. » Le voyageur Chardin, qui visita la Perse à la fin du xvn° siècle (1671-1677), a bien décrit les effets qui résultent de l'habitude de manger l’opium : « Les Persans trouvent qu'elle produit dans le cer- veau des visions agréables et une manière d'en- chantement. Ceux qui en ont pris commencent à en sentir l'effet au bout d’une heure; ils devien- nent gais, après ils se päment de rire, et ils font et disent ensuite mille extravagances comme des bouffons et des plaisants ; et cela arrive particulie- rement à ceux qui ont l'esprit tourné à la plaisan- terie. L'opération de cette méchante drogue est plus ou moins longue, à proportion de la dose ; mais d'ordinaire elle dure quatre à cinq heures, non pas à la vérité de la même force. Après l’opé- ration, le corps devient froid, morne et stupide, et demeure en cet état languissant et assoupi jusqu'à ce qu'on reprenne une autre pilule... Mais, pour peu qu'on s'habitue à ces pilules de pavot, on ne peut plus s’en passer; et, si l'on est un jour sans en prendre, il y paraît et sur le visage et à tout le corps qui tombe en une langueur qui fait pilié. C'est bien pis pour ceux en qui l'habitude de ce poison est invétérée, car l'abstinence leur en de- vient mortelle... Le Gouvernement a täché plu- sieurs fois d'empêcher l'usage de cette drogue, à cause de ses funestes effets, dont tout le royaume se sentait; mais on n'en a jamais pu venir à bout; car c'est une inclination si générale que, de dix personnes, à peine en trouvera-t-on une exempte de cette méchante habitude... Ceux qui y sont adonnés ne parviennent jamais à une grande vieil- lesse, et outre qu'ils sont, dès l’âge de cinquante ans, incommodés de douleurs dans les nerfs et dans les os, nées de la malignité de ce poison lent, ils ont encore l'esprit si languissant qu'ils n'osent se montrer que quand la drogue les agite... « Il y a la décoction de la coque et de la graine de pavot, qu'on nomme cocquenar, dont il y a des cabarets dans toutes les villes, comme de café. C'est un grand divertissement de se trouver parmi ceux qui en prennent dans les cabarets, et de les bien observer avant qu'ils aient pris la dose, avant qu'elle opère, et lorsqu'elle opère. Quand ils en- 1 RarnaëL : Æstat de la Perse, publication de l'Ecole des Langues Orientales, annotée par Ch. Scheffer. trent au cabaret, ils sont mornes, défails et lan- guissants. Peu après qu'ils ont pris deux ou trois tasses de ce breuvage, ils sont hargneux et comme enragés; tout leur déplait, ils rebutent tout, et s'entre-querellent; mais, dans la suite de l’opéra- tion, ils font la paix, et chacun s’abandonnant à sa passion dominante, l'amoureux, de naturel, conte des douceurs à son idole; un autre, demi-endormi, rit sous cape; un autre fait le rodomont; un autre fait des contes ridicules; en un mot, on croirait alors se trouver dans un vrai hôpital de fous. Une espèce d'assoupissement et de stupidité suit cette gaieté inégale et désordonnée ; mais les Persans, bien loin de la traiter comme elle le mérite, l'ap- pellent une extase et soutiennent qu'il y a quelque chose de surnaturel et de divin en cet état-là. » Il est probable que cet effet exhilarant est produit, non pas par l'opium pur, mais par son mélange au haschisch. En tout cas, cette dernière sub- stance entre dans la composition du hueng où bang et du poust qui provoquent une agitation beaucoup plus violente. V. Richard, observant à Balasor, dans la pro- vince d'Orissa (Inde anglaise), estime que, dans cetle région, 4 habitant sur 12 ou 14 mange l'opium, et que la proportion tend à s’accroitre e. Sur un total de 613 thériakis, l'âge du début était de vingt à vingt-six ans pour les hommes, et de vingt-quatre à trente pour les femmes; 142 absor- baient de l’opium depuis dix à vingt ans, 60 de- puis vingt à trente ans, et 38 depuis plus de trente ans. La plupart de ces opiophages consom- maient leur dose quotidienne en deux fois, le matin et le soir. Elle était, en moyenne, ‘de 6 à 7 grains, mais elle pouvait atteindre le chiffre énorme de A6 grains. C'était limitation, la croyance dans le pouvoir aphrodisiaque de l'opium et surtout une maladie. telle que le paludisme, la dysenterie, la diarrhée, la tuberculose, le rhumalisme, l’éléphantiasis, qui avaient amené ces individus au thériakisme. Beau- coup avaient commencé à prendre de lopium lors de la famine de 1866, parce que l'usage de ce cal- mant apaisait leurs souffrances *. D'après Richard, l'absorption de doses modérées peut se prolonger longtemps sans effets nuisibles. Cependant, il reconnait que les fonclions géné- siques des mangeurs d'opium sont affaiblies, et 1 La vente de l’opium aux thériakis est une source nnpor- tante de revenu pour le Gouvernement de l'Inde, les licences accordées pour un an seulement étant parfois de près de 12 millions. 2 L'extension de l’opiophagie semble favorisée par l'inter- diction faite aux Mahométans de boire de l'alcool, et jusqu'à un certain point par la rigueur des jeûnes religieux pendant lesquels les Bouddhistes, les Hindous et les Musulmans cherchent à tromper leur faim en avalant de l'opium. 19 red D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM qu'ils sont peu prolifiques (en moyenne un enfant après onze ans de mariage). Dymock (de Bombay) est du même avis que V. Richard. D'après lui, une partie infime de la classe riche fait seule abus d’opium. Moore arrive à la même conclusion en ce qui concerne le Rajpulana”. Les mangeurs n'absorbent, au début, que des quantités minimes, 0,03 à 0,12 centigrammes d’opium par jour. Celui qui possède une force de caractère assez grande pour restreindre sa ration quotidienne d'opium à quelques centigrammes, ne devient pas un opiomane, de même qu'un Européen n’est pas un alcoolique parce qu'il boit chaque jour un peu de vin. La tyrannie de l'habitude et la nécessité d'ac- croître constamment la dose de poison pour obtenir l'effet désiré sont, d'ailleurs, beaucoup moins accentuées chez l’opiophage que chez le morphino- mane ou le fumeur. Mais ceux qui sont incapables de modérer leur passion pour l'opium arrivent à prendre la dose massive de 7 et même 10 grammes. Ces grands mangeurs d’opium perdent l'appétit; ils ont des nausées, des vomissements, une conslti- pation opiniâtre, et parfois, à la période ullime, une diarrhée incoercible. Ils tombent dans une apathie profonde quand ils sont privés de leur poison habituel. Graduellement, leurs facullés intellec- tuelles et affectives se pervertissent. Pàles, éma- ciés au delà de tout ce qu'on peut imaginer, sans force, sans énergie, sans volonté, sans jugement, réduits à l'état d'automates, ils n'ont plus d'autre objectif que la satisfaction de leur passion, et ils finissent par sombrer dans le gâtisme. _ L'opiophagie n’est pas cantonnée en Asie : elle a des adeptes en Europe, parmi la population ou- vrière de certains comtés d'Angleterre, ceux de Lincoln et de Norfolk notamment. Aux États-Unis, on comptait, il y a une vingtaine d'années, 82.696 man- geurs d'opium, la plupart dans le Michigan, où la consommation de chaque thériaki est d’une once par semaine. IV. — LE FUMEUR D'OPpIüM. Quarante ou cinquante ans avant que les Anglais fussent entrés en relations commerciales suivies avec le Céleste Empire, l'habitude de fumer l'opium s'était déjà répandue, dit-on, parmi les Chinois. Mais elle y faisait des progrès très lents. En 1858, il n'y avait pas plus de 2 millions de fumeurs; vingt ans plus tard, on en évaluait le nombre à 400 * D'après E. Marrix (L'opium, ses abus, etc. Paris, 1893. p. 29), le nombre des mangeurs d’opium dans l'Inde anglaise ne serait pas moindre de 20 millions; ce seraient, pour la majorité, des Musulmans. ou 120 millions. Depuis lors, le goût de l'opium n'æ fait que s'accroitre en Chine. Au Yunnan, où l'on cultive le pavot, la plupart des habilants, manda-— rins et lellrés, commerçants et gens du peuple, citadins et campagnards, bouddhistes ou chrétiens, s’adonnent avec fureur à la passion de l'opium. Tout paysan ensemence au moins un petit champ. de pavot, à proximité de sa case, pour sa consomma— tion personnelle ; il prépare lui-même son opium, et ce bouilleur de cru n'est nullement inquiété par letisee Dans les grandes villes, à Yunnansen, à Talifu, les boutiques ferment avant la tombée du jour; toute la soirée. jusqu'à une heure fort avancée de- la nuit, est consacrée à l'opium. Le fumeur dort d'un sommeil agilé, et il ne repose guère qu'à la pointe du jour: aussi se lève-t-il fort tard. L'acti- vité commerciale ne se réveille que vers 10 heures. du matin. Quant on parcourt cette province du. Yunnan, pendant les mois de mars et d'avril, on ne voit que champs de pavot en fleurs. On le cultive: pendant la saison sèche, entre deux récoltes de- riz. f Le Sze-tchouen est une province qui produit: aussi beaucoup d'opium. Le D' Legendre estime qu'à Tehen-tou il y a 30 °/, de fumeurs parmi la: population mâle, et à King-tchéou 60 °/,. Les Chinois qui ont essaimé dans tout l'Ex- trême-Orient, les îles du Pacifique, l'Australie, la Californie, l'Afrique du Sud, introduisent partout: à leur suite le poison favori. Les coolies, réduits à: l'état de demi-servilude, qui lravaillent dans les mines et les plantations, n’ont pas d'autre plaisir, après leur rude labeur, que de fumer l'opium. A leur contact, les peuplades de la presqu'île indo- chinoise, les Birmans, les Siamois, les Malais, les Annamites, les indigènes des Philippines et des iles de la Sonde ont pris goût à la funeste drogue. Beaucoup de fumeurs préfèrent l'opium à la liberté. Parmi les lépreux internés à l’établisse- ment de Jerajak (Straits Settlements), il en est fort peu qui réclament leur élargissement parce qu'on leur délivre graluitement de l'opium. En 1900, l'Indo-Chine française achetait dans l'Inde et au Yunnan 110.000 kilogs d’opium *. La 1 Le coolie ou muletier porte sa pipe à opium pendue à sa ceinture, et jamais il. ne s'en sépare. Le lépreux qui par- court les routes, une hotte sur le dos, pour recueillir les aumônes est réduit au plus complet dénuement; cependant, il possède toujours une pipe dans son bagage. — Les prêtres bouddhistes sacrifient aussi à la « fée brune ». Arrivé à Num Tchang, sur la route de Tali à Bhamo, je me rends à la pagode où il est d'usage de loger les étrangers. J'assiste à l'office du soir, le bonze récite ses prières, puis il étend sa natte dans le sanctuaire et se dispose à fumer l'opium au pied de ses dieux. De l'aveu des missionnaires catholiques, les Chinois convertis usent largement de l'opium. ? À raison de 19 piastres le kilog pour le Bénarès, et deæ D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM e— quantité introduite en fraude par la contrebande était peut-être égale. Partout, même dans les régions les plus reculées du Laos, les fumeurs étaient nombreux. Une réunion de l'Office pharmaceutique du Trans- vaal a mis au jour des fails intéressants sur le trafic de l'opium parmi les ouvriers chinois du Rand. Le secrétaire de l'Office, examinant le livre de poisons d'un pharmacien du centre de Johannesburg, à trouvé que 468 livres d'opium avaient été vendues pendant les mois de juillet et d'août. Beaucoup d'ouvriers chinois de l'intérieur, des jeunes gens en général, qui n'avaient jamais fait usage de l'opium auparavant, ont subi la contagion et fument à présent comme leurs compatriotes. L'opium brut « porte à la tête », soit parce qu'il est trop riche en morphine, soit parce qu'il contient d’autres aleuloïdes tels que la thébaïne, la papa- vérine, la narcotine et la narcéine. Avant d'être livré au consommateur, l’opium de pipe doit subir une préparation longue et délicate, qui a pour effel de développer son arome, de chasser son principe volatil vireux, d'éliminer les impuretés qui altèrent ses qualités plastiques. Par les manipulations de la bouillerie et la fermentation consécutive, l'opium brut se dépouille du caoutchouc, des résines, de la cellulose, des gommes, des substances albu- mineuses et muqueuses, enfin d'un excès de narco- tine et de narcéine. Il prend alors le nom de Clandoo. A la fabrique de Saïgon, où l’on suit la méthode cantonnaise, la série des opérations est la suivante !: 4 Section et décortication des balles d'opium. La masse qu'on en extrait est une substance de couleur brun-rougeàtre, de consistance molle et poisseuse, exhalant une forte odeur vireuse de fleurs de pavots froissées; 2 Décoction des coques de pétales de pavot, ou du papier ayant servi à envelopper les pains d'opium ; 7 à 9 piastres seulement pour l'opium du Yunnan, qui est beaucoup moins estimé des fumeurs. — Depuis deux ans, la manufacture de Saigon tire les deux tiers de son opium du Yunnanetun tiers de l'Inde. La culture du pavot se répand dans le Haut-Laos. 1 Sous réserve des modifications qui auraient été appor- tées depuis avril 1900, époque à laquelle je suivis toutes les phases d'une fournée d'opium. — La fabrication du Chan- doo demande trois jours, mais il y a un chevauchement continuel de toutes les opérations qui s'exécutent simulta- nément; dans la même journée, pendant qu'une équipe évapore les liqueurs de la veille (3° journée), une autre pétrit et cuit l'opium retiré des boules et des écorces le jour pré- cédent (2° journée); enfin, un troisième groupe d'ouvriers décortique les boules qui seront travaillées le lendemain (1e journée). ? Ces enveloppes ou imbrios sont imprégnées d'une très notable quantité d'opium. Sur 200 boules de provenance indienne et pesant 350 kilogs, il y a 217 kilogs d'opium | 3° Réunion des exlrails oblenus par décoction à la masse d’opium; 4 Empâtage, c'est-à-dire brassage de l'opium, pendant une heure et demie environ, dans de grandes bassines de cuivre à double fond chauflées par un courant de vapeur d'eau à 110° (2 atmo- sphères). Le pétrissage se poursuit jusqu'à ce que l’opium acquierre la consistance de la pâte de boulanger ; 5° La bassine est retirée du feu et la masse d’opium est pétrie à l’aide d'une spatule (refouloir). Cette malaxation a pour but de refroidir lentement la masse, de manière à lui donner une homogénéité parfaite. L'opium est ensuite étalé en couche uni- forme à la surface de la bassine. Un filet d'eau est insinué entre le récipient et le revêtement d'opium pour faciliter son adhérence; 6° Puis on procède à l'opération du grillage. Chaque bassine est retournée sur un foyer de braise recouvert de cendres. De l'opium, après quelques instants d'exposition au feu, se dégagent d'abon- dantes vapeurs blanchätres.:La bassine est alors saisie avec des pinces, et il est facile de détacher la couche superficielle d'opium grillée; c'est un disque mince ayant la forme d'une crêpe. On recommence ensuite le grillage. La masse d’opium est succes- sivement débitée en un grand nombre de tranches. Le grillage exige un opérateur habile. C'esl l'odeur qui indique le moment précis où 1l faut écarter la bassine du foyer pour détacher un disque. La torréfaction élimine certaines matières empy- reumatiques et donne à l’opium un bon arome; 1° Les disques d'opium concassés sont mis à macérer dans de l'eau froide pendant dix-huit à vingt heures. Le liquide oblenu est décanté à l'aide de mèches en moelle de Tam Sam, plante très commune en Chine; $& Après filtration de la liqueur sur plusieurs épaisseurs de papier non collé, la solution d'opium est poriée à l’ébullition dans de grands cylindres, pendant plusieurs heures, jusqu'à ce qu'elle acquierre la consistance sirupeuse et donne 29° à l’aréomètre Baumé; 9° Battage de cette solution concentrée d’opium dans une sorte de moulin à palettes, probablement pour y introduire le ferment; 10° L'opium est déposé en magasin. Il entre en brut, 416 kil. 500 d'imbrios et 16 kil. 500 d'écorces sèches. 1 Cette moelle se présente en filaments blancs, ecylin- driques, de 2 millimètres de diamètre et de 20 à 30 centi- mètres de longueur, ayant la formede gros vermicelles. Après les avoir humectés d'eau, on les étale en nappes de 1 à 2 centimètres d'épaisseur sur 12 à 15 centimètres de largeur et 30 à 35 centimètres de longueur. L'une des extrémités de la mèche plonge dans la bassine, l'autre pend extérieure- ment. Cette décantation, qui s'opère par le mécanisme du: siphon, ne demande pas plus de 10 minutes. 26 D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM fermentation, gonfle et se couvre d'écume. Puis, en une semaine, la masse se réduit à la moitié du volume qu’elle avait avant le battage et le conser- vera indéfiniment. Alors, se développe à la surface de l'opium une couche de champignons qui peut atteindre plusieurs centimètres d'épaisseur. On ne sait pas quel est l'agent de la fermentation. Calmelte avait supposé que c'était l'Aspergillus niger, opi- nion qui parait controuvée. On suppose générale- ment aujourd'hui que la masse d'opium est le siège de deux fermentations successives : l’une, courte et rapide, dont l'agent serait un Saccharomyces; elle commence dès le deuxième ou troisième jour, pour cesser après vingt-cinq ou trente jours; l’autre, plus lente, presque indéfinie, produite par des levures. C’est celte dernière qui donnerait au Chandoo cet arome si apprécié des fumeurs: 11° Mise en boîtes”; 12° Pasteurisatlion, c'est-à-dire exposition des boites à une température de 90° pour arrêter toute fermentation. Quand la série dés opérations est terminée, 350 kilogs de Bénarès fournissent 246 kilogs de Chandoo, soit 68 °/,; le Yunnan donne un ren- dement moindre, soit 60 0/,. L'opium, modifié par le brassage, le grillage, 4 Une pompe à mains distribue, à chaque coup de piston, dans de petites boîtes de cuivre, un poids donné d'opium, 5, 10, 20, 40 ou 100 grammes. Une employée, avant la ferme- ture des boîtes, en pèse une pour s'assurer que le débit de la pompe est rigoureusement exact. Chaque boîte est recou- verte d'une capsule sur laquelle est inscrite, au balancier, la marque de fabrique, la provenancé de l'opium et la date. Tous les temps de la fabrication sont exécutés par de robustes Chinois, car le pétrissage est très pénible. Chaque ouvrier a pour tâche une marmitée d'opium, c'est-à-dire une balle de 1.500 grammes, ce qui demande huit heures de travail environ. Chaque jour, deux équipes se succèdent à la manufacture : l'une est présente de 5 heures du matin à midi ou 1 heure, l'autre est occupée l'après-midi. La mise en boite, opération n'exigeant aucune force mais seulement de l'adresse, est confiée à des Annamites. En principe, les ouvriers chinois doivent ètre placés sous le contrôle d'employés européens; mais, en réalilé, les gar- diens sont des noirs ou des mulätres de la Réunion. Une amende collective de 100 piastres est infligée à toute l'équipe quand un vol est constaté; aussi les ouvriers exercent-ils une surveillance réciproque les uns sur les autres. Il ne se perd, pour ainsi dire, pas une parcelle d'opium. Les fragments de coque en pétales de pavot qui entourent les balles sont vendus à la classe pauvre. Ces écorces ne renferment que des traces de morphine, en quantité suffi- sante cependant pour donner à l'indigène l'illusion de l’opium. Quand l’Annamite est aux champs, faute de pouvoir fumer, il mâche, en travaillant, quelques morceaux d'écorce impré- gnée d'opium. Le dross est le dépôt qui s'accumule dans la pipe. C'est une masse noire, légère et poreuse comme du coke. On enextrait de l'opium qu'on mélange au produit du Yunnan pour lui donner un goût plus relevé, Certains indigènes le ‘chiquent. Les tenauciers de fumeries d'opium doivent vendre leur dross à l'administration, contre remboursement de sa valeur déterminée par arrêté. Cependant, les soustractions sont nombreuses: les particuliers tirent du dross, par des procédés défectueux, un opium très chargé en morphine qui serait plus nuisible que l'opium de la Régie. l'ébullition et la fermentation, exhale une odeur désagréable d'emplâtre brülé. Mais, en vieillissant, il s'améliore comme le vin et acquiert un parfum doux et pénétrant. Le Chandoo” contient 30 à 34°}, d'eau, 6 à 10 °/, de morphine, 1 à 3 °/, de narcotine; il donne 3 à 6 °/, de cendres, 1 à 4°/, de substances insolubles dans l’eau, 10 à 15 °/, de matières inso- lubles dans l'alcool, 1 à 6 °/, de glycose. Son aci- dité équivaut à 4 et 6 grammes de SO‘H°. Chaque variété d'opium a son arome et son bou- quet. Les gourmets savent reconnaitre la provenance et le mode de fabrication d'un Chandoo. Il y a des opiums de grandes marques, comme il y a des vins de grands crus. Et, de même qu'un palais délicat ne donne pas la première place au vin qui contient le plus d'alcool, de même un fumeur émérite ne donne pas la préférence à l'opium qui est le plus chargé de morphine. Ainsi la proportion de cet alcaloïde dans le Bénarès n’est que de 6 à 8 °/,; dans le Yunnan, elle est de 9, 33°/,; et cependant le premier est beaucoup plus prisé des connais- seurs, et partant payé plus cher que le second. Le Malwa a la réputation d’être plus stimulant. Il : a un fort arome et un goût piquant. Il cause, chez ceux qui ne sont pas habitués à le fumer, des brû- lures d'estomac (heart-burn), il irrite le système nerveux et provoque des éruptions cutanées désa- gréables. Le Patna est doux, mais narcotique. Le Persan est chaud et âcre, il donne de la diarrhée. L'opium de Chine est comparable au Malwa sous certains rapports; il est plus dur et plus actif que le Patna, il cause des démangeaisons et des érup- tions. Il semble qu’on le falsifie souvent avec du varech ou de l'huile. Il serait curieux de recher- cher jusqu'à quel point ces différences de goût et d'action sont liées à l'huile qui entre dans la prépa- ration de l'opium de Malwa et de celui de Chine. L'opium d'Asie-Mineure, très riche en morphine, porte à la tête; ilest préféré par les grands fumeurs, auxquels les opiums légers ne donnent plus entière satisfaction. Des experts, en appréciant les propriétés orga- noleptiques de l'opium : odeur, saveur, consis- tance, ductilité d'une boulette qu'on étire après l'avoir chauffée à la lampe, etc., peuvent soupconner la provenance d’un échantillon de Chandoo. Mais, si habile que soit un fumeur, il ne peut, en tirant quelques bouffées d’un opium, évaluer la quantité de morphine qu'il contient. L'expérience suivante de Lalande est très démonstrative: Il incorpora à 1 G. Poucuer : Lec. de Pharmacodyn. et de Matière médicale, 2e série. Paris, 1901, p. 793, et Fzippo Ruo : Art. « Opium », in Handb. der Tropenkrankh., t. I. p. 238. Leipzig, 1905. D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM 27 - un Chandoo 10 °/, de morphine en sus de la teneur normale. Le fumeur ne s'en aperçut pas; l'im- pression sur les muqueuses buccale et bronchique ne dénonca pas l'addition de morphine. Mais le sommeil se prolongea cinq heures de pius que de coutume. Une expertise ainsi conduite ne permet donc pas de déceler la fraude en toute certitude. En cas de litige avec des particuliers accusés de contrebande, voici comment procède la Régie de l'Indo-Chine. Elle fait analyser dans son labora- toire de recherches le Chandoo contenu dans la baîte Saisie. Celle-ci porte un numéro d'ordre, de sorte qu'on peut comparer la composition chimique de l'échantillon incriminé avec celle du produit qui a été mis en circulation sous le même numéro. S'il existe des différences notables entre les deux ana- lyses, c'est que le Chandoo est falsifié, addilionné de dross par exemple, ou qu'il sort d'une autre bouillerie que celle de la Régie. Le dross, résidu qui se condense dans le four- neau et le tuyau de la pipe, est beaucoup plus riche en morphine que le Chandoo. On en fait un extrait qui a une saveur àcre, empyreumalique, et qui porte à la tête. Entre l'opium de bonne qua- lité et le dross qui apporte aux poumons, à chaque aspiration, une quantité relativement considérable de morphine, il y a la différence qui existe entre le vin naturel et le vin frelaté additionné d'alcool. Le mandarin qui fume 150 pipes d'opium bien pré- paré s'achemine plus lentement vers la déchéance que le coolie qui s'intoxique avec un produit trop riche en morphine. C’est surtout par raison d'éco- nomie que les indigènes donnent la préférence au dross. Cependant, c'est quelquefois par goût, de même que certains buveurs aiment mieux les eaux- de-vie de mauvaise qualité. Moissan a étudié, par la méthode des distilla- tions fractionnées, divers échantillons de Chandoo provenant de Chine et de la manufacture de Saïgon. De l'opium chauffé à 250° s'élève une fumée légère et bleuâtre. Lorsque le dégagement a cessé, il faut porter la température à 275 où 280° pour en produire un nouveau. Vers 300°, la fumée devient blanche et plus lourde ; son odeur est moins agréa- ble. À 350°, la fumée ne contient encore qu'un peu de parfums volatils et une faible dose de morphine. Le dross et les opiums de mauvaise qualité que fume la basse classe ne distillent qu'à une tempé- rature beaucoup pius élevée, et alors les substances toxiques, telles que le pyrrol, l’acétone et les bases hydropyridiques apparaissent rapidement et en quantité nolable dans la fumée. On est loin d'être d'accord sur la quantité de morphine absorbée par le fumeur. Les uns sup- posent qu'un huitième de cet alealoïde est retenu par les poumons. D’autres estiment que quarante pipes, c'est-à-dire 10 grammes de Chandoo, con- tenant 75 centigrammes de morphine, peuvent être remplacées par 20 centigrammes d'extrait thébaïque introduits par la voie stomacale. D'après Mac Callum, chimiste du Gouvernement anglais à Hong-Kong, la morphine se déposerait dans la pipe et n'arriverait pas jusqu'à la bouche du fumeur. Le goût amer de cet alcaloïde ne serait pas perçu quand on fume l'opium et il serait possible que la sensation agréable fût produite par un corps qui prendrait naissance pendant la combustion. A. Gautier pense que les bases hydro- pyridiques, et non pas l'opium, sont la cause de l’intoxication?. Le fumeur se livre à sa passion, soit à domicile, seul ou en compagnie de quelques amis, soit à l'auberge ou dans une fumerie publique. Il y en a pour toutes les bourses : des bouges, où grouille l'écume des villes: d’élégantes, établies dans de luxueux Yamens, retraites paisibles, dont les salles de repos s'ouvrent sur une cour intérieure ali- mentée en eau vive. Le fumeur se couche sur un lit bas, ayant à sa portée, sur un plateau, sa pipe, sa boite à chandoo, une longue aiguille pour confectionner la boulette d'opium, un grattoir pour recueillir le dross, et une petite lampe portative. La pipe à opium est un bambou de 50 centimètres de longueur, fermé à l'une de ses extrémités. Latéralement, à 40 centi- mètres de l'embouchure, s'adapte un fourneau de terre rouge ou brune, qui ne communique à l'exté- rieur que par un pertuis de 2 à 3 millimètres de diamètre. La préparauon d'une pipe d’opiim exige une certaine habileté. L'aiguille est plongée dans le chandoo et tournée entre le pouce et l'index au- dessus de la flamme. Sous l'influence de la cha- leur, l'opium se déshydrate el se gonfle en une grosse bulle d'un brun doré qui répand une odeur fine et pénétrante. Quand la consistance est con- venable, ce que le fumeur apprécie en roulant sur la pulpe du doigt la boulette d'opium, toujours adhérente à l'aiguille, il en fait un petit cône qu'il introduit par le sommet dans le pertuis du four- neau. Par des mouvements de torsion, l'aiguille est ——, 1 En tout cas, il n'est pas exact de dire, comme le fait Bauner, auteur d'un excellent travail présenté au Congrès colonial de Paris, 1903, et publié dans le Bulletin médic DA 1903, n° 27 : « Chaque bouffée de vapeur d'opium inspirée, qui constitue une pipe, amène donc directement le redou- table composé de vingt-trois puissances nocives, el c'est le poumon, organe récepteur par excellence, qui offre sa large surface d'absorption aux funestes vapeurs comme Ja voie de pénétration la plus sûre et la plus rapide de l'économie » D' E. JEANSELME — 19 (o 2] MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM retirée avec adresse, de manière à ce que le canal qu'elle laisse après sa retraite demeure perméable. Cela fait, le fumeur se couche sur le côté, la tête sur l'oreiller, dans ure position confortable. Il porte la pipe à sa bouche, approche le fourneau de la lampe, et fait coup sur coup, sans reprendre ha- leine, trois à quatre longues inspiralions pendant que l’opium grésille. La fumée est avalée et rejetée par la bouche et les narines. Pendant ce dernier temps, qui dure à peine quelques secondes, le four- neau doit rester au-dessus de la flamme jusqu'à ce que les dernières particules d'opium poussées par l'aiguille vers le pertuis soient consumées. Après quoi, le fumeur gratte avec la tête aplatie de l'aiguille le résidu qui encrasse l'orifice et pré- pare immédiatement une nouvelle pipe. Chaque fois, c’est une dose d'environ 25 centigrammes d'opium qui est ulilisée, et, comme la ration quoti- dienne d'un fumeur moyen est de 30 à 40 pipes, cela fait une consommation de 8 à 10 grammes d'opium par jour. L’accoutumance arrive vite, et tel qui, au début, se contentait de 5 à 6 pipes arrive plus ou moins rapidement à en fumer 100. L'interprète qui m'accompagnait durant mon voyage en Chine avait déjà atteint ce chiffre, bien qu'il ne fût âgé que de 17 ans. Certain vice-roi, il y a quelques années, dépassait 150 pipes. Pour obtenir la félicité qu'il cherche, l’opiomane a besoin du calme parfait. Aussi fume-t-il de pré- férence le soir, après la journée faite, quand il à la certitude de ne pas être dérangé par des impor- tuns'. S'il est des fumeurs honteux, la plupart vantent, au contraire, les bienfaits de l'opium, et, comme les morphinomanes, cherchent à faire des prosélytes. Quelquefois, les premières pipes sont mal sup- portées par le débutant, qui est pris de vertiges, de nausées et de vomissements. Cela est d'ailleurs assez rare. | Quand la tolérance est acquise, le premier effet de l’opium est de plonger le fumeur dans une félicité parfaite. L'esprit semble libéré de ses atta- ches terrestres. Tout souci s'efface, toute préoccu- pation de la vie matérielle est bannie. Dans cet état d'euphorie, l'intelligence et la mémoire s’exaltent, la parole est facile, la pensée nette et prompte, les problèmes les plus ardus sont délibérément abor- dés et semblent aisés à résoudre. Maints projets sont ébauchés, mais bientôt abandonnés, car cette suractivité morbide masque une diminution réelle de la faculté d'attention. Privé de jugement et de * La pointe d'opium, obtenue par de faibles doses, aiguise l'intelligence. C'est le moment précis que choisissent les négociants chinois établis en Indo-Chine pour traiter les affaires difficiles. volonté, l’opiomane flotte dans un rêve imprécis el contemple avec une jouissance indicible les visions fugilives et riantes que lui impose son imagination déréglée. Au réveil, le souvenir de cette ivresse s’estompe; pourtant de fins lettrés nous ont laissé le lableau fidèle de leurs sensations. P. Loti, dans une page des Derniers jours de Péking, a retracé de main de maitre l’état psychique que procure l’opium : « Par degrés, il nous apportera l’extase chinoise, l'oubli, l’allègement, l'impondérabilité, la jeunesse. » « Dans un anéantissement physique très particulier, qui laisse se libérer l'esprit (à Bénarès, peut-être dirait- - on : se dégager le corps astral), tout nous parait facile, amusant, dans ce palais, et ailleurs dans le monde entier. Nous nous félicitons d’être venus habiter la « Ville jaune » à un instant unique de l'histoire de la Chine, à un instant où tout est ouvert et où: nous sommes encore presque seuls, libres dans nos fan- taisies et nos curiosités. La vie nous semble avoir des lendemains remplis de circonstances intéressantes, et même nouvelles. En causant, nous trouvons des suites de mots, des formules, des images rendant enfin l'inex- primable, l'en-dessous des choses, ce qui n'avait jamais pu être dit. Les désespérances, les grandes angoisses que l’on traînait partout comme le boulet des bagnes, sont incontestablement atténuées. Quant aux petits ennuis de la minute présente, aux petits agacements, ils n'existent plus... Par exemple, à travers les glaces de la galerie, quand nous aperce- vons, dans le lointain du palais de verre, un pâle fanal de mauvais aloi qui se promène, nous disons, sans que cela nous agite aucunement : — Tiens! encore des voleurs! Ils doivent pourtant nous voir. Demain il faudra songer à faire une battue! » Un médecin, doublé d'un psychologue, le D' Lau- rent, auteur d'une monographie où l'analyse la plus incisive s'allie à l'élégance du style, a rendu en termes excellents l'état du fumeur pendant celte période d’excitation : « [l pense à peine; les idées flottent très vagues, à peine reconnues par la con- science, si bien mème qu'il arrive que si, voulant graver dans l'esprit une idée qui vient de plaire, on fait effort pour la formuler une seconde fois, elle a disparu. On a presque la sensation de tableaux grisâtres, vagues, ondulant devant l'esprit qui n'a pas la force de s'apercevoir nettement de ses pen- sées". » A cetle phase de demi-conscience, succède un sommeil tardif, lourd et sans rêve. Au matin, rien ne subsiste du bel optimisme de la veille. Pour peu que la dose habituelle d'opium ait été dépassée, la tête est vide, la parole pâteuse, la mémoire incer- laine, les idées confuses, la täche quotidienne qu'il va falloir aborder inspire un dégoût insurmon- table. Souvent alors le fumeur aspire quelques bouffées d’opium pour se mettre d’aplomb, et aus- sitôt le poison donne un coup de fouel à ses facultés 1 Laurenr : Essai sur la psychologie et la physiologie du fumeur d'opium. Paris, J. André, 1897. D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM 29 engourdies, de même que l'alcooi redonne du ressort au buveur après une nuit d’orgie. Le fumeur d'occasion en est quitte pour un ma- laise bientôt dissipé. Tout le jour, il exécute sa besogne sans entrain, mais sans défaillance, si elle est facile et n'exige aucune initialive. Mais celui qui cultive la pipe glisse rapidement sur la pente falale. Vers le déclin du jour, le besoin de l'opium renait impérieux et demande à être satisfait sur l'heure. Ainsi s'installe, en quelques semaines, parfois même en quelques jours, une habilude tyrannique, d'autant plus difficile à déraciner que l'affaiblissement de la volonté est l'une des tares les plus précoces que l’opium inflige à ses adeptes. Pour retarder cette échéance prévue et redoutée, beaucoup de Chinois et d'Annamites de la classe aisée évitent de fumer à heure fixe; mais ceux qui ne sont pas doués d'une grande ferce de ca- ractère finissent par succomber à la tentation et, après une lutte plus ou moins longue, deviennent tout à fait incapables de résister aux attraits du poison. Un homme peut boire, chaque jour, toute la vie durant, une cerlaine quantité de vin sans deve- air alcoolique; mais le fumeur d'Extrème-Orient, comme le morphinomanñe, ne peut apaiser son besoin d'opium qu'en absorbant des doses de plus en plus élevées de poison. Heureusement la cherté de l’opium contraint la basse classe à une sobriété relative. Si l'opium était à bas prix, il causerait d’effroyables ravages, car beaucoup de Chinois et d'Annamites fument à peu près tout ce qu'ils gagnent. Quant à l'Européen, qui peut salisfaire sa passion sans compler, il aboutit à peu près sûre- ment à l'intoxication chronique. Dès lors, il est l’esclave de sa pipe, il ne vit que par elle et pour elle. Honneur, affections, carrière, tout est sacrifié à cette passion de plus en plus exigeante. Rien n'est plus navrant que de lire le journal d'un opio- mane, où il relate, jour par jour, son calvaire, ses minutes de lucidilé et de révolte contre l'opium, ses heures de lächeté et d'abdication ! Peu à peu, le fameur se désintéresse de tout ce qui n'est pas sa passion. Ses proches, ses amis re- marquent avec anxiélé les lacunes de sa mémoire, l'inexactitude de ses assertions, la faiblesse de son jugement, l'inégalité de son caractère, le relâche- ment de ses liens affectifs. Il n'est plus que l'ombre de lui-même et tombe dans une torpeur invincible, au milieu d'une conversation ou d'un repas, dès qu'il n’est plus sous l'influence du poison. J'ai connu en Indo-Chine un Européen, grand fumeur d'opium, qui en était arrivé au point de ne plus quitter son lit. Il vivait sans nul souci de sa personne, dans un laudis sordide et obscur où il n’admettait que le boy chargé de préparer sa pipe. Depuis plusieurs mois, il ne se nourrissait plus que de sucreries. En un tel état de misère physique et morale, comment un être sans volonté n'obéirait-il pas aux injonctions du besoin, alors que quelques pipes suffisent pour calmer ses tourments, apaiser ses remords et masquer momentanément sa dé- chéance‘? Vienne une circonslance imprévue qui prive le fumeur de son stimulant habituel, et celte misé- rable loque humaine, talonnée par le besoin, donne les signes d'une déséquilibration psychique com- plète. Maintes fois j'ai vu des porteurs et des mu- letiers dans cet élat de souffrance que les Chinois appellent le Guien. Si l'étape est plus longue que de coutume, ils donnent des marques visibles d’im- palience; assoiffés d'opium, ils hâtent le pas et arrivent à l'auberge tout haletants et ruisselants de sueur. Sans prendre le temps d'absorber aucune nourriture, ils se précipitent sur leur pipe et fament avec avidité. Brunet a bien traduit les angoisses des opiomanes en élat de jeûne: «Ils éprouvent, dit-il, le besoin de fumer d'une manière tellement irrésis- tible que c'est une monomanie impulsive analogue aux envies de la grossesse, avec celte aggravation qu'ils sont malades s'ils ne se satisfont immédiate- ment; ils bäillent, ils crachent, ont des bouffées de chaleur alternant avec des frissons, des crises de sueur, se sentent les yeux pleins de larmes, ne peuvent avaler une bouchée, sont envahis par une angoisse d'attente, un désir si violent qu'ils ne peu- vent supporter de retard, et, quelle que soit la gravité des circonstances, les nécessités du service ou de la fonction, il faut qu'ils se précipitent sur leur pipe; ils la préparent avec de tels trépigne- ments de joie impatiente que leurs mains en trem- blent, puis-ils la hument goulûment comme quel- qu'un qui allait étouffer et qui aspire enfin la bouffée d'air sauveur qui ramène à la vie”. » Un observateur exercé reconnait à première vue un fumeur d'habitude, de même quil discerne aisément un alcoolique. Mais, entre ces deux inloxi- qués, le contraste est frappant. Tandis que le bu- veur parle avec volubilité, se dépense en actes inutiles, gesticule et s'emporte, le fumeur d'opium { J'ai pu observer un Européen qui fumait, dans sa journée, jusqu'à 120 pipes d'opium. Le matin, à 1i heures, au sortir du bureau, il prenait un acompte de 20 pipes, puis il déjeunait. Le soir, à 6 heures, derechef 20 pipes, puis il dinait. Alors commencait une longue séance qui se pour- suivait pendant des heures, jusqu'à ce que le chiffre de 0 pipes fût atteint. Cet Européen était un agréable causeur il avait le travail facile et l'intelligence ouverte, mais il perdait toutes ces qualités quand il n’était plus stimulé par l'opium. En moins d'une année, il était devenu incapable de tout effort physique ou intellectuel. 2 E. Broner : Une avarie d'Extrême-Orient : la fumerie d'opium. Nécessité de l’éviter et possibilité de la guérir. — Mémoire présenté au Congrès colonial de Paris et publié dans le Bull. médical, 1903, n° 27, p. 315. 30 D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM est morne, silencieux, atone, avare de ses mouve- ments. Beaucoup de fumeurs ont un embonpoint rai- sonnable où même de la corpulence, mais ceux qui fument avec excès arrivent au dernier degré de la maigreur : ce sont de vrais squelettes ambulants. Leur visage est bouffi et d'une extrême päleur; leurs trails tirés expriment la tristesse et la souf- france ; leur regard, voilé par des paupières lourdes, tombantes el chassieuses, est sans expression, car ils sont étrangers au monde extérieur. Jour et auit, ils sont lorturés par une insomnie rebelle à tout traitement‘. Ils se plaignent de démangeai- sons, siégeant surtout au nez, aux lèvres, à la tête, aux parties génitales, mais beaucoup moins vives que celle des cocaïnomanes. La sensibilité de la peau, surlout à la douleur, est manifestement diminuée. La force musculaire va s'amoindrissant et le corps se couvre de sueurs profuses au plus léger effort. Les mouvements sont lents el incer- tains, la démarche hésitante. Aucune des grandes fonctions n’est épargnée. Le pouls et la respiration se ralentissent et deviennent arythmiques; la sé- crétion de la salive, de la bile et de l'urine dimi- nue. La vessie est paresseuse et se vide incom- plètement. La gorge est sèche, la soif ardenle, l'appétit nul, la langue chargée, la constipation opiniätre. Les forces viriles, malgré les visions éroliques que suscite le poison, déclinent rapide- ment. Cette lamentable agonie, aussi pénible pour l'entourage que pour le patient lui-même, peut êlre abrégée par une complication inlercur- rente. Sinon la vie se prolonge dans le gàtisme jusqu'au jour cù une diarrhée incoercible met fin à ce long martyre. Le fumeur invétéré n'est pas sujet, comme l'al- coolique, à de violentes crises d’excitation, et jamais il n’est nécessaire de l'interner. D'après les observalions concordantes des médecins aliénistes des Indes anglaises et néerlandaises, l'opium est rarement l’origine de maladies mentales. G. Ellis, directeur du Lunatic Asylum de Singapour, n'a pas encore vu un seul cas de folie imputable avec cer- titude à l'intoxication par la fumée d’opium *. Mais il n’est pas douteux que l’abus de ce poison entraine à la longue un affaiblissement du sens moral. Pour satisfaire sa passion ruineuse, le fumeur s’endette et plonge sa famille dans la mi- sère; réduit aux expédients, il a recours à des 1 D'après Laurent. chez les hystériques hypnotisables, l'opium, fumé mème à petite dose, empêche la réalisation de l'hypnose, peut-être parce que les sujets sont privés d'attention, conséquence de la faiblesse de la volonté. 2 À l'autopsie des opiomanes, on ne constate aucune modification appréciable des tissus ni des organes. combinaisons louches, à des actes délictueux, à l'escroquerie et au vol. On estime que la proportion des fumeurs d'opium dans les prisons de Singa- pour et de Hong-Kong est de 60 °/,. Les tares physiques, intellectuelles et morales de celui qui s’adonne à l'opium le rendent impropre à remplir une fonction publique. On ne saurait tolérer ce vice dégradant chez celui qui détient une parcelle de l'autorité; il ne possède plus l'énergie, la décision, le courage, la vigueur, toutes qualités requises pour exercer le commandement. Officier de quart, il peut, pendant une de ces éclipses de l'intelligence familières aux fumeurs, conduire un navire à sa perte; — administrateur colonial, il se laisse aller aux actes irréfléchis, aux exactions, aux abus de pouvoir; — magistrat, il trafique de la vie, de l'honneur et des biens de ceux auxquels il doit la justice. Le Gouvernement de l’Inde anglaise rejette, comme indignes de servir, les Européens convain- cus de fumer habituellement l'opium. En Indo- Chine, celte pernicieuse passion est fort répandue parmi la population blanche. « Nombreux sont ceux qui consomment au moins un kilog par mois, et mon opinion, dit Laurent, est que plus de la moitié des fonctionnaires ou commerçants euro- péens en Indo-Chine fument l’opium, ouvertement ou clandestinement”'. » Récemment, une circulaire du lieutenant-gouverneur de la Cochinchine rap- pelait au corps des administrateurs, en termes. comminatoires, l'interdiction de fumer. Au Tonkin, dit E. Martin, « le culte de la pipe s'est généralisé et dépasse promptement toule mesure... Quant à la pratique dans les rangs de l'armée française, elle s'y est malheureusement introduile malgré les obstacles que des règlements sévères lui suscitent, et elle y exerce des ravages. qu'on ne saurait trop déplorer * ». Une statistique établie récemment accuse 15 ?/, de fumeurs d'opium dans les régiments d'infan- terie coloniale, 20 °/, dans la Légion étrangère, 25°}, parmi les Européens détachés dans les régiments indigènes et 30 °/, parmi les soldats indigènes”. D'Indo-Chine et des stations d'Extrème-Orient, les troupes coloniales, les officiers et les équipages de la flotte ont importé en France la funeste habi- tude de fumer l'opium. Ils ont fait de nombreux prosélytes dans nos ports de guerre. A Toulon d'abord, puis à Brest, Lorient, Rochefort, Cher- bourg, des fumeries, en nombre relativement con- sidérable, se sont ouvertes où marins et soldats de tous grades s’adonnent aux voluptés de la pipe en 1 LAURENT : Essai sur la psychologie et la physiologie dw fumeur d'opium. Paris, J. André, 1897. 2 E. Mars : L'opium, ses abus, ete., 1893. 3 Courrier de Haïphong, 9 juin 1904. D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM 31 compagnie de demi-mondaines. Beaucoup d’aspi- rants, dès leur sortie de la frégate-école, s’enrôlent dans une fumerie. Justement ému des ravages causés par l'abus du dangereux narcolique, le Gouvernement étudie, à l'heure actuelle, les mesures à prendre pour en- rayer le fléau. L'état actuel de notre législation ne permet d’alteindre le fumeur d'opium qu'en pre- nant un détour. En vertu de la loi du 19 juillet 1845 et de l'ordonnance du 29 octobre 1846 sur les substances vénéneuses, sont punies de 100 à 3.000 francs d'amende et de six jours à deux mois de prison les personnes qui, sans y être autori- sées, vendent des toxiques. Des visites domici- liaires viennent d'être faites à Toulon. Ces opéra- tions ont été très fructueuses, car elles amenèrent la confiscation d'une quantité importante d'opium. Les détenteurs vont être poursuivis correction- nellement. Ces mesures seront-elles efficaces? on peut en douter. Le fumeur est fertile en expédients quand il s'agit de salisfaire son vice. Et, d’ail- leurs, beaucoup d'habitués de la pipe rapportent d'Extrème-Orient une ample provision de chandoo pour leur consommation personnelle. Du reste, la France n’est pas le seul pays où se soit introduite l'habitude de l’opium. On fume à Londres et dans les ports d'Angleterre. On fume à San Francisco et en Californie, où l'élément chinois est nombreux. Allen Williams, dans un ouvrage déjà ancien, estime qu'il y a près d’un million de fameurs d’opium aux États-Unis. Leur nombre paraît s'accroître à New-York et dans d’autres villes de l'Est aussi bien que de l'Ouest. Les statis- tiques du Bureau national montrent que la quan- lité d’opium importée aux États-Unis a passé, de 1870 à 1880, de 189.354 livres à 243.211 livres pour l’opium brut, et de 49.355 livres à 77.196 livres pour l’opium préparé, bien que le nombre des Chinois soit resté stationnaire, ou à peu près, depuis 1876. De l'opium brut, une certaine quan- tité est réexportée aux Indes Occidentales; la plus grande partie de l'opium préparé est consommée à San Francisco. Il existe de nombreuses fumeries dans toutes les grandes villes d'Amérique, et même à New-York, bien qu'une loi de cet État interdise l'ouverture de ces établissements. En 1883, le Gouvernement a élevé le droit d'entrée de 6 à 10 dollars par livre sur l’opium préparé, ce qui n'a pas empêché l'importation d'atteindre 66.232 livres. Malgré la hausse formidable de l'opium brut, dont le prix a presque doublé en un an (12 fr. 50 en 1586, 23 francs en 1887), le stock importé atlei- gnait, à cette date, 568.263 livres ‘. . ! L'opium n'a pas eu que des détracteurs. Au dire des indigènes, et quelques médecins européens partagent cette L'opium est nuisible à l'individu, à la race, à la société. Il a, de plus, des conséquences économiques fort graves, car la satisfaction de ce besoin factice coûte fort cher. En Indo-Chine, d'après E. Martin, «la dépense journalière d’un fumeur de la classe riche peut atteindre 10 à 12 francs : les coolies ne dépassent guère 0 fr. 75, en mauvais opium, bien entendu ». Ce dernier chiffre peut paraître bien minime. Il est, au contraire, très élevé, eu égard au salaire moyen des indigènes. Beaucoup ne consacrent pas plus de 4 ou 5 sous par jour, et même moins, à leur nourriture ‘. On voit par cet exemple combien l'usage de l'opium grève lourdement le budget de la classe pauvre. En réalité, ce vice arrive à tripler ou quadrupler le prix de l'existence, ce que ne fait pas l'alcool en Occident. Les gages d’un boy ordi- naire sont de 8 piastres, soit 20 francs par mois, somme à peine suffisante pour payer sa consom- mation en opium; aussi ne se fait-il pas faute de voler son mailre. Beaucoup d'Annamites et de Chinois ne se résignent au dur mélier de piroguier ou de porteur de chaise que pour avoir de quoi se procurer de l’opium. Et, comme la plupart ne peuvent faire une telle dépense, ils fument de opinion, les fumeurs seraient à l'abri du paludisme, de la diarrhée et de la dysenterie. Un observateur qui a vécu longtemps en Extrème-Orient, le D' Laurent, arrive à cette conclusion, surprenante autant qu'inattendue, que l'opium, chez les neurasthéniques, amènerait une véritable tonifica- tion mentale : « Ils y trouvent Ja tranquillité, l'absence de préoccupations continuelles, la force de faire leur travail, un état meilleur en un mot, ce qui compense pour eux les inconvénients d'une habitude chronique. Chaque séance d'opium les ramène pour quelques heures à la vie normale: ils sont devenus des intoxiqués, mais ne sont plus des neurasthéniques. Ils ont, en somme, changé leur dépres- sion, leur fatigue continuelle, pour l'état intermittent de besoin qui ressemble tant à une crise aiguë de neuras- thénie. Il nous semble, suivant en cela leur propre opinion, qu'ils n'ont pas perdu au change, au moins pour le moment présent; nous faisons toute réserve pour l'avenir, bien que nous ne sachions trop si celui d'un fumeur doit paraitre plus sérieux que celui d'un neurasthénique atteint grave- ment ». (L. LAURENT : Bull. de l'Institut général psycholo- gique, 1903.) — Parmi ceux qui essaient de disculper l'opium d'une partie des accusations portées contre lui, il n'y à pas que des négociants intéressés à la prospérité de ce com- merce. Des hommes dont la parole a beaucoup de poids ontplaidé les circonstances atténuantes en faveur de l'opium. Sir John Strachey, lieutenant-gouverneur de la Présidence de Bombay, écrit dans l’/Znde (traduction J. Harmand, 1892 « L'opium absorbé avec excès peut produire sans doute des effets tout aussi pernicieux que la consommation excessive d'alcool: mais il ne peut pas faire plus de mal que l'alcool à ceux qui en abusent, et il est certainement moins dan- gereux pour leur entourage. Fumé avec modération, suivant la pratique de la grande majorité des Chinois, il n'existe aucune raison de croire que l'opium soit pernicieux. » Ce n'est pas l'usage, c'est l'abus qui est nuisible. Je n'y contre- dis pas, mais l’un ne mène-t-il pas infailliblement à l'autre? 1 Cette estimation, exacte il y a quelques années (1899- 1900), est peut-être trop faible aujourd'hui, par suite de la hausse des denrées dans les régions traversées par les che- mins de fer. 32 D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM l'opium de contrebande et mal préparé, ou le dross, très chargé en morphine, et partant très toxique. Au Yunnan, où le prix de la main-d'œuvre est à peu près le même qu'en Indo-Chine, la pipe d'opium revient, d'après mon évaluation person- nelle, à moins de 1 centime. Ce chiffre est beau- coup plus faible qu'en Indo-Chine, où les droits sur l'opium sont très élevés; néanmoins, pour le fu- meur moyen, qui se contente de 40 pipes, cela fait une somme de 0 fr. 40 par jour, et de 12 francs par mois. Dans des agglomérations très pauvres, telles que la chrétienté de Pin Kio, un fumeur ordinaire dépense 150 sapèques par jour pour son opium; or, un ouvrier gagne au plus 40 à 50 sapèques; aussi est-il rapidement réduit à la misère. Pour les colonies européennes d'Extrême-Orient, l'opium mis en ferme ou en régie est une source importante de revenu, qui s'accroit d'année en année. Cet impôt de consommation à rapporté, en Indo-Chine, 8 millions de francs en 1887, et 14 mil- lions en 1904, sur un budget de près de 77 millions. En 1899, il a été fabriqué à la bouillerie de Saïgon environ 110.000 kilogs de chandoo®. La progression est régulière : en 1900, 106.989 kilogs; en 1901, 113.901 kilogs; en 1902, 112.731 kilogs; en 1903, 129.740 kilogs. En 190%, la quantité consommée est tombée à 110.626 kilogs. Ce fléchissement est dû à une crise économique passagère, causée par une série de fléaux : récolte médiocre, typhon, inondations, etc. *. L’opium est mis à la portée des consommateurs par des débitants asiatiques qui paient une licence. Il est impossible d'évaluer la quantilé d'opium que la contrebande introduit en fraude dans la colonie. Dans l'Inde anglaise, les droits prélevés sur l'opium, en 1881, ont été de 10.480.51 livres sterling (262.001.025 francs). En 1882-1883, l'Inde a ex- porté en Chine et dans d'autres pays un total de 91.998 caisses d’opium d’une valeur de 287.034.400 francs. Après l'impôt sur la-terre (Zand Revenue), l’opium est la source la plus importante de receltes pour le budget de l'Inde.Il a rapporté, en 1888-89, 245 millions de francs‘. Telle est la redevance 4 L'opium de qualité supérieure, dit de Bénarès, est acheté par l'Administration au prix de 19 piastres le kilog, et vendu au consommateur 68 piastres après sa transfor- mation en chandoo. En évaluant la piastre à 2 fr. 50, valeur qu'elle avait en 1900, cela met le kilog d'opium préparé à 170 francs. En comptant 4.000 pipes de 25 centigrammes au kilog, on trouve que la pipe revient à 0 fr. 042, soit un peu plus de 4 centimes. 2 P. Mrrce et L. LEFEBYRE : Chine. Saigon, 1906. Sir). STRACHEY : p. $2. Note sur l'opium en Indo- L'Inde, trad. par J. Harmand, 1892, annuelle que la Chine paie aux Anglais depuis le traité de Nangkin, car presque tout le stock indien est importé en Chine. Une autre conséquence indirecte, mais désas- treuse, de l'abus de l'opium, c'est la famine. Depuis 1870, l'opium persan a été exporté en grande quantité de Bouchir et de Bender-Abbas, ports situés sur le golfe Persique, à destination de Londres, des Établissements du Détroit et de la Chine. À cette date, la production annuelle ne dé- passait pas 2.600 caisses; mais la culture du pavot, étant très rémunératrice, fut substituée à celle des céréales et du coton. Il en résulta une grande famine en 1871-1872. Malgré cette leçon, la culture du pavot s'étend tous les jours, surtout dans la région d'Ispahan qui est riche en cours d'eau, tandis que le Yezd en est dépourvu. Autour de Chiraz, Beh-heban et Kermanshah, les champs de pavot s'étendent sur une très vaste superficie, ce qui fait monter le prix des céréales. De 1859 à 1877, la production de l'opium persan a passé de 300 caisses à 7.700, dont les cinq sixièmes environ se rendent au marché chinois. Autrefois, dans l'Empire du Milieu, la province du Chen-si produisait 30 °/, de l'opium indigène: mais la famine qui suivit l'abandon de la culture des céréales contraignit le Gouvernement chinois à in- terdire l'extension de la culture du pavot dans le Chen-si, le Ho-nan, et le Chi-li. Toutefois, malgré les édits, il n'est pas douteux que les quatre cin- quièmes de l'opium consommé en Chine sont indi- gènes. é Dans l'Inde anglaise, mêmes erreurs économiques et mêmes suites fâcheuses. Sur les territoires de la Couronne, dans les Agences de Behar et de Bénarès, souvent le Gouvernement fait des avances en argent aux indigènes pour encourager la culture du pavot. A Malwa, l'opium rapporte trois à sept fois plus que le froment ou les autres céréales, et, sur des lerrains exceptionnellement favorables, jusqu'à douze et même vingt fois plus que le blé. C'est une des causes principales de ces famines périodiques qui désolent l'Inde et font des millions de vic- times. En 1875, 1.500.000 Hindous moururent de faim dans l'Orizza, les céréales ayant cédé la place au pavot. En 1868, 1.200.000 indigènes dans le Radj- poutana succombèrent, parce que les districts voisins de Malwa n'étaient plus approvisionnés en grains. En 1874, lord Northbrook eut à nourrir 4 mil- lions de faméliques au Bengale durant quatre mois, ce qui coûta 6 millions de livres sterling, parce que, sur des milliers d’acres, le pavot avait supplanté le blé. PR PT PP PS LE D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM 33 V.— LA LUTTE CONTRE L'OPIUM. Abrutissement et sénilité précoce pour lindi- vidu, misère et déshonneur pour la famille, dimi- nution de la natalilé et abâtardissement pour la race, élévation du taux des crimes et délits pour la société, appauvrissement de la fortune publique et famines pour l'Etat, telles sont les conséquences de l'opium, péril social qui ne le cède guère à l'alcool. Les moralistes et les philanthropes chinois ont essayé d'arrêter le fléau contre lequel les édits les plus sévères se sont montrés impuissants. [ls ont complètement échoué. En Chine, on a utilisé la propagande par l’image contre l'opium, comme on l'a fait en Occident contre l'alcool. Des estampes, des albums représentant les étapes successives de la vie du fumeur d'opium ont été répandus. « Sur la première planche, un personnage, qu'à ses vêle- ments somptueux on devine être de noble extrac- tion, est élendu parmi des coussins. À la page suivante, les yeux du fumeur sont devenus caves, sa main à maigri, quelques meubles ont disparu. Plus loin, on le voit en fureur, battant sa femme, pendant qu'à l'arrière-plan des coolies achèvent de disperser le mobilier. Enfin, l'homme est couché sur un grabat. Ses vêtements se sont effilochés, laissant paraitre les membres étiques. Son cou misérable et noueux supporte à peine sa tête vacil- lante, et ses moustaches mal soignées pendent sordidement sur sa bouche. Il meurt enfin, ruiné, dans l'ombre et la solitude”. » Ces publications n'ont donné aucun résultat appréciable ?. Seuls, les Japonais ont fait l'effort nécessaire pour se préserver du fléau.Devantl'imminence du danger, ils n’ont pas hésité à recourir aux moyens extrêmes. Des peines d'une sévérilé draconienne (les tra- vaux forcés à temps et de fortes amendes) sont appliquées aux délinquants, et par ce moyen ils ont réussi à enrayer le mal dès sa naissance. Ils sont même parvenus, dit-on, à extirper la perni- cieuse habitude de Formose, leur colonie. Actuellement, parmi les Etats d'Europe, d'Amé- ! BIENVENU : La Médecine internationale illustrée, 1904. 3 Le Code malgache, promulgué le 29 mars 1881, formule les défenses et les pénalités suivantes : « Le pavot (dont on extrait l'opium) ne doit pas être cul- tivé sur la terre de Madagascar; ceux qui cultiveront cette plante seront punis d'une amende de cent piastres, et leurs cultures de pavots seront détruites: s'ils ne peuvent effec- tuer le versement de l'amende, les délinquants seront mis aux fers à raison d'un sikajy par jour jusqu'à concurrence du montant de sa valeur. » (Code malgache des 303 articles, article 181.) En admettant, ce qui est douteux, que cet article ait jamais été appliqué, on peut se demander s'il est resté en vigueur » depuis l'occupation francaise et l'introduction de la main- d'œuvre chinoise. Du reste, il est bon de remarquer que cet article ne défend pas d'introduire de l'opium à Madagascar, mais seulement d'y cultiver le pavot. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. rique et d'Océanie, un mouvement général se des- sine contre l’opium. Les blancs se sentent menacés, car le mal prend racine chez eux. Et d'ailleurs, ils commencent à comprendre que c’est un bien mau- vais calcul, — pour élevée que soit la redevance qu'ils tirent de l'opium, — de favoriser la dégéné- rescence des races indigènes, les seules capables de fournir la main-d'œuvre dans les colonies situées sous les (ropiques. Le Gouvernement français s'émeut, non sans raison, des progrès que fait l'opium dans nos ports de guerre et s'apprête à sévir. Les États-Unis vont organiser la lutte aux Philip- pines. La Commission qui a été instituée à cet effet propose d'établir les mesures suivantes : La vente de l'opium serait le monopole de l’État. Dans trois ans, son importation serait absolument in- ‘lerdite, sauf pour les usages médicaux. Les en- fants apprendront à l'école combien l'opium est malfaisant. Dès à présent, seuls les fumeurs no- toirement connus et âgés de plus de vingt et un ans pourront obtenir l'autorisation de se procurer de l’opium. Pour éviter toute fraude, ils seront tenus de s'adresser toujours au même dépôt, auquel ils devront fournir leur licence accompagnée de leur photographie. Les fumeurs qui manifesteront le désir de renoncer à l'opium seront traités gralui- tement dans les hôpitaux gouvernementaux. Les fumeurs incorrigibles seront punis, ou même bannis. Enfin, mesure radicale, tout Chinois con- vaincu de faire le trafic secret de l’opium sera ren- voyé dans son pays aux frais du Gouvernement. Les fumeries, qui font de nombreusesrecrues, seront fermées. En Australie, la campagne contre l'opium, qui avait pris naissance dans les États de Victoria, de la Nouvelle-Galles du Sud et de l'Australie méridio- nale, est arrivée à ses fins, et le Gouvernement fédéral vient d'interdire la vente de ce produit, sauf quand il est destiné à la préparation des médicaments. Le Transvaal a été plus loin dans cette voie. L'imporlation de l'opium, même pour les usages médicaux, est prohibée, sauf le cas d'une autorisa- tion spéciale pour une quantilé déterminée. En Angleterre, deux tendances opposées se dessinent. Le Friend of China, organe de l’Asso- ciation pour la suppression du commerce de l'opium, envisage la question au point de vue con- fessionnel. Avant tout, l'opium est un vice qu'il faut exterminer parce qu'il rend stérile l’œuvre de l'évangélisation. On ne peut, dit-il, accomplir une telle œuvre, en tenant d'une main la Bible et de l'autre l'image de Mammon‘. Il semble que de tels ! Mammon, dieu des richesses chez les Syriens. — 1 34 D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM arguments ne peuvent que nuire à la cause. Cepen- dant, à l'instigalion de celte Société, dès 1891, la Chambre des Communes se prononçait, en prin- cipe, contre le trafic de l'opium. En 1893, Gladstone instituait une Commission d'enquête chargée d'étudier la question sous tous ses aspects. Après avoir entendu un grand nombre de témoins : hindous, chinois et européens, celte Commission conclut que l'Inde anglaise ne saurait se passer du revenu fiscal de l’opium, ni défendre radicalement la cullure du pavot. Mais le parti adverse ne se tient pas pour battu, et, à l'heure actuelle, la campagne contre l’opium reprend plus àpre que jamais. Trois cent vingt membres du Parlement anglais seraient, dit-on, disposés à voler la suppression de l'exportation de l'opium de l'Inde en Chine. Dans une réunion ayant pour but d'appuyer cetle motion, le D' J.-L. Max- well, président du Comité consultatif des Sociétés anglaises contre l'abus de l’opium, a élé jusqu'à dire : « L'Angleterre est le seul pays du monde qui favorise l’abominable et dégradant commerce de l’'opium. » Dans cette même réunion, lord Kinnaird a rappelé les ravages causés par l’opiomanie parmi les Chinois. Les nations ont toujours payé leurs torts, ajouta l’orateur, et, durant le règne de la reine Victoria, pas une heure ne s’est écoulée sans qu’une {onne d’opium ait été exportée de l'Inde en Chine. Le D' R.-E. Horton, tout en reconnaissant le préjudice que la suppression du commerce de l'opium porterait au budget de l'Inde, est d’avis que ce sacrifice s'impose pour le bon renom de l'Angleterre. Cette campagne bruyante, plutôt qu'agissante, n'aura pas d'effet utile tant qu'elle se bornera à signaler les méfaits de l’opium, sans indiquer les moyens de combler le déficit qui résulterait de la disparition d’une des branches les plus importantes du trafic indien. Il ne faut pas oublier que l'Inde britannique consomme peu d’opium et exporte presque tout le stock qu'elle produit. Toutefois, le sacrifice serait aujourd'hui moins lourd qu'il y à dix ans. Lorsque la Commission d’enquête dépo- sait son rapport, en 1895, le revenu de l'opium représentait 14 °/, des ressources budgétaires totales de l'Inde; actuellement, ce revenu est des- cendu à la proportion de 7 °/,. Depuis 1888-1889, les droits perçus annuellement sur l’'opium sont tombés de 215 millions de francs à 75 millions. La Commission anglaise d'enquête était d'avis que « l'interdiction de l'usage de l’opium en Chine était une mesure qui devait être laissée à l'inilia- tive du Gouvernement chinois, mesure à laquelle, « Vous ne pouvez obéir à Dieu et à Mammon ». (Saint- Matthieu). l d’ailleurs, se prêtent les conventions internatio- nales ». La Chine, la principale intéressée, a enfin entendu cet appel et manifeste la volonté d'’inter- venir dans le débat. Au mois de janvier 1906, qualre vice-rois, placés à la tête d’une population de 180 millions d'habilants, affirmaient que le quart de leurs administrés étaient réduits à l’état squelettique par l'abus de l’opium. Comme remède, ils proposaient de réduire simultanément, et dans les mêmes proportions, l'importation indienne de l’'opium et la culture du pavot sur le sol chinois. Mais, pendant qu'on discutait ces demi-mesures, l’idée de la prohibition faisait du chemin, et un édit de l’empereur de Chine vient d'interdire l'usage de l’opium à compler d’un délai de dix ans. Puisse ce texte législatif ne pas rester lettre morte! L’Angleterre ne fera pas obstacle à cette réforme, à en juger par les affirmations de son ministre, M. Morley : « Si la Chine a réellement l'intention de combattre l'usage de l’opium, a-t-il dit, le Gouver- nement anglais est tout disposé à lui prêter son concours, dût-il même en résulter un sacrifice d'argent pour le budget de l'Inde anglaise ». De son côté, la Chine doit fournir la preuve de sa sin- cérité, en proscrivant chez elle la culture du pavot. L'agitation qui se fait en divers pays, autour de la question de l’opium, montre que l'humanité est consciente du danger. Toutefois, il faut le recon- naître, aucune entente internationale des Puissances pour lutter contre l'ennemi commun n'est à espé- rer; elles continueront à disperser leurs efforts, telle protégeant la métropole, et telle autre ses colo- nies, suivant que leur intérêt particulier l'exige: elles ne peuvent s'avancer dans la voie des ré- formes qu'avec une extrême circonspection, tou- jours arrêtées dans leur élan généreux par l'arrière- pensée de ne pas détruire l'équilibre de leur budget. Chaque État doit donc étudier le problème à son point de vue personnel et le résoudre au mieux de ses intérêts. Que pourrait faire la France, sans porter préjudice au régime économique de ses pos- sessions? La régie de l'opium en Indo-Chine est une source de gros revenus, dont la colonie ne sau- rait se passer. Et d'ailleurs l'habitude de fumer est si fort enracinée, non seulement parmi les Chinois, mais aussi parmi les indigènes annamites, laotienset cambodgiens, que les peines les plus sévères seraient de nul effet. Comment tenir la main à ce qu'elles soient appliquées, alors que, sur 20 millions d'habi- tants, un tiers, peut-être, fume l’opium? La ferme- ture de la bouillerie de Saïgon n'aurait pas d'autre effet que de détourner au profil de la contrebande les sommes qui sont actuellement versées dans la caisse de la colonie. Donc, ce que l’on peut tenter, ce n'est pas de D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM Ce De © détruire la passion de l'opium chez les indigènes, c'est de la contenir en organisant dans les écoles l’enseignement antiopiacé, à l'instar de l'enseigne- ment antialcoolique, et en écartant des places rétri- buées par la colonie ou les municipalités les indi- gènes fumeurs d'opium avérés. Mais on ne peut sévir avec trop d'énergie contre les fonctionnaires européens, civils ou militaires, qui s'adonnent à l'opium. Par une série de peines graduées : l'avertissement, le blâme, l'absence de tout avancement, la suspension, la mise à la retraite d'office et même la révocation, il faut rendre à l'élément dirigeant la dignité sans laquelle il ne peut avoir d’ascendant sur l’irdigène. Dans la métropole, la fermeture des fumeries publiques ou clandestines s'impose. Les vendeurs et détenteurs d'opium de pipe, quels qu'ils soient, doivent être condamnés à de forles amendes, à la prison, et à la confiscation du produit prohibé. Si les lois existantes ne permettent pas d'atteindre le but, le Gouvernement peut s'adresser aux Cham- bres : elles ne lui refuseront pas les armes néces- saires pour combattre un fléau, encore à l'état naissant, mais qui menace d'infliger à notre ma- rine et à nos troupes coloniales une tare avilis- sante. VI. — LA CURE DU FUMEUR D'OPIUM. Le fumeur peut-il, sans danger, être soumis à l’abstinence de l’opium ? Evidemment, les intéressés soutiennent que non, mais ils sont mauvais juges. En cas de privation brusque et prolongée, chez les prisonniers par exemple, les angoisses et les tor- tures du Guien sont parfois si violentes que la mort peut s’ensuivre. Mais cette terminaison est assez rare ; la plupart des détenus, après une période très pénible, mais courte, reprennent de la fraicheur, de l'embonpoint et du poids. Il est donc possible de traiter le fumeur d'opium. Deux procédés de cure sont usités. Les Chinois conseillent la désintoxication lente, la diminution graduelle de la ration journalière. [ls donnent aux fumeurs qui veulent se déshabituer de la pipe des pilules à base de chandoo contenant une dose d’opium de plus en plus minime, À leur exemple, les missionnaires d’Indo-Chine emploient de l'extrait thébaïque ou du laudanum pour traiter les fumeurs. Celte méthode, peu douloureuse et très simple, a l'avantage de ne pas exiger l’inter- nement des malades dans une maison de santé; mais elle est défectueuse. En réalité, elle ne sup- prime pas l'appétit pour l’opium; elle substitue à l'intoxication par la voie pulmonaire, l’inloxica- tion par la voie digestive. E. Martin, qui a étudié à fond la question, a bien montré le peu d'efficacité de cette méthode. Depuis quelques années, dit-il”, des médecins anglais prescrivent aux Chinois fu- meurs d'opium, pour les soustraire à la tyrannie de la pipe, des granules contenant 3 à 4 milligrammes de morphine; il en faut 20 pour équivaloir à 40 pipes, ralion ordinaire du fumeur chinois. Pris en nombre décroissant, ces granules ont donné quelques succès. Ils eurent bientôt une grande vogue. Fournis en gros par une maison de Londres, ils devinrent l’objet d'un trafic important. Délivrés, au début, sur ordonnance par le pharmacien, ils furent consi- dérés, dans la suite, comme un simple article de commerce que chacun put débiter. Dès lors, dans toutes les villes, des boutiques s’ouvrirent pour vendre cette spécialité et réalisèrent en peu de temps des bénéfices considérables. Les granules furent préférés à. la pipe, parce qu'ils n’entravent pas les occupalions journalières et n’exigent pas la posilion couchée; du reste, les consommateurs s’aperçurent rapidement qu'ils faisaient des éco- nomies surprenantes. Tandis que leur dépense quotidienne en chandoo de Patna ou de Bénarès était auparavant d’un dollar, ils obtenaient à pré- sent, grâce aux granules, le même effet, pour une somme dix fois moindre. Toujours sous le prétexte apparent de guérir les fumeurs d'opium, la pratique des injections de morphine s'est répandue à Shangaï, d'où elle a été: importée à Hong-Kong. Actuellement, continue E. Martin, plus de vingt maisons de commerce vendent des injections. Chaque établissement a, en moyenne, cinquante clients qui s'y rendent matin el soir. Ce quia rendu la piqûre de morphine extrêmement populaire parmi les Chinois, c'est qu'elle est moins onéreuse que la pipe (elle ne coûte que dix centimes), c’est aussi qu'elle procure instantanément le bien-être, sans nécessiter de perte de temps et sans imposer la promiscuilé de la fumerie d’opium. Le Conseil: législatif de Hong-Kong, pour arrêter les progrès de la morphinomanie, beaucoup plus pernicieuse que l'usage de la pipe, a rendu une ordonnance inter- disant de faire des injections aux coolies ou de leur administrer de la morphine par toute autre voie. La question est donc jugée : la méthode lente est à rejeter. Deus les exemples que je viens de rap- porter, elle a eu pour effet de remplacer une intoxi- cation légère par une intoxication massive et per- fectionnée. Elle a certainement aggravé lasituation, car mieux vaut fumer 40 pipes, qui ne contiennent que des traces de morphine, que d'introduire dans l'organisme, chaque jour, 6 à 8 centigrammes par 1 E. Mar : Les abus de l'opium, inorphinomanie, opio- phagie, fumage. Revue scientifique; 1892, [, p. 75. — Du même : La Morphinomanié en Chine. Journ. d'Hygiène; 1896; t. XXI, p. 290. 36 D' E. JEANSELME — MANGEURS ET FUMEURS D'OPIUM ingestion ou 4 centigrammes par voie hypoder- mique. Mais, alors même que la méthode indiquée serait rationnellement appliquée, elle n'alteindrait pas le but, parce qu'elle entretient le goût de l’opium chez le patient. « On arrive à obtenir qu'il fume moins; on n'a pas arraché son désir de recommencer à la première occasion, et tout est là. Le malade n'est pas dégoûté de son toxique, parce qu'il en subit encore un peu l'influence » (Brunet). La méthode brusque, calquée sur la cure de démorphinisation, est le procédé de choix. Il faut d'abord, par un examen complet du malade, s’as- surer que les organes sont en bon état, le cœur en particulier, car la tendance à la syncope est fré- quente pendant la crise provoquée par l’abstinence. La cure ne se fera pas à domicile, mais dans une maison de santé ou dans un local convenablement aménagé, pour éviler toute supercherie de la part du malade et pour le soustraire à son entourage habi- tuel et à ses souvenirs. Une personne sûre, agréée par le malade et le médecin, sera chargée de sur- veiller, d'assister et de réconforter le patient pen- dant la rude épreuve. Le sevrage brusque et absolu déchaîne une crise très pénible. Pendant la période critique, qui dure cinq à sept jours, le médecin doit rester presque en permanence au chevet du malade, pour parer aux évenlualités. L'insomnie rebelle, les névralgies et les crampes sont calmées par les bains chauds, le bromure, le chloral, donnés le soir, aux heures où le malade avait l'habitude de fumer. À la rigueur, quand les souffrances sont intolérables, quelques piqûres de morphine faites à l'insu du malade amènent un repos relatif. Si le cœur fléchit, il faut recourir aux injections de caféine où d'huile camphrée. Si la dépression ner- veuse est extrême, une ou deux pilules de 5 centi- | grammes d'extrait de chanvre indien procurent un grand soulagement. Quand les vomissements bilieux diminuent et que la débâcle insteslinale s'est produite, il faut relever les forces du conva- lescent par des toniques. Avant la reprise des occupations habituelles, le massage, les bains, la promenade, les exercices physiques, la vie au grand air, le voyage sous la garde d’un ami sûr, sont d'excellents adjuvants pour consolider la guérison. L'individu nouvelle- ment sevré doit, s'il le peut, changer de domicile. En tout cas, on ne l’autorisera à retourner chez lui qu'après une minulieuse inspection des lieux, et après avoir fait disparaitre tous les objets qui, en lombant sous les yeux du convalescent, pour- raient raviver sa passion pour l’opium*. Voici donc le fumeur sevré. Est-il désormais à l'abri des rechutes? En aucune facon. Qui a fumé, fumera. Il subsiste, après guérison, un amoindris- sement permanent de la volonté, qui nécessile la surveillance discrète de l’ex-fumeur par une per- sonne de confiance. D'ailleurs, les névrosés, les dégénérés s’adonnent volontiers à plusieurs intoxi- cations, passant de l'opium à la cocaïne, de la cocaïne à l’éther ou à l'alcool. Celui qui a subi le joug de l’opium fera bien de renoncer à la vie colo- niale. S'il reste dans ce milieu, s'il renoue ses anciennes relalions, les occasions sont trop multi- pliées pour qu'il ne succombe pas un jour ou l’autre à la tentation de fumer. D' E. Jeanselme, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. ! F. BRuNET : Progrès médical, 22 juin 1901, et Bull. médical, 1903, n° 27. tetes BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 37 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Correspondance d'Hermiteet de Stieltjes, publiée par les soins de MM. Baïllaud (B.), Doyen honoraire de la Faculté des Sciences, Directeur de l'Observatoire de Toulouse, et Bourget (H.), Maître de conférences à l'Université, Astronome adjoint à l'Observatoire de Toulouse, avec une préface de M. Euice Picarn, membre de l'Institut. — Tome I°* (S novembre 1882, 22 juillet 4889). Tome II (48 octobre 1889-15 décembre 4894). 2 vol. gr. in-8° de xx-4#77 p., et vi-46% p. Le volume :46 fr. Gauthier- Villars, editeur. Paris, 1906. « On ne se doute pas, écrivait Galois, que le livre le plus précieux du plus savant serait celui où il dirait tout ce qu'il ne sait pas; on ne se doute pas qu'un auteur ne nuit jamais tant à ses lecteurs que quand il dissimule une difficulté. Quand la concurrence ne régnera plus dans les sciences, on s'empresser…a de publier les moindres observations, pour peu qu'elles soient nou- velles, en ajoutant: je ne sais pas le reste.» Ün livre où règne d'un bout à l'autre cette franchise que demandait Galois, et où les deux géomètres illustres dont on a réuni la correspondance se disent l'un à l’autre : voilà ce que J'ai cherché, comment j'ai tâätonné, ce que j'ai trouvé et comment je l'ai trouvé, le point où Je me suis heurté sans pouvoir aller plus loin, l'espoir trouble que j'ai senti, l'obstacle qui m'a arrêté, la lumière qui m'est apparue, telle est cette correspondance entre Hermite et Stieltjes que nous donnent MM. Baïllaud et Bourget. Que de sujets y sont traités, eftleurés, approfondis! Voici divers points de la théorie des nombres, élémen- taires ou élevés, les formes quadratiques, quelques pro- priétés cachées des déterminants, les fractions con- tinues et leurs généralisations dans divers sens, la fonction € de Riemann, les fonctions eulériennes, les fonctions sphériques et leurs racines, les fonctions ellip- tiques, la théorie de la transformation pour ces fonc- tions, de belles applications des théories de Cauchy sur les intégrales prises le long d’un contour, de la méthode de Laplace pour la recherche des valeurs approchées des intégrales définies, la formule de Stürling, des études profondes sur diverses formules asympto- tiques, des points importants de la théorie générale des fonctions, des rapprochements inattendus entre ces sujets si différents. La matière est admirable, la façon dont elle est ouvrée est plus admirable encore : on s'arrèle devant ces deux artistes avec l’émerveillement d’un enfant, immobile devant la fenêtre où travaille un bon ouvrier, et tout ébahi de ce qui se passe sous ses yeux, de la facilité avec laquelle le travails’accomplit. Ce qui frappe tout d'abord peut-être, c'est la passion que ces deux bons ouvriers apportent àleur besogne : ils l'aiment vraiment, et ils jouissent des efforts qu'ils font ; ils sentent la beauté, non seulement de ce qui étonne, de ce qui est nouveau, mais des choses prochaines et fami- lières qui jamais, pour eux, ne se fanent et ne se défrai- chissent. Tous les deux ont un sens profond de l’obser- vation, qu'ils regardent comme la vraie source de la découverte; ni l’un ni l’autre ne prétendaient construire. Stieltjes, formé par la dure discipline des astronomes, était rompu au calcul numérique; sa patience, sa sûreté n'étonnent pas moins que la sagacité avec laquelle il sait reconnaitre, dans les tableaux de nombres, les pro- priétés des fonctions, que l'élégance ou la profondeur des démonstrations par lesquelles il établit ces pro- priétés. Hermite, mystique et réaliste‘, était persuadé .* Cest un trait sur lequel M. Darboux à appuyé, dans l'excellent portrait qu'il a donné de l'illustre géomètre. que les êtres mathématiques, ont tout autant de réalité que les êtres matériels. Il y a dans leur cor- respondance, sur la facon dont ils comprennent et sentent les Mathématiques, des pages admirables. Et combien la prose d'Hermite est savoureuse! Ceux qui l'ont connu le retrouvent là tout entier et bien vivant, avec ses formes polies et un peu cérémonieuses, son désir de plaire à celui qu'il entretient et d'en faire ressortir le mérite, ses images amusantes et familières, ses citations latines, son mélange de pessimisme et de gaité, sa foi profonde, qui se trahit par un mot, une courte phrase, qui ne s'étale jamais et respecte toujours la pensée d'autrui, sa façon délicate de servir et d'offrir, la chaleur de son affection, son souci de payer à cha- cun ce qui lui est dù et au delà, son entier désintéresse- ment. Il n'y manque guère que la malice, qui n’était pas petite; mais je crois bien qu'elle n’est pas absente de la correspondance et qu'on la trouverait dans les lignes de points que MM. Baillaud et Bourget ont sub- sutuées à quelques passages des lettres. Quel noble exemple aussi que la courte vie de Stieltjes! Il est miné par la maladie; les admirateurs qu'il a à l'Institut, Hermite en tète, lui ont procuré, par des prix, que justifiaient amplement ses travaux, le moyen de passer ses derniers hivers en Algérie. Il travaille Jusqu'au bout : nul découragement; un peu de tris- tesse seulement devant son œuvre interrompue, devant les choses qu'il ne fera pas. Quelle dignité devant la fin prochaine, inévitable! Et quelle modestie, lorsqu'il parle de son admirable Mémoire sur les fractions con- tinues! « Mais, Monsieur, je viens de m'apercevoir que mon Mémoire doit avoir certains rapports avec la question de Physique mathématique traitée dernièrement par M. Poincaré. Dès lors, je crois que mon travail peut avoir un intérêt pour lui et il me semblerait alors na- turel que ce soit lui qui fasse un rapport qui, du reste, pourrait être bien court; après tout, mon travail n’a pas l'importance que vous y attachez ; Je crois que tout l'intérêt en consiste en ce que j'ai complètement traité un sujet un peu limité. Et enfin, c'est bien ce que j'ai fait de mieux et je ne serai plus capable d'un tel effort. C'est aussi un travail qui est bien conforme à mon tem- pérament; cela dénote une persévérance et une patience très grandes ; ce n'est que de cette manière que j'arrive à faire quelque chose. » Il faut remercier MM. Baillaud et Bourget de nous avoir donné ces deux volumes, si riches en belles lecons de morale et de science ; à cette publication, ils ont apporté tous leurs soins: on se rend compte, en la feuil- letant, du travail et du temps qu'elle leur a coûté. Ils y ont mis quelques notes discrètes, qui permettent au lecteur de retrouver les travaux auxquels Hermite ou Stieltjes font allusion. L'exécution typographique fait grand honneur à M. Gauthier-Villars. Ces deux volumes sont publiés dans le même format et avec le même caractère que les œuvres d'Hermite, dont M. Emile Picard poursuit la publication avec un zèle très pieux. Ah! si la mort n'avait pas fauché Stieltjes, quel bon aide M. Picard trouverait en lui! JuLEs TAXNERY, Sous-directeur de l'Ecole Normale Supérieure. 1 J'en veux dire un trait, qui me concerne. Stieltjes se trouve avoir l’occasion, en citant mon nom, de parler de l'équation différentielle linéaire que vérifie toute fonction algébrique d’une variable. Cette équation, qu'il m'avait en- seigné à former. alors que je préparais ma thèse, Hermite l'appelle « l'équation de Tannery ». 38 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 2° Sciences physiques Abraham (M) — Theorie der Elektrizität. — Tome 1: Introduction à la théorie de Maxwell, par le D' A. FüPpL. 2 édition revue et augmentée. 4 vol. in-8° de 443 pages. (Prix: 15 fr.) — Tome 11: Théorie électromagnétique du rayonnement, par le D' M. Agraxam. À vol. in-8° de 404 pages. {Prix : 42 fr. 50.) Teubner, éditeur. Leipzig. Le premier volume à gardé le même plan d'ensemble que dans l'édition primitive, mais à recu un certain nombre d'additions. Dans les chapitres du début, qui contiennent l'exposé des règles de calcul des vecteurs, M. Abraham a donné quelques définitions nouvelles et multiplié les exemples d'applications empruntés à la Mécanique et à l'Hydrodynamique:; ces exemples concrets sont bien appropriés à familiariser le lecteur avec le calcul des vecteurs. Les chapitres relatifs au champ électromagnétique ont été augmentés, notam- ment en ce qui concerne l'étude de la résonance élec- trique et des oscillations dans les circuits liés par induction (expériences el théories de Bjerknes, de M. Wien, de Drude), la réflexion des ondes sur les surfaces métalliques (travaux de Hagen et Rubens) et la propagation des ondes dans les fils. Le deuxième volume est entièrement nouveau et consacré à la théorie des électrons. Cette théorie, qui a été développée par plusieurs physiciens, mais surtout par Lorentz, tend à ramener tous les phénomènes électriques aux mouvements d'électrons, c'est-à-dire de masses électriques élémen- taires, indivisibles. Conception analogue en Electricité à la conception atomistique de la matière en Méca- nique. Tout courant électrique est le résultat d'un courant de convection des électrons: le rayonnement par on- dulations est produit par les vibrations des électrons. Les rayons cathodiques, par exemple, représentent un courant de convection d'électrons négatifs. Dans la théorie primitive de Maxwell, l'expression de rayonnement signifie un transport d'énergie, défini par le vecteur de Poynting. La lumière représente des ondulations électromagnétiques se propageant avec la vitesse de 3,101 cm/sec. Nous connaissons, d'ailleurs, tout un ensemble d'ondulations se propageant avec cette même vitesse et ne différant les unes des autres que par leur longueur d'onde. Ce sont, par ordre de longueur d'onde croissante : les ondes ultraviolettes, les ondes visibles, les ondes infrarouges, les ondes hertziennes, avec une lacune entre les ondes infra- rouges les plus longues que nous ayons pu observer (6,0% cm.) et les ondes hertziennes les plus courtes (À=—6,10-1 cm.) Mais il existe aussi d'autres rayonnements qui ne se propagent pas avec une vitesse constante, même dans le vide. En général, ils se distinguent des précédents en ce qu'ils transportent non seulement de l'énergie, mais aussi de l'électricité. On les appelle rayonne- ments par convection. [IS ne peuvent se différencier les uns des autres que par la vitesse des électrons, puisque toutes les antres propriétés de ceux-ci sont supposées invariables. Tels sont, par exemple, les rayons cathodiques. Nous connaissons aussi des rayonnements par con- vection d'électrons positifs, tels que les rayons canal. Ce que nous en savons nous porte à attribuer aux élec- trons positifs une masse d'inertie beaucoup plus grande que celle des électrons négatifs. L'idée fondamentale de Ja théorie sera d'appliquer aux électrons les équations du champ électromagné- tique déduites des conceptions de Faraday et de Maxwell. Elle tient donc en quelque sorte dans les théories des actions immédiates ou de milieu la place de celle de Weber dans les théories des actions à dis- tance. Il est à peine besoin de faire remarquer que nous sommes dans l'impossibilité absolue de vérifier directement que les électrons obéissent aux lois du champ électromagnétique ou l'existence même de ces électrons. Tout ce que nous pouvons faire, c'est de déduire par le calcul mathématique de ces hypothèses des conséquences accessibles à l'expérience. Le courant se compose de deux termes: le courant de déplacement dans l’éther et le courant de convec- tion des électrons. Dans les régions où n'existent ni matière ni électrons, les équations se réduisent à celles de Maxwell. On ne saurait considérer les électrons comme des points géométriques, car l'énergie électrique due à leur propre charge deviendrait infinie en ces points: il sera donc nécessaire de leur attribuer des dimensions et une forme. Dans la théorie de Maxwell, les forces électroma- gnétiques qui agissent sur un élément de volume résultent de pressions ou de tensions appliquées à sa surface : il s'ensuit que, dans certains cas, de telles forces peuvent agir sur un élément de volume de l'éther. La théorie de Lorentz exclut cette dernière conséquence: mais les forces ne satisfont plus au principe de l’action et de la réaction. Lorentz ajoute aux composantes des forces de Maxwell et Hertz celles du vecteur : 4 dE — y° dt où vest la vitesse de la lumière, Ÿ le vecteur radiant de Poynting. L'intégrale définit le vecteur L représentant la « quantité de mou- vement électromagnétique » contenue dans le volume = sur lequel porte l'intégration. Pour un système fermé, la somme de la quantité de mouvement mécanique et de la quantité de mouve- ment électromaguétique est constante; de même, la somme des moments de ces quantités de mouvement. Les problèmes généraux que doit résoudre la théorie sont les suivants : Etant donnés l'état initial du champ à l'époque t—0, la position et le mouvement de l'électricité à l'époque 40, déterminer le champ électromagné- tique ; Etant données la distribution initiale de l'électricité en repos, la distribution de l'électricité et du courant de convection, déterminer la perturbation magnétique. La discussion conduit à cette conclusion, que les perturbations électromagnétiques ne peuvent naître dans le vide: elles ont toujours leur source dans : l'électricité. La source lumineuse la plus simple qu'on puisse imaginer sera un électron vibrant autour de sa posi- tion d'équilibre. D'après la polarisation des doublets observée dans les expériences de Zeeman, ce serait un électron négatif. La molécule dans son état initial est regardée comme n'exercant aucune action élec- trique extérieure ; la constitution la plus simple qu'on puisse lui attribuer, c'est de la supposer formée d'un électron négatif et d'un électron positif dont les cen- tres coincident. Si l'électron négatif se déplace, l'autre restant fixe, il se produira un bipèle dont on pourra calculer le champ. On détermine le champ d'une charge électrique se déplaçant d'un mouvement uni- forme, d’un mouvement varié : ce qui permet d'étudier le champ d'un bipôle vibrant et se déplaçant, et con- duit au principe de Doppler. Il doit résulter de l'émission une réaction sur l'électron en mouvement, résultant de l'action magné- tique du courant de convection (phénomène analogue à l'induction électromagnétique). Cette réaction jouera le rôle de la force d'inertie en Mécanique, ce qu'on exprime en disant que la masse de l’électron est de nature électromagnétique. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 39 On peut construire la dynamique de l'électron en supposant sa masse exclusivement électromagnétique et lui-même susceptible de translation et de rotation comme un solide. Ceci revient à admettre que l’élec- tricité est liée aux éléments de volume de l'électron comme la matière aux éléments de volume d’un solide. L'électron sera regardé comme sphérique, formé de couches concentriques sur lesquelles l'électricité est uniformément répartie. En particulier, comme cas limités, ce sera une sphère avec une densité cubique uniforme ou une surface sphérique avec une densité superficielle uniforme. De plus, on admettra que l'élec- tron est indéformable. On pourra ainsi établir les équations du mouvement d'un électron seul, de la translation uniforme d'un système de charges électriques. On arrive au résultat suivant : La distribution électrique en équilibre sur un système », animé d’une vitesse de translation uniforme égale à Bv, peut être déduite de la distribution sur un système Ÿ, en repos, si > se déduit de È, par une contraction parallèle à la translation, dans le rapport LEVATETE Il suit de là que la distribution sur un ellipsoïde con- ducteur n’est pas modifiée par une translation uniforme. D'autre part, qu'il n'est pas besoin, pour entretenir la translation uniforme d'un tel ellipsoide, d'une force extérieure, mais seulement d’un couple, si la direction de la translation est oblique sur les axes principaux. Si l'on applique ces résultats à l’électron, on trouve que l’électron, quand aucune force extérieure n'agit sur lui, poursuit un mouvement rectiligne uniforme, quand sa vitesse est inférieure à celle de la lumière. Cette conséquence de la théorie s'accorde avec ce que nous savons par l'expérience des rayons cathodiques et des rayons du radium. Le principe de l'inertie est donc satisfait. Le principe des forces vives se vérifie également, quoique la masse électromagnétique ne soit pas inva- riable comme la masse mécanique et ne soit indé- pendante de la vitesse que si cette dernière est faible. Dans les expériences, la masse s'est montrée constante en ce sens que l'accélération transversale reste pro- portionnelle à la composante transversale de la force extérieure. Pour déduire ce principe des équations fondamentales, il faut évidemment se borner aux cas où le premier est vérilié : comme, par exemple, le cas d'un électron par- faitement symétrique animé d'un mouvement de trans- lation sans rotation. Il y aura lieu de distinguer la masse longitudinale, quotient de la composante longitudinale de la force extérieure par l'accélération longitudinale, et la masse transversale, quotient de la composante transversale par l'accélération transversale ; en général, ces masses sont différentes. Remarquons, enfin, que, dans cette dynamique élec- tromagnétique de l’électron, les équations de Lagrange s'appliquent. Le calcul de la déviation magnétique et de la déviation électrostatique des rayons cathodiques fournit une nouvelle occasion de vérifier la théorie. Pour éviter certaines difficultés qui se présentent dans l'optique des corps en mouvement, Lorentz admet que l’électron est déformable : il suppose que les forces électromagnétiques provenant du champ extérieur et celles provenant du champ interne se font équilibre, au sens où on l’entend dans la mécanique des corps solides. Sphérique à l’état de repos, il se transforme par suite du mouvement en ellipsoide aplati dans le sens du mouvement dans le rapport de 1:V1—%. Mais la masse électromagnétique ne peut plus se déduire de l'énergie électromagnétique et pour sauve- garder le principe de l'énergie, il faut attribuer à l'électron une énergie interne qui n'est pas de nature électromagnétique. Quand on considère le mouvement de l'électron comme quasi-stationnaire, on néglige le rayonnement par ondulations. Pour en tenir compte, il faudrait introduire dans l'expression des forces exercées par l'électron sur lui-même une force dont le travail soit égal à l'énergie rayonnée. Le mouvement peut être regardé comme quasi-stationnaire quand la réaction d'émission est négligeable vis-à-vis de cette force : cette condition est réalisée dans tous les cas pratiques où on calcule la déviation des rayons cathodiques et des rayons f. Après avoir établi la dynamique de l'électron, l'au- teur applique ces principes à l'étude des phénomènes électromagnétiques dans les corps matérieïs immobiles, puis dans les corps matériels en mouvement. Le champ électromagnétique individuel des élec- trons est inaccessible à l'expérience, qui ne peut atteindre que les valeurs moyennes relatives à un grand nombre d'électrons. Le calcul de ces valeurs moyennes, basé sur la dynamique électromagnétique, aboutit au système d'équations de Maxwell. Les phénomènes spéciaux étudiés ensuite sont la dispersion des ondes électromagnétiques, la polarisation rotatoire magnétique, l'aimantation, la conduction électrique, le champ électromagnétique des courants de haute fréquence dans les conducteurs linéaires, l'émission d'énergie par les antennes. J'ai essayé de donner, dans l'analyse qui précède, nécessairement incomplète en raison du caractère même de l'ouvrage, une idée des questions qui y sont traitées et de la manière dont elles le sont. Il convient de remarquer qu'il ne s'agit pas là d’une tentative faite pour ramener les phénomènes électriques à un autre groupe de phénomènes, mais d'un essai de relier en- semble, par des lois mathématiques, les manifestations attribuées à l'électricité, une fois admis un certain nombre de faits expérimentaux considérés comme irréductibles. Bien plutôt, cet exposé pourrait être con- sidéré comme un acheminement à une interprétation électromagnétique de la mécanique de la matière. Le lecteur que n'aura pas rebuté le travail, d'ailleurs peu considérable, nécessaire pour se familiariser avec les notations employées dans l'ouvrage, ne regrettera pas son temps. M. LAMOTTE, Professeur adjoint à l'Université de Clermont-Ferrand. Escard (Jean), /ngénieur civil. — Le Carbone et son industrie. — 1 vol. gr. in-8° de xvini-784 pages, avec 129 figures. (Prix broché : 25 fr.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1906. Par suite des différentes formes sous lesquelles il peut se présenter et de l'immense utilité pratique de certaines d'entre elles, le carbone est un corps qui intéresse à la fois puissammentle savant et le technicien. C'est à l'un comme à l’autre que s'adresse le livre où M. Jean Escard a essayé de condenser tout ce que l’on connaît d’essentiel sur cet élément et son industrie. L'ouvrage débute par une étude sur les propriétés générales des carbones; puis l’auteur envisage succes- sivement les trois variétés de cet élément : diamant, avec ses caractères spéciaux, ses gisements, ses appli cations industrielles, ses modes de formation possibles dans la Nature et les essais qu'on a tentés pour le reproduire; graphite, naturel ou artiliciel, avec ses gisements ou ses modes de préparation, et ses usages si importants dans l'industrie électrique; enfin car- bone amorphe, sous forme de charbon de bois, de noirs industriels, de coke, de charbon de cornue et surtout de houille, dont les diverses variétés, les gisements et les emplois sont traités avec tout le développement qu'ils comportent. En maints endroits, M. Escard a ajouté, à l'exposé de faits connus, des con- sidérations personnelles, en particulier sur l’épuise- ment des mines de charbon et le combustible de l'avenir, qui ajoutent à l'intérêt du livre. Il faut donc le louer de nous avoir donné cette importante mono- graphie, la première, croyons-nous, qui ait été conçue sur un aussi vaste plan. 40 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 3° Sciences naturelles Le Mexique : son évolution sociale. — Monogra- plie en collaboration, sous la direction de M. Just Sierra. — 3 vol. gr. in-k jésus. Ballesea et Cie, éditeurs. Mexico. Ce magnifique ouvrage est un véritable monument élevé, en l'honneur de leur pays, par un certain nombre de lettrés et de savants mexicains. C'est une vaste synthèse de l'histoire politique, de l'organisation administrative et militaire et de l'état économique de la Fédération mexicaine. Les progrès accomplis dans l’ordre intellectuel, les conquêtes effectuées dans le domaine industriel, agricole, etc., on trouvera tout cela dans cet inventaire qui résume les progrès de la nation au xix° siècle. Les trois volumes ont été luxueu- sement édités, et l'ouvrage, ainsi conçu, fait le plus grand honneur aux savants qui ont entrepris cette splendide et utile publication. L. R: Bilancioni (D' Guglielmo). — Dizionario di Bota- nica generale. — 1 vol. iu-16 cart. de xx-926 p. (Prix : 10 fr.). H. Hæpli, éditeur. Milan, 1906. En ouvrant ce pelit ouvrage, il semble tout d'abord que l’auteur se soit appliqué à en justifier le titre par une sage élimination de toute définition systématique; toutefois il est peut être exagéré d'avoir à chercheren vain dans le Dictionnaire les mots : A/ques, Champignons ou tous autres se rapportant aux grandes divisions du Règne végétal. Mais où la surprise devient encore plus grande, c'est que, si l'on s'adresse aux mots: noyau, aleurone, amidon, à chacun de ces trois vocables l'auteur se contente de nous renvoyer au mot ce/lule (38 colonnes): cette manière de faire est-elle bien celle d'un Dictionnaire. Citons maintenant quelques définitions un peu éton- nantes en 1906: Baside «cellule conidifère spéciale aux Basidiomycètes »; Asque «cellule tubuleuse ou utriforme qui produit dans son intérieur des spores agames ». Pour savoir ce qu'est un porl, il faut revenir à l’article tissu, etc. En revanche, l'auteur paraît s'être appliqué à collec- tionner Jes curiosités de la glossologie botanique : nous apprenons avec étonnement qu'un Bacillus est unique- ment un bulbille, et nous sommes heureux de trouver le sens des mots hasigyndium, bibliolithe, rhegma, thallone, ete. L'auteur nous semble être une victime de certaines tendances scientifiques, que des théories hasardées ont volontiers beaucoup plus séduit que l'observation ri- goureuse des faits. Nous ne pouvons terminer celte critique sans ajouter encore que, sous le titre pompeux de Biographies d'illustres botanistes, M. Bilancioni à ajouté un ap- pendice où l’on trouvera la presque totalité des bota- nistes italiens. Si beaucoup de véritables gloires de la Botanique n'y ont pas l'honneur d’une mention, n'ayant pas le bonheur d'être nées sous le ciel bleu de lHalie, l’auteur, par compensation, a charitablement sauvé de l'oubli quelques illustres noms! Eu. Perror, Professeur à l'Ecole supérieure de Pharmacie de Paris. Giglio-Tos (Ermanno), Professeur de Zoologie, d'Anatomie et de Physiologie comparées à l'Univer- sité de Cagliari. — Les Phénomènes de la Vie. IIIe partie : La Fécondation et l'Hérédité. — 1 vol. in-8 de 190 pages. (Prix : 3 fr.) Cagliari, chez l'auteur, à l'Université, 1906. Cette troisième partie des « Problèmes de la Vie » est consacrée à l'interprétation scientifique des phéno- mènes de la Fécondation et de l'Hérédité, qui sont « les questions peut-être les plus ardues et les plus compliquées de la Biologie actuelle ». Aussi celte partie, bien qu'écrile dans le langage sobre et clair qui distingue l'auteur, et quoiqu'elle soit la suite. logique des deux autres, — peut-être même un peu pour cette dernière raison, —est-elle d'unelecture réellement plus difficile que les précédentes. Quand on arrive, par exemple, à l'explication algébrique de la dichoga- mie protandrique par le nombre des atomes moindre dans les biomolécules mâles que dans les biomolécules femelles, on se trouve en face d'équations qui se comprennent comme telles, mais dont la symbolisa- tion biologique est vraiment trop obscure. Voici, d'ailleurs, le résumé de l'ouvrage. Après avoir démontré que dans tout organisme doivent exister des cellules capables de régénérer un autre organisme de la même espèce, l'auteur passe à l'examen des condi- tions nécessaires pour que ces cellules, ou cellules génétiques, puissent acquérir la faculté de cette régé- nération. Il pose successivement les conditions de la reproduction asexuelle et de la reproduction sexuelle; dans le premier cas, chaque cellule génétique peut ré- générer intégralement l'œuf, c'est-à-dire régénérer à la fois les biomolécules mâles et femelles; dans le secund cas, la régénération intégrale de l'œuf n’est possible que par l'addition biomoléculaire. L'addition biomoléculaire! Voilà le phénomène fondamental de Ja fécondation. la cause première de tous les autres phé- nomènes. L'addition biomoléculaire a comme consé- quence nécessaire la disparition de l'une ou de l’autre des deux sortes de biomolécules. De là, la nécessité de deux sortes de cellules génétiques, régénérant, les unes, les biomolécules mäles, les autres, les biomolé- cules femelles; et de là encore la nécessité de l'union de ces deux sortes de biomolécules. Dans les cellules génétiques mäles disparaissent les biomolécules fe- mclles, dans les cellules femelles les biomolécules mäles. L'auteur explique ensuite, en s'aidant de gra- phiques algébriques, que les biomolécules régénérées de chaque sorte ne peuvent être deux, mais doivent être quatre; d’où il résulte que chaque cellule géné- tique doit donner lieu à la formation ou bien de quatre cellules femelles ou bien de quatre cellules mâles. — « Comme dans l'examen des phénomènes biologiques il faut considérer tous les modes possibles dont ils peuvent s'accomplir, il en résulte la nécessité de distinguer deux sortes d'additions biomoléculaires, l'externe et l'interne (chap. IV) ». L'addition biomolé- culaire externe est étudiée au chapitre V, l'addition biomoléculaire interne au chapitre VI. J'avoue m'être mal rendu compte de la distinction de ces deux sortes d'additions biomoléculaires, qui semble née, comme l’auteur le reconnaît lui-même, de la nécessité de faire face à certains faits. La description, toute théorique, des phénomènes de maturation des cellules sexuelles est d’ailleurs très satisfaisante. — Vient ensuite l'étude des phénomènes divers de la sexualité : fécondation, hé- rédité, dichogamie, parthénogénèse, caractères sexuels secondaires, rajeunissement des Infusoires. On y trouve l'application logique des principes fondamentaux ex- posés dans les pages précédentes. Tous ces chapitres s'enchainent dans un ordre rigoureux, qui, une fois de plus, fait le plus grand honneur à M. Giglio-Tos. La méthode est toujours la même que dans les deux pre- miers volumes, c'est-à-dire parfaitement scientifique : poser les hypothèses possibles (deux ou plusieurs) et donner les raisons de ses préférences; par exemple : 4° supposer que les cellules génétiques issues de l'œuf ne subissent aucune transformation jusqu'à la forma- tion d’un œuf nouveau; 2° que ces cellules aussi bien que les autres se transforment et acquièrent une cons- titution différente de celle de l'œuf; 3° choïsir la seconde hypothèse, et dire pourquoi. Fa Mais on retrouve dans cette troisième partie et on regrette la même indifférence de l’auteur vis-à-vis des faits positifs et concrets. Elle se révèle par l'absence d'une documentation appuyée sur des citations: celles- ci sont très rares, tandis que, dans un essai théorique de ce genre, il faudrait citer le plus de faits possible, pour donner au lecteur l'assurance que l'interprétation BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX = ue théorique proposée est conciliable avec le plus grand nombre de faits connus et qu'il n’en est pas un seul, parmi les mieux établis, qui lui soit contraire. Prati- quement, l'ouvrage aurait pu être divisé en deux parties : la partie documentaire aurail consisté en de longues notes placées au bas de chaque page, auxquelles il serait renvoyé dans la partie théorique. L'aveu de cette indifférence à l'égard des faits échappe d’ailleurs à M. Giglio-Tos en plus d'un endroit. Ainsi, il divise la partie somatique de l'organisme en deux portions : une progénétique, qui se forme avant le début de la diffé- renciation des cellules génétiques, et une mélagéné- tique, et il ajoute: « Cette distinction, qui, au point de vue théorique, ne peut être mise en doute, devient naturellement difficile ou même impossible au point de vue pratique... Cependant nous verrons qu'elle est absolument nécessaire pour l'étude de certains phéno- mènes.. ». Ailleurs (p. 57), ne trouvant pas dans les caractères morphologiques la preuve que les individus naissant de la division d'un être unicellulaire soient identiques à celui-ci, l’auteur les suppose cependant différents, pour pouvoir conclure que cette division des unicellulaires n’est pas une vraie « reproduction ». Mais ces critiques ne s'adressent pas précisément au fond même de l'ouvrage. Il en est peut-être autrement de la suivante. L'addition biomoléculaire est la donnée fondamentale de laquelle dérivent toutes les interpré- tations particulières exposées dans ce livre. Mais cette donnée n'est ni un fait, puisqu'elle n’est pas constatée par l’observalion, ni une loi générale comparable à la gravitation universelle, à l'équivalence mécanique de la chaleur, puisqu'elle ne se vérifie pas expérimenta- lement. C'est une hypothèse présentée comme un phé- nomène du monde ultramicroscopique, la biomolécule étant le dernie: terme d'une série rapelissante, qui va des biomonades (cellules) aux biomores et aux biomo- lécules. Pas encore le dernier terme cependant; car les biomolécules se composent d'atomes, et ceux-ci, M. Giglio-Tos n'hésite pas à nous les présenter, à dis- cuter sur leur nombre, leur qualité, leur arrangement différent dans la biomolécule mâle et dans la biomolé- cule femelle. «L’essai d'interprétation scientifique» que nous propose l'auteur ne devient-il pas simplement alors la traduction, dans un langage moléculaire et atomique, des grands faits généraux de la Biologie, qu'on exprime en langue biologique en parlant de ce que lon voit, des chromosomes et des cellules? On peut le craindre. Je désire toutefois vivement que ces craintes ne soient pas fondées, que le superbe effort de pensée auquel s’est livré M. Giglio-Tos ne soit pas vain, et que ce qui est si bien trouvé soit vrai aussi dans ce livre si remarquable à tant d'égards. A. PRENANT, Professeur à l'Université de Naney. 4° Sciences médicales Calot (D' F.), Chirurgien en Chef de l'Hôpital Roth- schild. — Technique du traitement des tumeurs blanches. — 1 vol. grand in-8° de 272 pages avec 192 figures. (Prix : 7 fr.) Masson et Ci, éditeurs. Paris, 1906. Dans cet ouvrage, le D' Calot cherche à établir que les traitements généralement suivis actuellement pour la cure des tumeurs blanches, la simple immobili- sation d’une part, le traitement sanglant (amputation ou résection) d'autre part, doivent céder le pas à un traitement en quelque sorte intermédiaire, les ponc- tions suivies d’injections modificatrices. Avant d'exposer ce traitement, l’auteur résume dans un chapitre de diagnostic la manière d'examiner une tumeur blanche. Il recherche en particulier les signes de début, s’élevant contre la facilité avec laquelle des médecins font le diagnostic d’arthralgie hystérique et contre la conception du rhumatisme tuberculeux, décrit par Poncet {de Lyon), l'existence de celui-ci ne lui paraissant pas démontrée. Au point de vue du pro- nostic, Calot fait une grande différence entre les tumeurs blanches fermées, dont la guérison semble certaine, et les tuberculoses ouvertes, infectées, dont le traitement est beaucoup plus difficile, mais que les injections arriveraient néanmoins à guérir dans un certain nombre de cas. La technique de ces injections, les détails sur les liquides à employer, la manière de procéder, les pré- cautions à prendre pour éviter la fistulisation, etc., sont minutieusement exposés. Pour obtenir la sclérose des fongosités, il faut injecter de l'huile créosotée iodoformée ; pour obtenir leur fonte, un mélange de naphtol et de glycérine. Cette liquéfaction des fongo- sités est avantageuse en ce qu'elle permet leur évacua- tion par la ponction aspiratrice. Aussi Calot, qui, pour l'obtenir, emploie les injections de naphtol camphré, défend-il énergiquement cet agent contre les dangers que divers chirurgiens, Guinard, Kirmisson entre autres, lui ont attribués. En même temps que l'on fera ces ponctions et ces injections modificatrices, on instituera un traitement général (séjour au bord de la mer, suralimentation) et un traitement local (repos de la jointure) ; un appa- reil plâtré n'est nécessaire que s’il y a des douleurs ou une tendance à une attitude vicieuse. Lorsque l’on est amené à recourir au traitement sanglant, il faut faire une ablation large, une résection étendue, ce qui n'est possible que chez l'adulte, à cause des arrêts de développement qui en résulteraient chez l'enfant. Chez celui-ci, on se contentera, comme intervention sanglante, du drainage des articulations infectées. La question des appareils à appliquer est longue- ment traitée. Calot préfère aux gouttières, générale- ment employées, les plâtres circulaires, insistant sur ce fait que l'appareil doit embrasser les deux articu- lations adjacentes. Lorsque le malade va mieux, on remplace le plâtre par un appareil amovible en cellu- loïde ou en cuir. L'ouvrage se termine par l'application de ces prin- cipes généraux aux Cas envisagés en particulier, aux modifications à apporter au traitement suivant la nature de la tumeur blanche et suivant son siège. Ecrit d'une manière claire et précise, illustré de nombreux dessins qui mettent en relief les points principaux, ce livre nous à intéressé. On n'y trouve pas une revue complète de tout ce qui a été dit sur la question, mais on y voit exposée, avec tous les détails nécessaires, la pratique d’un chirurgien qui a une grande expérience, surtout chez l'enfant, ce qui fait le mérite de l'ouvrage, qu'on consultera avec fruit. Dr H. HARTMANN, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris, Chirurgien des hôpitaux. 5° Sciences diverses Clerget (Pierre). — Villes et écoles américaines. — 4 brochure. Bloud et Cie, éditeurs, Paris. Les premières lignes de ce travail résument le sujet dont il traite : « Parmi les choses d'Amérique qui frap- pent le plus l'Européen, deux d’entre elles, la ville et l’école, semblent tout particulièrement représentatives de la mentalité du peuple des Etats-Unis ». On trouvera, dans fcette courte mais substantielle étude, la sûreté de documentation et les qualités de méthode et de clarté que notre distingué collaborateur apporte dans tous ses travaux, et l’on s’expliquera mieux, après l'avoir lue, les progrès constants de ce Nouveau Monde dont « l'industrie etle commerce pour- chassent victorieusement l'industrie et le commerce du Vieux Continent ». ARE 42 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 17 Décembre 1906. Séance publique annuelle, M. H. Poincaré rappelle la vie et l'œuvre des membres de l’Académie décédés pendant l’année courante, puis proclame les noms des lauréats des prix décernés par l'Académie. — M. M. Ber- thelot lit une notice sur la vie et les travaux de F. Fou- qué. 5 Seance du 24 Décembre 1906. M. le Secrétaire perpétuel annonce la mort de M. J.-A.-C. Oudemans, Correspondant pour la Section de Géographie et Navigation, et de M. J.-A. Normand, Correspondant pour la même Section. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Em. Picard présente ses recherches sur la détermination des intégrales des équations du type elliptique par certaines conditions aux limites. — M. P. Painlevé applique sa méthode de formation des équations différentielles du second ordre à points critiques fixes aux équations de la forme J'=R (y', y, x), où R est rationnel en y', algébrique en y, et analytique en x. — M. J. Hadamard expose une nouvelle méthode de calcul des variations. — M. J. Clairin étudie les équations aux dérivées partielles du second ordre à deux variables indépendantes qui admettent un groupe d'ordre impair de transformations de contact. — M. L. Lecornu montre que, dans le mouvement d'un ensemble quelconque de sphères homogènes qui ont leurs centres fixes et qui exercent à leurs points de contact des pressions mutuelles données, le travail du frottement, rapporté à l'unité de temps, va constamment en diminuant. — M. Em. Belot a trouvé la formule suivante pour les durées de rotation directe des planètes et du Soleil : 23,15 Fr Va p'27 6,61 D Yan où à est la distance au centre du système en rayons de l'orbite terrestre, D le diamètre de l’astre en diamètres de la Terre, et d sa densité par rapport à l’eau. — M. P. Salet à constaté que la lumière de Mercure n'est pas sensiblement polarisée, ce qui peut être dû soit à la nature de son sol, soit à la présence d'une couche de nuages. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Ed. EI. Colin commu- nique ses déterminations magnétiques faites dans la ville de Tananarive et dans la banlieue. Il y a une per- turbation très caractéristique autour de Tananarive. — M. J. Becquerel a observé quelques anomalies dans les modifications des bandes d'absorption d’un cristal sous l'action d’un champ magnétique, modifications qui ne sont pas symétriques pour certaines bandes chez le xénotime. — M. P. Weiss propose une nou- velle théorie très simple du ferromagnétisme, d’où il déduit une relation entre l'intensité d’aimantation et la température qui se vérifie par l'expérience. — M": Baudeuf à observé qu'une plaque métallique isolée, placée dans un champ électrique de direction conve- nable et fourni par une autre plaque éclairée, peut prendre une charge négative lorsqu'elle est frappée par la lumière ou même par des rayons ultra-violets. — M. F. Wallerant a reconnu que les enroulements hélicoïdaux dans les corps cristallisés ne sont obtenus que par l'addition d’un corps étranger doué du pouvoir rotatoire; le sens de l’enroulement est déterminé par le signe du corps actif et par certaines particularités, encore inconnues, de la substance qui s'enroule. — M. P. Gaubert a constaté que les figures de corrosion à faces courbes peuvent être produites, comme certaines faces courbes des cristaux, sous l'influence de la varia- tion continue de la composition du milieu ambiant: les matières étrangères colorant un cristal modifient la résistance des faces à l'action du dissolvant. — M. G.-D. Hinrichs, calculant par sa méthode les résultats d'analyses des sels de dysprosium de M. Urbain, conclut que le dysprosium a pour poids ato- mique exactement 162,5. — MM. G. Malfitano et L. Michel ont reconnu que la méthode cryoscopique ne peut servir à déterminer la masse des micelles, au moins pour le colloïde hydrochloroferrique; la quan- tité d'ions en rapport avec les micelles doit être extré- mement faible. — M.B. Szilard, en mélangeant à chaud une dissolution d'azotate d'uranium avec de l'hydrate de thorium précipité par AzH* et bien lavé, a obtenu un composé colloïdal rougeûtre, qui paraît bien défini. — M.R. Dollfus, en jetant un cristal de sulfate ferreux dans une solution de silicate de soude ou de potasse, a obtenu des croissances artificielles analogues à celles de M. Leduc. — M. Binet du Jassoneix, en réduisant l'oxyde de chrome par le bore au four électrique, a obtenu des fontes qui contiennent deux composés définis Cr°B*(d—6,7) et CrB(d—6,1), très solubles dans un milieu moins riche en bore. — M. E. Rengade, par l'oxydation incomplète des métaux alcalins, suivie de la distillation dans le vide de l'excès du métal, a pré- paré à l'état de pureté les protoxydes anhydres Cs°0, Rb°0, K°0 et Na°O, le premier en cristaux très nets, les autresen cristaux confus ouemorphes.— M.G-.Gain a obtenu une série de sulfates du vanadium tétrava- lent SO*(VO) contenant, pour 2 molécules du sulfate neutre, 3, 4,5, 7 et 8 molécules d'acide sulfurique et 15 ou 16 H°0. — M. G. Charpy préconise l'emploi d'aciers spéciaux, en particulier au chrome-nickel, pour le rivetage, opération qui leur confère automati- quement les qualités les plus avantageuses. — M. E. Glasser a trouvé en Nouvelle-Calédonie un nouveau silicate hydraté de nickel et de magnésie, qu'il nomme népouite et qui répond à la formule 2Si0*.3(Ni,Mg) 0.2H°0. — M. E. Berger propose de doser le soufre libre par oxydation avec l'acide azotique fumant, addi- tionné d’un peu de bromure de potassium. Il a obtenu rapidement de bons résultats. — M. H. Guillemard décrit quelques procédés de dosage des nitriles et des carbylamines, soit seuls, soit en mélange. — M.J. Ber- thaud, par l’action directe du P blanc sur les alcools méthylique et éthylique, en tube scellé, à 2509, a obtenu H°P, un peu de phosphines et les produits d’oxydation de ces corps (acide phosphorique et acides phosphiniques), et enfin 20 à 30 °/, d'hydrates de tétral- kylphosphonium. — M. R. Marquis, en faisant réagir SOCE sur l'acide benzhydroxamique, a obtenu l'isocya- nate de phényle. L'acide salicylhydroxamique, dans les mêmes conditions, fournit de l’oxycarbanile. — M. A. Berg a repris l'étude de l’élatérine et maintient pour ce corps la formule C*H*07. Il donnesous l'action de la potasse d’abord de l'élatéridine, puis un acide, l'acide élatérique. — MM. P. Breteau et P. Woog ont constaté que le chloroforme se conserve parfaite- ment pur dans des flacons en verre blanc en présence de 2 à 4 millièmes de diverses substances: essence de térébenthine, menthol, gaïacol, thymol, ionone, ete. L'addition d'un morceau de moelle de sureau coloré au rouge Congo indique, par un virage au bleu, la moin- dre trace de décomposition. — M. P. Mazé recom- mande,: pour assurer la conservation du beurre, le lavage avec l’eau filtrée sur bougie et, en dernier lieu, | ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 43 additionnée d'une petite quantité d'acide lactique. Mais il est toujours préférable de faire d’abord lexa- men bactériologique de la crème. — MM. J. Galimard ét L. Lacomme, en cultivant le bacille de la diarrhée verte sur un milieu ne renfermant comme corps azoté que le glycocolle, ont observé l'élaboration d'une matière protéique (mucine ou mucoide), puis d'un corps gras, probablement une lécithine, grâce à la pré- sence du glycérophosphate de chaux. 3 SCIENCES NATURELLES. — M. Eug. Pittard déduit, de ses observations sur les habitants du Valais, que le milieu géologique qui parait le moins heureux (terrains cristallins) n'influence pas dans un sens défavorable le développement de la taille humaine. Il en est de même des hautes altitudes. Enfin, la taille humaine la plusélevée correspond aux versants les moins favorisés. — M. M. Letulle et M'° M. Pompilian ont constaté que les besoins d'azote et de chlorure de sodium de l'orga- nisme présentent des caractéristiques personnelles, qui peuvent varier de 4 à 2 pour l'azote et de 1 à 4 pour NaCIL. Pendant l’inanition, le besoin d'azote diminue. — M. Guglielminetti présente un appareil pour la chloro- formisation qui se compose du dispositif Roth-Draeger pour le chloroforme et d’un distributeur doseur d'oxy- gène dù à l’auteur. — M. L. Pénières à observé que les injections de résine d'euphorbe dans les tissus déter- minent une sédation de la circulation rouge et une surexcitation de la circulation blanche. MM. M. Ni- colle et Adil-bey ont libéré l'agent pathogène intra- leucocytaire de la vaccine par digestion pancréatique, puis l'ont filtré à travers la bougie Berkefeld dans des conditions où les autres bactéries se trouvent retenues. Ils ont ainsi obtenu un liquide vaccinal absolument pur. — M. E. Pinoy a constaté qu'un champignon isolé d'un cas de mycétome blanc chez l'homme peut donner un mycétome à grain noir chez le pigeon. — M. E.-L. Trouessart décrit une espèce nouvelle du genre leticyon (Speothos), rapportée de l'Equateur par le Dr Rivet, et qu'il nomme Sp. Riveti; c’est un type très ancien, probablement peu éloigné de la forme primitive des chiens. — M. H. Micheels à reconnu que la nocivité de la solution de NaCÏI pour les graines en germination peut être atténuée par l'introduction de sels de métaux bivalents. — M.J. Dumont montre que les radiations de la partie droite du spectre sont celles qui agissent le plus efficacement sur la migration des matières azotées, en particulier du gluten, dans les grains de froment pendant la phase de maturation des épis. — M. P. Becquerel estime qu'il est très difficile de savoir, avec une graine renfermant une certaine quantité d'eau, si elles sont en vie ralentie ou en vie suspendue. — M. Hirtz à essayé de reproduire, par un dispositif expérimental, les phénomènes de retrait d’un ellipsoide qui se refroidit avec perte graduelle de sur- face ; il a obtenu des aspects qui se rapprochent beau- coup des formes observées à la surface de la Lune. — M. A. Riche à observé des mouvements orogéniques particulièrement intenses dans la région de Chézery (Ain). — M. Ch.Depéret éludie les migrations des Mam- mifères tertiaires à l'époque miocène. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 48 Décembre 1906. L'Académie procède au renouvellement de son Bureau pour 1907. M. A. Gautier devient président. M. Buc- quoy est élu vice-président. M. Troisier est élu secré- taire annuel. M. A. Netter revendique, sur M. A. Robin, la prio- rité de l'emploi des métaux colloïdaux, en particulier du collargol, dans le traitement des maladies infee- tieuses et de l’explication du mécanisme de leur action. — M. le D' Barot lit un Mémoire intitulé : De quelques signes cliniques nouveaux permettant de déceler la … tuberculose dans son stade primitif de germination … canglionnaire. — M. le D' Delbet donne lecture d’un travail sur le traitement des varices par l’anastomose saphéno-fémorale. Séance du 26 Décembre 1906. M. le D' Thoinot est élu membre titulaire dans la section d'Hygiène publique, Médecine légale et Police médicale. M. Balland a déterminé la répartition du phosphore dans les divers aliments. Les blés en renferment de 0,65 à 1,11 °/, (calculé en P°0°), les légumes verts de 0,10 à 0,29 °/,, les légumes secs de 0,61 à 1,45 °/,, les fruits ordinaires moins de 0,40 °/,, les viandes 0,45 0/ en moyenne, la chair de poisson 0,60 °/, en moyenne, les fromages de 0,78 à 1,81 °/,, le café torréfié 0,40 °/,, le cacao jusqu'à 1,30 /,, l'œuf de poule 0,26 °/.. — M. Lancereaux estime avec M. Poirier que l’exürpation d’un cancer, d'un cancer lingual en particulier, doit être précoce, large et logiquement conduite; mais, mème dans ces cas favorables, une récidive rapide, une mort prompte peuvent suivre cette intervention ration- nelle. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 15 Décembre 1906. M. Ch. Richet a isolé de l'extrait aqueux de Sube- rites domuneula une substance lentement soluble dans l'eau, qu'il nomme subéritine et qui est extrèmement toxique pour le chien ou le lapin en injection intra- veineuse. — M. P. Lassablière a constaté que la subé- riline, sans produire l'hémolyse dans le sang après injection, diminue notablement la résistance globu- laure. — MM. Rollinat et E. Trouessart montrent que la Taupe aveugle constitue une espèce transformée de la Taupe commune ; cette évolution se produit aujour- d'hui sous nos yeux dans la Creuse. — M. Th. Miro- nescu conclut de ses recherches que la théorie de l'origine intestinale de la pneumonie manque encore d'appui expérimental. — M. Battier a obtenu de très bons résultats dans le traitement de la diphtérie aviaire par le sérum antidiphtérique. — M. M. Nicloux décrit la technique de son procédé de dosage de petites quan- tités d'éther dans l'air, dans le sang ou un liquide organique et dans les tissus. — MM. A. Gilbert et A. Lippmann ont observé chez un malade atteint de sangrène sénile une septicémie strictement anaérobie. — MM. Carrieu et Lagriffoul ont constaté que le vési- catoire agit surtout par le coup de fouet qu'il donne à la phagocytose. L'augmentation des globules blancs est caractérisée par une polynucléose avec éosino- philie. — MM. Ed. Toulouse et H. Piéron montrent que l'inversion du cycle nycthéméral de température chez les veilleuses de nuit est toujours possible à réa- liser. Mais elle ne se produit qu'après un conflit plus ou moins long entre la persistance d'une régulation nerveuse adaptée à d'anciennes conditions d'existence et l'influence de conditions nouvelles. — MM. H. Rajat et G. Péju rapprochent le parasite du muguet (Ændo- myces albicans) d'un champignon nouvellement décou- vert, le Saccharomycopsis capsularis. — M. J. Canta- cuzène à reconnu que, parmi les bacilles morveux qui ont franchi l'épithélium intestinal, ceux que les phagocytes n'ont pas arrêtés en route sont transportés jusqu'au sang par le courant Iymphatique ; parvenus dans le système sanguin, ils sont aussitôt arrêtés, englobés et détruits par les phagocytes dans la rate et les vaisseaux pulmonaires. — MM. E. Wertheimer et L. Lepage ont observé que l'excitation du gyrus sig- moide chez le chien produit une augmentation de la quantité de lymphe fournie par le canal thoracique. — M. F.-J. Bose a constaté que les injections de sérum anticoccidien (obtenu par injection de néoplasie à Coccidium oviforme) n'ont aucune action curatrice, pas plus sur les épithéliums à C. oviforme que sur les cancers humains. Le sérum anti-claveleux n'a aucune action curatrice sur le cancer humain. — MM. L. Gar- relon et J.-P. Langlois ont pratiqué la section phy- 44 ACADÉMIES KT SOCIÉTÉS SAVANTES siologique du pneumogastrique pendant la polypnée thermique : il ÿ a tantôt augmentation, tantôt ralen- tissement cle la polypnée. — M. G. Desbouis et J-P. Langlois montrent que l'hyperglobulie qui se produit par respiration de vapeurs d'hydrocarbures chez le lapin, le cobaye et le pigeon ne se retrouve pas chez le chien et le chat. L'excès globulaire est dù à une hyperglobulie vraie et non à une concentration du sang. — M. F. Battelli et M! M. Tovstein ont déter- terminé la durée des convulsions cérébro-bulbaires et médullaires chez différentes espèces animales. — M. J. Salmon à éludié les connexions des rudiments sque- lettiques chez les Ectroméliens ; leurs variations cor- respondent aux variations morphologiques des rudi- ments. M. W. L. Yakimoff a constaté que c'est dans l'eau citratée que le trypanosome de la dourine vit le plus longtemps (trois jours); sa-survie est de deux jours dans le sang défibriné et d'un jour seule- ment dans le sérum de remarque que les larves de mouche des cadavres ense- mencent de tous côtés les microbes liquéfiants qui leur préparent leur bouillie alimentaire ; il y aurait là une sorte de symbiose. M. H. Vallée est élu membre titulaire de la Société. La Société procède au renouvellement de son bureau, qui est ainsi constitué pour 1907 : Président : M. A. Giard ; Vice-présidents : MM. E. Bouvier et H. Roger; Secrétaire général : M. E. Gley : Secrétaires : MM. L.Courtade, V. Henri, A.Lécaillon et P. Portier; Trésorier : M. G. Weiss ; Arcliviste : M. A. Pettit. Séance du 22 Décembre 1906. M. J. Camus présente un appareil destiné à main- tenir le pansement après laparotomie chez le chien. — M. H. Busquet à constaté que le tartre stibié en circu- lation artiticielle diminue le calibre des vaisseaux pul- monaires. — M. M. Weinberg a reconnu, chez les singes, des cas de septicémie due au coli- bacille ino- culé par le trichocéphale dans la muqueuse intestinale. Les tænias ayant également favorisé chez un singe l'éclosion dela fièvre typhoide, ilne serait pas étonnant qu'ils jouent, dans certains cas, le même rôle chez l’homme. — MM. H. Iscovesco et A. Matza ont observé que l’hémoglobine forme avec des albumines négatives des complexes solubles dans l’eau et électro-positifs. — MM. CI. Regaud et J. Blanc ont étudié l'action des rayons de Roentgen sur les éléments de l’épithélium séminal ; les spermatogonies sont de beaucoup les plus vulnérables. — M. L. Sauvé a constaté que la tête du pancréas produit toujours la mort après injection péri- tonéale chez le lapin, tandis que l'injection de la queue du pancréas n’est pas fatale. — M. Ch. Dhéré a reconnu que le spectre d'une solulion d'hématine à 1/10.000 présente, sous l'épaisseur de { mm.,une bande d’absorp- tion dont le milieu tombe soit dans la portion termi- nale du violet, soit dans la portion initiale de l’ultra- violet. — M. H. Piéron montre que l'Actinia equinia s'ouvre par agitation de l’eau et frottements de courants, par oxygénation et par excitation alimentaire; elle se ferme par déshydratation et désoxygénation, par exci- tations mécaniques et blessures, etenfin par modifica- tions toxiques des milieux. —MM.G-. Bohn et H.Piéron estiment que les phénomènes d'anticipation réflexe et de rythmicité interne dans la façon dont se comporte l'Actinia equinia vis-à-vis des marées nesont pas oppo- sés, mais se complètent mutuellement. — M. P. Rem- linger apporte de nouvelles expériences montrant que l'anthracose pulmonaire pathologique n'est pas d'ori- gine intestinale. — M. A. Frouin a observé une sapo- nification partielle des graisses neutres introduites dans une anse intestinale isolée; ce phénomène est favorisé par la bile. — M. M. Nicloux a reconnu que l'alcool éthylique en vapeur est arrêté complètement par l’eau à 40°, tandis que l'éther en vapeur n'est pas arrèté; il cheval. -- M. E. Guyénot a en résulte un moyen de séparer quantitativement c deux corps. — M. L. Malassez montre la précision de sa méthode de notation des objectifs microscopiques. = M. EH. Christiani a recherché la présence de traces d'alcool dans l'air par passage d'un litre d'air dans un barboteur capillaire et titration colorimétrique par le bichromate. — MM. Chirié et Monier-Vinard ont constaté que, si l'argent colloïdal est susceptible d’en- rayer une septicémie preumococcique relativement atténuée, il n'amène qu'une légère survie chez les anis maux gravement infectés. — M. R. Dubois a extrait du Bonellia viridis, du Morphysa sanguinea et de quel- ques autres Annélides des substances nettement fluo- rescentes. — M. F. Battelli et Ml: S. Ornstein n'ont pas observé d'augmentation appréciable d'adrénaline dans la capsule surrénale droite après avoir extirpé la gauche; au contraire, il ya diminution. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 4 Décembre 1906. M. Sébileau montre que les rayons X ont la faculté, sinon de provoquer l'avortement, tout au moins de retarder la date de la mise-bas chez la lapine, en portant un grave préjudice aux fœtus. — M. G. Hudellet a observé une certaine diminution de poids de foie sous l'action des rayons X ; mais il y a une brusque diminu- tion du poids des animaux traités. — MM. Gentes et Philip ont trouvé que, quand il existe une artère hépa- tique gauche, celle-ci ne résulte pas de la division pré- maturée de l'artère hépatique proprement dite : elle représente la gastro-hépatique supérieure persistant dans son entier avec sa branche coronaire stomachique et sa branche hépatique; dans ce cas, il existe une. véritable indépendance des deux lobes du foie. — M. B. de Nabias indique un procédé de recherche. rapide de l’urobiline dans les selles par la réaction de fluorescence verte obtenue au moyen de AzH° et ZnCF. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 17 Décembre 1906. MM. L. Hoche et Funck ont constaté que, chez les jeunes lapins, après une courte séance d’inhalation, les particules de noir de fumée pénètrent dans les plus lines voies aériennes, où elles sont ensuite englobées. par des cellules rondes ou ovoides. — M. L. Mercier à reconnu que les corps de Blockmann de la Blatte sont des bactéries, qu'il à pu cultiver et qu'il nomme Bacillus Cuenotr. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE SECTION DE NANCY Séance du 19 Décembre 1906. M. Guntz communique la suite de ses recherches sur, l'action du magnésium sur les oxydes des métaux alcalino-terreux; il ajoute que si, à basse température, le magnésium réagit sur la chaux, vers 10009, au con- traire, le calcium décompose la magnésie quantitati- vement en donnant du magnésium pur. — M. A. Guyot, a constaté que les éthers oxaliques jouissent de la, propriété de se combiner aux amines aromatiques ter- tiaires en présence de chlorure d'aluminium pour. donner naissance à une série de produits de conden- sation plus ou moins avancés suivant la température à laquelle on opère et la quantité d'AICF : 1° des éthers dialcoylamidophénylglyoxyliques R'*Az.C°H*.CO.CO8R ; . 20 des éthers tétraicoyldiamidodiphénylglycoliques (R?A7.C°H4}? C(OH)CO?R:; 3 des éthers hexaméthyltriami- dotriphénylacétiques (R!Az.C°H:)° C.CO'R. Cette faculté de condensation des éthers oxaliques avec les amines aromatiques tertiaires semble présenter un grand ca- ractère de généralité. Toutefois, les rendements, qui sont généralement assez élevés et dépassent 6 °/ du rendement théorique, sont médiocres lorsqu'on opère ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 43 avec l'oxalate de méthyle. Traitées par l'acide sulfurique concentré et chaud, ces trois catégories d'éthers perdent une molécule d'oxyde de carbone et donnent quanti- tativement : 1° des acides dialcoylamidobenzoiïques REAz.CH'.CO’H; 2 des tétraalcoyldiamidobenzophé- nones R'?Az.C°H:.CO.C‘H:.AzR®; 3° des hexaalcoyltria- midotriphénylcarbinols (R'*AzC°H"}" = COH. Or, ces pro- duits de décomposition sont précisément les termes qui prennent successivement naissance dans l'action du gaz phosgène sur les amines aromatiques tertiaires et qu'on prépare aujourd'hui industriellement par cette méthode. Il en résulte que nous disposons, grâce aux éthers oxaliques, d'un procédé nouveau permettant de préparer ces trois classes de composés sans employer le chlorure de carbonyle, d'un maniement si pénible. — MM.A. Guyot et Vallette poursuivent l'étude, com- mencée par l'un d'eux en collaboration avec M. Catel!, des dérivésæ-arylés du benzo-furfuraneetde son hydrure et en décrivent quelques nouveaux représentants. Par l'action ménagée de C°H° MgBr sur la monotolyl-phta- lide, ils ont obtenu le p-tolyl-phényloxy-z"-benzo-6f"- dihydro-furfurane (1), cristaux blancs que la chaleur ou, mieux, les agents déshydratants transforment par perte d'une molécule d'eau en p-tolyl-phényl-ax- benzo-68!- furfurane (Il), feuillets d’un jaune intense, F. 880, solubles avec une fluorescence verte de toute beauté dans la plupart des véhicules organiques : LR ŒM°. CH Ne C— C'H*.CHS ces do A cé C‘H < 0 HO/ “cons C— C'H5 I Il Ce dernier composé, oxydé en solution acétique par le bichromate de sodium, donne le p-toluyl- benzoyl- benzène-1 :2, cristaux incolores F.159, solubles en rouge fuchsine dans l'acide sulfurique concentré. Traité en solution alcoolique par l'amalgame de sodium, il fixe quatre atomes d'hydrogène et donne le tolhydryl- benzhydryl-benzèue-1 : 2, fondant à 102°,qui par déshy- dratation ménagée fournit le tolyl-phényl-az'-benzo-5f- dibydro-furfurane, F. 140°. En faisant agir un excès de C‘H°MgBr sur la monotolyl-phtalide, les auteurs ont obtenu un second produit par fixation de deux molécules d'organo-magnésien : l’ortho-tolhydryl-tri- phényl-carbinol, fondant à 482°, que l'acide sulfurique concentré et froid transforme par perte de deux molé- eules d'eau etcondensation anthracénique en p-tolyl-9- phényl-10-anthracène, cristaux d’un jaune pâle fondant à 489°, qui fournit par oxydation en solution acétique par le bichromate de sodium un diol: le p-tolyl-9- phényl-10-diol-9:10-dihydro-anthracène, fondant à 2129, soluble avec une belle coloration bleu indigo intense dans l'acide sulfurique concentré. — MM. A. Guyot et Pignet,en condensant le chlorure de l'acide diméthyl- amido-ortho-benzylbenzoïque avec la diéthylaniline, ont obtenu une nouvelle cétone (CH*)*Az.C‘H#.CH>.C‘H*.CO. C°H4.Az (C°H°}, cristaux jaunes, fondant à 140°, que les réducteurs transforment successivement en hydrol, prismes incolores, F.73, puis en dérivé méthanique, petits cristaux blancs fondant à 57°. Broyé avec de l'acide sulfurique concentré, l'hydrol précédent perd une molécule d'eau et donne un dérivé du phényl-dihy- droanthracène, que les oxydants transforment en dérivé anthracénique proprement dit. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 1 Novembre 1906. MM. R. B. Haldane et le Vicomte Iveagh sont élus membres de la Société. MM. G. A. Buckmaster et J. A. Gardner : La quan- ! Bull. Soc, Chim., 3° série, t. XXXV, p. et 1124. 561, 562, 567 Lité anesthésique et mortelle de chloroforme dans le sang. Les auteurs, après avoir rappelé les recherches récentes des savants français J. Tissot et M. Nicloux sur le même sujet, décrivent leurs propres expériences. La quantité de chloroforme dans le sang artériel au moment où les réflexes conjonctivaux et de la queue ont disparu, puis quand les mouvements respiratoires cessent, et enfin quand les réflexes réapparaissent, à été calculée d’après la différence de contenu du chlore dans le sang avant et après l'administration de l'anes- thésique ; le chlore a été déterminé par la méthode bien connue de Carius. Des expériences préliminaires ont montré que le contenu normal en chlore du sang ne varie pas pendant l’anesthésie prolongée par l'éther. Des résultats de toutes les expériences (exécutées sur les chats principalement et sur quelques chiens), on déduit que la quantité de chloroforme dans le sang artériel, au moment où les réflexes conjonctivaux dis- paraissent, varie de 14 à27,6 milligrammes par 100 gram- mes’ de sang. La vitesse d’induction de l’anesthésie est un facteur particulier à chaque animal. La dose mor- telle moyenne de chloroforme dans 100 grammes de sang est de 40 milligrammes. Après l'anesthésie, Île chloroforme est éliminé avec une extrème rapidité. L'expérience montre que le chloroforme inhalé est d'abord associé avec les corpuscules du sang et ne passe dans le plasma que lorsque l'anesthésie est poussée à un point extrême ou qu'une grande quantité de vapeur est rapidement administrée. Séance du 8 Novembre 1906. Le Duc de Connaught est élu membre de la Société. M. L. Southerns à poursuivi, parallèlement à MM. Poynting et Philips, des expériences pour recher- cher avec exactitude s'il se produit une altération dans le poids d’une substance donnée consécutivement à une variation de sa température.Ses résultats lui permettent de conclure avec certitude que, dans les limites de température employées (10° à 30°), il n'existe pas de variation de poids supérieure à 1/10 pour une éléva- tion de température de 1° C. — M. R. J. P. Roberts présente un micromanomètre compensé, destiné à ser- vir d'anémomètre et pour l'indication et la mesure de faibles pressions. Les deux branches d’un tube en V de large diamètre sont reliées par un tube de dia- mètre plus petit (1/10) replié horizontalement, con- tenant une bulle d'air dans le mercure, qui sert d’in- dex. — M. R. C. Maclaurin étudie au point de vue numérique les propriétés optiques des plaques métal- liques minces. — M. W. N. Hartley a recherché l'ori- gine des rayons continus observés dans le spectre d'étincelle des métalloïdes et de quelques métaux. I à reconnu que la nature du gaz entourant les électrodes a une influence distincte sur le spectre; le spectre con- tinu n'est pas causé par l'oxydation, car dans tous les cas il est le plus fort quand les électrodes sont immer- gées dans l'hydrogène ou l'azote, tandis que les spectres sont les plus faibles dans une atmosphère contenant de l'oxygène, libre ou combiné. — M. £. H. Buchner a déterminé la composition de la thorianite et la radio- activité relative de ses constituants. 2k grammes du minéral ont été dissous dans l'acide nitrique bouillant, en laissant seulement un faible résidu qui a été fondu avec le sulfate acide de potassium. La masse fondue se dissout presque entièrement dans l’eau. Les solutions obtenues ont été traitées de la facon ordinaire et l'on en a retiré Pb, Cu, Sn, Sb, Fe, Al, Ur, Th, Ce, Zr, Ti, Ca, qui ont été déterminés quantitativement, ainsi que He, CO? et H°0. La plupart de ces éléments sont pré- sents en faible quantité; on a trouvé : Pb O, 2,42 °/,; Fe*0?, 3,35 °/.: Ur‘O8, 43,12 °/. ; ThO?, 70,96°/,; Ce*0*, 1,96 °/, ; He, 8,2 ce. par gramme de minerai. Le minerai original possède 83,3 °/, de l’activité dé l'oxyde d'ura- nium type ; 60 °/, de l'activité est allié à la thorite, 9 °/ à l'uranium ; la forte activité du fer paraît due à la pré- sence du radio-thorium de Hahn. —M.E. A. Minchin a reconnu l'existence d'une enkystation du Trypanosoma of 16 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Grayi dans l'intestin postérieur de la Glossina palpalis. Toutes les analogies avec les autres Protozoaires suggè- rent que les kystes sont destinés à être éliminés et à in- fecter des hôtes frais, probablement, dans ce cas, les Ver- tébrés dont la mouche obtient des trypanosomes. On se trouverait donc en présence d'un mode jusqu'alors insoupçonné d'infection par les trypanosomes, dans lequel les parasites, pris du sang des Vertébrés par des Invertébrés suceurs de sang, passent, dans l'intestin de ces derniers, par un cycle de développement qui se ter- mine par l'enkystation du parasite. Dans cet état, il est évacué et il réinfecte les Vertébrés-hôtes en conta- minant leur nourriture ou leur boisson. Ce mode d'in- fection peut ètre appelé contaminatif, par opposition au mode 2noculatif observé dans la malaria. Séance da 22 Novembre 1906. M. J. S. Macdonald poursuit ses recherches sur Ja structure des fibres nerveuses. Des fibres nerveuses, disséquées dans des solutions salines inoffensivés et examinées au microscope, présentent une série d’appa- rences variées qui sont distribuées dans un ordre constant tout le long de la fibre. Cette distribution est due, suivant l’auteur, au courant électrique qui tra- verse la fibre intérieurement à partir de chaque point lésé et qui quitte la fibre pour traverser la solution saline à certains points cathodaux définis. À chaque point lésé, source du courant, la matière colloïde est précipitée et est entourée d'une solution aqueuse. Par l'emploi de réactifs définis, on trouve que cette solution est une solution concentrée d'un sel de potassium, probablement le chlorure. L'auteur, dans un Mémoire antérieur, avait déjà attiré l'attention sur l'importance de ce fait, la lésion étant considérée comme la consé- quence fatale d'une violente excitation, et sur la pro- babilité que l'excitation est la conséquence d'une dé- solution de la matière colloïide et de la libération du sel inorganique qui diffuse et donne naissance à la variation électrique. Aux points cathodaux, on observe une série de conditions similaires, d'origine secondaire par rapport à celles qui ont été décrites à la source du courant. La région lésée est nettement limitée par une «région anodale » adjacente, où la matière de la fibre nerveuse à une apparence exceptionnellement fluide. La région anodale passe à la région cathodale par une série graduée de changements coagulatifs. L'auteur estime que les neurofibrilles, qui sont communément regardées comme des éléments de structure de la fibre nerveuse, sont des précipités de protéides. — M.J. ©. W. Barratt: Sur les opsonines en relation avec les cellules rouges du sang. L'auteur montre : 4° qu'on peut déterminer quantitativement le contenu opso- nique du sérum en employant la phagocytose comme preuve de la présence de l’opsonine des cellules rouges du sang et en évitant la phagocytose spontanée ; 2 que l'action de l’opsonine sur la cellule rouge procède avec une vitesse correspondant à celle que présente une réaction stæchiométrique bimoléculaire. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 6 Décembre 1906. MM. A. W. Crossley et N. Renouf, en réduisant le 5-chloro- 3-céto- 1 : 1-diméthyl-A‘-tétrahydrobenzène par divers moyens, ont obtenu : avec Na en solution éthérée, le 3-hydroxy-1 : 1-diméthylhexahydrobenzène; avec Na en solution alcoolique, le 3-hydroxy-5-éthoxy- 41:1-diméthylhexahydrobenzène, Eb.135° sous25 mm.; avec Zn en solution aquo-alcoolique, le 3-céto- 1: 1-di- méthyl-Af-tétrahydrobenzène, Eb. 88,5 sous 32 mm. : avec Zn en solution acétique, le 3-céto-1 : 4-diméthyl- hexahydrobenzène, Eb. 77°,5 sous 27 mm. Il se forme danschaquecas un peu de composédicyelique. — M.R. Meldola, en nitrant le diacétyl-p-aminophénol, est arrivé à un nouveautrinitrocéataminophénol (OH: AzO®. Az0* : AzHAc : AzO® —1 : 2:3: 4: 5), K. 4780-479c, dont le groupe nitro placé en 3 est très labile, ce qui perme au nouveau Corps de se combiner facilement aux amines pour donner des benziminazols substitués. = M. F.P. Leach, en faisant agir AzH° et l'alcool sur nitrosochlorure de pinène à 45°-50°, a obtenu uné nitrolamine (I), F. 1239-4125, qui réagit facilement! avec les aldéhydes pour donner des produits de con densation cristallisés (IT) : C:AzOH : AzO c'H< | < cue/ | br” NC{CHS).AzH? S C(CH*).Az:CH.R (1) (11) — Le mème auteur, en faisant réagir le cyanate de K sur le nitroso-chlorure de pinène, a obtenu un com posé (I), F. 238°-240°, qui est réduit par Zn et l'acide acétique en une pseudo-carbamide (IV), F. 224 : C—A70 CO cHv£ | SazH NC(CH:).AzH.C0/ (III) CH— AzH CHE | Nco NC(CH:).AzH/ (IV) —— MM. W.H. Perkin jun. et R. Robinson, en traitant par AICI un mélange de chlorure de vératryle et d'éthe triméthylique du pyrogallol dissous dans CS?, ont obtenu la 1:2:3:3':4-pentaméthoxybenzophénone, F. 1259. Avec l'éther triméthylique du phloroglucinol il se forme la 2: 4:6 : 3! :4'- pentaméthoxybenzophé none, F.156°-1579, identique à la pentaméthylmaclw rine. Le chlorure de pipéronyle et l'éther triméthylique du phloroglucinol donnent, dans lesmêmes conditions la 3°: #-méthylènedioxy-2 : 4: 6-triméthoxybenzophé none, F. 133, identique à l'oxyleucotine de l'écorce de coto. — M. J. S. Lumsden énonce la loi suivante, qu'il a vérifiée sur un certain nombre de substances : Quand une substance à l'état liquide se dissout sans change= ment de volume, la même substance à l’état solide ou gazeux, quand elle sera dissoute dans le même solvant, prendra le volume que le même poids de cette subs- tance occuperait, si elle était un liquide pur à la tem- pérature de la solution. — M. J. L. Simonsen, en trai- tant l'acétylsuccinate d’éthyle par MgCHI, a obtenu le térébate d'éthyle ; avec le $-acétylglutarate d’éthyle, on obtient le terpénylate d’éthyle. Enfin le dérivé sodé de l'acétylsuccinate d’éthyle réagit sur le B-iodopropio- nate d'éthyle pour former le £-acétylbutane-28-tricar- boxylate d'éthyle, qui, hydrolysé par HCI, fourni l'acide G-acétyladipique, F. 102; l'éther éthylique de ce dernier, traité par MgCH°I, est converti en homo- terpénylate d'éthyle. — MM. K. J. P. Orton, J. E. Coates et F. Burdett ont constaté que les solutions de sels de diazonium dans divers solvants se décomposen rapidement par exposition à la lumière. Le produit de la réaction dépend du solvant : en solution aqueuse, il se forme un phénol; en solution alcoolique, un éther phénylacoolique; en solution formique, on obtient un hydrocarbure. — MM. A.E. Dunstan et R. W. Wilson ont déterminé la courbe de viscosité des mélanges d'acide sulfurique et d’eau ; elle présente un maximum pour H?S0*. H°0 et un minimum pour 3H?S0*.2H°0. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Octobre 1906. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. H. Schoute pré- sente pour les Mémoires de l'Académie: « Regelmäs- sige Schnitte und Projektionen des Hundertzwanzig- zelles und Sechshundertzelles im vierdimensionalen Raume » (Sections et projections régulières de l'héka= tonikosaèdroiïde et de l'hexakosièdroïde dans l'espace à quatre dimensions. Seconde partie (pour la première, parue en 1894, voir la Rev. génér. des Se.,t. V, p.435). Dans ce travail, illustré par 18 planches, l'auteur étu- die les sections parallèles perpendiculaires à une dia- gonale centrale, ou à une droite transversale, joignant Séance du 27 xidière Lan EN Q de! ? Î x à : ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ’ 47 Jes milieux soit de deux arêtes opposées, soit de deux . faces opposées, soit de deux corps limitants opposés, | et les projections centrales, un point d'une de ces quatre droites étant le centre, un espace perpendicu- laire à cette droite étant l'espace de projection. Après avoir prouvé que les projections de l’un des deux po- lytopes sont des figures polaires réciproques de sec- tions déterminées par rapport à des sphères determi- nées de l’autre, l'auteur étudie les quatre séries de sections parallèles des deux polytopes. Ainsi, il trouve 421 sections de l'hékatonikosaèdroïde et 59 sections de l'hexakosièdroïde, différant entre elles dans le sens de l'isomorphisme des polytopes. Dans la table qui ter- mine cette étude, le symbole 3/4/2618(52,84,34)3%04" fait connaître un polyèdre à 52 sommets, 84 arêtes, 34 faces, limité par 4 triangles, 12 quadrangles, 18 hexagones, 40 des sommets formant les points de réunion de 3 et 12 des sommets formant les points de réunion de % arêtes. — Ensuite M. Schoute présente, au nom de M. W. A. Versluys: Seconde communication sur les équivalents Plückériens d'un point cyclique dune courbe gauche. Pour la première communication, voir Rev. geénér. des Se., t. XVIL, p. 55. 20 Scrences PaysiQues. — M. W. H. Julius: Distri- bution arbitraire de la lumière dans les bandes de dispersion. Conséquences spectrosecpiques et astro- physiques. En Spectroscopie expérimentale et dans ses Fig. 1. — Appareil de M. Julius pour étudier l'influence de la dispersion sur les raies spectrales. — NN, tube en nickel; M, M', manteaux parcourus par un courant d'eau froide ; aa!, bb!, tubes A cuivre, portant les tubes de nickel À et B, parcourus par un courant électrique; e, tube pyrométrique; d, tube à air. applications à des problèmes astrophysiques, on déduit de l'apparence des raies spectrales des conséquences relatives à la température et à la densité des gaz envi- ronnant la source de lumière. En bien des cas, ces conclusions doivent être fausses, si l'on cherche l’ori- gine des raies obscures exclusivement dans l'absorp- . tion, celle des raies lumineuses exclusivement dans l'émission sélective, et si l’on ne tient pas compte de la circonstance que la distribution de la lumière dans le spectre dépend tout aussi bien de la dispersion anor- male des rayons dans la matière absorbante. Ce n’est pas par exception que cette dernière influence se fait sen- tir. On sait déjà que la plupart des vapeurs métalliques causent une dispersion anormale de ces espèces de lumière correspondant au voisinage de quelques-unes de leurs raies d'absorption. Dans tous ces cas, le carac- tère des raies d'absorption en doit subir l'influence, la masse de vapeur traversée n'étant jamais homo- gène. Done, il est nécessaire d'examiner pour elle seule l'influence de la dispersion sur les raies spectrales: il faut tâcher de la séparer des phénomènes purs d'émis- sion et d'absorption. À cette fin, il faut chercher à obtenir une masse de vapeur aussi homogène que pos- sible et à construire un appareil qui permette d'y réa- liser des variations locales de la densité, n'aflectant pas sensiblement la densité moyenne, de manière que le pouvoir absorbant puisse être considéré comme constant. De plus, il était désirable d'examiner la vapeur à une température relativement basse, afin qu'on n'ait pas à tenir compte de son spectre d'émis- sion. L'appareil dont s’est servi l’auteur consiste en un tube NN’ (fig. 1) en nickel, de 60 centimètres de lon- gueur, dont la partie moyenne se trouve dans un four électrique de Heraeus, et dont les extrémités portent des couvercles à fermeture hermétique. Le four étant en action, un courant continu d’eau froide conduit par les deux manteaux M,M' maintient une température constante des extrémités. Chacun des deux couvercles porte une fenêtre rectangulaire et, de part et d'autre, deux ouvertures a et à (D' et a') pourvues de petits tubes de cuivre; de plus, un des couvercles porte encore deux autres tubes ec et d (voir aussi fig. 2); par E , â DIE | FES S CN F P «— _ 90 EE » Fig. 3. — Æ£nsemble du dispositif de M. Julius. — L, source lumineuse; E, F, lentilles; Q, écran; S, fente du spectro- graphe ; NN', tube en nickel contenant la substance à l'état de vapeur. e, un tube en porcelaine d’un pyromètre de Le Chate- lier est introduit, tandis que d porte un robinet à mer- cure, menant à un manomètre et à une machine pneu- matique de Geryk. Reste encore à décrire l'appareil par lequel on peut causer des variations arbitraires dans la densité. Il consiste en deux tubes en nickel A et B menant de a à a! et de 2 à D' et courbés de telle facon qu'ils se trouvent à côté l’un de l’autre dans la partie échauffée du tube NN’. Ces tubes A et B sont fixés hermétiquement dans les trous des couvercles à l'aide de presse-étoupe en caoutchouc, ce caoutchouc isolant en même temps À et B au sens électrique de NN’. Les quatre extrémités des petits tubes sont refroi- dies à l’aide de courants d’eau. Si l’on fait passer un courant électrique par À ou B, la température du tube s'élève un peu; au contraire, on y abaisse la tempéra- ture en y faisant passer un courant d'air. Les inten- sités des courants et donc aussi les températures se maintiennent constantes durant un temps assez consi- dérable. L'appareil entier est représenté schématique- ment par la figure 3. La lumière du charbon positif L est concentrée par la lentille E sur l'écran Q, où se trouve une fente dont la largeur peut être variée. La lentille F forme dans le plan de la fente S une image distincte du diaphragme P. L'axe optique des deux lentilles passe par le tube NN'à vapeur de sodium entre les deux tubes A et B. Si l'ouverture du diaphragme P Fig. 2. Fig. 4. Fig. 2. — Appareil de la figure 1, vu de face. — Mêmes lettres. Fig. 4. — Forme de l'incision du diaphragme. a la forme d'une fente étroite verticale dont l'image tombe sur la fente du spectrographe, on apercoit dans le dernier le spectre continu de la lumière électrique. Le tube NN’ n'étant pas chauffé, on aperçoit les raies D, et D, comme des traits obscurs extrêmement fins, attribués à l'absorption du sodium toujours présent à proximité du charbon. Si l'intensité du courant dans le four est telle que l'élément thermique accuse une + 48 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES température constante (de 3909), presque tous les rayons de lumière traversent la masse de vapeur en forme de droites. Alors le spectre n’est pas altéré; seu- lement les deux raies D sout un peu plus fortes. En chassant un courant faible d'air à travers À, on voit s'élargir bientôt les raies du sodium. Cela ne saurait être une conséquence d'une absorption plus forte, la densité moyenne de la vapeur n'étant pas changée sensiblement. En voici la cause. Les rayons de lu- mière à indice de réfraction très grand sont déviés vers g' (fig. 3), ceux à indice très petit vers gq; ainsi dans l'image de la fente du diaphragme P formée en S, les espèces de lumière correspondant aux parties du spectre situées de part. et d'autre des raies D font défaut, tandis que cette image reste parfaitement distincte, la marche de toutes les autres lumières n'ayant pas subi de variations sen- sibles. En échauffant en même temps le tube B à l’aide d'un courant de 20 ampères, de manière à agrandir la différence de la densité dans l'espace entre les deux tubes, la largeur des raies s’accroit encore visiblement. Et si, momentanément, on échange les rôles des tubes Fig. 5. — Speclres du sodium observés à la suile de la dispersion des raies. A et B, on voit les bandes obscures se rétrécir, rede- venir des traits fins, pour reprendre après deux minutes la largeur originale."Ainsi, à côté des deux causes con- nues de l'élargissement des raies spectrales : 1° le mou- vement des molécules lumineuses dans la direction de la ligne de vision; 20 les variations des périodes de vibration des électrons par les chocs des molécules, vient se joindre une troisième: la dispersion anor- male dans le milieu absorbant. Toute la série des phé- nomènes démontrée à l’aide du tube à vapeur de so- dium mène à l'opinion que cette troisième cause est la plus importante. Nous allons voir qu'elle influence non seulement les raies obscures, mais tout aussi bien les raies lumineuses. Si l’on élargit la fente du dia- phragme du côté de p', le spectre n'en subit aucune influence, tant que les tubes A et B ont la température de l'entourage; les raies D se présentent comme en & (fig. 5). En abaissant la température en A et en l’élevant en B, les raies obscures D s'élargissent du côté des longueurs d'onde plus petites, l'intensité de lumière s'accroissant encore de l'autre côté, des rayons du champ p' dispersés anormalement pouvant atteindre le point S à travers la fente Q (voir f, fig. 5). Le spec- tre £ se transforme en y si l'on change le signe de la différence de température entre A et B, ou bien si l'on élargit la fente en P du côté de p. Un petit déplace- ment du diaphragme entier, mettant S dans l'ombre, fait apparaître le spectre 5, faisant l'impression d'un spectre d'émission du sodium à raies tant soit peu déplacées, quoiqu'en réalité il soit engendré exclusive= ment par des rayons du champ p' ayant subi une dis- persion anormale dans la vapeur. Représentons-nous encore une fois le diaphragme P à fente étroite placé sur l'axe optique, et le spectre à raies larges corres- pondant à une différence de densité en A et B. Laissons parvenir, à l’aide d'une incision dans la feuille d’étain* du diaphragme, à côté de la fente, un groupe de rayons de longueurs d'onde déterminées à travers Q et S. Alors la bande obscure présente une tache lumineuse d'une forme dépendant de celle de l'incision. Si lin- Gision du diaphragme a la forme de la figure #, on ob- tient le spectre :; en faisant décroître la différence de densité, le spectre + se transforme en £; en renver- sant le signe de cette différence, on passe par & (diffé- rence — 0) et n à ü. Ainsi l'on peut créer des dédouble- ments, des renversements, des branches claires ou obs- cures de raies spectrales à discrétion. Ensuite, l’auteur recherche s'il est probable que les circonstances des expériences se présentent, soit dans la Nature, soit en des recherches spectroscupiques entreprises dans d'autres buts. D'abord des ouvertures curieuses du dia- M phragme ne sont pas nécessaires pour engendrer les phénomènes observés. Enfin, l’auteur examine les ; rapports quantitatifs. Autrefois, il a démontré (Rev. « génér. des Se.,t. XV, p. 480-495) qu'on peut s'imaginer que le Soleil est un corps gazeux dont les matières constiluantes sont mélangées intimement, tous les phé- nomènes qui donnent l'impression d'ètre produits par des matières séparées pouvant être expliqués à l’aide de l'absorption anormale. 11] conclut son article de haute importance en tentant de démontrer que la dis- tribution de la lumière la plus probable exige cette M constitution du Soleil. Ainsi, dorénavant, les raies de « Fraunhofer ne sont plus exclusivement, comme le croyait Kirchhoff, des raies d'absorption, mais printi= palement des raies de dispersion. Il faut que nous nous habituions à l'idée de rayons de lumière courbes, ete: — M. H. W. Bakhuis Roozeboom : La conduite mu tuelle des halogènes. — Ensuite M. Roozeboom pré- sente, au nom de M. J. M. Jaeger: Une substanre à cinq phases liquides différentes, dont au moins trois sont Stables par rapport au liquide isotrope. I s'agit de C*H#%O?C.CH: CH.C'H*. — M. H. Kamerlingh On- nes et C. A. Crommelin : La mesure de températures très basses. IX. Comparaison d’un élément thermique constantan-acier avec le thermomètre à hydrogène (voir Rev. génér. des Se., t. XNII, p. 802). Post-scrip- tum. — M. H. Kamerlingh Onnes et C. Braak: La mesure de températures très basses. XIII. Détermina- tions avec le thermomètre à hydrogène. Avec une planche. — Enfin, M. Onnes présente, au nom de M. W. van Bemmelen: « Erdmagnetische Pulsatio- nen » (Pulsations du magnétisme terrestre). 3° SCIENCES NATURELLES. — M. L. Bolk : « Das Cere- bellum der Säugetiere. Ein vergleichend-anatomische Untersuchung ». (Le cerveau des mammifères, étude d'anatomie comparative). — Ensuite M. Bolk pré- sente au nom de M. A. J. P. van den Broek : Sur le rapport des voies génitales à laglande génitale des Marsupiaux. — M. J.-M. van Bemmelen présente au nom de M. H. G. Jonker: « Liste des publications se rapportant à la géologie des Pays-Bas. » Sont nommés rapporteurs : MM. van Bemmelen, K. Martin et G.-A. Molengraaff. CS P.-H. ScHOUTE. Le Directeur-Gérant : Louis Onivier. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 18° ANNÉE NS 2 30 JANVIER 1907 Revue générale des SCENE pures ef appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aûresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et «les 11 publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et Ia Hollan CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Le Colonel Mannheim. — La France vient de perdre un savant de premier ordre. Son œuvre ne pourra être dignement exposée et appréciée que par un de ses pairs, avec des dévelop- pements qui ne sauraient être renfermés dans les li- ‘nites trop étroites d'une Notice. Il ne peut s'agir ici que de donner dès à présent une idée de la vigueur de son esprit, de la multiplicité de ses travaux et de l'originalité de sa méthode. Au début de sa carrière, les esprits étaient surtout frappés de ces méthodes de transformation qui, intro- duites par Poncelet, Chasles, Bellavitis, …., ont donné d'abord à la Géométrie une puissance et une fécondité inattendues, et qui, pénétrant ensuite dans l'Analyse, Jui ont ouvert la voie de ses plus profondes découvertes. Mannheim s’occupa, dans ses premiers essais, des transformations par inversion et par polaires réci- proques. Il s'attache aux propriétés métriques, moins dociles à ces méthodes que les propriétés descriptives, et dont Poncelet ne venait à bout qu'en les rendant d'abord proiectives. Il se passe de cet artifice, et les transforme directement. Il fait plus : peu satisfait d'être arrivé à une propriété nouvelle en faisant jouer la mé- thode de transformation ;comme une sorte de méca- nisme, il porte la transformation sur la démonstration elle-même, et fait assister, en quelque sorte, à l'évolu- üon même des idées. Mais bientôt il est attiré par des questions d’un ordre nouveau où il entrevoit, puis découvre un domaine qu'il fait sien, et où il établira en maître toute son œuvre. Il s’agit, en effet, d'aborder géométriquement la Comparaison des arcs, les propriétés infinitésimales ‘ordre supérieur des surfaces, des courbes planes et Sphériques, de faire rentrer enfin sous la prise de la Géométrie pure des problèmes qu'il semblait que l'Analyse était seule capable d'agiter et de résoudre. Il doit donc créer à mesure son instrument de re- cherche, et il sait déjà qu'il le trouvera dans l'étude du déplacement des figures. Dès lors, il s'attaque à cette ‘question, et d’abord il la renouvelle. Jusqu'à lui on n'avait étudié que le déplacement d'un REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. | solide libre, .et personne n'avait songé à imposer des conditions aux déplacements, et à suivre, d'après ces conditions, les déplacements qu'elles déterminent. Une idée féconde était au bout de cette voie : cinq con- ditions déterminent un déplacement; mais si l’on retire une condition ? Le déplacement indéterminé qui en ré- sulte n'est pas arbitraire ; un point du système est assujetti maintenant à décrire non une ligne, mais une surface. Ce qui se présente alors est bien la généralisa- tion dans l’espace du déplacement plan, et il faut s'at- tendre à rencontrer ici la généralisation du centre ins- tantané par lequel passent toutes les normales. Le pénétrant géomètre la trouva, et il put énoncer ce beau théorème d'après lequel les normales à toutes les sur- faces trajectives rencontrent deux mêmes droites. Pendant sept années, cette étude du déplacement à deux paramètres est poussée dans tous les sens; les surfaces trajectoires révèlent leurs propriétés infinité- simales jusqu'aux deuxième et troisième ordres. Sil s'agit de l’élémentinfinitésimal engendré par une droite, un pornt représentatif adjoint à cette droite représente, dans le cas d’un seul paramètre, l'élément de surface réglée: un segment de cercle dont le plan contient la droite donne, dans le cas de deux paramètres, une représentation plane, d'une simplicité saisissante, de l'élément de congruence ou pinceau. Il faut voir, dans ce problème d'optique géométrique où il transforme par la réfraction un pinceau incident, comment il sait conduire cette méthode qu'il a créée, et comment il fait d’un problème une construction, un édifice géo- métrique achevé, devant lequel l'esprit ressent dans sa plénitude la satisfaction de la solution définitive. A ce moment, la Géométrie Cinématique est tout entière constituée dans l'esprit de son inventeur. Il ne désigne pas seulement sous ce nom l’ensemble des propriétés du déplacement des figures invariables, con- sidéré indépendamment du temps; en réalité, il inau- gure une méthode nouvelle. En effet, il ne fait pas seulement servir aux démonstrations les propriétés des systèmes invariables; l'instrument qu'il présente est bien plus souple, plus délicat, plus pénétrant. I plie à son usage les systèmes déformables : angles, dièdres, polygones, polyèdres... ; il démêle dans chaque élé- ment la partie invariable, et, passant d’un élément au 2 50 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE suivant, il arrive à des formules composées en général de simples rapports, qui lui permettent de poursuivre et d'atteindre jusque dans les ordres supérieurs des propriétés infinitésimales qui jusqu'alors n'avaient cédé qu'à l'Analyse, qui lui avaient mème été rebelles. Pour mettre en lumière la puissance et la pénétra- tion de la méthode, il en multiplie les applications variées, ingénieuses, profondes. Elles sont réunies dans le monument qu'il à laissé, le grand livre des « Principes et Développements », où toute son œuvre est exposée et coordonnée. C'est là que se trouvent cette théorie nouvelle du contact des surfaces, poussée pour la première fois jusqu'au troisième ordre, et cette belle étude de la surface de l'onde où, après’tant de découvertes géométriques, il arrive à des propriétés optiques qui avaient échappé à Fresnel et à ses suc- cesseurs. C'est,-enfin, grâce à cette méthode que le Cours de Géométrie descriptive de l'Ecole Polytechnique pré- senta, dans l'exposition et les démonstrations, une unité qui aurait pu paraître incompatible avec la diver- sité et la nature des questions de son programme. Courbure des surfaces, raccordement des surfaces réglées, courbes d'ombre.., tout était ramené et s'or- donnait suivant la même ligne, et formait cet ensemble harmonieux et fortement original de l'enseignement géométrique de notre Ecole, qui en était si justement lière. Il vint un jour où elle put le lui dire dans une forme à la fois affectueuse et solennelle. Le Colonel Mann- heim, qui aimait passionnément et l'Ecole et «la noble Géométrie », reçut cet hommage avec une émo- tion profonde, qu'il emporta dans sa retraite, et qui depuis, au moindre mot, l’attendrissait et le consola de bien des choses. Le souvenir qui lui fut alors offert reçut, dans l'asile sérieux et calme où, jusqu’au dernier jour, il recueillait sa pensée toujours active, une belle place entre d’autres souvenirs si chers. C'est-là qu'il a terminé sa noble vie, laissant à la Science un monument durable, à l'Ecole des leçons et un exemple que ceux à qui il fut donné de le bien connaître envelopperont avec émotion dans la piété du souvenir. J. Réveille, Docteur ès sciences, Ancien élève de l'Ecole Polytechnique. $ 2. — Astronomie Sirius. — Cette belle étoile suscite de nombreux et importants travaux : dernièrement, à la Société astro- nomique du Pacifique, les observations spectroscopiques faites sur Sirius étaient résumées par M. Campbell, directeur de l'Observatoire Lick. On peut adopter pour éléments du système double qu'elle forme ceux que calculait M. Zwier en 1899, savoir : Durée de la révolution. Passage au périastre . Demi-grand axe . Excentricité . . Inclinaison. . . . . Position du nœud . 48,S421 ans La parallaxe, d’après Gill, est 0"37; suivant Auwers, les masses relatives des deux corps seraient 2,20 et 1,04 en adoptant pour unité la masse du Soleil. Comme les deux grands corps du système de Sirius circulent autour de leur centre de gravité, leur vitesse radiale par rapport à nous passe à son maximum lors- qu'ils sont aux nœuds de l'orbite, c’est-à-dire à la même distance de l'observateur. Depuis 1896, on prit donc, à l'Observatoire Lick, un grand nombre de clichés de Sirius au point de vue du déplacement des raies de son spectre, produit par son mouvement sur la ligne de notre rayon visuel, et, en les comparant avec les plus récentes déterminations de Potsdam et de Paris, on en conclut que le système de Sirius s'approche de nous à la vitesse de 3,4 par seconde. En outre, depuis 1891, l'astre principal du système deSirius, le corps lumineux s'éloigne de la Terre, de moins en moins il est vrai. Ce résultat, diamétralement opposé aux précédents, n'est pas sans compliquer le problème : car, dès 1868, M. Huggins choisissait Sirius à l'origine pour appli- quer la même méthode et le voyait s'éloigner à la vitesse de 47 kilomètres par seconde. En 1871, Vogel et Lohse trouvent un éloignement plus rapide encore, 75 kilo- mètres par seconde, tandis que quatre années de mesures à Greenwich donnent 35 kilomètres. Malgré les diffi- cultés pratiques de ces recherches, de tels écarts sont inadmissibles entre les diverses déterminations et l’origine de ces variations reste une énigme caplivante. Au reste, il n'est pas jusqu à la couleur de Sirius qui ne préoccupe les astronomes : en 1892, M. See publiait un savant Mémoire sur la couleur de Sirius et, prenant à témoin les vieux textes, affirmait que cette belle étoile devait être anciennement rouge. Torturant à son tour les écrits anciens, M. Schiaparelli parvient, à deux reprises, à des conclusions entièrement opposées, aux- quelles se rallie volontiers M. Callegari, mais qui ne nous paraissent nullement concluantes, à cause, notam- ment, des adjectifs employés en littérature poétique comme synonymes, et auxquels il faut se garder d’atta- cher un sens trop absolu. Faut-il donc nous obstiner sur les vieilles écritures qui mettent en opposition MM. See et Schiaparelli? ou bien en venir à des modifications progressives de la couleur, corrélatives de transformations physiques? Faut-il admettre avec Secchi que les astres rougissent en vieillissant et que les étoiles blanches ou bleues sont les moins anciennes? Devra-t-on reprendre partielle- ment la théorie de Herschel, avec l'interposition de nuages cosmiques plus ou moins absorbants de tels rayons lumineux? L'observation des étoiles temporaires attire de préfé- rence actuellement vers les hypothèses physiques, avec introduction de forces mécaniques très puissantes : l'étoile de Cassiopée que voyait Tycho en 1572 était blanche, puis devint jaune, rouge comme Aldébaran, et reprit sa couleur primitive dans la même année. N'est-ce pas à une conflagration violente, avec dégage- mentde chaleur, qu'il faut attribuer le retour au blanc? Décidément, nous avons encore beaucoup à apprendre et à gagner en précision en ce qui concerne Sirius. D'ailleurs, nous devons ajouter que les données de Zwier adoptées par Campbell ne sont pas les plus récentes, et que M. Doberck est parvenu à représenter assez bien les observations du système de Sirius jusqu'à 1903 avec les éléments suivants, assez différents des résultats antérieurs : LA Durée de révolution . . . . . . . . 49,49 ans Date du passage au périhélie. 1894,28 EXGCERITICLENSER EE PTRPECREEE 0,5871 Demi-grandiaxe.. RS ETS Angle de position du nœud . . . . . . 225°49" Angle formé par la ligne des nœuds et É celle des apsides PRES 299354" Inclinaison de l'orbite sur le plan perpen- diculaire à la ligne du rayon visuel. . 4320! S 3. — Art de l’Ingénieur Les ballons captifs dans l'armée alle- mande. — Par suite des difficultés extraordinaires qu'on éprouve assez souvent à se procurer un point de vue approprié du haut duquel on puisse examiner le terrain environnant, les ballons captifs se sont trouvés rendre des services précieux aux armées pour le service d'éclaireurs. : + Le type de ballon employé d'abord dans l'armée allemande, comme dans celles d’autres pays, était le ballon sphérique bien connu, qui cependant ne se prétait à cet usage que dans le cas de conditions atmosphériques tout particulièrement favorables, c'est- à-dire par un temps parfaitement calme. En effet, un ballon de ce genre, attaché à un càble, exécute des CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE o1 oscillations violentes sous l’action du vent, qui le pousse vers le bas, en même temps que la poussée du gaz qu'il contient tend à le soulever. Or, ces oscillations dérangent évidemment les opérations des observateurs installés dans la nacelle. Lorsque cet état de choses continue pendant un certain lemps, la pression du vent finit par expulser du ballon le gaz tout entier, l'ouverture d'admission restant ouverte continuelle- ment afin d'éliminer le danger d’explosion. Même dans une atmosphère parfaitement calme, les observateurs sont plus ou moins gènés par la tendance que présente le ballon à tourner autour de son cäble. Par suite de ces divers obstacles, le Service aérostatique n'a pu être, jusque dans ces derniers temps, porté au degré de sûreté désirable, d'autant plus que les jours vrai- ment calmes sont exceptionnels; aussi les ballons de l'ancien type n'ont-ils pu servir que pendant un tiers de l’année. M. A. Riedinger, à Augsburg, a été le premier, parmi les constructeurs allemands, à préconiser l'usage du ballon cylindrique. Ce ballon, étant placé obliquement par rapport au vent, d'une facon analogue à un cerf- volant, reçoit une poussée dirigée de bas en haut et qui est renforcée par le vent lui-même. Quoique simple de construction, ce ballon ne réalisa cependant la sta- bilité voulue qu'après que certaines diflicultés eurent été vaincues. Un ballon purement cylindrique, à bouts hémisphériques, loin d'être stable, parcourt en effet des trajectoires en spirale sous l’action du vent qui le pousse rapidement vers la terre. Grâce aux travaux de M. de Parseval, qui a réussi à donner à ce ballon toute la sécurité désirable, les observateurs peuvent désor- mais travailler tranquillement, même par un vent violent. Le principe sur lequel est basée la construction de ce ballon, employé à présent dans l'armée allemande, est le suivant : Le ballon (fig. 1), de forme cylindrique, est divisé en deux compartiments; le supérieur b, plus grand, est la chambre à gaz, et le compartiment infé- rieur €, séparé par une cloison horizontale à, est le bal- lonet. Ce dernier est muni d'une ouverture d dirigée à l'encontre du vent, de facon à se remplir automatique- ment d'air à la tension correspondant au vent qui arrive. Cette pression se propage à travers la cloison supérieure du ballonet vers la chambre à gaz, où la pression du gaz vient s'y ajouter. La pression à l'intérieur du ballon étant, par conséquent, plus grande que dans l'air envi- ronnant, le vent, en le quittant, est incapable d'y pro- duire des creux, comme dans le cas des ballons sphériques, dont la couverture présente des creux pou- vant servir de surfaces d'attaque au vent et qui sont la cause principale de leur instabilité. Le timon f consiste en un anneau creux appliqué au bas de la pärtie postérieure du ballon; il sert à garantir la stabilité nécessaire. Comme le ballonet, il se remplit d'air d’une facon automatique en même temps que l'excédent d'air s'échappe par le haut. Tout en pro- tégeant le ballon contre les oscillations horizontales, ce timon l’ajuste suivant la direction du vent. La sta- bilité de l'aérostat est ultérieurement accrue par des brise-vent q disposés en arrière du ballon et qui exercent sur ce dernier une poussée constante enrayant tout mouvement latéral. Le poids des brise-ventest compensé par des voiles p, attachéès à droite et à gauche dans la partie postérieure du ballon le long de son équateur et qui lui donnent un surcroît de stabilité. L'emploi de ces trois dispositifs différents pour as- surer une stabilité aussi grande que possible présente l'avantage ultérieur de maintenir une stabilité suffi- sante, mème dans le cas où l’un ou l’autre de ces divers organes viendrait à se briser. C’est ce qui vient d'être prouvé lors d’un accident causé par la foudre tombée Sur un ballon et y ayant mis le feu. Grâce à ces dispo- sitifs multiples, situés en dehors de l'enveloppe du ballon, la vitesse de sa chute a été, en effet, amortie au point d'éviter des conséquences fatales. Un autre dispositif de sûreté est enfin constitué par la soupape à gaz e, qui s'ouvre automatiquement aussitôt que le ballon, ayant brisé son câble, arrive à des hauteurs excessives. La pression de l'air extérieur dé- croissant à mesure que le ballon s'élève à des hauteurs toujours plus grandes, il se présente, en effet, un danger d'explosion dû à la tendance d'expansion du gaz. Ce danger est éliminé en reliant la soupape au moyen d'une corde à la cloison supérieure du ballonet. Comme le gaz, en se dilatant, pousse le ballonet vers le bas, la corde, se tendant, ouvre la soupape automatiquement. Ce dispositif a rendu d'excellents services dans des cas de rupture du câble. L'adoption de ces ballons-cerfs-volants a donné aux services d'éclaireurs des troupes de cavalerie le premier moyen de se renseigner rapidement sur la situation de l'armée ennemie, en substituant aux opérations Coupe verticale à travers l'axe longitudinal. Vue latérale. Vue par-dessus: Fig. 1. — Ballon cerf-volant en usage dans l'armée alle- mande. — a, ouverture d'admission; D, chambre à gaz: ec, ballonet: d, entrée du vent dans le ballonet: e, Sou- pape: f, timon: g, entrée du vent dans le timon; h, sortie du vent du timon; ?, cloison supérieure du ballonet: k, chainette intérieure de la soupape; /, càble; m, corde croisée; », cordes de la nacelle; 0, cordes pour ajuster la nacelle: p, voile; g, brise-vent; r, ceinture. fortuites d'autrefois un service sûr, précis et bien orga- nisé, à l'abri même de vents violents. Lors de l'inauguration de l'Exposition Universelle de Milan, le détachement d'aérostiers allemands a réussi à remplir et à enlever un ballon d’une capacité de 609 mètres cubes en vingt-cinq minutes, le ballon, soulevé automatiquement par la poussée du gaz, servant lui-même de monteur. L'opération consistant à ramener le ballon vers la terre est bien plus difficile lorsqu'il s'agit de vaincre la résistance du vent. A cet effet, on se sert en général d’un rouleau suspendu dans le câble et auquel sont attachées plusieurs cordes pendant vers le bas et dont les nœuds sont saisis par les hommes de l'équipage; ces derniers, en courant avec le vent à l'encontre du ballon, produisent la chute de celui-ci par l'effet de traction qu'ils exercent sur les cordes. Le cabestan à câbles exposé à Milan est pourvu d'un moteur à benzine de 26 chevaux; on le dit supérieur aux cabestans actionnés par machines à vapeur dont 52 CARONIQUE ET CORRESPONDANCE on se sert en France; la position basse du cabestan est également un avantage spécial. L'emploi de ces dispo- sitifs augmente de beaucoup les possibilités de l’aéro- nautique militaire, en la rendant indépendante des conditions atmosphériques. ‘Alfred Gradenwitz. $ 4. — Physique L'action des oscillations électriques sur les corps aimantes.— On sait que le détecteur d'ondes électriques imaginé il y a quelques années par M. Mar- coni est basé sur l’action qu'exercent sur les corps aimantés les oscillations électriques traversant l’espace. M. Marconi a constaté, notamment, que les courants oscillatoires produits par les ondes électriques réduisent l'intensité d'aimantation d’un morceau de fer aimanté; le courant secondaire induit par celte réduction d'in- tensité magnétique est utilisé pour révéler la présence des ondes. L'explication qu'on donne d'ordinaire de cette action est que les oscillations électriques affectent le fer d’une facon à peu près analogue aux vibrations mécaniques, c'est-à-dire qu'elles annulent ou réduisent l’hystérèse, permettant au fer d'approcher d'une condition plus par- faitement normale où il n'y aurait pas de perte par hystérèse. Ce sujet vient d’être repris par M. W. H. Eccles!, qui résume les résultats de ses expériences dans un Mé- moire récemment présenté à la Société de Physique de Londres L'auteur se sert de deux faisceaux identiques de fil de fer, aimantés au moyen de deux bobines identiques, reliées en série, les bobines et les faisceaux étant dis- posés de façon à annuler l’un l’autre les effets produits sur un magnétomètre disposé entre les deux systèmes. La bobine à travers laquelle on envoie les oscillations électriques entoure l'un de ces faisceaux de fil de fer. Les expériences ont été faites en faisant traverser aux faisceaux de fil des cycles magnétiques jusqu'à ce qu'une condition stable fût réalisée. C’est alors qu'on a produit, dans la bobine précitée, des oscillations dont l'effet sur l'aimantation du fer a été déterminé en notant la variation de la déviation du magnétomètre, ajusté pour une sensibilité extrême. Les détermina- tions faites par l’auteur sont relatives à différents points des boucles d'hystérèse correspondant à différentes intensités maxima de l’aimantation. Les oscillations étaient produites par la décharge d’une machine électro-statique; le choix du pôle de cette machine relié à la bobine oscillatoire se trouve être parfaitement indifférent. L'auteur constate, dans des conditions analogues, des déviations identiques du magnétomètre. L'effet produit par l'oscillation varie suivant le degré d'aimantation, atteignant un maximum quand la condition magnétique du fer est celle qui correspond au point d'inflexion de la courbe d’hys- térèse. Le résultat le plus intéressant de ces recherches est pourtant le fait constaté par l’auteur que les oscilla- tions exercent des effets identiques respectivement sur les branches ascendante et descendante de la courbe d'hystérèse; c'est dire que, dans l'un et l'autre cas, l'intensité d'aimantation du fer est affaiblie, tandis que les chocs mécaniques imprimés au fer, on le sait, augmentent son intensité magnétique sur le côté ascen- dant de la courbe. L'oscillation exerce donc un effet autre que celui d'annuler l'hystérèse ; aussi l’explica- tion jusqu'ici donnée doit-elle être en défaut. Bien qu'on ne sache pas au Juste en quoi peut consister cette action de l’oscillation électrique sur l'aimantation du fer, l’auteur incline à croire qu'il existe à l'intérieur du fer des forces intrinsèques, tendant à amener ce dernier vers une condition stable, mais qui ne coin- cide pas avec la condition définie par la courbe nor- male d’aimantation. Ces oscillations dépenseraient 1 Electrical Review, N. Y., n° 12, 1906. vraiment sur le fer de l'énergie disparaissant sous la forme d'hystérèse magnétique. Cette hypothèse est confirmée par certains autres résultats trouvés par l’auteur. Les expériences qu'on vient de décrire démontrent, on le voit, que les courants oscillatoires exercent dans un cas une action allant dans le même sens que la force magnétisante, et dans l’autre une action en sens inverse. $ 5. — Zoologie Mimétisme olfactif. — Les cas de mimétisme que nous offrent en nombre les Insectes sont du mimé- tisme visuel, c'est-à-dire que la ressemblance exté- rieure de forme et surtout de couleurs entre l'espèce copiée et celle qui copie donne à l'œil l'illusion de l'identité, au moins à un examen rapide; la disposition semblable des marques les plus visibles, des dessins caractéristiques, tout concourt à la tromperie. Rappe- lons, par exemple, le cas du Vespa crabro, notre Frelon, copié par le Trochilium apiformis, celui des Piérides de l'Amérique tropicale qui ressemblent tant aux Héliconides et aux Danaïdes brillamment colo- rés, etc. On connait l'interprétation très séduisante qui a été donnée de ce curieux phénomène : on a supposé qu'il y avait un considérable avantage pour l'espèce la moins bien armée à se confondre avec une forme bien défen- due, non comestible, munie de couleurs prémoni- trices, de facon à être laissée de côté par les carnas- siers qui chassent à la vue, tels les Oiseaux. Par suite de sélections successives de variations de plus en plus favorables, l'espèce copiante s’est rapprochée graduel- lement de la forme copiée, jusqu'à atteindre quelque- fois l'identité apparente. ; La théorie explicative du mimétisme visuel a subi en ces derniers temps de si rudes attaques qu'il est bien difficile de l’accepter telle quelle. Il est juste de dire que les critiques n’ont rien mis à la place; le phé- nomène reste inexpliqué, dans sa signification s’il en a une, et dans son origine. Mais les carnassiers terrestres qui se renseignent par la vue sont, en somme, assez rares; beaucoup d'autres, les Insectes en particulier, se guident surtout par l'ol- faction. On pourrait concevoir a priori un mimétisme olfartif, produisant une erreur utile au possesseur de l'odeur ; Santschi ‘ vient d'en citer un cas tout à fait intéressant chez les Fourmis. Les femelles fécondées de Bothriomyrmex (Afrique du Nord) ont la singulière habitude de s’introduire dans des colonies de T'apinoma normalement constituées; elles sont dès l'abord arrêtées sur le dôme par les ouvrières de Tapinoma, qui les molestent quelque peu au début, en les tiraillant parles antennes et les pattes; mais la femelle arrêtée répond bénévolement aux légères vexations qui l'accueillent; elle caresse les ouvrières avec ses antennes, comme si elle voulait les calmer. À force de patience, elle finit par entrer dans le nid, tue la mère Tapinoma et mange probablement les œufs de celle-ci; dès lors, elle fera soigner ses propres œufs par les T'apinoma ouvrières jusqu'au moment où celles-ci seront devenues inutiles par suite de la mul- tiplication de ses propres descendants. Or, il est extrêmement remarquable que la femelle de Bothriomyrmex, qui se fait ainsi accepter par les Tapinoma, a une odeur très pénétrante et très carac- téristique de Tapinoma, odeur si tenace qu'elle per- siste encore après plusieurs mois d'immersion dans l'alcool. Les ouvrières et les mâles de Bothriomyrmex, qui n'ont aucun rapport avec les T'apinoma, n'ont pas du tout cette odeur particulière. Ajoutons que la femelle de Bothriomyrmex a aussi la taille et la cou- leur, mais non pas la forme, des ouvrières de 7api- { Saxrscar : À propos des mœurs parasitiques tempo- raires de Fourmis du genre Bothriomyrmex (Ann. Soc. Entom. France, t. LXXV, 1906, p. 363). 4 “1 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 53 noma; tout cela réuni, mimétisme visuel et mimétlisme olfactif, doit nécessairement favoriser la confusion dont bénéficiera la femelle parasite. S 6. — Sciences médicales Les dangers du chien d’abattoir. — Les chiens d'abattoir transmettent le tænia échinocoque : M. le D: Dévé (de ltouen) attire de nouveau l'attention sur ce point. On sait, en effet, que, dans les villages et dans les abattoirs, certains chiens aiment à manger les viscères des moutons et bœufs écorchés vifs. Or, ces viscères sont pleins de « boules d'eau » ou kystes hydatiques qui sont déglutis par les chiens : ceux-ci, léchant ensuite leurs maitres, peuvent les infester, et c'est pourquoi les bouchers, charcutiers et leurs enfants sont si souvent porteurs de kystes hydatiques (17 2/4 des cas). Il convient donc de réglementer l'abatage et d'ordonner l'incinération de tous les viscères présen- tant des « boules d'eau ». $ 7. — Géographie et Colonisation La production et la consommation du ca- cao. — Un récent article de M, Aug. Chevalier?, le savant explorateur de nos richesses agricoles colo- niales, vient heureusement compléter l'excellente mono- graphie que MM. Lecomte et Chalot avaient consacrée au cacao, il y à quelques années. Le cacaoyer est un arbuste adapté à la vie sociale des végétaux de la forêt tropicale. Planté isolément, il craint la grande lumière tropicale, les vents violents et les effluves marins. Il ne prospère pas au-dessus de 600 mètres, redoutant les abaissements de température qui sont le fait de l'altitude : il exige toujours de 20 à 30°. Sa racine pivotante demande un sol profond, riche en humus, auquel il faut fournir surtout de la potasse et de l'acide phosphorique. Le cacaoyer réclame une chute de pluie d'au moins 2 mètres; sans irrigations, il ne résisterait pas à une sécheresse trop prolongée. Pour tamiser la lumière, on abrite provisoirement l’arbuste, pendant sa croissance, d’abord avec des bananiers que l’on coupe et laisse sur place au bout de cinq ou six ans; on préfère ensuite, pour l'abriter d'une façon permanente, d'autres arbres que l’on place en lisière, perpendiculairement à la direction des vents régnants. On possède de nombreux renseignements statistiques sur la production mondiale du cacao. M. Aug. Chevalier donne les chiffres suivants qui représentent des tonnes : 1S9% PAYS PRODUCTEURS 1903 Equateur . San Thomé . Brésil. . . Trinidad Venezuela. : Saint-Domingue. Grenade Ceylan . Go d Coast. Surinam . Haïti. Cuba . Ë Jamaïque. . . . Indes néerlandaises. . : . Martinique el Guadeloupe. Cameroun 5 Aulres pays. s00 508 125.989 69.095 L'exportation est à peu près proportionnelle à la pro- 1 Bulletin médical, 1906, p. 810. ? Annales de Géographie, 15 juillet 1906. duction. L'Equateur, Trinidad, le Brésil, le Venezuela, San-Thomé, Grenade, viennent en tête; mais l'accrois- sement le plus considérable dans les dernières années provient des colonies africaines : Gold Coast, Cameroun et San Thomé. Comme pour le coton, le café, le caout- chouc, les métropoles européennes cherchent, de cette facon, à lutter contre la concurrence américaine. Et il faut reconnaitre que les Anglais à Gold Coast et les Portugais aux iles Principe et San .Thomé sont arrivés à des résultats magnifiques. Nous aurions grand prolit à étudier les méthodes employées dans ces régions; aussi bien, faut-il espérer que la Mission de M. Aug. Chevalier ne tardera pas à porter des fruits. Le champ est encore à peu près vierge, puisqu'en 190% la quan- tité de cacao produite dans nos colonies dépassait légè- rement 1.000 tonnes, soit à peine la vinglième partie de la consommation francaise. Plusieurs propriétaires de San Thomé, ajoute M. Chevalier, arrivent à récolter cette quantité dans une seule plantation. Ce n’est pas cependant que les terres favorables nous manquent : elles abonident à la Guadeloupe, sur la côte Est de Mada- gascar, à la Côte d'Ivoire, et surtout au Congo qui a fait Jusqu'ici les plus grands efforts pour développer cette culture. D'après M. Harold Donald Smith, les pays importa- teurs de cacao se classent dans l’ordre suivant, les chiffres représentant des tonnes’: 1905 1903 Etats-Unis... 34.621 Allemagne ne Red LOS 21.310 France :/1. . : ON On fr 2 20.333 DAYS DES EMA CAR OS TA 16.449 Grande-Bretagne . . . . . 20.757 18.387 Espagne Der 5.610 5.897 Autriche-Hongrie . D M2 TRRS 2,002 BeloiqUE A A A D TUE 2.120 Les meilleures qualités de cacao viennent du Vene- zuela, qui en exporte annuellement 40.000 quintaux, principalement en France et en Espagne. Trinidad exporte 125.000 quintaux en Amérique, France et Grande-Bretagne. Nous importons la plus grande partie du cacao brésilien. Guayaquil exporte déjà de 100.000 à 200.000 quintaux, principalement en Espagne et en Allemagne. New-York, Hambourg et le Havre sont, par ordre d'importance, les trois grands marchés du cacao: Importation n’est pas équivalent de consommation; c'est ainsi que pour la Suisse, les Pays-Bas et la France, qui vendent de grandes quantités de cacao en poudre et de chocolat, il est difficile d'établir d’une façon pré- cise les chiffres de consommation. M. Chevalier donne les suivants, en kilogramme et par tète d'habitant; ils se rapportent à 190% et concernent le chocolat : France. Ü.880 Angleterre. 0,745 Allemagne. 0,708 Belgique. Etats-Unis. . Espagne .. - Norvège. D'après M. Max Eckert, la consommation du chocolat, qui s'élevait vers 1865, et par tête d'habitant, à 0 kil. 13 en France, 0,07 en Grande-Bretagne, 0,04 en Allemagne, serait aujourd'hui de 0,400 en France et en Angleterre, et 0,300 en Allemagne; elle atteindrait 0,700 en Suisse. Ce qui est certain, c'est que la consommation du cho- colat ne cesse de croître; félicitons-nous de la place que nous occupons dans la consommation d’un produit d'une aussi grande valeur alimentaire. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. 544 L'-C' R. BOURGEOIS — L'ÉTAT ACTUEL DE LA GÉODÉSIE L'ÉTAT ACTUEL DE LA GÉODÉSIE XV: CONFÉRENCE DE L'ASSOCIATION GÉODÉSIQUE INTERNATIONALE TENUE A BUDAPEST EN 1906 La Science géodésique est en progrès continuel. | en vue de la nouvelle détermination des éléments Nous le constations ici même dans un arlicle publié | de l’ellipsoïde terrestre depuis 1899. L'arc du au commencement de 4904, à la suite de la qua- | Spitzherg, entrepris par les Gouvernements russe Lorzième Conférence de l'Association Géodésique | et suédois, est actuellement entièrement lerminé internationale. La quinzième réunion de cette as- | et les caleu!s en cours d'exécution. semblée à Buda-Pest, au mois de septembre dernier, La carte de la figure 1 montre l'ensemble de l'arc, vient encore de le confirmer. Ce ne sont pas seule- | qui mesure 4°1/2 environ d'amplitude. Il comporte ment les instruments de mesure qui se perfec- | 33 slations, dont 18 ont été occupées par les Sué- tionnent de jour en jour et permettent d'atteindre | dois et 15 par les Russes. des précisions de plus en plus grandes, ce sont La latitude astronomique a été observée à la aussi les méthodes qui se modifient, le champ des | presque tolalité des stations, et l'on a déterminé études géodésiques qui s'étend; enfin, ce sont sur- | également de nombreux azimuts de façon à pouvoir tout les conclusions qui se précisent et nous amè- | faire une étude, aussi complète que possible, des nent à une connaissance de plus en plus exacte du | déviations de la verticale. géoïde ou de la figure mathématique de la Terre. Les deux bases ont été mesurées au fil Jäderin Nous n'entrerons pas dans le détail des Rapports | avec étalonnage du fil avant et après la mesure. particuliers, présentés par les délégués nationaux, | Enfin, des observations de la gravilé, au moyen du sur les travaux exécutés dans les différents pays | pendule de Sterneck, ont été faites en dix sta- depuis la Conférence de 1903, nous bornant à | tions, et l'on a pu se rattacher à l'ancienne station constater que partout, aussi bien dans les États | de Norskü, faile autrefois par Sabine. européens qu'aux États-Unis, au Mexique, au Japon On sait quelles ont été les difficultés rencontrées et dans les colonies asiatiques ou africaines, les | par les opérateurs russes el suédois au cours de travaux géodésiques se complètent et s'étendent. leurs travaux; l'année 1900, entre autres, fut par- Nous ferons de préférence un exposé d'ensemble ticulièrement difficile en raison de l'accumulation de chacune des grandes questions qui ont été dis- | des glaces et du mauvais temps persistant. La cutées, savoir : les mesures d'arc actuellement | Campagne n'avait pas élé couronnée de succès en cours d'exécution ou récemment terminées; les | malgré les efforts inouïs des géodésiens, et les nouvelles méthodes de mesure des bases; les difficullés rencontrées étaient telles que l'on pouvait derniers résultats fournis par les nivellements douter de la possibilité de mener l’entreprise à son de haute précision: l'état actuel des mesures d'in- | terme. La ténacité et l'énergie des opérateurs ne lensité de la pesanteur, en particulier sur les | Se démentirent pas cependant; l'année 1901 fut, du océans: les études sur la répartition des masses | reste, plus favorable et permit aux Russes de ter- et sur les courbures du géoïde entreprises par miner leurs observations. Les Suédois, dont les MM. Eütvôs et Brillouin, celles sur la compensation | travaux, situés plus au nord que ceux des Russes, isostalique par le Coast and Geodelic Survey aux élaient encore davantage gênés par les glaces, ne États-Unis; l'emploi de la télégraphie sans fil dans terminèrent leurs mesures sur le Lerrain qu'en 1902. les déterminations de différences de longitudes, M. A. Hansky narra ici même les péripéties de ces enfin celui du téléphone et d'une mélhode de expéditions polaires où les opéraleurs ont eu à coïncidences dans les mêmes délerminations. déployer plus que de l'énergie, car on serait tenté de dire de l'héroïsme, pour triompher de tous les obstacles accumulés dans ces solitudes glacées. I. — GÉODÉSIE. MS. ; Pendant que les Russes et les Suédois mesuraient $ 1. — Les grandes mesures d'arcs actuellement un arc polaire, la France avait, comme on le sait, en cours. repris la mesure d'un arc équalorial dans les ré- Les lecteurs de la Æevue ont été entretenus déjà | 8!0nS où avaient opéré autrefois les académiciens des grands ares actuellement en cours d'exécution | Bouguer, La Condamine et Godin. 1 A. Haxsky : Les travaux de la Mission russo-suédoise #R. Bocrceors : L'état actuel de la Géodésie. Revue gén. | pour la mesure d'un arc de méridien au Spitzberg, dans la des Se. du 30 avril 1904, t. XV, p. 31. Revue des 15 et 30 décembre 1902. L'-C! R. BOURGEOIS — L'ÉTAT ACTUEL DE LA GÉODÉSIE KO oc L'exposé de l'ensemble des travaux de la Mission géodésique francaise de l'Équateur doit faire l'objet d'un prochain article de la Revue générale des Sciences, et nous nous bornerons à présenter ici une simple énumération des mesures et des obser- vations qui ont été effectuées au cours du séjour en Équateur et au Pérou. L'arc qui s'étend de Tulcan, près de la frontière de Colombie, à Payla, au Pérou, a une amplitude de 5153 30". La chaîne méridienne comporte 74 stations et s'appuie sur trois bases, l’une fondamentale, celle de Riobamba, mesurée avec l'appareil bi-métallique de Brünner et l'appareil Jäderin à fils d'invar el cuivre; les deux autres de vérification : celle du Nord ou de Tulcan, mesurée avec l'appareil Jäderin à fils d'invar et cuivre ; celle du Sud, ou de Payta, mesurée avec la règle monométallique en invar et l'appareil Jäderin modifié par MM. Carpentier et Guillaume, à fils invar. Sauf quelques rares exceptions, on à mesuré la latitude astronomique à tous les sommets de la triangulation, soit au théodolite à microscopes, par la méthode des observations circumméridiennes d'étoiles culminant au Nord et au Sud du zénith, soit par la méthode des hauteurs égales d'étoiles en employant l'astrolabe à prisme. En outre des stations extrêmes, l'arc est jalonné par six slalions astronomiques intermédiaires, où l’on a déterminé la lalitude, un azimut et une dif- férence de longitude, de facon à pouvoir y former l'équation de Laplace. De plus, une stalion astronomique a été installée à la côte, à Machala, reliée géodésiquement à la chaine, el l'on y a déterminé la différence de longi- tude avec la station astronomique de Cuenca, dans la Cordillère, en vue de l'étude du relèvement éventuel du géoïde sous le massif des Andes. Un nivellement de précision de 410 kilomètres environ relie la base fondamentale au point de Salinas, sur le Pacifique, où l’on à installé un médimarémètre qui fonctionne depuis deux ans. Un autre médimarémèlre, relié aussi à la base du Sud par un lronçon de nivellement de précision, a été inslallé à la station de Payta. Il a été fait six stations d'intensité de la pesanteur, suivant une coupe Est-Ouest, allant de Machala, sur le bord du Pacifique, à Baños, sur le versant amazonien de la chaîne des Andes orientales. Baños n’est déjà plus qu'à l’altilude de 1.800 mètres. On à déterminé, en 48 stations convenablement réparlies, les valeurs de la déclinaison magnétique, de l'inclinaison et de la composante horizontale: Payta est encore au nord de l'équateur magnétique. Le médecin-major Rivet, chargé des études rela- dives aux Sciences naturelles, a fait au Muséum de nombreux envois zoologiques et minéralogiques. Il a entrepris une étude anthropologique des races 13 ie du réseau de triangles | au | SPITZBERG Echelle de 1:1000000 | Prajection conique | Fig. 1. — Arc du Spitzberg. indiennes de l'Amérique du Sud, et, grâce à l’in- fluence qu'il a su prendre dans le pays, a réuni une 56 collection d'antiquités incas tout à fait exception- nelle. En chaque station géodésique, on a visé un grand nombre de sommels de la Cordillère, ainsi que tous les points remarquables du lerrain, et fail un tour d'horizon photogrammétrique; en ajoutant à ces données les nombreux itinéaires qui ont été exécutés, on est en possession d'éléments plus que suffisants pour élablir une carte générale de la région interandine, dont l’ulilité pour l'Équateur ANGOLA ...--"""û PORTUGAIS ; | BRITISA CENTRAL AFRICA GERMAN RHODESIA BSouTH WEST: À à À AFRICA ! BECHUANALAND Durban AEOCAREMAN, CA Fig. 2. — Chaîne du Cap au Caire et triangulation de pre- mier ordre de l'Afrique du Sud. ne saurait faire de doute et qui a déjà recu un commencement d'exéculion. Ces travaux, qui viennent de prendre fin au mois de mai dernier, ont demandé cinq ans d'efforts; onze officiers de la Section de Géodésie du Service géographique, ainsi que vingt-huit sous-officiers et soldats y ont été employés. La Mission a eu à déplorer la perte du Comman- dant Massenet, décédé à Cuenca le 1° octobre 1905, des suites d'un abcès au foie, au cours des opéra- tions de la différence de longitude Cuenca-Machala ; du soldat Roussel, mort aux environs de Tulcan #n 1902, et du soldat Pressé, décédé à Robiamba L'-C! R. BOURGEOIS — L'ÉTAT ACTUEL DE LA GÉODÉSIE en 1903. Les membres de la Conférence ont tenu à rendre hommage à la mémoire de ces victimes de la science en se levant en leur honneur. M. Darwin, délégué de la Grande-Bretagne, a rendu compte de l'état d'avancement des travaux de triangulation du grand arc africain qui doit, le long du 30° degré de longitude, aller du Cap au Caire. Ainsi que l'on peut s’en faire une idée par l'inspection de la carte de la figure 2, ces opérations sont relalivement avancées au Transvaal, en Rho- désia et dans l'Afrique Centrale anglaise. M. Hel- mert à fait connaître qu'un crédit d'un million de marks sera très certainement voté à bref délai pour l'exécution de la triangulation en Afrique Orientale allemande. Celte colossale entreprise, qui donnera à la science un arc de 55° d’amplitude, est donc en excellente voie d'exécution. $ 2. — Les Mesures de bases‘. La mesure d'une base est l'opération géodésique la plus délicate d’une triangulation. Nous avons exposé, il y a deux ans, l'évolution des procédés employés depuis l’époque où Delambre et Méchain utilisèrent, avec la précision que l’on sait, la règle bimétallique construite par Borda ; nous n'y revien- drons pas. Les éludes de MM. Benoit et Ch.-E. Guil- laume sur les alliages d'acier et de nickel ont actuellement transformé la question et permis de s'affranchir de la détermination si importante et si délicate de la température de la règle. L’acier à 36 °/, de nickel, ou métal invar, a un coefficient de dilatation si faible que l’on peut se contenter, sans erreur sensible pour la réduction, de la tempéra- ture lue sur un bon thermomètre à mercure placé sur la règle, ou dont le réservoir est plongé dans sa masse. Outre les règles en métal invar, on a fait dans tous les pays, depuis une vingtaine d'années, époque à laquelle M. Jäderin présenta son appareil à fils de 2% mètres d'acier et de laiton tendus sous un effort constant, un large usage d’appareils à fils. C'est sur ces derniers surtout qu'a porté la discussion à la conférence de Buda-Pest. L'appareil de M. Jäderin a été, à la suite de lon- gues études, perfectionné, — l'on devrait même plus exactement dire complètement transformé, — par MM. Guillaume et Carpentier. En outre des modi- fications très importantes dans la disposition de l'appareil lui-même, telle que la substitution de poids tenseurs aux dynamomètres, qui en rendent l'emploi beaucoup plus facile et augmentent la précision dans de larges proportions, M. Guil- laume a porté principalement ses recherches sur - 1 M. le lieutenant-colonel Bourgeois, chef de la Section de géodésie au Service Géographique de l'Armée, rapporteur. TL r L'-C! R. BOURGEOIS — L'ÉTAT ACTUEL DE LA GÉODÉSIE 51 LI le traitement à faire subir au métal invar et aux fils, de facon à éviter autant que possible des modifications moléculaires qui se seraient infail- liblement traduites par des variations dans la lon- gueur des appareils de mesure. C'était là, en effet, une des craintes sérieuses qui se présentaient au sujet de l’alliage invar; on pouvait légitimement penser que la précieuse propriété qu'il possède de se dilater très peu serait peut-être contrebalancée par de l'instabililé et, par conséquent, par une tendance plus ou moins grande à se déformer sous l'action du temps. M. Guillaume avait été invité à venir faire lui- même à Buda-Pest une communication détaillée sur ses appareils et ses études. Il a exposé les divers traitements que l'expérience a conduit à faire subir aux fils pour assurer la permanence de leur état. Il se présente dès le début une question d'ordre pralique, tout à fait importante. Le fil a 24 mètres de longueur et ne peut, on le conçoit aisément, être transporté à l'emplacement choisi pour la mesure et souvent mème conservé en dehors des périodes de service à l’état d’'exten- sion; il faut nécessairement l'enrouler sur: lui- même, donc aussi le dérouler et cela fréquemment au cours des opéralions. On est amené, dans la plupart des cas, à le faire au commencement et à la fin de chaque séance de travail, car on dispose rarement d'un abri où l’on puisse en toute sécurité suspendre le fil étendu. Cette opération a loujours paru dangereuse pour la stabilité du fil, et il est évident qu'à l'état d’enroule- ment la fibre extérieure et la fibre intérieure tra- vaillent différemment. La question a donc tout par- ticulièrement atliré l'attention, et de nombreuses expériences ont été faites au Bureau international des Poids et Mesures de Breteuil. Elles paraissent avoir montré qu'un fil enroulé sur un rayon de 25 centimètres reste dans les limites de sa déforma- tion élaslique dans le passage de l’élat de couronne à celui de complète extension. En conséquence, les fils, dès leur sortie de la filière, sont livrés au Bureau International enroulés sur un tambour de 0%,50 de diamètre et subissent l'étuvage ainsi que les manipulations nécessaires à la pose et à l’ajus- tage des réglettes dans ces mêmes conditions. Enfin, des expériences nombreuses ont montré qu'un fil enroulé depuis sept à huit mois ne paraissait pas présenter de changement systémalique dans sa longueur. Pendant plusieurs années, on a préconisé l'enroulage à la main au cours des opérations de mesure, en laissant, pour ainsi dire, le fil reprendre de lui-même son diamètre coronal habituel, l'opé- rateur veillant seulement à la non production de boucles ou de nœuds; depuis peu, des études nou- velles ont montré qu'il ne paraissait pas y avoir d'inconvénient à enrouler le fil sur un tambour, ce qui, au point de vue de la facilité de manœuvre, est bien préférable à l’enroulage à la main. Le second point qu'il importait d'étudier et d’ex- périmenter est la stabilité du nouvel alliage. On a cherché à réaliser le plus possible l'équilibre molé- culaire du métal qui constitue les fils, en faisant subir à ceux-ci une série de manipulations qui ont pour but de mettre pour ainsi dire en mouvement les éléments constilutifs du métal de toutes les façons possibles, de telle sorte qu'il leur soit en définitive possible de se grouper de la manière la plus stable. Pour cela, les fils sont soumis tout d'abord, après l'étuvage, à une traction sous un poids de 60 kilogs pendant vingt-quatre heures. Celte première mani- pulation, qui produit dans un fil de 24 mètres un allongement de 0"",21 en moyenne, a égale- ment pour but de vérifier la solidité des altaches des réglettes. Mais le traitement le plus particu- lier, introduit depuis quelque temps seulement et qui paraît produire les meilleurs effets sur la stabilité ultérieure du métal, est celui qui consiste à imprimer aux fils des secousses très énergiques au moyen d'une sorte de baltage rythmé : deux aides tenant le fil étendu dans loute sa longueur, à chacune de ses extrémités, le frappent vigoureuse- ment et en cadence sur un plancher. Cent chocs aiosi donnés à un fil qui à subi un allongement sous l'effort de la traction de 60 kilogs, le ramènent à sa longueur initiale, etles cent chocs suivants ne pro- duisent qu'un raccourcissement moyen de 0,1. Pendant la période triennale de 1903 à 1906 dont il a été rendu compte à la Conférence, on a employé les appareils Guillaume-Carpentier à fil invar aux mesures de bases exécutées par les Services géodé- siques serbe et russe, par les officiers de la Mission Géodésique Française à Payta (Pérou) et, enfin, par la Commission Géodésique Suisse au Simplon. On a employé également des fils invar dans les mesu- res de bases du Cap, au cours des. opérations de la triangulation du Grand Arc Africain. Ces mesures ont donné partout des résultats largement suffi- sants comme précision pratique. Mais il y a des différences marquées entre les précisions obtenues dans ces différentes opérations. Si, en Serbie, au Cap et au Simplon, on à constaté un accord entre les mesures faites avec différents fils atteignanten- viron le 1/1.000.000, cet accord tombe au 1 /100.000 en Russie et au 1/200.000 environ en Equateur. M. Guillaume eslime que ces divergences sont dues, pour les fils russes, à un défaut dans l'ajustage des régletles, qui à pu être cause des varialions consla- tées dans les élalonnages successifs par le Général Gédéonoff; cependant, d'après ce dernier, ces varia- tions ne se seraient pas produites graduellement, mais par sauts, et le Général les avait attribuées L'-C! R. BOURGEOIS — L'ÉTAT ACTUEL DE LA GÉODÉSIE aux actions mécaniques inévitables qui s'exercent dans l’enroulement et le déroulement du fil. A Payla, l'on a constaté des allongements atteignant une valeur variant du 4/100.000 au 1/250.000 de la longueur des fils. M. Guillaume les attribue à un battage insuffisant avant la livraison et peut- être ensuite à l'effet de la températureélevée, ayant pu dépasser 40°, à laquelle les fils ont été exposés d'une facon continue au cours du voyage de France au Pérou, dans la mer des Antilles et dans le Paci- fique. Il eût été nécessaire, d'après lui, de laisser les fils, qui avaient ainsi subi une sorte de nouvel étuvage, reprendre leur état normal, par un repos de trois mois environ, tandis que les bases ont été mesurées dès l'arrivée des appareils. Les conclusions de la discussion à laquelle ont donné lieu ces résultats sont, tout d'abord, qu'il faut apporter dans le maniement des fils et dans la mesure des ba- ses les mêmes + les médimarémètres donnaient, par comparaison avec les maréographes, des niveaux moyens systé- matiquement trop bas de deux cenlimètres envi- ron. M. l'Ingénieur des Mines Lallemand, Directeur du nivellement général de la France, a donné l’expli- cation de ce fait, dont la cause a été récemment mise en évidence à la suite d’une judicieuse obser- vation de M. Prévot, Ingénieur du Service du nivel- lement général. Elle réside dans l'entrainement d'une petite quantité d’eau par la sonde qui sert à enregistrer journellement la hauteur d’eau dans le médimarémètre. Cette sonde, quand on la retire, entraine, en effet, un certain volume d'eau, dont une partie seulement retombe dans le tube. Le niveau de l'eau dans le médimarémètre se trouve. ainsi déprimé d'une petite quantité, et l'intervalle de temps de vingt-quatre heures qui s'écoule entre les deux plongées successives de la sonde est insu. fisant pour per- mettre la ren- précaulions mi- Le ee dE LR trée d’eau équi- nulieuses que is valente à lra- l'on a l'habilude 1 vers le vase po- de prendre dans ; s il reux. Le niveau les opérations qu dansle médima- faites au moyen Ur AI hr an DZ rémètre baisse des règles, et Î donc graduelle- ensuite qu'il pa- 1! ment jusqu'au raitétre de toute | moment où l'é- PRIME F Bogaemans" del 21: nécessité, dans PAZ H quilibre entre la les mesures de D À : : ie e Re perte provenant Fig. 3. — Niveau aulorollimaleur à mereure. — P, prisme à double réflexion haute précision, de comparer fré- quemment, pour ne pas dire journellement, les fils employés à une courte base étalon dont on déterminerait la longueur avec une haute précision et qui jouerait ainsi le rôle de comparateur. On sait que ce pro- cédé à été employé par les Géodésiens américains dans leur campagne de mesure des neuf bases du Grand Are Transcontinental en 1902. £ 3. — Nivellements de haute précision’. Les nivellements de précision qui se poursuivent normalement et avec activité dans tous les pays montrent que partout le niveau des mers est sensi- blement le même. Aux États-Unis notamment, où les nivellements partant de l'Atlantique ont atteint le Pacifique, on a observé seulement une diflérence de niveau de 187 millimètres entre les deux océans et une différence de 38 millimètres entre l'Allantli- que nord et le Golfe du Mexique. On avait remarqué, depuis quelques années, que 1 M. l'Ingénieur en chef des Mines Lallemand, directeur du Nivellement général de la France, rapporteur. intérieure: H, horizon à mercure: O, objectif: R, réticule; G, miroir; L, source lumineuse; M, lunette. de l’eau entrai- née par la sonde et le gain pro- venant de la rentrée correspondante à travers le vase poreux sera établi. Cette valeur limite de la dépression, sensiblement proportionnelle au mo- dule d'amortissement de l'appareil, varie de deux à trois centimètres. On pourra donc corriger doréna- vant cette erreur, connaissant le module d'amor- tissement des divers médimarémètres. Les instruments actuellement employés appar- tiennent aux types connus dans lesquels l'horizon est défini par le plan tangent à la partie supérieure de la bulle du niveau. M. l'Ingénieur hydrographe Driencourt à présenté à la Conférence un modèle d'instrument de nivellement enlièrement nouveau, où l'horizon est défini par la surface libre d'un bain de mercure. Le principe est analogue à celui, de l’astrolabe à prisme et l'instrument se compose ‘fig. 3) : 1° d'un prisme P, à double réflexion inlé- rieure, dont les faces réfléchissantes étamées font entre elles un angle de 45° ; 2° d’un horizon à mer- cure H placé au-dessous; 3° d’une lunette dont l'axe optique est situé dans une section droite du prisme: Le réticule R, situé au foyer de l'objectif O, peut | L'-C' R. BOURGEOIS — L'ÉTAT ACTUEL DE LA GÉODÉSIE 59 êlre éclairé par une source lumineuse latérale L, qui envoie un faisceau de rayons suivant l'axe de la lunette M par l'intermédiaire du miroir G incliné à 45°. Il est facile de voir sur la figure, er suivant la marche des rayons, que ceux-ci, après réflexion dans le prisme et sur le bain de mercure, vien- dront former dans le plan du réticule une image de la croisée des fils de ce dernier, et que l’axe opti- que de la lunette sera rigoureusement horizontal quand on aura assuré la coïncidence de la croisée des fils et de son image. Le prisme ne couvre qu'une moitié de l'objectif, ainsi qu'on le voit sur la figure; on peut done voir simultanément les divi- sions d’une mire et le réticule, c'est-à-dire faire la lecture d'une nivellée à l'instant précis de la coïn- dence du fil horizontal et de son image. M. Drien- court a donné à son instrument le nom de niveau autocollimateur à horizon de mercure. Cet instru- ment, s'il est reconnu pratique à l'usage, pourra être appelé à augmenter la précision des nivelle- ments primordiaux. $ 4. — Les mesures de l'intensité de la pesanteur. Les déterminations de l'intensité de la pesanteur sur les continents au moyen du pendule n'ont fait aucun progrès notable nouveau ; M. Helmert, Directeur de l'Institut Géodésique Prussien et du Bureau Central de l’Associalion Géodésique Inter- nationale, à fait ressortir l'importance capitale de la valeur de g adoptée pour les slations principales auxquelles se rattachent dans les divers pays les observations relatives. Il a mis en évidence, il ya déjà quelques années, une cause d'erreur prove- nant de la flexion des pendules, qui ne s’élimine ni par la réversion, ni par l'échange des couteaux, ni par l'emploi de deux pendules de même poids et de longueurs différentes ; les corrections dues à la flexion, qui peuvent affecter, suivant M. Helmert, la quatrième décimale de g, ne peuvent donc être négligées. On a poursuivi pendant de longues années, à Potsdam, des recherches, qui viennent d'être ter- minées, dans le but de déterminer la valeur de l'intensité de la pesanteur avec 5 pendules batlant la demi-seconde ; l'erreur ne parail pas dépasser le 1/100.000 de la valeur de g. Cette évalualion de la précision est basée, tant sur l'accord des différents résultats isolés obtenus à Potsdam, que sur la valeurs des écarts qu'ils présentent par rapport aux valeur absolues obtenues par d'autres observa- teurs à diverses stations et qui ont pu être réduites . à Potsdam avec toute la précision désirable. On à entrepris, comme l’on sait, depuis 1900, ? M. Helmert, Directeur de l’Institut géodésique prussien et du Bureau Central de l'Association, rapporteur. des déterminations de l'intensité de la pesanteur à la surface des Océans, par une méthode basée sur la comparaison de la pression atmosphérique donnée par l'observation barométrique et de la valeur de cette même pression déduite de la tempé- rature d'ébullition de l’eau, c’est-à-dire d'observa- tions hypsométriques. Les tables hypsomélriques donnent la hauteur de la colonne de mercure qui correspondrait à 45° de lalitude et à l'altitude zéro ; si done Bz,est la hauteur barométrique lue en un lieu de latitude # et d'altitude 2, où l’on a observé également le thermomètre hypsométrique,d'où l'on conclut B,°, on a la relation : “5 45 g°B°—= 79 JB; —: B, o ou, en appelant e la correction baromélrique au lieu d'observation : À = 15 \ Pn?— DAT MB; de ( d ©) et: La comparaison de la correction ainsi cbservée à la valeur de cette même correction calculée pour la latitüde + d'après une formule théorique, celle de M. Helmert, par exemple, permettra d’éludier les anomalies que présente la pesanteur observée par rapportà la pesanteur calculée. M. le Professeur Hecker, chargé par l’Associa- tion Géodésique Internationale des observations de l'intensité de la pesanteur sur les Océans, à fait, depuis 1903, deux voyages dans le Pacifique, de Sydney à San-Francisco, el de San-Francisco à Yokohama, au cours desquels il a effectué de nom- breuses déterminations par la méthode dont nous venons de parler. Il a rattaché les observations, comme cela avait été convenu à la suite de la Con- férence de 1903, à un certain nombre de points continentaux, où l'on à déterminé la valeur de g par des observations précises, faites au moyen du pendule. Ce rattachement est indispensable, afin de pouvoir calculer certaines constantes qui entrent dans la formule de réduction dont se sert M. Hecker. Les observations mettent en évidence que la valeur de l'intensité de la pesanteur sur le Paci- fique suit, d'une facon générale, la loi normale exprimée par la formule de M. Helmert. On a constalé cependant certaines anomalies; des écarts positifs considérables (0 em. 250 environ) se manifestent dans le voisinage de l'ile d'Oahu, l’une des Sandwich, et aussi à l'extrémité nord de la Nouvelle-Zélande ; un écart négalif de même valeur exisle au-dessus de la fosse profonde qui se trouve au bas des îles Tonga, tandis qu'un écart positif se manifeste sur le plateau élevé situé au sud de ces 60 L'-C! R. BOURGEOIS — L'ÉTAT ACTUEL DE LA GÉODÉSIE mêmes iles. Il y a donc des réparlilions de masses qui restent encore à étudier. M. Hecker emploie pour ses déterminations un appareil composé de cinq baromètres et de six hyp- somètres ; l'enregistrement des hauteurs baromé- triques, qui doivent êlre connues à quelques microns près, se fait photographiquement, et l'observateur estime que la précision de la déter- mination de la variation de g est de l'ordre de quelques unités de la quatrième décimale, $ 5. — Les études sur les variations de la pesanteur et sur la courbure du géoïde’. Les observations de l'intensité de la pesanteur au moyen du pendule sont, jusqu'à présent du moins, dans l'impossibilité à peu près complète de déceler les varialions très faibles de g dans un périmètre restreint. L'appareil est d'installation assez délicate, et la déterminalion comporte la connaissance essentielle de deux éléments : une longueur et une durée, dont le dernier nécessite soit l'installation de la station à proximité d'un éta- blissement possédant un garde Lemps de marche connue avec précision, soit des observations aslro- nomiques directes, assez longues, qui compliquent encore les expériences. Les composantes de la pesanteur en un point de la Terre suivant trois axes de coordonnées passant par ce point sont les dérivées premières de la fone- tion potentielle des masses terrestres et de la force centrifuge : UV NS + y2+ 2), x, ,z élantles coordonnées du point, Vla fonction potentielle des masses terrestres et w la vitesse de rôlation de la Terre. Les neuf dérivées secondes de cette fonction expriment donc les variations des composantes de la pesanteur, et leur connaissance permet également de calculer différents autres éléments qui en sont fonction, tels que les cour- bures des différentes sections normales du géoïde, celle de la ligne de force de la pesanteur, la varia- tion de la direction du fil à plomb avec la hauteur. On voit combien est vaste le champ d’explorations qui résulte de ces indications. M. le baron Eülvüs, professeur à l'Université de Buda-Pest, a imaginé, il yaune dizaine d'années, un appareil qu'il a perfectionné et amené acluelle- ment à une forme toul à fait pratique en campagne. C'est une balance de torsion convenablement dis- posée, et comme, dans ün champ de force variable, la pesanteur aux divers points n'est pas la même qu'au centre de gravité autour duquel se font les l'Université de Brillouin, professeur ‘ Rapport de M. Eülvss, professeur à >uda-Pest, et communication de M. au Collège de France. oscillations, il en résulte des couples qui tordent le fil; l'instrument, par une série d'observation simples, permet la détermination précise des quan tités . ŒN .dVi dŒVOLEN . ŒY — e dy? dx? dxdy° dydz dxdz” L'analyse malhématique des conditions d'équis libre de la balance de torsion conduit, eu effet, à des équations desquelles on tire les valeurs de ces quantités, connaissant : 1° la durée d'oscillalion de la balance, qui s'oblient par l'observation et ne nécessite que l'aide d'un chronomèlre; 2° Ja constante de l'instrument, déterminée une fois pour toutes par l'observation de la torsion produite par l'attraction de masses connues. Tout l'appareil est enfermé dans une cage de laiton à doubles parois, de facon à ce que les changements de tem= pérature se fassent autant que possible senti uniformément dans l'intérieur et n'y occasionnent. aucun courant d'air. On cherche naturellement à avoir une durée d'oscillation des barres aussi: longue que possible, afin d'augmenter la sensibi- lité de l'instrument et la précision des observations; cette durée, dans les instruments actuellement en usage, est de 600 à 1.200 secondes. La cage lout" entière peut tourner autour d'un axe vertical; un limbe gradué et une alidade, qui font partie du sys-, tème, font connaitre la direction du plan d'expé-« rience par rapport à une origine. . Eôtvüs a fait au moyen de ses appareils de. Re éludes des variations de la pesanteur | dans certaines régions de la plaine hongroise. Il à, en particulier, étudié l'anomalie que pré- sente le plateau du Saghegy, tronc de cône d'origine volcanique de 1.600 mètres de circonférence à la base, de 200 mètres au sommet et de 150 mètres d'altitude, qui émerge de la plaine près de Kis- Czell, dans la partie occidentale de la Hongrie. Ce plateau présente des anomalies singulières eb d'un ordre de grandeur tout à fait inusité (fig. 4); elles avaient déjà été signalées par le Colonel von Sterneck, qui y avait délerminé l'intensité de 1 pesanteur en deux slations, mais n'avait pu étendre son étude en raison des difficultés que présentent. les observations au moyen du pendule. M. Eôtvüs à opéré en six stations et a obtenu les résultats ci-dessous : VARIATION DIRECTION de la pesanteur de dans la l'accroissement sur'ace de niveau de g, dy comptée du Nord où As vers l'Est ARS ENE 88,2 X 10—9 — 9002 re TEE QE) + 2801 COMME te LT RES — 10005 ENS PAIE — 16594 SR MIE SC AO 2 — 15309 6 LUI — 1004 L'-C! R. BOURGEOIS — L'ÉTAT ACTUEL DE LA GÉODÉSIE 6L Les appareils de M. Eütvüs sont actuellement, d'un maniement et d'un transport si faciles qu'il a pu, depuis quatre ans, poursuivre ses éludes en trois centsstations différentes. Tout récemment, il a exploré les environs de Versecz, les monts Fruska- gora et le lac Balaton; il n'a malheureusement pu donner à la Conférence les résultats de ses der- niers travaux, car les calculs n’en sont pas encore entièrement terminés. M. Brillouin, professeur au Collège de France, à entrepris des études analogues et donné à l'appa- reil de M. Eütvüs une formel particulièrement adaptée aux mesures rapides; il a, de plus, imaginé une méthode optique extrêmement ingénieuse pour la mesure des petits angles qui permet l'éva- luation précise d'une fraction de seconde d'arc. Fig. 4. — Plateau du Saghegy (Hongrie) avec l'emplacement des six stations où a observé M. Eütvôs. — La flèche indique la direction de l'accroissement de la pesanteur. M. Brillouin détermine ainsi la différence des cour- bures principales du géoïde et leur direction. Il à pu, en 1906, mettre à profit l'interruption de cinq jours dans les travaux du tunnel du Simplon qui avait été consentie pour la mesure de la base géo- désique, et faire dans ce tunnel une série de déter- minalions excessivement intéressantes ; ses obser- vations, au nombre de seize, montrent que l’ellip- ticité du géoïde dans la région explorée dépasse de 50 à 100 fois celle de l’ellipsoïde; elle est très variable en grandeur et en direction dans l'inté- rieur du tunnel, et {très différente de ce qu'elle est à l'extérieur. $S 6. — Etude du géoïde par le Coast and Geodetie Survey aux États-Unis ‘. Le Coast and Geodetie Survey avait présenté à la : Rapport de M. Hayford, Inspecteur des travaux géodé- siques et chef du Bureau des Calculs du Coast and Geodetic Survey. précédente Conférence de l'Association géodésique internationale, en 1903, une élude des formes du géoïde aux États-Unis, en partant des nombreuses observations de déviations de la verticale obtenues en cinq cent sepl stalions au cours des opérations géodésiques. Une méthode graphique ingénieuse avait permis de tracer sur une carte topographique les courbes de contour du géoïde, et leur étude attentive avait déjà amené les géodésiens améri- cains à conclure que les dévialious de la verticale sont produites en général par les excès et les défauts de masse correspondant aux inégalités de la surface terrestre jusqu'à plusieurs centaines de kilomètres de la station, plutôt qu'uniquement par les excès et les défauts de masse existant à courte distance. Cette étude n'a été considérée par le Coast and Geodetic Survey que comme un premier pas dans ses recherches et comme une sorte de reconnais- sance préalable du problème. Au cours des trois dernières années, MM. Titt- mann, superintendant du Service, et Hayford, inspecteur des travaux géodésiques et chef du bureau des calculs, ont cherché à utiliser les nom- breuses données qu'ils possèdent pour étudier le plus ou moins bien fondé de l'hypothèse de la com- pensation en profondeur des masses terrestres (hypothèse isostatique) et, dans le cas où celle-ci semblerait être confirmée par l'ensemble des observations, de rechercher à partir de quelle pro- fondeur on peut supposer que la compensation est parfaite. Les coordonnées géodésiques des sommets d’une triangulation sont calculées en partant de celles d'un point inilial, au moyen de formules établies pour un certain ellipsoïde de référence. Si l’on détermine astronomiquement, àtitre de vérification, les coordonnées et un azimut en quelques-uns de ces points géodésiques, on constate d'ordinaire, entre les résultats du calcul et ceux de l’observa- tion directe, un écart pouvant s'élever jusqu'à quelques dizaines de secondes et qui, interprété géométriquement, indique que la verticale vraie ne coïncide pas avec la verlicale théorique. Parmi les causes qui peuvent amener cette discordance, il y en a deux qui s'offrent immédiatement à l'esprit: la direction de la pesanteur peul être influencée par des altractions provenant de l'inégale répartition des masses autour de la stalion, ou bien encore il peut y avoir des erreurs dans les coordonnées iniliales ou dans les dimensions admises pour l’ellipsoïde de référence. Dans l'hypothèse de la compensation isostatique parfaite, on admet que tout excès de masse, mon- tagne ou continent, formant bosse, est compensé par un défaut de densité existant à la surface même 62 L'-C! R. BOURGEOIS — L'ÉTAT ACTUEL DE LA GÉODÉSIE du gévïde, el inversement que tout défaut de masse, formant creux, est compensé par un excès de den- sité du fond. Il ne peut done, ici, y avoir de dévia- Lion du fait de masses en excès ou en défaut autour de la station; le désaccord constaté entre les coor- données géodésiques et astronomiques ne peut provenir que de la deuxième cause ou d’autres causes encore insoupçonnées. Si, au contraire, il n'y a aucune compensalion, les attractions topographiques exerceront lout leur effet. Celui-ci peut se calculer, et, si l'on retranche celte valeur de la discordance entre les coordonnées, le résidu pourra être considéré comme provenant des erreurs dans les coordonnées initiales, dans les dimensions de l’ellipsoïde de référence ou de causes inconnues. Le cas sera analogue si l’on admet qu'il existe une compensation des excès et des défauts de masse, non pas immédiatement à la surface du géoïde ou au fond même des océans, mais se répartissant sur une cerlaine profondeur, d'une centaine de kilomètres, par exemple ; seule- ment, il faudra, dans le calcul de la part des discor- dances revenant aux attractions topographiques, tenir compte de l'hypothèse que l’on aura adoptée. Les diverses stalions astronomiques du réseau géodésique fourniront donc des équations de la forme : A (de) + B(d}) + C(de) + D (da) + E(de)+K—=R, EST dy, d), du, da et de? étant les corrections cherchées, aux coordonnées du point origine et aux éléments de l’ellipsoïde, K la discordance connue par les observations entre les coordonnées astronomiques et géodésiques en chaque station, corrigée ou non de la valeur des attractions lopographiques sui- vant l'hypothèse adoptée, et R le résidu encore inconnu provenant des causes insoupconnées. On déterminera, au moyen de l’ensemble de ces équa- tions, les valeurs des corrections en appliquant la méthode des moindres carrés, c'est-à-dire en ren- dant minimum la somme des carrés des résidus. Les géodésiens américains ont envisagé cinq hypothèses. La solution 4 correspond à la compensation iso- stalique parfaite + les termes K sont intégralement conservés. Dans la solution 2, les termes K sont corrigés de l'attraction topographique, calculée par un procédé graphique très ingénieux et très rapide, dans un rayon de 4.127 kilomètres autour de la stalion : c'est la solution qui correspond à l'hypo- thèse oùil n'y a aucune espèce de compensation isostatique. Dans les solutions 3, 4et5, les termes K sont corrigés de l'attraction calculée dans l'hypo- thèse que la compensation isoslatique existe et est complète à la profondeur de 162 kilom. 2 pour la solution 3, de 120 kilom. 9 pour la solution 4 et de = 113 kilom. 7 pour la solution 5 ; on a admis, de plus, pour la simplification des calculs, que la compensalion était uniformément répartie sur ces profondeurs. Les valeurs en kilomètres adoptées comme profondeur de compensation sont basées TABLEAU [. — Valeurs admises du grand axe et de l’aplatissement de la Terre. RAYON RAYON APLATISSE- équatorial polaire MENT Bessel, 1841 . Clarke, 1866 . Clarke, 1880. Helmert, 1893 . sur les résultats d'une étude préalable de la ques- tion. On a calculé ainsi, pour les cinq hypothèses, des corrections qui ont permis tout d'abord de compa- rer les valeurs corrigées du grand axe et de l’apla- tissement aux valeurs actuellement admises à la suite de la discussion de l'ensemble de tous les arcs méridiens mesurés el qui sont résumées dans le tableau ]. Puis l’on a calculé les résidus des équations et, par la comparaison des différentes valeurs obtenues pour la somme de leurs carrés, on s’est fait une TAgLEAU Il. — Valeurs du grand axe et de l'aplatisse- ment de la Terre résultant de diverses hypothèses. CARRÉ des RAYON RAYON APLATIS équatorial polaire |SEMENT résidus ———_—_— — Solution 1 (Compen- sation parfaite à l'altitude de 0). Solution 2 (rigidité complète ). + Solution 3 (compen- salion à 162k2), . Solution 4 5.356.435m .359.344 compen- sation à 120k9). . .16 Solution 5 (compen- salion à 113K7) . 5.356.868 idée de la probabilité plus ou moins grande de ï | i dns GA A ot chaque hypothèse, en admettant que la solulion la | plus voisine de la vérité devait être celle où la somme des carrés des résidus est la plus petite. Le tableau IL donne, pour chacune des hypo- LA Dm {tt er L'-C! R. BOURGEOIS — L'ÉTAT ACTUEL DE LA GÉODÉSIE thèses, les valeurs du rayon équatorial, du rayon polaire, de l'aplatissement et de la somme des car- rés des résidus. L'examen des nombres ci-dessus montre netle- ment que l'hypothèse de la non existence d'une compensation est loin de la vérilé. La somme des carrés est huit fois plus forte que dans les solu- tions 3, 4 et 5, et les valeurs corrigées des rayons polaire et équatorial sont inadmissibles. L'hypothèse de la compensalion isoslatique parfaite à la surface de niveau zéro donne, pour somme des carrés des résidus, une valeur qui est trop forte, quand on la compare à celles obte- nues dans les hypothèses 3, 4et 5, pour que celle solution puisse être retenue. Ilsemble done que l’on doit admettre l'existence de la compensation isostatique réalisée sur une profondeur d'environ 114 kilomètres en dessous de la surface. A la suite d'une discussion très approfondie des résultats fournis par les calculs dont on vient d’esquisser la marche, le Coast and Geodetic Sur- vey a adopté les valeurs suivantes pour l'ellipsoiïde de référence, comme étant celles qui s'adaptent le mieux à la région des Etats-Unis : Rayon équatorial Rayon polaire . . 6.318.2830 + 3% 6.356.868 il Aplatissement . ee —— 297,8 + 0,9 II. — ASTRONOMIE. $ 1. — Variabilité des latitudes. Dans le domaine de l’Astronomie, nous avons à | signaler en premier lieu la continuation des tra- vaux entrepris depuis quinze ans pour l’élude de la variabilité des latitudes. Les stations astrono- miques chargées de cet important service sont plus nombreuses qu’en 1903 et comprennent actuelle- ment en plus deux nouvelles stations dans l'hémi- sphère austral ; en outre, les Observatoires de Leyde, de Poulkovo et de Tokio coopèrent également à ces travaux et vont être suivis, à partir de cette année, par l'Observatoire de Johannesburg dans l'Afrique méridionale. En résumé, les observalions se font en six sla- tions siluées sur le parallèle Nord de 39°8, en deux stations situées sur le parallèle Sud de 31°55, et enfin en lrois observaloires situés par + 59°16, + 52°9' et + 35°49'. Les résultats obtenus pen- dant ces trois dernières années sont en concor- dance avec ceux qu'on a obtenus précédemment; le mouvement du pôle est incontestable, très faible il est vrai (0"2 environ), et d’une période qui parait être de quatorze mois. [ S 2. — Emploi de la télégraphie saus fil dans la détermination des différences de longitude. On a fait en Allemagne, en 1906, au cours de la différence de longitude Postdam-Brocken, un essai d'emploi de la télégraphie sans fil pour l'échange des signaux, lequel a très bien réussi. Afin de se rendre compte d'une facon aussi précise que pos- sible de la valeur des résultats obtenus par le nou- veau procédé, l'opération était faite en même temps par les moyens ordinaires de la télégraphie aérienne, et l’on n'a constaté aucune erreur systé- matique dans la détermination de l1 différence d'heure des stalions par chacun des deux sys- tèmes employés: les écarts entre ces deux déler- minations ne dépassent pas 0°,003. Ce résultat, ainsiquel'afaitremarquerlerapporteur M.Albrecht, est très important, car la télégraphie sans fil dimi- nuera dans une assez grande proportion les frais des différences de longitudes, permettra de s'affranchir des lignes aériennes, elLenfin donnera la possibilité de faire simultanément un grand nombre de diffé- rences par rapport à un point central unique. $ 3. — Emploi du téléphone et suppression du chro- nographe dans les différences de longitudes*. L'Observatoire de Montsouris à entrepris, au printemps de 1903, sous la direction de M. le Com- mandant Guyou, la détermination de la différence de longitude Paris-Brest, en utilisant l’astrolabe à prisme pour les observations d'heure en chaque station, le téléphone et une méthode des coïnci- dences très ingénieuse pour l'échange des signaux. Nous n'entrerons dans aucun développement au sujet de l’astrolabe à prisme, dont la ÆRevue a déjà entretenu ses lecteurs. Mais nous donnerons quelques délails sur la méthode employée dans l'échange des signaux, en raison des simplifications qu’elle introduit dans le matériel nécessaire pour les opéralions si compli- quées des déterminations de longitude et aussi de la haute précision dont elle est susceptible. Dans la méthode ordinaire avec emploi du chro- nographe, les secondes de l'horloge locale s'enre- gistrent automatiquement sur une bande de papier sur laquelle, par une disposition spéciale, s'inseri- vent aussi simultanément à chaque station les signaux d'échange. En relevant un de ces signaux par rapport à la seconde la plus proche, on obtient en chaque station l'heure de l'instant de la pro- duction du signal*, d’où, par différence, une valeur de la différence de longitude. 1 M. Albrecht, chef de Section à l'Institut géodésique prussien, rapporteur. 2 Communication de M. l'Ingénieur hydrographe en chef Driencourt. s En admettant que le signal produit à la station A soit 64 L'-C' R. BOURGEOIS — L'ÉTAT ACTUEL DE LA GÉODÉSIE Supposons qu'à la station À on emploie une hor- loge de Lemps sidéral et à la station conjuguée B une horloge de temps moyen, et qu'au lieu d’en- voyer des signaux d'échange ordinaires la station B puisse faire enregistrer pendant un certain temps, sur la bande de la station À, les battements de son horloge. En raison de la différence de durée des secondes de temps sidéral et de temps moyen, 86.16% 86.400" les coches seront en coïncidence à un certain ins- qui sont entre elles dans le rapport de tant, puis s'écarteront progressivement de _ de seconde à chaque coche successive, pour se retrou- ver de nouveau en coïncidence au bout desix mi- nules six secondes. On prendrait dans ces condi- tions comme instant de comparaison des horloges celui où les secondes battues par chaque garde temps coïncident, en remarquant qu'une erreur de 3 secondes sur l'estimation de l'instant de la coïncidence n'entrainera qu’une erreur inférieure DEL ; à oo de seconde sur ce que l’on pourrait appe- ler, par analogie avec la méthode ordinaire, le relevé du signal d'échange. On conçoit dès lors facilement que l’on puisse remplacer le chrono- graphe par le téléphone, à condition qu'il soit pos- sible, à un moment donné, à l'observateur de la station À par exemple, d'écouter simultanément dans son récepteur le battement de son horloge propre et celui de l'horloge de la station B. L'obser- vateur B devra naturellement opérer de même ensuite, afin que l’on puisse, comme d'habitude, croiser les observations. Dans la différence de longitude Paris-Brest, on a employé deux chronomètres, l'un de temps moyen, l’autre de temps sidéral, battant la demi-seconde et se retrouvant, par conséquent, en coïncidence toutes les trois minutes environ. Sur la glace même de chacun des deux instruments était placé un microphone Hughes intercalé dans le primaire d'une bobine d'induction dont les extrémités du secondaire étaient rattachées aux bornes de la ligne téléphonique; les observateurs des deux sta- tions percevaient ainsi simultanément les batte- ments des deux chronomètres; de plus, une résis- tance variable, introduite dans le primaire de la station où l’on veut effectuer les comparaisons. permettait à l'observateur d’égaliser l'intensité des battements de son instrument avec l'intensité de instantanément transmis et enregistré à la station B : dans la pratique, on élimine l'erreur provenant de la non instan- tanéité en croisant les échanges de signaux. ceux de l'instrument de la stalion voisine. Les coïncidences ont élé observées avec une très grande précision, ainsi que le montre le tableau ci-dessous, qui donne, pour la station de Brest, les écarts entre la moyenne de deux ou trois coïncidences prises par deux observateurs différents : OBSERVATEUR À OBSERVATEUR B DIFFÉRENCE 11 avril. 050541 0°043 +- 0s014 12 avril. 0,013 0,020 — 6,007 13 avril. 0,035 0,040 — 0,005 16 avril. 0,023 0,017 + 0,006 17 avril. 0,035 0,030 + 0,005 La nouvelle méthode, en raison des simplifica- lions qu’elle apporte dans l'installation des sla- tions, surtout si l'on y adjoint la détermination de l'heure locale au moyen de l’astrolabe à prisme, dont l'emploi n’exige ni cabane, ni pilier, sera cer- tainement employée toutes les fois que les lignes télégraphiques permettront l'échange de commu- . nications téléphoniques. III. — Coxczusrows. Cet exposé sommaire des principales questions traitées à la Conférence de Buda-Pest fera ressor- tir, nous l’espérons, combienlesétudes géodésiques continuent à prendre de l'essor; mais il faudrait, pourêtre complet, pouvoir faire partager au lecteur l'impression qui s’est dégagée des séances et de la discussion des rapports; c’est inconteslablement celle de l'existence d'efforts considérables et bien coordonnés, en vue d'arriver à un même but. Nous ne saurions terminer cet article sans men- lionner l'accueil qui a été fait à l'Association géo- désique Internationale dans la capitale de la Hon- grie par S. A. R. l’archiduc Joseph au nom du Roi, par les ministres du royaume, le bourgmestre de Buda-Pest, les notabilités scientifiques et tout spé- cialement par M. Bodola de Zagon, professeur à l'Ecole Polytechnique, délégué du Gouvernement hongrois auprès de l'Association Géodésique, qui s'est multiplié pour rendre agréable à ses collègues leur séjour à Buda-Pest. Quant aux délégués fran- çais, ils ne sauraient oublier l'amabilité avec la- quelle ils ont élé recus par M. de Fontenay, Consul général de France. L'-C! R. Bourgeois, Membre correspondant du Bureau des Longiludes, Chef de la Section de Géodésie au Service Géographique de l'Armée. 1 Pour plus de simplicité, on à supprimé le nombre des heures, minutes et secondes. L. JOUBIN — L'OSTRÉICULTURE DANS LE MORBIHAN 65 L'OSTRÉICULTURE DANS LE MORBIHAN L'exéeulion d'une carte générale ostréicole des côtes de France, dont j'ai entrepris la publication -en collaboration avec l'un de mes élèves, M. Gué- rin, m'a conduit l'année dernière à visiter en détail les côtes du Morbihan. Il m'a semblé que les lecteurs de la /?evue géné- rale des Sciences prendraient quelque intérêl à connaître les méthodes actuellement employées dans l'industrie ostréicole de cette région et les faits biologiques ou océanographiques sur les- quels elles sont basées. Les rivières du Morbihan et le bassin d'Arcachon produisent la presque lotalité des jeunes huîtres destinées à être élevées sur place, ou transportées sur d’autres points du lilloral français, ou enfin -exporlées à l'étranger, nolamment en Angleterre et en Belgique. On peut estimer à environ deux cent millions les jeunes huitres livrées à l'élevage chaque année par les parqueurs du Morbihan. Cette industrie est donc considérable et donne lieu à un commerce fort important. La zone litlorale du Morbihan est presque tout entière occupée par les huitrières, qui commencent ‘un peu au-dessus de l'embouchure de la Vilaine pour s'étendre au delà de Port-Louis; mais ces huitrières ne sont pas placées directement sur la côte : elles sont abriltées dans les rivières et les golfes qui viennent y déboucher; ce sont, de l'Est à l'Ouest, les rivières de Penerf, d'Auray, le golfe (ou mer) du Morbihan, les rivières de Saint-Phili- bert, de Crac’h (ou de la Trinité), d'Etel, de Blavet. Nous laisserons de côté la rivière de Penerf.et le Blavet qui sont de médiocre importance. Il faut tout d'abord s'entendre sur ce terme de rivière. On pourrait croire que les huitrières sont placées dans lesembouchures de cours d’eau d'une certaine importance et que le volume d’eau douce qui vient se mêler à l'eau de mer est un facteur Sérieux dans la biologie des huîtres. Ces rivières sontbien plutôt des golfes, des sortes de fiords anfractueux, peu profonds, aux berges ‘élevées dans leur partie supérieure, basses et sa- blonneuses près du rivage, et suivant probablement une formation géologique particulière, car elles sont toutes sensiblement parallèles. Ce sont de grandes cassures découpant profondément la côte, généralement basse et couverte de dunes, qui font pénétrer la mer fort loin dans l’intérieur des terres. Tout au fond de ces découpures viennent se jeter REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. de petits ruisseaux qui apporlent une quantité d’eau douce tout à fait négligeable. Tel est le cas de larivière d’Auray, au fond de laquelle se jette le Loch, qui n’est qu'un mince ruisseau. La rivière de Crac’h est tout à fait analogue; celle de Saint- Philibert est plutôt un petit golfe. La rivière d’Etel est, en réalité, un golfe intérieur communiquant avec la mer par une étroite ouverture, à contour très anfractueux, parsemé d’ilots et de presqu'iles: c'est, en plus petit, la même structure que la mer intérieure du Morbihan. La carte ci-jointe (fig. 4) montre cette structure. La plupart de ces rivières, et notamment celle d'Auray, sont extrêmement pittoresques et ren- ferment des sites de toute beauté. A cette côte, entre la rivière de Crac'h et celle d'Etel, est attachée, par une très étroite langue de sable, la presqu'ile de Quiberon, qui ne possède pas d'huilrières en raison de la violence de la mer qui la bat, mais protège toute la côte d’Auray des tempêtes du large. L'industrie ostréicole de toute celle région, qui correspond au quartier maritime d'Auray, s'exerce exclusivement sur l'huître proprement dite, Ostrea edulis. Les parqueurs et l'Administration veillent avec un soin jaloux à ce qu'aucune huitre portu- gaise (Gryphæa angulala) ne soil introduite dans leurs rivières. On craignait autrefois l'hybridation entre Îles deux espèces, et, par conséquent, la perte de l'huitre native; on sait aujourd'hui que ces deux mollus- ques ont un mode de reproduction très différent, qui exclut toute possibililé de croisement. Ce qui serait à craindre, c'est que les huîtres portugaises ne s'installent dans les rivières du Morbihan comme elles l'ont fait au nord de la Gironde, où elles chassent de plus en plus l’huitre locale; par leur rusticité, leur vitalité, leur fertilité, elles auraient vite fait de prendre toute la place et d’ex- clure l'huitre armoricaine. Jusqu'à présent, rien de tel ne s'est produit, quoique de temps à autre on trouve quelques individus isolés qui sont immé- diatement détruits. Le fond du chenal des rivières d'Auray et de Crac’h est occupé par des banes naturels d’huitres, qui formaient autrefois un tapis continu depuis l'embouchure jusqu'au point où la marée cesse de se faire sentir. 11 en était de mème autrefois dans la rivière de Saint-Philibert et dans la mer du Morbihan ; mais diverses causes, parmi lesquelles il faut citer en première ligne l'abus de la drague, ont anéanti ces deux derniers bancs. 66 L. JOUBIN — L'OSTRÉICULTURE DANS LE MORBIHAN Quant à ceux d'Auray et de Crac’h, ils tendent à se restreindre de plus en plus; la partie inférieure de ces bancs, celle qui est la plus voisine de la mer, est extrêmement appauvrie et même a disparu totalement sur de larges surfaces; en d’autres des huîtres, et surtout avec les pillards qui, malgré l'active surveillance de l'inspection des pêches, font des ravages considérables, sachant bien qu'ils en seront quittes pour quelques francs d'amende. Ces pillards, qui viennent surtout de la rivière de so c} Qi S\Erdeve SE deven \ & \ £ Fort : Penthièvre Port Mar a ON : AS Pl Con quel Nantes LS se gun? QUIBERON Fig. 1. — Carte de la région des rivières du Morbihan où sont installés les bancs d'huitres naturels et les établissements ostréicoles. points, les bancs diminuent de vitalité d'année en année. Des règlements récents permettent cependant d'espérer une amélioration; la drague n’est per- mise que pendant quelques jours par an, et pen- dant une heure seulement chacun de ces jours. En outre, les bancs sont divisés en sections auxquelles, suivant un roulement, on ne touche que tous les trois ans. Mais il faut compter avec les ennemis naturels Vannes dans des barques grossières, mais très maniables, sont connus dans le pays sous le nom de synagols. Il existe encore en pleine mer, au large du fort Penthièvre, dans la baie de Quiberon, un banc naturel qui n’est malheureusement pas classé par l'Administration ; aussi les dragueurs ne le laissent- ils guère en repos. C’est un état de choses fâächeux, car, si l'appauvrissement des bancs de rivières venait à s’accentuer, il y aurait là une réserve L. JOUBIN — L'OSTRÉICULTURE DANS LE MORBIHAN 67 considérable qui permettrait de les reconstituer avec des huîtres du pays. La drague des bancs naturels dans les rivières produisait autrefois une quantité considérable d'huiîtres, qui, en 1878, a atteint pour la seule ri- vière d'Auray plus de 27 millions d'individus, ven- dus 427.000 francs, partagés entre 2.300 inscrits maritimes. Aujourd'hui, après une chute régulière, 200 inscrits environ pêchent 2 millions d'huitres qui ne valent pas 10.000 francs. L'appauvrisse- ment des bancs, la diminution de valeur des huîtres de drague, par suite de la surproduction des huîtres d'élevage dont la qualité est préfé- rable, ont amené ce résultat. Il serait facile ac- tuellement, sans trop faire crier les électeurs, de supprimer la drague régulière et de l'autoriser seulement lorsqu'il aura été reconnu qu'un banc a besoin d'être nellové. Il Le rôle principal, qui devrait être le seul, des banes naturels est de fournir les huitres mères, dont les œufs el les embryons donnent les jeunes huîtres appelées naissain. Toute l'industrie ostréi- cole consiste à récolter ce naissain, à le soigner et à le conduire jusqu'à la taille marchande, ce qui exige plusieurs années. Les huîtres nalives des bancs naturels sont des reproducteurs fort actifs, car une huître adulte, ayant de cinq à six ans, donne près de deux millions d’embryons. Les œufs fécondés restent enfermés entre les lames du manteau et des branchies de la mère; ils sont tout d’abord blancs et produisent ce qu'on appelle les huîtres laiteuses; ils deviennent ensuite gris, puis ardoisés et ressemblent à de la cendre fine. Cette évolution dure en tout six à sept semaines. C'est à ce moment que l'huitre, par des contrac- tions brusques, chasse ses embryons sous forme d'un petit nuage grisâtre. Cette reproduction se fait en été; c'est au mois de juin que les huîtres commencent à devenir lai- teuses, et elles émettent leurs embryons du com- mencement de juillet au milieu d'août. Les va- riations dans l'époque où se fait l'émission des embryons oscillent dans un espace de quatre à cinq semaines, six au plus. Ces différences, qui pa- raissent tout d'abord insignifiantes, ont, au con- traire, une grandè importance, car les résultats que l'ostréiculteur attend de son travail dépendent de la connaissance exacte de l'époque de la maturité. Dans une même localité, les pontes ne s'éche- lonnent pas. Au dire des ostréiculteurs, toutes les huîtres sont mûres à peu près à la même date. On à remarqué aussi que les huîtres lancent leurs embryons seulement au moment où la mer monte. On surveille attentivement les huîtres pendant la période de reproduction; l’ostréiculteur doit, en effet, disposer ses appareils collecteurs à une époque aussi voisine que possible de la maturité des em- bryons. Or, l'opération de la pose des collecteurs est longue; elle ne peut se faire que pendant les jours de marée de quinzaine, durant les trois heures environ où la mer est assez basse pour que l'on puisse placer ces appareils assez près des che- paux. Si on laisse passer une marée, il faut attendre la suivante, soit un retard de quinze jours pendant lesquels l'émission du naissain peut avoir eu lieu. On pourrait penser que l’ostréiculteur n’a qu'à placer ses collecteurs plus tôt et qu'il sera ainsi certain de ne pas manquer sa récolte. Il n’en est rien. En effet, l’eau des rivières contient en suspension de fines particules de vase qui se déposent sur les collecteurs et les recouvrent, dans l’espace de dix à vingt jours, d'une sorte d’enduit gras sur lequel les jeunes huîtres ne peuvent pas se fixer; les em- bryonsexigent,en effet,unesurface solide etpropre. Si les collecteurs sont posés trop lôt, on risque de voir d'autres amateurs de surfaces dures et propres profiter de l’aubaine et s'y fixer en foule; telles sont, par exemple, certaines Ascidies simples et composées que l’on appelle dans le pays des po- lypes. Ces Ascidies se reproduisent du milieu de juin au commencement de juillet, et, si lon a déjà posé les collecteurs à cette époque, elles les re- couvrent au point de ne plus laisser de place aux huîtres. On voit combien la pose des collecteurs nécessite d'attention et d'expérience et laisse, malgré tout, place à un aléa considérable. Cette année, par exemple, on a récolté du naissain en abondance dans la rivière d'Auray et rien dans la rivière de Crac'h, qui en est si voisine, parce que les collec- teurs y ont été posés une marée trop tard. Les jeunes embryons émis par l'huitre-mère nagent dans l'eau au moyen de grands cils vibra- tiles pendant un temps qu'il est fort difficile d'évaluer; les uns le limitent à quelques heures, les autres à quelques jours; puis, lorsqu'ils ont ren- contré un objet à leur convenance, ils s’y fixent, perdent leurs cils vibratiles et sécrètent une petite coquille excessivement mince, dont une des valves adhère immédiatement au support qu'ils ont choisi. Ce terme de choisi est exact, car on a vu les em- bryons mis en expérience tâter divers emplace- ments et ne se fixer qu'après avoir trouvé une sur- face solide, propre et lisse, non recouverte de vase et dépourvue d'animaux et de végétaux parasites. Dans les bancs naturels, les embryons se fixent souvent sur les coquilles d’autres huîtres vivantes 68 L. JOUBIN — L'OSTRÉICULTURE DANS LE MORBIHAN ou mortes, et c'est ainsi que se forment les bouquets ou paquets d'huîtres que l’on drague fréquemment. On a essayé de' nombreuses méthodes pour obliger les jeunes huitres à se fixer sur des objets à la convenance des ostréiculleurs, et les systèmes de collecteurs sont assez nombreux. Dans les ri- vières du Morbihan, après de multiples tätonne- ments, on s'est arrêté à deux procédés : les plateaux et les tuiles. Ils sont d’ailleurs usités partout, mais avec quelques particularités spéciales dans le Morbihan. Les collecteurs à plateaux sont constitués par des planches assemblées de facon à former une surface plane de deux mètres de longueur sur un de largeur environ; elles sont lisses et goudronnées. On su- perpose horizontalement une dizaine de ces pla- teaux entre de solides pieux enfoncés dans la vase et réunis par des traverses. On s'arrange pour que le plateau inférieur soit à 15 centimètres environ du sol et on laisse 3 ou 4 centimètres d'espace libre entre chacun d'eux. Le tout forme une sorte de meuble rectangulaire, et certains parcs en con- tiennent plusieurs centaines séparés par de petils passages (fig. 2). Les embryons des huîtres, amenés par les cou- rants de la marée montante, se fixent sur la face inférieure, à l'obscurité, en commencant par les pla- teaux du bas, et l’on peut en voir, quelques jours après, qui sont entièrement couverts de milliers de naissains. Les collecteurs en tuile sont d’un usage plus fréquent. Un se sert, pour les construire, de tuiles demi-cylindriques, en terre cuite rouge, de 30 à 35 cenlimètres de longueur, en tout semblables à celles dont on se sert pour les toitures. Deux trous sont percés sur leur arête médiane pour le passage d'une boucle en fil de fer qui sert à les maintenir en piles. On dispose, pour faire ces piles, deux tuiles à côté l'une de l’autre, la face concave en-dessous: puis deux autres en travers sur les premières, et ainsi de suite en ailernant de façon que chaque pile comprenne 20 tuiles, réunies par une anse de fil de fer. On pose un nombre variable de ces piles les unes à côté des au- tres sur un petit plan- cher supporté par des piquels, on charge le tout de grosses pier- res, et l'on a ainsi un tas ou ruche de 250 à 300 tuiles. Certains grands parcs renfer- ment assez de ces ru- ches pour faire un total de 500.000 tuiles (fig. 3). Cesruchessontsur- tout employées dans la rivière d’Auray; dans la rivière de Crac’h, les paquets de 2) tuiles sont placés au sommet d'un pi- quet de 1,50 enfoncé à moitié dans la vase. C'est le collecteur en champignon. Les lè- tes de tous les cham- pignons se touchent et s'appuient les unes contre les autres dans un même parc. Les collecteurs en champignon tiennent plus de place que les ruches, mais ils ont l'avan- tage de pouvoir être posés mème lorsqu'il reste encore un demi-mètre d’eau au moment de la basse mer, ce qui prolonge le temps de travail pendant les jours de marée. On à vu plus haut combien cetle condition est importante dans la pratique. Les tuiles, avant d'être disposées en collecteurs, subissent une opération spéciale qui consiste à les recouvrir d’un mince enduit formé de chaux, ciment et sable fin mélangés: on les plonge dans cette préparation maintenue à l'état liquide. Cet enduit a un double avantage; les embryons, qui ont besoin de calcaire pour la sécrétion de leur co- quille, recherchent de préférence pour s'y lixer les L. JOUBIN — L'OSTRÉICULTURE DANS LE MORBIHAN 69 EEE ppp objets où ils peuvent en trouver. En outre, quand il s’agit plus tard de détacher les jeunes huîtres des tuiles, de les détroquer, il suffit de glisser un couteau spécial à bout rond entre l’enduit et la tuile pour détacher la chaux par plaques minces qui entraînent les petites huîtres sans les blesser. Quelques ostréiculteurs préfèrent ne pas chauler leurs tuiles et les couper, au moyen d'appareils spéciaux, en fragments portant chacun une huitre. C'est ce qu'on appelle les huîtres à tesson. Celle méthode, longue et coûteuse, est maintenant très peu employée. Lorsque le naissain vient de se fixer, les jeunes huîtres forment sur l'enduit blanc de la luile de petits points jaunàtlres, brillants, à peine visibles à l'œil nu. Dès le mois de février ou mars de l'année suivante, ces petites buitres ont 10 à 12 millimètres de diamètre ; au mois d'août, ayant un an, elles ont 4 à 6 cen- timiètres, mais elles sont encore minces, à coquille peu solide. On les détroque sur- tout au printemps et on les expédie par pleins bateaux à Etel, à Marennes, en An- gleterre, en Belgique; elles peuvent suppor- ter ainsi un voyage de huit à dix jours sans périr. ‘ig. 3. — Vue d'un parc dans Il n’y à pas avantage à laisser trop longtemps les huîtres sur les collecteurs : elles se gênent, de- viennent difformes ou s'étalent trop, landis que leur valve collée contre la tuile reste trop fragile. Une fois détachées, elles consolident leurs valves et prennent du creux. C'est là que finit le rôle de l’ostréiculteur pro- ducteur de naissain dans la région d'Auray. Il s’agit maintenant d'amener ces huitres à la taille mar- chande et de procéder à leur engraissement. Ces deux opérations exigent des manipulations variées. Les jeunes huîtres détroquées doivent êlre pla- cées dans des parcs spéciaux. Il faut que le sol de ces parcs soit modifié pour les recevoir, car il est | très rare de trouver des terrains naturellement convenables à cet usage. Les huîtres, en effet, ne peuvent vivre sur la vase, qui les recouvrirait rapi- dement. Il faut que la couche superficielle soit enlevée et remplacée par du sable, des cailloux, des débris de coquilles; le toul se tasse et forme fina- lement une sorle de macadam dur et uni, où l’on peut placer les huîtres. Cette transformation des terrains coûle fort cher. Certains ostréiculteurs déposent les huîtres aussitôt après le détroquage sur ce sol artificiel; mais la plupart préfèrent les enfermer pendant plusieurs mois dans des caisses en toile métallique, isolées du sol par des piquets, où elles sont à l'abri des ennemis variés qui cher- chent à les dévorer. Ces caisses ostréophiles (fig. 4) sont plates, fermées par un couvercle; elles ont en- la rivière d'Auray contenant des collecteurs formés de tuiles en Las ou ruches. viron 2 mètres de longueur sur À de largeur et coûtent chacune environ 10 francs; certains par- queurs en ont jusqu'à 3.000; comme elles ne durent pas plus de six ou sept ans, leur installation repré- sente une mise de fonds considérable et exige un rapide amortissement. Les jeunes huîtres grandissent vite dans ces boîles; on les y retourne, on enlève les coquilles vides, les algues et les parasites; ce sont des soins continus et coûteux. Quand elles ont atteint de 3 à 5 centimètres, dimensions qui varient selon les préférences des parqueurs, et consolidé leur co- quille, on les place sur le sol des pares que l’on nomme des pares d'étalage, où il faut encore, pen- dant un an ou deux, les débarrasser de leurs enne- mis, les retourner au rateau, les trier par catégo- ries, toutes manipulations qui exigent de nombreux 70 L. JOUBIN — L'OSTRÉICULTURE DANS LE MORBIHAN ouvriers, et qui sont fort pénibles pendant la mau- vaise saison. III Les huilres ont atteint leur taille el leur forme marchande entre trois et quatre ans. Ce chiffre varie un peu selon la localité. À ce moment, il faut commencer à les engraissér avant de les livrer à la consommation. On ne pratique que très peu cette industrie dans le quartier d'Auray. On n'y compte qu'un petit nombre de bassins ou claires, où l’eau de mer ne pénètre pas à toutes les marées. On expédie la très grande majorité des huîtres de trois ans à Marennes, où on les engraisse et où on les transforme en huîtres vertes. On en envoie aussi beaucoup à Ostende et en Angleterre ; presque tout le reste va à Etel. L'industrie plus particulière des rivière d'Auray et de Crac’h est donc la production du naissain; une faible partie reste dans les pares d'étalage de ces deux rivières. Au contraire, dans la rivière d'Etel, ainsi que dans la mer du Morbihan, on ne récolte pas de naïssain et il n’y a pas de collecteurs; les parqueurs achètent le naissain aux ostréicul- teurs de Crac’h ou d’Auray. On voit donc que l'in- dustrie de ces régions, cependant très voisines, est tout à fait différente. Il faut ici faire une remarque qui a son intérêt pratique. Les producteurs de naissain de la région d'Auray vendent à Marennes ou eu Angleterre leurs plus belles huitres, les mieux faites; il leur en reste un grand nombre qui sont plus ou moins défec- tueuses et qui, surtout, quelle que soit la longueur de leur séjour dans leur rivière natale, cessent de grandir; ce sont celles-là qui sont vendues aux parqueurs de la rivière d’Etel. Or, aussitôt installées dans leurs nouveaux parcs, elles subissent une pousse rapide et regagnent en peu de temps la taille des premières. En outre, les ostréiculteurs ont remarqué que les huîtres épuisent assez rapide- ment la capacité nutritive d'un terrain de pare, et que, si on les change de place, on détermine chez elles un accès de croissance. Aussi déposent-ils d'abord leurs jeunes huitres dans les parcs du bas de la rivière d’Etel, puis, plus tard, ils les trans- portent dans les parcs du haut de ia rivière. Ils laissent reposer quelque temps le parc usé avant de le faire servir de nouveau Les huitres subissent, au cours de ces diverses opérations du détroquage, de la mise en boiîle, en pare, dans les transports, un déchet considérable. L'ostréiculteur d'Etel qui achète un million de nais- sains à Auray doit compter qu'au bout de trois ans, quand il expédiera ses huîtres à Marennes, il n'en trouvera dans ses parcs que 400.000, soit environ 60 ° /, de déchet; c’est là un chiffre moyen qui sou- vent est dépassé. Ce ne sont pas seulement les manipulations diverses qui causent cette perte; les ennemis variés de l’huître y contribuent beau- coup. L'envasement est un des principaux dangers auxquels les huîtres sont exposées dans les parcs. Les courants des rivières remuent la vase et la transportent partout; elle a tendance à se déposer dans les endroits plus calmes, c’est-à-dire dans la rivière haute qui est peu profonde, dans ses branches ou dans les baies latérales. Elle couvre les huîtres dans les parcs d'une mince couche de boue grise, et on doit les laver en jetant violem- ment de l’eau dessus et les remuer au rateau. Mais les parqueurs ont trouvé un auxiliaire bien inattendu pour les aider dans l'opération du nettoyage des huitres : c’est le Bigorneau vulgaire, Littorina littoralis. Quand ils voient que les huîtres dans leurs pares sont devenues grises, ils y sèment à poignées des bigorneaux; ceux-ci se promènent sur les huîtres, décollent la vase et les petites algues quis'yétaient fixées, eten peu de temps elles deviennent parfaitement propres. Quand on par- court les parcs, on voit cà et là de grandes taches blanches qui sont le résultat du travail de ces bigorneaux. Mais il faut cependant les surveiller; quand ils ont fini de nettoyer les huitres, ils se meltent à ronger le bord mince de leur coquille, la pousse ou barbe récente. On les enlève alors et on les sème plus loin. Un autre ennemi des huîtres est la moule, qui se développe facilement surtout dans la rivière d'Etel; les jeunes moules se fixent dans les parcs et dans les caisses ostréophiles à l’aide des nombreux fila- ments collants de leur byssus, elles agglutinent les jeunes huîtres en paquets et les font périr. L'ingé- niosité des ostréiculteurs les a conduits à tirer parti de ces moules pour détourner les ravages d’un autre ennemi plus terrible, le Crabe vulgaire, Car- cinus mænas. Lorsque ces crabes se trouvent en présence de jeunes moules et de jeunes huîtres, ils commencent toujours par manger les moules et ils n'attaquent les huîtres que quand il n’y a plus de moules. Les parqueurs maintiennent une sorte d'équilibre entre ces deux antagonistes et détruisent {antôt l'un, tantôt l’autre. Mais les crabes, le plus souvent, ne trouvant pas de moules, fontune grande consommation d'huitres. C'est surtout contre leurs déprédations que sont faites les caisses de Loile métallique. Ces animaux malfaisants passent l'hiver cachés dans la vase du fond des chenaux ; au mois de mars ou d'avril commence la période de reprodue- tion de ces crustacés extraordinairement proli- fiques; ils sortent de leurs terriers et dévorent les jeunes huîtres après en avoir brisé la coquille L. JOUBIN — L'OSTRÉICULTURE DANS LE MORBIHAN 71 avec leurs pinces; ils bouleversent le sol des parcs en creusant des galeries. À mesure que l'été approche, ils remontent vers les parties hautes des rivières, d’où ils redescendent à l'automne; après un nouveau séjour dans les parcs bas, ils hivernent en novembre. On a beau en prendre de grandes quantités dans des nasses en grillage, il en reste autant. Il en est de même des éloiles de mer, qui pul- lulent dans certains points des rivières; on en détruit le plus possible, mais, comme les crabes, elles sont très prolifiques et il en remonte constam- ment des chenaux dans les parcs, où elles font une grande consommation d'hui- tres. Une raie, la pas- tenague, ainsi qu'une autre espèce, la raie aigle, que l’on con- fond sous le nom de thère, sont très frian- des d'huîtres; on les empêche d'approcher des pares en les en- tourant de filets ou de grillages. C'est principalement pour empêcher ces pois- sons de dévorer les naissains que l'on à inventé l'huilre à tes- son. Le bigorneau per- ceur est encore un ennemi des huîtres, qu'il perce d’un trou pour y introduire sa trompe au moyen de laquelle il aspire les parties molles de l'animal. Il est peu abondant, sauf à Lochmariaker. Une éponge, la Clione celata, creuse des gale- ries dans l'épaisseur des valves de l’huitre ; elle rend la coquille friable et l'animal périt; elle est localisée sur un ou deux bancs des rivières et elle y est peu abondante. Les Arenicoles ou vers noirs bouleversent le sol des parcs font remonter la vase par-dessus le macadam et envasent les huîtres; il est fort diffi- cile de s'en débarrasser. Fig. 4. Il faut encore citer une algue globuleuse qui se fixe sur les huîtres; elle se remplit d'air et, quand il fait chaud, à mer basse, elle se gonfle comme un pelit ballon. Quand la mer remonte, l'huitre, soulevée par ce flotteur, est entraînée au loin par les courants. Cette algue, qui ne parait s'être instal- lée que depuis peu de temps dans la région, a fait perdre un grand nombre d'huitres. On voit par ce qui précède quelles difficullés de toutes sortes il faut surmonter pour conduire le naissain jusqu'à l’état d'huitre marchande; il fau- drait y ajouter encore diverses maladies qui ne paraissent pas avoir jusqu'ici atteint gravement la région d'Auray. On peut se rendre compte des frais énormes de matériel et de personnel, des capitaux qu'il faut engager, et de l'amortissement qu'il y a lieu de prévoir quand on veut organiser une — Vue d'un pare ostréicole dans la rivière d'Ltel. — Les premiers plans sont occupés par des caisses ostréophiles; derrière et au-dessus d'elles est un grand pare d'étalage contenant environ deux milliers de jeunes huitres. exploitation un peu considérable. Il faut encore considérer que, depuis quelques années, les prix de vente des huîtres et des naissains ont beaucoup diminué. Alors que le naissain valait, il y à dix ans, environ à francs le mille, il ne vaut plus guère que 60 à 75 centimes; ce prix n’est plus rémunérateur. Cette baisse est due principalement à la surproduction. Les belles recettes des premiers éleveurs ont tenté une foule trop considérable d'imitateurs. D'autre part, on se souvient des articles de jour- naux et des polémiques de ces dernières années au sujet de cas de fièvre tvphoïde mis sur le compte des huîtres. Beaucoup de personnes n'ont plus voulu en manger, et les étrangers ont profité de celte occasion pour ne plus acheter leurs huitres en France. En Angleterre, notamment, on à fait venir on] 19 de grandes quantités d'huitres des Etats-Unis. Le récent Rapport du Professeur Giard sur cette pré- tendue contamination des huîtres à fait justice de ces affirmations trop souvent intéressées. Actuel- lement, il y a une tendance à l'amélioration dans la vente des huîtres, au moins dans la région d’Auray. Ces notes rapides auront, je l'espère, permis au A. HOLLARD — LA THÉORIE DES IONS ET SES CRITIQUES lecteur de se rendre compte de l'état actuel de l’industrie huîtrière dans le Morbihan et des con- ditions, particulièrement intéressantes au point de vue biologique et océanographique, où elle s'exerce. L. Joubin, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle- de Paris. LA THÉORIE DES IONS ET SES CRITIQUES A PROPOS D'UN Ces critiques ont fait l'objet d’un développement important de la part de M. Chesneau, professeur à l'Ecole nationale des Mines, .dans ses Principes théoriques des méthodes d'Analyse minérale". L'Analyse est considérée trop souvent comme un chapitre tout à fait à part de la Chimie. Les traités de Chimie analytique se bornent, en effet, à exposer dans le détail les opérations de l'analyse, mais ils se gardent de les raltacher aux lois générales de la Chimie. Ostwald a réagi contre cette tendance en publiant ses Principes scien- tifiques de la Chimie analytique, où un grand nombre de réactions sont interprétées avec l’hypo- thèse de l'existence d’un équilibre entre les ions et les molécules. L'hypothèse des ions, dont s'est servi Ostwald, a certainement contribué à donner à cet exposé la lumière et l'harmonie qui en ont fait le succès”. Mais il ne suffil pas qu'une hypo- thèse soit séduisante pour être adoptée d'emblée, et l’on peut très bien chercher à interpréter les méthodes et les réactions de l'analyse chimique avec une autre hypothèse. C'est ce qu'a fait M. Chesneau, qui, non seulement ne s’est pas servi de la théorie des ions, mais a soumis cette théorie à une critique sévère. Nous examinerons tout à l'heure la valeur de cette critique, d'autant plus importante qu'elle contient les arguments —décisifs selon quelques-uns — qu’avaient donnés Kahlen- berg et son École. Il « Il nous parait préférable — dit M. Chesneau — de recourir à la méthode calorimétrique, qui, elle, est exemple d'hypothèse et ne fait appel qu'à des réactions manifestes. » C'est nous qui soulignons, parce que cette absence d’hypothèse à l'endroit de ‘ 4 vol. in-8° de 243 pages. Dunod et Pinat, éditeurs, Paris (1906). ? L'ouvrage allemand a été traduit en français, en anglais, en russe, en hongrois, en italien, en japonais. LIVRE RÉCENT la méthode calorimétrique rappelle ce passage de: La Science et l Hypothèse de M.H. Poincaré : «Ily a des hypothèses dangereuses ; ce sont d’abord, ce sont surtout celles qui sont tacites et inconscientes. » La méthode calorimétrique admet — entre autres hypothèses tacites — que la saturation des affinités les plus fortes est toujours liée à un plus grand effet thermique. Nous n'avons pas à rappeler ici les réactions nombreuses qui contredisent cette hypothèse ; il nous suffira de constater que quel- ques-unes des conclusions auxquelles elle a conduit M. Chesneau ne s'accordent pas avec les faits : « Les déplacements réciproques des acides ou des bases dans les sels — dit M. Chesneau — sont d'autant plus complets que la différence des cha- leurs de saturation de la même base par les deux acides est plus considérable, et réciproquement : le déplacement est pratiquement complet si la diffé- rence est très grande, partiel si elle est petite. » Cependant, les exemples abondent où l'acide le plus fort n'est pas celui dont la neutralisation dégage la plus grande quantité de chaleur, et un grand nombre d'acides sont chassés de leur com- binaison plus ou moins complètement par d'autres acides dont la chaleur de neutralisation est beau- coup moindre. Ainsi, un équivalent d'acide chlor- hydrique ou nitrique déplace d'un équivalent de leur sel de soude les acides suivants, dont la cha- leur de neutralisation est cependant bien supé- rieure : les acides sulfurique et sélénique, dont 2 les 5 sont déplacés; les acides orthophosphoriqueet , : # : : ee oxalique, dont les 3 sont déplacés; l'acide fluorhy- drique, dont les =. sont déplacés, etc. Plus loin, M. Chesneau s’abuse complètement quand il dit : « Quant à la classification des acides et des bases, celle qu'Ostwald déduit de leur degré d'ionisation revient exactement à celle que nous avons établie d'après les chaleurs respectives de gen CFTC A. HOLLARD — LA THÉORIE DES IONS ET SES CRITIQUES 13 neutralisation. » Il n'y a cependant aucun rapport entre l'une et l'autre classification, comme le montre le tableau suivant : CHALEURS CONDUCTIBILITÉS de neutralisation électriques Acide sulfurique . . . . . 157 calories 65 Acide orthophosphorique. . 148 7,5 Acide monochloracétique . 145 4,9 Acide oxalique . : .1. .. 141 197 Acide chlorhydrique. . . . 137 100 On voit qu'en particulier l'acide chlorhydrique, qui, dans ce tableau, a la chaleur de neutralisation la plus faible, est celui qui est le plus dissocié. II Passons maintenant aux objections faites à la théorie des ions. Voici quelques-uns des arguments de M. Chesneau ; nous examinerons ensuite ceux de Kahlenberg. « Nous ferons tout d'abord observer — dit M. Chesneau — que, pour les propriélés addilives des solutions salines, tous les raisonnements basés sur l'ionisalion des électrolytes peuvent être repris textuellement en se fondant sur l'hydrolyse des sels en acide et base libres. » Ce serait Lout au plus vrai si l'hydrolyse élait une propriélé générale des sels; mais c'est une propriété que possèdent seuls les acides ou les bases faibles et leurs sels, tandis que les propriétés addilives ont lieu pour fous les sels d'après la théorie électrolytique. La méthode calorimétrique elle-même n'accuse pas d'hydrolyse avec les sels à base et acide forts. Mais M. Chesneau tient à affirmer la généralité du phénomène et il ajoute : « L'égalité de force des acides à l’état de dilution infinie, déduite par Ostwald de l'ionisation complète dans cet état, résulte, dans notre théorie calorimétrique, de ce fait que, à l’état de dilution infinie, tous les sels doivent être entièrement hydrolysés, et leurs acides mis intégralement en liberté. » « L'un des phénomènes — dit, plus loin, M. Chesneau — qui contredisent le plus nettement à la théorie électrolytique est l'hydrolvse des sels en solutions aqueuses. Dans l'hydrolyse du chlo- rure ferrique : Fe*Clf + 6H°0 re Fe*(OH}5 + G6HCI, la théorie électrolytique exige la dissociation de HO en ses ions HH+OH pour produire l’hydrate ferrique et l'acide chlorhydrique. Or, le second syslème est beaucoup plus riche en ions libres que le premier, puisque, dans la théorie électrolytique, HCI est presque totalement ionisé, que Fe°Cl l’est beaucoup moins que HCI (dans le rapport de 3 à 5 environ) et que H°O et Fe* (OH)" ne le sont pas du tout. Ce n'est donc pas dans le sens du système le moins ionisé que la réaction tend à se produire, mais, au contraire, dans le sens du sys- tème le plus ionisé, c'est-à-dire en un sens inverse de la règle donnée par Ostwald pour prévoir le doubles décompositions salines ; et, en fait, l'hy- drolyse de Fe’Cl° et de la plupart des sels absorbe de la chaleur, tandis que la règle formulée par Ostwald a pour base la tendance à la formation de l’eau avec dégagement de 13 cal. 5. » M. Chesneau n'est vraiment pas heureux quand il cite les résultats numériques auxquels conduit l'hypothèse des ions : « Fe*Cl° — dit-il — est beau- coup moins dissocié que HOGI (dans le rapport de 3 à 5 environ). » Cela n'est vrai que pour des con- centrations de Fe*Cl° très supérieures à celles où se produit le phénomène de l'hydrolyse; mais, dans le cas de l'hydrolyse, Fe*Cl° est, comme HCI, entièrement dissocié. Quant au dégagement de 13 cal. 5, Ostwald n’a jamais dit que ce dégage- mentrésultait de l'hydrolyse des sels, mais unique- ment de la neutralisation des acides {or/s par des bases fortes en solution étendue. L'équation d'équilibre indiquée par M. Chesneau devient, dans la théorie de la dissocialion électro- lytique, si l'on considère que Fe‘Cl° et HCI sont enlièrement dissociés, tandis que, pratiquement, la base reste non décomposée : ++ = RSA LAN ARR ESNLER (Fe), + (CL), + 6 H20 2, 6 (H + CI) + Fe, (OH)s. mn IN La théorie des ions s'accorde donc très bien avec les phénomènes de l'hydrolyse, où, d'après M. Ches- neau, « se manifeste le plus nettement l’impuis- sance des ions ». On va voir que les expériences suivantes de M. Chesneau n'ont pas ébranlé davantage la théorie de la dissociation électrolytique : « J'ai vérifié — dit M. Chesneau — si, comme l'indique Ostwald, le ralentissement du dégage- gement d'hydrogène par addition d'un acétate, dans l'attaque du zine par l'acide acétique, est bien en rapport avec l'ionisation de l'acétate. » Nous ferons tout d'abordremarquer que M. Ches- neau a, une fois de plus, mal interprété le sens des indications d'Ostwald. Voici, en effet, la citation d’Ostwald qui se rapproche le plus de ces indicalions' : « L'action d’un acide est affaiblie par l'addition d'un de ses sèls neutres, et cela d'autant plus que cette addition est plus importante et que l'acide est plus faible. » — Malgré le point de départ inexact de M.Chesneau, nous poursuivons néanmoins jusqu'au bout l'exposé de ses expériences, parce que, loin d'infirmer l'hypo- 1 OsrwaLo : Les Principes scientifiques de la Chimie ana- lytique, p. 58 de la traduction francaise. A. HOLLARD — LA THÉORIE 74 thèse des ions, elles la confirment au contraire : Les acélates ajoutés par M. Chesneau ont été suc- cessivement l’acélate de soude, l'acétate de manga- nèse et l’acétate de zinc : « L’addition d'acétate a bien ralenti le dégagement d'hydrogène, mais nullement dans le sens des prévisions tirées de l'ionisation, car l'acétate de manganèse, qui est certainement moins ionisé que l’acétate de soude, produit le même effet que celui-ci, et l’acélate de zinc, qui doit avoir une ionisation très voisine de l'acétate de manganèse, agil beaucoup plus que celui-ei et que l'acétate de soude, au point d'arrêter presque totalement le dégagement d'hydrogène ». Les termes cependant et doit, que nous avons soulignés, auraient gagné — dans l'intérêt même de la thèse de M. Chesneau — à être remplacés par des affirmations fondées sur l'expérience. Nous admet- tons, cependant, que ces probabilités sont l’expres- sion de la vérité; il n’en reste pas moins que les acélates, quels qu'ils soient, sont tellement plus dissociés que l'acide acétique qu'ils doivent avoir tous le même effet sur l’acide acélique; cet eflet est de modifier, dans une même proportion et dans le sens de l’affaiblissement de l'acide acétique, l'état d'équilibre des concentrations de l’anion CH'CO* de l'acide acétique, de son cation ñ et de la partie de l'acide acétique dissociée. De fait, M. Chesneau trouve qu'en présence des acélates de soude et de manganèse, l'acide acétique dégage sur une lame de zinc la même quantité d'hydrogène. Quant à l'arrêt presque total du dégagement d'hydrogène sous l'influence de l’acétate dezinc, ce n’est pas, comme le croit M. Chesneau, un fait qui intirme l'hypothèse des ions, mais bien plutôt un fait qui la confirme; l'addition d’acétate de zinc amène, en effet, des ions Za qui, par la pression osmotique qu'ils exercent sur la lame de zinc, s'opposent à la dissolution de celle-ci. Nernst avait déjà prévu le phénomène dans sa généralité bien avant les expériences de M. Chesneau. M. Chesneau croit devoir remplacer la théorie des indicateurs colorés, basée sur l’ionisation des sels, par une théorie basée, d'une part,sur l'hydrolyseet, d'autre part, sur la force des indicateurs considérés comme des acides faibles, cette force étant mesurée par la quantité de chaleur qu'ils dégagent en se combinant à un alcali. Nous avons vu tout à l'heure ce qu'il fallait penser de cette mesure de la force des acides. Quant à l'hypothèse de l'hydrolyse, elle ne sau- rait non plus nous satisfaire, puisque les indica- teurs réagissent également dans les solutions non aqueuses, à condition qu'elles soient dissociantes (par exemple, la phtaléine du phénol dans les solu- tions alcooliques sèches). Dans ces solutions non DES IONS ET SES CRITIQUES aqueuses, il ne saurait être question d'hydrolyse. «Les expériences de M. Chassy— dit M. Chesneau — montrent que, dans un mélange de plusieurs sels, on peut en électrolyser un seul (ce que témoigne le métal déposé à l’électrode —) et constater en même temps le transport de molécules par le cou- rant électrique, bien qu'elles n'aient pas été disso- ciées en ions. » De fait, dans un mélange de sulfate de zinc et de sulfate de cuivre, par exemple, on peut déposer le cuivre seul et constater que la concentration de sulfate de zine augmente à la cathode. Mais cela ne signifie pas que le sulfate de zinc ait été transporté à l'état de molécules à la cathode. Cela signifie tout simplement, d'après l'hypothèse des ions, que les ions 7a — qui ont pris part au transport de l'électricité — n'ont pas pu former de dépôt métallique à la cathode. Ce dépôt, en eflet, à supposer qu'il ait pu se former, aurait aussitôt déplacé, en se dissolvant, la quantilé équivalente de cuivre. Ces expériences ne paraissent donc pas,comme le dit M. Chesneau, « devoir faire rejeter l'hypothèse d'ions électriques préexistant à l'état libre dans les solutions salines aqueuses ». M. Chesneau reproche à Arrhéniuset à son École d’avoir négligé de parti pris les expériences susceptibles d'infirmer la théorie des ions : « Les nombreux travaux suscités par les publicalions d'Arrhénius dit M. Chesneau — ont tous été dirigés au début en vue de confirmer sa théorie; notamment, les solutions concentrées ou failes avec des solvants autres que l’eau furent longtemps laissées de côté. C’est ainsi que l’on admit peu à peu, surtout en Allemagne, grâce à l'autorité des illustres promoteurs de la théorie électrolytique, que les solutions aqueuses des sels sont seules douées de conductibilité électrique, et que les corps qu'elles contiennent y possèdent des poids moléculaires anormaux, tandis que, en solu- tion non aqueuse, les corps dissous ont des poids moléculaires normaux et conséquemment ne con- duisent pas l'électricité. » Cela est si peu exact qu'il a été publié — mème avant [a théorie d'Arrhénius — un grand nombre de mesures de conductibilité de solutions non aqueuses (Voir, en particulier, les mesures faites en solutions alcooliques par Matteucci et Oberbeck en 1875, par Gugliemo en 1882, par Vicentini en 188%, par Fitzpatrik en 1887; voir aussi les mesures faites par Pfeiffer en 1885 dans les solutions éthérées et par Bouty dans les solulions nitriques en 1888.) III Si nous passons maintenant aux criliques de Kahlenberg, que cite M. Chesneau, nous rencon- A. HOLLARD — LA THÉORIE DES IONS ET SES CRITIQUES 15 trons des objections à la théorie des ions qui paraissent beaucoup plus sérieuses. Kahlenberg a faitremarquer qu'un certain nombre de sels en solulions aqueuses concentrées donnent, par la cryoscopie, des poids moléculaires supé- rieurs à ceux que donnent leurs conductibilités électriques d’après l'hypothèse des ions. À cela nous ferons observer queles travaux de Jones expli- quent très bien celte divergence : cette divergence est d'autant plus accentuée — d’après Jones — que le sel cristallise avec un nombre de molécules d'eau plus considérable; l'abaissement du point de con- gélation est augmenté d’une façon anormale parce qu'une partie de l’eau ne figure plus à l’état de dissolvant, mais est combinée avec les molécules. « Il existe, dit Jones‘, une relation générale entre le nombre de molécules d'eau de cristallisation d’un corps et la grandeur des abaissements qu’il produit sur le point de congélation de l’eau... Le nombre des cas qui se conforment à cette relation est si considérable et le nombre des exceptions apparentes si pelit que la coincidence ne peut être considérée comme fortuite. … Si la substance cristallise sans eau, il faut s'attendre à ce que l'abaissement cryoscopique produit soit normal ou, au plus, un peu trop grand. Et c'est bien ce qui se passe. Parmi les soixante-huit corps étudiés jusqu'ici, aucun de ceux qui cristallisent anhydres ne donne en solution concentrée un abaissement cryoscopique considérable. L'abaissement cryoscopique produit peut être légèrement supérieur à celui qu'on calcule d'après le degré de dissociation, puisqu'il peut arriver qu’une substance se combine avec quelques molécules d’eau en solution, tout en élant inca- pable de conserver cetle eau hors de la solution; de même, une substance qui cristallise avec de l'eau peut se combiner, en solution, avec un nombre de molécules d'eau beaucoup plus grand que celui qu'elle est en état de conserver hors de la solution. La théorie est, par conséquent, tout à fait d'accord avec les faits. » Kabhlenberg a formulé des objections impor- tantes à l'égard des solutions non aqueuses : Alors que, dans l’eau, le degré de dissocialion, défini par le rapport ? des conductibilités molé- U U'œ culaires, concorde généralement avec le degré de dissocialion délerminé par une des méthodes osmotiques, il ne concorde pas, dans un certain nombre de cas, pour les dissolvants autres que l’eau. Cette discordance, signalée par Kahlenberg et ! Journal de Chimie physique, &. I, n° 6, p. 486 (1905). par d'autres expérimentateurs, peut être expliquée par la formation de molécules et d'ions complexes : « La polymérisation des électrolytes — dit P. Du- toit’ — semble bien être le cas général dans les dissolvants non dissociants (Werner, Bruni et Berti, Frankland et Farner). Dans les liquides don- nant des solutions conductrices, on remarque une action dissociante du dissolvant, car, dans la règle, le poids moléculaire diminue par la dilution. Il est impossible de déduire le nombre des ions, qui seul permettrait une comparaison avec les conduc- tibilités, du nombre total des molécules polymé- risées, des molécules simples et des ions que donnent les méthodes osmotiques; mais on peut affirmer que la dissociation des molécules en ions s'effectue, car les sels n'ayant pas de tendance à la polymérisation donnent des valeurs inférieures au poids moléculaire théorique... Ainsi, dans l'acétone, Nal se montre neltement dissocié (Jones). Dans la pyridine et le benzonitrile, on trouve, à côté d'élec- trolytes polymérisés, des électrolytes dissociés (Werner). » Kahlenberg a observé que la solution de l'oléate de cuivre dans le benzène, qui est une solulion non conductrice, précipile instantanément le chlo- rure de cuivre par addition d'un certain nombre de chlorures dont les solulions benzéniques ne sont pas conductrices. Cette expérience parait con- tredire la théorie qui veut que les réactions instan- tanées ne s'effectuent qu'entre ions. Mais, en rai- son des complications qu'apporte à la réaction la polymérisation de l'électrolyle, cetle expérience n'est pas nécessairement en contradiction avec la théorie des ions. Ces complications ne doivent pas faire oublier le grand nombre de réactions simples effectuées en solutions non aqueuses et donnant raison à la théorie des ions”. Dans les solutions non aqueuses également, l'hypothèse des ions a été confirmée par un grand nombre de mesures de conductibi- lités. C'est ainsi que Godlewski a montré, pour un grand nombre d'électrolytes en dissolution dans l'alcool, que leur conduclibilité est bien la mesure de la dissociation ; que Duloit et Levier ont trouvé que la conductibilité moléculaire dans l'acétone — pour les sels qu'ils ont éludiés — devient cons- tante aux grandes dilutions et qu'elle est la somme des conduclibilités ioniques (loi de Kohlrausch). Pour l'ammoniaque aussi, la conductibililé mo- léculaire des électrolytes devient constante aux grandes dilutions, conformément à l'hypothèse des ions. ! Journal de Chimie physique, février 190%, p. 644. ? Voir en particulier, P. Durorr : Loc. cit., p. 648. -1 [er] A. HOLLARD — LA THÉORIE DES IONS ET SES CRITIQUES JA" Mais il ne suffit pas de démolir une théorie; il faut encore mettre à sa place une explication géné- rale plus satisfaisante. Comment interpréter, en particulier, autrement que par l'hypothèse de la dissociation électrolytique, ie facteur À par lequel il faut multiplier la pression osmotique, les écarts de congélation et d'ébullition calculés dans l'hypo- thèse de molécules non dissociées? Voici la réponse de M. Chesneau : « Si les contradictions entre les faits et la théorie de l'ionisation paraissent devoir faire rejeter celle-ci, on retombe alors dans une autre difficulté, celle de ne pas expliquer la néces- sité d'introduire le coefficient 1 dans la loi générale d'équilibre de Guldberg et Waage. Sans doute, il vaudrait mieux renoncer à cette explicalion, plutôt que de la tirer d'une hypothèse contestable ; mais de récentes recherches sur l'état de polymérisation des liquides entreprises, par Ramsay et Shields, et les applications qu’en a faites le Prof. H. Crompton aux solutions salines, permettent dès à présent de concevoir le coefficient À comme résultant d'une action chimique entre le solvant et les corps dis- sous. » Afin de ne pas trop prolonger la discussion, nous ne parlerons pas de la théorie de Crompton, qui a déjà été réfutée par Jahn”. Quant aux recherches de Ramsay et Shields, elles sont relatives aux ten- sions superlicielles des liquides purs et n'ont — quoi qu'en dise M. Chesneau — aucun rapport quelconque avec la loi de Van C'Hoff qui régit les solutions des sels et non les liquides purs. Ramsay et Shields ont établi la loi suivante : YS —kt + étant la tension superficielle du liquide, s la sur- face correspondant au volume moléculaire, Æ une constante et { la température du liquide comptée en partant de la tempéralure crilique prise pour origine *. Cette loi est analogue à la loi des gaz : pV=RT; qui relie la pression au volume moléculaire. De même que R a la même valeur pour tous les gaz normaux, c'est-à-dire qui ne se dissocient ni ne s'associent sous l'influence des varialions de température, la valeur de Æ est aussi la même pour tous les liquides purs normaux. Pour un certain nombre de liquides, À est trop petit ou trop grand. Ramsay et Shields en concluent 1 Berichte der d. ch. Ges., t. XXX, p. 2982-2293. = Plus exactement, le point d'origine est à 5° au-dessous de la température crilique. qu'il y a association ou dissociation des molécules du liquide: et, si l’on appelle x le coefficient d'as- sociation ou de dissocialion, on a : YS—Ækt. On le voit, le coefficient x, qui est relatif aux liquides purs, n'a aucun rapportavec le coefficient z qui, lui, est relatif aux solutions. Cela n'empêche pas M. Chesneau de dire : « L'analogie des conclu- sions de Ramsay et Shields avec celles de Van UHoff, aboutissant à l'équation 7Ÿ— :RT de la loi des pressions osmotiques pour les solutions salires, est frappante : le coefficient x joue dans l'équation de Ramsay et Shields le même rôle que le coeffi- cient ? dans l'équalion de Van t'Hoff. » Ramsay et Shields ne seront pas peu surpris de voir quelle interprétation on a pu donner de leur loi. y En résumé, nous croyons avoir prouvé que les criliques dirigées contre la théorie de la dissocia- tion électrolytique ne sont pas de nature à faire abandonner une hypothèse qui a élé aussi fruc- tueuse, que l’on a appliquée à des domaines scien- tifiques très différents et qui a favorisé d'ure façon remarquable le développement prodigieux de la Chimie physique. Avec un certain nombre de dis- solvants autres que l'eau, nous avons vu qu'on ne retrouve plus la même simplicité de relation entre le poids moléculaire des électrolytes, leur conduc- tibilité et leur aptitude à entrer en réaclion ; mais nous avons vu aussi que la polymérisation des électrolytes dans ces dissolvants pouvait expliquer, au moins qualitativement, ces anomalies. Il est probable qu'une étude plus approfondie de ces phénomènes de ,polymérisation expliquera d’une facon complète et quantitative ces anomalies. Il est possible aussi qu'au fur et à mesure des progrès de la science, on soit obligé de grefler sur l'hypo- thèse de la dissociation électrolytique des hypo- greffes finissent par modifier de fond en comble l'hypothèse primitive des ions. C'est, en effet, le cas de beaucoup de théories de passer, après avoir servi, pendant un temps plus ou moins long, à interpréter et à faire prévoir un certain nombre de phénomènes. En atlendant, la lhéorie des ions continue à susciter — même dans le domaine des dissolvants autres que l’eau — des éludes fruc- tueuses. Le moment n'est donc pas encore venu d'abandonner un guide ainsi qualifié. A. Hollard, Docteur ès sciences, Chef du Laboratoire central des Usines de la Compagnie française des Métaux- thèses complémentaires; il se peut même que ces BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 1 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Couturat (Louis). — Les Principes des Mathéma- tiques. avee un appendice sur la Philosophie des Mathématiques de Kant. — 1vo/. grand 1-8, de vin-312 pages. (Prix : 25 fr.) Félix Alcan, éditeur. Paris, 1906. Ce livre est une exposition critique de divers travaux récents, par lesquels plusieurs auteurs (MM. Russell, Peano, Boole, Schrüder, .…) ont essayé d'élucider les bases des Mathématiques. Voici, d'après M. Couturat, ce qu'il en est. La méthode capitale est la Logistique, la logique formelle, c'est-à- dire la logique convenablement appropriée et pourvue d'un outillage (terminologie et notations) quasi algé- brique. On a ainsi le calcul des propositions, le calcul des classes, le calcul des relations. Les Mathématiques s'édifient en opérant, parles pro- cédés ci-dessus indiqués, sur des notions primitives et irréductibles, axiomes ou postulats. Pour l'Analyse, ces notions sont le nombre entier (cardinal) et l'idée d'ordre. Il y a quatre Géométries, suivant le système qu'on se donne de postulats : I. La Topologie ou Analysis situs; : ( II. Projective ; Les Géométries + III. Descriptive‘; l IV. Métrique. La Géométrie projective postule le point et la droite. La Géométrie descriptive (qui n’a que le nom de com- mun avec la théorie ordinaire des épures) postule, en outre, sur chaque droite le point #mpropre (inter- section avec une quelconque des parallèles), qui joue un rôle à part. La Géométrie métrique introduit encore : Ou bien la notion de vecteur, Ou bien celle de la congruence (superposabilité des figures), Ou bien celle de mouvement. La Géométrie métrique est la vieille et consacrée science ordinaire, celle d'Euclide. C’est la plus compli- quée de toutes. « Il est assez piquant (Couturat, p. 181) de constater que la réputation de rigueur dont la Géométrie d'Euclide a joui pendant des siècles était absolument usurpée, et qu’elle ne méritait guère de passer, aux yeux des philosophes rationalistes du xvue siècle, pour le modèle et le type de la déduction logique. » Quant à la Topologie, c'est une branche difficile, obscure et encore assez peu développée. Elle traite : De la connexion des surfaces de Riemann (théorie des fonctions d’une variable complexe); De différents problèmes assez disparates, souvent cachés sous l'apparence d'amusettes ou de devinettes : Problème des ponts; Nœud gordiernt; Retourner son gilet et le mettre à l'envers ayant les mains liées; 3 Définition de la courbe fermée, etc., ete. En résumé, la Mathématique consiste à arranger par la logistique et à combiner (comme en un jeu de casse- tête ou, si l'on préfère, comme au jeu d'échecs) des notions qu'on n'a pas à élucider. « La Mathématique (citation de M. Couturat, p. 4) est une science où l'on ne sait jamais de quoi l'on parle, ni si ce qu'on dit est vrai ». D OT PR NS EN RS TRS EE ! Ou affinne, de l'Abstrakte Geometrie de Vahlen (voir le compte rendu dans la Revue du 15 juin 1906). Voilà le résumé du livre. Qu'en faut-il penser au point de vue dogmatique? La question est oiseuse. D'abord, M. Couturat (Introduction) décline toute prétention à l'originalité: il jette par-dessus bord plu- sieurs théories de son livre « De l'Infini Mathématique », vieux à peine de dix années; il annonce (et avec raison) que des publications incessantes transfigurent la Imatière, presque de mois en mois. L'ouvrage est un document historique, dressé par un chroniqueur sagace et bien informé, sur l’état de la question, dans les toutes premières années du xx° siècle. Deux Notes (Sur la théorie des ensembles et Sur celle des groupes) sont un essai de vulgarisation pour ces difficiles matières. Le volume se clôt par une étude sur la philosophie des Mathématiques de Kant. Ici je me récuse et ne sui- vrai pas M. Couturat sur un terrain où les philosophes sont chez eux. Je dirai seulement que M, Couturat s'y réclame non de Kant, mais de Leibnitz. L'ouvrage est intéressant et utile. I] épargne au lec- teur la peine de recourir à de nombreux Mémoires, dis- persés dans divers recueils et en diverses langues, et à de nombreux livres. Il est éminemment instructif etil fournit une excellente discipline : il apprend à se méfier de l'évidence, de l'intuition, des idées tradition- nelles et consacrées. LÉON AUTONNE, Maître de Conférences de Mathématiques à l'Université de Lyon. Codron (C.), Zagénieur civil, Professeur du cours des Arts mécaniques à l'Institut industriel du Nord, Lauréat de la Société d'encouragement pour l'Indus- trie nationale. — Expériences sur le travail des machines-outils pour les métaux. 2° fascicule : Forage. —1 vo/.in-4° de 551 pages avec 1612 figures. (Prix : 25 fr.) Dunod et Pinat, editeurs. Paris, 1906. Cet imposant volume est la suite de l'œuvre considé- rable entreprise par M. Codron, et dont nous avons signalé le début aux lecteurs de la Ztevue générale des Sciences, en 1902. Ce livre n’est pas un cours à l'usage d'étudiants qui s'y noieraient, ni une synthèse bâtie sur une théorie quelconque de l'outil, et en vue de cette théorie : c’est un recueil d'expériences poursuivies avec méthode sur le travail des outils tel qu'il s'opère dans les ateliers. Chacune de ces expériences est exposée dans ses moindres détails, de manière à permettre de la vérifier et répéter au besoin; elles sont, en outre, groupées par séries de travaux analogues, en y faisant varier suc- cessivement les données dont on peulainsi déterminer l'influence. Cette détermination est précisée par des formules d’une certaine généralité, bien qu'elles ne soient rigoureusement applicables qu'aux expériences mêmes dont elles sont tirées. Comme dans le premier fascicule de 1902, consacré au meulage, au cisaillage et au poinconnage, toutes les expériences, toutes les gravures sont originales. Leur ensemble représente un travail absolument inédit et que l’on peut, sans exagération aucune, qualifier de colossal. Les mécaniciens ne sauraient trop remercier M. Codron d'avoir su l’accomplir avec des ressources aussi faibles que celles dont il dispose. Ces travaux sont loin d’ailleurs d’être terminés, l’auteur les poursuit infatigablement; mais il faudra, malgré tout, quelques années encore pour mener à bonne fin cette contribu- tion capitale à la technologie des machines-outils. GR: BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 2° Sciences physiques Barus (Carl), Professeur de Physique à l Université de Brown, à Providence (Etats-Unis). — A conti- nuous Record of atmospheric Nucleation. — 4 val. in-8° de 226 pages avec liqures. Smithsonian Institu- tion. Washington, 1906. Id. — The Nucleation of the uncontaminated At- mosphere. — 4 vol. 1u-8° de 152 pages avec figures. Carnégie Institution. Washington, 1906. Le Professeur Barus est peut-être de tous les physi- ciens celui qui a le plus écrit sur la question des « noyaux de condensation »; et, si ses travaux sur ce sujet l'ont conduit parfois à des conclusions théoriques fort discutées, il n’en reste pas moins qu'on lui doit la découverte de faits expérimentaux importants, et notamment de la propriété qu'a le phosphore de pro- voquer une condensation intense dans un jet de vapeur. La plus grande partie des deux ouvrages actuels est relative à des expériences variées, et souvent curieuses malgré leur complication apparente, sur la production de gouttelettes d'eau qui a lieu au sein de l'air primiti- vement saturé d'humidité, et exposé aux rayons X, ou à ceux du radium, lorsqu'on soumet cet air à une détente brusque. Le gaz étudié est éclairé au moyen d'un dispositif spécial, et l'auteur obtient, grâce à la dimension et à la couleur des couronnes de diffraction observées, une estimation de la grosseur et, indirec- tement, du nombre des gouttelettes formées. Ce que l’auteur appelle « nuclei » (que l’on peut traduire par «noyaux de condensation», ou pour abréger «noyaux »), ce sont les centres particuliers, produits dans le gaz par le rayonnement actif, ou préexistants, et autour desquels se forment les gouttelettes. De ses expériences, M. Barus est amené notamment à conclure qu'il existe dans les gaz deux sortes de «noyaux »,les uns éphémères en quelque sorte, exi- geant pour provoquer la condensation une sursatura- tion assez élevée, les autres, ou « noyaux résiduels », de bien plus grande dimension, produisant par contre la condensation pour des détentes beaucoup plus faibles; les « noyaux » de la première catégorie paraissent d’ailleurs passer progressivement à l'état de « noyaux résiduels ». M. Barus semble n'avoir pas eu connaissance de divers travaux antérieurs sur la question, dans son explication de la stabilité des noyaux résiduels : il y a plusieurs années déjà, M. J. J. Thomson a montré que l'évaporation de petites gouttelettes d'eau doit cesser de se produire, même dans une atmosphère non sa- turée, lorsque leur diamètre dépasse une certaine valeur en rapnort avec la tension superficielle minima des couches minces; et une théorie ayant une base analogue, et qui explique la permanence de certains ions à faible mobilité, a été donnée récemment par MM. Langevin et Bloch. Ici se pose la question qui parait surtout avoir préoccupé M. Barus, et sur laquelle il émet des conclu- sions qui seront fort discutées : N'y a-t-il pas identité entre les « noyaux » et les charges électriques libres ou « ions », dont l'étude de la conductibilité électrique des gaz a mené à concevoir l'existence? Les ions sont produits au sein des gaz par les mêmes radiations que les « noyaux » ; comme ceux-ci, ils se subdivisent net- tement en deux catégories : les ions à grande mobilité, assez éphémères à cause de la vitesse relativement élevée de leur recombinaison, et les « gros ions » à faible mobilité, beaucoup plus stables; comme les « noyaux », enfin, les ions ont la propriété de provo- quer la condensation de la vapeur d'eau. M. Barus ne conteste rien de tout cela, et pourtant il conclut har- diment de ses expériences que les « noyaux » sont complètement distincts des « ions », c'est-à-dire que la charge électrique est une propriété accidentelle, mais non nécessaire, des centres de condensation. Bien que cette affirmation, lorsqu'elle a été émise, ait ren- contré un peu de scepticisme chez certains partisans trop exclusifs de la théorie des ions, il est certain que, sur un point au moins, nous voulons dire en ce qui concerne les « noyaux résiduels », elle a été mise hors de doute par l'expérience. Il ressort, en particulier, très nettement des recherches d'Eugène Bloch, que la condensation produite par le phosphore,notamment, et les gaz récemment préparés, a lieu non seulement au- tour des « gros ions », mais aussi en grande partie autour d’autres centres de dimensions analogues, mais électriquement neutres, et qui sont peut-être les pro- duits.de la recombinaison des gros ions. | Restent les « noyaux éphémères » de Barus; sont-ils essentiellement distincts des ions à grande mobilité, comme il l’affirme? 11 est permis d’avoir encore quel- ques doutes à ce sujet. Les expériences indépendantes de J. J. Thomson et A. Wilson ont montré, en effet, que, dans un gaz ionisé, le nombre des centres de condensation multiplié par la charge de chacun d'eux est égal au produit de la charge d'un ion par le nombre des ions à grande mobilité mesuré électriquement. M. Barus convilie, il est vrai, ce résultat avec son hypothèse, en admettant que la production de chaque « noyau » est accompagnée de l'expulsion d’un électron. Seules, de nouvelles expé- riences pourront élucider ce point et établir ce qu'il y a de vrai dans cette hypothèse. En tout cas, semble-t-il, rien n'empêche a priori de penser que le produit de la recombinaison des ions ordinaires, ou quelque autre centre particulier, électriquement neutre, soit capable, lui aussi, de provoquer la condensation, comme c'est le cas des gros « noyaux » stables. La dernière partie du travail de M. Barus expose des séries de mesures continues de la teneur en « noyaux » de l'air atmosphérique, effectuées simultanément en deux stations assez éloignées (Block-Island et Provi- dence). De ces stälions, la première au moins est à l'abri de toute cause artificielle de « nucléation »: dans toutes deux, on a constaté nettement que la teneur en « noyaux » de l'atmosphère paraît passer par un maxi- mum très accentué au voisinage du solstice d'hiver, par un minimum au solstice d'été. Il sera curieux de rechercher si ce phénomène est général sur le globe et s’il n’a pas quelque rapport avec la hauteur de pluie qui tombe aux diverses saisons, ou peut-être avec la pression de radiation due au rayonnement solaire. Tels quels et bien qu'ils semblent heurter sur cer- tains points l'orthodoxie de la théorie des ions, ces ouvrages de M. Barus sont intéressants; ils le sont par les expériences et les réflexions qu'ils exposent; ils le sont surtout par celles qu'ils suggèrent. CH. NoRDMAN\, Docteur ès sciences, Astronome-adjoint à l'Observatoire de Paris. Dujardin (J.), Constructeur d'instruments de préci- sion. — Notice sur les instruments de précision appliqués à l’Œnologie. 4° édition. — 1 vol. 1n-8° de 550 pages avec 250 figures. (Prix : 4 fr.) Paris, 1906. Cette notice est destinée à vulgariser la Chimie œno- logique et ses applications à la vinification, à l'analyse des vins, à la recherche de leurs falsifications, à la dis- tillation, etc. L'auteur n’est pas seulement un constructeur habile : c'est aussi un chercheur et un collectionneur, et l'on trouve, dans sa Notice, des renseignements historiques et des reproductions de gravures anciennes qui inté- resseront les œnologues. M. Dujardin reproduit les principaux règlements administratifs concernant les vins, et il décrit les essais qu'il est utile d'effectuer, aussi bien au vignoble que dans les chais des commerçants. X. ROCQUESs, Chimiste-expert des tribunaux de la Seine. En BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 19 3° Sciences naturelles Boureart (D' Félix Ernest). — Les Lacs alpins suisses. Etude chimique et physique. — 1 vol. gr. 1n-4° de 127 pages, avec 22 fig. Georg et C'°, éditeurs. Genève, 1906. C'est un excellent et très consciencieux travail que celui que vient de publier le D' Félix Bourcart, sous le titre de « Les lacs alpins suisses; étude physique et chimique », etquia été couronné par la Société Helvé- tique des Sciences naturelles. I1 est évident que cet ouvrage, en 100 pages, n’est point à comparer aux trois volumes de la belle monographie du Léman par le professeur F.-A. Forel, ou à la monographie si com- plète du lac Balaton, dont les diverses parties, élabo- rées séparément par des physiciens et des naturalistes spécialistes, ont été groupées et mises en ordre par les soins d'une Commission formée au sein de la Société hongroise de Géographie de Budapest, sous la prési- dence du Dr Louis de Loczy. Néanmoins, le D' Bourcart a apporté une précieuse contribution à nos connais- sances relativement aux 33 lacs, amas d'eau sporadi- ques éparpillés sur les hauts sommets des Alpes, et pour lesquels il a recueilli un certain nombre de don- nées physiques et chimiques. Examinons la facon dont Le D' Boureart a exécuté la tâche qu'il s'était proposé d'accomplir. L'auteur commence par décrire le matériel dont il s'est servi ; il indique de quelle manière il a réussi à le lransporter dans ces régions souvent peu abordables, comment il a procédé aux recherches, exécuté les mesures, récolté les échantillons d’eau et de vase, les a conservés et enfin les a analysés dans le laboratoire. Les instruments sont fort simples et connus de tous ceux qui se sont livrés à des études de limnologie ou d'océanographie. Peut-être ne sont-ils pas des meil- leurs, mais ils sont suffisants. et l'auteur fournit par son exemple la meilleure preuve qu'il est beaucoup plus facile d'obtenir de bons résultats avec de médio- cres outils et un opérateur habile et dévoué pour les manœæuvrer, qu'avec des instruments parfaits et un homme médiocre. Le D° Bourcart me permettra à ce propos une observation : il attribue l'invention du cône à recueillir la vase à M. Delebecque, ingénieur des Ponts-et-Chaussées, qui a examiné la plupart des lacs français. Il se trompe; on m'a fait l'honneur de m'en attribuer la paternité plusieurs années avant que M. Delebecque ait commencé à s'occuper de limnologie, et l’on avait tort, car il existait bien avant moi. D'ail- leurs, à dire vrai, les services rendus par lui ne valent pas qu'on se dispute vivement la gloire de sa décou- verte. Les procédés d'investigation n'ont rien de nouveau, non plus que le mode de conservation des échantil- lons. Quant à ce qui concerne l'œuvre du laboratoire, M. Bourcart n'a malheureusement pas eu le temps d'analyser'les vases et il s’est borné aux échantillons d'eau. Il à ensuite comparé les résultats obtenus avec les données physiques recueillies par lui sur le ter- rain. Le mode opératoire des dosages est très soigneuse- ment décrit. Ils portent sur l'évaluation du résidu sec, le dosage de la silice, du fer et de l’alumine, l'acide sulfurique, la soude et la potasse, la chaux, la magnésie, le chlore, le manganèse, les matières organiques, l'hydrogène sulfuré et l'acide carbonique. Les autres données physiques relatives à chaque lac étaient le nom et la situation du lac, l'altitude de son niveau, le caractère de ses rivages, la dimension et la constitution de son bassin, sa profondeur maxima, les variations de niveau annuelles, le nombre, le genre et le caractère des affluents ainsi que des émissaires, la nature du terrain sous-lacustre, la transparence et la couleur de l’eau, sa température à la surface et au fond. On voit combien ces particularités sont nom- breuses. Il est cependant fàächeux que la plupart ne soient pas plus complètes et ne se rapportent, le plus souvent, qu'à la journée même où l'étude a été exé- cutée. On regrette aussi l'absence des cartes. L'auteur indique, il est vrai, la feuille de l’atlas de Siegfried où se trouve chacune d'elles; leur reproduction n'aurait rien fait perdre à l'ouvrage. Une planche ou deux auraient suffi; elles auraient rendu grand service et auraient certainement été plus utiles que les petites photographies représentant chaque lac et qui se trou- vent dans le livre. On ne saurait aborder ici le résumé, même succinct, de chacun des lacs étudiés. Ce qui importe est d'ail- leurs de chercher la loi générale qui résulte d’une série de faits particuliers. Certes, il eût été assez présomp- tueux d'espérer trouver des lois d’une importance capitale, conduisant à des aperçus complètement nou- veaux et inattendus, et pourtant les faits observés sont intéressants. Les lacs se trouvent à des altitudes com- prises entre 1.000 et 2.000 mètres; ils sont presque toujours de faibles dimensions, le plus grand, celui de Sils, dans l'Engadine, possédant 5 kilom. de longueur sur { kilom.400 de largeur; le plus petit, le lac Bleu, près de Berne, n'ayant pas 100 mètres. La profondeur varie : ceux dont les rives sont rocheuses et abruptes sont plus profonds que les lacs situés en terrain peu accidenté et bordés de tourbières; elle a varié de 836 (Poschiavo) à 4 mètres seulement (Lauenen). Les changements de niveau sont variables : forts pour ceux dont les affluents superficiels amènent des eaux prove- nant de la fonte des neiges, faibles quand les eaux sortent de sources dont le débit est presque toujours régulier. Ces changements dépendent aussi de l’écou- lement, qui peut être sous-lacustre ou superficiel. Le caractère de l'eau varie avec la provenance dé celle-ci : d'ordinaire limpide lorsqu'elle coule d’une source, d'un lac ou de champs de neige, trouble, au contraire, quand elle vient d'un glacier ou résulte du ruisselle- ment. Le fond des lacs est constitué par une couche de vase, variable d'épaisseur et de composition, à moins qu'elle ne manque complètement si le mouvement de l'eau ne permet pas aux matières en suspension de se déposer. La teinte passe du gris elair au jaune, au brun ou au noir, et elle n’est jamais verte ou bleue. Le degré de limpidité n’est en rapport direct qu'avec la propor- tion des matières en suspension; la couleur dépend uniquement des substances dissoutes de nature orga- nique et elle est la résultante de la couleur bleue de l'eau pure avec la teinte brune des solutions orga- niques. Les données relatives à la température sont assez peu complètes; elles se bornent souvent à celle de la surface et, au plus, à celles de la surface et de la pro- fondeur maxima. Encore cette dernière, n'ayant pas été prise avec un thermomètre à retournement, n'échappe pas à quelque critique; l’une et l’autre ne se rapportent qu'au jour de l'examen et l’on n ignore pas que, surtout pour les eaux douces, l'économie ther- mique change considérablement avec la saison. Les valeurs obtenues ont toutefois montré que les tempé- ratures superficielles sont toutes plus élevées que celles du fond et qu'elles dépendent du climat et surtout de la profondeur, étant d'autant plus chaudes que la profondeur est plus faible. Un chapitre est consacré à la discussion des résultats des analyses d'eaux et à l'étude de l’action très com- plexe de l’eau sur les différentes matières susceptibles de se rencontrer dans les bassins d'alimentation des lacs; l'action est mécanique et chimique, dissolvante, décomposante et par réactions mutuelles des matières dissoutes. Un dernier chapitre établit une classification ration- nelle des lacs alpins selon qu'ils possèdent un bassin siliceux ou calcaire; elle se résume par les deux lois suivantes : La plupart des qualités de l’eau des lacs alpins résultent de la constitution tant géologique que chi- mique du bassin d'alimentation tout entier; d’autres 80 sont plutôt en relation avec les caractères spécifiques du bassin lacustre. Les lacs qui se trouvent dans des conditions sem- blables présentent des propriétés physiques et chi- miques analogues. Cet apercu montre combien est justifié notre juge- ment du livre du D' Bourcart. Puisse ce (ravail ne pas tarder à être complété après une seconde visite à ces mêmes lacs, faite à une autre époque de l'année, en prenant des données physiques un peu plus nom- breuses. en donnant des indications topographiques, en analysant les vases et en notant les divers change- ments accomplis. Après avoir exposé ainsi en quelque sorte une analomie plus complète de ces amas d’eau, le Dr Bourcart en montrera la physiologie, et cette par- tie ne sera certainement ni la moins intéressante ni là moins féconde en aperçus nouveaux. J. THoucer, Professeur à la Faculté des Sciences de l'Université de Naney. 4° Sciences médicales Bruel (D' André). — Traitement des chorées et des ties de l'enfance. (Alitement et isolement, disci- pline psycho-motrice.) — Thèse de Paris. À broch. in-8° de 100 pages. G. Steinheil, éditeur. Paris, 1906. On étudie généralement comme formes nosogra- phiques distinctes, d'une part les chorces, d'autre part les ties. Cette distinction est parfaitement justifiée entre un vrai tiqueur et un vrai choréique, la confusion n'est guère possible. Il existe cependant entre les chorées et les ties, en particulier chez les jeunes sujets, des analogies pathogéniques et cliniques si fréquentes que le diagnostic reste souvent en suspens. Il existe mème une forme morbide à laquelle le D: Brissaud à donné le nom de «chorée variable », type de transition entre la chorée et les tics, où les «mou- vements nerveux » sont tantôt ceux de la chorée, tantôt ceux des tics. Chorées et tics de l'enfance peuvent donc être con- fondus quelquefois en clinique; mais c’est surtout par les résultats obtenus avec une thérapeutique similaire que se manifeste la parenté morbide des deux affections. Dans la chorée, un grand nombre d'agents médica- menteux ont été employés. Le salicylate de soude, l'aspirine, l’arsenic, l’antipyrine, la valériane, pour ne citer que les principaux, se sont montrés souvent effi- caces; toutefois, la multiplicité même des traitements préconisés contre la chorée prouve qu'aucun de ces traitements n'a de valeur absolue. Aussi, de très bonne heure, a-t-il fallu venir en aide aux médicaments en se servant des agents physiques. L'hydrothérapie, sous la forme du drap mouillé, de lotions, non pas froides, mais tièdes, des bains chauds ou tièdes, a réellement un effet sédatif marqué sur l'agitation des choréiques. On peut dire autant de bien de la cure d'air, de la cure de climat. Selon le Dr André Bruel, une autre méthode de trai- tement parait mériter la préférence. Cette méthode a été appliquée avec succès depuis plusieurs années par le Professeur Brissaud. Elle comporte : le repos au lit et l'isolement. On peut y adjoindre la discipline psycho- motrice de Brissaud et Meige. Lorsqu'on suit et qu'on observe un certain nombre de choréiques ainsi traités, il est facile de constater, en effet, que le repos au lit bien surveillé, un isolement qui quelquefois doit être complet, une gymnastique méthodique destinée à retenir l'attention fugitive des petits malades, doivent tenir une place de premier ordre dans le traitement; le résultat thérapeutique obtenu est toujours rapide etsouvent complet. Ceci, bien entendu, n'exclut pas certains agents médicamenteux qui paraissent avoir donné de bons résultats äans les chorées rebelles; mais il y a tout lieu de croire qu'il ne faut y recourir que secondairement. En ce qui concerne les tics, les effets des traitements médicamenteux se montrent absolument nuls. Pou BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX celte raison, il n'y à pas très longtemps encore, les ties étaient considérés comme rebelles à tout traitement. Les travaux successifs de Brissaud, Henry Meige, Feindel, ant démontré qu'il n'en était pas ainsi:les lies sont curables par un traitement approprié. Ici, de même. que dans la chorée, l’alitement, l'isolement, la disci- pline psycho-motrice se montrent particulièrement efficaces. Mais, pour les tiqueurs, on aura recours d’abord à la discipline psycho-motrice, puis à Falitement, qui sera: souvent mitigé, enfin à l'zsolement, réservé aux cas graves. «Les procédés de traitement véritablement efficaces sont ceux qui, rationnellement institués, tendent à obtenir une régularisation méthodique des actes psycho-moteurs, en s'appuyant sur l'éducation motrice combinée à la psychothérapie.» La discipline psycho-motrice est une discipline médicale de l'immo- bilisation et des mouvements, qui comprend la combi- naison de deux procédés : 1° immobilisation des mou- vements; 2° mouvements d'immobilisation. Le premier procédé est une sorte d'entrainement à l'immobilité pendant un temps progressivement croissant; le second apprend à régulariser tous les gestes en remplaçant les mouvements involontaires, incorrects et intempestifs, par des mouvements voulus, corrects et opportuns. A l'inverse des méthodes d'éducation physique, qui ont pour objectif de transformer des actes voulus en actes automatiques, la discipline psycho-motrice tend à supprimer les actes automatiques dont les ties font partie, et à développer le pouvoir frénateur et correc- teur des centres supérieurs, volontaires. En résumé, si l’on considère l’ensemble des résultats (hérapeutiques exposés par le D° André Bruel dans sa thèse, on est amené à conclure que deux modes de traitement sont particulièrement efficaces contre les chorées et les tics de l'enfance à savoir : l'alitement et l'isolement d'une part, la discipline psycho-motrice d'autre part. L'alitement et l'isolement sont surtout recomman- dables pour les jeunes choréiques. La discipline psycho- motrice convient plus spécialement aux jeunes tiqueurs. Mais, chez les uns comme chez les autres, l'alternance ou la combinaison des deux procédés thérapeutiques représente la méthode de choix. , : L'alitement et l'isolement peuvent être pratiqués à demeure ou dans un établissement spécial. Ils com- portent plusieurs degrés : l'augmentation du séjour nocturne au lit avec alitement diurne gradué; l'alite- ment absolu avec isolement; l'alitement absolu avec isolement dans l'obscurité. G La discipline psycho-motrice, applicable aux cho réiques comme aux liqueurs, ne vise pas simplement la disparition des « mouvements nerveux ». Elle a pour but la correction de toutes les habitudes fonctionnelles fâcheuses. C'est la thérapeutique des mauvaises habi- tudes. ; Enfin, à ces modes de traitement essentiels, il peut être utile d'ajouter certaines médications : hydrothé- rapie tiède, aérothérapie, elc., el, dans quelques cas, surtout pour les jeunes choréiques, l'emploi de médi- caments, en particulier la valériane, le fer, l'arsenic, l'antipyrine. 5° Sciences diverses De Graffigny (11.), Zngénieur civil. — Dictionnaire des termes techniques employés dans les Sciences et dans l'Industrie. — 1 vol. in-16 de 840 pages. (Prix : broché, 12 fr. 50: cartonné, 14 fr.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1906. 3 . Intéressante réunion et explication d’environ! 25.000 mots employés dans le langage technique et dont certains comportent jusqu'à vingt et trente signi= fications différentes. Il y à là un travail considérable, fruit de longues années de recherches, et dont ingé= nieurs et industriels doivent ètre très reconnaissants ä l'auteur. 5 L: } } ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 81 ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 31 Décembre 1906. M. H. Becquerel est élu vice-président de l'Aca- démie pour l’année 1906. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Deslandres dé- crit de nouveaux appareils enregistreurs de latmo- sphère solaire qu'il a réalisés à l'Observatcire de Meudon : spectro-enregistreurs, qui relèvent pour le disque entier les vitesses radiales de H et K et les épaisseurs des trois couches du calcium ; enregistreurs de spectres, qui relèvent près des taches la composition chimique générale des vapeurs et leurs mouvements radiaux. — M. G. Bigourdan présente les observations différentielles de nébuleuses, faites entre 2? h. et 9 h. d'ascension droité, à l'Observatoire de Paris. — MM. P. Vieille et R. Liouville font connaître une méthode nouvelle de mesure des résistances opposées par les métaux à des déformations rapides. 90 SCIENCES PHYSIQUES. — M. L. Bloch eslime que lionisation accompagnant la détente des gaz est due au barbotage de ceux-ci à travers l'eau condensée à l’orifice de détente. — M. Em. Bose démontre que l'équation de Nernst et, par suite, l'équation différen- tielle de Duhem s'appliquent aux mélanges non-homo- ènes. — MM. Ph.-A. Guye et G. Ter-Gazarian ont déterminé le poids moléculaire exact du gaz chlorhy- drique par la méthode de réduction à 0° des éléments critiques; il est de 36,469. On en déduit pour poids atomique du chlore la valeur 35,461. — M. M. Hou- dard à constaté que le carbone, sous ses (rois élals, se dissout dans le protosulfure de manganèse, d'où il se sépare par refroidissement à l'état de graphite. La quantité dissoute, en graphite, est d'environ 4,2 °/5. — M. G. Gin, en réduisant la rhodonite au four élec- trique, a obtenu un nouveau siliciure de manganèse, SiMn*(D —6,05). — M. D. E. Tsakalotos montre qu'on peut calculer les points de fusion des hydrocarbures CH à CH'# d’après la formule : 85 — 0.01882(n —1)° (a —1) : An— où À, est la différence entre le point de fusion d'un hydrocarbure de la série et celui de son homologue supérieur et n le nombre des atomes de carbone de l'hydrocarbure. — M. Tchelinzeff a reconnu que le remplacement, dans les éthers de la série grasse R.O.R, des radicaux les uns par les autres ne modifie que fort peu le caractère des valences complémentaires de l'oxygène. — M. L. Henry, en traitant la lactone buty- rique par CH'Mgl, à obtenu le glycol succinique bimé- thylé dissymétrique (CH*)*C(0H).CH*.CH°.CH°0H, Eb. 1589 sous 65 millimètres, qui est déshydraté par chauf- fage avec l'acide sulfurique en donnant l'oxyde de tétraméthylène biméthylé, Eb. 95°, — MM. Ch. Moureu et I. Lazennec, en condensant les hydrazines avec les nitriles acétyléniques, ont obtenu des pyrazolonimines. — MM. Tiffeneau et Dorlencourt montrent que la transposition de l'hydrobenzoïne n’est pas un cas isolé, mais une transposition commune à tous les glycols possédant un radical aromatique au voisinage de loxhy- dryle le plus résistant. — M. A. Trillat a constaté que les vins amers contiennent, à un moment donné, des doses anormales d'aldéhydes et d'ammoniaque. Il se forme dans ces conditions des résines d'aldéhydes, qui leur communiquent la propriété amère. 3° SCIENGES NATURELLES. — M. N. Vaschide à cons- taté que le sommeil diurne est moins réparateur et REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER moins reposant que le sommeil nocturne, toutes les fonctions de l'organisme subissant des perturbations notoires pendant le sommeil diurne, en tant que rythme et constance. — M. A. F. Llobet signale les excellents résultats obtenus par l'emploi de l'iode, ad- ministré par les voies digestives, dans le traitement de la pustule maligne. — MM. M. de Rothschild et H. Neuville décrivent une Antilope trouvée par eux dans la vallée de l'Ituri (Est africain) et qui constitue une espèce nouvelle, qu'ils nomment Cephalophus Leopoldi. — M. P. Wintrebert à observé que l'émana- tion du radium, dissoute dans l’eau, à une dose à peu près égale à celle qui se trouve dans les eaux thermales de Plombitres, détermine un effet favorable sur le dé- veloppement et la métamorphose des Batraciens. — M. L. Bruntz a reconnu que les formations Iymphoiïdes des Gammarides sont analogues aux formations lym- phoïdes des Caprellides; mais leurs organes globuli- gènes ne correspondent pas aux organes frontaux. — M. Ed. Heckel montre que les phénomènes de muta- tion gemmaire peuvent être obtenus chez tous les Solanum tubérifères, sous l'influence de la superfu- mure; ils produisent les mêmes résultats que le croi- sement. — M. Ed. Griffon a constaté que, chez plu- sieurs Solanées, la greffe n'a pas mis en évidence d'influence spécifique morphologique du sujet sur le greffon, et réciproquement. — M. L. Blaringhem a re- connu que les mutilations violentes, faites à une époque convenable, constituent un moyen très puis- sant et méconnu jusqu'ici pour déterminer des varia- tions brusques, héréditaires et progressives; par ce procédé, il a créé une variété nouvelle de maïs, le Zea Mays pseudo-androgyna. — MM. Eug. Rousseaux el Ch. Brioux ont étudié la culture de l'asperge dans lAuxerrois et montrent que les besoins de cette plante en acide phosphorique, azote et potasse sont élevés. — M. L. Bertrand précise les détails des charriages vers le Nord qu'il à indiqués dans les Pyrénées, entre la vallée de l'Ariège et le Roussillon. — M. St. Meunier rappelle d'anciennes expériences de M. Daubrée et de M. de Chancourtois relatives à limitation artificielle des chaînes de montagne, et tout à fait analogues à celles qu'a présentées récemment M. Hirtz. Séance du 7 Janvier 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Schoenflies montre que le théorème de Borel représente une géné- ralisation du théorème de Heine et il en donne une démonstration générale. = M. L. Lecornu étudie théoriquement le mouvement que prend une tige de turbine flexible aux très grandes vitesses de rotation. — M. J. Merlin déduit de mesures micrométriques faites lors de l’éclipse du 30 août 1905 qu'il y a lieu de corriger lés positions relatives du Soleil et de la Lune données dans la Connaissance des Temps; toutefois, cette correction ne fait qu'avancer de 11, 4 sec. la position de la Lune sur sa trajectoire. 2 SciENCES PHYSIQUES. — M. Th. Moureaux indique la valeur des éléments magnétiques à l'Observatoire du Val-Joyeux au 1* janvier 1907. — M. P. Weiss déduit de l'étude des propriétés magnétiques du fer que la molécule de fer «, 6 et y se compose de deux atomes, tandis que celle du fer à secomposerait de trois atomes. — M. J. Bergonié montre que le voltmètre électro- statique, placé en dérivation sur un tube de Crookes, donne des indications proportionnelles au degré radio- chromométrique des rayons que celui-ci émet et peut donc servir à mesurer ce degré. — MM. G. Urbain et C. Scal ont étudié le spectre de phosphorescence DA* 82 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ultra-violet des fluorines : il est assez variable, phéno- mène qui doit être attribué à la dilution plus ou moins grande de la gadoline dans le fluorure de calcium. M. P. Carles à recherché la présence du fluor dans un grand nombre d'eaux minérales et l’a trouvé dans presque toutes les eaux françaises en quantités variant de 2 à 48 milligrammes par litre. — MM. H. Moissan etT. Watanabe ont pratiqué la distillation des alliages d’Ag et Cu, Ag et Sn, Ag et Pb au four électrique. Les résultats permettent de classer ces métaux dans l’ordre de volatilité suivant : Pb, Ag, Cu, Sn, le premier étant le plus volatil. M. V. Thomas à constaté que la chloruration par un courant de CI en présence de chlo- rure thalleux transforme les carbures aromatiques en dérivés mono- ou polychlorés, et les dérivés mono- bromés et monoiodés en dérivés chlorobromés et chlo- roiodés. — M. P. Carré, en réduisant par Zn et la soude alcoolique la p-nitrobenzophénone, a obtenu un mélange de p-azo- el de p-azoxybenzophénone; dans les mêmes conditions, la m-nitrobenzophénone fournit de la m-azoxy benzophé none. — M. G. Gastine propose l'emploi de la lumière polarisée pour la recherche mi- croscopique des amidons composés du riz et du maïs dans la farine de froment. 39 SCIENCES NATURELLES. MM. Ed. Toulouse et E. Piéron expliquent, par l'influence de l’activité et de l'habitude, les irrégularités qui caractérisent les chan- gements du cycle nycthéméral de la température. — M. J. Kunstler considère le centrosome comme le centre cellulaire primitif, ayant précédé le noyau; son rôle senible être resté essentiellement: reproducteur. — M. S. Leduc répond aux critiques adressées à ses « cellules artificielles »: pour lui, elles réalisent nette- ment les phénomènes de croissance et de nutrition. — M.J.de Loverdo montre que le procédé de conservation des œufs par le froid (à une température constante de — 1° et à un degré hygrométrique aussi rapproché que possible de 78 °/0) est de beaucoup supérieur à celui de la conservation par la chaux. — M. Ch. Gravier à déterminé les Annélides polychètes rapportées par la Mission antarctique francaise; elles sont en relation étroite avec celles de l’extrémité sud de l'Amérique, — MM. W. Kilian et L. Gentil ont constaté, par l'étude des fossiles rapportés par le second, l’existence de l'Hauterivien et du Barrémien dans l'Atlas occidental marocain. ACADEMIE DE MEDECINE Séance du 2 Janvier 1907. M. L.-E. Bertrand montre que tous les types de dysenteries bacillaires peuvent se compliquer d'abeès du foie; ceux-ci n'ont pas d'origine purement spéci- fique. — M. J. Bertillon lit un Mémoire sur la fré- quence des principales causes de décès à Paris pen- dant la seconde moitié du xx siècle. Séance du 8 Janvier 1907. MM. A. Poncet el R. Leriche montrent que rien n'est si commun dans l'histoire des arthritiques que la tuberculose plus ou moins latente ; pour eux, les lésions dites arthritiques ne sont fréquemment que l'expres- sion de tuberculoses locales bénignes, la densification du tissu fibreux étant due à l’action ‘des toxines dif- fuses du microbe causal. — M. Kermorgant présente un Rapport sur les maladies endémiques, épidémiques et contagieuses qui ont régné dans les colonies fran- çaises en 1905. — M. Le Dentu communique les ré- sultats éloignés de 53 opérations d'amputation du sein pour cancer épithélial. La survie moyenne après l'opération a été de quatre ans quatre mois et demi, et dans six cas elle a été supérieure à douze ans. L'auteur conclut que l'amputation du sein peut donner de meil- leurs résultats qu'on ne le croit généralement si l'in- tervention est précoce et large. — M. le D' Lagrange lit un travail sur un nouveau traitement du glaucome chronique simple. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 29 Décembre 1906. M. Ch. Richet a constaté que la dose mortelle de subérifine, rapportée au kilogramme d'animal, est extrèmement variable, par suite des idiosyncrasies diverses qui existent chez les individus d'une même espèce. — MM. M. Doyon, A. Morel, CI. Gautier el G. Péju ont constaté que les solutions salées circulant dans le corps pendant la vie ou aussitôt après la mort entraînent des substances albuminoïdes intra-cellu- laires que n’entraine pas le sang défibriné. — M. A. Ferranini à observé que l'acide chlorhydrique agit comme antiseptique sur la pepsine; en y ajoutant des peptones, on peut diminuer cette action antiseptique. — M. G. Stodel a remarqué que si, à du sang défi- briné, on ajoute de l'émulsine, celle-ci reste tout entière dans le sérum; on peut rechercher ce ferment dans le sang en faisant agir le sérum sur l’amygdaline; le sérum diminue l’activité de l’'émulsine. — Me Lévy a reconnu que la lécithine hémolyse les globules rouges de cheval. — M. Ch. Lesieur a constaté que la bile des animaux normaux ou rabiques, ainsi que les sels biliaires isolés, sont capables de neutraliser a vitro le virus rabique, au bout de quelques minutes de contact. — M®° Z. Gatin-Gruzewska a observé que le glycogène extrèmement purilié ne précipite pas par l'hydrate de fer colloïidal. — MM. Rist et L.-G. Simon montrent que les lésions histologiques de l’appendicite gangreneuse sont sous la dépendance étroite desmicro- organismes, — M. F. J. Bosc, en injectant à des ma- lades un sérum anticancéreux obtenu par inoculation à l'âne et au mouton de produits cancéreux humains, a observé au niveau des “re cancéreux des réactions spécifiques manifestes et une amélioration de l'état général; mais le processus cancéreux n'est arrêté que temporairement. — M. A. Giard signale la découverte, faite par M. E. Bordage à La Réunion, de l'hôte long- temps inconnu du Aepon typus : c'est un crabe, Te Grapsus strigosus. — M. L. Lapicque, à propos des observations récentes de M. Bohn, estime impossible que le rythme des marées, irrégulier, puisse s'imprimer, dans la matière vivante qui y est soumise. M. G. Bohn répond que les faits sont là qui contredisent les idées de M. Lapicque. — M. P. Salmon montre que la dou- leur consécutive aux injections superficielles de sels mercuriels solubles peut être calmée par une injection anesthésique profonde dans la même région. M. E. Trouessart signale la conformation spéciale de l'oreille moyenne et interne et la forme particulière de l'os temporal qui la recouvre chez les Lémuriens, différentes chez ceux de Madagascar et ceux du reste de la terre. — M. E. Gley rappelle que ses recherches ont montré que la suppression du pancréas enlève au É i | foie la propriété de fixer le sucre qui lui arrive. — M. Ch. Dhéré a constaté que le spectre d'absorption violet et ultra-violet de l'oxyhémoglobine présente deux bandes, dont l’une est signalétique de l'hématine et l'autre de l'oxyhémoglobine. — MM. L. Jammes et A. Martin ont reconnu que la nature du milieu na qu'une influence peu marquée sur le développement embryonnaire de l'œuf d'Ascaris vitulorum en solu- tions artificielles; l'embryon se forme à 33°, mais il n'éclôt qu'entre 380 et 409, — MM. R. Leriche et F. Vil- lemin montrent que l'artère coronaire n'est pas une branche collatérale d'un tronc gastro-hépatique, mais une artère principale en Anatomie normale. — M. J. Basset critique les vues de M. A. Calmette M k- pathogénie de l’anthracose pulmonaire; pour toutes les expériences faites infirment pen 48 théorie de l’origine intestinale. — MM. J. Basset et Carré montrent également que les expériences de M. Calmette sur l’origine intestinale de la pneumonie sont sujettes à rue — M. M. Nicloux a constaté que le seuil de l’anesthésie par l'éther est atteint lors= que le sang artériel renferme 105 à 110 mgr. d'éther À | i ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 83 pour 400 c. c.; la mort est obtenue avec des doses voi- sines de 160 à 170 mgr. — MM. CI. Regaud el J. Blanc ont reconnu que, des parties constituantes de la cel- eule, c'est la chromatine qui parait la plus sensible aux rayons X. — M. H. Iscovesco a observé que la fibrine mise dans un champ électrique est nettement électro-positive. — M. V. Henri et M! Philoche pré- sentent une nouvelle théorie de l’action des diastases, qu'ils considèrent comme des calalysateurs colloïdaux spécifiques ; pour qu'une diastase puisse agir sur un corps donné, il faut que ce corps puisse être adsorbé par les granules de la diastase. — MM. V. Henri, H. Iscovesco et A. Mayer exposent les conditions gé- nérales de la formation des complexes colloïdaux. — M: P. Cernovodeanu à constaté que l'hémolyse pro- duite par un mélange de deux sérums peut être supé- rieure, égale ou inférieure à la somme des hémolyses partielles produites par chacun des deux sérums sépa- rément, suivant que les sérums s'activent, sont indif- férents ou se neutralisent. — M. V. Henri présente une nouvelle cuve spectrophotométrique. — MM. Léo- pold-Lévi et H. de Rothschild signalent l'existence de certains œdèmes transitoires, liés au mauvais fonc- tionnement thyroïdien. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 18 Décembre 1906. MM. van Gaver el P. Stephan ont observé une par- ticipation directe des spermatozoïdes aux phénomènes de l’ovogenèse chez le Saccocirrus papillocereus. — M. A. Billet propose de renforcer la solution de Roma- nowsky-Giemsa du commerce par quelques gouttes de bleu carbonaté pour faire apparaître certaines altéra- tion de la cellule-hôte des Sporozoaires et Hémato- zoaires. Cette même méthode à permis à l'auteur d'établir la diagnose différentielle des formes annu- laires des Hématozoaires du paludisme. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 23 Novembre 1906. M. Dubrisay attribue les phénomènes d'explosion auxquels donnent souvent lieu les allumettes à pate chloratée à une déshydratation trop profonde du bou- ton de l'allumette. On peut sécher sans inconvénients ces allumettes à des températures assez élevées en introduisant dans les pâtes de très faibles doses de sul- fate ferreux. — MM. L. J. Simon et Ch. Mauguin ont soumis à la saponification par KOH alcoolique l’éther phénylnaphtoquinoléine-dicarbonique et son dérivé dihydrogéné (obtenus dans l'action de la benzylidène- B-naphtylamine sur l’éther oxalacétique) : le premier donne le biacide ou l’éther acide correspondant: le second fournit de l’acide phénylnaphtoquinoléine car- bonrque et la quinoléine substituée qui en dérive. Dans la réaction de Dübner, les auteurs ont encore isolé un acide tétrahydrogéné et de la benzylnaphtylamine. — M. Sommelet à cherché à faire la synthèse des cétones R.CO.CH*0CH5. La réaction de Friedel et Crafts ne donne pas de résultats. L'hydrolyse de l'éthoxyacétyla- cétone, préparée par la réaction de Claisen, ramène presque entièrement aux corps générateurs. Enfin, la réaction de Blaise (action des dérivés organomagnésiens sur l’éthoxyacétonitrile) a conduitau résultat cherché. L'éthoxyacétonitrile se prépare avec un bon rendement par l’action des cyanures de Hg ou Ag sur l’éther oxyde méthyléthylique chloré. — MM. R. Lespieau et G. Dupont, par l’action de l’oxyde de méthyle mono- chloré sur le bromacétylure de magnésium, ont obtenu la diméthyline du glycol acétylénique, Eb. 64° sous 14 min. Séance du 1% Décembre 1906. M. I. Lazennec, par l'action de la bromacétophénone sur la pyrocatéchine monosodée, a préparé l’o-oxyphé- noxyacétophénone C4#(OH\0.CHE.CO.CHF, F.114°, qui se déshydrate sous l’action de la chaleur en donnant la phényléthène pyrocatéchine : ,0.CH CRHOMI| OCACHE : (F0, — M.E. Berger oxyde rapidement le soufrefà froid en le mettant dans l'acide nitrique additionné d'un peu de KBr. On évapore en présence d'HCI et reprend par l'eau. — MM. G. Bertrand et M. Javillier séparent le zinc de solutions très diluées de ce métal en les trai- tant par un excès de chaux et d’AzH*; on filtre, puis fait bouillir pour chasser AZI. Le zincate de chaux se précipite avec un peu de carbonate ; on le filtre et, après dissolution par HCI, on sépare la chaux par l'oxa- late en milieu fortement ammoniacal. Le zinc restant dans la liqueur est transformé en sulfate et titré. — M. Brachin à condensé avec les composés organo- halogéno-magnésiens : 1° les aldéhydes acétyléniques R.C : C.CHO, qui lui ont donné des alcools secondaires R.C : C.CHOH.R'; 2° les acétones acétyléniques, qui lui ont donné des alcools tertiaires R.C : C.COHR'R"!, déshydratables par distillation en fournissant des car- bures à la fois éthyléniques et acétyléniques. — MM. Ch. Moureu et Biquard : Les gaz rares des sources ther- males (voir {. XVIL, p. 1036). Séance du 28 Décembre 1906. M. Marcel Godchot, en poursuivant l'étude de l'octo- hydrure d'anthracène et de ses dérivés, a été conduit à assigner à ce carbure la formule de constitution : CHE C‘H:° 4 SCH® Il montre que l'hexahydroanthrone s'unit aux aldé- hydes suivant la réaction : que C:CH.R CHU SCOHE + R.CHO — C'H0£ > CH + H20: N CO” SCO La benzylidène-hexahydroanthrone, par exemple, est cristallisée, fusible à 137-1389. Par réduction, elle fournit le benzyl-octohydroanthranol, fusible à 169- 170°, qui, par perle d’eau, donne le benzyl-hexahydrure d'anthracène, liquide bouillant vers 255-258° sous 20 mil- limètres, caractérisé par le picrate, fusible à 120°. L'au- teur indique ensuite que l'hexahydroanthrone, en pré- sence des dérivés organo-magnésiens, donne, sinon les alcools tertiaires prévus par la théorie, du moins les carbures obtenus par déshydratation de ces alcools : R OH R NE | G C Copie SCSHE = HO + CH” | Ces, CH° CH — M. Ch. Moureu, en son nom el au nom de M: I. Lazennec, communique les résultats obtenus dans la condensation des hydrazines avec les nitriles acétylé- niques. — M. H. Guillemard expose quelques réactions, à l’aide desquelles il a pu doser séparément les nitriles et les carbylamines dans un mélange de ces deux iso- mères; ces méthodes de dosage lui ont permis d’étu- dier les proportions de ces deux corps qui prennent naissance dans l'alcoylation des cyanures métalliques. — M. Sommelet communique les premiers résultats obtenus par lui dans l’étude des dérivés a&-alcoylés de l'acroléine. Ces composés se forment d'une façon très générale quand on décompose, par chauffage avec l'acide oxalique desséché ou lacide formique cristallisable, les diéthers-oxydes R.COH(CH?OR'} de triols à fonctions immédiatement voisines. Ces éthers-oxydes eux-mèmes sont préparés, avec d'excellents rendements, par la condensation, avec les éthers-sels, de l’éther-oxyde chlo- rométhyléthylique, en présence de magnésium, dans des conditions particulières, Le , TEL TU US 7) +2 84 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 15 Novembre 1906. M. F. Soddy : Emploi du calcium comme absorbant pour 1eS gaz. Au moyen d'un four électrique spécial, entouré d'un tube de porcelaine et enclos dans un tube de verre, l'auteur a pu chauffer des réactifs dans le vide, dans un appareil en verre doux scellé, à une température bien supérieure à celle du point de ramol- lissement du verre. Le calcium, chauffé de cette facon, absorbe tous les gaz connus, à l'exception de ceux du groupe de l'argon. Le vide élevé obtenu rapidement par l'absorption des gaz par le calcium est au moins égal au vide maximum réalisé par d'autres procédés. En faisant entrer de l'air dans l'appareil et absorbant tous les gaz, sauf largon, il est possible de faire ensuite passer une décharge et d'étudier commodément le spectre de ce dernier corps. — M. A. J. Berry décrit une méthode pour déterminer le degré du vide dans un flacon de Dewar par la mesure de la vitesse d'éva- poration de l'air liquide dans celui-ci. — M. H. St. Allen : La fatique photoëlectrique du zine. L'observa- tion de Hertz, que la lumière ultra-violette peut faci- liter le passage d’une étincelle électrique, a conduit à la découverte d’autres actions photoélectriques. Dans les premières expériences sur l'effet photoélectrique des métaux, on remarqua que l’action était diminuée par l'exposition à la lumière. Ainsi Hallwachs, qui a trouvé qu'un métal devient positivement électrisé sous l'influence d'une lumière ultra-violette, établit que de « vieilles surfaces ne présentent plus le phénomène. La radiation elle-même abaisse le potentiel auquel les plaques peuvent être électrisées; de sorte que, dans une expérience subséquente faite avec la même sur- face, le potentiel obtenu est plus faible, tandis que son élévation se produit plus rapidement et que la décroissance est plus forte que lorsque, pour le mème intervalle de temps entre les expériences, la plaque n'était pas illuminée ». Cette diminution d'action pho- toélectrique est désignée sous le nom de « fatigue » des métaux sous l'influence de la lumière, et a attiré l'attention d'un grand nombre de physiciens. Le pré- sent Mémoire se rapporte à la manière dont l'activité photoélectrique du zinc diminue lorsque le métal est exposé à la lumière. Les expériences décrites montrent qu'il est nécessaire d'employer la somme de deux termes exponentiels afin d'obtenir une représentation adéquate pour la courbe de fatigue photoélectrique du zinc. De la même facon que Rutherford a expliqué les courbes de déperdition pour l'activité excitée du ra- dium et du thorium comme une conséquence de chan- gements successifs, il est aussi possible d'expliquer les résultats présents comme dus à deux changements consécutifs. La nature des modifications ainsi suggé- rées n'est pas élucidée. Il est aussi démontré que les ondulations lumineuses plus longues peuvent apporter un changement dans le sens opposé, c'est-à-dire qu'elles peuvent produire une certaine quantité de recrudescence d'activité photoélectrique. SOCIETE DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 1x Décembre 1906. La séance à été consacrée à la visite d’une intéres- sante exposition d'appareils de Physique dus à divers constructeurs anglais. SOCIÈTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 20 Décembre 1906. M. F.R. L. Wilson décrit une nouvelle méthode pour la préparation d'hydrogène sulfuré pur dans les laboratoires. Le gaz impur résultant de l'action de HCI sur FeS est conduit sur de la chaux hydratée jusqu'à saturation ; il se forme un hydrosulfure Ca (HS) (OH). On amène alors un courant de CO? qui se combine à —— la chaux sous forme de carbonate et met H°S pur en liberté: Ca (HS)(OH) + CO*— CaCO* + HO LHES. — M. V. H. Veley a déterminé, à l’aide du méthylorange et d'un tintomètre, les constantes d'affinité des acides aminocarboxyliques et aminosulfoniques. Les acides aminocarhoxyliques aliphatiques sont des substances neutres ; leurs chlorhydrates sont complètement hydro- lysés en solution. Les acides aminobenzoiïques sont dis- tinctement acides. — M. H. Bassett jun. montre que le phosphate dicalcique ne forme probablement qu'un seul hydrate, le dihydrate. Le phosphate monocalcique a été obtenu anhydre par cristallisation à 460° d'une solution de carbonate de calcium dans lacide ortho- phosphorique dans le rapport P?0° : CaO —#4,6. CaHPO* n'absorbe pas AzZH°; CaHPO*.2H°0 l'absorbe à 1009 avec formation de phosphates tricalcique et diammonique; CaH'(PO)? absorbe AzH* à 100 avec formation de Ca (AzH*®H*(PO'}, qui est décomposé par l’eau. — MM. H. A. D. Jowett et F. L. Pyman ont préparé la lactone de l’o-carboxyphénylglycéryltropéine, puis l'hydroxya- cide correspondant, qui n'a aucune action mydriatique. Ce fait est contraire à l'hypothèse de Ladenburg, qui attribue l’action mydriatique à la présence d'un OH dans la chaine latérale contenant le groupe COOH. — Les mêmes auteurs ont préparé l'acide cinnamoylsali- cylique CO*H.C‘H".0.C0.CH : CH.C'H;, par! condensation : de l'acide salicylique avec le chlorure de cinnamoyle; il fond à 155°, son éther méthylique à 74°. — MM. J. I. Sudborough et J. Thomas ont éludié la vitesse d’ad- dition du brome à l'acide cinnamique et à ses éthers; elle varie énormément suivant que la réaction a lieu à l'obscurité ou à la lumière, étant bien supérieure dans ce dernier cas. — M. 9. W. Bruhl montre que la su- périorité de la rotation, magnétique du A%:5%-p-men- thadiène sur celle du limonène ou du dipentène iso- mères est due à la présence de deux doubles liaisons en position C:C.C:C dans la molécule du premier. — M. D.L. Chapman critique la théorie de la valence pro- posée par MM. W. Barlow et W.J. Pope et montre qu'elle ne peut être employée pour démontrer que la valence est une simple relation de volume. — M. le Comte de Berkeley détermine la densité exacte des cristaux au moyen du picnomètre en employant comme liquide le tétrachlorure de carbone. L'air adhérent aux eris- taux est chassé par un courant de vapeur de CCI, tan- dis qu'ils sont placés dans le vide et le pycnomètre est rempli aussitôt après. — M. G. Le Bas montre que le volume moléculaire des hydrocarbures C* H?r+? peut être calculé par la formule {6n Æ2)S, et celui des alcools Cr H%+10H par la formule (6n4)S, où S est égal à 2,970. — MM. A. E. Dixon etJ. Hawthorne, en fai- sant agir le chlorure d'acétyle sur les aryl-thio-urées monosubstituées, ont obtenu des composés ArAzH.C (AzH).S.COCH*.HCI; en leur enlevant HCI par CaC0*, on obtient non la base libre, mais un isomère provenant de la migrate de l'acétyle: CH°CO.ArAz.CS.AzH®, lequel s’'isomérise lui-même facilement en CH*COAZH.CS.AzH Ar. — MM. W. H. Bentley, R. Robinson et Ch. Weiz- mann ont préparé l'acide 3-méthoxyphtalique par l'oxydation du 1 :5-méthoxynaphtol avec le permanga= nate, et l'acide 3-hydroxyphtalique par fusion du pre- mier avec KOH. — MM. W. H. Bentley et Ch. Weiz- mann ont préparé l'acide 4-hydroxyphtalique pur, F. 20%, par fusion de l'acide sulfophtalique avec KOH. — MM. W. H. Bentley. A. Friedl, F. Thomas et Ch. Weizmann ont préparé un grand nombre de dérivés hydroxlés et amido-hydroxylés de la naphtacènequi. none. — M. S. Ruhemann, en faisant réagir la thioa- cétanilide sur l’oxalate d'éthyle en présence d'éthylate de soude, a obtenu le dithioxanthoxalanile : CS.CH? CO.C0 C‘H5.AzZ | | NazCH, Po C CS F. 235° avec décomposition; il est transformé par les alcalis dilués en un isomère, renfermant C(SH): CH au lieu de CS.CH?, F. 195° avec décomposition. Par ébul= ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 85 lition avec KOH, un S est remplacé par O, et on obtient le thioxanthoxalanile, F.216°-2189 avec décomposition, SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION CANADIENNE Séance du 25 Octobre 1906. MM. H. E. Baker et W. R. Lang rappellent qu'il est d'usage courant, dans la fabrication des fils d'acier, de plonger d'abord dans un acide les barreaux d'acier pour enlever la couche noire d'oxyde avant de les étirer en lils. Cette pratique détériore la qualité des barreaux, mais, si ceux-ci sont ensuite chauffés pendant plusieurs heures à 1209, ils sont restaurés presque com- plètement. Les auteurs ont soumis un certain nombre de barreaux à des essais physiques dans le but de mesurer l'importance de la détérioration et de la restau- ration ; les résultats montrent qu'il faut employer un acide faible et que la pratique du chauffage à 120 est parfaitement justitiée. SECTION DE LONDRES Séance du 3 Décembre 1906. M. H. W. Rowell propose une nouvelle méthode de détermination de l'antimoine, applicable à ses alliages, dont l'emploi est maintenant assez répandu. Elle con- siste à oxyder le chlorure antimonieux en chlorure antimonique par le bromate de potassium en solution chlorhydrique : KBrO* + 3SbCI + GHCI = 3SbCPF + KBr + 3420. On se sert du méthylorange comme indica- teur. — M. M. W. Blyth se demande si nous possé- dons actuellement une méthode sérieuse d'étalonnage des désinfectants et répond par la négative. La méthode de Rideal-Walker, qui établit le pouvoir germicide des divers désinfectants par comparaison avec l'acide car- bolique, peut toutefois nous donner une idée de la valeur relative des désinfectants. Mais, en présence de malière organique, tous les désinfectants tendent à se rapprocher comme effet. Il y aurait donc lieu d'ex- primer leur puissance par plusieurs figures répondant aux diverses conditions d'emploi. — M. J. G. Parker et H. G. Bennett étudient les méthodes d'analyse des matières tannantes et critiquent vivement celle de l'Association internationale, à laquelle ils préfèrent celle des chimistes américains. SECTION DE MANCHESTER Séance du 2 Novembre 1906. M. W. H. Coleman décrit une méthode d’enregistre- ment graphique du travail des chambres de plomb, qui permet de juger facilement de leur fonctionnement et de remédier aux défauts ou d'augmenter la produc- tion si c’est nécessaire. SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 27 Novembre 1906. M. S. R. Trotman étudie les methodes de sélection de la benzine pour le dégraissage. La meilleure benzine pour le dégraissage est celle qui ne contient point de fractions bouillant au-dessous de 80° et au-dessus de 1109, et dont la presque totalité bout entre 90° ef 1000. Or, les méthodes actuelles d'essai ne renseignent pas du tout sur ce point. L'auteur propose une méthode nouvelle basée sur un essai de distillation fractionnée. SECTION DU YORKSHIRE Séance du 3 Décembre 1906. . MM. H. R. Procter el H. G. Bennett présentent une étude sur le développement actuel des méthodes d'ana- lyse des matières tannantes. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 25 Octobre 1906. M. A. Engler présente une Note sur les conditions de végétation du Harrar et du Plateau des Galla. L'étude des collections très étendues du D’ Ellenbeck, compre- nant plus de 2.000 espèces végétales, et qui ont été réunies lors d'une expédition dirigée par l'auteur, à eu des résultats importants tant pour la topographie végé- tale du Somaliland que pour celle du Harrar et du Plateau des Galla, inexplorés jusqu'ici au point de vue botanique. Les formations végétales de ces régions pré- sentent, en général, de grandes analogies avec cellesde l'Abyssinie, bien que les espèces singulières n'y man- quent point. Séance du 8 Novembre 1906. M. O. Struve rend compte de ses recherches sur le mouvement séculaire du cinquième satellite de Jupiter. Les observationsfailes pendant lestrois premières oppo- sitions qui ont suivi la découverte de ce satellite, soit par M. Barnard à l'Observatoire de Lick, soit par l'auteur à celui de Pulkowa, ont été coordonnées parfaitement il y a dix ans par M. F. Cohn, le résultatle plus impor- tant étant une détermination approchée du mouvement des apsides et des nœuds. Tandis qu'il ne restait guère de doute relativement à une excentricité considérable de l'orbite, les conclusions se rapportant à l'inclinaison de la surface de l'orbite et au mouvement circulaire du nœud étaient moins certaines. L'auteur reprend ce pro- blème, en utilisant toutes les observations faites pen- dant ces dernières années par les mêmes expérimenta- teurs. De ces recherches paraît résulter l'existence d'un mouvement séculaire plus grand : le chiffre pro- posé par l’auteur est de 916° par an. Le Mémoire original donne les éléments de l'orbite, en dehors du mouve- ment séculaire de la ligne d'apsides et de nœuds. — MM. L. Holborn et S. Valentiner présentent les résultats de leurs mesures de températures faites au moyen du thermomètre à azote et du photomètre spec- tral jusqu'à la limite de 16007. Les mesures jusqu'ici faites au moyen du thermomètre à azote (rapportées à la thermopile au platine-platine rhodium imaginée par M. Le Chatelier) n'allaient que jusqu'à 1.130°. Pour les étendre jusqu'à la limite de 1.600, les auteurs rempla- cent le dispositif jusqu'ici employé par un tube chauf- fant vertical, évitant tout contactde la thermopile avec les parois du four. Le chauffage est effectué par un cylindre fermé en feuille de platine de Omm,01 d’épais- seur, recouvrant un tube en argile de 50 centimètres de longueur et 5,5 centimètres de diamètre. C'est ainsi qu'on réussit à réaliser l'échelle du thermomètre à azote jusqu'à 1.600° à + 10° près. Cette échelle est reproduite par une thermopile protégée par un tube de verre de quartz et graduée au moyen des points de fusion. Pour mesurer le rayonnement noir par voie optique, il suffit de déterminer une seule température au moyen d'une thermopile graduée ou en se guidant sur un point de fusion. Toutes les autres températures sont déterminées au moyen de la formule des rayon- nements. Séance du 15 Novembre 1906. M. Zimmermann présente une Note sur la représen- tation des lignes continues ou brisées à courbure plane. L'auteur fait voir que toute ligne pareille peut se représenter au moyen de l'aire et des moments stati- ques d'une surface obtenue en considérant les valeurs réciproques des rayons de courbure comme ordonnées d'une courbe limitant la surface. Les règles générales ainsi réalisées peuvent être utilisées pour résoudre bien des problèmes techniques d'une façon tout particuliè- rement simple et illustrative. Séance du 22 Novembre 1906. M. Martens explique et décrit le dispositif d'essais permanents qu'il vient de construire pourle Bureau des 86 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Poids et Mesures à Gross-Lichterfelde. 20 machines automatiques y servent à déterminer la résistivité mécanique des métaux à l'état chauffé. Ces machines sont à commande hydraulique, à réglage électrique automatique et à contrôle au moyen d’une inscription automatique; des soupapes à mise hors d'action ser- vent à les protéger. Séance du 29 Novembre 1906. M. W. Dilthey présente la suite de ses études sur les fondements des sciences philosophiques. L'auteur traite de la possibilité de concevoir l'idée d’une science philosophique, isolément et sans liens avec l'ensemble systématique. Après avoir ensuite considéré l'histoire des Sciences philosophiques, il étudie quelques théo- rèmes fondamentaux relatifs à leurs fondements, — M. Couze adresse une Note préliminaire, rédigée par M. Graeber, sur l'étude, faite sous les auspices de l'Académie, des acqueducs de Pergame. Cette élude était relative surtout au château d’eau de la conduite à pression, aux acqueducs romains, aux conduites lon- geant la pente septentrionale de la citadelle et enfin aux conduites de Soma ou de Kaikos.— M. W. Nernst présente une Note sur les relations entre l'évolution de chaleur et le travail maximum dans les systèmes condensés. Après avoir déduit sous une forme quelque peu modifiée les formules régissant les systèmes con- densés en vertu du théorème thermique récemment développé par le même auteur, il applique le théorème en question à l'équilibre existant entre les antipodes optiques. C'est ainsi qu'il trouve les conditions d'équi- libre bien connues, obtenuesjusqu'iciexclusivement sur la base de la théorie moléculaire, mais qui se dédui- sent maintenant par voie purement thermodynamique. Après avoir ensuite étudié les conditions thermiques d'affinité dans la conversion du soufre prismatique en soufre octaédrique, l’auteur démontre l’applicabilité des nouvelles formules. Il discute enfin,au même point de vue, la formation des sels à eau de cristallisation et la force électromotrice de certaines combinaisons gal- vaniques. — M. Branco présenteune Note de M.O. Zeise sur la flore d’éponges miocène d'Algérie, résumant les recherches faites par l’auteur sous les auspices de l'Académie au printemps de 1906. — M. Klein adresse un Mémoire de M. F. Tannhauser au sujet des études préliminaires pour un examen pétrographico-géologi- que de la chaîne de gabbros de Neurode. Après avoir passé en revue les différentes roches de cette chaine de sabbros, l'auteur expose leurs rapports mutuels et notamment ceux qui existent entre le gabbro et le diabase ; il discute enfin l’âge géologique de la chaine. Ces recherches ont été également entreprises sous les auspices de l’Académie. — M. Klein présente ensuite une Note rédigée par M. A.Schwantke sur les basaltes de la partie occidentale du Groënland septentrional et sur les fers d'Uifak. Les conditions si remarquables de ces basaltes, renfermant du fer pur, ont donné lieu à bien des discussions. Après avoir bien apprécié la valeur des différentes hypothèses en présence, l'auteur incline à adopter l'hypothèse suivant laquelle les com- posés de fer seraient réduits dans le basalte par le charbon qu'il perce. La présence, dans le basalte, du fer groënlandais ne saurait être regardée comme preuve d’une condition quelconque de l'intérieur de la Hérre: ALFRED GRADENWITZ. ACADEMIE DES SCIENCES DE VIENNE 22 Novembre 1906. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Leon : Sur l'équi- libre élastique des corps de rotation qui tournent régulièrement et dont les directions de tension prin- cipale sont les directions des coordonnées. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. E. Lecher montre expé- rimentalement, au moyen d'un nouveau calorimètre thermoélectrique, que l'effet Peltier, lorsqu'on renverse le courant qui le produit, change de signe sans que sa Séance du valeur numérique se modifie. Les expériences, faites sur la combinaison fer-constantan, donnent, pour la valeur de l'effet Peltier, 3,37 X 10 —%g. cal. par cou- lomb à 20° C. — M. E. Kielhauser décrit quelques phénomènes lumineux qui se produisent quand on plonge des électrodes d'aluminium dans des solu- tions d'acide chromique, de bichromate de potassium et de chlorure ferrique. — M. P. D. Quensel estime que le point de fusion de la tridymite est un peu au-dessus de 1550° et que celui du quartz n'est pas identique, mais lui est supérieur d'environ 50° (vers 16250). Il montre également l'existence d’un domaine de pseudo-équilibre entre le quartz et la tri- dymite de 10000 à 3509, où le quartz est stable jusqu'à 900%, et où la tridymite représente la forme stable au-dessus. — M. C. Doelter a également déterminé le point de fusion de la tridymite, qu'il place entre 15759 et 15800. — M. H. Meyer a constaté de grandes diffé- rences de stabilité entre les acides cinchoniques alkylés. 11 à préparé : l’e-phénylcinchonate de méthyle, F. 58°; l’amide «-phénylcinchonique, F. 155°; l'x-oxy- $-méthylcinchonate d'éthyle, F. 1679, etc. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. H. Rollett montre que de petites quantités d'acides et d’alcalis, qui n'ont aucune influence visible sur les corpuscules sanguins, abaissent cependant leur résistance spécifique, En diluant diversement du sang avec du sérum, la disso- lution électrique (par la décharge) a lieu plus rapide- ment là où il y a le plus de corpuscules. Enfin, l'agglu- tination des corpuscules produit une augmentation de l'hémolyse électrique. Séance du 6 Décembre 1906. 1° SciENcES PHYSIQUES. — M. H. Mache donne une nouvelle démonstration simple de la loi de la réparti- tion des vitesses de Maxwell. — M. F. Aigner a étudié l'influence de la lumière sur les conducteurs chargés électrostatiquement. Le potentiel de contact est modifié par la lumière de telle façon que les rayons à ondes courtes abaissent plus fortement le caractère électro- positif d'un métal que’les rayons à ondes longues. Le changement de position dans la série des tensions par l'éclairement est accompagné d’une variation de la sensibilité photo-électrique. — MM. R. Trebitsch et G. Stiasny ont enregistré phonographiquement des chants et des récits dans la langue des Esquimaux du Groënland occidental pendantl’été 1906. — M.H. Meyer a constaté que les acides +-méthoxyquinoline-6-carbo- nique, «-méthoxycinchonique ef a'-méthoxynicotique, chauffés au-dessus de leurs points de fusion, ne pré- sentent pas la migration typique de l’alkyle vers l'azote. Le premier donne un anhydride désalkylé, F.330° ; le second, l’éther isomère, F.255°; le troisième, l’oxy- acide libre. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. A. Grund présente ses recherches physiogéographiques surles deltas du grand et du pétit Méandre. La nature salée des eaux pro- fondes du delta du petit Méandre provient de l’exten- sion ancienne de la mer sur ces régions; elle venait autrefois jusqu'à Ketshi-Kala. Dans la vallée du grand Méandre, la mer remontait autrefois jusqu'au-dessus de Sokia, mais le delta de ce dernier fleuve progresse rapidement. — M. V. Apfelbeck décrit les nouveaux Coléoptères qu'il a rapportés de son voyage en Albanie et au Montenegro. Séance du 13 Décembre 1906. 410 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Pick : Sur des équations différentielles du deuxième ordre qui ne sont jamais singulières. ! 2 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Lampa, äprès avoir discuté l’état actuel du problème de l'hystérésis diélec- trique et montré qu'on s'est surtout occupé jusqu'à présent d'hystérésis diélectrique visqueuse et non d'hystérésis pure, indique une méthode pour déterminer cette valeur d’après l'observation des moments de ro= tation d'un corps de forme appropriée dans un champ sb 2 - ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 87 diélectrique. Les résultats de la théorie concordent assez bien avec ceux qu'on déduit des expériences de von Lang dans ce domaine. 3° SCIENCES NATURELLES. — M.F.Steindachner donne la description de deux nouveaux Corydoras trouvés dans l’état de Piauhy (Brésil) ;ils sont désignés sous les noms de C. treitlir et de C. julii. — MM. K. et L. Linsbauer ont constaté que le seuil de l'excitation des filaments de Centaurea jacea a lieu, dans des con- ditions favorables, pour une intensité de choc de 2,08 >< 10" cm. g. De faibles intensités de choc ne dé- clanchent, chez les filaments de Centaurea comme chez les folioles de Aimosa, que des réactions sous-maxi- males. Chez ces deux plantes, on ne parvient pas à augmenter l'effet de l'excitation par la sommation d'excitations de choc intermittentes. — M. F. Becke : Le domaine-frontière du noyau du Hochalm au nord- ouest. — M. V. Uhlig : Le domaine mésozoïque des « Radstädter Tauern ». L. BRUNET. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances d'Août, Septembre et Octobre 1906. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Ricco résume les observations sur l'éclipse totale de Soleil du 30 août 4905, faites par lui à Alcala de Chivert, et décrit les particularités des photographies spectrales qu'il a obtenues. — M. A. Viterbi : Sur l'expression générale de la gravité en dehors d'une planète dont une surface extérieure d'équilibre est un ellipsoide. — M. E. Pascal présente des considérations sur les cova- riants angulaires d’une forme différentielle d'ordre supérieur. — M. B. Levi poursuit ses recherches sur les fonctions dérivées et s'occupe des fonctions qui ont des dérivées en chaque point. — M. M. de Franchis éludié des surfaces irrationnelles du 5° ordre avec un nombre infini de coniques, et des surfaces plusieurs fois irrégulières du 5° ordre avec des points multiples. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Battelli transmet ses recherches expérimentales sur la résistance des solénoïdes aux courants de haute fréquence, expériences qui confirment que, pour des courants alternatifs, le rapport entre la résistance ohmique R d'un fil recourbé en solénoïde et la résistance R' du même fil distendu est égal à : V5 4/E 92rV 2 ee F 6T — M. A. Battelli, avec l'aide dé MM. A. Occhialini et S. Chella, à fait des recherches sur la radio-activité des eaux el des gaz de San Giuliano en Toscane, recon- naissant que cette radio-activité est due à une émana- tion dont les caractères ressemblent, mais ne sont pas identiques, à ceux du radium; les auteurs se pro- posent d'étudier les propriétés physiques de l'émana- tion et d'en faire l'analyse spectrale. — MM. A. Battelli et L. Magri étudient l'hystérèse magnétique du fer, produite par des courants à haute fréquence. — M. Gu- glielmo décrit une méthode pour déterminer avec une grande exactitude, à l’aide des gouttes tombantes et d'une formule particulière, la tension des liquides. — M. G. Ercolini décrit les phénomènes produits par la déformation d'un fil métallique, soumis à des tractions et des flexions simultanées. — M. A. Pochettino à exécuté de nouvelles expériences pour comparer l'ef- fet photoélectrique de l’anthracène avec celui du zinc, et pour rechercher la cause de la diminution de cet eflet avec la répétition. — M. F. Piola décrit une mé- thode pour l'étude des variations qui se manifestent pendant la magnétisation, lorsque la matière qui par- court un cycle magnétique donné se trouve assujettie à des charges oscillatoires très rapides, comme celles que l’on obtient avec les décharges des conducteurs. — Dans une autre Note, M. Piola, avec la collaboration de M. Tieri, étudie les variations magnétiques produites Par la torsion dans le fer qui parcourt des cycles dis- symétriques. — MM. R. Nasini et G. Levi, examinant la radio-activité des produits anciens el récents de l'éruption du Vésuve, ont trouvé que la radio-activité des sables et des lapillis diffère de celle des laves, et que les produits manifestent une activité plus grandeavec leur ancienneté. — M. G. Levi à fait des expériences sur le pouvoir rotatoire du quartz à ia température de l'air liquide, et a vu que, entre + 12° et — 180°, ce pouvoir ne subit aucune variation. — MM. N. Parra- vano et G. Marini s'occupent des propriétés de l'acide hypophosphorique (dont la formule est H*P*0°) et de ses combinaisons. — MM. G. Oddo et A. Colombano ont trouvé un procédé d'extraction de la solanine du Solanum sodomaeum Linn.,et en étudient les propriétés chimiques. — M. E. Rimini s'occupe du dosage hydro- métrique des sels d'hydrazine et de leur emploi dans les analyses volumétriques. — M. L. Francesconi éla- blit les rapports qui existent entre la fluorescence et la constitution chimique des substances organiques. — M. L. Mascarelli transmet les résultats de ses observations et de ses recherches sur les deux modifi- cations de l'Iodure mercurique, le jaune et le rouge, et sur les moyens d'obtenir ces deux formes des solu- tions d'iodure, convenablement préparées. — Dans une autre Note, M. Mascarelli s'occupe de l'existence de produits d'addition entre les nitrodérivés aromatiques et les sels halogénés de mercure, — Le même auteur s'occupe, en outre, de la façon dontse comporte l'aldé- hyde benzoïque en présence de l'iodobenzène et sous l'action de la lumière. — MM. R. Ciusa et C. Agosti- nelli ont fait des recherches sur les produits d'addi- tion des dérivés du trinitrobenzène avec quelques subs- tances aromatiques azotées. — M. R. Ciusa : Sur la formation et sur les réactions de la thiobenzanilide; action de l'hydroxylamine sur les cétones du type R.CH : CH.CH: CH.CO.R. — M. A. Mazzucchelli établit les conditions de la précipitation quantitative du peroxyde des solutions des sels d'uranyle, et en étudie en même temps les applications analytiques. — M. G. Oddo expose ses idées sur une disposition particulière des atomes, qu'il appelle mésoëédérie, qui suppose qu'un atome d'hydrogène, au voisinage de deux éléments polyvalents, puisse partager entre eux sa valence, pre- nant une position d'équilibre stable moyen. — MM. G. Plancher et R. Ciusa : Sur quelques produits de con- densalion des pyrrols. — MM. C. Ulpiani el A. Par- rozzani décrivent une nouvelle méthode pour déter- miner la quantité d'acide citrique contenue dans le suc des citrons, à l’aide du chlorure de chaux avec adjonction de soude. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. F. Zambonini pré- sente une étude de la galène qui s'est formée dans la dernière éruption du Vésuve en avril 1906. — Le même auteur décrit les formes cristallines de l’épidote ren- fermé dans des cassures d’un exemplaire d'épidotite trouvé dans la vallée de Suse, près de Condone.— M. 1. Colomba transmet ses recherches sur les cristaux de barytine de Traversella et de Brosso. — M. G. Chec- chia-Rispoli donne une description des Foraminifères que lon rencontre dans les gisements éocéniques du cap Saint-Andrea, près de Taormine. — M! D.Bruschi expose les résultats qu'elle a obtenus par ses recherches sur la vitalité et la digestion de l’albumen dans les graines de maïs, de froment, d'orge et de seigle; on arrive à la conclusion qu'il y a une autodigestion de l'albumen, mais à un degré très différent dans les diverses espèces de graines. — M. E. Carrasco fait des observations sur l'aspect extérieur et sur la structure interne des Pandanus, un des groupes les plus intéres- sants des Monocotylédonées. — M. N. Strampelli annonce que, pour prévenir la maladie du charbon du blé, due à l'Ustilago carbo, on doit recourir non seule- ment aux médicaments ordinaires, mais aussi à un choix des variétés qui sont capables de résister à l'in- fection des ovaires par les spores transportées avec le vent. — MM. G. Tizzoni et A. Bongiovanni établissent les conditions pour obtenir la décomposition in vitro du virus rabique au moyen du radium. — M. A. Her- 88 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES litzka parle de ses recherches sur la catalase, c'est-à- dire sur les ferments de différentes origines qui décom- posent l'eau oxygénée. — M. A. Aggazzotti a lait des expériences sur la réaction du sang dans l'air raréfié, qui conduisent à admettre que, non seulement par le séjour sur le Mont Rose, mais aussi sous la cloche pneumatique, les animaux présentent une diminution de l'alcalinité de leur sang; dans ce dernier cas, cette diminution est moindre que celle observée sur le Mont Rose. — M. V. Ducceschi, poursuivant ses recherches sur la physiologie de la respiration, s'oc- cupe de la tonicilé des muscles respiratoires. — MM. N. Cerletti et G. Perusini donnent les résultats d’une enquête qu'ils ont faite en examinant la glande (hyroï- dienne des enfants dans les écoles de Rome et des pays où existent le goitre et le crétinisme; ils insistent sur la nécessité d'étudier cette grave question sociale à laquelle se rattache le développement normal, phy- sique et intellectuel des individus. — M. N. Cerletti montre, avec expériences à l'appui, que les injections de suc d'hypophyse produisent constamment chez les animaux, cobayes et lapins, un retard dans l'augmen- tation du poids et dans le développement du squelette. ErNesTo Mancini. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 2% Novembre 1906. 1° SGiENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. G. van de Sande Bakhuyzen présente au nom de M. H. J. Zwiers : Recherches sur la trajectoire de la comète périodique Holmes et sur les perturbations de son mouvement elliptique, En janvier 1906, l’auteur a communiqué (Rev. génér. des Se., t. XVII, p. 302) ses recherches pro- visoires sur les perturbations qu'éprouverait la comète Holmes pendant son invisibilité depuis janvier 1900 jusqu'à janvier 1906; il y ajoutait une éphéméride détaillée de ses positions apparentes du 4° mai au 31 décembre 1906. Ce calcul à conduit à la redécouverte de la comète. Le 30 août, l'Observatoire de Leyde recut la dépêche que la comète avait élé retrouvée par M. M. Wolf, de l'Observatoire de Kænigstubl, près de Heidel- berg, dans une photographie de la partie du ciel où elle devait se trouver, dans la nuit du 28 au 29 août. La position a = 61° 51!, à ——+ 42° 28! (déterminée gros- sièrement au temps local 13152m{) s'accordait très bien avec le calcul. En deux autres occasions, M. Wolf a déterminé par la photographie la position de la comète, le 25 septembre et le 40 octobre. L'auteur examine les éléments provisoires et léphéméride donnée par ces trois observations. — M. W. Kapteyn : Sur une classe particulière d'équations différentielles homo- gènes du second ordre. L'auteur cherche à déterminer toutes les équations différentielles linéaires du second ordre Ry"—ÆSy'Æ Ty —0, où R,S,T sont des poly- nômes en x, jouissant de la propriété d'admettre comme deuxième intégrale particulière : By: (2 , P Ya (z) dz = J, 2 nr A x, (x) représentant une première intégrale particulière. — M. J.C. Kluyver : Quelques formules sur les nom- bres entiers moindres que n et premiers avec n. L'au- teur généralise quelques formules dues à Kronecker. — M. J. A. C. Oudemans : Uccultations et éclipses mu- tuelles des satellites de Jupiter en 1908. Seconde partie : éclipses (pour la première partie, voir Rev. génér. des Se., t. XNIT, p. 1043). Ce travail, illustré par deux planches, se termine par une table, faisant con- naître les particularités de 84 éclipses entre le 4° avril et le 20 mai 1908. L'auteur se demande si aujourd'hui on peut encore se fier aux tables de Damoïseau, for- mant la base des calculs du « Nautical Almanac ». La réponse est affirmative, si l'on excepte la première éclipse du satellite IV, qui arrive après une période de longue durée ne contenant pas d'éclipse: — M. P.H; Schoute présente au nom de M. F. Schuh : Le lieu des couples de points communs et l'enveloppe des cordes communes de courbes faisant partie de trois faisceaux. Première partie. Le lieu des couples de points par lesquels passent des courbes faisant partie de trois faisceaux d'ordres r,s,t est de l'ordre 3(rst +4} — 2{r+Hs+Ht) — (ar Hs yt), « représentant le nombre des points d’intersection fixes communs des courbes du second et du troisième faisceau, ete. L'en-. veloppe des cordes communes est de la classe 3rs4 — 2(st+tr+rs) Lir+s 2, Chronographe. — La vitesse linéaire de la périphérie du tambour lournant peut varier entre 1 et 40 mètres par seconde. Pendant la période de refroidissement, où les varialions de Ja pres- sion s'effectuent très lentement, le mécanisme moteur peut être réglé de manière qu'une vitesse linéaire de 5 à 10 centimètres par à n'obtenir 98 P. BOURGOIN — L'ÉTUDE DES POUDRES DE GUERRE AU LABORATOIRE A seconde. Le tambour du chronographe peut être aisément détaché et transporté dans la chambre noire, où la pellicule photographique est enroulée et placée dans une boîte étanche à la lumière. A cet effet, et ainsi que l'explique la légende de la figure 9, cette boîte est disposée de telle manière | que le tambour puisse être fixé en pleine lumière sur l'axe du chronographe, sans que la pellicule soit impressionnée. La boite entourant le tambour est percée d'une fente longue et étroite qui, pen- dant la rotation, est masquée par un obturateur. Cet obturateur démasque la fente immédiatement avant une explosion, pour la recouvrir une seconde plus tard, alors que l'impression photographique est obtenue. Grâce à ce dispositif, il n’est pas né- cessaire que la chambre dans laquelle on expéri- mente soit absolument sombre. La source lumineuse est constituée par un fila- WW FBoggrmns dut Fig. 9. — Chambre noire du chronographe de M. Petavel. — Le tambour D est représenté fixé sur l'axe A du chrono- graphe. Pour enlever le tambour sans exposer à la lumière la pellicule qui est enroulée sur lui, la chambre noire est d'abord déplacée légèrement vers la droite, de manière à engager l'épaulement circulaire E dans le lo- sement F. Le tube en laiton G est ensuite engagé dans l'évidement H. Cette opération terminée, son couverele C peut alors être enlevé et la pièce N dévissée. La chambre noire, avec le tambour qui en a été ainsi rendu solidaire, peut, dans cet état, être séparée du chronographe (en fai- sant glisser tout le système vers la droité) et mise dans la chambre noire, où la pellicule est développée et rem- placée par une autre non encore impressionnée, ment droit de lampe à incandescence, dont l'image se forme au foyer du miroir, c'est-à-dire sur la fente de la boîte du chronographe, où elle produit une raie droite lumineuse perpendiculaire à l'axe de rotation. Le faisceau lumineux, se déplaçant d'une longueur qui est à chaque instant propor- tionnelle à la pression développée dans la bombe, trace une courbe sur la pellicule photographique, dont les ordonnées représentent (à une certaine échelle) les pressions de l'explosion etles abscisses (à une autre échelle) les temps écoulés. Le manomètre est taré au préalable à l'aide d'une pression hydraulique, par un procédé sur lequel Pauteur ne donne aucun renseignement. 3. Bombes. — M. Petavel a employé deux bombes : l’une cylindrique, l’autre sphérique. Le LE à métal les constituant était de l'acier doux forgé. La bombe sphérique avait un diamètre intérieur- de 101%%,6, avec un écart maximum inférieur à 0,254 (1/100 de pouce). La cavité sphérique était pratiquée dans un bloc massif d'acier par une ouverture de 31 millimètres de diamètre, et la sur- a Fig. 10. — Bombe sphérique de M. Petavel. — À, écrou du manomètre enregistreur; B, bouchon de mise de feu z C et D, valves d'admission des gaz: a, épaulement: b, logement de l'extrémité du manomètre. face intérieure ne présentait aucune aspérité sen sible. Le volume de la cavité, déduit d'un jaugeage soigné, au mercure, était de 556 centimètres cubes; sa surface était égale à 327 centimètres carrés. L'épaisseur minimum des parois était de 54 milli- mètres environ. Dans ces conditions, la bombe aurait sans doute pu supporter des pressions de 2.000 atmosphères (206,6 kilogs par centimètre carré); mais, par prudence, on n'a jamais dépassé la moitié de ce chiffre. La bombe cylindrique, en raison de sa plus grande résistance, fut seule employée pour les. hautes pressions. La figure 10 représente une section de la bombe sphérique. l’écrou du manomètre est représenté D L Fig. 11. — Bombe cylindrique de M. Petavel. — A. écrou du manomètre enregistreur: B, bouchon de mise de feuz C et D, valves d'admission des gaz. en À; l'anneau d'acier D de la figure 8 s'appuie sur l’épaulement a et obture le joint régnant à cet endroit. L'extrémité du manomètre est ajustée dans b, à frottement doux, et met ainsi l'obturateur à l'abri de l'action des gaz chauds. B est le logement du bouchon de mise de feu. Lorsqu'on expérimente P. BOURGOIN — L'ÉTUDE DES POUDRES DE GUERRE AU LABORATOIRE 99 sur des explosifs gazeux, on emploie deux valves - qui se vissent en CG et D. La bombe est d'abord ; remplie avec du mercure passant par C; on intro- - duit ensuite le gaz par D. Dès que le mercure est expulsé, la valve GC est fermée. Après chaque / 2 l ! | | Echelle en centimètres Fig. 12. — Bouchon de mise de feu de la bombe de M. Pe- iavel. — L'isolant du conducteur central est en forme de cône, de manière à assurer sa tenue dans son logement au moment de l'explosion. Une petite cartouche de poudre noire peut être placée, le cas échéant, autour du til fin W. Le joint conique D, étanche aux gaz, est protégé comme à l'habitude de tout contact avec les gaz chauds, par une pièce faisant saillie, qui bouche étroitement l'ouverture pratiquée dans la bombe. explosion, la bombe est lavée avec une solution de potasse caustique, puis avec de l'eau distillée. F 1000 & È “à & > $ S ù 500 $ \S © 9 ë À ë [e) 0015 0010 0005 0 Temps en secondes Æ— Fig. 13. — Tracé donné par le manomètre enregistreur de AW, Petavel. — Diamètre de la cordite : Om/m,S9: densité de chargement : 0,074: charge uniformément répartie en bombe sphérique. La bombe cylindrique (fig. 11) avait les dimen- sions suivantes : Diamètre extérieur . . . . . . . . : 0m122 Diameétre intérieur 200 ue 020317 Ponsveurdeilame "turn ne 0m6961 Molume;intétieurs Me. ee EX 550 cm° Surface des parois internes. , : . . . 709 em° Les deux bombes ont donc même volume inté- rieur, mais la bombe cylindrique à une surface interne double de celle de la bombe sphérique. La bombe cylindrique a parfaitement résisté à des pressions de 2.000 aimosphères. Le bouchon de mise de feu (fig. 12) est organisé = =] = 500 Pression en aémosphères 0 0,03 0,02 0,01 Temps en secondes = Fig. 14. — Tracé donné par le manomètre enregistreur de M. Petavel. — Diamètre de la cordite : 4u/m,44: densité de chargement : 0,099. Charge uniformément répartie en bombe sphérique. d'une facon identique à celui qu'on emploie dans le manomètre de M. Vieille *. 4. Tracés. — Avec cet appareil, M. Petavel a effec- tué un grand nombre d'expériences diverses, dontles résultats sont de tous points identiques à ceux pré- cédemment obtenus par M. Vieille. Les tracés ob- 2000 1000 Pression en stmosphères 0 0,03 0,02 001 (e) Temps en secondes = Fig, 15. — Tracé donné par le manomèlre enregistreur de M. Petavel. — Diamètre de la cordite : 4m/m,44: densité de chargement : 0,15. Charge uniformément répartie en bombe cylindrique. tenus sont généralement très nets et, grâce à leurs dimensions, la lecture en est facile. Les figures 13 1 Afin d'obtenir une inflammation de l'explosif aussi rapide que possible, Pétavel a parfois fait usage de gaz lon- nant (H°0) au lieu de poudre noire. 100 à 45 donnent des spécimens des tracés fournis par ce remarquable appareil, dont la manipulation doit d’ailleurs être quelque peu délicate. Nous reviendrons plus loin sur l'influence exercée par la forme et les dimensions des bombes, sur les tracés correspondant à une même poudre tirée à une même densité de chargement dans ces diverses bombes. $ #4 — Manomètre de Noble. Sir Andrew Noble a exécuté tout dernièrement une série de recherches dans le but d’élucider la \ / 2) le L) C) Si Q 13 à 1ë 19 É 12 FA Q D Ÿ IS L 3 e ! [l n2) 9P 25/4 8p S/14 à P. BOURGOIN — L'ÉTUDE DES POUDRES DE GUERRE AU LABORATOIRE Ce dernier organe est conslitué par un piston en acier, de faible section, qui recoit à l'une de ses extrémités la pression des gaz. L'autre extrémité de ce piston a une section plus forte sur laquelle vient s'appuyer un ressort spiral a, dont la défor- mation a été soigneusement larée. Un levier, attaché en À à ce piston, peut pivoter autour d’un axe c supporté par un palier fixe de l'indicateur; il résulte, par suite, de ce dispositif que, lorsque le ressort se comprime sous l'action du piston, l'ex- trémité du levier est assujettie à se déplacer. Ce même levier porte deux électro-aimants 4, | LSS27/N DUEJQ + — ŒE FBoñpEemA del. evier de chargement a JA me Pre) EF i Fig. 16. — Appareil de Sir Noble. — à, ressort spiral; b, point d'attacne du levier pivotant autour de l'axe €; d, d, électro-aimants; e, tringle; f, anneau; g, g, tringles guidant le chariot porteur du style. variation de composition des produits gazeux résullant de la combustion d'un explosif donné sous des pressions variables. C’est au cours de ces travaux qu'il a entrepris d'étudier le mode de développement des pressions en vase clos à l’aide du manomètre que nous allons décrire (fig. 16). 1. Description du manomètre. — La bombe, de forme cylindrique, est fermée à ses deux extré- mités par deux bouchons étanches aux gaz. A travers l’un d'eux passent les fils de la mise de feu électrique, tandis que l’autre porte l'indicateur de pression. Researches on Explosives, Part. IT, lue à la Société Foyale de Londres dans la séance du 8 juin 1905. dont l’un enregistre les secondes, tandis que l’autre est inséré sur le circuit de mise de feu. Une tringle e pivote autour d'un axe situé à l'extrémité du levier, et son mouvement, commandé par l’attrac- tion de l'électro des secondes, détermine à son tour, par l'intermédiaire de l'anneau f, le déplace- ment d'un style qui marque sa trace sur un enre- gistreur constitué par un tambour tournant. Ce tambour tournant est en bois léger ; au-dessus de lui, et parallèlement à son axe, sont disposées deux tringles g, g supportées par le bàti de l’appa- reil et le long desquelles le chariot porteur du style’ est assujetti à glisser. Enfin, le style est sou levé par une détente qui est dégagée par le courant de mise de feu, au moment du passage de celui-ci dans un électro-aimant relié à la détente. P. BOURGOIN — L'ÉTUDE DES POUDRES DE GUERRE AU LABORATOIRE 101 Le lambour tournant peut être animé de deux vitesses, dont la plus grande est de 1 mètre à la seconde, l’autre n'étant que de 25 millimètres dans le même intervalle de temps. Le tambour est mis en mouvement par des cordes de transmission enroulées, d'autre part, sur la roue à gorge de l'appareil moteur. Avant une explosion, on installe le tambour de manière à ce qu'il soit actionné par la transmission à grande vitesse, celle à petite vitesse étant rendue folle. Une ou deux secondes après l'explosion, on actionne le levier de changement de vitesse, de manière à inverser l'état de choses précédent; La grande vitesse est mesurée approximative- ment à l’aide d’un tachymètre, mais son évaluation exacte est déduite de la longueur de la seconde sur le diagramme d'enregistrement. Ce dernier est tracé sur une feuille d'étain appuyée sur une feuille de papier. La feuille d’étain ainsi préparée est placée sur le tambour, ainsi que l'indique la fi- gure 16. Les bords de la feuille sont collés sur le tambour, et sa surface est ensuite noircie avec du camphre enflammé. Le chronomètre est du type en usage dans la marine ; il n’en diffère que par l'addition d’un con- act à secondes. Celui-ci, étant relié au mécanisme placé sur le levier commandé par le piston, actionne le style traceur, qui peut, dès lors, inscrire les secondes pendant toute la durée de l'expérience. 2, Exécution d'une expérience. — La succession des opérations pendant l’exécution d'une expé- rience est alors la suivante : Toutes les connexions électriques étant assu- rées, le chronomètre est relié au chariot du style traceur, mais aucune inscriplion ne peut avoir lieu, par suite du soulèvement du style par l'arma- ture de l’électro-aimant qui le commande. Le tambour est alors mis en marche, et, lorsqu'on a atteint la vitesse cherchée, ce que l’on constate aisément par la lecture du tachymètre, on presse le bouton de mise de feu, ce qui entraine la fer- meture du circuit de mise de feu au battement de la seconde suivante par le chronomètre. Le passage du courant dégage en même temps la plume et allume la charge. On réduit alors la vitesse du tambour aussi rapidement que possible en agissant sur le levier de manœuvre des trans- missions, en même temps qu'on réduit la vitesse du moteur. Le chronomètre continue à battre les secondes, fournissant ainsi la relation existant entre le temps et la pression jusqu’à la fin de l’ex- périence. On enlève ensuite le diagramme en cou- pant la feuille au point où le style est tombé; ce point marque le battement de la seconde corres- pondant à la mise de feu. La feuille est ensuite étendue sur un plateau, enduite de vernis el sé- chée. 3. Critique de l'appareil précédent. — Sir Noble pe fournit aucun éclaircissement sur la constante x, du manomètre employé par lui, et il semble bien qu'il ne s'en soit pas préoccupé. D'autre part, la longueur de la course du piston, correspondant à la pression maximum indiquée dans les tracés obtenus par lui, paraît incompa- tible avec la condition =>. Le manomètre de 0 l'appareil peut donc avoir un fonctionnement dyna- mique. Il semble d’ailleurs bien qu'il en ait été ainsi dans les expériences en question, car, si, en partant : 1° de la formule ‘ bien connue (due à Abel et à Sir Noble lui-même): fA PE AN 2 des résultats numériques (*, À, p) consignés dans le mémoire de Sir Noble, on calcule, en fonction de la densité de chargement A, les valeurs de f relatives à la cordite, on obtient les nombres ci- après : A f A f 0,05 8.739 0,25 10.368 0,10 11.177 0,30 11.145 0,15 10.439 0,40 10.954 0,20 11.084 0,50 10.062 L'inspection de ce tableau fait immédiatement ressortir la divergence des valeurs de /, bien que celles-ci soient obtenues avec un même explosif. Si l’on observe en outre : 1° Que la valeur théorique de / correspondant à la décomposition de la nitroglycérine est de 10,560; 2° Que, dans une expérience à la bombe, et en supposant même réalisé intégralement le mode de décomposition théorique de l'explosif correspon- dant à ce chiffre maximum, le refroidissement par les parois de l’appareil exerce une influence per- turbatrice se traduisant par un abaissement notable de la pression et, par suile, par une diminution correspondante de la valeur de /; 3° Que les poudres à la cordite ont une force sensiblement moindre que la nitroglycérine pure, par suite de l’adjonclion de coton-poudre et de dis- solvant à cet explosif; On en déduira que la plupart des chiffres ! Dans cette formule: p représente la pression (kg par. cm): A, la densité de chargement ; æ, le covolume, c’est-à-dire, pour des explosifs à décom- se Vo Le position gazeuse totale, 000” 2° désignant le volume total des gaz, ramené à 00 et 760ww, produit par 1 kilog d'explosif. 102 P. BOURGOIN — L'ÉTUDE DES POUDRES DE GUERRE AU LABORATOIRE inscrits dans le tableau précédent sont trop élevés. Comme, d'autre part, les valeurs d’x sont connues avec précision et qu’une erreur, même notable, sur cette quantilé n'aurait qu'une faible influence rela- tive sur les valeurs de / correspondantes, déduites de la formule d’Abel et Noble, on en conclut à l'inexaclitude des pressions mesurées. Pour si ingénieux qu'il soit, l'appareil précédent ne fournit done, tout au moins dans ses conditions actuelles d'établissement, que des indications er- ronées. $ 5, — Remarques relatives à l’utilisation des données fournies par les appareils précédents. Nous avons vu précédemment que le coefficient angulaire de la tangente au point d'inflexion de la courbe des pressions en fonction des temps ca- ractérise, pour des poudres chimiquement sem- blables et brûlées sous une même densité de char- gement, la forme du grain employé. En principe, on devra donc emplover, pour la détermination de cette caractéristique, des bombes de dimensions telles que le grain entier puisse y brûler, sans qu'on soit obligé au préalable d'altérer sa forme. Les poudres actuelles étant d'ailleurs toujours, et quoi qu'on fasse, des mélanges plus ou moins homogènes (les raisons en seront données dans la deuxième partie de ce travail), il y aura, en outre, intérêt à brûler à la fois un nombre de brins (ou de grains) suffisamment grand pour qu'on puisse déduire d'une série d'expériences des ré- sultats moyens dignes de confiance. Les effets perturbateurs, dus au refroidissement des gaz au contact des parois de l'appareil, subsis- teront toujours, quoi qu'on fasse, et seront fonction des dimensions de celui-ci; mais, comme ils se pro- duisent également dans le canon, on conçoit qu'il soit possible d’en tenir compte très approximative- ment par l'introduction d'un facteur de correction empirique afférent au tir d'une bouche à feu déter- minée. Il serait, d’ailleurs, illusoire de chercher, dans les calculs de ce genre, une précision que ne comportent pas les Lirs eux-mêmes, car les très minimes différences qui existent entre des bouches à feu similaires suffisent pour introduire des diffé- rences notables dans les résultats balistiques de tirs effectués le même jour. II. — ÉTUDE EXPÉRIMENTALE DE LA STABILITÉ DES POUDRES. $S 1. — Considérations générales. L'ancienne poudre noire avait une stabilité chi- mique parfaite, et, à la condilion d’être mise à l'abri de l'humidité, sa conservation était indéfinie. Il n’en est malheureusement pas de même des col- loïdes nitrés dont l'usage comme poudres est main- tenant général. On sait que ces corps. qu'ils soient à base de coton-poudre seul ou de coton-poudre associé à la nitro-glycérine, sont obtenus par la géla- tinisation du coton-poudre dans des dissolvants variés et appropriés à son laux de nitralion (alcool, éther, éther acétique, acétone). . Cette fabrication est très délicate et demande à être conduite avec le plus grand soin. En ce qui concerne notamment la fabrication du coton- poudre, une immersion exagérée dans le bain acide favorise des réactions secondaires nuisibles, telles que : suroxydation de parties de cellulose, disso- lution dans le bain acide de matières organiques constituant des impuretés du coton, formation d'acides nitreux et de dérivés nitreux instables de la cellulose. L'opération de la nitration est, en outre, elle- même influencée par les variations thermomé- triques et hygrométriques de l'atmosphère, et son allure est étroitement liée à la nature des colons sur lesquels on opère. L'opération de la gélatinisation et les séchages subséquents ne sont pas moins délicats. Quoi qu'il en soit de ces difficultés extrêmes de fabrication, la poudre mise en service perd plus ou moins rapi- dementson dissolvant, suivant le degré d'étanchéité des caisses dans lesquelles elle est contenue, et surtout suivant la température plus ou moins élevée à laquelle elle est soumise. Cette élimination progressive du dissolvant a pour effet de modifier profondément les diverses propriétés du colloïde. Ainsi, alors qu'une poudre en bon état est élastique et tenace, une poudre privée d’une partie notable de son dissolvant devient dure et cassante, et l'on a pu, aux États-Unis, baser une épreuve de stabi- lité sur cette altération physique. Parallèlement à cette modification, on voit changer les proprié- tés balistiques de la poudre, par suite du relève- ment de sa force et surtout de son coefficient de vivacité. L'éliminalion du dissolvant s’accentuant, on voit, et c’est là la conséquence la plus grave de ce phé- nomène, apparaître des traces de décomposition nilreuse. Cette décomposition est accompagnée d'un dégagement de chaleur tel qu'il peut en résulter la combustion spontanée de l’explosif, et c'est à des accidents de ce genre que sont sans doute impu- tables les catastrophes retentissantes du J/aine, du Mikasa et celle, toute récente, de l’Aquidaban en rade de Rio-de-Janeiro. La détermination de la stabilité des poudres à donc, dans la pratique, une très grande importance, et l'on s'explique ainsi les nombreux travaux dont elle a été partout l’objet. Les causes mises en avant pour expliquer celle (] Ts: P. BOURGOIN — L'ÉTUDE DES POUDRES DE GUERRE AU LABORATOIRE 103 formation spontanée de produits nitreux sont les suivantes : 1° Traces de produits nitreux, résultant, ainsi que nous l’avons vu plus haut, d'une fabrication peu soignée; 20 Addition de substances en vue de l’augmenta- tion de la stabilité. C’est ainsi que Guttmann a montré‘ que les substances alcalines incorporées dans le but de neutraliser les produits nitreux accé- lèrent, au contraire, dans certains cas, la décom- posilion de la poudre. Le même auteur a également fait voir * que l'addition d’eau distillée à de la nitro- glycérine pure produit le même effet; 3° Manque de soins dans les diverses opérations de fabrication et de séchage; 4 Le coton employé n'est pas de la cellulose chi- miquement pure et contient toujours de petites quantités de matières organiques, dont la nitrifi- cation peut engendrer des composés instables, non éliminés dans la suite des opérations de fabrica- tion; 5° Certaines nitrocelluloses pures, sinon la tota- lité, seraient instables, et leur degré de stabilité tout relatif ne dépendrait que de conditions élroite- ment limitatives ; 6° La molécule de nitrocellulose pure serait sus- ceptible d'éprouver une oxydation lente, comme certaines variétés de carbone poreux en éprouvent à l'air (voir les travaux récents de Moissan sur ce sujet); 1° Enfin, le chimiste A. Sy, du Laboratoire de l'Arsenal de Francfort, invoque comme cause agis- .sante l’action de bactéries dénitrifiantes”*. Quoi qu'il en soit de ces causes et de leur impor- tance relative, l'expérience a permis de reconnaitre que l'évolution d'une poudre nitrée est régie par une loi expérimentale assez précise. Appelons A le temps écoulé depuis la fabrication de la poudre jusqu'au moment où elle se décom- pose, en la supposant constamment soumise à une température de 0°. Désignons maintenant par a le temps correspondant à la température {; l'expé- rience montre qu'entre des limites assez étendues de température, les temps à sont liés à À par une relation de la forme : (1) a—Ae où + représente une constante posilive. Il résulte de la forme de la relation (1) que, de la connaissance du temps a, correspondant à une tem- pérature déterminée /,, on pourra déduire le temps a d'évolution correspondant à la température nor- " Zeitschrift für angewandte Chemie, 1897. p- 235. © Tbid., 4899, p. 55. 3: Stbility test for Nitrocellulose powders. Journ. of the United States Artillery, octobre 1903, p, 131. male { de conservation de la poudre. Comme x décroit d’ailleurs rapidement à mesure que { grandit, il sera en général commode de déterminer la valeur de à correspondant à une valeur élevée de é, par suite de la réduction de la durée de l’ex- périence d'épreuve ainsi effectuée. Les températures d’épreuve employées doivent ètre, en principe, supérieures à la température d'ébullition du dissolvant utilisé pour la gélati- nisation, sans toutefois être trop élevées au-dessus de ce dernier chiffre, car l'expérience a montré qu'une épreuve de stabilité effectuée dans ces con- ditions pouvait provoquer une décomposition sans rapport avec la stabilité de l’explosif, c’est-à-dire n'obéissant pas à la relation (1). Supposons choisie la température 0 de l'épreuve; celle-ci consistera en un chauffage de la poudre à celte température, en présence d'un réactif capable de déceler le commencement de la décomposition nitreuse, réaclif qui est généralement le papier bleu de tournesol. Le rougissement de ce dernier étant obtenu, si l’on refroidit la poudre à la température ordinaire et “qu'on la laisse en cet état pendant quelques heures, on constatera, en recommençant l'épreuve précé- dente, que le papier de tournesol rougit au bout d'un intervalle de temps moindre que le précédent. Ce phénomène s'explique dela manière suivante : le chauffage élimine tout d’abord le dissolvant de la périphérie de la bande ou du grain de poudre; si l’on arrêle l’opéralion avant que le dissolvant soit chassé de l’intérieur, celui-ci, au refroidissement, se diffuse de nouveau dans toute la masse et vient : neutraliser les produits acides de la surface. L'épreuve unique ne peut donc fournir d'indica- tion valable qu'au cas où sa durée serait suffisante pour amener l'élimination totale du dissolvant. Comme il n'en est jamais ainsi, on a substitué dans certains pays, à l'épreuve unique, l'épreuve dite à durées lotalisées, qui s'exécute ainsi qu'il suit : La poudre est chauffée de la mêrae manière que dans l'épreuve unique; soit a le temps nécessaire au rougissement du papier bleu de tournesol. On laisse refroidir la poudre et l’on renouvelle l'épreuve le lendemain à la même heure; soit 4! le nouveau temps obtenu. On répète indéfiniment l'opération jusqu'à ce que le dernier temps a, soit inférieur à un minimum donné. La résistance de la poudre est alors représentée par la somme a+ a 4"... La, qui doit être infé- rieure à une durée minima découlant de la disceus- sion des expériences antérieures. La durée a de la vie d'une poudre à la tempéra- ture normale de.son emploi n'est, d’ailleurs, pas le - seul facteur qu'il importe de considérer. Au point de vue balistique, la modalité de la perte du dis- 104 solvant en fonction du temps a également une grande importance. _ Pesons 100 grammes d'une poudre donnée, au moment de sa mise en service, et placons l'échan- tillon en question dans une caisse à poudre ordi- naire, supposée conservée à une même température. En effectuantpériodiquement des pesées de l’échan- tillon, on constatera des pertes de poids sueces- sives zx, x', 7’. Si maintenant on porte les temps en abscisses et les pertes de poids en ordonnées, on obtiendra une courbe telle que celle de la figure 17, qui représentera l'allure du phénomène,et celui-ci pourra être caractérisé, à un instant quelconque 8, par le coefficient angulaire n de la tangente MT à cette courbe au point d'abscisse 0. Etant donné ce que nous ayons dit précédem- ment de l'influence qu'avait au point de vue balis- tique le départ du dissolvant, il est clair qu'à de Fig. 15: grandes valeurs de correspondront des variations très rapides des qualités balistiques de la poudre considérée. Une bonne poudre doit done être ca- ractérisée, non seulement par une bonne stabilité, mais encore par de faibles valeurs du coefficient défini plus haut. Un excès de dissolvant augmen- tera sans doute la stabilité; mais, comme cet excès s'éliminera assezrapidementen service etqu'ilaura pour effet un accroissement marqué du coefficient x dans les premières périodes de la vie de la poudre, il sera, en définitive, plutôt nuisible. Une longue pratique peut, seule, aider à fixer les conditions limites à admettre, lant pour la stabilité que pour le coefficient 1, mais le caractère obligatoire de la prise en considération de ces deux facteurs ressort net- tement dela discussion précédente. Dans la pratique, on déterminera 7 en opérant à une température constante déterminée, et assez élevée pour mettre en évidence, dans un temps suffisamment court, les pertes de poids de l'échantillon dues au départ du dissolvant. Ayant ainsi mis en lumière le but des épreuves de stabilité et les conditions dans lesquelles elles P. BOURGOIN — L'ÉTUDE DES POUDRES DE GUERRE AU LABORATOIRE doivent s'exécuter, nous allons maintenant décrire les principales de ces épreuves actuellement en usage tant en France qu'à l'Étranger. S£ 2, — Épreuve d’Abel. Cette épreuve, la plus ancienne de toutes, est encore actuellement réglementaire en Angleterre. L'échantillon de poudre est réduit en copeaux de Oum 5 d'épaisseur et exposé à l’air pendant un minimum de douze heures. On peut encore employer des raclures minces détachées avec un morceau de verre et soumises pendant quarante- huit heures à une température de 45°C.; les ra- clures ainsi chauffées sont alors placées dans une boîte humide où on les laisse toute une nuit. On prend ensuite 1 gr. 3 de l'échantillon ainsi préparé et l’on place ce poids de poudre dans une éprou- vette en verre de 16 centimètres de longueur, fermée par un bouchon que traverse une baguette de verre. À la partie inférieure de celle-ci est soudé un crochet en fil de platine, auquel est attachée une bande de papier imprégnée d'iodure d’amidon (KI + amidon) et mouillée sur la moitié de sa lon- gueur avec une solution de glycérine à 50 °/,. On règle la position de la bande dans le tube, de manière à ce qué la ligne séparant les portions sèche et mouillée soit dans le même plan horizon- : P. BOURGOIN — L'ÉTUDE DES POUDRES DE GUERRE AU LABORATOIRE tal que le bord du voile d'humidité formé à l'inté- rieur du tube par l’explosif. Le tube est ensuite im- mergé dans un bain, dont la température, variable suivant la nature de l'explosif, est de (100° + 1°) pour les poudres à la nitrocellulose. Le bain em- ployé (fig. 18) est une marmite d'eau dans laquelle est placé un second vase en cuivre contenant de l'eau ou de la glycérine ; ce dernier a un couvercle formé par trois disques parallèles etperforés, placés à 25 millimètres l’un de l’autre. Les trous dans les disques du haut et du milieu sont juste assez grands pour laisser passer les tubes d'essai, qui s'encastrent dans les ouvertures plus petites du troisième disque. Ce dispositif assure aux tubes une position verlicale et les maintient à un même niveau. Lorsque le bain a atteint la température voulue, on immerge les tubes, et l'épreuve commence à cel instant ; elle prend fin lorsqu'on voitapparaitre une ligne brune, à la jonction des parties sèche et mouillée du papier d'épreuve. Une poudre à la nitrocellulose est considérée comme bonne lorsque le papier ne vire au brun qu'après 10°. Pour les poudres à la nitro-glycérine, le brunissement ne doit pas apparaître avant 20', la température du bain élant 65°,5. La décoloration du papier est due à l’action de l’iode libre, provenant de la décom- position de l'iodure de potassium par les impu- | retés ou les produits de décomposition de l'explosif (oxydes d'azote). En se reportant à ce que nous avons dit plus haut, il est facile de se rendre compte que l'épreuve d'Abel ne fournit aucun renseignement sur le mode de départ du dissolvant. L'addition de com- posés azotés à la poudre peut, en outre, dénaturer complètement le sens de l'épreuve, en laissant croire à un manque de stabilité de l’explosif, alors que les mauvais résullats de l'épreuve peuvent être dus à une décomposition partielle des subs- tances ajoutées, décomposition qui peut ne pas se produire aux températures ordinaires de conser- vation de la poudre. Réciproquement, l'addition de cerlaines subs- tances à la poudre, telles que le bichlorure de mercure, peut masquer complètement le manque de stabilité de l’explosif. Dans ce cas, le mercure provenant de la réduction du bichlorure par les composés nitreux s'unit à l’oxyde d'azote' et, en empêchant sa volatilisation, retarde son action sur le papier d’épreuve. Ce mode de fraude, qui n'est pas à craindre dans les usines de l'État, se serait, paraît-il, produit aux États-Unis’, où les fourni- tures d’explosifs sont faites par l’industrie privée. 1 Tnowas : Zeitschrift für ang. Chem., 1S9S, p. 1027. ? Voirl'article « Stability test for Nitrocellulose powder », REVUE GÉNÉHALE DES SCIENCES, 1907. 105 L'addition d’amines et d'urée fausserail égale- ment l'épreuve en vertu de la réaclion suivante : R.AzH? + HO.Az.0—=R.OH + Az° + H°0. Les sels alcalins, l’éther acétique, l'acétone, les huiles, la vaseline, l’aniline, ont été aussi em- | ployés dans le mème but. Une autre sorte de critiques à encore été faite contre l'épreuve d’Abel: on à fait ressortir que des résultats différents étaient obtenus suivant que les copeaux employés étaient plus ou moins gros et que leur teneur en humidité élait plus ou moins considérable. Dans le même ordre d'idées, les résullats de l'épreuve seraient fonction de la nature du papier d'épreuve, de très légères différences modifiant beaucoup les résultats de l'épreuve. Il en serait | d'ailleurs de même de l'équation personnelle de l'opérateur. Pour toutes ces raisons, l'épreuve d’Abel est aussi défectueuse qu'insuffisante. Les mêmes cri- tiques générales peuvent être faites au sujet de ses modifications : épreuve de Cullen à l'iodure de zinc (température d'épreuve 80°), épreuve de Gutt- mann, avec papier mouillé dans une solution de diphénylamine dans l'acide sulfurique. $ 3. — Épreuve de Hess. Hess chauffe le coton-poudre à 70° dans un tube en verre, etenlève au moyen d’un courant d'air les produits volatils de décomposition qui sont trans- portés dans une solution diluée d'empois d’amidon ioduré. On procède à cinq observations : quatre lectures de coloration de l’empois ioduré et une nolation du temps nécessaire pour obtenir l’explo- sion d'un échantillon. Celle épreuve n'est encore qu'une modification de celle d’Abel et présente les mêmes inconvénients que cette dernière, l'empois d'amidon étant aussi sensible que le papier imprégné de cette substance. S 4. — Epreuve d’explosion. Pour exécuter cette épreuve, on place 0 gr. d'explosif dans un tube en verre large et robust. Ce tube, légèrement bouché, est ensuite placé dans un bain de paraffine à 100° (fig. 14), que l'on agite et que l'on chauffe de manière à réaliser une éléva- tion de température de 5° par minute. L'opération est poursuivie jusqu'à l'explosion de l'échantillon ; à cet instant, on note la température du bain. Une poudre à la nitrocellulose de Bonne stabilité ne doit pass'enflammer en dessous de 477°. Le point d'explosion d’une poudre à la nitro-gly- auquel nous sommes redevable d'une partie des rensei- gnements précédents. 3x 106 cérine slable n'est ‘pas inférieur à 170°, L'expé- rience fait ressortir l'insuffisance absolue de: ce mode d'apprécialion, bon tout au plus à différen- cier les poudres très stables de celles en voie de décomposition. La loi suivant laquelle on élève la température en fonction du temps jouerait d’ail- leurs un rôle prépondérant dans ce mode d’épreuve. $ 5. — Épreuve allemande. Cetle épreuve est la suivante ; 2gr.5 d’un échan- tillon de l’explosif à étudier sont placés dans un tube d’épreuve très résistant avec une bande de Fig, 19. — Appareil pour l'epreuve d'explosion. papier bleu de tournesol. Le tube, légèrement bouché, est ensuite placé dans un bain chauffé à la température constante de 135°. On note successivement les temps mis pour obtenir ;-1° le rougissement du papier bleu de tour- nesol; 2° l'apparition des fumées brunes d'acide hypoazotique ; 3° l'inflammation de l'échantillon, Des explosifs stables supportent cette épreuve dans les conditions suivantes : KROUGISSEMENT APPARITION du des vapeurs d'acide INFLAMMA- ; papier hypoazotique TION Poudre à l4 nitro- = É Re cellulose, . . . LUE 2h00 5h00 Poudre à la nitro- glycérine « s + 030 Ou45! 5b00 Pour rendre les résultats de l'épreuve aussi P. BOURGOIN — L'ÉTUDE DES POUDRES DE GUERRE AU LABORATOIRE soit inférieur à une heure. Les temps successifs probänts que possible, on compare la poudre à étu= dier à une poudre typesimilaire de bonne stabilité. Comme nous l'avons dit précédemment, la tempé-" rature d'épreuve de 135° paraît trop élevée, la durée de l’explosif à cette température n’obéissant plus qu’accidentellement à la loi numériqueénoncée- au début de cette étude. L'appréciation de l'instant du rougissement du papier de tourneso! peut également donner lieu à de fortes divergences, que l’on réduira au minimum en prenant les précautions suivantes : a) Le papier de tournesol sera aussi sensibles que possible et d'une qualité uniforme ; : D) On fera usage d'uneéchellede teintes graduées: c) On aura recours autant que possible à un seul observateur. $ 6. — Épreuve française (ou Vieille) à 110° centi-. grades. Dix grammes de l’explosif étudié sont placés dans un fort tube en verre, ainsi qu'une bande de papier bleu de tournesol. Le tube est ensuite herméti- quement bouché et placé dans une étuve à 410°: on note le temps mis par le papier tournesol pour passer au rouge. Le flacon est alors enlevé de l'étuve et ouvert. On laisse refroidir la poudre pen- dant la nuit et on renouvelle l'opération en prenant un flacon propre et un nouveau papier. On conti-. nue la série des épreuves jusqu'à ce que le temps. nécessaire pour obtenir le rougissement du papier sont alors additionnés et le total obtenu ne doit pas être inférieur à un chiffre variable suivant l'épaisseur de la poudre. © L'épreuve n'est pas applicable aux poudres à la nitroglycérine; sa bonne exécution exige, en outre, la stricte observation des précautions indi- quées précédemment pour l'emploi du papier de tournesol. De plus, et bien que fournissant une limite inférieure précise de l'existence de l'explo- sif, elle doit être complétée par la mesure du coef- ficient défini par une durée et une température de chauffage déterminées, si l'on veut avoir une. idée äpprochée des variations balistiques éprou- vées par la poudre après sa mise en service. $ 7. — Épreuve américaine à 115° centigrades. L'épreuve porte sur quatre échantillons. Ceux-ci. sont pesés sur un verre de montre et chauffés pen- dant huit heures dans une étuve à air réglée à la température de 115°C. (+0°,5). L’échantillon est alors enlevé, mis à refroidir dans un dessécheur et pesé. è Cette opération est renouvelée pendant six jours. A la fin de cette ren la RER de poids ne doit. pas excéder 8 ° P. BOURGOIN — L'ÉTUDE DES POUDRES DE GUERRE AU LABORATOIRE 107 : Les résultats obtenus servent à construire la courbe définissant le coefficient 1. L'étuve à air employée pour le chauflage est à double enceinte (fig. 20). L'étuve proprement dite ou four est constiluée par des feuilles de cuivre; son fonds inférieur a la forme d’un V dans le but de prévenir les bosselages. Extérieurement à ses parois, Le four est entouré sur les 2/3 de sa hau- teur par un bain constitué par un mélange de xylène et de toluène en proportions telles que l'ébullition du liquide maintienne l’intérieur du four Fig. 20. — Ætuve pour l'épreuve à 1150. — à, mélange de toluène et de xylène. à la température de 115°. Un condenseur à reflux empêche l’évaporation du xylène et du toluène. La température de 115° n’a d’ailleurs pas été adoptée au hasard; elle résulte de nombreuses expériences comparatives qui ont montré que cette température était oplima au point de vue de la différenciation entre les tracés afférents à, une bonne et à une mauvaise poudre. En plaçant les échantillons dans des boîtes sou- dées, on obtient des résultats qui montrent nette- ment que ce dispositiféquivaut, toutes choseségales d’ailleurs, à une augmentation de la température de l'épreuve. L'épreuve précédente est complétée par une épreuve dile de fragilité, cette dernière propriété étant, non sans raison, considérée parles Etats-Unis comme une source de dangers, puisqu'elle résulte d’une perte notable de dissolvant. Nous ne sommes toutefois pas renseigné sur la corrélation qu'on à pu établir en Amérique entre la stabilité et la fra- gilité, si toutefois il existe une relation numérique entre ces deux caractérisques d'une poudre. Quoi qu'il en soit de ces considérations, l'épreuve de fragilité s'exécute de la manière suivante: On choisit, dans la poudre en essai, 10 grains‘ de poudre dont on coupe les deux extrémités perpen- diculairement à la longueur, de manière que, l'opé- ration terminée, leur longueur soit égale à leur dia- mètre. On comprime ensuite lentement les grains entre des surfaces parallèles jusqu'à production de fentes. La diminution de hauteur éprouvée par le grain à cet instant est exprimée en pourcentage de la longueur primitive; la moyenne des 10 mesures ne doit pas être inférieure à 45°/,. Les bonnes poudres donnent plus de 50°/,. III. — ETUDE DES PHÉNOMÈNES D'ÉROSION. $ 1. — Historique de la question. Les phénomènes d'érosion de l'âme des bouches à feu ont été observés depuis longtemps déjà : c’est ainsi que la mise hors de service des anciens canons bouchés résultait généralement des dégradations du grain de lumière dues à cette cause. Toutefois, l'artillerie n'a commencé à se préoccuper sérieuse- ment de leur influence destructive que lors de l'apparition, d'ailleurs presque simultanée, du for- cement par la ceinture et de l'emploi des gros calibres (1870). L'usage des poudres prismatiques brunes, pen- dant la courte période qui s'étend de 4880 à 1890, miten évidence leur pouvoir érosif considérable, et, à cet égard, la mise en service des poudres col- loïdales à base de nitrocellulose pure réalisa un véritable progrès. Il n'en est d'ailleurs pas de même de toutes les poudres colloïdales, et celles à base de nitroglycé- rine sont particulièrement offensives pour les bouches à feu, à tel point que, dans certains tirs, on voit l'usure de l'arme s’accentuer nettement à chaque coup. Pour remédier à des effets destruc- teurs aussi rapides, plusieurs artilleries ont dû renoncer à l'usage des poudres en question, malgré leur supériorité balistique incontestable. En Angleterre, où elles sont encore en usage, on à 1 Les poudres de guerre en usage aux Etats-Unis sont des poudres à base de nitrocellulose gélafinisées par l'acé- tone. Elles ont la forme de cylindres faiblement allongés et percés de canaux parallèles à l'axe. Le chiffre de 8 9/0 donné plus haut pour la perte de poids maxima à l'épreuve de 115° C. dénote un faible séchage ; de telles poudres doi- vent éprouver de grandes variations balistiques en service. 18 P. BOURGOIN — L'ÉTUDE DES POUDRES DE GUERRE AU LABORATOIRE atténué leurs effets d’érosion en leur incorporant une certaine quantité de vaseline, et l’on a par ce moyen obtenu le résultat cherché ; mais, du même coup, on a également diminué la puissance balis- tique de l’explosif. Le pouvoir érosif des poudres ainsi modifiées FBCRTEMANS del. Fig. 21. — Appareil Vieille pour l'élude des phénomènes d'érosion. — À, bouchon pour la mise de feu: a, a, fils de fer fins: b, b, obturateur en cuivre rouge: B. bouchon renfermant le manomètre: C. bouchon renfermant le grain métallique, {cordites MD) est d’ailleurs encore resté très supé- rieur à celui des poudres à la nitrocellulose pure (poudres américaine, allemande, francaise, russe), et l’on a prévu, dans la Marine anglaise, la possi- bilité du rempla- vel’ et deSir A. Noble”, en Angleterre, ont d'ailleurs pleinement confirmé les résullats oblenus par notre éminent compatriote. : Le principe des appareils employés par ces divers savants est d'ailleurs identique : ils consistent essentiellement en un bloc d'acier très résistant. fermé par un bouchon porlantune ouverture étroite d'une longueur et d'un diamètre déterminés, par laquelle s'écoulent les gaz à haule température provenant de la combustion de l’explosif. Le bouchon est pesé avant et après l'expérience. La perte de poids constatée mesure l'effet érosif correspondant aux conditions de l'expérience. Voici, d'ailleurs, la description donnée par M. Vieille de l'appareil employé par lui dans ses expériences ‘. $ 2. — Appareil Vieille. Il consiste en une chambre en acier munie de trois tubulures (fig. 21), fermées chacune par un bouchon en acier. Le bouchon A, qui sert à la mise de feu, est percé d'un canal co- nique s'évasant cement des tu- bes des canons vers l'intérieur, de douze pouces dans lequel s'en- gage un piston dans le cours exactement rodé d'une guerre. Quoi qu'il en formant clapet et soit des avantla- isolé par de la ges et des incon- gomme laque. Ce piston constitue, vénients respec- tifs des diverses avec le corps du bouchon, partie poudres actuel- lement en usage, Pressions en Aémesphères d'un circuit élec- ce n'est que tout trique compre- Erosion en cent: cuber pant un fil de fer récemment que fin aa traversan! l'étude des phé- nomèênes d'éro- une pelile amor- sion a été abor- ce de poudre de dée d'une ma- Densités de chargement iè stéma- : ne È : c PILE JE EmA Fig. 22. — Ærosions comparatives produites par la cordite et par la poudre tique. tubulaire à la nitrocellulose de Rottweil. Les premiers travaux sur la question sont dus à Daubrée*, dont les expériences avaient pour but la recherche des causes de la formation des cheminées dia- mantifères de l'Afrique du Sud; toutefois, c'est M. Vieille* qui, le premier, a mis en évidence le rôle prépondérant que joue, dans les phéno- mènes de ce genre, la lempérature de combus- tion de l'explosif. Les travaux récents de Peta- 4 C. R. de l'Acad. des Sc., 24 novembre 1890. 2 Vrerze: Etude sur Jes phénomènes d érosion. lPoudres et Salpêtres, 1. XI. M. des chasse extra- fine, que le pas- sage du courant dans le circuit permet d'enflammer. Le joint du bouchon A avec la chambre est assuré par l'obturateur en cuivre rouge bb. Le bouchon B renferme un manomètre à écrase- ment ou à ressort, et la tête du piston qui transmet la pression des gaz est munie d’une plume en acier qui inscrit son déplacement sur un cylindre tour- Peppers del. ‘ La pression des explosions. l’hilosophical Transactions, série A, 1905. 2? Recherches sur les explosifs. Zbid., série À, 4905. M. des Poudres et Salpôtres, t. XI, p. 167. A" HECTOR PÉCHEUX — CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES ALLIAGES DE L'ALUMINIUM 109 nant, dont on connâäit la loi de rotation en font- tion du temps par un procédé identique à celui qui a été décrit précédemment (manomètre enre- gistreur). On obtient donc ainsi la loi du dévelop- | pement des pressions à l'intérieur de l'appareil, en fonction du temps. Le troisième bouchon C recoit le grain métallique, percé d’un canal axial de 1 millimètre de diamètre par lequel s'écoulent les gaz produits par la com- | bustion de l’explosif. L'obturation du joint du bou- chon Cet de l'appareil est assurée comme plus haut. Le bouchon C qui portele grain est percé lui-même d'un large canal de 10 millimètres de diamètre, assurant un facile écoulement aux gaz ayant tra- versé le grain. Le volume intérieur de ce Lype d'appareil est de 17,8 c. c.; on y brûle des charges explosives dont | le poids est compris entre 3 gr. 5 et 10 grammes. Vieille a d'ailleurs employé des éprouvettes cylin- driques de 75 et 340 centimètres cubes de capacité intérieure. Ces dernières n'avaient que deux tubu- lures, dont l’une servait à la mise de feu et l'autre à l'installation du grain de fuite; on y brülait des charges respectivement cinq et vingt fois plus con- | sidérables que celles comburées dans l'appareil de 17,8 c. c. $ 3. — Mesure des érosions. Le grain métallique à travers lequel s'écoulent les gaz pèse 135 grammes avant l'expérience. Il est pesé au milligramme à la balance de précision; après l'explosion, il est essuyé et pesé de nouveau avec la même précision. Suivant les métaux cons- tituant le grain, on a observé des différences de poids variant de Ogre. 150 à 8 ou 9 grammes. Dans tous les cas, l’approximation obtenue était supé- rieure au 1/100. L'érosion volumétrique était déduite de la précé- dente; dans quelques cas, on l'a cependant évaluée directement par un jaugeage au mercure du canal de fuite opéré avant et après l’explosion. Pour donner au lecteur une idée de la différence des pouvoirs érosifs des poudres à la nitrogly- cérine (cordite MD) et à la nitrocellulose (poudre allemande de Rottweill), nous donnons ci-contre un graphique obtenu parSir A. Noble et relatif aux pouvoirs érosifs de ces deux poudres en fonction des charges et des pressions enregistrées (fig. 22). Le rapprochement fait nettement ressortir l'in- dépendance du pouvoir érosif et de la pression. P. Bourgoin, Chef d'escadron d'Artillerie coloniale. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES ALLIAGES DE L'ALUMINIUM Les alliages que donne l'aluminium avec les mé- taux usuels (fer, argent, or, étain, zinc et cuivre) ont été obtenus pour la première fois par H.Sainte- Claire Deville (en 1854), et ensuite par Ch. et Al. Teissier, par mélange direct des métaux compo- sants. Plus tard, on put les préparer en réduisant par un excès d'aluminium les oxydes des métaux en question, réduclion facililée par la grande cha- leur de combustion de ce métal : l'excès d’alumi- nium se combinant au métal mis en liberté. C'est le principe de l’a/uminothermie, appliqué en grand par Goldschmit d’abord, puis par M. L. Guillet, en 1901, lequel a pu réaliser les alliages de l’alu- minium avec les métaux : cuivre, nickel, fer, man- ganèse, chrome, titane, tungstène, molybdène, uranium, étain et antimoine. La préparation des alliages de l'aluminium avec les métaux industriels (cuivre, fer, nickel, tung- stène, manganèse) est réalisée couramment, aujour- d'hui, au four électrique; par la méthode électro- thermique, depuis les travaux de MM. Cowles (1883), Héroult (1886) et Moissan (1895), ces alliages rece- vant des applications métallurgiques intéressantes (fabricalion des aciers spéciaux, des bronzes, ete.). Nous nous sommes proposé, en 190%, de préparer quelques alliages de l'aluminium avec les métaux facilement fusibles : plomb, étain, zinc, bismuth, antimoine et magnésium, afin d'étudier eénsuile, si possible, leurs propriétés physiques et électri- ques essentielles, et quelques-unes de leurs pro- priétés chimiques”. I. — PRÉPARATION. Nous avons pu obtenir un certain nombre de ces alliages par mélange direct des deux métaux fondus au creuset de terre réfractaire : dans le bain d’alu- minium fondu, on projette le métal à allier, qui fond assez vite, et on agite le mélange obtenu, que l’on recouvre de poussier de charbon afin d'éviter l'oxydation, et que l’on coule en baguettes cylin- driques, dans des moules en sable gras d'étuve. Le mélange dés métaux n'est difficultueux que dans ‘ Les alliages de l'aluminium avec le zinc et l'étain, el avec le magnésium et l'antimoine, ont été éludiés avant nous au point de vue de la fusibilité, et comme il sera indiqué plus loin. Seuls, ceux de plomb ou de bismuth avec l'aluminium ne l'ont pas été avant, à notre connaissance. 110 HECTOR PÉCHEUX — CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES ALLIAGES DE L'ALUMINIUM le cas du zinc : la grande chaleur latente de fusion de ce métal (28,13 calories) produisant, dès quil vient de fondre au contact de l'aluminium liquide, une solidification de toute la masse, il faut donner un coup de feu, et les deux métaux fondent à nou- veau, en se mélangeant aisément, et dans toutes les proportions. 1 est tout aussi aisé d'obtenir des mélanges de l'aluminium avec l’étain (en toutes pro- portions). Ceux que fournissent le plomb, l'antimoine, le bismuth et le magnésium sont plus difficiles à obtenir, et donnent lieu aux remarques suivantes : Les alliages avec le p/omb ne paraissent possibles qu’à partir de la teneur de 90°/, en aluminium, sans doute à cause de la grande différence de densité entre ces deux métaux ; — et encore faut- il porter le bain d'aluminium vers 800° ou 850”, au moment d'y projeter le plomb, et agiter le mé- lange (à l'aide d'une baguette de fer) immédiate- ment avant de le couler, pour éviter la liquation; nous avons eu ainsi trois alliages, à 92 °/,, 94°/,, et 96 ‘/, d'aluminium; — d'ailleurs, ce ne sont là que de simples mélanges, mal définis; car, si on les refond, et qu'on les coule de nouveau, leur titre diminue légèrement en aluminium : il se produit une liquation. Avec l'antimoine, la série restreinte d'alliages obtenus par nous s'explique par les points de fu- sion des dits alliages, — points de fusion déter- minés par M.H. Gauthier en 1901 : notre creu- set ne pouvant dépasser la lempérature de 850°, il nous a été impossible d'obtenir, par mélange direct, d’autres alliages que ceux-ci : SbAÏ" (à 87,5 °/, d'aluminium), SbAl"® (à 89 °/,), SbAI* (à (] 89,8 °/.),et SbAl*° (à 90,3 °/.). M. Van Aubel (1895) a obtenu SLA (à 19,4 °/, d'aluminium), fondant à 1.080° ; M. . Gauthier a obtenu (1901) les alliages : à 48 °/, d'Al (fondant à 970°), à 89°/, (fondant à 800°) et à 91 °/, (fondant à 734°) : les points de fu- sion baissent avec la {eneur en antimoine (ce métal fond sensiblement à la même température que l'aluminium). M. L. Guillet a obtenu, en 1902, les alliages défi- nis : SbAl, SbAÏ, SbAÏ', SbAl!°, « lesquels, dit-il, deviennent vite pulvérulents à l'air, et donnent une poussièrenoirätre ». Nos 4 alliages, de titres voisins (entre 87,5 °/, et 90,3 °/.), se comportent très bien : après deux ans et demi, ils ont conservé la méme densité, le même aspect extérieur, et la même fénacité. — Nous avons constaté, en coulant l’alliage fondu dans le moule en sable, qu'il est très difficile d'obtenir des ba- guettes homogènes avec un diamètre inférieur à 6 millimètres : le moulage est impossible avec une section moindre, l’alliage devenant très vite päteux à la coulée (effet de capillarité, évidemment). Le bismuth (le métalle plus dense après le plomb, parmi les six employés par nous) donne lieu égale- ment à certaines difficultés : il est impossible d'obtenir un alliage homogène, et sans liquation, à moins de 70°/, d'aluminium; il faut agiter con- venablement le mélange des deux métaux, avant de couler; nous avons obtenu quatre alliages à 15°/,, 85 °/,, 88 °/,, et 94 °/, d'aluminium, bien homo- gènes. | La très faible densité du magnésium rend très difficile le mélange de ce métal avec l'aluminium; de plus, la très grande chaleur spécifique (0 cal. 245) du premier rend sa fusiou difficile; enfin, la faci- lité avec laquelle brûle le magnésium au contact de l'air, quand il arrive à une température voisine du rouge naissant, oblige, si l'on veut obtenir le mélange des deux métaux fondus, à maintenir le second au milieu de l'aluminium fondu, à l'aide d'une baguette de fer, et à agiter le mélange avant de le couler: sans cette précaution, le magnésium forme, à la surface de l'aluminium, une sorte d'éponge qui s'oppose à la réussite de l'alliage. Nous avons pu couler les alliages obtenus en baguettes de 9 à 10 millimètres de diamètre; l’état pâteux de l’alliage fondu (de consistance analogue à celle du verre fondu) ne permet pas de couler en baguettes plus minces. Il nous a été impossible d'obtenir des mélanges à moins de 65 °/, d’alumi- nium. — M. O. Boudouard a oblenu en 1901” 3 alliages bien définis, cristallisés, à 54°/,, 70 °/, et 81 °/, d'aluminium ; mais il chauffait les deux métaux dans un tube vide et scellé, ce qui explique la formation de l’alliage à 54°/,: ce dernier, d’ail- leurs, est instable, et s’altère au bout de quelque temps d'exposition à l'air. Nous avons obtenu, quant à nous, à alliages, à COL GS man) beta ee IT. — COULEUR; STRUCTURE. Tous les alliages obtenus présentent une couleur rappelant celle de l'aluminium pour ceux à grande teneur en aluminium (alliages du plomb, de l'an- | timoine et du magnésium). - Les alliages avec le zine° sont : gris-bleu (Zn'Al, Zn’Al, ZnAl); blancs (ZnAP, ZnAl, ZnAl', ZnAl', ZaAl",ZnAl®);les trois premiers sont peu sonores; ils sont tous cassants ; les six premiers sont durs ; les trois derniers, mous, se plient légèrement et cassent ensuite. La pâte de ces alliages est grenue, à grains fins rappelant ceux de la fonte; quelques lamelles cristallines sont emprisonnées dans la päte des trois premiers. Tous se liment facilement. C. R. Acad. des Sciences, t. CXXXIII, p. 1003. C. R. Ac. des Sc., n° 18: L. CXXXVIIT, mai 1904. dés = HECTOR PÉCHEUX — CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES ALLIAGES DE L'ALUMINIUM 111 Les alliages avec l'éfain (Sn’Al, Sn’Al, Sn'Al, SnAl°) crient comme l’élain, sont cassants, surtout . après plusieurs recuils ; le premier devient même pulvérulent. La pâte de ces alliages est striée, à stries plus fines quand la teneur en aluminium augmente. Ces alliages sont mous, et gras àla lime. Les alliages plomb-aluminium' sont assez cas- sants, à structure grenue, le grain étant plus fin quand la proportion en aluminium augmente ; ils ont la couleur de l’aluminium, avec un peu moins d'éclat. Les alliages avec l’antimoine* sont peu cassants, très malléables, se plient assez bien ; ils se liment difficilement ; le recuit les rend cassants. Leur pâte est grenue et présente une couleur blanc-bleuätre ; on y distingue quelques lamelles cristallines fines. Ils ne deviennent jamais pulvérulents,mème après plusieurs recuits. Les alliages bismuth-aluminium® présentent une couleur blanc-bleuätre, sont assez cassants (à 88 °/, et à 94 °/,), plient à 120° environ. La pâte est grenue, à grains serrés, avec quelques lamelles cristallines dans les deux premiers alliages. Tous se liment bien etsont assez malléables. Les alliages avec le magnésium” ont une couleur blanc d'argent; ils sont très durs et très cassants, prennent un beau poli par la lime; la pâte est grenue, à grains serrés, blanche dans les alliages à 66 °/, et à 68 °/,, bleuâtre dans les trois autres ; ils sont peu malléables. IIT. — DENSITÉS ; CHALEURS SPÉCIFIQUES ; POINTS DE FUSION. $ 1. — Densités. Nous avons déterminé la densité de nos alliages par la méthode de la balance hydrosiatique (sen- sible au centigramme), et avec la double pesée ; — en général, la densité trouvée est inlérieure à la densité théorique (cas des alliages avec le zinc : 4 sur 9; avec l’étain : 3 sur 4; avec le plomb, le bismuth et l’anlimoine, qui augmentent de volume en se solidifiant) ; pour les alliages avec le magné- sium, au contraire, la densité trouvée est supé- rieure : il y à une légère contraction à la solidifi- cation. $ 2. — Chaleurs spécifiques. Elles ont été déterminées à l’aide du calorimètre à eau, en laiton argenté el poli, à double enveloppe, isolé à l’ouate. Le thermomètre calorimétrique employé était divisé en 1/50 de degré (pouvant donner le 1/100 de degré, par conséquent). 1 C. R. Ac. des Sc., n° 17, t. CXXX VIII, avril 1904, ? C. R. Ac. des Sc., n° 25; t. CXXXVIIL, juin 1904. C. R. Ac. des Se., n° 24; {. CXXXVIII, juin 1904. C. R. Ac. des Sc., nos 2% et 25; &. CXXXVIII, juin 1904. Les alliages étaient portés à 100° (étuve à air, chauffée extérieurementà la vapeur, dont la tempé - rature était évaluée au 1/5 de degré); la correction due au refroidissement était rendue négligeable par l'emploi d’un calorimètre à capacité voisine de 500, l'expérience durant une minute au maximum, et la différence des températures au calorimètre étant inférieure à 1°". Dans toutes nos expériences, le thermomètre calorimétrique,; une fois arrivé à la température d'équilibre, y demeurait 1/4 d'heure environ, sans variation ; le laboratoire, bien abrité, fournissait une température sensiblement constante pendant une mesure. Nous avons pu vérifier dans quelles limites nos alliages suivaient la loi de Regnault et Woestyn : Pa X e = c*, p, étant le poids atomique moyen de chaque alliage. — Sauf pour les alliages bismuth- Il 5 P 5 aluminium, qui donnent un produit un peu élevé, ainsi que deux alliages d’antimoine-aluminium, le produit obtenu est très voisin du nombre 6; il est compris entre 5,9 et6,3. — Il faut noter la constance de ce produit pour les alliages du magnésium, sauf le plus riche en aluminium. $ 3. — Points de fusion. Nous avons déterminé les points de fusion de nos alliages à l'aide des pyromètres platine-pla- tine iridié (à 10 °/, d'iridium), et cuivre-nickel (métaux purs). Ces pyromètres ont élé construits spécialement par nous, pour celte détermination. La soudure chaude à été obtenue au chalumeau ; les fils, isolés à l’aide de rubans de coton bitumé, étaient disposés sans torsion dans un tuyau de terre de pipe. Chacun des pyromètres était relié à un galva- nomètre Deprez-d'Arsonval (de E. Ducretet), par l'intermédiaire d'une résistance appropriée; le galvanomètre, gradué en microvolts, donnait la température cherchée par une lecture sur une règle transparente, où une division valait 100 micro- volts, et à l’aide d’une table construite à cet effet. Le bout du tube en terre de pipe était dans le bain d'alliage; l'observation de l'arrêt de la tache lumi- neuse sur la règle permettait la lecture de la tem- pérature de solidification, par l'intermédiaire de la table. Nous avons opéré avec deux pyromèlres, et nous estimons que, dans les conditions où ils fonction- nent tous deux, le pyromètre nickel-cuivre donne des résultats plus approchés”; aussi les chiffres ! Indications fournies par M. Berthelot, Journ. de Phye. théorique et appliquée, 1812, p. 284. 2 C, R. Ac. des Sc., n° 10; t. CXLHII, septembre 1906; et Traité de Mesures électriques, par H, Pécheux, chez JB, Baillière, Paris, 112 HECTOR PÉCHEUX — CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES ALLIAGES DE L'ALUMINIUM adoptés sont-ils ceux que nous à fournis ce pyro- mètre. M. H. Gautier, en 1901, a déterminé les points de fusion des alliages de l'aluminium avec le zinc, l'élain, l'antimoine; M. O. Boudouard, en 1901, a déterminé les points de fusion de quelques alliages de magnésium-aluminium. Ceux des allia- ges du plomb et du bismuth avec l'aluminium l'ont été exclusivement par nous. Pour les alliages de l'étain et du zinc, le point de fusion est intermédiaire entre ceux des métaux composants. Pour les alliages du plomb, du bis- mutb, de l’antimoine, le point de fusion est plus élevé que celui du moins fusible des deux métaux, et d'autant plus qu’il y a plus du métal le plus fusible; — pour ceux du magnésium, les points de fusion, sont moins élevés que ceux du magnésium et de l'aluminium. POINTS DE FUSION ALLIAGES en degrés PAS RE RE PO RE NE ON TO + ED PAU RMS MER PE CE SLR UT OAI ee A 425 PA CNE EE EE EE CES 0 PANNES REP Sen A ENRe D are Re Oo MR ATP, ten See et loi D ENT) ARABE TETE ee DE CET A APARIE RO BD ALT RENE Se PE afin cs udalie 00 ZnAl:°. HSE A STE PE PE 427 2000 FAN SR AS SE D Te 610 SU LR EE PRE nt des» CE 120 Sn'Al HORS TALOS CU EM TE à PUS NL ES D SNAATME EE LCR SANTE En CNRS RAS 530 SDAL RS: Er er i s 10 CUT 570 PDA AO OC ANATIEERE RE EN RER 645 PAL (à 94 ol d'Al). .. . . . . 652 PAT ÉGA0G 10 /GTEAT) STE EE NERE 635 719 674 AI (à S8 0/5 d’ 1-1 60E BAT (a 90) CAN EE PRG SD SBALOS PRE Res 740 SOA RE ET A ARS 725 SbAÏS .:, NUE des D AN 120 DDASS ee ct 2 A TA 0 MgAl (à 66 0/0 d'Al) : à... | 420 MPAL (068 CS AL) EN A) MrAMN(Q 80 / ON ATEN 458 MESA 100 LATIN ME RE 480 MBAl(R S510/CDALE 565 AUDE AUS NN SERRES 630 EV. — RÉSISTIVITÉS ET THERMO-ÉLECTRICITÉ. $ 1. — Resistivites. La résislivité (résistance spécifique rapportée à 1 centimètre de longueur et 1 centimètre carré de section droite) des baguettes d'alliages a été évaluée au pont de W”. Thomson (lord Kelvin), élant donnée la très faible résistance de ces baguettes (inférieure à 1/1.000 d'ohm). Nous avons mesuré ainsi les résistances de chacune de nos baguettes à deux températures bien repérées, et nous en avons du magnésium et de l’antimoine), ou qu’elle est déduit ensuite, par le caleul, la résistivité 9, à 0°, et le coefficient de température 4 (un seul suffit pour les alliages), tous deux étantexprimés en microhms- centimètres: chaque résultat a été évalué à moins de 1/10 près. Les résultats obtenus sont consignés. dans le tableau I ci-après, et donnent lieu aux remarques suivantes : 1° La résistivité est intermédiaire entre celles des métaux composants, dans les alliages du plomb, du bismuth, de l’anlimoine ; elle est plus rappro- chée de celle de l'aluminium (9, — 3 microhms 2) dans les deux premières séries, et de celle de l'an- timoine, dans la troisièmesérie ; — les résistivités du plomb, du bismuth, de l’antimoine sont très éloignées de celle de l'aluminium; 2° Elle est supérieure à celle du métal le plus ré- sistant dans les étain-aluminium, zinc-aluminium (sauf le dernier alliage de cette série) et magnésium aluminium. Il-est à noter que les résistivités : du zinc (8 microhms 10), de l’étain (14 microhms), du magnésium (5 microhms) sont plus rapprochées de celle de l'aluminium; 3° Le coefficient de température — sauf pour les alliages à résistivité intermédiaire — est d'autant plus faible que la résistivilé est plus élevée (alliages moins élevée, au contraire (alliages de l’étain). (Conclusions analogues à celles de Mathiessen et Dewar et Flemming sur les alliages); 4 Des recuits successifs augmentent la résisli- vité des alliages du plomb et de l’étain (ces der- niers se modifient profondément, et deviennent cassanis); ils ne la modifient pas sensiblement dans les alliages du magnésium, de l'antimoine et du zinc ; 5° Le grand écart entre certaines résistivités, dans une même série, est l'indice d'une faible homogé- néité pour l’alliage très résistant (cas de : SbAl” et des magnésium-aluminium à 66 °/,; et à 68°/, d'aluminium); | 6° Les résistivilés des alliages de zinc passent par un minimum, puis par un MAXIMUM, UN NOU- veau minimum, un second maximum, et décrois- sent ensuite d'une facon continue. (Résultals ana- logues à ceux qui donnent les alliages de. l’alumi- nium avec le cuivre.) Les autres alliages se com= portent de facon analogue, mais avec des écarts plus grands (sauf ceux de l’éfain et du hismuth). $ 2. — Thermo-électricité. Chaque baguelte d’alliage formail, avec un fil de cuivre pur, un couple thermo-électrique, relié à un galvanomètre de W. Thomson gradué en micro- volts. La soudure chaude était portée à des lempé- ratures croissant jusqu'à 380° (huile de lin bouil= lante). Nous donnons, dans le lableau Suivant, et à" Lo HECTOR PÉCHEUX — CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES ALLIAGES DE L'ALUMINIUM 115 litre d'indications, les pouvoirs thermo-électriques £ de ces couples, à {00°; ils sont extraits du tableau des forces électromotrices qui figure aux Comptes Rendus de l'Académie des Sciences (E. GXXXIX, Décembre 1904, n° 26). L'étude de l'allure des courbes des f. 6. m. thermo-électriques relevées donne lieu aux obser- vations suivantes : 1° Ces courbes sont formées de portions de TABLEAU |. — Résistivité et pouvoir thermo-électrique . des alliages d'Al. POUVOIR THERMO-ÉLEC- TRIQUE a 4o0e a ae) à 1 RÉSISTIVITÉ à 0° ALLIAGES ———— ZHPAIl". 7. Zn°AI . ZnAI . NA . PDAs. | ADAlRS.. ZnAlS FIN ECS PHASE 0,0007 0,0005 0 ,0007 0 ,0006 0 ,0004 0 ,0002 0.000 0,000 0 ,0003 D © & 1) 0: 19 © © cote ICO NE 19 1 07 DNONNDeæ==zSe IN © ce SAS SAIS SUAIrON SAIS . . 0,000% 0.000 0 ,0003 0.0002 à 92 % d'AL. PbAI < à 94 % d'AI. à96 %'d'AI. 0,0001 0,0002 0,0001 à 15 % d’AI. à 85 % d'A. à 88 % d'AI. à 94 9% d'Al. 0,0006 0,0005 0,0005 0,000 BiAl ADAID Er à SDAIS. . SbAÏS. . ShaAls. 0 ,0002 0.000 0 ,0004 0,0007 à 66% d'AI. à 68% d'AI. D à 13% d'AI. néant néant 0,0006 0,000% 0,0006 à 77% d'Al. à 85% d'Al. courbes très sensiblement paraboliques qui se raccordent à des températures remarquables, les- quelles correspondent à une transformation molé- culaire des alliages; cette transformation a lieu pour tous les alliages, entre 120° et 180°, à une température qui dépend, en général, du point de fusion ; elle est d'autant plus élevée que celui-ci l'est davantage, sauf quelques exceptions ; 2° La présence du silicium dans un alliage (silicium apporté par l'aluminium) relève la tempé- rature de transformation moléculaire, sauf dans les alliages de l'äntimoine avec l'aluminium (ces deux métaux composants ont très sensiblement le même point de fusion) ; 3° Le recuit des alliages relève légèrement les LA f.é. m. de tous les couples, comme d'ailleurs celle du couple formé par l'aluminium coulé et le cuivre ; % Les alliages sont voisins dans la série ther- mo-électrique, quand les métaux composants sont voisins eux-mêmes (cas des alliages du plomb, de l’étain, du bismuth, du magnésium) ; 5° Les alliages des métaux é/oignés dans la série sont très éloignés de l’un des métaux composants (cas des alliages avec le bismuth et l’antimoine). Ces deux dernières conclusions sont conformes à celles de Seebeck, Rollmann, et Becquerel, sur les alliages qu'ils ont étudiés. Le tableau des formules des pouvoirs thermo- électriques des couples formés par ces alliages avec le cuivre, entre la température de la soudure froide (9°,5 ou 17°,5) et la température la plus élevée de la soudure chaude (380°), est exposé au complet dans notre « Traité de mesures électriques et magnétiques », chez J.-B. Baillière, à Paris. V. — PROPRIÉTÉS CHIMIQUES. PROPRIÉTÉS RÉDUCTRICES DES ALLIAGES. En général, l'action des alliages sur les réactifs usuels (acides minéraux, hydrates alcalins, eau régale, acide sulfhydrique) est prévue par celle, qui est connue, des mélaux composants sur les mêmes réactifs. Notons, comme particularités inté- ressantes à retenir, les points suivants : la polasse caustique étendue et froide attaque les alliages suivants plus énergiquement que l'aluminium : plomb-aluminium ; étain-aluminium; zinc-alumi- nium;, bismuth-aluminium ; les antimoine-alumi- nium sont, au contraire, plus faiblement attaqués; par contre, l'acide sulfurique étendu et froid attaque les alliages du bismuth, de l’antimoine, de l'élain, moins énergiquement que l'aluminium; ceux du zinc, au contraire, sont allaqués plus vive- ment. L’acide chlorhydrique les atlaque tous vive- ment à froid, surtout ceux du magnésium, qui pro- jettent des parcelles métalliques incandescentes avec l'acide concentré. L'air sec ou humide n'atlaque, à la température de la coulée, que les alliages du magnésium; l'air humide attaque les alliages d'étain à fa tempéra- ture ordinaire ; les autres sont inox ydables à la tem- pérature ordinaire. Mais l’action chimique intéressante des alliages est celle qu'ils manifestent en présence de l’eau tenant en solulion du chlorure de sodium ou du sulfate de cuivre. a) Solution de chlorure de sodium. — Une ba- guelte, récemment limée, d’alliage d’étain, ou de bismuth, ou de magnésium, immergée dans l’eau distillée ne renfermant que 1 centigr. 7 de chlorure 114 de sodium par litre (eau provenant de la distillation d'une eau riche en chlorures et renfermant 12 cgr. environ par litre), donne lieu à un abondant déga- gement d'hydrogène; un lingot d’alliage de SnA}, de 2 centimètres cubes, nous a fourni entre 5 et 6 centimètres cubes d'hydrogène en vingl minutes; un alliage bismuth-aluminium en donne davan- tage ; les alliages Mg-Al sont encore plus actifs. b) Solution de sulfate de cuivre. — Dans la solu- tion aqueuse du sulfate de cuivre (densité 4,1), la décomposition de l’eau est plus active avec les mêmes alliages, et le sulfate de cuivre est décom- posé en mème temps; l’alliage Bi-Al à 75 °/, d'alu- minium fournit 15 centimètres cubes d'hydrogène en vingt minutes, trois fois plus que l’alliage SnAF de même volume; la décomposition est beaucoup plus énergique avec les Mg-Al, dont les deux métaux composants sont réducteurs énergiques de l’eau. Les alliages Zn-Al, Pb-Al, qui ne décomposent pas l’eau pure à trace de chlorure de sodium, dé- composent celle qui a dissous le sulfate de cuivre. L'eau de la solution de sulfate de zinc(densité : 1,4) n'est décomposée que plus lentement. L'ordre et l’activilé de ces décompositions correspondent bien à l’exothermie des solutions employées : la plus exothermique (SO'Zn) étant plus difficilement décomposable que SO‘Cu, moins exothermique”. Tels sont les résultats purement qualitatifs de ces actions réductrices. Pour nous rendre plus exactement compte de la nature des actions, du rôle joué par chacun des métaux composants pendant les réactions, nous avons opéré comme il suit: Il faut tout d'abord remarquer que l'aluminium limé atlaque à peine les solutions de chlorure de sodiumet de sulfate de cuivre, ef qu'un alliage non limé se comporte de même : l'attaque, très faible au début, s'arrête bientôt. M. Ditte, professeur à la Sorbonne, a montré que la décomposition d’une solution de sulfate de cuivre par l’aluminium s'arrête à cause du poli du métal, et qu'elle reprend par l'introduction, dans la solution, de quelques gouttes de chlorure platini- que : le platine réduit, insoluble dans l'acide sulfu- rique, formant sur l'aluminium un dépôt rugueux facilitant le dégagement de l'hydrogène. Or, un morceau de chacun des alliages que nous avons obtenus avec l'aluminium et le bismuth ou le magnésium, limé sur toute sa surface, donne lieu à une décomposition qui ne s'arrête plus, même sans l'introduction de chlorure de platine, et dans une solution de sulfate de cuivre pur. 11C. R. Ac. des Sc., n° 23: t. CIX, juin 1905. HECTOR PÉCHEUX — CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DES ALLIAGES DE L'ALUMINIUM -de cuivre par l'hydrogène. -proportions, et limés au préalable, donnent lieu Des pesées faites avec soin nous ont permis de constater que, dans l’action des bismulh-aluminium sur la solution de sulfate de cuivre, l'aluminium seul réduit l'eau dissolvante, — en donnant de l'hy- drogène, que nous avons dosé et dont une partie réduit le sulfate de cuivre, et de l'alumine qui se dissout dans l'acide sulfurique rendu libre, — bismuth de l’alliage réduisant, de son côté, une autre portion de sulfate; de sorte qu'il ne se dé gage que la seplième partie environ du poids to tal d'hydrogène réduit; le tube de verre gradué qui recueille cet hydrogène, et au fond duquel s'opèren les réductions, se recouvre d'un dépôt de cuivre pulvérulent jaune, dans le haut du tube (au débul de la réaction), puis rouge vineux, vers la fin, dans le bas de la colonne gazeuse, ce cuivre ayant élé entrainé par l'hydrogène. Est-ce une action catalytique due au cuivre pré: cipité qui facilite la réduction du sulfate par l'excès d'hydrogène, et rend ainsi libre la surface de l'al liage, permettant par suite la continuation de l'a taque? ou est-ce le bismuth rugueux, libre, qui facilite le départ de l'hydrogène ? Avec un morceau de magnésium-aluminium à 85 °/, d'aluminium, les pesées faites montrentque. le dégagement d'hydrogène de l'eau est dû unique ment au magnésium, l'aluminium réduisant tout simplement le sulfate de cuivre : il n'y a pas, em effet, dans ce cas, de dépôt de .cuivre sur le tube ce qui indique bien la non réduction du sulfate Notons qu'un alliage Mg-Al, non limé, à surface polie, etrecuite se recouvre, en dix heures environ d’un dépôt très adhérent et très solide de cuivre rouge. Nous avons obtenu ainsi, au bout de di heures et demie environ, avec l’alliage à 85 °/, d'a luminium, une gaine de cuivre tenace de Om 09 d'épaisseur (mesurée au palmer), et s'en levant très bien à l’aide d’une lame de canif. Enfin, les alliages d’étain-aluminium, en toutes à une décomposition del'eauet du sulfate de cuivre; mais cette décomposition s'arrête bientôt, Je couche d'alumine qui demeure adhérente à la su face des alliages étant znsoluble dans ce cas*. Les autres alliages de l'aluminium ne donner pas lieu à une décomposition sensible; ils se comportent moins énergiquement encore que les étain-aluminium. Hector Pécheux, Professeur d'Electricité et de Chimie à l'Ecole nationale d'Arts et Métiers d'A * ‘ Pour plus de détails, voir C. À. Ac. des Sc; n°10 {. CXLII, mars 1906. D: G.-S. HIRST — LA MORTALITÉ TUBERCULEUSE AUX ANTILLES LA MORTALITÉ TUBERCULEUSE CHEZ LES BLANCS, LES GENS DE COULEUR ET La question des rapports de la tuberculose pul- monaire avec la race a été encore peu étudiée ; ayant eu l’occasion de recueillir sur ce sujet des obser- vations statistiques précises dans une région bien délimitée des Antilles, où des sujets de races blanche et nègre et les produits de leur mélange vivent depuis de longues années dans un même milieu, il m'a paru intéressant de résumer briève- ment les résultats obtenus. Les Iles Turques et Caïques, dépendances de la colonie anglaise de la Jamaïque, ne sont peuplées que depuis une période d'environ 250 ans. Dans quelques-unes des îles formant le groupe des Caïques, on a retrouvé, il est vrai, à plusieurs reprises, des restes d'habitations caraïbes ; mais ces Indiens étaient morts ou avaient émigré dans d'autres îles bien avant que les ancêtres des habi- tants actuels eussent pris possession du sol. La population actuelle (qui comple un peu plus de 5.000 âmes) peut être divisée en trois classes : les blancs, les noirs et les gens de couleur !. La population blanche descend en grande partie d’émigrants anglais des Bermudes et de loyalistes des États-Unis du sud qui quiltèrent leur pays pen- dant la Guerre de l'Indépendance. Le reste (qui n'est qu'une petite minorité) descend de marins qui naufragèrent sur les côtes ou qui, après avoir visité les iles, décidèrent de venir s'y établir. En somme, les blanes sont de souche anglaise. Ils vin- rent pour travailler aux marais salants, qu'exploi- tent encore aujourd'hui leurs descendants. Pour l'exécution de ce travail, ils amenèrent avec eux des esclaves noirs, hommes et femmes. La population noire actuelle descend de ces esclaves, ou d'autres qui naufragèrent sur ces îles au cours des voyages des navires négriers de l'Afrique occidentale à Cuba et qui furent réclamés par les propriétaires blancs de marais salants. La population noire est donc d’origine purement afri- caine. La population de couleur provient de l'union des blancs et des noirs et peut donc être considérée comme possédant, à des degrés divers, du sang européen et du sang africain. Cette classe présente ! Dans les deux Amériques, ce terme sert communément à désigner les divers métis nés de la fusion des deux races blanche et nègre. LES NÈGRES AUX ANTILLES presque tous les degrés de coloration, et il peul arriver qu'une personne de couleur soit prise pour un Européen qui a résidé pendant plusieurs années sous les tropiques. J'ai été frappé, non seulement dans ces iles, mais dans d'autres parties du monde, du trait particulier suivant que présen- tent les rejetons de parents colorés : les mäles sont invariablement plus foncés que les femelles; dans quelques cas, la différence de coloration est si pro- noncée qu'on est étonné de se trouver en présence de descendants des mêmes parents. Je souligne ce fait, car l’on verra, par l'examen du tableau qui suit, que la mortalité par tuberculose chez les femmes de couleur est double de celle des hommes de couleur. On verra également que, tandis que cette classe de la population augmente constam- ment, les blancs et les noirs sont en décroissance. II Quels sont les us et coutumes de la population qui nous intéresse? Tous les habitants, blancs, gens de couleur et noirs, sont, en général, calmes, sobres et satisfaits. À l’exception de la classe mar- chande, la population parait n'avoir aucun souci, ni rien qui puisse l'agiler. Elle vitsurtout d'aliments farineux, mangeant rarement de la viande fraiche, à laquelle elle préfère la viande salée, L'instruction est obligatoire jusqu'à treize ans, et la plupart des gens savent lire et écrire. Les gens de couleur, en général, sont plus intel- ligents, vivent dans de meilleures habitations et sont plus prospères que les noirs. Il est donc d'autant plus étrange qu'ils soient les principales victimes de la tuberculose. Les noirs habitent de petites cases en bois el vivent dans une sainte terreur de ce qu'ils appellent « l'air de la nuit ». En conséquence, aussitôt que la nuit commence à tomber, ils dépensent beaucoup de travail et d'ingéniosité pour calfeutrer leurs huttes et exclure toute trace possible d'air frais. Si les noirs pouvaient être amenés à comprendre la folie de cette coutume, je pense que leur mortalité par la phtisie diminuerait rapidement; mais, jusqu'à présent, à l'exception de quelques individus intel- ligents, la doctrine de l'air frais après le coucher du soleil est un cauchemar pour eux. Quand un cas de phtisie se produit dans une telle hutte, il est dif- ficile de concevoir comment les autres occupants peuvent échapper à la maladie. Leurs cases, 116 D' G.-S. HIRST — LA MORTALITÉ TUBERCULEUSE AUX ANTILLES d'ailleurs, quoique fort séparées les unes des autres, sont surpeuplées la nuil : un homme, sa femme, six ou sept enfants, et quelquefois trois ou quatre autres parents dormiront dans une petite hutte à peine assez large pour loger une vache. Les biancs, en général, sont bien logés et paraissent heureux. Quelques-uns ont le bénéfice d'une bonne instruction, mais la majorité ont seu- lement recu l'instruction que les iles peuvent fournir. Leur nourriture diffère peu de celle du reste de la communauté : ils mangent peu de viande fraiche et subsistent principalement d'ali- ments farineux. A l'exception de quelques fonc- Tagceau |. — Mortalité tuberculeuse moyenne des diverses races aux Iles Turques et Caïques pendant la période 1891-1905. POPULATION ANNUELLE MOYENNE LOCALITÉS COULEUR nité de se reproduire et de prospérer, ils s'étonne= raient que les cas de tuberculose ne soient pas plus nombreux. } _En ce qui concerne la population de couleur, je pense que le terrain hérité de l'ancêtre blanc es dans la plupart des cas, une cause propice à la croi sance du bacille. Dans cette classe, hommes € femmes sont minces et de petite taille, et paraissen! particulièrement exposés aux maladies de toute nature. On sait que les mariages entre consanguins produisent ces caractéristiques, mais ce ne peut être le cas entre blancs et noirs. J'ai noté le même fait chez des Asiatiques et en Afrique, où, comme MORTALITÉ TUBERCULEUSE AGE MOYEN DES DÉCÉDES # 1891-1901! 1901-1605 1891-1901 Blanes. . .| 55 62,50) ee il. 3 Cokburn De coulezr.| 205 2760) EF. 5 9 1 Harbour. rase L 0 (OMAAGNE Noirs . 384 400 TC: 13 } MTotileee 611 158.5 | 23 | 1901-1905 1891-1901 1901-1905 F0! B Lr. 0 { 29 Le. : ‘ 0 18 0 Mes ia nel as | 25 ER | m | Blancs. . . 18 45 } l ° De couleur.| 190 229 } Salt Cav. 1 Noirs . . .| 260 DUT Total . 468 445 | tionnaires du Gouvernement, ils sont tous engagés, directement ou indirectement, dans l'extraction du sel. III Comment la tuberculose a-t-elle été introduite dans ces îles? C’est — indubitablement pour moi — par l'homme blanc. Mon expérience dans l'Afrique occidentale — d’où j'ai montré que tous les noirs étaient originaires — est que la maladie n y existe pas, excepté à l'état de cas importés. Il est done très improbable que la tubereulose ait été introduite aux Antilles par les esclaves. Ce sont cependant eux qui en souffrent le plus aujourd'hui : il faut croire qu'ils l'ont contractée du blanc et, par suite de leur ignorance des modes ordinaires de contamination, transmise à d’autres noirs. En fait, s'il était pos- sible à nos lecteurs de voir la manière dont le nègre fournit au bacille de la tuberculose toute opportu- aux Antilles, les mulètres sont plus sujets à la ma ladie que les parents blanes ou noirs dont ils sont issus. Dans les îles Turques et Caïques, il y a trois bu- reaux pour l’enregistrementdes décès : Grand Turk, Cockburn Harbour el Salt Cay. J'ai examiné les re- gistres de chacun de ces bureaux; mais, pour ne pas infliger trop de statisliques à mes lecteurs, j'ai reproduit seulement, dans le Lableau ci-dessus, les données relatives à Cockburn Harbour et Salt Cay pour les quinze dernières années; celles de Grand! Turk conduisent aux mêmes conclusions. Si cela était possible, il serait intéressant de pos- séder les registres des décès des premiers oceu- pants, qui permettraient probablement de retrouver l'importation de la maladie. Nous savons qu'il y & deux siècles, la phtisie était un fléau en Angleterre, et il est probable que plusieurs personnes atteintes vinrent (par la voie des Bermudes ou des États-Unis D' G.-S. HIRST — LA MORTALITÉ TUBERCULEUSE AUX ANTILLES 117 du sud) aux iles qui nous occupent et furent le point de départ de la maladie. Il n’est guère pratiqué aujourd'hui de mesures sanitaires, et alors il n’y en avait aucune. La popu- lation actuelle (comme, sans doute, celle d'il y a deux siècles) se repose entièrement sur les avan- tages naturels des iles, dont aucun n'a cependant été suffisant pour enrayer les progrès de la maladie. Avec très peu d'efforts bien dirigés et une faible dé- pense, je suis toutefois convaincu que la maladie pourrait être entièrement bannie des iles”. IE Un vieux dicton soutient que « la statistique peut servir à prouver lout ce qu'on veut ». En ce qui concerne la mortalité tuberculeuse des blancs, cela pourrait être vrai, car les deux décès enregistrés lun à Cokburn Harbour et l’autre à Salt Cay en 1 Voir à ce sujet mon arlicle : The Turks and Caicos Islands as a health resort, dans Lancet, 1% avril 1906. Le climat de ces iles est tout particulièrement favorable. La température est extrèmement régulière : à Salt Gay, elle s'est maintenue entre 249,4 et 30°C. pendant l'année 1905: la chaleur n'est pas oppressive, car elle est tempérée par la brise de mer, qui souffle constamment. On ne peut mieux comparer le séjour dans ces îles qu'à la vie sur le pont d'un navire. Le soleil brille presque sans interruption ; il est rare de voir le ciel complètement couvert pendant un jour. La maladie la plus répandue est le rhumatisme, qui cède, d'ailleurs, rapidement à l'administration du salicylate de soude; les affections tropicales y sont inconnues. 1894 sont les seuls qui aient éié notés pendant toute la période considérée, de sorte que la morta- lité des blancs ne saurait être déduite sérieusement de ces statistiques. Par contre, celles qui concernent les membres de couleur et noirs de la communauté portant sur un nombre suffisamment grand de personnes, on peut tirer de l’examen du tableau les conclüsions sui- vantes : 1° Les gens de couleur succombent à la tubercu- lose dans une plus forte proportion que les noirs; en outre, les femmes de couleur sont plus sujettes à la maladie que les hommes dans la proportion de quinze à huit; 2 Les hommes de couleur meurent à un àge moins avancé que les femmes; 3° Les femmes noires meurent pratiquement dans la même proportion par rapport aux hommes que dans la classe de couleur, mais les femmes meurent à un àge beaucoup moins avancé que les hommes, ce qui est l'inverse de la classe colorée; 4% Les gens de couleur, comme classe, meurent à un âge plus avancé que les noirs. Telles sont les principales déductions qu'on peut tirer de l'étude du petit groupement que j'ai observé; mais elles me paraissent devoir posséder une portée plus générale. D: GS. Hirst, Médecin du Gouvernement à Salt Cay (Iles Turques). 118 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX { { BIBLIOGRAPHIE 1° Sciences mathématiques Abeille (Léonce), Capitaine de frégate, Sous-Direc- teur de l'Ecole supérieure de Marine. — Marine française et Marines étrangères. POLITIQUE NAVALE DES GRANDES PUISSANCES. LES ORGANISATIONS MARITIMES ET LES FLOTTES ACTUELLES. ÉCONOMIES ET RÉFORMES. — 1 vol. in-18 de 360 pages (Prix : 3 fr. 50). Librairie Armand Colin, 5, rue de Mézières. Paris. 1906. Après avoir été négligées d'une façon incroyable dans notre pays, qui, pourtant, possède un littoral étendu, des intérêts maritimes et coloniaux considé- rables, les questions navales ont, au cours de ces der- nières années, inspiré de nombreux écrits émanant de professionnels, d'hommes politiques ou de publicistes. Il convient, très certainement, de se réjouir de cette orientation nouvelle des esprits, mais tant d'efforts méritoires n'ont pas encore donné à la France une doctrine maritime nationale, et il n’y a pas lieu de s’en étonner, car les œuvres des ingénieurs ou des marins sont, presque toutes, d'une technicité qui rebute le grand public et, d'autre part, elles ne comportent que des études, fragmentaires en quelque sorte, d’un pro- blème dont les grandes lignes échappent aux non- initiés. Quant aux autres publications, elles sont, il est vrai, d'une lecture moins ardue et abordent volontiers les questions générales ; mais le talent des auteurs ne réussit pas toujours, malgré les plus consciencieux efforts, à dissimuler une certaine inexpérience des difficultés de la matière. Le livre du Commandant Abeille présente cette par- ticularité remarquable d’avoir été écrit à l'intention du grand publie, en laissant de côté tous les détails purement techniques, par un officier fort instruit qui est en mème temps un penseur. Son travail est à la fois très solidement documenté et dégagé de tout ce qui risquerait d'en faire perdre de vue le plan général; il ne sacrifie, cependant, aucune des parties essentielles d’un sujet qui demande à être traité intégralement, puisque, «sous des formes extré- mement variées, le problème maritime est un et n'est soluble que par des vues d'ensemble » (p. 18). Nous devons donc être renseignés sur le recrutement et l'entrainement du personnel, les méthodes de concep- tion et d'exécution du matériel, la valeur actuelle et les améliorations possibles de notre flotte de guerre, la mobilisation, le droit international maritime, ete. Cha- cune de ces questions fait l’objet d’un chapitre dans Marine française et Marines étrangères. L'auteur connaît, par une expérience professionnelle de vingt-cinq années, l’organisation et le fonctionne- ment de notre marine, et il a eu à sa disposition les renseignements les plus précis sur l’organisation et le fonctionnement des marines étrangères ; il a fait alors des rapprochements et des comparaisons et nous en donne les résultats. Mais ces résultats n'auraient qu'une valeur très rela- tive si l’on omettait de tenir compte de certaines influences qui, pour être extérieures à la marine, n’en ont pas moins sur elle une action importante. Le Com- mandant Abeille ne les a pas négligées : « Faire res- sortir l'existence de rapports permanents et intimes entre l'état politique, social, économique, industriel d'un pays et son organisation maritime; expliquer pourquoi leur négation vouerait la marine à l'impuis- sance. voilà, dit-il, l'objet essentiel des études com- paratives sur les marines de guerre... » (p. 38). Les conclusions auxquelles il arrive sont singulière- peut en juger par les extraits suivants : « Pourquoi, d'une manière tout à fait générale, les solutions com— pliquées sont-elles à la fois en faveur chez nous et condamnées à l'étranger ? » (p. 109). « La marine française est uniquement guidée par le fétichisme des conceptions administratives » (p. 440). « Le maintien de ces procédés préhistoriques ocea- sionne un véritable gaspillage d'hommes et d'argent » (p. 288). « Ces faits contredisent absolument les principes sur lesquels repose notre organisation. Plaignons nos principes et débarrassons-nous en » (p. 135). Le Commandant Abeille, on le voit du reste, dit fort crüment les choses et met en pratique, comme écri- vain, les principes qui s'imposent sur les champs de bataille et qu'il rappelle en ces termes : « Cogner de bon cœur, en utilisant toutes les armes dont on dis- pose, dans des engagements poussés à fond, telles ont été toujours les conditions mêmes du succès » (p. 348). Et, comme il désire ardemment pour ses idées le succès qui leur permettra de faire œuvre utile, il presse son lecteur par une argumentation vigoureuse et se refuse à lui présenter des vérités atténuées : « Je ne saurais, dit-il, me défendre de parler avee passion des erreurs et des abus auxquels nous devons de ne pas posséder encore l'admirable marine que nous aurions déjà pu constituer sans alourdir Les charges du pays » (p. 360). Cette dernière phrase est à retenir : Voici donc un officier de marine, un spécialiste averti, qui déclare que la marine dispose de erédits suffisants, maïs qu’elle n'a pas su, jusqu'ici, en tirer tout le parti possible. Qu'on ne s’imagine pas, cependant, que le Commandant Abeille aille chercher des économies dans la substitu- tion des petits navires aux grands bâtiments de haute mer; il s'élève avec énergie contre cette utopie si dangereuse, el, pourtant, il ne réclame aucune aug- mentation du budget naval! Contrairement à l'habitude des réformateurs, il s'interdit les conceptions gran- dioses, mais irréalisables, et s'attache exclusivement à proposer une utilisation meilleure des ressources que nous possédons déjà et des dépenses, forcément limi- lées, consenties par le pays. Il n'y a pas d'illusions à se faire. Ces dépenses sont et seront, longtemps encore, inévilables. La paix, que certains s’imaginent aimer d’un amour plus ardent en offrant leur patrie désarmée à toutes les convoitises, sera, au contraire, rendue plus pro- bable par le développement des forces militaires d'une grande nation pacitique comme la nôtre. . « La France, dit le Commandant Abeille, s’honore grandement en voulant être le champion de cette paix humaine, qui n'exclut pas plus entre peuples qu'entre particuliers l'idée féconde et naturelle de lutter pour vivre mieux. Mais pense-t-on que, si son impuissance ou mème son affaiblissement lui interdisaient de parler haut et ferme, elle pourrait propager son idéal plus aisément? Vivre est à la fois un besoin et la condition essentielle du succès de notre propagande. Et, pour vivre librement, il faut pouvoir combattre au besoin » (p. 74). Au lendemain des retentissantes et décisives catas- trophes dont les mers d'Extrème-Orient ont été le théâtre, les cruelles vérités, mises en lumière sans parti-pris, mais sans ménagements, dans Marine fran- çcaise et Marines étrangères ne peuvent manquer de s'imposer aux méditations de ceux à qui il incombe, d'assurer l'intégrité et la grandeur de là patrie. Mais; ANALYSES ET INDEX : : ment instructives et fort peu satisfaisantes, ainsi qu'on BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 119 pour que ces vérités portent des fruits, il faut que la fiche des dirigeants soit rendue possible par l'appui, et au besoin par le stimulant de l'opinion publique; il faut donc quelles soient propagées par tous: ceux qui s'intéressent à la vie nationale, sans exception. - A ce propos, le Commandant Abeille revendique pour les officiers le droit de rompre le silence que la tradition leur a imposé jusqu'ici; il considère mème que c'est un de leurs devoirs professionnels de publier les opinions qu'ils jugent bonnes à répandre et d'aider ainsi à l'éducation maritime de leurs compatriotes. Dans le même ordre d'idées, il demande que le Minis- tère de la Marine fournisse lui-mème, régulièrement, des renseignements à la presse, afin de documenter l'opinion publique et de ne pas la livrer aux hasards des informations insuffisantes ou fantaisistes. Il semble que la Ligue Maritime Française est tout indiquée pour cette noble tâche d'apprendre aux Fran- cais à regarder vers la mer; les résultats qu'elle à déjà obtenus avec des moyens insuffisants montrent ce qu'on pourrait attendre d'elle si les bonnes volontés lui venaient en plus grand nombre. La Ligue Maritime Allemande a cent fois plus d'adhé- rents que la Ligue Maritime Francaise. Nous avons la conviction que les courageux efforts du Commandant Abeille ne seront pas stériles et que l'évolution dont il démontre la nécessité se produira avant longtemps; mais si, par malheur, nous devions nous tromper, oh! alors, nous préférerions que son livre n’eût pas été écrit, car le danger qu'il signale est pressant et, s'il nous laissait indifférents, ce serait à désespérer de notre aptitude au progrès, de notre bon sens ou de notre énergie ! Le diagnostic porté sur l'élat de nos institutions maritimes par une personnalité aussi indiscutable- ment compétente ne passera pas inaperçu de nos rivaux. Ils observeront les mesures prises pour amé- liorer ces institutions et, au cas où nous serions assez iniprudents pour ne rien faire, celle constatation ne pourra manquer d'accroître leur confiance en eux- mêmes d’une facon inquiétante pour nous. Si, au con- traire, nous nous mettons à l'œuvre, délibérément et sans retard, et que les réformes nécessaires soient menées à bien, notre prestige en sera augmenté dans des proportions considérables. Mais, dira-t-on, les opinions du Commandant Abeille ne sont-elles pas très discutables et empreintes de quelque pessimisme ? Il serait trop pénible de penser que la marine francaise est dans la situation d'infério- rilé où il la représente! Cette objection aurait une grande force si nous nous trouvions en présence de simples affirmations, mais voici de quelle facon la question est posée à la page 325 : « Nous ne nous départirons pas de la règle que nous nous sommes imposée : mettre à la disposition de tous une documentation fournissant à chacun le moyen de” sè prononcer, en connaissance de cause, sur tous nos dires. », et ailleurs : « L'esprit critique ne peut avoir d'autre résultat : allant au fond des choses el se ren- dant compte de leur difficulté, il développe le respect des actes et de la pensée d'autrui, tandis qu'il rend plus sévère pour soi-même » (p. 15). Ce ne sont pas là les allures d’un autoritaire où d’un démolisseur ! Il y a lieu, au contraire, de noter que le Commandant Abeille s'est imposé l'emploi d'une mé- thode scientilique de travail : ses opinions n’en auront que plus de poids auprès des lecteurs de la ÆRevue, el ils se rangeront certainement parmi ces « hommes de bonne volonté », dont l'auteur sollicite le concours en maints passages de son livre, ceux-ci, par exemple : « On se convaincra que la collaboration des non- professionnels et des professionnels militaires est un devoir impérieux et permanent » (p. 16). « Le concours obstiné d’un sentiment public, cons- cient de nos besoins maritimes, est la condition essen- tielle de notre sécurité... » (p. 32). « La force des choses impose ainsi une notion simple, dont la méconnaissance à toujours été la véri- table cause de notre impuissance navale : la marine française sera en liaison avec la nation ou elle n'exis- tera pas... » (p. 352). Tout ceci a été compris de l’autre côté du Rhin, où la Ligue Maritime, patronnée, d'une facon effective, par l'empereur et les princes allemands, compte ses adhé- rents par centaines de mille et n'a pas été étrangère aux magnifiques résultats obtenus par le Gouvernement impérial. Ces résultats, les voici, et il serait bon de les avoir toujours présents à l'esprit : « En 1895, l'Allemagne avait presque tout son ma- tériel naval à créer : la fermeté de ses décisions lui vaudra, pourtant, de posséder un nombre de cuirassés égal au nôtre en 1907, et sensiblement supérieur en 1917, » Il est vrai qu'il s'agit là d'un pays qui, après Iéna, sut tirer des enseignements de sa défaite, alors que Trafalgar ne nous à rien appris. Il n’est jamais trop tard pour bien faire. Mettons-nous à l'œuvre! GASTON DE CAQUERAY, Lieutenant de Vaisseau hors cadre. 2° Sciences physiques Thomson (J.-J.), Professeur de Physique expérimen- tale à l Université de Cambridge. — Conduction of Electricity through Gases. 2° édition. — 1 vol. in-S° de 678 pages avec 205 fig. (Prix cartonné : 20 fr.). Cambridge University Press, 1906. L'ouvrage de l’éminent physicien de Cambridge, dont M. Guillaume analysa naguère ici la première édition, à été si rapidement épuisé que l’auteur s’est vu bientôt dans la nécessité d'en publier une seconde édition. En deux ans, la question des phénomènes électriques dans les gaz s'est, d’ailleurs, enrichie d’une foule de contributions nouvelles, qui ontamené M. J.-J. Thomson à récrire une bonne partie de son livre et à y ajouter plusieurs paragraphes nouveaux, qui en ont augmenté l'étendue de plus d'une centaine de pages. Ainsi rajeunie et mise au point, cette œuvre rencon- trera, nous n’en doutons point, le mème accueil em- pressé que sa devancière. Korda (Désiré), /ngénieur. — La séparation électro- magnétique et électrostatique des minerais. — 4 vol. in-8° de 29 pages et 54 fiqures.(Prix:6 fr.) — Edité par l'Eclairage Electrique. Paris, 1906. On sait que les minerais extraits du sol ne peuvent que très rarement être employés à l’état cru et doivent être soumis à un enrichissement préalable avant d’être traités au point de vue métallurgique. Pour enlever la plus grande partie des gangues, on met à profit les différences qui existent entre les propriétés physiques les plus immédiates des corps constituants. C'est ainsi que le triage à la main est basé sur la couleur et les lois de la réflexion, la préparation hydromécanique sur celles de la pesanteur et de la poussée dans les liquides. Mais il arrive souvent que les propriétés dont nous venons de parler ne se différencient pas assez pour permettre une séparation, même grossière, des composés en présence, et cela d'autant plus que ces derniers sont des oxydes de métaux de la même famille, difficulté qui se présente pour les minerais mixtes, mélange de deux ou plusieurs minerais hétéro- gènes enchevêtrés. Tels les tailings de Broken Hill, dont on produit, chaque année, des quantités énormes en Australie, et qui contiennentenviron 22 */, de plomb et 26 °/, de zinc. Telles encore les blendes pyriteuses du Laurium, dont la gangue est très complexe et mêlée de fer et de chalcopyrite. Là interviennent, avec succès, les méthodes de triage reposant sur les propriétés magnétiques et élec- — 4 Revue gén. des Sciences du 28 février 1906, L. XVIT, p. 198, 120 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX tiques, dans lesquelles on utilise les différences, soit dans la perméabilité magnétique, soit dans la conduc- tibilité électrique. Ces méthodes sont toutes récentes, et la dernière ne date même que de quelques années. Aussi oncomprend l'intérêt d'un ouvrage comme celui de M. Désiré Korda, qui traite spécialement toutes les questions s'y rapportant, d'autant plus que jusqu'ici, en dehors de quelques articles parus dans les pério- diques, le sujet n'a guère été abordé dans son en- semble. Probablement pour appeler l'attention sur elles, Pauteur fait passer en première ligne les trieuses électrostatiques; ces appareils sont les derniers venus et seulement appliqués en Amérique. Ils sont nés de la nécessité de trier les minerais d'une indiflérence magnétique complète. L'échelle de conductibilité indi- quée par M. Blake‘permet de classer les différents corps à ce point de vue et de guider dans la recherche des minerais mixtes sur lesquels un traitement de ce genre pourra être essayé avec chance de succès. Vient ensuite, avec force détails, l'étude des appareils où le magnétisme est employé pour séparer les corps en diverses catégories, suivant leur degré de perméabi- lité. M. Korda décrit longuement les types de trieuses employées, qui sont déjà légion : Mechernich, Johnson, Wetherill, Rowand, Knowles, King, etc., fonctionnant par extraction ou par déviation, à sec ou en présence de l'eau. La théorie de ces séparateurs repose naturelle- ment sur toutesles notions de magnétisme qu'on trouve dans les traités spéciaux, mais qui sontreproduites ici pour la commodité du lecteur; elle est précédée d’un lableau des perméabilités des différents corps et d'in- dicationssur le grillage desminerais, opération préalable nécessaire dans certains cas pour en augmenter la sus- ceptibilité magnétique. Comme application de la théorie, on trouve la des- cription de nombreuses installations de triage, notam- ment aux principales mines de Suède et Norvège, à celles de Broken Hill en Australie et du Laurium en Grèce. Les résultats obtenus avec tous les types d’ap- pareils employés sont soigneusement détaillés dans une série de tableaux pour permettre d'apprécier le rendement des divers procédés. Enfin, l'ouvrage se termine par l'exposé des travaux préparatoires aux opérations de triage magnétique ou électrique, travaux qui consistent dans le triage à la main, le concassage, la concentration hydromécanique, le broyage, la classification, le traitement du fin, etc. On peut voir, par ce qui précède, quel intérêt pra- tique présente le livre de M. Korda pour les ingénieurs de mines métalliques. C’est un guide d'autant plus sûr qu'il relève d’une expérience personnelle longuement mürie. Emile DEMENGE, Ingénieur Civil. 3° Sciences naturelles Lorin (Henri), Professeur de Géographie coloniale à l'Université de Bordeaux. — La France, Puissance coloniale. EYUDE D'HISTOIRE ET DE GÉOGRAPHIE POLI- TIQUES. —— 4 vol. in-8°, de 500 pages. (Prix: 6 francs.) Augustin Challamel, éditeur, Paris, 1906. En 1886, Alfred Rambaud, secondé par un groupe de collaborateurs distingués, publiait La France coloniale. Mais, depuis vingt ans, les territoires que la France pos- sède outre-mer se sont considérablement accrus, ont été explorés en détail, ont recu une organisation admi- nistrative nouvelle, et entin commencent à être exploi- tés. Tant de changements justifiaient amplement la pu- blication d’un livre nouveau. M. Henri Lorin à entre- pris de l'écrire, et il faut le féliciter d'avoir réussi dans une tâche devant l'étendue de laquelle plus d’un érudit aurait reculé. L'ouvrage est divisé en « livres », dont chacun traite d’une région géographique : Méditerranée occidentale, Afrique occidentale et centrale, Océan Indien, Extrème- Orient, Amérique el Océan Pacifique. Dans chacun de ces « Jivres », l'auteur à adopté une méthode uniforme d'exposition : 11] donne une esquisse géographique du pays, en énumère les productions, traite des indigènes qui l'habitent, et montre enfin comment il est admi-" nistré et outillé. Ce plan schématique est d’ailleurs modifié selon les" circonstances, Le « livre » relatif à l'Algérie et à la Tunisie comporte un chapitre relatif aux colons euro- péens, alors qu'il ne saurait en être de même dans le « livre » relatif à l'Afrique occidentale. L'auteur à une tendance heureuse à rattacher Ie présent au passé ; mais il y sacrifie parfois un peu com- plaisamment, et l’on éprouve quelque surprise à voir," dans un ouvrage sur la France puissance coloniale, apparaître Salomon et la reine de Saba, Alexandre le Grand et Marco Polo (p. 224-227). La partie de l'ouvrage qui nous a paru la plus neuve” est la dernière : « Les aptitudes et les institutions coloniales de la France contemporaine. » C'est la pre= mière fois, croyons-nous, qu'on présente ainsi tout un” ensemble de renseignements sur l'Administration colo- niale, l'Ecole coloniale, le Jardin colonial, l'Office colo- nial et les relations de la métropole avec ses colonies. Les faits exposés par M. Lorin étaient dispersés dans une quantité de livres spéciaux, de brochures et de fas-" cicules de périodiques. Il les a condensés en une syn- thèse, qui sera fort utile; mais pourquoi n'avoir pas” couronné d'un index alphabétique des matières un ou- vrage destiné à être lu sans doute, mais consulté da- vantage encore ? HENRI DEHÉRAIN, k Docteur ès lettres, Sous-bibliothécaire de l'Institut. Bechmann (G.), Zugénieur en Chef des Ponts et. Chaussées, Professeur à l'Ecole des Ponts et Chaus- sces, — Hydraulique agricole et urbaine. — 1 yo1. gr. in-8 de 642 pages de l'Encyclopédie des Travaux publies. (Prix : 20 fr.). Ch. Béranger, éditeur, Paris, 1906. M. Bechmann, dans un langage clair et précis, passe en revue dans son livre toutes les notions qu'un ingé- nieur des Ponts et Chaussées doit connaître sur l’'Hy- drologie, l'Hydraulique agricole et urbaine. Ce sont des sujets fort vastes, pouvant faire l’objet de plusieurs volumes; l’auteur, avec l'habileté qui lui est coutu- mière, les a réunis en un volume de près de 700 pages. À sa lecture, on reconnait le professeur qui cherche à intéresser son élève, à lui donner des idées générales sur toutes les parties du cours sans l’embarrasser dans des détails, en eux-mêmes intéressants, mais qui s'acquièrent à la longue par la pratique. Ce livre est à la portée de tous les lecteurs ;-il est exempt de notions difliciles à comprendre et de ma- thématiques.Il est au courant des dernières nouveautés de la Science parues sur ce sujet tant en France qu'à l'Etranger. Le nom de M. Bechmann et les hautes fonctions qu'il a occupées à la Ville de Paris, à la tête de l'important Service des eaux et de l'assainissement, sont un sûr garant de la compétence de l’auteur. L'agriculteur n'y trouvera peut-être pas des détails suffisants pour le guider dans ses drainages ou ses irrigations, mais l'ingénieur, le conducteur des Ponts et Chaussées, voire même les municipalités, trouveront dans ce livre des notions très utiles pour les guider dans le choix des procédés à employer en Hydraulique agricole et urbaine. À ce titre, sa publication se faisait depuis longtemps désirer. F. DIENERT, Ingénieur agronome, Chef du Service de surveillance des Sources de la Ville de Paris. Maclaud (D' Ch.), Administrateur des Colonies, chargé de mission. — Notes sur les Mammifères et les Oiseaux de l'Afrique occidentale (Casamance, Fouta-Dialon, Guinées française et portugaise. 1 vol. petit 1n-8° de X1V-352 pages, 16 fig. hors texte el 1 carte. Challamel, éditeur. Paris, 14906. — Du même : Etude sur la distribution géographique des races sur la côte occidentale d'Afrique, de la BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Gambie à la Mellacorée. 1 hroch. in-8° de 40 pages avecA carte hors texte. Paris, Imprimerie Nationale, 4906. (Extrait du Bulletin de Géographie historique et descriptive, n° 1, 1906.) M. le D' Maclaud n'a pas passé moins de douze années dans l'Afrique occidentale, en qualité soit de médecin, soit d'administrateur colonial; chargé de mission des Ministères de l'Instruction publique et des Colonies, il a, au cours de cette longue période, réuni des docu- ments scientifiques de tout ordre, qu'il a commencé à mettre en œuvre en publiant les deux ouvrages ci- dessus. Nous avons déjà dit ici‘ combien ont élé fruc- tueuses pour l'Histoire naturelle les diverses campagnes qu'il a faites pour la délimitation de la frontière entre la Guinée francaise, la Casamance et la Guinée portu- gaise ; il a donc su, en toute occasion, tirer profit pour la science de ses courses à travers la brousse de l'Ouest africain. Sous un titre modeste, il a présenté un tableau que l’on peut regarder comme à peu près complet des mam- mifères et des oiseaux de l'Afrique occidentale. Mais le D' Maclaud n'a prétendu faire ni un traité didactique sur cette partie de la faune africaine, ni un inventaire définitif et ne varielur des richesses zoologiques de notre colonie. Son but a été seulement de dresser la liste des espèces dont il à eu l'occasion de constater l'existence au cours de ses périgrinations ou dont il à rapporté des dépouilles au Muséum, et de noter toutes les observations qu'il a personnellement faites. Il en ré- sulte que l'une des qualités de ce livre est l'exactitude. Comme l’a dit M. Edmond Perrier, directeur du Mu- séum, dans la préface, ce livre est un exemple: il serait à désirer que d'autres livres semblables fussent écrits par ceux qui ont observé les animaux ou les plantes de nos colonies. On auraitainsi les éléments les plus sûrs pour entreprendre des travaux didactiques et, en même temps, les nouveau-venus aux colonies, sachant de suite ce qui est connu, pourraient, sans perte de temps, diriger immédiatement leurs efforts en vue de décou- vertes nouvelles. Mais, si l’auteur a voulu écrire pour les coloniaux un livre clair, lisible pour tous, en évitant autant que pos- sible les descriptions techniques, il a avec beaucoup de raison adopté la terminologie scientifique pour désigner les divers types, l'emploi exclusif de noms vulgaires étant la source d'incessantes et d'inextricables confu- sions. Les échantillons rapportés par le D° Maclaud ont, d'ailleurs, été étudiés et déterminés par des savants d'une compétence indiscutable, tels que les regrettés Professeurs Milne-Edwards, Ou-talet et de Pousargues, par MM. Ménegaux, assistant d'Ornithologie au Muséum de Paris, Hellmayr, du Muséum de Vienne, etc. L'ouvrage mentionne et décrit 78 espèces de mammifères et 256 espèces d'oiseaux. A signaler une curieuse espèce nouvelle de Cheiroptère, /e Hhinolophus Maclaudi, qui à été décrite par de Pousargues, et, parmi les oiseaux, une espèce nouvelle appartenant à la famille des Cer- thüdés, le Salpornis Maclaudi, décrite par Oustalet. Dans son étude sur la distribution géographique des races sur la côte occidentale d'Afrique, le D° Maclaud a essayé d'apporter quelque clarté dans la détermination, le classement et la distribution des races humaines si nombreuses qui vivent de la Gambie au Sierra-Leone. Dans ce vaste espace, il est facile de distinguer deux sroupes distincts, des races aborigènes et des tribus envahissantes. Le contact plus ou moins prolongé entre les unes et les autres a apporté une perturbation con- sidérable dans leur ethnique et modifié leur habitat. Le D' Maclaud s’est borné, pour le moment, à indiquer la locaiisation actuelle des groupements nègres de l'Ouest africain, les modifications qu'ils ont apportées à Rev. gén, des Sc., 1904, p. 222; 1905, p. 970. 122 leur habitat et les tendances que manifestent certains d'entre eux à essaimer vers d’autres territoires. On peut donc espérer que l’auteur donnera une suite à cette première étude. M. le D' Maclaud groupe sous le nom de races sou- daniennes les tribus envahissantes, Foulbés où Man- dingues, dont les migrations ont laissé une trace dans les traditions locales et sont aujourd'hui connues dans leurs grandes lignes. Après avoir envisagé une à une les tribus qui s'y rattachent, l’auteur aborde l'étude curieuse des races qu'il qualifie d’ahorigènes. Sous ce nom, très imprécis, dit-il lui-même, il réunit les divers groupements nègres qui peuplent l'Ouest africain et qui lui paraissent issus d’une grande race noire, autre- fois prédominante dans toute la région nigérienne. Il indique les principaux caractères communs qui peuvent justilier l'existence d'une souche unique et il note ce que l'on sait de chacune de ces races d’après les obser- vations des précédents voyageurs et d’après les siennes propres. La carte jointe à cette étude montre nettement la répartition géographique actuelle des races envahis- santes et des races aborigènes. Ces dernières, refoulées d'abord par la violence, sont aujourd'hui pacitiquement pénétrées ; elles sont appelées à perdre fatalement leurs caractères ethniques et à disparaitre comme races spé- ciales devant les progrès de races supérieures. Il est done grand temps d'en relever les caractères. GUSTAVE REGELSPERGER. 4 Sciences médicales Traité d'Hygiène, publié en fascicules, sous la direc- tion de Brouardel (P.), Professeur à la Faculté de Médecine de Paris, Membre de l'Institut, et Mosny E.), Médecin de l'Hôpital Saint-Antoine. — 3° fas- cicule : Anthropologie, Hygiène individuelle, Edu- cation physique, par MM. R. Anrnony, E. Dupré, P. Rimerre, G. Brouarpez, M. BouLay, V. Morax, P. Lareuice. — 1 vol. gr. in-8° de 300 pages avec 38 fiqures. (Prix : 6 fr.) J.-B. Baillière et fils, édi- teurs. Paris, 1906. Ce volume renferme des notions très intéressantes d'Anthropologie et nous fait connaître la pratique de l'Anthropologie moderne : ce sont les notions générales sur la forme humaine, puis les procédés pour observer et représenter cette forme, l'anthropométrie, la ma- nière d'établir une fiche d'observation, de suivré la croissance de l'individu. Vient ensuite une étude sur l'évolution psychique de l'enfant et de l'adulte, avec les fondements psycholo- giques de l'éducation intellectuelle, la manière d'ob- Server et celle aussi d'éviter le surmenage intellectuel des écoliers. La seconde partie a trait à l'Hygiène individuelle : M. Brouardel y passe en revue les différentes pièces dont se compose le vêtement et donne des conseils pratiques sur le choix des tissus et sur la forme du vête- ment. Il indique ensuite les principes et la pratique de la propreté corporelle. Des chapitres spéciaux sont consacrés à l'hygiène des diverses parties du corps : oreille, nez, bouche, gorge, œil. Dans la troisième partie, M. Lafeuille traite de l'édu- cation physique : il établit les principes physiologiques du travail musculaire, les effets de l'exercice sur la nutrition, la respiration, la circulation, le système nerveux et l'appareil locomoteur; et il part de ces principes pour étudier et classer les divers exercices physiques, en rapport avec l’âge, le sexe, les constitu- tions et les états morbides, montrant commenton doit utiliser la gymnastique pour perfectionner ou réformer l'individu. M. LABBÉ, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 1% Janvier 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. À. Hurwitz démontre un théorème nouveau sur les points critiques des fone- tions inverses. — M. G. Rémoundos communique certains résultats analogues à ceux de M. Hurwitz sur les points critiques d’une classe de fonctions. — M, T. Boggio donne l'expression des potentiels d'un volume atürant dontla densité satisfait à l'équation de Laplace. — M. H. Merczyng à étudié expérimentalement le mouvement des liquides à grande vitesse par conduites très larges, et confirme le fait, établi théoriquement par MM. Darey et M. Lévy, que la pente hydraulique aug- mente avec la diminution du diamètre du tuyau. — M. E. Seux à construit, sur le modèle de l'aile de l'oiseau, de petits modèles d'aéroplanes possédant des bords antérieurs de diverses épaisseurs. Les appareils munis d'un bord antérieur d'une certaine épaisseur progressent plus facilement que ceux à bord plan mince et possèdent un meilleur équilibre longitudinal. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. G. Gabet présente un nouvel appareil de télémécanique sans fil qui, par application d'un nouveau principe électromécanique, celui du retard au contact, permet un contrôle à priori des commandes perçues et donne à l'opérateur la faculté d'annuler, avant qu'elle n'ait recu un commen- cement d'exécution, toute commande étrangère per- turbatrice. — M. D. Berthelot indique deux modes de calcul, direct et indirect, du facteur par lequel on réduit les densités normales des gaz aux densités limites, pour la mesure de leur poids moléculaire, —. M. M. Berthelot montre qu'il y a une différence très nette entre les phénomènes chimiques déterminés par un échauffem: nt résultant de causes purement calori- fiques et ceux dus à un échauffement produit par les actions électriques. — M. L. Vignon a constaté que l'ionisation des matières colorantes est fortement accrue par la dilution et surtout par l'élévation de température; elle joue un grand rôle dans la teinture des textiles. — M. A. Colson à obtenu un sulfate de chrome vert Cr? (SO —Æ 6H?0 dont les trois radicaux sont totalement dissimulés. Une solution froide de sulfate chromique en équilibre ne contient pas unique- ment un sel violet el un sel vert, mais plusieurs sels verts différents. — M. Em. Vigouroux, en faisant agir le chlorure de silicium sur le chrome vers 12000, a obtenu Je siliciure Cr'Si®, — M. P. Lebeau estime que le siliciure de manganèse obtenu par M. Gin dans la réduction de la rhodonite au four électrique est du siliciure SiMn? impur. — MM. A. Seyewetz et Poizat décrivent un appareil continu pour la préparation de l'oxygène pur sous pression constante, utilisant la chute d'une solution acide de permanganate dans l’eau oxygénée. — M. W. Tchelinzeff montre que la ther- mochinie, par suite de la faiblesse des effets ther- miques, ne permet pas de conclure à l'existence d'isoméries dans les combinaisons oxoniennes de Grignard et Bayer; mais la décomposition par l’eau et les produits qui en résultent démontrent cette isomérie, suivant l'hypothèse de Bayer (R)(R)O(X)MgR! et (RR)O(X Mg. — M. Pastureau, en traitant la méthyl- éthylcétone par H°0* en présence d'acide sulfurique, a obtenu un superoxyde (C*H$0?} explosif au-dessus de 100°, et un alcool, le méthylacétol. — MM. E.-E. Blaise et M. Maire ont constaté qué les amines phé- noliques se fixent facilement sur la double liaison des cétones vinylées en donnant des B-arylaminocétones, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES == EE qui se cyclisent en donnant des 4-alcoylquinoléines. 39 SCIENCES N:\TURELLES. — M. E.-P. Fortin montre que, l'éclairage d’un objet ne variant pas,la coloration de cet objet est perçue différemment suivant que l'œil est ou n'est pas exposé à la lumière. — MM. M. de Rothschild et H. Neuville décrivent une seconde antilope nouvelle de la vallée de l'Ituri (Afrique cen- trale), à laquelle ils donnent le nom de Cephalophus ituriensis, — Le Prince Albert de Monaco résume les principaux travaux effectués au cours de la 8° cam- pagne de la Princesse-Alice, qui s'est rendue au Spitz- berg pendant l'été de 1906. — M. Eberhardt indique un procédé permettant de détruire les larves dans les plantations d'arbres et qui consiste à injecter dans les galeries une solution de formol et de glycérine, qui tue la larve lorsqu'on ne peut pas la saisir directement avec des pinces en élargissant un peu l'ouverture. — M. M. Caullery communique ses recherches sur les Liriopsidae, Crustacés isopodes parasites des Rhizo- céphales. — M. G. Bonnier estime que les expériences de Leduc sur les prétendues cellules artificielles ne sont qu'une répétition pure et simple de celles de Traube et Pfeffer. — MM. W. Kilian et L. Gentil ont reconnu l'existence de l’Aptien, du Gault et du Céno- manien dans l'Atlas occidental marocain. — M. Deprat à étudié les rapports entre les terrains tertiaires et les roches volcaniques dans l’Anglona (Sardaigne). — M. G. Mercalli présente ses observations sur le trem- blement de terre calabrais du 8 septembre 1905 ; il ne paraît pas de nature tectonique, mais plutôt périmé- trique (intervolcanique). Séance du 21 Janvier 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. M. Fréchet présente ses recherches sur l'approximation des fonctions par des séries trigonométriques limitées. — MM. P. Tsou- calas et J. Vlahavas ont déterminé la résistance de l'air et la force ascensionnelle maximum absolue des hélices de propulsion. — M.-F. Ferber donne ües formules qui permettent de trouver quelle est l'hélice nécessaire pour faire avancer avec une vitesse V un système qui demande pour se sustenter une poussée F et quelle puissance cette hélice absorbera. — M. A. Ja- cob à déterminé les conditions d'équilibre et la résis- tance d'un tube élastique sur lequel on enroule un fil également élastique, le brin ayant au moment de l'enroulement une tension variable suivant une loi donnée. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — Le Prince Albert I‘ de Monaco rend compte des observations de magnétisme terrestre, faites avec son appui par M. Chaves dans le sud de l'Afrique, en particulier au Mozambique. — MM. P. Weiss et A. Cotton ont mesuré le phénomène de Zeeman sur les raies bleues du zinc. L'écart entre deux composantes magnétiques varie proportionnelle- ment à l'intensité du champ. — M. J. Becquerel a constaté que la tysonite possède, comme le xénotime, des bandes d'absorption sensibles à l’action d'un champ magnétique. — MM. A. Jaquerod et F. L. Per- rot, par la diffusion de l'hélium à travers la silice à haute température, ont préparé ce gaz à l’état de pureté, la silice étant imperméable aux autres gaz jusqu'à 1.100°. — MM. A. Charrin et Goupil ont re- connu que les plantes artificielles de M. Leduc n'ab- sorbent ni le chlorure de sodium, ni le sucre, et ne présentent aucun phénomène de nutrition, — M. H. Guillemard montre qu'on n'obtiendra de carbylamine, dans l’alcoylation d’un eyanure, que si ce dernier peut donner, dans les conditions de la réaction, une com- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 123 … hinaison stable avec la carbylamine naissante; sinon, : : + on obtiendra soit un dérivé de la carbylamine, im- propre à la régénérer, soit un nitrile. M: R. Les- pieau, en hydrogénant par l’amalgame de Na la lactone érythronique inactive, a obtenu un sucre réducteur, qui n'est autre que l'érythrite active naturelle. — M. L.-J. Simon étudie le mécanisme des diverses syn- thèses des dérivés quinoléiques. — M. G. Blanc, en calcinant les sels de Ca des acides 86-diméthylpimélique et Bg:-triméthylpimélique, a obtenu la 3 : 3-diméthyl- cyclohexanone, Eb.173°, et la 3:3:6-triméthyleyclohexa- none, Eb. 1860. — M. G. Kimpflin propose l'emploi du méthylparamidométacrésol pour la recherche du mé- thanal dans les végétaux verts; il donne avec ce corps une coloration rouge stable. — M. M. Hanriot a isolé du Tephrosia Vogelii deux substances : le téphrosal, C°H%O, liquide volatil, et la téphrosine, C**H?°0", F. 187°, substance toxique pour les Poissons. MM. Eug. Charabot et G. Laloue ont constaté que, dans labsinthe, il y a consommation de matières odorantes à la suite du travail de la fécondation; on a donc intérêt à empêcher la fécondation de la fleur si l’on veut récolter plus d'essence. 39 SCIENCES NATURELLES. — MM. G. Kuss et E. Lobs- tein ont reconnu que l’anthracose pulmonaire physio- logique se produit par inhalation et non par déglutition. L'intestin normal n'est pas absolument imperméable aux granulalions fines de noir de fumée, mais la quan- lité de poussières qui peuvent arriver par celte voie aux poumons est insigniliante. — MM. F. X. Lesbre et F. Maignon ont constaté, chez le porc, que la sec- lion bi-latérale de la branche interne du spinal est incompatible avec une survie prolongée. La section double du pneumogastrique n'est pas incompatible avec la vie. — M. J. Chevalier a étudié l’action phar- macodynamique d'un alcaloïde nouveau contenu dans la racine de valériane fraiche. L'action prédominante est dépressive et paralysante; elle se fait sentir non seulement sur le bulbe, mais sur le cerveau el tout l'axe cérébro-spinal. — M. A. Krempf considère chaque territoire cellulaire de la couche à calicoblastes des Hexacoralliaires à polypier comme fonctionnant à la facon d'une glande à sécrétion mérocrine, mais d’une glande à sécrétion figurée entièrement élaborée à son intérieur. — M. Leclerc du Sablon a étudié les transformations qui se produisent dans les diverses parties de l’ovule du figuier à la suite du dépôt de l'œuf de Blastophage. Dans certains cas, l'albumen se forme sans qu'il y ait eu fécondation. — M. J.Boussac déduit de ses recherches sur l’évolution des Cérithes du bassin de Paris : 1° que la couche de Mortefontaine appartient à la même zone paléontologique que les sables moyens ; 2 que les be de Montagny appar- tiennent à la même zone que les sables de Cresne; 3° que la zone à Pholad. ludensis est une zone dis- incite. — M. G. Bigourdan expose un projet de clas- silication bibliographique de toutes les matières qui constituent la Sismologie actuelle. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 15 Janvier 1907. M. H. Huchard considère l'hypertension artérielle comme préparant les lésions vasculaires de l’artério- sclérose et montre l'importance qu'il y a à la combattre par ce qu'il appelle la médication hypotensive : régime alimentaire lacto-végétarien et hypochloruré, stimula- tion de l'élimination rénale. — M, Ch. Monod a réuni un grand nombre de documents relatifs à l'emploi du sérum antituberculeux de Marmorek dans différents pays; il déduit de léur examen : 1° que l'application de ce sérum est d'une innocuité absolue; 2° que son action se manifeste sur toutes les formes de tubercu- lose; 3° que cette action, dans la tuberculose pulmo- naire, porte sur tous les symptômes morbides; 4° que, dans un grand nombre de cas traités à temps, l'action du sérum à élé tellement complète que tous les symp- tomes de l'affection ont disparu et que certains pra- ticiens n'ont pas hésité à prononcer le nom de guérison (ou, au moins, d'amélioration considérable). 929 Séance du 22 Janvier 1907. M. le Président annonce le décès de M. E. Javal, membre de l'Académie. MM. E. Lancereaux et N. Paulesco proposent un nouveau système de classilication et de nomenelature en Médecine, sur lequel une Commission, nommée par l'Académie, aura à se prononcer prochainement. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 12 Janvier 1907. MM. G. Linossier el G. H. Lemoine ont conslalé que les sérums précipitants sont incapables de mettre en évidence des différences, si elles existent, entre les albumines du sérum des animaux de même espèce el de races différentes. MM. P. Ancel et F. Villemin ont provoqué la dégénérescence de la glande séminale par l’ablation du feuillet pariétal de la vaginale; la glande interstitielle conserve néanmoins son intégrité morphologique et fonctionnelle. — M. M. Nicloux à constaté que l'éther s'élimine très rapidement dès le début de la cessation de l’anesthésie; en cinq minutes, la quantité dans le sangartériel baisse de moitié; après quatre heures, il n’y en à plus trace. — M. A. Delcourt a observé que le Notonecla umbrina, que l'on range comme une varieté du N. glauca, parait ètre une espèce distincte. — M. L. Marchand montre que la lésion la plus commune chez les épileptiques est une adhérence plus ou moins diffuse des méninges molles au cortex, qui se complique, chez les sujets à faiblesse intellec- tuelle ou déments, d'une sclérose névroglique des adhé- rences méningées. — MM. L. Jammes et A. Martin ont reconnu que le chorion ovulaire de PAscaris vitu- lorum subit, dans sa structure intime, des modifications aboutissant à une atténuation de la semi-perméabilité à la fin de l’évolution. — M. R. Dubois a pu constaler de visu, au moyen de la radioscopie, les mouvements synergiques des sacs aériens dans la respiration des oiseaux. — M. M. Lambert a observé que l'extrait du corps jaune de l'ovaire est doué d’une grande toxicité pour le lapin et la grenouille en injection vasculaire. — M. A. Popovici-Baznosanu montre que, chez les larves de Chloe, Siphlurus et Tricorythus, il existe un sinus ventral thoracique identique au sinus abdominal de Graber. Le sang qui s'y trouve peut passer dans l'abdomen grâce aux contractions des muscles ventraux. — M. Lagriffoul à constaté qu'employé dans des con- ditions déterminées le bacille tuberculeux homogène d'Arloing peut vacciner efficacement contre la tuber- culose, — M. P. Remlinger montre que l'inoculation sous-cutanée de sérum de cheval ou de toxine anti- diphtérique et antitétanique peut, en général, être con- sidérée comme inoffensive, et qu'elle ne produit pas d'anaphylaxie. — M. E. Vidal combat l’action de la substance empêchante, produite dans les humeurs des cancéreux traités par les sérums cytolytiques spéci- fiques, au moyen d’un anti-sérum produit par l'injection de cette substance àunanimal.—M.E.P.Fortin a observé que, l'éclairage d'un objet ne variant pas, la coloration de cet objet est percue différemment suivant que l'œil a où n’a pas été exposé à la lumière. — MM. H. Isco- vesco, Joltrain et Monier-Vinard ont constaté qu'un liquide péritonéal ou pleural contenant des globulines négatives et à conductivité électrique supérieure à celle du sérum, prouve que la séreuse est altérée. — MN. P. Armand-Delille et E. Leenhardt montrent qu'il est possible d'obtenir des sérums cytotoxiques beaucoup plus rigoureusement spécifiques lorsqu'on s'adresse, non plus aux tissus complets, mais à un de leurs élé- ments essentiels, les nucléo-albumin +. — M. Ch.-A. François-Franck a étudié la respiration chez le came léon vulgaire ; le poumon subit d'énormes variations de volume pendant l'inspiration et l'expiration. — M. et 19 re Mu L. Lapicque ont reconnu que les paramètres de la formule de Weiss (Q — 2 + ht), relative à l'excitabilité des nerfs moteurs, sont affectés tous deux, en sens inverse, par la température. Quand elle s'élève, a di- minue et augmente. — M. M. Weinberg et R.S. Wil- liams ont trouvé dans l'appendice de véritables plis muqueux, de dimensions inégales et de siège irrégulier, qui doivent jouer un rôle important dans la topographie des lésions appendiculaires. — M. Ed. Chatton a ren- contré chez les Daphnies un protiste parasite nouveau, qu'il nomme Pansuorella perplexa. — MM. L. Bérard et L. Thévenot ont constaté que la présence des mi- crobes n'est pas constante dans les goitres. Les microbes que l’on y trouve paraissent être ceux que l’on ren- contre d'ordinaire dans les néoplasies bénignes. — M. A. Mayer étudie l'influence des électrolytes sur la précipitabilité et la solubilité des combinaisons d'ad- sorption et des complexes colloïdaux d’albuminoïdes. Séance du 19 Janvier 1907. M. G. Bohn a observé que, chez les Convoluta, en aquarium comme sur la plage, la sortie du sable com- mence entre 3 h. #0 et 5 heures avant la mer basse et dure environ deux heures, c'est-à-dire à lieu au mo- ment où la mer descend manifestement. — M. R. Du- bois présente la radiographie d'une perle enfermée dans les valves d'une huitre perlière; ce procédé évite la destruction des mollusques pour la recherche des perles. -- M. Ed. Retterer montre qu'à l'origine les organes élastiques sont exclusivement cellulaires. Les fibres et les lamelles élastiques représentent une élabo- ration protoplasmique; les noyaux subissent un chan- gement profond, qui les transforme en élastine. — M. A. Lelièvre a constaté que les modifications struc- turales observées dans les reins d'animaux maintenus au régime carné offrent une grande ressemblance avec celles des reins d'animaux de même espèce rendus anuriques par le régime sec. — MM. B. Moreau, A. Morel et CI. Gauuer dosent le fer dans les tissus par calcination avec KAZz0*, K?CO* et Na?CO®, dissolu- tion chlorhydrique et précipitation par le nitroso-B- naphtol. — M. J. Nageotte a pratiqué la greffe des ganglions rachidiens; il a obtenu la survie des éléments nobles, avec transformation des cellules uuipolaires en cellules multipolaires. — MM. Th. Tuffer et A. Mauté montrent que, dans la médication ionique, il faut dis- tinguer l’action médicamenteuse vraie, qui reste loca- lisée à la peau, et l’action propre du courant, qui peut se faire seutir sur les tissus profonds. — M. L. Cesari a constaté que le liquide cérébro-spinal ne contient pas de choliue chez les chiens soumis à des crises épilep- tiques expérimentales, même souvent répétées. — M. M. Nicloux a reconnu que tous les tissus renferment de l’éther en quantité notable au moment de la mort par cet anesthésique; le tissu adipeux est capable d’en fixer jusqu'à 400 milligrammes par 100 grammes. — M. G. Bouffard montre que l'agent de propagation de la souma, rypanosomiase du Soudan français, est le Stomoxys vébhiculant le Tr. Cazalboui. — MM. Enri- quez et Ambard ont constaté que, chez les tubercu- leux, la décharge chlorurée provoquée par le passage d'un régime de chloruration normale à un régime dé- chloruré se produit, en général, brusquement du jour au lendemain. — MM. Ch. Morel et E. Dalous ont observé que, dans les tubereules, les éléments cellu- laires (surtout les cellules de Langhans) sont suscep- tibles de conserver, pendant un certain temps, leurs propriétés phagocytaires, — MM. Léopold-Lévi et H. de Rothschild signalent certains cas de neuro-arthritisme qui paraissent ètre en relation avec l'hypothyroïdie. — M. À. Guilliermond a observé, chez les bacilles endo- sporés, à défaut d'un noyau, un grand nombre de fines granulations colorables qui semblent indiquer un sys- tème chromidial diffus. — M. A. Frouin a constaté, chez les animaux à fistule gastrique, une digestion plus complète et une évacuation plus rapide de l'estomac à la suite de l’ingestion de salive. — M. A. Charrin a re- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Te connu que l'argent colloïdal est éminemment bactéri= cide et relativement dépourvu de toxicité pour l'orga= nisme, qu'il modifie même dans un sens favorable. —" M. A. Mar présente un nouvel appareil à thoracentèses — M. H. Piéron montre la généralité des rythmes spontanés et des phénomènes d'anticipation en Biologie: — M. J. Gautier a constaté que la tallianine (terpène ozoné employé par les vétérinaires) produit en injection une énorme polynucléose assez durable, à laquelle elle doit peut-être ses propriétés curatives. — MM. Ch.” Achard, L. Gaillard et A. Ribot ont étudié le méca- nisme de l'absorption péritonéale : le nombre et le poids des molécules sontles deux facteurs qui influencent le plus la grandeur de l'absorption. - MM. Ch. Achard et P. Emile-Weil ont reconnu que l'injection intra-vei- neuse de collargol chez le lapin suscite de fortes réae- tions des organes hématopoïétiques et du sang (myélo-, cytose de la moelle, polynucléose sanguine). Séance du 26 Janvier 1907. M. le Président annonce le décès de M. E. Javal et de M. P. Budin, membres de la Société. M. M. Caullery a étudié la castration parasitaire produite sur les Rhizocéphales par les Cryptonisciens. … La régression des ovules a lieu par action à distance et rentre dans la castration parasitaire indirecte et temporaire. — M. R. Dubois a constaté que le Chaeto= morpha crassa prend de l'O dans le milieu ambiant et. le rejette au fur et à mesure sous l'influence de la lumière. Quand celle-ci n’agit pas, l'O n’est pas rejeté : il sert à la respiration et aux phénomènes bioprotéo- niques ; c'est alors surtout CO* qui est éliminé. —. MM. A. Goris et L. Crété ont reconnu que l'huile de marrons d'Inde préexiste dans la graine ; elle est facile à extraire par un solvant des marrons desséchés ; dans les marrons frais, elle est énergiquement retenue par la saponine. — M. A. Lelièvre a observé que les cel- lules rénales proliférent et se disposent en assises stratifiées au cours du régime sec et carné; d'autre part, il existe une destruction cellulaire active. Après le régime carné, on assiste à des phénomènes d'expul- sion du noyau. — MM. P. Fauvel et G. Bohn ont étudié le rythme des marées chez les Diatomées litto= rales. — M. A. Marmorek a produit expérimentalement des cavernes pulmonaires chez le cobaye et le lapin tuberculeux par l'injection répétée de tuberculine, qui stimule la sécrétion, par les bacilles de Koch, de toxine tuberculeuse, cause de la formation des cavernes. — M. E. Trouessart considère les Lémuriens comme un groupe diphylétique. — M. Nicolétis propose l'emploi, en électricité médicale, d’un nouveau genre de courant non douloureux, dit énallaxotone, c’est-à-dire alterna- tivement croissant et décroissant, qu'il obtient avec un nouveau genre de rhéostat. — M. A. Lorand montre que les altérations de la thyroïde sont souvent suivies d’altérations des reins et que, dans la goutte, la médi- cation thyroïde amène une augmentation de l'élimi- nation d'acide urique. — M. Al. Carrel a observé que des artères de chiens transplantées sur le chat con- tinuent à jouer leur rôle d'artères et qu'un séjour de vingt jours à la glacière ne produit dans l'artère aucune lésion incompatible avec ses fonctions. — M. E. Maurel confirme qu'en modifiant certaines conditions de la vie, et au bout d'un certain temps, on peut ren- verser la marche nycthémérale de la température nor- male et porter son maximum au matin, de même qu'en revenant aux conditions premières on peut porter ce maximum au soir. — M. C. Cépède a observé la déhiscence des spores du A/yxobolus cyelordes dans le rein du Leusciseus rutilus parasité. — MM. L. Jammes et A. Martin résument le mécanisme de l'in festation par l'Ascaris vitulorum. — MM. G. Kuss et E. Lobstein : La pathogénie de l’anthracose pulmo- naire (voir p. 123). — M. H. Piéron présente un nou- veau cardiographe évitant les déformations respira- toires. — M. E. F. Terroine a observé que, lorsqu'on fait à un chien des saignées suivies de réinjections de + volumes égaux de sérum artificiel ou de liquide de Locke, et si l'on espace suffisamment les saignées, le sang se coagule spontanément de plus en plus vite, - jusqu'à un certain moment à partir duquel la coagu- labilité diminue; on peut arriver à obtenir un sang ne coagulant plus spontanément. — MM. M. Doyon, Cl. Gautier et A. Morel ont constaté que l’ablation totale de l'intestin ne modifie pas la teneur du sang en fibrine ; si la survie est un peu longue, il y a cependant une légère augmentation de la fibrine dans le sang. — MM. J. Cluzet el A. Soulié montrent que, sous l'in- fluence des rayons X, la glande mammaire semble retardée dans son évolution vers la sécrétion lactée. — M. J. Basset communique de nouvelles expériences qui excluent la possibilité de pneumoconioses d'ori- gine digestive. — MM. A. Calmette et G. Petit onl observé que le staphylocoque virulent peut facilement traverser, non seulement la muqueuse de l'intestin grêle, mais aussi celle du gros intestin, et se retrouver ensuite dans le sang de la circulation périphérique ; à la suite, des lésions caractéristiques d'ostéomyélite peuvent apparaître chez les animaux. — M. E. Fauré- Frémiet a étudié la variabilité de quelques Opercularia commensaux des insectes aquatiques. — M. A. Frouin indique le mode de préparation de quelques sérums exclusivement agglutinants ou hémolytiques. — M!e M. Loyez critique les recherches de M. Dubuisson sur la formation du vitellus chez les Reptiles et chez les Oiseaux. — M. A. Marie signale divers cas d'animaux ayant reçu des injections de virus rabique insuffisantes pour leur donner la maladie et qui ont contracté la » rage après un traumatisme cérébral qui a diminué leur résistance. — M. H. Vincent montre la solidité de lunion de la toxine et de l’antitoxine tétaniques en mélange neutre; au bout de 24 heures, le mélange n'est plus dissociable par le chlorure de calcium, qui, dans des mélanges récents, précipite en partie la toxine. — M. M. Nicloux a constaté que, dans l’anes- thésie, l'éther se répartit d'une façon à peu près uni- forme entre les globules et le plasma sanguins, avec un léger écart en faveur du plasma en valeur relative. — M. J. Gautier a constaté que certaines septicémies (pyocyanique, streptococcique, etc.) peuvent être enrayées par l'injection, aussi précoce que possible, de tallianine (terpène ozoné). RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 8 Janvier 19057. MM: J. Gautrelet el H. Gravellat ont conslalé que l'absorption de bleu marine (couleur d’aniline) fait appa- raître dans l'urine un sulfo-conjugué ayant tous les caractères de l'indican. Le foie joue un rôle primordial dans cette transformation. — MM. Benoit-Gonin el Lañfite-Dupont montrent que le passage de la station quadrupède à la station bipède dans la série des Mam- mifères à influencé la direction des canaux semi-cireu- laires de l'oreille. — MM. Verger et Brandeis ont con- staté que les staphylocoques injectés dans le sciatique disparaissent rapidement après avoir provoqué des lé- sions diapédéliques et hémorragiques de peu d'étendue dans le tissu interstitiel. — M. G. Denigès décrit une nouvelle réaction caractéristique de l'inosite : colora- tion bleue avec le nitroprussiate de soude après oxyda- tion par l'acide azotique. — MM. L. Tribondeau el G. Hudellet ont reconnu que les rayons X provoquent dans le foie du nouveau-né des altérations histologiques et fonctionnelles (glycogène) importantes, relativement aux résullats médiocres obtenus précédemment chez l'adulte etl'animal jeune. — MM. J. Bergonié et L. Tri- bondeau ont étudié le processus involutif des follicules ovariens après rontgenisation de la glande génitale femelle. ; RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 44 Janvier 1907. M. A. Prenant décrit les caractères des cellules ciliées e{ muqueuses dans l’épithélium bronchique de ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES l'homme; ils sont analogues à ceux des cellules épi- théliales de l’œsophage du Triton. — M. L. Bruntz à découvert l'existence d'organes globuligènes chez les Isopodes terrestres (Cloportes), d’eau douce (Aselles) et marins (Ligies et Ancées). — M. Lucien a étudié le développement du ligament annulaire antérieur du carpe chez l'homme. — M. Ch. Champy décrit la structure du testicule d’un homme de 57 ans, présen- tant les caractères d’un castrat : les cellules séminales sont à l'état embryonnaire et même régressées; la glande interstitielle est complètement absente. — MM. M. Dufour et L. Vérain présentent une nouvelle forme de rhéostat liquide pour l’électrophysiologie. — M. L. Cuénot a observé l'existence de l’autotomie caudale chez le Mulot, le Lérot et le Muscardin. Elle est due à la fragilité du fourreau de la queue, qui ne peut supporter sans se rompre une légère traction, el à pro- bablement une valeur défensive vis-à-vis des carnas- siers qui pourchassent ces animaux. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 21 Décembre 1906. M. Paraf-Javal présente un chronomètre prqmentaire, Cet appareil permet d'exprimer rapidement en chiffres les proportions de pigments donnés composant une couleur donnée. Il comprend essentiellement : 1° un cadran rotatif comportant une graduation centigrade ; 2° un axe-pivot transmettant son mouvement au ca- dran ; 3° un jeu de disques colorés, à centre évidé, ayant chacun une fente radiale et un index, ce qui les rend susceptibles de se recouvrir et de former des secteurs plus ou moins étendus dont la somme est toujours égale à la surface d'un disque; 4° une douille à baïon- nette avec ressort permettant de solidariser les disques avec le cadran pendant la rotation; 5° un jeu de ron- delles-témoins permettant d'avoir sous les yeux, pen- dant la rotation, les couleurs des pigments composant la couleur à reproduire. Soit à reproduire un violet composé d'un rouge et d'un bleu donnés : Combiner un disque coloré du rouge donné et un disque coloré du bleu donné, et faire glisser les disques les uns sur les autres de manière à obtenir un secteur rouge et un secteur bleu; faire tourner et comparer le violet pro- duit par la rotation au violet à reproduire ; augmenter ou diminuer les secteurs respectifs jusqu'à ce que le violet de la rotation soit identique au violet à repro- duire. Lire les proportions du. rouge et du bleu com- posauts sur le cadran. L'exemple choisi s'applique à une couleur composée de deux pigments. On peut, en augmentant le nombre des disques, déterminer. la proportion d’un nombre quelconque de pigments composant une couleur donnée, ou déterminer quels pigments il y a lieu de choisir parmi les pigments connus pour reproduire une couleur donnée. En utili- sant les couleurs dites primaires, employées pour le procédé dit des {rois couleurs, on peut reproduire, au moyen de rouge, de bleu et de jaune, et au besoin de blancet de noir,une couleur donnée. — M. A. Jobin présente l’astrolabe à prisme de MM. A. Claude el L. Driencourt pour la détermination de la longitude et de la latitude par la méthode des hauteurs égales. Il a déjà été décrit ici même en détail par les au- teurs, — M. H. Le Chatelier présente un manomètre de grande sensibilité destiné à la mesure de la vitesse des courants gazeux dans les cheminées d'usine au moyen du tube de Pitot. Il permet de faire les mesures à 1/100 de millimètre et est en mème temps assez rus- tique pour pouvoir être mis entre les mains d'ouvriers. l'utilise un double principe : celui de la juxtaposition de liquides de densité voisine, déjà employé par Krebs, et celui de l'émergence d’une pointe noyée, déjà em- ployé par M. Le Chatelier. On ramène le niveau à une hauteur invariable en introduisant ou enlevant de 1 Voir la Revue des 30 novembre et 30 décembre 1905, &. XVI, p. 972 et 1071. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES PE PTE CT ERP l'eau dans une des branches à large section du mano- | de lait placés dans une capsule de porcelaine; ap mètre au moyen d'une burette de Mohr reliée à l'appa- reil par un tube en caoutchouc. La section des surfaces libres de l'eau est de 1 décimètre carré, de telle sorte que 1/10 de centimètre cube correspond à 1/100 de millimètre de hauteur d'eau. La communication est établie entre les deux branches au moyen d'un siphon renversé, dont la disposition est due à M. Stanton, du National Physical Laboratory de Londres. Le liquide non miscible à l'eau, dont on maintient la surface de sépa- ration au sommet d'un tube coupé droit au milieu duquel affleure la pointe, est de l'essence minérale. On augmenterait considérablement la sensibilité et l'on obliendrait le 14/1000 de millimètre, si lon pouvait employer un liquide de densité plus voisine de celle de l'eau. Mais les tentatives faites dans cette voie ont échoué, à cause de la propriété qu'ont ces liquides de s'émulsionner rapidement avec l’eau. SOCIETE CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 11 Janvier 4907. La Société procède au renouvellement de son Bu- reau, qui est ainsi constitué pour 1907 : President : M. L. Bouveault; Vice-présidents : MM. H. Moissan, Pascalis, P. Feundler et M. Hanriot: Secrétaire général : M. A. Béhal; Secrétaire : M. G. Bertrand. SOCIETE ROYALE DE LONDRES Séance du 15 Novembre 1906 (suite). M. H. L. Bronson : Æflet de la température sur l'activité du radium et ses produits de transformation. Un grand nombre de savants ont essayé de faire varier l'activité de diverses substances radio-actives en les soumettant soit à de très hautes températures, soit à des températures très basses. Parmi tous ces essais, deux seulement, à la connaissance de lauteur, ont apparemment donné des résultats positifs. Les expé- riences maintenant décrites ne présentent aucune preuve d’un changement quelconque dans l’activité des produits de transformation du radium lorsqu'ils sont soumis à des températures variant entre — 180° C. et 4600° C. Si quelque changement a lieu, il est très faible, et ne peut être supérieur à 4 °/, dans le cas du radium C pour des températures variant entre — 180° C. et 1.600° C., et supérieur à 4 °/, dans le cas de l’éma- natjon du radium B, pour des températures variant entre — 180° C. et 1.500° C. Ainsi disparaît la seule exception connue à la règle générale que l'activité des substances radio-actives n’est pas affectée par la tem- pérature. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE MANCHESTER Séance du T Décembre 1906. MM. L. G. Radcliffe et W. H. Maddocks ont déter- iminé les constantes d'un bloc de beurre de tourbe, trouvé dans une tourbière à Maghery (Irlande). I fond entre 46,5 et 499,5 C.; D—0,839 ; il contient 98 °/, de malière grasse soluble dans l’éther. L'indice d'acide est. de 201,9, l'indice de saponification de 394,1, l'indice Reichert-Meissl de 1,2, l'indice de Hehner de 98,5 °/,, l'indice d'iode de 10 °/,. SECTION DU YORKSHIRE Séance du 3 Décembre 1906. M. F. W. Richardson propose une méthode de déter- mination colorimétrique de la formaldéhyde dans le lait. On ajoute goutte à goutte 4 centimètres cubes d'acide sulfurique ferrugineux fort à5 centimètres cubes ————————————pZEZELELEEUEL qe a . l'auteur consiste en une fluorescence singulière, de chaque goutte, on agite vigoureusement. En présene de formaldéhyde, il se forme une coloration violet qu'on compare avec des tubes titrés. — MM. I. Q. chardson, S. H. Wood el W. P. Bloxam étudie l'influence des impuretés dans la détermination de Pin- digo par la méthode au tétrasulfonate. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 16 Novembre 1906. M. M. Planck fait la nécrologie de M. Paul Dru professeur à l’Université de Berlin. Il rend compte la vie et de l'œuvre de ce savant, dont la mort subite, survenue il y aquelques mois, a été universellement re- grettée. — M. G. E. Lilienfeld adresse une Note sur des phénomènes d’un nouveau genre observés dans la colonne positive des effluves électriques. Cette note préliminaire est relative à la démonstration expéri- mentale d'un mouvement ordonné dans la décharge électrique au sein d’un gaz raréfié, à distance considé- rable des électrodes, c’est-à-dire dans les portions de la décharge exemptes de toute influence de la part des phénomènes des électrodes. Les phénomènes décrits par l’auteur rendent probable la présence d'un mou- vement ordonné tout nouveau se produisant, pour un vide avancé (de l’ordre de grandeur de 0#,01 de mer-= cure), dans la colonne positive d’un effluve électrique; pour les pressions en question, le chemin moyen d'une molécule est comparable aux dimensions des tubes à vide employés. Le phénomène remarqué par nuance rubis, des parois de verre, fluorescence qui s'accompagne souvent d’un échauffement intense du verre et qui se présente dans le cas de raréfactions et de recharges répétées d’un tube à vide rempli d'oxy- gène. La manière dont se comporte la fluorescence rouge fait voir que les particules qui la produisent exécutent un mouvement ordonné de la cathode vers l’anode. La déviation magnétique de cette fluorescence produite par le champ faible d'un aimaut en acier dé- montre que ce ne sont pas les corpuscules négatifs seuls qui engendrent cette fluorescence, mais qu'il se présente en mème temps un autre facteur, identique peut-être aux particules positivement chargées. L'au- teur étudie enfin la déviation électro-statique de cette luminescence. M. Goldstein présente une remarque suivant laquelle un mouvement ordonné dans la lumi- uescence positive des tubes de Geissler a été décrit il y a déjà quelque temps par lui-même. À ce propos, 1l avait été conduit à admettre que la lumière positive des gaz fortement raréfiés se compose de rayons recti- lignes se propageant de la cathode vers l’anode. Ces rayons, tout en montrant les mèmes phénomènes qualitatifs que les rayons cathodiques, présentaient une rigidité magnétique bien moindre. — M. G.E. Li- lienfeld adresse une Note sur la dispersion anormale de l'effluve électrique dans la colonne positive. On sait que les raies spectrales émises par les tubes de Geissler sont, en général, irréversibles. L'auteur se pose la tâche de déterminer si, au moyen d'un dispositif aussi parfait que possible, on ne pourrait démontrer l’exis- tence d’une dispersion anormale. Il détermine, à cet effet, la vitesse de la lumière dans la colonne positive de l’effluve pour des lumières homogènes appartenant à plusieurs régions du spectre, en observant les bandes d'interférences produites sur les deux plaques du ré- fractomètre interférenciel de Jamin. Ces expériences font voir que la vitesse de la lumière dans un gaz luminescent n'est influencée sensiblement que par l'échauffement dû au courant électrique et nullement par la luminescence du gaz. Aussi il ne peut y avoir de dispersion anormale. — M. G. C. Schmidt étudie, l'émanation du phosphore. Il fait voir que, dans l'oxy- dation lente du phosphore, l'on ne produit tout au plus que des traces d'ions. La conductibilité provoquée par. l'oxydation du phosphore n'est qu'apparente; elle est due à la convection de l'électricité par les produits - d'oxydalion solides et conducteurs de consistance nébuleuse. Les particules conductrices consistent en acides du phosphore. — M. W. Biegon von Czudno- … chowskidécrit un dispositif construit par M.E. Ruhmer pour l'opération intermittente d'une bobine d'induc- tion, à interrupteur fonctionnant automatiquement, . sans pile accessoire pour actionner ce dernier. à ALFRED GRADENWITZ. … ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 24 Novembre 1906 (fn). 3° SCIENCES NATURELLES. — M. M. Weber : La faune - ichthyologique de la Nouvelle-Guinée. Communication . de quelques résultats obtenus par M. F. W. R. Koch, médecin de l’Expédition néerlandaise vers la Nouvelle- . Guinée en 1903. — Rapport de MM.J. M. van Bemmelen, K. Martin et G. A. F. Molengraaff sur une étude de M. H. G. Jonker : « Lijst van geschriften, welke han- delen over of van belang zyn voor de geologie van Neder- land, 1734-1906 » (Liste des publications sur la géologie des Pays-Bas, 1734-1906). Cette étude va paraître dans les Mémoires de l'Académie. — M. C. Winkler présente au nom de M. J. W. Langelaan : « On congeuital ataxXia in a cat » (Sur l'ataxie congénitale d’un chat). Sont nommés rapporteurs MM. C. Winkler et Th. hace. Séance du 29 Décembre 1906. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. G. van de Sande Bakhuyzen communique un post-seriptum de la main de M. J. A.C. Oudemans à la dernière partie de Pétude sur les occultations et les éclipses des satellites de Jupiter (voir /ev. génér. des Se., t. XNIIL, p. 88). — Ensuite M. Bakhuyzen fait un discours à la mé- moire de M.J. A.C.Oudemans, né le 16 décembre 1827, décédé en décémbre 1906, depuis 1856 professeur d'As- tronomieé à l'Université d'Utrecht. — M. Schoute pré- sente au nom de M. F. Schuh : Sur le lieu des couples de points communs et l'enveloppe des cordes communes de courbes de trois faisceaux. Seconde partie : Appli- cation des résultats généraux de la première partie (voir Rev. génér.des Se., t. XVIII, p. 88) au cas spécial de trois faisceaux de coniques. Le lieu L' et l’enve- loppe E‘ du cas général; le lieu L5 et l'enveloppe E? du cas des faisceaux ABCD, ABEF, CDGH; étude de plu- sieurs cas encore plus spéciaux. — Ensuite M. Schoute présente, encore au nom.de M. F. Schuh : Sur Le lieu ‘des couples de points communs de surfaces de quatre faisceaux. Dans le cas général, la surface en question est de l’ordre 4 {rstu H 1) — 2 (MH sS+Lt+u),r,s,t,u représentant les ordres des quatre faisceaux de surfaces. Influence de plusieurs particularités, que les courbes de base de deux, de trois ou des quatre faisceaux ad- mettent des points communs. — Enfin, M. Schoute présente au nom de M. W. À. Wythof : La règle de Néper dans l'espace quadridimensional, Si l'on consi- dère comme éléments d'un triangle sphérique A,A.,A., rectangle en A,, l'hypothénuse a,, les deux angles A,, À et les compléments ] 1 dl 5 T7 ds, 9T—43 des côtés 2,, a,, chaque formule du triangle sphérique rectangle admet la substitution cyclique : 1 1 (Ass ST — 23; de, 5% — di, A). Ici cette règle mnémonique de Néper est étendue à lespace à quatre dimensions, au tétraèdre hypersphé- rique A,A,A,A, birectangle, les arêtes AAS NE TOA AT élant respectivement normales aux faces A AA, et A,A,A,. Ainsi les deux séries de cinq triangles sphé- iques rectangles dont les hypothénuses forment un quintangle sphérique sont remplacées par une série ACADÉÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 197 unique de douze tétraèdres opposés deux à deux, et la substitution cyclique est remplacée par une substitu- tion à trois cycles. Rapport entre les volumes de deux quelconques des tétraèdres de la série nouvelle, etc. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. W. H. Julius commu- nique au nom de M. W. J. H. Moll : l'echerches sur quelques spectres métalliques ultra-rouges. Les spectres des divers métaux alcalins se prêtent, par suite de leur structure relativement simple, à l'étude de l’ultra- rouge; effectivement plusieurs observateurs ont cher- ché à déterminer les raies d'émission de ces métaux dans ce domaine. Pour la première partie du domaine, il suffit de sensibiliser la plaque photographique (expé- riences de Lehmann et de Snow). Pour les parties plus éloignées, on ne connaît que les expériences de W. W. Coblentz, qui ont donné le résultat négatif que les méteux alcalins n’admettent pas d'émission spéciale au delà de 1,5 u. Au contraire, l'auteur prouve l’exis- tence de plusieurs raies d'émission de ces métaux au delà de cette limite. Ici il fait connaître la méthode dont il s'est servi. Ces résultats sont déposés dans cinq petits tableaux concernant Na, K, Rb, Cs et Hg. Les expé- riences avec le lithium n'ont pas donné de résultats plausibles, — M.J. D. van der Waals : Une remarque sur la théorie de la surface Ÿ de mélanges binaires. L'expérience intéressante de M. Kamerlingh Onnes sur un gazcoulant au fond d'un liquide (/?ev yénér. des Se. t. XVIII, p. 88) a dirigé de nouveau l'attention sur la direction de la tangente au point de plissement d'un mélange binaire. Autrefois, l’auteur a examiné la 4 dv condition m) — æ, sous laquelle cette tangente dx est parallèle à l'axe des v. Ici il indique trois problèmes en rapport avec celle condition. Dans le premier, do- miné par les équations : dy d24 ds dv? *dxdv RTE 0, le point considéré est le point critique du mélange indécomposable, et l’on trouve approximativement : d. log à 5 VS: Dane ou =) 9 o J suivant que » dépend ou ne dépend pas du volume, Alors les deux lignes se coupent encore en deux points; le second problème s'occupe du cas de coïncidence de ces deux points et dépend des équations : dèy FEU ( CRU 1e AU] dy av? > Gxdv = Vaveux) = gxedv dis° uv? dxdv Le troisième problème exige que la ligne possède un point double. Les trois problèmes ana- logues qu'on obtient en interchangeant v et x. Appli- cation au cas de l'hydrogène et de l'hélium. — Ensuite M. van der Waals présente, au nom de M. ©. Postma : Encore quelques remarques sur la quantité H et la distribution de la vitesse d'après Maxwell (voir Zev. génér. des Se., t. XVIL, p. 304). Dans son article pré- cédent, l’auteur a critiqué les démonstrations de la distribution de Maxwell comme l'état le plus probable d'un gaz données par L. Boltzmann et J. IL. Jeans. lei, il fait voir qu'une autre interprétation de l'analyse de ces savants lève les difficultés. Cette interprétation nouvelle s'accorde tout à fait avec les bases de la théorie de Gibbs dans sa « Statistical Mechanics elle lui permet, en outre, de corriger la démonstration du théorème analogue pour un gaz non réglé, donnée 198 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES par L. Boltzmann dans son « Gastheorie », d'une erreur indiqué e pay C. H. Wind. — M. H. Kamerlingh Cnnes présente, aussi au nom de M. W. H. Keesom : Contri- bution à la connaissance de la surface % de van der Waals. XII. Le coulage à fond de la phase gazeuse dans la phase fluide chez 1 mélanges binaires (com parez Rev: génér. des Se., t. XVIII, p. 88). 1. Intro- duction. Traitement du one à l’aide des sur- faces à d'énergie libre construites pour l'unité de poids du mélange sur les coordonnées x, v, {. Comme l'a remarqué van der Waals, les lois de stabilité et de coexistence des phases sont les mêmes pour ces sur- faces-ci Y et les surfaces Ÿ ordinaires se rapportant à la quantité moléculaire; les phases coexistantes cor- respondent aux points de contact du plan bitangent, roulant sur le pli de la surface. Donc il s’agit princi- palement de la projection de la connoïde et des cordes de contact connodales sur le plan xv. Les auteurs laissent hors de considération des cas plus particuliers; ils se bornent à des températures où l'apparition du pli longitudinal n'entraine pas de perturbation. Pour le cas d'un gaz sans attraction (1x, —0), dont les molé- cules ont une certaine dimension, l'étude des surfaces L se simplifie. Provisoirement, on estime probable que l'hélium admet encore une certaine attraction. Néan- moins, le cas d'un gaz sans attraction est étudié à fond pour pouvoir comparer ce que les expériences se rap- portant à des mélanges avec He produisent. 2. Pression et composition barotropiques. 3. Phénomènes barotro- piques pendant la compression d'un mélange de com- position donnée. 4. Perturbations par les attractions capillaires. 5. Remarques sur les expériences ulté- rieures avec l'hélium et l'hydrogène. XII Le coulage à fond et la réascension de la phase gazeuse dans la phase fluide chez les mélanges binaires Introduc- tion. A. Sur les conditions de l'apparition d'un point de plissement barotropique. (A suivre.) — Ensuite M. Ka- merlinghOnnes présente, aussi au nom de M.C.Braak : Isothermes de qaz biatomiques et de leurs mélanges binaires. NT. Isothermes de l'hydrogène entre — 104 C. et — 2170 C. 1. Introduction. Les expériences dont il s'agit se rapportent à la recherche de l'équation pv 0,30! 0,20 + 0,10 È à È 10 20 30 #0 50 FOIE Fig. 1. — Jsothermes de l'hydrogène. d'état de l'hydrogène, étudiée depuis plusieurs années au Laboratoire de Physique de l'Université de Leyde comparez Rev. géueér. des Se., t. XII, p. 391). Apercu des appareils. 3. Le manomètre. 4. Les pié- zomètres et les appareils auxiliaires. 5. L'hydrogène. 6. Les températures. 7. Les expériences. 8. Calcul des expériences. 9. Aperçu d'une détermination. 10. Valeurs de pva. 11. Erreur probable d'une détermination. 12. Coeflicients viriaux individuels provisoires. 13. Mi- nima de pv. À l'aide de la méthode des moindres car- is, les auteurs trouvent la parabole p=P,+P,(pvf) HP,(pra},oùP,—=—2.556,P,=—551,689,P,—— 135251 (voir le diagramme ci-joint). Les données sur lesquelles la théorie des TOITANES carrés a été appliquée se trouvent réunies deus le petit tableau suivant : TaBLeAu [. — Minima de pv. — 1820,81 — 1950,27 — 2040.70 — 212,76 — 2170,41 0,32630 La dernière colonne fait connaître la différence entre les valeurs de p observées et calculées en atmosphères: Le sommet de la parabole, lieu des points minima des lignes pv, se trouve à une pression de %3,7 atmosphères correspondant à T—63°,5 par rapport au zéro absolu 273,09. — M. A. F. Holleman présente, aussi au nom de M. G. L. Voerman : Les acides thioy héniques « el 6. Ces deux acides, trouvés en 1886 par V. Meyer, ont été obtenus par les auteurs à l’aide d'une méthode de préparation différente, qui donne surtout des quantités considérables de l'acide « D'après les re- cherches de M. Vœrman, ces der x acides donnent une série continue de mélanges. Les points du commen- cement de la congélation peuvent être déterminés avec certitrde, les points terminaux de la congélation seulement avec une incertitude de 00,5 C. 39 RCGIENCES NATURFLLES. — M, J. D. van der Waals présente, au nom de A. Pulle : Z{apport sur mes recherches, faites pendant mon séjour an Jardin des plantes à Buitenzorq (ile de Java). - M. H. Zwaarde- maker présente, aussi au nom de M. P. Wolterson : Sur Ja relation quantitative entre l'irritation du «nervus vaqus » et l'action du cœur. Les expériences de M. Wolterson, dont les résultats vont paraître dans uve thèse, ont porté sur la Tortue de marais (Zmys orbicular JE les conclusions de ce travail sont les sui- vantes : La chronotropie engendrée par l'irritation du nerf peut être réduite à une action catalytique négative sur un chimisme qui forme la base de la pulsation. Par analogie, l'inotropie se prête à une considération semblable : seulement, la possibilité de la démonstra= tion fait défaut parce qu'à présent on ne peut pas accuser des temps de transformations égaux. Le nerf vague droit de la tortue admet deux espèces de fibre négativement chronotropes; le cœur de la tortue montre une sensibilité considérable pour l'inotropie du ventricule après l'excitation du vague; quelquefois le cœur échauffé montre un remuement, immédiate- ment après le retard principal causé par l'irritation. — M. H. W. Beijerinck présente la thèSe de M. N. L. Sôhngen : « Het ontstaan en verdwynen van waterstof en methaan onder den invloed van het dagelykseh leven » (La génération et la disparition de l'hydrogène sous linquents de la vie organique). — M. J. W.Moll présente : « Mikrographie des Holzes der auf Java nul Baumarten » (Description microgra® phique du bois des espèces d'arbres de Java), composée, sous la direction de M. Moll, par M. H. H.Jarssonius. P. H. ScHouTE. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Casselle. 18° ANNÉE n 28 FÉVRIER 1907 Revue générale Des Sciences pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rune du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Ernesto Cesaro. — La Science a fait une grande perte dans la personne du mathématicien italien Cesàro, mort, il y a quelque temps, dans un dramatique acci- dent, à la plage de Torre Annunziata, près de Naples, victime de son dévouement paternel. Ernesto Cesàro naquit à Naples en 1859. C'est donc dans la force de l’âge, c'est dans la pleine maturité de son talent que la mort est venue le frapper. Si nous ajoutons qu'il fit paraitre ses premiers travaux à l’âge de vingt-deux ans, que, deux ans plus tard, son Mémoire sur diverses questions d'Arithmétique mérita d'être publié par les soins de l'Académie de Liège, et qu'en 4892 Beltrami, dans un Rapport à la suite duquel Cesàro recut la médaille d'or de la Société italienne des Sciences, énumérait plusde deux cents de ses travaux, nous aurons donné une idée de deux de ses qualités les plus remarquables : une précocité rare et une mer- veilleuse activité. Ces heureuses dispositions recurent leur première et, cependant, à peu près définitive orientation des maîtres de l'Université de Liège”, où Cesaro vint faire ses études?, et principalement de Catalan et de Neu- berg. S'inspirant de leurs conseils, — peut-être aussi de ceux d'Hermite, qu'il avait eu le bonheur de con- naître pendant sa vie d'étudiant et dont ses travaux atlirèrent rapidement l'intérêt, — le jeune géomètre porta son attention sur la théorie des nombres et les lois asymptotiques si cachées auxquelles elle conduit : avant tout, sur la plus mystérieuse de toutes, la distri- bution des nombres premiers. Tchebycheff avait publié 1 Son frère, Joseph Cesàro, y occupe actuellement encore la chaire de Minéralogie. ? [1 les avait commencées en vue de la carrière d'ingé- nieur. Mais sa passion pour la science pure, traversée cepen- dant à cette époque par de graves embarras pécuniaires qui le forcèrent mème à interrompre momentanément scolarité, fut la plus forte, etil s'y abandonna sans méme acquérir le diplôme qu'il avait visé tout d'abord. Au reste, Cesàro aimait peu les examens : il offre un exemple typique de la crainte qu'ils peuvent parfois occasionner à quelques- uns de ceux qui donnent, par ailleurs, les preuves les plus éclatantes de supériorité scientifique. sa REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907, ses célèbres travaux sur cette question et obtenu, par sa puissante méthode, une expression approchée du produit des nombres premiers inférieurs à une quantité quelconque donnée. Mais il n'avait pas poursuivi jusqu’au bout les con- séquences de sa découverte; beaucoup de questions relatives à ce sujet restaient à élucider, beaucoup de résultats à préciser. C'est à cette tâche que se voua surtout Cesàro. C'est ainsi qu'il put resserrer notable- ment les limites indiquées par le géomètre russe: la formule d'approximation qu'il proposa, pour la substi- tuer à celle de Tchebycheff, ne le cède en exactitude qu'à une seule autre, celle que fournissent les profondes méthodes de Riemann. C'est ainsi également qu'il par- vint à démontrer l'expression obtenue empiriquement par Pervouchine pour le n°%t nombre premier, et qu'on lui doit une évaluation asymptotique pour les pro- duitssi intéressants que l'on obtient en multipliantentre à ee eux les facteurs de la forme 4 —- (où les p sont les J nombres premiers conséculifs) et auxquels conduit naturellement l'étude dela fonction £(s) pour s—1. De telles recherches exigent une grande pénétra- tion; elles ne peuvent être abordées sans une connais- sance approfondie des propriétés des séries et font nécessairement intervenir une foule de questions asymptotiques délicates relatives aux suites infinies. Cesàro fit, dans ce domaine général, plusieurs décou- vertes importantes : il fut amené, en particulier, à introduire la notion de sommation moyenne, qui à joué un rôle important dans les recherches les plus récentes. Grâce à ces dernières études, il put suivre le grand mouvement qui entraina les mathématiciens de Ja fin du 19° siècle vers la théorie des fonctions. A cette ten- dance se rattachent, entre autres, des contributions à l'étude d’une série de Taylor sur son cercle de conver- gence et à celle du genre de la dérivée d'une fonction entière d'après les travaux de Laguerre. De longue date, enfin, il sentit également la nécessité de faire évoluer la Science mathématique dans la direc- tion des applications concrètes, el se consacra avec succès à plusieurs questions relatives aux déformations élastiques. & 130 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Après avoir enseigné cinq ans à l'Université de Palerme, où il fut nommé presque d'emblée, à l’âge de vingt-sept ans, professeur titulaire, Cesàro revint(1891) à Naples, son pays natal, pour y occuper la chaire de Calcul infinitésimal. Outre ses travaux originaux, il laisse des traités très estimés sur l'Analyse, la Géo- métrie, la Théorie de l'Elasticité. $ 2. — Astronomie Castor, étoile quadruple.— Pendantlongtemps, on à admis qu'un des pius beaux systèmes du ciel, Castor, était formé par deux composantes, de 2° et de 3° grandeurs, décrivant en 350 années une ellipse allongée autour de leur centre de gravité ; puis l'emploi de la spectroscopie permit d'étendre et de compléter ce système si curieux puisque, dès 1896, M. Belopolsky observait que la composante de 3° grandeur n'est elle- mème qu'un système binaire, dont la révolution de- mande {rois jours seulement. Et voici que, dans l'Astro- physical Journal (juin 1906), M. Curtiss, de Lick, an- nonce que la composante de 2° grandeur possède, elle aussi, un système orbital périodique de neuf jours, avec une excentricité considérable de 0,5, tandis que le système secondaire le moins brillant, défini à Poul- kovo par M. Belopolsky, est sensiblement circulaire. Pour avoir les dimensions de ces systèmes secon- daires, il faudrait connaitre les inclinaisons de leurs plans sur celui de l'orbite principale, point laissé dans l'ombre par les méthodes spectroscopiques; mais, si lon veut admettre que ces plans coïncident, le prin- cipal étant défini par les observations visuelles de Castor, les demi-grands axes des systèmes secondaires peuvent être évalués à 1.667.000 kilomètres pour l'étoile de 2° grandeur 1.135.000 = = sel ee Ces chiffres sont hypothéliques, certes : mais, à coup sûr, les orbites sont bien petites par rapport au système principal. M. Curtiss, au reste, va plus loin : avec une parallaxe de 0",05, il trouve une masse globale de 12,7 par rap- port à celle du Soleil; comme nous l'avons déjà ren- contré par ailleurs, le système le moins brillant, ce- lui de l'étoile de 3° grandeur, l'emporte par sa masse, qui vaudrait six fois la somme des masses du compa - non le plus brillant. Voilà un système de premier ordre par l'intérêt qu'il présente, les travaux qu'il suscitera, et les surprises qu'il nous réserve. Aetion d’une masse intra-mercurielle sur la longitude de la Lune. — La théorie de la Lune est loin de concorder avec l'observation, qui a mis en évidence d'importantes perturbations ne pouvant, selon toute apparence, se rattacher aux actions des masses connues du système solaire. Si l'on veut, au reste, être utilement renseigné sur cette délicate théorie, 11 faut recourir aux excellents travaux de M. Andoyer; notam- ment, on pourrase faire une idée précise des desiderata actuels de la question en lisant l'ouvrage que cet auteur consacre à notre satellite dans la collection Seientia; mais, sans entrer ici dans les détails, nous pouvons rappeler que l’une des inégalités les mieux connues a une amplitude d'environ une demi-minute d'arc, avec une période évaluée à deux cent soixante-treize ans; d'autres, à coefficients plus faibles, sont également manifestes. Enfin, la valeur théorique de l'accélération séculaire n'est pas vérifiée par l'ensemble des obser- vations d'anciennes éclipses. Dans ces conditions, n'y a-t-il pas lieu de se deman- der si, parmi les causes capables de produire ces écarts entre le calcul et l'observation, il ne conviendrait pas de considérer l'action d'une masse voisine du Soleil ? Sans rien préjuger de l'existence d’un pareil corps, tel est le problème que s'est posé M. Saint-Blancat dans un travail important présenté à la Faculté des Sciences de Paris, comme thèse de doctorat, et qui paraitra ultérieurement dans les Annales de la Faculté des Sciences de Toulouse. L'auteur, astronome adjoint à l'Observatoire de Toulouse, recherche donc l'ordre de grandeur des perturbations que pourrait occasionner sur la longitude de la Lune une planète intramercu= rielle convenablement placée : il s'agit uniquement, bien entendu, d'inégalités à longue période, les seules qui puissent être sensibles dans ce cas. F Les conclusions sont les suivantes : pour une tren= taine d’orbites d’un tel astre, l'inégalité de deux cent soixante-treize ans de période pourrait être attribuée: à une masse au plus égale à celle de Mercure; dans le cas de plusieurs orbites, la masse nécessaire serait voisine de celle de notre satellite; pour deux d’entre elles, la douzième partie de Mercure suflirait; enfin, des masses encore beaucoup plus faibles seraient sus= ceptibles de fournir de fortes inégalités à très longue période. L'explication des anomalies du mouvement de la Lune préoccupe les astronomes depuis un demi-siècle, et, dans l'état actuel, aucune tentative ne doit être négligée en vue d’une solution possible. Les recherches que nous venons de mentionner n'étaient pas super- flues : bien mieux, le grand intérèt qu'elles présentent est hautement légitimé par les conclusions, car on voit bien quelle serait l'importance, au point de vue du mouvement de la Lune, de l'existence de faibles masses intramercurielles, réparties au moins sur certaines orbites bien déterminées. Au point de vue analytique, M. de Saint-Blancat utilise aussi une méthode inédite, imaginée par M. Andoyer, qui s’est proposé de l'appliquer à un sys- tème formé de deux étoiles doubles : cette nouvelle forme de la fonction perturbatrice relative à l’action directe dispense, pour le cas d’une planète voisine du Soleil, de recourir aux formules d'action indirecte, et permet une vérification approchée de l’ensemble des calculs effectués par les méthodes ordinaires; en outre, elle fournit, sur un cas particulier bien limité, une comparaison très précieuse des résultats que peuvent donner et la méthode ordinaire et le nouveau procédé, dont M. Andoyer se réserve de donner un exposé com= plet. Ainsi, tant par les méthodes convergentes employées que par l'originalité des résultats, et par la solution plau= sible qu'il apporte à un problème délicat, et par les conséquences non encore examinées de l'existence de planètes intramercurielles, voie nouvelle et peut-être féconde, le travail de M. Saint-Blancat constitue u jalon, une étape précieuse pour les astronomes, et faib grand honneur à l’auteur et à l'activité scientifique de l'Observatoire de Toulouse. $S 3. — Art de l’Ingénieur Les récents progrès des moteurs à gaz et gazogènes. — M. G. Richard à fait récemment sun ce sujet, à la Société d'Encouragement pour lIndus= trie nationale,une communication dont nous extrayon les renseignements qui suivent : L'application des moteurs à gaz à l'utilisation des gaz de hauts-fourneaux ne fait que s'étendre de plu en plus. On sait qu'elle a conduit à la création de mo= teurs d’une puissance qui eût semblé inabordable il a quelques années seulement, et qu'on y est parven par de nombreux perfectionnements, dont le principal est l'abandon presque universel des types à Sim effet ou ne donnant qu'un coup par cylindre tous le deux tours. Mais l'exécution de ces grands cylindre deux fois plus actifs que ceux des anciennes machines n'a pas été sans entraîner de grandes difficultés pou le refroidissement de leurs parois, de leurs culasses; @ même de leurs pistons, l'exécution de stuffing bo étanches et durables, et enfin la construction de sou papes de distribution, celles de l'échappement surtout; sensibles au régulateur, convenablement refroidie [ CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 131 —— — —— . — — pour ne pas se brüler ni se gauchir et disposées de manière à permeltre un accès et un entretien faciles. Ces difficultés, ainsi que celles de lallumage et du - réglage, de la mise en train et aussi du nettoyage des gaz, ne sont pas encore entièrement vaincues, mais elles sont suffisamment résolues néanmoins pour que ces moteurs puissent être considérés comme absolument pratiques ‘. Parallèlement au développement de ces moteurs, il convient de signaler celui des gazogènes destinés à les alimenter, principalement des gazogènes à aspiration, qui dispensent des gazomètres, débitent proportionnel- lement aux besoins du moteur et sans danger de fuites d'oxyde de carbone. La grande question, pour ces gazogènes, est de permettre (eyes facile et sûr de charbons plus ou moins bitumeux, menus et de basse qualité ?, dont il faut empêcher le collage dans la cuve du gazogène et évacuer les goudrons soit par leur combustion dans le gazogène même, soit par des la- vages. Le problème n'est pas encore complètement résolu, mais il progresse chaque jour par une série de tâtonnements expérimentaux. D'autres perfectionne- ments, relatifs à la conservation des garnissages, au décrassage des grilles, à la récupération des chaleurs perdues, s'effectuent chaque jour, de sorte que ces gazogènes sont actuellement des appareils qui, avec des anthracites, du coke et des charbons maigres, mar- chent avec autant de sécurité et de simplicité que les chaudières à vapeur, et qu'on n'hésite pas à leur con- lier le sort de très vastes entreprises, telles que la dis- ibution d'électricité à Madrid, un peu osée peut-être, avec ses cinq moteurs de 2.000 chevaux, et ses gazo- mètres à récupération d’ammoniaque. La machine à vapeur subit done actuellement, de ces moteurs, un rude assaut, justifié par ce fait qu'ils ne dépensent guère plus de #50 à 500 grammes de char- bon, même pour des petites puissances d’une dizaine de chevaux ; mais il serait présomplueux d'en conclure à la disparition prochaine des machines à vapeur. La question du meilleur type de moteur à adopter doit, en effet, être étudiée, dans chaque cas, non seulement au point de vue seul de l'économie de combustible, qui est loin, très souvent, d'être la dominante, mais aussi en raison de toutes sortes de considérations locales et particulières à chaque espèce, et qui rendent impos- Sible toute solution générale d'une pareille question. C'est ainsi que les applications de moteurs à gaz aux navires, malgré leurs avantages incontestables de sécu- rité et d'économie de combustible, ne se développent que très lentement. La souplesse et la sûreté de manœuvre des machines à vapeur, qui ont en elles- mêmes leur changement de vitesse et leur changement de marche, compensent, en effet, largement, dès que OR AN NL ! Revue de Mécanique, mars-et oclobre 1906. ? On peut employer même du lignite à 4.800 calories, qui donne le cheval-heure pour 0k,T (Neumann) “Revue de Mécanique, juillet 1906, p. 67. A côté de ces grandes installations, signalons les appli- cations des gazogènes aux locomobiles, notamment celles de la Société allemande de Hanovre (Deutsche Sauggas Lo- comobile Werke) qui vont de 10 à 30 chevaux. Les loco- mobiles à gazogènes de 15 chevaux dépensent par cheval- heure 0Kk,6 d'anthracite environ. ® Voir Revue de Mécanique, décembre 1906, p. 513-544, Vétude de M. Mathot « sur les moteurs à combustion in- terne el les moteurs à vapeur», On est d'ailleurs descendu, avec la surchauffe, à des dépenses de 450 grammes de char- bon par cheval indiqué pour une machine à vapeur de 500 chevaux. A sienaler aussi un essai de Barrus avec un gazogène de 100 chevaux où l'on aurait réalisé une économie de 38 °/, (0K,50 au lieu de 0KS d'anthracite par cheval effectif) en remplaçant l'injection d'eau au gazogène par celle d'une parlie des gaz d'échappement du moteur {Cassiers Magazine, septembre 1906). À l'usine Menier, à Noisiel, on serait arrivé à utiliser des déchets agricoles dans un gazogène Richet au prix de 0 fr. 043 par cheval heure. 5 Bulletin de la Soc. d'Encourag. de décembre 1905, p. 1509, et mai 1906, p. 588. 7 l'on atteint des puissances d'une centaine de chevaux les avantages précités des moteurs à gaz, de sorte que les projets, très nombreux et fort ingénieux :, élaborés pour la substitution de ces moteurs aux machines à vapeur sur les grands navires, sont encore à l'état d'hypothèse. Le progrès des applications des moteurs à la petite navigation marche, au contraire, avec plus de rapidité, en dehors, bien entendu, de l'automobilisme, parce qu'ils présentent, dans certains cas, comme pour les sous- marins et les petits torpilleurs*, des avantages tout particuliers. $ 4. — Electricité industrielle Expériences de téléphonie sans fil. — On se rappelle les belles expériences faites, il y a quelques années, par M. E. Ruhmer, à Berlin, dans le domaine encore si peu exploré de la téléphonie sans fil®, L'expé- rimentateur allemand se servait d'un dispositif compre- nant, à la station de départ, un projecteur au foyer duquel se trouvait un arc voltaique dit chantant, inséré dans le circuit d'un microphone, et, à la station de réception, un autre projecteur, au foyer duquel était placée une pile à sélénium faisant partie d’un cir- cuit téléphonique. Les ondes acoustiques des mots prononcés devant le microphone produisaient, au moyen des oscillations de courant concomitantes, des fluctuations d'intensité lumineuse de l'arc chantant, et les rayons d'intensité variable émanant du projecteur de départ, après avoir frappé le projecteur disposé à la station d'arrivée, étaient concentrés sur la pile à sélénium dont ils modifiaient la résistance électrique au fur et à mesure des variations d'intensité du cou- rant microphonique. Les variations de résistance de la pile à sélénium se traduisaient, enfin, par des modifi- cations correspondantes de l'intensité du courant tra- versant le téléphone, dont la membrane reproduisait ainsi les vibrations acoustiques frappant la membrane du microphone de départ. Le système précédent ne se prête qu'aux communi- cations entre deux stations mutuellement visibles, donc disposées à petite distance l’une de l’autre. Aussi beau- coup d'expérimentateurs ont-ils cherché à remplacer les ondes lumineuses par les ondes électriques, qui, dans la télégraphie sans fil, servent d'agent de trans- mission. En raison de l'impossibilité où l’on était de produire des oscillations électriques à amplitude cons- tante, ces tentatives restèrent sans résultat. Or, M. Poul- sen, à Copenhague, vient d'imaginer un procédé pour engendrer, au moyen d'un arc chantant plongé dans une atmosphère d'hydrogène, des ondes électriques non amorties se prêtant à un emploi dans la télégra- phie sans fil*. D'autre part, la Compagnie de télégraphie sans fil « Telefunken », s'inspirant des résultats du savant danois, vient de mettre à l'étude un procédé analogue basé sur le refroidissement des électrodes de l'arc. M. Ruhmer a su tirer parti de ce nouveau progrès de la radio-télégraphie dans des expériences de téléphonie sans fil à transmission par ondes électriques que nous allons décrire. En principe, il ne s'agit que d'imprimer aux ondes électriques des modulations correspondant aux caractères des ondes acoustiques pour rendre la voix humaine perceptible à la station d'arrivée dans la membrane d’un téléphone. Le dispositif de transmission est un circuit vibra- toire continuellement traversé par des oscillations électriques non amorties et qui est accouplé avec un système vibratoire ouvert (antenne), accordé par rap- port au premier d'une façon analogue aux dispositifs de télégraphie sans fil. n9c 99 Bulletin de la Soc. d'Encourag. de mars 1905, p. Bulletin de la Soc. d'Encourag. de novembre 1906. ® Voyez la Revue du 18 janvier 1904, p. 5. “ Voyex là Revue du 15 novembre 1906, p. 919. 1 2 152 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Or, il y a deux moyens de modifier les vibrations électriques par la voix humaine, suivant que c’est, ou bien l'intensité, ou bien la longueur d'onde des vibra- tions qu'on fait varier, en émettant dans l'un et Pautre cas des ondes électriques dont les modulations corres- pondent aux caractères du langage, leur fréquence étant soit constante soit variable. A la station d'arrivée on emploie, suivant la pratique générale de la télégra- phie sans fil, un détecteur d'ondes sensible aux oscil- lations d'intensité, disposé en série avec le téléphone et la source de courant. Pour des longueurs d'onde constantes, une modification de l'intensité des ondes produit une variation correspondante de l'effet que subit le détecteur, tandis que, pour des longueurs d'onde variables, un nombre variable d'ondes agit sur le détecteur pendant des intervalles égaux; l'intensité des ondes restant constante, l'effet exercé sur le détec- teur dépend du nombre des ondes qui le frappent. Après ces considérations théoriques, nous donnerons quelques détails an sujet du dispositif employé par M. E. Ruhmer. Un arc chantant alimenté de courant continu à 220 volts et disposé, suivant le procédé de Poulsen, dans une atmosphère d'hydrogène, servait d'excitateur d'ondes. Le circuit vibratoire était cons- titué par une batterie de sept bouteilles de Leyde {d'une capacité de 0,02 microfarad), une self-induction réglable et la bobine primaire d’un transformateur de Tesla. Les deux circuits se trouvant à l'unisson, on pouvait maintenir entre les bornes secondaires du transformateur de Tesla un arc à flamme fort stable d’une longueur de plusieurs centimètres. Au miroir tournant, cet arc voltaique donne limpres- sion d’un arc à courant continu, sa fréquence (environ 300.000 par seconde) étant trop considérable pour le décomposer en décharges d'étincelles individuelles. D'une facon analogue, un tube d'oscillographe à effluve, inséré dans la bobine secondaire du transformateur et qui se prète parfaitement pour accorder l'un à l'autre les deux circuits vibratoires, présente une surface d'effluve d'une intensité uniforme, limitée par deux lignes parallèles à la ligne de zéro et équidistante par rapport à celle-ci. Ce tube oscillographique permet également, par la grandeur de la déviation de l’effluve, de reconnaitre l'influence exercée, sur l'intensité des vibrations élec- triques à amplitude constante, par la distance des électrodes et par l'intensité du courant d'alimentation. Cette observation engagea M. Ruhmer à influencer l'excitateur d'une facon analogue à l'arc chantant. La bobine de réaction, insérée d’abord dans le circuit d'alimentation pour empècher une réaction des vibra- tions rapides sur le système à courant continu, fut remplacée par une bobine d'induction dont l'enroule- ment secondaire se trouvait en communication avec un microphone et une pile. Cette expérience a donné des résultats très satisfaisants, le tube oscillographique présentant, pendant les conversations faites devant le microphone, une bande d’effluve à franges correspon- dant aux vibrations acoustiques, et d'une luminosité variable, ce qui démontre que l'intensité des courants à haute fréquence dans la bobine secondaire du trans- formateur de Tesla subit des modifications correspon- dant aux vibrations acoustiques. Il semble que le principe utilisé dans le présent dis- positif participe à la fois de l'une et de l'autre des deux méthodes (modifications de l'intensité et de la lon- gueur d'onde respectives des vibrations électriques) dont il vient d'être question. Après avoir remplacé le tube oscillographique par l'arc à flamme alimenté de courants ondulatoires à haute fréquence, ce dernier s'est trouvé rendre fort distinctéement chaque mot prononcé devant le micro- phone, avec une intensité dépassant mème celle des arcs voltaiques « parlants ». Les expériences jusqu'ici faites, limitées au labora- toire de l'inventeur, ont permis des transmissions très satisfaisantes à des distances d'environ 30 mètres, avec , de 20 cobayes adultes ou jeunes, soumis à l'ingestiol graphes, il faut reconnaitre qu'il avait été longtem} doute pas de la réussite des expériences défini qu'il se propose de faire avec un dispositif plus pt sant et avec des antennes plus longues, et dans lé quelles il s'agira de franchir des distances de plusien kilomètres. Alfred Gradenwitz. ne $S 5. — Sciences médicales La genèse de l'anthracose pulmonaire. On sait que MM. Calmette, Vansteenberghe et Gry ont conclu, de diverses expériences, que l’anthra@ pulmonaire relève d'une origine digestive : le charbof avalé, suivrait la voie des chylifères, des ganglion mésentériques et, de proche en proche, par la wo lymphatique, gagnerait les poumons. Plusieurs savants parmi lesquels MM. Kuss, Lobstein, Basset, ete, sont élevés contre cette manière de voir, n'ayant reproduire les faits observés par MM. Calmette et collaborateurs. Le D' F. Feliziani' (de Rome) a entre pris, à son tour, une série d'expériences qui sont loi d'être favorables à cette théorie; en effet, sur plu répétée et massive d'encre de Chine, tantôt mêlée au aliments, tantôt introduite par la sonde, aucun » présenté à l’autopsie de pigmentation anormale 4 poumon. Les ganglions mésentériques n'étaient pa non plus pigmentés et, sur les coupes de lintestn on voyait les particules dé charbon adhérentes à surface des cellules de la muqueuse, mais ne para sant point pénétrer dans la profondeur. Enfin quatre cobayes, soumis à l'injection intra-péri tonéale d'une émulsion d'encre de Chine et sacrifié après vingt-quatre et quarante-huit heures, ne mon rent pas non plus d’anthracose pulmonaire. Ces faits ne confirment donc pas la théorie de Cal mette, appliquée d'abord à l'anthracose pulmonaire puis à la tuberculose. Mais on doit se demander si I peut assimiler d’une manière absolue la poudre ine qu'est le charbon au bacille de Koch, germe vivant, en conclure à l'impossibilité d'une infection pulmonait transmise par les voies digestives. i Ajoutons que la Société de Biologie vient de nomm une Commission, composée de MM. Borrel, Dast Henneguy, Letulle et Malassez, chargée de procéder la vérification des faits qui ont été avancés SuPM mécanisme de l'anthracose pulmonaire; de ses 0m vaux sortira, sans doute, la solution de cet importar problème. LU a $ 6. — Géographie et Colonisation L'exploration du massif du Rouvenzor Le puissant massif qui émerge brusquement, entre lac Albert-Nyanza au nord et le lac Albert-Edouardm sud, des profondeurs de l'un des grands « Graben» l'Afrique occidentale, et qui étend ses assises Ms 125 kilomètres du nord au sud et une centaine de es plorations multiples, dont les dernières, notamme celles qui ont eu lieu en 1906, ont été particulièremel importantes par leurs résultats géographiques ets tifiques. Sile Rouvenzori (Le Roi des Nuages) semble représenter les montagnes de la Lune des anciens gét oublié. Ce massif avait été probablement apercu sir S. Baker en 1864 et par Gessi en 1876; il avaïtsél signalé en 4877 par Mason-Bey, mais ce fut Stanle le premier qui, en 1889, lors de sa retraite avec E Pacha, put se faire une idée exacte de son imporlan Un des adjoints de Stanley, Stairs, en tenta, COM on sait, l'ascension; mais il dut s'arrêter à 3.256 mètt d'altitude, bien au-dessous des premiers champs, neige; il estima que le sommet auquel il: Sék ‘ I] Policlinico, 1906, n° 12, p. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 133 attaqué atteignait 5.059 mètres, mais ce n'était pas Je point culminant du massif. Le D' Stuhlmann, en 1891, ne put davantage atteindre la limite des neiges; il estima, cependant, être parvenu à une altitude de 064 mètres dans la partie orientale du massif. En 1892, le capitaine Lugard explora les terrasses orientales du Rouvenzori. G. F. Scott Elliot, en 1894, monta à 3.812 mètres sur le versant occidental, et à 3.965 mètres sur le versant oriental; il fit d'importantes études sur la géologie et la flore du massif. Ce fut seulement en 1900 que MM. Moore et Fer- gusson atteignirent la région des neiges, à 4.545 mètres. La même tentative fut renouvelée avec succès, peu de temps après, par un fonctionnaire, M. Bagoe. Mais ce fut le gouverneur général de l'Ouganda, Sir Harry Johnston, qui, dans sa remarquable exploration de 1900-1901, donna, le premier, des indications pré- cises sur les caractères et l'importance du massif du Rouvenzori; il s’éleva à 4.51% mètres, et il pensa que l'altitude du point culminant n'était guère inférieure à 6.000 mètres'. En 1901, MM. Wylde et Ward dépas- sèrent de 150 mètres environ le point atteint par Sir Harry Johnston, et estimèrent que le plus haut sommet des monts Rouvenzori s'élevait à 5.700 mètres au moins. Ils ne pensaient pas qu'on pül jamais arriver à cause des variations climatériques et des graves troubles physiques qu'elles provoquent? Ce sont les mêmes diflicultés qui arrètèrent tous les voyageurs : les ouragans, la grèle, la neige et sur- tout les brouillards. De plus, au delà de 2.700 mètres el jusqu'à 4.000 mètres, le sol présente presque par- tout des espaces marécageux, dans lesquels on enfonce “jusqu'aux genoux, et qui forment autour de la montagne “ne ceinture qu'on ne peut franchir à pied sec. Dans ja dernière partie de l'ascension, il faut gravir, par une température glaciale, des murs verticaux de roche ou de glace. Malgré ces difficultés, une nouvelle ascension fut tentée par le Rev. A. B. Fisher et sa femme, qui par- vinrent à 4.520 mètres‘; d'après cet explorateur, le ‘plus haut sommet serait à 6.700 mètres. On ne peul manquer d'être frappé de l'écart que présentent les appréciations des divers voyageurs en ce qui touche l'altitude du point culminant du massif. En 1904, le Dr J.-J. David, de Bàle, s'éleva jusqu'à un col neigeux, à 5.050 mètres, maissans pouvoir dépasser ce point. Il évalua la hauteur du Rouvenzori à 5.400 ou 5.500 mètres au plus, altitude qui serait atteinte par trois pics appartenant à l’un des faîtes méridionaux du massif. Il y aurait cinq grandes masses neigeuses supérieures à 5.000 mètres el comptant une douzaine de pics. Le versant occidental est escarpé, tandis que le flanc oriental est sillonné de longues vallées qui lescendent en gradins vers l'Ouganda. D'après l'explo- rateur, le Rouvenzori est le produit d'un soulèvement causé par une énorme pression latérale ; mais il n’a pas “un caractère volcanique et, du reste, son apparence extérieure n'est pas celle d’un volcan. On trouve, à sa base, du gneiss et, dans les vallées occidentales, de la quartzite, du granit micacé et des micaschistes. Le “véritable nom du massif serait le Rounssoro, c'est-à- dire le « Producteur des pluies ». La partie du massif où se trouvent les trois pics culminants serait dési- “gnée, par les indigènes du versant occidental, du nom de Kokora *. MM. Douglas-W. Freshfield et A. L. Mumm firent à leur tour l'ascension du Rouvenzori en novembre 1905 ; Minais, parvenus à 4.200 mètres, ils durent renoncer, à 1 Sir Hlarey Jonxsrox : The Uganda Protectorate, Ruwen- zovi, and the Semliki forest (lhe Geographical Journal, janvier 1902, p. 1-51). # he Geographical Journal, janvier 1902, p. S6. 3 Rev. A. B. Fisuer : Western Uganda (The Geographical Journal, septembre 1904, p. 249-267). Di 4 Prof. Paozo ReveuLI : IL Runssoro -le esplorazioni del dott. J.-J. David ilaliana, Bolletino, 1906, p. 394-365). (Ruvenzori) secoudo Sociela Geogralica cause du mauvais temps, à pousser plus haut l’ascen- sion. Comme le D' David, W. Fresbfield évalue aussi l'altitude du plus haut sommet à 5.500 mètres. Il déclare qu'on à beaucoup exagéré l'étendue des névés du Rouvenzori!, Trois expéditions importantes ont eu lieu en 1906. La première, en janvier, est celle de l'alpiniste autri- chien Rudolf Grauer, accompagné de deux mission- naires anglais, MM. H. W. Tegart et H. E. Maddox. Elle arriva à 4.586 mètres et estima que la plus haute cime doit s'élever à 5.480 mètres environ. M. Grauer pensa avoir atteint la ligne de faite du glacier du Mo- boukou, et il y découvrit une pointe de rocher qui domine de 12 mètres l'arète neigeuse et à laquelle il donna le nom de King Edwards Rock?. Une expédition anglaise, organisée en vue d'études zoologiques, sous les auspices du Musée d'Histoire naturelle de South Kensington, a fait ensuite, au mois d'avril 1906, l'ascension de plusieurs des sommets du Rouvenzori; elle comprenait MM. Woosnam el Carruthers et le D Wollaston qui, arrivés le {°° avril en haut du Douvoni, sommet nord-est du glacier Moboukou, gravirent l’un des deux pics que présente ce sommet, le pic méridional, dont l'altitude fut évaluée par eux à 4.8%3 mètres. Le 3 avril, les explorateurs attei- gnirent le sommet du Kiyanja, le pie le plus occidental du groupe du Moboukou, dont l'altitude fut trouvée ètre de 4.991 mètres. Ces deux pies avaient été considérés par plusieurs des précédents voyageurs comme les plus élevés de la chaine, mais les explorateurs anglais aperçurent du sommet du Kiyanja, dans la direction du nord-nord-ouest, un pie d'une plus grande altitude terminé par deux pointes, qui se dressait sur un éperon de la ligne de faite dominant la Semliki. Is ne purent en faire l'ascension à cause des tempêtes de neige et du brouillard persistant. Tandis que l'expédition italienne du due des Abruzzes s'acheminait à son tour vers le massif, le lieutenant anglais T. T. Behrens, qui recherchait, d'après toutes les données existantes, les positions et les altitudes les plus probables des principaux pics neigeux du Rouvenzori, ainsi que l'allure vraisem- blable de la ligne de faite reliant ces sommets, signala lui aussi, en se fondant sur les documents trigonomé- tiques de la Commission de délimitation anglo-alle- mande de 1903, l'existence d'un sommet à deux pointes, situé au nord-nord-ouest du massif et qu'il identifia avec le Kanyangoungoué de Stuhlmann; il accordait à ces deux pics les hauteurs respectives de 5.066 et 5.043 mètres. Ces constatations, qui concor- daient avec celles de l'expédition anglaise, se trouvè- rent confirmées encore par le duc des Abruzzes qui, la même année, gravit les plus hauts pics du Rouvenzori, dont il acheva ainsi l'exploration *. Parti de Naples pour Mombasa le 16 avril 1906, le duc des Abruzzes emmenait avec lui le commandant Cagni, qui l'avait déjà accompagné dans son exploration arc- tique, le D' Cavalli, le lieutenant de vaisseau Winspeare, l'alpiniste et photographe renommé Vittorio Sella, le Dr Roccati, géologue, deux guides et deux porteurs de la vallée d'Aoste, en tout douze Européens, et en plus tout le personnel indigène nécessaire. La caravane i Doucras W. Fresuwæcn : À note on the Ruwenzori sroup (The Geographical Journal, mai 1906, p. 481-456); Du Mève : Ruwenzori and the frontier of Uganda (/b1d., novembre 1906, p. 481-486); Du MÈME Ruwenzori (A/pine Journal, février 1906, p. 45-5u). , 2 The Geoyraphical Journal, mai 1906, p. 477-481; Sociela Geografica italiana, Bolletino, mai 1906, p. 515. # Alpine Journal, mai 1906; he Geographical dournal, juin 1906, p. 616-641. i Lieutenant T. T. Benrexs: The snow-peaks of Ruwen- zori (The Geographical Journal, juillet 1906, p. 43-50). 5 À. F.R. Wozccasrox : Ruwenzori (The Alpine Journal, novembre 1906, p. 310-313). Duc prs Auru/es : The Snows of the Nile (The Gengraphical Journal, février 1907, p. 121- 147, avec photographies et 1 carte hors lexte. 134 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE * partit d'Entebbe, capitale de l'Ouganda, le 44 mai. En quinze jours, elle arriva à Fort-Portal, au pied de la chaine, d'où en huit jours elle monta à Bujongolo, à 3.798 mètres au-dessus du niveau de la mer, dans la partie supérieure de la vallée du Moboukou. Le duc des Abruzzes réussit à faire l'ascension des principaux sommets de la chaîne, et notamment des deux plus élevés, inexplorés, qui se trouvent au nord- ouest du Kiyanja, et auxquels il donna les noms de Marguerite et d'Alexandra; les deux pics ont respecti- vement 16.816 et 16.750 pieds, soit 5.125 et 5.105 mètres. Le premier fut gravi le 48 juin. La position des deux pics coincidait bien avec les indications de l'expédition an- glaise et du lieutenant Behrens; les points culminants du Rouvenzori avaient été gravis. Si leur altitude est moindre que celle supposée par quelques explorateurs, il faut reconnaitre qu'elle avait été fort justement ap- préciée par la plupart des premiers voyageurs : Stanley, Stairs, Stuhlmann, Scott Elliot, Wylde, qui tous avaient attribué au Rouvenzori environ 5.100 mètres. Le duc fit encore l'ascension de plusieurs pics. Il établit l'altitude et la latitude des treize plus importants, tandis que M. Sella en prenait des photographies superbes. Les recherches faites permirent de constater que la chaîne du Rouvenzori est composée de six massifs montagneux, séparés par des cols et hauts de 4.200 à 4.400 mètres. Le duc des Abruzzes leur donna les noms de Stanley, Speke, Baker, Emin, Gessi et Thomson; à ce dernier nom, la Société de Géographie de Londres a proposé de substituer celui de Louise de Savoie. Le groupe le plus élevé, le mont Stanley, comprend cinq sommets ayant tous environ 5.000 mètres et dont les plus élevés sont les pointes Marguerite et Alexandra; les trois autres sont les pics Hélène (16.388 pieds), Sa- voie (16.340 pieds) et Mœæbius (16.214 pieds). L'expédition rapporte des données précises sur le système des glaciers de la chaine. La ligne de partage des eaux est également tracée, ainsi que la configuration des vallées descendant à l'est vers l'Ouganda et d’une partie de celles allant à l'ouest vers le Congo. Un affluent du Moboukou a été découvert, le Boujoukou, qui entaille par un profond bassin le cœur même de la chaîne et est formé par les eaux de fusion des principaux glaciers du mont Stanley; son impor- tance est telle que l’on doit plutôt le considérer comme le cours d’eau principal et le Moboukou comme son tributaire. Le King Edwards Rock de M. Grauer ne serait qu'un gros « gendarme » sur l’'arête se- condaire qui sépare les deux ravins du Moboukou el du Boujoukou, et ne se trouverait pas sur la vraie ligne de faite. Deux lacs furent rencontrés à 4.500 mètres. Grâce aux mesures d'angles prises par le duc et aux travaux de triangulation opérés par le com- mandant Cagni, la carte topographique de la région put être dressée. De nombreux documents relatifs à la Géologie, à la Botanique et à la Zoologie ont été aussi rapportés. La théorie d’une origine volcanique du massif doit être entièrement écartée; sur un seul point on trouve des traces de veines de basalte dans une roche de gneiss. Un important phénomène géologique qui a été signalé dans le massif du Rouvenzori est le développement considérable de ses glaciers à l'époque glaciaire. Aujour- d'hui, ils sont d'une étendue beaucoup moindre et tous en retrait; l'existence de moraines récentes à plusieurs centaines de yards du front de la glace actuelle prouve ce retrait avec évidence. Les glaciers qui descendent le plus bas sont ceux du Moboukou et du Semper, qui S'abaissent respectivement jusqu'à 13.682 et 14.325 pieds. Les plus vastes glaciers se trouvent sur les monts Slanley, Speke, Baker, et du côté oriental du Gessi. La plus haute température a été observée sur le pic du roi Edouard : 6° C. ; et la plus basse sur le pic de la reine Alexandra : —3°,5 C. A Bujongolo, le ther- momètre a varié de 10° à 0° C. La pluie devient inva- riablement de la neige à 14.100 pieds. Dans les vallées du Moboukou et du Boujoukow à environ 10.000 pieds, le climat est constamme chaud et humide, et on y trouve des mousses spéciale des hépatiques et des lichens qui recouvrent le tron des arbustes ; la végétation est luxuriante et les espèce principales sont les bruyères, les lauriers, les orchidées, les fougères, les violettes, les renoncules, les géra niums, les chardons, etc. A environ 11.500 pieds, bea coup de plantes de la région inférieure disparaissent, @ à 12.000 pieds, dominent les bruyères, les lobelia, le sénecons, les mousses, les hépatiques, les lichens. L'Helichrysum apparaît à 11.500 pieds et, ainsi qu les sénecons, continue jusqu'aux glaciers. Sur les pie on trouve encore quelques mousses, des lichens & quelques petites plantes phanérogames naines qu rappellent la végétation des Alpes. Gustave Regelsperger. $ 7. — Enseignement Personnel universitaire, — M. Caubet, docteur ès sciences, chef des travaux de Physique à la Facult des Sciences de Bordeaux, est nornmé maître de Confé rences de Physique (P. C. N.) à la dite Faculté. M. Blanchard, professeur d'Histoire naturelle médi= cale à la Faculté de Médecine de Paris, est nommé pro fesseur de Parasitologie et d'Histoire naturelle à la dite Faculté. M. Pettit, docteur en médecine, chef du Laboratoir de Clinique chirurgicale, est nommé chef du Labora= toire de Clinique des maladies des voies urinaires (See tion de Bactériologie et d'Histologie). M. Jolly, maître de Conférences au Laboratoire d'Histologie du Collège de France, est nommé chef du Laboratoire de Clinique chirurgicale en remplacement de M. Pettit. M. Gonnessiat, astronome-adjoint à l'Observatoire de Lyon, est nommé astronome-adjoint à l'Observatoire de Paris. M. Renan, astronome-adjoint à l'Observatoire de Paris, est nommé astronome titulaire au dit élablisse- ment, en remplacement de M. Bossert, décédé. Conservatoire des Arts-et-Métiers. — M. Bou- quet, Conseiller d'Etat, directeur de l'Enseignement technique au Ministère du Commerce, est nommé Direc= teur du Conservatoire des Arts-et-Métiers, en remplace= ment de M. Chaudèze. . Bourses des Curie. — M. Liard, vice-recteur de l'Académie de Paris, à été informé par M. André Car- negie, qu'il mettait à la disposition de l'Université de Paris un capital dont le revenu, 12.500 francs, sera attribué, sous forme de bourses d’études, à des savants qui se proposent de faire des recherches dans le Labo= ratoire de Physique générale créé depuis quelques. années pour Pierre Curie. Suivant les intentions du donateur, le nom de Mn Curie sera associé à celui de son mari, et ces. bourses porteront le nom de « Bourses des Curie W fondées par André Carnegie. Elles pourront être accordées à des savants et des étudiants de toute nationalité, qui auront déjà fait preuve de mérite scientifique. | Cours de la Sorbonne. — M. Maurice d'Ocagne, professeur à l'Ecole des Ponts et Chaussées, donnérä la Sorbonne, à partir du 1% mars, un cours libre de Calcul graphique et de Nomographie; ce cours aur& lieu les mardis et vendredis à 5 h. 1/2. M. Ch. Marie commencera également à partir du mers credi 13 mars, à 5 h. 1/4, un cours sur les applications de, l'Electrochimie aux recherches et aux préparations de la Chimie minérale et organique. LÉOPOLD DE SAUSSURE — L'ASTRONOMIE CHINOISE DANS L'ANTIQUITÉ 135 L'ASTRONOMIE CHINOISE DANS L'ANTIQUITÉ I. — LE TEXTE DU YAO-TIEN. Les documents que nous possédons sur les ori- gines de la civilisation chinoise ne sont pas nom- breux. Les fouilles préhistoriques n’ont pu être commencées nulle part. Les monuments, les ins- criptions font totatement défaut. Les seules sources de nos connaissances sont donc celles qui découlent de l'antique littérature nationale. La destruction des livres, ordonnée sous les 7s'in au mr siècle (av. J.-C.), à fait disparaitre beaucoup de documents. Cependant, la proscription ayant élé de courte durée, les classiques ont pu être re- constitués de mémoire. On en a aussi retrouvé dans des cachettes, et d’autres ouvrages ont été décou- verts dans un tombeau. : Le plus ancien des livres canoniques, le Chou- King, est un recueil de textes historiques, dont les premiers se rapportent à des souverains qui auraient précédé les dynasties, antérieurs par con- séquent au xxut° siècle avant J.-C. d'après certaines chronologies chinoises. Mais les sinologues mon- -trent que ces textes sont suspects. Au delà du xu° siècle, les annales ne présentent plus de certi- tude. M. E. Chavannes estime que la durée attribuée aux deux premières dynasties (mille ans, est très surfaite. Quant aux souverains antérieurs, leur histoire est visiblement mythique. Dans ces conditions, on concoit que tout docu- ment susceptible de fournir un renseignement authentique sur ces temps nébuleux acquière une importance capitale. On ne saurail l’examiner avec trop de soin. Or, ce document existe : c'est un texte astronomique incorporé au premier chapitre (Yao-Tien) du Chou-King. N indique les positions sidérales du Soleil pour les quatre dates cardinales de l'année correspondant au milieu de chaque saison! ; en principe, il fournit done les éléments d'un calcul chronologique fondé sur la précession des équinoxes. En voici les passages essentiels : Puis Yao® ordonna à Zi et à Ho d'observer avec atten- tion le ciel majestueux et d'appliquer les méthodes du calcul au Soleil, à la Lune, aux constellations et aux Syzygies de conjonction, puis d'indiquer avec soin au peuple les saisons. … Le jour moyen et les constellations N7a0 servent à fixer le milieu du printemps. … Le jour le plus long et les constellations Æo servent à fixer le milieu de l'été. 1 Les équinoxes et solstices marquent le milieu des sai- sons chinoises, non leur origine, ce qui d'ailleurs fournit une meilleure division météorologique de l'année. 2 Yao, l'avant-dernier des souverains non héréditaires, est censé avoir régné de 2357 à 2255. . La nuit moyenne et la constellation ia servent à fixer le milieu de l'automne. . La nuit la plus longue et la constellation A/ao ser- vent à fixer le milieu de l'hiver... L'année à 366 jours; par le moyen du mois inlerca- laire, on détermine les quatre saisons ". s A première vue, ce texte ne parait guère explicite. ILest muet sur les deux points essentiels : la position des étoiles et la posilion du Soleil. Mais l'impression change lorsqu'on apprend, par les traditions continues de l'Aslronomie chinoise, que ces éléments sont sous-entendus parce qu'il était inutile de formuler des règles bien connues, restées en vigueur jusqu'à nos jours. L'Astronomie chinoise est fondée sur l'obser- vation des passages au méridien. Il s’agit done ici du passage au méridien des astres Niao, Ho, Hiu, Mao, aux quatre dates cardinales de l’année. Il ne reste plus à connaître que l'heure à laquelle se rapportent ces passages pour avoir la position correspondante du Soleil. Mais les auteurs ne sont pas d'accord sur ce point, et c'est ce qui explique le peu de crédit accordé à ce document unique. L'interprétation à laquelle on s’est arrêté — el qui fait autorité actuellement — lui dénie d’ailleurs presque toute valeur chronologique. Je me propose ici de démontrer que cette opinion de la critique moderne est complètement erronée; puis j'essayerai d'en établir une autre, sur des bases indiscutables,. II. — IDENTIFICATION DES ASTRES. Il faut d'abord savoir, nalurellement, à quels astres correspondent les quatre noms du texte. Celle identification est d’ailleurs certaine ?. Il s’agit d'étoiles isolées et non de constellations. Quand bien même la traduction des sinologues serait incontestable, une quadruple coïncidence établirait l'interprétation astronomique. En prin- cipe, une seule des propositions du texte suflit, en effet, à fonder une évaluation chronologique. La concordance des quatre propositions constitue done un argument irréfutable. 1 Cette traduction, la plus récente, est de M: E. Chavannes, in: Les mémoires historiques de Se-Ma-Ts'ien (E. Leroux, éditeur, Paris, 1895, tome 1, p.43 et suiv.). L'éminent sinolo- gue estime que la version du Chou-King incorporée à la compilation de l'historien chinois (au n° siècle avant notre ère) présente plus de garanties d'authenticité que le texte mème de ce livre tel qu'il nous est parvenu. 2 Nous verrons plus loin que les termes Viao el Jo sont archaïques ; on doit leur substituer les noms modernes Sing et lang. 136 LÉOPOLD DE SAUSSURE — L'ASTRONOMIE CHINOISE DANS L'ANTIQUITÉ Les termes Ziu, Mao, ete., n'ont d'ailleurs jamais désigné des constellations, mais des divisions géométriques du ciel, des fuseaux horaires, com- parables à des quartiers d'orange, dont le nombre a varié de 4 à 28 et qui étaient limitées par autant d'étoiles équatoriales dont elles portaient le nom: CNCEBEDP ANA EZ NE TEN ES... mouvement > diurne Ces divisions (A, B, C..) comprennent ainsi toute l'élendue du ciel qui défile entre le passage au méridien des étoiles correspondantes (a, b, e)'. Le même nom Hiu, Mao, ete., désigne donc l'ori- gine el l'étendue de la division ; mais celle-là plu- tôt que celle-ci, car l'élément primitif, dans ce système, c'est le choix des étoiles équatoriales. Depuis lors,ces mêmes étoiles sont restées conti- nuellement en usage pour repérer les posilions cé- lestes. L'esprit lraditionaliste des Chinois en estune première garantie. D'autre part, des commentaires antérieurs à l'ère chrétienne affirment que les 4 éloiles de notre texte se lrouvaient équidistantes sur l'Equateur à l'époque de Yao et qu'elles indi- quaient alors les positions cardinales du Soleil, dont elles se sont progressivement écarlées dans la suite. Ce témoignage prouve la continuité de Ja tradition, puisque ladécouverte dela précession des équinoxes, en Chine, est bien postérieure. Quant à l'équivalence des noms chinois dans notre propre nomenclature, elle ne fait pas non plus de doute. En 1683, l'empereur Xang-Hi chargea les missionnaires jésuites de mesurer les coordonnées de ceséloiles pour les insérer dans sa célèbre ency- clopédie. Le P. Gaubil renouvela cette opérationen 1726. Enfin, ces identifications concordent avec celle des Japonais basée sur leurs plus anciens calalogues. IT. — Orixion pu D' Lecce. Le célèbre sinologue anglais a incorporé à sa traduction du Chou-Xing (1879) un graphique éta- bli par l’astronome Prilchard, pour démontrer l'exactilude des indications de Yao qui vérifient, dit-il, l'état du ciel aux environs de l'an 2.300. Mais à quelle heure, suivant le D'Legge, ces indicalions se rapportent-elles ? ; « Il a toujours été affirmé par les lettrés chi- nois — assure-t-il — que, lorsque Yao dit : l'étoile du milieu du printemps est dans Niao, cela Signi- fie l'étoile qui culmine à la tombée de la nuit (at dusk) en cette saison?. » Voilà qui nous plonge ! Ces divisions équaloriales sont appelées sieou(stations: : leur amplitude, fort inégale, varie entre 30 et 300. Biot a montré clairement leurs origines dournaldes Savants, 1840). ? Sacred Books of the East, vol. III. D. 24 dans l'incertitude, car la tombée de la nuit est une” heure bien vague el celledel'apparition des étoiles! varie suivant leur éclat. Or, les étoiles du textes (sauf une de 2°) sont de 3° et 4° grandeurs. Mais nous“ sommes tirés d'embarras par le docteur lui-même,« qui, abandonnant l'heure de la visibilité des étoiles," lui substitue bientôt celle du coucher du Soleil, sans autre explication. C'est là une indication plus précise, encore qu'on necomprenne pas bien comment les Chinois pou-. vaient observer les éloiles à ce moment où elles sont invisibles. Le D' Legge se montre néanmoins très satisfait du résultat des vérifications dans les- quelles il guide le lecteur : « On voit, dit-il, que l'étoile se trouve en effet peu éloignée du méridien, ce qui s'accorde avec les indications du texte. » Il serait préférable de poser quelques chiffres. La graduation du graphique indique les heures. suivantes : LATITIUDE : 360 PRINTEMPS ÉTÉ AUTOMNE HIVER Coucher du Soleil . 6" 1020m 6h 4h40m sage de l'étoile, 5b50m Gb05m 5h39m Sh55m Écarts. . —10m +75m -92{m 55m La précession des équinoxes étant de 5 minutes par siècle (environ), ces écarts montrent que les indications du texte concorderaient avec le coucher du Soleil aux dates suivantes — 2,100 — 800 1.900 — 3.800 (le graphique étant établi pour l'an — 2.300). Trente siècles d'incertitude, voilà qui est peu satisfaisant ! Mais remarquons que ces écarts énormes sont symétriques, comme les heures du coucher du Soleil] ; et que, si l'heure sous-entendue par le texte n'est pas celle indiquée par le D° Legge, mais bien 6 heures du soir, tout s'explique. Les résultats deviendraient alors plus concordants : — 2.100 — 2.400 — 1.900 — 2.200. Continuons cependant notre enquèle, IV. — OPINION pu PROFESSEUR RUSSELL. Le D' Legge n'était pas astronome. Mais, après lui, la question a été reprise par M. S. M. Russell, professeur d’Astronomie au 7'ong-wen-koan à Pé- kin*, A la source des renseignements indigènes, cet auteur était bien placé pour fournir une solution définitive. Cependant, sa critique ne nous satisfait pas plus que celle du sinologue anglais. On s'atten- dait à y trouver un exposé des conditions tech- * Ce chiffre approximatif n'est valable que pour les astres 1 situés sur l'écliptique. Les étoiles dont il s’agit se trouvant M sur l'équateur, il y aurait lieu de calculer séparément pour chacune d'elles la valeur de la précession. Nous adopterons cependant la valeur moyenne de 5 par siècle, qui donne M une idée très suffisante de l'amplitude du mouvement. S. * Journal of the Peking Orieatal Society, vol. W, me 3. LÉOPOLD DE SAUSSURE — L'ASTRONOMIE CHINOISE DANS L'ANTIQUITÉ 137 niques et traditionnelles permettant d'établir l'heure des observations. Mais M. Russell entre tout de suile en matière en fixant simplement le délai minimum de visibilité des étoiles. Certains peuples ont, en effet, déterminé la po- Sition sidérale du Soleil d’après la situation des étoiles au moment de leur apparition !. Mais ce pro- cédé — basé sur le rapport assez vague de l'inten- Silé lumineuse du Soleil avec son angle horaire — exige l'emploi des astres les plus brillants : car la visibilité des étoiles de 3° et 4° grandeurs varie telle- ment avec l'état de l'atmosphère qu'on ne peut établir aucune évaluation horaire sur leur appari- tion. Or, M. Russell, ne tenant aucun compte de la faiblesse et de la diversité d'éclat des étoiles du texte, fixe uniformément leur délai de visibilité : « Niao (Véloile du printemps) ne pouvait avoir été observée, dit-il, avant 6" 30" du soir. À ce moment l'astre avait franchi, d'environ 10°, le méridien... ?. « L'observation de //o (été) ne pouvait avoir été faite — au plus tôt — avant 7 heures du soir; l'étoile avait alors dépassé de 14° le méridien. « fliu (automne) n'avait pu être observée avant 6" 30%. À ce moment, elle avait dépassé de 14 le méridien. “« Mao (hiver) avait été observée — au plus tôt — à 5" 15%, L'astre se serait trouvé alors à 6° à l'est du méridien ». La position des astres par rapport au méridien, d'après cetle évaluation, aurait donc été + 10°, 149, + 44°, — 6°, alors que, d'après le texte, ces écarts devraient être nuls. « Ainsi, conclut-il, à l'exceplion du d'hiver, les direclions de Yao pour délerminer le solstice d'été et les équinoxes conviendraient beau- solstice Coup mieux à une époque postérieure de plusieurs siècles. » Sur qualre résultats, M. Russell en a trouvé trois à peu près concordants et un aberrant. Ils équi- valent, en minutes de temps, à : 100, + 56m, + 56m, — 24m, Il élimine le dernier. ELil n'indique pas quel nombre de siècles serait nécessaire pour annuler les trois autres et les meltre d'accord avec le texte. Le calcul est facile cependant; la précession étant ! Avant l'invention des garde-temps, il n'y avait pas d'autre moyen d'effectuer cette observation, puisque le Soleil et les étoiles ne sont pas visibles simultanément. > Cette position de l'astre ressort immédiatement de la différence des ascensions droites. Celle du Soleil, à l'équi- noxe, est par définition de 00. Celle de Niao (a de l'Hydre), au 24e siècle, était de 87038 —5 h. 50: elle passait donc au méridien 5 h.50 après le Soleil, comme nous l'avons déjà vu d'après le graphique du Dr Legge. Done, à 6 h. 30, elle avait passé depuis 40m — 100. de 5 minutes par siècle, il faudrait reporter le règne de Ÿao d'une dizaine de siècles plus tard, eu pleine période historique ! « Il est évident toutefois, ajoute-t-il, que ces directions étaient seulement destinées à indiquer grossièrement les saisons pour les besoins de l'agri- culture et ne sont d'aucune utilité (of no use at all) pour fixer la date du règne de Yao. Les heures auxquelles les observations étaient faites ne sont pas mentionnées; dans ces conditions, la lenteur du mouvement de précession ne permet pas de lever l'incertitude, si ce n'est dans des limites très VAgUuPs, » Mais un point reste à élucider. Comment se fait-il que M. Russell arrive à trouver des résultats con- cordants au solstice d'été et aux équinoxes, alors que le graphique du D' Legge prouve que celte concordance est réalisée seulement par rapport à une heure constante (6")? Il a dû commettre une erreur. En effet, il fixe à 7 heures l'observation de l'étoile de l'été alors que le Soleil, au solstice, se couche à 7! 20% ! Si nous reclifions le délai de visi- bilité, l'écart au solstice d'été prend une valeur symétrique de l'écart au solstice d'hiver. Dès lors, il n'ya plus aucune raison d'éliminer ce dernier ; el tout l'échafaudage des conclusions s'écroule. V. — LA QUADRATURE DE L'ÉQUATEUR. Ce qui surprend dans les recherches de MM. Legge et Russell, c'est qu'ils poursuivent la solution du problème sans tenir compte des principes de l'As- tronomie chinoise, dont la simplicité atteste cepen- dant la lointaine origine. Celte omission est d’au- tant plus singulière qu'il s'agit d'un système d'étoiles fondamentales resté en usage depuis lors et dont la destination primilive est bien claire. Les Chinois ayant porté dès le début leur atten- tion sur la culmination des astres au méridien, il leur à fallu de bonne heure choisir des repères sidéraux pour noter les intervalles. Dans notre propre Aslronomie, gràce à la préci- sion de nos instruments, nous pouvons compter la longitude équatoriale des astres (ascension droite) à partir d'un point de repère unique et fictif”. Mais les primitifs élaient obligés, naturellement, de choisir un point de repère réel, une étoile. Et, comme les étoiles équatoriales ne sont pas visibles toule la nuit ni toute l’année, ils furent conduits à en adopter plu- sieurs. Les Chinois eurent ainsi l'idée fort ingé- nieuse de choisir quatre repères sidéraux corres- pondant (sur l'équateur) aux quatre positions astronomes ‘ Le point vernal, à l'intersection de léeliptique et de l'équateur, 138 LÉOPOLD DE SAUSSURE — L'ASTRONOMIE CHINOISE DANS L'ANTIQUITÉ cardinales du Soleil : ce sont les quatre étoiles de notre texte. De cette manière, ils avaient, chaque soir, un repère visible à droite du méridien. Ces quatre jalons, étant choisis à égale distance sur l'équateur, se succédaient de 6 heures en 6 heures au méridien dans la révolution diurne ; et ils se succédaient de trimestre en trimestre (aux mêmes heures) au méridien dans la révolulion annuelle. Dans ce sens, le Chou-King peut dire que leur passage marque le changement des saisons : c'est là un simple corollaire du principe de cette qua- drature. Mais sa véritable destination est de repérer les ascensions droites, de marquer l’origine des abscisses des astres mobiles. VI. -- DÉTERMINATION DES SAISONS. Ce n’est pas ainsi que l'on a compris le texte, et je reconnais que le sens propre des mots yi #ing justifie l'interprétation admise : les quatre étoiles, dit le Yao-Tien, « servent à déterminer » les sai- sons. On en à conclu que les Chinois avaient simple- ment noté la position des étoiles aux dates cardi- nales et que leretour des mêmes astres leur servait à déterminer ces dates. Mais alors, à quelle heure le passage de ces étoiles déterminatrices était-il observé ? Car, enfin, tous les astres défilent chaque jour au méridien, et si l’on ne spécifie pas d'heure iln y a pas de détermination. Dans l'idée préconcue (et non formulée) que les Chinois ne possédaient pas de garde-lemps à une époque si reculée, on répondait: au coucher du Soleil, à l'apparition des étoiles. Nous avons montré que ces deux hypo- thèses sont conlrouvées et que l'étoile de la saison passait à 6 heures du soir, heure artificielle que l'on ne peut connaitre sans un instrument (clepsy- dre, horloge à eau). « Mais, objectera-t-on, à 6 heures les étoiles sont invisibles. Comment donc pouvait-on les observer? » — Précisément, on ne les observait pas. Le texte indique un principe théorique et non un procédé employé dans la pratique. C'est ce que je vais établir. Les Chinois n'ont connu les anomalies solaires qu'à uneépoque relativement récente. Leur astrono- mie a toujours considéré le Soleil comme parcou- rant l'équateur (non l’écliplique) avec une vitesse uniforme. Le soleil chinois correspond donc à notre soleil moyen. C'est ce qui a valu à leur calendrier cette simplicité si pratique que les Jésuites ont « réformée » bien à Lort au xvu° siècle. Conformé- ment à celle théorie, les saisons chinoises (à plus forte raison dans l’antiquilé) divisaient l’année en quatre parties égales. Ce sont des saisons moyen- ues. Elles étaient donc déterminées par une simple opération arithmétique et non par une opération astronomique. Un seulélément est nécessaire pour établir le calendrier chinois : la date du solstice d'hiver. Par celte donnée, les limites des saisons sont immédiatement connues. Il n’y avait donc pas à attendre l'époque de ces limites pour les déter- miner au moyen d'étoiles. Le texte, par ailleurs, nous montre les règles du calendrier traditionnel déjà constituées (lune intercalaire, elc.). Cela suf- firait déjà à faire rejeter ne admise. Mais il y a plus. Par suite des aberrations solaires, nos saisons inéqales correspondent à des courses égales du Soleil sur l'équateur, tandis que les saisons égales des Chinois correspondent à des courses inéqales du Soleil sur l'équateur. Si done les quatre étoiles déterminatrices avaient été choisies, comme on le pense, de trimestre en trimestre, d’après leur concordance avec les saisons chinoises, leurs intervalles devraient re- fléter ces inégalités, ce qui nest pas le cas. MM. Legge et Russell n’ont pas pensé à cela et vérifient le texte pour les valeurs 0°, 90°, 4809, 270° de la position du Soleil. En définitive, c'est bien par rapport à ces valeurs qu'il convient de vérifier le texte. Mais, d'après leur propre interprétation, les critiques auraient dû le vérifier par rapport aux saisons chi- noises. Or, les saisons vraies étant, dans l'antiquité, plus inégales encore que de nos jours, le calcul de la longitude du périgée est indispensable pour connaître les positions du Soleil correspondant aux saisons chinoises. Il est surprenant qu'aucun auteur n'ait fait ce calcul, ni mentionné la nécessité de le faire. Quant à Biot, qui connaissait mieux que personne les principes du calendrier chinois, il serait in- eroyable qu'il n'ait pas vu leur incompatibilité avee le texte‘; mais, ne songeant pas à en déclarer la teneur inadmissible, il évite de poser le dilemme. Il s'en tire en s’abstenant de parler des équinoxes et en glissant, pour le solstice, une explication inacceptable : è « Le passage de Fang° six heures après le Soleil, 1 dit-il, désignait le solstice d'été, ce qui s'accorde très bien avec les instructions de l'empereur ». Biot. sait fort bien, cependant, qu'il ne s’agit pas du solstice, mais du milieu de l'été chinois: et, s'il avait calculé la longitude du périgée, il aurait cons taté qu'à cette date l'étoile convenable se trouve à plus de 5° en dehors de la division Fang, ce qui s'ac= ‘ Il ne faut pas oublier, cependant, que Biot n'a traité cette question du Yao Tien qu'accessoirement, dans les dernière pages de ses Etudes sur l'Astronomie indienne el chinois (Paris, 1862). Il entreprit cet ouvrage à l'âge de quatre-vingts sept ans : mourut avant d'en avoir pu corriger le épreuves. 14 ® Fang correspond à Ho dans le texte (V: la note p. 15 Par erreur, Biot dit ici Sing. à LÉOPOLD DE SAUSSURE — L'ASTRONOMIE CHINOISE DANS L'ANTIQUITÉ 139 corde très mal avec les instructions « de l’empe- reur ». VII. — OPINION DES ASTRONOMES CHINOIS. L'interprétation que je propose semble contraire à la teneur littérale du texte. Le passage suivant, emprunté au P. Gaubil', montre cependant qu'elle est conforme à l'opinion des anciens astronomes chinois : « Je ne puis me dispenser de rapporter ce qu'on dit au temps des //an sur les quatre éloiles qui répondent aux quatre saisons; ce qu'ils écrivent là-dessus est sûrement antérieur à leur temps, comme il sera facile de le démontrer”. « Ils assurent qu'il s'agit des étoiles qui passent au méridien à midi, à minuit, à 6 heures du malin et 6 heures du soir... Qu'au temps de Yao, à G heures du soir, Niao passait par le méridien à l’équinoxe du printemps au-dessus de l'horizon, tandis que /liu y passait au-dessous... » (III, p. 8). On voit qu'il ne s'agit pas d'observations trimes- trielles isolées, mais d'une quadrature solidaire faisant concorder quatre fois par an la révolution diurne et la révolution annuelle. Le P. Gaubil, ce- pendant, ne paraît pas avoir bien compris le pré- cieux renseignement qu'il nous transmet, car il ajoute en note: « Je crois qu'on (/e fexte) ne parle que du passage au méridien à 6 heures du soir ». Il rappelle ainsi les interprètes chinois à la teneur liltérale du texte, persuadé que l’astre était réelle- ment observé pour déterminer la saison, et cela à une heure où les étoiles sont invisibles ! VIII. — LA CRITIQUE PHILOLOGIQUE DU TEXTE. Il reste à savoir si nolre interprétalion, contraire au sens liltéral de deux mots du lexte, peut s'ac- corder avec la signification de l'ensemble. Avant chacune des proposilions sidérales, le Chou-King nous montre Yao envoyant en mission un astronome vers chacun des quatre points cardi- naux de l'Empire et jusqu'au Tonkin ; le passage suivant donnera une idée suffisante du texte inlé- gral, qui se reproduit d'une manière analogue et symétrique pour chacune des autres saisons : « Ÿao ordonna spécialement au cadet des Zi de demeurer chez les Yu-i, pour y suivre avec allen- tion le lever du Soleil et déterminer et promulguer partout ce qu’il faut faire au printemps. Le jour % Les nombreux documents originaux recueillis par ce missionnaire forment le 2° volume des Observations ma- thém., ete., du P. Souciet, Paris, 1732. Tomes II et IT. ? En effet, les Chinois ne connaissant pas alors la préces- Sion, cette interprétation (en désaccord avec l'état de leur ciel; ne pouvait étre que traditionnelle. La dynastie des Han à régné de —206 à +221. moyen et les constellations !Viao servent à fixer le milieu du printemps. Le peuple alors se disperse; les oiseaux et les bêtes nourrissent ou sont pe- tits". » Le souverain, on le voit, intervient bien pour envoyer les frères 7j et Jo en mission, mais rien n'indique positivement que les propositions rela- lives aux caractéristiques des saisons fassent partie de son discours. Néanmoins, les plus illustres sino- logues, J. Legge, S. Julien, ont admis cette inter- prételion, qui est celle des commentateurs chinois portés à révérer dans Jao l'initiateur de toule science. Aussi ces préceptes sont-ils communément appelés « les Instructions de Yao ». L'empereur légendaire est censé indiquer à ses astronomes le moyen de déterminer les saisons. Ce n'est pas tant cette interprétation — j'ima- gine — qui dérive du texte, que le texte lui-même qui, très anciennement, à été modelé sur cette interprétation. Cette tendance, d’ailleurs, a conti- nué à se faire sentir jusqu'à nos jours; car, tandis que la version ci-dessus, transmise par l'historien Se-Ma Ts'ien, énonce d'une manière impersonnelle les proposilions astronomiques, celle du (/hou-Xing traditionnel dit: « O vous, Ai et Jo (sachez que) la révolution annuelle comporte trois cent soixante- six jours. » Voilà donc une modification vraisem- blablement postérieure au 1° siècle avant J.-C., qui constilue l'unique molif formel d'attribuer à Yao l'énoncé de ces propositions. Puis, cette ver- sion s'élant enracinée, à la faveur de cette interpo- lation, dans l'esprit des sinologues, leurs traduc- tions et leurs commentaires l'ont accentuée encore davantage. On pourrait en citer divers exemples, à partir du P. Gaubil; c’est ainsi que le D' Legge tra- duit : « The day (said he) is of the medium length and the star is in Niao; you may thus delermine mid-spring », alors que le texte dit simplement : EME RE VIE ENT (Le) jour moyen (et l’hastre Niao servent (à) déterminer (du) printemps (le) milieu. Nous aurons à critiquer plus loin la première partie de celte traduction; mais ce qu'il faut rete- nir ici, c'est que le second membre de la phrase, par l'adjonction arbitraire du pronom you (vous) et des mots said he (dit-il), fausse la teneur du texte en le plaçant formellement dans la bouche de Yao. Sile Chou-King venait encore une fois à disparaitre et qu'il en subsistät seulement la traduction an- glaise, la postérité pourrait croire que, dans celle phrase, Ÿao s'adressait explicitement à ses astro- nomes, alors que cette version ne reposerait que sur ! Chavannes, 0p. cit. p. 49. LÉOPOLD DE SAUSSURE — L'ASTRONOMIE CHINOISE DANS L'ANTIQUITÉ une interpolalion du xx" siècle de l'ère chrétienne. On voit par là combien fragile est l'interpréta- tion du sens général du texte, comme l’objection que l'on en pourrait tirer contre la discussion astronomique. Les propositions sidérales, prises isolément, ont une signification certaine dont l'au- thenticilté se démontre par les rapports mathéma- tiques qu'elles révèlent. L'ensemble du texte, au contraire, n'a pas de valeur intrinsèque. Nous pourrions done nous borner ici à récuser l'autorité de ce document hybride si un sinologue n'en avait dévoilé le mystère. M. Chavannes, en effel, a montré que les pas- sages mettant en cause le souverain sont des interpolalions postérieures, car il est inadmissible que l'Empire ait eu, dès cette époque, les limites immenses qu'il atteignit seulement sous la 4° dynas- tie. 11 faut admirer la sagacité avec laquelle le jeune historien, alors au début de son œuvre magistrale, a mis le doigt sur l’altération du texte, indépendamment de toute induction astronomi- que: « I n'est pas difficile, dit-il, de reconnaitre dans ce qui précède un vieux calendrier analogue au /lia-Siao-Tcheng... Ce débris de l'antiquité à été incorporé dans la légende de ao, mais devait former à l’origine un tout indépendant" » Dès lors, tout s'explique. Si ces renseignements astronomiques proviennent d'un almanach, il est naturel d'y trouver associés la durée relative du jour et l'étoile de la saison, comme signes distinc- tifs des dates cardinales. Les mots « servent à déterminer » s'adressent au public, non à des techniciens. D'ailleurs, le texte dit: « Ze jour moyen et l'étoile Niao servent à déterminer le printemps ». Par conséquent, si l’on s'en lient à la lettre, il faut admetlre que les Chinois « déterminaient » également les dates cardinales par la durée rela- live du jour, ce qui impliquerait des mesures horaires extrêmement précises. Remarquens, en oulre, que le texte dit plus loin, en employant les mêmes mots : « Le mois intercalaire sert à déter- miner les quatre saisons », alors que sa destina- tion véritable est tout autre. Il faudrait done ad- mettre que les Chinois employaient simultanément trois procédés incompréhensibles pour déterminer les saisons, alors que nous savons fort bien qu'ils se servaient d’un quatrième, beaucoup plus sim- ple: la division de l’année en quatre parties égales. IX. — VALEUR SCIENTIFIQUE DE LA QUADRATURE. ET CHRONOLOGIQUE Ayant ainsi élabli la triple concordance astrono- mique, traditionnelle et littéraire de notre inter- 1 Op. cit., p. 49. prétation, il nous reste à évaluer la précision scientifique du document. D'après le graphique du D' Legge, les proposi tions sidérales du Yao-Tien se rapportent visibl ment à 6 heures du soir, mais pas exactement. Il a des écarts considérables. Mais il serait parfaile= ment illogique de considérer ces écarts comme des erreurs commises par les Chinois. Imagine-t-0r que, si des astronomes modernes voulaient établie une quadralure analogue, il dépendrait d'eux de trouver des étoiles principales aux endroits conve nables? Ils seraient bien obligés de se contenter de celles qui existent et n'arriveraient pas à diviser l'équateur en parties rigoureusement égales. En outre, les fondateurs de cette quadrature se sonb imposé manifestement les règles suivantes : 1° Choisir des étoiles le plus près possible de l'é quateur, où la vitesse du passage méridien esf maxima. Plutôt que de se contenter d'une étoile bien placée en ascension droite, mais un peu élois gnée de l'équateur, préférer une étoile mal placée en ascension droite, mais située sur l'équateur"; 2 L'étoile à choisir doit se trouver à droite de la position qu'elle a à repérer. En effet, comme l'abscisse équatoriale se compte nécessairemenb dans le sens du déplacement du Solei!, de droite à gauche, cette étoile ne pourrait servir à repérer um point cardinal à sa droite, car alors ce dernier se trouverait englobé dans la division précédente. Or, Biot, qui a reconstitué minulieusement toub le ciel chinois du vingt-quatrième siècle, a constatés d'après ces deux règles, que les quatre étoiles de la quadrature sont fort bien choisies et « qu'un astronome moderne n'eût pu faire mieux » (Jour nal des Savants, 1840). Pour relever une erreur de la part des Chinois, il faudrait pouvoir montrer qu'ilsavaient à leur disposition une éloile mieux située que celle qu'ils ont adoptée : or, tel n'est pas le cas. La première de ces deux règles enlève toute va leur chronologique à la quadrature, puisqu'il en résulte que le choix des étoiles n'indique pas néces sairement la position cardinale du Soleil. Mais la deuxième nous permet de supputer l'é poque à laquelle cette quadrature a été établ d'après celte condition que l'étoile devait se trouver originairement à droile de la position cardinale du Soleil; en d’autres termes, que son écart devait être positif et non négatif. Quoique l'étude de Biot ne fût pas deslinée à cette recherche, mais seu ment à réfuter les théories d'Ideler sur un prè tendu zodiaque lunaire, elle va nous fournir la dalle d'origine de la quadrature; Biot avait calculé les . » So ÿE 1 C'est ainsi qu'ils ont dédaigné Régulus, qui repérail exactement le solstice sur l'écliptique, pour lui préférentm petite éloile équatoriale, ul LÉOPOLD DE SAUSSURE — L'ASTRONOMIE CHINOISE DANS L'ANTIQUITÉ 141 ascensions droites suivantes pour l'année 2.357 avant Jésus-Christ : Niao. a de l'Iydre. S7036/40/ + 10m Ho x du Scorpion. AN0037/46/ — 2mÿ Hiu . 8 du Verseau 26301422" + 27m Mao. ñn des Pléiades. 35803016" + 6m La dernière colonne fournit les écarts (en temps) entreles étoiles et les posilions cardinales du Soleil 0e, 90°, 180°, 270°. Puisque l'un de ces écarts à une valeur négative, c’est donc qu'en 2.357 la pré- cession avait déjà commencé à désorganiser le Système en faisant passer à gauche une éloile qui, selon la règle, devait se trouver, au début, à droite de la position qu'elle était destinée à repérer. À raison de 5 minutes par siècle, la quadrature aurait donc été établie — au plus tôt — vers l'an 2.400. Sans doute, ces observations primitives ne sont pas infaillibles ; mais il convenait, pour la clarté de la discussion, d’en envisager d'abord le principe {héorique ; examiaons-en maintenant l'application. Quoique Biot n'ait relevé aucune faute horaire dans le choix des étoiles, admetlons 1° (= 4) d'er- reur ; supposons que les Chinois se soient trompés de deux jours dans la date du solstice d'hiver qui servit à orienter la quadrature, soit 2° (— 8"); ajoutons encore 3 minules : cela fait un total de 15 minutes correspondant à la précession de trois siècles. En admetlant donc que, par un concours fortuit assez improbable, toutes les erreurs se soient produites dans le même sens, la quadrature daterait, à la rigueur, de l'an 2.100. Une autre conclusion, beaucoup plus indiscu- {able, qui résulte de notre interprélation, c'est - qu'à cette époque les Chinois élaient en possession des deux instruments dont leur astronomie resta “dans la suite tributaire : le gnomon et la clep- sydre. Pour faire concorder la quadrature avec Îles - phases de l'année solaire, il était, en effet, néces- saire de fixer une date tropique : sans doute le solstice d'hiver, base du calendrier chinois. Ce peuple n'ayant jamais connu l’autre procédé de détermination tropique (par l'azimul équinoxial), c'est évidemment le gnomon qui a permis d'orien- ler la quadrature. Ayant déterminé soigneusement la date du sol- slice par le moyen de l'ombre maxima, les astro- nomes ont réglé leurs clepsydres, ce jour-là, sur le passage: du Soleil au méridien, à midi; puis, à 6 heures du soir, ils ont noté quelle était l'étoile équatoriale passant au méridien : appelons-la B. Celle éloile va servir de point de départ à la qua- drature. Successivement et en renouvelant maintes … fois l'opération, ils ont jalonné l'équateur de 6 heu- res en 6 heures à partir de l'étoile B dans la révo- lulion noclurne quotidienne ; ils onl ainsi désigné solidairement les étoiles correspondantes C, D et A. À est donc l'étoile en conjonclion avec le Soleil au solstice d'hiver, mais alors c’est B qui passe au méridien à 6 heures du soir et va servir de repère aux diversesobservalions astronomiques effectuées dans le trimestre. De même, à l’équinoxe du prin- temps, le Soleil est en conjonction avec B, mais c'est C qui devient l'étoile de la saison, el ainsi de suite. La clepsydre est indispensable pour l'élablisse- ment el bien plus encore pour l'utilisation de celte quadrature si ingénieuse. On pourrait à la rigueur choisir, sans garde-temps, des étoiles équidistantes sur l'équateur, en observant quelles sont celles (C et A) qui se lèvent et se couchent alors que B culmine au méridien. Mais à quoi servirait cette quadrature et quel rapport présenterait-elle avec le texte du Chou-King, si l'on ne disposait d'une évaluation horaire pour l'utiliser"? Je ne vois d'ailleurs pas pourquoi l'on se refuse- rait à admeltre une invention aussi simple, de la part d'un peuple alors en possession d'une écrilure, d'un calendrier et d'une philosophie sociale remar- quables. La clepsydre chinoise, à l'origine, consistait simplement en un réservoir laissant écouler l'eau goulle à goutte dans un récipient muni d'une lige graduée. Son maniement élait une fonction héré- dilaire ; avec de l'expérience, cet instrument rudimentaire peut donner des résullals fort précis. Comme il est peu coûteux, rien n'empêchait d'en avoir plusieurs et de les comparer. On comprit alors l'utilité de remplacer au fur et à mesure l’eau écoulée, ce qui amena l'idée de maintenir constant le niveau du réservoir. Le Tcheou-li (antérieur à l'ère chrétienne) nous montre que la tige était alors mobile et qu'il existait un jeu de 48 gradua- tions”. L'exactitude de cette quadrature peut paraitre étonnante pour une époque si reculée. Elle est cependant indubitable, puisque ses inégalités cor- respondent toutes à des lacunes sidérales de léqua- teur. Un garde-lemps précis n’est pas nécessaire pour l'expliquer, car il ne s’agit pas d'observations fugitives, mais d'une mesure constamment renouve- lable, destinée dans la pensée de ses auteurs à jalonner le ciel ad sæcula sæculorum. 1 leur à suffi d'évaluer grossièrement la quantilé d'eau écoulée en un quart de jour, puis de la rectifier de telle façon que l'opération renouvelée quatre fois amenât le retour du même astre au méridien. ! Les vingt étoiles fondamentales qui repéraient sur l'équateur la culmination des circumméridiennes auraient été également inutilisables sans la connaissance de leurs intervalles. ? La clepsydre sous les Soui était très perfectionnée ; elle 112 LÉOPOLD DE SAUSSURE — L'ASTRONOMIE CHINOISE DANS L'ANTIQUITÉ X. — INDICATIONS SECONDAIRES DU TEXTE‘. L'évaluation grossière de la durée de l'année 366 jours) peut surprendre de la part d'astrono- mes en possession de repères sidéraux si précis. Dans un calendrier perpétuel, en une seule géné- ration, cette erreur de 0i,76 aurait produit un re- tard de 23 jours équivalant à l'effet de la préces- sion pendant 18 siècles! Mais il faut se rappeler que ‘e calendrier chinois considérait l'année commeune entité autonome, contrôlée par la déter- minalion expérimentale du solstice d'hiver. L'éva- luation de sa durée ne servait qu'à établir le calendrier en cours ; et pour cela, un nombre pair, assignant à chaque saison 911,5, était plus commode qu'un nombre impair. Il paraît donc probable qu'en principe on admettait 366 jours, et qu’on retranchait un jour 3 fois sur 4 en attribuant seule- ment 29 jours à une lunaison de 30. Ce nombre avait aussi l'avantage de simplifier la règle d’intercalation. Son douzième, en effet, est de 301,5. La lunaison élant de 29:55, cela donnait un jour de recul par mois lunaire. XI. — LA NOMENCLATURE ANTIQUE. Parmi les 28 divisions équatoriales dont la liste immuable a traversé les siècles, ne figurent pas les deux premiers termes, Miao et Ho, mentionnés par le document. Leur interprétation soulève quelques difficultés ; si nous avons pu en faire abstraction jusqu'ici, c’est que les auteurs dont nous avons contesté les vues sont d'accord avec nous sur ce point que le texte désigne les étoiles déterminatrices des divi- sions Sing (Niao), Fang (Ho), Hiu, Mao. Nous avons vu cependant que, dans sa traduc- lion, M. Chavannes parle de constellations et même de groupes de constellations. Il y a lieu mainte- nant de préciser la portée de cette divergence d’in- terprétation. Si ces observations antiques concernaient vrai- ment la culminalion de groupes de constellations, elles seraient tellement vagues qu'il n'y aurait au- cun parti à en lirer ; et l'on concoit que, dans cette acception, M. Chavannes n'en fasse pas grand cas. Mais, indépendamment du texte, et quand bien meme nous ne posséderions pas le Chou-King, le fait que, sur les 28 étoiles fondamentales, si inéga- galement réparties en général, il en est 4 qui comprenait quatre réservoirs superposés. Un instrument de ce genre existe dans une bonzerie de Canton. Il serait utile d'en avoir la description, que j'ai négligé de faire, n’en con- naissant pas alors l'intérèt historique. © Voir l'article complémentaire qui paraitra sous peu dans le T’oung Pao (Leroux, éditeur Jjalonnent les positions cardinales du Soleil a xxIv° siècle, suffirait à établir l'existence, la préci- sion et l'époque de la quadrature. Sans le secours des indications du Chou-Xing, personne — il es vrai — ne se fût avisé d'une telle découverte ; mais puisqu'elle est faite, on peut au besoin considéret ce texte comme une simple confirmation de a preuve lirée de la réparlition des sieou. f L'interprétation astronomique n’est done pas en Jeu. Il est intéressant néanmoins de savoir si fé Yao-Tien parle réellement de constellations ; cela importe d'autant plus que les démonstrations pu rement astronomiques ont naturellement moins de prise sur l'espril des sinologues si elles ne sonb appuyées par quelque argument d'ordre histo- rique. Le lexte dit uniformément: sing Niao…. sing Ho... sing Hiu... sing Mao.., c'est-à-dire : l'étoile Niao. l'étoile Ho.…., ete. bei mot sing désigne, en effet, un astre isolé, étoile ou planète. Puisque la teneur liltérale du texte est d'acces avec l'interprétalion de l’Astronomie européenne, pourquoi donc les sinologues s’en écartent-ils pour traduire sing par « constellation » el même par « groupes de constellations »? — Uniquement parce que d'anciens commentateurs estiment que Niao et Ho désignent des zones englobant plusieurs sieou. Et comme, en chinois, le pluriel est souven: sous-entendu!, le mot sinq he est alors supposé signifier les étoiles Niao…. les étoiles Ho... On passe ainsi d'étoile à ÉMESS puis à cons= tellation et enfin à constellations. Puisqu'on justifie cette extension par une raison étymologique, non astronomique, il n'y a, en tous cas, aucun motif de l’imposer également à Æiu et Mao, qui sont incontestablement des noms d'étoiles identifiés par les Jésuites avec 8 du Verseau et des Pléiades. L'origine des sieou ne repose jamais sur la considération d'une figure spatiale*. Is: * Le texte en fournit plus haut un exemple; il dit que Yao ordonna d'observer FH HA à le) soleil, la) lune, (les) éloiles. M. Chavannes traduit ce dernier mot par cons- telations. * Je ne suis même pas convaineu que le mot sieou ait désigné, au début, des zones spatiales: de telle sorte que: même si le texte parlait de sieou, on pourrait encore sous tenir anal désigne des astres isolés. L'orthographe de ce, mot fe indique Éle ent {nomme :s (abrités sous un. toit. Il peut signifier auberge, et l'on s'est appuyé sur ce fait pour l'assimiler aux wansions lunaires d'autres pe uples.} Sa composition idéographique semble justifier cette op nion, car on peut se représenter les étoiles d'un sieouh comme abritées dans un même logement. Mais ie ne crois pas que cette explication soit la bonne. L'auberse chinoise n'est pas un lieu de réunion, mais un relai, une halte Exemple : l'auberge de Ho-Si-Wou, qui marque létapen entre Tien-Tsin et: Pékin. L'acception primitive de €en mot indique un corps de garde, un poste échelonné de dis=M tance en distance, un relai. Il correspond au latin Stati00 LÉOPOLD DE SAUSSURE — L'ASTRONOMIE CHINOISE DANS L'ANTIQUITÉ 143 —— coupent en deux ou trois morceaux les constella- tions les mieux caractérisées, comme Orion, dont ils ne tiennent aucun compte, étant déterminés par des étoiles équatoriales repérant le passage méri- dien de certains astres remarquables. Plus on re- monte dans le passé, par conséquent, plus le nom de la division s'applique spécialement à l'étoile qui lui a donné naissance. Et, puisque la teneur du texte, comme l'interprélalion aslronomique, postule « l'étoile Æiu.., l'étoile A/40...», on ne sau- rail étendre à ces deux termes l'objection relative aux deux autres. Examinons maintenant cette objection, basée sur les commentaires chinois. Ceux-ci sont loin d'être unanimes. Nous avons vu, d'après le P. Gau- bil, qui a compulsé tous les ouvrages spéciaux à une époque où l’on pouvait encore se les procurer, que les astronomes avaient conservé l’interprétla- tion exacte concernant les « 4 étoiles qui répondent aux 4 saisons »; el le missionnaire ajoute : « Cette interprétation des auteurs du temps des an est généralement suivie par les astronomes et histo- riens des Z'sin, Tang, Song, Yuen, Ming et ceux de la dynastie présente ; on le suppose au Tribunal des Mathématiques comme un point certain. » Les techniciens chinois connaissaient donc le véritable sens du document avant la découverte de la pré- cession ; mais, comme ils n'élaient pas en mesure de le démontrer, il n'est pas surprenant que toutes sortes de théories contradictoires aient été émises pour expliquer un texte en désaccord avec l'état du ciel. Certaines d'entre elles se rapportent au coucher du Soleil, ce qui explique l'opinion du -D' Legge. Mais, comme le dit le P. Gaubil à propos d'un autre passage, ce qu'on voit de plus sûr dans ces commentaires, c'est que leurs auteurs élaient de bien mauvais astronomes. Il faut prendre cependant en sérieuse considé- ration les explications puisées par M. Chavannes dans la grande collection Hoang, T's'ing King Kie. Elles nous fournissent sur la nomenclalure antique des renseignements inédits provenant certaine- ment d'une tradition directe‘. Le ciel, d'après cette tradition, était primitive- ment divisé en quatre régions symbolisées par oiseau (Niao), le dragon, le tigre, la tortue. Or, on peut également induire de la théorie de Biot (Cp. statio militum, Suétone). Il me parait clair qu'il s'ap- plique, dans ce sens, aux étoiles jalonnant l'équateur el non à leurs intervalles spaliaux. Comme notre mot étape, il à fini par désigner à la fois les stations et l'intervalle de ces stalions. ! Le plus ancien de ces commentateurs Xong Nan Kouo jouit d'un grand prestige, non seulement comme descen- dant direct de Confucius, mais parce qu'il a pris une part importante à la reconstitution du Chou-King, dontunexem- plaire antique fut découvert dans un mur de sa maison ancestrale (rie siècle avant J.-C.). qu'il a dû exister une division en quatre quartiers, puisque les quatre étoiles tropiques ont une origine antérieure aux aulres sieou. Il faut remarquer, cependant, que les astres dé- signés par le texte ne sont pas situés à l'origine, mais au #ilieu des régions dont parlent les com- menlateurs. Cela s'explique très bien, car la méta- physique et le calendrier chinois considèrent le milieu de la saison comme la date fondamentale. Chaque saison étant supposée en corrélation avec un élément de la nature (bois, feu, métal, eau) et avec un point cardinal de l'horizon (est, sud, nord, ouest), l'effet maximum de ces influences occultes devait se faire sentir naturellement au milieu de la Saison, non à sa limite. Il me parait donc vraisem- blable que, dans la terminologie antérieure à Yao, à l'origine de la quadrature destinée à fixer exac- tement le pointcardinaldes saisons, on eût désigné les quatre étoiles choisies par les noms étoile bois, étoile leu, etc..; ou par les noms étoile oiseau. étoile tigre.…., ete. Le caleul de la précession nous a montré, en eflet, que la quadrature avait été constituée à une époque antérieure àce souverain, et la terminologie du texteconfirme cette induction en établissant qu'au temps de }ao une partie des noms anciens élait encore usitée (ANiao, [o), alors que d'autres noms avaient fait leur apparition par suite de la création récente d'un certain nombre de sieou. Cette hypothèse me parait corroborée par l’indi- cation suivante : « Il n'y a pas à proprement parler de constellation Z/0, dit M. Chavannes ‘:; le mot Lo signifie feu, et, comme l'élément feu correspond au sud et par suite à l'été, on appelle constellations leu celles qui culminent au moment du solstice d'été; on donne plus spécialement ce nom, parmi les sept constellations qui occupent la région du ciel symbolisée par le dragon, aux deux constel- lations centrales qui sont ang et Sin ». Cette éty- mologie intéressante est visiblement altérée par l'ignorance des Chinois sur la genèse de leurs di- visions. Il ne pouvait pas, en effet, exister sept sieou dans le quartier du Dragon, s'il est exact (comme cela me parait démontré) que 4, sur 28, datent du xn° siècle. D'autre part, l'amplitude de la division Sin n'était que de 3° seulement; un fuseau horaire s'étendant d’un pôle à l'autre et n'ayant que 3 à l'équateur ne saurait répondre à aucune constellation; il provient manifestement de la segmentation d'une ancienne division, com- prenant peut-être Fang el Sin, et qui a pu porter le nom //o de létoile cardinale. C'est là une simple supposition ; mais on voit qu'il n'y a pas de constellation Sin ; que d'anciens 1 Op. cils, p.46. lA LÉOPOLD DE SAUSSURE — L'ASTRONOMIE CHINOISE DANS L'ANTIQUITÉ noms ont dû cerlainement disparailre dans les seg- mentations successives ; que la tradition a conservé le souvenir d'une région //0 repérée par l'étoile cardinale ; enfin, que le texte disant sing Ho (l'étoile A0), aucun renseignement positif ne prouve qu'il y ait là un contre-sens. Le D' Legge concilie la teneur liltérale avec les commentaires en traduisant: «l'astre est dans Ho »; il n'est guère probable que cet expédient rende comple de l'intention originelle du texte ; en tous cas, il n’y à aucune raison de l’étendre, comme il le fait, aux deux derniers termes /Ziu et Mao. En résumé, les commentateurs ont conservé une tradition authentique, mais incomplète, en faisant une distinction entre les deux premiers et les deux derniers termes. Les régions désignées autrefois par ANao el Ho ne sont pas équivalentes aux sieou postérieurs Sing et Fang. Les divisions primitives étaient repérées par une étoile placée au centre; les divisions ultérieures, par une étoile placée à leur droite ; ce qui résulte de la destinalion res- peclive de ces deux systèmes. On ne peut prouver que les termes Niao, Ho, aient désigné des étoiles, mais le contraire ne saurait non plus se démon- trer. Dans ces conditions, il me semble que la charge de faire la preuve incombe plutôt à qui s'écarte de la teneur du texte confirmée par l'interprétation astronomique. XIT. — ConcLusiow. La destinée de ce document du CAou-King a élé singulière. À l'origine, quelque scribe chargé de rédiger l'almanach officiel fit probablement un emploi peu judicieux de deux mots de sa langue; ce simple fait a engagé dans une impasse les cri- tiques modernes, tant chinois qu'européens. Plutôt que de dénoncer l'impropriété de ces termes, dont le texte fournit d’ailleurs un autre exemple pro- bant, on a échafaudé des théories qui déniaient aux astronomes chinois toule précision technique, en les supposant néanmoins capables d'observer les étoiles en plein jour. La considération suivante suffit d’ailleurs à ruiner toute interprétation simi- laire : les étoiles dont il s’agit étant également dis- tantes sur l'équateur, leur culmination ne peut con- corder avec le coucher du Soleil, à moins de faire régner le bon roi Yao sur une contrée équatoriale. L'opinion du Professeur Russell fait cependan aulorilé. Nous en voyons un indice dans l’appré ciation suivante d'un historien peu porté ceper dant à accepter sans contrôle les idées reçues « Les commentateurs ont accumulé autour de ce pa s sage toute leur science astronomique. Il nous suffi de n'y voir que ce qui s'y trouve exprimé, à savoñ que les Chinois avaient évalué la durée de l’annë avec une assez grande approximation, en secon lieu qu'ils avaient recours à l'artifice des moi intercalaires ». Le savant traducteur — dont les travaux per meltent actuellement à tout homme cultivé de se délecter à la lecture si attrayante du Tite-Live Chinois — tient donc pour négligeables les quatre propositions sidérales qui constiluent, à mon avis, le plus étonnant, le plus précis et le plus ancien document scientifique de l'humanité. | Ce texte démontre que les Chinois, antérieure ment à l'an 2.000, possédaient les instruments et 1 théorie complète de leur astronomie équatoriale et qu’au delà encore doit se trouver un long passé de tätonnements et de progrès. Il faut done recule de dix siècles au moins les premières étapes de leur civilisation, telles qu'on les concoit actuelle ment; cela suffit à rendre vraisemblable la réalité des souverains légendaires qui précèdent les grandes dynasties. La crilique historique a montré, il esl vrai, que les annales sont suspectes. Mais ses preuves sonl purement dubitalives et n’enlament pas la possi bilité de ce passé. Les découvertes de ces der nières années en Grèce et en Egyple prouvent que les mythes peuvent recéler une histoire véridique: Le Juge des Enfers a réintégré son palais de Cnossos, et, dans la vallée du Nil, les dynasties divines ont pris rang parmiles mortels. Tour des Mathématiques. Une lumière en détache le profil dans l'obscurité : à la lueur des lampes qui éclairent la graduation des clepsydres, de astronomes sont occupés à choisir quatre étoiles. alors également réparties sur l'équateur céleste, € dont la dispersion actuelle mesure la durée d’une histoire plus de quarante fois séculaire. Léopold de Saussure. D° G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE 145 a ———— —— —— OO . Les cellules de notre organisme ne jouissent pas toutes d'une longévité égale. Comme on le sait, lêtre vivant n'est qu'une fédération d'êtres élé- -menlaires évoluant pourleur propre compte. Quel- ques-unes de ces cellules ont une existence tout à fait éphémère, tandis que d’autres ont une longé- vilé aussi grande que l'organisme dont elles font partie. C'ést ainsi que la couche épithéliale qui couvre notre corps est dans un continuel renou- vellement, les cellules les plus superficielles repré- sentant des cellules mortes ou en train de mourir. Ilenest de même pour les cellules épithéliales de la plupart de nos muqueuses, qui meurent et se détachent tous les jours de notre organisme. Bien plus, ilexiste dans notre organisme des glandes dont les cellules se détruisent à la suite de leur fonctionnement. La glande mammaire représente, à cet égard, un exemple remarquable : en sécrétant le lait, des cellules glandulaires se consomment et meurent. En opposition avec ces éléments dont l'existence est éphémère, il y en a d'autres dont la vie est pour ainsi dire éternelle, carils vivent aussi longtemps que l'organisme dont ils font partie : Jai nommé la cellule nerveuse et le tissu muscu- laire. Des recherches multiples, expérimentales, et des études anatomo-pathologiques ont montré que la cellule nerveuse ne se multiplie pas après à naissance el qu'un centre nerveux détruit est incapable de se reproduire ; et précisément c'est à cette fixité de la cellule nerveuse qu'est due la persistance de certains souvenirs de la plus tendre enfance jusqu'à notre extrême veillesse. C'est là également la raison de l'incurabilité des paralysies motrices ou sensitives après la destruc- tion des centres nerveux. Si la masse de nos centres nerveux augmente considérablement après la naissance, cela ne dépend pas de l'augmentation numérique des cellules nerveuses, mais bien de leur volume. En effet, j'ai démontré, à l'aide de mensuralions précises, que le volume des cellules nerveuses augmente conslamment après la nais- Sance et que celte augmentation intéresse les élé- ments constitutifs de la cellule : corps cellulaire, noyau, nucléole et prolongements. Elle s'arrête vers l'âge de trente ans. Quelques auteurs, et récemment Ciaccio*, ont EEE ! Get article, entièrement rédigé, nous à été remis en novembre 1906 (Note DE LA RépACrTION. Cractro : Sur la reproduction des cellules nerveuses Revue neurol., 15 octobre 1906. REVUE GÉNÉKALE DES SCIENCES, 1907. LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NER VEUSE ' PREMIÈRE PARTIE : DÉGÉNÉRESCENCE ET RÉGÉNÉRESCENCE DES NERES admis la multiplication des cellules après la nais- sance. Ce dernier aurait trouvé dans le cerveau de la souris, en outre des cellules à type adulte, d'autres cellules embryonnaires, occupant en grande partie la couche interne et externe de l'é- corce cérébrale et aussi une petite partie de la couche pyramidale. Ces éléments sont pourvus d'un gros noyau ovalaire et d'une mince couche de protoplasma basophile : ce sont des neuroblastes. Leur rôle est de servir d'origine à des cellules nerveuses nouvelles par division amitotique. La division est asymétrique et, dans ce cas, à côté de gros noyaux bien constitués, on en voit d’autres plus petits. Le processus ne va presque jamais Jusqu'à la division complète des cellules nerveuses en plusieurs cellules filles; il a pour conséquence la formation d'éléments à plusieurs noyaux. L'un d'entre eux deviendra le noyau de la future cellule nerveuse, tandis que les autres subissent le pro- cessus dégénératif et forment le protoplasma. L'au- Leur combat l'objection qu'il s'agisse là de cellules de névroglie, parce qu'il a pu observer des stades de transition entre ces éléments polynucléaires, les neuroblastes et les cellules nerveuses adultes. Puis, dit-il, si ces noyaux représentaient des cellules de névroglie ou des neuronophages, on ne pourrait pas s'expliquer leur présence dans les cellules ner- veuses jeunes, étant donné que les neuronophages n'attaquent que des éléments vieillis. De ses recherches, l’auteur conclut que la cellule nerveuse n'est pas un élément perpétuel et que les cellules vieilles sont remplacées par des éléments peu diffé- renciés, par un processus spécial. L'opinion de M. Ciaccio ne saurait être admise sans conteste, car les faits observés par lui sont susceptibles d'une autre explication, et ses conclu- sions dépassent l'interprétation exacte des faits. Il est vrai qu'on peut rencontrer dans l'écorce des Jeunes animaux, et même chez l'adulte, des cellules à plusieurs noyaux. Moi-même j'ai fait une consta- tation identique, mème chez l'homme : mais cela ne prouve pas que ja division du noyau ait pour con- séquence fatale celle du protoplasma. Chez l'em- bryon humain âgé de sept mois, on trouve constam- ment des cellules des ganglions sympathiques à noyaux multiples, et même chez l'homme adulte j'ai trouvé également des cellules à trois et quatre noyaux; de sorte que, pour nous, les cellules à plusieurs noyaux qu'on peut rencontrer chez l'ani- mal adulte représentent des formes de divisions 4* retardataires qui n'ont pas abouti à la multiplication des cellules. Quant à l'opinion de M. Ciaccio, à savoir que les noyaux sont destinés à la formation du protoplasma par deux processus dégénératifs différents, c'est là une hypothèse qui me semble hasardée. Si les cellules nerveuses elles-mêmes ne sont pas capables de mulliplication et de régénérescence, il n'en est pas de même de leurs prolongements ner- veux. Ceux-ci, en effet, jouissent d’une grande capacité de régénérescence, que nous prouverons dans ce travail à l'aide de documents multiples. Mais, pour mieux saisir le mécanisme intime de la régénérescence, il faut d'abord étudier la phase qui ‘en précède les premiers phénomènes. Il est nécessaire, je pense, de faire précéder cette étude d’un court historique de la question : On sait que Waller, à la suite de nombreuses recher- ches expérimentales faites principalement sur les racines du onzième nerf cervical du chat et du chien, formula en 1856 la proposition suivante : Quand on interrompt un cordon nerveux de facon à empêcher sa régénération, le bout périphérique dégénère lorsqu'il est ainsi séparé de son centre trophique, tandis que le bout central, resté en rap- port avec ce centre, demeure normal. Il a montré ensuite que les fibres dégénérées étaient l’objet d'un processus de régénérescence, aboutissant à la res- tauration anatomique et fonctionnelle du nerf sec- tionné. Waller pensait qu'à la suite de la section, tous les éléments du nerf, à savoir le cylindraxe, la myéline et la membrane de Schwann, subissenl la dégénération et disparaissent complètement. Par conséquent, tout est détruit lorsque la régéné- rationcommence:lestubes nerveux de nouvelle for- mation n'empruntent absolument rien aux anciens. L'opinion discordante de Schiff', qui avait affirmé qu'on ne doit pas parler d’une régénérescence des fibres du bout central parce que les cylindraxes ne disparaissent pas dans le bout périphérique aprèsla section d’un nerf, n’a guère qu'une valeur historique. Les phénomènes morphologiques qui caractérisent la dégénérescence wallérienne ont été étudiés principalement par Ranvier*, Vanlair*, von Büngner*, Stræbe”, etc.; mais les lésions fines du ! Scuirr : Sur la dégénérescence paralytique des nerfs; sur quelques conditions de la régénération des nerfs sectionnés. Semaine médicale, 1811, p. 262. ? Ranvier : Lecons sur l’histologie du système nerveux, 873, p. 158. 3 Rs : Arch. de Phys. norm. et pathol., 1894. * Vox Bünçcxer : Zieglers Beiträge, Bd. X (189). Uber die Degenerations und Regenerations-vorgänge aus Nerven nach Verletzungen. » Srrogee : Zieglers Beilräge, Bd. XIII. Experimentelle D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE cylindraxe ont été décrites pour la première fois par Bethe et Monckeberg‘. Ces auteurs ont observé que le premier phéno mène de la dégénérescence, c'est la disparition de la colorabilité primaire des fibrilles du cylindraxe qui coïncide avec la perte de l’excitabilité du nerf Puis, on voit que les fibrilles ne sont pas éten dues comme à l’état normal, mais montrent des flexuosités sur leur trajet et sont entremêlée D'autre part, les neurofibrilles, au lieu d’être unie présentent, par ci, par là, des épaississements gra: nuleux. Le nombre de ces épaississements aug mente et est suivi d'une destruction granuleusé des fibrilles. Puis, la substance {périfibrillaire, au lieu d'être homogène, se remplit de fines granula tions. Les grosses granulations provenant de la dégénérescence des fibrilles disparaissent. En ce qui concerne la dégénérescence de la myéline, Nasse avait déjà observé la fragmentation et la résolu tion de gros fragments en petits morceaux. Puis Ranvier, Vanlair, von Büngner, etc., ont étudié de plus près ces modifications et ont montré com ment les fragments de myéline se réduisent à læ fin en petites boules ou même en gouttes qui siè gent entre les restes du cylindraxe. Je donne à présent le résultat de mes recherches, faites à l'aide de la méthode de Cajal, sur la dégénérescence des nerfs périphériques consécutive à la section. Les phénomènes morphologiques qui caracté= risent la dégénérescence wallérienne sont variables et leur aspect dépend de facteurs multiples, parmi lesquels il faut citer en première ligne l'intensité du traumatisme qui a déterminé la solution de con tinuité du nerf, l’âge de l'animal et le milieu où celui-ci a été conservé. Sans doute, l'intensité d traumatisme retentit tout d’abord sur les bouts du nerf sectionné. Quoi qu'il en soit, le premie phénomène qui apparait aux extrémités du nerf | sectionné, c’est l'accumulation de substances li quides qui produit une espèce de gonflement du cylindraxe et de la myéline. L’accumulation des. substances interfibrillaires sur certains points du cylindraxe à pour conséquence de produire des” modifications dans la structure de celui-ci. Il se produit tout d’abord, tout au moins dans quelques fibres, la dilatation des mailles du réseau existant à l’état normal dans le cylindraxe. Les travées pr maires peuvent être épaissies, les ramifications secondaires sont ou ne sont pas visibles; la désin: tégration et la dégénérescence granuleuse des neu rofibrilles apparaissent ensuite. A ce moment, le cylindraxe se fragmente en mon pherer Nerven nach Verletzungen (1893). i { Berne und MOoNCKkEBERG : Arch. f. mikr. Anat., 4. LIN D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE 147 grande de granulations, cerlaines plus grosses, el d'autres plus fines. Je désigne du nom d’axo/yse la dissolution des neuro-fibrilles du réseau du cylin- draxe et leur transformation en une masse granu- leuse. A mesure que la liquéfaction s’accuse, il apparait dans le cylindraxe des granulations (fig. 1, A), des espèces de vacuoles ou des cavités (fig. 1, À, B,C, D), qui donnent aux fragments de cylindraxe des aspects très différents. Ces fragments s'incurvent, ont un trajet spiroïde ou curviligne ; ils sont séparés par les noyaux des cellules de Schwann na RS ontarien e ER M Sion rt ST Tr ane er, CITES épet EE iet Hs pa Lien NOT ÉcuAere RER nn ns se æ'e ne ue DE Dar de Fig. 1. — Quatre fibres à differents degrés d'axolyse. A. Le cylindraxe ne présente plus de neurofibrilles, mais il est constitué par une foule de granulalions disséminées dans la substance interfibrillaire. B. Formation de cavités el de vacuoles à l'intérieur du cylindraxe à la suite de la résorption des granulations. C. Lésion encore plus avancée. D. Fragmentation et morcellement du cylindraxe, augmentés de volume et entourés d'une quantité plus ou moins grande de protoplasma. À mesure que les fragments de cylindraxe deviennent de plus ‘en plus petits, ces noyaux et leur protoplasma aug- mentent et se divisent, donnant naissance à des cellules fusiformes, que j'ai baptisées du nom de cellules apotrophiques. En effet, ces cellules consti- tuent des colonies et des faisceaux qui ont pour but d'attirer les axones jeunes, de nouvelle forma- tion, que nous allons décrire tout à l'heure dans le bout central; elles se laissent traverser par ces axones, les nourrissent et les dirigent pour les conduire jusqu'à leur deslination dernière. Si la liquéfaction du cylindraxe et la dégénéres- cence de son réseau neurofibrillaire marquent le commencement de la dégénérescence wallérienne, l'augmentalion de volume des noyaux de la gaine de Schwann et de leur protoplasma, et ensuite leur division, marquent le commencement de la régénérescence !. En dehors de ces phénomènes de dégénéres- cence, en rapport direct et exclusif avec la suppres- sion de l'action trophique de la cellule nerveuse sur le cylindraxe, on peut voir, en outre, dans les cylindraxes situés à l'extrémité du bout périphé- rique, des modifications d'un aspect un peu diffé- rent. Il s’agit de fibres qui présentent une colora- tion plus foncée sur une partie de leur trajet et une luméfaction considérable dans laquelle on voit très nettement un réseau à mailles plus ou moins larges et à travées fortement argentophiles. Le réseau, de forme variable, peut n’exister qu'à la surface du cylindraxe, pendant que, dans la partie “profonde, on peut voir un filament constitué par des neurofibrilles juxtaposées. Cette modification hyperplastique est passagère, car les travées du réseau sont fragmentées el l'on assiste même dans ces fibres à la formation de l'axolyse. En plus des phénomènes plus ou moins connus qui caractérisent la dégénérescence wallérienne du bout central, nous avons trouvé certaines for- malions assez spéciales qui méritent qu’on s’y arrêle un instant. Il s'agit de la présence de néo- formations qui paraissent en rapport intime avec des modifications des cellules apotrophiques. En effet, ces corpuscules plus ou moins volumineux et, pour cette raison, visibles à un faible grossisse- ment, ressemblent aux massues lerminales que nous sommes habitués à voir à l'extrémité du bout central. Ces massues ne paraissent pas tout d'abord être en continuité avec les fibres parties du bout central. D'ailleurs, ces formations sont précoces et on les trouve déjà trois ou quatre jours (fig. 2) après la section d’un nerf, alors qu’il n'y a pas encore de cicatrice entre les deux bouts sectionnés. Elles sont très variables d'aspect et sont plus nom- breuses dans certains faisceaux que dans d’autres. Elles paraissent tout d'abord constituées par deux portions: une porlion périphérique pâle, amorphe ‘ Pour l'historique de la question de la dégénérescence et de la régénérescence expérimentales, je renvoie le lecteur au travail complet et intéressant de Mepea : Contributo allo studio delle fini alterazioni della fibra nervosa (feno- meni de e regenerativi) nella neurite parenchimatosa dege- nerativa sperimentelle. Memorie del BR. Intituto lombardo de scienze et lettere, vol. XX-XI della serie I, fasci, VIN, Milano, 1906. 148 D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE ou granuleuse, et une portion centrale constituée par de la matière argentophile possédant le plus souvent une structure réticulée ou neurofibrillaire. Parfois, les neurofibrilles s'y disposent sous forme de peloton, d’autres fois sous forme de pinceau et, enfin, en réseau à mailles distinctes. Ces massues apparaissent parfois comme des formations indé- pendantes. Passons à présent aux phénomènes chimiques qui caractérisent les troubles nutritifs de la dégé- nérescence wallérienne. Il faut remarquer tout d'abord que nos connaissances à cet égard sont tout à fait incomplètes. Les auteurs qui ont abordé cette élude sont les savants anglais Halliburton et Mott. Ces auteurs ont constaté que, dans les nerfs dégénérés, la quantilé d’eau augmente pendant que celle de phosphore diminue; ils ont également remarqué la disparition du protogane. La lécithine, qui constitue une grande partie de lamyéline, subit, sous l'influence de l'hydratation, des modifications de désorganisalion qui peuvent s'exprimer de la manière suivante : lécithine + eau — acide stéarique + acide glycérophosphorique + choline. Comme on le voit, la dégénérescence de la myé- line ne constitue pas une simple émulsion repré- sentant un phénomène d'ordre physique, mais il s’agit là d'un véritable phénomène chimique, d'un dédoublement avec hydratation, c'est-à-dire d'une saponification. Sans doute, ce phénomène de saponification est analogue à d’autres phéno- mènes du même genre et est dû, par conséquent, à une diastase qu'on peut comparer à celle qui existe dans le sue pancréatique. Les lécithines se rap- prochent, comme on le sait, des corps gras par la propriété qu'elles ont de donner de la glycérine par la saponification. Du reste, les graisses du système nerveux sont des mélanges de cholestérine et de lécithine. Il s'ensuit que les substances grasses de la myé- line se décomposent, à la suite de la séparation d'un nerf de son centre trophique, à la manière des matières grasses dans la digestion. Je pourrais invoquer à l'appui de ma manière de voir le fait, trouvé par Bockay, que le suc pancréatique dé- compose la lécithine en acide gras. La conclusion qui se dégage de ces considérations, c'est que la formation des acides : acide stéarique et acide glycéro-phosphorique, dans la dégénérescence wal- lérienne, est due à un processus de dédoublement ou de fermertation analogue à celui de la digestion pancréatique par exemple. Ayant ainsi établi la nature enzymatique de la dégénérescence de la myéline, il s'agit de se demander où à lieu la fabrication du ferment qui réalise la saponifi- cation des graisses de la myéline. Il est probable que ce sont les noyaux de la gaine de Schwann, qui entrent en activité et qui prolifèrent d'uné facon considérable dans le bout périphérique dx nerf sectionné, qui sécrètent celte substance. Quoi qu'il en soit du siège d’élaboralion du ferment dé saponification de la myéline, il n'y a pas de doute que ce ferment, s’il exisle, est inactif à l’état nor mal; il se trouve donc à l'état de proferment. La section du nerf le ferait sortir de son inactivité par sa transformation en ferment. Nous arrivons à présent à l’étude des phéno mènes chimiques de la dégénérescence du cylin draxe. Nous avons vu qu'au point de vue morpho Fig. 2. — Extrémité supérieure du bout périphérique dans un cas de sciatique réséqué. — On voit tout d'abord er haut de la figure des éléments cellulaires émigrés : cel lules rondes, cellules à réseau, et, plus bas, des fibres fines sinueuses qui finissent par une massue. Parfois, Iæ substance argentophile de la massue est entourée d'une atmosphère de protoplasme, pale, jaunâtre et granuleu appartenant, suivant toutes les probabilités, à des cellules apotrophiques. En À et en A!, on voit comment la fibre jeune finit par une espèce de pinceau réticulé à l'intérieur du proto plasma de ces cellules. e.J, c.1', cellules émigrées;r, cylin: draxe tuméfié et à structure réticulée très manifeste: logique, nous avons affaire là avec la désorganisas tion des neurofibrilles, qui sont réduites à des gras nulations de différents volumes et constituent des masses informes : ii s’agit là de l’axolyse. Sans doute, cette désorganisation a pour conséquence l'incapacité d'absorption de l'oxygène, élémenb indispensable pour la fonction du nerf. La désors ganisalion du cylindraxe représente, en somme, D: G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE 149 un phénomène de protéolyse; mais les phénomènes chimiques intimes qui caractérisent la désorgani- sation du cylindraxe nous sont malheureusement inconnus, parce qu'on ne connait pas bien la for- mule chimique d'une matière albuminoïde ; aussi nous ne pouvons juger les modifications du cylin- draxe dégénéré que par comparaison avec ce qui se passe dans le phénomène digestif des matières albuminoïdes. IL est impossible d’aller plus loin dans cette voie de l'hypothèse et de dire si, dans Paxolyse, il intervient deux ferments, comme le fait a élé prouvé par Pavlow et Chepowalnikoff pour la digestion pancréatique des matières protéiques, ou bien s'il s’agit là de l’action d'un seul ferment. C'est, du reste, pour le moment une chose d'intérêt secondaire, car le fait important qui résulte de toutes les considéralions que nous .venons d'émettre plus haut, c'est que la dégénérescence morphologique de la myéline et du cylindraxe, con- sécutive à la section des nerfs, est sous la dépen- dance de modifications biochimiques analogues à celles qui se passent dans la digestion. Les substances graisseuses de la myéline, comme des graisses soumises à la digestion, subissent des changements analogues de la part des enzymes sé- crétés, dans un cas, peut-être par les cellules de la gaine de Schwann,dans l'autre, par les cellules des glandes digestives. D'une façon comme de l'autre, les graisses sont émulsionnées et saponifiées. A leur tour, les matières protéiques des aliments sont transformées par la pepsine et la trypsine en subs- tances solubles comme les albumines, les pep- tones, ete. On doit rencontrer également de pareilles substances dans les nerfs en état de dégénéres- cence; mais il est probable que, dans ces derniers, la décomposition est poussée encore plus loin et qu'il y a formation de produits solubles plus simples, tels que la tyrosine, la leucine, etc. Je pourrais rapprocher de l'opinion que je viens d'émettre l'hypothèse de ScotLl! à propos du mé- tabolisme et de l’action de la cellule nerveuse. Cet auteur croit que la substance de Niss] des cellules nerveuses se rencontre seulement dans les cellules pancréatiques et dans les cellules principales des glandes du fond de l'estomac. Les neurosomes de Ileld sont morphologique- ment homologues des granulations zymogènes des cellules glandulaires, etil y a dépendanceréciproque entre la quantité de la substance de Nissl et le nombre de neurosomes, exactement comme il y en a une entre le prozymogène de Mac Callum et le nombre des granulations de zymogène. Les noyaux de ces trois genres de cellules se ressem- 4 F. IH. Scorr : Sur le mélabolisme et l'action de la cel- lule nerveuse. Brain, parts CXI et CXIT, p. 506-527, Autumn end Winter, 1905. blent beaucoup. Il y a aussi une grande ressem- blance entre l’action de ces trois cellules en tout ce qui concerne la transformation des protéides. De tout cela, l’auteur conclut que les cellules nerveuses agissent peut-être par le moyen d'un ferment pro- téolytique qu’elles élaborent. Sans doute, l'hypothèse prend une large part dans la théorie que nous venons de donner à propos des phénomènes qui caractérisent la dégé- nérescence des nerfs. Néanmoins, il nous semble qu'étant donnée la stricte analogie qui existe entre les modifications biologiques qui caractérisent la dégénérescence et la digestion des substances grasses albuminoïdes, on peut admettre que, dans les deux cas, la Nature emploie le même processus de fermentation. Ayant établi ici la nature enzymatique de la désorganisalion de la myéline et de l’axolyse, il s’agit de se demander quel est le lieu d’élaboration des ferments qui réalisent ces phénomènes. Il est admis, aujourd'hui, que des ferments analogues aux diaslases digestives sont répandus à profusion dans la plupart de nos organes. Le tissu nerveux doit en contenir également. On pourrait se de- mander si toutefois ces ferments, dans ces circons- tances, ne sont pas fabriqués par les noyaux de la gaine de Schwann qui, entrant en activité et pro- liférant d'une facon considérable dans les bouts périphériques des nerfs sectionnés, sécréteraient cette substance. C'est là une hypothèse qui à besoin d’être vérifiée. En tout cas, la section d'un nerf périphérique aurait pour conséquence ou bien de faire apparailre les ferments, ou bien de les faire sortir de leur inactivité en les transfor- mant de proferments en ferments. I] Dans les premiers jours qui suivent la section d'un nerf,on constate, dans l'extrémité terminale du bout central, des modifications morphologiques in- tenses, relevant d'une nutrition très aclive. C’est ainsi qu'on y voit des fibres hypertrophiées à différents degrés avec des neurofibrilles très évi- dentes, parfois dissociées el laissant même entre- voir, par suite de l'augmentation de la substance interfibrillaire, le réseau qui existe à l'élat nor- mal (fig. 3). Conjointement à cette hypertrophie des cylindraxes, il existe une néoformation des axones jeunes, qui se détachent des fibres hypertro- phiées, enlacent ces dernières ou bien s'enroulent en spirale autour d'elles. Ailleurs, ces fibres fines constituent des plexus inextricables, ou plutôt un feutrage, soit autour des fibres hypertrophiées, soit autour des fibres dégénérées. Dans ce dernier cas, elles peuvent également former une véri- 150 D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE table couronné autour des boules de graisse pro- venant de la fragmentation de la myéline. On a parfois l'impression que les cylindraxes hyper- trophiés traversent un cylindre creux dont les parois sont formées par les axones jeunes enroulés autour de l'axe de la vieille fibre nerveuse. Sur le trajet des fibres fines nouvellement formées, ou bien à leur extrémité, on voit souvent des espèces d’anneaux de dimension variable. Lesaxones jeunes peuvent finir aussi par un bouton ou bien par un petit cône de structure réticulée (fig. 3, C, ml). Les fibres dégénérées du bout central ont le cy- lindraxe frag- menté ou bien réduit en gra- nulations plus ou moins COmM- pactes.Lorsque le processuf de dégénérescen- ceestplusavan- cé, les granula- lions sont en voie de résorp- tion et il y a des lacunes. Certains cylin- draxes offrent à leur intérieur des espèces de vacuoles. Au- dessus de l’ex- trémité termi- nale du bout central, on trouve des cy- lindraxes n’of- bordant l'extrémité du bout central, et, ensuites les vaisseaux de nouvelle formation. Enfin, entr& certaines fibres hypertrophiées, on voit aussi des trainées de cellules fusiformes réunies ou non em faisceaux. Les modifications que nous venons de décrire sont celles qu'on observe habituellement dans lé bout central trois jours après la section d'un nerf périphérique. Il faut savoir cependant que leur aspect est variable suivant l’âge de l'animal et l'in: tensité du traumatisme. À ce moment, il n'y a pas encore réunion entre les deux bouts du nerf seclionné. Les jours suivants les phénomè nes de régéné rescence sac centuent dans le bout central et nous assis tons aux diffé rentes phases de la pénétra lion des axones jeunes dans le cicatrice et, de là, dans le bout périphérique. Chez les petits animaux, de mème que chez les animaux jeunes, la régé nérescence se fait plus rapi dement et læ cicatrice inter- médiaire s'éta frant pas de Fig. 3. — Section du sciatique du chien de cinq jours et demi. Détails de régé- = s nérescence dans le bout central. modifications A. Cylindraxe d'aspect à peu près normal à sa partie supérieure, tandis qu'à structurales ; sa partie inférieure il est considérablement tuméfié; là les neurofibrilles sont Ana dent très apparentes et comme enchevétrées. En réalité, il s’agit d'une structure certains da entre réliculée mise en évidence par l'augmentation de la substance inter et péri- eux,cependant, fibrillaire. ; ARE. PES. : A ë : B. Cylindraxe en état de division longitudinale par dissociation en cordons présentent des de neurofibrilles (e). Certains de ces cordons sont indivis, tandis que d'autres excroissances se divisent (cd). To ; trophiques ca, cal, ca. latérales plus ou moins gran- des et de volu- me différent. Parfois, ces ex- croissances sont filiformes oubien ressem- blent à des épi- nes. Je dois ajouter qu'il y a encore d’autres phé- nomènes qui témoignent du processus de régéné- rescence; c'est, d’une part, un exsudat cellulaire, C. Cylindraxe tuméfié, aux neurofibrilles dissociées (nfd) à la partie supé- rieure et réunies en cordons divergents vers le liers moyen (cd). Certains d'entre eux finissent par une massue terminale mt, ml. D. Cylindraxe tuméfié d’une facon encore plus considérable et constitué en haut par des neurofibrilles très apparentes et enchevêtrées (nf): puis, dans le reste, les neurofibrilles se réunissent en cordons (ce) qui courent autour des débris d'un cylindraxe dégénéré. Les morceaux de ce dernier siègent en appa- rence entre les faisceaux de neurofibrilles qui s’anastomosent ou bien donnent des ramifications latérales finissant par un bouton (b). E. Cylindraxe ancien enroulé par quelques fibres de nouvelle formation présentant des anneaux ou des massues terminales (a et mt); ca, ca!, cellules apotrophiques. sion terminale ou par arborisations. Bien entend ces trois processus de multiplication de fibres, c'est à-dire par division longitudinale, par multiplication blit plus vite. sion collatéra le, on peut cons slater encore, à l'extrémité du bout central eb dans la cicatris ce, la multipli= cation des fi= bres par divi= u, D: G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE 151 collatérale ou terminale, ne s’excluent pas l’un l'autre; ils peuvent, au contraire, coexister. La figure 4 donne un bel exemple de ce genre. C'est ainsi qu'on y voit un cylindraxe avec des neuro- fibrilles très apparentes, donnant des branches col- latérales qui se divisent à leur tour et finissent librement ou bien par une massue. Puis il finit par deux branches terminales, lesquelles donnent également des ramifications collatérales terminées ou non par une massue. Au voisinage de la plupart de ces branches de division, on voit des cellules Fig. 4. — Fibres hypertrophices à fibrilles très manifestes présentant une riche division collatérale et lerminale, — Certaines ramilicalions collatérales el terminales finissent par une massue petite ou volumineuse. Certaines ramifi- calions sont libres. TC, tronc commun; be, branche colla- térale; bdd, branche de division; t/, terminaison libre: mt, ml!, ml, massues terminales; bt, bl', boutons termi- naux; ca, cal, ca, cellules apotrophiques. aptrophiques fusiformes dont la direction générale est celle des axones. La cicatrice ne se forme qu’au bout de six à sept jours; elle réunit alors les deux bouts du nerf séparés par la section, et elle constitue une espèce de pont permettant le passage des axones jeunes du bout central dans le bout périphérique. Mais, à mesure que les fibres de nouvelle formation pénè- trent et traversent la cicatrice, elles diminuent de nombre; leurs ramifications sont aussi moins nom- breuses et subissent une espèce de désorienlation, Les fibres de nouvelle formation divergent, s'entre- croisent et constituent une espèce de feutrage. Un certain nombre de ces fibres se redressent et des- cendent verticalement dans le bout périphérique, où nous les trouvons côte à côte, soit unies en fais- ceaux plus ou moins denses, soit isolées. Les axones jeunes qui ont pénétré dans la cica- trice se divisent la plupart du temps par dicho- tomie; les branches de division divergent et, après un court trajet, pénètrent dansle bout périphérique. Dans la cicatrice, on trouve parfois des fibres ter- minées par un cône de croissance. À mesure que les fibres jeunes pénètrent dans le bout périphé- rique, leur nombre diminue de plus en plus. Au- tant les ramifications des fibres nerveuses sont fré- quentes à l'extrémité du bout centraletmême dans la cicatrice, autant elles sont rares à l'extrémité du bout périphérique; cependant, on en trouve en dichotomie dans ce bout. Certaines fibres de nou- velle formation finissent par une massue terminale dont le volume dépend du calibre de la fibre. La direction des axones jeunes à l'extrémité du bout central et dans la cicatrice varie avec les dif- férentes conditions de la solution de continuité. Chez l'animal jeune, qui a subi la section simple du nerf et où la réunion des deux bouts s'est faite sans accident, les fibres divergent dans la cica- trice, suivent une direction plus ou moins oblique et, après avoir émis quelques ramifications, pénè- trent dans le bout périphérique. Il n’en est pas de même dans les cas de rupture, de résection, de transplantation, où les axones jeunes affectent les directions les plus variées : ils se dirigent assez souvent dans le sens transversal, se multiplient à l'infini, et c'est seulement lorsque l'attraction exercée par le bout périphérique devient plus in- tense qu'ils changent de direction et s’en vont vers le bout périphérique. L'existence à peu près exclusive des arborisations libres au niveau de la cicatrice el l'absence de mas- sues ou de cônes de croissance dans les dernières branches de ces ramificalions ont conduit Cajal à supposer que les massues terminales représentent le cône d'avancement d’un axone, tandis que les arborisations finales correspondraient à une phase amiboïde et d’accroissement très actif assurant la neurolisation du bout périphérique. Il est probable que ces deux stades alternent dans les fibres de la cicatrice lorsque la progression doit s'effectuer à travers un chemin accidenté et rempli d'obstacles. Après le stade des ramificalions actives ou de den- dro-amiboïsme survient la phase des massues ter- minales qui traversent les chemins rendus libres. Enfin, un nouvel obstacle peut être l'attraction chimiotactique dans différentes directions qui fait 152 D’ G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE disparaitre les massues pour donner naissance à la phase d’amiboïsme. Tout en tenant compte de ces judicieuses observations de Cajal, je dois faire remarquer qu'à mon avis les massues terminales (fig. 5) ne représentent autre chose qu'une espèce de retard en route dû à la diminution des forces attractives exercée par les cellules apotrophiques. Au contraire, la phase de dendro-amiboïsme, qui représente en somme un procédé rapide de régé- nérescence, correspond précisément à une attrac- tion puissante de ces cellules. Les massues termi- nales, de même que les appareils en spirale, sont D mr amine m7 ps Sp mn LES nome om re Fig. 5. — Quelques spécimens de massues et de boules ter- minales provenant du bout central des nerfs sectionnés. — A, B, C, D, F, Cônes de croissance ressemblant plus ou moins à des spermatozoïdes; E, Massue terminale cons- tituée par deux régions : l’une centrale foncée; l’autre claire périphérique ; G, Cône de croissance en fer de lance; H, Massue terminale géante provenant du bout central d'un cas de section triple du sciatique, l'animal ayant vécu quarante-cinq jours ; 1, Massue terminale géante à structure nettement réticulée provenant du bout central dans un cas de section triple du sciatique, la troisième section datant de huit jours. deux formations qui impliquent un ralentissement dans le processus de régénérescence; on les ren- contre toutes les fois que la force attractive du bout périphérique a diminué. À mesure que le processus de régénérescence avance, les fibres de nouvelle formation se réunis- sent et constituent des faisceaux de plus en plus compacts, séparés par des colonies de cellules apo- trophiques dépourvues d’axones, mais qui, à leu tour, attireront ces derniers. Les fibres qui consti tuent ces faisceaux ne sont pas de volume égal elles sont grosses et fines et ces dernières habituel lement représentent des divisions collatérales de fibres épaisses; il est assez fréquent d'observer sur le trajet des axones jeunes, des anneaux 6 bien des épanouissements. En tout cas, quoique le divisions collatérales et les ramifications termi nales, de même que les boutons de trajet, soien encore assez fréquents au bout de la troisième se bOTIES RIT TES cr F7 4 « dans nd e Ge A A PTE (Er et pa PTT ie TN GATE M A AE nr QE Le Fig. 6. — Bout périphérique du sciatique sectionné depuis vingt-six jours. Petit chien. — Les fibres fines de nouvelle formation réunies le plus souvent en petits faisceaux, cir= culent dans les interstices des cellules apotrophiques, réduites à peu près à leur noyau, ou traversent le proto= plasma dans ces dernières. Ces fibres de nouvelle forma- tion, dépourvues de myéline, offrent une certaine analogie avec les fibres de Remack. maine, il y a cependant une diminution dans l’in- tensité de ce processus. Au commencement de la quatrième semaine, chez le chien âgé de quelques jours, la neurotisation du bout périphérique est presque complète (fig. 6). En effet, on constate qu à cette époque il n'y a plus trace de dégénérescence, el le bout périphérique est constitué essenlielle- ment par des fibres noires bien imprégnées, de calibre inégal, les unes plus fines que les autres, réunies en petits faisceaux séparés par des noyaux di D: G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE 153 très longs, fusiformes, riches en granulations de chromatine et possédant un ou plusieurs granules nucléolaires. Le rapport des axones jeunes avec ces noyaux est variable : tantôt ils traversent leur protoplasma et, dans ce cas, ils passent devant le noyau ou bien le contournent ; d’autres fois, ils cir- culent entre leurs interstices ; dans ce dernier cas, la fibre est flanquée sur son trajet de plusieurs noyaux et ressemble alors aux fibres de Remack. Mais l’axone ne présente pas le même rapport sur son trajet avec ceux-ci et leur protoplasma ; ils sont situés tantôt dans ce dernier, tantôt dans les in- terstices des cellules. - Nous avons vu plus haut que les cellules dérivées de la gaîne de Schwann jouent un grand rôle dans Je processus de régénérescence. Les auteurs clas- siques, tout en reconnaissant la multiplication no- table des noyaux des cellules de Schwann dans le bout périphérique des nerfs sectionnés, ne sem- blent pas leur avoir attribué un rôle essentiel dans le processus de régénérescence. Par contre, les partisans de l'autorégénérescence : Von Büngner, Howell et Huber, Wieting, Bethe, Durante, ete., ont prétendu que les fibres nerveuses apparais- sent par différenciation protoplasmique à l'inté- rieur du neuroblaste, c’est-à-dire des cellules dérivant des noyaux de la gaine de Schwann. Grâce aux recherches entreprises avec la méthode de Cajal, il nous est facile de préciser la part qui revient à ces noyaux dans les phénomènes de ré- générescence. Dans le bout central comme dans le bout périphérique, il apparaît des cellules fusi- formes, peu nombreuses au commencement, et plus tard disposées en faisceaux ou en colonies denses. Dans le bout périphérique, elles deviennent de plus en plus apparentes et nombreuses à mesure que le processus de dégénérescence attemt son maximum. Elles s'y disposent longiludinalement entre les fibres dégénérées et se substituent com- plètement à ces dernières, qu'elles remplacent à mesure que les débris de la dégénérescence de la myéline sont enlevés. De sorte qu'après une se- maine, chez l'animal jeune, le bout périphérique est essentiellement constitué par une masse de cellules fusiformes disposées en faisceaux très denses ; il est également encapuchonné de colonies de ces cellules, mais leurs faisceaux sont déso- rientés et suivent différentes directions. Ces cel- lules fusiformes juxtaposées possèdent un noyau ovalaire où oblong, très gros, riche en granula- tions de chromaline disposées sur les travées du réseau. Aussi bien dans le bout périphérique que dans le bout central, les axones de nouvelle forma- tion contractent des rapports intimes avec ces cellules. En effet, les axones se forment par poussées el divisions successives des vieilles fibres ou bien par expansion des ramifications collatérales. Mais ces axones jeunes, délicats, sans résistance, ne sauraient arriver à leur destination s'ils n'étaient pas attirés, dirigés et nourris par les cellules apotrophiques, Aussi, nous trouvons les fibres jeunes à l'intérieur ou dans les interstices des cellules apotrophiques. suivant de près la direction de ces dernières. Lorsque ces cellules se sont formées, elles ont une évolution toute spéciale, en vertu de laquelle elles retournent à leur état antérieur de noyaux de Schwann, entourés d’une légère couche de proto- plasma. Aussi, cette évolution est en rapport intime avec le développement des fibres nerveuses ; leur protoplasma abondant, leur noyau volumi- neux diminuent à mesure que les fibres fines se développent (fig. 6). Leurs corps cellulaires s’efti- lent, leur noyau devient oblong et petit, la chro- matine se réduit dans les fibres de nouvelle forma- lion sans myéline; ces dernières sont flanquées de noyaux effilés, très oblongs, de distance en dis- tance. Par contre, les cellules qui n'ont pas exercé leurs affinités électives par rapport aux axones jeunes possèdent un noyau entouré d'un proto- plasma volumineux. Sans doute, un certain nombre de ces cellules, n'ayant pas pu saturer leurs affi- nités, finiront par s'atrophier et disparaître. Ce sont non seulement les axones qui ont des rapports intimes avec les cellules apotrophiques, mais éga- lement les boules et les massues terminales. Les massues terminales affectent des rapports intéressants avec les cellules apotrophiques. En effet, ces massues sont coiffées de noyaux qui leur forment parfois une espèce d’enveloppe, ou bien ils siègent seulement sur un côté de la massue, qui peut alors présenter une dépression à ce ni- veau. D'autres fois, les noyaux sont situés au collet de la massue. Habituellement, on ne voit pas de protoplasma autour de ces noyaux; aussi doit-on se demander s’il n'y a pas de simples rapports de continuité entre eux et la massue terminale. Mais, si l'on examine un grand nombre de pièces prove- nant de sections à des intervalles de temps diffé- rents, on peut constater que la massue terminale contracte avec le protoplasma des cellules apotro- phiques des rapports plus inlimes qu'une simple continuité. En effet, ilest facile de voir, sur des pré- parations appropriées, que cette formation termi- nale se trouve à l'intérieur des cellules apotro- phiques, qu'elle consomme leur protoplasma pour sa nutrition et qu'à mesure que la substance argen- lophile de la massue se développe, le cytoplasma de la cellule diminue de plus en plus, vu qu'ik ne reste plus que le noyau. Mème plus, la sub- stance argentophile de la massue, développée d'une façon considérable, comprime le noyau, qui 154 D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE apparaît souvent sous la forme d’un croissant. Enfin, il existe des massues où ce noyau fait même défaut. Quelle est la signification des boules terminales si nombreuses dans le bout central des nerfs sec- tionnés ? Il est évident qu'il ne s'agit pas de cellules ner- veuses, ainsi que Neumann l'avait admis aulrefois. Dans un travail antérieur, que nous avons fait en commun avec M. Minea, nous avions rapproché les massues terminales des nerfs en régénescence de celles qu'avait décrites Cajal à l’extrémité des appendices de certaines cellules des ganglions spi- naux. Mais, assurément, je ne saurais plus admettre qu'elles représentent des terminaisons sensitives, parce que je les ai trouvées dans le bout central des nerfs moteurs, tel le nerf hypoglosse. Aussi, je me suis rattaché à l'opinion de Cajal, qui considère ces formations comme équivalentes aux cônes de croissance décrits par lui, pour la première fois, à l’extrémilé des fibres nerveuses en voie de déve- loppement. Perroncito n’est pas disposé à admettre qu'il s'agit là d'organes terminaux, sous prétexte qu'il a vu souvent leur extrémité se continuer avec des fibres plus fines: d'autre part, il doute qu'il puisse ètre aussi question de phénomènes de régénérescence, puisqu'il rencontre, dit-il, des for- mations semblables sur le trajet de fibres en voie de dégénérescence. Je me demande si l’on ne doit pas identifier les massues terminales des fibres du bout central, lesquelles assurément ne diffèrent pas autrement des cônes de croissance de Cajal que par leur volume, avec certaines tuméfaclions qu'on constate, en effet, sur le trajet de certaines fibres en voie de dégénérescence à l'extrémité su- périeure du boul périphérique. En effet, on voit bien qu’elles se sont déve- loppées aux dépens du protoplasma des cellules apotrophiques, tout au moins en ce qui concerne la partie incolore périphérique, qui ne paraît être autre chose que le protoplasma transformé des cel- lules apotrophiques. Parfois même, on distingue le noyau de ces cellules, lequel apparait comme comprimé ou réduit de volume. Cette formation est l'aboutissant d'un pédoncule représenté au com- mencement par un jeune axone, qui S'amincit quelque peu à mesure qu'il s'éloigne de la forma- tion terminale. En général, ces massues ressem- blent assez bien à celles qu'on rencontre dans le bout central. La difficulté pour expliquer leur si- gnificalion réside dans ceci : c'est que, tout d’abord, on n'en lrouve pas dans la cicatrice, et ensuite qu'elles sont dirigées, non pas du centre vers la périphérie, mais de la périphérie vers le centre. D'autre part, le point de départ des axones jeunes, tout au moins pour certains d’entre eux, paraît être dans le réseau de substance argentophile dé ces formations. Ainsi donc, pour le moment, genèse de ces néoformations n'est pas facile trouver; cependant, ce n’est pas là une raisons pour admettre la théorie de la régénérescencé autogène, que j'ai adoptée un instant et que j'a ensuite abandonnée à la suile de nombreuses recherches confirmalives des expériences de Cajals LI + } Fig. 7. — Appareil spiral coupé en travers à la partie supë rieure et longitudinalement dans le reste. — Fa, Fa!, fibres axiales longitudinales: fa, fa!, fibres axiales coupées transversalement: f.s, f.s!, fibres spirales; ca, ca!, cellules apotrophiques: #1, ml', massues terminales. Cet appareil spiral volumineux provient du bout central du sciatique d'un chien auquel on a transplanté un mo ceau de sciatique d'un autre animal gardé douze heures dans du sérum oxygéné. L'animal a été sacrifié dix-huit jours après. Rien n’est plus variable que la forme, le volumè même la des massues terminales (fig. 5). Nous avons montré, dans nos pubiications antérieures, qu'elles sont constituées assez souvent par un réseau et par une subslance fondamentale et structure D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE 155 ämorphe, qui ne représentent pas autre chose que la substance interfibrillaire. En dehors de cet aspect réticulé, elles donnent parfois l'impression d'une pelote enroulée, ou bien d'une arborisalion terminale. 11 nous serait difficile parfois d'affirmer si l'hypertrophie des massues terminales dépend Fig. 8. — Appareil spiral très long, décrivant des sinuosilés dans son trajet el, arrivé à l'extrémité du bout central, se retournant pour se diriger vers le haut de ce bout. — Les fibres spirales présentent des tours très denses; aussi l'appareil dans son ensemble est très foncé. Certaines fibres spirales ont des ramifications sortant de l'appareil et finissant tantôt par une petite massue, tantôt par une grosse. fa, fibres axiales: mt, ml', ml", etc., massues ter- minales. Cette figure provient du bout central d’un nerf sciatique, dans un cas de transplantation de ce nerf. Sérum oxygéné, douze heures dix-huit jours. d'un obstacle rencontré par le cône de croissance dans sa progression, ou bien s'il s’agit là d’un Simple trouble de nutrition. Le fait est que nous avons rencontré parfois des massues volumineuses là où l’on ne voyait pas d'obstacle apparent. C'est ainsi, par exemple, que, dans un cas de section simple du tronc vago-sympathique chez le chien sacrifié vingt et un jours après l'opération, il y avait un bon nombre de massues terminales, aussi bien dans le bout périphérique que dans le bout central. Une autre formation très fréquente dans le bout central après les sections nerveuses, et qui mérite toute notre altention, ce sont les appareils en spi- rale (fig. 7 et 8). Ils sont plus nombreux et d’une organisation plus complexe chez l'animal adulte, tandis que, chez l'animal jeune, ils peuvent faire complètement défaut. Leur nombre, leur volume et même leur constitution histologique paraissent être en rapport avec la vitesse de la neurotisation du bout périphérique. En général, ils sont peu nombreux et d’une constitution histologique très sommaire lorsque les fibres de nouvelle formation du bout central traversent rapidement la cicatrice pour se rendre dans le bout périphérique. Mais, dans des cas de résection du nerf, de section de la moelle, ou bien lorsque à la place du nerf réséqué on interpose un fragment de nerf d’un autre ani- mal, on assiste à la production d’un grand nombre de ces formations. Leur constitution histologique est la suivante : Le centre de l'appareil est formé par une ou plusieurs fibres à myéline, plus ou moins épaisses, à trajet longitudinal ou s’entre-croi- sant parfois. Ce sont les fibres axiales, autour des- quelles s'enroulent en spirale ou en 8 des fibres plus fines (fig. 7 et 8). Parfois, le trajet de ces der- nières est tellement compliqué qu'il est impossible de les suivre. D'autres fois, ces appareils sont courts et ressemblent à des pelotons emméêlés ou bien très longs, et décrivent un trajet sinueux. Évi- demment, les fibres en spirale sont des fibres de nouvelle formation, et je pense, avec Lugaro, que quelques-unes d’entre elles représentent des divi- sions collatérales. Après un cireuit plus ou moins long, elles finissent par une petite massue termi- nale, située à peu de distance de l'appareil spiral, ainsi qu'on le voit bien sur la figure. Cajal a observé que, dans quelques cas, la fibre spirale provient d'une fibre issue au niveau d'un étranglement de Ranvier, appartenant à la fibre axiale; mais, étant donnée la richesse extraordi- naire des fibres el la facon inextricable dont elles se mêlent, il lui est impossible de dire si toutes proviennent de la fibre principale. Il admet que la plupart sont la continuation des fibres de Remack. La genèse du peloton se trouverait dans une cause mécanique. En effet, le peloton correspond à un faisceau de fibres du bout central entouré d'une membrane nucléée, qui se continue avec la gaine 156 D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE de Henle des faisceaux correspondants; ainsi cette membrane constitue un obstacle surtout pour les fibres fines. Ces dernières, au lieu de s’accroître vers la cicatrice, décrivent de nombreux tours autour de cylindres plus gros. Les fibres fines finissent par de pelites massues perdues dans l'épaisseur du vortex fibrillaire. Les axones plus épais parviennent à vaincre l'obstacle de la gaine de Henle et, sortis de cette gaine, se frayent un chemin parmi les autres fibres. Perroncito, après avoir noté la présence de ces formations hélicoïdales, se demande si les fibres spirales proviennent ou non des ramifications des fibres qu'elles enveloppent. Il ne peut pas répondre à cette question; toutefois, il incline vers l’affirma- live. Lugaro, qui a consacré à celle question un tra- vail inléressant, admet avéc Cajal que le facteur mécanique joue un grand rôle dans la production du peloton; mais il croit aussi qu'il intervient encore un autre facteur, qui serait la désorienta- tion chimiotaxique. Cette désorientation est due à la cicatrice, qui rend irrégulier le courant de la substance neurotropique. Mais y a-t-il un rapport entre la formation des appareils en spirale et les cellules apotrophiques? Je pense qu'il n’y a aucun doute à ce sujet. Tout d’abord, j'ai pu constater la présence des cellules apotrophiques à l'intérieur d'un grand nombre de ces formations. Il est vrai qu'il existe également des fibres de ce genre ne présentant pas sur leur trajet de semblables cel- lules. Je ne pense pas que cette constatation soit de nature à infirmer mon opinion. En effet, avec Cajal, Lugaro et moi-même nous avons admis que les chaines cellulaires attirent, par voie chimiolaxique, les axones de nouvelle formation. Or, les appareils en spirale sont consti- tués tout d’abord par de vieilles fibres offrant habituellement une direction longitudinale, et par des ramifications collatérales décrivant des spirales et s'enroulant autour de ces dernières. Aussi, il me semble que la disposition des fibres spirales est réglée par l'attraction des cellules fusiformes. J'ai pu constater neltement la relation étroite qui existe entre les fibres qui forment la spirale et les cellules satellites. Mais, dans les cas où elles ne sont pas visibles, il est probable qu’elles exercent leur action à une cerlaine distance. Il n’y a que les fibres fines qui réellement ne sont pas accompagnées de cellules satellites. Les expériences de résection, de rupture et d’ar- rachement des nerfs démontrent, avec la dernière évidence, que la régénérescence du bout périphé- rique se fait par l'intermédiaire des fibres de nou- velle formation, parties du bout central et se diri- | geant, gräce aux cellules apotrophiques, vers l& bout périphérique. Prenons quelques exemples dé ce genre. | La résection du sciatique a été faite chez un lapin d'un mois. On a tout d'abord sectionné le nerf derrière le trochanter et l’on en a enlevé un& portion de 1 centimètre. Ensuite, on a pratiqué une seconde section au niveau de la partie inférieure dé la cuisse, où l'on enlève également 1 centimètre dé nerf. L'animal a été sacrifié quarante-trois jours après l'opération. A l'autopsie, on a trouvé l'extré mité du bout central renflée, constituant un né vrôme prolongé par un petit tronc nerveux. n'ar= rivant pas cependant jusqu'à l'extrémité supérieure du bout périphérique; de sorte que la solution dé continuité était comblée par une espèce de Lissw musculo-graisseux. Au niveau de la deuxième se tion, l'intervalle séparant les deux bouts était de 1 centimètre et occupé par le tissu musculaire. Le bout central au-dessus du névrome présenté de nombreuses massues terminales disséminées irrégulièrement entre les fibres rerveuses. Puis on constate quelques appareils en spirale, dont quelques-uns très longs. Au niveau du névromeé, les fibres nerveuses se réunissent en faisceaux lesquels, à cause de leur direction irrégulière, s'en- chevêtrent. Au-dessus du névrome et dans le tron€ du prolongement que nous avons indiqué plus haut, les faisceaux nerveux changent de direction et s'en vont dans le sens de l'axe du nerf. Déjà, à cet endroit, on voit entre les faisceaux des masses musculaires, et il est facile de se convaincre qu les deux bouts du nerf sont séparés par un tissu de muscles. A mesure qu'on se rapproche de l'ex- trémité supérieure du bout périphérique, on voit entre les fibres musculaires des colonies de cel lules fusiformes qui s'infiltrent entre les espace libres de ces fibres. A l’extrémilé du bout périphé- rique, les colonies de cellules sont très denses @ ne suivent pas une direction régulière; elles tour billonnent. Certaines de ces colonies contiennent des faisceaux : de fibres nerveuses de différent calibres; elles sont tanlôt très fines, tantôt assez épaisses ; quelques-unes d’entre elles contiennen des renflements moniliformes. Sur leur trajet, d'autres se bifurquent, et les branches de divi= sion vont dans des directions opposées. J'ai pu rencontrer parfois, à l'extrémité de quelques fibres contenues dans les gaines proltoplasmiques, un cône terminal. Au niveau de l'extrémité irférieure de ce bout périphérique, c'est-à-dire au-dessous de la seconde résection, on constate un grand nombre de colonies de bandes et de cellules fusiformes, chargées de débris de dégénérescence; mais on n'y trouve plus de fibres de nouvelle formation. Ni dans la cicatrice inlermédiaire, ni ee om D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE 157 dans le bout périphérique créé par la deuxième résection, on ne voit la moindre trace de fibres de nouvelle formation. Cette constatation démontre, à mon avis, que les obstacles qu'elles ont ren- contrés ont été infranchissables pour arriver à ce niveau. Une autre expérience, de nature à montrer égale- ment que les fibres de nouvelle formation, après les sections nerveuses, proviennent du bout central et que, par conséquent, elles n'apparaissent pas par différenciation du protoplasma des neuroblastes, c'est la résection d'un fragment du nerf sciatique, son ablation et la remise sur place immédiatement. L'extrémité du bout central, dans ce cas, est cons- liluée par des faisceaux denses de fibres nerveuses orientés de divers côtés, apparaissant sur ce bout, -obliques, transverses ou longitudinaux. Au niveau de la première section, les faisceaux sont conver- gents; ils s’entreméêlent au niveau de la cicatrice, puis descendent plus ou moins régulièrement en faisceaux encore plus compacts dans le fragment réséqué. Les faisceaux nerveux, tout en restant indépendants dans ce fragment, s'entre-croisent, et il en résulte leur rapprochement de la seconde sec- tion; arrivés là, ils se désorientent de nouveau, suivent des directions différentes, divergent et pénètrent dans le bout périphérique. À cet endroit, les fibres jeunes ne forment plus de faisceaux com- pacls épais, mais elles se présentent sous forme de faisceaux minces, constitués par un nombre res- treint de fibres de calibre différent, traversant des bandes protoplasmiques très longues contenant encore des boules de graisse résullant de la dégé- nérescence de la myéline; ce sont des fibres fines plus ou moins isolées, situées à l'intérieur de cel- lules trophiques. Les fibres de la boule de graisse divergent ou bien les embrassent. Il y à d’autres facteurs qui interviennent pour retarder la progression du processus de régéné- rescence : ce sont les transplantalions nerveuses. Si l'on résèque une quantité de nerf plus ou moins grande et qu'à la place de la portion enlevée on transplante une autre portion de nerf du même animal ou bien d'un animal de la même espèce ou d'espèce différente, on voit toujours un retard plus ou moins considérable dans la progression des axones jeunes. C’est surtout dans ces circonstances qu'on assiste à la formation de toute espèce d’ap- pareils en spirale très complexes et très longs, de massues, parfois géantes, d'excroissances colla- térales, etc. Le morceau transplanté exerce, par conséquent, une espèce d'action répulsive sur les fibres du bout central: mais celte chimiotaxie négative n'est pas si accusée lorsqu'il s'agit d’aulo- transplantation, et elle est beaucoup plus considé- rable dans les cas d'hétéro-transplantation. Cela dépend de l'absence ou du nombre très restreint de sources chimiotaxiques dans le nerf étranger. Le même phénomène se produit lorsque, sur le trajet du nerf réséqué, on place un morceau de nerf pris sur le cadavre, ou bien encore lorsqu'on a gardé un nerf vivant pendant quelques heures dans un sérum simple. Si, au contraire, le mor- ceau de nerf de la même espèce a élé conservé dans le sérum de Locke et mis ensuite à la place de la portion de nerf réséquée chez la même espèce, il s'y forme encore des cellules apotrophiques et, par conséquent, il y a, tardivement, il est vrai, pénétration de fibres du bout central dans le nerf transplanté. En résumé, l’altraction des axones jeunes dans le bout périphérique est en rapport avec la quantité de nerf réséqué et en rapport direct avec l’âge de l'animal, ainsi qu'avec le degré d'affinité qui existe, dans les cas de transplantation, entre les espèces animales. Bien entendu, cette proposition générale n'a qu'une valeur relative. Si la résection et la rupture d’un nerf relardent la régénérescence du bout périphérique, l'arrache- ment du bout central qui fournil les fibres de nouvelle formation devrait, par conséquent, sup- primer tous les phénomènes de régénérescence. En eflet, ainsi que nous l'avons démontré dans un travail antérieur fait en collaboration avec M. Bal- let, l'arrachement complet d'un nerf périphérique est suivi d'une atrophie définitive des cellules d'origine de ce nerf. Dans ces conditions, la régé- nérescence devrait être impossible. Or, dans plu- sieurs cas d'arrachement du nerf sciatique, j'ai trouvé dans son bout périphérique des fibres de nouvelle formation. Je citerai comme exemple l'une de ces expériences. Chez un lapin àgé de quelques mois, on a arra- ché le nerf sciatique avec les racines antérieures et les ganglions spinaux correspondants. L'animal a élé sacrifié deux cent soixante-douze jours après l'opération. La partie supérieure du bout périphé- rique, légèrement renflée, a été trouvée adhérente aux museles sous-jacents. Electriquement, le nerf n’était pas excilable. Dans les préparations traitées par la méthode de Cajal, on constate au microscope, à l'extrémité supérieure du bout périphérique, la présence de fibres musculaires entre lesquelles on voit, par-ci par-là, un tissu fasciculé qui, plus bas, devient plus abondant et offre des aspects différents. En effet, autour de ces fibres muscu- laires, le tissu fasciculé à noyaux oblongs est constitué par des faisceaux denses entre lesquels il existe en abondance des vaisseaux de nouvelle formation. Plus bas encore, le tissu fasciculé est encore plus dense, ondulé, et les faisceaux qui constituent le nerf se pénètrent réciproquement et perdent jusqu'à un cerlain point leur individualité. 158 D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE Sur tout le parcours de la section, on voit des fibres nerveuses d'aspect très différent. La plupart d'entre elles sont isolées ou réunies en petit nombre sous forme de faisceau. Les fibres épaisses sont des fibres à myéline et peuvent être accom- pagnées par une fibre plus fine. Que ce soient des fibres fines ou des fibres épaisses, les unes comme les autres peuvent être suivies sur un long trajet; cependant, on ne peut voir leur terminaison. Je n'ai rencontré ni des cônes de croissance, ni des massues terminales. On voit parfois des fibres bifurquées, mais elles sont rares. Au-dessous de la région précédente, on constale dans ce bout péri- phérique des faisceaux de fibres de nouvelle for- mation, disséminés et constitués par un nombre restreint de fibres. Les fibres qui les composent sont flexueuses et parfois enroulées. En dehors de ces faisceaux minces, on rencontre aussi des fais- ceaux beaucoup plus épais, constitués par un grand nombre de fibres nerveuses. Ces faisceaux ont parfois une direction transversale et donneraient l'impression qu'ils pénètrent du dehors à l’intérieur du nerf. Enfin, j'ai pu constater, en outre, un faisceau assez large, où l'on voit, à l'intérieur, des bandes protoplasmiques contenant des débris de la fibre dégénérée et des fibres très fines de nou- velle formation. L'explication de ces faits est difficile à donner. On pourrait supposer, avec Lugaro, que les fibres régénérées du sciatique proviennent du nerf crural et de l’obturateur restés intacts. Evidem- ment, cette explication serait plausible; mais j'ai pensé que les fibres saines d’un nerf intact ne pénètrent pas dans le bout d’un nerf arraché el dégénéré. On pourrait se demander s'il ne s'agirait pas là de fibres sympathiques dont les centres d'origine seraient à la périphérie. Quoi qu'il en soit, il faut reconnaitre que la présence de pareilles fibres dans le bout périphérique d'un nerf arraché est une question importante qui réclame de nou- velles recherches. Il résulte de toutes ces études que la régénéres- cence et la neurotisation du bout périphérique ont un caractère continu, c'est-à-dire que les fibres nouvelles se propagent du bout central sectionné vers la cicatrice intermédiaire et le bout périphé- rique pour arriver à leur destination. Elles ne se forment pas d'une façon discontinue, comme l'ont prétendu les partisans de la régénérescence auto- gène, aux dépens du protoplasma des cellules de Schwann devenues neuroblastes. Ces cellules, ou les cellules apotrophiques, ainsi que nous les avons désignées, ne créent pas de toutes pièces la fibre nouvelle ; mais cette dernière s'est formée dans le bout central par continuité ou division des fibres anciennes; elle a été atlirée ensuite, dirigée et même nourrie par ces cellules. La régénérescencæ autogène dans le sens de Bethe n'existe pas. La façon dont les axones jeunes s'infiltrent dan$ les interstices et évitent les obstacles différents @ le nombre de ramifications conslantes qu'ils don: nent prouveraient qu'ils jouissent d'une grande plasticité. Ils s'arrêtent lorsqu'ils rencontrent des obstacles et ils forment alors, suivant le cas, un épaississement, une massue, ou bien ils s’étiren sitôt l'obstacle dépassé. A leur tour, les cellules apotrophiques jouissent aussi de propriétés très spéciales, en vertu desquelles elles se déplacent € se multiplient avec une facilité étonnante. s'infil trent dans tous les interstices en se dirigeant dans le sens de la moindre résistance; elles entrafs nent avec elles sur ce chemin, très accidenté par: fois, les jeunes axones nés dans le bout central La question de l'auto-régénérescence me semble aujourd'hui complètement tranchée. Dans une pr mière série de recherches que j'avais pratiquées avec M. Minea, nous avons adopté la manière de voir de Bethe; mais d’autres recherches nouvelles nous onl permis de confirmer celles, très soignéess de Cajal. Du reste, d'autres auteurs, comme Per de ses expériences. Il y a cependant encore quel ques lacunes à ce point de vue. C’est ainsi, pan exemple, que, chez les animaux nouveau-nés, om peut observer une atrophie très marquée, voire même la disparition d’un grand nombre de cel. lules nerveuses après la résection et la rupture du nerf sciatique, et cependant 1l y a un très grand. nombre de fibres régénérées dans le bout périphé» rique. Dans un autre ordre d'idées, on constate la même contradiction apparente entre l'état des centres nerveux et la régénérescence. C'est ainsi que Raimums, après l’ablation de la portion infé= rieure de la moelle, aurait trouvé des fibres à myé= line dans le sciatique. Il est vrai que Lugaro a expliqué l'existence des ces fibres par la génération, dans le nerf sciatique dégénéré, de fibres du nerf crural et du nerf obtu rateur restées intactes. Mais, comme je l'ai affirmé autrefois, l'explication de Lugaro n'est pas exempte de toute critique, et il n’est pas du tout prouvé que les fibres saines d’un nerfintact peuvent pénétret dans un autre nerf sectionné et dégénéré. Plusieur expériences que j'ai faites confirment mon opinion: à cet égard. En effet, si l’on résèque un nerf et qu'on rapproche son bout périphérique du ner voisin, après avoir enlevé complètement le bout central, on ne constate jamais la pénétration des fibres du nerf intact dans le bout du nerf réséqués et dégénéré. LA Il est connu depuis bien longtemps que les deux 1 A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE 159 —————— bouts d'un nerf sectionné présentent une tentative très manifeste à se réunir, même lorsqu'ils ont été Séparés par une grande distance, soit par la résec- lion d’un morceau du bout central, soit en éloignant d’une facon mécanique les deux extrémités. Cependant, on n'avait pas encore trouvé une explication vraiment plausible jusqu'au moment | Où Forssmann a entrepris des expériences très | “ingénieuses pour expliquer ce phénomène. Voici en quoi elles consistent : Dans un petit tube de collo- dion, l'auteur introduit, d'un côté, le bout périphé- rique du nerf péroné et du nerf tibial, de l’autre côté le bout central seul, soit du nerf péroné, soil du nerf tibial. Deux mois plus tard, il trouve le bout central en connexion avec les deux bouts périphé- riques, et, dans ces deux derniers, approximative- ment le même nombre de fibres nouvelles. Il conclut de cette expérience que la pénétration des fibres nerveuses du bout central dans le bout périphérique n'est pas sous la dépendance d'une action mécanique, comme l'avaient admis autre- fois Ranvier et Vanlair, mais qu'il s'agit là d'un phénomène actif de chimiotropisme, ou bien de neurotropisme positif. » En effet, les fibres du bout central ne choisis- Sent pas leur voie dans le sens de la moindre résis- lance, maiselles se sentent attirées dans une direc- tion donnée et s’accroissent dans ce sens, pénétrant aussi bien dans le bout périphérique d'un autre nerf que dans leur bout périphérique propre. Mais de quoi dépend cette force d'attraction du bout périphérique dégénéré? A cette question répond une autre expérience du même auteur. Après avoir sectionné un nerf, il a appliqué à l'extrémité du bout supérieur deux petits tubes de collodion, dont l’un contenait du foie trituré et l’autre du cerveau. Dans ces conditions, il a observé que les fibres poussaient du bout central se dirigeant toujours du côté du tube rempli d'émul- sion de cerveau. La conclusion de Forssmann, c’est que la force neurotropique est représentée par la myéline dégénérée des fibres du bout périphé- rique. Cette force est telle qu'elle oblige les fibres du bout central, non pas à prendre la direction de la moindre résistance, mais à se replier sur elles- mêmes, à rebrousser chemin et à prendre une direction ascendante pour se rendre à l'endroit où elles sont attirées. L'explication proposée par Forssmann n'est pas de nature à satisfaire l'esprit. Aussi, différents auteurs ont-ils interprété différemment ses expé- riences. Ainsi, Bethe ne nie nullement que le chi- miotropisme ne joue aucun rôle dans la réunion des deux bouts, mais il ajoute qu'il n’est pas sous la dépendance des fibres nerveuses et qu'il s'exerce par le tissu conjonctif périneural. Celui-ci s'accroit et rejoint le bout périphérique, tandis que les fibres nerveuses n'y pénètrent qu'après lui. Dans un second article, nous exposerons les résultats que nous a donnés l'étude des transplan- tations nerveuses, et les conséquenses qui s'en déduisent quant au mécanisme intime de la dégéné- rescence et de la régénération nerveuses. D' G. Marinesco, Professeur à la Faculté de Médecine de Bucarest. REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE Les nombreux travaux de Chimie minérale parus dans l’année montrent l’activité qui règne dans les laboratoires. Quelques-uns présentent un grand intérêt à cause de leur nouveauté. D'autres semblent moins utiles au premier abord ; ils ont trait à des questions déjà anciennes, que l'on est habitué à con- sidérer comme définitivement résolues. Ils appor- tent à la Science des faits nouveaux et viennent quelquefois substituer, à des résultats depuis long- temps admis, des conclusions complètement diffé- rentes. Ces travaux méritent donc d'être retenus. La Revue doit signaler aussi les progrès accom- plis en décrivant les résultats pratiques obtenus par l'application de certaines méthodes de labora- loire. On sait combien d'efforts se sont accumulés pour rendre industrielle l'expérience faite en 1780 par Cavendish et Priestley, expérience qui consiste à oxyder l'azote de l'air au moyen de l'électricité. Les récents travaux de Birkeland et Eyde ont résolu d'une manière pralique cette oxydation. La fixation de l'azote atmosphérique sous forme d’azotate est désormais une opération industrielle. Non seule- ment l'azote a pu être transformé en azotate; mais, par suite d’une combinaison intermédiaire sur laquelle nous reviendrons plus loin, l'azote de l'air peut être obtenu sous forme ammoniacale. Ce sont là des résultats précieux au point de vue écono- mique; ils vont révolutionner une partie de l'In- dustrie chimique. Les travaux qu'il nous semble utile de retenir dans cette revue peuvent se classer en trois groupes: ceux qui résultent de l'application des hautes tem- pératures ; les travaux sur les métalloïdes; les travaux sur les métaux et les sels métalliques. 160 A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE I. — IlAUTES TEMPÉRATURES. Dans la revue de 1904, nous avons montré le rôle important qu'avaient joué en Chimie minérale les hautes températures produites par le four élec- trique. Cette année, ce rôle n'a pas été moins brillant. Mais, à côlé des températures de l’are électrique, qui complètent des réaclions que les procédés ordinaires de chauffage ne pouvaient amener jusqu'au bout, il faut signaler pour mémoire celles que produisent les réactions chi- | niques telles que l'oxydation de certains métaux : aluminium, magnésium. M. Zenghelis aurait réalisé par voie purement chimique des températures très élevées, analogues, dit-il, à celles du four élec- trique (?), en faisant brûler de la poudre d'alu- minium dans un courant d'oxygène au sein d’un creuset de Hesse préalablement porté au rouge dans un four à coke. La température ainsi obtenue suffit pour fondre et même volatiliser partiellement le platine et des oxydes très réfractaires : la magnésie, la chaux et l’alumine. Par voie alumino- thermique, il a été possible de réduire un mélange d'anhydride tungstique et de bioxyde de manganèse à l’état métallique et de préparer ainsi les alliages de lungstène et de manganèse à l'état pur. M. Vi- gouroux a préparé celte année des ferromolybdènes en réduisant les oxydes de fer et de molybdène par l'aluminium. Il à ainsi isolé quatre alliages parfai- tement définis : Fe*Mo, Fe‘Mo*, FeMo et FeMo°. Par le même procédé, il a réduit le mélange d'anhydride tungstique et d'oxyde de fer, et est arrivé à un alliage de composition identique à celle de l’un des ferromolybdènes; c'est le ferretungstène Fe°Tu, Dans des recherches datant de plus de douze ans, M. Moissan a établi que plusieurs métaux pouvaient être volatilisés dans le four électrique. Cette année, l'illustre savant a repris ces expériences dans le but de classer les points d'ébullition d'un certain nombre de métaux. Le cuivre peut être aisément distillé au four électrique. En 8 minutes et avec un courant de 300 ampères sous 110 volts, on dis- tille 230 grammes de métal. L'or distille aussi très rapidement, mais son point d'ébullition est supé- rieur à celui du cuivre; dans la distillation des allages d’or et de cuivre, celui-ci se volatilise toujours le premier. Le point d’ébullition augmente dans la famille du platine; il faut des courants variant de 500 à 100 ampères sous 110 volts pour transformer en vapeur le platine, l'osmium, le ruthénium, le rho- dium, etc. Tandis qu'on peut distiller en 5 minutes, avec un courant de 500 ampères sous 110 volts, 150 grammes d'or, on ne peut volatiliser dans les mêmes condilions que 12 grammes de platine. Les métaux communs ont aussi des points d’ébullition très différents. C’est le manganèse qui est Le plus volatil de tous, puis vient le nickel. Le chrome es moins facile à volatiliser et le fer est très réfra taire. Mais, de tous les métaux, ce sont le molyb dène et le tungstène dont les points d'ébullitig sont les plus élevés. Il faut chauffer le tungslèn pendant 20 minutes dans un courant de 700 ami pères sous 110 volts pour commencer à le volatiliser Ces recherches sur la volatilisation des métaux montrent qu'il n'existe pas de corps réfractaires! Tous les métaux, par une élévation de température suffisante, sont facilement liquéfiés, puis trans- formés à l'état gazeux. | Tous les corps simples, l'hélium excepté (sam liquéfaction n'ayant pas encore été produite), peu vent donc exister sous les trois états de la matière Tandis que l'Institution Royale de Londres a réussi par l'application rationnelle des basses Lempérs tures, à liquéfier et solidifier les anciens gaz réputés permanents, M. Moissan, à l'aide de son four élec trique, s’est posé et a résolu le problème inverse liquéfier et volatiliser les métaux réfractaires. C'est par l'utilisation de l'arc électrique que lé problème de la fabrication industrielle du salpêtre a été résolu. Par l’action des décharges électrique ae or puis en nitrate de calcium. Il es impossible d'entrer ici dans tous les détails tech niques de cette fabrication. Nous dirons seulement qu'une usine créée à Nottoden, en Norvège, par la Compagnie Norvégienne de l'azote, et qui dispose d'une force de 30.000 chevaux, peut traiter, dans trois fours qu’elle à fait construire spécialement pour cet usage, 75.000 litres d'air par minule. Len rendement en oxyde azotique est de 1 °/,- L’acide azotique obtenu dans celte fabrication peut servir pour la plupart des besoins industriels ; le nitrate de calcium est vendu comme engrais dans le come merce. Sa valeur au point de vue agricole ne paraît pas êlre sensiblement différente de celle du sal pêtre du Chili. La fixation de l'azote de l'air sous forme amm niacale à été réalisée par le D° Frank en collabora= tion avec M. Caro. La température de l'arc électrique n'est pas nécessaire ; il suffit du rouge (1.200 à 1.500°) pour l'accomplir. On sait que certains métaux alcalins et-alcalino-terreux, lithium, calcium, par exemple, possèdent la propriété de fixer l’azote à la température du rouge, pour former des azoture parfaitement définis Li'Az, Ca'Az?. Le Professeur Frank et M. Caro se sont demandé si les carbures de ces métaux ne jouiraient pas de la même Pro priélé. Ils ont chauffé au rouge du carbure de cal A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE 161 EEE aa cium dans un courant d'azote. Celui-ci est absorbé et produit un composé défini, la cyanamide cal- “cique : C'Ca + Az? — CAz?Ca + C. Traitée par l’eau, elle se décompose aisément et fournit de l’ammo- miaque : CAz'Ca + 3H°0 — 2 AzH° + CO'Ca. _ La cyanamide calcique peut done servir à la fabrication industrielle de l'ammoniaque et des dérivés de l'ammoniaque. Bien plus, la réaction de destruction par l’eau s'effectue lentement lorsqu'on laisse séjourner la cyanamide calcique dans le sol. Elle peut donc servir d'engrais azoté. Le D' Frank à montré que l’ammoniac pouvait être brûlé dans l'oxygène avec un bon rendement en acide azotique. Dans des expériences récentes, Schmidt et Baker ont réalisé cette oxydation en fai- sant passer le mélange de gaz ammoniac et d'oxy- gène ou d’air dans un tube chauffé au rouge, ren- fermant soit du platine, soit de l'amiante platinée. 75 à 80 °/, de l’ammoniac sont transformés en com- posés oxygénés de l'azote, dont 80 à 90 °/, sont de l'acide azoteux. Par sa transformalion aisée en ammoniaque ou en acide azotique, la cyanamide calcique se pré- sente donc comme un produit industriel de premier ordre. Elle est déjà fabriquée en grand à Berlin par la « Cyanidgesellschaft », et livrée sur le marché sous le nom de chaux azolée. Sa fabrication va per- mettre l'emploi et, par suite, l'écoulement des Stocks de carbure de calcium et donnera peut-être un regain de vilalité aux usines à carbure. Nous ne pouvons pas lerminer ce chapitre sans signaler les intéressantes expériences de M. Armand Gautier, relatives à l’origine des phénomènes vol- caniques et à la formation des eaux minérales. Ce savant à essayé de reproduire dans le laboratoire les réactions qui donnent naissance aux différents gaz que l'on trouve dans toute éruption volcanique et à donner, par suite, une explication de ce phé- nomène. Il a montré, en outre, par de véritables Synthèses d'eaux minérales, comment pouvait être expliquée leur formation sans qu'il soit besoin de faire intervenir la présence des eaux météoriques superficielles. En 1901, M. A. Gautier a établi que les roches pri- mitives (granits, porphyres, gneiss, dioriles, etc.) réduites en poudre et préalablement desséchées à 200°, contiennent encore de 0,7 à 7°/, d'eau, qu'elles abandonnent au rouge. Dès qu'elle est mise en liberté, cette eau, réagissant sur les roches, produit une quantité très notable de gaz contenant de loxyde de carbone, de l'anhydride carbonique, de l'hydrogène, de l’argon, des traces de méthane, de Phydrogène sulfuré et de l'ammoniac. Les gaz ainsi formés peuvent réagir les uns sur les autres, ainsi que le montrent les expériences de M. Gautier. Un | mélange d'oxyde de carbone et de vapeur d'eau REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. chauffé au rouge vif se décompose selon l'équation suivante: 3C0 + 2H°0 — 2C0?+ 2H? + CO. A1300°, un mélange d'anhydride carbonique et d'hydrogène se transforme en oxyde de carbone et vapeur d’eau : CO 2H — CO + A LH:0. Mais la vapeur d’eau peut réagir au rouge sur les sulfures métalliques, selon les équations : 3FeS + 4H°0 — Fe°O! + 3H23-L H°: CS + 2H°0 = Cu? + SO? + 2H: 3PDS + 2H°0 = 3 Pb + 2H2S + S0°. L'hydrogène sulfuré qui prend naissance dans ces réactions peut être à son tour partiellement détruit par les oxydes métalliques. Du gaz sulfhy- drique, dirigé sur des oxydes de fer ou d’alumi- nium chauffés au rouge, s'est décomposé en anhy- dride sulfureux et hydrogène : 2Fe°05 + TH2S — 4FeS + 3S0° + 7H°: 4 APO5 + 9H°S — 2A1205.ALS5 3802 + 9H2. Enfin, chauffé au rouge avec l'anhydride carbo- nique, l'hydrogène sulfuré s’est détruit en formant une certaine quantité d'oxysulfure de carbone : 8CO0° + 91FS — 3 COS + 5 CO + H? + 8 H°0 +- 65. De ces expériences, M. À. Gautier a été conduit à l'explication des phénomènes volcaniques et de l'origine des eaux thermales. Le soufre et les gaz produits dans ces réactions (H°,C0°,CO,H°S,S0*,COS) font parlie des émanations volcaniques. Sous l'in- fluence des fortes pressions qu'elles supportent, les couches terrestres peuvent, étant donné leur état d'équilibre instable, se rétracter. Les laves brûlantes, en pénétrant dans les fissures formées, déshydratent une partie des roches. L'eau mise en liberté peut réagir sur les oxydes et les sul- fures métalliques constituant ces roches et pro- duire des gaz. Ces gaz, à leur tour, peuvent réagir entre eux aux températures des profondeurs ter- reslres el donner naissance à un volume gazeux énorme, atteignant des pressions considérables. D'où les formidables explosions volcaniques. Les mêmes réactions conduisent à l'explication de l’origine des eaux thermales. La quantité d’eau produite par la déshydratation des roches est grande. Non moins grande est celle qui résulte de l'action réciproque des gaz à la température du rouge. Si cetle eau n’est pas rejetée par les volcans, elle peut émerger de leurs territoires et produire les eaux thermales. La Chimie vient encore une fois à l'aide de la Géologie. Elle explique, par des réactions de labo- ratoire, l'origine des grandes masses de gaz et de vapeur d'eau qui se produisent dans les éruptions volcaniques. Il ÿ a quelques années, elle avait per- mis d'expliquer, à la suite de synthèses très impor- tantes faites par MM. Sabatier et Senderens, l’ori- * LT* 162 A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE gine géologique de tous les pétroles que l’on trouve à la surface de la terre. II. — MÉTALLOÏDES. Les recherches sur le fluor ont été peu nom- breuses depuis les travaux de M. Moissan. Nous avons montré l'an dernier que l’action directe du fluor sur l'oxyde azotique avait conduit au fluorure d'azotyle ou de nitryle AzO'F. Il semblait étrange que cette action des deux corps n'ait pas donné le composé AzOF. Des recherches récentes ont montré que l'action directe du fluor sur le bioxyde d'azote ne permettait pas d'atteindre le fluorure de nitro- syle. Mais, en chauffant à 200° dans un tube de pla- tine un mélange de fluorure d'argent et de chlorure de nitrosyle, et recueillant les produits de la réac- tion dans un ballon de platine refroidi par l'air liquide, on a obtenu le fluorure de nitrosyle. C'est un gaz doué d'une activité très grande comme le fluorure de nitryle, mais qui s'en dis- tingue aisément par la densité de vapeur (AzOF : —1,7— AzO'F : D =92,2) et par son aclion sur l'iode et sur l'eau. Le fluorure de nitryle ne réagit pas sur l'iode; le fluorure de nitrosyle donne des fumées blanches de pentafluorure d'iode. Le pre- mier, mis au contact de l’eau, se décompose avec production d'acide azotique ; le second donne de l'acide azoteux : AzO2E + H20 = AzOSH + HF: A2OF —+ H°0 — AzO?H + HF. Il est intéressant de rechercher l’affinité chi- mique qu'ont entre eux les métalloïdes d’une même famille. Dans certains cas, elle est très grande (famille de l'oxygène) ; dans d'autres, elle est faible (familles de l'azote et du chlore). On sait, d'autre part, que, lorsqu'on s'éloigne de la tête de famille, les affinités des éléments sont de plus en plus grandes: Dans la famille des halo- gènes, on sait préparer, par action directe des métalloïdes l'un sur l’autre, le pentafluorure d’iode, le chlorure d'iode. Cela tient au caractère très élec- tronégatif du fluor et du chlore. Ce caractère élec- trochimique est assez puissant dans le brome pour que, par action directe du brome sur l'iode en excès, on ait préparé le bromure d'iode Brl. Mais ce corps est déjà très instable; il se détruit par la distillation ou par son contact avec l'eau. D'après cela, il semble que la combinaison du chlore avec le brome doive être très difficile à produire. Un décrit cependant, dans les livres classiques, le chlorure de brome, dont Balard a signalé la for- mation en 1826, par action directe du chlore sur le brome. M. Lebeau a recherché récemment les conditions de formation de ce composé, et il a essayé de l'ob- tenir en refroidissant, par le mélange acétone ets neige carbonique, le produit de l’action du chlore” sur le brome. Les cristaux obtenus dans trois expériences différentes, soumis à l'analyse, ont donné une composition variable : BrCl, BrCl, BrCl®, On n'est pas en présence d’un composé, défini: les cristaux sont constitués par un mélange de chlore et de brome solides. En 1880, M. Berthe-=, lot, ayant étudié la chaleur de formation du chlo- rure de brome, avait trouvé un nombre très faible ;" la nature définie de ce corps lui parut suspecte. M Néanmoins, malgré les réserves failes par ces savant, les livres classiques ont continué à décrire le chlorure de brome comme un composé bien défini. Les travaux de M. Lebeau montrent que ces corps doit être rayé, dès à présent, des livres de. Chimie. Le fluor et le brome sont séparés dans la familles par le chlore. Le caractère très électronégatif du fluor laissait espérer sa combinaison directe avec le brome et, de fait, M. Lebeau a isolé l'an derniers le fluorure de brome. Il n'en est pas de même pour le chlore. Sonm caractère électronégatif permettait de penser qu'il résisterait à toute action du fluor. M. Lebeau à essayé d'obtenir la combinaison de ces deux élé- ments à basse température, en opérant soit avec un excès de fluor, soit avec un excès de chlore. Les expériences faites en variant les conditions de la réaction lui ont montré que le fluor et le chlore ne s'unissent pas directement. Le chlore liquéfié- dissout le fluor, mais ce dernier se dégage au point de solidification du chlore. En présence de l'eau, le fluor oxyde le chlore et le transforme complète-. ment en acide hypochloreux. H D'après ces résultats, il semble bien que, dès à. présent, on puisse arrêter la liste définitive des … combinaisons des métalloïdes halogènes entre eux," aux corps suivants : BrF, Brl, CII et ICI et IF L'oxybromure de carbone COBr”, dont la prépa ration a été indiquée par Emmerling et Besson, n'est jamais pur. Il est toujours souillé d'oxychlo- rure et il est indiqué dans les traités de Chimie comme un liquide bouillant de 12° à 30°. On voit combien est peu définie cette tempéralure d'ébulli-. tion. Elle est loin de correspondre à un composé pur. De nouvelles recherches ont été failes cetten année par Von Bartal, qui a montré que Ce corp peut être préparé par une méthode analogue à celle qui fournit l'oxychlorure de carbone. L'union» de la vapeur de brome avec l'oxyde de carbone sek fait soit en présence du chlorure d'aluminium, soit par action de la décharge électrique silencieuse sur le mélange du gaz oxyde de carbone et de la vapeur de brome. La saponification du tétrabro=n mure de carbone au moyen d'acide sulfurique très” A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE 163 Nr À concentré le produit aussi à l'état pur avec un rendement très satisfaisant. Obtenu par l’une quel- conque de ces trois méthodes, l’oxybromure de carbone constitue un corps bien défini, bouillant à 645, de densité 2,45 à 15°, et beaucoup plus stable vis-à-vis de l’eau que l'oxychlorure de carbone. La liste des nouveaux gaz de l'air va-t-elle s'ac- croître encore d'une unité? Dans une étude qu'il a faite en 1903 des spectres du néon, du krypton et du xénon, M. E. Baly a montré que les spectres des deux derniers présentent 37 raies de même intensité. Il émettait l'hypothèse que ces raies devaient appartenir à un gaz plus lourd, du même groupe, et qui constitue vraisemblablement une impurelé des deux gaz précédents. De nouvelles recherches de M. Rudolf Schmidt semblent montrer que le xénon n’est pas un gaz unique, mais un mélange de plusieurs gaz. L'un d’eux à pu être séparé et une partie de son spectre ultra-violet a été mesurée. Sous l’action de la décharge électrique, le nouveau gaz donne une magnifique lueur verte. Si l'on fait éclater dans sa masse de longues étincelles, on obtient une colo- ration bleu-rougeâtre. L'étude de ce gaz est encore trop peu avancée pour que l’on puisse déterminer sa nature exacte et ses constantes physiques. » On sait que ces gaz de l'air sont réfractaires à toute combinaison. Lord Rayleigh et Sir W. Ramsay mont jamais réussi à obtenir l'union de l'argon avec un corps quelconque. MM. Collie et Ramsay ont constaté la même inertie de la part de l’hélium. MM. Berthelot et Moissan n'ont pas réussi à for- , mer des combinaisons définies avec l'argon. M. E. Cooke semble avoir été plus heureux. En opérant à des températures élevées, de 1200° à 1300°, il a obtenu des combinaisons avec des corps relative- ment volatils. 11 y a une tendance à la combinaison de l’argon avec le zine ; mais le cadmium n'a aucune Laffinité. Le mercure se combine avec l'argon et Phélium; le sélénium jouit des mêmes propriétés. Que sont ces combinaisons? Sont-elles des corps bien définis? L'auteur à négligé de les décrire. La plupart de ces nouveaux gaz ont été trouvés dans un grand nombre de sources thermales. Il ya déjà quelques années, Lord Rayleigh et Ramsay avaient isolé l'argon des eaux de Bath; MM. Bou- chard et Troost l'ont trouvé dans l’eau de la Raillère, M: Moissan dans la source Bordeu de Luchon, etc. M: Moureu à voulu généraliser cette étude, dans le but d'établir la présence de l'hélium dans les sources thermales. L'existence de ce gaz dans ces sources se rattache d’une manière étroite au phé- nomène de la radio-activité. M. Moureu a étudié quarante-trois sources appartenant à des régions diverses de la France et de l'Étranger. Par le seul examen spectroscopique direct du mélange des gaz rares qui se dégagent du griffon (argon, hélium, néon, krypton, xénon), il a reconnu la présence de l’argon dans les quarante-(rois sources étudiées, et celle de l’hélium dans qua- rante et une sources. Après avoir soumis ce mélange gazeux au frac- tionnement, par le charbon refroidi à l'aide de l'air liquide selon la méthode de Dewar, M. Moureu a reconnu aussi l'existence du néon dans ces gaz. On peut donc admettre comme établie la présence générale de l'hélium dans les eaux thermales. Or, on sait que le radium et l’actinium engendrent spontanément de l'hélium, et que ces deux corps et leurs émanations sont très répandus dans les substances terrestres. Il résulte de là que l’hélium provenant soit du radium, soit de l’actinium, doit se rencontrer dans la majeure partie des gaz sou- terrains. UT. — Méraux Er SELs MÉTALLIQUES. Nous avons montré plus haut qu'il avait été pos- sible de déterminer, à l’aide du four électrique, la température d’ébullition des métaux communs, ou du moins d'établir un classement dans les points d’ébullition de ces métaux. Des divergences existent dans les températures d'ébullition des métaux alcalins, et, pour quelques-uns d'entre eux, elles ne Sont pas connues. On ne sait pas à quelles tem- pératures se volatilisent le cæsium et le rubidium. Pour le potassium, Perman donne, comme tempé- rature d'ébullition, 667. Carnelley et Williams fixent celte température entre 719 et 731°. Le so- dium se volatiliserait à 742° (Perman), et le lithium au-dessus du rouge. La difficulté de détermination de ces températures tient à ce que ces métaux attaquent les vases dans lesquels on produit leur ébullition. Ruff et Johannsen ont trouvé que la vapeur des métaux alcalins est sans action sur le fer. Ils ont pu les distiller dans une cornue en fer forgé privée de soudure. Les températures des vapeurs de ces métaux ont été prises à l’aide d’un couple platine-platine rhodié, convenablement pro- tégé. Les auteurs ont trouvé comme points d'ébul- lition les nombres suivants : Cæsium, 670°; Rubi- dium, 690°; Potassium, 757°:; Sodium,877°. Quant au Lithium, le point d’ébullition serait supérieur à 1400°. À cette température, la cornue de fer com- mence à se ramollir, et il n’a pas été possible de trouver le moment exact où ce métal commence à bouillir. Ces nombres sont bien différents de ceux quel'on trouve dans les ouvrages classiques. Ils suivent bien la croissance des poids atomiques et rentrent dans les courbes de fusion de la classification pé- riodique. 164 A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE Les combinaisons de ces métaux alcalino-terreux avec l'ammoniac liquéfié continuent à faire l’objet de nombreuses recherches. Le strontium-ammo- nium, dont une étude complète a été faite récem- ment par M. Rœderer, se comporte comme les autres métaux-ammoniums et donne lieu aux mêmes réactions. Dans ces derniers temps, Otto Ruff et Geisel ont repris en détail l'étude des combinaisons des métaux alcalins avec l'ammoniac liquéfié. Ils arrivent à cetle conclusion que l'on ne se trouve pas en présence de véritables combinaisons chi- miques, de corps définis. Les métaux-ammoniums seraient constitués par un mélange mécanique du métal inaltéré, plus ou moins poreux, avec la solution saturée de ce métal dans l'ammo- niac. Ils auraient pu effectuer la séparation du métal et de l’ammoniac en pressant dans un linge la masse très refroidie. La solubilité du métal dans l'ammoniac liquéfié varierait avec la température. C'est, d’ailleurs, ce qui semble résuller de l'étude du strontium-ammonium. M. Rœderer a montré que sa composition change quand la température s'élève. Elle serait à : Sr + 6,38 AzH* MU SE 0e Sr + 6,26 AZH* Sr + 6,15 AzH* Sr + 6,01 AzH° Que l’on n'ait pas affaire à de véritables com- posés définis, cela est peut-être probable. Mais on ne doit pas perdre de vue que, si on élève leur température, ces corps ont une tendance à la disso- ciation. Quoi qu'il en soit, que ces métaux-ammo- niums soient des corps définis ou des solutions des métaux dans l’ammoniac liquide, ils n’en restent pas moins des agents précieux pour la synthèse chimique. Nous avons déjà signalé dans la revue précédente les propriétés curieuses qu'ils pos- sèdent. Il faut en ajouter d’autres. De même qu'ils transforment les dérivés mono- chlorés forméniques en carbures saturés correspon- dants : CnH?r +1 C1-+ 2 AZHSNa — CrHir +2 + AZH?Na + Na] + AzHS, de même ils réagissent sur les dérivés halogénés disubstitués, où les deux halogènes sont sur deux atomes de carbone différents, pour les transformer en carbures éthyléniques : CH?CI CH° | + 2AzHSNa — 2NaCl + 2AzH° + || CH?CI CH° CH°Br.CHBr.CH$ + 2 AZHSNa — 2 NaC] + 2AzH° + CH° : CH? — CH. Au contraire, les bichlorures qui ont leur chlore sur le même atome de carbone ne sont pas atta- qués. C’est le cas du chlorure de méthylène CH°CF, du chlorure d’éthylidène CH*CHCF, du chloracétol CH°CCI°CH}, etc. É Tandis que, pour les substitués monochlorés, il y a formation d’un amidure métallique, il ne s'en produit pas pour les dérivés dichlorés consécutifs: Le métal-ammonium agit à la manière du sodium ou du potassium. Une réaction de même nature se produit avec les alcools non saturés. Sans que la double liaison disparaisse, l'oxhydrile alcoolique est simplement remplacé par un atome d'hydrogène. On obtient un carbure éthylénique et un alcoolate d’un alcool incomplet : 2 CH? : CH.CH?OH + 2 AZH°Na — CH°: CH.CHS + 2 AzH° + CH? : CH.CH°ONa + NaOH Les combinaisons de l'oxyde de carbone avec« les mélaux-ammoniums conduisent aux métaux=… carbonyles, qui se prêtent à des réactions chimi= ques très variées que nous avons déjà fait connai: tre. L’oxyde de carbone fournit aussi avec le nickel | et le fer des combinaisons de même nature, par faitement définies : le nickel-carbonyle Ni(CO)' e le fer-carbonyle Fe{CO)’, dont l'étude a été faite pa Mond, Langer et Quincke, et aussi par Berthelot et Dewar. Récemment, Dewar et Jones ont déter miné à nouveau les constantes physiques du fer. carbonyle et fail une étude nouvelle de ce corps: Les résultats oblenus diffèrent en cerlains poin de ceux qui sont inscrits dans les livres classiques On trouve, dans ces derniers, que la décomposi tion du fer-carbonyle par les halogènes et les acides oxygénés, acide sulfurique, acide is fournit un sel ferrique et de l’anhydride carbo nique. Ceci esten contradiction avec les expériences récentes de Dewar et Jones. Les halogènes et les acides décomposent le fer-carbonyle avec produe tion d'un sel ferreux et d'oxyde de carbone selon l'équation : Fe(CO} + SO'H? — SO!Fe + 5 CO + H. Î D'autre part, lorsqu'on abandonne le fer-carbo nyle, ou sa dissolution dans les solvants organi ques, à l'action de la lumière solaire, il se dédouble en oxyde de carbone et un composé plus complexes 2Fe(CO) — Fe?(C0) + CO. Mond et Langer avaienb montré que, dans cette mème destruction, il se pros duisait du fer-heptacarbonyle Fe*(CO)'. Le composé Fe*(CO)° de Dewar etJones se dépose; pendant la décomposition du fer-carbonyle, à l'état d'un solide cristallin orangé où l’on peut distinguer de petites plaques hexagonales. Chauffé seul, il e détruit à son tour vers 100° en oxyde de carbone. et fer-pentacarbonyle liquide, avec dépôt de fer: Fe*CO)° — Fe (CO) + Fe + 4C0. Chauffé d’ailleurs avec de l’oxyde de carbone sous pression, il est complètement transformé dans le composé liquide A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE * 465 normal Fe(CO)'. Une réaclion colorée permet de distinguer aisément le composé liquide du corps solide. Ce dernier, chauffé avec de l’éther et du toluène, produit une intense coloration verte que ne donne pas le fer-pentacarbonyle. Ces travaux nouveaux de Dewar et Jones fixent les propriétés des carbonyles de fer; ils montrent que le composé de Mond et Langer n'a pas la composition indiquée, mais possède un double atome de fer. Des travaux effectués sur les sels métalliques, nous ne reliendrons que ceux de M. Colson sur les sels de chrome. On sait que l'hydrate chromique existe sous deux formes bien définies : l'hydrate bleu clair ou vert, obtenu en précipilant un sel chromique vert par l’'ammoniaque, et l'hydrate vio- let, qui est précipité par l’ammoniaque dans les solutions des sels violets de chrome. Au premier correspondent les sels violets de chrome, les sels chromiques, dont le type est le sulfate {SO')'Cr*. Au second se rattachent les sels verts dont le type est l'acide chromosulfurique de Recoura (4S0*)Cr?.H°.11H"0, sel complexe où ne peuvent êlre décelés de suite l’acide sulfurique et le chrome. M. Colson a montré que, lorsqu'on pré- cipite l’alun violet de chrome par l’ammoniaque, il donne un hydrate vert. Cet hydrate vert, dissous dans l’acide sulfurique, donne un composé vert répondant à la formule : (SO*)‘Cr'.OH°. Si l'acide est en quantité insuffisante, on à un composé ba- sique (SO0*)"Cr‘O, vert comme le précédent. C'est un sel nouveau qui n'a plus la constitution des sels chromiques violets, ni celle de l’acide chromosulfu- rique. En effet, tandis que les premiers sont immé- diatement précipitables par le chlorure de baryum, et que l'acide chromosulfurique n'est altaqué qu'après plusieurs jours, le nouveau sel de Colson est précipilé immédiatement par BaCF, mais seule- ment trois molécules d'acide sulfurique sont at- teintes. Deux restent dissimulées dans la molécule du sel et le chlorure de baryum ne peut pas les précipiter. M. Colson explique ces faits en admet- tant que le nouvel hydrate vert n'est pas Cr'(OH)”, mais un oxyde de formule : (OH)-Cr.0.Cr{OI)’, et le sel provenant de la dissolution de cet oxyde dans l'acide sulfurique aurait pour constitution : SO'H — Cr Cr.SO'H PANNE niZ NX (8) >SO1 SO‘ 0 N f 9 NW C1 —SO0—0Cr Pour justifier la constitution du nouvel oxyde vert, M. Colson a préparé le sel normal de cetoxyde avec l’acide acétique. En le traitant, en effet, par ce dernier acide étendu, on à une solution qui donne par évaporation dans le vide des paillettes amorphes répondant à la formule : (C*H*0*Cr)O(CrC°ER°0°). Dans cet acétate, l'oxyde de chrome n’est pas immédiatement déplacé par la potasse. À 0°, la liqueur reste limpide plusieurs jours ; à 20°, quel- ques heures, et à 60°, quelques minutes. Les travaux de M. Colson ne s'arrêtent pas là. En traitant par l’anhydride sulfureux une solution refroidie d’anhydride chromique, on obtient une solution verte qui, évaporée dans le vide, puis maintenue pendant quelques jours dans le vide sec, abandonne un corps solide vert foncé dont la composition est celle du sulfate chromique violet : (SO‘)*Cr?, 10H°0. Les solutions étendues de ce sel conservent leur couleur verte et précipitent par le chlorure de barvum. Ces deux propriétés diffé- rencient nettement ce nouveau sel : 4° du sulfate chromique violet ; 2° de l’acide chromosulfurique de Recoura. Lorsqu'on fait bouillir sa solution aqueuse, il se dédouble en acide sulfurique et en pentasulfate (SO“)°Cr‘O. Ce pentasulfate est vert, et sa solution conserve cette teinte. Il est identique au sel basique vert signalé plus haut. Dans ce nouveau sulfate chromique vert, il y a deux radicaux SO‘ dissimulés dans la molécule, non précipilables par les sels de baryum. Or, M. Colson a montré que l'action de l’eau pouvait amener la disparition des radicaux dissimulés et que l'absorption d'une molécule d’eau correspond à la disparition d'un radical SO‘ dissimulé. On peut ainsi passer de la formule (SO*)Cr* aux sels : (S0‘)Cr*(SO*H){OH), (SO‘)Cr*(SO‘H)} (0H)? et Cr(SO'H}(OH). Mais alors, on concoit la pos- sibilité de l'existence de sulfates acides, tels que Cr(OH)}(SO'H)', ou Cr°(SO'H)f; et, de fait, M. Colson a préparé le composé Cr’{OH}(SO'H)° par action de SO* sur le mélange d’'anhydride chromique et d'acide sulfurique en solution concentrée. On voit, par ces travaux, combien est complexe la question des sels de chrome. L'hydrale violet peut être obtenu par laction de l'ammoniaque sur les sels violets, mais cette même action, produite avec l’alun violet, donne aussi un hydrate vert. Il en résulte qu'à ces deux formes d'hydrates corres- pondent : 1° des sels violets, déjà connus, les sels chromiques ; 2° des sels verts qui diffèrent essen- liellement des précédents par la précipitation incomplète de leur acide. Ces sels nouveaux sont de deux sortes : les uns isomères des sels chromi- ques (SO*)'Cr? et ayant vraisemblablement la cons- titution suivante : SO: VA \ SO#— Cr—Cr=—S0"; les autres, se rapprochant plutôt des sels de Recoura, de formule : (SO')Cr?0H?, mais préci- pitant une partie de leur acide par le chlorure de baryum. A. Mailhe, Chargé d'un Cours complémentaire de Chimie à la Faculté des Sciences de Toulouse, 166 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX ° Sciences mathématiques Bachmann (P.). — Zahlentheorie (Versuch einer Gesamtdarstellung dieser Wissenschaft in ihren Hauptteilen). Fünlter Teil : Allgemeine Arith- metik der Zahlenkôrper. — 1 vol. in-8° de 548 pages. (Prix : 46 marks.) Teubner, éditeur. Leipzig. Voici une nouvelle occasion, offerte au public fran- çais, de se faire une idée de la théorie des corps algé- briques. Nous avons eu l’occasion de rappeler ici même combien cette théorie, et bien d’autres d’Arith- métique supérieure, étaient ignorées dans notre pays. L'Ecole francaise a, d'ailleurs, d'assez beaux et d'assez nombreux travaux à son actif dans d'autres voies pour pouvoir renoncer à explorer celle-ci, et ce n'est pas nous qui songerons à blâmer la tendance, toujours plus forte, par laquelle nos mathématiciens sont en- trainés vers le domaine réel et les applications con- crètes. Peut-être, cependant, certains d’entre eux n’auront-ils pas, sans une certaine mélancolie, par- couru, l’année dernière, le premier volume des œuvres d'Hermite, et constaté que, de ces beaux travaux dus au génie du géomètre français, la plupart n'ont pas été poursuivis chez nous et y sont restés à peu près inconnus. Ce sont ceux-là, on peut l’espérer, qui tien- dront à rattraper le temps perdu et seront heureux de trouver pour cela l'ouvrage de M. Bachmann. Il n'est pas besoin de dire que le sujet y est étudié avec la conscience qui est la qualité dominante de l’auteur. M. Bachmann n'entend pas innover : il ex- pose, le plus complètement qu'il peut, nos connais- sances présentes, sans y rien ajouter peut-être, mais sans en négliger une parcelle. C'est dans cet esprit qu'il traite les propriétés communes aux corps de nombres algébriques en général, réservant à un pro- chain volume les propriétés, si remarquables, de cer- taines catégories particulières de corps. Faut-il maintenant analyser les divers chapitres dont se compose son livre? Tous, depuis le premier, seront entièrement nouveaux pour la plupart des lec- teurs français; tous, jusqu'au dernier, sont essentiels à connaître. Le premier, c'est la notion même de corps algébrique. Le dernier est la curieuse et originale méthode, sorte de généralisation hardie de la repré- sentation décimale, par laquelle M. Hensel développe les nombres algébriques en séries. Entre les deux se déroule cette extraordinaire création de la pensée qui s'appelle la théorie des idéaux et que l’auteur expose conformément à la marche indiquée par Dedekind. Rien que par l'audace de la conception, par la grandeur de l'effort accompli, elle mérite que nos mathématiciens se l’assimilent et la méditent. Jacoues HADAwaARD, Professeur adjoint à la Sorbonne, Professeur suppléant au Collège de France. Vivanti (G.), Professeur à l Université de Messine. — Theorie der eindeutigen analytischen Funktionen (THEORIE DES FONCTIONS ANALYTIQUES UNIFORMES). T'ra- duction allemande de A. Gurzmer. — 1 vol. in-8° de 512 pages. (Prix : 46 fr.) B. G. Teubner, éditeur. Leipzig, 1906. . Cet ouvrage est la traduction allemande de la « Théorie des fonctions analytiques » de Vivanti, parue en italien il y a cinq ans, et qui rencontra un accueil très favorable dans la péninsule. L'adaptation qu’en donne aujourd'hui M. Gutzmer est la consécration de ce succès et nous montre en quelle estime les mathé- maticiens d'outre-Rhin tiennent l'œuvre de M. Vivanti. Izart (J.), Ingénieur civil des Mines. — Méthodes économiques de combustion dans les chaudières à vapeur.—1 vol.in-8° de A3 pages avec nombreuses figures. (Prix: T fr. 50.) Dunod et Pinat. Paris, 4906. Ainsi que l’auteur le dit fort bien dans sa préface, l'utilisation du combustible, qui est le pain de l'indus- trie, intéresse celle-ci au plus haut point : elle con- stitue un des éléments principaux de l’abaissement des prix de revient. M. Izart s'est proposé d'exposer les meilleurs moyens de réaliser pratiquement cette éco- nomie. Son travail, dit-il, n'a aucune prétention au rigorisme scientifique, et il a cherché « à le dépouiller de tout caractère mathématique, lequel embrouille parfois les choses qu'il prétend éclairer » ; ce dernier aphorisme est tout au moins contestable et nous en laissons la responsabüiité à l'auteur. Le caractère essentiellement pratique de l'ouvrage ressort des cinq divisions adoptées : 1° Etude économique de la combustion ; 2° Pertes et rendement dans la combustion ; 3° Choix d’un combustible économique ; 4° Economie dans les méthodes de chauffe ; 5° Appareils pour le contrôle de la chauffe. Le plan de l'auteur est logique et rationnel : après avoir étudié la manière dont s'opère la combustion et dressé le bilan des pertes qu'elle ne peut éviter, il aborde la question du choix du combustible, de la meilleure facon de le brûler et des procédés permet- tant de contrôler une utilisation normale. Tout cela est présenté avec clarté et méthode et sans trop de redites. Pour conclure, M. Izart se demande comment on réalisera l’économie de charbon, qui fait l'objet de son travail : « Il suffit de savoir et de vouloir », répond-il, et il ajoute qu'il faut aux industriels du raisonnement et de l'initiative, ce qui est parfaitement vrai. Plus de soixante-dix pages sont consacrées aux ren- seignements numériques relatifs aux températures, aux combustibles, au tirage, aux pertes thermiques, aux récupérations, aux consommations, aux coûts ef aux prix de revient : le lecteur y trouvera de nom- breuses données utiles à l’industrie, que l'auteur à recueillies avec beaucoup de patience et d'esprit pra tique. AIMÉ Wrrz, Doyen de la Faculté libre des Sciences de Lille 2° Sciences physiques Hæœgner (Paul .— Lichtstrahlung und Beleuchtung. — 1 vol. in-8 de 66 pages avec 37 figures et de nom- breuses tables. N°8 de lElektrotechnik in Einzel- Darstellungen. (Prix : 3 fr 75.) F. Vieweg und Sobhn; éditeurs. Braunschweiq, 1906. Ce petit volume est destiné à aider l’électrotechniciem dans le projet et l'exécution d'installations d'éclairage en particulier dans le choix, la distribution et la déter= mination de l'intensité des lampes à arc. L'auteur mon tre par quelques exemples comment le rayonnements lumineux dans l'espace, le courant lumineux, aïnSi que l'intensité lumineuse moyenne peuvent se cal= culer au moyen de la forme de la surface et de Ja luminosité superficielle du corps éclairant. Il donne de nombreuses tables, qui fournissent rapidement des résultats utilisables pour les cas qui se représentent JEM plus fréquemment dans la pratique. Comme on le voit, la Collection électrotechnique de M. Benischke, que nous avons déjà signalée à plusieurs reprises, se complète d'ouvrages toujours utiles eb pratiques, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 167 . Moureu (Ch.), Professeur agrégé à T Ecole supérieure de Pharmacie de Paris. — Notions fondamentales de Chimie organique (deuxième édition, revue et augmentée). — À vol. in-8° de 320 pages. (Prix : 1 fr. 50.) Gauthier-Villars, éditeur. Paris, 1906. Il y a quatre ans, j'ai déjà souhaité la bienvenue au livre que M. Moureu venait alors de faire paraître sous le même titre : l'avenir a réalisé mes espérances el s'est montré favorable à la tentative de l’auteur. Aussi ‘suis-je particulièrement heureux de recevoir la “deuxième édition de cet ouvrage, dont je me conten- - terai de dire qu'il est encore supérieur à son ancien, “parce quil s'est accru des connaissances acquises pendant ces dernières années. M. Moureù a voulu que son livre reste au courant des progrès de la science et il a spécialement déve- loppé l'emploi des méthodes de Grignard, de Sabatier et Senderens, de Bouveault et Blanc à la préparation des hydrocarbures et des alcools. A noter aussi quel- ques indications historiques sur les principales décou- vertes relatives à la Chimie ancienne et moderne, dont Ja rareté était manifeste dans la première édition. Il nous paraît impossible de réunir sous un volume aussi restreint un plus grand nombre de données; c'est dire que le plan adopté par M. Moureu était bon : nl lui assurera certainement un nouveau et légitime succès. L. MAQUENNE, Membre de l'Institut, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle. Dowson (J. E.) et Larter (A. T.). — Producer Gas = (LE GAZ DE GAZOGÈNE). — 1 vol. in-8 de 296 pages avec 13 fig. (Prix : 13 fr. 15.) Longmans, Green and C°, 39, Pasternoster Row, Londres. 1906. L'emploi du gaz de gazogène est aujourd'hui si répandu etce produitest fabriqué avec des combustibles si divers, que le moment était venu d'entreprendre un “xposé complet de cette question. Le fonctionnement pratique des gazogènes en rela- ion avec les fours et les moteurs à gaz est aujourd'hui assez bien connu; mais on est moins renseigné sur la thermochimie des phénomènes et sur les principes et conditions dont dépend une marche avantageuse des “sazogènes. Les auteurs ont donc consacré leurs trois premiers chapitres à la considération de la formation du gaz de gazogène à un point de vue strictement théo- rique : les résultats théoriques sont ensuite comparés à “ceux de la pratique et l’on en déduit un certain nombre d'indications dont les constructeurs et les industriels pourront faire leur profit. C'est Bischof, de Mägdesprung (dans le Harz), qui fabriqua le premier gazogène en 1839 ; mais son inven- tion ne fit guère de progrès jusqu'en 1857, époque où Frederick Siemens fit connaître sa combinaison de gazogène et de four à régénération. Cette importante invention el d'autres améliorations subséquentes furent introduites en Angleterre par son frère, Sir William Siemens, auquel on est surtout redevable du grand mouvement donné à l'emploi du gaz de gazogène pour les fours requérant des températures hautes et unifor- L mes. Il montra non seulement qu'on économise du combustible en le convertissant préalablement en un gaz, mais encore que beaucoup d'opérations indus- trielles importantes peuvent être accomplies avec des fours chauffés au gaz, alors qu'elles sont impossibles par chauffage direct avec un combustible solide. Plu- sieurs modifications et améliorations ont étéapportées par d’autres techniciens aux gazogènes et aux fours: tous les types notables sont décrits et discutés par les auteurs. Dans les fours, le gaz est utilisé tel qu'il est produit par le gazogène. Pour des travaux plus simples, par exemple lorsqu'il est brûlé dans un bec, il doit être auparavant refroidi et purifié. C'est M. J. E. Dowson qui, en 1878, proposa la première installation de ce genre. Mais un développement plus important était réservé au gaz de gazogène par suite de son emploi dans les moteurs à gaz. C'est encore M. Dowson qui, en 1881, lança cette nouvelle application en présentant à l'Asso- ciation britannique pour l'avancement des Sciences un modèle de son installation actionnant un moteur à gaz Otto de 3 chevaux, ce qui fit dire à Sir H. Bramwell que cinquante ans plus tard le moteur à gaz aurait surpassé la machine à vapeur. Si cette prophétie n'est pas encore accomplie, il faut constater qu'il n’est pas rare aujourd'hui de voir des moteurs de 1.500 à 2.000 chevaux travailler avec du gaz de gazogène dans des conditions très satisfaisantes. Une modification intéressante qui a suivi emploi du gaz de gazogène dans les moteurs à été l'adoption des types à succion, rela- tivement récente, et que les auteurs examinent en détail. L'ouvrage se termine par l'examen des divers com- bustibles qui peuvent servir d'aliment aux gazogènes, les méthodes d'analyse chimique et de détermination du pouvoir calorifique de ces substänces ainsi que du gaz qu'elles produisent. Les auteurs estiment que l'emploi du gaz de gazogène est appelé à se répandre considérablement par suite de l'économie et de la simplification du travail qu'il per- met de réaliser sur d’autres combustibles; l'œuvre si claire qu'ils ont écrite contribuera aussi pour sa part, en faisant connaître les facteurs scientifiques et techni- ques du problème des gazogènes, à hâter cette évolu- tion. Louis BRUNET. 3° Sciences naturelles Costantin (J.), Professeur au Muséum national d'His- toire naturelle. — Le Transformisme appliqué à l'Agriculture. — 1 vol.in-8° de la Bibiothèque scien- tifique internationale de 300 pages avec 105 gravures. (Prix : 6 fr.) Félix Alcan, éditeur. Paris, 1906. La grande question exposée par M. Costantin comporte deux points de vue : l’un, purement théorique et phi- losophique, qui intéresse surtout les savants spéculatifs; l’autre,essentiellement pratique, auquel se placent prin- cipalement les techniciens de l’agriculture et de l'hor- ticulture. L'auteur a fait ressortir ce double point de vue d’une facon remarquable. L'intérêt du problème philosophique se soutient de lui-mème par la considé- ration du commencement et de la fin des êtres vivants; celui du problème pratique est démontré surabondam- ment par les progrès qu'ont suscités, en Agriculture et en Horticulture, les sélections, les hybridations, les mutations qui ont transformé parfois très profondément les propriétés et les caractères d’un grand nombre de variétés d'animaux domestiques, de plantes de grande culture et de végétaux d'ornement. Nous devons être reconnaissants à M. Costantin de nous avoir fait profiter de sa compétence person- nelle en exposant, dans son ouvrage, les principes du transformisme ét l'étude des facteurs de la variation dans le règne végétal. Les philosophes et les agronomes trouveront là à glaner une ample moisson de théories et de faits dont ils pourront tirer profit; l’auteur aura ainsi réalisé son désir « de rapprocher les théoriciens et les praticiens et de leur apprendre à s’estimer et à s'aider ». L'ouvrage est divisé en deux grandes parties : la pre- mière, consacrée aux petites espèces et à la mutation; la seconde, aux facteurs de la variation. Le rôle économique et l'importance des variétés sont bien mis en relief par le cas du sélectionnement de la betterave, par les transformations du chou, du blé, qui ont donné naissance aux diverses variétés exploitées actuellement avec grand avantage. Les travaux de Jordan, la sélection artificielle d’après Lamark et Darwin, la sélection naturelle et la notion de la lutte pour l'existence, enfin la découverte de la mutation et l'étude de ce phénomène font l'objet d'autant de cha- pitres détaillés. Comme applications de ces recherches, 168 M. Costantin nous offre l'exemple du Laboratoire de Svalôf, en Suède, où l'initiative individuelle a permis de sélectionner plusieurs types de céréales et de plantes diverses et de les mieux approprier à leur destination. Parmi les facteurs de la variation, le mode de culture et les façons culturales, l'action du climat et des sai- sons, du sol et de l'alimentation sont examinés en don- nant à l'appui les exemples de la betterave, de la vigne, des arbres fruitiers, d'un grand nombre de plantes hor- ticoles: l'influence des mutilations et de la greffe, le rôle du parasitisme et de la symbiose, fournissent aussi d'utiles et nombreuses applications. Il nous est d’ail- leurs impossible de citer ici tous les faits et toutes les théories rappelés et développés dans cet ouvrage, qui constitue l'un des recueils les plus complets et les plus originaux que la science possède actuellement sur e sujet traité. A. HÉBERT. Brücker(E.), Docteur ès sciences, professeur au Lycée de Versailles. — Sciences naturelles (Anatomie et Physiologie animales et végétales, Paléontologie, Hygiène), pour les classes de Philosophie, Mathé- matiques, Saint-Cyr, Ecole Navale, Institut agro- nomique. — 2 vol. in-8 Jés. (Prix: 4 fr. chaque.) Ch. Delagrave, éditeur. Paris, 1906. Chaque année voit éclore un ou plusieurs manuels d'Histoire naturelle, généralement fort bien faits, à l'usage des classes supérieures de l’enseignement secon- daire; en voici un de plus, conforme aux programmes du 31 mai 1902. Le premier volume renferme la monographie de l'Homme (anatomie, physiologie, développement), ab- straction faite, bien entendu, de la reproduction, car il est bien connu que, dans l’enseignement secondaire, les plantes seules ont le droit d’avoir des organes mäles et femelles. Puis vient une Zoologie débutant par les formes les plus inférieures pour finir aux Mammifères, et enfin un aperçu historique sur les connaissances précédentes. Le second volume débute par la Paléo- graphie (continents et mers d'autrefois), et une Paléon- tologie disposée suivant l'ordre zoologique avec une histoire succincte des industries préhistoriques de l'Homme. Puis vient l’organisation et la vie des plantes supérieures, la reproduction des Angiospermes, Gym- nospermes et Cryptogames, et des notions de Paléobota- nique. C'est ensuite le tour desplantes sans chlorophylle (Neottia, Orobanche, Champignons, Bactéries), de l'his- toire des fermentations et des maladies microbiennes. Une quatrième et dernière partie est consacrée à l'Hy- giène (maladies microbiennes classées suivant le mode de dissémination, hygiène de l'habitation, du corps; les aliments et les boissons). Il y a peu de lacunes dans cet ensemble, et la plus grave d’entre elles tient peut-être aux programmes, que Je connais fort peu, je l'avoue: il n'y a absolument pas de classification botanique pour les plantes supé- rieures; peut-être, après tout, est-il plus utile, dans la vie courante, de connaître les Ptéridospermées que les Ombellifères, Solanées ou Graminées. Un manuel tel que celui-ci peut être considéré sous trois points de vue : les faits, la rédaction et la méthode d'exposition. M. Brücker est généralement très ren- seigné, tout est bien au courant, bien au point, il n'y a à relever que des broutilles insignifiantes : les Arabes ne secouent pas le pollen des fleurs mâles sur les Dat- tiers femelles; ils agissent plus sagement en attachant une inflorescence mâle au milieu du bouquet de feuilles de l'arbre femelle; je n'aime guère les Monères, ni les néphridies des Rotifères, ni les deux feuillets des mé- sentères; c’est un peu vieillot ou même erroné. Dans le texte, M. Brücker ne cite pas de noms de savants, et il a raison, Car cela ne dit rien du tout aux élèves, mais pourquoi alors ces notices historiques parfaitement inutiles parce que parfaitement incomplètes ? Pourquoi, en botanique, Camerarius, pourquoi Gæthe, très sur- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX fait d'ailleurs sous ce rapport, et pas Nägeli, ni Hugo Moh], ni de Bary, ni Sachs, ni Tulasne, ni Thuret, ni Pringsheim, ni Brongniart, ni tant d'autres; il est asse curieux que, suivant cette notice, depuis 4850, ce sont les seuls professeurs actuels du Muséum et de la Sor bonne qui ont fait progresser la Botanique; quelque admiration qu'ils méritent, c'est peut-être un peu d’e clusivisme. M. Brücker est nettement transformiste: Ja conti nuité et l'évolution des êtres ressortent très heureu sement partout où cela est possible, et, n'était son affection immodérée pour les arbres généalogiques, même les plus discutables, il n’y aurait que des éloges à faire. La rédaction est très bonne, claire, abondamment illustrée; avec grande raison, M. Brücker a débarrassé le plus possible son texte des termes par trop rébar: batifs et des désignations absolument inutiles, tels que les noms des canaux des glandes salivaires ou des modifications de l'ovule: je regrette vivement l'absence d'étymologies, d'autant plus nécessaires qu'on sait moins de latin et de grec. L'auteur a un souci constant de se référer aux réa lités, même les plus vulgaires, et on ne peut encore que l'en louer; il n’y a pas de mal à ce que l'élève sache exactement à quoi correspondent le mou, le rognons, le ris de veau et les tripes. Passons à la méthode : M. Brücker annonce que son livre est ordonné suivant un plan tout nouveau, in ductif, au lieu d’être faussement déductif comme les autres manuels; c’est-à-dire, si j'ai bien compris, qu'il cherche à suivre l'ordre historique de nos connais sances, à passer d'une approximation grossière à une deuxième approximation plus précise, pour arrive enfin à l'examen microscopique, à la structure cellu- laire ; il reproche assez vivement aux traités antérieurs de débuter par la définition de la vie, la définition de la cellule abstraite, le groupement des cellules en divers tissus, pour continuer par la monographie des organes et appareils. : Il me paraît qu'il y a de nombreux intermédiaires entre ces deux absolus, mais n'importe, je ne veux envisager que le résultat. Et je dois dire qu'il est dé- plorable; la méthode de M. Brücker aboutit à un curieux gächis; qu'on en juge : pages 9 à 30, descrip= tion succincte du squelette par régions ; pages 45 à 48, dans l'Histologie, description histologique de l'os et du cartilage; pages 177 et suivantes, redescription dun squelette, mélangée aux muscles, articulations et liga- ments; pages 215 à 226, structure microscopique et développement de l'os, suivi de l'étude des poils et des dents. Bien entendu, tous les endroits où l'on parle du squelette sont séparés par des chapitres quelconques. Il ya un certain chapitre intitulé l'Appareil sécré” teur qui renferme un fouillis sans nom : Îles cellules mucus, les glandes en grappe (salivaires, sébacées et mammaires), les glandes en tube de l'intestin, les glandes sudoripares et les reins, puis le foie et les glandes closes (corps thyroïde, capsules surrénales, rate et thymus). Il y a un paragraphe sur la fonction glycogénique page 171 et un autre page 328, alors qu'il serait logique de grouper tout ce qui a rapport aux réserves après l'absorption intestinale. Il est vraimen bizarre de parler des réflexes à la fin de l'anatomie: dans le système nerveux, alors qu'on en aurait eu constamment besoin pour expliquer en bonne place les réglages de la digestion, du cœur, etc. La dispersion des renseignements concernant um: même organe est naturellement beaucoup plus sen- sible dans la partie zoologique que dans la botanique; mais on la rencontre encore dans cette dernière. Je ne sais si, malgré les éminentes qualités du Manuel de M. Brücker, il ralliera les naturalistes à la méthode. inductive, et aux descriptions par approximations successives. L. Guéxor, Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 169 4 Sciences médicales Second Report of the Wellcome research Laborato- ries at the Gordon memorial College (Khartoum). Department of Education. — 1 vol. de 255 pages. Londres, 1906. Dès l'année 1904 a été installé, à Khartoum, un Labo- ratoire d'étude des maladies tropicales, de leur bacté- riologie et de leur prophylaxie. Dans ce même labo- ratoire sont étudiées les eaux, l'hygiène des habita- tions et du sol, les conditions possibles d'exploitation agricole, industrielle et minière du pays. Ce laboratoire - fonctionne sous la direction de M. A. Balfour. Il a déjà fourni un premier Rapport en 1904. Le second, édité dans le cours de l'année 1906, ren- ferme des études très détaillées sur l'épidémiologie du pays, notamment sur la trypanosomiase humaine et animale, la prophylaxie du paludisme, la lèpre, etc. La maladie du sommeil est fréquente dans les pro- vinces de Kordofan, de Bahr-el-Gazal, de Gayeluba. Tous les gouverneurs de district ont été invités à fournir des renseignements sur la nature et la répartition des mouches dangereuses. Il a été possible, ainsi, d'établir la répartition des Glossina palpalis, morsitans, longi- Pennis, elc., ainsi que des Stomoxys et des diverses Muscidées. Les Anophelines et les Stegomya abondent dans le Soudan anglo-égyptien. M. Théobald, dont la compé- tence sur ce sujet est bien connue, fait la description des nombreuses espèces qu'il a rencontrées. La lutte contre les moustiques a déjà réduit considérablement leur nombre à Khartoum et diminué la proportion des cas de paludisme parmi les troupes anglo-égyptiennes. De nombreuses figures, planches et cartes, illustrent cette intéressante publication. Dr H. VINCENT, Professeur à l'Ecole d'application du Val-de-Grâce (Paris). 5° Sciences diverses Pensa (Henri). — La République et le Canal de Panama.— 1 vol. gr. in-8° de 344 pages, accompagné d'une carte en couleurs de l'Amérique centrale et des tracés projetés du Canalinterocéanique.(Prix:7f.50.) Hachette et Ci, éditeurs. Paris, 1906. M. Henri Pensa, dont la compétence, en matière de politique extérieure et de colonisation, est bien connue, vient de consacrer un nouvel ouvrage à la très impor- tante question d'actualité du Canal et de la République de Panama. Ce livre, qui traite de sujets ressortissant à l'économie politique et au droit, débute par des con- Sidérations géographiques et géologiques, en même temps que l'introduction témoigne de préoccupations scientifiques que nous devions signaler tout d'abord aux lecteurs de cette Revue. Cet esprit et cette méthode äpparaissent comme la caractéristique de cel ouvrage, qui nous semble marquer une date et signaler une évo- lution des plus intéressantes. «IT y a toujours quelque intérêt, dans une étude d'ordre politique, écrit l'auteur, à s'inspirer, autant que cela est possible, des méthodes d'observation et d'analyse qu'un des plus grands sa- vants, Darwin, rapporta du voyage qu'il fit surle Beagle autour de l'Amérique du Sud. Certaines conditions sont nécessaires aux collectivités humaines comme aux espèces animales pour leur organisation et leur pros- périté. L'étude des circonstances où est née la petite République de Panama permettra de les observer sans peine.» Et, après avoir décrit les fluctuations de la politique dite mondiale, après avoir noté la prépondé- rance des intérêts économiques, M. Pensa ajoute : « Les hommes qui doivent être considérés comme ayant réel- lement déterminé ces graves transformations dans l'équilibre des groupements humains sont certainement ces savants désintéressés, ces promoteurs de décou- vertes qui ont rendu ces transformations faciles et par conséquent nécessaires, plutôt que les hommes d'Etat ou les soldats, simples directeurs et metteurs en scène de pièces dont ils ne sont pas les auteurs. » Pasteur avait déjà écrit : « La science, dans notre siècle, est l'âme de la prospérité des nations et la source vive de tout progrès. Sans doute la politique, avec ses fatigantes et quotidiennes discussions, semble être notre guide. Vaine apparence! Ce qui nous mène, ce sont quelques découvertes scientifiques et leurs applications ». C'est dans cet esprit et avec ces préoccupations que M. Pensa entreprend l'historique de la jeune République de Panama. Nous ne pourrions noter ici les détails qui le composent, mais on peut se demander la raison du rapide succès de cette révolution sans violence, alors que les insurrections précédentes, étaient restées sans résultat. L'auteur répond en citant Aug. Comte : «Toute action politique estsuivie d’un effet réel etdurable quand elle s'exerce dans le même sens que la force de la civili- sation, lorsqu'elle se propose d'opérer des changements que cette force commande actuellement. L'action est nulle, ou du moins éphémère, dans toute autre hypo- thèse ». Il faut reconnaître qu'en cette circonstance les Américains ont bien agi dans le sens de la civilisation. La République de Panama devait être créée, parce que le progrès du droit international public tend à éviter les conflits armés et à faire prédominer les solutions con- formes aux aspirations de la majorité des habitants; parce que la géographie et la géologie de l’isthme appren- nent que seule la voie de Panama était réalisable; et, enfin, parce que l'étude de la condition économique des Etats-Unis a démontré que la création d'un canal inter- océanique étaitune nécessité absolue pour eux. M. Pensa pense aussi qu'une telle œuvre aura, au point de vue américain, des résultats incalculables. « Elle fortifiera la puissance maritime des Etats-Unis en rapprochant ses deux côtes du Pacifique et de l'Atlantique ; elle assurera la mise en valeur commerciale de tous les Etats amé- ricains orientés vers le Pacifique par les industriels, les commerçants et les armateurs américains, tandis qu'ac- tuellement ces Etats relèvent à tous égardsdel'industrie, du commerce et de la marine marchande de l'Europe. Par cette mainmise sur l'Amérique du Sud, le canal ac- croitra la productivité de ces Etats, où l'indolence espa- gnole laisse en jachère des richesses naturelles infinies, et par les capitaux qu'il permettra aux Américains d’im- porter, par les chemins de fer, les ports qu'ils créeront, ceux-ci hâteront la prospérité de territoires sensible- ment aussi vastes que ceux mêmes des Etats-Unis. Les Etats-Unis pourront de leurs villes ouvrières de l'Est exporter au Japon, en Chine, en Australasie, leurs pro- duits manufacturés à aussi bon compte que ceux qui viennent d'Europe par Suez, et ils auront sur ceux-ci la supériorité du prix de revient qui sera certainement abaissé aux Etats-Unis, par rapport au prix de revient en Europe, les matières premières élant abondantes et les frais généraux singulièrement allégés ». Quant aux con- séquences qui en résulteront pour l'Europe, l'auteur affirme qu'elles ne seront pas celles qui, de 1881 à 1889, ont été partout répandues par la Compagnie universelle du Canal. «Si l'on éprouve quelque étonnement, c'est qu'il ait été possible pendant près de dix ans de repré- senter l'œuvre de Panama comme ayant un intérêt national francais, uniquement parce qu'il avait plu à des financiers de mettre en action la grande notoriété acquise à M. de Lesseps par l'ouverture du canal: de Suez et alors que rien, ni dans la nature du travail, ni dans son prix de revient, ni surtout dans ses consé- quences économiques pour l'Europe et la France en particulier, ne permettait d'établir la moindre compa- raison entre les deux entreprises de Suezet de Panama. L'Europe n'avait pas plus à réaliser une pareille œuvre qu'il ne lui appartiendrait actuellement d'en empêcher le succès ». Ces considérations nous paraissent tout à fait justes, et nous sommes d'autant plus heureux de les retrouver dans ce livre, dont nous avons signalé la valeur scientifique de la méthode, qu'une récente étude de la même question nous avait conduit à des conclu- sions identiques. PIERRE CLERGET, Professeur à l'École Supérieure de Commerce de Lyon. 170 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER 2 ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 28 Janvier 1907. La Commission spéciale présente la liste suivante de candidats pour la place d'Académicien libre laissée vacante par le décès de M. Bischoffsheim : 4° Le Prince Roland Bonaparte; 2° MM. J. Carpentier, V. Cornil, J. Tannery et L. Teisserenc de Bort. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Arm. Lambert a étudié les propriétés analytiques et l'indépendance des coefficients du développement de la fonction per- turbatrice. — M. E. Waelsch présente ses recherches sur les fonctions sphériques et leurs multipèdes. — M. M. d'Ocagne éludie la représentation par points alignés de l'équation d'ordre nomographique 3 la plus générale. — M. G. Koenigs présente ses recherches sur la courbure des courbes enveloppes dans le mouve- ment le plus général d'un corps solide dans l’espace. — M. P. Duhem démontre que, tant que la disconti- nuité est suffisamment petite, la vitesse de propagation de l'onde de choc rapportée au fluide en aval est plus grande que la vitesse du son dans le même fluide; le sens de l'inégalité doit ètre renversé pour le fluide en amont. — M, I. Lagarde corrige les éléments calculés par Encke pour l'éphéméride de la comète 14819 IV (Blanpain), ce qui augmente la possibilité de la capture de cet astre par Jupiter. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. D. Berthelot estime que, sil faut tenir grand compte des valeurs expérimentales des compressibilités des gaz déterminées par M. Guye et ses collaborateurs, le mode de calcul indirect de ces grandeurs qu'il a appelé réduction des constantes cri- tiques doit être abandonné. — M. H. Morel Kahn a observé que les carbures de baryum et de strontium dissolvent le carbone à peu près dans la même propor- tion que le carbure de calcium. — M. V. Auger a pré- paré du métaphosphate cuivreux par action de l'acide métaphosphorique au rouge sombre sur un excès de cuivre et précipitation dans le chlorure de méthyle. Il est très instable et se décompose assez vite en métal et sel cuivrique. — M. P. Carle montre l'influence nui- sible de la silice dans le dosage du fluor dans les eaux minérales et la nécessité de l'éliminer préalablement. — M. E. Chablay propose une nouvelle méthode de dosage des halogènes dans les composés organiques par chauffage avec les métaux-ammoniums en tube ouvert; la méthode est simple et exacte. — M, Alb. Colson poursuit ses recherches sur les sulfates chromiques condensés. — MM. Amé Pictet et Eug. Khotinsky, en dissolvant à froid l'anhydride azotique dans l’an- hydride acétique et distillant sous pression réduite, ont obtenu l’azotate d'acétyle, CH*CO?A70?, qui se com- porte, vis-à-vis des substances aromatiques, comme un agent nitrant d’une grande puissance. — M. A. Wahl, en faisant passer un courant d'anhydride nitreux sur le benzoyl-acétate d'éthyle, a obtenu le benzoylglyoxylate d'éthyle, Eb. 150°-153° sous 43 mm. — M. E. Léger a préparé un certain nombre de déri- vés de l'hordénine : tartrates neutre et acide, chloro- méthylate, benzoylhordénine, etc. 3°- SCIENCES NATURELLES. — M. A. Chauveau montre que l'utilisation (digestion, absorption, assimilation) des aliments dans l'organisme entraîne une surconsomma- tion d'oxygène, indicative d'un accroissement de la dépense énergétique de l'économie animale, accroisse- ment faible avec les hydrates de carbone, plus accentué avec les graisses et très marqué avec les albuminoïdes. — M. A. Guébhard montre que les phénomènes de ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES vision verte décrits par M. Fortin s'expliquent par un soustraction du-rouge opérée par l'œil : celui-ci, lai sant passer presque librement le spectre du sang q l'irrigue, est mis, par rapport au rouge, dans un étaf d'anesthésie régressive ou de fatigue. —— MM. A. Char rin el Goupil ont reconnu que les extraits musculaires sont beaucoup plus riches en produits toxiques qu'on ne je croyait. — MM. M. de Rothschild et H. Net ville décrivent deux nouvelles espèces d'Antilopes dé l'Afrique centrale : le Cephalophus centralis et 6 Cephalophus æquatorialis Bakeri. — M. R. Anthony montre que l’'Hemibradypus Mareyi constitue l'annean qui manquait dans la chaine qui relie l'Hapalops aux Paresseux d'aujourd'hui. — MM. W. Lubimenko €! A. Maige ont constaté qu'à aucun stade de développe ment du pollen du Nymphea alba et du Nuphar luteur il ne se produit, dans les noyaux reproducteurs, dé réduction quantitative absolue de la masse chroman tique. — M. A. Lacroix a étudié la constitution miné ralogique des roches qui constituent le dôme récenf de la Montagne Pelée : à la base, elles sont faiblement microlitiques et pauvres en tridymite, non quartzi fères; au sommet, on trouve le type le plus cristallin riche en trydimite et quartzifère. Séance du 4 Février 19057. L'Académie procède à l'élection d’un Académicien libre ; le prince Roland Bonaparte est élu. — M. Ber thelot annonce à l'Académie le décès de M. D. J. Men déléeff. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Z. de Geôeze pré sente ses recherches sur la quadrature des surfaces courbes. — MM. P. Tsoucalas et J. Vlahavas dé montrent que la force ascensionnelle de l’aéroplané est la moitié de celle de l'hélicoptère pour la mêmé dépense et la même hélice; en plus, l'hélicoptère n°4 pas besoin de plans sustentateurs. — M. J. Baïllaud a trouvé, sur les clichés de la carte du ciel, l'image d@& nouvelles étoiles variables à variations lumineuses très rapides ; l'une, en particulier, subit en trente minutes une augmentation d'éclat d'au moins une grandeur ef demie. — MM. H. Deslandres ef L. d'Azambuja expo sent les recherches poursuivies à Meudon, en 4906, s les parties peu connues de l'atmosphère solaire, en particulier les vapeurs productrices des raies spectrales noires et les amas de particules décelés par un spectré continu. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. G. Bigourdan montre qu'une dépression barométrique importante a suiy l'augmentation de l'émission de grisou qui a été la cause des explosions de Lens et de Sarrebruck le 28 janvier. — M. J. Amar déduit de ses recherches que la réfraction d'un gaz composé est la somme des réfractions des atomes qui entrent dans la molécule, MM. G. A. Hemsalech et C. Tissot ont employé un transformateur à circuit magnétique ouvert traversé p un courant alternatif en régime de résonance po obtenir de fortes étincelles électriques. — M. L. Mal clès montre que la paraffine anglaise du commerce; fusible vers 72°, présente une stabilité diélectriqué parfaite, c'est-à-dire n'indique ni surcharge, ni résidus Les diélectriques solides, tels que le verre, l'ébonite, le mica, présentent encore une surcharge et un résidu — M. J. de Kowalski présente une nouvelle théorie de la phosphorescence et de la fluorescence, basée S la présence, dans les corps doués de ces propriétés, de systèmes corpusculaires électronogènes, expulsant dés électrons sous l'influence d’une énergie extérieure, @b luminophores, qui deviennent lumineux après avoil ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 171 absorbé une quantité d'électrons relativement petite. M. D. Berthelot a calculé les poids moléculaires de divers gaz (H°,Az°,C0,CO*,Az°0,HCI,AzH*,SO?) par la mé- thode des densités-limites. Il trouve des résultats assez concordants avec ceux des autres expérimentateurs, sauf pour Az0* et AzH*. — M. P. Freundler à préparé Péther-oxyde de l'alcool ax-dichlorisopropylique, Eb. 1459-1460, et l’aldéhyde dibromacétique. — MM. L. Meunier et E. Desparmet, en faisant réagir l'amidure de sodium sur les dérivés polyhalogénés de carbures, ont constaté que chaque molécule d'amidure enlève une molécule d'acide halogénhydrique. D'autre part, Vamidure s'emploie dans beaucoup de cas comme substitut de l’éthylate de sodium pour l'obtention de dérivés sodés. — M. G. André à déterminé la compo- sition des sucs extraits des tiges et des feuilles de di- vers végétaux : la concentration est à peu près inva- riable, quelle que soit la pression. — MM. J. Auclair ét L. Paris ont constaté que le bacille de Koch ren- _ ferme 33,8 °/, de matières adipo-cireuses. L'acido-ré- sistance n’est pas fonction de ces seules matières, mais appartient en propre, à des degrés variés, à toutes les parties constituantes du bacille. à 30 SCIENCES NATURELLES. — M. A. Chauveau poursuit Lexposé de ses recherches démontrant la supériorité de la dépense énergétique attachée à l’assimilation des aliments albuminoides. — M. A. Laveran à (rouvé, chez des moutons provenant de Ségou et ramenés en France par M. Cazalbou, deux Trypanosomes, dont une æspèce voisine du 7». dimorphon, mais qui ne saurait lui être identifiée ; l'auteur la nomme Tr. Pecaudi. — Me M.Phisalix a fait l’'autopsie de l'éléphant d'Afrique Sahib, mort en six jours d’une affection aigué au Mu- séum le 29 janvier. Il a succombé à un coup de froid, Qui à provoqué chez lui une congestion pulmonaire intense, accompagnée d’une pleurésie aiguë double avec épanchement. — M. Ed. Chatton décrit l’Apodinium mycetoides, qu'il à observé attaché au tégument de Rritillaria pellucida. IH se rapproche des Péridiniens libres. — M. Ph. Glangeaud à étudié la chaine des Puys et a observé une dissymétrie des deux versants : le versant Ouest offre une pente assez douce, tandis que le versant Est se termine par un brusque escarpe ment. — M. A. Michel-Lévy poursuit l'élude des ter- rains paléozoïiques de la bordure orientale du Plateau central. Les schistes famenniens s'étendent notable- ment dans le sud-ouest du Morvan. — M. L. Bertrand a constaté que la direction normale armoricaine des plis hercyniens dans les Pyrénées est profondément troublée, dans la partie orientale de la chaîne, par des plis à direction varisque. — M. J. Boussac es- lime que les dépôts éocènes du massif armoricain et de la zone de Roncà doivent ètre attribués au Barto- nien inférieur. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 29 Janvier 1907. M. le Président annonce le décès de M. P. Budin, membre de l'Académie. M. A. d'Espine décrit sa méthode de diagnostic précoce de la tuberculose des ganglions bronchiques chez les enfants, qui repose sur l’auscultation de Ja voix. Les premiers signes de l’adénopathie bronchique consistent, en effet, dans un timbre surajouté à la voix, qu'on peut appeler chuchotement dans le premier Stade et bronchophonie dans un stade plus avancé. — M. Brunon communique les résultats du traitement hygiénique, à l'hôpital, de cent cas de tuberculose pul- Mmonaire infantile au cours d’une période de cinq ans. Ce traitement consiste dans la vie en plein air, une grande propreté des enfants et des salles, avec alimen- tation ordinaire. L'augmentation de poids s’est pro- duite rapidement et la guérison a été obtenue dans la plupart des cas: — M. le D' Le Clere lit un Mémoire sur le tremblement essentiel héréditaire. Séance du 5 Février 1907. M. E. Kirmisson signale un cas de myosite tuber- culeuse à foyers multiples chez un enfant de dix ans. — M. A. Netter entretient l’Académie de 120 cas d'accidents infectieux relevés en moins de quatre mois dans douze villes de France et qui ont ceci de com- mun : c'est qu'ils ont tous pour origine l'ingestion d'huîtres provenant de la même localité, Cette. Les cas les plus nombreux ont revêtu l'apparence de troubles gastro-intestinaux (diarrhée, colique, etc.), plus ou moins graves et plus ou moins persistants. Les cas de fièvre typhoïde nettement établie ont été au nombre de 33, avec une mortalité élevée : 7 décès, soit 21,1°/s. La cause de ces accidents doit être attribuée à la pol- lution des huitres, qui, à Cette, sont conservées dans des parcs placés dans des canaux qui reçoivent les égouts de toute l’agglomération, et, par ceux-ci, les déjections de ses habitants. On pourrait purifier les huitres en les plaçant, avant de les livrer à la consom- mation, pendant une huitaine de jours dans de l'eau de mer pure et renouvelée, où elles se débarrasseraient de leurs bacilles. M. J. Chatin insiste sur l'efficacité de cette dernière mesure, qui active considérablement la phagocytose chez l'huître et lui permet d'éliminer les souillures dont elle est chargée. — M. N. Gréhant a simplifié les procédés d'analyse des gaz combustibles tels que le formène et l’oxyde de carbone, ce qui permettrait de faire ces analyses jour et nuit dans les exploitations de houille. — M. Armagnac donne lec- ture d’un travail sur une échelle optométrique polyop- totypique. Séance du 12 Février 1907. M. le Président annonce le décès de M. G. Darem- berg, Correspondant national. M. P. Berger présente un Rapport sur un travail de MM. Rochard et de Champtassin sur le traitement des atrophies musculaires consécutives aux épanche- ments articulaires, en particulier à l'hydarthrose. Ils remplacent l'immobilisation jointe à la compression de l'articulation en cause {procédé généralement usité) par des exercices d'entraînement basés sur le principe des résistances calculées et progressives. Les résultats sont, en général, satisfaisants. — M. Fernet présente le Rapport de la Commission de revision de la nomen- clature des maladies. Cette Commission propose de diviser les maladies en cinq classes : 1° maladies cau- sées par des agents physiques ou physinoses ; 2° ma- ladies causées par des agents chimiques ou chimi- noses ; 3° maladies causées par des agents animés ou b'onoses ; 4° maladies causées par des agents moraux ou intellectuels ou psychonoses ; 5° maladies causées par des agents de nutrition ou trophonoses. Chacune de ces classes se divise en un certain nombre de genres : on a alors une série d’affections génériques suivant la nature des agents qui les ont déterminées. Les manifestations locales des maladies causées par ces agents seront désignées par le nom de l'organe suivi du terme pathie : encéphalopathie, gastropa- thie, ete, en les accompagnant d’un mot qui désigne la cause : tuberculeuse, syphilitique, ete. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 2 Février 1907. M. L. Capitan recommande l'emploi du collargol en injections intramusculaires qui donne de bons résultats quand tout autre mode d'administration est impossible. — M. H. Iscovesco a trouvé, dans le liquide céphalo- rachidien normal, une matière albuminoïde électro- négative ayant les propriétés d’une globuline et un autre colloïde, soluble, électro-négatif. — MM. H. Isco- vesco et A. Matza montrent que la pénétration d’un sel dans l'organisme par le courant électrique, quand elle peut se faire, ne consiste qu'en un échange, avec | l'organisme, de cathions et d'anions. — MM. H. Labb* et G. Vitry onl conslaté que, dans l'ictère par réten- tion, où la bile cesse de passer dans l'intestin et appa- raît dans l'urine, la moyenne des sulfo-éthers urinaires éliminés augmente considérablement. — M. Ed. Ret- terer signale, d'après une communication du D° Ap- pellof, que, dans les mers du Nord, où la marée est faible, il n’y à pas de périodicité régulière dans l’épa- nouissement ou le retrait des tentacules des Actinies. — M. M. Nicloux montre que la substance oxydée par le bichromate contenue dans le sang et les tissus d’un animal anesthésié par l’éther est de l’éther seul. L’éther ne se transforme pas en alcool éthylique dans l’orga- nisme. — M. Speroni considère la cellule épithélioide comme la première manifestation de la dégénérescence du tubercule. — M. E. Maurel montre que l'activité et l'alimentation sont les deux principaux facteurs de la fixation de la marche nychthémérale de la température ; ils peuvent, chacun à leur tour, acquérir la prépondé- rance suivant les espèces animales et les conditions dans lesquelles elles vivent. — M. C1. Regaud signale deux cas de néoplasmes malins chez le rat coexistant avec une helminthiase extra-intestinale. — M. A. Ca- vasse décrit quelques nouveaux caractères du microbe qu'il a découvert en 1904 dans les crachats de la coque- luche. — M. R. Dubois signale un phénomène de simili-conjugaison chez les formes obtenues par l'action du chlorure de baryum sur la gélatine. — M. Em. Gé- raudel montre que le foie de l’homme est un foie monolobulé, tandis que le foie du porc est un foie multilobulé, — MM. CI. Gautier et Ch. Hervieux ont observé qu'après extirpation du foie la presque totalité de l'indol administré aux grenouilles n’est plus trans- formée en chromogène indoxylique. — M. M. Weinberg a reconnu que les larves d'Helminthes, en traversant la muqueuse intestinale, sont, pour la plupart, dépouillées des microbes qu'elles portent à leur sur- face ; toutefois, certaines larves réussissent à introduire les microbes dans le courant circulatoire et même dans la sous-muqueuse. — MM. R. Lépine et Boulud montrent que le collargol augmente d’une manière du- rable le pouvoir cytolytique du sang. — MM. Chiray et Sartory ont constaté la présence constante de l'£ndo- imnyces albicans, parasite du muguet, dans l'intestin des enfants qui ne sont pas nourris au sein. M. G. Bohn est élu membre titulaire de la Société. Séance du 9 Février 1907. M. G. Bohn montre l'impossibilité d'étudier avec une précision mathématique les oscillations de l'état phy- siologique chez les animaux littoraux.— M.N.H.Svwel- lengrebel présente ses recherches sur le Spirillum giganteum el le Spirochaeta Balbranii. — M. H. Piéron a étudié l'adaptation à la recherche du nid chez les fourmis ; il y à reconnu trois types: un visuel, un ol- factif etun musculaire. Le premier permet l'orientation aux plus grandes distances, le dernier aux plus faibles. — M. E. L. Backmann à constaté que le lactate de soude provoque, chez le cœur isolé et survivant des Mammifères, une diminution brusque et violente de l'amplitude des contractions, remplacée ensuite par une très lente augmentation. — MM. R. Dubois et E. Couvreur ont répété sur le Pieris brassicae les expériences de Me von Linden, qui aurait observé une décomposition de CO? par les chrysalides avec fixation de C. Six séries d'expériences n'ont donné que des résultats négatifs. — M. E. Maurel estime que la lumière joue, après l'alimentation et l'activité, une certaine influence sur la marche nychthémérale de la température normale. — M. H. Stassano présente un nécessaire clinique pour la pratique du séro-diagnostic; on utilise directement le sang du malade, au lieu du sérum, et on le fait agir sur des émulsions de bacilles tués. — M. Ch. Fouquet a observé une forme recti- ligne du Spirochaete pallidum, qui lui parait repré- senter un stade plus avancé du parasite, presque spé- cial aux lésions tertiaires. — M.M. Kollmannareconnu que les cellules sanguines des Scorpionides et des Ara- ACADËMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES néides renferment des granulations à caractères chr matiques ambigus et qu'on ne peut classer nettemen dans aucune des catégories d'Ehrlich.— MM. A. Frouir et P. Thomas ont constaté que les glucosides ne son pas dédoublés par le suc intestinal frais, mais bien pa celui qui est resté en contact avec les cellules quil renferme. — M. A. Marie, par des injections pa riennes très virulentes et rapprochées, a obtenu ur sérum antirabique doué de fortes propriétés neutre lisantes pour le virus rabique. — MM. A. Charrin # Monier-Vinard montrent que la ligature des branches de l'artère rmésentérique entraîne des modifications in testinales qui retentissent sur le développement, soi en troublant les fonctions physiologiques de la diges tion, soit en mettant en jeu l’auto-intoxication € parfois l'infection, soit en compromettant l'intégrité du foie. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 18 Janvier 1907. : La Société procède au renouvellement de son Bureau Sont élus : Vice-président : M. H. Deslandres; Secrétaire-général : M. H. Abraham; Vice-secrétaire : M. A. Dufour: Archiviste-trésorier : M. Pellin. Séance du 1° Février 1907. M. C. Tissot : Réalisation de la syntonie par l'em ploi des detecteurs bolométriques. Le problème de ls syntonie dans la télégraphie sans fil est tout à f semblable à celui qu'a résolu M. Mercadier pour Ja télégraphie avec fil; il s’agit de permettre à plusie groupes de correspondants d'échanger des dépèches par l'intermédiaire du même milieu de transmission sans pour cela se gêner réciproquement. La solution donnée par M. Poulsen au moyen de l'arc chantant est d’un maniement difficile et se prête mal à l’obten tion de grandes amplitudes. M. Tissot obtient une syntonie très suffisante par un procédé dont l'appli tion ne présente aucune difficulté. Des expériences préalables ont montré que l'antenne à excitation directe donne des vibrations trop amorties pour donner lieu à une résonance franche. Le montage par indue tion est beaucoup meilleur ; une variation de fréquence de 0,1 suffit alors pour faire descendre de 100 à 5 l'ame plitude reçue dans un détecteur convenable. Ce détee teur ne saurait être un cohéreur, lequel n’est sensible qu'à l'amplitude. Un détecteur intégrateur devient nécessaire et, en l'excitant par un circuit accordé, le bolomètre convient pour cet emploi : pour un temps suffisamment court (0 sec. O1 par exemple), sa dépers dition est négligeable et il accumule pendant ce temps la chaleur produite par plusieurs milliers d’éndes. Ce récepteur a, il est vrai, le défaut d'être peu sensibles M. Tissot lui a fait subir une modification extrême ment ingénieuse, qui en fait en même temps un ins trument aussi pratique qu'on peut le désirer : il fail passer dans les branches du pont un courant alternatih et remplace le galvanomètre ordinaire par un télé phone qui est beaucoup plus sensible et d’un usage particulièrement facile, surtout à bord. Les indications deviennent en même temps plus rapides. Une grosse difficulté restait à surmonter : il n'existe pas de moyer simple pour produire des ondes hertziennes entrete nues. M. Tissot a fait la juste remarque qu'on obtien drait les mêmes effets en envoyant par l'antenne une série de trains d'ondes très rapprochés, et à fréquence constante. Il suffit donc de produire les ondes par un appareil Tesla peu amorti, et de faire fonctionner ce Tesla un grand nombre de fois par seconde. L'emploi d'un interrupteur Wehnelt (1.000 interruptions, soit 1.000 trains par seconde) a donné de très bons résuË tats. Mais la puissance est limitée. Un arc chantant ordinaire, facile à manœuvrer, et dont le circuit vibrant agissat par induction sur le Tesla, a permis nm p. nf + ro —— ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES d'obtenir sans peine 3.500 {rains d'ondes par seconde, et la transmission à pu, dans ces conditions, se faire facilement jusqu'à 40 kilomètres. La solution du pro- blème est donc complète, car, si M. Tissot s’est arrèté “ans ses essais à une distance très modérée, c'est uni- quement parce que les moyens dont il disposait sur place l'obligeaient à produire le courant alternatif par un procédé en quelque sorte indirect. Mais il existe actuellement des alternateurs dont la fréquence s'élève à 500 périodes par seconde, et précisément M. Tissot se propose d'employer directement des machines de ce “enre pour actionner le producteur d'ondes propre- - ment dit. — M. V. Crémieu présente ses recherches sur la gravitation qu'il à déjà exposées ici mème‘. — M. O. de Faria : Transformateur électrolytique des courants alternatifs en courants redressés ondula- toires. L'extension prise par les distributions à cou- “rants alternatifs, par suite de la grande facihté avec laquelle ils peuvent être transformés et transmis à grande distance, à fait chercher des dispositifs per- mettant de les transformer en courants continus, ces derniers étant nécessaires à certaines applications pour lesquelles les courants alternatifs ne peuvent être utilisés directement. La caractéristique du transfor- mateur de Faria consiste en la circulation automa- tique de l’électrolyte et dans le choix du métal le plus convenable des électrodes : aluminium pur du com- merce, plomb antimonié et phosphate de soude comme -électrolyte. Grâce à cette circulation, la température ne peut plus dépasser certaines limites. Cette circula- tion n’est autre chose qu'un véritable courant de con- vection. La polarisation est complètement supprimée. Le rendement des transformateurs de Faria varie de 65 à T5 °/, en watts. Les principales applications sont la charge des accumulateurs, marche des bobines d'in- “duction sur les courants alternatifs, lampes à arc et aux vapeurs de mercure, moteurs, galvanoplastie; enfin, toutes les applications des courants continus sur les courants alternatifs. — M. G. Millochau : liecher- “ches sur la température effective du Soleil. Après avoir rapidement exposé les grandes lignes de l'histoire de l’actinométrie et rappelé la définition d'un corps noir ou radiateur intégral, l’auteur expose le principe du pyromètre Féry et décrit l'appareil qui à servi aux “mesures faites au mont Blanc sur la température effective du Soleil. MM. Féry et Millochau ont mesuré cette température au centre de l’image solaire à diverses altitudes, et à chaque poste d'observation à des hauteurs différentes du Soleil au-dessus de l'horizon, ainsi que la variation de cette température suivant un diamètre. Ils donnent les résultats suivants : 5.660 pour un radiateur intégral qui, substitué au Soleil, produirait le mème effet que le centre du disque solaire ; 6.130° pour le même radiateur entouré d'une atmosphère absorbante produisant les effets constatés. Le rayonnement calorifique du bord n'est que les #5 0/, du rayonnement au centre. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 25 Janvier 1907. M. P. Freundler entrelient la Société de ses recher- ches sur les propriétés des azoïques orthocarboxylés et sur leur transformation en dérivés C-oxy-indazyli- ques. Il discute également la constitution des azoïques et celle des dérivés benzéniques en général. — M. H. Guillemard expose les résultats qu'il a obtenus dans l'étude des conditions de stabilité des carbylamines. Ces corps s’unissant facilement, même à froid, aux iodures alcooliques, on ne pourra les obtenir, par l'alcoylation des cyanures, que s'ils s'isolent à l’état de combinaison avec le cyanure. D'autre part, ces combinaisons des cyanures et des carbylamines se dis- socient, sous l’action de la chaleur, en donnant nais- sance à un mélange de nitrile et de carbylamine, dans ER Re ? Voir la Revue du 15 janvier 1907. 173 lequel la proportion de nitrile augmente avec la tem- pérature; on n'obtiendra donc de carbylamine que si, dans les conditions où l’on opère, la combinaison de carbylamine et de cyanure est stable; dans tous les autres cas, on obtiendra soit le nitrile, soit un dérivé de la carbylamine, toujours impropre à la régénérer. Enfin, l’isomération des carbylamines, sous la seule action de la chaleur, est précédée d’une polymérisation, et le polymère, en se détruisant, donne naissance au nitrile. — Par l'action de l'éther orthoformique sur l'acétylène dibromo-magnésien, M. Ch. Moureu à ob- tenu le diacétal (C*H°0)?CH.C :C.CH(OC*H°}, qui fond vers 20° et distille à 1279-1275 sous 13 millimètres; d—0,9529; n° — 1,43276. Ce corps doit donner, par hydrolyse, la dialdéhyde acétylénique, encore in- connue, CHO.C :C.CHO. — M. Tiffeneau rappelle que la transformation des a-glycols aromatiques en aldéhydes ou cétones s'effectue avec migration phénylique chaque fois que le radical phényle se trouve au voisinage de l'oxhydrile le plus résistant. En collaboration avec M. Daufresne, il s'est proposé d'étudier l'action de SO'H® au 1/5 sur certains glycols aromatiques pour y examiner le rôle joué par le radical aryle. Dans ces conditions, le glycol dérivé de l'anéthol fournit, sans transposition, l’acétone anisique et non, comme l’a publié Balbiano, l'aldéhyde p-méthoxyhydrocinnami- que. Le glycol correspondant à l’estragol n'a pas encore pu être préparé. La saponification du dibromure d'estra- gol (6b. 188-1929 sous 18 millimètres), soit par CO'K*, soit par l’acétate de K suivi de KOH alcoolique, conduit à un résultat inattendu. Au lieu du glycol, on obtient le z-méthoxyphényleyelopropanol : _CHOH CIFO.C‘H".CH2/ | CH° fusible à 79°; c'est le premier exemple d’un alcool tri- méthylénique; son acétate bout à 164-165° sous 13 mil- limètres ; do— 1,123. Hydrolysé par SO“H? au 1/5, cet alcool fixe H°0 en donnant l'aldéhyde paraméthoxyhy- dratropique CH*O.C°H*.CH(CH*).CHO. — MM. Tiffeneau et Daufresne ont alors songé à préparer le cyclopro- panol. Par action de Na sur une solution éthérée d'acétate de dichlorhydrine symétrique, ils ont obtenu un éther acétique différent de lacétate d’allyle, obtenu par Bigot (6b. 111-1439, do — 1,048) ; il ne fixe le brome que lentement. Ces recherches sont poursuivies. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 1% Novembre 1906 (fn). M. G. Reid: Lag nitrilication des eaux d'égouts. L'auteur présente certaines observations récentes qui l'amènent à conclure qu'en employant des particules filtrantes à grain fin on pourrait réduire considérable- ment l'épaisseur des filtres à percolation. Un filtre com- posé d'une substance d'une dimension de 3 millimètres, en travail constant depuis trois ans, a été percé à quatre profondeurs différentes de facon à recueillir des échan- üillons de liquide montrant le degré de purification obtenu à des intervalles de 35 centimètres. Les résul- tats obtenus sont basés sur l'analyse d'échantillons nombreux recueillis pendant une période d'environ douze mois, le débit du filtre étant resté constamment d'environ 900 litres par yard de surface. En ce qui con- cerne la matière organique, en suspension ou en solu- tion dans l’effluent de la fosse septique alimentant le filtre, le travail de purification est effectué à une pro- fondeur de 35 centimètres à partir de la surface, ne laissant presque aucun travail aux couches plus pro- fondes. En ce qui concerne la matière charbonneuse, l'oxydation parait être également rapide. L'ammoniaque libre diminue constamment avec la profondeur jusqu'à un mètre; elle présente ensuite une légère augmenta- tion, qui peut être attribuée à un réveil des change- ments anaérobiques, résultat de l'effet asphyxiant des 174 produits de la combustion formés au-dessus. L’azote nitrique est à peu près constant aux diverses profon- deurs. — M. G. P. Mudge: Sur la coagulation intra- vasculaire chez les albinos et les animaux pigmentés. — M. E.F. Fritsch: La flore algologique sub-aérienne et d’eau douce à Ceylan. Séance du 30 Novembre 1906. Séance anniversaire annuelle. La Société procède au renouvellement de son bureau pour l’année 1907; il est ainsi constitué : Président : Lord Rayleigh ; Trésorier : M. A. B. Kempe; Secrétaires : M. J. Larmor elSir A. Geikie; Secrétaire pour l'Etranger : M. F. Darwin. Séance du 6 Décembre 1906. 5 M. P. A. Mac Mahon présente la suite de ses recher ches sur la théorie de la composition des nombres. — M. S. E. Sheppard et C. E. K. Mees: La lhéorie des processus photographiques. WI. L'image latente et sa destruction. Les auteurs considèrent que la « dévelop- pabilité » est causée par l'accélération de réduction due au traitement préliminaire. La réaction chimique essentielle dans le développement est: Ag LR Ag |mét| +R, qui aboutit normalement à un état d'équilibre. Si, dans cet état, on introduit une cause tendant à abaisser la limite métastable de la solution argentique, alors l'halogénure devient développable. Les substances suivantes peuvent agir comme germes pour une plaque sèche: l'argent, introduit à l’état d'argent colloïdal, puis converti à l’état métallique, l'or, le platine, le sulfure d'argent, les ions gazeux des flammes. Tous les résultats des auteurs tendent à montrer que la condition nécessaire et suffisante pour la « développabilité » est la production d’une nouvelle substance dans le grain d'halogénure d'argent. D'autre part, l'image primaire formée par le développement de l’image latente est intensiliée par l'argent trans- porté des autres parties de la pellicule. Ensuite, les auteurs étudient une action particulière des sels de cuivre, fer, mercure et uranium, qui désensibilisent la plaque, de sorte que d'énormes expositions sont néces- saires pour produire des résultats normaux; l’explica- tion de ce fait serait que ces corps agissent comme catalysateurs de la réaction d'oxydation, qui estopposée à l’action de réduction ordinaire de la lumière. Enfin, les auteurs considèrent la formation de l'image latente comme en relation avec l'effet photoélectrique, et comme due à la libération d'électrons qui ionisent l'ha- logénure et le gaz environnant.— M. H.H. Dixon pré- sente ses recherches sur le courant de transpiration dans les plantes. La théorie qui attribue l'élévation de l'eau dans les arbres pendant la transpiration à la traction transmise vers le bas de la colonne d'eau. a éte fortement critiquée. On a prétendu que la résis- tance offerte au couraht de transpiration par les canaux des arbres est si grande que les forces engen- drées dans les feuilles sont incapables de soulever l’eau et que, même si elles suffisaient, de l’eau contenant de l'air ne pourrait pas transmettre les tensions invoquées: L'auteur montre que les avocats de ces idées se sont basés : d’une part, sur une estimatfon exagérée de la vitesse du courant de transpiration, d'autre part, et surtout, sur une évaluation excessive de la résistance du bois au flux de l’eau. Ses nombreuses observations sur ces deux points ne laissent aucun doute à ce sujet, et l'auteur en conclut que la théorie de la cohésion est absolument d'accord avec les faits. Séance du 13 Décembre 1906. M. A. Mallock: La relation entre la tension de rupture et lélongation dans les essais d'aciers à la traction. Si l'on nomme « tension de rupture » d’une pièce d'acier la tension maximum appliquée divisée par la section de la pièce, et « élongation » l'augmen- ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES D? tation de longueur pour cent due à la déformation entre deux marques faites sur la pièce, on constat ue la somme arithmétique « tension de ruptur RUES pour cent » reste constante et égale environ 67 ou 68 pour tous les aciers doux qui non au commencement de l'essai, aucune déformation mé canique interne, quel que soit d'ailleurs le traitemé (trempe ou recuit) auquel ils ont été soumis. Ce ph nomène ne peut s'expliquer qu'en admettant quel résistance intrinsèque de tous les aciers ordinaires une quantité constante et égale à environ 70 tonn par pouce carré, et qui ne peut être altérée par traitement thermique et même, dans une certaine me sure, par la composition chimique. — M. J. E. Coates a soumis à un nouvel examen /4 portion la plus légè de l'air atmosphérique. 1] a constaté qu'il n'exis aucune ligne inconnue dans le spectre de cette portion toutes les lignes observées étant attribuables-à M lium, au néon et à l'hydrogène. La quantité d’hyd gène séparable de l'air est beaucoup moindre quenlé maximum qui lui a été ssigné par de précédents observateurs : A. Gautier, Rayleigh et Dewar; elle s'élève tout au plus à 4 volume pour 4 million et dem de volumes d’air. ; SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 17 Janvier 1907. M. A. W. Stewart a examiné les spectres d’absorp= tion de certains acides saturés et non saturés et les comparés avec les pouvoirs rotatoires de leurs éthe amyliques. On observe une relation étroite entre deux propriétés : les substances ayant l'absorption générale la plus forte ont aussi la plus grande rotation moléculaire. — M. F.S. Kipping a préparé le d/-ben= zyléthylpropylsilicol(CTH7)(C?H°) (C$H*) Si OH, qui don: avec l'acide sulfurique un mélange d'acides sulfoniqu: dont l’un, {(SO*H.C*H°) (C245)(CSH7 Sil O, a été isolé; par cristallisation fractionnée de son sel de d-méthylhy drindamine, on le dédouble en ses deux isomères actifs. — MM. J. T. Hewitt et T. F. Winmill, par la détermination de l'énergie superficielle, montrent que l'association des phénols est diminuée ou entière: ment empêchée par la présence de substituants en ortho. — M. J.T. Hewitt, en faisant diffuser l’une dans l’autre des solutions de NaOH et de HgCI® dans NaCl travers d’une solution de NaCl de densité intermédiai a obtenu des cristaux rouge sombre d’un nouvel oxy chlorure mercurique Hg°0°CF. — MM. H. D. Law et F. M. Perkin ont trouvé que la meilleure méthode pour préparer le dichlorure de chromyle est de dis soudrg l'acide chromique dans un peu plus de son. équivalent de HCI concentré et d'ajouter par petites. portions de l'acide sulfurique concentré en refroidis sant chaque fois; après vingt minutes, la couche infé rieure lourde de dichlorure de chromyle est soutirée. — Les mêmes auteurs ont étudié les produits d’oxy- dation des hydrocarbures aromatiques (toluène, lènes, mésitylène, Ÿ-cumène et cymène) par divers oxydants : peroxyde de plomb, de manganèse, dichlo- rure de chromyle, persulfates. Dans tous les cas, on obtient des quantités variables de monoaldéhydes. MM. S. Smiles et Th. P. Hilditch, en chauffant les anisols ou les phénétols au bain-marie avec SeO* eb AICF, ont obtenu les chlorures de selenonium corres- pondants, donnant des hydroxydes fortement basiques par traitement avec Ag*0. — M. A. G. Green apporte, de nouveaux faits en faveur de la structure quinonoïde des sels colorés des phtaléines. — MM. A. Th. de Mouil- pied et Al. Rule, en condensant l'éthylate de soude avec l’oxamate d’éthyle ou l’oxalate d’éthyle avec l’oxa mide, ont obtenu la tétracétopipérazine; le succina= mate de méthyle donne la succinimide par une réaction similaire. — Mile A. E. Smith et M. K. J. P. Orton, par l'action de l'acide sulfurique sur le2:4:6-tribromo-1= nitroaminobenzène, ont obtenu, soit la2:6-dibromo- nitroaniline, soit la s-tribromophénylimino-dibromo= ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 175. benzoquinone. — MM. Th. C. Beck et W. J. Pope ont résolu la trétrahydro-p-toluquinaldine en ses consti- fuants optiquement actifs par l'acide d-a$-bromocam- Dhresulfonique ; le sel de la base droite donne [M = + %45° en solution aqueuse. — MM. W. Barlow et W. J. Pope répondent aux critiques adressées par M. Chap- Man à leur théorie de la valence.— M.F.N.A.Fleisch- mann, en condensant la lactone triacétique avec J'éther acéto-acétique en présence d'acides forts, à obtenu la pyrone-lactone, C‘H$O“,F.21#°. La même lactone donne avec l'éther f-aminocrotonique aussi la “pyrone-lactone et un produit qui s’hydrolyse en ?-luti- dostyrilcarboxylate d'éthyle. — MM. W. Caldwell et ét E. A. Werner ont constaté que le dichlorure de p-iodoacétophénone se décompose soudainement à 930..94° en donnant de la chloro-p-iodoacétophénone, “Ki. 126-1270. Le dichlorure de p-iodoacétanilide se dé- “compose à 105° en fournissant la chloro-p-iodoacéta- nilide, F.144°. Dans le groupe du toluène, on observe des décompositions analogues. — M. J. Mc Connan à “observé que, dans des conditions favorables, l'O-salicyl- Salicylamide se réarrange en formant la disalicylamide, et vice versa. — MM. J. Me Connan et M. E. Marples ont constaté que l'Az-méthyl-Az-benzoylsalicylamide est instable; dans les cas où elle devrait se former, elle est instantanément hydrolysée ou se réarrange en Az-méthyl-0-benzoylsalicylamide. — MM. £. Barrett ét A. Lapworth ont déterminé la vitesse de réaction ‘du brome avec quelques acides non saturés en solution “iqueuse. Les résultats ne sont pas d'accord avec l'hy- “pothèse que le brome se dissocie en ions avant son addition à une double liaison ; ils montrent plutot que les ions des acides, aussi bien que les acides eux- ïêmes, s'unissent directement avec le brome. “AM. A. H. Dunstan et F.B. Thole critiquent les vues “le Holmes sur la complexité moléculaire des liquides. Pour les liquides monomoléculaires, le rapport de la viscosité au volume moléculaire est à peu près cons- tant; quand ce rapport augmente, il y à association, “ét c’est le cas pour la plupart des corps hydroxylés. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 26 Janvier 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. G. van de Sande Bakhuyzen présente un> communication provisoire “Sur : La réfraction astronomique d'après une distribu- tion atmosphérique de la température déduite à l'aide ‘ascensions en ballon. Les diverses théories sur la réfraction de la lumière des corps célestes dans l'atmo- Sphère terrestre reposent sur l'hypothèse que les Tagceau |. — Différences des réfractions obtenues par les méthodes d’Ivory et de Bakhuyzen. DIS- TANCE zënithale MOYENNE HIVER AUTOMNE annuelle 850 + 0/21 860 + 0,13 870 — 0,47 880 — 3,93 88030! | — 9,64 89° —23,69 89020! | —43,80 89040! | —121/07 90° —2132,4 —2,9,6 couches d'air d'égale densité sont comprises entre des Surfaces sphériques concentriques et que leur tempé- rature dépend d’une manière déterminée de la hauteur. Ge rapport théorique entre la température et la hauteur à été choisi de manière que : 1° les déviations entre les valeurs essentielles et théoriques de la température à une hauteur donnée soient aussi petites que pos- sible: 2° la différentielle de la réfraction dans une couche infiniment mince admette une intégrale. Ici l’auteur s'occupe de la première condition; à cette fin, il se sert des observations aéronautiques entre 1900 et 1903 qu'il emprunte à trois publications (« Ergebnisse der Arbeiten am aëronautischen Observatorium Tegel », « Travaux de la Station franco-scandinave de sondages aériens à Halde, par M. Teisserenc de Bort », « Verüf- fentlichungen der internationalen Kommission für wissenschaftlichen Luftschifffahrt »). Les résultats principaux sont déposés dans le tableau I, où les se- condes indiquent les différences entre les réfractions d'après la théorie de Ivory et la théorie de l’auteur. — M. P.H.Schoute : Sur le lieu des points de rebrous- sement d'un systèmé linéaire triplement infini de cubiques planes à six points de base. Dans la représen- tation connue de la surface cubique sur un plan, les sections planes de la surface correspondent à des cubiques passant par six points, tandis que la courbe parabolique p*? de la surface correspond point par point au lieu des points de rebroussement 1% du système de cubiques. À l’aide de cette correspondance, l'auteur trouve que :-« Le lieu r'?, qui consiste en dix traits en forme d'’ovale, admet six points quadruples d'un caractère particulier, les six points de base A; du sys- tème de cubiques; chacun de ces points quadruples se compose de deux points de rebroussement, dont les tangentes coïncident avec celles des deux cubiques du système admettant un point de rebroussement en ce point de base, mais dont les pointes aiguës sont dirigées en sens opposé ». Le cas où les six points A; consistent dans les cinq sommets d'un pentagone régulier et son centre, correspondant à la surface diagonale de Clebsch : l'équation p— 366 Æ 206% — 159! — 3012 + 2P(1 — 36° — 3pt + pt) + 4P4A2L 0?) —0, où p°— x + y° et P—x — 10x%y° L5xyt, de r'? dans ce cas, déduite à l’aide de considérations géométriques simples; vérification de ce que la courbe n'admet comme points réels que six points quadruples isolés et dix points doubles isolés (les dix ‘ovales réduits à des points). Considéra- tion de plusieurs autres cas particuliers : 1° Les six points de base sont les trois couples de sommets opposés d'un quadrilatère complet (surface cubique à quatre nœuds; le lieu r'?se compose des quatre côtés du quadrilatère comptés trois fois); 2° les six points de base sont les sommets d’un ‘hexagone régulier (cas spécial d'une surface cubique à un seul nœud, projetée centralement de ce point comme centre: le lieu r® se compose du cercle circonscrit compté trois fois et d’une rosace à six feuilles, représentant avec le cercle six des dix ovales, les quatre autres s'étant réduits à des points, ete.). — Ensuite M. Schoute présente, au nom de M. F. Schuh : Sur le lieu des couples de points communs de n +1 faisceaux de variétés Vn_1 à n—1 dimensions dans l'espace E, à n dimensions. L'ordre du lieu cherché est où r; représente l’ordre des variétés du faisceau (V{?_;) et a; le nombre des points d'intersection libres de » variétés quelconques des 2 autres faisceaux; ce lieu passe a; — 1 fois par la base V_, du faisceau (V}_;). 20 SœENcEs Paysiques. — M. H. Kamerlingh Onnes présente, au nom de M. W. H. Keesom : Contribu- tion à la connaissance de la surface Ÿ de Van der Waals. XL. Sur les conditions du coulage à fond et de la réascension de la phase gazeuse dans la phase fluide chez les mélanges binaires (suite). Conditions pour l'existence de points de plissement barotropiques dans le cas de mélanges pour lesquels M,—2M,, vu, —81x. — M. H. Kamerlingh Onnes, aussi au 156 nom de Mie T. C. Jolles : Contribution à la connais- sance de la surface % de Van der Waals. XIV. Déduc- tion graphique des résultats des expériences de M. Kuenen sur des mélanges d’éthane et d’oxydule d'azote. 1. Introduction. 2. Bases du calcul. Loi des états correspondants. Equation d'état réduite. 3. Gran- deurs critiques pour les mélanges. 4. Construction des surfaces Ÿ. 5. Détermination des phases coexistantes. 6. Autres détails des modèles et des planches. 7. Com- paraison de la construction avec l'observation. — M. H. Kamerlingh Onnes, aussi au nom de M. C. Braak : La mesure de températures très basses. XIV. Réduction des indications du thermomètre à hydro- gène à volume constant à l'échelle absolue. 1. Intro- duction. 2. Réduction à l'échelle absolue 3. Précision des - corrections. #. Comparaison des résultats avec ceux déduits théoriquement. 5. Formule de réduc- tion. XV. Influence de la déviation de la loi de Boyle- Charles sur la température, mesurée à l’aide d'un thermomètre à gaz à volume constant d'après les observations faites avec cet appareil. — M. K. A. H. Schreinemakers : Sur un système de quatre compo- santes à deux phases fluides. Etude du système quater- naire : eau, alcool éthylique, sulfate de lithium et sulfate d'ammonium. Représentation de ce système dans l’espace à l’aide d'un tétraèdre régulier. A la tempéra- ture de 30° correspondent 18 états d'équilibre. — M. A. P. N. Franchimont : Contribution à la con- naissance de Paction de l'acide nitrique réel sur les composés hétérocyeliques. — M. H. A. Lorentz présente au nom de M. J. H. Meerburg : Sur le mouvement d'un fil métallique à travers la glace. Résultats des mesures faites par l’auteur avec l'intention de vérifier les formules de M. Ornstein (ÆRev. génér. des Sce., t. XVI, p. 304). L'auteur expérimente avec trois métaux différents : il se sert de fils d'acier, d'argent et d'un alliage de l'argent. IL fait connaître plusieurs causes de déviation entre la théorie et la réalité. — M. A.F. Holleman présente au nom de M. J. Boëseken : Sur les réactions catalytiques, par rapport à la trans- formation du phosphore ordinaire en phosphore rouge. — M. C. H. Wind, aussi au nom de MM. A. F. H. Dalhuizen et W. E. Ringer : Mesures de courants en Tagceau Il. — Direction et vitesse des courants dans la mer du Nord à diverses profondeurs. VALEURS DÉDUITES DE LA CAKTE| VALEURS OBSERVÉES HEURES vitesse — direction vitesse direction 00 0,5—0,3 0,9—0,6 N 147 0,6—0,4 N 189 0,3—0,2 N 221 N 266 0,3—=0,2 N 280 0,6—0,4 N 296 1,0—0,7 331 0,6—0,4 N 34 0,3—0,2 N 132E N 415 X-2— > St O7 de © À de O2 5 % 3 2 Il (] l 2 3 % 02 LCR CN EN LI LL LITE Ssssesssess un point de la mer du Nord à différentes profondeurs. Les différences entre les résultats des auteurs se rap- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES portant à des courants qui se manifestent à une pro- fondeur de 5 mètres et ceux déposés dans une carté publiée par l'Amirauté anglaise se rapportant à des courants de la surface de la mer sont assez considé rables, comme on le déduit sans peine du petit tablea IT, où les heures — 5, — 4, etc., sont des heures avan et les heures 1, 2, etc., des heures après le moment de la marée à Douvres et où la vitesse est comptée en lieues marines par heure. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. A. W. Hubrecht présente au nom de M. J. Boeke : Gastrulation éb formation du feuillet enveloppant de l'œuf des Téléos téens. — M. C. H. H. Spronck présente au nom de M. P. Nieuwenhuyse : Sur la cause de l'anthracose des poumons. Comme on le sait, MM. Behring et Cal mette combattent la doctrine d'après laquelle l’origine de la tuberculose de l’homme doit être cherchée dan$ linhalation ou l'aspiration de bacilles tuberculeux ; au contraire, ils croient que le « tractus intestinalis » forme la porte d'entrée du bacille. A l’occasion de cette hypothèse nouvelle, MM. Vansteenberghe et Grisez ont expérimenté sur l’origine de l’anthracose des poumons vers la fin de 1905 dans le laboratoire de M. Calmette. Ils mêlaient de la suie, de l'encre de Chine ou di carmin à la nourriture d'un Cavia adulte et l'obligèrent: à en avaler de grandes quantités; déjà après vingt quatre heures, ils trouvèrent dans les poumons dem l'animal de grandes taches noires ou rouges, surtoul dans les lobes supérieurs et le long du bord des lobes inférieurs. Ainsi ils conclurent que les particules avaient fait le chemin de l'intestin vers le sang em suivant le courant de la lymphe à travers les ganglion mésentériques et qu'elles s'étaient déposées dans leS poumons. De la même manière, la poussière suspenduë& dans l'air serait avalée au lieu d’être inhalée, et atteindrait les poumons après avoir passé par l'intestin: En réalité, cette théorie nouvelle a été développée pal Villaret en 1862, mais elle n'avait pas eu de succès; puis les expériences consciencieuses de M. Arnold (1885) sur l'inhalation des poussières l'avaient faib tomber en oubli. Pendant que l'auteur s'occupait de répéter les expériences de MM: Vansteenberghe eb Grisez, plusieurs Mémoires se rapportant au même sujet ont paru. Mais ces publications récentes son# bien loin d'avoir élucidé la question : l'hypothèse nouvelle est soutenue encore par MM. Vansteenberghe;, Grisez, Sonneville, Petit, Hermann, Behring et Cal mette, tandis que MM. Aschoff, Mironesco, Schulze, Spronck, Cohn, Remlinger, Basset, Küss, Lobstein ef Beitzke la combattent. Ici M. Nieuwenhuyse fait con naître les résultats de 35 expériences où il a tent compte de l’âge des animaux et du temps écoulé entre l'introduction des particules et l’autopsie: d’après lui aussi, l'anthracose des poumons n’est pas causée par l'infusion de particules par la voie de l'intestin. Rapport de MM. T. Place et C. Winkler sur une étude de M. J. W. Langelaan : « On congenital ataxia in & cat » (Sur une ataxie congénitale d'un chat). L'étude va paraître dans les Mémoires de l’Académie. — Rappork annuel de la Commission géologique : M. C. Lely, pré sident, M. J. M. van Bemmelen, secrétaire. P. H. Scxoure. L Le Directeur-Gérant : Louis OLivier. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 18° ANNÉE N°95 15 MARS 1907 Revue générale des Scien pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Marcel Bertrand, Henri Moissan. — La Science française vient d’être douloureusement frappée en la personne de deux de ses plus illustres représen- tants, Marcel Bertrand et Henri Moissan, décédés à quelques jours de distance vers la fin du mois dernier. La Aevue, qu'ils honorèrent à plusieurs reprises de leur collaboration, s'associe au deuil de leur famille et de leurs amis ; elle consacrera prochainement une notice détaillée à! leur œuvre, qui a fait époque dans lés domaines respectifs de la Géologie et de la Chimie minérale. Louis-Émile Javal. — Louis-Emile Javal naquit le 5 mai 1839, à Paris, où son père, Léopold Javal, ori- ginaire de Mulhouse, s'était fixé dès l’âge de vingt ans après avoir séjourné en Angleterre. Banquier, homme politique de marque, fondateur et constructeur de che- mins de fer, industriel, agriculteur et économiste dis- tingué, Léopold Javal rèva pour son fils aîné une carrière d'affaires, tandis qu'Emile Javal se sentit une vocation puissante pour les carrières scientifiques en général, la Médecine en particulier. Des aspirations opposées du père et du fils il résulta un compromis: Javal fut destiné à l'Ecole Polytechnique, à laquelle son père avait aspiré dans sa jeunesse. Cette résolution tardive fut bientôt entravée par une fièvre typhoïde, de telle sorte que la limite d'âge fut atteinte par Emile Javal avant qu'il eût rempli les formalités d'admission. Elève du lycée Bonaparte, de la génération de Sully- Prudhomme, de Sadi Carnot, avec lesquels il resta lié d'amitié inaltérable, il entra comme élève libre à PEcole des Mines et en sortit ingénieur civil des mines à l’âge de vingt-trois ans. Après avoir visité pendant une année les principales mines de l’Europe en com- pagnie de ses camarades de promotion, dont faisait partie Adolphe Carnot, il entra comme ingénieur civil des mines aux houillères de l'Hérault et des Bouches- du-Rhône, où l'appelaient de grands intérêts de famille. IL n'y resta qu'une année, L'attention de Javal avait été attirée de bonne heure Sur un des chapitres les plus intéressants de l'Ophtal- mologie, la loucherie. Son père était atteint de stra- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. bisme convergent. Opéré par Desmarres en 1846, il ne tarda pas à loucher en dehors d’une façon excessive, Cet accident, irrémédiable à l’époque, désola le malade et son entourage. Une sœur d'Emile Javal, de quinze ans plus jeune que lui, hérita de l'anomalie ocuwaire de son père. Ces circonstances furent décisives pour la carrière de Javal. Elles devinrent le point de départ de son œuvre ophtalmologique, qui est considérable et de premier ordre, car il sut revenir à des idées saines dans une question que l'intervention opératoire avait désespérément obscurcie. Attiré irrésistiblement vers l'étude du strabisme, Javal entreprit en 1865 des études régulières en médecine. Après avoir passé son doctorat en médecine, en 1868, Javal, marié et père de famille, se rendit à Berlin, afin de poursuivre ses recherches auprès d’Albrecht de Graefe. C'est à Berlin qu'il apprend la déclaration de la guerre; il repart aussitôt pour la France, et nous le trouvons pendant six mois médecin-major à l’armée au Nord, commandée par Faidherbe, puis à l’armée de Versailles. La paix extérieure et intérieure rétablie, nous voyons Javal partager une activité de tous les instants entre la chose publique et la science, mettant à leur service une grande clarté de conception, une patience inlassable, le besoin indélini de perfectionnement et un esprit novateur. II fut à la fois un savant théoricien et un constructeur habile. Né dans une situation qui lui eût permis le repos dans le bien-être matériel, il travailla toute sa vie sans relâche. Conseiller général de l'Yonne, de 1871 à 1895, il représenta ce département à la Chambre des députés de 1885 à 1889, se consacrant surtout aux questions intéressant l'hygiène de l'enfance et des écoles, les familles nombreuses, les déshérités, apportant à l'étude de ces problèmes un esprit novateur et ingénieux. La loi Javal exonérait de la plupart des impôts directs les familles de sept enfants. Comme membre de la Ligue contre la dépopulation, Javal déploya une activité féconde et fit preuve d'un grand zèle. Il chercha la cause du ralentissement d'accroissement de la popu- lation dans des institutions sociales, le service militaire et les impôts. Ses propositions visèrent les allégements de ces fardeaux. 178 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Ses nombreux travaux scientifiques ouvrirent à Javal les portes de l’Académie de Médecine en 1884. Reçu à la Section de Physique et de Chimie, il y succéda à Wurtz. Ses communications sur la dépopulation et sur d’autres questions sociales furent le point de départ d'intéressantes discussions dans le sein de l'Académie. Javal avait éprouvé des symptômes prodromiques de glaucome à l'œil droit depuis 1881; à la suite de la campagne électorale de 1885, il perdit cet œil complè- tement par un glaucome d'’allure particulière, L'œil gauche avait présenté des couronnes depuis le mois d'août de la même année. A partir de ce moment, Javal envisagea l'éventualité de la cécité complète. Ses notes et tout son arsenal de travail furent classés et ordonnés de façon à pouvoir être retrouvés mentalement, par la mémoire, sans contrôle visuel. Ces craintes se réali- sèrent en 1899. Stoiquement supportées, de longues souffrances physiques et morales aboutirent à la perte complète et définitive des deux yeux en 1900. Sans s’attarder à des lamentations inutiles, Javal ne songea plus qu'à organiser sa vie sur de nouvelles bases. La construction d’une tablette à crémaillère lui permit d'écrire l'écriture ordinaire sans voir, et l’ensemble des mesures prises eut pour résultat la continuation de son activité scientifique. Javal rendit à l'Ophtalmologie deux grands services : l'examen approfondi du strabisme, ainsi que l'invention d'une nouvelle méthode de traitement de cette anoma- lie,et l'introduction de l’ophtalmomètre dans la clinique ophtalmologique. 11 prit une part active dans la réforme du système des verres de lunettes, et la grande clarté de son esprit ingénieux et original contribua beaucoup à faire universellement accepter le système métrique actuellement en usage. Le célèbre traité de Helmholtz sur l'Optique physiolo- gique, dont le premier fascicule avait été publié en 1856, avait fini de paraitre en 1866 lorsque Javal et Klein publièrent, en 1867, une traduction française de cette grande œuvre, complétée par de nombreuses notes personnelles , contrôlée par des expériences multi- ples, mise au jour comme texte et comme bibliogra- phie. La traduction de l'Optique physiologique de Helmholtz fut suivie de près par la traduction du traité de Donders sur la réfraction et l'accommodation, entreprise par Javal avec le concours de MM. Debove et Rendu, ses camarades à l’armée du Nord. Javal puisa dans cette double œuvre de traduction l'inspiration de l'étude approfondie de lastigmie, vice de réfraction dont il était atteint personnellement. Helmholtz, Don- ders et leurs collaborateurs avaient déterminé la cour- bure d'un certain nombre de cornées à l’aide d'un instrument inventé par Helmholtz etnommé ophtalmo- mètre. Cet instrument, d’une exactitude relative, est d’une application si compliquée et si longue que la mesure d’une seule cornée constitue un travail d'obser- vation et de calcul considérable. Par des efforts incessants, continués pendant une dizaine d'années, Javal, aidé de collaborateurs dévoués, parmi lesquels il faut mentionner, en première ligne, M. Schiotz, de Christiania, sut tellement simplifier l'ophtalmomètre que la mesure complète d'une cornée se fait par lecture directe, en peu de minutes. Entre ses mains habiles, l'instrument de laboratoire inventé par Helmholtz devint un instrument de clinique et de cabinetde consultation. C’est grâce à cet instrument qu'aujourd'hui tout oculiste peut découvrir l'astigmie et peut en prescrire sûrement les verres correcteurs. Or, l’astigmie est l’anomalie de réfraction la plus ré- pandue et la plus importante par ses suites souvent graves. L'introduction üe l’ophtalmomètre dans la pra- tique courante constitue un des progrès marquants de l'opthalmologie du x1x° siècle. Dans ses travaux sur la loucherie, Javal rejette nette- ment les théories formulées après l'invention «e la myotomie par Cunier et Diefenbach, transformée en ténobomie par Bonnet (de Lyon), et revient à la con- ception de Buffon, qui considère le strasbisme comme une anomalie de la vision binoculaire. Sur ce principe il édifie sa nouvelle méthode de guérison du strabisme les exercices de fusion binoculaire exécutés à l'aide dt stéréoscope. . Lorsque Javal se présenta en 1882 à l'Académie Médecine, il avait à son actif une centaine de Mémoir. concernant la physiologie et la pathologie oculai Pendant la seconde moitié de sa vie, il s'employa les réunir en œuvre d'ensemble en les reliant par dés travaux destinés à en constituer un édifice comple Le premier en date des livres de ce genre est intit Mémoires d'ophtalmométrie et parut en 1890. Il réu: nit, en outre des travaux ophtalmométriques de law teur, les principaux travaux de recherches "n grâce à l’instrument qu'il avait présenté au Congrès international des Sciences médicales tenu en 1881 Londres. : En 1896 parut le Manuel théorique et pratique de stra: bisme. C'est l'œuvre fondamentale de Javal. Quelqu variée qu'ait été l’activité scientifique de Javal, il s'ot cupa pendant toute sa vie du strabisme. C'est à ce su qu’il émit le plus grand nombre d'idées personnelles, d'idées fertiles et qui resteront. Les observations con tenues dans ce livre ont été recueillies pendant trente trois ans, de 1863 à 1895, et c'est avec raison que Jav: choisit comme épigraphe du Manuel cette phrase d'Alfred de Vigny : « Une pensée de la jeunesse, réalisée dans l’âge mur ». Dès l'ouverture du Laboratoire ophtalmologique de Sorbonne (1879), dont il fut le premier directeur jus= qu'en 1900, Javal avait inscrit dans son programme de recherches la physiologie de la lecture et de l'écriture, vers laquelle l'avaient conduit ses études sur l'hygièn: scolaire, la myopie et la scoliose. Les monographie publiées à ce sujet par Javal et ses collaborateurs s éparses dans des journaux médicaux, pédagogique littéraires et autres, ef ce n’est que plusieurs année après la perte définitive de la vue que Javal, à la grande admiration de tous, fit paraître, en 1905, le traité d'en semble intitulé : Physiologie de La lecture et de l'éer ture. Ce livre eut un succès immense. Traduit er allemand pendant l'année qui suivit son apparition, il eut une seconde édition française cette même années Il ajoute aux exemples des Euler, des Charles Bonne des Huber, des Plateau, une preuve éclatante de J force de production de certains aveugles. : Entre temps, Javal avait publié un petit livre dont le ütre ne figure nullement sur son programme de tra: vail, petit livre qui fit plus pour populariser auprès des foules le nom de l’auteur que toute son œuvre scien= tifique. Ce petit livre est intitulé : £ntre aveugles, et paru en 1903. C’est un ensemble de conseils à l'usage des personnes qui viennent de perdre la vue ou qui sont menacées de la perdre, conseils qui sont adressés en partie à leur entourage. Pénétré d'une philosophit pratique et sereine, ce livre est d'un sentiment {ou chant, témoignant d'une philanthropie élevée. « Si ces pages servent à adoucir quelque infortune analogue la mienne, le sort m'aura donné une précieuse conso= lation », dit l'auteur dans sa préface. b Enfin, nous ne pouvons conclure cette note sans dire deux mots au moins d’un opuscule de Javal qui ren ferme une somme de travail que son petit volume n® laisse guère soupconner. Ce petit livre, paru en 1885, est intitulé : La lecture enseignée par lécriture: L'écriture qu'enseigne ce petit livre est Zécriture droite, sur papier droit, corps droit, la seule qui soit compatible avec une bonne hygiène scolaire et géné= rale. 4 Si l’on embrasse d'un coup d'œil cette vie d'Emile Javal, si une dans sa diversité, on ne peut manquer de reconnaître dans toute son œuvre un souffle humani= taire qui la féconde et la vivifie. ! D' D.-E. Sulzer, 4 Médecin ophtalmologiste de la Fondatim Ad. de Rothschild. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 179 $ 2. — Astronomie # Lt. Mouvement du Soleil relativement aux . ctoiles les plus faibles. — Le Professeur George “ C. Comstock vient de publier, dans The Astronomical “ Journal, un important Mémoire sur les mouvements "propres des étoiles de la neuvième à la douzième gran- …_deur, discutés au point de vue de la translation du … système solaire dans l'espace. En voici les conclusions : _ {1° Au moins jusqu'à la douzième grandeur, les - étoiles présentent un mouvement propre appréciable … dont l'amplitude est environ de deux ou trois secondes par siècle; 20 La distance moyenne et, par conséquent, l'éclat moyen de ces étoiles sont donc considérablement infé- rieurs à ceux qu'on leur attribue habituellement ; 3° Les mouvements propres et sans doute aussi les - parallaxes des étoiles au-dessous de la neuvième grandeur montrent un accroissement progressif aug- - mentant avec la distance de la Voie Lactée; —. 4° On peut accepter provisoirement, et jusquà - preuve du contraire, l'hypothèse que les groupes - d'étoiles disséminés dans l’espace et séparés par de … grandes distances, mais ayant un centre commun de - gravité, n'exercent pas une influence perturbatrice considérable les uns sur les autres; … 5° La formule empirique de Kapteyn, représentant la - parallaxe stellaire comme une fonction du mouvement propre et de la grandeur des étoiles, peut être étendue aux étoiles de la onzième grandeur et probablement aux plus faibles sans une erreur sensible dans le résultat moyen; - 6 Le mouvement du Soleil, par rapport aux étoiles - les plus éloignées (10° et 119 grandeur), n'est pas consi- - dérablement différent de son mouvement relativement aux plus éclatantes, et l'influence perturbatrice des parties les plus proches du système stellaire à l'égard des régions étoilées les plus lointaines est, par consé- quent, insignifiante. La distance des étoiles fixes.— Dans une cir- constance récente, M. Wirtz avait déclaré que la méthode photographique de Kapteyn était la seule vraiment appropriée, aujourd'hui, à la détermination des paral- laxes stellaires : cette méthode, on le sait, repose sur la comparaison micrométrique d'images des mêmes étoiles, photosraphiées sur la même plaque à trois ou six mois d'intervalle. M. Pulfrich revendique ! le pre- mier rang pour ses propres méthodes : celle du stéréo- comparateur et celle qu'il appelle méthode des éclairs {Blink-methode). Le stéréocomparateur effectue la comparaison à vue, tandis que le microscope mono- culaire, auquel M. Pulfrich a eu recours en dernier lieu, permet de superposer les deux images ou de les com- itempler tour à tour en les échangeant rapidement : il m'est plus ici question de vision stéréoscopique, et les différences parallactiques, se manifestant, pour ainsi dire, par éclairs, sautent alors aux yeux. Si ces nouvelles méthodes d'observation facilitent sensiblement la recherche des parallaxes sensibles, Sans fournir directement la distance des étoiles, il faut du moins convenir qu'elles constituent un véri- table progrès au point de vue de l'exploration de l'Univers. Enfin, pour la détermination des parallaxes notables, il ne faut pas oublier que l’on peut utiliser “omme base le chemin parcouru par le Soleil, S 3. — Physique Sur la conduetibilité du cohéreur due à une action mécanique. — Le problème de la con- ductibilité du cohéreur est étroitement lié aux idées relatives à la propagation de l'électricité dynamique. Lorsque des oscillations électriques d’une intensité 4 Astronomische Nachrichten, n° 4013. suffisante se propagent à travers l'éther, des molécules matérielles peuvent, le cas échéant, être soudées les unes aux autres bar de petites étincelles, formant un pont continu de molécules solides qui assure la conduc- tibilité du courant électrique. Grâce à une ionisation exaltée, la résistance du cohéreur peut alors, même au- dessous de la différence critique de potentiel, se réduire à une grandeur appréciable. D'autre part, M. Auerbach à fait remarquer que non seulement les ondes électriques, mais encore les oscillations acous- tiques peuvent provoquer la conductibilité du cohé- reur, surtout dans le cas où les oscillations d’un diapason, par suite de la résonance de la table opéra- toire, sont transmises au point de contact. Des résuitats identiques ont été trouvés indépendamment par M. Leppin, qui fut en mesure de constater des modifi- cations de la conductibilité du cohéreur sous l’action, non pas seulement des oscillations précédentes, mais encore d'un effet calorifique, la chaleur de la main par exemple. Mème sous l’action des ondes optiques, l’on pouvait observer la déviation de l'aiguille d’un galva- nomètre inséré, avec une pile Leclanché, dans le cir- cuit d’un cohéreur. Dans un travail récent‘, M. B. Thoeldte rend compte des expériences qu'il vient de faire pour vérifier une observation indiquée par M. Auerbach, à savoir que des coups frappés à intervalles réguliers sur la table opératoire produiraient un effet analogue. Voici les résultats trouvés par l’auteur : Lorsque la conductibilité du cohéreur est provoquée par un choc mécanique, il convient de l’attribuer à la carbonisation des couches de graisse adhérentes aux tiges du cohéreur, due à la compensation électrique se produisant aux bouts du cohéreur. La conductibilité ainsi produite est proportionnelle à l'intensité des oscil- lations mécaniques; elle est constante lorsque le courant traversant le cohéreur a atteint son intensité tout en- tière, et inconstante dans le cas contraire. $ 4. — Chimie physique La Table internationale des Poids atomi- ques pour 1907. — On sait qu'une Commission internationale est chargée de reviser chaque année la table des poids atomiques des éléments chimiques, en tenant compte des délerminations récentes. Cette Commission, qui était composée l'année dernière de MM. F. W. Clarke (Etats-Unis), H. Moissan (France), W. Ostwald (Allemagne) et T. E. Thorpe (Angleterre), a récemment déposé son Rapport pour 1907. Les der- nières années ont été fertiles en recherches sur les poids atomiques; plusieurs éléments, comme l'azote, le bismuth, le tantale et la plupart des terres rares ont fait l’objet de travaux sérieux, qui ont conduit la Com- mission à modifier légèrement les valeurs jusqu'alors acceptées. Nos lecteurs nous sauront sans doute gré de reproduire ici le tableau des nouveaux poids atomiques tel qu'il est sorti des délibérations de la Commission : Aluminium . .. ; ; S'UAL PA ANTMOINE 0. HISD 120,2 ATEN CC: ce 1 Ag 107,93 ADO MATE MU VS di sn) à MN 29,9 ASIE ne Me lels à . AS 15210) Azote PRADA RU A AZ 14.01 BENOIT UE M MEN 131,4 BISMUIREMEU. LEP ENT 208,0 BOT MERE ir AUTOS ES 11,0 Br'OMELTN FN -N: FE fs Ho uDr 19,96 Cadmiumee “he UE à perl Cæsium Cs Calcium . SE BTE RE CA CATOONE EE, ELU LUC 12,00 CéÉTIUMPEEE tes pe Ce 140.25 CHLOLER RS RE EE AE NS IC 35,45 CRTOMEMPRMREME RUE EEC Cr 52,4 COPA RER RE Er C0 59.0 ! Annalen der Physik, n° 11. 1906. 180 Colambon EME E ICD 94 GUANTE ZE SAME AENER CN AE RAR EN CU 63,6 Erin SES M0 APR TNET: 166 Etain HE Ce on 119,0 EUrOPIUR ER CT CC ERP Eu 152 OPEN ONE OS ON PA MEN ET NÉE 55,9 PIVOT LE M ANS AR RS RS PEUR 19,0 GAdOL NIMES RT 156 GalUUM EE NEC EN RAENEREAl GE 70 GéLManIUM MEME EME 12,5 GC EE EN EMI GI Cl Hélium QUE O0 A LOS le He 4,0 HYÜTOSÉDE ER AE IL 1,008 Tr RU RS SE CE El lot 115 TOUR SN MEN CR Cl 126,97 IMAC EE PE IT 193,0 Krypton RER MIE CR - NRT 81,8 Danthane te ER OUITA 138,9 LDIumE ee CNE Crea 7,03 MODES RE RE Me 24,36 ManraDese EE RE ln 55,0 METCULE RE TO. M TOR SIL 200,0 Molybdene PRES EN AA ENT 96,0 NÉOUVITEMERENE NE ERP IE NE 143,6 NÉ RETENUE EP ANNE EMEMRINE 20 INICKEL NES MO EN ER ER REA NINT 58,7 OL NN SE SEA 197,2 OSMIUDE Cie Re CT ere CREUS 191 OF NAT EN RE TA EE MD) 16,00 PAlAUMEE IC eee Ce IPC 106,5 PHOSPROTER RC RUE. 31,0 Platine ue LR TT EN PS 194,8 PLOMPD A MMENAEUNE AHNRONCEAIPD 206,9 POSSUMONMMM ED ENTER EIOR 39,15 Praséodymert mec 07 MMRE 140,5 RadIUMAS ER RC ce RC 225 RECU Rb 103,0 ROUDITIUM ERREUR D 85,5 RURÉMIUE NE SEEN RP MIEL 101,7 SATA UD NE EEE PORN PERS 0) 150,3 SCANUM PME UPS ESC 44.1 Sénior RASE 1952 SIGMA AE TAC CSL 28,4 SOUMET EN 23,05 SOUITEEREE R C) 32,06 SHRODUURENC RTE EE NI RIT 87,6 Tantale NM NE EN Ce DE 181 Tellure rt rem Sr Dr ee LE 127,6 Der ee RCE RERO E) 159,2 Thallium. es MERE RTE 204,1 RAOTUME SE PIE ENS RETENIR 2325 DRULUMEREN EC TE im 171 ÉÉLÉBNE sde se EE eee Di 48,1 Minestene CES EE RENTE 184 UPATUM ES EE PRIE PR RE LU 238,5 Nanadium NL ON 51,2 KÉHONETEN TA RAIN TH LENS AIENE 128 METELDIUNN ECM LE RND 173,0 Yitrium sosreus te LE nAG Vi 89,0 Zinc: : Ar rélese 7n 65,4 AITCODUMENE ER Zx 90,6 $ 5. — Chimie biologique Une théorie thermo-chimique de l'assimi- lation. — On sait que l'équilibre chimique d'un mé- lange comprenant plusieurs substances dépend de la température, toute augmentation de température mo- difiant la répartition des masses dans un sens tel que la chaleur interne du mélange s'acroisse, tandis qu'une réduction de la température produit une con- version pour laquelle la provision totale de chaleur interne du mélange décroît. C'est dire qu'à la suite de tout accroissement de température, il se produit une fixation chimique de chaleur libre, tandis que toute réduction de température s'accompagne d'un dégage- ment de chaleur chimiquement liée. Une fois cette conversion finie, le mélange se trou- vera de nouveau à l’état d'équilibre. Or, toute conver- sion demandant, pour se produire, un certain temps, l'état d'équilibre se trouve être en retard par rapport à la température variable. Pendant un chauffage très rapide du mélange, ce dernier n’éprouve donc d'abord aucune variation interne appréciable, le déplacement CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE des masses dont s'accompagne l'absorption de chaleur se produisant exclusivement à une température éle= vée. Inversement, le mélange, pendant un refroidisse- ment subséquent très rapide à la température initial retient l’état chimique ainsi produit, et ce n’est quë cette température qu'il retourne à l’état chimique int tial, tout en dégageant de la chaleur. j 1 Ce phénomène est représenté dans le diagramme thermique de la figure 1. Au point 1, le mélange se trouve à l’état d'équilibre correspondant à la tempéra= ture Tr. En raison du chauffage rapide, sa chaleur spé: cifique restant constante, il atteint la température My sur une courbe logarithmique 1-2, et tout en absorbant, une quantité de chaleur correspondant à l'aire 4-2-5- 6-1. Or, cette quantité de chaleur n'est employée que pour augmenter la température et non paspour accroître la chaleur interne, puisque, suivant les hypothèses formulées, le déplacement des masses ne se produi qu'une fois l'échauffement terminé, c'est-à-dire à la température Ty. A cette température, le mélange subit donc une conversion donnée en liant de la chalew libre, certaines substances étant élevées à l'état de composés thermiquement supérieurs en absorbant de Température ZE composants d’autres substances d'une teneur en cha= leur relativement moindre. La chaleur liée pendant ce processus est exprimée dans le diagramme par l'aire 2-3-7-5-2. Le refroidissement subséquent devant se produire à chaleur interne constante, à l’égal de l'échauffement, est réglé par la ligne 3-4, parallèle à la ligne 2-4: Au point +, le mélange retourne à la température ini- tiale, tout en étant chimiquement modifié par rappo à l’état initial, ayant absorbé une quantité de chaleu totale 1-2-3-4-8-6-1. | Une fois le point # atteint, il se produit une réaction chimique rétrograde, tendant à rétablir l’état d'équi- libre initial du mélange. Les composés qui, à la tempé rature supérieure, s'étaient incorporé des composants: d’autres substances thermiquement inférieures, tout en absorbant de la chaleur, dégageront à présent ce composants en même temps que de la chaleur. Lors= que ce processus rétrograde se passe à la température constante Tr, la quantité de chaleur 4-1-6-8-4 est ame née au dehors à l'état libre, en même temps que Jen point l’estatteint. Cette quantité de chaleur est cepen- dant plus petite que celle qui avait été absorbée à Jan température Trr de l'aire 1-2-3-4-1. Le processus rétrograde ne peut done être (erminÉ au point { que si cet excédent de chaleur est en même temps évacué sous une forme quelconque, les subs=. tances restantes communiquant cet excédent, par exemple, aux composants dont elles se séparent. Pourvu que ces composés nouveaux ne modifient point l'état d'équilibre initial, les substances efficaces passent donc par un cycle thermique fermé ayant pour résul- l'AS CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE tat la production, à l’état latent, de la quantité de cha- leur 1-2-3-4-1.. Dans un Mémoire récent, M.J. Fischer fait remarquer que toute cellule végétale n'est autre qu'un ensemble de substances, siège d'un cycle continu pareil. Les plantes transformeraient les substances chimico-ther- miquement inférieures de la nature inorganique (et notamment l'anhydride carbonique), en composés thermiquement supérieurs, en empruntant l'énergie nécessaire à la lumière du Soleil. Pour fixer les idées, considérons le cas d’une algue, flottant dans l’eau, et qui, en vertu de sa couleur verte, absorbe la chaleur des rayons du Soleil; cette absorp- tion, n'étant entretenue que par les grains de chloro- phylle incorporés au sein de la cellule, s'accompagne d'une chute de température. Or, on observe sur bien des cellules que le protoplasma, pendant le processus d’assimilation, se trouve en circulation permanente ; aussi bien, il n’est autre qu'un mélange de substances allant et venant entre des points à températures diffé- rentes. Voici, du reste, d’autres raisons militant en faveur de l'hypothèse de l’auteur, suivant laquelle le plasma de la cellule jouerait le rôle de support de chaleur : Dans le cas typique d'assimilation, il se forme un hydrate de carbone et de l'oxygène libre, aux dépens de l'acide carbonique et de l’eau. Les substances pré- citées sont les matières entrant dans le processus thermo-chimique hypothétique, à l'état thermiquement inférieur, pour en sortir à l’état thermiquement supé- rieur. Il s'agit, dans ce cas, de composés chimiques bien stables el qui ne peuvent guère avoir d'influence spécifique bien marquée sur la répartition des masses, de façon qu'en remplaçant un groupe de matières par un autre groupe thermiquement supérieur, l’on n'em- pêche ni les substances vraiment actives de subir le processus rétrograde complet, ni le cycle parfait de s'accomplir. Les substances actives elles-mêmes exercent sur l'équilibre une influence fortement dépendante de la température ; elles tendent, en effet, à se convertir en composés alliés, tout en absorbant ou en dégageant du carbone. D'autre part, les quantités échangées étant toujours très petites, les composés en question ne se différencient que peu entre eux quant à leur capacité thermique et leur composition chimique. L'intervalle de température dans lequel opère une plante n’est enfin pas toujours le même, mais diffère suivant la température ambiante; aussi la faculté de conversion que possèdent les substances actives ne peut-elle être limitée à un nombre peu considérable de degrés. Les substances actives entrant dans le mélange doivent, par conséquent, appartenir à une longue chaine de composés carburés relativement peu stables, dans laquelle deux termes voisins ne différent que peu quant à leur composition et leur capacité thermique. Or, cette déduction se vérifie parfaitement dans le cas des composés albuminoïdes du plasma cellulaire. L'hypothèse indiquée par l’auteur pour expliquer le processus d’assimilation est la suivante : une masse plasmique renfermant un grand nombre de composés albuminoïdes étroitementalliés etcapables de coexister, se transforme, tout en absorbant de la chaleur, de telle facon que certaines molécules subissent un échange matériel, chacune avec une molécule de l'espèce im- médiatement supérieure, les molécules de lespèce supérieure dégageant de l'oxygène et absorbant de l’anhydride carbonique ; après quoi, la masse plasmique se rend vers la paroi cellulaire, plus froide, où elle subit une conversion opposée, au courant de laquelle il se dégage un hydrate de carbone. Une fois la compo- -sition initiale de la masse plasmique rétablie, celle-ci se rend de nouveau vers un grain de chlorophylle. Ce processus thermo-chimique peut se produire * Zeitschrift für Electrochemie, n° 34, 1906. 181 aussi dans un plasma en apparence stationnaire, grâce à une diffusion mutuelle à travers le plasma. L'auteur croit même probable que cette diffusion joue le rôle le plus important dans la Nature, le déplacement des plasmas ne se produisant que pendant une activité tout particulièrement énergique de la cellule. Faisons remarquer que, dans l'hypothèse de l’auteur, le diagramme d'une cellule végétale correspond par- faitement à celui d'une installation de machine à vapeur, où l’eau alimentant la chaudière serait exposée à un échauffement préliminaire dans un assez grand nombre de gradins, par la vapeur retirée de la machine en fonctionnement et l’eau condensée formée par cette dernière. $S 6. — Agronomie La Conservation de l'eau. — Dans une précé- dente Note’, consacrée au phénomène à peu près géné- ral de la déperdition de l’eau, nous signalions le déboi- sement comme une des causes principales de ce funeste état de choses. C'est que, sur la pente privée d'arbres, le ruissellement agit avec le maximum d'intensité. Comme l'écrit M. Champsaur*, l’eau n'est plus divisée par le lacis des tiges et des racines; elle n’est plus main- tenue en partie en suspension dans l’air parles organes aériens des végétaux et ainsi plus facilement restituée par évaporation à l'atmosphère. Elle n’est plus absorbée ou filtrée par les débris végétaux qui recouvrent le sol de la forêt. Il ne se produit plus cette action de filtra- tion lente qui a pour résultat de retarder les crues et de régulariser le débit des cours d’eau. Le torrent formé déverse alors dans un temps très court presque toute l'eau reçue dans son bassin de réception. Ce débit peut varier subitement de 1 à 100, tandis que, pour les cours d’eau à bassins boisés, placés dans des situations ana- logues, la proportion correspondante est de 4 à 5. Ces conditions désastreuses communiquent aux rivières un régime torrentiel très accusé. Leur débit subit les plus grandes variations; elles entraînent des galets d'un volume qui peut aller jusqu'à un décimètre cube; elles occupent presque toute la largeur des vallées et y for- ment des plages de graviers, de sables ou de limons:; elles divaguent sur leurs lits comme les torrents sur les cônes de déjection. Le sol devient « en proie aux tor- rents », suivant l'expression de Surell. Les rivières ne peuvent plus suffire aux saignées que leur fontles villes et les canaux d'irrigation; de là, de graves conflits entre les populations intéressées à la jouissance des eaux disponibles. Le remède, c’est l'arbre. La forèt régularise la chute des pluies. M. Mathieu, directeur de l'Ecole forestière de Nancy, a observé, pendant onze années consécutives, qu'il tombe une plus grande quantité d’eau sur les sur- faces boisées que dans la zone limitrophe, et ces obser- vations ont élé corroborées par celles que M. Fautrat a instituées près de Thiers. C’est que le pouvoir réfrigé- rant des forêts est bien connu. Sous leur couvert, la température est généralement différente de celle d'un terrain nu. Des expériences ont montré que la tempé- rature de la surface terrestre dans une forêt, en juillet, est d'environ 4° plus basse qu'en terrain découvert, tandis qu'en décembre cette différence est nulle et mème négative. La forêt agit aussi sur l’état hygromé- trique de l'air : en conservant la fraicheur du sol, pro- tégé contre l'influence asséchante du ventet des rayons solaires, et aussi par la transpiration des feuilles, l'arbre contribue à accroître l'humidité de l'air ambiant. La forêt condense les eaux souterraines et régularise leur circulation. Bien que son sol recoive moins d’eau qu'un terrain nu, l'humidité s'y conserve mieux. La couche d’humus qui se forme d'année en année sous le couvert des bois fait fonction d'éponge. Elle retient et 1 Cf. la Revue du 15 septembre 1906. ? Les terrains et les paysages torrentiels des Basses- Alpes. Paris, Imprimerie nationale, 1900. 182 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE absorb& la pluie, qui s'infiltre ainsi lentement dans le sous-sol pour aller reparaître sous forme de sources dans les parties déclives. La neige fond beaucoup plus lente- ment dans la forèt que sur la terre nue, et l’eau de fusion pénètre à son tour dans les couches souterraines. Notons encore que les bois paralysent l'action néfaste que les vents violents exercent sur la culture. Un simple rideau d'arbres suffit également pour modifier la tem- pérature ambiante. M. Sorel rapporte que M. Becquerel avait utilisé le rayonnement caloritique du bois pour faire mürir la vigne dans une localité du Loiret où elle n'avait jamais été cultivée. La forêt fixeles dunes mou- vantes et assainit les régions plates et marécageuses. C'est le même pin maritime qui a sauvé les Landes et régénéré la Pologne. Dans nos Alpes, enfin, la forêt est un des rares remèdes efficaces contre l'avalanche. Il faut donc reboiser : c’est encore la conclusion d’un remarquable Rapport de M. de Grossouvre!, ingénieur en chef des Mines, dans lequel l’auteur attire en outre l'attention sur l'influence qu'a pu exercer la disparition des étangs qui, situés à la tête des cours d’eau, servaient de régulateurs pour la distribution des eaux pluviales, reçues par le sol. Celles-ci ruissellent maintenant à la surface; elles sont perdues pour les nappes souterraines et se rendent immédiatement aux rivières voisines. Une des parties originales de ce Mémoire est aussi celle où l'auteur montre que l’appauvrissement des sources n'a point pour cause l'augmentation de la transpiration végétale résultant de l'extension et de l'intensité des cultures. Le mouvement en faveur du reboisement ne cesse de s'étendre. Des instituteurs cherchent à y intéresser leurs élèves. La fête de l'arbre, qui est devenue, aux Etats- Unis, une institution d'Etat, se répand-en Europe : on la trouve déjà en Espagne, Italie, Belgique; on cherche. à l'implanter chez nous. La Ligue pour le reboisement de l'Algérie l’a organisée, en juin dernier, au Jardin d'essai d'Alger. D'autre part, le ministre des Colonies vient de constituer une Mission à laquelle il a confié le soin de rechercher les mesures à prendre pour assurer la préservation des massifs forestiers de nos possessions africaines, en même temps que le reboise- ment des régions dénudées. On sait, en effet, que l’assé- chement de la surface terrestre n’est point spécial à la France, mais qu'il se fait sentir partout en Europe, en Asie, en Afrique comme en Amérique. Le Président Roosevelt est l’homme d'Etat qui a le mieux compris toute l'importance du reboisement; il en a parlé dans de nombreux messages et il a écrit notamment cette phrase-type : « Les problèmes de la forêt et de l’eau sont peut-être les questions d'ordre intérieur les plus vitales pour les Etats-Unis ». En France, l'Association pour l'aménagement des montagnes, qui a tenu, à Paris, au mois d'août dernier, son deuxième Congrès, vient d'essaimer en Dauphiné une société-sœur qui s'est fondée à Grenoble par l'ini- tiative du Commandant Audebrand, l’un des spécia- listes les plus compétents en matière de houille blanche. L'œuvre si intéressante et si utile de M. Paul Descombes promet d'être particulièrement féconde. Nous consa- crerons une prochaine Note à l'examen des solutions pratiques d'aménagement forestier et à leurs consé- quences économiques et sociales. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole Supérieure de Commerce de Lyon. $ T. — Sciences médicales Action des rayons X sur les glandes géni- tales. — On se souvient d'une discussion à l’Acadé- mie de Médecine où fut agitée la question très grave de la stérilité provoquée par l'action des rayons X. A cette discussion prirent part MM. Debove, Brouardel et Pinard. Se basant sur les expériences de MM. Bergonié { Bulletin de la Société d'Agriculture du département du Cher, t. XXXIV, n° 2. Bourges, 1906. et Tribondeau, en France, d'Abers-Schomberg, en Alle magne, ces maîtres avaient conclu qu'on ne devait pas permettre l'application des rayons X dans la sphère génitale. Le Dr Fr. Roulier’ vient de reprendre, dans sa thèse, ce sujet si intéressant. Il confirme d'abord les expé- riences susdites. Chez le rat et le cobaye, après une série d'irradiations d'intensité moyenne, on constate l'atrophie du testicule et la desquamation de l'épithé— lium séminal, suivie de son expulsion. Sur l’homme, il existe une azoospermie passagère; mais la réparation semble se faire un mois ou deux après la cessation du traitement. Cet effet désagréable se fait non seulement. sentir lorsqu'on irradie directement les testicules, mais même chez les radiologues qui, du fait de leur profession, se trouvent continuellement sous l'effet des. rayons X. Il était intéressant de savoir si, chez la femme, malgré la situation plus profonde de la glande, on obtiendrait les mêmes résultats. Le Dr Rouler a done collectionné les observations de malades traitées au niveau de la région ovarienne et il n’a trouvé aucun point digne d'être noté; certaines d’entre elles, encein- tes, avaient continué normalement leur grossesse ; d'autres avaient fait une grossesse postérieurement à leur traitement radiothérapique. Cependant, sur les femelles des cobayes, les expériences avaient donné des. résultats positifs, qui ne s'étaient pas maintenus lors- qu'on avait eu affaire à une espèce plus grande, à la chienne par exemple. M. Roulier, pour être fixé, fit même des essais sur le cadavre : il mit, au niveau de l'ovaire d'une femme, une pastille de Sabouraud-Noiré et, malgré la dose énorme qu'il donna sur la peau, il n'obtint, au point considéré, aucun changement de teinte. | De ces recherches, on peut donc conclure que, si l’on arrive à utiliser ce procédé pour obtenir chez l'homme une stérilité passagère, par contre il ne paraît « pas applicable chez la femme. Il ne semble donc pas qu'il puisse être employé comme agent malthusien, ainsi qu'on l'avait cru tout d'abord. $ 8. — Enseignement L'Institut Océanographique. — Les plans d’avant-projet de l’Institut Océanographique sont ter- minés et viennent d'être remis au prince de Monaco par M. Nénot, l'architecte de la Sorbonne. Ce palais, conçu dans le style roman, est en pierre de taille ; sa façade est flanquée d’une haute tour carrée et percée de portiques et de baies à plein cintre. I} comprend un vaste amphithéâtre pour les conférences, un musée, une galerie circulaire d'exposition, et autour. de cette galerie un aquarium où seront présentés vivants les types les plus curieux de la faune sous- marine. : À côté sont les bureaux du secrétariat et le cabinet du Prince. A l'étage supérieur sont les salons de récep- üon et une tribune s'ouvrant sur l'amphithéâtre. 1 Le Muséum de la Réunion. — Par mesure bud- gétaire, le Gouvernement de la Réunion vient de sup= primer le poste de Directeur du Muséum de la Réunion: Ce poste est occupé, depuis de nombreuses années, par un naturaliste de talent, M. Bordage, docteur ès sciences, dont les travaux sont connus et fort appréciés du monde scientifique. On sait, d'autre part, les services rendus. par ce biologiste à l'Agriculture de cette colonie dans la lutte contre les parasites animaux et végétaux. Aussi nous ne pouvons que regretter de voir une colonie fran- caise méconnaître les services de la science, sans doute pour réaliser une économie de quelques milliers de francs, alors que les autres peuples coloniaux s'effor- cent de multiplier les postes semblables à celui qui vient d'être supprimé à Saint-Denis! { Thèse de Paris, 1906, 71 pages, 2 planches, LOÉNIT 28 H. HENRIET — L'ATMOSPHÈRE DES VILLES 183 Quand Lavoisier posa, vers la fin de l'avant- dernier siècle, les bases de la Chimie moderne, il - établiten même temps, dans une expérience mémo- “rable, que l'air atmosphérique est un mélange d'oxygène et d'azote ; aussi le nom de l'illustre chimiste français domine-t-il l'histoire chimique de l'air. Son œuvre, en ce qui concerne l’atmo- sphère, fut complétée d’abord par Gay-Lussac et Humboldt, qui, en 1808, déterminèrent par les pro- - cédés eudiométriques, plus précis que ceux qu'em- - ployait Lavoisier, la proportion à peu près exacte de chacun des gaz constiluants; plus récemment * Dumas et Boussingault, ainsi que Regnault, établi- rent d’une facon définitive, grâce à des méthodes ‘analytiques d'une rare précision, la véritable com- position chimique de l'air. D'après ces savants, l'air contient en volume: 19°/, d'azote et 21 °/, d'oxygène, et ces chiffres furent considérés comme exacts jusqu'en 4895, + époque où Lord Rayleigh et le Professeur Ramsay + montrèrent que l'air contient encore 1 °/, d’un - gaz nouveau, qu'ils isolèrent et dénommèrent argon. Sur ces entrefaites, la découverte de l'air liquide étant venue fournir à la science un nouveau moyen de travail, MM. Ramsay et Morris W. Travers par- vinrent, trois ans après la découverte de l’argon, à isoler de l’air liquéfié, par distillation fractionnée, une petite quantité de gaz nouveaux : le néon, le krypton et le xénon, à poids atomiques croissants et doués d'une activité chimique presque nulle. De son côté, au cours des recherches qu'il eftec- tua sur les gaz combustibles de l'air, M. Armand Gautier montra que l'hydrogène à son tour existe à l’état libre dans l'atmosphère ; ce gaz fut même, par la suite, extrait directement de l'air liquide. Enfin, tout récemment, l'étude des phénomènes de radio-activité a permis, dans une certaine mesure, d'expliquer la présence dans l'air d'un autre gaz très léger: l'hélium, qui parait être le terme ultime de la désagrégation du radium et que M. Ramsay avait déjà trouvé dans les gaz extraits de la clé- véite, puis M. Bouchard dans les eaux de la source de la Raillère à Cauterets. L’hélium fut isolé en quantité appréciable en même temps que le néon, l'argon, le krypton et le xénon, par distillation fractionnée de l'air liquide. Tous ces gaz, dont l'existence ne nous à été révélée que peu à peu et grâce à des travaux con- sidérables, constituent par leur ensemble la masse atmosphérique proprement dite, car ils jouissent L'ATMOSPHÈRE DES VILLES de la propriété d'exister en tous les points du globe, dans une proportion toujours constante. Cependant, il convient de remarquer qu'à côté de ces gaz il en existe d’autres, en quantité très minime et dont le poids varie à chaque instant; ce sont: la vapeur d’eau, l'acide carbonique et l'ozone. Ces gaz ou vapeurs, qu'on serait tenté de consi- dérer comme accessoires tant leur proportion est faible, ont cependant une importance considérable. Tout le monde connaît aujourd'hui le rôle capital que joue la vapeur d’eau dans les variations de tem- pérature à la surface du globe, ainsique dans la vie des animaux et des plantes; chacun sait de même quelle valeur possède l'acide carbonique dans la nutrition des espèces végétales, ainsi que dans les phénomènes de la vie marine; enfin, l'ozone lui- même, dont Schœænbein constata la présence dans l'air en 1840, a depuis cette époque été considéré comme un agent très actif de l'épuration de l'air. La composition chimique de l'atmosphère paraît aujourd'hui bien établie-et laisse peu de place aux surprises. Il est cependant un point qui est toujours resté dans l'ombre : je veux parler de l’altération que peut subir l'air sous l'influence de l’activité humaine. A priori, il parait évident que, comparée à l'énorme masse de gaz qui entoure la Terre, la quantité d'éléments étrangers que la vie sous toutes ses formes est susceptible d'introduire dans cette même masse est absolument négligeable. Mais on peut se demander si, dans une grande ville où vivent de nombreux êtres humains, où brüûlent d'innombrables foyers, où fonctionnent d'impor- tantes usines, où, en un mot, des produits gazeux sont déversés constamment et en abondance dans l'atmosphère, cette atmosphère conserve une com- position identique à celle de la masse. On sait bien, par expérience, que le séjour pro- longé dans les villes exerce une action déprimante, et c'est pourquoi l'air de la campagne est recom- mandé pour rétablir l'organisme fatigué; mais on ignorait les causes de l'infériorité de l'air des grandes cités elce n’est guère qu'à l'abondance plus grande des poussières de toute espèce qu'on attri- buait ses fâcheux effets. Pourtant, comme nous le verrons tout à l'heure, l'air des villes présente, sur celui des campagnes, des différences chimiques profondes, desquelles il n'est pas invraisemblable de rapprocher les diffé- rences d'action physiologique que l'expérience de chaque jour permet de constater. 184 I En 1830, Boussingault avait observé que, dans les villes et les lieux marécageux, il existe un principe hydrogéné gazeux, qu'il supposait être le formène.M. Armand Gautier, il y a quelques années, . reprit ces expériences et détermina d'une façon rigoureuse la proportion de carbone et d'hydrogène existant à l'élat de combinaison dans l'air des villes, des campagnes et de la mer. Il trouva par exemple, dans 400 mètres cubes d’air de Paris, un poids de 6 gr. 8 de carbone; cette quantité dimi- nuait beaucoup dans les campagnes et devenait nulle en mer, où cependant se trouvait toujours une certaine proportion d'hydrogène. En l'absence de carbone, ce dernier gaz ne pouvait exister qu’à l'élat libre, et ce fut là l'origine de la découverte de l'hydrogène dans l'atmosphère. Ces travaux permettaient déjà d'affirmer que, dans les grands centres, l'atmosphère subit d'im- portantes modifications. Pourtant, ne paraît-il pas étrange que les vents ne puissent emporter tous ces gaz, quelle que soit leur origine et au fur et à mesure de leur production, pour les méler intime- ment à la grande masse de l'atmosphère ? Cette question m'a paru intéressante à étudier, et j'y ai consacré plusieurs années de travail qui m'ont permis d'établir le mécanisme de la pollution de l'air. Je vais m'efforcer de montrer comment J'ai été conduit à résoudre le problème. Quand on dose l’acide carbonique par les pro- cédés habituels, qui consistent à faire barboter plusieurs centaines de litres de gaz dans une solu- tion alcaline qu'on titre avant et après le passage de l'air, on trouve que la proportion de gaz car- 3 10.000 du volume total, c'est-à-dire à 30 litres par 400 mètres cubes. On observe aussi que les nombres ne varient que très peu si l’on examine l’air marin, l'air des cam- pagnes ou même celui des grandes villes. Cependant, quand on introduit l'air de Paris dans un récipient clos et qu'on le maintient vingt- quatre heures en contact avec une base forte comme la potasse ou la soude, on voit la propor- tion d'acide augmenter considérablement et arriver % ï fréquemment à =. Mais, dès qu’ ‘éloigne q 10.000 Mais, dès qu'on s'éloigne de bonique est toujours égale aux la ville, cette proportion diminue et les résultats se rapprochent beaucoup de la normale. L'appareil que j'ai utilisé dans la circonstance consistait en un ballon de verre de 5 à 6 litres de capacité et dans lequel on faisait le vide. Un robinet permettait d'introduire l'air, et un tube à brome de faire pénétrer l'alcali sans ouvrir le ballon. H. HENRIET — L'ATMOSPHÈRE DES VILLES Or, si, dans un semblable récipient clos, on intr duit de l'acide carbonique pur mélangé d'oxygène et d'azote purs, on s’apercoit qu'après dix minu seulement de contact, l'absorption de l'acide car bonique est complète. Mais, puisque cette durée es insuffisante quand il s’agit de l'air extérieur, i faut de toute nécessité que, dans les villes, il exist des corps autres que l'acide carbonique, capable de réagir au bout d'un temps très long sur les alcalis. D'autre part, la teneur normale en acide carbonique qu'on observe dans la campagne en opérant par contact prolongé, prouve que ces mêmes corps ne s'y rencontrent pas. Et cela nous amène à conclure que, la grande atmosphère élan exempte de tels produits, ces derniers ne peuven avoir pour origine que l'activité humaine. Les grandes agglomérations rejettent dans l'atmosphère des produits gazeux de différente nature, dont l’origine est due : 1° aux phénomènes de respiration ; 2° aux phénomènes de combustion. Abandonnons pour un instant les phénomènes de combustion pour porter toute notre attention sur les produits gazeux de la respiration. Remplis- sons deux ballons avec l'air d’une salle où plusieurs personnes ont séjourné longtemps et dosons la quantité d'acide contenue dans ces ballons, en laissant le premier dix minutes en contact avec un” alcali, c’est-à-dire le temps nécessaire à l'absorp- tion de l'acide carbonique, et le second vingt quatre heures dans les mêmes conditions. Nous observerons que la teneur en acide du second ballon est supérieure à celle du premier et que le phénomène est en tous points comparable à ce qui se passe avec l’air de la ville puisé en dehors des édifices. Il parait donc naturel de relier ces faits et d'attribuer aux produits de la respiration les diffé- rences existant entre les nombres élevés que four- nit un contact prolongé et la teneur normale de l'air en acide carbonique. Mais, pour cela, il nous faut montrer que ces produits sont bien susceptibles de saturer peu à peu les bases fortes, c’est-à-dire de jouer le rôle d'acides. Si l’on condense dans un serpentin la vapeur d'eau exhalée par les poumons, on obtient un liquide neutre, à odeur fade et doué de propriétés réductrices assez énergiques. Ce liquide, distillé, sur l'acide sulfurique, laisse échapper un ou plu-= à sieurs acides volatils. Chauffé, au contraire, avec : de la potasse, il abandonne des substances très fortement basiques, à odeur ammoniacale pro- noncée. Dès lors, on s'explique très bien que de tels corps, qui sont en somme des sels à bases volatiles, puissent, à la longue, saturer un alcali par leur acide, en laissant leur base se dégager. Cependant, une grosse objection se présente à # EP w » Ÿ H. HENRIET — L'ATMOSPHÈRE DES VILLES 185 l'esprit. On comprend bien que dans une atmo- sphère confinée les produits de la respiration _ séjournent et, étant donnée leur composition, pro- duisent les effets observés; mais dans l'air exté- rieur, incessamment agité, en contact permanent avec la masse atmosphérique, comment admettre leur présence ? Quelques expériences vont nous permettre de répondre. Prélevons dans Paris, par exemple, avec un ballon clos, de l'air pendant un brouillard. Nous obtiendrons, après un contact de dix minutes seulement, un nombre qui, calculé en acide carbo- nique, atteindra facilement » tandis qu'à la 4 10.000 campagne, dans les mêmes conditions, nous ne dépasserons pas la normale. On est tenté, pour expliquer le fait, d'admettre que la vapeur d’eau, en se condensant en fines gouttelettes pour former le brouillard, dissout peu à peu certaines sub- stances contenues dans l'air de la ville et qu'une fois dissoutes ces substances agissent rapidement sur les alcalis, tandis qu'ordinairement, leur disso- lution ne s’effectuant que peu à peu, on ne parvient à déceler leur présence qu'après un cerlain temps. C'est là une hypothèse que nous pouvons cher- cher à vérifier. Pour cela, prélevons l'air extérieur de la ville au moyen d'une longue et étroite cana- lisalion, que nous mettrons en communication avec un ballon dans lequel on aura fait le vide. Si nous ouvrons le ballon, il existera dans la canali- salion, pendant le remplissage, un vide partiel qui aura pour effet de condenser une partie de la vapeur d'eau. Si notre hypothèse est exacte, cette eau, en se condensant, entrainera avec elle les sub- stances solubles contenues dans l'air, et seuls pénètreront dans le ballon les gaz insolubles tels que l'acide carbonique. Or, l'analyse des échantillons d'air prélevés dans ces conditions et maintenus vingt-quatre heures en contact avec un liquide absorbant, a toujours fourni des résultats beaucoup plus faibles que ceux qu'on obtenait au même moment en aspirant direc- tement l'air extérieur. La vapeur d’eau, en se con- densant, paraît donc bien retenir des substances aclives. Si maintenant, au moyen d'une pompe, nous com- primons de l'air dans un réservoir et si nous vidons ce dernier par fractions, en analysant chacune d'elles, nous obtiendrons des nombres qui iront sans cesse en croissant. Dans ce cas, en effet, chaque ouverture du réservoir produit une détente et par suile une condensation, dont l'effet est de précipiter les substances solubles de l'air et d'enrichir peu à peu le gaz du récipient de ces substances. Et cela est tellement vrai que, si l'on vide le réservoir au moyen de détentes alternativement lentes etrapides, , c'est-à-dire produisant, les unes une très faible condensation et les autres une condensation très intense, on obtient des résullats alternativement élevés et faibles, mais présentant, dans l’ensemble, une marche toujours ascendante. L'expérience prouve que les produits de la respi- ration existent presque en tout temps dans l'air des villes, car il n'y a guère que pendant les journées sèches du printemps et de l'hiver, ou après une vio- lente tempête de sud-ouest, qu'on ne les rencontre pas. Si donc, d'autre par!, nous pouvons démontrer que la condensation de la vapeur d'eau dans l'air est permanente, nous comprendrons pourquoi la présence des produits de la respiralion dans l'atmosphère est constante, la condensation les ramenant toujours dans les basses couches de l'air. Les observations météorologiques ont permis de constater que, durant les pluies et même pendant les brouillards, l'hygromètre est bien au-dessous du point 100; si la pluie est de longue durée, la tension de la vapeur d'eau augmente bien peu à peu, mais jamais elle n'arrive à la saturation. D'autre part, au cours d’ascensions exécutées par l'Aéro- Club de Vienne, les aéronautes ont observé fréquem- ment, à des altitudes comprises entre 3.000 et 4.000 mètres, dans des nuages, des indications hygrométriques variant de 100 à 60 et même moins. Il s'ensuit donc que des gouttes liquides peuvent exister dans une atmosphère non saturée de vapeur d'eau. Au point de vue théorique, M. Langevin a dé- montré par la Thermodynamique que, dans une semblable atmosphère, il peut y avoir équilibre pour des gouttelettes d'un diamètre voisin de 100 . de millimètre, et il a cherché à mettre ces gouttelettes en évidence. On savait déjà, d’après les recherches d’Aiïtken et de Coulier, que les poussières provoquent la conden- sation de la vapeur d’eau, en ce sens que chacune d'elles joue, dans une atmosphère sursaturée de vapeur, le rôle d’un germe destiné à former une gouttelette. On sait aussi, grâce aux travaux de C.-T.-R. Wilson et d'Elster et Geitel, que l’atmo- sphère’contient de petits centres électrisés ou ions, capables d'agir sur la vapeur d'eau sursaturante, tout comme les poussières; mais ces ions sont -— de micron, soil el ; à 300 de micron. M. Langevin, en étudiant avec plus de soin l'ionisa- lion atmosphérique, observa que l'air renferme en grande quantité de gros ions semblables à ceux que produit le phosphore et ayant un diamètre juste- d'un diamètre bien inférieur 1 Ù ; ment égal à 100 de micron, c’est-à-dire de l’ordre de grandeur que la théorie assigne aux gouttes 186 H. HENRIET — L'ATMOSPIIÈRE DES VILLES liquides en équilibre avec une atmosphère : non saturée. Or, au plus fort de l'été, l'état hygrométrique dans la ville ne s'abaisse guère, en moyenne, au- dessous de 60. Cette valeur élevée, jointe aux observations qui précèdent, permet de considérer comme infiniment probable la présence constante d'eau en gouttelettes dans l'atmosphère. Ces pelites gouttelettes sont capables, tout comme les grosses, d'absorber les vapeurs solubles qu'elles rencontrent dans l'air, et ces vapeurs. que l’on peut alors considérer comme de véritables poussières, sont destinées falalement à rejoindre le sol. IT Nous allons examiner maintenant si les produits de la combustion sont susceptibles d'influencer à leur tour l'air atmosphérique. Quand on dirige, dans un ballon refroidi, un courant de vapeur d’eau et un courant d'air de Paris, on obtient, par condensation de la vapeur, un liquide qui contient toutes les substances susceptibles de dissolution et primitivement mélangées à l'air. En étudiant ce liquide, on constate qu'il est neutre, incolore, qu'il contient des sels ammoniacaux, mais aussi qu'il possède des propriétés réductrices très nettes. Ainsi, il réduit les sels d'or, le nitrate d’ar- gent à l'ébullition, le permanganate de potassium en solution alcaline vers 60°: il ramène le bichlo- rure de mercure à l’état de calomel et donne avec un peu de perchlorure de fer une coloration rouge. Ces diverses réactions appartiennent à l'acide for- mique et j'ai cherché à identifier ce corps d'une façon précise. A cet effet, on concentre environ 50 litres d'eau de condensation en présence de soude pure, puis on distille le produit obtenu avec de l'acide sul- furique. Il passe à la distillation un liquide acide possédant l'odeur caractéristique de l'acide for- mique. Recueilli dans la soude pure et redistillé plusieurs fois sur l'acide sulfurique, il fournit une liqueur exempte de matières organiques et qui, sa- turée par l'eau de baryte, donne un sel que l’on peut faire cristalliser. Le poids de sel de baryum obtenu de cette facon est ensuite calciné, ce qui donne un nouveau sel : le carbonate de baryum. Son poids correspondant exactement à celui que produirait un poids de formiate de baryum égal à celui du sel analysé, il s'ensuit que l'acide extrait de l'air est bien l'acide formique. On rencontre cet acide dans l'atmosphère des villes à l’état de sel ammoniacal, et les eaux météo- riques, particulièrement celles qui proviennent des brouillards, en contiennent relativement beaucoup. On le trouve encore dans les gaz qu'on extrait du sol, où il prend probablement naissance sous l’in- fluence de fermentations. | L'acide formique n’est pas le seul corps réducteur que renferme l'atmosphère des villes. En étudiant l'action du réactif de Nessler sur les eaux météo- riques, j'avais remarqué qu'il ne donne jamais avec ces eaux une teinte jaune limpide, comme le font. toujours les solutions ammoniacales pures et très. diluées.On obtient, au contraire, des teintes toujours louches, et si l’on ajoute après le réactif de Nessler un excès d'acide acétique, il se produit une colora- tion jaune-verdätre très belle, assez semblable à celle d’une émulsion d’absinthe avec l'eau. Cette réaction particulière ne se produit ni avec les sels | ammoniacaux, ni avec ceux des amines primaires: par contre, on l'observe avec les sels d'hydrazine, | d'hydroxylamine et, en général, avec tous les corps réducteurs capables d'agir à froid sur le réactif de. Nessler. L'acide formique n'ayant aucune action sur ce réactif, il paraissait donc certain que, dans l’air, existait encore un composé énergiquement réduc- teur, que je me suis proposé d'isoler et de déter— miner. Après des recherches très longues, je suis. parvenu au but de la facon suivante : On recueille avec soin une centaine de litres d'eau provenant de la condensation des brouillards - d'hiver, et on concentre le liquide au bain-marie à 60° environ. Une partie du corps cherché, qui est volatil, est perdue dans cette opération, mais le liquide se concentre de plus en plus. Quand il ne forme plus qu'un volume de 500 centimètres cubes environ, il ramène le réactif de Nessler à l’état de mercure métallique au bout de quelques secondes. On distlle alors ce liquide à l’ébullition, et on cons- tate que le distillatum présente toutes les propriétés des aldéhydes : réduction du nitrate d'argent am- moniacal, de la liqueur de Fehling et de l'acide” chromique en solution sulfurique, ainsi que reco- loration en rouge-violet du bisulfite de rosaniline. Il restait à voir à quel aldéhyde on avait affaire. Or, si l’on fait agir la solution aldéhydique sur l'hy= droxylamine pour former une oxime, on obtient de l'acide cyanhydrique, ne pouvant provenir que de la déshydratation de la formaldoxime qui s’est produite. De plus, si l’on condense le liquide d'essai avee de la diméthylaniline en solution sulfurique, on ob- tient, après saturation par la soude caustique et élimination de l'excès de diméthylaniline, une base insoluble qu'on peut recueillir sur un filtre. Cette base n’est autre chose que le tétraméthyldiamino- diphénylméthane, car, en présence d'acide acétique et de bioxyde de plomb, elle donne naissance à une magnifique couleur bleue : l'hydrol de Michler. Ces réactions, absolument spécifiques, mettent H. HENRIET — L'ATMOSPHÈRE DES VILLES 187 -hors de doute l'existence dans l'air d’un corps nou- “veau : l’aldéhyde formique, formaldéhyde où mé- _thanal. - L'atmosphère contient donc, au moins dans les “villes, de l'acide formique et du formaldéhyde. La - question est maintenant de savoir d’où proviennent . ces Corps. “ Dès qu'il eut connaissance de leur existence, M. Trillat suggéra que le formaldéhyde pourrait bien provenir des fumées et montra que toutes les combustions incomplètes donnent naissance à celte … subslance. Des essais directs m'ayant démontré “l'absence complète de ce composé à la fois dans “l'atmosphère de la mer, dans le sol et dans les pro- - duits de la respiration, il était de toute évidence qu'il ne pouvait être originaire que des combus- tions, ce qui justifiait l'hypothèse de M. Trillat. La proportion d'acide formique répandu dans l'air ne parait guère excéder 5 à 6 milligrammes - par 100 mètres cubes, mais celle du formaldéhyde est certainement beaucoup plus considérable, bien qu’on ne sache pas encore le doser avec précision dans l'air. Quoi qu'il en soit, l'acide et l'aldéhyde formique ne représentent qu'une fraction infime du volume d'air auquel ils sont mélangés : 1/1.000.000 ou 2/1.000.000 au plus; et cela n’a rien d'étonnant si » l'on songe que, pendant les combustions, il ne s'en produit que des doses extrèmement faibles. Mais, ce qui paraît surprenant au plus haut point, c'est que des gaz tels que l'acide carbonique et l'oxyde de carbone, qui s'échappent à torrents de tous les - foyers, soient sans action marquée sur la composi- tion de l'air. Nous savons, en effet, que la propor- tion d'acide carbonique n'est pas sensiblement plus élevée à la ville qu'à la campagne, et M. Armand Gautier a constaté que l'air de Paris ne renferme jamais d'oxyde de carbone. Comment donc est-il possible de concilier l'ab- sence complète dans l'air de gaz qu'on y déverse en abondance, avee la présence continuelle de pro- duits qui n'y sont répandus qu’en très faible pro- portion? Ici encore intervient la condensation de la vapeur d'eau, et le phénomène est exactement semblable à celui qui a lieu avec les produits de la respiralion. L'acide formique et ses sels, ainsi que le formal- - déhyde, sont très solubles dans l’eau, et leur disso- lution très étendue n’a pas de tension de vapeur sensible à la pression et à la température ordi- naires. Il s'ensuit qu'ils sont enrobés facilement par les gouttelettes liquides qui les ramènent cons- tamment vers le sol. Au contraire, l'acide carbo- nique et surtout l'oxyde de carbône, fort peu solu- bles, échappent à l’action de l'eau et se mélangent rapidement à la masse atmosphérique, abandon- nant ainsi le lieu où ils ont pris naissance. D'après cela, il est certain que toutes les vapeurs issues des combustions sont capables d'être maintenues dans l'air grâce à l’eau condensée, et de créer par leur présence une pollution permanente de l'atmo- sphère. III J'ai cherché à doser l’ensemble de ces corps doués de propriétés réductrices en les transformant en acide carbonique au moyen de l’oxyde de mer- cure chauffé à 250°. La moyenne annuelle du poids de carbone obtenu ainsi est égale à 1 gr. 9 par 100 mètres eubes d'air dans le centre de Paris et à 1 gr. 3 à Montsouris, au sud de la ville. Ce poids de carbone, qui par lui-même est considérable, reste bien inférieur à celui qu'a obtenu M. Armand Gau- lier, qui a trouvé dans Paris 6 gr. 8; mais il con- vient de remarquer que ces deux catégories de résultats n’ont pas la même signification. Alors que les chiffres de M. Armand Gaulier se rapportent au carbone total contenu dans l'air à l'état de combi- naisons gazeuses autres que l'acide carbonique, ceux qu'a fournis l'oxyde de mercure sont relatifs aux seuls composés du carbone qui sont facilement oxydables, et par suite capables d'avoir sur l’orga- nisme une aclion chimique appréciable. Au point de vue physiologique, ce sont eux qui nous impor- tent le plus. Si l’on examine la variation anouelle du poids de carbone réducteur au centre de Paris et à Mont- souris, on constate que c’est en plein été, alors que le nombre des foyers est minimum, que ce poids est le plus élevé. Ce résultat s'explique aisément si l'on remarque que les mois d'été sont ceux où l’état hygrométrique est le plus faible, et conséquemment où les condensations sont le moins intenses. Les gouttelettes qui subsistent sont alors très petites et ne tombent que fort lentement sur le sol, de sorte que toutes les vapeurs qu’elles ont dissoutes res- tent en suspension dans l'atmosphère, qui se trouve alors au maximum de pollution. L'hiver, au con- traire, où les condensations sont nombreuses et intenses, où les gouttes liquides sont très grosses et tombent rapidement sur le sol, l'air atmosphé- rique se débarrasse plus vite qu'en été de ses vapeurs malsaines. Malgré tout, il faut malheureusement constater que, d'un bout de l'année à l’autre, l'atmosphère de Paris reste polluée ; que, d'une part, les brouillards et les brumes sont le réceptacle de toutes les impu- relés de l'atmosphère, et que, d'autre part, les jours d'été, l'air, quoique généralement plus sec, n'est guère favorable aux poumons, puisqu'il con- lient des matières réductrices en plus grande quantité. 1 188 Nous pouvons donc considérer comme établi le principe suivant : Lorsque, dans l'atmosphère d'une ville,on déverse un mélange de produits gazeux comprenant : d'une part, des substances insolubles dans l'eau à la pres- sion où elles se trouvent dans le mélange, et, d'autre part, des substances solubles dans les mêmes con- ditions, les premières se dispersent dans toute la masse atmosphérique, tandis que les secondes se condensent avec la vapeur d'eau et sont ramenées dans les souches inférieures de l'air. Ce principe résume l’ensemble des phénomènes | physiques qui concourent à la pollution de l’air des villes quand cet air est au repos; il ne tient nulle- ment compte de l’état d'agitation de l'atmosphère, et l’on peut se demander ce qu'il devient dès que souffle un vent violent. La réponse à cette question est facile. L'analyse quotidienne montre,en effet, que par tous les temps, secs ou humides, calmes ou agités, l'air est souillé de gaz réducteurs. Il est probable que les obstacles que rencontre le vent dans sa marche, à l'intérieur d'une grande ville comme Paris, s'opposent au re- nouvellement de l'air; mais la situation topogra- phique de la ville joue certainement, dans la cir- constance, le rôle prépondérant. Si, en effet, on examine Paris des hauteurs qui l’avoisinent, on voit très fréquemment, à la place où se trouve la cité, une immense cuvette remplie de vapeurs plus | ou moins épaisses, qui n'en occupent que le fond. Les courants atmosphériques balayent la partie supérieure de la cuvette, mais ne produisent dans la parlie inférieure que des remous inefficaces. Aussi, peut-on compléter le principe précédent par le suivant : Dans une ville de grande étendue, surtout si elle se trouve à l'intérieur d'un vallonnement, les cou- ches inférieures de l'air ne se renouvellent qu'avec une vitesse plus faible que celle de la pollution, ou ne subissent, de la part de l'air des hautes régions, qu'un brassage sur place, sans purification appré- ciable. Nous avons vu tout à l’heure que l'air de la mer, le seul qu'on puisse considérer comme à l'abri de toute contamination, contient, outre les gaz élémentaires : de la vapeur d'eau, de l'acide carbo- nique et de l’ozone en tout temps; jamais on n'y rencontre de gaz réducteurs. C’est bien là l’atmo- sphère type, que nous devons considérer comme pure el qui nous servira de terme de comparaison. Celle des campagnes isolées et des montagnes s'en rapproche d’ailleurs beaucoup. Les propriétés d'une atmosphère pure diffèrent essentiellement de celles de l'air des grandes villes. Dans celles-ci, nous l'avons vu, on ne trouve de l'ozone que bien rarement el grâce à des conditions H. HENRIET — L'ATMOSPHÈRE DES VILLES À h météorologiques spéciales. Cela tient à ce que les gaz réducteurs produits sont en proportion telle- ment grande par rapport au gaz oxydant, —1 gr. 9 de carbone, vis-à-vis de 2 à 3 milligrammes d'ozone, — que ce dernier disparait intégralement. Cette disproportion entre les réducteurs et l'ozone montre | jusqu'à l'évidence qu'il est impossible de consi- dérer l'ozone comme un épurateur de l’air, et, si son action sur l'organisme est indiscutable, elle ne peut se manifester qu'en l'absence des gaz réducteurs, ce qui est loin d’être le cas dans l'intérieur des villes. Il résulte de tout ceci que, chimiquement, on peut nettement différencier l’air des villes de l'air pur, au moyen de la formule suivante : L’altmosphère des campagnes et de la mer pos- sède toujours des propriétés énergiquement oxy- dantes ; au contraire, celle des grandes villes est toujours réductrice. Il y a là une divergence de propriétés extrème- 0 ment nette, et il est infiniment probable que l'état d'infériorité physique du citadin sur le campagnard est dù, en partie, à l'air que chacun d'eux respire. » IV Comme je l’ai dit en commencant. on a considéré depuis longtemps l’ozone comme un épurateur très aclif de l’air, à cause de ses propriétés énergique- ment oxydantes, et nous venons de voir que l'on avait bien tort, sinon en principe, du moins en fait. On a même été jusqu'à voir dans sa présence, en un lieu donné, un gage certain de la pureté de Fair. Il y a là encore une grosse erreur. L'ozone, qui existe dans les campagnes à la dose de 2 à 4 milligrammes par 100 mètres cubes d’air, est certainement un antiseptique puissant, et son efficacité sur l'appareil respiratoire est connue en thérapeulique depuis longtemps; mais sa pré- sence en un lieu déterminé ne prouve pas que l'air soil pur en ce point. Ainsi par exemple, à Mont- souris, on trouve de l'ozone chaque jour. et cepen- dant on y rencontre aussi des gaz réducteurs en abondance. Est-ce à dire qu'oxydants et réducteurs puissent subsister dans une atmosphère humide, et par suite favorable aux aclions chimiques, sans se détruire? Cela est bien peu vraisemblable, car l'expérience prouve que l’ozone réagit énergiquement sur les gaz réducteurs de l'air, et je citerai en particulier son absence complète à l’intérieur de Paris, qui ne peut être expliquée que par un phénomène de des- truction. Les deux expériences suivantes vont vous donner la clef de l'énigme. Exposons dans l'air, au sud de Paris par exemple, un papier imprégné d'iodure de potassium et d’empois d’amidon. Si le vent vient du di | H. HENRIET — L'ATMOSPHÈRE DES VILLES 189 Sud ou du Sud-Ouest, c'est-à-dire directement de la campagne sans avoir traversé la ville, nous verrons le papier bleuir peu à peu, par suite de la formation d'iodure d'amidon sous l'influence de l'ozone. Mais, que le vent vienne à changer de direction et arrive du Nord en traversant Paris dans la largeur, nous verrons alors que, non seulement la teinte du papier n'augmente plus d'intensité, mais encore qu'il se décolore. Pour effectuer la seconde expérience, disposons à l'air extérieur, d'une part un papier ioduré et amidonné sensible à l'ozone, ét d'autre part, sur une soucoupe de porcelaine, des gouttes de réactif de Nessler que le formaldéhyde à la propriété de réduire rapidement en donnant des taches noires de mercure métallique. Quand le vent vient du Sud-Ouest, le papier se colore, mais l’autre réactif reste intact. Inversement, quand le vent souffle du Nord ou de l'Est, c'est le réactif de Nessler qui noir- cit, sans que le papier perde rien de sa blancheur. On voit donc nettement qu'à Montsouris, par exemple, l'ozone et les gaz réducteurs se succèdent suivant la direction des vents, mais sans jamais exister en même temps. Le lieu considéré dans nos expériences est donc soumis : tantôt à des vents oxydants, lantôt à des vents réducteurs, et la pré- sence de l'ozone ne prouve nullement que l’atmo- sphère y soit toujours pure. Celle-ci est naturelle- ment préférable à celle d'un point où l'ozone n'existe jamais, mais rien de plus. Aussi, la formule qui détermine les conditions auxquelles doit satisfaire l'air pur peut s'énoncer comme suil : L'atmosphère d'un lieu est exempte de toute souillure émanant des grandes agglomérations humaines lorsqu'elle renferme de l'ozone d'une façon permanente, bien qu'en proportion variable, et quand on n'y constate jamais la présence de produits réducteurs et surtout du formaldéhyde. Etant donné que les propriétés oxydantes d’une atmosphère pure sont dues à l'ozone, on est fondé à rechercher l'origine de ce gaz. Sa formation a été attribuée d’abord aux effluves et aux étincelies électriques qui se produisent pendant les orages ; puis, quand on s’est apercu que l'ozone existe d'une facon permanente et que l'explication était au moins incomplète, on a pensé que les combustions lentes qui se produisent à la surface du sol ou durant la vie végétale pourraient bien être la cause de la formation continuelle de l’ozone. On . sait, en effet, qu'une combustion vive, comme dans le cas d'une flamme, produit de l'ozone si l’on refroi- dit l'air environnant assez rapidement, et qu'une combustion lente, comme celle du phosphore, est toujours accompagnée de la produclion d'une petite quantité d'ozone. Ces divérses hypothèses sur l’origine de l’ozone me paraissent peu fondées. D'abord, on n'a jamais pu mettre en évidence la formation d'ozone, ni à la surface du sol, ni au milieu des bois. On a bien prétendu que les bois de pins, si appréciés en théra- peutique, devaient leurs vertus à l'ozone qui se formerait par oxydation des térébenthines, mais les méthodes employées pour s'assurer du fait sont trop discutables pour qu'on puisse accepter les résultats auxquels elles ont conduit. De plus, il paraîtrait singulier d'admeltre que l'ozone prend naissance au niveau du sol, ce milieu étant, par excellence, le plus favorable à sa destruction. Cependant, si malgré tout il en était ainsi, la pro- portion du gaz oxydant devrait diminuer avec l’al- titude, et c'est tout le contraire qu'on observe. Ainsi, par exemple, M. Maurice de Thierry a obtenu aux Grands-Mulets, à 3.020 mèlres d'altitude, un poids d'ozone égal à 9%8',4 par 100 mètres cubes, tandis que le même jour, à Montsouris, on n'en trouvait que 1€",9, c’est-à-dire cinq fois moins. Il faut donc rechercher l'origine de l'ozone ailleurs que dans les phénomènes de combustions lentes dont le sol est le siège. L'expérience montre qu'à Montsouris l'ozone est maximum par les vents du Sud-Ouest et décroit quand la direction du vent change, bien que, lors- qu'il souffle entre l'Est et l'Ouest, il ne passe pas sur Paris. Naturellement, l'ozone diminue encore quand les vents soufflent des régions Nord, parce que, dans ce cas, ils ont traversé toute la ville. Un second facteur important de l'augmentation de la teneur de l’air en ozone est la pluie. Chaque précipitation atmosphérique est toujours accompa- gnée d'une élévation du taux d'ozone. Des expériences encore inédites m'ont permis de considérer les vents soufflant du Sud-Ouest comme capables d'apporter à la surface du sol l'air des hautes régions de l'atmosphère. Les pluies agissent vraisemblablement de même en entraînant, autour de chaque goutte liquide, une gaïne de l'air où elles ont pris naissance. Dès lors, on est en droit de penser que c’est dans les hautes régions que l'ozone se forme, sous l'influence probable des radiations ultra-violettes émises par les rayons solaires que rien n'arrête, ou peut-être encore sous l’action des effluves dont l'air très rarélié peut être constamment le siège, ainsi que l’ont montré les beaux travaux de M. Bouty sur la limite de l’état diélectrique dans les gaz. V Maintenant que nous connaissons le mécanisme de la pollution de l'air dans les villes, il nous est possible d’en tirer un enseignement pratique pour 190 l'avenir, afin d'éviter les conséquences fâcheuses de l'état de choses actuel. Nous voyons, tout d’abord, que la position d’une ville dans un repli de terrain est une condition défavorable à son aération; c’est en plaine ou sur une élévation qu'il faudrait la bâtir. Malheureusement, on se heurte ici à des questions économiques qui priment tout. C'est, en effet, la facilité des communications par eau, par terre, ou par voies ferrées, ainsi que la proximité des régions fertiles, qui déterminent l'emplacement d'une cité. Aussi, de ce côlé, y a-t-il peu de chose à espérer pour l'hygiène. Mais, en considérant une ville quelconque, on pourrait encore l’assainir en ayant soin d'orienter ses rues dans la direction des vents les plus violents. Pour arriver dans ces conditions à un bon résul- tat, il serait indispensable encore de réduire le plus possible les obstacles que rencontrent les cou- rants aériens en augmentant la largeur des voies publiques et en réduisant la hauteur des édifices. De cette façon, même si la ville se trouvait encais- sée, la couche d'air qui passerait au-dessus d'elle pourrait encore, par diffusion, renouveler suffisam- ment l'atmosphère au niveau du sol. En ce qui concerne les atmosphères confinées, qui contiennent toujours, quoi qu'on fasse, les gaz réducteurs de la respiration, il convient de les aérer très fréquemment. Mais, sous prétexte d'évi- ter les microbes, il ne serait pas sage de maintenir dans un local habité des appareils formogènes, qui entretiennent toujours une atmosphère réductrice. D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE Le formaldéhyde, envisagé comme agent de stérili= sation, ne doit êlre utilisé que dans des locaux évacués pendant, au moins, le temps nécessaire à lan désinfection. Cependant, si l’on voulait purifier d'une manière continue l'atmosphère d'une pièce toujours occupée, c’est à l'ozone qu'il faudrait s'adresser, puisqu'il nous est indiqué par la Nature elle-même. Son emploi est, il est vrai, pour l'ins- tant, peu pralique, mais il peut être remplacé par les rayons solaires, dont les propriétés antisep- tiques sont bien connues. On sait, en effet, aujourd’hui, que l'atmosphère est le siège d'un rayonnement perpétuel, dont les causes sont multiples. À côté des rayons émis par les corps radio-actifs dont le sol envoie les émana- tions dans l'atmosphère et desquels les propriétés physiologiques sont encore à l'étude, l’astre qui nous éclaire produit sur le globe terrestre un rayonnement très complexe. Les ondes lumineuses, en particulier, ont fait l’objet de nombreuses re- cherches, et la photothérapie, ou traitement de cer- taines maladies par la lumière, a déjà fait ses preuves; quant à la partie ultra-violette du spectre 4 ' QUr solaire, qui possède des propriétés bactéricides très M prononcées, nous lui devons un culte spécial, que nous ne pouvons lui rendre qu'en donnant large- ment accès dans nos demeures à la bienfaisante lumière du soleil”. H. Henriet, Docteur ès Sciences. LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE DEUXIÈME PARTIE : LES TRANSPLANTATIONS NERVEUSES Dans un premier arlicle!, nous avons examiné les principaux phénomènes qui caractérisent la dé- générescence et la régénération des nerfs section- nés. L'étude des transplantations nerveuses est de nature à jeter une certaine lumière sur le méca- nisme intime de la dégénérescence et la régénéra- tion nerveuses; aussi croyons-nous nécessaire d'exposer ici quelques recherches sur ce sujet. Il y a longtemps que plusieurs auteurs se sont oc- cupés de celte question, mais il faut arriver aux expé- riences de Merzbacher pour apprécier la juste valeur de ce genre de recherches. Cet auteur a montré ! Voir la Æsvue du 28 février 1907, t. XVIII, p. 145. que les essais de transplantation d'un morceau de nerf de lapin à un cobaye, du cobaye au lapin, du chien au lapin et du lapin au chien, ete., s’accom- pagnent, en général, non pas de la régénérescence du nerf transplanté, mais, au contraire, de sa né- crose. Si la transplantation a dieu du chien au chien, du lapin au lapin, du cobaye au cobaye, le nerf transplanté présente les caractères de la dé- générescence wallérienne. En d’autres mots, la dégénérescence n'existe que dans des cas d’auto- et d’homo-transplantation. Merzbacher * a constaté que la myéline des fibres 1 Conférence faite au Laboratoire de M. Haller à la Sor- bonne le 13 décembre 1906. à 2 MerzeaCcHeR : Zur Biologie der Nervendegeneration (Er- gebnisse von Transplantationsversuche), Neurol. Central- blatt, 15 février 1905. CR TS TS tft ns ras Se 40.2 LR La D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME nerveuses des nerfs transplantés ne se colore qu'incomplètement et prend parfois une nuance brune ou grisätre; elle a un aspect rigide. A la sur- face des fibres nerveuses, on voit des produits de coagulation, mais il n'y a pas de boules ni de gout- telettes de myéline. Il s'agirait donc, nor pas d’un processus de dégénérescence, mais de la nécrose. Nous avons repris, avec le concours de nos pré- parateurs MM. Goldstein et J. Minea, l'étude des transplantalions nerveuses : le nombre de nos expériences étant considérable (elles dépassent la centaine), nous ne pouvons en donner qu'un court résumé. Elles ont porté sur des chiens, des chats, des lapins, des cobayes, des corbeaux, etc.; et l'on a fait les transplantations du nerf de chien, soit au même chien ou à un autrechien, c'est-à-diredel’auto- et de l’homo-transplantation, ou bien du chien au chat, au lapin ou au cobaye, etc. À certains points de vue, nos recherches concordent avec celles de Merzhacher; à certains autres, elles en diffèrent; en tous cas, elles les complètent, car cet auteur n'a eu en vue que la myéline. En outre, il ne s'est pas occupé des modifications du cylin- draxe et des cellules de Schwann, ni des phéno- mènes vasculaires, qui sont de beaucoup les plus importants. Dans la grande majorité des cas, on a transplanté un morceau de nerf à la place d'un autre. Ce n’est que très rarement qu'on a pratiqué les expériences sous la peau. Lorsqu'on enlève un morceau de nerf et qu'on le place sous la peau chez le même animal ou bien chez un autre de la même espèce, on cons- tate, au bout d’une semaine, en dehors de la fragmentation de la myéline et de l’axolyse, l’ap- parition d'un grand nombre de cellules fusi- formes, à noyau oblong, disposées en faisceaux orientés dans diverses directions. En tout cas, on ne voit pas de faisceaux de cellules satel- lites faciles à suivre sur une très grande distance ; la plupart d'entre eux sont courts ets’entre-croisent. Ces cellules apotrophiques présentent un noyau oblong, beaucoup de granulations et de un à deux nucléoles. Parfois, elles offrent des vacuoles. Le morceau transplanté ainsi n'offre pas de fibres de nouvelle formation, ni après six jours, ni après seize et vingt jours. Lorsqu'on à fait les transplantations d'un nerf sur le trajet d’un autre nerf de la même espèce, l’aspect extérieur et les modifications histologiques fines du morceau transplanté ont varié avec la Survie de l'animal. On peut dire cependant qu'en général le morceau de nerf transplanté, dans les cas d'auto- et d’homo-transplantation, s'est rap- proché d'autant plus de l'aspect et des qualités du nerf réséqué que l'animal a survécu plus long- temps; de sorte qu'après un certain temps il s'est DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE 191 trouvé incorporé. Au contraire, dans les cas d’hété- ro-transplantalion, même si ce morceau a été trouvé réuni aux deux bouts du nerf réséqué, son aspect différait complètement du nerf autochtone. Ainsi, on le trouvait tuméfié, d'une coloration ocreuse, parfois grisätre, et sa consistance était parfois plus grande que celle du nerf propre de l'animal. Ces expériences prouvent que la réunion des deux bouts sectionnés ne dépend pas toujours de la régénéres- cenceet qu'elle peut se faire sans que la régénéres- cence existe. Les lésions histologiques du morceau de nerf Fig. 4. — Hétéro-transplantation du eubital du chien sur le lapin. — On y voit trois cylindraxes profondément altérés sous trois aspects différents : A. Cylindraxe sous la forme d'un cordon sinueux, par suite de la résorption d'une partie de son trajet. On y voit la présence de granulations fortement colorées, en- tourées d'une auréole, tandis que la masse du cordon est homogène ou bien finement granuleuse. B. Fragment du cylindraxe également sinueux, à la sur- face duquel sont disséminés de gros corpuseules colorés en noir foncé. = : À x C. Cylindraxe sinueux gonflé sur une partie de son lrajet, échancré sur d'autres, présentant des granulalions plus fines. transplanté dépendent de la durée de survie de l'animal chez lequel on a pratiqué la transplanta- tion, de l'épaisseur du nerf et de l'espèce animale. Considérées en général, ces lésions ne sont pas comparables à celles de la dégénérescence wallé- rienne. Toutefois, j'ai pu constater, lorsqu'il s'agit de nerfs minces transplantés chez le chien, que beaucoup de fibres subissent des modifications 192 comparables à celles de la dégénérescence wallé- rienne. Tout d'abord, nous remarquons que le nerf, transplanté sur une espèce animale différente, ne présente pas les modifications d'axolyse avec les caractères que nous lui avons trouvés dans les cas de section nerveuse. Les cylindraxes ne se désagrè- gent pas et ne présentent pas la dégénérescence granuleuse que nous avons décrite plus haut. Ils gardent pendant assez longtemps leur aspect exté- rieur et ce n’est qu'au bout de dix à quinze jours qu'on peut voir un grand nombre de granulations aa D Er LAS... 6e Fig. 2. — Coupe longitudinale d'un fragment de cylindraxe dun lapin transplanté chez le chien. — On y voit trois cylindraxes d'aspect différent : A. Cylindraxe ayant gardé sa continuité, mais présen- tant des renflements et des régions rétrécies sur son trajet. Toute sa surface est couverte de granulations noires. A!. Les tuméfactions de la fibre sont plus considérables que dans le cylindraxe voisin: il est alternativement très tuméfié et atrophié. A!". Cylindraxe fragmenté en différents morceaux. Ces fragments fca, fea' sont couverts de véritables corpuseules a contour double; leur centre est plus clair. grossières, logées à la surface ou à l’intérieur, parfois même très volumineuses, entourées ou non d'une auréole (fig. 1 et 2). La fragmentation des cylindraxes, dans ce cas,estégalement tardive. Cette altération se propage du bout supérieur vers le bout inférieur. Il n’y a pas formation de cellules apotrophiques, ou bien il n'y en a qu’à l'extrémité D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE supérieure, provenant sans doute du bout central du nerf sur le trajet duquel on a fait la transplan- tation. On a l'impression que, dans ces cas d’hétéro- transplantation, le cylindraxe subit un processus de nécrose ; mais je ne pense pas qu'il y ait lieu de considérer cettenécrose d'unnerfhétéro-transplanté comme étant tout simplement un phénomène passif et de l’assimiler aux phénomènes d’axolyse qui ont lieu lorsqu'on place un morceau de nerf dans un liquide aseptique. Dans le but d'apporter quelque lumière sur le — Extrémité supérieure d'un fragment du nerf scia- tique d'un chien prélevé une heure après la mort et trans- planté sur le trajet du nerf sciatique d'un chien vivant, sacrilié dix-huit Jours après cette opération. — On y voit une colonie de cellules apotrophiques juxtaposées c.c.a, Fig. 3. puis quelques autres cellules isolées ca!, ca! ; ensuite des macrophages M, M', et des cellules mononucléaires m, m'. Les fibres nerveuses ont complètement disparu. mécanisme de l'homo et de l'hétéro-transplantation, nous avons pratiqué les expériences suivantes : Tout d'abord, on a pris sur le cadavre d’un chien, mort depuis une heure, un morceau de nerf sciatique qu'on à transplanté sur le trajet du même nerf chez l'animal vivant; celui-ci a été sacrifié dix-huit Jours après cette opération. L'aspect du morceau trans- planté n’est pas le même sur toute son étendue. A l'extrémité supérieure, on ne voit plus trace des ST IT PO OP OE RÉ TT te, D: G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE 193 cylindraxes, mais à leur place on trouve des macro- phages, des polynucléaires et des lymphocytes. Entre ces cellules émigrées, on voit des colonies de cellules apotrophiques, ou des cellules isolées, mais pas de jeunes axones (fig. 3). À un niveau un peu plus inférieur, on trouve, à la place du cylindraxe, de gros fragments irréguliers, couverts de gra- nules et de granulalions noires ou foncées, ou bien parfois creusés par les vacuoles. À mesure qu'on se rapproche de l'extrémité inférieure du boul transplanté, on ne constate plus celte frag- re. AL Fig. 4. — Méme cas que la figure précédente. — Trois cylin- draxes f.c.a, f.c.a!, f.c.a! fragmentés, en état de nécrose et de vacuolisation. Les fragments sont couverts d'un grand nombre de granules et de granulations représen- tant probablement des produits de coagulation. Cette figure a été prise à un niveau inférieur à celui de la figure précédente. mentation (fig. 4), résullant sans doute du morcel- lement du cylindraxe tuméfié, mais des cylindraxes -continus à trajet plus ou moins irrégulier (fig. 5). On peut, par conséquent, assimiler les phénomènes biologiques qui se passent dans un nerf pris sur le ‘cadavre et transplanté sur l'animal vivant aux altérations histologiques qui se passent dans un nerf hétéro-transplanté. En résumé, le‘morceau de nerf estsouventinvadé, dans les cas d'hétéro-transplantation, d'un grand REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. nombre de leucocytes, polynucléaires, éosinophiles. Le liquide de Flemming fait voir dans ces polynu- cléaires des granulations noires. En ce qui con- cerne la myéline, un certain nombre de fibres peuvent offrir la fragmentation, tout comme dans la dégénérescence wallérienne ; dans d’autres, la myéline est incolore, ou bien il se dépose à sa sur- face un grand nombre de fines granulations tein- tées en noir par l'acide osmique; le cylindraxe est, au commencement, d'aspect uniforme, ou légère- ment granuleux, rigide, ou bien enroulé sur lui- Méme dentes. — Celle-ci a été prise à un niveau encore plus inférieur. Trois cylindraxes A', A!, A!!. nécrosés, gardant Fig. 5. cas que celui des deux figures préce- cependant leur continuité: il n'y a que le cylindraxe A' qui présente un commencement de fragmentation. Ces cylindraxes sont couverts de græmules et de granulations de volume inégal et fortement colorées en noir. mème. Plus tard, on observe dans sa substance un grand nombre de granulations fines, colorées en noir par le liquide de Flemming. Plus tard encore, la méthode de Cajal nous fait voir de gros corpus- cules fortement imprégnés, disséminés sur toute l'étendue du fragment de cylindraxe. Ce dernier ne présente pas le même degré de lésion, les uns étant plus altérés que les autres. En tout cas, la lésion débute toujours au niveau du bout supérieur du morceau transplanté et est en rapport avec l'ex- 5* D: G. MARINESCO — LE MÉCANISME trémité du bout supérieur du nerf autochtone. Le réseau de kéraline des fibres du nerf transplanté, malgré sa résistance, paraît être détruit ; cependant, le fait qui importe dans ces transplantations, c’est l'absence de colonies cellulaires apotrophiques dé- rivant de la prolifération des cellules de la gaîne de Schwann avec formation consécutive des fais- ceaux et de colonies de cellules apotrophiques. Ce sont ces cellules qui assurent la régénérescence dans le cas de section, d’auto- et d'homo-transplan- tation des nerfs, car ce sont elles qui dirigent et qui nourrissent les fibres nerveuses nouvellement formées dans le bout central. Comment expliquer les modifications si étranges que nous venons de décrire après les transplanta- lions nerveuses? Je crois que, pour comprendre ces phénomènes, il faut faire appel aux recherches à tous égards si intéressantes de Bordet, d'Ehrlich et Morgenroth, de Metchnikoff, etc. Il en résulte que tout corps albuminoïde, ou ayant une constitution moléculaire qui se rapproche de celle des matières protéiques, est capable de provoquer la formation de substances spéciales, à la condition qu'il ne pro- vienne pas de l'animal même qui sert à la fabrica- tion de ces anticorps. C'est ainsi, et c'est le cas qui nous intéresse dans l'espèce, que les spermatozoï- des, les leucocytes et les épithéliums vibratiles, introduits sous la peau ou dans la cavité péritonéale d'animaux appartenant à une espèce étrangère, in- citent le protoplasma à fabriquer des substances capables d'immobiliser, d’agglomérer ou de dé- truire ces cellules. On désigne ces substances sous le terme générique de cytotoxines. Dans nos cas de transplantalions nerveuses d'une espèce animale à une autre, l'organisme tâche de se défendre contre ces corps étrangers par des réactions cellulaires qui conduisent à la formation d’une neuro-toxine, laquelle empêche la formation des cellules apotrophiques, qui constituent la base de la régénération nerveuse. Aussi, le nerf trans- planté meurt et finit par disparaitre. Il y aurait cependant des objections à faire à cette manière de voir. Par exemple, on pourrait soutenir que le nerf transplanté meurt parce qu'il ne se trouve plus dans des conditions favorables, parce qu'il est privé d'oxygène, étant donné que les connexions vasculaires des morceaux transplantés ont été in- terrompues et, par conséquent, l'apport d'oxygène supprimé. À cette objection, on peut répondre par le fait que, si la transplantalion se fait à la même espèce, les connexions vasculaires sont également supprimées, et cependant le nerf vit et est capable de régénérescence. Il semble donc que l'hypothèse la plus probable est toujours celle qui fait inter- venir la production d’une cytotoxine. DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE IT Je ne connais pas encore d'essais de transplanta= tion de ganglions nerveux. Aussi, j'ai entrepris: une série d'expériences avec mes préparateurs, MM. Goldstein et J. Minea, dans le but d'étudier le sort des cellules ganglionnaires lransplantées sous: la peau ou bien sur le trajet d'un nerf du même animal ou d'un autre de la même espèce. Les lé- sions cellulaires sont déjà visibles cinq heures. après Ja transplantation du gangliou: elles portent sur tous les éléments constitutifs du ganglion ner-« veux. Après ce laps de temps, on observe de la chromatolyse diffuse, et il persiste encore quelques corpuseules de Nissl dans le cytoplasma, mais ils sont réduits à des granulations irrégulières. La sub- slance fondamentale de la cellule est colorée plus « ou moins intensément. Quelques cellules présen- tent une chromatolyse périphérique. Dans la cap- sule du ganglion, comme autour des cellules ner. veuses et dans le tissu interstitiel, on voit un certain nombre de cellules polynucléaires, et les. cellules de la capsule ont leur noyau plus développé, de même que les cellules interstitielles. En dehors de la turgescence du noyau et de l'augmentation de la chromatine, on peut voir parfois la multiplication. » des cellules satellites. Dix heures après la trans- plantation, les lésions sont beaucoup plus avan- cées et les cellules nerveuses ont une coloration diffuse; il n'y a plus de corpuscules de Nissl et le corps cellulaire offre une coloration violette dont l'intensité est très variable: parfois il est très päle, son volume a diminué plus ou moins, et certaines M cellules sont atrophiées et rétractées; le noyau, tantôt central, tantôt légèrement déplacé, change: également sa forme : le contour en est irrégulier et le contenu coloré; il peut être également atrophié: Le nucléole ne se colore pas si-intensément qu'à s l'état normal ; il est plus pâle, surlout dans la partie centrale. Les cellules ganglionnaires sont inégale- ment altérées : certaines sont très pâles avec le noyau alrophié, tandis que d'autres présentent encore des corpuseules de Nissl. On trouve aussi,: dans ce cas, la réaclion et la multiplication des: cellules satellites. A la périphérie des ganglions, il M a une affluence considérable de leucocytes polynu- cléaires, quelques-uns en voie de dégénérescence; ceux-ci pénètrent dans le tissu interstitiel (nous les: trouvons entre les cellules satellites) et même à l'intérieur de la cellule nerveuse ; il y a aussi for- mation de vaisseaux. Si l’on emploie comme méthode de coloration le procédé de Romanowsky, on voit que le eylo- plasma des cellules altérées se colore le plus sou- vent en rose, et celles qui le sont moins conservent encore une certaine quantité de substance chromaz- ki D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE 195 tophile colorée en violet ou en rouge violet. Done, il y a changement de réaction ; les cellules péri- phériques ont mieux gardé leur structure. Après quinze heures, il se produit encore une exagéralion des lésions cellulaires ; le corps de la cellule parait plus diminué, les cellules satellites plus nombreuses et la pénétration des polynu- eléaires dans le cytoplasma nerveux plus abon- dante. Les lésions quatre heures (fig. 6); cepen- dant, certaines cellules de la périphérie sont mieux conser- vées que leurs congénères des couches plus profondes. La plupart des cel- lules se trou- vent en état d’achromatose relative ou mê- me absolue. Les lésions du noyau et de la malléole mar- chent de pair avec celles du cytoplasma; il y a coloration diffuse du côté du noyau, dé- coloration à peu près com- plète du nu- cléole et, d’au- s'accentuent encore après vingt- se colorent d'une facon plus foncée. Enfin, il ya encore des cellules qui ne possèdent plus la moindre trace de réseau ou de neurofibrilles. Les fibres nerveuses à myéline intraganglion- naires présentent une dégénérescence consistant dans la formation de tuméfactions ou d'ampoules sur le trajet des cylindraxes. Les neurofibrilles sont dégénérées. Les fibres sans myéline sont plus résistantes, ce qui cadre bien, | ainsi que nous le verrons immédiatement, avec la résistance plus grande des cel- lules sympathi- ques à l’absen- ce d'oxygène. Le ganglion qui a séjourné trois jours sous la peau après sa transplanta- tion offre ‘des lésions encore plus profondes: La plupart-des cellules sont presque invisi- bles par la mé- thode de Nissl, mais leur cyto- plasma pâle se colore encore avec la métho- de de Roma- nowsky. Le contour de la cellule est bien indiqué par la prolifération des cellules sa- tres fois,kario- Fig. 6. — Portion d'une coupe du ganglion plexiforme dans un cas d'auto-trans- tellites,quileur lv ü re plantation. — Après vingt-quatre heures, on voit deux espèces de cellules : À t yse. e plus les unes en achromatose presque absolue (ca, ca!, cal); les autres, en état de constituentune souvent, le chromatolyse difuse, sont colorées en bleu foncé (c.e, c.c!); deux d'entre ces espèce de cou- noyau est atro- phié, il a chan- gé de forme, il est oblong, ovoide, en forme de comète, etc. Parfois, très atrophié, ilest à peine visible. ( La méthode de Cajal nous montre qu'en dehors des lésions de la substance chromatophile et des changements de réaction du cytoplasma, il ya encore des altérations profondes du réseau cyloplasmique et des neurofibrilles. Au bout de vingt heures, par exemple, on constale dans certaines cellules la dé- générescence granuleuse des travées du réseau ; dans d'autres, elles sont épaissies, granuleuses et dernières ont le noyau excentrique. Dans les cellules en achromatose, on voit des modifications profondes du noyau et du nucléole, qui sont atrophiés; celui de la cellule ca! est réduit à une toute petite vésicule avec une granulation centrale (2). D'autre part, les noyaux ont changé de forme et présentent soit l'homogénéisation, soit la karyolyse (e.s'). ronne. Parfois, la prolifération est abondante au niveau de l'axone ; il est presque impossible dej distinguer le noyau de la plupart des cellules, tellement il est pèle et son contour mal délimité. Souvent, il est atrophié et réduit à une vésicule contenant quel- ques granulations mal colorées. À la surface de la cellule, ou à la périphérie, on voit souvent des polynucléaires, qui peuvent même pénétrer dans le cytoplasma. C'est après trois jours que les cellules commencent à disparaître, et cette disparition se fait de la profondeur vers la surface 196 D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME A la place des cellules nerveuses disparues, on voit des ilots de cellules satellites, soit encore des cellules interstilielles proliférées et un nombre considérable de cellules émigrées. On trouve aussi des cellules à grillages, qui ne sont autre chose que les macrophages chargés d'enlever les débris de dégénérescence. Les parois des vaisseaux de nouvelle formation sont entourées de toutes sortes de leucocytes. En outre, on distingue, entremêlés aux éléments cel- lulaires suscités ou formant des colonies indépen- dantes, des cellules fusiformes réunies en petits faisceaux dont le noyau oblong ou fusiforme est très riche en chromaline ; les deux prolongements qui sont aux deux pôles de la cellule sont plus ou moins longs,suivant le volume même de cette der- nière. Parfois, il se dégage deux prolongements de l’un de ces pôles. Il ne faut pas penser que toutes les cellules des ganglions transplantés seront vouées à une mort immédiate ; en effet, dans plusieurs cas, j'ai eu l’occasion de constater, aussi bien chez les animaux à température constante que chez les animaux à sang froid, la survivance d’un certain nombre de cellules constituant une espèce de bordure à la périphérie du ganglion transplanté. C’est ainsi que, dans un cas d’auto-transplantation du premier gan- glion sacré sur letrajet de la racine du côté opposé, la méthode de Nissl m'a permis d'y voir une à deux rangées de cellules disposées en croissant et dont la plupart sont pourvues de substance chromato- phile variant d'aspect d’une cellule à l'autre. Dans les cellules qui ont gardé leur forme normale, elle est disposée sous forme de bâlonnets, de corpus- cules irréguliers, paraissant moins denses à la périphérie, tandis que la substance fondamentale est fortement colorée, surtout dans la région pro- fonde de la cellule. Les petites cellules ou bien celles qui sont atrophiées contiennent de la subs- tance chromatophile en état de dissolution; aussi revétent-elles l'aspect des cellules chromophiles. La méthode de Cajal nous révèle, en outre, des détails encore plus intéressants : En effet, dans un cas de transplantation du ganglion plexiforme sur le trajet du nerf sciatique, l'animal étant sacrifié 23 jours après, nous avons vu que les cellules per- sistant à la périphérie ont non seulement gardé la structure du réseau achromatique, mais encore quil se détache de leur périphérie des expansions d'aspect anormal finissant par des massues con- sidérables. Ces expansions, qui poussent à la péri- phérie cellulaire, se présentent sous la forme d’un champignon, d’un pied, d’un prolongement épais, ou bien même d'une expansion très fine terminée par un bouton. Dans la profondeur du ganglion, on ne trouve plus de traces des cellules nerveuses ; DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE mais on y voit des colonies de ceilules apotrophiques et de fibres de nouvelle formation : celles-ci pro viennent sans doute du bout central du nerf sciati- que sur le trajet duquel a été intercalé le ganglion. En outre, les fibres de nouvelle formation se diri=M gent vers les cellules nerveuses, qu'elles entourent | sous forme de faisceaux en leur constituant un véritable plexus péricellulaire. Les cellules ner-« veuses reslées plus ou moins intactes ne paraissent | pas persister indéfiniment ; elles finissent aussi par disparaitre. Les éléments nerveux des ganglions transplantés ne peuvent résister à l'injure brutale de l’opéra- tion, étant donnée la suspension immédiate et complète de la circulation et spécialement l'absence de l'oxygène. Il est probable que les cellules qui persistent encore à la périphérie peuventse nourrir quelque temps grâce à l'imbibition des sucs nutri- tifs du milieu où le ganglion a été lransplanté. Lors de la pénétration des vaisseaux de nouvelle forma- tion dans le ganglion, les celiules nerveuses sont déjà mortes, et la circulation sanguine rétablie irrigue seulement le lissu interstitiel et les fibres de nouvelle formation. L'explication des modilicalions cellulaires que nous venons de décrire après la transplantation - d'un ganglion nerveux sous la peau ou sur le trajet d'un nerf du même animal se trouve sans doute dans la suspension de la circulation artérielle. Il se passe quelque chose d’analogue dans la substance grise de la moelle sacro-lombaire après la ligature de l'aorte abdominale. Il ne faudrait pas, cependant, penser que la cause immédiate de ces lésions est due purement et simplement à l'absence complète de matériaux nutritifs dans le ganglion; mais il faut faire intervenir aussi, dans la mort organique et fonctionnelle de la cellule nerveuse, le manque complet d'oxygène. En effet, comme je l'ai montré autrefois, la cellule nerveuse est par excellence un organisme aérobie; l'absence instantanée de l'oxy- gène entraine de graves désordres pour l'édifice de cet élément. D'autre part, les cellules satellites eln les éléments interstitiels du ganglion transplanté, non seulement peuvent vivre, mais encore se mul- tiplient et prospèrent. Donc, ils trouvent à l'inté- rieur de ce ganglion les matériaux nécessaires à leur nutrition. Ce qui prouve que vraiment les lésions profondes que subissent les cellules d'un ganglion transplanté sont dues à l'absence d'oxy= gène, c'est la même expérience pratiquée chez la grenouille, c'est-à-dire chez un animal à sang froid. Les recherches récentes de Baglioni ont montré que, chez les animaux à sang froid, la con= sommation d'oxygène est moins rapide. En effet, la transplantation d’un ganglion spinal de gre- nouille sous la peau d'une autre n'est pas suivie de D' G. MARINESCO — LE MÉCANISME DE LA RÉGÉNÉRESCENCE NERVEUSE la mort rapide des cellules de ce ganglion. Non seulement les cellules peuvent figurer pendant plus de deux semaines, mais elles sont encore capables de réagir et même de se réparer, bien qu'incomplè- tement, ainsi que le montre la figure 7. IT Nous avons vu précédemment que la cellule nerveuse gouverne la nutrition des fibres nerveuses auxquelles elle donne naissance et celle des tissus. Elle conduit les échanges nutritifs, qu'elle modère ou stimule suivant le cas: mais, que le matériel nu- tritif vienne du dehors, et le rôle du système ner- veux selimitealors à régler l'emploi des matières nutri- tives; celte aclion trophique de la cellule nerveuse est sous la dépen- dance immédiate _de son fonctionne- ment. Dans plu- sieurs travaux, j'ai montré le rôle con- sidérable des exci- tations dans le fonctionnement et la nutrition des cellulesnerveuses. Le neurone ne vit que grâce à son fonctionnement ; un centre nerveux séparé de ceux qui luienvoient les ex- citations, ou bien de celui auquel il envoie à son tour des stimulations fonctionnelles, ne peut pas vivre indéfiniment : il s'airophie. A cet égard, les lésions que l’on constate dans l'hémi- plégie infantile du côté de la moelle et du cervelet sont très démonstratives. La corne antérieure de même que l'hémisphère du cervelet en rapport avec l'hémisphère cérébral atrophié ne’ suivent plus leur développement normal; leurs cellules s'atrophient et peuvent même disparaitre. Toute perturbation prolongée dans la fonction d’un neu- rone retentit sur la nutrition et la fonclion du neurone suivant. Ramon y Cajal, à la suite de ses recherches sur la structure des ganglions spinaux etsympathiques et sur la régénérescence des nerfs périphériques, après l'opération : Fig. 7. — Deux cellules du ganglion spinal d'une grenouille transplanté sous Ja peau d'une autre. — Le ganglion a été enlevé dix-huit jours La cellule A se présente avec les caractères du commencement de réparation : le noyau et le nucléole tuméfiés: à la périphérie, il y a une couronne mince de substance chromatophile et aussi dans le centre; à la périphérie de cette cellule, on voit aussi des cellules satellites. Le noyau de la cellule B se présente dans les mêmes conditions que celui de la cellule A; seulement la périphérie, tout au moins en partie, est festonnée, excavée, excavations dans lesquelles logent des cellules satellites. 197 est arrivé à une opinion toute différente de la pré- cédente. Voici,en résumé, la théorie ingénieuse de Ramon y Cajal sur le mécanisme intime de la nutrition du neurone. Il est bien connu que la cellule nerveuse est accompagnée, dans les centres nerveux comme dans les ganglions périphériques, de cellules satel- lites disposées en couronne autour des neurones de la moelle et du cerveau, ou bien se concentrant à l'origine de l’axone. Dans les ganglions sympa- thiques et sensitifs, ces cellules siègent à l'intérieur de la capsule, préférant les régions où il y a des prolongements protoplasmiques, constituant ainsi une espèce de pléiade. Les cellules satellites rem- plissent les exca- valions des cellu- les fenètrées ; elles résolvent le glo- mérule initial des axones descellules ganglionnaires. On peut consi- dérer encore com me cellules satel- lites les petits élé- ments nucléés qui accostent les fi- bres de Rémack et les gaines de Schwann des fi- bres médullaires. A l'état normal, il s'établit, entre ces cellules satel- liles et la cellule nerveuse, une es- pèce d'équilibre autritif, maintenu par une substance sécrétée par le neurone. Cette as- socialion nutritive mutuelle est comparable aux symbioses des algues et des lichens. Lorsque les éléments nobles vieil- lissent, se fatiguent ou meurent, les cellules satel- lites augmentent de volume et se multiplient, parce que les matières inhibitrices ont diminué ou bien font défaut. Alors, elles élaborent des substances excilatrices de l’activité formative des prolonge- ments des cellules nerveuses. Comme conséquence, les cellules des ganglions spinaux donnent nais- sance à des dendrites secondaires et à des ramifi- cations mulliples, comme cela se voit dans les gan- glions spinaux des vieillards. Lorsque le processus de destruction a lieu dans les nerfs périphériques, le cylindraxe meurt et se 198 1 G. FRIEDEL — LES BASES DE LA CRISTALLOGRAPHIE résorbe ; mais les cellules de Schwann proliférées activent la nutrition des fibres nerveuses restées intactes, qui poussent et forment des axones jeunes. D'après Cajal, les cellules de Schwann rempliraient deux rôles successifs, dont le premier consiste dans la destruction de l’axone de la fibre morte, contri- buant à sa résorption, et le second a pour but la création de sources chimiotactiques susceptibles d'attirer les fibres nouvelles. Cajal n'indique pas de quelle manière agissent les cellules satellites des centres nerveux, qui sont de nature névro- glique, sur l’activité nutritive de la cellule nerveuse. La conclusion de Cajal, c'est que le neurone représente une individualité physiologique par- faite seulement en ce qui concerne son activité spé- cifique, c'est-à-dire production d'énergie ct pro- pagation de l'impulsion nerveuse. Les autres phénomènes, particulièrement ceux d'ordre nu- tritif et négatif, tels que l'apparition, la forme et l'accroissement des prolongements, sont subordon- nés à l’action des cellules satellites. Il me semble impossible d'accepter l'hypothèse de M. Cajal, qui dissocie l’activité spécifique ou la fonction de la cellule nerveuse de la nutrition de cet élément. Cajal attribue les phénomènes d'ordre nutritif de la cellule nerveuse à l’action directrice des cellules satellites. En effet, entre ces derniers phénomènes et l’activité spécifique de la cellule, il y a une relation intime. Le fonctionnement intensif de la cellule nerveuse réclame un apport plus considérable de matériaux nutritifs, lui permettant d'augmenter son volume ou bien de subir des modifications plastiques de ses différentes parties constitutives. La condition première de l'apparition des prolongements et des expansions nerveuses réside dans la cellule même. La prolifération des cellules satellites n’est pas de la cellule nerveuse. Il faut, pour cela, que celle-ci soit en état de réagir d'une façon plastique à la suite des excitations externes ou internes. C'est là ce qui nous explique pourquoi, dans différents états pathologiques, comme chez les vieillards, la prolifé- ration des cellules satellites ne s'accompagne pas toujours de la formation d'expansions nerveuses. Je ne veux pas nier par là que les cellules satel- lites ne puissent pas avoir d'influence excitante et formative sur le corps du neurone, mais je crois qu'il est nécessaire que ce dernier soit capable de répondre à ces excitations par des phénomènes d'organisation plastique ; or, lorsque cette propriété est épuisée, comme cela a lieu dans les atrophies, on peut constater de véritables nodules de cellules satellites, pendant que la périphérie de la cellule nerveuse est complètement dépourvue d'expansions. D' G. Marinesco, Professeur à la Faculté de Médecine de Bucarest. LES BASES DE LA ET LES THÉORIES SUR LA M. Wyrouboff a montré dernièrement’ aux lec- teurs de la evue quel est l’état actuel de cette sorte de métaphysique panachée de mysticisme que l’on tente aujourd’hui de substituer à l’une des plus précises et des plus claires parmi les sciences phy- siques, la Cristallographie. Je crains que la répu- tation médiocre dont jouit cette science auprès du public non spécialiste n'en ait pas été améliorée, et je voudrais, en laissant de côté une polémique de détail”, qui ne saurait intéresser les lecteurs, 1 Revue générale Sciences du 30 décembre 1906. #11 me sera permis de dire, cependant, que les opinions que M. Wyrouboff me prète dans son dernier chapitre ne sont pas les miennes. Jamais je n'ai dit que les théories de la structure fussent illusoires et stériles : on verra plus loin ce qu'il en est. De même pour les axes ternaires irrationnels : dans le haut de la page 1059, M. Wyrouboff en fait des « exercices géométriques sans porlée cristallographique » : en note, il CRISTALLOGRAPHIE STRUCTURE DES CRISTAUX essayer de leur faire comprendre combien, pour tirer de la Cristallographie tout ce qu'elle peut donner légitimement, il est inutile de sortir du domaine des sciences positives, de parler avec dédain des « lois empiriques », de prétendre subs- tituer aux faits d'expérience et d'observation de vagues raisonnements a priori dépourvus de base expérimentale et dont l'inexactitude, une fois si- gnalée, saute aux yeux. Je voudrais montrer qu'en restant sur le terrain solide des faits, sans rêve- ries et sans habiles détours de langage, on peut bâtir une théorie de la structure des milieux cris- tallisés. reconnait que l'on peut en déduire que les cristaux ont la structure réticulaire, ce qui n'est pas déjà si mal pour un, exercice sans portée. Mais celle conclusion, qu'il attribue à Hecht et qui, dit-il, est « exactement contraire » à celle de M. Friedel, c’est la mienne tout simplement, un peu accen= tuée seulement dans le sens de laffirmation. suffisante pour l'émission des expansions nouvelles . G. FRIEDEL — LES BASES DE LA CRISTALLOGRAPHIE 199 I. — DÉFINITION DU MILIEU CRISTALLISÉ è ET DU CRISTAL. Qu'est-ce, d’abord, qu'un milieu cristallisé? La réponse aujourd’hui classique, malheureuse- ment due à Mallard, mais adoptée, sauf quelques “variantes de détail, par les cristallographes con- -temporains, est celle-ci : Le milieu cristallisé est “un milieu anisotrope et homogène. Anisotrope, “c'est-à-dire qu'il n'a pas les mêmes propriétés ; “vectorielles dans toutes les directions. Homogène, “c'est-à-dire que toutes ses propriétés, scalaires ou “vectorielles, sont les mêmes pour tous les points que nous pouvons discerner dans la masse, ou tout ‘au moins dans une certaine étendue de cette masse : Rien ne nous permet de distinguer, dans ette étendue, une portion d’une autre, si petites soient-elles. — Voilà assurément une définition faite pour éton- “ner le profane dépourvu de toute idée préconcue. Montrez-lui un groupe de quartz ou de spath, ‘commencera Loujours par remarquer les faces planes æt brillantes, les arêtes rectilignes, et s'informera si « c'est tillé ». Ayant appris que « c'est naturel » “et que cela se trouve ainsi, ayant vu ensuite un cristal de spath ou une lame de mica se diviser “indéfiniment suivant des faces toujours lisses, planes et parallèles, il s’'émerveillera de ces pro- priétés si remarquables. Et il classera ainsi les faits dans son esprit : Un cristal, c’est quelque chose qui pousse naturellement avec des faces “planes et qui a souvent des clivages plans. Eh bien, ici le profane a mille fois raison contre les savants. , Distinguons d'abord deux choses : l’état cristal = Ê rome SET isé et le cristal. En quoi l’état cristallisé se sépare- -il de l’état amorphe? Est-ce par l’anisotropie? Mais rien de plus fréquent que l’anisotropie dans des corps que personne ne nous demande d'appeler cristallins. Une lame de gélatine, un grain d'amidon, pre fibre végétale, un poil animal, un fragment de “de verre trempé ou comprimé sont biréfringents, once anisotropes. { Est-ce par l’homogénéilé? Mais l'homogénéité ne saurait être caractéristique d'un é{at de la matière. Si hétérogène que soit un verre trempé, il suffit d'en isoler par la pensée une “portion assez petite pour que rien ne nous per- mette plus d'y distinguer deux points pour lesquels Lellipsoïide optique (par exemple) soit différent. Ceïte porlion, amorphe, sera aussi anisotrope et aussi homogène que n'importe quelle substance cristallisée. Inversement, la matière cristalline Peut, sans cesser pour cela d'être crislalline, être très hétérogène. L'homogénéité n'est donc pas plus que l’anisotropie un caractère spécifique de l'état cristallisé. U est bien vrai que la matière cristallisée est toujours anisotrope; mais la matière amorphe l'est souvent aussi. Il est bien vrai que la matière cris- tallisée se présente souvent à nous sous forme de fragments sensiblement homogènes et qu’elle a une tendance remarquable à cette homogénéité; mais il y a également des fragments de matière amorphe qui sont tout aussi homogènes, même quand ils sont anisotropes. ILest donc juste de dire que la matière cristallisée est toujours anisotrope, tandis que la matière amorphe l'est plus rarement; que la matière eris- tallisée est plus fréquemment et remarquablement homogène sur une assez grande étendue, et qu'il en est de mème pour la matière amorphe isotrope, tandis que la matière amorphe anisotrope ne l'est généralement que sur une étendue restreinte. Mais, dans tout cela, il n’y a que des questions de plus ou de moins. Aucune limite nette entre l’état cris- tallin et l’état amorphe ne peut être tirée de là. Toutefois, cette tendance dela matière cristallisée à l’'homogénéilé est un fait remarquable dont toute théorie devra tenir compte. Comme dans les autres branches de la Physique, il y aura intérêt, pour rendre abordable l'étude de la matière cristallisée, à paenone celle-ci sous la forme homogène, plus simple. C'est pourquoi nous conviendrons de donner un nom spécial, celui de cristal, à toute portion homogène de matière cristallisée. Mais cela ne nous dit pas encore ce que c’est que de la matière cristallisée. Mallard (et non Bravais, comme le dit M. Wyrou- boff) a cru pouvoir; de l'anisotropie et de l'homo- généité seules, déduire logiquement une théorie de la structure du cristal, et de cette théorie elle-même déduire l'existence nécessaire des faces planes, des clivages et de la loi qui régit leurs directions. C'est pourquoi ces propriétés ont été rayées de la défini- tion du cristal comme étant incluses implicitement dans les deux autres. Il est aisé de montrer, par l'analyse de ces raisonnements, qu’ils sontillusoires et font appel, dans leurs prémisses, à leur conclu- sion. Mais cela même n'est pas nécessaire. Admetlonsles raisonnements de Mallard. Admet- tons que toute substance anisotrope et homogène a la structure d'un cristal, et tout ce qui s'ensuit comme faces, clivages, etc... En vertu de quoi refuse-t-on alors cette structure à une petite portion anisotrope et homogène d'un cheveu, d’un verre trempé, d’une lame de gélatine? Pourquoi s’obsti- ne-t-on à séparer ces objets des cristaux? M. Wal- lerant a répondu : C'est qu'ils ne sont anisotropes que grâce à des « actions extérieures ». Mais d’abord cela n’est nullement vrai pour tous les cas. Et puis, quand cela le serait, on ne voit intervenir nulle part, dans les raisonnements de Mallard, le fait que 200 l'anisotropie ne soit pas due à des « actions exté- rieures ». Mallard prend l’anisotropie telle quelle, sans du tout en faire intervenir la cause. Et il nous démontre bel et bien, ou croit nous démontrer, que toutes ces malières amorphes anisotropes doivent, aussi bien que les cristaux, avoir la structure réti- culaire. Pourquoi donc lui-même, et tout le monde avec lui, se refuse-t-il à cette conclusion? La réponse est bien simple. C'est celle de notre profane: Ces portions de matières amorphes, bien qu'anisotropes et homogènes, ne sont pas des cristaux parce qu'elles n'ont pas de faces planes, pas darêtes rectilignes, pas de clivages. La ma- tière cristallisée n’est, en effet, caractérisée d’une manière nette que par cela, qui est un fait d'ob- servation indépendant de tout autre, primor- dial. Expliquons ce mot de faces planes. Car j'ai eu cette surprise de voir un cristallographe m'objecter. que les faces planes sont un phénomène tout ex- térieur, qui n'atteindrait pas la « structure inlime » de la matière, et opposer à ma manière de voir, qui serait toute de surface, celle des esprits profonds qui, eux, pénètrent dans l'intimité des molécules sans dire par quel chemin. Un cristal, c'est-à-dire un fragment de matière cristalline homogène, est, non pas toujours mais souvent, limité naturellement par des faces à peu près planes. Quand nous le voyons croître, nous voyons la face se déplacer parallèlement à elle- même, à peu près si elle n’est qu'à peu près plane, très exactement si elle est très exactement plane. I à aussi, non pas toujours mais souvent, des clivages, c’est-à-dire des directions de plans paral- lèment auxquelles la cohésion est maximum et que la cassure suit de préférence, quelque petit que soit le fragment brisé. Il a encore, non pas toujours mais souvent, des plans de glissement et de macle parallèlement auxquels on peut produire certains déplacements remarquables. S'il n'a aucune de ces propriétés, rien ne permet de le distinguer de la malière amorphe. ’ Or, un de ces plans n'a jamais une position absolue déterminée. Tous les plans qui lui sont parallèles, pour autant que nous puissions les dis- tinguer les uns des autres, jouissent exactement des mêmes propriétés. C'est la loi de la constance des angles, ou loi de Romé de l'Isle, expression de l'homogénéité en ce qui concerne le phénomène particulier révélé par ces plans. Tous ces plans, quand bien même c’est par le phénomène de la limitation extérieure des formes qu'ils se manifestent, révèlent donc une série de propriétés de la matière cristalline qui ne sont pas particulières du tout à sa surface, qui ne peuvent à aucun titre’être écartées, avec dédain, comme G. FRIEDEL — LES BASES DE LA CRISTALLOGRAPHIE superficielles, géométriques, ayant trait à la seule forme, mais qui sont au premier chef des propriétés « intimes », appartenant à toute portion intérieure du cristal, si petite que nous puissions l'observer Cette propriété, caractéristique de la malière cristallisée, peut d'une manière plus générale être exprimée ainsi: La matière cristallisée a des pro= priélés vectorielles discontinues. Elle a, en tous ses points, des directions de plans etde droites qu jouissent de certaines propriétés dont les directions voisines ne jouissent à aucun degré voisin. La matière amorphe, au contraire, n'a que des propriétés vectorielles continues. Si elle est aniso trope, chacune de ses directions de plans et de droites a toutes ses propriétés infiniment voisine de celles qui appartiennent aux directions infini ment voisines. La matière cristallisée a aussi des propriétés vec= torielles continues. Telles sont ses propriétés op- tiques, par exemple. Par ces propriétés-là, e/le ne diffère pas de la matière amorphe. Chose vraiment incroyable, ce sont celles-là que l’on voudrait nous faire considérer comme des propriétés plus « in= times » que les autres, et révélatrices de la struc ture, alors qu'ellesne sont même pas caractéristiques de l’état cristallin. Un cristal cubique, optiquementb isotrope, ne diffère en rien, au point de vue optique d'un morceau de verre. Un cristal biréfringent uniaxe ou biaxe, ne diffère pas davantage, à ce point de vue, d'une porlion homogène de verre comprimé. Ce que l’on appelle improprement l'op= tique cristallographique, c’est l'étude de propriétés qui ne sont pas spéciales aux cristaux ; ce n'esb pas l'optique cristallographique, c'est l'optique de la malière anisotrope, cristalline ou non. Ainsi l'erreur de M. Wyrouboff est grande quand il dit: « Ne considérons plus le cristal comme une combinaison de plans, mais comme un corps qui, même en l'absence de faces. possède des propriétés: très variées et très caractéristiques ». Car, si per= sonne ne demande à considérer « un cristal comme une combinaison de plans », du moins l’existence de « faces », c'est-à-dire de propriétés veclorielles discontinues, est-elle parmi les propriétés du erista la seule qui soit vraiment caractéristique. Nous voilà parvenus à un premier résultat fon damental: la matière amorphe n’a que des pro priétés vectorielles continues. La matière cristallisée est celle qui a des propriétés vectorielles discon= tinues. Et nous appellerons cristal une portion. homogène de matière cristallisée. 4 Remarque: Les propriétés vectorielles discon= tinues impliquent l’anisotropie. Dire que la matière crislallisée a des propriétés discontinues, c'est dire qu'elle est toujours anisotrope par ces propriétés: Ce qui ne l'empêche pas, bien entendu, de pouvoir G. FRIEDEL — LES BASES DE LA CRISTALLOGRAPHIE être isotrope pour ses propriétés continues, par exemple pour ses propriétés optiques. » II. — CRISTAUX MOUS ET « CRISTAUX LIQUIDES ». Arrétons-nous un instant à ce résullat. Si la matière cristallisée est douée de propriétés vecto- rielles discontinues, m'a-t-on objecté, que faites- vous des « cristaux liquides » de M. Lehmann, qui n'en ont point? M. Lehmann a fait connaître" deux choses différentes, entre lesquelles il cherche en vain à élablir une continuité : En premier lieu, des cristaux mous, pourvus de propriétés discontinues, qui possèdent indubita- blement l’état cristallin. Formés dans des condi- lions convenables, ils sont aussi homogènes que n'importe quel cristal. Ce sont de véritables cris- taux. Ils ne diffèrent des cristaux habituels que par une plasticité extrême, dépassant encore celle des cristaux mous anciennement connus, tels que ceux du plomb métallique ou du sulfure d'argent. Cette plasticité, qui les rapproche de l'état liquide, n'a rien de nouveau en elle-même. Elle existe à des degrés divers dans tous les solides; il y a tous les degrés entre l’état solide et l'état liquide. Mais la fluidité n'avait jamais été observée à un tel degré dans les cristaux; et elle rend possibles des phéno- mènes de déformation, de réunion de cristaux, etc., qui seront fort intéressants à connaître en détail. Pour le moment, on n'a donné à leur sujet aucune observation sérieuse accompagnée de mesures exactes, mais seulement de ces affirmations ten- dancieuses où l'explication théorique précède et influence le fait. Tout est à faire. Mais enfin ce qui sera fait sera de la cristallographie. Tout autre est le cas des « cristaux liquides » proprement dits de M. Lehmann. Ce sont des liquides totalement dépourvus de propriétés vecto- rielles discontinues, toujours très hétérogènes quant à leurs propriétés vectorielles, et qui n'ont de commun avec les cristaux que l’anisotropie. Par tous les détails de leurs propriétés, ils sem- blent bien constituer une très curieuse forme nou- velle de la matière. Les études de Schenck laissent peu de doute à ce sujet. Mais, au sens où nous avons défini le cristal, ce ne sont pas des cristaux, . car ils ne sont jamais homogènes; ce n'est pas de la matière cristallisée, car ils n’ont point de pro- priétés vectorielles discontinues. C’est de la matière anisotrope, voilà tout. Les appeler ou non cristaux est une pure affaire de mots. Ceux qui voudront, avec M. Lehmann, leur appliquer ce nom, seront toujours obligés de distinguer, au moins, deux 1 Voir Gausert : Cristaux liquides et liquides cristallins, dans la Revue générale des Sciences du 30 novembre 1905. 201 sortes de cristaux extrèémement différents : ceux qui ont des propriétés discontinues et ceux qui n’en ont pas. En vertu de quoi, alors, ils pourront refuser d'appeler eristaux tous les corps amorphes anisotropes, c'est ce que l'on ne voit plus. Infiniment plus claire me parait la solution qui consiste à réserver le nom de cristaux à ce que l’on a toujours, explicitement ou implicitement, désigné sous ce nom. L'expression de « liquides aniso- tropes » désigne de la manière la plus satisfaisante les liquides de M. Lehmann. Il n'y a rien en eux qui puisse modifier nos idées sur ce que nous appelons ici la matière cristallisée, c'est-à-dire expressé- ment celle qui a des propriétés vectorielles discon- tinues, et non une autre. III. — LA Lor D'HAÜY. Revenons au cristal. Les directions des plans et droites qui se révèlent par les propriétés discon- tinues sont liées entre elles par une loi qui est due à Haüy. C'est la loi des troncatures ralionnelles simples, second fait fondamental de la Cristallo- graphie, dont l'expression la plus simple est : Les directions des plans et droites que mettent en évidence les propriétés discontinues sont celles de plans réticulaires simples et de rangées simples d'un certain réseau de parallélépipèdes contiqus. Quatre de ces plans, arbitrairement choisis, suffi- sent à déterminer la forme de ce réseau : et alors tous les autres en sont aussi des plans réliculaires simples. Un plan réticulaire, e’est un plan qui con- tient, répartis aux sommets d'un réseau de parallé- logrammes, une infinité de sommets du réseau de parallélépipèdes supposé indéfiniment prolongé; il suffit pour cela qu'il en contienne trois. Une ran- gée, c'est une droite qui passe par une infinité de ces sommets équidistants; il suffit pour cela qu’elle passe par deux d’entre eux. Un plan réticulaire simple, c'est un plan réticulaire qui, pour une aire donnée, contient beaucoup de sommets. Une rangée simple, c'est une rangée sur laquelle l’équidistance des sommets (paramètre de la rangée) est serrée. Cette loi est purement une loi d'observation. Le réseau que nous utilisons pour l'exprimer n'a, en aucune façon, le caractère d'une hypothèse ou d'une théorie physique. C'est un intermédiaire géomé- trique commode, abrégeant le langage, rien de plus. Nous verrons tout à l'heure s'il est possible, et à quelle condition, d'en faire une lhéorie phy- sique de la structure du cristal. Mais, dès maintenant, quelle tentation ! S'il nous était possible de nous autoriser de quelque autre chose pour installer dans le cristal une répartition de la matière qui s’exprimât par un réseau de parallélépipèdes; si nous pouvions ensuite, par un 202 G. FRIEDEL — LES BASES DE LA CRISTALLOGRAPHIE raisonnement quelconque, entrevoir qu'un tel milieu devrait avoir des propriélés vectorielles discontinues, et précisément suivant les plans réti- culaires de ce réseau ; alors la loi d'Haüy ne serait plus une « loi empirique», elle « s'éléverait » au rang de loi rationnelle, nécessaire. Telle a été l'illusion de Mallard. Il a cru pouvoir démontrer que la matière homogène et anisotrope doit être composée de molécules réparties aux sommets d’un réseau de parallélépipèdes; il a cru ensuite pouvoir démontrer qu'un tel milieu doit avoir des faces planes parallèles aux plans réticulaires de ce réseau. Pourquoi une telle démonstration est im- possible, nous l’avons déjà vu. Et, de fait, le raison- nement de Mallard contient dans ses prémisses l'existence de faces planes et la loi des troncatures rationnelles auxquelles il prétend arriver dans sa conclusion. La vérité est que, par aucun moyen, la structure réliculaire ne peut être déduite de la seule homogénéité. | Haüy avait antérieurement tenté un bond moins audacieux, mais non moins faux dans son principe. Prenant le cristal tel que nous l'avons défini, comme un objet homogène pourvu de faces planes (propriétés disconlinues), il a cru pouvoir de celte seule propriété déduire logiquement la nécessité de la loi des troncatures rationnelles. L'illusion était de moindre envergure; elle était aussi plus naturelle au xvin° siècle. On sait comment, choi- sissant pour son exposé, parmi les propriétés dis- continues, celle du clivage, Haüy divise le cristal en petits éléments polyédriques (molécules inté- grantes) et arrive ainsi à lui attribuer une struc- ture qui ne diffère pas essentiellement de celle qu'ont imaginée Delafosse, Bravais et Mallard. Ce raisonnement est dépourvu de toute valeur. Ce n’est pas parce qu’il se base, comme on l'a reproché souvent à Haüy, sur une propriété telle que le slivage, qui manque parfois. Car en réalité le raisonnement d'Haüy n’est pas du tout basé sur le clivage. Si l'on veut bien ne pas s’en tenir aux mots et regarder le fond des choses, le raisonne- ment d'Haüy s'applique également bien en partant de trois faces de la forme extérieure, ou de trois plans manifestés par des propriétés vectorielles discontinues quelconques. Ce n’est pas non plus, autre reproche plus superficiel encore, parce que le résultat d'Haüy supposerait la continuité de la matière. Haüy lui-même a spécifié qu'il n’en est rien, et en effet son raisonnement, pas plus que. celui de Mallard, n'impliquent quoi que ce soit sur la continuité ou la discontinuité de la matière. Le seul défaut du raisonnement d'Haüy est tout autre : C'est que ce raisonnement, comme celui de Mallard, est une pétition de principe. C'est que trois clivages par exemple ne divisent nullement le cristal en petits éléments identiques dont les longueurs des arêtes soient déterminées, mais en parallélépipèdes d’angles déterminés et dont les arêles ont des dimensions relatives quelconques. C'est que, par suite, quand on attribue à ces petits fragments des dimensions identiques et à leurs arêtes des longueurs relatives déterminées, et quand aussi on convient ensuite de les ranger par décroissements entiers simples, on introduit impli- citement à la base du raisonnement toute autre chose que la propriété du clivage : et cette autre chose, c'est la loi des troncatures rationnelles tout entière, car seule elle détermine les longueurs rela- tives des arêtes de la molécule intégrante et les lois des troncatures. Ainsi fait Mallard lorsque, partant de la seule homogénéité, il conclut que ses « points analo- gues » sont équidistants. L’homogénéité telle que nous l’observons n'exige nullement cette réparti- tion, qui n'est introduite en réalité que pour par- venir ensuite à la loi des troncatures rationnelles. Toutes les tentatives faites pour extraire lo- giquement, de toute autre propriélé de la matière cristalline, soit la loi des troncatures rationnelles seule, soit, avec elle, l'existence même des faces planes révélant les propriétés discontinues, sont donc restées vaines. Et il ne pouvait en être autre- ment. Basées sur l'illusion cartésienne du raison- nement créateur en matière de sciences physiques, ces tentatives sont, en effet, fausses dans leur prin- cipe même. M. Wyrouboff nous invite à admirer Haüy pour avoir négligé même d'exprimer sa loi d'observation et lui avoir substitué une « théorie ralionnelle », c'est-à-dire un prétendu raisonne- ment qui n'est qu'un trompe-l'œil. Il nous sera permis, au contraire, de ne voir là qu'une faiblesse, que, d’ailleurs, on oublie volontiers en regard de l'immense service rendu à la science par la décou- verte de la loi. Ce ne sont pas des raisonnements fallacieux qui sont à la base de la Cristallographie. Ce sont des faits d'expérience. De ces faits, nous avons jusqu'ici reconnu deux, indépendants de tout autre et que rien ne peut permettre de prévoir logiquement : 1° L'existence, dans toute matière cristallisée, de propriétés vectorielles discontinues, révélées par des directions de plans et de droites qui ont des propriétés particulières ; 2° La loi qui régit les directions de ces plans et droites dans une masse cristalline homogène, dans un cristal: c’est-à-dire la loi d'Haüy. Elle implique, bien entendu, la première. Mais l'inverse n’est pas nécessairement vrai. On pourrait parfaitement imaginer des milieux homogènes et pourvus de propriétés discontinues, dans lesquels ces pro- priétés ne suivraient pas la loi d'Haüy. Tant il est G. FRIEDEL — LES BASES DE LA CRISTALLOGRAPHIE 203 vrai que cette loi estun pur fait d'observation, que rien ne peut faire prévoir rationnellement. IV. — LA THÉORIE RÉTICULAIRE, OU THÉORIE DE LA PÉRIODICITÉ DU MILIEU CRISTALLIN. Ces deux faits nous conduisent déjà à entrevoir comme possible une théorie de la structure des cristaux, théorie destinée à grouper les faits d'expé- _rience, comme toute théorie physique, et non rêverie métaphysique a priori. Nous pouvons ima- giner avec Haüy, Delafosse, Bravais et Mallard, dont les vues ne se distinguent sur ce point que par des différences tout à fait superficielles, que le cristal, qui nous semble homogène, ne l'est pas en réalité dans ses derniers éléments, mais qu'il a une structure périodique, ou si l'on veut réliculaire. Étant homogène pour nos observations, il contient par suite un grand nombre de points, assez rapprochés pour que nous ne puissions les distin- guer entre eux, et qui ne se différencient en rien les uns des autres par leurs propriétés constatables. Ces points analogues (Mallard), nous imaginerons qu'ils ne sont pas infiniment voisins, mais répartis aux sommets d’un réseau de parallélépipèdes con- tigus, semblable à celui que la loi d'Haüy nous à conduits à considérer. Tous les points analogues d'un point donné A de la masse sont ainsi supposés répartis aux sommets d'un réseau de parallélépi- pèdes dont ce point initial A est un des sommets. Pour avoir tous les points analogues d'un autre point B, il suffit de faire glisser le même réseau de À en B. Ce réseau, c'est la période du milieu cris- tallin. Chacune de ses mailles, que l’on n’est d’ail- leurs nullement obligé de limiter par des plans, contient un et un seul des points non analogues qui existent dans le milieu. Comme dans toute chose périodique, nous aurons à distinguer dans un milieu ainsi construit deux éléments : 4° les dimensions de sa période, c’est-à-dire ici la forme de la maille; ® le contenu de sa période, le remplissage de la maille. C'est ce que j'appelle le motif cristallin, parce que c'est l'élément qui se répète périodiquement comme le motif d'un papier de tenture. S'il nous plait d'ima- giner, comme éléments matériels du cristal, des molécules, ce motif comprendra en même temps et ces molécules et le vide qui sera censé les entourer. C'est le contenu complet de la maille. Cela étant, nous imaginons que le réseau que la loi d'Haüy nous a conduits à considérer est préci- sément celui qui exprime la répartition des points analogues, la périodicité du milieu. Les plans réti- culaires et les rangées de ce réseau, nous imagi- nons que ce sont les plans et droites qui se révè- lent par les propriétés discontinues. Dire que cela peut se démontrer n'aurait aucun sens. Cest une image physique que nous inventons pour exprimer la loi d'Haüy, comme on a inventé la molécule chimique pour exprimer la loi des proportions mul- tiples simples, rien de plus. Maintenant, est-il vrai que cette image, cetle théorie, n’exprime réellement que la loi d'Haüy ? Si cela était, elle n'aurait pour le physicien pas plus de valeur que cette loi elle-même. Toute con- séquence de la théorie serait aussi bien une consé- quence directe de la loi. Le progrès serait illusoire. Supposez, au contraire, que cette théorie implique une ou plusieurs autres lois complètement indé- pendantes de la loi d'Haüy, et que l'observation confirme. Nous n'irons pas alors jusqu'à conclue pour cela, avec M. Wyrouboff : donc la théorie est vraie, donc les eristaux ont la structure réliculaire. Pas davantage nous ne nous laisserons détourner de cette recherche par le même auteur lorsqu'il la qualifiera d'exercice géométrique sans portée cris- tallographique. Mais nous conclurons: l'aspect de la théorie en est tout changé, et sa valeur grande- ment accrue. De théorie indifférente, équivalente à une seule loi, elle devient théorie utile, établis- sant un lien entre deux catégories de faits que l'observalion seule et la pure logique laisseraient indépendants. Nous n'aurons pas celte naïveté de croire que, par elle, nous connaissons pleinement et définitivement la réalité, mais du moins nous apparaîtra-t-elle comme le reflet de quelque réalilé ; du moins aussi saurons-nous exactement, pour le jour où des faits nouveaux rendront une autre théorie nécessaire, à quelles conditions précises cette théorie nouvelle devra répondre pour pouvoir être substituée à l’ancienne sans que rien des faits acquis se perde en chemin. Eh bien, c'est là vraiment ce qui a lieu. Il ya une loi d'observation, totalement indépendante de la loi d'Haüy, et qui est aussi nécessairement que celle-ci à la base de la théorie réticulaire de la structure. C'est la suivante : Dans l'expression de la loi d'Haüy, les paramètres de deux arêtes symé- triques par rapport à un élément de symétrie du cristal, c'est-à-dire de deux arêtes physiquement identiques, sont toujours en rapport rationnel, et par suite peuvent toujours être pris égaux. Ce qui peut se dire encore : 11 est toujours pos- sible de choisir le réseau de facon qu'il ail au mini- num la symétrie du milieu cristallin. Expliquons ceci : De la loi d'Haüy toute seule, on déduit aisément que les propriétés discontinues des cristaux ne peuvent avoir que des axes de symétrie en nombre fini et d'ordres 2, 3, 4 et D. Et que, par suite, les cristaux eux-mêmes ne peuvent avoir que l’une des symétries des objets quelcon- ques astreints à cette seule condition de n'avoir 204 G. FRIEDEL — LES BASES DE LA CRISTALLOGRAPHIE que de tels axes. Il y a trente-deux de ces types de symétrie, L'existence des trente-deux types de symétrie des cristaux est donc un résultat immé- diat de la loi d'Haüy, et non d'une théorie quel- conque de la structure. On démontre, d'autre part, toujours en partant de la seule loi d'Haüv, que deux arêtes symétriques par rapport à un axe d'ordre 2, 4 ou 6 ont néces- sairement des paramètres en rapports rationnels. Rien n'empêche donc de les prendre égaux. On peut toujours, pour exprimer la loi d'Haüy, s'il n'y a que des axes d'orûre pair, employer un réseau qui.ait au minimum la symétrie du milieu cristallin. Mais, par contre, s'il existe dans le milieu un axe ternaire, la loi d'Haüy n'exige plus que ce choix soit possible. Elle permet l'existence d’axes ter- naires dits irrationnels, qui sont tels qu'aucun réseau ne peut les avoir pour axes ternaires. Rien dans la loi d'Haüy, rien dans aucun autre fait connu ne s'oppose à l'existence de tels axes. Rien de plus aisé que d'imaginer un cristal qui en serait pourvu. Mais, s'ils existaient, il y aurait des cas où l'on ne pourrait attribuer au réseau qu'une symétrie infé- rieure à celle des propriétés constatées du cristal. Il serait donc impossible d'attribuer au réseau une matérialité, d'en faire l'expression de la périodicité du milieu en donnant aux paramètres des dimen- sions finies'. La théorie réticulaire serait inad- missible. Or, d'après les faits, la non-exislence de cristaux pourvus de tels axes, bien qu'elle ne soit qu'un fait négatif, est frappante et remarquable. Il est à peu près certain que l'on peut poser, à titre de loi d'ob- servation que rien ne saurait faire prévoir : les axes lernaires irrationnels n'existent pas. Cela revient à dire : on peut toujours choisir le réseau, avec paramètres finis, de facon qu'il ait au mi- nimum la symétrie constatée dans les propriétés quelconques du cristal. Ou encore : on peut faire du paramètre une grandeur physique linie propre à chaque arête. Tel fait d'observation qu'implique la théorie réticulaire. Cette théorie groupe el résume ainsi en elle trois lois d'observation applicables aux cristaux, et trois seulement”, qui sont les lois fondamentales de la Cristallographie. Ce sont : 1° loi fondamentale : Existence des faces planes (plus généralement, existence des propriélés vec- est le * On pourrait, cependant, alors imaginer une théorie réti- culaire avec période infiniment petite, et qui admettrait les axes fernaires irrationnels. Mais elle rendrait possible aussi des axes d'ordre infini, qui n'existent pas. * D'aucuns s'étonneront peul-être de ne pas voir figurers parmi les lois fondamentales de la Cristallographie la « loi de symétrie », que les ouvrages classiques placent à côté de la loi d'Haüy. C'est que cette loi n'est pas une loi phy- sique. Cest une définition de la symétrie, rien de plus. torielles discontinues dans la matière cristal- line); 2° loi fondamentale : Loi d'Haüy ou des tronca- tures rationnelles simples ; 3° loi fondamentale : Loi de rationnalité des paramètres symétriques. Telle est la base expérimentale solide de la théorie réticulaire. Je ne puis voir en quoi sous- traire cette théorie à l'appui suspect de faux rai- sonnements équivaudrait à la considérer comme «illusoire et stérile ». Bien au contraire, en met- tant à leur place les faits expérimentaux qu’elle est destinée à réunir, je prétends montrer qu’elle est autre chose qu'une vaine spécülation de philoso- phes, et je crois ainsi augmenter sa valeur. J'ajouterai encore que la loi d'Haüy, sous la forme que je lui ai donnée ci-dessus et qui est, - aux expressions près, celle dont on se contente habituellement, laisse le réseau assez indéterminé, comme le ferait par exemple pour la molécule, en Chimie, la seule loi des proportions multiples sim- ples; mais qu'il existe une forme de cette loi plus précise, vérifiée sinon toujours, du moins dans un très grand nombre de cas très frappants, et qui fixe alors sans ambiguïté la forme et le mode du réseau. Elle consiste simplement en ceci que non seulement les plans mis en évidence par les pro- priétés discontinues sont parmi les plans à grande densilé réticulaire de tous les réseaux que l'on peut choisir, mais qu'ils sont d'autant plus impor- tants que leur densité réticulaire est plus grande dans un certain réseau. C'est la loi de Bravais. Par une singulière aberration, beaucoup de cris- tallographes se refusent à constater cette loi et ne consentent à insister complaisamment que sur les quelques exceptions qu'elle comporte. Tel le chi- misle qui se refuserait à constater la loi de Gay- Lussac sur les combinaisons en volumes, et par suile n'accepterait pas la définition des poids mo- léculaires qui en est: l'expression, sous prélexte que quelques densilés de vapeurs sont très varia= bles et que la loi de Gay-Lussac est en défaut pour elles. Quand on substitue cette loi à la loi d'Haüy dans la définition du réseau, on délermine ainsi un ré- seau précis. Ün sait ce qu'on veut dire au juste quand on en indique les dimensions et le mode. On exprime par là, d'un seul coup, toute une série de faits que le réseau, déterminé autrement, n'ex- prime pas. Dès lors le réseau, au lieu de rester quelque chose de vague, dont on peut multiplier les paramètres par tout ce que l’on veut, au risque de ne plus même exprimer la loi d'Haüy (car on en est arrivé là), devient quelque chose de parfai- tement défini dans la grande majorité des cas, comme la molécule dans la Chimie. G. FRIEDEL — LES BASES DE LA CRISTALLOGRAPHIE V.— LA THÉORIE DE LA STRUCTURE DE SCHOENFLIES. Au point où nous en sommes arrivés, nous sommes en possession d'une théorie qui est la suivante : le milieu cristallin homogène (cristal) est périodique, avec une période finie (les mathé- maticiens disent : il contient un groupe de transla- tions finies, ce qui revient au même). La forme de sa période est en général parfaitement déterminée par l'observation. Mais, par contre, aucun des faits que nous avons jusqu'ici utilisés ne nous permet de rien spécifier quant à la disposition de son motif (les mathématiciens disent : domaine complexe, ce qui revient au même encore). La matière du motif peut même être supposée continue ou discontinue. Elle est complètement indéterminée. D'autre part, celte périodicité exprime entière- ment les faits invoqués. Si on ne leur ajoute aucun fait nouveau, on pourra bien discourir indéfiniment sur le motif cristallin, le découper en autant de fractions que l’on voudra; on aura fail une œuvre mathématique intéressante, mais on n'aura rien ajouté à la théorie en tant que théorie physique. C'est pourtant en cela exactement que consiste la fameuse « théorie dela structure » que l’on prétend aujourd'hui «opposer » à lathéorie de la périodicité d'Haüy, de Bravais et de Mallard. Etudiée d’abord avec son vérilable sens, c'est-à-dire à litre de recher- che purement mathématique, par M. C. Jordan, elle est devenue, entre les mains de MM. Sohncke, Fedorow et Schoenflies, une « théorie » à préten- tions physiques. Ces mathémaliciens, admettant la périodicité et sans introduire aucun fait expéri- mental nouveau, sans prétendre exprimer aucun fait autre que ceux qu'implique la périodicité, ont cherché de quelles manières peuvent être, dans un milieu périodique, répartis les éléments de symétrie (axes de symétrie, axes hélicoïdaux, plans de symétrie, etc.). Ils ont trouvé 230 de ces modes de répartition, et divisé en conséquence le motif (domaine complexe) selon 230 types difré- rents de division, en pelits éléments de volume : dépourvus eux-mêmes de toute symétrie et dont la répétition symétrique reconslitue le domaine com- plexe ; ce sont les domaines fondamentaux. Il'n'y a là aucune espèce de théorie physique qui ajoute quoi que ce soit à la simple notion de pério- dicité. Quelle que soit la nature du motif, quelles que soient les hypothèses que l’on pourra jamais faire sur elle (pour exprimer des faits), toujours ce molif pourra, tant que la périodicité restera admise, se découper en domaines fondamentaux selon l’un des 230 modes de Schænflies. La prétendue théorie de la structure n’est &onc nullement une théorie 205 mathématique de tout ce que l'on peut dire a priori du motif, en vertu de la seule périodicité, lorsqu'on S'abstient de faire à son sujet aucune hypothèse, aucune théorie physique. C'est l'absence de toute théorie de la structure autre que la pério- dicité. Elle n'implique même pas la continuité ou la discontinuité de la matière. Elle ne suppose rien sur elle. Est-ce à dire que cette théorie mathématique soit sans intérêt? Nullement. Elle nous fait mieux comprendre quelles conditions la périodicité im- pose nécessairement à la répartition de la matière dans la maille. Elle n’est pas une théorie physique, mais elle est le cadre dans lequel, lorsque nous voudrons établir une théorie physique qui soit avant tout basée sur la périodicité, nous serons astreints à nous mouvoir. Je comparerais volontiers la théorie de Schænflies à ce que serait en Chimie une théorie mathémati- que de toutes les combinaisons possibles de n atomes de carbone tétravalents avec p atomes d'hydrogène monovalents, 4 atomes d'oxygène divalents,etc...". Une telle théorie pourrait avoir son intérêt, même pour le chimiste. 11 y trouverait énumérées, à côté de beaucoup de combinaisons qui ne seront jamais réalisées et que peut-être des lois de la Chimie, non introduites par le mathémati- cien, rendent impossibles, toutes celles du moins qui seront jamais considérées comme possibles tant que le carbone sera envisagé comme élément tétravalent, l'hydrogène comme élément monova- lent, etc. On serait satisfait de savoir combien il y en a, et surlout qu'il y aeu un homme assez sagace et assez palient pour les compter. Mais qui dira qu'il y ait là une théorie chimique, qui ait introduit dans nos connaissances chimiques quoi que ce soit de nouveau, quiait en elle-même une autre valeur, comme représentation des faits, que le simple énoncé de la doctrine de la valence ? Telle estla théorie de Schænflies. Elle a sa valeur mathématique. Elle est l’œuvre d'une grande saga- cité et d'une prodigieuse patience. Mais on abuse vraiment de notre crédulité quand on cherche à nous faire croire qu'elle ajoute quoi que ce soit à la simple notion de périodicilé. « Ne nous perdons pas dans les abstractions mathématiques », tel est le conseil excellent que nous donne M. Wyroubofl. Je demande la permission d'ajouter : Ne prenons pas pour abstractions mathémaliques ce qui est raisonnement légitime et nécessaire, ni pour théo- ries physiques nouvelles ce qui n’est qu'abstrac- tions mathématiques à propos de vieilles théories. Pour construire une théorie physique de la struc- ! Ce problème a élé abordé, et traité dans quelques cas physique. C'est, tout au contraire, l'étude purement | pärticuliers, notamment par Cayley et par Brunel. 206 G. FRIEDEL — LES BASES DE LA CRISTALLOGRAPHIE ture du motif cristallin, la théorie de Schoenflies ne saurait done, prise telle quelle, servir de base. On peut bien déclarer arbitrairement, avec M.Wal- lerant : le domaine fondamental de Schoenflies contiendra une particule, composée d’un très grand nombre de molécules chimiques. Nous ferons de cette particule l'élément constitutif du cristal, et interdisons par là à l'élément constitutif du cristal d'avoir aucune symétrie. Tout au moins, s'il en a une, ne doit-elle se retrouver à aucun titre dans le cristal. On peut bien aussi, avec M. Wyrouboff, décréter : Le domaine fondamental contiendra une molécule chimique et une seule, et à cette molé- cule chimique il est par conséquent interdit d'avoir une symétrie qui puisse se retrouver dans le cris- tal. Mais, par ces décisions arbitraires ou toutes autres analogues, on ne se propose d'exprimer aucun fait. Pourquoi veut-on que dans tout cristal le domaine fondamental, pure abstraclion géomé- trique, simple subdivision de la maille imaginée par le géomètre, corresponde à une unité physi- quement ou chimiquement définissable? Pourquoi s'interdire une molécule chimique qui pourrait porter sur plusieurs des domaines fondamentaux du géomètre et pourrait, par suite, avoir une symé- trie? Pourquoi dans tel cristal chaque domaine fondamental ne contiendrait-il pas plusieurs molé- cules chimiques, dans tel autre une seule, dans tel autre encore une molécule chimique n'appar- tiendrait-elle pas à plusieurs domaines fonda- mentaux? A ces questions, aucune réponse. Nous sommes en plein arbitraire, en pleine rêverie, dans ces nuages où conduisent le dédain de la « loi empirique » et l'admiration de la « théorie ration- nelle ». VI. — UNE THÉORIE PHYSIQUE DE LA STRUCTURE. Pour qui tient à rester dans le domaine de la science positive, voici quelle est la situation : Les faits d'observation que nous avons mis en œuvre jusqu'ici nous conduisent à la théorie de la périodicité. Ils nous font connaître la forme de la période, qui résume à elle seule ces faits. Mais ils laissent complètement indéterminé le contenu de cette période, le motif. Notre théorie nous laisse done la latitude d'exprimer d'autres faits, par le moyen d'hypothèses restrictives sur la structure de ce motif. La théorie de Schoenflies n’exprimait rien de plus que la périodicité : celle que nous chercherons à établir devra, sous peine d'être sans but et sans utilité, exprimer autre chose ; elle sera un cas particulier inclus dans la théorie de Schoen- flies, nécessairement, et un cas particularisé par l'expression d'un ou plusieurs faits dont Schoen- flies, comme mathémalicien développant le seul principe de la périodicité, n'a pas tenu comple et n'avait pas à tenir compte dans ses recherches. Plusieurs ordres de faits cristallographiques peu- vent être invoqués en faveur d’hypothèses sur la structure du motif. Il m'est impossible de les développer tous ici. Chose remarquable d'ailleurs, ils conduisent tous à une même conception, que nous devons à Mallard. Je citerai seulement ici un fait extrêmement important et dont l'analyse nous conduit, presque nécessairement, à celte concep- tion de la structure. Ce fait, dont M. Lehmann et M. Wyrouboff lui- même, grâce aux études microscopiques des trans- formations polymorphiques, ont ajouté un grand nombre d'exemples à ceux qui étaient connus de- puis longtemps, c’est ce que M. Wyrouboff a ap- pelé le polymorphisme direct. Dans certaines trans- formations polymorphiques, on voit toutes les propriétés physiques, notamment les propriétés optiques, et le plus souvent la symétrie qu’elles révèlent, changer brusquement, sans déplacement visible de chaque point de la masse, sans que l’ho- mogénéilé du cristal soit détruite’, sans que la forme extérieure subisse d'autre changement que de légères contractions ou dilatations dans certains sens, sans que celte forme extérieure enfin cesse de convenir à la symétrie interne nouvelle. À cela s'ajoute le fait connexe, constaté depuis longtemps, que deux formes polymorphes d'un même com- posé chimique ont en général des réseaux qui sont, à de légères déformations près, multiples simples l’un de l’autre. J’appelle réseaux mul tiples l'un de l’autre deux réseaux qui ont les mêmes plans réliculaires. Analysons ces faits : Deux formes d'un même composé chimique polymorphe n'ont pas, en géné- ral, même réseau. Elles n'ont en général ni la même symétrie, ni les mêmes clivages, ni les mêmes formes dominantes. Appliquée à chacune d'elles, la loi de Bravais conduit à deux périodes en général tout différentes, qui peuvent d’ailleurs accidentel- lement avoir même symétrie, mais avec des para- mètres ou tout äu moins un mode différent. Mais ces deux réseaux sont l'un multiple simple de l'autre ; et dans la transformation polymorphique directe, quand elle est possible, nous voyons la matière, douée primitivement de l’une de ces périodes, passer subitement, sans déplacement sensible, à une période différente qui a la forme et l'orientation d'un multiple de la première. Cela revient à dire, d'une manière plus générale, les cas de trimorphisme, tétramorphisme, étant fréquents, LT PTS EE SE que ces deux périodes sont toutes deux multiples 1A cela près que parfois un cristal homogène se trans forme en une macle, Mais cela ne change rien à la conelu- sion, et je suis obligé ici d'abréger. + 0 G. FRIEDEL — LES BASES DE LA CRISTALLOGRAPHIE 207 _ d'une troisième, laquelle peut d'ailleurs, comme cas particulier, se confondre avec l’une d'elles. Quelle signification attribuer à ce nouveau réseau, sous-multiple (ou multiple, cela revient au même) de la période proprement dite déjà définie du cristal, et qui se révèle comme commun à toutes les formes po- lymorphes d'un même composé capables de passer de l’une à l’autre par la transformation directe ? Rappelons-nous que, dans la transformation direcle, nous ne percevons aucun déplacement de la matière. Ce dernier fait, nous l’exprimons d'une manière salisfaisante si nous admettons que toute la transformation se réduit à des rotations de par- ticules sur elles-mêmes, sans déplacement sensible d'un de leurs points que nous pouvons convenir . d'appeler leur centre de rotation ‘. Dès lors, nous sommes conduits à admettre ceci : la matière du cristal est discontinue. Elle se compose de parti- cules distantes, réparties aux sommels d'un réseau de polyèdres identiques contigus. Ce réseau n'est, d’ailleurs, pas forcément un réseau de parallélépi- pèdes. Mais, en raison même du fait que nous voulons exprimer, il est nécessairement un multiple d'un réseau de parallélépipèdes contigus. C'est-à- dire qu'on peut toujours le définir comme un réseau de parallélépipèdes dont certains nœuds sont sup- primés. Cet ensemble de points, fixe dans le cristal, constitue ce que l’on peut appeler son réseau malé- riel. Il est le même, à de petites déformations près, pour les diverses formes polymorphes d’un même composé, susceptibles de passer de l'une à l'autre par polymorphisme direct. À chacun de ses sommets est le centre de rotation d'une particule, dont la nature est la même pour toutes les formes polymorphes et que l'on peut, par suite, imaginer être la molécule chimique elle- même, ou, ce qui est indifférent, un groupe constant de molécules chimiques. Ces particules ne sont pas en général orientées parallèlement entre elles. Mais les points homologues de toutes celles qui sont parallèles et que rien, si ce n’est leur position absolue dans l’espace, ne différencie les unes des autres, constituent des points analogues. L'en- semble de ces points définit un réseau de parallé- lépipèdes contigus, ou groupe de translations, qui est la période, le réseau cristallin du milieu : réseau applicable, puisque le milieu est périodique, à n'im- porte lequel des points de ce milieu, et nullement fixe dans le cristal. Ce réseau n’est pas, en général, 1 Ce n'est que par des artifices de langage que l'on a pré- tendu se passer, dans l'interprétation des macles méca- niques comme dans celle du polymorphisme direct, de ces rotations de particules et les remplacer par des déforma- tions. Il y'aura toujours en dernière analyse un élément qu'il faudra faire tourner, tant que l'on ne nous aura pas demandé expressément de déformer la molécule chimique, puis l'atome. identique au réseau matériél, mais 1} en est un multiple. I peut, comme cas particulier, lui être identique, ainsi que le supposaient inutilement, à titre d’hypothèse générale, Delafosse et Bravais. Si maintenant les particules viennent à changer d'orientation, sans que le réseau matériel qui définit leurs positions subisse autre chose que de légères déformations, le réseau cristallin peut changer du tout au tout. Mais il reste un multiple du même réseau matériel. La transformation poly- morphique directe s’interprète ainsi de la manière la plus claire et la plus adéquate, par de simples rotations de particules. Ce qui exprime les deux faits dominants : 1° Il n'y a pas de déplacement sensible de la matière; 2° Les réseaux des deux formes polymorphes sont multiples d’un même réseau. Quant à la symétrie des particules, il devient complètement inutile de la déclarer nécessairement nulle. Elles sont astreintes simplement à avoir au maximum la symétrie de la forme là moins symé- trique connue du composé. On remarquera qu'ainsi précisée la théorie de la structure n’est pas finie, fermée. Le fait du poly- morphisme direct, qui est en somme assez excep- tionnel, nous conduit à la notion du réseau maté- riel, mais ne suffit pas à définir, à fixer complète- ment ce réseau. Il reste donc possible d'utiliser l'image de la structure à exprimer d’autres faits encore, dont plusieurs s'accordent d’ailleurs remar- quablement avec cette même notion de réseau matériel. Mais un tel sujet nous entrainerait trop loin. J'en ai assez dit, je pense, pour montrer que je suis très loin de considérer les théories de struc- ture comme « illusoires et stériles », et pour faire comprendre à quelle condilion elles doivent ré- pondre pour ne l'être pas. Dans tous les domaines de la science physique, toute théorie qui prétend se construire ralionnellement, en perdant le con- tact des faits expérimentaux, est, en effet, stérile et illusoire. Sur les ailes de quelques grands mots elle croit s'envoler très haut, fait illusion à certains, mais, pour qui sait voir, piétine misérablement sur place. Pendant ce temps, le physicien moins ambi- tieux, qui saitne pouvoir quitter Lerre, avance sûre- ment, les yeux fixés sur les faits, le raisonnement tendu vers eux pour discerner ceux qui sont logi- quement indépendants de ceux qui ne le sont pas, et ne bâtit de théories que pour grouper ceux qui, en dernière analyse, restent logiquement distincts. A cette condition, il est certain que ses théories contiennent un reflet de la réalité, dans la mesure où elle est accessible. À cette condition, il est sûr de faire besogne saine, utile et féconde. G. Friedel, Ingénieur des Mines, Professeur à l'Ecole des Mines de Saint-Etienne. 208 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Goursat (E.), Professeur à la Faculté des Sciences de Paris. — Cours d'Analyse mathématique. 7ome 11: Théorie des fonctions analytiques. Equations différentielles. Equations aux dérivées partielles. Eléments du Calcul des variations.— 1 vol. gr.in-8° de 640 pages. (Prix : 20 fr.) Gauthier- Villars. Paris. Après avoir constitué un volume avec les théories, soit de Calcul différentiel, soit de Calcul intégral, qui ne faisaient intervenir que le domaine réel, M. Goursat a reporté à sa seconde partie tout ce qui introduit la considération des variables complexes et, avant tout, la théorie des fonctions analytiques. On se demandera sans doute si cette division, si con- traire aux habitudes recues, s'imposait, si elle constitue une classification bien naturelle des matières de l'Analyse. La lecture mème de l'ouvrage suffira à mon- trer qu'il en est bien ainsi. C'est que la notion même sur laquelle on opère, celle de fonction, a une signifi- cation différente dans les deux cas. Tant que la variable reste réelle, cette notion garde une grande généralité, la continuité et l'existence de dérivées jusqu'à un cer- tain ordre — le plus souvent de la dérivée première ou tout au plus de la dérivée seconde — étant seules indispensables au raisonnement. Dans le champ des variables complexes, au contraire, c’est la notion de fonction analytique qui s'introduit nécessairement. C'est donc à la théorie des fonctions analytiques que l'auteur s'adresse dès le commencement, et (tout en n'ignorant pas, dans la suite, l’usage des séries entières) il emploie tout d'abord, pour la traiter, les méthodes de Cauchy et l'intégration dans le plan des variables imaginaires. Dans sa préface, il prend la peine de s’en justifier. Quelques géomètres le jugeront sans doute bien scrupuleux, et trouveront qu'il fait beaucoup d'honneur aux aphorismes des ultra-weierstrassiens. Mais l’exclusivisme de ceux-ci a parfois été assez intran- sigeant pour rendre cette apologie utile. Disons d’ail- leurs qu’une heureuse réaction tend à se produire et que, dans son remarquable Lehrbuch der Functionen- theorie, M. Osgood en donne l'exemple, en attribuant aux intégrales de contour la place qui leur revient, quitte à les combiner ensuite avec les méthodes de Weierstrass. Un tel éclectisme n'a vraiment pas besoin de justifi- cation. Personne n'a jamais songé à exclure de la théorie des fonctions l'emploi de la série de Taylor. Je ne vois pas pourquoi l'inverse serait plus raisonnable et quel avantage il y a à constituer cette théorie en se passant des intégrales de Cauchy. Le plus curieux est qu'il ne me parait pas du tout démontré que ce but soit atteint. Nul doute qu'il ne le soit pour l'imprimeur et qu'un traité de théorie des fonctions d'après Weierstrass ne puisse être composé sans signe f. Mais le logicien, plus difficile à contenter, y trouvera une certaine décomposition de fraction rationnelle en fractions simples dont les infinis sont distribués sursun cercle, qui ressemble à s’y méprendre à une « valeur moyenne » de Cauchy sur le cercle en question. Cette exclusion des intégrales définies, sur l’utilité — et même sur la réalité — de laquelle nous avons tant de doutes, est-elle au moins obtenue sans rien sacrifier de la portée et de la généralité de la théorie? Qui ne voit immédiatement le contraire? D'un côté, on admet à priori l'existence du développement de Taylor, c'est-à-dire d'une expression analytique de forme BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX LAN 2 nd déterminée et toute spéciale. De l'autre, on ne suppose à la fonction envisagée que des propriétés simples de continuité et de dérivabilité : ces hypothèses, les plus banales que l'on puisse faire pour l'application du Calcul infinitésimal, et qui restent telles dans le do- maine réel, sont grosses de conséquence dans le do- maine complexe et suffisent, comme le montre la théorie de Cauchy, à fonder la notion de fonction ana- lytique. Rien de tout cela ne ressort de la théorie fondée sur l'emploi exclusif des séries. Cet important avantage des méthodes de Cauchy, M. Goursat se trouve être un de ceux qui ont contribué à le mettre le plus en lumière, en simplifiant encore les hypothèses utilisées. Au lieu qu'avant lui il avait été nécessaire. d'assigner une limite supérieure au module de la dérivée, il a démontré que l'existence de celle-ci suffit à assurer l'exactitude du théorème fondamental. Cette démonstration est si simple que îl tout en s'étant astreint à rester élémentaire et à ne pas dépasser les limites des programmes, il a pu la pré- senter à ses lecteurs. Inutile de dire qu'un peu plus loin les propriétés des séries entières et du prolongement analytique sont exposées avec le soin qu'elles méritent. La théorie des fonctions analytiques, établie sur cette double base, occupe la première moitié du volume : elle comprend, en particulier, une excellente étude des fonctions elliptiques où, sans entrer dans le détail des- calculs souvent fastidieux auxquels ces fonctions peuvent donner lieu, l’auteur sait aborder les princi- pales questions générales qu'elles soulèvent, tant dans leur théorie que dans leurs applications, ou du moins leurs applications purement analytiques. Quant à la théorie des fonctions algébriques et des intégrales abéliennes, elle est représentée par ses pro- positions les plus élémentaires : méthode de Puiseux, théorème d'Abel, périodes des intégrales abéliennes. Le lecteur acquiert, d'autre part, une idée des diffi- cultés qui entourent la théorie des fonctions analytiques de plusieurs variables et des résultats établis : tel est, entre autres, l'important théorème de Weierstrass, dont l'absence constituait une lacune regrettable des anciens traités. Bien que l'étude des équations différentielles puisse se poursuivre aussi bien dans le domaine réel que dans le domaine complexe, il était impossible de l'aborder sans la connaissance des doctrines précé- dentes. M. Goursat la traite tant au point de vue de la théorie des fonctions, telle qu'il vient de la présenter, qu'au point de vue des variables réelles, tel que l'in- troduisent les travaux récents. Il ne laisse d’ailleurs pas ignorer à ce sujet les prin= cipales théories anciennes ou modernes : multiplica= teur (dont nous voudrions, pour notre part, voir lier la notion à celle des invariants intégraux, si prepre à l'éclairer), transformations infinitésimales, intégrales régulières des équations linéaires, points singuliers les plus simples, etc. Quelques indications sont mème données sur la question des intégrales singulières des systèmes différentiels, élucidée précédemment pan l’auteur grâce à des considérations géométriques très simples. . Tous ceux qui ont lu les Leçons sur l'intégration des équations aux dérivées partielles du premiel ordre ne s'étonneront pas de voir traitée avec Une grande perfection la théorie des équations aux déme vées partielles. Mais ilest un point, brièvement indiqué en une page, et qui mérite cependant d'attirer toute leur attention : je veux parler de la méthode de Mayer, Le BIBLIOGRAPHIE:— ANALYSES ET INDEX mise ici sous une forme nouvelle et très heureuse. M. Goursat sera, je crois, le premier à l'avoir fait com- prendre, si par comprendre on entend « savoir, non « seulement si tous les syllogismes d’une démonstra- « tion sont corrects, mais pourquoi ils s’enchaînent « dans tel ordre plutôt que dans tel autre ». L'ouvrage se termine par les éléments du Calcul des variations. Grâce aux récents traités sur cette matière, particulièrement à celui de M. Bolza, l'auteur a pu introduire ici la méthode de Weierstrass. Un géomètre aussi rigoureux ne pouvait, au reste, songer à suivre aujourd'hui les anciens errements. JacQuEs HaDaMaARD, Professeur adjoint à la Sorbonne, Professeur suppléant au Collège de France. 2° Sciences physiques Ginestous (G.), Chargé du Service météorologique à la Direction de l'Enseignement public de la Tunisie, professeur au Collège Sadiki. — Etude sur le Climat de la Tunisie. — 1 vo/. gr. 1n-8 de vi-4#27 pages, avec très nombreux diagrammes el cartes. Impri- merie Centrale (Georges Guinle et Ci), Tunis, 1906. L'étude sur le climat de la Tunisie de M. Ginestous a fait l’objet d’une thèse présentée à la Faculté des Sciences de Paris, pour obtenir le titre de docteur de l'Université de Paris. On doit féliciter la Faculté des Sciences, en accueillant favorablement un tel travail, d’avoir encouragé les études météorologiques et cli- matologiques conçues dans un esprit scientifique. Sous la direction de M. Jacques, directeur de lOf- fice tunisien des Postes et Télégraphes, aujourd'hui décédé, et de M. Machuel, directeur général de l'En- seignement public, M. Ginestous à organisé le Service météorologique en Tunisie ; et depuis 1894 il ne cesse de développer les stations d'observations, d'en sur- veiller le fonctionnement et d'en recueillir les don- nées. En se consacrant à cette œuvre de longue haleine, l'auteur ne cache pas qu'il a eu surtout en vue un but très précis : faire connaître à la France, avec tout le détail nécessaire, ce qu'est le climat tunisien. De très nombreux diagrammes servent à illustrer ce que les tableaux de chiffres ne traduiraient pas d'une façon assez concrète. Des cartes illustrent de même la distribution des températures, de la nébulosité, des vents sur la Tunisie. La nébulosité est extrêmement faible en Tunisie, surtout dans le sud ; en été, elle est faible dans tout le pays. Le ciel, dit l’auteur, est « toujours pur, tou- jours bleu, toujours lumineux ». Il est regrettable que l'on n’ait pu dans le sud faire quelques observations de polarisation atmosphérique au photopolarimètre Cornu, telles que Cornu lui-même en avait fait sur le ciel de la Grèce. Les températures ont été suivies durant quinze ans en plus de vingt stations, et l’auteur a établi — au prix de quels calculs ! — un luxe de tableaux des tem- pératures moyennes mensuelles, des températures minima moyennes el maxima moyennes pour chaque mois, pour chaque saison et pour l'année entière. Il résulte des observations du Service météorolo- gique tunisien qu'il peut geler l'hiver, et même au printemps, dans la région des plateaux du Nord-Ouest de la Tunisie, à Aïn-Draham, et parfois jusqu'à Tunis même. Il s’agit ici de gelées noires, pour lesquelles le thermomètre sous abri descend au-dessous de zéro. Les gelées blanches, pour lesquelles le sol est gelé sans que la température de l'air tombe à zéro, sont natu- rellement plus fréquentes encore, et l'auteur en fait plus loin une étude spéciale. Quant aux températures extrèmes de l'été, la température de 40° est fréquem- ment dépassée, surtout lorsque souffle le sirocco ; et il résulterait des observations citées par l’auteur que l’on aurait atteint une fois à Tunis et à El-Djem l'énorme température de 500. M. Ginestous à eu l'heureuse idée de faire une étude REVUE GÉNÉKALE DES SCIENCES, 1907, 209 spéciale de quelques journées de sirocco ; pour le 12 avril 1903, le 10 août, le 25 août, le 12 septembre 1903 et pour le 25 juillet 19904, il trace sur des cartes les lignes limitant la région où la température a dé- passé 40°. Bizerte, pour ces cinq situations, est laissée en dehors de cette région, ce qui indique que la tém- pérature y est restée au-dessous de 40° ; il en est de même, en général, pour une étroite bande du littoral oriental de la Tunisie. Tunis, pour les cinq situations indiquées, s’est trouvée, au contraire, dans la région où le thermomètre est monté au-dessus de 40°. Pour quelques-unes de ces dates, l’auteur donne également les diagrammes des appareils enregistreurs de la station de Tunis : baromètre, thermomètre el hygromètre. On peut voir, sur les courbes du 12 avril, qu'une baisse barométrique brusque correspond à une élévation tout à fait anormale de la température et à une baisse corrélative de l'humidité relative. Plus loin, l’auteur donne les cartes de la situation météo- rologique générale qui correspondent à tel ou tel vent en Tunisie. Nous nous permettrons à ce sujet une légère cri- tique : en étudiant la giration des vents à Tunis pour tous les cas possibles de dépressions barométriques passant au nord de Tunis, en allant de l'Est à l'Ouest, ou de l'Ouest à l'Est, au sud de Tunis, de l'Est à l'Ouest, puis de l'Ouest à l'Est, l’auteur prend la peine de des- siner seize figures théoriques, représentant tous les cas possibles, alors qu'il suffisait de deux ou tout au plus de quatre pour faire comprendre l'application de la loi de Dove à la station de Tunis ; un tel luxe de dé- tails, où l’on passe en revue tous les cas imaginables, est à peine à sa place dans un livre didactique pour des débutants ; il ne l’est pas dans une thèse. Sur la distribution des pluies, sur la direction et la force des vents aux diverses stations, l'ouvrage contient aussi des données très complètes et très intéressantes. se termine par un essai de division de la Tunisie en ‘égions naturelles, dont chacune est brièvement caracté- térisée en quelques pages qui résument l'allure de son climat. Il est à regretter que l'ouvrage ne contienne pas une table méthodique des cartes et des diagrammes, ce qui le rendrait plus maniable et permettrait d'en uti- liser plus aisément la riche documentation. BERNARD BRUNHES, Directeur de l'Observatoire du Puy-de-Dôme, Cross (C. F.) et Bevan (E. J.). — Researches on Cellulose. 11 (1900-1905). — 1 vol. 1n-8° de 184 pages. (Prix : 9 fr. 40.) Longinans, Green and C°, éditeurs. London, 1906. Ce volume est la suite de celui que les mêmes au- teurs ont fait paraître sur le même sujet il y à quel- ques années! et a pour seul but de résumer les connais- sances acquises depuis celte époque sur les propriétés et la constitution de la cellulose. Personne n'était mieux qualifié que MM. Cross et Bevan pour entreprendre pareille tâche et faire une judicieuse critique des travaux relatifs à la cellulose ; nous ne pouvons malheureusement pas les suivre ici dans leurs hypothèses, ni leurs discussions, dont le seul exposé nous entrainerait trop loin : rappelons seulement que MM. Cross et Bevan continuent à consi- dérer la cellulose comme un complexe, un agrégat qui ne saurait répondre à une seule formule chimique bien définie, quelles que soient d’ailleurs celles des éthers simples ou mixtes qui ont été proposées par différents auteurs. L'ouvrage se termine par un exposé succinct des progrès réalisés dans la technologie des produits cellu- losiques, notamment dans la fabrication de la soie artilicielle ou lustracellulose, ainsi que de la viscose sous forme massive ou mélangée avec le caoutchouc, Par le nombre et l'importance des renseignements 1 Voir la Aevue du 15 juillet 1895, p. 601. “+ 210 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX qu'il contient, ce volume doit nécessairement prendre sa place au milieu des monographies spéciales qui, - aujourd'hui, tendent de plus en plus à remplacer les traités généraux. L. MAQUENNE, Membre de l'Institut. 3° Sciences naturelles Davidson (Allan A.). — Journal of Exploration in Central Australia (1898-1900). — 1 broch. in-4 de 76 pages, avec 2 cartes. C. E. Bristow, Government Printer, Adelaïde, 1906. Il y a une dizaine d'années se formait en Australie, sous le nom de Te Central Australian Exploration Syndicate, une Société dont le butétait de faire recon- naître, au point de vue de ses ressources minières possibles, la région centrale du Territoire nord de la colonie de l'Australie du Sud, région qui s'étend des deux côtés de la ligne télégraphique transcontinentale qui va d’Adélaïde à Port-Darwin. M. A. Davidson fut mis à latête d’une Expédition qui, en deux campagnes, exécutées de 1898 à 1900, explora ce pays. Les gise- ments auriferes reconnus par l'Expédition ne sont pas suffisamment riches pour rémunérer une exploitation dans les conditions de transport actuelles; de ce côté donc, l'entreprise n'a pas donné tous les résultats qu'on en attendait. Par contre, la Mission a rapporté des renseignements géographiques et géologiques fort intéressants, qui complètent ceux de l'Expédition Elder et qui permettent de remplir d'indications sûres un blanc de plus de 27.000 mailles carrés sur la carte de l'Australie centrale. Forel (Auguste), ancien Professeur de Psychiatrie à l'Université de Zurich. — L'Ame et le Système nerveux. Hygiène et Pathologie. —1 vol. in-8° de 334 pages, avec 2 planches en couleurs et T figures dans le texte. (Prix : 15 fr.) G. Steinheïl, éditeur, Paris, 1906. Cet ouvrage de vulgarisation fait pendant à « La question sexuelle », que le mème auteur a fait paraître lan dernier. Comme la question sexuelle, celle de l'âme devait aussi être exposée äu grand public. Le sexe et la pensée sont, en ellet, les deux « mystères » biologiques dont l'homme est avant tout, sinon exclu- sivement curieux. Vous chercheriez en vain à intéresser un auditoire populaire avec la physiologie de la cireu- lation ; vous y réussirez toujours avec les phénomènes de la reproduction et avec les processus de la pensée. C'est que, d'instinet, cet auditoire a senti que, si les pre- miers sont les données du problème de l'espèce, les seconds sont celles du problème individuel par excel- lence. Ainsi, ces deux livres de M. Forel : « La Question sexuelle », « L'Ame et le système nerveux », forment une œuvre biologique complète de vulgarisation. L'auteur à intituié son ouvrage « L'âme et le système nerveux », parce qu'il a voulu partir du point de vue dualistée « avec les gens qui — dit-il — n'osent regarder les faits en face », « avec ceux qui jurentsur l'autorité », et qui en « prolitent pour prétendre qu'il s'agit là d'une question de métaphysique insoluble, et pour se mettre à cheval sur une équivoque appelée parallélisme psycho-physiologique ». Il compare l'hypothèse du dualisme, qui considère l'âme et l'activité cérébrale comme distinctes, à la conception cosmogonique de Ptolémée, et celle du monisme, qui les identifie l'une à l'autre, à la théorie de Copernic. Comme la théorie de Ptolémée, le dualisme « conduit à d'absurdes contra- dictious el exige des croyances mystiques sans aucun fondemeut scientitique, dès qu'on veut vérilier les faits à son aide. À l'aide du monisme, au contraire, tout s'explique clairement et sans coutradictions, comme le mouvement des astres avec la théorie de Copernic. On peut même souvent calculer et prédire les réac- tions psychologiques. Voilà pourquoi nous sommes en droit d'admettre le monisme comme démontré, jusqu'à : preuve du contraire, c'est-à-dire jusqu'à ce qu'on prouvé qu'il existe des âmes sans cerveau et des cer: veaux viyanis Sans âme ». Dans la première partie de son livre : « Ame, cerveau et nerfs à l'état normal », l'auteur tente cette démo tration. Après un premier chapitre, où il expose psychologie (science de l'âme), et un second pou l'anatomie du système nerveux, il examine dans un troisième les rapports entre l'âme et le cerveau, qui sont l'objet d'une science spéciale, la psycho-physio= logie. Le premier chapitre contient l'analyse d'un fait psychologique simple, la définition et l'explication des facultés de l'esprit et des notions principales de la Psy= chologie. Dans toute cette partie et dans l'ouvrage entier, Forel se sert de la terminologie de Simon : l'image mémoriale est un « engramme », sa revivifi- cation une « ecphorie », sa reconnaissance ou identifi= cation une « homophonie », ete. 4 Voici d'ailleurs à peu près la démonstration du cer- veau-âme. La conscience, c'est le côté intérieur psy- chologique (introspecté) de notre vie cérébrale; Je, neurocyme (onde nerveuse), c'est la vie cérébrale ob servée du dehors, par exemple chez les autres. « La physiologie du système nerveux (la science du neuro- cyme), a dit Fechner, et la psychologie traitentla même matière vue de deux côtés différents. Elles sont aussi. incapables d'entrer en conflit que celui qui regarde le côté convexe d’un arc de cercle et celui qui regarde. son côté concave. » Le monisme scientifique dit que ce sont les mèmes réalités qui nous apparaissent, psy=. chologiquement comme âme et conscience, physiolo-, g.quement comme neurocyme. Les états d'âme, obser- vés par la méthode introspective de la Psychologie, différent des activités neurocymiques de la physiologie nerveuse en ce qu'ils ne paraissent pas obéir à la loi de l'énergie, mais semblent naître de rien et disparaitre dans le néant, en ce qu'on ne peut les rattacher tous les uns aux autres par la Loi de cause à effet. C'est en se basant sur de pareilles observations de, pure psychologie subjective qu'on admet à l'exis- tence d’une âme indépendante de la matière vivante du corps, c’est-à-dire des lois naturelles. Toutes les contradictions de cette supposition dualiste s'expliquent d'abord par une distinction nécessaire. La conscience supérieure ou superconscience est l'ensemble des rellets synthétiques les plus importants des phéno- mènes nerveux complexes dont nous ayons conscience à l'état de veille, c'est-à-dire de ceux qui sont fixés par l'attention et dont nous nous souyenons; elle constitue ainsi le principal de notre moi, de notre âme. La conscience inférieure ou subcousecience se compose de tous les phénomènes psychiques (improprement appelés inconscients) qui furent une fois conscients; mais très faiblement, et qui ont été oubliés depuis. Notre moi est comparé à une machine très complh= quée, qui n'aurait que des sensations synthétiques du rythme dont les ondes de ses atomes sont animées ! Parce qu'elle n’est plus qu'âme et conscience, c'est-à- dire qu'elle n'a plus que des qualités synthétiques, subjectives qu'elle doit à sa complexité, parce qu'elle a perdu les consciences élémentaires de l'énergie de chacun de ses atomes, et qu'elle les a confondues dans le tout de sa subconscience, cette machine n'aurait pas le droit de refuser à chacun de ses atomes la sensa- Lion, car ce serait lui refuser l'énergie et le mouvements C'est ainsi qu'il faut se représenter, d'après M. Forel, la différence qui existe entre la conscience d'un neus rone, d'une cellule ou d'un atome, d'une part, et celles de notre cerveau, c'est-à-dire notre superconseiences d'autre part. : | Dans le cinquième chapitre: « Genèse individuelle et décadence du système nerveux », l'auteur examine les conditions physiologiques de l'hérédité nerveuse: ll nous explique ce qu'est la « mnème » (Simon), cest à-direla some des engrammes (modifications irrita= tives) héréditaires et individuels produits chez un être vivant. Il nous montre comment, dans la phylogénie, la 1: imnème est modifiée par la sélection, qui en élimine fout ce qui est mal adapté. * La seconde partie de l'ouvrage traite de laphysiologie nerveuse. L'auteur sy élève d'abord contre la distinc- tion des psychoses ou maladies mentales et des névroses où maladies nerveuses, conséquence de l'idée du parallélisme de l'âme et du cerveau. Par contre, il maintient la distinction des troubles organiques et des troubles fonctionnels, c'est-à-dire ne reposant sur aucune lésion anatomique; il tient cependant pour malheureuse l'épithète « fonctionnels » ét la remplace par cellé de « neurocymiques » qui ne l'est pas moins; cat cominent le neurocyme (onde nerveuse) serait-il troublé, si son substratuin he lest pas? Le pre- mier chapitre de cette partie pathologique est con- sacré à là psychopathologie ét à la neuropathologie sénérales. Dans le deuxième sont classées et définies les ormes diversés des maladies mentales et nerveuses ; dans le troisième, il examine leurs causes, l'hérédité et les causes acquises. à Malgré l'importance des problèmes qui y sont sou- levés et malgré la place considérable qui leur est accordée, les deux premières parties de l'ouvrage (qui en forment plus dés deux tiers) ne sont cependant pou préämbuüle, qu'une introduction scientifique et théorique à la troisième partie. Elles ont pour but de faire comprendre à tout homme cullivé le fonctionne- ment de notre cerveau-âme et ses maladies, pour lamener ensuite à un résultat pratique : à pratiquer l'hygiène nerveuse pour lui-même et pour ses descen- dants. M. Forel est un savant complet, qui conseille comme bon ce qu'il sait ou croit être vrai, qui pense que la pratique du bien est la suite logique de la pos- session du vrai. Il y a dans cette partie du livre quatre excellents chapitres sur l'hygiène de la vie de l'âme et * du Système nerveux. Ce sont d'abord des généralités . Sur l'h\giène nerveuse : des règles négatives, telles que l'abstinence; des règles posilives, qui découlent par exemple de la loi de l'exercice, de la nécessité du som- ineil, de la prédominance du naturel sur l'artificiel. L'hygièné nerveuse de la conception et de l'hérédité, celle de l’ontogénie ou de l'enfance (pédagogie), celle de l'adulte, formant uné série chronologique naturelle de chapitres fort intéressants et surtout fort utiles, dans lesquels tout homine désireux de bien vivre psy- chiquement, soucieux de procurer aux siens et à son prochain une vie psvchique belle et harmonique, pourra découper des maximes et des règles de conduite pour les divers âges et les diverses circonstances de la vie. Le mariage hygiénique, la blastophthorie ou alté- ration du germe hérédilairement transmissible, l'hy- giène nerveuse de l'école et de l'école de l'avenir, lhy- riène nerveuse de la maison et de la famille, celle de a femme, celle du vieillard, celle des névropathes, - (els sont les principaux sujets traités dans ces cha- pilres L'ouvrage se termine par l'énoncé dun certain nombre de thèses où projets sur l'hygiène publique ou . Sociale du système nerveux, projets dont la réalisation s'impose à bref délai. « La question sexuelle », « l'âme et le système ner- veux » forment ensemble une œuvre complète de Bio- logie appliquée à l'Hygiène, une œuvre de vulgarisation digne entre toutes d’être répandue. A. PRENANT, Protesseur à la Faculté de Médecine de l'Université de Nancy. 4 Sciences médicales Lebar (D: L.). — Hyperesthésies systématisées et troubles connexes. (Thèse de Paris). — Une bro- chure 1n-8 de 311 pages. Vigot frères, éditeurs. Paris, 1906. Pendant longtemps on à attribué à l'hystérie tous — les troubles de la sensibilité ayant un certain caractère de généralisation, tels que les hémi-anesthésies, lorsqu'il n'existait pas .de lésions organiques évidentes du sys- À BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX PAR tème nerveux. Il en est encore ainsi pour les troubles de la sensibilité par défaut. Mais il est désormais cer- tain que bon nombre de cas de troubles de la sensibi- lité par excès, les hémi-hyperesthésies par exemple, doivent être retranchés du tableau de lhystérie. D'après le Dr L. Lebar, ces hyperesthésies systéma- tisées doivent'être rattachées à une autre cause, à des lésions viscérales aiguës homolatérales. Leven est le premier qui ait étudié les troubles systématisés de la sensibilité par excès en dehors de l’'hystérie (1884). Il a mis en relief cette notion nou- velle, qu'au cours des diverses maladies de l'estomac on observe des troubles sensitifs nombreux ; dans cer- tains cas, des hyperesthésies de la peau, des muscles, des articulations sont systématisées au côté gauche. Plus tard (1393), Weill (de Lyon) étudia chez les tuber- culeux les hémihypéresthésies profondes et superti- cielles observées dans les cas où les lésions pulmo- naires ont une prédominance unilatérale très accen- tuée. Enfin, M. Jacquet a montré la coexistence de toute une série de phénomènes moteurs, vaso-moteurs, ther- niques, pupilläires et trophiques, avec les troubles hypéresthésiques. En recherchant les relations qui unissent tous ces accidents (hypéresthésies systématisées, superficielles où profondes et troubles connexes), on a remarqué qu'il existe fréquemment une affection organique siégeant du même côté. En se rapportant aux obser- valions, on rencontre chaque fois, « au-dessous » des troubles sensitifs, une lésion viscérale: orchite, salpin- gite, pneumonie, pléurésie, éruption dentaire, appen- dicite, olite aiguë, etc. On peut donc dire qu’en de certaines conditions de brusquerie ou de violence une lésion retentit sur le côté du corps où elle siège, et cela par des manifestations multiples dont les plus évidentes sont les troubles de la sensibilité. Comme preuve de cette interprétation, on fait remarquer que très souvent les phénomènes en ques- tion suivent, avec un parallélisme parfait, les oscilla- tions de la lésion primordiale ; ils s'atténuent avec elle ; ils prennent plus d'intensité lorsqu'elle devient plus active. Le Dr Lebar cite le cas d’un pneumonique du sommet droit avant une exaltation de la sensibilité du même côlé ; la maladie suit son cours normal vers la guérison, l'intensité de l'hyperesthésie suit une marche parallèlement descendante. Brusquement, de nouveaux foyers d'hépatisation apparaissent à la base du même côté, aussitôt Phyperesthésie redevient très vive. De curieux phénomènes de transfert complètent cette démonstration. Exemple : chez une malade atteinte de pleurésie droile, et qui présentait une hyperesthésie profonde et superficielle du même côté, une pulpite aiguë de la deuxième molaire inférieure gauche amène le transfert des phénomènes sensitifs, thermiques, vaso-moteurs, au côté gauche. Ces faits, selon le D' Lebar, permettront de retran- cher du cadre de l'hystérie certains phénomènes, les hyperesthésies en particulier, qui lui avaient été rat- ‘ tachés, il ÿ a quelques années, un peu trop hâtive-, ment. De H. Merce. 5° Sciences diverses Riemann (Hugo), Professeur extraordinaire à l'Uni- versité de Leipzig. — Les éléments de l'Esthétique musicale. — 1 vol. in-8° de 277 pages de la Biblio- thèque de Philosophie contemporaine. (Prix : 5 fr.) F. Alcan, éditeur. Paris, 1906. Le distingué professeur à l'Université de Leipzig, évitant les spéculations théoriques hasardées, à étudié, dans cet ouvrage, les éléments premiers de l'esthétique musicale. Il manquait une traduction française M. Humbert, professeur au Conservatoire de Genève, à très heureusement comblé cette lacune, 212 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 11 Février 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Lebesgue décrit une méthode permettant de démontrer l'existence d’une fonction harmonique dans un domaine et prenant des valeurs continues données à la frontière, sans aucune restriction. — M. R. Baïire démontre l’invariance du nombre des dimensions d'un continu par rapport au uroupe de toutes les transformations biunivoques con- tinues. — M. J. Guillaume présente ses observations du Soleil faites à l'Observatoire de Lyon pendant le quatrième trimestre de 1906. Les taches ont diminué tant en nombre qu'en étendue; il en est de même des facules. 2 Scrences PHysiQuEs. — M. G. Meslin montre que la théorie de M. Garbe sur les spectres cannelés des réseaux parallèles rend compte de toutes les particula- rités du phénomène, spécialement de la loi relative au déplacement angulaire des réseaux. — M. Alb. Colson a constaté que la molécule verte de sulfate chromique obtenue en chauffant le sulfate violet au-dessus de 90° présente deux états dissous dans les mêmes conditions de température et de milieu : un état initial condensé de forme [Cr?(S0*}E et un état normal Cr*(S0“}* prove- nant de la dissociation lente du précédent. — M. L. Henry a préparé le diméthylisopropylearbinol (CH*}C (OH).CH(CH*® par diverses réactions : 1° action de CH* MeBr sur l’aldéhyde 4-chloroisobutyrique; 2° action de C45MgBr sur la monochlorhydrine amylénique. — M. H. Fournier a constaté qu'il est possible de trans- former un alcool primaire saturé en acide monobasique correspondant, et cela avec un bon rendement, en employant le permanganate de potassium dans des conditions bien déterminées. — M. G. Darzens: Hydro- sénation catalytique des éthers-sels non saturés (voir p. 215). — M. H. Guillemard a reconnu que les cya- nures métalliques soumis à l’alcoylation donnent à basse température des carbylamines, à température plus élevée un mélange de carbylamine et de nitrile, puis, à partir d’une certaine température, uniquement des nitriles. — MM. A. Haller et Ch. Weizmann, en faisant réagir CH°Mgl,C*H°Mgl et C°H°MgBr sur les cya- nocampholates de méthyle et d'éthyle, ont obtenu les éthers acylcampholiques correspondants. La réduction de l'acide benzoylcampholique fournit l'acide phényl- oxyhomocampholique. — MM. A. Trillat et Sauton établissent la présence d'aldéhydes dans les fromages ; leur présence coïncide avec l'apparition de l'amertume. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. M. Nicloux fait un parallèle entre l'anesthésie par l’éther et par le chloro- forme. Les quantités absolues d’éther contenues dans le sang sont plus grandes que celles de chloroforme. L'éther s'élimine, relativement, plus vite que le chlo- roforme. L'éther se répartit égalemententre les globules et le plasma, tandis que le chloroforme a une affinité élective pour les globules. — M. A. Borrel a observé un lymphosarcome du vagin et du pénis chez le chien inoculable par le coït, et en relation avec la présence de larves d'Acariens. — M. M. Dupont a reproduit sous forme de courant alternatif la série des vibrations qui correspondent à une série de sons musicaux et se propose d'étudier les effets physiologiques de ces cou- rants musicaux rythmés. M. A. d'Arsonval rappelle que le nerf et le muscle répondent aux excitations électriques les plus variées et les plus compliquées. — M. A. Giard, à propos de l'autopsie de l’éléphant mort au Muséum, signale qu'il est bien établi que l'éléphant | d'Asie ne possède pas de cavités pleurales ; le fait est« moins certain pour l'éléphant d'Afrique et il y aurait lieu de le vérifier exactement. — M. E. L. Bouvier an étudié, sur diverses espèces de Crustacés de la mer des Antilles et du Pacifique, et qui devaient être iden—" tiques lorsque ces mers communiquaient, les modifi-" cations subies depuis l'émersion de l'isthme de Pana- ma. Elles ont été tantôt à peu près nulles, tantôt simplement suffisantes pour produire des variétés,s souvent assez grandes pour donner lieu à des espèces distinctes. — M. H. Piéron étudie les phénomènes d'adaptation biologique par anticipation rythmique. -- M. L. Joleaud a constaté l'existence de l’Aquitanien marin dans la partie moyenne de la vallée du Rhône; cette vallée n’a donc pas échappé, comme on le pen- sait, à l'invasion marine de la fin des temps éogènes. — M. F. Leprince-Ringuet a effectué des mesures géothermiques dans plusieurs sondages du bassin du Pas-de-Calais. Le degré géothermique du Dévonien et du Silurien (56,6 m.) est bien supérieur à la moyenne (31 m.). Séance du 18 Février 1907. M. le Président fait part à l'Académie du décès de M. Marcel Bertrand, membre de la Section de Miné- ralogie. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. —- M. Edm. Maillet pré- sente ses recherches sur les fonctions quasi-entières et quasi-méromorphes. M. P. Boutroux étudie la croissance des intégrales des équations différentielles de premier ordre. — M. G. Koenigs décrit le mode de construction du rayon de courbure des courbes- enveloppes dans le mouvement le plus général d'un corps solide. — M. G. Blum présente un appareil simple reproduisant toutes les particularités de l'expé- rience de Foucault sur la rotation de la Terre. — M. H. von Zeipel a essayé d'appliquer la théorie cinétique des gaz à l'étude de la distribution des étoiles dans les amas polaires. — M. G. Millochau décrit un artilice qui permet de régler le spectrohéliographe, non seule- ment dans la région lumineuse ordinaire du spectre, mais encore dans les parties du spectre solaire que l'on peut observer oculairement par l'emploi des écrans « colorés. : 20 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. G. Baume et D. E. Tsakalotos ont étudié les variations de la tension de vapeur avec la température au voisinage du point d'ébullition sous la pression p; elles sont régies par la relation dp/dT = 0,01 Mp/E, M étant le poids molécu- laire et E la constante ébullioscopique. — M. M. Ber- thelot à constaté qu'il ne se produit absolument aucun équilibre stable entre l'azote et le carbone pur solide ou vaporisé sur le trajet de l'étincelle électrique. — M M. G. Lemoine à observé que les vapeurs d'alcool éthylique anhydre, passant sur de la braise chauffée à 450°, sont dédoublées en aldébyde et hydrogène. La braise accélère aussi catalytiquement la décomposition de l'eau oxygénée. — M. V. Thomas, en traitant par l'iode du magnésium en poudre placé dans un excès de différentes cétones ou de dilférents nitriles, a obtenu des combinaisons d'iodure magnésien avec ces com- posés organiques. — M. Alb. Fourier propose une méthode pour l'analyse par voie humide des sables aurifères ; on leur ajoute un peu de Mn0*, puis HCI; il se forme du Cl libre, qui dissout l'or. On dissout les chlorures dans l'alcool, précipite par IES et continue comme dans les méthodes ordinaires. — M. J. B. Sen- derens, en faisant passer des vapeurs d'alcool éthylique sur du carbone (noir animal) vers 400°, à obtenu de Le LA 67 LL '4 4 S'éyhne. du méthane, H, CO et CO*; avec l'alcool pro- pylique, on obtient du propylène, de l'éthane, H et CO. Dans les deux cas, il se forme intermédiairement de l'aldéhyde formique. — M. G. André poursuit ses recherches sur la migration des principes solubles ans le végétal par l'étude des sucs retirés par expres- “sion des divers organes. — M. C. Fleig a constaté que “l'acide formique et les formiates absorbés par l’orga- “nisme sont transformés partiellement par les tissus, qu les dédoublent ou les oxydent, avec formation de carbonates qui sont éliminés. — M. C. Delezenne à reconnu que l'activation du sue pancréatique par les sels de calcium se produit toujours brusquement el présente les caractères d’un véritable phénomène explosif. 30 SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Charrin et Lévy- Franckel montrent que le sérum antidiphtérique, injecté à des lapins, n’agit.que pendant la durée de sa présence; au contraire, la toxine diphtérique provoque une réaction qui confère aux cellules le pouvoir d'éla- “horer des anticorps d'une facon durable. — MM. G. - Marinesco et M. Goldstein : Sur la transplantation des ganglions nerveux (voir p. 194). — M. Y. Manoué- lian a observé que, dans la sénilité ou les états patho- logiques, quand la cellule nerveuse se trouve atteinte dans sa vitalité, les cellules satellites se multiplient, ; l'attaquent, pénètrent dans son intérieur, la dévorent - et la détruisent. — MM. Ch. Nicolle et Pinoy signalent - un nouveau cas de mycétome à grain noir dans lequel . le champignon à fructifié à l'intérieur même des tissus - chez l'homme. — M. J. Kunckel d'Herculais montre . l'extension d'une petite mouche, l'Anthomyia eilicrura, . dont la larve est une des plus grandes destructrices ir œufs de sauterelles ; cette larve n'a d’ailleurs pas # ; Ceres en | un régime animal exclusif, car elle peut être végéta- rienne. — M. Ch. Janet a constaté que, chez les reines - es fourmis, la dégénérescenee des muscles vibrateurs du vol se produit par histolyse, sans aucune interven- tion de phagocytose. — M. Ph. Glangeaud distingue, (ans la chaine des Puys, des volcans formés de roches acides (volcans domitiques) et des volcans à cratère plus récents, ayant donné des coulées de roches plus basiques. — M. J. Thoulet a étudié une série de fonds - sous-marins recueillis entre Madagascar, la Réunion el «l'ile Maurice. ACADÉMIE DE MÉDECINE î Séance du 19 Février 1907. | M. À. V. Cornil signale deux cas de tuberculose EL musculaire: une tuberculose scléreuse du muscle mas- séter et une myosite tuberculeuse suppurée avec abcès froid. — M. Kermorgant rappelle que le paludisme a pris, en 1906, sur les hauts plateaux de Madagascar, plus spécialement en Emyrne, aux environs immédiats de Tananarive, une extension sans précédent et une allure véritablement épidémique. La lutte anticulici- dienne proprement dite n'a pu être entreprise, en rai- “son de l'impossibilité de pétroler les rizières dont la - contrée tire sa subsistance et des difficultés insurmon- tables que présente la protection mécanique des habi- “tations. La quinothérapie a été la seule arme employée “pour lutter contre l'épidémie ; elle a donné des résul- — tats remarquables dans tous les milieux où elle a été appliquée d'une facon continue. Elle ne s’est montrée “inefficace que dans la population civile indigène, à … cause de son peu de résistance et de la quantité insuf- . fisante de quinine mise à sa disposition. La gravité des atteintes du paludisme paraît avoir été commandée par l’état de misère physiologique de la population et aussi par les troubles profonds apportés dans les con- ditions d'existence de l'indigène par l'occupation fran- caise. Séance du 26 Février 1907. M. le Président annonce le décès de M. H. Moissan, membre de l’Académie. -— M. H. Vincent est élu 1 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 23 membre dans la Section d'Hygiène publique, Médecine légale et Police médicale, M. Chauvel présente un Rapport sur un Mémoire du D' Armaignac concernant une échelle optométrique polyoptotypique, qui permet de déterminer l'acuité visuelle de l'œil avec une précision suffisante pour con- fondre les simulateurs. —M. A. Laveran communique un Rapport sur deux travaux : l’un, de MM. Thiroux et d'Anfreville, relatif à la maladie du sommeil au Séné- gal, l’autre, de M. L. Martin, concernant cinq nou- veaux cas de trypanosomiase chez des blancs. Les malades de MM. Thiroux et d’'Anfreville ont été traités par l’atoxyle ; deux sont morts, mais un jeune noir, leur paraît être guéri, car les symptômes morbides ont disparu et l'on ne trouve plus de trypanosomes dans le liquide cérébro-spinal. Les malades de M. Martin ont été également traités par l’atoxyle; on a constaté de grandes améliorations, mais, à plusieurs reprises, on a vu réapparailre les accidents et les trypanosomes dans le sang, après interruption du traitement, — M. Decréquy donne lecture d'un travail sur l'emploi de la photothérapie au cours d'une ostéite des parois de la caisse. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 16 Février 1907. M. CI. Gautier a constaté que la soie de Saturnia Yama-Maï, retirée directement de l'animal et mon souillée de ses déjections, est verte et ne présente pas de cristaux de chloroyamamaine. — MM. M. Breton et G. Petit ont reconnu que l’anthracose pulmonaire par voie digestive est facilement réalisable chez le cobaye jeune, rendu préalablement tuberculeux par cette même voie digestive, le ganglion mésentérique tuber- culeux ne retenant plus les particules ingérées. — M. H. Cousin montre que la céphaline donne les mêmes produits de saponification que les lécithines : un acide glycéro-phosphorique, des acides gras et de la choline, —_ M. N. Fiessinger a étudié les lésions rénales, hépa- tiques etintestinales au cours de l’intoxication mereu- rielle massive; elles peuvent apparaître très rapide- ment et il n'existe aucun rapport entre la durée de l'intoxication et l'intensité des lésions. — M. R. Du- bois, en évaporant la solution alcoolique des glandes à pourpre du WMurex brandaris, à obtenu des fibrilles qui présentent de grandes analogies avec les fibrilles mus- culaires : stries noires et blanches entre nicols croisés. — MM. Léopold-Lévi et H. de Rothschild attirent l'attention sur une fonction du corps thyroïde qu'ils appellent orégogène, c’est-à-dire qui actionne divers appétits. L'administration d'extrait thyroïde a relevé, dans de nombreux cas, l'appétit alimentaire, l'appétit intellectuel, l'appétit sexuel. — MM. L. Ribadeau- Dumas et Poisot ont observé un hérédo-syphilitique présentant les manifestations muitiples d'une syphilis viscérale très accentuée; on a retrouvé le Spirochæte pallida dans tous les organes. — M. P. Remlinger estime que le virus rabique, déposé accidentellement ou expérimentalement en un point du corps de l'homme ou de l'animal, atteint les centres nerveux plus souvent qu'on ne le croit, mais peut demeurer très longtemps dans le cerveau à l’état de vie latente, pour se réveiller ensuite sous l'influence d’un traumatisme ou d'une émotion. — M. J. Baylac à constaté que les liquides d'huitres renferment : de l’albumine, de l’'urée et des sels ammoniacaux, des phosphates, des sulfates, des chlorures, Na, Mg, K, Si, etc. — M. Guerbet a reconnu que les sulfo-éthers urinaires sont sensiblement pro- portionnels à l'azote total éliminé; le rapport normal des premiers au second est de 1,40/,. — M, P. Salmon a inoculé du virus syphilitique à 8 syphilitiques ter- tiaires; il a obtenu six insuccès et deux résultats posi- tifs de nature contestable. Il semble donc que le syphi- litique possède une immunité cutanée absolue contre une réinfection venue du dehors. — M. H. Lams com- munique ses recherches sur la biologie sexuelle d’un \ L'inNALU RAM RTE re 7 EN aie, 2 de Lu ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Gaästéropode pülmonëé, l'Arion empiricorum. — M. R. Legendre à étudié par les mélliodés neurofbrillaires les väricosités des dehdrites des cellulés nerveuses. Ellés né semblent pas fiorrhales, ni dues à üñe ältéra- tion posli-mortem. — M. E. Faurié-Frémiet décrit la structure dé l'appareil basiläire chez lés Opercularra. — MM. J. Basset el H. Carré dédüisent de leurs expé- rientes que la, muqueuse intestinale normäle ne se laisse pas träverser pat les particules solides, inertés où vivantes, incafäbles de la lésér, — MM. Ch. Avbertin et L. Ambard ünt provoqué, far des injections intra- veinieuses de sécréline, une éositiophilie intestinale. — MM. L. Ambard, M. E. Binet el G. Stodel ont cons- taté sur le chieh que, dans les matières fécales ordi- naires, l'amylase est en quantité 1rès constante et très faibie; dans le liquide de purgation, l’amylase est en quantité 46 ou 20 fois plus grande. Séance du 23 février 1907. M. J. Baylac montre que la loxicilé des liquides d'huîtres appätlient en propre à ces animaux; elle est indépendañte de leau dans laquelle ils vivent — MM. M. Doyon., CI. Gautier et A. Morel onl constalé que l'extrait éthéré diminue dans le sang conservé aseptiquement à l'étuve. — M. M. Wéinberg à reconnu que les tumeurs gastriques à Spiroptères qu'on observe chez le cheval sont le produit du transport des mi- crobes dans les tissus de l’organise par des Hel- minthes. — M. J. Nageotte à poursuivi ses recherches sur la greffe des ganglions rachidiens ét explique le inécanisme dé certaines forrhalions observées. — M. G. Bohn a constaté que l'épanouissement des Actinies, non seulernent se produit d'autant plus faci- lement, mais ëaicoré dure d'autant plus longtemps que l'éclaireméënt passé à été plus considérable. — MM. R. Cambier et A. Giraud montrent que le zini- phène (acide #-oxycyano-cinnamique) ouit d'un pouvoir antiseptique relativement élevé, d'autant plus précieux que c'est uhe substance nôn toxique et non irritante. — M.F. Battelli ét M'e L. Stern ont étudié l'action d'un cértain nombre de substances sur l’activité respi- raloire des tissusanimaux isolés; l'aldéhyde salicylique, l'arsénile et le persulfate dé Na la diminuent considé- rablement. — M.C. Fleig a observé que le formiate de soüde provoque chez l'animal la vaso-dilatation du foie, du rein et du cerveau; la formaldéhyde en injec- tion exerce une vaso-constriction intense sur le rein, bientôt suivie d’une puissante vaso-dilatation progres- sive. — M. 3. Cluzet décrit une méthode, basée sur l’etiploides condensateüurs, pour déterminer la formule d'exchatioti d'un nerf où d'un muscle: — M.E. P. Fortin indique les aspects dé certains éléments du corps vitré qu'on peutübserver par vision entoptique.— M. A. Rance aëextrait de la bilirubine du plasma du sang de cheval. — M. H. Piéron se propose d'étudier la question pliy- siologique du sommeil par une méthode qui consiste à altendre l'apparition du besoin impératif de sommeil el émpéchant dés chiens de dortiir sans les fatiguer. — M. R. Dubois a trouvé au centre d’une jeune perle uñ grand nombre de cellules qui paraissent être celles d'u sporozoaire parasite enkysté; il y a lieu de se de- mänder si ce n’est pas ce parasite qui est l’origine de là production de là perlé. — MM. R. Legendre et H. Piérou ont übservé certaines modifications des cellules dé l'écorce cérébrale qui paraissent être en rapport direct avec l'état d’insomnie expérineéntale provoqué chez deux chiens. — M.H. IscovésCo a cons- taté que les globules sanguins des brightiques ot une résistance fort diminuée et leur sérum un pouvoir hé- molysant considérable ; l'administration de sels de Ca augmente là résistance globulaire et diminué lé pou- voir hémolÿsant. — MM. L. C. Maillard et F. Vlès ont trouvé, dans le stylet cristallin du Cardium edule, üñe substänce réduisant la liqueur de Febling, — MM. A. Mayer ét E. F. Terfroine motitrent que les albümines précipitées par l’alcoül peuvent s'y redis- soudre 8h présence de certains électrolytes. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORLEAUX Séance du 5 Février 1907. MM: Verger et Brandëis ont reconnu qüé, dan l'infection staphylococcique éxpérimentale des nerfs les lésions parenchymateuses sont de peu d'iiportäne en regärd des lésiohs interstitielles. — M. C. Saw: geau à constaté l'existence dé l Aglaozonia melanoïdi à Banyuls sur-mer, dans la Méditerranée; il a égale ent récolté à cetendroit le Neinodéïa tinqitana, jus qu'alors connu setlement aux envirüns de Tanger. MM. J. Bergonié el L. Tribondeau ont observé, après l'irradiation de l'ovaire par les rayons X, üne atrophié de la glande interstilielle caractérisée : 4° par la dim: nution de son volume total; 2 par l’écartement plus grand des nodules qui la constituent; 3° par 16 rabo grissement des éléments cellulaires. — M: J. Kunst à observé un cas de castration d’un lièvre par des la: pins qui lui mangèrent les testicules ; c'est en partie à ce fait qu'on peut attribuer la disparition du liè devant le lapin. — M. A. Gauducheau a isolé des eaux d'un puits, près d'Hanoï, un bacille violet patho gène: #4 RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 19 Février 1907. MM. H. van Gaver el P. Stephan poursuivent leurs recherches chez le Sacrocirrus papillocércus. — M.de Keatine-Hort a constaté que les longues étincelles de haute fréquence ét de haute tension ont, sur les tis- sus, une action destructive à haute dose, vaSo-constrie tive énergique à dose moindre. Elles ont une action élective sur les tissus anormaux. — M. L: Perdrix présente un appareil pour la désinfection rapide des livrets de caisse d'épargne par l'aldéhyde formique à température élevée. — M. A. Briot a observé que les iélanges de présure et d'antiprésure ne se neutralisent qu'après une heure au moins de contact. L SOCIÈTE FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 45 Février 1907. M. Victor Henri a étudié la coagulation du latex de caoutchoue et les propriétés élastiques du caouteho pur: 1° Agents coaqulants. Le latex de caoutchouc est un liquide blanc laiteux plus ou moins épais; il con tient en solution des cristalloïdes en quantité variables au microscope, on voit un grand nombre de globule ronds ou ovales de 1 à 2u de diamètre, agités de mou: vements browniens très intenses. Le nombre de tes globules de caoutchouc varie de 20 à 100 millions p millimètre cube. Sous l'influence de toute une sér d'agents différents (chaleur, alcools, acétone, acides; sels, etc.), le latex se coagule, les globules se réunis sent et se séparent du liquide dans lequel ils étaient suspendus. On obtient un caillot qui est élastique: caillot desséché donne le caoutchouc bien connu: l'on’ place du latex d'Hevea dialysé dans un tube en. dans lequel plongent deux électrodes entre lesquell on établit une différence de potentiels de 110 volts, of voit la branche négative du tube en U s'éclaireir et globules du caoutchouc s'accumuler dans la brane positive; par conséquent, les globules de caoutcho sont chargés négativement par rapport au liquide. latex, doit donc êlre rapproché des colloïdes négatifs: En étudiant l’action des différents électrolytes sure latex, on trouve que les corps précipitants et coag lants sont les mêmes que ceux qui agissent sur colloïdes négatifs en général, c'est-à-dire que ee sont les ions positifs qui déterminent la coagulation du latex. De même que pour les colloïdes, ce sont ions H+etles ions des métaux bi et trivalents qui sa surtout actifs. Le latex de caoutchouc est coagulé par les acides et les sels des métaux bi et trivalents. Ilrest également éoagulé par les colloïdes positifs, par exemple l’hydrate de fer colloïdal. 2° Aspects des Cox gula. Lorsqu'on provoque la coagulation du latex, on «A 5 à F F4 re 4 pa ch si t nn 1 pre EU dés à : RP ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 245 ke obtient des caillats de consistance et d'aspect Lrès va- jables suivant les coagulants. Ainsi cerlains coagn- ats, tels que CaCE additionné d'une trace de soude, ovoquent la formation de flocons qui tombent au nd du vase, mais qui restent bien isolés, sans s'ac- pler entre eux. Si l’on recueille ces flocons, qu'on s presse et quon dessèche, on obtient un éoagulum able, cassant, non élastique. Avec d'autres coagu- ais, par exemple Ca CF additionné d'une trace d'acide, voit la formation de caillot compact, très élastique; S différents flocons, à mesure qu'ils se forment, se Ilent entre eux. Le caillot desséché est très élastique. nemanière générale, sile milieuestalcalin, on obtient des flocons isolés, tandisque, s'ilestacide, on a un réseau astique. L'étude microscopique (lu latex au moment de coagulation montre que, dans un milieu alcalin, les obules se réunissent en formant des amas irréguliers " persés dans le champ du microscope; au contraire, en milieu acide, on yail les globules se réunir suivant es lignes absolument rectilignes, formant des chape- ts, de sorte que la préparation microscopique pré- ente bien l'aspect d'un réseau. 3° Ælasticite du caout- shouc obtenu. Des bandes de caoutchouc desséché étaient étudiées par des tractions, et l'auteur a tracé néral qui ressort de cette étude est que lélastieite et “la resistance d'un caoutchouc dépendent directement du mode de coagulation du latex. Le mème latex, coagulé par des agents différents, peut donner des caoutchoucs dont la résistance à la ruplure varie dans des proportions très fortes. Ces différences des pra- riétés élastiques ne s'observent pas seulement sur le “caoutchouc directement; elles persistent aussi après la vulcanisation au bain de soufre de ce caoutchouc. n dehors de l'intérèt théorique qui a guidé ces re- cherches, les résultats précédents présentent un intérêt “pratique; on sait, par exemple, que le caoutchouc de Ceylan est fourni par du latex d'AHevea, comme celui du Para; mais, à Ceylan, la coagulation est faite par l'acide acétique, tandis que c'est le fumage qui est employé en Amazonie ; il est donc possible que l'infé- “riorité du Para de Ceylan par rapport au Para de l'Amazone soit due uniquement à une différence du mode de coagulation. — M. Chassagny décrit un 4p- “pareil destiné à l'étude graphique de la composition des “vibrations circulaires. Cet appareil se compose essen- iellement de deux axes verticaux situés dans Île prolongement l'un de l'autre. Les extrémités de ces “leux axes qui se trouyent en regard sont munies de deux manivelles qui se terminent par des œillets. Dans les deux œillets passe librement une broche rec- tiligne, dent un point P est assujetli à rester constam- “ment sur un même plan horizontal. Lorsque les axes tournent d'un mouvement uniforme, le point P parti- plan la trajectoire résultante des vibrations circulaires que lui imprimerail isolément chacun des axes. Pour Éviter la nécessilé de rotations uniformes difficiles à réaliser, on élimine mécaniquement le temps en sou- mettant les deux axes à la même commande. Cette Commande simultanée s'obtient à l’aide de courroies directes ou croisées, qui passent, d’une part, sur des poulies montées sur les deux axes et, d'autre part, sur d'autres poulies montées sur un arbre moteur paral- lèle aux deux axes. En disposant du diamètre des poulies, de la longueur des manivelles et de leur angle initial, on fait varier les conditions de période, d’am- plitude et de phases des vibrations composantes. — M. Marcel Moullin : Sur les égaliseurs de potentiel. On emploie couramment, en météorologie, comme égaliseurs de potentiel, des flammes, des mèches et, “Mepuis quelques années, dessels de radium.M. Moullin à étudié le fonctionnement de ces collecteurs en les phen dans un champ électrique obtenu, à l’aide une batterie de petits accumulateurs, entre deux plateaux conducteurs parallèles. L'étude de la défor- “mation du champ à l’aide d'un appareil à écoulement LA £ \ + A : k es courbes de traction pour chacune. Le résultat gé-. d'eau permettait de déterminer l'origine des pertur- bations (accumulation d'ions, écarts entre le potentiel mesuré et le potentiel qui correspondrait à la position du collecteur). Les indications de ces égalisateurs de potentiel ont été ensuite comparées aux indications données par l'écoulement d'eau, dans le vent, en les plaçant dans un champ électrique constant, établi entre le plancher métallique dela deuxième plate-forme de la tour Eiffel et une surface grillagée de 90 milli- mètres carrés de superficie suspendue à 4",10 au- dessus(champ, 112 v. p.m.). Sels de radium. Collecteurs en forme de disques recouverts sur l'une de leurs faces de sulfale radifère collé à l’aide de vernis (Armet de Lisle). Si le disque est placé perpendiculairement aux lignes de force, il y a, en l'absence du vent, une perturbation due à une accumulation d'ions, surtout importante du côté inactif, et qui devient négligeable quand le vent atteint une vitesse de l'ordre du mètre. De plus, les ions ramenés par le vent sur Ja perche isolée qui soutient le collecteur peuvent donner lieu à une fuite. Cette fuite intervient seule quand le disque est parallèle aux lignes de force et si le yent souffle bien horizontalement, sans tourbillons. Le disque devra done être dispusé verticalement, le coté inaclif tourné vers la perche et disposé, de préférence, de façon que le vent vienne de l'arrière. Flammes. Les flammes in- diquent, en l'absence de vent, le potentiel d'une région située 20 centimètres à 30 centimètres plus haut. Cet écart diminue avec le vent et il est dû à une accumu- lation de charges dans la flamme par suite de l'inégale vitesse des ions entraînés à la fois par le champ et les vaz chauds. La lampe d'Exner, quand elle file, ne résente pas, jusqu'à extinction, d'erreur variable avec e vent. Mèclies àu nitrate de plomb. La seule pertur- bation provient dece qu'elles se chargent positivement, même en l'absence de champ. Cette charge provient d'une émission de charges négatives pendant la décom- position du nitrate de plomb. Elle n’est importante que pour les mèches obtenues avec une solution concén- lrée: elle est nulle pour des solutions à 5 ou 2 ?/,, qui donnent des mèches qui se mettent bien en équilibre à l'air libre ou dansle vent. Les mèches se recommandent pour les mesures absolues; les sels de radium seront utilisés pour les installations portalives destinées à faire des mesures suivies ou même pour les installa- tions fixes, s'ilest possible de se placer dans les condi- tions indiquées. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 8 Février 1907. M. Binet du Jassonneix communique les résultats de ses recherches sur les combinaisons du bore avec le chrome et le molybdène. — M. P. Freundler, à propos d'un récent travail de M. Wohl, rappelle ses recherches, entreprises depuis plus de deux ans, sur les dérivés dihalogénés de l'aldéhyde acétique. Il à ob- tenu, au cours de ces recherches, l’'oxyde éthylique de l'alcool &4-dichlorisopropylique CHCP. CH(OC#H5). CH°; ce dernier, étant chauffé avec de l’oxyde de plomb et de l'eau, fournit, non pas de l'aldéhyde éthyl-lactique, mais du chlorure d’éthyle et de l'acide propionique. M. Freundler se réserve de continuer ces recherches. — M. Bouyeault présente une note de M. Cuniasse sur la caractérisation de l'essence d’absinthe. — ,M. G. Darzens communique un ensemble de recherches sur l'uydrogénation catalytique des éthers-sels non saturés. Les éthers-sels des acides gras non saturés du type CH2r 0% s'hydrogènent régulièrement et facilement pour donner les éthers-sels saturés correspondants. Cette hydrogénation s'effectue quelle que soit la position de la double liaison: c'est ainsi que le diméthylacry- late d'éthyle donne lisovalérianate d'éthyle ét que l'undécylénate d'éthyle donne l'éther undécylique. Les éthers des acides non saturés aromatiques S’hydro- gènent également, et il est à remarquer que, dans cette réaction, le noyau aromatique résiste à l’'hydrogéna- ACADÉMIES ET'SOCIÉTÉSZSAVANTES tion; c'est ainsi que le cinnamate de méthyle donne seulement le phénylpropionate de méthyle. Il en est tout autrement lorsque le noyau aromatique est déjà partiellement hydrogéné. L'acide tétrahydrobenzoïque donne l'acide hexahydrobenzoïque; l'acide cyclohexé- nacétique donne l'acide hexahydrophénylacétique. — M. R. Locquin expose comment il a réalisé le dédou- blement en ses deux inverses optiques de l’un des deux acides a-amino-méthyléthylpropioniques racémiques prévus par la théorie et dont M. Bouveault et lui ont récemment donné une méthode de préparation synthé- tique. Ce dédoublement s'obtient par l'intermédiaire des sels de brucine du dérivé formylé correspondant, en suivant la marche indiquée par E. Fischer. Le sel de la combinaison lévogyre se dépose le premier. Les eaux-mères fournissent la combinaison dextrogyre. Les dérivés formylés actifs fondent à 437; en solution alcoolique renfermant 10 °/, environ de substance, (a) — 27976 et + 28926. Les acides a«-aminés corres- pondants fondent vers 185° en se décomposant:; en so- lution aqueuse renfermant 3,10 °/, environ de sub- stance, (a)}=——1055 el + 11929. La comparaison de ces différents résultats avec ceux qu'a donnés M. Ehrlich, au sujet d'une nouvelle leucine extraite des résidus des mélasses de betteraves, permet de conclure à l'identité de l'acide «-amino-métnyl-éthylpropionique, préparé synthétiquement par MM. Bouveault et Locquin, avec l'i- soleucine de M. Ebrlich. — M. E. Rengade expose les résultats de ses recherches sur les protoxydes anhydres des métaux alcalins. Il à pu préparer ces corps à l’état de pureté parfaite et bien cristallisés, en combinant le métal correspondant avec une quantité insuffisante d'oxygène et distillant ensuite dans le vide absolu l'excès de métal alcalin. Les composés Cs°0, Rb°0, K°0, Na°D ainsi obtenus se combinent à l'eau avec violence, ils sont réduits par l'hydrogène au-dessous de 200°, avec formation d'un mélange équimoléculaire d'hydrate et d'hydrure. En élevant ensuite la tempé- rature jusqu'à 300°, dans le vide, l'hydrure se dissocie avec dégagement d'hydrogène et volatilisation de métal. L'ammoniac liquéfié réagit également sur ces pro- toxydes et les décompose d’abord en métal et bioxyde, qui réagissent l’un sur l’autre en fixant une molécule d’ammoniac pour donner, finalement, un mélange d'amidure et d'hydrate. SOCIÈTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 22 Novembre 1906 (fin). MM. L. Hill et M. Greenwood poursuivent leurs re- cherches relatives à l'influence de l'augmentation de pression barométrique sur l'homme. En ce qui concerne l'absorption des gaz par les fluides tissulaires, ils arrivent aux conclusions suivantes : 1° les fluides du corps de l'homme exposés à l'air comprimé absorbent l'azote d'accord avec la loi de Dalton; 2° la saturation des fluides du corps est atteinte après une exposition à des pressions de 30 à 45 livres pendant dix à quinze mi- nutes; 3° mème avec une vitesse de décompression de vingt minutes par atmosphère, l'équilibre entre l'azote dissous et celui de l'atmosphère n’est pas complet quinze minutes après la-décompression. — MM. F. A. Baïinbridge et A. P. Beddard : Le rapport des reins avec le métabolisme. On à étudié les effets produits par l'enlèvement de la plus grande partie du rein chez les chats; on enleva une partie d'un rein à la première opération et, quelques semaines plus tard, on enleva le rein opposé. Après la deuxième opération, les animaux refusèrent la nourriture et perdirent de leur poids, mais pas plus rapidement que des chats normaux privés de nourriture pendant vingt-quatre heures. Les auteurs n'ont pas observé invariablement l’'augmenta- tion de l'élimination d'azote urinaire indiquée par Bradford ; mais, chez quelques chats, qui refusèrent la nourriture après la deuxième opération, l'élimination de l'azote augmenta, cependant pas en aussi grande quantité qu'avant la deuxième opération. De plus, l'élimination de l'azote urinaire n'a pas augmenté avant que les animaux aient perdu environ 25 °/, du poids de leur corps. Une augmentation semblable d'azote a été observée par un grand nombre de savan chez des animaux normaux, lorque la graisse de leu corps avait été grandement utilisée et que l'énergié devait être procurée par une augmentation du katabo lisme des protéides. Par conséquent, on peut conclure que l'augmentation de l'élimination de l'azote observée chez les chats privés des trois quarts ou plus de leurs reins est le résultat de l'inanition; on n’a obteni aucune preuve de l'influence directe des reins sur J£ métabolisme azoté. Bradford a trouvé que les chiens après excision d’une partie d'un rein, sont apparem- ment incapables de laisser passer une urine concen trée. Les auteurs ont trouvé cependant que, dans le“ mêmes conditions, les chats peuvent laisser passer une urine concentrée, et que sa quantité n’est guère supé= rieure à la normale. Même après la seconde opération, l'urine n’est pas en quantité excessive ou notablement diluée. La rétention de l'azote s’est produite toujours après la première opération, et chez un animal après la deuxième opération aussi. L'analyse, par la méthode de Schryver, du sang, du foie et des muscles, a montré par comparaison avec des animaux normaux, unëé augmentation marquée, non seulement dans la quan tité actuelle de l'azote résiduel dans ces organes, spé- cialement le foie, mais aussi dans son pourcentage relativement à l'azote total. — — M. A. Sedgwick Etudes sur le développement de la néphridie larvaire» IT. Le Polygordius. — M. R. H. Lock présente ses recherches sur l'hérédité de certains caractères invi sibles chez les pois. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 8 Février 1907. La Société procède au renouvellement de son Bureau pour l’année 1907. Sont élus : Président : M.J. Perry; Vice-présidents : MM. C. Chree, H. M. Elder, d. Fleming et W. Watson: Secrétaires : MM. W. R. Cooper et W. Cassie; Trésorier : M. H. L. Callendar; Bibliothécaire : M. W. Watson. : M. A. Russell présente un travail sur le ‘champ magnétique et les coefficients d’inductance des cou rants circulaires, cylindriques et hélicoïdaux. Il donne la formule pour la force magnétique près d'un courant circulaire, puis il montre comment la self-inductance d'un anneau de fil et l'inductance mutuelle entre de filaments circulaires coaxiaux peuvent être trouvées sans l'emploi du théorème de Neumann. Par la méthode de Kelvin, les résultats obtenus peuvent être appliqu au problème correspondant du filament vortex simp en. Hydrodynamique. Puis l’auteur donne, à la fois sous forme d’'intégrales elliptiques et sous forme série algébrique, la formule exacte pour l'inductance mutuelle entre une feuille de courant cylindrique et. un filament de courant hélicoïdal coaxial. La formule de Lorentz pour la self-inductance est un cas particus lier de la formule de l'auteur pour l'inductance mutuelle, et la formule de Lord Rayleigh est un cas, particulier de la formule de Lorentz. Quand la longueur de l'hélice est plus du double de son diamètre et que le pas de l'hélice est faible, la self nauCiRo donnée par la formule : D | a° 4a & a* — 92 __N2 = = =— . De [: 3xh | Sh° Sr où N est le nombre de tours, 24 le diamètre et 24 Ian longueur axiale. à: Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. À Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. : Y # _ 18° ANNÉE 30 MARS 1907 Revue Sciences pures el appliquées générale des DirEcTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Marcel Bertrand et son œuvre géologique. — La Géologie française, plus sprcialement celle des Alpes, vient d'être cruellement frappée par la mort prématurée, survenue le 13 février 1907, d'un de nos maîlres les plus éminents : Marcel Bertrand Fils du célèbre mathématicien Joseph Bertrand, membre de l'Académie française et Secrétaire perpétuel de PAca- démie des Sciences, il soutint dignement la lourde charge d'un nom aussi illustre et, comme Pa dit M. l'enri Becquerel, non seulement il le porta sans défaillance, mais réussit à y ajouter un nouvel éclat. Ne le 2 ruillet 1K47, Marcel Bertrand passa par | Ecole Polytechnique de 1867 à 1869 et en sortit comme ingé- nieur des Mines, pour être attaché, quelques années plus fard, au Service de la Carte géôlogique de France. Nommé en 1886 professeur de Géologie à l'Ecole natio- nale des :ines, il sut donner à son enseignement une ampleur magislrale, en s’attachant surtout à reconsti- tuer l'histoire des chaines de montagnes. Elu en 1896 membre de l'Académie des Sciences à la place de Pas- teur, il mulliplia ses travaux qui, tous, sout marqués d'une puissante originalité; ils le placent au premier rang de- lectoniciens. Comme collaborateur du Service de la Carte géolo- gique, il eut à s'occuper du Jura, de la Basse-Provence et des Alpes. Nous le suivrons dans ses études sur chacune de ces régions, où il apporta un contingent d'observations nouvelles et de vues synthéliques ayant fait époque dans la Science, et dont devront tenir compile tous ceux qui, après lui, auront à s'en occuper. A l'époque où Bertranfl fut chargé d'établir la carte d'une partie importante des massifs jurassiens (feuilles de Gray, Saint-Claude et Lons-le-Saulnier), les terrains jurassiques supérieurs de ces massifs n'avaient été l’objet d'aucune étude de détail. Les idées les plus contradictoires régnaient au sujet de leur classification. En suivant les couches pas à pas, et grâce à la théorie des faciès, dont l’initiateur avait été Grestly, il arriva à démontrer qu'entre Gray et Saint Claude le faciès et la faune coralligène se développent, suivant les points, à des niveaux différents. Il pouvait distinguer une ovlithe rauracienne, une oolithe astartienne et REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. une oolithe virqulienne. Comme le fit ressortir M. Henri Douvillé, c'était là un résultat d’une extrème imj or- tance, qui permettait d'établir un synchronisme exact entre les assises du bassin parisien et celles du bassin méditerranéen. Ces resultats furent acc eplés par tous, deux ans plus tard (18 lors d'une réunion extraordinaire de la Société Géologique dans le Jura, réunion que Marcel Bertrand présida avec une autorité et un savoir indis- cutables. ss Entre temps (1884), il avait publié un Mémoire qui passa presque inaperçu, bien que portant en germe l'explication des phénomènes orogéniques. C'était une Notice sur les rapports de structure des Alyes de Glaris et du bassin hourller du Nord. Au lieu d’ Éo quer la structure des premières par deux grands plis inclinés, l’un vers le Nord et l’autre vers le Sud, il considérait cette disposition comme due à un pl unique. Il supposait que le pli septentrional n'est pas un véritable pli, ayant racine en profondeur, mais seulement une wasse charriée par le déroulement du pli méridional. Ces phénomènes de recouvrement, comme les appe a l’'éminent géologue, ne sont pas spéciaux, ajoutait- il, aux Alpes de Glaris Ils se retrouvent à l’est jusque dans le Tyrol (Rhäticon), et en Savoie ils se pours ivent Jusqu ‘aux environs de Faverges. Cette Communication, qui fut discutée et n'eut pas le retentissement mérité, devait révolutionner la Tectonique et donner la clef de la structure de la plus grande partie du front sep- tentrional des Alpes. Peu après, Bertrand abordait l'étude de la Basse- Provence; là encore il marquait son empreinte d’une facon indélébile, en montrant que cette contrée, con- sidérée avant lui comme peu « disloquée », est, en réalité, un pays où les phènomènes de plissement ont eu une intensité exceptionnelle. A ce point de vue, la région du Beausset (Var), entre Toulon et Mar- seille, est particulièrement curieuse. S on montrent sont disposées en un large pli synclinal, où les bancs crélacés sont Éoncordante en{re eux, ainsi qu'avec le Jurassique sous-jacent. Dans ce bassin d'apparence si régulière existe, cependant, une singu- Les assises qui | lière anomalie : la colline qui s'élève au Sud du 6 218 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Beausset a ses sommets formés de lerrains anciens (Trias et Infralias). Ces terrains étaient regardés comme les restes d'un ancien récif, ayant existé au milieu de la mer crétacée. Le savant géologue s’inscri- vait en faux contre cette manière de voir; il démon- trait que /e Trias est en réalité superposé au Crétace, faisant partie d'une masse autrefois poussée sur ce Crétacé, puis ensuite isolée de sa racine par dénudation. En un mot, on avait affaire ici à un véritable Zambeau de recouvrement. Ce n’est pas tout. L'éminent maître pouvait encore démontrer que le Crétacé forme un pli couche vers le Nord, tandis que le Trias forme un autre pli, dont le sommet est également au Nord, et qui se rattache aux plis méridionaux du bassin. Ces divers phénomènes sont dus à une même cause: à des refoulements, en tout semblables à ceux des Alpes de Glaris ainsi qu'à ceux de la région du Nord, bien que ces derniers soient d’un autre âge. Dans un Mémoire rédigé dix ans plus tard (1898), et consacré au bassin de Fuveau, il cherchait encore à démontrer que des analogies de structure existent entre la bordure de ce bassin et celle de la contrée houillère franco-belge. Enfin, nous ajouterons que, dans une remarquable étude publiée dans les Bulletins du Service de la carte, en 1899, il résumait ses divers travaux sur la Basse- Provence, en avançant qu'il aurait existé sur tout le Nord de cette région une grande nappe de terrains charriés horizontalement, et que cette nappe aurait été plissée ultérieurement avec le substratum*. En 1890, Charles Lory, l'un des maîtres incontestés de la Géologie francaise, nous était brusquement enlevé, laissant inachevées plusieurs cartes géologiques de nos massifs alpins. A la tête des collaborateurs qui furent désignés pour continuer l'œuvre du regretté professeur de Grenoble fut placé Marcel Bertrand, et « nul aujour- d'hui, dirons-nous avec M. Kilian, ne peut parler des Alpes francaises sans rappeler l'œuvre de cet éminent géologue »°. Au nombre des questions restées en sus- pens se trouvait celle de l’âge des « Schistes lustrés ». Ces schistes avaient été classés dans le Trias par Ch. Lory, tandis que nos confrères italiens, MM. Zacca- gna et Mattirolo, les considéraient comme antérieurs à la formation houillère. Rallié tout d'abord à cette der- nière interprétation, Bertrand l'abandonnait bientôt en publiant un important Mémoire qui ouvrait une voie sûre à nos recherches, car il établissait d'une façon définitive que les schistes sont d'âge secondaire. Cette attribution a été confirmée par des découvertes récentes de fossiles, faites tant en Italie qu'en Suisse. Cette importante question résolue, il pouvait conti- nuer utilement ses courses en Maurienne et Tarentaise (Savoie). Il en publia les résultats, dès 1894, dans une Notice de tous points remarquable, et dont la plupart des données ont été confirmées par les travaux ulté- rieurs. Le trait caractéristique de la structure des Alpes françaises, conclut-il, est la structure en éventail com- posé. Les plis de l'Ouest se couchent vers la France, ceux de l'Est vers l'Italie. La zone des terrains houillers, de Bourg-Saint-Maurice à Briancon, est le centre de l'éventail et l'axe des plissements. Un phénomène remarquable, que présente le pli médian, est de s'ouvrir autour d'une amande synclinale formant le « Mont-Jovet », et plus loin, à partir de Sainte-Foy, autour d'une autre amande de structure analogue, « La Grande-Sassière ». 1 Des recherches récentes de M. Kilian (C. R. collabora- teurs. p. 1905) ont complété les travaux que nous venons de résumer, en montrant que les plis couchés ‘'e celle région nappes sont formés dans des conditions analogues à ceux du front nord des Alpes. 2 W. Kizran et J. Révicz: Etudes géologiques dans les Alpes occideutales. Contributions à la géologie des chaines intérieures des Alpes française. Loc. cit, p. 568. se Les plis situés à l'Est de la bande houillère son sinueux. Cette structure serait due à l'interposition lentilles allongées dans le sens de la direction. G lentilles, le plus souvent, sont des noyaux anticlinaux, accidentés de plis ne se prolongeant pas au delà de las lentille. Bertrand proposait, à juste titre, pour cette structure le nom d'amygdaloïde. On peut citer comme type les massifs de la Vanoise, du Mont-Pourri et surtout, du Mont-Blanc. Dans un Mémoire postérieur, paru en 1896, le savant professeur — avec lequel, en compagnie de M. Kilian, nous avions fait un certain nombre d'excursions — donnait une description des massifs situés au Nord de l'Isère, entre Moütiers et le Mont-Blanc. il distinguait cinq bandes principales, orientées du Sud-Ouest au Nord-Est, et admettait les conclusions formulées par M. Kilian et par nous sur l'existence du terrain num- mulitique dans cetie partie des Alpes. Cette même année, il publiait, avec M. Etienne Ritter, une Note sur la structure de la chaine du Mont-Joly, près de Saint-Gervais. Les deux auteurs arrivaient à démontrer que cette chaîne « présente un empilement de plis rabattus jusqu'à l'horizontale, et que, pour chacun de ces plis superposés, on peut observer sans discontinuité son rattachement à la partie droite ».M C'était là une constatation d'une extrème importance, qui permettait de s'expliquer la formation des grands plis couchés, et qui, complétée par les données fournies par les lambeaux de recouvrement, permit d'édifier la. thcorie des charriages. Ainsi étaient modifiées profon- dément nos conceptions relatives à la formation des … montagnes, et Bertrand pouvait avancer à bon droit que « le rôle des déplacements horizontaux est une des ques-. tions fondamentales de la géologie des Alpes ». En 1897, paraissait, dans les comptes rendus du Congrès international tenu à Zurich en 189%, un impor- tant travail dû également à notre savant maître et traitant de la récurrence de certains faciès : roches gaeïssiformes et dépôts schisleux plus où moins eris- tallins. Les gneiss d'âge permien, les schistes lustrés d'âge secondaire, le flysch d'âge tertiaire, disait-il, réalisent un cycle complet, embrassant la série des terrains sous un nombre restreint de faciès, directe- ment liés aux mouvements ayant formé la chaine. On peut donc conclure à « la liaison ordonnée de tous les phénomènes tectoniques, sédimentaires et éruptifs, autour de l'histoire des chaînes de montagnes ». C’est de ces problèmes d'Orogénie que se préoccupait surtout à cette époque Marcel Bertrand; les deux der- nières Notes communiquées par lui, en 1900, à l'Aca- démie des Sciences, sont consacrées à des considéra- tions de cet ordre et sont intitulées, l’une : Æssai d'une théorie mécanique de la formation des montagnes, et l’autre : Deformation tétraëdrique de la Terre ëét déplacement du Pôle. Après avoir rappelé, dans la pre mière, que les chaînes européennes sont allées en se déplaçant progressivement vers le Sud, il admet les phases suivantes, comme cause de leur éditication : {° formation d'une cuvette géosynclinale dissymé- tique, dont le fond avance vers le Sud, ce qui amène la production d'un bourrelet; 2° poussée sur la cuvette de ce bourrelet qui, reformé sans cesse, se recouvre d'une nappe de charriage; 3° élévation en masse de l'édifice marin, ainsi construit en profondeur. Ces idées théoriques, clairement formulées, sont remarquables et, si elles ne donnent pas encore là solution définitive, -— car le problème est difficile et d’autres facteurs nous semblent devoir être pris en considération, — elles témoignent de la génralité des conceptions de l'éminent géologue. Avec MM. S. Suess, de Vienne, et Heim, de Zurich, il se place au premier rang des créateurs de la Tecto> nique, cette branche de la Géologie qui s'est donné pour mission d'étudier les dislocations subies par les terrains, et dont les découvertes récentes ont modifié si complètement nos idées relatives à la formation des ; chaines montagneuses. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 249 L'examen que nous venons de faire de l’œuvre de celui qui fut pour nous le plus attachant et le plus regretté des maîtres, témoigne hautement de la grande perte subie par la science "céologique. Ses travaux — comme il advint pour ceux de l’un de ses prédécesseurs dans la chaire de l'Ecole des Mines, Elie de Beaumont, — illustrent à jamais son nom; ce nom restera indis- “solublement lié aux importants progrès réalisés par “l'Orogénie, vers la fin du siècle dernier. J. Révil, Président de la Société d'Histoire naturelle de Savoie. $ 2. — Astronomie Les taches solaires et le magnétisme ter- .mestre. — Le 10 février dernier, la Société Astrono- mique de France recevait la notification qu'une perturbation magnétique très intense avait agité les boussoles de tous les observatoires, en France, en “Angleterre, en Belgique, en Allemagne, en Italie, en 1 Espagne, elc…., el un peu partout, aussi bien dans le “Nouveau- Monde, aux Etats-Unis, que sur notre conti- - nent. A l'Observatoire magnétique du Pare-Saint-Maur, l'aiguille de déclinaison, dont loscillation diurne moyenne n'est que de quelques minutes, s’affola pen- “dant vingt-quatre heures, au point de parcourir une amplitude d'un degré et demi. Une dépèche du pic du Midi apprenait que la perturbation avait, là aussi, . dépassé un degré. À l'Observatoire de Kew, en Angle- ES. le 9, à Sym du soir, l'aiguille aimantée s'écarta “vers l'ouest jusqu'à 57!, point extrème qu'elle atteignit j à 8134"; DES quoi, elle revint vers l’est et parc ourut _un angle de 73", qu'elle atteignit à Sh45m, Tandis que le magnétisme terrestre accusait ainsi une sorte de lièvre, — ce qui ne s'était pas produit “avec celte force depuis le 31 octobre 1903, jour auquel « les communicalions télégraphiques ont été interrom- “pues sur le monde entier pendant plusieurs heures, — -le Soleil montrait sur son disque lès manifestations … d'une activité extraordinaire; d'immenses taches par- -semaient sa surface, et deux d’entre elles étaient assez - vastes pour être visibles à l'œil nu. Or, il est extrème- ment rare qu'un pareil fait se présente, etil estd’autant plus digne d'attirer notre attention que le maximum “de la fluctuation solaire est passé depuis plus d'un an. Le groupe principal des taches solaires, celui qui est passé au méridien central le 9, mesurail 5! d'arc de longueur, et la grosse tache de droite 16". M. Salet, à l'Observatoire de Paris, et ant Reboul, à Royan, “en même temps que le Comman- ont signalé cette tache immense l'Observatoire de Juvisy. Mouvement accéléré de la tache rouge de … Jupiter. — L'un des phénomènes qui intéressent au plus haut point les astronomes depuis plusieurs années est le mouvement propre si singulier présenté par la fameuse tache rouge de Jupiter. M. W.-F. Denning fit des observations ‘ sur cette tache en 1906 : pour la fin «de la dernière opposition, de mars à mai, ses mesures montrent une valeur correspondant aussi près que pos- “sible à celle du système If, basée sur une période de rotation de 9155m40$,6; mais, en réobservant la planète avant le lever du Soleil, le 9 août, il remarqua immé- diatéement que la tache rouge et son échancrure > étaient fort en avance (de 11.000 milles) sur la position prévue. Ce fait a été confirmé le 41 août au matin par le Rév. M. E. R. Phillips, ainsi que par une autre observation faite par M. Denning le 16 août, montrant que, dans une période inférieure à trois mois, les taches avaient perdu 16°, soit 26229, relativement au méridien 0 du Système IT. En somme, tandis que la rotation entre le 24 mars et le 4 mai était de 9h55"40S,6, elle était “devenue seulement de 9155"33s8 le 4 mai et le 8 août : 1 Arlicle de The Observatory, “Soc. astron., novembre 1906. Bull. de la inalyseé dans le la dernière période est la mème que celle présentée par la tache rouge en 1879. D’après M. Denning, la tache sombre de la zone tro- picale Sud, qui à une étendue de près de 63° en longi- tude, a dù être en conjonction centrale avec la tache rouge en juin 1906, et il pense que cette circonstance peut bien être la cause de l'accroissement marqué de vitesse présenté par celle-ci. Cependant, la récente accélération dans le mouvement de la tache rouge est beaucoup plus grande que celle qui à été jamais observée : l'échancrure dans la bande équatoriale aus- trale, ainsi que la tache rouge, semblent avoir été visibles depuis soixante-quinze ans. $ 3. — Physique Un dispositif pour mesurer lintensité des rayons X. — Les instruments jusqu'ici employés pour déterminer l'inten- sité d’un rayonnement X, basés sur l'emploi de gal- vanomètres ordinaires à bobines rotatoires, étaient || sujets à bien des sources | d'erreur. Or, celles-ci se | trouvent éliminées dans un appareil récemment inventé par M. E.Ruhmer, à Berlin, et qui permet de déterminer et de contrô- ler continuellement l'in- | tensité du flux effectif d'une ampoule à rayons X. Celinstrument(fig, 1) com- | porte un tube en verre V, où l’on fait le vide, avec deux électrodes axiales, dont la plus longue et la plus mince sert pour déter- : miner l'inten- | sité cherchée. Lorsque la borne positive de l’instru- mentest reliée à la cathode de l'ampoule T, én série avec cette dernière et la bobine B, son fil cathodi- que se recou- vre d'une lumi- nescencebleue Fig. 1. — Dispositif pour mesurer l'in- aussitôt qu'on tensilé des rayons X,. B, bobine : fait- fonction- T, ampoule; V,tube à électrodes. ner le tube, sur une longueur proportionnelle à l’intensité du courant. Une échelle attachée à l’ampoule, et qui est graduée par voie empirique en milli-ampères, permet de lire ainsi immédiatement, à tout moment voulu, l'intensité maxima du courant effectif, de la même façon qu'on lit la température sur l'échelle d’un thermomètre. Cette propriété est d’un prix tout spécial pour les travaux photographiques et surtout pour ceux de thérapeutique. En effet, l'expérience a démontré qu'avec un dispositif donné et un mêmè degré de dureté de l’ampoule de Roentgen, une intensité de courant donnée, pendant des intervalles déterminés, correspond toujours à une même quantité de rayonnement X. La première peul donc servir à mesurer cette dernière. L'effet du rayon- nement dépend évidemment de la distance entre l’am- poule et l’objet en question. Pour des degrés différents de dureté, il faut naturel- lement tenir compte aussi de l'autre facteur détermivant la quantité d'énergie employée pour produire le rayon- nement Roentgen, à savoir le potentiel de | FA l’'ampoule. 990 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE On trouve ce potentiel d'après la longueur de l'étin- celle d’un éclateur relié parallèlement à l'ampoule : le produit de celte longueur par l'intensité de courant lue sur l'instrument donne la valeur exacte de l'intensité du rayonnement. L'instrument décrit ci-dessus se distingue surtout par sa construction simple (ne comprenant ni bobines ni parties rotiloires) et la sûreté de son fonctionne- ment. Le procédé utilisé dans la construction offre l'avantage ultérieur d'éliminer toute influence du cou- rant de fermeture sur les indications, la luminescence due à ce courant étant limitée à l'électrode la plus courte, laquelle n'est point utilisée en mesurant l'intensité du rayonnement lioentgen. $ 4. — Chimie industrielle Dispositifs industr'els pour la fixation de l'azote. — Parmi les divers procédés préconisés dans ces dernières années pour la fixation de l'azote atmo- sphérique, il y en a deux qui, semble-t-il, se prêtent à une exploitation industrielle, à savoir les procédés basés respectivement sur la production de l'acide nitrique et d'un composé azoté dit cyanamide de cal- cium ou « chaux azotée ». Dans une conférence récemment faite à Berlin, M. G. Erlwein a décrit les appareils employés pour la fabrication de ce dernier produit. L'auteur exjose les deux méthodes qui se trouvent en présence, à savoir celle de MU. Frank et Caro, méthode dans laquelle on fait agir l'azote, dans des cornues fermées, sur le car- bure de calcium du commerce à la chaleur rouge ou blanche etla méthode indirecteétudiée par MM.Siemens et Halske, dans laquelle, en évitant l'emploi du car- bure, on prépare le cyanamide de caïcium directement à partir de ses composants (la chaux, le charbon et l'azote atmosphérique) à l'incandescence d’un four élec- trique à résistance. Cette dernière méthode, inventée et mise à l'étude alors que le prix élevé du carbure diminuait fortement l'économie du premier procédé, vient d'être abandonnée enparlie au profit del’ancien procédé Frank-Caro, depuis que le prix du carbure, par suite des perfectionnements apportés à son industrie, s'est abaissé considérable- ment. Aussi les usines à « chaux azotée » récemment installées par la Société des Cyanures se servent-elles de l'ancien procédé employant comme intermédiaire le carbure du commerce. La production de la « chaux azotée », suivant ce dernier procédé, se fait dans les appareils représentés dans la figure 1, comprenant deux fours, à savoir, le four fixateur d'oxygène et le four azoteur. Dans le pre- mier, on produit de l'azote pur en conduisan! de l'air comprimé à travers des cornues de fer verticales CC portées à la chaleur rouge et remplies de limaille de cuivre. Le cuivre incandescent retire de l'air atmosphé- rique l'oxygène, en se combinant à ce dernier pour former de l'oxyde de cuivre solide, en même temps que l'azote pur, quillant les cornues, passe à travers les dispositifs de lavage et de séchage pour se rendre vers l'autre four. Les fours fixateurs d'azote contiennent plusieurs bat- teries de cornues, dont l’une sert à préparer l'azote, en même temps que les autres sont soumises à un pro- cédé de réduction, leur oxyde de cuivre étant recon- verli, par du gaz pauvre ou d'éclairage, en cuivre prêt à réagir Dans les grandes installations, surtout aux endroits à force hydraulique peu coûteuse, l'azote est retiré de l'air liquide au moyen d’une distillation frac- tionnée, la liquéfaction de l'air étant obtenue par le procédé de Linde, basé sur une ingénieuse combinai- son de compressions, de refroidissements et de détentes. La distillation fractionnée de l'air liquide s’opère dans des colonnes de rectification entourées par une sub- siance isolatrice de la chaleur et construites suivant le même principe que les colonnes employées dans l'in- dustrie de l'alcool. L'appareil azoteur consiste en un four F (fig. 4) coms prenant des cornues de matière réfractaire analogue à celle des fours à gaz. Ces cornues, étanches a l'air sont portées par un feu extérieur à la chaleur rouge où blanche; elles sont remplies de carbure pulvérisé et réliées par des conduites au four formateur d'azote. Aus: sitôt que la cornue à atteint la température à laquelle l'azole se combine au carbure, l'absorption d'azote c'est-à-dire la formation de chaux azotée, se passe d’une facon très énergique, et, comme cette réaction FA Bone" PS del. Fig. 1. — Four pour la production de la chaux azotée aux dépens du carbure de calcium. — C, C, cornues de fem remplies de limaille de cuivre; F, four fixateur d'azote est exothermique, c’est-à-dire s'accompagne d’une pro duction de chaleur, il se produit des accroissements rapides de la température de la charge de carbure allant quelquefois jusqu'à des expiosions. Lorsque le carbure contenu dans la cornue n’absorbe plus d'azote (ce qu'on reconnaît par un gazomètre y inséré), on fait entrer la masse de chaux azotée, à l'abri de l'air, dan des réservoirs métalliques étanches à l'air, et, aprè qu'on l'y a refroidie, on la pulvérise et on l'introduit, pour être aérée, dans des sacs ou d’autres récipien de transport. La matière noire retirée des cornues, qui n’est autre que de la chaux azotée, comprend de 19 à 21 °/, d'a FÉOREEMPN,S LE, Fig. 2.°— J'our Siemens pour la fabrication de’la chaux azotée. zote, sa composition chimique, assez constante, étant 57 °/, ‘de cyanamide calcique (CaCaz?), 21: c/0 de chaux caustique (CaO), 14 °/, de carbone (C), 2,5 2/, des silice (Si02),4#°/, d'oxyde de fer (FeO), et 1°/, de chaux liés à de l'acide carbonique, du soufre et du phosphores La fabrication de la chaux azotée suivant le procédé direct de Siemens. d'autre part, s'opère dans des fours représentés dans la figure 2. Ces fours, de forme reë tangulaire, ont des murs maçonnés doubles en briques réfractaires, le mur intérieur étant percé de trous pou faciliter l'accès libre de l'azote à la charge du compars timent à réaction. À l'intérieur de ce compartiment rempli de parties égales de chaux et de coke pénè= trent, du milieu du front du four, deux électrodes en charbon, amenant le courant continu ou alternatif nécessaire pour chauffer la charge. 4 Pour faire marcher le four, on amène à la chaleur CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE blanche un conducteur d'électricité, inséré dans la zone de réaction, par le passage du courant électrique. La charge de chaux et de charbon l’entourant, charge qui est un semi-conducteur d'électricité, devient, par là, ‘bonne conductrice et s'échauffe à son tour directement par suite du passage du courant. Cette charge peutmème, grâce à un accroissement suffisant de l'intensité du courant, être portée à une chaleur blanche intense, à - laquelle elle réagit avec l'azote forcé dans le comparti- ment, en donnant naissance à du cyanamide de calcium (chaux azotée). en même temps qu'il se f rme du mono- xyde de carbone, produit de réduction de la chaux vive par le charbon. Ce monoxyde est évacué à travers un tube fixé au couvercle du four, afin d’être employé au dehors de ce dernier pour le chauffage ou la pro- «uction de la force motrice. La conversion qui à lieu dans la charge du four est représentée de la facon la plus simple par l'équation : CaOu + C++" Az) —, CaCAz' + CO Chaux Carbone. Azote. Cyanamide Monoxyde causlique. de calcium. de carbone. La chaux azotée, restant dans le four électrique à - résistance, renferme un Laux total de 13 à 15 °/, d'azote ; Armomaque FE ZA CLLLL LL LL LL LL Vapeur d'eau EL LCLLLCCC CII LILI SES SS acide sulfur: que 4 ZE N N à 1] à \ N À À KKKKKKKKKKKK FB0ÿhEMA ES del. %ig. 3. — Disposition pour la fabrication du sulfale d'am- monium. elle se comporte parfaitement comme la matière pré- parée suivant la méthode de Frank-Caro, avec le car- bure pulvérisé. La propriété que possède la chaux azotée de rendre son azote à l’état d'ammoniac gazeux, lorsqu'elle est traitée avec de la vapeur d’eau, vient d'être utilisée par la Société des Cyanures en vue d’un procédé industriel pour la fabrication du sulfate d’ammonium, dans les appareils représentés par la figure 3. Dans un réservoir analogue à un autoclave, on répand de la chaux azotée en plusieurs couches, sur des rayons superposés. L'azote du cyanamide de calcium se convertit alors en ammoniac, évacué après des intervalles déterminés d'action de la vapeur d’eau, en même temps que cette dernière, pour être absorbé dans des tubes renfermant de l'acide sulfurique, où il se convertit en sulfate d'ammonium, engrais commer- cial et très courant. La première usine à chaux azotée, installée à Piano d'Orta, près de Pescara, en Italie, donne une produc- tion annuelle de #.000 tonnes, mais qui sera portée très prochainement au triple. Sur le modèle de cette pre- mière installation, on compte en établir d'autres dans plusieurs pays européens, au courant de cette année, pour des rendements en général plus grands. Alfred Gradenwitz. $ 5. — Botanique La variabilité des feuilles végétatives du « Prunus Spinosa LL. +. — Si, assez souvent, la seule observation des principales formes de variation des espèces végétales suflit aux morphologistes, dans cer- tains cas, cependant, il est intéressant de pouvoir établir l'amplitude et la valeur exacte de ces variations par des mesures précises, c'est-à-dire par une étude statistique rigoureuse. Ces mesures, quelquefois très difficiles à effectuer, surtout lorsqu'elles portent sur des plantes très différenciées, deviennent plus faciles dès qu'elles sont réduites à un seul membre, bien homogène et dont les variations de détail sont insuf- fisantes pour faire disparaître la régularité d'ensemble qui, dans ce cas, est proprement le caractère spéci- fique. Toutefois, il y à pour chaque plante des limites que la variation semble ne pouvoir dépasser, soil qu'elle cesse d’être perceptible à nos investigations, — mais il resterait à savoir si l’observation est bien con- forme à la réalité !, — soit que le caractère spécifique ait é6 lui-même si profondément moditié qu'il n'a pu être conservé. Quoi qu'il en soit, chaque espèce a une tendance à produire une certaire forme foliaire, bien déterminée, mais dont la réalisation effective est très contrecarrée par les influences extérieures. Considérant que la longueuret la largeur des feuilles du Prunus spinosa L., vulgairement connu sous le nom de prunellier des haïes, pourraient être définies par un rapport numérique précis etsimple, M. A. Heyer, de Saint Gall (Suisse)?, a essayé d'établir la valeur dominante et les valeurs limites de ce rapport, c'est-à- dire de donner une interprétation mathématique aux variations. Dans ce but, M. Ileyer a mesuré 7.500 feuilles, dont 5.000 provenaient d'arbustes variés de taille et d'âge, 1.500 de rejets de l'annve, et enfin 1.000 autres d’une haie qui est tondue tous les ans. Les feuilles ont été mesurées suivant leurs plus grands axes, soil de la base au sommet du limbe pour la longueur, et suivant la plus grande largeur, y compris les dents. Les chiffres ainsi obtenus, portés sur un schéma combiné”, ont fourni les résultats suivants : 1° le rapport entre la longueur et la largeur oscille entre 1:3 et4:5; 2 La relation 2: 3 parait être assez fréquente; 3° A lo: gueur constante, la largeur varie autour du rapport dominant 1:2; tandis qu à largeur constante, la longueur varie dans un rapport inverse, mais avec moins de régularité ; 4° Les maxima de fréquence de la courbe de varia- tion sont: pour la longueur, à 2X millimètres et à 33 millimètres; pour la largeur, à 13 millimètres ; 5° La plus grande longueur absolue est de 70 milli- mètres (sur 33) et la plus grande largeur de #4 milli- mètres (sur 62). à Quelque intéressants que soient ces premiers résultats, surtout au point de vue de la méthode, ils le seraient bien plus encore si M. Heyer avait pu relier à leurs causes les principales variations. Sans doute, il y a là un gros problème, très à part, mais que ne devraient pas négliger ceux qui ont la patience de se livrer à de semblables études de statistique pure. Il est vrai que, dans le cas particulier, l'hétérogénéité des matériaux utilisés était une grosse difficulté. La conclusion la plus importante de ces recherches, c’est la démonstration de l'existence de rapports entre la longueur et la largeur de la feuille de Prunus. La valeur dominante ainsi que l+s valeurs limites de ce rapport sont également reconnues; mais il reste cependant à savoir si les influences locales ne peuvent les modifier, et c'est ce que M. Heyer se propose d'étudier. Ernest Fleury. * Pourquoi n'y aurait-il pas ici quelque chose d'analogue à ce qui à lieu pour la perception des sons par exemple ? 2 M. A. Heyer a présenté une étude préliminaire sur ce sujet à la 89e session de la Société helvétique à saint-Gall, en août 1906. Voir in C. #., p. 70-72. 3 G ories Duxcxer : Die Methode der Variationsstalistik, Leipzig, 1897, p. 42. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 6. — Enseignement 224 L'enseignement scientifique dans les 1y- cées. — M. Liard, vice-recteur de l'Académie de Paris, à adressé récemment aux inspecteurs d’Aca- démie, proviseurs et principaux, une intéressante circulaire sur l'état actuel de l’enseignement scien- üfique dans les lycées. Cette circulaire résume les constatations et les observations faites par les rap- porteurs au Conseil académique, et qu'il à paru utile au Recteur de porter à la connaissance des professeurs. Mais, en outre des professeurs, elle intéresse aussi ceux que préoccupe le progrès de notre enseignement public. C’est pourquoi nous en publions quelques extraits. Le Recteur fait d'abord cette constatation que, dans les classes littéraires, l'enseignement des Mathéma- tiques est « faible, très faible même ». 11 recherche la cause de cette faiblesse. Celle-ci est-elle imputable au petit nombre d'heures dont les professeurs de Ma- thématiques disposent? Un certain dédain des élèves n'y est-il pas, comme autrefois, pour quelque chose? Dans ce cas, émarque M. Liard, ce serait aux profes- seurs à réagir; et il ajoute : « Leur est-il impossible de faire entendre, par un choix judicieux d'exemples et d'applications, de quelle utilité est, dans la vie de chaque jour, une certaine connaissance des éléments des Mathématiques, même pour ceux dont l’activité n'aura pas besoin de la science comme instrument? « Leur est-il impossible également, surtout en philo- sophie, de faire voir à leurs élèves, par un enseignement clair, bien dépouillé, réduit à l'essentiel, de quel prix sont ces éléments pour cette culture plus complète des esprits, à laquelle visent les programmes de 1902? « Dans ces classes, qui n’aboutissent pas à des con- cours, je ne saurais trop recommander.aux professeurs de s'attacher plus à l'esprit qu'à la lettre des pro- grammes, de se dire qu'ils auront rempli leur tâche si, de leur enseignement, leurs élèves emportent un certain nombre de notions positives, bien assises, net- tement comprises et adhérentes à leurs esprits. » Dans les classes scientifiques, au contraire, tout autres sont les résultats. Le Recteur constate avec satis- faction que «les changements de points de vue et de méthodes inaugurés avec les nouveaux programmes commencent à faire sentir leurs effets, qui sont d'heu- reux effets ». Pour entrer dans le détail, dans la classe de Spéciales, d'une manière générale, non seulement le rôle de l'Analyse s'est accru envue des applications pratiques, mais l'esprit de la Géométrie analytique s'est trans- formé; plus rare s'est faite l'intervention des formules générales, plus fréquent l'appel à l'initiative des élèves. Le Recteur signale quelques initiatives. Ainsi, dans un lycée de Paris, un professeur à renoncé à la division traditionnelle des cours en Algèbre et Géométrie ana- lytique, et à incorporé les applications géométriques au cours d'Analyse. Dans un autre lycée, l'enseigne- ment de la Géométrie dans l’espace est illustré par des modèles en plâtre et en fil. C'était d'ailleurs le vœu de la Commission interministérielle qui a préparé les programmes de Spéciales, qu'il en fût partout ainsi. M. Liard estime qe cette pratique, dont l'expérience a prouvé la valeur, ne saurait être trop recommandée. Une réforme, accomplie l'an dernier, a été la trans- formation de l'ancienne classe d'£lémentaires supé- rieures en Spéciales préparatoires. Les résultats n’ont pas répondu ici à l'attente des réformateurs. Trop d'élèves ont cru pouvoir brûler cette étape, dans l'igno- rance « qu'un an passé en spéciales préparatoires à s'initier en toute liberté aux méthodes, aux questions générales, était pour tous la meilleure préparation à la classe de spéciales proprement dite, à l'esprit et aux procédés de la science, et pour beaucoup le seul moyen d'éviter la surcharge, le désarroi et la chute ». Les classes de Mathématiques, anciennes Ælémen- .d'Anatomie comparée à la Faculté des Sciences de Paris, taires, Sont généralement bonnes; on y fait moins dé Géométrie que par le passé, et plus d'Algèbre. | Pour les divisions de première et de seconde, M. Lie après avoir constaté que les effectifs y étaient nombreux ajoute : L ; « Presque partout on se plaint qu'ils le soient trop. Nombre d'élèves se trompent sur leurs goûts, sur leurs aptitudes au sortir du premier cycle, et s'engagent à légère dans la voie scientifique, sans se douter entrent dans une impasse, et qu'au bout les attenden des échecs irréparables. C’est un courant contre leque il est, je le sais, difficile de lutter, dans une société où grandit chaque jour l'importance de l'industrie. Tou fois, c'est notre rôle, c'est notre devoir, à l'instar décisif des options, d'éclairer, autant que faire peut, les familles sur les aptitudes de leurs enfants sur les chances de succès qui les attendent dans te voie ou dans {elle autre. » Et M. Liard ajoute : + « Dans l’ensemble, les divisions D semblent moi bonnes que les divisions C. L'habitude de réfléchir ee de raisonner y est moins solide; on y donne trop à mémoire. Je le signale aux professeurs de!ces divi sions, persuadé qu'ils s'appliqueront à provoquer che leurs élèves un effort personnel et soutenu de flexion. » Ni la lettre, ni l'esprit des programmes et des instructions de 1905 ne sont encore assez générale- ment observés dans les classes du premier cycle. A ce sujet, le Recteur s'exprime en ces termes: « De même que le premier contact de l'enfant avec les choses de l’Arithmétique se fait par l'expérience, par le mécanisme des opérations et la résolution des pro- blèmes faciles, non par le dogmatisme, la logique pure et la démonstration de vérités abstraites, on a pensé que ce même enfant, encore qu'il fût déjà un peu plus mûr, ne pouvait s'intéresser aux choses de la Géométrie que s'il les voyait sortir et se dégager peu à peu de. l'étude des formes usuelles et de la considération des mouvements familiers. « En provoquant ce changement de méthode, nos pro fesseurs élaient d'accord avec d'éminents géomètres: Dès 1765, dans la préface de ses £léments de Géométrie Clairaut demande que l'on n'impose pas aux débutants la fatigue et l'ennui d'une rigueur inutile. Et, en 1846, Jacobi écrivait : | « La rigueur des démonstrations géométriques est\ « une invention des Grecs qui fait le plus grand hon= « neur à l'intelligence humaine; mais elle n’est une « nourriture convenable et saine que pour les jeunes « gens dont l'esprit a déjà une certaine maturité: alo « seulement, la Géométrie logique est, comme la gram= « maire, une véritable éducation de l'intelligence. » Personnel universitaire. — M. Caullery, doc teur ès sciences, maitre de Conférences de Zoologie à la Faculté des Siences de Paris, est nommé professe adjoint à ladite Faculté. M. Pruvot, docteur ès sciences, chargé du cours est nomimé professeur adjoint à ladite Faculté. M. liabaud, docteur ès sciences, est nommé maitre de Conférences de Tératologie à la Faculté des Sciences de Paris (création du budget de 1907). \ M. Bounhiol, docteur ès sciences, chef des travaux dé Zoologie à l'Ecole des Siences d'Alger, est chargé d'un: cours de Zoologie agricole et de Zootechnie à ladite Ecole. É { M. Brives, docteur ès sciences, est chargé d'un cours complémentaire de Minéralogie appliquée à l'Algérie, à l'Ecole des Sciences d'Alger. : M. Combette, agrégé des Sciences mathématiques, ancien professeur de Mathématiques au Lycée Saint- Louis, Inspecteur général de l’économat des lycées et collèges, estnommé Inspecteur général de l'instruction publique pour l'Enseignement secondaire (ordre des Sciences), en remplacement de M. Piéron, décédé. G. MILHAUD — DESCARTES ET LA LOI DES SINUS DESCARTES ET LA LOI DES SINUS En 1637 paraissait, à la suite du Discours de la Méthode, et comme l'un des « Essais de cette Mé- thode », la Dioptrique de Descartes, qui, dans le Discours Second, étudiait les réfractions et donnait une démonstration théorique de la loi des sinus. Cette démonstration était bientôt l'objet des plus vives discussions, notamment entre Descartes et Fermat. Mais, du vivant de Descartes, personne ne lui adressa d'autres reproches que d’être incom- préhensible. C'est beaucoup plus tard, et, pour la première fois, vers 1662, que, sous la plume du savant Isaac Vossius, fut exprimée l'idée d'un plagiat. Vossius déclarait avoir vu un travail ma- nuscrit de Snellius sur la lumière, où se trouvait indiquée, quoique sous une forme légèrement diffé- rente, la loi des sinus. Snellius était mort en 1626, et, d'après Vossius, Descartes avait pu facilement prendre connaissance de celte loi pendant son long séjour en Hollande, car Hortensius, élève de Snel- lius, et plus tard professeur lui-même à Amsterdam, avait exposée publiquement dans ses leçons. Christian Huygens alla plus loin. Dans sa Diop- _trique, publiée seulement après sa mort, en 1705, on lit, à propos du manuscrit de Snellius : « Ce manuserit est resté inédit. Je l'ai vu, et l'on m'a dit que Descartes, lui aussi, l’a vu ; c’est de là peut- être qu'il aura liré sa mesure par les sinus”. » Tous les accusateurs de Descartes, de Leibnitz à Poggendorf, ont reproduit avec quelques variantes, et avec plus ou moins d'assurance dans leurs aflir- malions, ce qui fait le fond de ces deux témoignages. Kramer”, en 1883, à montré à quel point, cepen- dant, l'hypothèse d'un plagiat est invraisemblable ; et, il y a une dizaine d'années, la découverte de quelques lettres échangées par Golius et Constantin Huygens, due au Professeur Korteweg”, est venue apporter des arguments nouveaux contre une accu- sation qui semble ne plus subsister que par l'effet d’une longue habitude. Mais il est trop vrai qu'elle subsiste, et il peut être fort utile d'y revenir. Tout d'abord, quel est ce fameux séjour en Hol- lande pendant lequel Descartes aurait eu aisément connaissance de la loi de Snellius? Nul doute qu'il ne s'agisse du long séjour de vingt ans qui dura de 4 Et nos vidimus aliquando et Cartesium quoque vidisse accepimus; ut hinc fortasse mensuram illam, quæ sinibus constitit, elicuerit (Opera reliqua, &. MW). 2 Zeitschriit 1ür Math. und Phys., &. XXVII. 3 Cf. R. de Mit. et de Mor., 1896. 1629 à 1649. Descartes s'élait installé à Amsterdam, d'où il faisait de fréquents voyages à La Haye et aussi à Leyde, où Snellius, mort trois ans aupa- ravant, avait enseigné longtemps, et où se trou- vaient assurément nombre de ses amis et de ses disciples. C'est de là qu'en 1637 il publiait, dans sa Dioptrique, le résultat de ses recherches sur la ré- fraction. Pendant les huit ans déjà écoulés, n'était- il pas vraisemblable qu'il eût entendu parler de la découverte du savant hollandais? — C'était si vrai- semblable que nous pouvons affirmer presque à coup sûr, nous le verrons, que cela arriva réelle- ment; mais cela n’a d'importance, au point de vue de l'accusation, que si, en 1629, Descartes n'était pas encore en possession de sa loi des sinus, comme l'ont certainement pensé Vossius, Huygens et Leib- nilz, mais comme il est impossible de le croire encore pour qui a jeté les yeux sur la correspon- dance de notre philosophe. Pour qu'on s'y reconnaisse, un mot est pourtant nécessaire. La loi de la réfraction n'a surlout inté- ressé Descartes que pour les applications pratiques qu'il a voulu en tirer. Le huitième discours de la Dioptrique traite tout au long «des figures que doivent avoir les corps transparens pour détourner les rayons par réfraction en toutes les facons qui servent à la veuë ». Il y est démontré que les rayons tombant sur le contour elliptique d'un morceau de verre auquel on a donné cette forme vont, après réfraction, concourir en l’un des foyers, pourvu seulement que le rapport de l'axe à la distance des foyers soil précisément égal à l'indice de réfraction du verre; etil en est de même, sauf que le rapport est renversé, pour un morceau de verre à contour hyperbolique. C'est de là que Descartes tire la construction des appareils d'optique auxquels il attribue la plus grande importance. Nous revien- drons plus loin sur les proposilions fondamentales de ce « discours »; pour le moment, contentons- nous de remarquer que de pareils travaux supposent manifestement connue la loi des sinus, et revenons à la correspondance. Dans ses lettres d'octobre et novembre 1629 adressées à Ferrier!, Descartes, comme l’a observé Millet il y a déjà longtemps, se préoccupe sans aucun doute de faire tailler un de ces verres hyper- boliques qui seront décrits dans la Dioptrique; ce qui nous montre Descartes en possession de sa loi très peu de temps après son installation en Hol- lande. Mais il y a mieux, et une autre lettre adressée 1 Anam et Tanxery : T. I, p. 32 el 53. 224 | G. MILHAUD — DESCARTES ET LA LOI DES SINUS à Golius le 2 février 1632" est plus édifiante encore. bescartes avait fait connaître à son correspondant sa découverte de la loi des réfractions, et Golius, en réponse, a exprimé le désir de soumettre cette loi à l'épreuve de l'expérience. Descartes conseille d'adopter un dispositif qu'il décrit, en ajoutant que, quaut à lui, il a jugé inutile d'en user : « Toute l'expérience que j'aie jamais faite en celte matière, dit-il, est que je fis tailler un verre, il y a environ cinq ans, dont M. Mydorge traça lui même le mo- delle; et, lorsqu'il fut fait, tous les rayons du soleil qui passaient au travers s'’assemblaient tous en un point, justement à la distance que j'avais prédite. Ce qui m'assura ou que l'ouvrier avait heureuse- ment failly, ou que ma ratiocination n'était pas fausse” ».. Ce verre qu'a taillé Mydorge, et dont l'usage à constitué aux yeux de Descartes une vérifi- cation suffisante de sa loi, est également mentionné dans une lettre à Huygens, de décembre 1635° : «Il y a déjà huit ou neuf ans, dit Descartes, que je fis aussi tailler un verre par le moyen du tour, et il réussit parfaitement bien. » Et, plus bas, Mydorge est nommé comme ayant lui-même exécuté l'ouvrage. Il est très intéressant de constater que ces indica- tions, données à trois ans de distance, concordent pour rejeter vers 1627, ou peut-être 1626, le travail contié à Mydorge, et par conséquent la connaissance de la loi des sinus. Et par là se trouve renversée de facon calégorique l'hypothèse d'après laquelle le long séjour en Hollande et la fréquentation des savants de ce pays, après 1629, auraient permis à Descartes de surprendre et de s'approprier la dé- couverte de Snellius. — Ajoutons qu'en ce qui con- cerne plus particulièrement Hortensius, il n’a enseigné qu'à partir de 1634; et, s'il a exposé les travaux de Snellius, comme le dit Vossius, cela ne prouve plus rien contre Descartes. Mais en 1629 Descartes n'allait pas en Hollande pour la première fois. Nous savons qu'il avait passé deux ans à Bréda, de 1617 à 14619, avec l'armée du prince Maurice; puis qu'à son retour d'Allemagne, en décembre 1621, il s'était installé à La Haye jusqu'en février 1622, avant de rentrer en France. — Le plagiat pourrait-il remonter à l’un de ces deux séjours? I est impossible de fixer la date de la découverte de Snellius; mais tout fait suppos:r qu'elle ne s’est produite que peu de temps avant sa mort. Vossius, qui à été en relation avec la famille de Snellius, puisque c'est d'elle directement qu'il dit avoir tenu le fameux manuscrit, nous apprend que le profes- seur de Leyde allait publier son travail quand la mort l'a frappé, en 1626. Et d'ailleurs, nous savons, ! Apam et TANNERY : T. I], p. 236. par tous ses autres ouvrages, qu'il avait l'habitude | de publier ses recherches à mesure qu'elles pre- naient corps*. Mais voici qui est plus décisif. Parmi les savants qui ont approché Snellius, qui ont véeu longtemps à Leyde et même enseigné près de lui, il en est un qui semble particulièrement désigné, par l'intérêt qu'il prenait aux travaux de Mathématiques et de Physique, et par ses relations avec celui qu'il appe- lait son «maitre vénéré», pour connaître une décou- verte aussi importante que celle de la loi de la ré- fraction, si elle se füt produite avant 1626. Golius, dont nous voulons parler, quitta Leyde et s'éloigna de Snellius en décembre 1625, pour un voyage en Orient, d'où il ne devait revenir qu’en 1629. Or, Golius, au commencement de 1632, ignore encore absolument les travaux de Snellius sur la réfraction. Nous le savions déjà par les lettres échangées à cette date entre lui et Descartes, notamment par celle de Descartes que nous avons mentionnée plus haut, du 2 février 1632, Mais nous avons mieux aujour- d'hui. Grâce au Professeur Korteweg, d'Amsterdam, nous savons désormais que cette année 1632 est celle où Golius, qui venait de connaître déjà par Descartes sa loi des sinus, découvrit le fameux ma- nuscrit de Snellius. M. Korteweg a retrouvé quel- à Constantin Huygens. Par elle, nous apprenons quelle a été l'hésitation de Golius à accepter la loi de Descartes (ingeniosi Descartes inventum); il a voulu la vérifier par l'expérience (et cela confirme ce que nous avions vu d'autre part); mais ses hési- tations n’ont pris fin que par la découverte de quel- ques éerils de Snellius, où il a trouvé la même loi, énoncée sous une autre forme, Et Golius, plein d’en- thousiasme pour la rencontre merveilleuse des deux savants, dont l'un a été conduit par l'expé- rience, l’autre par le raisonnement, cite et compare les énoncés qu ils ont donnés l’un et l’autre de la loi des réfractions. Tandis que Descartes fait porter la relation sur les sinus des angles d'incidence et de réfraction, Snellius, limitant par une même nor- male à la surface de séparation des deux milieux le prolongement du rayon incident el le rayon réfracté. énonce que le rapport de ces deux longueurs est constant. C’est, si l’on veut, le rapport des cosé- canles, au lieu du rapport des sinus, ce qui revient au même. Et Golius n'a pas été le seul à attendre la décou- verte du manuscrit, en 1632, pour en soupçonner seulement l'existence. Avec beaucoup de raison, M. Korteweg nous demande d'ajouter ici le nom du correspondant de Golius, de Constantin Huygens. * Cf. la notice sur la vie et les travaux de Snellius par Î P. van GEEr, Archives Néerlandaises, &. XNIII. ques leltres forl importantes, dont l’une de Golius, | a , | | — s G. MILHAUD — DESCARTES ET LA LOI DES SINUS 2925 Ses lettres à Golius le montrent justement préoc- cupé des problèmes de Dioptrique. Il conseille à Golius (notamment en décembre 1629) de s’y appli- quer avant tout. En 1632, il voit Descartes chez Golius, et l'entretien roule précisément sur la loi de laréfraction'. Comment supposer que. s'ileûtconnu Je travail deSnellius, il n’en eût point parlé à Golius? Constantin Huygens n’a certainement appris l’exis- 4ence de ce travail que par la lettre que lui a adressée . Golius en novembre 1632. N'y a-t-il pas là la preuve suffisante que les recherches de Snellius sur la réfraction ou bien datent seulement des derniers Llemps de sa vie, ou bien sont restées de son vivant rigoureusement secrètes? Et si l'on songe alors que l'accusation for- mulée contre Descartes exige, pour être encore valable, qu'avant février 1622 : 1° Snellius ait été en possession de sa loi, 2° Descartes en ait eu connais- sance, — on sentira à quel point elle est insoute- nable. Il est un dernier point sur lequel M. Korteweg appelle l'attention. Les relations établies entre Golius, Constantin Huygens el Descartes ne permettent pas de douter, quoique nous ne puissions citer sur ce point aucun texte, que Descartes n'ait lui-même été mis très vite au courant des recherches et des conclusions de Snellius. La correspondance qu'échange notre philosophe avec Golius en 1632 ne pouvait pas ne pas se continuer par la mention si importante de la découverte des papiers de Snellius, et par l'adhésion définitive à la loi des sinus qu'elle entrainait chez -Golius, sans qu'il sentit désormais le besoin d'expé- riences nouvelles. Donc en 1632, cinq ans avant la publication de la Dioptrique, Descartes à su certai- nement par les savants hollandais et l'existence et Je contenu du manuscrit. Peut-être même l'a-til vu; et peut-être aussi, dans l'esprit de Constantin Huygens, la confirmation qu'apportait la découverte de Golius à la loi carlésienne de la réfraction a-t-elle donné lieu à la longue à quelque malentendu dans les conversations qu'il eut à ce sujet avec son fils. En tous cas, celui-ci était un enfant en 1632. Les quelques faits précis qu'il tenail de son père : 4° antériorité probable de Snellius sur Descartes dans la solution du problème des réfractions; 2% connaissance prise par Descartes en 1632 de la solution de Snellius; 3° publication lardive de la Dioptrique en 1637, pouvaient bien, soixante ou soixante-dix ans plus tard, amener sous la plume .de Christian Huygens une affirmation qui, prise à Ja lettre, n'a probablement rien d'inexact, mais qui m'a plus la siguification qu'on lui donnait”. 1 Cf. KorTEWEG : Op. cit. 2 Tdem: Il Tout est-il clair maintenant? Et pouvons-nous envisager avec une sereine tranquillité un soupçon, d'où qu'il vienne? Pas encore. Peut-être même avons-nous laissé de côté jusqu'ici le grief le plus fort, celui qui a été plus ou moins visé par les accu- saleurs de Descartes, mais qui,en tous cas, a joué le plus grand rôle dans les esprits, el aujourd'hui encore laisse subsister quelque doute chez ceux qui sont le plus disposés à croire. C'est la difficulté de penser que Descartes ait été vraiment amené à sa loi par l'étrange démonstralion qu'il en donne, et, sinon, l'ignorance où nous sommes de la voie qui l'y a conduit. Voyons de plus près, et rappelons d'abord en peu de mots la démonstration de Descartes : Assimilons le mouvement de la lumière à celui d’une balle qui, ayant décrit le chemin AB (fig. 1), rencontrerait Ge 0-2 Fig. 1. en B une toile CBE, el la traverserait, mais de telle façon que, par exemple, sa vitesse serait réduite de moitié. Le nouveau chemin BI serait parcouru en deux fois plus de temps que l'a été AB. Mais il est évident, pour Descartes, que la balle ne perdrait rien de sa déterminalion horizontale, laquelle, ne rencontrant pas la toile, ne saurait être empêéchée par elle ; et dès lors, en deux fois plus de temps, c’est le double de AH, c'est-à-dire HF qui serait parcouru vers la droite. Le point I s'obtiendrait done par l'intersection de la circonférence et de la verticale FI telle que HF fût le double de AH, ou, en d’autres termes, le chemin BI s'obtiendrait par la condition que le rapport des sinus des angles d'incidence et de réfraction fût l'inverse de celui des vitesses dans les deux milieux. Les idées maniées dans cette démonstration témoignent de toute la confusion qui régnait encore dans les notions fondamentales de la science du mouvement. En particulier, nous voyons Descartes distinguer radicalement le mouvement, ou la quantité de mouvement et, par suile, la vitesse d'où elle dépend, — de la détermination, ou ten- er 226 G. MILHAUD — DESCARTES ET LA LOI DES SINUS dance à se mouvoir dans telle ou telle direction. Dans le fait de la réflexion, par exemple, d’une balle sur un corps dur, Descartes voyait la déter- mination changer, mais non le mouvement ou la vilesse. — Mais ce n’est pas cette distinction qui suffirait à nous troubler. Fermat la fera lui aussi, plus rigoureusement que Descartes lui-même, ce qui ne l’'empêchera pas de trouver cette démonstration absolument incompréhensible, — Faut-ilparlerde ce qu'il y a de contradictoire à comparer le mouvement de la lumière, dont le déplacement est instantané pour Descartes, à celui d'une balle dont la vitesse est finie et se modifie dans certaines circonstances? Fermat ne manque pas de le faire remarquer, et Descartes répond que l'instantanéité du déplace- ment ne s'oppose pas à une action plus ou moins forte. Au fond, vitesse, mouvement, force, action, tout cela se confond ici pour Descartes, et c’est grâce à celte confusion que, passant de la vitesse à l’ac- tion et à la résistance, il croit pouvoir répondre à Fermat. Mais peu importe! tout cela n’est que pecca- dille, et Fermat lui-même n'insistera pas. Il est difficile, d’ailleurs, de méconnaitre l'intérêt qu'il y a dans cette tentative de Descartes de constituer une théorie cinétique des phénomènes lumineux, et l'on peut bien dire avec Poggendorf, — qui pour- tant est à son égard un juge si sévère, — qu'il ouvrait ainsi la voie à Huygens et à Newton. Enfin, de quelque manière que se meuve la lumière, le principe d'après lequel son mouvement peut se décomposer suivant une parallèle à la surface de séparalion el suivant une normale, n’a rien que de fort naturel. Descartes trouvait cette décomposition toute faite chez Alhazen et Witelo {ce dernier est celui qu'il appelle Vitellio, comme Kepler). Nous lisons en effet dans Kepler, à propos de ces savants : « Addunt subtile nescio quid : motum lucis oblique incidentis componi ex motu perpendiculari et motn parallelo ad densi superficiem eumque motum sie Composilum non aboleri ah oceursu pellucidi den- sioris, sed tantum impediri. » [Ed. Frisch, t. IL, p- 181]. Fermat, que je continue à citer, parce qu'il offre l'exemple d’un esprit sincère, large, intelligent, absolument impartial, s’efforcant en vain de com- prendre Descartes, Fermat acceptera fort bien le principe de la décomposition du mouvement de la lumière, mais il demandera qu'on l'applique de toute autre manière que Descartes. Par exemple, admettant que le mouvement soit accéléré où relardé dans le sens de la normale à la surface, il cherchera la résultante de la force qui pousse la lumière dans la direction du rayon incident et de celle qui s'ajoute dans la direction de la normale, et il conclura que la direction du rayon réfracté se trouve alors définie par un rapport de sinus, mais non point de ceux qui interviennent dans la loi de Descartes. Fermat s'écarte d'ailleurs des hypothèses de Descartes en faisant porter l'accé- lération ou le ralentissement, déterminé par les milieux, sur la détermination normale du mouve- ment el non sur la direction, inconnue d'abord, du rayon réfracté, — et, d'autre part, en ne tenant pas comple de ce que la détermination parallèle à la surface de séparation reste constante. Qu'il discute avec Descartes, ou plus tard avec Clerselier, il varie ses objections ; jamais il ne se résout à adopter les postulats de Descartes. Ce sont ces pos-. tulats, et surtout le postulat relatif à la détermina- tion parallèle, qu’il se refuse absolument à accepter. Or, c'est là vraiment qu'est le nœud de la démons- tration cartésienne ! Que ce soit la vitesse totale qui soit modifiée dans des conditions déterminées, malgré ce que l'hypothèse présente d'arbitraire, on peut dire qu'elle ne surprend pas trop chez Descartes; cela peut se rattacher à l'idée que la détermination est distincte de la vitesse. Dans la réflexion, la vitesse se conserve; dans la réfrac- lion, la vitesse est modifiée dans un rapport qui dépend des milieux. Soit! Mais que l'on comprend Fermat ne pouvant accepter alors que la déter- minalion parallèle à la surface reste la même après comme avant que la lumière a passé d'un milieu dans l'autre ! Certes, Descartes est sincère et convaincu de l'évidence des principes qu'il énonce, mais d'où lire-l-il cette étrange hypothèse? À la rigueur, quand il s'agit de la réflexion, on comprend qu'il se laisse guider par le fait que « la rencontre de la terre ne peut empêcher que l’une des deux déter-. minations et non point l’autre »; mais Fermat, très justement, lui demandera comment la même raison subsiste, quand la terre est remplacée par une toile que traverse la lumière. En somme, il ne faut pas que le mot de détermi- nation cache ce qu'il y a d'étrange dans l'hypo- thèse de Descartes. Il nous demande d'admettre que le mouvement de la lumière étant devenu deux fois plus lent (de B à 1), le mouvement vers la droite garde sa vitesse première, de telle sorte que le sinus de l’angle de réfraction soit double du sinus de l'angle d'incidence. Autant vaut dire, et c'est la meilleure manière d'expliquer l'assurance tranquille de Descartes énonçant son postulat, | qu'il. nous demande d'admettre que le sinus devient double quand le passage de la lumière d'un milieu dans l'autre a pour effet de rendre sa vitesse deux fois moindre ; et, de même, que le sinus devient moitié, si la vitesse se double: bref, que le rapport des sinus garde une valeur fixe, qui ne dépend que de la nature des deux mi- lieux. La seule excuse de l'hypothèse de Descartes G. MILHAUD — DESCARTES ET LA LOI DES SINUS 2927 est qu'elle fournit un rapport constant des sinus, et inconsciemment, sans doute, il reporte, sur le postu- lat d'où il la déduit, la conviction où il est déjà de la réalité de la loi. Fermat ne manquera pas de dire, dans sa controverse avec Clerselier, qu'il ne pourrait admettre les postulats de Descartes que si la loi était exacte. En fait, il ne croira lui-même à la loi que quand il l'aura retrouvée, mais en se fondant sur un tout autre principe (à savoir que le . chemin parcouru par la lumière de A à I'doit être un minimum). Mais alors d'où venait à Descartes celle connais- sance de la loi des sinus? — Peut-on songer à l'expérience ? On sait bien que Descartes a été à ses heures excellent observateur, et, en ce qui concerne les réfractions, sa lettre à Golius ne con- tient-elle pas d'excellents conseils? Mais, dans cette lettre même, nous l’avons vu, Descartes déclare n'avoir fait aucune des observalions qu'il conseille; son unique expérience sur la réfraction a consisté à faire tailler un verre à travers lequel les rayons du soleil ont convergé dans les conditions prévues. Et nous n'avons aucune raison de penser que Des- cartes ne dit pas sur ce point la vérité exacte. Du moins, cette expérience unique dont il parle peut nous faire deviner le processus qu'a suivi sa pensée pour arriver à soupçonner la loi des sinus. Les problèmes relatifs à la taille des verres, dont il nous fail connaître les propriétés au chapitre VII de la Pioptrique, font tous suite à un premier pro- blème, supposé résolu, sur lequel il s'explique dans ce même chapitre, et qui n'est autre chose qu'un problème de géométrie relatif à la théorie des coniques. L'énoncé est le suivant: Etant donnée une ellipse ou une hyperbole, sur laquelle tombe un rayon parallele à l'axe focal, à quelle condition géométrique le rayon réfracté pas- sera-t-il par l’un des foyers ? Supposons, pour pré- ciser, qu'il s'agisse de l’ellipse, rencontrée en B par un rayon parallèle au grand axe (fig. 2). Joignons B au foyer |, prenons sur la parallèle à l’axe une lon- gueur BA égale à BI; puis menons la normale en B, sur laquelle nous abaisserons les perpendiculaires AL, IG. Descartes montre très simplement, par con- sidération de triangles semblables, que les lon- gueurs AL et [G doivent être entre elles comme l'axe DK est à la distance des foyers HI. Le rapport des longueurs AL et IG représentant d'ailleurs le rapport des sinus des angles ABL, IBG, la condi- lion pour que le rayon AB passe, après réfraction, par le foyer [ est, en somme, que les angles d’inci- dence et de réfraction aient leurs sinas dans le rapport de DK à HI. Il y a là‘un problème de ma- ! Pour Fermal, le rapport des sinus sera égal au rapport des vitesses, el non à l'inverse comme pour Descartes. thématiques qui dut être assez facile pour Descartes, et qui peut bien remonter à ses premièresrecherches sur les coniques". Tout au plus se demandera-t-on comment il avait eu l'idée de se le poser. Mais la construclion d'instruments d'optique destinés à aider la vision était trop à l’ordre du jour, et, si l'on songeait à un contour elliptique ou hyperbo- lique, les foyers élaient trop désignés, ne fût-ce que par leurs noms, pour marquer les points où les rayons solaires avaient des chances de se con- centrer, si c'élail possible, pour que nous ne soyons pas autrement surpris de voir Descartes chercher de ce côté. Mais la solution de ce problème tout géométrique ne donnait certes pas la loi de la réfraction. Elle apprenait seulement que des rayons parallèles à l'axe passeront après réfraction par le foyer L, si, pour certaines positions du point B sur la courbe, one A r) Fig. 2. la loi inconnue suivant laquelle s'effectuent physi- quement les réfractions permet que les sinus des angles ABL, IBG, aient entre eux le rapport voulu. Existera-t-il de pareilles positions du point B? Ce n’est pas impossible à priori. Qui sait si — suppo- sée connue la loi de la réfraction — le problème qui aurait pour objet de trouver de tels points B ne pourrait pas devenir indéterminé? et qui sait si, pour une grandeur convenable donnée aux éléments de la conique, tous les rayons parallèles ne vien- draient pas passer par 1? Ce serait là le cas le plus heureux. Il se produirait si la loi de la réfraction, qui doit poser, elle aussi, une relation entre les angles, se confondait précisément avec la condi- tion que le rapport des sinus restät le même, quel que fût le point B, — pourvu seulement que le rap- port du grand axe à la distance des foyers repré- sentàt justement la valeur constante de ce rapport. Cette dernière valeur, si cela se réalisait, s'obtien- drait aisément par une seule expérience, faite sur un morceau de verre, et il resterait à le tailler selon un contour elliptique dont l'excentricité serait connue d'avance, pour que les rayons paral- 1 Cf. KRAMER : Op. cit. G. MILHAUD — DESCARTES ET LA LOI DES SINUS lèles à l'axe vinssent concourir au foyer après réfraction. Or, c'est là précisément l'expérience unique de Descartes. Mydorge à taillé un verre hyperbolique, -— l'hyperbole devant avoir une excentricité connue d’après le rapport des sinus calculés dans une observation quelconque sur un morceau de verre, — et le succès de l'expérience a pu suffire pour changer en certitude ce qui n'était que Soupçonné, sauf pour Desrartes à y ajouter l'évidence dernière par la « ratiocination » que nous Savons. C'estKramer, le premier, qui a essayé de rattacher ainsi la découverte de la loi des sinus à l'étude géo- métrique des coniques. Et, en vérité, il est surpre- nant que cela n'ait pas davantage frappé ceux qui, après lui, ont examiné la même question. Van Geer, dans sa notice sur Snellius, est amené à résumer le Mémoire de Kramer; il ne mentionne même pas ce qui est relatif au problème géomé- trique que Descartes à résolu. Le Professeur Kor- teweg, après avoir insisté sur l'invraisemblance du plagiat, se demande comment Descartes a pu par- venir à sa loi. Il juge très peu concluante, parce que trop peu précise, l'expérience rendue possible par le verre de Mydorge, et finalement, sans avoir mentionné non plus le problème sur les coniques, il s'en remet pour l'explication cherchée au carac- tère de Descartes, qui l’inclinait « à l'enthousiasme et aux convictions fortes, même en des choses incerlaines ». Au surplus, il est possible que le processus, tel qu'il vient d’être présenté, laisse subsister encore quelques difficultés. La Géométrie ayant conduit Descartes à mettre les sinus en évidence, n’aurait-il Pas un peu vite soupconné qu'une relation constante va porter précisément sur ces lignes dans le phé- nomène physique de la réfraction? Y aurait-il là quelque divination de génie, capable de nous sur- prendre par son caractère exceptionnel? Remarquons, en tous cas, que l’étonnement serait aussi nalurel pour la découverte de Snellius. Il ne suffit pas, en effet, de dire, avec Golius, qu'il a tiré sa loi de l'expérience. S'il l'en a tirée, c'est qu'il la lui a demandée, et que, ne doutant pas à priori de l'existence d'une relation constante, il a songé à porter Son attention sur les cosécantes des angles d'incidence et de réfraction. Mais, en vérité, pour lui comme pour Descartes, y a-t-il là autre chose que la suite naturelle des recherches de Kepler ? L'un et l’autre l'ont eu pour maître en Optique. Descartes le déclare nettement‘; et quant à Snel- 1 Anay et Tannery : T. II, p. 86. lius, il s'était de bonne heure lié d'amitié avec Kepler, quil avait connu à Prague, dans l'entou- rage de Tycho-Brahé. Or, quand on jette les yeux sur les écrits de Kepler relatifs à la réfraclion, on est frappé de voir à quel point il est près de saisir la vérilable loi. Ses expériences, répélées à l’aide d'un dispositif très simple, qui lui donne avec pré- cision les angles d'incidence et de réfraction, l’amènent assez vite à corriger les résultats obtenus au xiH° siècle par ie Polonais Witelo : les angles eux-mêmes ne sont pas dans un rapport conslant, comme celui-ci l'avait cru, du moins dès qu'ils cessent d'être très petits. Kepler cherche quelle correction il faut faire subir à l'énoncé de Witelo. et essaie de faire jouer un rôle aux sécantes des angles d'incidence. La figare sur laquelle il rai- sonne fait souvent songer à celle de Snellius. mettant en évidence les parties des rayons limitées par une normale voisine, et l'on se demande com- ment, parmi toutes les lignes qu'on peut essayer de comparer, il ne songe pas à ces deux longueurs. Quand il cherche de quoi dépend, dans la réfraction. le relèvement de l'image du fond, il songe, parmi un assez grand nombre d'hypothèses qu'il énumère, à faire intervenir les sinus des angles d'incidence. (Quinto, an ascendant imagines in proportiqne sinuum inclinationum? Frisch, I, p. 184.) Il ne s'agit pas là précisément de saisir le rapport entre les sinus des angles qui se correspondent par la réfraction, mais il est intéressant de voir Kepler porter tout naturellement son attention sur les lignes trigonométriques des angles, tantôt sur la sécante, tantôt sur le sinus. Bref, on sent, en le lisant, qu’il ne lui a presque rien manqué pour par- venir à la loi de la réfraction: el, loin d’être surpris par la découverte simultanée de ses continuateurs, Snellius et Descartes, on s'étonne de ne pas la trouver chez Kepler lui-même. Peut-être alors vraiment toutes les difficultés tombent-elles, dans la question qui nous préoccu- pait. S'il en resle du moins, provenant du lon ou de l'atlitude de Descartes, s'il nous apparaît par- fois comme ne ressemblant à personne, eh bien! c'estqu'il est Descartes, et c'est en quoi ses singu- larités nous intéressent presque aulant que ses découvertes elles-mêmes, pourvu seulement qu'on n'en Lire point argument dans une accusation que ne pourrail plus étayer un seul grief positif. G. Milhaud, Professeur à l'Université de Montpellier. D' P. DESFOSSES — LES IONS ET LA THÉRAPEUTIQUE LES IONS ET LA Pour bien comprendre ce qu'on entend aujour- d'hui par le mot ion, il faut se reporler aux idées du suédois Swante Arrhenius sur les solutions. D’après ce savant, quand une certaine quantité de chlorure de sodium, par exemple, est dissoute dans l'eau, nous devons admettre que celte solution contient : d'une part, un certain nombre de molé- cules inlactes NaCI ; d'autre part, un certain nombre de molécules dissociées en leurs éléments consti- tutifs Na et CI. Ce qui caractérise essentiellement ces éléments dissociés, c'est que chacun d'eux possède une charge électrique distincte, tandis que les molécules non dissociées sont électriquement neutres. Ces éléments de la dissociation molecu- luire, chargés électriquement, sont les jons. Le signe de la charge des ions varie avec la fa- mille chimique à laquelle ces éléments appar- tiennent: les métaux, les alcaloïdes portent des charges positives; les radicaux acides sont chargés négativement. Dans la solution de chlorure de sodium que nous avons prise comme exemple, les molécules non dis- sociées sont neulres: les ions Na sont chargés posi- livement, les ions CL sont chargés négalivement: les charges posilives et les charges négalives se font équilibre; qu'on fasse passer un courant élec- trique dans cette solution, les ions se m'ttront en + mouvement : les ions Na, chargés posilivement, se dirigeront vers l'électrode négalive : ce sout des calions (yuru, en bas; ww, je vais); les ions CI, chargés négalivement, se dirigeront vers l’él: ctrode positive : vais). L'effet du courant électrique est d'allirer les ce sont des a210nS (avx, en haut; w, je ions vers les électrodes, tandis que de nouvelles molécules se scindent pour remplacer, dans la solution, les ions qui disparaissent aux électrodes en perdant leur charge électrique. Ce double mou- vement des ions constitue le courant électrique lui-même. On concoil donc que le courant élec- trique ne peul être transmis que par les liquides dissociables par lélectricité. Depuis fort loug- temps, on avait remarqué que les substances liquides ou dissoutes se comportent de ueux manières diflérentes par rapport au courant élec- trique : les unes, comme l'alcool, les solutions de sucre, ne conduisent pas l'électricité; les autres, comme les acides, les bases et les sels, conduisent l'électricité. Les substances qui conduiseut le cou- rant éprouvent en même lemps des modificalions dans leur nature chimique, sont décomposées, élec- THÉRAPEUTIQUE trolysées par le courant : ce sont des électrolytes. Le passage de l'électricité à travers un électrolyte s'accompagne donc de la libération, aux électrodes, des ions respectifs, qui s'y déposent comme dans la galvanoplastie, ou qui donnent lieu à des réactions secondaires comme dans la fabrication de la soude par électrolyse du sel marin. Certaines substances ne donnent pas naissance à deux ions seulement, comme le chlorure de s0- dium, mais leurs molécules se divisent en trois ions; la molé-ule de sulfate de soude Na*SO' se divise en trois ions : un ion négalif SO‘ et deux ions positifs Na. Dans ce cas, l'ion S0', qui fait équilibre à deux ions Na, est appelé ion bivalent. La molécule de perchlorure de fer FeCF se divise en quatre ions : un ion Fe et trois ions Cl; l'ion fer, dans ce cas, est trivalent; il équivaut à trois ions chlore. Le nombre d'ions libérés dans une solution varie: avec le degré de concentration ; une solution con- centrée contient peu d'ions; Lrès étendue, elle en contient un graud nombre. La dissociation des ions progresse quand on dilue, elle régresse quand on concentre; l'équilibre est obtenu quand toutes les molécules sont dissociées. On arrive ainsi à une constante pour toutes les dilutions d'un même élec- trolyte, variable d'un électrolyte à l'autre. Cette constante de dissociation, qui exprime l’aplitude d'un corps à la dissocialion, traduit aussi son apli- tude à réagir mesure cette affinité, cette « force » des réaclils que les chimistes ont remarquée depuis longtemps sans pouvoir la définir. Les acides forts sont les plus dissociés, el la valeur de la constante de dissociation ou d'affinité décroit à mesure qu'on passe des acides forts (nitrique, sulfurique) aux acides faibles (acétique, butyrique). Tous les acides donnent, d’ailleurs, à côté d'un anion sprcifique, le même cation H; les propriétés communes qui tra- duisent leur cararlère « acide » ne sont autres que + les propriétés de l'ion H. De ces nolions, bien connues des lecteurs de la Pevue géuérale es Sciences, découlent des consé- quences fort importantes au point de vue physique, chimique et biologique. On sait que la pression osmolique d'une solulion est déterminée par le nombre de molécules par litre de cvtie solution; c'est, pour une quanlilé quelconque de celle solu- tion, le quotient du nombre des molécules par le 230 D' P. DESFOSSES — LES IONS ET LA THÉRAPEUTIQUE volume en litres. Si l’on calcule la pression osmo- tique que devra avoir une solution de sucre, d'urée, l'expérience vérifie Le chiffre calculé ; mais, avec les corps de nature saline (acides, bases, sels), c'est-à- dire avec les électrolytes, la pression réelle est supé- rieure à la pression prévue: il semble qu'il y ait plus de molécules qu'on n’en a mis. Ce fait résulte de la dissociation électrolytique, de l’ionisation. Quand une molécule K*S0* portée dans l’eau subit cette dissociation électrolytique, elle fournit deux cations K et un anion S0’, soit trois particules au lieu d'une; la pression osmotique sera triplée, les ions dissociés complant au même titre que les mo- lécules entières pour l'établissement de la pression. L'eau se congèle à 0 degré. La dissolution dans l’eau d’une substance comme le sucre, l'alcool, dont la solution ne conduit pas l'électricité, abaisse la température de congélation de la solution propor- tionnellement à la concentration moléculaire; les solutions électrolytiques présentent un abaissement du point de congélation plus grand que celui qu'on calcule d'après la concentration moléculaire en poids. Là encore il s’agit d'un phénomène ionique. Une des objections que quelques chimistes ont soulevées au début contre la théorie de l’ionisation était leur surprise de voir, par exemple, des atomes K circuler librement dans l’eau sans produire la réaction intense que détermine un fragment de potassium; mais l'ion K se trouve dans un état énergétique tout particulier, tout différent de celui des molécules de potassium solide. L'état électrique particulier des ions leur communique des pro- priélés, des capacités de réaction toutes spéciales. Les actions chimiques et, par suite, les actions toxiques, antiseptiques et médicamenteuses des substances électrolytiques sont presque exclusive- ment des actions ioniques. Lorsque nous préci- pitons un chlorure par un sel d'argent, nous oblenons la réaction de l'ion ne sur l'ion Cl; seuls, les composés électrolytes du chlore capables delibérer l’ion Cllui-mème donnent, avec le nitrate, de chlorure d'argent: dans les solutionsde chloral, du chlorate de potassium, une solution de nitrate d'argent ne délermine pas de précipilé; ici, en effet, le chlore ou bien se trouve dans une molécule non électrolyte, ou bien fait partie d’un ion com- plexe tel que l'ion CIO*, dont les réactions sont différentes de celles de l'ion CI. Les propriétés toxiques et pharmacologiques dépendent essentiellement des groupements ioni- ques ; l'ion qui est le groupement le plus important à ce n'est ni l'atome, ni la molécule, c'est connaitre pour le médecin. Considérons, par exemple, les phosphures et les phosphates : les uns sont extrémement loxiques ; les autres n'ont aucune toxicité; c'est à l'ion phosphore que les phosphures doivent leurs propriétés toxiques ou thérapeutiques. La molécule des phosphates contient le phosphore dans la même proportion que celle du phosphure, mais ce phosphore fait partie d'un ion complexe PO“, dont les propriétés sont abso- lument différentes de celles de l'ion phosphore. De même, on ne pourrait instiluer une médication ferrugineuse avec des ferrocyanures : ils con- tiennent du fer; cependant, ils ne manifestent aucune des propriétés du cation Fe; le ferro- cyanure de polassium, par exemple, donne un anion létravalent FeCAz = et quatre cations mono- valents K:; mais il ne donne aucun cation Fe: il ne peut donc pas produire l’action thérapeutique du ere La connaissance de la nature ionique des actions médicamenteuses est indispensable au médecin. Introduire dans l’urèlre des combinaisons pro- téiques de l'argent, c'est épargner à la muqueuse du patient la sensation désagréable causée par le nitrate, mais c'est aussi le priver de l'action anti- septique et cautérisante de l'ion Ag. Un de mes confrères, chirurgien distingué de province, s'étonnait devant moi de pouvoir, sans déterminer d'accidents, introduire dans des arti- culations tuberculeuses des quantités énormes de glycérine phéniquée; ce fait s'explique aisément par la théorie des ions : les solutions glycérinées ne conduisent pas l'électricité; la glycérine re dissocie pas les électrolytes; dans les solutions glycérinées, l'absence des effets ioniques amène la disparition des effets toxiques. Stéphane Leduc a observé plusieurs personnes ayant avalé une cuillerée à bouche de glycérine au phénol à parties égales sans accidents, ni caustiques, ni toxiques ; la même dose, étendue d’eau, eût été mortelle. Paul et Krünig', en 1896-1897, ont montré que l’action bactéricide des sels de mercure varie avec le degré de dissocialion, avec le nombre d'ions actifs. Pour une même concentration moléculaire, le chlorure et le bromure mercurique, qui sont, à peu près, aussi fortement dissociés, ont une action désinfectante peu différente, tandis que le cyanure est à peu près sans action bactéricide. En étudiant l’action du bichlorure, du bibromure et du cyanure de mercure sur les spores du Zacillus Anthracis, l'expérience donna : après l'action pendant vingl minutes d’une solution d’une molécule d’'HgCE dans 64 litres d'eau, 7 colonies; après l'action pendant vingt minutes d'une molécule d'HgBr dans 64litres 1 Ta. Pauz et B. KrônrG : Ueber das Verhalten der Bakte- rien zu chemischen Reagentien. Zischr. physik. Chem. . XXI, p. 41%, INS96. — Die chemischen Grundlagen der Lebre von der Giftwirkung und Desinfection. Ztschr. Hvg., L. XXV, p. 1, 1897. D' P. DESFOSSES -— LES IONS ET LA THÉRAPEUTIQUE 231 d'eau, 34 colonies; après l'action pendant vingt minutes d'une solution de bicyanure de mercure HgCy° quatre fois plus concentrée, une molécule dans 16 litres d'eau, un nombre incomptable de colonies. Après quatre-vingt-cinq minutes d'action, les solutions de HgCF et de HgBr° ne laissentaucune colonie se développer; la solution plus concentrée de HgUy° laisse encore se développer 33 colonies. Dans ces solutions, l'ion actif, l'ion bactéricide, c'est l'ion Hg, qui existe en grand rombre dans la solution nolablement dissociée de HgCF et qui existe en petit nombre dans la solution peu dissociée de HgCy. En médecine humaine, où l'on à si souvent à utiliser l'action anlisyphilitique du mercure, il im- porte d'utiliser des préparations où l'action spéci- fique des ions Hg pourra s'exercer. Il n’est pas sûr que la thérapeutique antisyphilitique ait une valeur quelconque lorsqu'on utilise une substance orga- nique complexe, indolore ou agréable à manier, mais d’une efficacité peut-être contestable. Comme l'action bactéricide, comme l'action théra- peutique, la douleur semble être produite par l'ion Hg, ion actif; éviter la douleur, c'est, pour certaines préparativus, supprimer l'efficacité. M. Stéphane Leduc, pour obtenir un médicament mercuriel actif, mais supportable, a ulilisé les propriétés des ions: il est possible de faire diminuer la quantité d’un ion délerminé qui se trouve libre dans un certain volume de solution sans pour cela toucher à la quantité brute du sel introduit. Si l'on ajoute des ions CI à une solution de HgCF, il se reforme des molécules HgCÉ et le nombre des ions Hy diminue par conséquent; il suffit donc d'ajouter un sel à même anion, un chlorure dont le cation soit sans aclion toxique, NaCl, par exemple, pour faire régresser le nombre des ions Hg dans le liquide. Ajouter du chlorure de sodinm à une solution de sublimé, c'est en diminuer la puissance ; mais, si l'on injecte cette solution dans les tissus du corps humain, par la diffusion dans le sang et l'action régulatrice de l'économie sur la concentration de NaCIl, la dissociation revient ce qu'elle eût été sans l'addition de chlorure de sodium. Aussi Stéphane Leduc conseille la préparation suivante : ST) Tate PEN Me PEN EMENOEE 0 gr. 20 Chlorure de sodium recristallisé. . or Eau distillée . . . . 100 gr. L'injection sera pratiquée trois fois par semaine, dans les muscles de la fesse, très lentement et à la dose de 5 à 10 centimètres cubes ; ce traitement a permis à Leduc de guérir complètement des cas de tabès au début. Le fait que l'addition d’un électrolyte à un autre électrolyte peut abaisser la dissociation peut pro- duire nombre de résultats curieux; la baisse d'ioni- sation est d’autant plus notable que l’électrolyle était moins dissocié; pour les corps peu solubles, l'addition d'un électrolyte peut entrainer même une diminution de la solubilité. L'acide urique est un acide très faible, très peu dissocié, et ses sels ne le sont guère davantage; si, à une solution saturée d'urate acide de Na, on ajoute NaCI, c'est-à-dire des ions Na en abondance, on diminue la dissocia- tion de l'urate; il se reforme des molécules d'urate qui, ne pouvant trouver place dans la solution puisque celle-ci est saturée, se précipitent. L'addi- lion de carbonate ou de bi-carbonate de soude diminue également la solubilité de l'urate. On arrive done à cette conclusion inattendue que, lorsqu'on administre aux goutteux du bicarbonate de soude, des sels de lithium, on n'arriverait pas, si ces sels pénétraient vraiment dans le sang, à dissoudre les concrélions uratiques, mais, au contraire, on entraverail leur dissolution”. II Ces quelques exemples montrent de quelle utilité la théorie des ions peut être pour la Pharmacologie, la Thérapeutique et la Médecine générale; mais la plus curieuse, sinon la plus importante, des applica- tions de cette théorie réside dans l’électrolyse médi- camenteuse, la pénétration électrique des ions. L'introduction tout empirique dans l'organisme par le courant galvanique a déjà une histoire longue. La première lentalive d’intro- duction de médicaments à l'aide du courant de la pile remonterait à Rossi (1803). Dès 1833, Fabre- Palaprat prétendait introduire électrolytiquement de l’iode dans le corps humain; plus près de nous, à partir de 1880, les travaux se multiplient: on essaie le traitement des névralgies par l’introduction électrolytique de la cocaïne, de la syphilis par les bains hydrogalvaniques de sublimé; on fait des tentatives de traitement de la goutte et du rhuma- tisme par l'introduction électrolytique du lithium. Tous ces travaux, malgré leurinlérêt, ne pénétraient de substances pas dans le publie médical, car ils présentaient des conclusions souvent contradictoires. Il semble que c'est à Frankenhauser, Bordier, et surtout à Leduc que revient le grand mérile d’avoir donné de la méthode un exposé clair et rigoureux, d'en avoir précisé et étendu les applications, d'avoir éveillé l'attention des praticiens sur une thérapeutique qui parait douée d’une grande puissance et d'une rare précision. Les ions, avec leur état énergétique particulier, 1 L. C. MarcLaRD : les sciences physiologiques et pharmacologiques. Journal de Pharmacie et de Chimie, 16 novembre 1906. La dissociation électrolytique dan 9232 D' P. DESFOSSES — LES IONS ET LA THÉRAPEUTIQUE jouent un grand rôle dans l’action des solutions médicamenteuses ; mais, si l'on vient à faire passer un courant dans ces solutions, à l’action chimique propre des ions viennent s'ajouter les avantages que procure leur transport vers l’électrode. Puisque les radicaux acides et les métalloïdes vont vers le pôle positif, que les métaux, y compris l'hydrogène, vont au pôle négatif, il suffira d’interposer dans le circuit le corps humain pour faire pénétrer les radicaux mélalliques sous le pôle positif, les radi- caux acides sous le pôle négalif. L'organisme humain, en raison de sa teneur en chlorure de sodium (à grammes par litre d’après les physiologistes), est le siège d'un mouvement d'ions dans les deux sens, d’un double déplacement des ions de la molécule NaGl; l'anion chlore se dirige vers le pôle positif, le sodium se dirige vers l'électrode négative. Arrivés aux électrodes, ces ions auront une des- tinée différente suivant que le courant aura été amené à l'organisme à l’aide d’électrodes métal- liques où à travers des solutions électrolytiques”. Si les électrodes sont inattaquables par les pro- duils de la décomposition électrolytique, les tissus étant conslilués principalement par NaCl, l'anion Cl se dégage à l’anode, et, après avoir abandonné sa charge au contact de l'électrode posilive, em- prunte de l'hydrogène au tissu sous-jacent qu'il détruit, et reconstilue l'acide correspondant : 2 CI + H°0 = 2 HCI + O0. Le cation Na, après avoir abandonné sa charge électrique au contact de la cathode, reprend les caractères chimiques des métaux alcalins et emprunte l’hydroxyle du tissu sous-jacent qu'il détruit pour reconstituer la base correspondante : Na + H°0 = Na08 + H. Dans ce cas, on obtient à l'anode et à la cathode une action causlique destruclive ; c'est précisément sur celte propriélé que repose tout entière l'élec- trolyse caustique. Siles électrodes sont attaquables par les produits de la décomposition électrolytique, s'il s'agit d’élec- trodes en zinc par exemple, il y aura comme précé- demment formation à l'anode de l'acide HCI, qui atiaquera à son lour l'électrode en zinc avec formation de chlorure de zinc ZnCr ; ce chlorure de zinc pourra donner lieu sur le tissu à une action secondiire des plus intéressantes : les métrorragies, en particulier, cèdent rapidement à l'électrolyse avec une anode de zine (60 à 100 milliampères Lepuc : Les nouvelles théories des solutions dans leurs rapports avec la médecine. La Presse Médicale, septembre 1906, n°s 70, 72, 1 STÉPHANI 14, 16. pendant 20 à 30 minutes), car l'ion zinc conslitu le coagulant :e plus efficace de tous ceux do dispose la médecine (Leduc). Si les électrodes sont des électrolytes, c'est- dire des solulions de sels, d'acides ou de bases, } théorie fait prévoir qu'il se produira un doubl courant ionique des électrodes vers les tissu humains et des tissus vers les électrodes ; le radie acide, repoussé par le pôle négatif, pénélrera sou la cathode ; le métal, repoussé par le pôle positif pénétrera dans le corps humain sous l'anode. Stéphane Leduc a donné de ces faits une démon tralion très ingénieuse, grâce au dispositif exprri mental suivant : Si l’on applique convenablement sur l'oreille d'un lapin une solulion de sulfate d strychnine et qu'on fasse passer un courant élec trique, le lapin sera intoxiqué et présentera un attaque lypique de létanos suivie de mort si l’élee trolyte sullate de strychnine est placé au pôl posilif ; le lapin restera indemne si l'applicalion est faite au pôle négatif; dans cetle expérience, e effet, c'est le radical strychnine qui est loxique e la strychnine ne peut pénétrer que sous l'anode. Si l’on applique sur l'oreille d’un lapin une solu- tion de eyanure de potassium el qu'on fasse passer un courant électrique, le lapin sera inloxiqué et succombera rapidement si le cyanure est placé au pôle négatif; il restera indemne si le cyanure est placé au pôle posilif; dans cette expérience, en! effet, c'est le radical cyanique qui est toxique, el ce radical ne peut péuélrer que sous la cathode. Arrivés dans l'organisme humain, les ions se comportent très différemment suivant leur nature =: lion strychnique est rapidement absorbé par læ cireulalion générale et produit la mort en quelques minules: l'ion permanganique ne diffuse absolu: ment pas et reste longtemps à l'endroit d'intro- duction. Si, par exemple, on se serl d’électrodes constituées par une solution de permanganate de potasse, l'ion permanganique pénélrera dans les tissus sous la cathode el poncluera la peau d’un pointillé noiràätre durable ; sous l’anode penétrera l'ion potassium, qui ne délerminera aucune modif cation apparente de la peau. Ces fails expérimentaux montrent qu'il est po sible de faire pénétrer dans l’organisme, au point où on le désire, un médicament donné; de cette constalalion est née la thérapeulique électro ionique. { Cette thérapeutique n'est pas très compliquée; elle n’exige qu'un courant électrique convenable, une substance active, des électrodes approprites Le courant électrique doil êlre un couraut CON= tinu de faible intensité, qui n'atleint qu'exception= nellement 100 miliampères, wais d'assez forte tension {30 à 50 volts), car la résistance du corps Sur à pt AUS + D' P. DESFOSSES — LES IONS ET LA THÉRAPEUTIQUE 233 humain est considérable; sur le trajet du courant | celle, entre autres, d'un jeune soldat, atteint d’une rire les bornes de prises du courant et les électro- ankyÿlose des doigts à la suite d'un phlegmon de des, on intercale un réducteur de potentiel et un | la main et qui, pendant six mois, fut soumis, dans - millimmpéremèlre permetlant de graduer et de | un hôpital militaire, à des traitements divers, parmi “mesurer l'intensité du courant qui doit traverser | lesquels des mobilisations forcées sous le chloro- le patient. 'Lesélectrodes seront larges ; elles seront | forme; lé résultat étant nul, le malade fut réformé. “constituées par des plaques de métal souple (étain), | Après deux séances d’électrolyse, la main dans un que l’on séparera de la peau par d'épaisses couches | bain d'une solution de chlorure de sodium servant “Me tissu de-coton hydrophile imprégné soit d’eau | de cathode, avee un courant de trente milliam- salée, soil de lelevtrolyle choisi. pères, pendant trente minutes, les mouvements Les solutions ‘électrolytiques seront faites avec | revinrent si complètement qu'il ne resla aucune . de l'eau aussi pure que possible, distillée et con- | trace d'ankylose. servée à l'abri de l'air. La concentration des solu- Un garde foreslier, après six mois d'immobili- tions qui imprègnent les électrodes n'a aucune | sation pour une arthrile fongueuse, avait depuis “influence sur l'introduction des ions; les effets | cinq mois une ankylose complète d'un genou; “produits ne dépendent que de la nature des ions et | Leduc fit neuf séances d'électrolyse (compresse “de l'intensité du courant. À d’autres égards, la con- | cathode imprégnée d’une solution de chlorure de “centration, cependant, n'est pas indifférente, et l’on | sodium; 100 milliampères pendant 40 minutes), me doit pas appliquer sur la peau des solutions | et, à la suite de ce traitement, le malade marchait d'acides ou de bases à concentration de 1 °/, qui | parfaitement et pouvait reprendre ses fonctions de produiraient des actions caustiques directes sans le | garde forestier. On pourrait citer d’autres exem- “courant électrique. | ples : du reste, ils se multiplieront à mesure que Les actions ioniques offrent des effets aussi variés | S’étendra davantage l'applicalion de celte théra- que le nombre des ions et les doses différentes | peutique. “auxquelles on peut les employer. III L'ion quinique à été employé avec succès par ILeduc contre cerlaines névralgies ; je l'ai moi- L'électro-ionisation est une branche des plus pnême employé dans le trailement de néoplasmes | intéressantes de l’électro-thérapie ; elle date seule- “ulcérés el douloureux : l’action analgésique a été | ment de quelques mois, et déjà elle a donné les vextrèmement remarquable. | résultats les plus encourageants. C'est pour cela L'ion zinc a été employé comme hémostatique que nous avons cru intéressant de la présenter et comme désinfectant. | succinctement aux lecteurs de la Revue. L'ion sulicylique a été employé, avecle plusgrand | Comme nous l'avons dit plus haut, la connais- "succès, dans le traitement de variétés très diverses | sance des ions et de la dissociation électrolytique “d'arthriles rhumalismales, contre des tics doulou- est aujourd’hui indispensable au médecin. C'est reux de la face ayant resisté à plusieurs opérations aux ions libres qu'il faut rapporter la plupart des “chirurgicales. réaclions produites par les acides, les bases ét les Une des actions les plus constantes des traile- | $e1s: tous ceux qui connaissent le rôle primordial, ments électro-ioniques est l'influence résolutive, | chez les êtres vivants, des malières minérales sur les formations scléreuses et cicalricielles, des d'abord, puis des acides organiques et des bases veathodes formées par une solution de chlorure de organiques, comprendront que l'intervention des sodium. J'ai vu une ankylose fibreuse complète de | ions dans les réactions de l'organisme est prépon- l'index, conséculive à une plaie septique profonde dérante et que, devant la théorie des ions, s'ouvre *à doigt, disparaître en quelques séances par l'in- aujourd'hui non seulement le territoire immense fluence de l’ionisation sous une cathode de chlo- de la Chimie, mais le domaine de la Pharmacologie rure de sodium; nul massage n'aurait pu produire | ef de la Biologie tout entier. bun résultat aussi rapide. Le Professeur Leduc a publié maintes observalions encore plus probantes, D' P. Desfosses. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 4907. qe 234 F. PÉCHOUTRE — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE TI. — ÉTAT ACTUEL DE (Nos CONNAISSANCES Sur 14° |! boucles ou deices Use rapprochent encore uaeltoss REDUCTION CHROMATIQUE. Le perfectionnement des méthodes techniques, la rencontre de matériaux d’études plus favorables et aussi l'influence de considérations théoriques ont provoqué, dans le domaine de l'histologie végé- tale, un changement de vues à peu près radical en ce qui concerne les questions de karyokinèse et de réduction chromatique. Il y a à peine deux ou trois ans, l'accord semblait établi sur les données suivantes : des deux divisions de maturation des cellules sexuelles, la première, ou division hétérotypique, est caractérisée par la réduction de moitié du nombre des chromosomes; la seconde. ou division homotypique, ne diffère pas essentiellement des divisions typiques ou divisions des noyaux végétatifs. Les chromosomes isolés par ces deux divisions successives doivent leur origine à un double clivage longitudinal et non à une seission transversale, capable, dans l’une ou l’autre division, de séparer dans un même chromosome deux parties dissemblables, c'est-à-dire chargées de propriétés héréditaires différentes. La division est done simplement réductrice au point de vue quantitatif; elle ne saurait l'être au point de vue qualitatif. La division hétérotypique et la division homotypique sont l’une et l’autre des divisions équationnelles; aucune ne revêt le caractère d'une division réductionnelle. Telle était l'opinion de la majorité des botanistes, Strasburger, Guignard, Grégoire, Mottier, Sargant, Schniewind-Thies, Ernst, etc. Seuls, Belajeff, Ishikawa, Atkinson et quelques autres étaient d'un avis contraire et croyaient à une division réductionnelle, qu'ils faisaient coïn- cider avec la division homotypique *. En 1903, parut une communication préliminaire de Farmer et Moore ? qui eut un grand retentisse- ment et dans laquelle ces savants donnaient de la division hélérotypique une interprétation toute nouvelle. Le chromosome hétérotypique ne doit pas son aspect à un double clivage longitudinal. À la prophase de la division hétérotypique, le fila- ment de linine fendulongitudinalementse contracte en formant des boucles ou des U dontles plis tendent de plus en plus à se placer parallèlement, à mesure que cette phase progresse. Les branches de ces 4 Voir dans la Revue générale des Sciences, 11e année, no 48, 1900, la Æevue annuelle de Botanique, p. 1051. 2 J. B. Fanuen and J. G. S. Moore: New investigations in- tothe Reduction of Animals and Plants. Proc. tov.Soc., 1903. et toute trace de séparation disparait. Le chro= mosome hélérotypique résulte donc de la soudure de deux chromosomes clivés ; il est bivaleat, et Lan division qui libérera les deux chromosomes sim= ples sera une division transversale. Ainsi, d'après: ces conclusions, non seulement il exislerait une division réductionnelle, mais encore cette division réductionnelle coïnciderait avec la division hété= rotypique et non avec la division homotypique, comme le croyaient Ishikawa, Belajeff et Atkinson: Ce fut le point de départ d'une série de recherches nouvelles. Gregory ‘ dans les Fougères, Williams dans les Dictyotacées, Strasburger* dans les Gal tonia, Funckia et Thalictrum, Rosenberg‘ dans les Drosera, Miyake® dans les cellules-mères polli- niques des Monocotylédones, Overton* dans les cellules-mères polliniques des Dicotylédones, con- firment dans ses points essentiels l'hypothèse de Farmer et Moore, tandis que Grégoire’, Berghs® et Allen *, qui étudient surtout les genres Lilium et A/lium, arrivent à des résultals différents, sans nier la possibilité d’une division réductionnelle. Cet engouement subit des botanistes pour la division réductionnelle est attribuable en grande. partie aux progrès de nos connaissances sur l'hy- Lu | bridation ; car les lois de Mendel relatives à la dis-\ jonction des hybrides s'expliquent difficilement M sans l'hypothèse d'une réduction qualitative !. A la vérité, quelque grosse de conséquences que soit cette nouvelle interprélalion des mitoses sexuelles, la distance n’est pas grande, au point de vue histologique, entre l’ancienne et la nouvelle 1 Grecory : Spore-formation in Leptosporangiate Ferns- Ann. of Bot., 190%. | Ce È t 2 VWazzraus: Studies in the Dictyotacées. Ann. of Bot., 1904: 3 SrrassurGer: Ueber Reduktionsteilung. Sitzungsber. d: Kgl. Preuss. Akad. d. Wiss. Phys. Math., 1904. Histolo=M gische Beiträge zur Vererbungsfrage. I. Typische and Allotypische Kernteilung. Jahrb. f. wiss. Bot., 1905. “ RosenserG : Ueber die Reduktionsteilung in Drosera Stockholm, 1904. Le + 5 Mivake : Histologische Beiträge zur Vererbungsfrage- II. Uber Reduktionsteilung in den Pollenmutterzelees einiger Monokotylen. Jahrb. f. wiss. Bot., 1905. 5 Overtow: Id. IV. Ueber Reduktionsteilung in den Pollen= mutterzellen einiger Dikotylen. Jahrb. f, wiss. Bot., 1905: 7 GréGoiREe: La réduction numérique des chromosomes et les cinèses de maturation. La Cellule, 1904. S Bencus: La formation des chromosomes hétérotypiques dans la sporogénèse végétale, 1904. ° ALLEN: Chromosome Reduction in Lilium canadense. Bot. Gaz., 1904. — Histologische Beiträge zur Vererbungs- frage. IL. Das Verhalten der Kernsubstanzen während der Synapsis. Jahrb. f. wiss. Bot., 1905. 10 Les lois de Mendel ont été exposées dans la Revues cénérale des Sciences de 490%, par Cuenot. L] 1 F. PÉCHOUTRE — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 23 QC hypothèse. Pour qu'une réduction quantitative soil en même temps qualitalive, il suffit d'admettre que -le chromosome hélérotypique, le chromosome en “tétrade, résulle non d'un double clivage longitu- “dinal, mais de l'accolement de deux chromosomes “simples et clivés; les aspects peuvent être iden- tiques dans les deux cas, mais la séparalion ulté- -rieure des chromosomes simples sera une division “transversale dans la seconde hypothèse. “ À cet égard, l'entente semble bien près de s'éta- blir entre les botanistes. Mais d’autres ques- “tions restent à élucider. Quelle est la nature des “chromosomes simples qui s'’accouplent en un “chromosome bivalent? Comment et à quel mo- _ment se fait cel accouplement? Le chromosome, “support des qualités héréditaires, est-il un élé- ment qui conserve son individualité au milieu des phases si compliquées qu’il doit parcourir? Tels ont les points qui, actuellement, retiennent l’alten- tion des chercheurs et aussi ceux qui présentent “le plus d'intérêl pour l'intelligence des phéno- - mènes d'hérédité. “ Le noyau d'une cellule-mère sexuelle, après la _ division qui lui a donné naissance, passe par une : phase de repos caractérisée par la disposition Docu du filament de linine, sur lequel se trou- vent distribués de nombreux grains de chromatine. “Van Wisselingh d'abord, et plus tard Grégoire et “Wygaërts”, ont nié l'existence de la linine, ou du moins ont prélendu que granules et filaments “sont de même nature, qu'il n'y a pas à distinguer Ja linine de la chromatine el que, dans le noyau, à l'exception des nucléoles, tout ce qui est figuré est de la chromatine. Mais la majorité des bota- istes est d’un avis contraire. Un résultat plus im- portant des recherches de Grégoire et de Wigaërts, parce qu'il plaide en faveur de l'autonomie des chro- osomes, est que le réseau d’un noyau sexuel se présente comme une associalion de chromosomes alvéolisés et réticulés. Le noyau au repos contient “d'ailleurs plus d'un nueléole, le plus souvent de deux à quatre, d'inégale grosseur. - Pendant le stade de repos, le noyau grandit et sa "masse de chromatine s'accroît. Quand la croissance à pris fin, les granules de chromatine épars sur le réseau se rassemblent autour de certains centres, dont le nombre parait correspondre à celui des chromosomes somatiques. À ce moment, le réseau “commence à se diriger avec les nucléoles vers un côté de l'enceinte nucléaire et Le noyau, entre dans la phase synapsis. C'est en 1895 que Moore appliqua pour la pre- ; Van WisseLiNGn: Ueber das Kerngerust. Bot. Zeit., 1899. ? GRéGome et W y64aErts : La reconstitution du noyau et la formation des chromosomes dans les cinèses somatiques. La Cellule, 1903. mière fois ce terme à üne phase du développement des noyaux sexuels qui précède la première division de maturation et qui se caractérise par l'agglomé- ralion des granules de chromatine en une masse fortement colorable et appliquée sur un des côtés du noyau, dont la surface restante parait vide. Déjà, en 1882, Strasburger ‘ avait observé et figuré ce stade dans les cellules-mères du Fritil- lar ia persiea. Onze ans plus lard, Zimmermann? le découvre dans le sac embryonnaire et es cellules- mères du pollen du Lilium. En 1896, Dixon‘ con- firme sa réalité dans la même plante et admet, avec Moore‘, que c'est une phase naturelle du développe- ment des noyaux sexuels. À partir de ce moment, de nombreux observateurs décrivent le stade sy- vapsis dans les divers groupes de plantes: Lidforss’, Smith®, miss Lyon’, Wiegand”, Duggard”, Merrel'°, Rosenberg‘, Murbeck'*, Ernst”, Juel”, Calkins'”, et miss Ferguson“. Ainsi il est légitime d'admettre que celte phase synapsis se rencontre dans le déve- loppement de nombreuses plantes vasculaires et qu'elle constitue un stade normal de leur évolution, bien que son interprétation ne soit pas encore défi- nilive. C'est un zoologiste, Montgomery”, qui, d'accord avec d’autres zoologistes, Sutton, Boveri, avança que la réduction numérique des chromosomes est due à la réunion de deux chromosomes provenant l'un du père et l’autre de la mère. Cannon accepta celte hypothèse de la conjugaison de deux chromo- somes dans le stade synapsis, parce qu'elle éclaire les lois de Mendel. Mais c’est surtout Strasburger qui a insisté sur ce stade et n’a pas hésité à le con- sidérer comme l'étape la plus importante de la division hétérotypique, parce que c'està ce moment que les supports héréditaires des caractères pater- nels et maternels se cherchent et s’accouplent tem- 1 SrRASBURGER: Archiv. f. mikr. Anat., 1882. 2 ZimMERMANN : Beiträge z. Morph. und Physiol. der Pflan- zenzelle, 1893. 3 Dixon: On the chromosomes of Proc. Roy. Irish. Acad., 1895. 1 Moore: Loc. cit. 5 Laiprorss: Zur Physiologie des pflanzlichen Kernes. Acta eg. Soc. Physiol. Lund, 1597. 5 Sum: À contribution to the life history of the Ponte- deriaceaæ. Bot. Gaz., 1898. +7 Lyon: A contribution to the life history of Euphorbia corollata. Bot. Gaz., 1898. 8 Wrecann: Bot. Gaz., 1899. ° Duccaro: Bull. Torr. Bot. Club, 1899. Bot. Gaz., 1900. 10 MerREL: Bot. Gaz., 1900. 11 RoseNBEeRG: Meddel. frän. Stockholm, 4901. 22 Mureeck : Lunds Univ. Arsk., 1904. Konigl. Svenska, 1902. 15 Ernst: Flora, Ergänz. Bd., 1902. 14 JueL: Flora, Ergänz. Bd., 1902. 15 Cazkins: Bull. Torr. Bot. Club, 1897. 18 KERGUSON: Proc. Wash. Acad. Sei., 189%. 17 Monrcomery: Zool. Jahrb., 1901. Biol. Bull., 1901, 1908 et 1904. Lilium longiflorum. 236 F. PÉCHOUTRE — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE porairement, poursedisJoindre ensuile.Strasburger ne croit pas toutefois, comme les zoologistes, que les chromosomes parentaux préformés et nettement séparés se rapprochent dans le stade synapsis. Comme il l’a constaté dans les cellules-mères polli- niques du 7halictrum purpurascens, ce sont les gra- nules chromatiques des chromosomes correspon- - 1. — Deux phases du stade Ssynapsis dans le Thalictrom purpurascens (d'après Strasburger). dants qui s'assemblent en forme de peliles masses autour de certains centres ; pour que cetassemblage soit facilité, Strasburger pense même que les gra- nules de chromaline abandonnent le réseau de linine (fig. 1). Comme le nombre de ces centres de réunion correspond au nombre réduit des chromo- somes, il est nalurel d'admettre que la chromaline d'un chromosome paternel et celle d’un chromoso- Fig. 2. — Cellule-m°re pollinique de Galtonia (d'après Strasburger). — Stade du spirème et dédoublement lon- gitudinal du filament de chromatine. me malernel se sont accouplées autour d’un centre commun. Les corps résultant de cet accouplement se disposent avec l’aide de la linine en un filament pelotonné. C'est le stade du spirème lâche, qui clôt la phase synapsis (fig. 2). Le filament qui constitue le spirème se montre formé de grasules de chromatine disposés en série et plongés dans la linine. Bienlôt on peut observer un clivage longitudinal du filament, clivage qui doit être considéré comme une séparation des éléments accouplés dans le stade synapsis. Ce clivage précoce ne produira, d’ailleurs, tout son effet qu'à la seeonde mitose. Le filament s'épaissit ensuite en devenant plus court et diminue le nombre de ses plis (fig. 3). A ce moment se produit la segmentation de ce filament doûble en fragments dont le nombre cor- respond au nombre réduit des chromosomes. Chaque fragment se compose de deux filaments situés à côlé lun de l’autre et souvent tordus l’un sur l’autre; en un mot, chaque fragment représente deux chro- mosomnes el mérite le nom de double chromosome. Fig. 3. — Cellule-mère pollinique de Galtonia (d’après Strasburger). — Raccourcissement et épaississement du filament de chromatine. Les chromosomes doubles deviennent plus courts et plus épais à mesure que l’on approche de la consti- tution du fuseau et prennent des formes variables. Dans le Gal(onia, étudié par Strasburger et Miyake, le phénomène se complique de la formation d'une chaine de chromosomes. Après la segmentation, les chromosomes simples de chaque couple, s'épais- sissantelseraccourcissant, s'écarlent l’un de l'autre: ils restent adhérents par l'une de leurs extrémités et unissent leurs extrémités libres aux extrémités libres des aulres couples; ainsi se produit l'appa- rence d'une chaine de chromosomes (fig. 4). A la suile d’un nouveau raccourcissement, la chaîne se disloque en couples de chromosomes isolés (fig. 3). Cette dislocation coïncide avec l'apparition du fuseau et la disparition de la membrane nucléaire (fig. 6). Quel rôle jouent les nucléoles dans la karyoki- nèse? Strasburger', Némec* et Grégoire* pensent STRASBURGER: Über Reduktionstheïlung, 4900. NÉMEC: Bot. Centralbl., 1899. % GREGOIRE: La Cellule, 1899. 1 4 qu'ils fournissent les matériaux nécessaires à la formation du fuseau. D'un autre côté, Gardner‘ et Wager* pensent que la substance nucléolaire est consommée par la formalion des chromosomes, et récemment Mano’ a émis la même opinion. Miyake”, Fis. 4. — Cellule-mère pollinique de Galtonia (d'après Strasburger). — Segmentation du filament de chromatine en huit chromosomes doubles. Chaine de chromosomes. se fondant sur ce fait que les nucléoles conser- vent leur grosseur et leur forme pendant la phase de segmentalion et ne disparaissent que peu à peu Fig. 5. k — Cellule-mère pollinique de Galtonia (d’après Strasbuiger). — Les chromosomes bivalents sont complè- 4 tement séparés. - à mesure que la formation du fuseau progresse, se rallie à la première hypothèse. Quand le fuseau, d'abord multipolaire, puis bipo- Garorer : Publ. of the Univ. of Pensyl., 1901. Wace: Ann. of. Bat., 1904. Mao: La Cellule, 1904. 3 Mivake: Pringsheims Jahrb., 1905. æ à = F. PÉCHOUTRE — REVUE ANNUELIE DE BOTANIQUE 237 laire, est constilué, les doubles chromosomes atta- chés aux fils du fuseau s’ordonnent pour former la plaque nucléaire (fig. 7). La numération des chromo- Fig. 6. — Cellule-mère pollinique de Galtonia (d'après Strasburger). — Formation du fuseau. somes bivalents est alors facile : il y en a huit chez le Gallonia, six gros et deux petits, etils présentent au début les formes les plus variées : ellipses ouvertes Fig. 1. Strasburger). — transversale des chromosomes bivalents au moment de la première mitose de maturation. — Cellule-mère pollinique de Galtonia (d'après Division bhétérotypique ou division ou fermées,anneaux, etc. Les chromosomes simples de chaque couple commencent alors à s’isoler, sans doute sous l'influence de la contraction des fils du fuseau auxquels ils sont attachés, et, quand la sépa- ralion est complète, chacun d'eux, suivant une marche inverse, se rend au pôle correspondant. Du- 238 F. PÉCHOUTRE — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE rant ce trajet, chaque chromosome simple subit une division longitudinale qui lui donne l'aspect d’un V; celle division longitudinale n'est que laréapparition du clivage précoce qu'avait présenté le filament de spirème. linine au stade du Dans le Galtonia, Fig. 8. Cellule-mere pollinique de Galltonia (d'après Strasburger). — Dédoublement longiludinal des chromo- somes ‘simples séparés par la division hétérotypique. l'union des deux branches des chromosomes simples est si intime qu'ils ne laissent voir leur double origine qu’au voisinage des pôles (fig. 8). Dèsleur arrivée aux pôles, les chromosomes-filles Fig. 9. — Schéma de lévolulien des chromosomes pendant les divisions hétérotypique et homotypique (d'après Strasburger). se rapprochent et forment les noyaux-filles autour desquels se constitue une membrane nucléaire. Se confondent-ils ou non en un filament continu ? La question est difficile à résoudre. Strasburger, Mottier, Schniewind-Thies penchent pour la pre- mière hypothèse; Grégoire et Wygaerts, Mivakes pour la seconde. Quoi qu'il en soit, les chromo- somes semblent conserver leur individualité et les noyaux-filles ne traversent jamais une phase dé repos complet. Ils entrent peu à peu dans la prG phase de la seconde division, el les couples de chro mosomes-filles deviennent visibles. Le fuseau, mul tipolaire au début, devient ensuite bipolaire ; les chromosomes- AE attachés aux fils de ce second fuseau se disposent en plaque nucléaire. La sépa* ration des deux moitiés de chaque chromosome fille se fait conformément aux procédés décrits par Strasburger, Guignard, Grégoire et Mottier. En résumé, les chromosomes hétérotypiques sont doubles, bivalents, et chacun des deux chromo: somes univalents qui les constituent est lui-même formé de deux moitiés longitudinales représentant l'une la chromatine paternelle et l’autre la chroma tine maternelle accouplées pendant le stade sy- napsis. La première division ou division hétéroty pique est une division transversale et, par consé quent, réductionnelle. La seconde division ou divi sion homotypique est une division longitudinale et par conséquent équationnelle. Le schéma ci-contre (fig. 9) permet de suivre la suecession des phéno: mènes dans les cellules-mères polliniques du Ga lonia. II. — PARTHÉNOGÉNÈSE OÙ APoGaMIE ? Parmi les Phanérogames, les cas aujourd'hui connus de parthénogénèse vraie, c'est-à-dire ceux où l'embryon provient d’une facon certaine de I cellule-œuf non fécondée, sont assez nombreux Ils ont été déjà décrits dans cette Revue et il suffit de les rappeler: Anfennaria alpina (Juel), Alehe milla (Murbeck), T'halictrum purpurascens (Over- ton), Taraxacum (Raunkiaer), Hierscium (Osten= feld), Wilstræmia indica (Winkler). A ces cas, où la parthénogénèse a été dûment constatée, s'en ajoutent d’autres, où elle est très probable: Aïe hirla(Treub), Thalictrum Fendleri (Day), Æuphor= bia dulcis (Hegelmaier) et Concombres (Kirchner): Chezles Gunnera, étudiés par Schnegg, elle est vrai semblable, bien qu'elle n'ait pas été établie : e parait douteuse chez le Gnetum, étudié par Lotsy. Strasburger, reprenant sur les Alchémilles le travail très remarquable de Murbeck, se propose de rechercher si, dans les phénomènes en ques tion, on se trouve bien en présence d’une véritable parthénogénèse. Qu'est-ce donc que la parthéno= génèse vraie ? C'est le développement sans fécon= dation, par conséquent sans addition des chromo- somes d’un noyau mâle, d'un œuf véritable pré sentant le nombre réduit de chromosomes. Une. parthénogénèse très particulière, mais très réelle, F. PÉCHOUTRE — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 23 est celle que l'on obtient dans les expériences de | faire à propos des cellules du nucelle se trans- mérogonie, où un fragment d'œuf énucléé el as- socié à un noyau spermatique, réduit par suite aux chromosomes de ce dernier, peut cependant ébau- cher son développement. Le développement reste encore parthénogénélique si un œuf non fécondé double, gràce à son propre pouvoir, le nombre deses chromosomes par une division longiludinale et rassemble ensuite en un noyau unique les pro- duits de cette division ; car, dans ce cas encore, l'œuf s'est développé avec son nombre réduit de chromosomes. Si, dans la fécondation, le phénomène capital réside dans la fusion des chro- mosomes paternels etmaternels, d'autres influences sont nécessaires pour provoquer le développement du germe. Ces influences peuvent n'intervenir qu'à titre de stimulants ; elles peuvent aussi provoquer le développement d'un œuf non fécondé, en d'au- tres termes, produire une vérilable parthénogénèse. Ainsi, pour qu'il y ait parthénogénèse vraie, il faut que la formation de la cellule-œuf ait été pré- cédée d’une réduction chromatique. Dans les plan- les à générations alternantes, ces œufs véritables sont le produit d'une génération nouvelle, du gamé- Lophyte. Chez les Alchémilles et aussi, sans doute, chez les autres Angiospermes réputées parthéno- généliques, il ne s'agit que d'organes .semblables à des œufs, produits non par un gamétophyte de nouvelle formation, mais par un sporophyte at- lardé. En effet, quand on suit le développement des Alchémilles parthénogénétiques, on constate qu'une ou plusieurs cellules-mères primordiales du sac embryonnaire se transforment normalement en cellules-mères. Le noyau de ces cellules-mères passe par les premières phases de la division hété- rotypique jusqu'au stade synapsis. Là, la cellule- mère change l'orientation de son développement et devient végétative ; au sortir du slade synapsis, le noyau subit une division typique sans présenter de réduction. Les produits ainsi nés d'une cellule- mère primordiale n'ont rien à voir avec une ori- gine sexuelle. Ils ne peuvent être considérés comme le début d'une nouvelle génération; ils ne représentent que les cellules végétatives du parent. Le développement est apogamique et non parthé- nogénélique. 11 n’en reste pas moins très remarquable que les influences qui président à la formation de l'ovule provoquent ici la formation d'organes semblables, en apparence, à un sac embryonnaire et à son con- tenu,comme, ailleurs, elles provoquent l’envahisse- ment du sac embryonnaire par des cellules du nu- celle qui deviennent des embryons. Mais on ne peut pas plus parler de parthénogénèse dans le développement des Alchémilles qu'on ne peut le formant en embryons. IT. — Le Cyrisus ADAMI, HYBRIDE SEXUEL. On sait que l’on désigne sous le nom d’hybrides de greffe ou d'hybrides asexuels des produits de croisement fort singuliers et fort rares, qui auraient été obtenus par simple greffage, en dehors de toute intervention sexuelle. Niée par les uns, qui n'y voient qu'une hybridation sexueile, accep- tée par les autres, l'existence des hybrides de greffe, si elle était confirmée, serait la plus ferme démonstration de l'influence profonde que le porte- grefle peut exercer sur le greffon. Les études récentes de Strasburger ‘ sur le Gytisus Adami ne sont pas favorables à cette dernière hypothèse. Le Cytisus Adami est, en effet, le plus célèbre parmiles hybrides de greffe, et son histoire ou peut- être sa légende mérite d'être rappelée. Ses deux parents, le Cytisus laburnum et le Cytisus purpu- reus, ont des caractères assez tranchés : le Cytisus laburnum est un arbre assez fort, à fleurs jaunes disposées en longues grappes pendantes; le Cytisus purpureus est un arbrisseau plus faible à fleurs rouges. On raconte qu'en 1830, un jardinier du nom d'Adam greffa le Cytise pourpre sur le Cytisus laburnum. La première année, le bourgeon bouda; il donna ensuite plusieurs rameaux, dont le plus vigoureux, vendu par Adam, avant sa floraison, comme variété de Cytise pourpre, devint l’origine du fameux Cytise d'Adam. La nouvelle plante rap- pelle le Cytisus laburnum: elle est un peu plus faible, ses folioles sont plus foncées et ses grappes moins fournies, mais les fleurs sont panachées de jaune et de rouge el stériles. Au bout d'un temps plus ou moins long, l'arbre pousse des rameaux vigoureux qui, par leurs caractères et notamment par leurs folioles, leurs fleurs et leur fertilité, res- semblent absolument à des rameaux de Cylisus laburnum. Dans le cours des années, la proportion des deux sortes de rameaux change assez souvent; tantôt les rameaux de /4burnum V'emportent et tantôt les rameaux d'Adami. Lorsque l'arbre est ägé, il pousse enfin une troisième sorte de branches, qui ressemblent étroitement à des branches de Cytise pourpre par leurs folioles plus petites et leurs fleurs rouges. Dans quelques cas, les rameaux de Cytise pourpre précèdent lesrameaux de /aburnuni. Comment interpréter cette apparition de trois sortes de rameaux sur un même individu? Il est incontestable que le Cytisus Adami est un hybride des deux autres espèces, et, si l’on s'en tient aux commémoratifs, que c’est un hybride né par voie 1 E. SrRASBURGER : Pringsh. Jahrh., 1905. végétative, un hybride de greffe. Sile Cytisus Adami | est né d'un croisement sexuel passé inaperçu et qui aurail accidentellement réussi, il faut reconnaitre que cet hybride sexuel présente des caractères que l'on ne trouve point chez les autres hybrides sexuels. On sait, en effet, que les hybrides sexuels entre espèces très différentes ressemblent à l'un ou l’autre deleurs parents et sont stériles par leurs étamines; chez le Cytisus Adami, au contraire, l'hybride rappelle ses deux parents et la stérilité est due à l'avortement des ovules. Pour ces raisons, la majorilé des botanistes admet, à l'heure actuelle, que le Cylise d'Adam doit être vraiment un hybride de greffe. En 18824, Strasburger ‘avait essayé d'expliquer les caraclères exceptionnels du Cytise d'Adam par une conjugaison des cellules végétatives au niveau du cal; là des cellules cambiales des deux parents se seraient ouvertes l’une dans l’autre etauraient con- fondu leurs proloplasmus et leurs noyaux, et Weiss- mann*, en 1892, adoptant l’explicalion de Stras- burger, faisait remarquer qu'on pouvait la vérifier en étudiant le nombre des chromosomes dans les trois formes. C'est ce travail que vient d'entre- prendre Strasburger”*. Quelles apparences doit, en effet, révéler l'étude histologique du Cytisus A dami si, d'après l'opinion réguanle, cette plante doit être considérée comme un hybride de greffe? Dans le cal qui, d’après les données du jardinier Adam, donne naissance à la pousse hybride, une cellule au moins de Cylise pourpre s'est confondue avec une cellule de Cytisus laburnun, les noyaux pouvant rester séparés ou se fusionner dans le symplaste. Dans le premier cas, la descendance du symplastesera binucléée, et, dans le second, uninucléée avec les noyaux plus gros que ceux des deux parents. Peut-on penser qu'à la suite de la fusion des noyaux, les contenus nucléaires se soient condensés et aient diminué leur masse”? S'il n'y a que condensation, il sera facile de la dévoiler au moment de la karyokinèse et de comparer le nombre de chromosomes de l'hybride à ceux des parents. D'un autre côté, il est d'autant moins admis-ible de croire à une disparition d'une parie de la substance nucléaire que l'hybride mani- feste les qualilé des deux parents. L'étude du méristème terminal du Cytisus À dami permet donc de prévoir ou des cellules binu- cléées, ou des cellules uninucléées, ou encore des porlions de lissu avec cellules pourvues de deux noyaux et d'autres avec des cellules à un seul noyau. Dans ie cas des cellules uninucléées, les noyaux de Cytisus Adami doivent être plus gros 1 STRASBURGER: Archiv 1. mikr, Anal., AS84. 2 WEissmaNN: Æssai sur l'hérédilé, 1892, ? STRASBURGER : Prinysheim Jahrbucher, 1905. F. PÉCHOUTRE — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE que ceux de Cytisus laburnum et de Cytisus pur=® pureus, où au moins doivent posséder un nombre: de chromosomes qui corresponde à la somme des chromosomes de Cytisus laburnum et de Cytisus” purpureus. L'observation a montré à Strasburger que le: sommet végétatif de Cytisus Adami est formé exclusivement de cellules uninucléées et que ces cellules ne présentent ni différences entre elles, ni rien d'anormal dans leur aspect. La grosseur moyenne des cellules et des noyaux est sensible- ment la même dans les sommets végétatifs des trois sortes de rameaux; les contenus nucléaires. peu abondants pour un tissu embryonnaire, ne diffèrent pas davantage. La grosseur des nucléoles. est considérable ; et quelques cellules présentaient deux nucléoles. Mais, comme ces cellules étaient rares et isolées, on ne pouvait penser à des géné- rations de cellules qui se seraient transmis deux nucléoles. Les figures karyokinétiques, qui se res- semblent dans les trois plantes, sont favorables à l'examen. Zôrnig, qui a étudié dans lelaboratoire de- Slrasburger les noyaux sexuels des Légumineuses,. n'ya trouvé que six doubles chromosomes, de sorte- qu'on pouvait en prévoir douze dans les noyaux végélatifs de Cytisus laburnum et de Cytisus pur- pureus. Mais leur nombre s'est montré à Stras- burger beaucoup plus élevé: quarante-huit dans. les deux parents et quaranle-huit aussi dans le- Cytisus Adami. Ainsi l'étude histologique du sommet végélatif du Cytisus Adami est contraire à l'hypothèse que cette plante soit un hybride de greffe ; ses figures karyo- kinétiques rendent vraisemblable que c'est un. hybride sexuel. Comument expliquer que, contrairement à la règle. générale, cet hybride forme un pollen normal, caractérisé par une réduction chromalique, tandis qu'il ne peut édifier ses ovules, comme l'ont montré: Caspary', Darwin”, Guignard* et récemment Tis- chler*. Dans des cas rares, l’ovule peut poursuivre son développement jusqu’à la formation du sac embyronnuire et présenter la réduction chromati— que ; mais il périt ensuite. L'argument relatif à la formation normale de pollen chez le Cytisus Adawi a d'autant plus de valeur que d’autres hybrides sexuels d'espèces de Cytises, les C. purpureo-elongalus et C. alpino aburnum, se conforment à la règle générale et présentent un pollen défectueux à côlé d'ovules. normaux. C'est là la raison qui parait avoir déter=- 1 Caspary : Verhandi. d. naturw. Ges. d. Preuss. Rhein=— lande u. Westlalen in Bonn, 1858 et 1859. ? Darwin: Variations des animaux et des plantes domesz tiques. 3 Guicnaro: Bull. Soc. Bot. de Lyon, 1887. 4 Tiscucer: Ber. d. deutsch. Bot. Gesellsch., 4908: | FAQ F. PÉCHOUTRE — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 241 miné Guignard à considérer la plante comme s'écar- tant des hybrides sexuels. Mais, depuis celte époque, Tischler a pu montrer que, chez des hy- : brides neltement sexuels, le Ribes Gordouianum et le Syringa la formation des ovules rencontre les mêmes empêchements que dans le Cytisus Adami, qui cesse d'être ainsi un cas isolé. L'avortement des ovules comporte, dans le cas actuel, une explication particulière. Il n’est pas douteux que la fertilité d’un hybride se lie à la réduction chromalique et que cette dernière se présente avec les mêmes caraclères dans les cellules mâles et femelles. Si un hybride forme un pollen normal, il doit pouvoir former des ovules normaux, et réciproquement. S'il n'en est pas ainsi, c'est que, dans l'un ou l'autre cas, l’évolution se heurte à des empêchements secondaires. Et de ce qu'un hybride manque de pollen normal, landis que les ovules sont normaux, on ne peut conclure qu'une chose, c'est que la formation du pollen se heurte plus souvent à des empêchements secon- daires. Le Cytisus Adami se comporte d'une manière inverse, et l'histologie en donne une raison suffisante. Les grains de pollen des C. laburnum et purpureus correspondent si étroitement dans leur forme et dans leur grosseur qu'on com- prendrait difficilement un empêchement à la forma- tion normale du pollen chez l'hybride. Il en est autrement de l'ovule, qui, dans le €. laburnum, est beaucoup plus gros que dans le C. purpureus, dans la proportion de huit à cinq. Il s'ensuit que le développement de lovule se poursuit diflicile- ment. Le nucelle du C. Adami à manifestemeni la tendance à prendre la grosseur du C. laburnunn, tandis que son légument ressemble à celui du C. purpureus. Ainsi développé dans un espace trop étroit, le nucelle de l’hybride fait saillie hors du micropyle. Le développement normal de l’ovule est empêche, bien que la réduction chromatique puisse encore se produire. Il reste toujours à expliquer la manière singu- lière dout se comportent les caractères parentaux chez cet hybride el comment les supports hérédi- taires de ces caractères semblent tantôt s'unir pour donner un rameau de (. Adami et Lantôt se disjoin- dre pour donner ur rameau de €. lburnum où de C. purpureus. L'étude des sommets végélalifs ne donne aucune indication à cet égard. Une seule hy- pothèse reste plausible : c'est que, dans les noyaux de Cytisus Adami, les chromosomes des deux pa- rents se font équilibre. Sous des influences incon- nues, cet équilibre peut être rompu soit en faveur du C. laburnum, soit en faveur du C. purpureus. {y aurait là quelque chose de comparable à ce qu'on observe chez ces plantes monoïques ou polygames qui, sur le même individu, à côté des fleurs mäles chinensis, se et des fleurs femelles, peuvent porter aussi, suivant les circonstances, des fleurs hermaphrodites. Pour contrôler le nombre de chromosomes trouvé dans le méristème terminal, Strasburger a procédé à des numéralions de chromosomes dans les cel- lules sexuelles des trois formes, et partout il a trouvé vingt-qualre couples de chromosomes, c'est- à-dire la moitié du nombre des chromosomes somatiques. Hugo de Vries rappelle, dans la seconde partie de son ouvrage sur la théorie de la mutalion, que cette qualité d'hybride de greffe attribuée au Cy- tisus Adami fut mise en avant pour la première fois par Caspary, en 1856, et que le jardinier Adam l'accepta, mais n'en fut pas le propagateur. Les contemporains d'Adam n’y croyaient pas, et l’un d'eux, qui connaissait l'arbre sur lequel Adam avait pris le greffon, affirmait que cet arbre avail ious les caractères du C. Adami. Hugo de Vries croit done qu'il est plus naturel d'admettre que le C. Adami est un hybride sexuel greffé ensuite sur le C. laburnum. [V. — RECHERCIES EXPÉRIMENTALES SUR L'ORIGINE DÉS ESPÈCES DANS LE RÈGNE VÉGÉTAL. Si la théorie de la descendance fondée par Lamarck et Darwin ne rencontre guère plus au- jourd'hui de contradicteurs, il n'en est pas de même de l'hypothèse relative à la manière dont s'est eflectuée cette descendance, c'est-à-dire au mécanisme qui préside à la formation des espèces, Les deux questions sont, en effet, d'ordre bien différent : la théorie de la descendance est une œuvre de documentation à laquelle l’Analomie comparée, l'Embryogénie et la Paléontologie ont apporté en commun un appui inébranlable; la formation d'une espèce nouvelle est un phénomène physiologique, dont la connaissance sera impar- faite tant que l'expérimentation ne s'en sera pas rendue maitresse. Il est bien évident que l'expérimentation ne saurait alteindre les grands rameaux de l'arbre généalogique, classes, ordres, familles, genres et même bonnes espèces, dont le développement se perd dans la nuit des Lemps et que l'homme n'a jamais pu prendre sur le fait. Il n'en est peut-être pas de mème des derniers ramuscules de l'arbre, mauvaises espèces, variétés, races où unités systémaliques d'ordre plus inférieur encore, ‘et il n’est pas improbable que quelques-unes de ces ultimes divisions soient actuellement en voie de formation. Si le chercheur les découvre et si leur production est accessible à l'expérience, la formation de petites ou de minuscules espèces de- vient ainsi uu problème concret dont la solution, est seule capable de substituer à la spéculation des faits posilifs et d'éclairer, par analogie, la forma- tion des grandes divisions systématiques, car il n'y à pas de distinction tranchée entre les divers groupes de la hiérarchie systématique. L'on ne saurait oublier, d’ailleurs, que les grands rameaux généalogiques, élant le produit d'une évolution de longue durée, ont pu ètre soumis à des influences qui n'existent plus aujourd'hui ou qui, si elles exisient encore, agissent si lentement qu'elles dé- passent les limites d'une expérience bornée. Darwin, impressionné surtout par les résultats de la sélection artificielle, grâce à laquelle l'homme peut, pour ainsi dire, choisir, entre les variations des animaux et des plantes domestiques, celles quil désire développer, avait attribué à la sélection naturelle le rôle prépondérant dans la formation des espèces. De même que l'homme, dans la cul- ture ou l'élevage, ne conserve que les variétés qui lui semblent les meilleures, de même la sélection naturelle, grâce à la lutte pour l'existence, ne laisse survivre que les plus aptes. Quelque plausible que paraisse cette hypothèse, elle est loin d'avoir en- trainé toutes les convictions. Parmi les critiques les plus sévères qui lui aient été adressées, il faut citer celle de Hugo de Vries', qui, dans une œuvre considérable qu'il intilule « Théorie de la muta- tion », combat avec une grande rigueur les fonde- ments de la théorie de la sélection, et où il s'élève avec force contre l'affirmation des évolulionnistes qui veulent voir dans la sélection une force créa- trice. La variation, sans laquelle on ne saurait com- prendre la formation des espèces, revêt au moins deux formes que Darwin avait formellement dis- tinguées, l’une très commune, la variation indivi- duelle, l'autre très rare, la variation spontanée. Sur laquelle de ces varialions porte la sélection? Dans ses premiers ouvrages, Darwin avait donné la préférence à la variation spontanée; mais, plus tard, sous l'influence de son entourage, il parut se rallier à la varialion individuelle. Toutefois, il n'a jamais exprimé, d'une manière définitive, sa ma- nière de voir. C'est Wallace, le co-fondateur du darwinisme, qui affirma le premier que les espèces sont le produit de la sélection des variations indi- viduelles. Pour lui, les animaux et les plantes varient perpéluellement dans les conditions re- quises pour la formalion de nouvelles formes spé- cifiques. variations spontanées sont sans influence sur Ja descendance. Seules, les variations individuelles, effectuées lentement et accumulées par la sélection, sont importantes. Les * Huco 1901-1903. DE VRies : Die Mutationsthcorie. 2 vol. Leipzig, F. PÉCHOUTRE -— REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE gueur de la manière suivante: Ces conclusions sont en désaccord avec 1 progrès de nos connaissances sur les varialions individuelles. Ces variations obéissent à la loi d Quételet; grâce aux travaux de Galton, de Weldon, de Bateson, de Duncker, etc., cette loi a fait entrer les investigations biologiques dans une nouvell phase: l'étude statistique de la variation et de l'héré dité. Les résultats de ces recherches montrent que les variations individuelles, ou communes, ou fluc- tuantes, ou graduelles, ou continues, se groupent autour d'une valeur, moyenne, de part et d'autre de laquelle la fréquence des variations décroit mesure que leur valeur s’accroit. Si l'on recueille une longue série d'observations mesurables et si Mm. 8 ts) 10 11 Tes ENTER BMET2N 2510806703 TN Fig. 10. — Courbe des variations des longueurs de 448 graines de haricot commun. l'on trace la courbe des variations, cette courbe coïncide avec celle de la probabilité de l'erreur. Prenons un exemple. Les graines du haricob commun varient en longueur de huit à seize milli= mètres. Dans un lot de 448 haricots, les nombres des graines se trouvent répartis d'après leur lon- LONGUEUR NOMBRE LONGUEUR NOMBRE en de en de mullimètres graines millimètres graines | S 1 13 106 9 2 14 33 10 23 15 ‘ 11 108 16 1 ; 12 167 U La courbe de ces variations est facile à con- struire : on prend comme abscisses les longueurs" des graines el comme ordonnées des longueurs. proportionnelles aux nombres des graines qui correspondent à chacune des tailles. En joignant | F. PÉCHOUTRE — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE PE 243 Jes extrémités des ordonnées, on obtient une courbe symétrique correspondant au développement d'un binome lfig. 10). Quelle action la sélection artificielle exerce-t-elle sur les variations individuelles ainsi comprises el quels résultats obtient-on quand on leur applique la méthode statistique? Si l'on choisit pour la reproduction des individus à caractères extrêmes (graines très longues ou graines très courtes, dans le cas de notre exemple), on obtient le plus souvent une descendance variée, dont la manière d'être se traduit par une courbe analogue à celle de la géné- ration précédente. Toutefois, les deux courbes ne se correspondent pas; le maximum de la courbe de deuxième génération, c'est-à-dire la valeur moyenne, se trouve déplacé vers le côté occupé par les individus reproducteurs choisis, et la valeur de ce maximum n'est guère inférieure à la longueur des graines choisies. Si l'on prend encore comme reproducteurs les individus extrêmes du même côté de la courbe, on observe un nouveau déplacement du maximum dans le même sens ; mais la valeur extrème que représente l'individu choisi comme reproducteur n'est pas atteinte; le progrès est moindre que la première fois. En continuant le processus, on obtient de nouveaux déplacements de la courbe, mais les progrès deviennent de plus en plus pelits jusqu'à ce qu'enfin le résultat de la sélection soit pratiquement nul. Le maïs fournit une bonne illustration de celte loi. Dans un épi de maïs, les grains forment des rangées longitudinales dont le nombre varie. Dans une race donnée, le nombre des rangées peut osciller, par exemple, entre 8 et 20; on en trouve le plus souvent /2 et ensuite 14; les épis avec 10 et 16 rangées sont rares, el tout à fait rares les épis avec 8 et 20. Que l'on sème les grains d'un épi à 16 rangées, c’est-à-dire d'un épi possédant un nombre de rangées plus élevé que la moyenne, les plantes nées de ces grains présenteront des épis dont les rangées seront comprises entre les nom- bres 8 et 22; l'on trouvera le plus fréquemment 14 et 16 rangées, tandis que 22 et 18 seront rares, 40 et 20 très rares, 8 et 22 exceptionnels. Conti- nuons la sélection et choisissons un épi à 20 ran- gées ; 16 et 18 rangées représentent, dans la des- cendance, les valeurs les plus fréquentes. Par la sélection des épis à rangées de plus en plus nombreuses que la moyenne, cette valeur moyenne a donc été portée de 12 à 14 d’abord et de 16 à 18 ensuite. Dans les générations suivantes, on pourra encore obtenir quelques progrès, mais la valeur moyenne ne dépassera pas 18. Un résultat inverse aurait été obtenu si l'on avait opéré avec des épis à nombre de rangées inférieur à la moyenne. Si la sélection cesse, la valeur moyenne revient peu à peu à sa valeur primitive et l'on perd le béné- fice acquis ; et, même si l’on continue la sélection lorsque le perfectionnement n'augmente plus, on n'obtient qu'un état slalionnaire. La sélection naturelle, grâce à la durée de son action, peut, semble-t-il, produire un résultat durable. Comme, d’un côté, l'expérience démontre que le perfectionnement possible est obtenu très rapidement et qu'il devient ensuite insensible, comme, d'un autre côté, la sélection naturelle opère dans des condilions moins favorables que la sélec- tion artificielle, on peut en conclure que la sélection naturelle produit au plus autant que la sélection artificielle, c'est-à-dire très peu. L'hypothèse que la longue durée pendant laquelle agit la sélection naturelle pourrait fixer héréditairement les modi- fications obtenues échappe à lout contrôle. Ainsi il est impossible de démontrer que la sélec- tion naturelle, opérant sur les variations indivi- duelles, ait pu faire naître un caractère nouveau et le rendre héréditaire. Bateson a élevé une autre critique contre la théorie de Darwin. D'après lui, l'hypothèse de la sélection doitexpliquer non seulement les relations des organismes, mais aussi leur discontinuité. Les espèces, telles qu'elles existent aujourd'hui, sont séparées nettement les unes des autres, et cette grave objection à la théorie de la varialion gra- duelle et continue n'est pas renversée par les nom- breuses formes intermédiaires qui ont élé décou- vertes. Ces formes intermédiaires se sont montrées dans beaucoup de cas comme des unités nettement définies et constantes, qui n'indiquent point une origine continue. D'un autre côté, la théorie de la sélection n’explique pas les variations sans utilité, qui souvent apparaissent comme des caractères spécifiques. Et Bateson conclut : « Le fait de la varialion suggère en définitive que la discontinuité des espèces résulte de la discontinuilé de la varia- tion ». La variation spontanée est celle dans laquelle les changements ne sont ni graduels ni continus, mais soudains et immédiats. À cette catégorie appar- tiennent ces variations dans lesquelles certains bourgeons d’un individu donnent naissance à une branche différente des autres branches. Un autre groupe comprend les variations singulières (single variations) de Darwin : ce sont des individus soli- taires tout à fait différents de leurs parents, appa- raissant à de rares intervalles et souche de races nouvelles et constantes. Peut-on penser, comme le soutiennent les partisans de la sélection, que les variations spontanées ne diffèrent que par la grandeur des variations individuelles et que la théorie de la mutalion néglige les petites devenant la LE F. PÉCHOUTRE — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE modifications pour ne s'allacher qu'aux grandes? Non, car les différences entre variation duelle et variation spontanée ne sont pas seule- ment quantitatives, elles sont aussi qualilatives ; les modifications spontanées sont souvent plus faibles que les modifications individuelles. Les indivi- nombreuses petiles espèces entre lesquelles à été divisé le Draba Verna diffèrent moins les unes des autres que les variations individuelles dans une même espèce. Le vérilable caractère de la varia- tion spontanée est qu'elle présente d'emblée tout le perfectionnement possible et qu'elle est aussitôt héréditaire. La sélection est inutile ; la nouvelle forme obtenue persisle, même à l'état isolé. La variation individuelle n’est héréditaire qu'à un degré déterminé et faible; la variation singulière est d'abord et complètement héréditaire. C'est, avant lout, le mérite d'un botaniste russe, Korschinsky', d'avoir recueilli dans la liltérature horticole les faits relatifs à l'apparition de nouvelles formes et d'avoir compris leur importance au point de vue du problème de l’origine des espèces. Il se servit pour désigner ces varialions spontanées du nom d'hélérogénèse, déjà employé par Külliker. Ainsi, au siècle passé, le Robinier faux-acacia à produit de nombreuses formes spontanées : une forme sans aiguillon (/. mesmis, 1833), une forme à fleurs roses (/. Decaisner, 1862), une forme à floraison pré-oce et abondante (f. semper florens 1862), une forme à feuilles simples (/{. monophylla. 1855). Et toutes ces formes ont apparu comme des individus isolés au milieu de centaines de rejetons. Le Chelidonium laciniatum, qui se distingue du Chelidonium majus par ses feuilles et ses pétales plus profondément découpés, fut découvert en 1590 dans un lot de Chelidonium majus cultivés dans le jardiu d'un pharmacien de Heidelberg. La nouvelle forme, qui n’a jamais élé rencontrée à l’état sau- vage, s'est perpéluée sans montrer de tendance à faire relour à son parent, le Che'idonium majus. L'Aune glutineux lacinié est, de même, né par une variation soudaine de l’Aune glutineux. Solms-Laubach* a décrit en 1900 un très beau cas de variation spontanée pour le Capsella Bursa- Pastoris. En 1897, on trouva à Landau un unique exemplaire avec fruits ovoïdes bien diflérents des fruils triangulaires ordinaires. Korschinsky a méconnu la constance héréditaire de ces formes spontanées, sans doute parce qu'il ne s’assurait pas que les graines produites par une nouvelle forme élaient nées par auto-fécondalion. C'élaient là des erreurs qu'ilfallaitéviler,etl'œuvre a été reprise par Hugo de Vries avec une méthode 1 Korsceniasxy: Heterogenesis und Evolution, 1901. 2 Guar zu Sozws-Laugacu : Capsella Heeger1. Flora Bot. Zeit... 1900. impeccable etun succès que mentpas encore dimi- nué les criliques de ses adversaires. Reprenant un terme déjà employé par le géologue *cott, Hugo de Vries désigne sous le nom de mutations les varia- tions spontanées, c'est-à-dire les variations sin- gulières de Darwin, l'hétérogenèse de Korschinsky, les variations par bonds, comme on dit quelquefois. Persuadé que la variation individuelle est limitée, que tout le bénéfice de la sélection peut être obtenu rapidement, dans un pelit nombre de générations, qu'il ne peut être conservé que par le processus: ininterrompu de l'élevage, que d'ailleurs il se perd aussi vite qu'il avait été acquis, que par la varia= tion, enfin, la sélection n'a jamais produit l'appari- tion d'un caractère spécifique nouveau, de Vries voit dans la mutalion le facteur essentiel de la for- malion des espèces. Les espèces se forment par mutalion, c'est-à-dire par apparilion soudaine d'un caractère nouveau, fixé dès le début. Il est certain que les idées révolutionnaires de de Vries sur l'origine des espèces ne sauraient êlre admises sans. avoir élé soumises à un contrôle long et rigoureux; mais on ne saurait refuser à ce novateur le grand mérite de s'être abstenu systémaliquement de loute spéculation philosophique pour rester constamment et de la facon la plus brillante dans le domaine expérimental. Le point capital des recherches de de Vries a lrail, en effet, à la production expérimentale des mulalions, Il a publié en 1901-1903 les résultats de ses travaux, qui avaient élé commencés en 1886. Après de longues recherches, H. de Vries trouva un sujet d'études favorable dans une plante origi- naire de l'Amérique septentrionale, l'ŒÆuothera Lamarckiana, qui est cultivée en Europe comme plante d'ornement et que l'on rencontre parfois à l’état sauvage. C'est le plus souvent une plante bisannuelle; la première année, sa lige resle courte et forme une rosette de feuilles appliquées contre le sol ; la seconde année, la tige s'élève à plus d’un mètre de hauteur el porte uue longue grappe de fleurs de grande taille, de couleur jaune clair, qui s'ouvrent le soir. La plante meurt lorsqu'elle à fruclitié. En 1886, de Vries rencontra à Hilversum, près. d'Amsterdam, au milieu de pieds sauvages et nor- maux d'(Ænothera Lamarckiana, deux formes net- tement tranchées et qu'il désigna sous les noms: d'Æ.læviyatael Œ.brevistylis. Cette dernière, élant stérile, ne put être utilisée dans les expériences de: culture. Mais de nombreux semis d'(Æ. Lamare- kiana et d'ŒÆ. lævigata furent réalisés et, parmi les nombreuses plantes ainsi obtenues, plus de 50.000: en 7 ans, 800 furent trouvées frappées de mutalions. Elles représentaient une série de formes nouvelles. qui se distinguaient de la masse des individus d'Œ. Lamarckiana par un ou plusieurs caractères. RE < fée. te. LS F. PÉCHOUTRÉ — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 245 très nets, quelquefois peu apparents; elles n'élaient d'ailleurs pas à l'abri des variations individuelles. Leur descendance se montra dès le début complète- ment constante, si l'on assurait l'aulo-fécondation. Ainsi, dans l’espace de quelques années, une éépêée avait produit un certain nombre de « mu- tants » différents les uns des autres et de la race originelle, que celte race soit représentée par l'Œ. Lamarckiana où PŒ. læviqata. À Ces mutants ne sont point comparibles aux es- pèces linnéenves, aux bonnes esptces; ce sont de petites espèces, des espèces élémentaires, comme les appelle de Vries, c’est-à-dire qu’elles diffèrent les unes des autres par un seul caractère ‘tranché ou par plusieurs caractères peu marqués, et non par plusieurs caractères très nels, comme les bonnes espèces. Ainsi, comme l'avait déjà démontré le botaniste français Jordan, l'espèce n'est qu'un assemblage de formes constantes élroi- tement apparentées, La sélection conserve son pouvoir sur les muta- tions, pouvoir plus puissant que sur les variations, d’abord parce que ces changements sont hérédi- taires d'emblée, et ensuile parce que les mutations offrent d'ordinaire une prise plus forte à la sélec- _ tion. Une objeélion qui à été faite aux mutalion® ‘comme sources de nouvelles espèces réside dans eur rarelé : 1/2°/, dans les recherches de de Vries et quelquelois un seul mulant parmi des milliers id'individus. Mais, d'après la loi de Delbœuf, cette lrarelé n'empêche pas la forme nouvelle de triom- \pher à la longue de la race ancienne, parce que Îes “formes nouvelles sont héréditaires et que, dans la lutte pour l'existence, elles ne sont pas plus défa- “vorisées L'hybridation seule diminue les chances ble survie des mulants. Si, sur 10.000 individus d'une espèce annuelle peuvent croître el qu'il nai-se chaque année 1°/, de mu- Miants, à chances égales dans la lutte pour l'exis- un t:rriloire, tence, il. y a encore, après dix ans, 9.04% individus “de l'espèce primitive, 5.000 après soixante-neuf ans, 3.600 après cent ans, 68 après cinq cents ans. Après neuf cents aus, il m'y aura qu'un seul indi- vidu de la race ancienne contre 9.999 de la nou- elle. Si la nouvelle race est favorisée dans la lutte pour l'existence, le processus sera raccourei. Mais, si l'hybridation intervient, et c'est le cas habiluel, il sera allongé. Ainsi, d’après les recherches de de Vries, la sélection n'a quelque pouvoir sur les variations individuelles qu'à la condition que l'espèce con- Sidérée soit isolée, réduite par la mutation à l'état d'espèce élémentaire. Mais voici que les recherches d'un botaniste danois, Johannsen, si elles se con- firment, viennent enlever aux variations indivi- duelles ce qui leur restait d'importance dans la formation des espèces !. Johannsen, professeur à l'Écolesupérieure d'Agri- culture de Copenhague, a expérimenté sur des plantes quise fécondent elles-mêmes et notamment sur les haricots. Si l’on compare un grand nombre d'individus de même espèce vivant ensemble, la récolle d'un champ, par exemple, toute une « populalion », comme dit Johannsen, on trouve ici aussi des variations individuelles, distribuées sui- vant la loi de Quételet, de part et d'autre d'une valeur moyenne qui représente le maximum de fréquence. Ainsi, dans une grande quantité de haricots bruns Princesse, le poids d'une graine oscille entre 2/10 et 8/10 de gramme; la plupart pèsent 4/2 gramme. Sélectionnons pour le semis des graines très grosses, des graines moyennes et des graines très pelites. La comparaison des nouvelles graines obtenues confirme Le résultat prévu; les graines très grosses ont 8onné des haricots plus gros en moyenne et Jës graines très petites des haricots plus petits que les haricots moyens, Mais, si la Sélection est renouvelée dans les mêmes ébnditions, ls poids moyens des graines petites fes ne s'écartent pas d'une manière sensible du poids moyen des graines-filles correspondantes. Ainéi, tout le progrès qu'il était possible d'obtenir par x séléction à été obtenu la première fois; la se- conde séleclion ne donne aucun bénéfice sensible. C'est la un résultat en désaccord avec les résul- lats ordinaires de la sélection appliquée aux varia- tions individuelles et qui ne peut s'expliquer que par l’auto‘fécondation. Johannsen admet qu'une population sé compose, en réalité, d'unit:s cons- tantes, d'ordre plus inférieur encore que les es- pèces élémentaires de de Vries et qu'il noinme des « lignées », lignées qui, exlérieurement, peuvent ne diflérer en rien les unes des autres, parce que la somme des variations individuelles, dans chaque lignée, est plus grande que la différence des lignées. Pour faciliter la démonstration, supposons qu'une populalion de haricots bruns Princesse se compose de onze lignées; à une extrémité, la lignée 4 donne des graines pesant en moyenne 400 milli- grammes, et à l’autre extrémité la lignée 4 donne des graines de 600 milligrammes. Entre ces deux extrêmes s'intercalent les neuf autres lignées, repré- sentées par des graines dont les poids diffèrent de 20 milligrammes en moyenne : lignée 4, 400 milli- grammes ; lignée b, 420 milligrammes ; lignée e, 440 milligrammes, ete. Si les variations, dans chaque lignée, ne dépassaient pas 3 milligrammes ‘ Jonanxsex : Ueber Erblichkeit in Populalionen und in reinen Linien, 1903. au maximum, il serait facile, par de simples pe- Mais, dès que les variations individuelles dépassent 10 milligrammes, et, en fait, elles peuvent atteindre 250 milligrammes en plus ou en moins, la sépara- tion des lignées devient impossible. Les courbes ces lignées deviennent transgressives ; elles em- piètent les unes sur les autres. Qu'a donc produit la première sélection? Aucune action sur les variations individuelles, mais une simple séparation des lignées à grosses, à moyennes et à petites graines, lignées qui existaient déjà, quoique masquées, et qui, dans la récolte, ne se trouvaient mélangées que mécaniquement. Dans le cas de fécondation croisée, les lignées s'hybrident et les individus se trouvent alors mé- langés à la fois mécaniquement et physiologique- ment. D'après les lois de l’hybridation, la descen- dance comprendra encore des individus de race pure e! la sélection sera capable d'en isoler un nombre de plus en plus grand; mais, dès que la sélection cesse, une nouvelle hybridation replonge ces individus dans les valeurs moyennes. Dès qu'une lignée est isolée, est devenue pure, la sé- lection peut rester sans effet. Ainsi s'explique que les progrès obtenus par la sélection deviennent de plus en plus petits. La connaissance des lois de l'hybridation nous aide à comprendre ce processus, mais non à le raccourcir, car les variations indivi- duelles ne permettent pas. de reconnaitre sur un individu les caractères de diverses lignées. Il est d’ailleurs possible que la sélection puisse produire quelque résultat durable, à condition qu'elle s'adresse à une lignée complètement isolée. Ainsi, de même, que de Vries avait été amené à considérer l'espèce comme un assemblage d'espèces élémentaires, de même Johannsen est conduit à dissocier l'espèce élémentaire en une foule de li- gnées héréditairement constantes. Les recherches de Johannsen ont enfin l'avantage de nous faire mieux comprendre les variations individuelles. On sait que ces variations sont, au moins partiellement, provoquées par les influences extérieures : nutrition, température, etc., et l'on pourrait penser que ces influences sont les uni- ques causes de la variation, puisque le progrès réalisé suppose une certaine hérédité de ces varia- lions. Une partie de cette hérédité est due à la l'autre parlie lui échappe et est sans doute due à des races masquées dans les hybrides; les influences extérieures agissent sur les sup- ports héréditaires de ces races, les démasquent et les font apparaître. Comme les influences exté- rieures gravilent autour d’une certaine moyenne, on comprend que les variations individuelles se grou- pent elles-mêmes autour d’une valeur moyenne. mère ; 1 246 F. PÉCHOUTRE — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE i i it faci io ; Ainsi, d'après ces nouvelles recherches, la sélec- sées, d'isoler d'un mélange les différentes lignées. | lion permet, d'un côté, d'obtenir des formes fixées comme mulalions dans des individus isolés, et, d'un autre côté d'isoler, au milieu d'un mélange, des races déjà existantes et héréditaires ; la sélection ne crée rien de nouveau. Il en est de même de l'hybridation, qui ne pro- duit aucun caractère nouveau, mais seulement des combinaisons nouvelles et durables de caractères existant déjà. Les espèces peuvent-elles reconnaître une autre origine el les principes lamarckiens, adaptation au milieu, effets de l'usage et du non-usage, peuvent- ils être considérés comme un facteur de l'appari- tion de formes nouvelles? Personne ne songerait à nier leur influence: la seule question est de savoir si les réactions des organismes répondant aux excitations ambiantes sont autre chose que des varialions individuelles comprises comme précé- demment. Lamarck et son École prétendent que les influencesextérieures qui atteignent l'organisme pendant son développement retenlissent sur le plasma germinalif et y provoquent des change- ments non point quelconques, mais toujours adap- tatifs. L'on connait la réfutation de Weissmann- La question est encore en litige, et il n'entre pas dans le cadre de cet exposé de revenir sur les dis- cussions relatives à l'hérédité des caractères acquis. Ainsi, les variations individuelles, définies par les courbes de Galton, sont très peu ou point héré- ditaires, tandis que les mutations se transmettent intégralement et d'emblée à la descendance. La sélection n'est profitable que si elle s'applique aux ram mi item . mutations. Appliquée aux variations individuelles, elle ne‘fait qu'éliminer; elle ne crée rien de nou- veau. Bien que la mutation soit très rare, elle reste le seul processus de la formation des espèces expé- rimentalement démontré. Le progrès réalisé par ces recherches récentes réside dans ce fait que les variations les plus fréquentes, les variations indi- viduelles, ne sont que peu (de Vries) ou point héré-— ditaires (Johannsen). Nous voyons, de plus, que l'unité systématique la plus inférieure n'est ni l'espèce, même élémentaire, ni l'individu, mais la lignée, c'est-à-dire une portion déterminée de plas- ma germinatif qui revêt, dans un plus ou moins grand nombre d'individus, la même livrée, tant que ce plasma germinatif n'est pas alléré par une mutation ou peut-être par une adaptation. Les influences extérieures ne modifient que la livrée; elles commandent les variations individuelles. V. — LES ORGANES DES SENS DES PLANTES. La sensibilité des plantes est-ellesimplementune sensibilité diffuse, répartie sur tous les points de F. PÉCHOUTRE — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 247 son corps, où bien a-t-elle à son service, comme chez les animaux, des organes spécifiques et loca- lisés, c'est-à-dire de véritables organes sensoriels? Tel est le problème auquel Haberlandt* travaille depuis plusieurs années, et auquel il donne une solution définitive dans la dernière édition de son Traité d'Anatomie physiologique (1905). Les plantes Fig. 41. — Coupe longitudinale de la partie inférieure d'un Brie : £ FI P ; É poil tactile du renflement moteur primaire du Mimosa pudica (d'après Haberlandt). possèdent comme les animaux de véritables orga- | nes des sens, qu'on peut ranger en trois sortes : organes du toucher, organes des sens pour la per- ception de la pesanteur, organes des sens pour la . perceplion de la lumière. Les organes du toucher, c'est-à-dire adaptés à la Ris. 12. — Coupe longitudinale de la partie inférieure d'un poil tactile de Biophytum sensitivum (d'après Haberlandt). perception des excitations mécaniques, se rencon- trent chez la Sensitive et quelques autres plantes douées des mêmes propriétés. Ils consistent en poils tactiles disposés à la surface des renflements moteursetfonctionnantcommele levier d'une presse ! Hagrnraxpr: Sinncsorgane in Pflanzenreich, 1903, à bouchon. A la base du poil, dans l'angle qu'il fait avec la surface du renflement moteur,se trouve un coussinet qui se trouve comprimé quand on abaisse lebras dulevier (fig.11).Chezle Piophytum,une Oxa- lidée asiatique, la disposition est la mème (fig.12). Les poils tactiles de deux plantes carnivores, AZ drovandia et la Dionæa, sont différents. Onsait que, sur chaque moitié de la feuille de /ionæa musci- pula, se dressent trois poils au milieu de nombreuses glandes. Qu'un insecte vienne à frôler un de ces poils sensibles, aussitôt les deux moiliés de la feuille s'appliquent l'une contre l’autre. Chaque poil tactile (fig. 13) présente, au-dessus d'un piédestal (p), un rétrécissement où se trouvent les cellules sensorielles (7), surmontées de cellules ta- Fig. 13. — Coupe longitudinale de la partie inférieure d'un poil tactile de Dionaea muscipula. — p, piédestal; 9, sensorielles; {, cellules tabulaires; e, pointe (d'après Haberlandt). cellules bulaires et d’une pointe (e) d'un millimètre de lon- gueur. La pointe fonctionne comme levier capable de déformer les cellules sensorielles. Les organes de perception de la pesanteur, qui permettent à la plante de s'orienter dans l'espace, consistent en cellules contenant des grains d'amidon. Dans la racine, on 1es rencontre dans la coiffe. Dans les tiges et dans les pétioles, elles for- ment un étui représenté par la couche amylacée (fig. 14). Les organes de perception de la lumière sont représentés chez les plantes inférieures, et notam- ment chez les zoospores, par le point rouge ou point oculaire. Chez les plantes supérieures, c'est la feuille qui représente le maximum de sensibilité à la lumière. La plupart des feuilles vertes s'orien- tent de manière à placer leur face supérieure nor- malement aux rayons incidents. Le péliole et le limbe inlerviennent dans cette orientalion, le pétiole pour amener la feuille dans un plan perpen- diculaire à la lumière incidente, et le limbe pour achever la mise au point. La sensibilité héliotro- pique, d'où résulte le pouvoir d'orientation, n’ap- partient qu'au limbe, et c'est lui qui commande les mouvements du péliole. Mais cette sensibilité appartient-elle à lous les tissus du limbe, ou est- elle localisée dans quelques cellules ou dans quel- ques tissus? D'après Haberlandt, c’est l'épiderme @ Se F Y a dl x Br; Fig. 44. — Eonpe transversale d'un fragment de tige de Linum perenne, couchée horizontalement et carable de se courber qgéotropiquement. — Au-dessous de l'écorce, on voit l’assise amylacée; les grains d'amidon colorés par l'iode, ou statoliles, sont appliqués contre la paroi cellu- laire inférieure (d'après Haberlandt). de la face supérieure qui perçoit la direction de la lumière incidente, et sa struclure est bien adaptée à cette fonction : cellules incolores à mince couche protoplasmique pariétale, à sac cellulaire transpa- rent el à paroi externe bombée, ressemblant, en un mot, à des lentilles plan-convexes. Ces lentilles concentrent les rayons lumineux sur le milieu de la paroi interne, où se trouve le protoplasma sen- sible héliotropiquement. C'est là l’état d'équilibre héliotropique : zone médiane de la paroi inlerne éclairée, zones latérales plus sombres. Dès que la lumière ne tombe plus normalement, l'équilibre est rompu et la feuille excitée tend à le rétablir. 48 F. PÉCHOUTRE — REVUE ANN SET = = UELLE DE BOTANIQUE SET Ainsi l'épiderme de la face supérieure 4e la feuille fonctionne comme un épithélium sensor tel. La sur- face de cet épiderme est comparable à 1 œil à, facelles et les couches plasmiques des parois! internes représentent une rétine au point de vue physiologique. Dans la plupart des plantes, toutes les cellules de l'épiderme supérieur sont sensibes Dans quelques Cas, on peut ohserver une division du travail. Chez une Acanthacée du Pérou, le Fittonia Ver- Fig. 15. — Organe de perception de la lumière de la face supérieure de la feuille de Fittonia Verschafielti. — A, vue de la coupe longitudinale d'un organe; B, vue de face de l'épiderme supérieur (d'après Haberlandt). schafïelli, les cellules épidermiques supérieures, petites, non bombées, forment un réseau dont les mailles sont occupées par de grosses cellules qui font saillie en forme de dômes arrondis (fig. 15). A son sommet, chaque grosse cellule porte une cel- lule plus petite, en forme de lentille bi-convexe à contenu transparent et forlement réfringent. L'expérience montre que la petite cellule fone- tionne comme appareil de réfraction, landis que la grande représente la cellule sensorielle. On ne. peut qu'être frappé de la ressemblance de ces organes avec les ocelles des animaux inférieurs. F. Péchoutre, Professeur au Lycée Louis-le-Grand: AR Le Er fie pm) 4 me ge PATES hé ne à + BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 249 SR Eee he ans | — 4° Sciences mathématiques Joutfret (E.). — Mélanges de Géométrie à quatre dimensions. — 1 vol. gr. in-8° de x1-227 pages avec #9 figures (Prix : 1 fr. 50.) Gauthier-Villars, édi- teur. Paris, 1906. ; — Get ouvrage complète le Traité élémentaire de Géo- métrie à quatre dimensions publié il ÿ à un an par M. Jouffret; il forme, toutefois, un tout indépendant et n'exige du lecteur d'autres connaissances que celles qu'on acquiert dans les cours de Mathématiques spé- “ ciales. Au moment où l'attention est attirée sur la Géométrie à dimensions par d'importantes publi- cations allemandes de M. Schoute (de Groningue) et de M. Segre (de Turin), les deux petits livres de M. Jouffret, écrits dans un style clair et facile, seront sûrement bien - accueillis. “ Les études réunies par M. Jouffret forment quatre + groupes : ; Le premier groupe comprend un aperçu sur Îles “ axiomes, conventions ou définitions de la Géométrie à * quatre dimensions et l'étude d'un mode de figuration simple du système de coordonnées à quatre dimen- sions. Le second groupe concerne l'hexagramme de Pascal et la surface du troisième degré, considérés comme introduction à l'étude de l'hexastigme. n Le troisième groupe est consacré aux hyperqua- … (riques, à leur classification, à leurs propriétés de “ contact; puis aux quartiques, surfaces du quatrième - degré communes à deux hyperquadriques et se proje- “ tant sur notre espace suivant des surfaces du quatrième “ ordre à conique double. Le quatrième groupe est formé par une trentaine de “ pages relatives à la question de la réalité de l'hyper- espace; celte partie du livre intéressera bien des lec- teurs que l'ouvrage lui-même laisserait indifférents; elle sera la pâture de la critique philosophique, ou luême théosophique. En dehors de son intérêt propre, qui ne sera sensible que pour une élite spéciale, ce livre offrira, aux jeunes gens désireux de faire des études géométriques, un “ moyen simple d'initiation à des conceptions qui leur “facilileront l'étude de la Géométrie énumérative et …_ même de l'Analysis situs. A. BOULANGER, E* Professeur-adjoint à la Faculté des Sciences de Lille. “Marchis (L.), Professeur-adjoint de Physique à la “. facullé des Sciences de Bordeaux. — Leçons sur la m2 production et l'utilisation des gaz pauvres. — mn { vol. in-4 autographié de 345 pages. (Prix : 42 fr.) — Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1906. “ En même temps que se multiplient les applications des gaz pauvres, le nombre et la qualité de ceux qui “S'en occupentcroissentets'élèvent:les leçons que publie «M. Marchis ont été professées par lui à la Faculté des Sciences de l'Université de Bordeaux; c’est la première fois qu'un enseignement aussi pratique et aussi indus- “triel est donné dans une chaire de Physique d'une “faculté ofticielle, et nous aimons à croire que cel exemple sera suivi. Les leçons de M. Marchis débutent par une inlro- duction consacrée aux moteurs à gaz ef aux gazogènes : le professeur définit à son auditoire les divers types de “gazogènes et de moteurs, et il fait l'histoire de leur . rapide et grandiose développement. Il énonce l'objet du cours; laissant de côté les considérations sur la théorie des moteurs, il s'attachera surtout à déve- REVUE GÉNÉHALE DES SCIENCES, 1907. BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX lopper « l'étude des modes de construction consacrés par la pratique ». Le chapitre, premier traite des gazogènes : on y étudie tour à tour le gaz à l'air, le gaz à l'eau, les com- bustibles des gazogènes, les gaz mixtes dits pauvres et les conditions de fonctionnement des producteurs, suivant qu'ils sont alimentés d’anthracite, de coke ou de charbons riches en matières volatiles ou en azote. Le chapitre II s'occupe de lutilisation du gaz de hauts-fourneaux et de fours à coke; une large part est faite aux appareils d'épuration des gaz, statiques et dynamiques, destinés à arrêter les poussières et les goudrons. Les grands moteurs à gaz forment la matière du troisième chapitre; le professeur décrit les moteurs à quatre temps de Deutz et de Nuremberg, ceux des Sociétés Cockerill et Cail, puis les machines à deux temps Kærting et von Œchelhäuser. Deux planches et 130 figures dans le texte illustrent ces lecons et éclairent d'une vive lumière les nom- breuses descriptions d'appareils: M. Marchis est remar- quablement documenté, et son exposé très précis el bien méthodique fait ressortir les caractéristiques des divers types considérés. Tous les gazogènes mentionnés n'ont pas eu la même fortune, et il en est parmi eux qui n'ont pas longtemps subi le feu de la pratique; mais une étude qui veut ètre complète échappe rare- ment à cet inconvénient, qui n'en est pas un du reste, attendu que les insueccès ont leur philosophie et leurs enseignements, aussi bien que les succès : ils sont même souvent d'une utilité plus grande à ceux qui savent en profiter. AIMÉ Wirz, Doyen de la Faculté libre des Sciences de Lille. Biorling (Philip R.), /ngénieur Conseil. — British Progress in Pumps aud Pumping Engines. — 1 vol. iu-4° de 92 pages avec nombreuses fiqures. (Prix : 6 fr.) Archibald Constable et C°, éditeurs. London, 1906. Cet ouvrage est le deuxième volume de la collection National Engineering and Trade lectures rassemblée par Ben H. Morgan. On sait que les pompes jouent un rôle très important dans la mécanique pratique : peu d'industries peuvent s'en passer. Mines, blanchisseries, teintureries, papeteries, usines d'alimentation, d'irriga- tion, chaufferies à vapeurs, toutes ont recours à ces engins qui font partie de leur matériel essentiel. La puissance des pompes varie naturellement suivant les applications et d’après les conditions locales, et le choix du système dépend.de l'endroit où l'appareil doit fonc- tionner. S'il s’agit d’un pays dépourvu de ressources, c'est la simplicité qui prime. Là, au contraire, où l'on dispose de facilités suffisantes pour les réparations, inais où le combustible est cher, on recherche avant tout une amélioration du rendement. Si la quantité d'eau à élever est faible, la pompe à main suffit. Pour un débit plus fort, 1l faut employer, pour actionner la pompe, soit la pression de l'eau (roues à aubes, turbines, roues Pelton), soit celle du vent, celle de l'air chaud, du gaz, de Pair comprimé, soit l'électricité et enfin la vapeur. Quant au type même le pompe, on le fait varier suivant les cas et toujours en se basant, sur les considérations suivantes : profon- deur du bassin où l'eau est puisée, hauteur à laquelle l'eau doit ètre élevée, distance qu'elle à à parcourir, nature et état physique de l’eau. Pour ne citer qu'un exemple se rapportant à cette dernière donnée, on comprend qu'avec une eau houeuse el lenant du sable en suspension, la pompe à plongeur est préférable. G** 1© UE [= Celle-ci convient également ponr l'eau acidulée ou sal e, la durée du plongeur étant prolonge par le grais- Sage. Quant aux pompes centrifuges, elles sont indi- quéessurtout pour les faibles hauteurs etles gros débits. La question est, on le voit, fort complexe, «t l'ingé- nieur de toute usine, insu‘fisamment spécialisé à ce point de vue, à grand besoin d'être guidé. C'est là objectif de M. Bjürling qui, sous une forme él'gante et concise, a passé en revue les nombreux systèmes de pompes en les classant d’après les genres de moteurs qui les actionnent. L'auteur a pris soin d'illustrer agréablement toutes ses descriptions : il insiste sur la caracl‘ristique de la construction anglaise qui, loin de sacrilier à la symétrie el à l'extérieur, répartit le me- tal aux endroits ou :l est nécessaire pour garantir toute sécurité à l'engin Une liste des principales fabriques anglaises qui se sont fait une réputation dans la cons- truclion des pompes lermine cet ouvrage, qui se recom- mande par les renseiguements extrêmement pratiques qu'on y trouve. Eure DEMENGE, Ingénieur civil. 2° Sciences physiques Ariès (Lieutenant-colonel). — L’Electricité consi- dérée comme forme de l'Energie : Les Notions fondamentales; le potentiel et la qgnantité d'élec- tricité. — 1 vol. ju-89. (l’rix : 2 fr, 50.) Librairie Scientifique À. Hermann. Paris, 1907. L'opuscule que le Lieutenant-colonel Ariès vient.de faire paraître sous le titre général : « l'Electricité consi- érée comme forme de l'Energie », semble être l'intro- duction à une théorie nouvelle de l'électricité qu'il se proposerait d'édifier sur les deux principes fondamen- taux de la Thermodynamique. En joignant à ces principes, qui s'appliquent à toutes les formes de l'Energie, quelques lois expérimentales nettement formulées sur les phénomènes électriques, l'auteur pense pouvoir donner, par un enchainement logique, tout le développement que comporte sa throrie. Comme l'indique le sous-titre de son opuscule, le but spévial qu'il à poursuivi dans cette première publica- tion est de bien déGnir ces deux facteurs. le potentiel et la quantité d'électricité, qui permettent de mesurer l'énergie électrique. Pour atteindre ce but, il s'inspire des ides qu'il a émises il y a déjà dix ans dans un volume intitulé C:ha- leur et Energie", et il suit la marche qui l'a conduit alors à la définition des deux facteurs de l'énergie calo- rifique, savoir : la température et l'entropie. C'est ainsi qu'il est amené à ceite affirmalion que beaucoup d'élec- triciens n'entendront pas sans surprise et d'après Ia- quelle l'échelle du potentiel électrique aurait son zéro absolu comme la température. La grandeur que l'on connait sous le nom de quantité d'électricité est celle que l'on mesure sur les courants électriques et dont on ne conçoit neltement qu'une seule espèce en lectrodynamique: elle différerait tota ement de la masse positive où négative d'élec- tricité que l'on suppose répandue à la surface des con- dicteurs en Electrostati que. L'auteur se réserve, sans doute, de detinir ultérieurement la masse électrique et d'expliquer par quels liens il Ja ratlache à la quan- tité d'électrici 6, S'il y parvient d'une façon claire et satisfaisante, il portera certainement quelque lumière sur le passage, aujourd'hui si obscur, de l'rlectrosta- tique à l'Electrodynamique. Le Lieutenant colonel Ariès ne manquera pas, d'ail- leurs, de trouver d'autres points obscurs dans la tâche longue et dificile qu'il s'est impos e : la dilatation électrique, la charge résiduelle, la l'orce électromotrice de contact, l'e 'et leltier, l'elTet Thomson, la polarisa- tion... sont des phénomènes que les théories actuelles ont peine à élucider; si la théorie nouvelle de l’électri- DER * Eucyclopedie scientilique des Aide-Mémoire. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX cité, dont l’opuscule actuel n’est que le chapitre initial, en donne des explications rationnelles, comme l’auteur semble le promettre, son livre constituera certaine ment un pas en avant. Tous ceux qui s'intéressent à la science électrique attendront avec impatience cet ouvrage qui, ainsi qué les précédents de M. Ariès, sort des chemins battus. H. LÉANTÉ, Membre de l’Institut. Chambre syndicale des Industries éleetri ques. — Instructions concernant les conditions d'établissement des installations électriques dans l'intérieur des maisons. — 1 brochure in-8° ce 23 payes. (Prix : O0 fr. 75.) Imprimerie Chaix. Paris, 1966. Cette brochure, extraite de la Série de Prix des tra vaux exécutés dans Paris, donne sur les conducteurs, les conditions de pose des lignes, les conditions d'emploi des appareils d'interruption et de sécurité, elc., elc., nombre de renseignements pratiques que l'on aura intérêt à consulter. | Perkin (F. Mollwo). Directeur du Département ehr mique du Borough Polytechnie Institute, à Londres: — Practical Methods of Inorganic Chemistry. 1 vol. in-16 de 156 pages avec ligqures. (Prix : 3 fr. 15.) Archibald Constable et Cie, éditeurs. Londres, 4906: Dans l'éducation des chimistes, on consacre généra= lement un temps très long aux préparations de Chimie organique, tandis que les préparation: de Chimie inor ganique sont plutôt négligées, peut-être parce qu'on estime que les composés inorganiques sont trop faciles à préparer. I en résulte que les éludiants s'intéressent. davantage aux recherches de Chimie organique, et c'est peut-être là, d'après M. F.-M. Perkin, l’une des cause pour lesquelles le champ de la Chimie minérale est aujourd hui un peu délaissé par les chercheurs. L'au te r, pour remédier à cet état de choses, publie un petit manuel pratique de préparations inorganiques destiné à ses élèves, mais qui pourra rendre des ser- vices ailleurs. Toutes les expériences décrites ont ét@ essayées duns son laboratoire et les méthodes indiquées sont celles qui ont donné les meilleurs résultats. volume renferme une centaine de préparations pr cédées d’un certain nombre de recommandations géné rales. 3° Sciences naturelles Fèvre (J.), Professeur à l'Ecole normale d'instit teurs de Dijor, et Hauser (H ), Professeur à lUne versité de Dijon. — Leçons de Géographie (your JES Ecoles Normales primaires et la preparation au bre vet supérieur). — Tome 1 : Gévgraphie générale Amérique, Océanie, Asie, Afrique. — 4 10/. iu-18 de 74% pages avec 211 figures. (Prix eartonné : 4 fr.) F. Alcan, éditeur. Paris, 4907. 3 Nous sommes bien aise de signaler ici cet ouvrage, qui marquera un heureux changement dans l'enseigne ment de la Géographie aux enfants. Ninspirant di l'effort de l'Ecole géographique française, qui, depu trente ou quarante aus, a tendu à mettre en lumie l'interdépendance des phénomènes géographiques; 1 liaisons qui existent eutre la nature du sol, la VÉgé tion et les élablissements huinains, les auteurs ol essayé de faire passer dans l'enseignement primai les résultats des travaux des mailres de la science, ém parliculier de M. \idal de la Blache. IIS ont réussi faire ainsi, de la plus sèche et de la plus fastidieuse des études, la plus philosophique et la plus y vante. Etous vrage renferme une docutuentalion aussi récente que possible : les croquis ont été multipliés, non pour rem= plarer l'atlas, mais pour souligner tel ou tel phénomène particulier. A la lin de chacune des leçons, sont indi es qu's les principaux ouvrages qu'on pourra utilement consulter pour approfondir ses connaissances sur les différents points étudiés au cours du chapitre. , $ è des Ann. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Gatin (C. T.). — Recherches anatomiques et chi- - miques sur la germination des Palmiers. (//e + qu'elle est là figurée en plan (fig. 1), une po-. pulation de 2.120.000 Pari- répartis sur une superfi- siens, SAR Btienr N ER — Fr QAR - o) é ALT cie de 7.802 he LS NS Badr n eu g RS rome enr e tares. Re CRETE > 5 Se Une fois les fortifications dis- parues, l'unité agglomérée s'a- grandira d'elle- méme jusqu'à comprendre la totalité du dé- partement de la Seine, ce dont témoigne déjà la densité de popu- lation, constatée ricaines, ainsi A 5 1 Me LE au delà de la que parlaliberté [£ere.ca É GT. zone militaire des solutions mi Fig. 1. — Carte du département de la Seine montrant les espaces habités extérieure ‘aux ses en œuvre. Ce qui se fait au delà des frontières sur notre continent, comme ce qui se réalise par delà les mers, ne saurait en rien préjuger de ce qui nous attend, en fait de conséquence à metlre en œuvre. Mais, quant à l'esprit même de la conception, il s'y rencontrera évidemment un précieux guide, une orientation qu'on ne laisserait pas de côté sans commettre une erreur. Paris de demain ne devra donc négliger aucune des données qui pourront aider la franchise des solu- tions. En Europe, notamment les villes allemandes, en s’agrandissant, arrivent toutes à comprendre, dans leurs nouveaux espaces, des terriloires ec asi- dérables exempts d'habitations et plantés d'arbres. Mais, en Amérique, le phénomène s'accuse davan- tage, étend ses applications de façon plus considé- et les espaces libres. remparts. En évaluant à 900.000 âmes la population départementale en dehors de l'enceinte actuelle eten faisant intervenir les 2.720.000 habitants de celle-ci,on arriveraitä une estimalion totale de 3.600.000, quantité sensible- ment équivalente, peut-être même supérieure, à celle de New-York. Or, le département de la Seine couvre seulement 47.676 hectares, tandis que le terriloire de New- York, avec l'adjonction de ses parcs ou espaces de toute espèce, en comprend près de 80.000. Si les conditions de santé sont rapportées à la quantité d'air disponible pour chaque habitant, et supposant ce volume atmosphérique en rapport avec la super- ficie du territoire affecté, nous aurons, comme on le voit par les chiffres déjà cités, une proportion de 1à2, c'est-à-dire 1 pour la capitale française de GASTON TRÉLAT — SANTÉ PUBLIQUE ET PARIS DE DEMAIN demain, 2 pour la ville des Etats-Unis. Conditions qu'il faut considérer comme deux fois meilleures à New-York avec ses 79.802 hectares — qu à ce nou- veau Paris comprenant seulement les 47.676 hec- tares du département. En pareil état de choses, il ne semble pas qu'il y ait d'hésilation vis-à-vis d'une solution issue d'un enchainement d'idées étrangères à toule vo- lonté préconçue. Rien n'y montre, que je le sache, aucune fantaisie personnelle; on se trouve conduit à la solution visée comme à une déduétion directe des faits que comporte le temps considéré dans ses généralités mondiales. Elle s'impose done à la diffusion internationale et caractéristique des intel- ligences de nos jours. Ce n’est pas du tout une opi- nion personnelle ; elle-apparaît bien plutôt comme une vérité établie par discipline mentale, que notre temps concourrait à mettre en évidence. D'ail- leurs, elle a pour fondements, indépendamment des faits observés, l'expérience et la science qui interviennent à l'appui de son exposé. Jetons un regard sur la carte’. Elle montre clai- rement le caractère que prendrait le plan de la capitale française par suite d'une situation nou- velle et conséquente de la répartition déjà effectuée des habitants dans la banlieue actuelle. Les mu- railles d'enceinte et les 300 mètres de largeur que mesure la zone militaire donneraient à ces espaces périphériques une importance de territoire condui- sant naturellement l'esprit à les vouloir disposés en jardins agrémentés de plantations. Ces espaces s'accuseraient comme localités reposantes pour les yeux et respecteraient la liberté atmosphérique dont ils assurent déjà les bienfaits aux habitants. Songerait-on jamais à livrer ces Lerrains à la spé- culation? Ce serait s'exposer à une densité regret- table de population, pour aboutir, finalement, à des conditions générales de santé qui seraient in- férieures à celles qu'il est permis de constater aujourd'hui. Car les fortifications et la zone préser- vent déjà leurs espaces d'habitations accumulées: el, comme conséquence, la santé générale en béné- ficie. Il ÿ à donc là un réservoir d'air libre qu'on n'a aucun droit de supprimer. Ce serait aller à l'encontre de l'amélioration sanitaire exigée par l'accroissement de l'aggloméralion — des plus grandes qu'il y ait au monde — et ce serait con- traire à l'esprit judicieux de toute élaboration auto- risée par la science de l'époque. La juxtaposition d'immeubles répétée à profusion, la superposition des élages habités nous ramèneraient aux condi- tions les plus malsaines et les plus redoutables dont : Figure déjà parue dans un précédent Mémoire : Paris de demain et la santé publique. La Revue d'Hygiène et de Police sanitaire en a mis obligeamment le cliché à notre disposition. les villes aient jamais pu témoigner, en suile de pro- cédés d'aménagements aveugles et dangereux dans leur conception. Il faut s’en méfier et savoir y résister. Cela devient un devoir, quand l'intérêt collectif entre en ligne et montre ses nécessités. C'est, du reste, là une manifestation des connais- sances déduites de la période transitoire où nous sommes engagés. De nos jours, des agglomérations, considérables par leur nombre d'habitants, en fourniraient des exemples nombreux : les popu- lations toujours croissantes se développent dans les anciennes cités, dont l'aménagement présentait un caractère particulier qu'on aurait bien dû res- pecter. Au lieu de cela, il se trouve depuis long- temps compromis par un encombrement qui ne cesse de s'accuser aux dépens de la santé des habi- tants, ainsi que des bâtiments devenus malsains par suite d'air et de lumière raréfiés; et la beauté elle-même des ensembles ne subsiste pas après la disparition des dispositifs prévus à la première heure. En effet, les villes, dont le service répon- dait anciennement à des exigences toutes difré- rentes, ne se prêlaient point aux nouvelles solu- tions. De la sorte, comme nous y avons, je crois, déjà fait allusion, le dernier siècle n’a rien fait, à Paris notamment, qui n'ait eu pour conséquence ultime de réduire effectivement la superficie ré- servée à l'habitation de chacun de nous et consé- quemment d’aggraver ses conditions de santé. Que faudrait-il donc pour assurer ce que nous voudrions, ou même ce que tout le monde avec nous voudrait voir réalisé? Ce qui précède a suffisamment établi — et per- sonne n'en doulera — que les communes du dépar- tement sont appelées à faire partie du grand en- semble aggloméré que nous dénommons : Paris de demain. W y aurait conséquemment grande utilité à ce qu'on songeät dès maintenant au service de la santé de ce grand ensemble. Les règlements, dont une nouvelle élaboration comporterait les avis les plus compétents en accord avec la liberté des es- prits, défendraient les collectivités communales contre toute exécution qui serait de nature à com- promettre leur élat sanitaire; elles assureraient les meilleures conditions de salubrité à la totalité de leur territoire. Pour cela, elles devraient donner à leurs voies de communication une largeur consi- dérable par rapport à la hauteur des bâtiments en bordure. Enfin, toutes les mesures seraient à prendre afin de ménager l'aération et l’ensoleille- ment de toutes les parties habitées. Il faudrait même également garantir l’eau, le sol et l’air de toute contaminalion, comme nous en exposions l'urgence en fait de santé publique, dès le début. Maintenant, si nous nous reportons à l'exemple que donnent les États-Unis avec leurs parcs cham- rés he .. GASTON TRÉLAT — SANTÉ PUBLIQUE ET PARIS DE DEMAIN 19 1 O6 pêtres, en dehors et à distance des centres habités, il semble que l'équivalent pourrait facilement se réaliser de soi-même sur les terrains de culture. Leur utilité serait respectée bien entendu; mais peut-être une transformation judicieuse devrait-elle les subordonner à des ensembles de beauté appa- - rente. Ils deviendraient alors des endroits de repos et de loisir, qui se joindraient aux espaces plus spécialement affectés aux jeux des enfants et aux sports des adultes. Et les parcs ainsi disposés se- * raient moins distants du centre habité que dans - la plupart des villes américaines ; ils seraient à portée presque immédiate de l'agglomération définitive que nous voyons déjà sur notre plan. Et même, avec Boston notamment, les États-Unis donneraient déjà l'exemple d’une ville reliée à ses parcs, gräce à leur répartition dans toutes les par- ties habitées que l’ensemble de l'agglomération peut bien comprendre. Enfin, comme nous l'avons déjà observé, le grand contour périphérique serait agrémenté de riches plantations dont la continuité serait éla- borée en vue de joindre l’un à l’autre les deux bois de Boulogne et Vincennes. Toute proportion gar- dée, ce serait en grand comme à Leipzig, dont J'avais récemment le plan sous les yeux : les espaces intercalés entre l'ancienne et la nouvelle ville seraient aménagés en jardins pour assurer pleine santé à la capitale agrandie. Tout répondrait alors aux conditions permettant d'assurer la santé à la vie agglomérée de notre époque. Conditions se résumant : 1° Dans le nombre de plus en plus considérable d'unités ou d'habitants concourant à la concen- tration ; 2° Dans la nécessité de répartir ces populations sur des superficies telles que chaque habitant béné- ficie d'une portion de territoire d’autant plus spa- cieuse que l'agglomération s'est accrue en nombre; 3° Dans la rapidité des transports, à concevoir de telle facon qu'elle pût faire penser à une sup- pression des distances entre les différents points compris dans le territoire aggloméré. Mais, avant loute autre chose, l'aménagement d'habitations rassemblées bien obligé de répondre aux conditions sanitaires qui visent les trois grands facteurs de l’eau, du sol et de l'air, conformément à ce que nous avons déjà dit: 1° Les eaux courantes, comme les eaux souter- raines, devront donc être garanties de toute conta- mination; des précautions ingénieuses les proté- geront toujours des écoulements trop directs, avant l’épuration dûment constatée des eaux usées ou résiduaires ; 2 L'épuralion par le sol des usures de la vie et des résidus industriels ne se fera jamais que dans est la mesure scientifiquement autorisée et expérimen- talement éprouvée ; 3° L'application des mesures prolectrices de la pureté atmosphérique, se généralisant de plus en plus, demanderait à être poursuivie. Il semblerait que l'argumentation poursuivie s'appuie sur un terrain solide-et qu'on ne puisse soulever aucune objection. Pourtant on alléguera peut-être la difficulté de créer un mouvement col- lectif, lorsqu'il s'agit, comme c'est le cas ici, d'avan- tages concernant surtout d’autres-généralions que les nôtres et ne touchant, pour ainsi dire, en rien celles qui engageraient une action présentement. La réponse est facile : Les générations qui succéderont aux nôtres y trouveront certainement un intérêt considérable; ce qui n'empêche que, par le temps qui court, la rapidité des moyens d'exécution et surtout l’exci- tant de pensées et de rivalités, en rapport avec leur extension à la surface entière du globe, ont totalement changé le régime des activités, comme temps réclamé par elles. Il n’y a plus rien qui soit entrepris de nos jours, sans que l’époque con- temporaine soit appelée à en constater les fruits, à en bénéficier, et, par conséquent, à récolter, par le fait, des satisfactions positives, auxquelles se joindrait, en outre, la fierté d'une initiative prise en vue de l'avenir. IV Je ne voudrais pas m'égarer, en faisant de la philosophie. Pourtant la pensée reporte l'esprit vers la réforme d'Auguste Comte, qualifiée de” religieuse. Il entendait, en effet, soumettre à un pouvoir spirituel le service temporel des activités sociales. Et je me demande en ce moment si l'idéal, entrevu comme déduction de la science pour servir de guide aux transformations intéres- sant l'avenir, ne rentrerait pas précisément dans les visions et les préoccupations qui pouvaient agiter le philosophe positiviste. L'objectif d'amélioration collective accuserait, en l'espèce, une source de discipline pour les es- prits. Et l'on est bien forcé de reconnaitre que l'absence transitoire de cette discipline est regret- table, en ce qui touche la hiérarchie des activités. Le spiritualisme du passé s’est toujours attaché à remonter les temps, pour y puiser un élargisse- ment de la volonté du jour. Au contraire, l'idéal autorisé par la science de l'heure présente ouvri- rait un champ tout nouveau d'activités, essentiel- lement vivantes, en accord avec l'intérêt de tous. Et ce serait peut-être là motif à tenir lieu de croyances tendant à disparailre. Cette pensée venant à l'esprit, j'essaie d'en 276 J. DENIKER — LES US, COUTUMES ET SUPERSTITIONS DE L'INDE MÉRIDIONALE transmettre l'écho aussi simplement que l’appari- tion a surgi. En terminant, reportons-nous encore au plan de la nouvelle capitale. Il schématise, par les valeurs respeclives de ses teintes, l'intensité plus ou moins accusée des populations déjà réparties sur les 47.676 hectares de superficie totale que Paris de demain est destiné à comprendre. Des groupe- ments d'habitations d’une densité variée en re- couvrent déjà plus de la moitié, approximativement 26.437 hectares. Dans les intervalles restés libres, on voudrait que les cultures du sol fussent autant que possible comprises dans des territoires dis- posés en pares, afin de mettre à la porlée de tous le charme de verdoyants apaisements, et cela tout en assurant à la santé collective le bénéfice d'une atmosphère non confinée. < Comme on le remarque, ce serait surtout la périphérie départementale, devenant la nouvelle périphérie urbaine, qui se prêterait aux dispositifs de parcs allégués ici. D'autre part, revenant à l’ancienne ville, la zone continuerait à la séparer de l'agglomération qui lui serait extérieure: elle se couvrirait de plantations aménagées en jardins, grand anneau de verdure formant un lien unitaire entre les bois de Boulogne et de Vincennes. Gaston Trélat, Chef d’Atelier, Directeur des Études à l'École Spéciale d'Architecture. LES US, COUTUMES ET SUPERSTITIONS DE L'INDE MÉRIDIONALE D'APRÈS UN LIVRE RÉCENT : Parmi les « superintendants » du Service ethno- | laquelle l’auteur s’abstient de toute énéralisation, P & graphique, établis dans chaque province de l'Inde depuis 1901, M. Thurston est un des plus actifs. Déjà bien avant l'organisation de ce service important, vers 1895, il a commencé à recueillir tout ce qu'il pouvait sur l'anthropologie, l'ethnographie, la sociologie, le folk-lore, les idées et coutumes reli- gieuses, juridiques ou économiques des tribus et peuplades si variées dont se compose la population de la province de Madras. Tous les ans, il publie un fascicule du Bulletin of the Madras Government Museum (dont ilestle directeur), consacré à l'Ethno- graphie et à l'Ethnologie et contenant surtout des articles de lui-même sur les sujets les plus variés relatifs aux populations de l'Inde méridionale. Enfin, il vient de publier un volume qui, à côté de la réimpression, avec de nombreuses corrections et adjonctious, de quelques-uns de ces articles, en contient plusieurs autres qui paraissent pour la première fois. Ilest à regretter que M. Thurston ait fait succéder ces articles dans son livre sans chercher à les relier par quelques considérations générales. Il est vrai que, dans sa préface, il dit ne s'adresser qu'à des spécialistes, ne vouloir donner que des maté- riaux, Sans conclusion aucune, et ne faire de son volume qu'un appel à la bonne volonté de ses correspondants, anciens et à venir, pour l'envoi de nouvelles observations. Tout en rendant hommage à la prudence avec ‘ Enc. Taursron : Ethnographie Notes in Southern India. Madras, Government press, 1906, in-8o, VIII-580 p., av. 40 planches. je crois que son livre aurait gagné à être un peu plus synthétique. Ayant déjà fait le premier travail de classement de ses propres observalions et de celles de ses nombreux correspondants, ayant déjà fait la coordination de ces travaux avec ce qui à été publié ailleurs, il lui eût été facile de faire encore un pas et de systématiser le tout en offrant un tableau sinon définitif, du moins plus sai- sissant de la vie des différentes peuplades de l'Inde. Un simple classement dans la succession des chapitres aurait déjà facilité la besogne du lecteur. J'ai dû le faire moi-même, afin de présenter une analyse plus claire du volume en question. C'est ainsi que je vais résumer les 18 chapitres de l'ouvrage en les groupant sous quatre chefs : 1° ceux où il est question de la vie matérielle des différentes peuplades de l'Inde Méridionale (chap. IV, VIII, XI, XVI et XvIi); 2° ceux où l'on traite des manifestations de la vie psychique (artistique, religieuse, etc.) de ces même peuplades (chap. m, IX, X, XII, XVIN) ; 3° les chapitres 1, 11, XI, XIV, XY, consacrés à la vie familiale; et enfin 4 les cha- pitres V, VI, VII, qui louchent à la vie sociale. I. — VIE MATÉRIELLE. L'obtention du feu (chap. vin) par friction de deux baguettes de bois se pratique encore couram- ment chez les tribus des montagnes et de la jungle; de plus, on retrouve cette pratique, comme survi- vance, dans certaines castes des Brahmans, où l'usage des allumettes est strictement défendu dans ; J. DENIKER — LES US, COUTUMES ET SUPERSTITIONS DE L'INDE MÉRIDIONALE 211 l'enceinte du temple. La méthode de giration est la plususitée, soit en ne se servant que des deux mains comme chez les Yanadis de Nellore,ou chezles Kani- kars, soit en employantune courroie pour imprimer le mouvement de va-et-vient à la baguette verticale, maintenue en haut à l’aide d’une coquille, comme chez les Badagas (fig. 1). Mais les Paniyans, qui ha- bitent au pied des Ghâtes occidentales, sur la côte Malabare, obtiennent le feu par la méthode de sciage d'une pièce de bambou par une autre (fig.2), méthode répandue surtout dans le monde malais et indoné- sien : enfin, les Kadirs des monts Anaimalai se ser- vent du briquet en remplaçant l'amadou par les 1 fibres d'une sorte de cotonnier (/ombax malaba- ricum). Le chapitre xvr donne des renseignements nou- “eaux sur l'étendue de la géophayie dans l'Inde méridionale. Les coolis,et surtout leurs femmes, des collines de Cochin, mangent plus d'une livre de terre comestible par jour, tout en paraissant être honteux d'avoir cette habitude. La géophagie est aussi pratiquée dans le Mysore, etsur les marchés de Madras et de Bangalore on vend en quantité l'ar- gile comestible. Ce qui est intéressant à noter, c'est que l'usage est surtout répandu parmi les femmes et dans les tribus civilisées : les « sauvages » de la jungle et des montagnes, excepté les Mala- yalis, paraissent ne pas connaître les délices de celle alimentalion bizarre. Le costume (chap. x) dans l'Inde méridionale REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 19017. change avec la mode; mais, à l'encontre de ce que l'on observe en Europe, ce n'est pas la coupe, mais bien la couleur et le dessin qui se modifient, sur- tout sous l'influence de l'importation des étoftes européennes. Et, à ce propos, il faut remarquer que les habitants de ce pays, dont les étoffes indigènes sont teintes en couleurs passées et composites, très artistiques à notre point de vue, manifestent un goût très prononcé pour nos étoffes aux couleurs les plus voyantes et aux dessins les plus grossiers ; d'ailleurs, c’est surtout l'étiquette sur les pièces de l’étoffe qui détermine l'achat. Certaines peuplades de l'Inde méridionale n'ont Fig. 1. — Obtention du feu par giration chez les Badagas. pas encore dépassé, pour leurs vêtements, le stade de la feuille de vigne légendaire. Les Koragas du Canara méridional étaient, encore en 1874, uni- quement vêlus d'une ceinture de feuilles, tandis que les femmes Poulayan Thanda portent une sorte de courte jupe en lanières de feuilles de « jonc de Thanda » (fig. 3). Les Bhondas de Jaipour sont plus avancés ; leurs femmes portent à la ceinture un mor- ceau d’étoffe en écorce tressée, mais si pelit qu'il ne couvre pas en entier même une seule hanche : l’on est obligé de le faire glisser d'un côté ou de l'autre, autour de la ficelle qui sert de ceinture, pour protéger telle ou telle partie du corps. Quant au sentiment de la pudeur, il varie de peuple à peuple : tandis que la femme tamoule porte une sorte de couvre-sein, qu'elle rabat en rencontrant un Européen, la femme malabare n’est nullement 7* 278 J. DENIKER — LES US, COUTUMES ET SUPERSTITIONS DE L'INDE MÉRIDIONALE gènée de paraître devant lui le torse complète- ment nu. Au costume se rattache la question des mutilations ethniques (chap. 1v). Ici, M. Thurston nous donne des renseignements circonstanciés sur le fard des Toddas des Nilghiris, jus rouge extrait du fruit d'Eugenia Arnottiana; sur les disqnes en élytres chatoyantes de Buprestides que les femmes d'autres régions de l'Inde méridionale se collent au milieu du front; sur les opérations du percement du lobe de l'oreille pratiqué sur les filles des Koravars, dès le troisième jour de leur naissance; et sur l'élargissement successif du trou ainsi obtenu, pendant des mois et des années, jusqu'à ce que le sujet, vers treize à qua- torze ans, puis- se y introduire des anneaux et des disques de 8 à 10 centi- mètres de dia- mètre. Le tatouage est répandu dans presque toutel’Inde mé- ridionale, beau- coupplusqu'on ne pensait jus- qu’à présent. M.Tburston dé- crit en détail l'opération, pratiquée en général par les Fig. femmes, fla- toueuses ambulantes. Celles-ci opèrent non seule- ment chez les Tamouls de toutes castes, mais encore chez les Eurasiens catholiques du Malabar, qui affec- tent surtout de porter, sur l’avant-bras, le tatouage d'un pigeon, emblème du Saint-Esprit. Le limage des dents incisives en cône pointu n'est pratiqué que chez deux seules peuplades de l'Inde méridionale et peut-être de l’Inde en général: les Kadirs et les Mala Vêdars des monts Anaimalai!; on fait cela, disent-ils, pour ne pas ressembler à une vache. L'usage de couper une ou plusieurs phalanges des doigts est courant dans le Mysore et le pays avoi- sinant. Rien de particulier à noter à propos de la cir- concision et de la castration, sinon le rappel de l'existence des Kojahs (eunuques volontaires à la * Au voisinage de l'Inde, on ne rencontre cette coutume qu'à Sumatra et à Java. 2, — Obtention du feu par sciage chez les Paniyans. suite de l’impotence), décrits par Shortt encore en 1873. À propos de la marque au fer rouge sur le sein, imposée aux Basivi (prostituées du temple), M. Thurston fait observer que, pour les plus jeunes et les plusjolies d'entre elles, on interpose entre le sein et le fer rouge une pâte de bois de santal, afin de ne faire qu'une marque fictive. Les hommes qui se soumettent à la même opération sur les épaules: sont considérés comme consacrés aux déesses et portent généralement le costume féminin (p. 404): Je passe plusieurs autres pratiques de mutilation, et Lermine la revue du premier groupe de chapitres par deux mots sur les hoomerangs (chap. xvu), provenant des Maravars de Madoura. Ces armes de jet ont la forme d’un croissant, large à l’extré- mité distale, étroit vers 4 manche; cette forme ne per- met pas le re- tour de l'arme vers la person- | k ; | 4 ne qui la lance. II. — Vie rsy- CHIQUE. una Le plus long … des chapitresse rapportant à la vie psychique … (le in°) est con- sacré aux sages,au «mau- … vais œil », aux à charmes, aux superstitions à propos des animaux, à la sorcellerie, aux ex-volo. Il contient des cen-… taines de faits très intéressants et n'est pas ana lysable. Voici quelques exemples de présages.… Frémissement dans la main droite : mariage avec une jolie femme; frémissement dans la plante du” pied droit : départ pour un voyage. D La veille du nouvel-an, il faut arranger une pièce dans la maison le plus luxueusement possible, avec” A eye Cal at ur fleurs, étoffes, objets précieux, afin d'entrer dans l'année qui commence par un endroit rempli de bonnes choses. Les figures qui forment des tour- billons de poils de la robe d'un cheval présagent le bien ou le mal, suivant qu'elles sont en couronne, en barbe de plume ou en crête’. Il est interdit de poser à la renverse les récipients qui servent comme Le DR Re 0 1 N'est-ce pas le précurseur des marques de propriétés sur le Hétau (le « Tamga» des Kirghiz, le « Vasm » des Arabes) J. DENIKER — LES US, COUTUMES ET SUPERSTITIONS DE L'INDE MÉRIDIONALE 9279 mesure de liquide: de là l'opposition formidable qu'avait rencontrée l'introduction de nouvelles mesures de capacité en aluminium, que l’on pres- oxydation du vase par le liquide. Ily a une foule de préjugés se rapportant aux constellations sous les- quelles naissent les en- ts, et aussi aux jours ropices et néfastes. Tou- efois, il y a des accom- modements : ainsi, il est néfaste de s'oindre Île orps le samedi; mais, si Pon met un peu de racine Nerium oleander dans lalabar, on voit, pendue à coin du toit de presque sie, sorte de poupée, re- s regard (fig. 4). Un enfant a-t-il perdu l'appé- it? Cela tient à l'influence le tel ou tel visiteur; aussi faut-il ramasser la pous- ière du sol qu'avait foulé son pied et frotter avec e poussière la tête de enfant. Faut-il rappeler les superstitions qui ont rait à l'haleine et qui sont à base de l'interdiction durepas en commun entre gens des castes diffé- tes? Faut-il aussi énu- nérer tous les « man- es des noms des cinq alistiques, dont M. Thurston donne la descrip- Pabord (chap. 1x) l'usage, répandu dans toute l'Inde ridionale, de courir sur les charbons ardents. Le anger de cet exercice paraît plus grand qu'il n’est D Dont, car on trempe piéalepiement les pieds rivait de renverser, après l'usage, afin de prévenir Fig. 3. — lemme Poulayan Thanda, vélue d'une jupe en lanières de feuilles de jonc. éments sacrés ? et tous les « yantrams » ou figures | pas, très vile, sans se brüler. Il en est de même de « Hook-Swinging » (chap. x) ou la pendaison à l’aide de crochets passés sous la peau du dos, au bout d'une perche que l’on fait tourner. Cette coutume barbare se pratiquait il y a encore quelques années ; le martyr, dans ce cas, était préalablement ahuri par une boisson anesthé- siante spéciale. Les sacri- fices humains (chap. xn) sont une affaire plus sé- rieuse et sont inter- dits formellement par le Gouvernement brilanni- que ; le dernier connu remonte à 1852 ; mais on les pratiquait secrètement il y à encore peu d'an- nées parmi les Khonds ou Kandhs du Bengal et du Madras. Les victimes « Myriames » devaient être obligatoirement ache- lées pour cet usage. Un des sièges sur lesquels on immolait les victimes hu- maines, remplacées de- puis par les bœufs, figure parmi les pièces rares du Musée de Madras; à ce litre, il est reproduit dans le volume de M.Thurston. On peut rapporter à la vie psychique la descrip- tion, dans le chapitre xvin, de différents instruments indiens plus ou moins scientifiques: mesures de longueur, clepsydres, tail- les pour marquer Îles comptes, ventouses sè- ches; et des objets de sports : les éperons du combat des coqs et le coup de poirg des Jeltis (une des castes des Telougous), qui s’enlrainent à donner avec celle arme des coups d'une telle violence qu’ils peuvent décoller la tête du tronc de leur adversaire ou de leur viclime, car ils sont employés aussi comme bourreaux. IT. — VIE FAMILIALE. Un long chapitre (le premier du volume) est con- sacré à la descriplion d'une centaine de coutumes matrimoniales, qui varient à l'infini d'un peuple à l’autre, d’une caste à l’autre dans le sud de l'Inde. 280 . J. DENIKER — LES US, COUTUMES ET SUPERSTITIONS DE L'INDE MÉRIDIONALE Le seul trait qui parait être commun à peu près à tous, c'est la mise au cou de la mariée d'un collier possédant des vertus magiques, le « tali »,ordinai- rement un cordon tressé d’or et d'argent (fig. 5). Je cite, un peu au hasard, quelques-unes de ces coutumes. L'apposilion du pied de la mariée sur une meule est une cérémonie essentielle du mariage dans différentes castes et même dans les cérémo- nies brahmaniques; elle signifie que la fidélité conjugale sera aussi durable que la pierre. Un autre usage répandu veut que l'on sème au mariage quelques graines de plantes diverses dans un pot ad hoc, à charge par ies mariés de jeter dans la ri- vière les nouvelles pousses quelques jours après lacérémonie. Une coutume assez étrange dans certaines Cas- tes brahma- niques des Tamouls: c'est le « ma- laimatht{hal » (échange de fleurs) : qua- tre jours après le ma- riage, le nou- veau marié el sa femme se rencon- rent dans un existe champ, che- après avoi vauchant allumé u chacun sur & VEN Us feu, la fiancé j Fig. 4. — Figures destinées à éviter le mauvais œil. : 4 les épaules applique su de leur oncle maternel respectif, et échangent des guirlandes ou des couronnes de fleurs. Cette cérémonie est suivie d’une autre, appelée « Amman Kolam », où la nou- velle mariée, déguisée en homme, est promenée en cortège à travers les rues avec une fillette repré- sentant sa femme; arrivée à son habitation, elle y rencontre son mari, l'invective, lui imputant toutes sortes de crimes, etle proclame son serviteur. Dans d’autres cas, le mari est travesti en femme el con- duit en procession par la ville, etc. Le rapt est pratiquée par les Khonds, monta- gnards du Goudjerat, chez lesquels la fiancée est enlevée, après avoir été recouverte d'un chàle rouge, et portée sur les épaules de son oncle jus- qu'au domicile de son futur mari. Souvent les amis des deux familles engagent une lutte, les uns pour arréler les ravisseurs, les autres pour couvrir leur fuite. Chez les Khonds de Goumsour, la fiancée ainsi enlevée est chargée, dans la maison de son futur, de très lourds colliers de mélal qui l'empéchent de fuir. Parfois, on donne à chaque famille une cord à nœuds, qui sert à remémorer la date du mariage en défaisant un nœud chaque jour. Chez les Khonds Kutiya, jeunes gens et jeunes filles couchent ensemble dans des maisons con truiles exprès pour cela dans les villages”. La coutume, si répandue chez beaucoup de peuples inculles, d'éviter après le mariage la ren contre des beaux-parents, semble être rare dans l'Inde méridionale. M. Thurston ne cite qu'un cas» chez les Poulayans (serfs agricoles) du Travancore; où la belle-mère ne peut approcher le gendre. entre deux. campsdejeu- jungle, où les fesses du promis des lisons ardents ; s'il crie trois fois : Am! Am! Am! il n'est pas digne du mariage; s'il sup= porte l'opération saus broncher, l'union est conclue. Naturellement, la force avec laquelle le tison est appliqué se trouve en rapport avec l'inclination qu'a la fille pour le jeune homme. D'après une autre version, la fille s'en va dans la jungle ave® plusieurs jeunes gens et les soumet successivement, à l'épreuve du feu. £: Il y a aussi la fuite simulée du promis, ramenés par le futur beau-père (chez les Pallans, agrieuls teurs Tamouls) ou par le père de la promise (chez les Kamsala, artisans Tamouls), et la curieuse 1 Ceci rappelle les « Olag » des Igorotes des Philippines: D'ailleurs, des maisons de ce genre se retrouvent chez d'autres populations de l'Inde méridionale, par exemple dans certaines tribus des monts Jeypore, où filles et garçons doivent coucher ensemble certains jours de la maturation du fruit du Man= guier (p. 32). Li] J. DENIKER — LES US, COUTUMES ET SUPERSTITIONS DE L'INDE MÉRIDIONALE 281 coutume du mariage fictif avec une épée, chez - les Kaïkolans (musiciens) du Coïmbalour, ou avec un are chez les Alias (cultivateurs) de Ganjam et chez les Oriya, ou avec un arbre chez les Dhobis (blanchisseurs) du Mysore, etc. Ces mariages fictifs sont ordinairement en con- - nexion soit avec la prise du voile des « Dasis » (pros- - tituées du Temple), comme chez les Kaïkolans, soit avec le mariage avant la puberté de la jeune fille. . Dans le premier cas, souvent un riche habitant prend sur lui tous les frais de la cérémonie et à ; * 54,4 AIN “recoit, en échange, les premières faveurs de la Dasi. … L'achat de la fiancée (le « Kalym » des peuples turcs) se rencontre chez les Malaïali de l'Arcot septentrional, où le prétendant doit travailler dans la maison et pour le compte de son futur beau- père. _ La place me manque pour parler en détail du « mariage parental » entre les garçons de cinq ou six ans et des filles de seize à vingt ans, qui a comme suite le concubinage de la mariée avec son beau-père qui se charge de la procréation ; cependant, la progé- niture, légalement, appartient au mari-enfant*. Cet 1 J'ai signalé, dans mon livre «Les races et les peuples de . de la terre » (Paris, 1900, p. 219), l'analogie de cette coutume avec le « snokhatchestvo » des paysans russes. J'ajouterai à 5. — Nouveaux mariés Kapous ou Reddis usage est très répandu chez les cultivateurs Ma- laïali du district de Salem, chez les Tamouls Kammas et chez les Reddis {cullivateurs Telougou), où la chose se complique en ce sens que la femme ne s'unit pas nécessairement avec son beau-père, mais avec un autre homme, le plus souvent un parent du côté malernel. Je passe la question de l'exogomie, du mariage à l'essai, du mariage feint ou pour rire, qui est peut-être la survivance des coutumes de défloraisons par les prêtres, relatées dans le voyage du capitaine Hamilton (1744). Telougous agriculteurs). Pour finir, voici la coutume énigmatique des Lambadis du Mysore : Immédiatement après Île mariage, toutes les femmes présentes à la noce se retirent dans une chambre où se trouve un seul homme, le brahman qui a présidé à la cérémonie; avec des cris et des chants sacrés, les femmes se précipitent sur lui, le pinçcent et cherchent à le flageller tout nu. On dit que le brahman consent à ce traitement moyennant une rétribution (p. 58). Je me vois obligé, faute de place, d'être très bref ce qui s'y trouve le dicton russe que l'on place dans la bouche d'un de ces maris précoces, qui, devenu adulte, s'adresse ainsi, en arrivant, à «ses » enfants : « Bonjour mes chers frères, enfants de ma femme; allez dire à votre père, qui est le mien, que le mari de sa femme est arrivé. » 282 J. DENIKER — LES US, COUTUMES ET SUPERSTITIONS DE L'INDE MÉRIDIONALE sur le chapitre x1 relatif à l'infanticide, et sur ceux qui traitent de la dévolution du nom (xiv) à l'enfant, et de la couvade (xv). L'infanticide, ou plus rigoureusement la suppres- sion des enfants du sexe féminin, comme coutume, a été surtout en faveur chez les Khonds et chez les Toddas; officiellement, la coutume est supprimée depuis trente et quelques années, mais la prédo- minance du nombre des hommes sur celui des femmes, relevée par les dernières statistiques dans ces tribus, laisse quelques doutes sur sa complète disparition. Comme il est dangereux pour tout Hindou de pro- | noncer son nom, qui est compris parmi «les neuf choses à ne pas révéler aux autres » (âge, fortune,se- crels de famille, état de santé, rapports sexuels, ete.), on appelle les enfants par des surnoms ou en abré- geant le véritable nom, qui est ordinairement celui d'un ancêtre déjà décédé. Quelquefois, on préfère les noms des hommes célèbres, seraient-ils même des Anglais (exemple : Munrolappa, d'après Sir Tho- mas Munro, ancien gouverneur de Madras). Les Koragas du Canara méridional portent les noms des jours de la semaine, etc. La couvade est répandue parmi les Kouravars ou vanniers du Malabar, ainsi que parmi les vanniers (Kukke) Koramas, près Shimoga; mais ce sont les seuls exemples plus ou moins authentiques ; autres faits signalés peuvent tout au plus être in- terprétés comme une survivance de cette coutume. Le chapitre 117, consacré aux rites funéraires, mériterait à lui seul une analyse spéciale; je me contenterai de dire que les cérémonies des funé- railles, partout où le brahmanisme à pénétré, tournent autour de.cette conception que l'âme sortie du corps brûlé a besoin de rentrer au plus vite et le mieux possible dans un autre corps. De là, l'indication des neuf points du corps par lesquels doit sortir l'âme; de là, les objets et les vêtements laissés sur la tombe ou données au brahman; de là, les deux statues ou deux pierres érigées l’une à la maison mortuaire et l’autre auprès d’un étang. les : Mais les tribus non brahmaniques ont des usa spéciaux qu'il serait trop long de relater ici. Notons cependant, que les cérémonies commémorative sont aussi importantes et aussi respectées chez Je unes que chez les autres. IV. — VIE SOCIALE. Je groupe sous ce litre trois chapitres consécutifs L'un d'eux (v°) est une longue énumération des#o tures usilées jadis dans l Inde; par exemple, lé sement des testicules, l’exhibition publique, en p nue, etc. Cette liste est suivie de celle des ordalies : passe la main dans un sac renfermant le serpent cobr sans être mordu; retirer une pièce de monnaie d'u: pot rempli d’un potage de riz bouillant, ete. Le second chapitre (vi‘) concerne les punition corporelles dans les écoles publiques de Wi méridionale, encore en partie en vigueur au jourd'hui. M. Thurston en énumère 42. Parmi le plus intéressantes est celle de répandre un peu d sable sur la cuisse nue de l’élève et la pincer ens à cet endroit : la chose est à la portée de tous maitres de village, car les enfants, assis par ter écrivent les lettres de l'alphabet avec leur doigts su le sable répandu devant eux. Enfin, le dernier chapitre (vu°) parle de l'esclav et des quinze conditions à la suite desquelles devient ou on devenait esclave (descendance d? esclave, subvention dans la famine, dettes, prison niers de guerre, apostasie, amour manifesté envers une esclave, vente volontaire, etc.). Je suis loin d’avoir épuisé tous les sujets du livre de M. Thurston, mais ce que je viens d'écrire suf fira, j'espère, pour montrer quelle mine inépuisab de renseignements représente ce beau volume, qui devrait être sur la table de travail de tous ceux qui s'occupent de l'Inde et de l’Ethnologie. J. Deniker, -: Bibliothécaire du Muséum d'Histoire naturelle» ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE 283 LA TAUTOMÉRIE PREMIÈRE PARTIE : HISTORIQUE. CARACTÉRISATION DE LA TAUTOMÉRIE I. —— INrRobUCTION. HISTORIQUE Parmi les divers isomères répondant à une même composition centésimale, il existe, on le sait, des différences de stabilité plus ou moins grandes. Le plus souvent, la stabilité de ces isomères est suffi- sante pour que chacun d'eux garde son individua- lité dans un intervalle de température assez étendu. Mais, lorsqu'on vient à dépasser les limites supé- rieures de température au delà desquelles ces isomères se dissocient, puis qu'on laisse la tem- pérature s’abaisser, les éléments séparés se com- binent et fournissent les isomères les plus stables. L’élévation de température a donc pour résultat de faire tendre les formes moins stables vers les les formes plus stables. Ce passage d'une stabilité inférieure à une stabilité supérieure est accompagné d'une perte d'énergie interne du système qui le subit; aussi le retour inverse n'est-il pas sponta- nément possible. Le chlorure de propyle, par exemple, sous l'influence de la chaleur se transforme en pro- pylène et acide chlorhydrique, qui, par refroi- dissement, se combinent en formant du chlorure d'isopropyle. Au contraire, le chlorure d'isopro- pyle, par chauffage, ne se transforme jamais en chlorure de propyle : CH°.CH?.CH?CI —+ CHS.CH : CH? + HCI — CH°CHCI.CHS. Il se produit ainsi ce qu'on nomme une migration moléculaire, dont le caractère est, nous le répétons, de ne pas être réversible. Ce phénomène est ana- logue à celui que l’on observe lorsque, un système solide élant en équilibre instable, on vient à le déplacer au delà de certaines limites que définis- sent les lois de la Statique. On voit alors ce sys- tème passer de l’état d'équilibre instable à l’état d'équilibre stable, et cette modification, corrélative de l’abaissement du centre de gravité, correspond par conséquent à une diminution d'énergie poten- tielle de ce système. Il en résulle que le passage de l'état d'équilibre instable à l'élat d'équilibre stable est spontanément irréversible. Mais, de même qu'en Mécanique, entre les élats d'équilibre stable et instable, se place celui d’équi- libre indifférent, de mème, en Statique chimique, nous aurons à envisager le cas où les migrations ne seront accompagnées que d’une variation d'éner- gie interne insignifiante, Pour celles-ci, des causes extrêmement faibles seront capables de modifier la statique de la molécule et aussi d’y provoquer la migration dans le sens direct et dans le sens inverse, en un mot de provoquer des migrations réversibles, de même que le fléau d’une balance en équilibre penchera vers la droite ou la gauche suivant que l'on surchargera l’un ou l’autre de ses plateaux. Ce sont ces migrations réversibles dont l'étude constitue l’objet de la Tautomérie. On peut dire que la Taulomérie est née des recherches sur l'éther acétylacétique. La prépara- tion bien connue de cet éther, réalisée dès 1863 par Geuther à l'aide de l’acétate d'éthyle et du sodium, avait déterminé Frankland et Duppa à attribuer au nouveau composé la constitution d’un éther &-cétonique et à expliquer sa formation par les réactions suivantes : CH#CO .OC?H5 + Na = Na.CH®.CO.OC' + H; cH?.C0.0C*H° + CH°.CO OCR] — CHS.CO.CH2.C0.0C?H5 + NaOC°H, bien qu'à vrai dire on ne fût pas arrivé à isoler le dérivé sodique de l’acétate d’éthyle dont on sup- posait la formation intermédiaire. Cette explication semblait d'autant plus rationnelle que l’éther acé- tylacétique se comporte comme une cétone, ‘et qu'on a reconnu depuis qu'il se combine avec la phénylhydrazine, l'hydroxylamine, qu'il donne un dérivé isonitré avec l'acide nitreux, et fournit enfin des dérivés mono et dialcoylés Jorsqu'on le traite par un iodure alcalin et par l’éthylate de sodium. Une propriété particulière de l’éther acétylacéti- que, celle d'échanger 1 atome d'H de son groupe- ment CH° contre 1 atome de Na, n'était pas ex- pliquée par la formule de Frankland et Duppa; mais ces auteurs l'attribuaient au voisinage de deux groupements Z>CO qui, disaient-ils, con- ‘fèrent à l'un des atomes d'H du CH° lié à ces groupements une négalivilé spéciale et lui per- mettent de fonctionner comme un atome d’hydro- gène des molécules acides. Geuther, au contraire, n'admettait pas la formule de Frankland et Duppa; pour lui, l'éther qu'il avait découvert et préparé le premier élait un alcool non saturé, de constilution représentée par la formule CH*C (OH) : CH.CO*CH*, c'est-à-dire un énol, ainsi qu'on le dit aujourd'hui’. Il en donnait pour preuves que l’éther acétylacétique donne un composé d'addition avec le Br et colore en bleu les Enol vient de éthénol, nom servant à désigner l'alcool non saturé hypothétique, CH? : CHOH, dérivant de l'éthène. 284 ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE solutions de Fe*Cl°, ainsi que le font les phénols, corps renfermant le groupement alcool non saturé : 7 Den. A l'appui de cette facon de voir, Ladenburg, Op- penheim, etc., montrèrent ultérieurement que le sodium n'atlaque pas l'acétate d'éthyle rigoureu- sement anhydre où exempt de toute trace d'alcool, et que, par conséquent, le composé hypothétique NaCH°.CO.0CH° ne se produisait pas. En outre, Clai- sen constata ullérieurement que, dans la préparation de l'éther acétylacétique, une trace d'alcool est indispensable pour amorcer la réaction du sodium sur l’acétate d'éthyle et que l'éthylate de soude peut avantageusement remplacer le métal. Il rejela donc le processus proposé par Frankland et Duppa et lui substitua le suivant : 0 ONa CH. ta + Na.OC?H° — CHS.C—OC:H; : OH Nocers ONa CH°.C—OCH + H?.CH.CO?C?H° — CH°C(ONa) : CH. CO2CEH5 Nos + 2CH°OH, aboutissant, par conséquent, non pas au dérivé sodé d'un éther B-cétonique, mais à celui d’un alcool non saturé. Ajoulons, comme dernière preuve de la consti- tution énolique du dérivé sodé de l’éther acélyla- célique, celle tirée de l’action, sur ce dérivé, du chlorocarbonate d'éthyle, donnant, dans ces con- ditions, un dérivé : CH. C: CH. CO?C?H5 Lo. cr d'origine énolique. Les deux opinions consistant à considérer l'éther acétylacétique soit comme cétonique, soit comme énolique, rallièrent l'une et l’autre des partisans, et, d’une polémique ardente, il ressortit cette con- clusion que, si l'hypothèse de Frankland et Duppa était justifiée pour un certain nombre de réactions, elle était en contradiction avec un certain nombre d’autres, au cours desquelles se forment les dé- rivés métalliques de l’éther acétylacétique. D'autre part, si la théorie de Geuther triomphait sur quel- ques points, elle était mise en échec par sa rivale pour les réactions où n'interviennent pas ces dé- | rivés métalliques. Il fallut done admettre que l'éther acétylacétique est capable de prendre deux constitutions différentes, suivant qu'il est libre ou sous forme de sel, et qu'il retourne à sa constitution primitive lorsque après l'avoir salifié on le remet en liberté en le déplacant de ses sels. On se proposa aussitôt de déterminer exacte- ment les conditions dans lesquelles se produisait cette migration réversible, et aussi de rechercher si d'autres substances que l'éther acétylacélique n'en fourniraient pas de semblables : l'étude de la tautomérie était amorcée. Une voie nouvelle s'offrait aux chercheurs: elle fut aussitôt explorée, et le nombre des composés susceptibles de se comporter comme l'éther acétyla- célique s’accrut rapidement, à la suite des travaux de Claisen, Wislicenus, Michael, Nef, Perkin, Brühl, Haller, etc. On vit que, pour ces composés présentant des migrations moléculaires réversibles, les réactions et la constitution dépendent à la fois du milieu et des réactifs en présence desquels ils se trouvent. Par exemple, ainsi que je l'ai montré, les alcools cétoniques se comportent, tantôt comme des cétonesa-lcools primaires, tantôt comme des oxydes-alcools secondaires, suivant le milieu dans lequel on les considère ou les réactifs que l'on fait agir sur eux, et les migrations dont leurs molécules sont le siège sont limitées par un état d'équilibre: dynamique dont la valeur dépend également des condilions de milieu. Nous pouvons donc définir la {automérie : L'étude des combinaisons dont la constitution est variable par suite de migrations moléculaires ré- versibles. Je me propose, dans ce lravail, de passer en revue les méthodes permettant de reconnaitre la taulomérisation et d'en mesurer les degrés sur telle ou telle substance; je classerai ensuite les divers types de lautomères actuellement connus, et enfin j'examinerai les causes provoquant la lau- tomérie et le mécanisme suivant lequel celle-ci se produit. IT. — NOMENCLATURE DES SUBSTANCES TAUTOMÉRISABLES. En 1886, Conrard Laar ! proposa d'attribuer le nom de {automérie (rauro, le même; mecos, partie) aux composés à fonctions variables, et tenta de les sérier dans une classification dont nous verrons plus loin les bases. Bien qu'étymologiquement parlant ce mot soit vague et imprécis, c'est lui qui a prévalu sur les synonymes qu'on lui a opposés depuis. À ce substantif, Jacobson*® voulut substi- tuer celui de desmotropie (ecuos, lien: reoros, Chan- gement), de sens plus précis, mais qui n’envisage, dans le phénomène de migration, que la modifica- lion de liaison. Conformément à la proposition de Hantszch et Hermann’, on réserve particulièrement le nom de {automères aux substances se compor- tant, dans leurs réactions, comme si elles avaient ! Ber., t. XVIII, p. 648, 652::t. XIX, p. 732. * Vicr. Meyer : Ber.,t. XX, p. 1132; t. XXI, p. 2698. ? Ber., t. XX, p. 280. | ANDRÈ KLING — LA TAUTOMÉRIE 28 © des constitutions variables, tandis qu'on nomme desmotropes celles qui subsistent sous des états iso- mériques différents. Ainsi l'éther acétylacétique, fonctionnant tantôt comme un alcool, tantôt comme - une cétone, est un fautomère, tandis que les va- riétés « et B de glucose isolées par M. Tanret constituent les desmotropes des glucoses. La désignation de pseudomérie (evo, faux; uepos, partie), créée par Baeyer' pour un cas spécial, a été également avancée par Laar pour remplacer celle de tautomérie; elle n’a rencontré aucune faveur. La principale cause résulte de ce que, lors- qu'on se trouve en présence de deux desmotropes, il est tout au moins téméraire d'affirmer que l'un est l'isomère vrai, l’autre le faux (le pseudo ou plus simplement le 4). Nous signalerons également « mérotropie », pro- posé par Michaël?, et devenu « fropomérie » Sous la plume de Claisen. Ces deux substantifs, dérivés d'une même étymologie changement ; uepoc, partie), sont tombés dans le parfait oubli. Jusqu'à présent, nous n'avons eu en vue que des substances à fonction variable, justiciables de ce que Pechmann’ nomme la fautomérie fonc- tionnelle. À côté de celles-ci, il en est d’autres, comme les amidines, qui présentent un caractère de lautomérie spécial. Si, par exemple, par des réactions régulières, on cherche à préparer les deux amidines isomériques suivantes : (pornos, AZ —R, et (Il) R.CK ; SAZz — Rs on aboutit à un isomère unique. De semblables cas sont dits de fautomérie virtuelle. III. — MÉTHODES PROPRES A L'ÉTUDE DES PHÉNOMÈNES DE TAUTOMÉRISATION. Maintenant que nous sommes fixés sur le sens à attribuer aux divers termes dont nous aurons à nous servir, nous allons passer en revue lesdiverses méthodes permettant de constater l'existence de la tautomérie et d'en mesurer les degrés. 1 C'est à l'occasion de ses travaux sur l'isatine que Baeyer fut conduit à adopter ce préfixe pseudo pour désigner celle des deux isatines (Ber., t. XVI, p. 2188) dans laquelle l'atome d'H est attaché à l'azote, et à réserver le nom d'isatine pour l'isomère dans lequel l'H appartient à un oxhydrile lié à un atome de C: Az Az —H ANSANS PSEAN | | CO—H | | co à , NAN Co Co Isatine (Lactime). Pseudo-isatine (%) (Lactame). 2 Liebig's Annalen, t. CCXCI, p. 25. 3 Ber., t. XXVIII, p. 876, 2362. A ce point de vue, nous ne considérerons pres- que exclusivement que les cas de tautomérie fonc- tionnelle. Car, pour ce qui concerne la tautomérie virtuelle, qui ne présente, en définilive, qu'un caractère négatif, constater l'absence d'un isomère prévu et l'expliquer, en cela se résume à peu près tout ce qu'on peut dire actuellement sur ce sujet. $ 1. — Méthodes chimiques. Ce sont les seules qui permettent d'affirmer qu'une substance est tautomérisable. Par contre, il faut ajouter qu'elles sont incapables, comme nous le verrons plus loin, de nous renseigner sur l'état réel de la fonction d’un desmotrope, comme sur les proportions dans lesquelles deux des- motropes d'un même tautomère existent en équi- libre. La tautomérisation, dans le cas le plus général, entrainant à la fois pour un composé : changement de fonction, modification des liaisons et déplace- meut d’un élément ou radical, nous pouvons grouper les méthodes chimiques qui la dévoilent en trois catégories, suivant qu’elles sont aptes à déceler l'une ou l’autre de ces modifications. 1. Réactions décelant le changement de fonctions. — Elles varient nécessairement avec les fonclions auxquelles la tautomérisation peut donner nais- sance. L'un des cas le plus fréquents est celui où, lun des desmotropes étant neutre, l’autre possède un atome d'H acide. On le rencontre dans les alcools, acides et éthers aldéhydiques ou cétoniques, dans les amides, les phénols, etc. L'apparition de la fonction acide chez les desmotropes en question sera caraclérisée, dans ce cas, par les réactions habituelles de la fonction acide. L'aptitude au remplacement d'un atome d'H par un métal dans les molécules analogues à celle de l’éther acétylacétique est considérée par beaucoup d'auteurs comme caractéristique de sa susceptibilité à la tautomérisalion. Michaël', en particulier, n'admet pas qu'il existe de composés oxygénés dans lesquels un métal soit lié au C, car, dit-il, de l'entassement des radicaux négatifs oxygénés résulte une exallation de la négativité de l'H, qui devient alors substituable par un métal ; mais, par suite de l'introduction de ce dernier, la négativité de TO deviendra telle que cet O se transformera en O hydroxylique. Perkin fait une remarque ana- logue à propos de la liaison des atomes d'azote et de métal dans les dérivés métalliques des com- posés hydrocarbonés renfermant de l'azote. Enfin, Hanlzsch, reprenant cette idée, l’a géné- 1 MicHAEL : J. f. p. Ch.,t. XXXVII, p. 501. 286 ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE ralisée et étendue à un grand nombre de substances qu'il a appelées : pseudo-acides*'. Pour cet auteur, si le trinitrométhane CH(Az0*)’ se comporte comme un acide, c'est qu'au contact des bases alealines il subit une taulomérisation et donne l'aci-trinitro- méthane (AzO*)C:AzOH. Il en donne pour preuve que des composés non lautomérisables, comme le chloroforme CHC!, bien que possédant 3 radicaux négatifs et 1 hydrogène liés au même carbone, sont incapables de donner des sels avec les alcalis. Néanmoins, il ne faut pas oublier que cette preuve perd un peu de sa valeur si l'on considère que des hydrocarbures non tautomérisables, comme le triphénylméthane, donnent, ainsi que l’ont montré MM. Hanriot et Saint-Pierre, un dérivé potassique CK(C'H°}. Ce fait prouve que, même en l'absence de toute lautomérisalion possible, l'accumulation des radicaux négatifs autour d'un atome de carbone augmente la négativité des atomes d'H encore unis à cet atome. Il est à remarquer qu'en général la transformation du desmotrope neutre en desmo- trope acide n’est pas instantanée ; aussi, lorsqu'on ajoutera peu à peu un alcali à une solution aqueuse du premier, verra-t-on l'alcalinité du mélange diminuer peu à peu, de telle sorte que la neutra- lisation définitive de semblables solutions ne peut être réalisée que par élapes successives. Cela tient, comme nous le verrons plus loin, à ce qu'il s'établit, entre les deux desmotropes et l’eau, un équilibre que l’alcali vientrompre, mais qui tend à se rétablir jusqu'à disparition complète du desmotrope neutre. L'aplitude réactionnelle acide prise par l'H dans les combinaisons n’a rien qui doive surprendre si l'on considère que, dans les formes aci du nitro- méthane ou des éthers cétoniques, on retrouve les groupements —Az-OH de l'acide nitreux, et >C-0H des acides organiques. En ce qui concerne ce dernier groupement, nous ferons remarquer qu'il se rencontre également dans les alcools tertiaires et les phénols. Il est donc légitime de chercher, par des réactions propres à déceler ces dernières fonctions, à caractériser la lautomérisalion d’un desmotrope célonique en desmotrope énolique. Et, de fait, le perchlorure de fer, qui, avec les phénols, donne la coloration violette bien connue, fournit également la même réaction avec les énols. Avec ces derniers, on obtient, pour une faible quantité de réactif, une coloration bleuatre qui vire au violet quand on augmente la dose de réactif. Ces colorations seraient dues à la formation de sels ferriques R*Fe*Clé et R‘Fe*CL. L'anhydride acétique, agent d'éthérification des alcools tertiaires et des phénols, permet également de reconnaitre l'oxhydrile des desmotropes énoli- +. D RÉ PRS E * Hanrzscu : Ber., t. XXII, p. 515: et t, XXX VIII. p. 998. _vés les autres dans lesquels le radical est attaché à l'atome ques. Par son emploi, Nef‘ a pu obtenir le dérivé acétylé de l’éther acétylacétique CH*.C(0.C0.CHÉ) CH.CO*CH, et Bredt* a démontré l'existence d’un forme lactonique de l'acide lévulique. Les résultats de cette réaction, qui, au premi abord, paraissent absolument concluants, ne peu- vent cependant être admis sans restriction, a moins en ce qui concerne l’éther acétylacétique. D'abord, on remarque que la proportion d cet éther transformée en dérivé monoacétylé es faible. Cela n'a rien de surprenant en soi, car le caractère alcoolique d'un groupement > COH s’at- ténue rapidement à mesure quelesradicaux auxquel il est attaché deviennent plus négatifs. J'ai mon tré ce fait en particulier pour l’acétol CH°.CO.CH°0H, dont la vitesse initiale d’éthérification s'éloigne con sidérablement de celle des alcools primaires et prend la valeur de celle qu'on observe pour les tertiaires. Mais ce qu'il y a de remarquable, c'est que, dans la réaction de l'anhydride acétique sur l’éther acétyl- acélique, à côté du dérivé O-acétylé*, CH°.C(0- CO.CH°): CH.CO*CHS, il se fait des quantités nota bles de dérivé C-acétylé, CH°.CO.CH(CO.CH)- COCH® (*). Par conséquent, l’anhydride acétique n'est pas un réactif spécifique de la fonction alcool des énols, puisqué son action peut également porter sur le CH° de la forme cétonique. Michaël fait, en outre, remarquer que, dans l'action des anhydrides ou des chlorures d’acides sur les com-= binaisons cétoniques, il peut se faire des dérivés d'addition dont la destruction donne naissance à un dérivé O-acétylé : OCOR, 9—COR, f SA 4 R.CO.CHER! — R.C— CCR — ( RC— CH — PR. H 0 — COR, + R,.COOH. Ce dernier argument ne prouve pas que l’éther acétylacétique ne soit pas tautomérisable, puisqu'il fournit un dérivé acétylé d’une structure différente de celle du composé générateur ; il prouve seulement qu'à l’état libre l'éther n'a pas la constitution énolique, malgré qu'il se combine avec l'anhydride acélique. : L'isocyanate de phényle, comme on le sait, réagit sur l'hydroxyle des alcools et des phénols, alors qu'il reste indifférent vis-à-vis du groupement cétonique. Goldschmidt et Meissler” ont, en consé- quence, proposé d'utiliser ce réactif à la recherche de la fonction énolique et à sa différenciation de la * Liebig's Annalen, t. CCLXXVI, p. 200. > Liebig's Annalen, t. CCXXXVI, p. 225. * D'après Claisen, on nomme O- dérivés ceux qui sont substitués à l'oxygène et correspondent à l'énol, et C- déri- de C du CH2. “ Liebig's Annalen, t. CCLXXVIIT, p. 223. “+ 5 Bert. XXIILp-1253: ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE 287 fonction célonique dans les tautomères. Celle pro- position a soulevé de vives objections de la part de Michaël‘, qui considère les combinaisons de l'isocyanate de phényle avec les éthers £-cétoniques, non pas comme des éthers carbaniliques : CH°.C (0.CO.AzH.C'H°) : CH.CO*CŒHS, mais comme des ani- lides d'acides maloniques CH°.C(OH):C(CO.AzH. C‘H°)CO*CH', et objecte que le fait, pour l'isocya- nate, de se combiner avec l’éther acétylacétique sodé prouve bien que ce réactif n'est pas spécifique de l’oxhydrile. Goldschmidt® défend ses conclu- sions et prétend que, si son contradicteur a obtenu des résultats différents des siens, c'est qu'il a opéré avec de l'isocyanate contenant des traces d’alcali. Bref, la polémique ouverte entre les deux auteurs n'est pas encore close, et la question de spécificité de l'isocyanate de phényle vis-à-vis de l'oxhydrile n'est pas encore élucidée complètement. J’ajouterai enfin que, dans certains cas, l'isocya- nate de phényle fonctionne comme déshydratant, et se transforme uniquement en diphénylurée sans donner d'éther carbanilique. C'est en particulier ce qui se passe avec l'acétok*, ou encore avec-les acides, ainsi que l'a montré M. Haller *. Jusqu'ici nous n'avons envisagé que les moyens de déceler la tautomérisalion énolique des com- posés cétoniques et analogues; il nous faut main- tenant examiner le problème sous son autre face et considérer les procédés qui nous fourniront la preuve que ces composés peuvent exister sous les formes cétoniques ou aldéhydiques. La phénylhydrazine et l'hydroxylamine sont les premiers réactifs auxquels on s’est adressé dans ce but. Malheureusement, ces réactifs, si précieux pour caractériser les fonelions aldéhydiques ou cétoniques isolées, perdent beaucoup leur valeur quand on cherche à les utiliser à la recon- naissance de ces fonctions en association avec d’autres dans une molécule tautomérisable. C'est ce que Baeyer et ses collaborateurs? ont montré à propos de la phloroglucine, qui, en se combinant à la phénylhydrazine, donne non pas une hydra- zone, mais un dérivé hydrazinique : CH C'HS.AzH. AZI. C/ Ÿ— C.AzH.AzHCSIIS nel | de 4 Con cu C‘H5.HAz. Az: C// NC: Az.AzH.CH5, au lieu de le Co 2 Ber., t. XXIX/1p. 1794: Ber., &. XXXVIII, p. 1096. KuiG : Th. Fac. Sciences Paris, 1905. CPRPACES CAEN IE 189; Ber., t. XXIV, p. 2687, 2690, 2692. œ æ © et ce que Nef et Bæninger ont montré également à propos de l'action de l'hydroxylamine sur les poly- phénols. Le quinone-dioxytéréphtalate d'éthyle, par exemple, en se combinant à AzH°.0H, donne- rait non pas une dioxime, mais un azonium : \ C0 CONRIX RS CK AzHO/ co — co” \Oazn:. L'ammoniaque et les bases aromatiques ont été également proposées pour différencier les groupe- ments cétoniques et énoliques. Mais, ainsi que le fait remarquer Wislicenus ', les résultats obtenus en les employant sont indécis. Ces deux groupements, en effet, se combinent l'un et l'autre aux bases ammoniacales pour donner le même produit d'addition, qui, par des hydrata- tions ultérieures, donnera tantôt un dérivé ratta- chable à la fonction cétonique, tantôt un autre dérivant de la fonction énolique : > CH > CH | | = =—1(0) > CH — C—AZX — AZHEX — [| ; AzHX — H°0 + > ( = (n 4 >C || OH Il — C— OH — C'AzXH: Néanmoins Hantzsch?, reprenant cette question sous une forme différente, a prouvé, en s'appuyant sur un grand nombre d'exemples, qu'en milieu rigoureusement axhydre le gaz ammoniac, réagis- sant à froid sur une dissolution benzénique d'un acide vrai, donne naissance à un sel ammoniacal, insoluble dans le benzène, qui se précipite immé- diatement : X.OH + AzH°—XOAZH'. Au contraire, en réagissant dans des conditions identiques sur la forme non oxhydrilée d’un corps tautomérisable, ce gaz ne peut former de sel ammoniacal insoluble dans le benzène, l’eau étant l'agent de tautoméri- sation nécessaire. Par exemple, dans le cas des bromamides ou des nitramides, on a: R.C(:0) AzHBr--HOH— RC(OH)AzHBr— RCO (AzH”) AzBr. Ce procédé confine de près à celui que nous avons décrit précédemment à propos de l'action des hydrates ou alcoolates métalliques sur les tau- tomères. Nous signalerons enfin l'emploi des COMpPOSÉS organo-magnésiens, qui permet parfois de différen- cier les fonctions cétoniques d'autres fonctions tautomères. Ainsi, l’acétol anhydre réagit sur le réactif de Grignard sous sa forme cétonique el non sous sa forme oxydrique*, tandis qu'au con- lraire l’éther acétylacétique réagit uniquement comme un énol”. ‘ Uber Tautomerie. Vorträge A. 1897. # Ber., t. XXXIL, p. 3066. 5 KunG : loc. cit. 4 GrienarD : An. Ph. Ch. (1), t. XXVII, p. 548 288 ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE "NS 2. Réactions décelant le changement de liaison. — Fréquemment, au cours d’une tautomérisation, la migration moléculaire modifie le degré de satu- ralion. de deux éléments voisins; ainsi les cétols ne présentent que des liaisons simples, tandis que les énols présentent des liaisons doubles. Mais, lors- qu'on cherche, en pareil cas, à déceler chimique- ment ce changement de liaison, on échoue généra- lement. C’est ce qui est arrivé à Geuther et à Brühl, qui ont bien constaté que les éthers $-cétoniques fixent du Br, mais qui n'ont pu isoler à l’état de pureté les produits d’addition ainsi obtenus. 3. Réactions basées sur le changement de situa- tion d'un atome d'H ou d'un radical qui lui est sub- stituë. — Nous ne ferons que signaler les modes | de décomposition différents des modifications des- motropiques d'un même tautomère. Si, en effet, nous exceptons les recherches de MM. Bouveault et Bongert sur la décomposition des dérivés O - et C- substilués des éthers B-cétoniques par l’eau ou la potasse, nous pouvons dire qu'en général ce | qui a été fait sur ce sujet est peu précis. Au contraire, la substitution d'un radical acyle ou alcoyle à l’'H d'un composé tautomérisable permet en général de déceler sa tautomérisation. Tantôt le produit de la substitution est un mélange, en parties inégales, des deux desmotropes sub- stitués; Lantôt il est constitué par un seul desmo- trope, dont la structure est différente de celle du composé qui lui a donné naissance. Dans les sub- | stitutions des tautomères, les conditions de milieu |! influent profondément sur la direction de la substi- tution, ainsi que nous le verrons tout à l'heure. Nous avons déjà dit que la substitution d'un alome métallique à l'H de certaines substances en provoquait la tautomérisalion. Nous ajouterons que, parmi tous les métaux, il | en est un, l'argent, qui jouit de propriétés remar- quables à ce point de vue. L'exemple du cyanure d'argent, donnant avec les iodures alcooliques, non pas un nitrile, mais une carbylamine, est classique, et les recherches de MM. Haller, Held et Blanc! ont également prouvé l'action lautomérisante de l'argent sur les éthers alcoyl-cyanacétiques. Ces derniers, traités par les chlorures d'acides, donnent soit des dérivés C, soit des dérivés O, suivant qu'on prend comme point de départ Jeurs sels alca- lins ou argentiques; nous reviendrons ultérieure- ment sur ce point. S 2. — Méthodes physico-chimiques. L'emploi des réactifs chimiques, nous l'avons dit, est seul légitime pour la reconnaissanre de l'aptitude à la tautomérie, qui est un phénomène d'ordre chimique. Mais, par contre, une fois la lautomérie reconnue, c'est aux seules méthodes physico-chimiques qu'il appartiendra de nous ren- seigner sur la réelle fonction d'un desmotrope ou encore sur les proportions dans lesquelles deux desmotropes d'une même substance chimique coexistant en équilibre dynamique dans un mélange dit allélotrope (xe)oun, mutuel: Teoros, Change- ment). Dans ces deux cas, en effet, l'introduction d'un réactif quelconque est à proscrire rigoureuse- ment, puisqu'elle a pour résultat de modifier soit la variété desmotropique, soit l’état d'équilibre à déterminer. Le principe de l'emploi des méthodes physico- chimiques à la détermination de la constitution d'une substance est bien connu. Il consiste à étu- dier, sur des types de constitution non équivoque, les variations des diverses constantes physiques en fonction des changements de structure, de liaison, de fonction chimique qu'on y introduit, puis à utiliser ces résultats, obtenus par méthode dédue- tive, pour fixer, par méthode inductive, les structures, liaisons ou fonctions de composés de constitution douteuse. L Il faut le dire tout de suite : l'application de ce principe est contestable lorsqu'on cherche à l’uti- liser à propos de composés à fonctions multiples ou (ce qui en somme revient au même) à des com- posés à longue chaîne hydrocarbonée. C'est qu'en effet les lois de variations, qui ont été établies sur des cas simples, ne s'appliquent plus en toute rigueur quand on en étend l’application aux molé- cules à fonctions multiples. En un mot, les lois physico-chimiques ne sont que des lois appro- chées, d'un degré d'exactitude moindre que les lois physiques proprement dites. Malgré ces critiques et quelques autres, de moindre imporlance, qui pourraient être faites, les méthodes physico-chimiques que nous allons passer en revue ont rendu un grand service à la question de la tautomérie. 1. Méthodes physiques décelant le changement de fonction. — Les variétés desmotropiques d'une même substance ont des chaleurs de formation et de combustion différeutes. Dans certains cas, leurs différences sont très supérieures aux valeurs des erreurs d'expériences et permettent de rattacher un desmotrope à l’une ou l'autre des constitutions possibles. Guinchant' a appliqué cette méthode à l'étude de l'éther acétylacétique. Je ferai remarquer que plusieurs causes d'erreur peuvent intervenir pour fausser les résultats obtenus par ce procédé; AC RTACASC { Th. Fac. Sc. Paris, 4897. ru ne": ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE 289 ce sont : l'existence possible d'associations molé- culaires et la faible valeur des différences à me- surer. Il existe également toute une série de méthodes électriques, qui ont été principalement instituées pour déceler la création d'une fonction acide chez les substances énolisables. Leur application à l'étude des pseudo-acides a été exposée ici par M. Muller‘; celte circonstance nous permettra de passer assez rapidement sur leur descriplion. Ces méthodes permettent de déterminer les coefti- cients d'affinité et d'hydrolyse, que l’on compare à ceux que devraient avoir normalement le desmo- trope oxhydrilé s'il existait en tant qu'énol à l'état anhydre, alors que réellement il ne se forme que peu à peu au contact de la solution. Le coefficient d'aflinité peut se déduire soit de la valeur de la chaleur de neutralisation, soit de celle du coefficient de dissociation électrolytique. D'après Hantzsch, lors de la neutralisation d'une base par un acide vrai, le rapport entre les valeurs du o coefficient d'affinité à 35° eL 0° est à peu près cons- tant et voisin de 1. Au contraire, lorsqu'une subs- tance subit la tautomérisation avant de prendre la k 36 k 0 est toujours supérieure à 2. Dans la dissociation par l'eau d'un sel d'acide vrai, l'hydrolyse croit constamment avec la dilu- forme acide, le rapport “augmente et sa valeur tion, jusqu'à une certaine limite, et par conséquent | la conductibilité augmente parallèlement. Il est évident que, lorsque la dissociation totale est réa- | lisée, la conductibilité reste sensiblement cons- tante par addition de nouvelles quantités de sol- vant. Avec les sels d'acides vrais, l'hydrolyse complète est atteinte pour le cas où une molécule est dissoute en 1.000 litres; er outre, pour un accroissement de dilution de 32 litres à 1.024 litres, la variation de conductibilité ne dépasse pas 10 ou 12 unités. Au contraire”, dans le cas où intervient une tautomérisation préalable, l'accroissement de conductibilité, lorsqu'on passe de la dilution 32 à la dilution 1.024, est supérieur à 12. De la connaissance de la constante d'aflinité K, on peut déduire celle d'Aydrolyse L. Pour les sels d'acides vrais, ces deux constantes sont inverse- ment proporlionnelles l'une à l'autre : LÉQRE=ICteNU Mais, quand l'hydrolyse est accompagnée de tau- tomérisation, l'équation (1) n'est plus satisfaite et 1 P. Tu. Muzcer: Les pseudo-acides. Rev. gén. Sciences, 1905, p. 417. 2 Ber., t. XXXI, p. 3066. la valeur expérimentale de L est inférieure à celle qu'on calcule en supposant que l'acide du sel n'a pas subi de tautomérisation". Enfin, la mesure des conductibilités des solutions alcalines de substances tautomères peut nous rendre encore d’autres services : En effet, la tauto- mérisation d'un desmotrope neutre en desmotrope acide, ainsi que nous l'avons signalé plus haut, peut n'être pas instantanée, même au contact de solutions alcalines, et, le cas échéant, la conducti- bilité d’une dissolution alcaline du desmotrope neutre s'accroît avec le temps *. Hantzsch, l’auteur de ces diverses méthodes d'in- vestigation, ajoute que, tandis que la conductibilité d'un acide vrai diminue rapidement par addition à sa solution aqueuse de quantités croissantes d'alcool, celle des pseudo-acides ou substances analogues diminue beaucoup moins vite. Ces diverses méthodes comportent quelques cri- tiques, que l’on trouvera formulées dans l'exposé de M. Muller. Je voudrais néanmoins faire remar- quer que, pour les acides faibles qui ont été choisis comme ligne de démarcation entre les acides vrais et les pseudo-acides, l'incapacité absolue de subir la tautomérisation n'a pas été prouvée. De celte remarque, il résulte que les méthodes que nous venons d'indiquer ne permettent pas de nier que tel acide soit tautomérisable, que tel autre ne le soit pas; elles nous fournissent seulement un moyen de classer les diverses combinaisons sui- vant leur plus ou moins grande aptitude à subir la tautomérisation : la limite entre les tautomérisables etles non tautomérisables est indécise. Comme dernière méthode électrique, je signalerai celle, peu connue, de Drude*. Cet auteur à montré que, soumis à l’action des courants à haute fré- quence, les corps présentent des absorptions nor- males où anormales suivant qu’ils contiennent ou non un groupement oxhydrile. Bien que cette méthode d'investigation souffre des exceptions curieuses (H°0 se comporte normalement, alors que le naphtalène monobromé absorbe anormalement), elle a fourni, pour la plupart des énols, des résultats analogues à ceux obtenus avecles autres méthodes. D'autres méthodes physiques permettent encore de déceler le changernent de fonctions. Les expé- riences de Raoull, Auwers, Beckmaun, etc., ont prouvé qu'en solution benzénique, la cryoscopie des combinaisons hydroxylées donne des résultats environ doubles de ceux obtenus dans d’autres solvants. Cetle méthode, appliquée aux énols, a donné des résultats tantôt concordants, tantôt 1 Ber., t. XXXV, p. 210: 2 Ber:, t. XXXII, p. 515. 3 Ber.,t. XXXV, p. 210. 4 Wied. Ann., t. LX, p. 500 290 discordants .avec ceux que fournissent les autres procédés. Enfin, l'étude de la variation du coefficient de solubilité à permis à Lowry' d'étudier quelques cas de tautomérisalion. 2. Méthodes physico-chimiques décelant le chan- gement de liaison. — À. méthodes non optiques. — La détermination du volume volumétrique parait, à première vue, être à même de caractériser l'exis- tence d’une double liaison dans un énol. Mal- heureusement, les associations moléculaires pré- sentées fréquemment par les tautomères rendent celte méthode inapplicable. Nous rejetterons également la méthode dilatomé- trique de Giolitti?, laquelle ne repose sur aucun principe solide et ne donne que des résultats indécis. La méthode capillimétrique de Schenck et Helien- berger” est plus féconde en résullats. Elle constate les variations de l'énergie superficielle molécu- laire consécutives à la laulomérisation. D'après Ramsay, la valeur de cetle énergie, pour les liqui- des, est fournie par l'expression : | E — énerg. mol. superf., à NN = tension superficielle, E — y(MV)5—7 (=) < M— poids moléculaire, © V — volume spécifique, | s — densité. Pour les liquides ne subissant pas la tautomérie, cette énergie moléculaire superficielle varie en raison inverse de la température. La formule : —=kX(c—t—d) (1 exprime cette loi; dans cette formule, + représente la température critique, { celle à laquelle est portée le liquide, d'un terme correctif constant (5° environ). On voit donc que, pour un liquide non tautoméri- sable, la courbe représentative des variations de E par rapport à + est une droite. Mais, si une tau- tomérisation intervient, à la température critique 1 Chem, Soc.,t. CLVI, D 67 ? Gaz. Ch. Ital., t. XXXIV, p. 208. 3 Ber., t. XXXVII, p. 3443. ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE za du desmolrope À se substitue peu à peu =», | celle du desmotrope B. Dans ce cas, on constate que la courbe représentative de E (fig. 1) quitte, pour | une certaine température, la droite AA'A"7,, se di- rige sur la droite BB'B'’:, et se confond ensuite avec elle. Or, inversement, cette méthode permet, non seulement de caractériser la tautomérisalion, mais encore de déterminer les limites de température entre lesquelles peuvent coexister les deux variétés desmotropiques d'une même substance, et au delà desquelles chacun des desmotropes est à l’état de purelé. Afin de se mettre à l'abri des erreurs pou- vant résulter des agrégalions moléculaires, les auteurs recommandent d'opérer entre de larges limites de température. Si, aux températures basses, la valeur du coefficient K subit une diminu- tion toujours constante, c'est qu'il y a association ; si, au contraire, K passe par un minimum, c'est qu'il y a tautomérie. B. Méthodes optiques. — x) Méthode spectromé- trique. On sait que le pouvoir réfringent molécu- laire d'une molécule se compose addilivement de la somme des pouvoirs des divers groupements atomiques et liaisons intervenant dans sa constitu- tion. Brühl” a utilisé cetle propriété à la recherche de la constitution des desmotropes. Soit, par exemple, une substance À, qu'il s'agit d'identifier avec l’un des deux desmotropes « ou e, l'un céto- | nique, l’autre énolique. On déterminera expéri- mentalement l'indice de réfraction moléculaire ua par rapport à une radiation déterminée et on le comparera aux indices y. et u. calculés pour le cétol et pour l'énol en se servant des modules déter- minés par Conrady pour les divers éléments et liaisons mulliples. Suivant que la valeur 4 coïn- cidera avec celle de y. ou de y. ou qu'elle sera inter- médiaire entre les deux, on conclura que A pos- sède la constitution cétonique, énolique ou qu'elle est formée d'un mélange des deux formes. Les mêmes déterminations pourront se faire en prenant le pouvoir dispersif moléculaire. Les formules adoptées par Brühl pour le calcul des indices expérimentaux sont : u — p. réf. mol.;: Na D—1,,M pour l'ind. }n — indice expériment.; ONRE +27 Dde réf. mol.)M— poids moléculaire ; D — densité. », et 2,, indice par rap- port à deux régions dif- férentes du spectre. \ à — p. dispersif; A ne NT 4 (52 ja +2) D le pouvoir dispersif. Oo (2) Dans certains cas, l'emploi de la méthode des pouvoirs dispersifs est préférable à celui des indices moléculaires, car la valeur de à est à peu près indé- pendante de la température, tandis que ce facteur LPBer., t XXVII-.p-12318, ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE influence notablement la valeur de y; de plus, pour une même substance, la différence Oc—Ce Ge est en général plus grande que Ve be En principe, les différences à mesurer sont suf- fisamment supérieures aux erreurs expérimentales pour que la méthode soit applicable. Ainsi, par exemple, entre les valeurs des indices de réfraction moléculaire des deux variétés cétonique et énolique de l'éther acétylacétique, il existe une différence de 0,94. Or, l'indice de réfraction peut être obtenu expérimentalement avec une approximation de une unité portant sur le chiffre de l'ordre de la qua- trième décimale. Le calcul montre que, dans ce cas particulier, une erreur de 107 sur l'indice se traduit par une erreur de l'ordre 10 * sur l'indice moléculaire, laquelle est, on le voit, négligeable par rapport à la différence à mesurer JARCAOTE Malheureusement cette méthode, si séduisante, est loin d'être irréprochable. Tout d'abord, l'appro- ximation de w décroit à mesure qu'augmente le M Ù facteur D Par lequel se trouve multipliée l'erreur absolue. En outre, les valeurs calculées pour les modules des groupements fonctionnels considérés dans des molécules à fonctions simples ne s'ap- pliquent plus exactement aux cas où ces mêmes groupements sont associés à d'autres fonctions dans des molécules complexes. MM. Haller et Mul- ler‘ ont démontré que la loi d'additivité de Brühl s'applique d'autant moins exactement à une rnolé- cule que celle-ci contient un plus grand nombre de radicaux négatifs. Et, plus récemment, M. Bauer” a fait ressortir que, de l'accumulation de ces radi- caux électronégatifs dans une molécule, résulte pour celle-ci une exaltation du pouvoir réfringent. Naturellement, les mêmes critiques sont à adresser à la méthode des pouvoirs dispersifs. L’uneet l’autre de ces méthodes sont applicables aux substances liquides ou aux solutions des subs- tances solides ou liquides. Mais, ainsi que nous le verrons plus loin, dans le cas où l'on opère sur des solutions, il n’est pas permis d'attribuer avec cer- titude à un composé non dissous la constitution qu'on lui a découverte en solution. Une modification apportée à la méthode spectro- métrique est celle qui a été indiquée par M. Muller” et utilisée ensuite par Brühl' sous le nom de C. R., t. CXXNIII, p. 1370; B. S. Ch.,t. XXVII, p. 1014. Th. Fac. Nancy, 1904, p. 74. C. R.,t. CXXXIV, p. 664. Zeit. f. p. Chem., [A], t. LI, p. 1. = & te 294 méthode spectrométrique différentielle. Elle repose sur l'application de la constance de différence À entre la réfraction moléculaire des divers acides vrais en solution et celle de leurs sels de soude également dissous. Cette différence égale 1,6 envi- ron. Mais, si la salification est précédée d'une tau- tomérisation, la différence A s'accroît et s'élève tou- jours au-dessus de la valeur 1,6. 8) Pouvoir rotatoire. Dans les dérivés acylés des éthers 8-cétoniques, la forme cétonique contient un carbone asymétrique, tandis que la forme énolique en est dépourvue : — C(OH) = € — lite OUR R La forme cétonique de ces éthers serait donc un mélange en quantités équivalentes des deux énan- tiomorphes, qu'on pourrait espérer séparer. Toutes les tentatives faites par M. Haller dans cette voie sont restées infructueuses. Néanmoins, M. Hal- ler‘ a constaté que, pour les substances actives, telles que les alcoyleyanocamphres, la tautoméri- sation de la forme cétone en forme énol subie au cours de leur dissolution est décelée par un accrois- sement du pouvoir rotatoire. En outre, en colla- boration avec M. Minguin*, M. Haller a trouvé que, pour les substances tautomérisables dissoutes, le pouvoir rotaloire augmente avec le pouvoir ioni- sant, autrement dit tautomérisant, du dissolvant. Un autre exemple bien connu est celui de la multirotation des sucres, dont la cause réside, comme on le sait depuis les recherches de Tanret, dans une lautomérisation. La valeur du pouvoir rotatoire magnétique, c'est- à-dire du pouvoir rotatoire pris par toute substance lorsqu'on la place dans un champ magnétique suf- fisamment intense, est également influencée par la tautomérisation et permet de la déceler. Perkin se- nior*, qui s'est beaucoup occupé de cette question, a établi une table d'incréments correspondant aux divers groupements fonctionnels. Il a pu, de la sorte, en opérant d'une façon analogue à celle que nous avons indiquée à propos de la méthode spec- trométrique, calculer les valeurs des pouvoirs rotatoires magnétiques des dérivés desmotropes et les comparer à celles qu'il obtenait expérimenta- lement sur les substances qu'il voulait leur identi- fier. Cette méthode, édifiée avec le plus grand soin par Perkin, mérite pourtant des reproches ana- logues à ceux qui ont été adressés à la méthode de Brühl, car les différents incréments n'ont pas des valeurs rigoureusement constantes suivant qu'on les considère dans des molécules à faibles ou à 1 C.R., t. CXXXVNI, p. 789. 2 C. R., t. CXXXVI, p. 41525. s Ch. Soc. Tr., t. XLI, p. 338 et années suivantes. 292 forts poids moléculaires. Au reste, il ne faut pas oublier que les deux méthodes spectrométrique et de rotation magnétique se ramènent à l'observa- tion, par des procédés différents, d’un même effet, qui est la modification apportée à la vitesse de propagation de la lumière à travers une substance lorsque celle-ci se tautomérise. y) Absorption de la lumière ultra-violette. Les essais tentés par Maägini! pour différencier les dérivés desmotropes par leur inégale capacité d'absorption des radiations ultra-violettes sont restés sans résultats. Par contre, reprenant cette question à la suite des travaux de Hartley et Hun- tingdon, MM. Baly et Duesch”® sont arrivés à des résultats intéressants. Ils ont constaté que les substances desmotropes pures ne produisent pas de bandes d'absorption lorsqu'on les interpose sur le trajet des rayons ultra-violets et que les bandes n'apparaissent que dans un mélange de deux des- motropes en train de se transformer lun dans l'autre. D'où les auteurs concluent que la méthode d'absorption des radiations ultra-violettes permet de caractériser un état dynamique des desmotropes et même, jusqu'à un certain point, de mesurer la quantité de réaction existant entre ceux-ci lors- qu'ils réalisent leur état d'équilibre. J'ajouterai, pour terminer, qu'il a été fréquem- men! remarqué que, souvent, la tautomérie d’une substance est accompagnée d'un changement de coloration et que la plupart des substances fluores- centes sont des tautomères. 3. Méthodes physico-chimiques permettant de déceler le changement de place d'un élément ou d'un radical. — Rien de précis n'a été fait sur ce point. 4. Conclusions. — Le grand nombre de méthodes physiques qui ont été proposées pour caractériser de Ch. Phys., t. II, p 403. DOC ? Ch. Soc., t. LXXXV, 1029; t. LXXXXII, pp. 766, 1347. ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE les desmotropes tire sa raison de ce fait qu'il n'en est pas une seule qui soit infaillible. Si nous cherchons, par exemple, à déterminer la constitution de l’éther acélylacétique pur, à la tem- pérature ordinaire, les méthodes de la chaleur de combustion, de la chaleur de formation, de la cryoscopie, la méthode dilatomérique, la spectro- métrique, celle de Drude, celle du pouvoir rotatoire magnétique concordent toutes pour en faire un composé cétonique ; seule, la méthode des volumes moléculaires fournit des résultats discordants, qui s'expliquent par l'intervention d'agrégations molé- culaires. Il semblerait donc, en opérant unique- ment sur cet exemple, que toutes les méthodes | soient équivalentes au point de vue de l'exactitude et en parfaite concordance entre elles. Mais les résullats sont bien moins encourageants si l'on cherche à appliquer ces mêmes méthodes à d’au- tres combinaisons que l'éther acétylacétique, par exemple à l'acétylacétone, à laquelle certaines des méthodes précitées fontattribuer la constitution d'un alcool cétonique CH°.C(OH): CH.CO.CH°, tandis que d’autres parmi ces méthodes en font un glycol CH°.C(OH): C: C(OH)CH:. Il faut donc n'accepter les résultats d'une méthode physico-chimique qu'avec beaucoup de prudence, les contrôler par ceux qu'on obtient avec d'autres méthodes, et ne pas oublier que les cons- tantes physiques dépendent d’un grand nombre de variables, parmi lesquelles il en est dont l’impor- tance, négligeable dans certains cas, peut devenir très grande dans d’autres cas. Dans une deuxième partie, nous indiquerons les principes de la classification des substances tau- tomères, et nous étudierons les causes et le méca- nisme de la tautomérisation. André Kling, Docteur ès sciences, » Chef adjoint de travaux à l'Ecole de Physique et de Chimie industrielles de la Ville de Paris. : de to rite dei EC use BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 203 ° BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Pionchon (J.), Professeur à la Faculté des Sciences de Grenoble. — Principes et formules de Trigono- métrie rectiligne et sphérique. — 1 vol. de 1%% pages. {Prix :5 fr.). Gratier et Rey, éditeurs, Grenoble, et Gauthier-Villars, Paris. 1907. Cet ouvrage se place entre les « Cours » ou «Elé- ments » à l’usage des écoliers et les savants « Traités » pour les mathématiciens, à la fois plus complet que les premiers et ne contenant pas les développements, su- perflus pour le praticien, des seconds. . Les nombreuses sciences appliquées sont, en général, “ributaires de ce qu'on peut appeler la « Géométrie quantitative », et la Trigonométrie est la base de cette étude, au moins pour les figures polygonales. D'où la nécessité d'avoir constamment recours à ses principes et formules, et le but du présent ouvrage est précisé- ment de présenter les uns et les autres sous une forme à la fois simple et rigoureuse. C’est plus et mieux qu'un mémento, car aucune formule n'y figure sans le rap- pel tout au moins de la théorie correspondante. Citons spécialement l'étude des fonctions trigonométriques (l'auteur rompt de facon heureuse avec la dénomina- tion inexacte de « lignes » trigonométriques), l'étude des grandeurs sinusoidales, la méthode graphique de résolution destriangles sphériques (d’après M. d'Ocagne), enfin une application pratique des formules trigono- métriques aux questions de maximum et de minimum géométriques. . E. Demouis, Professeur à l'École Professionnelle de Genève. Cambridge Tracts in Mathematics and Mathema- tical Physics. N° 1. Leathem (J. C.), Lecturer à Saint-Johns College, Cambridge. —. Volume and Surface Inte- grals used in Physics. — 1 vo/. 1u-8° de 48 pages. Brie Sur 45) N° 2. Hardy (G. H.), Fellow or Trinity College, Cambridge. — The Integration of Functions of a single variable. — 1 vo/. in-8° de 53 pages. (Prix : 3 fr. 15.) N° 3. Bromwich !T. J. l'A.), Professeur de Mathématiques au Queens College de Galway. — Quadratic Forms and their classification by means of invariant factors. — 1 vol. in-8° de 100 pages. (Prix : # fr. 40.) N° 4. Whitehead (A. N.), Fellow of Trinity College, Cambridge. — The Axioms of Projective Geometry. — 1 vol. in-8° de 6% pages. (Prix Sfr. 15.) -C. F. Clay, éditeur, Fetter Lane, Londres, 1905-1906. La Cambridge University Press a commencé la publi- cation d'une série de courts travaux sur divers sujets de Mathématiques pures et de Physique mathéma- tique. Le but principal de cette entreprise est de con- tribuer à maintenir à un niveau élevé l'éducation mathématique en Angleterre, par l'infusion continue de méthodes nouvelles ou plus exactes et par la propa- gation des recherches mathématiques récentes. Le caractère général de ces petits traités. est d'éclairer plutôt que d'épuiser les questions posées. Quatre volumes de cette collection ont déjà paru. Dans le premier, M. J. C. Leathem étudie les intégrales de volume et de surface que l’on rencontre constam- .ment en électricité et dans la théorie de l'attraction. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. | | Dans le second, M. G. H. Hardy expose les procédés d'intégration des fonctions d'une seule variable et montre que la solution de la plupart des problèmes élémentaires de ce domaine peut être cherchée dans une voie parfaitement définie et systématique. Dans le troisième, M. T. J. l'A. Bromwich traite la théorie des formes quadratiques d'après la méthode due en prin- cipe à Kronecker, qui permet une exposition très con- cise, qui se prète d’elle-mème aux explications géomé- triques et qui est bien adaptée à la réduction des exemples numériques. Enfin, dans le quatrième, M. A.N. Whitehead étudie les axiomes de la Géométrie projective, en choisissant comme exemple un des nombreux systèmes possibles d'axiomes projectifs, sur lequel il base la discussion des diverses idées direc- trices de la Géométrie projective. Cette Collection s'augmentera chaque année de quel- ques volumes nouveaux; ceux qui ont déjà été publiés nous font bien augurer de ceux qui suivront. Sinigaglia (François), Professeur à l'Ecole supé- rieure polytechnique de Naples. — La Surchauffe, appliquée à la machine à vapeur d’eau. (Æxtrait des Actes du Congrès international de Liège, Section de Mécanique). — Une brochure in-8° de 90 pages. Imprimerie La Meuse, Liège, 1906. La surchauffe de la vapeur a fait l'objet de plusieurs savantes communications au Congrès de Liège : M. Si- nigaglia a traité la question à un point de vue général, et l'étude très documentée qu'il en a faite a servi d'in- troduction aux mémoires plus spéciaux de ses col- lègues. Le sommaire des chapitres indique clairement la suite des matières traitées par le distingué pro- fesseur de Naples : I. La méthode de Hirn et l'inven- tion de la surchauffe ; — II. Unités de mesure eu égard à la comparabilité des essais; — III. Les moyens d'améliorer le rendement thermique des machines à vapeur; — IV. Les surchauffeurs et les machines; — V. Les machines demi-fixes et les locomobiles; — VI. Les locomotives ; — VII. Les machines marines ; — VIII. Les turbines à vapeur; — IX. Conclusions. M. Sinigaglia constate que le programme magistral de Hirn a été rempli, et il reporte sur le maitre l'honneur des progrès accomplis à la suite des célèbres expé- riences du Logelbach. La surchauffe a déjà grandement amélioré le rendement des machines à vapeur : les progrès de la métallurgie permettront de faire mieux encore. Il reste assurément quelques questions de détail à régler, mais la démonstration théorique et pratique des avantages qu'on peut retirer de la sur- chauffe est faite complètement, et personne ne les con- teste plus. AIMÉ Wirz, Doyen de la Faculté libre des Sciences de Lille. 2° Sciences physiques Fabre (Ch.), Docteur ès Sciences, Professeur adjoint à l'Université de Toulouse. — Traité pratique de Photographie stéréoscopique. — 1 vol. 1u-8° de 205 pages avec 132 figures. (Prix : 6 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1906. Bien que l'invention du stéréoscope ait à peu près coincidé avec celle de la photographie, c'est-à-dire avec celle d'une méthode permettant d'obtenir à coup sûr, et d'une manière tématique, les couples d'images dissemblables nécessaires à la perception du relief par voie binoculaire, la grande vogue dont cet instrument a joui au début n’a pas tardé à faiblir. La raison de cette sorte d'abandon est, sans doute, dans la complica- + [l «294 tion relative des procédés photographiques d'autrefois, et peut-être aussi dans le choix primitif d'un format incommode rendant les appareils volumineux et encom- brants pour les dimensions d'images à produire. Les choses ont changé aujourd'hui. L'invention des plaques au gélatino-bromure a entrainé, tant dans les opérations que dans le matériel photographiques, des simplifications grâce auxquelles tout amateur de bonne volonté peut devenir un photographe au moins pas- sable, et le nombre des adeptes de la stéréoscopie ne fait qu'augmenter chaque jour. Bien que chacune des épreuves d’un couple binocu- laire stéréoscopique ne soit qu'une épreuve photogra- phique ordinaire, la nécessité de produire, simultané- ment dans la plupart des cas, les deux épreuves du couple, jointe à celle de l'emploi d'un appareil spécial pour leur observation, fait, en réalité, de la stéréosco- pie une branche à part dans le domaine des opérations photographiques. M. Ch. Fabre, dont les diverses publications ont déjà contribué, dans une large mesure, à l'extension de la photographie, vient de rassembler en un volume ce qui peut intéresser les amateurs de stéréoscopie. 3 L'ouvrage débute, tout naturellement, par l'étude des objectifs, qui doivent satisfaire à des conditions spé- ciales, puisqu'ils sont astreints à travailler simultané- ment par paires. Vient ensuite l'examen des divers systèmes d’obtura- teurs et des chambres noires destinées à être utilisées avec le trépied classique, puis la description détaillée des appareils portatifs ou appareils à main du type « jumelles ». Ils sont aujourd'hui légion. Quelques-uns sont de véritables instruments de précision, permettant d'obtenir, avec autant de rapidité que de sûreté, des épreuves qui, malgré l’exiguité de leur format, four- nissent, à ceux qui les observent à l’aide d'un stéréos- cope de foyer convenable, l'illusion des sites photogra- phiés, avec leur relief et leurs dimensions véritables. Les chapitres suivants sont consacrés aux modes d'emploi de ces appareils, à la production des clichés négatifs, au tirage des positifs. Sans être surchargés au point de dérouter le lecteur par une trop grande multi- plicité de formules, ils contiennent de nombreux ren- seignements sur la manière de développer les épreuves, d'améliorer celles qui pourraient présenter quelques défauts, etc. Un chapitre spécial donne les indications voulues pour permettre à chacun de préparer lui-même les surfaces sensibles destinées à l'impression des positifs sur verre. Ce chapitre rappelle aux amateurs qu'au lieu d'employer exclusivement les émulsions toutes faites des plaques commerciales actuelles, ils peuvent avoir intérêt à reprendre d'anciennes formules, dans les- quelles on retrouve l'emploi du collodion et de l’albu- mine, quelque peu délaissés aujourd'hui, mais grâce auxquels on obtient des épreuves d’une finesse à laquelle ne peuvent atteindre les émulsions gélatinées d'emploi courant. Bien que les procédés de photographie en couleurs n'aient pas encore atteint la simplicité et le degré de perfection qu'on peut espérer pour l'avenir, ils donnent cependant, entre les mains d'opérateurs patients et soi- gneux, des résultats qui récompensent les efforts faits pour les obtenir. M. Ch. Fabre expose d’une manière simple la marche à suivre pour obtenir des stéréo- grammes unissant le charme de la couleur à celui du relief. Les principaux modèles de stéréoscopes sont ensuite étudiés. L'auteur termine en passant en revue les appa- reils de la catégorie des « stéréo-classeurs », qui rendent aujourd'hui si facile et si attrayante l'observation des collections de stéréogrammes, en évitant à l'observateur d'avoir à les manipuler un à un et en les faisant défiler automatiquement devant les oculaires stéréoscopiques, par la simple manœuvre d'un levier. La publication de l'ouvrage de M. Ch. Fabre sera cer- tainement bien accueillie par tous ceux qui s'adonnent BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX à la photographie stéréoscopique et en font leur dis= traction favorite. E. COLARDEAU, g Professeur de Physique au Ccllège Rollin: Pécheux (H.), Professeur à l'Ecole d'Arts eb Métiers d'Aix. — Manipulations et mesures. magnétiques et électriques. — 1 vol. in-16 de 536 pages. (Prix: 6 fr.) J.-B. Baillière et fils, éditeurs Paris, 1907. Cet ouvrage est un exposé sobre et clair des princi= pales méthodes employées par les électriciens pour la mesure des grandeurs électriques, magnétiques et voltométriques. L'auteur à cru avec raison ne devoir insister que sur les procédés les plus pratiques, ne nécessitant que des. appareils courants que l'on trouve dans tout labora- toire industriel. S'adressant à des élèves d'écoles industrielles, il a évité des descriptions encyclopédiques de méthodes plus ou moins compliquées, qui trouvent mieux leur place dans des livres plus savants. _R. SWYNGEDAUW, Professeur à la Faculté des Sciences de Lille. Bôckmann (Fr.). — Le Celluloïd ; camphre, cellc- lose, nitrocellulose, celluloïd. Ouvrage traduit de. l'allemand et augmenté d'un chapitre sur la Sore artificielle, par M. Gustave KLorz, /ngénieur-chi- miste. — À vol. in-8 de 126 pages avec 53 fiqures. (Prix : 4 fr. 50.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs- Paris, 1906. Le petit livre traduit par M. Gustave Klotz na pas grandes prétentions scientifiques, le sujet n'y prêtant guère d'ailleurs; mais il renferme des données intéres- santes sur des préparations exécutées maintenant sur une assez grande échelle (formules de composition, apareillages, précautions à prendre, etc.) Les pro- priétés des matières décrites sont aussi présentées avec quelques détails. Nous serions cependant tenté de reprocher à l’auteur (Fr. Bôckmann) d'avoir glissé un peu trop légèrement sur les dangers que peut pré- senter le celluloïd, surtout lorsqu'il est réuni en grande quantité, dangers spéciaux en cas d'incendie prove nant de la rapidité avec laquelle le celluloïd se con- sume, danger résultant, pendant cette combustion, du dégagement abondant de vapeurs nitreuses capables d'empoisonner ceux qui luttent contre lé feu, comme cela à été constaté à Berlin en 1903. Des catastrophes récentes ne rappellent que trop l'attention sur ces points. : On a signalé également des décompositions sponta- nées, l'attaque de pièces de cuivre transformées super ficiellement en nitrate basique au contact de cellu= loïd, et des explosions auxquelles a pu contribuer Ja vaporisation rapide de dissolvants employés pour coller les objets. Tout cela mérite de ne pas passer inapereu *. Le chapitre relatif à la soie artificielle, ajouté par M. Klotz, est traité dans le même esprit que le com- mencement de l'ouvrage. L'auteur passe en revue la soie Chardonnet, la soie au cuivre et la soie de viscose, en insistant aussi sur les autres applications de ce der- nier produit. Il expose les avantages et les inconvé= nients des différentes fabrications. En parcourant ces pages, on regrette que des opérations aussi ingénieuses. ne puissent encore conduire qu'à des articles de bazar d'une durée trop éphémère, comme le fait voir un petit tabléau indiquant les solidités comparées des soies naturelles et artificielles sèches et mouillées (page 82). Il ne faut pas désespérer cependant de voir une amé- lioration se produire de ce côté; la soie artificielle. pourrait alors devenir réellement pratique. G. ARTH, Directeur de l’Institut chimique de Nancy. 1 Voir Zeit. für angew. Chem., 1906, p. 1371. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 29 3° Sciences naturelles Recueil de l'Institut botanique (/niversité de Bruxelles), publié par M. L. Erréra. Tome 1. — 1 vol. gr. in-4°. (Prix : 25 fr.) Lamertin, éditeur. Bruxelles, 1906. Ce Recueil a été fondé en 1902 par le regretté Léo Erréra. Le premier volume paru, portant le n° V, com- prend les travaux de l'Institut botanique exécutés en 1901. Les publications antérieures devaient être réunies par la suite en volumes numérotés de I à IV. C'est le premier de cette série qui vient d'être publié par les soins du dévoué continuateur d'Erréra, M. Mas- sart. Ilest consacré à l'étude du glycogène, de l'amidon et autres réserves non azotées chez les végétaux. La plupart de ces travaux sont déjà anciens; quelques- uns sont restés inachevés par suite de la mort de l’auteur; aussi allons-nous les résumer un peu plus brièvement que ceux contenus dans les autres volumes. L. ErréRA. — L'épiplasme des Ascomycètes et le glyco- gène des végétaux (pp. 1-68). Ce travail est la thèse soutenue par l'auteur pour l'obtention du grade de docteur-agrégé. Il date de 1882. L'auteur y établit la présence du glycogène chez les végétaux, aussi bien dans les Phanérogames que dans les Champignons. Chez ces derniers, en particulier chez les Ascomycètes, le glycogène, d'abord diffus, s’accumule dans l’épiplasme des asques, d'où il disparait à mesure dela maturation des spores; outre son carac- tère de réserve respiratoire, il semble jouer un rôle dans la formation de l'huile qui se trouve dans les spores de la Truffe, par exemple. L. ErRÉRA. — Sur le glycogène chez les Mucorinées (pp. 71-76). Le glycogène est très répandu chez les Mucorinées, du moins quand la plante est vigoureuse : celles qui sont mal nourries n'en renferment presque pas. L. Erréna.— Sur le glycogène chez les Basidiomyeètes (pp. 77-125). On peut déceler microchimiquement le glycogène au moyen d'une solution iodée à 1/450. Un très grand nombre de Basidiomycètes contiennent cette substance et l’auteur en donne une liste raisonnée. Le glycogène est, pour les Champignons, l'homologue de l'amidon des Phanérogames; la répartition et les migrations de ces deux corps accusent un parallélisme complet. Erréra pense que la forme du migration du glycogène est la mannite. L. ERRÉRA. — Sur l'existence du glycogène dans la Levure de bière (pp. 125-128). La Levure est susceptible d'opérer la synthèse du glycogène au moyen des tartrates et des matières sucrées et de l'accumuler ensuite au titre de matière de réserve hydrocarbonée. L. ErRéRA. — Les réserves hydrocarbonées des Cham- pignons (1pp. 29-131). Il existe un parallélisme complet entre les réserves nutritives des Champignons et celles des autres plantes. De même qu'il ya des graines à huile, à amidon, à cel- lulose, il existe des sclérotes à huile, à glycogène, à cel- lulose. MAUIUER E. Laurent. — Recherches physiologiques sur les Le- vures (pp. 135-200). Les Levures de bière, de vin, de cidre et d'hydromel, ainsi qu'un grand nombre de formes-levures, peuvent former des réserves de glycogène aux dépens de nom- breuses substances dont la liste est donnée. Dans un moût sucré, la Levure peut accumuler une © quantité de glycogène allant jusqu'au cinquième de san poids; ce glycogène sert à la fermentation alcoolique. Des solutions trop concentrées d'acides, de sucres, d’alcools et de sels sont nuisibles au développement de la Levure, mais on peut habituer graduellement cet organisme à des doses de plus en plus fortes de ces produits. Cette manière d'être du Champignon vis-à- vis des matières salines se transmet à sa descendance. G. Craurriau. — Etude chimique du glycogène chez les Champignons et les Levures (pp. 201-295). Les glycogènes extraits des Champignons, des Levures et des animaux ont mème composition chimique [6(C°H#°05) EL H°0], même pouvoir rotatoire, 189918", mêmes propriétés chimico-physiques générales. Néan- moins, quelques différences très minimes, notamment dans l'aspect, la précipitation par l'alcool, l'action de l'iode, conduisent à admettre qu'il y a non pas un seul glycogène, mais un groupe du glycogène formé par une série de polymères 2 [6(CSH'°05) + H?0]. N. Exscn. — Le glycogène chez les Myxomycètes (pp. 297-300). La réaction du glycogène a été positive chez toutes les espèces examinées. Il fait défaut dans les spores qui contiennent de l'huile; il apparaît dès que le plasmode est constitué et augmente à mesure de l'évolution vers le stade sporange, mais il disparait rapidement pendant la maturation des spores. Il est abondant dans les selérotes. G. CLautriau. — Les réserves hydrocarbonées des Thallophytes (pp. 301-315). Ces réserves sont très variées : la présence de chlo- rophylle vraie est nécessaire à la formation d'amidon typique; lorsqu'une chromophylle vient se surajouter, il en résulte d'ordinaire une forme nouvelle d'hydrate de carbone; si toute plastide colorée disparait, le glyco- gène remplace généralement l'amidon. E. Laurent. — Recherches expérimentales sur la for- mation de l'amidon dans les plantes aux dépens de solutions organiques (pp. 317-341). Sur une centaine de corps étudiés, sept seulement peuvent engendrer de l'amidon : la glycérine, le dex- trose, le lévulose, le galactose, le saccharose, le lactose et le maltose. On peut considérer comme n'ayant aucun effet sur l’amylogénèse les alcools monoatomiques, le glycol, les alcools tétratomiques et hexatomiques, les éthers, aldé- hydes, corps gras, amines et amides, les composés aromatiques, les glucosides et les alcaloïdes. L. Erréra. — Glycogène et paraglycogène chez les végétaux (pp. 343-379). (Notes posthumes publiées par M. Massart.) L'auteur a décelé le glycogène dans un grand nombre de Champignons des divers groupes, ainsi que dans quelques Schizophytes et Rhizopodes (la liste en est donnée). Chez certains Beggiatoa, Sporozoaires et Fla- gellates, on rencontre du paraglycogène. Ces notes sont complétées par un Index des fiches bibliographiques recueillies par Erréra sur la question du glycogène et du paraglycogène, ainsi que par 5 planches coloriées où sont réunis ses dessins relatifs à ce sujet (pp. 381-425 et 432-446). Par une délicate attention, lescontinuateurs du grand savant disparu ont voulu perpétuer son souvenir en plaçant en tête de ce volume un magnifique portrait du maître, dont le savoir approfondi et l'affabilité cordiale resteront longtemps présents dans l'esprit de tous ceux qui l’ont connu. L:Lurz, Secrétaire général de la Société botanique de France, 296 Bardou (Paul), Licencié ès sciences naturelles, phar- macien supérieur. — Etude biochimique de quel- ques bactériacées thermophiles et de leur rôle dans la désintégration des matières organiques des eaux d'égouts. — Thèse présentée à la Faculté des Sciences de l'Université de Lille. Danel, édi- teur. Lille, 1906. Les bactéries ont une température à laquelle elles se développent le mieux. Quelques espèces vivent de préférence au voisinage de 0°; la majorité se multi- plie entre 20 et 40°. Enfin, les bactéries thermophiles proliferent avec plus de facilité aux températures éle- vées (60 à 802). Ces dernières se rencontrent en de nombreux en- droits: dans le sol, dans l'intestin de l'homme et des animaux. Elles se trouvent non seulement sous les tro- piques, mais également près des pôles. M. Bardou à cherché à isoler quelques bactéries ther- mophiles des eaux d'égouts. 11 s'est adressé aux fosses septiques installées par M. Calmette à la Madeleine pour l'épuration bactérienne des eaux d'égouts. Il y a constamment trouvé les quatre espèces qu'il désigne par les lettres x, 6, et à. L'auteur a étudié très conscien- cieusement la morphologie et la biologie de ces micro- bes thermophiles. On trouvera dans cette thèse quel- ques renseignements utiles concernant l'histoire de ces espèces. C'est un travail de longue haleine et très intéressant; mais on regrette que l’auteur n'ait pas su * se limiter en n'étudiant, d'une facon un peu détaillée, qu'une seule de ces espèces. Il nous aurait dit com- ment disparaissait une partie de l'azote de ses cultures, la nature et la proportion des gaz qui se dégage. D'autre part, M. Bardou, qui à travaillé à l'Institut Pasteur de Lille, n'ignore pas que les procédés biologiques d’épu- ration des eaux d'égouts ne seront véritablement pra- tiques que le jour où l’on aura très nettement démon- tré que la solubilisation des boues qui se déposent dans la fosse septique est à peu près complète. Le rôle des bactéries thermophiles dans ce phénomène est peut- être important! Malheureusement, l’auteur ne s’en est pas préoccupé. Peut-être M. Bardou compte-t-il pour- suivre ces études? Nous attendons alors avec curiosité l'étude détaillée de l'action de ces bactériacées sur la solubilisation des boues déposées dans la fosse sep- tique. Le travail de M. Bardou, ainsi complété, contri- buera à l'amélioration de l'hygiène des villes, pour lesquelles l'épuration des eaux d'égouts est un des plus importants problèmes qui se posent. F. DiÉNERT, Docteur ès sciences, Chef du Service de surveillance des Sources de la ville de Paris. 4° Sciences médicales Regnault (Dr Félix), Lauréat de l'Académie des Sciences, Professeur au Collège libre des Sciences sociales. — L'évolution de la prostitution. — 1 vo. in-18 de 354 pages. (Prix : 3 fr. 50.) E. Flamma- rion, éditeurs. Paris, 1906. Morhardt (D' P.-E.). — Les maladies vénériennes et la règlementation de la prostitution au point de vue d'hygiène sociale. — 1 vol. in-8° de 216 pa- ges. (Prix : 5 francs.) O. Doin, éditeur. Paris, 1906. Dans le livre de M. Regnault, la prostitution est envi- sagée à tous ses points de vue, si différents : ethnogra- phique, historique, médical, hygiénique et social. Mais, à l'inverse des ouvrages analogues qui, en étudiant l'évolution de la prostitution, restent confinés dans le passé, celui de M. Regnault s'occupe surtout de la transformation qui s'opère de nos jours. Voici, dans cet ordre d'idées, les principaux faits qu'il note : Les maisons publiques tendent à disparaitre aujour- d'hui, et la diminution de leur nombre, aussi bien en France que dans tous les autres pays, semble devoir BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX ————————————————— être attribuée à un changement survenu dans les mœurs. Les lois empêchent actuellement les tenan= ciers de se livrer à la traite des blanches. Ils ne peu vent prendre que des filles majeures, par suite non aptes à la servitude. Aussi les maisons fermées se transforment-elles en maisons de rendez-vous, où la fille, plus libre, n’est plus logée et où elle participe aux recettes. Fait curieux : l’état sanitaire des maisons fermées et des maisons de rendez-vous s'est beaucoup. amélioré et la syphilis y devient rare. D’après M. Re- gnault, ce fait serait dù à ce que ces établissements sont tenus aujourd'hui de ne prendre que des filles majeures. Or, les prostituées contractent presque toutes la syphilis au début de leur carrière. et elles débutent mineures. Aussi sont-elles, en général, vac— cinées quand elles entrent majeures en maison. En ce qui concerne la réglementation de la prostitu= tion, fortement attaquée en ce moment, M. Regnault ne s'en montre pas très enthousiaste. Le système de réglementation qui lui paraît le mieux compris est. celui qui fonctionne en Norvège et au Danemark. Dans ces deux pays, les prostituées sont régies par la loi commune. Les mesures sanitaires prises vis-à-vis des vénériennes sont les mêmes qu’on prend en face des autres malades contagieux. C’est le médecin ou la commission sanitaire qui est chargé de faire respecter la loi, et la police est à ses ordres. Partant, plus de souveraineté policière, plus de mise en carte, plus d'inscriptions arbitraires, plus d'hôpital-prison. Comme tout vénérien des deux sexes, la prostituée est obligée de se soigner à domicile ou à l'hôpital. Elle y est in- ternée d'office, si elle constitue un danger social, et ne peut en sortir qu'avec l'autorisation du médecin. C'est encore à cette question de la réglementation qu'est consacrée une grande partie du livre de M. Mor— hardt. Après une étude très détaillée et strictement médi- cale de la syphilis et de la blennorragie, M. Morhardt cite un nombre considérable de faits et de statistiques: dont l'étude critique aboutit à cette conclusion, que- l'utilité de la réglementation est loin d'être démontrée. Pour lui, les prostituées sont craintes dans la mesure. où les maladies vénériennes le sont elles-mêmes, et c'est précisément cette crainte qui agit comme um moyen de prophylaxie. Tout système de réglemen- tation qui diminuerait cette crainte, laquelle est un moyen prophylactique, aurait donc pour résultat d’'en- rayer la diminution des maladies vénériennes. Par là, le résultat de la réglementation tend à devenir négatif, car les résultats qu'elle pourrait amener par ailleurs sont neutralisés par l'assurance — fausse le: plus souvent — qu'elle donne de ne pas contracter une maladie vénérienne. Et l'utilité de la réglementation étant ainsi mise en doute, M. Morhardt estime que:ce- système perd ainsi toute sa raison d'être. D' R. Roue, Préparateur à la Faculté de Médecine de Paris. 5° Sciences diverses De La Sante (Le P. Xavier), S. J., Professeur de: Rhétorique au Collège Louis-le-Grand. — Ferrum,. poème latin écrit en ATAT, traduit en vers français par M. F. Osuonn, /ngénieur métallurgiste. Vendu au prolit de la Société de Secours des Amis des: Sciences, chez le traducteur, 83, boulevard de Cour- celles, Paris. Les bibliophiles et les curieux d'histoire des Sciences. nous sauront gré de leur signaler cette élégante pla- quette, traduction, par un savant métallurgiste doublé d'un délicat lettré, du poème écrit en l'honneur du Fer par un jésuite qui fut le professeur de Turgot et d'Hel- vétius. Il nous suffit de dire que la traduction de M. Osmond est vendue au profit de la Société de- Secours des Amis des Sciences. LE LL SSL 2 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 11 Mars 1907. M. Jules Tannery est élu membre libre de l'Aca- démie, en remplacement de M. P. Brouardel. — M. le « Secrétaire perpétuel annonce le décès de M. F.-J. + Herrgott, Correspondant de l’Académie pour la Sec- . tion de Médecine et Chirurgie. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Kœnigs étudie les déformations élastiques qui laissent invariables les longueurs d'une triple infinité de lignes droites. — MM. Crussard et Jouguet appliquent leurs recherches sur les ondes de choc et de combustion à l'étude de la stabilité de l'onde explosive. — M. Giacobini a décou- vert le 9 mars, à l'Observatoire de Nice, une nouvelle comète; c'est une nébulosité d'aspect rond, de 20" de diamètre, avec un noyau de 11° grandeur. — M. H. Deslandres précise quelques détails de construction et d'emploi de son spectrohéliographe. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Maurice de Broglie montre que la présence des centres de faible mobilité dans les gaz issus des flammes paraît liée à la produc- tion dans la flamme de produits solides ou liquides ou à la présence des centres existant antérieurement à l'état normai dans l'air atmosphérique. — M. Eug. Demole, en plongeant une plaque impressionnée dans une solution de ferricyanure de K et la développant ensuite, à constaté que les effets d’une surexposition sont abolis et que l’image peut être renversée si on la développe en lumière blanche. Ces faits paraissent attri- buables à la formation d'un oxybromure d’Ag. M. M. François est parvenu à séparer l’ammoniaque des amines volatiles en traitant le mélange par HgO jaune, qui se combine à AzH* pour former un oxyde ammonio-mercurique et ne réagit pas sur les secondes. — M. N. Gréhant présente un eudiomètre-grisou- mètre qui permet de doser très exactement de petites quantités de formène dans l'air des mines. — M. L. Henry, en déshydratant le diméthylisopropylcarbinol {CH*}C(OH).CH(CH*) par chauffage avec l’anhydride acétique , a obtenu du méthylisopropyléthylène — 1 : 1, GHEIC PCRECE CH°}, Eb. 56°-58°, et du tétraméthylé- Miène (CH*}2C : C(CH*}?, Eb. 729-730. — MM. E.-E. el Blaise et M. Maire ont constaté que les cétones f- chloréthylées et vinylées réagissent facilement sur les dérivés sodés, tels que l'éther acétylacétique sodé ou l’acétylacétone sodée, pour donner des combinaisons cycliques. — M. A. Wahl, en faisant réagir la phényl- hydrazine sur le benzoylglyoxylate d’6 sthyle, a obtenu une hydrazone C‘H5.CO.C(: Az.AzH.C°H5).CO?CH5, iden- tique avec l’azoique dérivé de l’éther benzoylac étique, ce qui démontre la constitution de ce dernier. — MM. Em. Bourquelot et H. Hérissey ont retiré des graines lu Strychnos Bakanko de Madagascar un nou- veau glucoside, la bakankosine, lévogyre, hydrolysable par l'émulsine en donnant du d-glucose. — MM. E. Kayser et H. Marchand ont observé que l'addition de sels de manganèse au moût sucré a pour effet de “pousser beaucoup plus loin la fermentation alcoolique. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. R. Robinson signale l'existence d’une formation osseuse sous forme d’épine existant sur le bord supérieur des lames des trois der- nières vertèbres dorsales chez l'homme. — M. A. La- veran donne les résultats de la détermination d’un certain nombre de mouches piquantes rapportées de l'Afrique intertropicale. MM. W. Lubimenko el A. Maige ont étudié au point de vue cytologique le développement des cellules-mères du pollen de Ny- phea alba et de Nuphar luteum. — M. G. Lapie montre que la végétation forestière présente, dans la Kabylie occidentale, des zones végétales bien caracté- risées (zone du chène-liège, du chêne vert et du cèdre), nettement en relation avec les conditions cli- matologiques, topographiques et édaphiques des di- verses parties de cette région. — M. N. Jacobesco a observé sur des vieux troncs de chène de Roumanie des tumeurs occupant l'emplacement d’une branche morte ou d’un bourgeon dormant blessé. Elles sont dues à des champignons ascomycètes, dont les tissus se sont substitués à ceux de l'arbre : il y a là une sorte de pseudo-morphose végétale. — MM. R. Nicklès et H. Joly ont mis en évidence, dans le nord du dépar- tement de Meurthe-et-Moselle, l'existence de deux failles très importantes, de direction hercynienne, orientées du N.-E. au S.-W. Dans l'étendue comprise entre ces failles, les couches secondaires sont affectées par une allure en dômes et en cuvettes. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séaice du 16 Mars 1907% M'e von Linden pense que, si MM. Dubois et Cou- vreur n'ont pu reproduire ses expériences d’absorp- tion de CO? par les chrysalides de Lépidoptères, c’est qu'ils se sont servis d'une atmosphère trop sèche. — M. M. Doyon et Cl. Gautier ont constaté que la liga- ture des artères du foie détermine fatalement des acci- dents convulsifs. — M. Ch. Lesieur montre que le taba- gisme expérimental est caractérisé, à l’état aigu, par des convulsions épileptiques suivies de paralysie et de somnolence, et à l’état chronique par des lésions athé- romateuses de l'aorte. La dénicotinisation du tabac empêche ces etfets. — M. J.-J. Vassal à pu conférer aux Bovidés des races d'Annam, très sensibles à la pasteurellose, une immunité solide par les toxines. MM. H. Bierry et Giaja ont observé que le suc pan- créatique dialysé sur sac de collodion en présence d’eau distillée perd tout pouvoir sur l’amidon et le maltose ; il le recouvre par addition d'un électrolyte convenable. — M. H. Bierry a étudié l’amylase du suc PÉDÉRÉAAUE de sécréline. — M. R. Dubois a observé la formation du pigment dans les vacuolides de la glande à pourpre du Murex brandaris. — M, G. Rosenthal est parvenu à rendre aérobie le bacille du tétanos; il tend alors à devenir immobile. — M. A. Combault montre que les glandes calcifères des Lombrics sont de véritables branchies, les concrétions calcaires n'étant que le résultat du dégagement de CO*. — MM. G. Delamare et P. Lecène ont constaté la présence de lécithine dans le tissu des hypernéphromes, argument en faveur de l’origine surrénale de ces tumeurs. — MM. E. Sergent et E.-L. Trouessart ont découvert un nouveau type de Sarcoptide, le Ayialges anchora, vivant en para- site sur une mouche, la Lynchia maura, qui parasite elle-même le pigeon en Algérie. — MM. Alglave et Ed. Retterer montrent que, dans la phlébectasie, l'hypertrophie des tuniques précède leur dilatation. — M. Ch.-A. François-Franck à étudié, par la chrono- photographie, le trajet du courant de l’eau à travers la chambre respiratoire des animaux aquatiques. — M. E. Suchard a constaté, dans le système veineux de la Rana esculenta, la présence de valvules sigmoïdes très nombreuses, comparables à celles des Mammi- fères. - - M. M. Hanriot a observé que tous les pois sons, surtout ceux d’eau douce, sont très sensibles à l'action de la téphrosine, dissoute dans l’eau où ils vivent. — M. Ed. Retterer à reconnu que les tubes ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES collecteurs et sécréteurs du rein sont produits par le bourgeonnement de l'épithélium du canal rénal. — M. A. Netter signale les bons effets des sels de cal- cium dans le traitement de l’urticaire, de l’ædème aigu, des engelures et du prurit. — MM. J. Foucaud et G. Chamagne ont constaté que toutes les eaux de Châtel-Guyon contiennent des colloïdes électro-négatifs. — M'° L. Fassin à observé une augmentation de la teneur du sérum en alexine à la suite de l’ingestion de corps thyroïde. — MM. L. Salinat et G. Chamagne ont reconnu que toutes les eaux de Vichy, à l'excep- tion de l’eau des Célestins, contiennent des colloïdes électro-négatifs. — M. J. Baylac persiste à croire que les accidents gastro-intestinaux provoqués par les huîtres sont généralement le résultat d’une intoxica- tion due à leur altération. — M. G. Bohn a observé l'existence d’un rythme nycthéméral chez les Actinies. — M. A. Besredka propose de doser la toxicité des sérums thérapeutiques par injection intracérébrale chez le cobaye. — M. L. Perrier a étudié la structure de la spore du Sarcocystis Lenella du mouton et de la chèvre ; il en déduit que les Sarcosporidies doivent être placées à côté des Coccidies-Grégarines. — M. G. Froin montre que la diapédèse leucocytaire dans la pleurésie et la méningite tuberculeuses est due à l'action chimiotac- tique des globules rouges extravasés et détruits dans les liquides tuberculeux. — M. P. Salmon a constaté que l’arsenic, sous forme d'atoxyl, est un médicament spécifique pour la syphilis. — M. E. Maurel montre que la lapine pleine ingère plus d'aliments ternaires qu'elle n'en anormalement besoin et que le surplus sert en grande partie à la constitution du fœtus. — M. L. Launoy a reconnu que les chlorures des métaux bivalents favorisent l'autolyse aseptique du foie de lapin. — M. H. Lams à observé que l’'éosinophilie, au cours de la plupart des infections, est un indice de convalescence et constitue un pronostic favorable. — M. E. Fouard: Sur un mécanisme de coagulation des colloïdes organiques (voir p. 236). — M. Ph. Eisen- berg à observé que le vibrion septique et le bacille du charbon symptomatique peuvent sécréter in vivo et in vitro une leucocidine. — M. H. Iscovesco a employé les métaux colloïdaux électriques à petits grains dans un certain nombre de maladies infectieuses et a obtenu toujours de bons résultats, sauf dans la tuberculose pulmonaire. — M. A. Rance montre que la bilirubine et ses dérivés sont les seuls constituants colorés du plasma de cheval. M. H. Hérissey est élu membre titulaire de la Société. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du S Mars 1907. M. Brissemoret a envoyé une note sur une réaction colorée des tanoïdes. — M. V. Auger a fait réagir en tube scellé liodoforme sur le bichlorure de mercure, en solution méthylique.lla obtenu un mélange d'oxyde, iodure et formiate de méthyle. En opérant avec l’iodo- forme et l'alcool méthylique à 1409, il se forme de l’oxyde et de l'iodure de méthyle, de l'iodure de mé- thylène et de l’acide carbonique. La série de réactions, dans ce cas, pourra s'exprimer par : HCF + 3 CH°OH — HCO?CH* + (CH*)Ÿ0O + 31H; HCIS + 1H — CH?I2 + 21; HCO?CH® + 2 1 — CO? + CHI + IH. En distillant un mélange d'iodoforme et de HgCE, on obtient, en même temps que le produit connu HCICE, un nouveau composé HCIECI, bouillant vers 160° en- viron, cristallisant dans un mélange réfrigérant et fusible à — 4°. 1] continue l'étude de cette substance. — M. Gabriel Bertrand a trouvé, en faisant l'analyse d'un médicament secret, composé essentiellement de julep gommeux et de 1 millième de sulfate de strych- nine, que la strychnine est extraite-en totalité, à l'état de sulfate, par l'agitation du liquide acide avec du chloroforme. L’'extraction est si complète qu'on ne trouve plus ensuite d'alcaloïde quand on agite le mi lieu alcalinisé. — M. L. Bouveault expose les résulta préliminaires de ses recherches sur la condensatio des acyloïnes avec l’éther acétique. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du A Février 1907. M. W. B. Tuck montre, par l'examen spectrosco- pique, que les composés p-hydroxyazoïques à Vétat libre ont la constitution de dérivés azoïques ; il en est de même des éthers des composés 0-hydroxyazoïques, mais les dérivés benzoylés ont la constitution de qui- nones-hydrazones. — MM. Th. S. Patterson et A. Me Millan décrivent une nouvelle méthode pour l'étude des changements intra-moléculaires. — M. G. Senter a constaté que la décomposition hydrolytique de l'acide monochloracétique par l'eau chaude, suivant l'équation CHECI.CO*H + H?0 —CH°0H.CO*H — HCI, est strictement monomoléculaire jusqu’à une solution binormale. La décomposition du monochloracétate de soude par l’eau n'est monomoléculaire qu'en solution diluée. L'action de la soude sur le monochloracétate de sodium, d’après l'équation CHECI.CO®Na + NaOH—CH°OH.CONa L NaCI, procède environ dix fois plus rapidement que le chan= gement correspondant en solution aqueuse. La vitesse de réaction en présence d’alcalis est donc accélérée par les sels neutres, tels que NaCI. — MM. A. D. Hall et C. Th. Gimingham ont étudié l'action des sels d'ammonium sur les principaux constituants du sol. il y a, en général, enlèvement d'AzH° de la solution, lequel est remplacé par des quantités équivalentes de Ca, Mg et K; il n'y a pas de développement d'acidité. — M. J.C. Irvine et Mlle A. M. Moodie ont transformé l'o-diméthoxybenzoïine en hydrobenzoïne:; cette der- nière, réduite par le procédé de Baeyer, fournit le p-diméthyltolane. L'anisoïne, dans les mêmes condi- tions, donne de la déoxyanisoïne et du stilbène. = M. A. G. Perkin, poursuivant ses recherches sur leS constituants de l'indigo naturel, y a trouvé cons- tamment du camphérol, existant dans la plante sous forme de glucoside qui doit être hydrolysé au cours du traitement sulfurique. — M. J. C. Crocker a déterminé la vitesse d’hydrolfse des amides aliphatiques par HCI. Les réactions sont bimoléculaires et suivent la relation K=—1/at1/G—1/C), où x est le degré de dissociation de HCI. — M. W. R. Dunstan n'a pu confirmer les résultats de G.T. Moody d'après lesquels le fer ne peut se rouiller en l'absence de CO*. — M. M. Esposito à obtenu le lanthane, le praséodyme et le néodyme à un. état de grande pureté après 110 cristallisations frae= tionnées de leurs nitrates doubles avec l'ammonium. — MM. W. Caldweil et E. A. Werner ont constaté que, lorsque le dichlorure d'iodobenzène est chauffé, il se décompose entre 112 et 1360 en fournissant du p-chloroïodobenzène. Les dichlorures d’o- et p-iodoni- trobenzène, dans les mêmes conditions, perdent leur CI, tandis que le dérivé m- fournit un composé sub= stitué. — M. W. J. Young a cherché à déterminer la nature du composé phospho-organique qui se formé quand on ajoute un phosphate soluble à un mélangé en fermentation de jus de levure et de glucose, com posé qui accélère le dégagement de CO*. Ce composé peut être précipité à l’état de sel de plomb, de formule C*H*O*PPD. Il est hydrolysé en acide phosphoriqué et en une substance réductrice dextrogyre. — MM. W: H. Perkin jun. et G. Tattersall ont préparé le 2° cinéol par action de CH*Mgl sur l'acide éthylcyclohexa= none-3-carboxylique. SOCIETE ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 25 Janvier 1907. MM. G.-C. Schmidt et W. Hechler présentent une Note sur la conductivité électrique des vapeurs SalineS° Suivant l’opinion des anciens physiciens, les vapeurs ét les gaz, au delà de la température d'incandescence, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 299 EE EE] —"—" —" — …—"—"— — —…———— seraient dénués de toute conductivité électrique. Les travaux récents font voir, au contraire, que cette pro- osition, dans le cas, du moins, de l'air atmosphérique, est loin d'être vraie, l'air présentant toujours une cer- taine conductivité, faible à la vérité. Or, les auteurs étudient la question de savoir si les vapeurs de certaines substances organiques et inorganiques présentent des hénomènes analogues à l'air atmosphérique.Ils cons- tatent que beaucoup d'entre elles, même a des tempé- -ratures relativement basses, sont extrèmement bonnes -conductrices. Il convient, donc, de distinguer deux classes de vapeurs: celles appartenant à la première ne conduiraient point l'électricité après fusion ou su- blimation, tandis que celles de l’autre seraient bonnes conductrices dans ces conditions. La première classe comprend la plupart des substances organiques et cer- tains composés inorganiques. Les mesures quantitatives jusqu'ici faites sur le Cd font voir que la conduction de l'électricité dans cette vapeur suit la loi d'Ohm. — M.F. Dessauer présente une Note préliminaireausujet d'un nouvel emploi des rayons Hoentqen. Depuis quel- ques années, les rayons X, qui autrefois étaient em- ployés exclusivement pour les usages diagnostiques, trouvent des emplois thérapeutiques immédiats. Les effets en question exercés par les rayons X sont loin d’être parfaitement élucidés ; cependant, il paraît bien établi que les cellules pathologiques, riches en proto- plasma, succombent les premières sous leur action, tandis que les cellules organiques, mûres et saines, leur opposent une résistance plus efficace. Quoi qu'ilen soit, la thérapeutique des rayons Roentgen se trouve en défaut toutes les fois qu'il s'agit de processus morbides localisés à une certaine profondeur. L'auteur désigne, sous le nom d’ « énergie thérapeutique » ou « énergie physiologique » des rayons X, leur puissance » d'action sur la cellule. Cette énergie semble être, en général, proportionnelle à la puissance chimique des rayons X ; elle s'exerce à la surface avec une intensité cent fois plus grande qu'à une profondeur de 5 milli- mètres. Cette décroissance rapide pour des profondeurs croissantes expliqué l'meflicacité des méthodes roent- génographiques dans toutes les affections profondes. L'auteur en attribue la raison aux dispositifs mêmes dont on se sert dans ces expériences et qui, en général, comprennent une bobine d'induction avec son inter- rupteur. Aussi il conseille d'abandonner complètement ces dispositifs. Lorsque l’anticathode, origine de la ma- jeure partie des rayons, n'est située qu'à environ 20 centimètres de la peau, l'énergie physiologique du rayonnement ne peutévidemment guère s'exercer qu'à * la surface de la peau, les rayons les plus doux (qui, dans ce cas, sont les plus énergiques) étant précisément ab- sorbés dans la couche superficielle de la peau. D'autre pärt, les effets, comme on le sait, diminuent en raison directe du carré de la distance. Il s'agissait donc de trouver un dispositif assurant un rayonnement sensi- blement homogène. Or, pour que le rayonnement reçu par un corpssoit homogène, les distances en profondeur doivent être négligeables en comparaison de la dis- tance de la source des rayons; d'autre part, le rayon- nement X doit être aussi homogène que possible et d’un pouvoir de pénétration extraordinaire, pour que l'absorption soit sensiblement homogène dans toute la région intéressée. Voici le dispositif imaginé par l'au- teur: Dans une salle au plancher d'une superficie d'en- viron 20 mètres carrés et d’une hauteur de #4 à 5 mètres, on dispose au plafond, sur des supports iso- lants, deux ampoules ou un nombre plus grand d'am- poules Roentgen. Ces dernières, très dures, fournissent unrayonnement d'une pénétration énorme, dont on ne peut guère déterminer le pouvoir de pénétration à l’aide de l'échelle courante de Wehnelt. Le rayonne- ment, qui est un rayonnement secondaire presque pur, - peut être considéré comme homogène à proximité du Lal plancher de cette salle, produisant une fluorescence uniforme de l'écran lumineux et ne décelant guère de différence entre la chair et les os de la main. Parmi les effets constatés sous l’action de ce dispositif, il convient de mentionner l'électrisation énorme à laquelle le corps se trouve soumis dans une salle pareille. Le dispo- sitif déerit ci-dessus trouvera sans doute d’intéressants emplois en médecine. — M. G. von Ubisseh à fait des recherches sur le galvanomètre comme instrument de zéro, dans les mesures de courants alternatifs, recher- ches dont il résulte que cet instrument est d'une sen- sibilité considérablement supérieure au téléphone dans les ponts à courant alternatif. Il convient de choisir un instrument d'une grande résistance interne. ALFRED GRADENWITZ. ACADEMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 23 Février 1907. 1° S@iENGES MATHÉMATIQUES. — M. J.P. van der Stok: Sur le traitement des observations du vent. L'auteur propose d'enregistrer la distribution annuelle des vents d’après la vitesse et la direction en un point quelconque de la surface terrestre à l’aide de cinq quantités : la grandeur et l’azimut du vecteur se terminant au centre de gravité de masses égales placées aux points ter- minaux des vecteurs indiquant la vitesse et la direction du vent dans les observations, l’azimut du grand axe et les longueurs des deux axes de l’ellipse d'inertie déduite de la position de ces masses par rapport au centre de gravité. Il applique ces idées à deux séries d'observations : 1° les observations faites à Bergen (Norvège) pendant vingt années, de 1885 à 1904, trois fois par jour, à 8 heures du matin et 2 et 8 heures du soir: 2° les observations faites à Falmouth (sur la Manche) de 1874 à 1886 et de 1900 à 1903, les observa- tions intermédiaires de 1887 à 1899 étant publiées dans une forme moins favorable au but, six fois par jour avec des intervalles réguliers de quatre heures. Ces deux cas ont été choisis parce qu'ils représentent deux types. A Bergen, l’ellipse des vents variables est très constante et de forme très allongée; à Falmouth, cette ellipse est à peu près un cercle. Ainsi les observations de Falmouth se prêtent spécialement à une comparai- son des résultats calculés et observés (Tableau I, p. 300). — M. IH. G. van de Sande Bakhuyzen présente au nom de M. A. Brester, pour les Mémoires de l’Académie : « Explication du mécanisme de la périodicité dans le Soleil et les étoiles rouges variables ». Sont nommés rapporteurs MM. W. H. Julius, J. C. Kapteyn et F. H. Schreinemakers. 20 SCIENCES PHYSIQUES. M. H. G. van de Sande Bakhuyzen, président de l'Académie, fait ressortir l'œuvre physico-chimique remarquable de M. H. W. Bakhuis Roozeboom, surtout en ce qui concerne l'appli- cation de la théorie des phases à la Chimie, qui donna un nouvel élan à la doctrine de l'équilibre chimique. M. Roozeboom, décédé il y a quelques jours, naquit à Alkmaar en 1854; depuis 4890, il était membre de l'Académie, et depuis 1896, professeur de Chimie à l'Université d'Amsterdam, où il succéda à Van’t Hoff. — M. J. D. van der Waals : Contribution à la théorie des mélanges binaires. La théorie des mélanges binaires, développée par l’auteur dans sa «Théorie moléculaire », a provoqué un grand nombre de recherches expéri- mentales et théoriques qui ont contribué beaucoup à la connaissance des phénomènes qui se présentent dans les mélanges. Néanmoins, plusieurs questions importantes sont restées irrésolues : ainsi, celle de la classification des groupes différents de surfaces 4. Quelques mélanges binaires admettent une surface % dont le pli présente une forme bien simple, tandis que le pli de la surface d’autres mélanges binaires est assez compliqué, ou que la surface possède encore un second pli. Jusqu'à présent, on ne connait pas la cause de cette différence; on ignore même comment la mettre en rapportavec d’autres propriétés saillantes de groupes particuliers de mélanges. Il est vrai, la théorie fait connaître l'équation de la courbe spinodale qui borne le pli, et la connaissance absolue de cette équation doit 300 ACADÉMIES ET SOCIETES SAVANTES fournir à l'analyse les moyens de classifier les sur- faces 4. Mais l'équation est très compliquée et — ce qui est pis encore — pour le cas des petits volumes elle ne forme qu'une approximation assez grossière. Guidé par ces remarques, l'auteur a cherché une manière d'attaquer le problème plus intuitive que la manière analytique; cette méthode permet d'indiquer une cause dont dépendent les diverses formes du pli et fait donc apparaître sous un nouveau jour plusieurs phénomènes partiellement connus. D'après la théorie, pour une température donnée, dans les phases coexis- tantes, les trois quantités dy d (dy dy (à). (A) aa dv NET À Ux vT doivent admettre des valeurs égales. La première de ces {rois quantités est la pression p; la seconde est la différence des potentiels moléculaires M,u, — Mu, — 9; la troisième est le potentiel moléculaire Mu, de la première composante. Le lieu des points admettant une valeur donnée de p est une courbe, qui se transforme d'une manière continue si p varie; l’ensemble de ces courbes p — c forme le diagramme (v, x) tout entier. De même, le lieu des points admettant une valeur TABLEAU I. équilibres métastable et labile des solides-fluides. Dans la rédaction des lecons de Thermodynamique professées par M. van der Waals, l’auteur parvient à d'autres résultats sur quelques questions particulières relatives à la courbe des trois phases et aux équilibres métas- table et labile des solides-fluides. Ici il fait connaître ces déviations. — M. H. Kamerlingh Onnes, aussi au nom de M. W. H. Keesom : Supplément à la commu- nication : Contribution à la connaissance de la Sur- face % de van der Waals. XN. Cas où l’une des deux composantes est un gaz sans aftraction, à molécules admettant des dimensions. Miscibilité restreinte de deux gaz. 1. Introduction. 2. La forme des courbes spinodales et du pli de la surface Ÿ. 3. Miscibilité res- treinte de deux gaz. 4. Distinction des états gazeux et fluide. 5. La surface de saturation pour les équilibres sur le pli gaz-gaz. 6. Conditions sous lesquelles une miscibilité restreinte devient probable. — M. P. van Romburgh, aussi au nom de M. A. D. Maurenbre- cher: Sur l'action de bases, d'ammoniaque et d'amines sur la S-trinitrophéenyl-méthylnitramine. — M.A.P.N. Franchimont présente au nom de M. F. M. Jaeger : Sur les phases liquides et anisotropes de l'éther buty- rique de la dihydrocholestérine et sur la question de — Fréquences de vitesses du vent sur 10.000. HIVER PRINTEMPS KILOMÈTRES AUTOMNE par heure Observé | Calculé Observé | Calculé 760 .871 1.853 . 701 .466 967 680 369 199 94 39 22 569 LH IH Difrér. DH HI TI Observé | Calculé Différ. | Observé | Calculé 588 .119 2.304 -818 2.110 .281 -064 192 920 164 179 66 20 5 Il 936 .126 14 187 314 159 245 203 22 20 19 42 9 9 = NN ND + HAE ++ donnée de ÿ se transforme d’une manière continue si q varie, el toutes ces courbes q=c' recouvrent le dia- gramme (v, x). Chacun de ces deux groupes de courbes Jouit de la propriété que, par un point quelconque du diagramme, il ne passe qu'une courbe unique du groupe. Au contraire, une courbe p—ce coupe une infinité de courbes g=c' et réciproquement. Même une courbe p— e coupe une courbe g— c! en plusieurs points : si deux points du diagramme représentent des phases coexistantes, les courbes p—e, q—c' qui con- tiennent l'un de ces points passent aussi par l'autre. Cependant, chaque couple de points d'intersection d'une courbe p == e avec une même courbe q ne fait pas encore trouver deux phases coexistantes, car il y a encore une troisième condition, celle que la quantité M,u, ait la même valeur pour les deux points du couple. — Voici donc la conclusion : si, dans le plan du dia- gramme, on à construit et coté toutes les courbes pc, q=—c'de manière qu'on apercoive tout de suite les couples de points d’intersection, l'on a tout de même besoin d’une certaine loi faisant connaitre les couples de points correspondant à des phases coexis- tantes. Dans cette étude, qui se continue, l’auteur s'occupe donc de la forme des courbes DEC den a forme des courbes g— c' et de la loi à laquelle nous avons fait allusion. — Ensuite M. van der Waals pré- sente deux communications au nom de M. Ph. Kohns- tamm : 1° Sur la forme de la courbe des trois phases solide-fuide-gazeuse d'un mélange binaire: 2 Sur les Savoir Si la présence d'une double liaison éthylénique est nécessaire pour la génération de ces phénomènes. — M. P. Zeeman présente, encore au nom de M. E. M. Jaeger : Sur l'influence de la lumière sur la condueti- bilité électrique de l'antimcine japonais. 3° SCIENCES NATURELLES. M. A. A. W. Hubrecht présente un mémoire de M. H. Strahl de Giessen, intitulé : Der Uterus puerperalis von Erinaceus euro- paeus (L'utérus puerpéral du hérisson). P. H. Scnoure. ERRATUM M. le lieutenant-colonel Bourgeois nous signale une erreur matérielle de copie dans l’article de la Revue du 30 janvier 1907 sur « l'Etat actuel de la Géodésie », au paragraphe 2 relatif aux Mesures de bases, et nous prie de la rectifier. Il y a lieu de lire, page 56, 2° co- lonne, vers le bas de la page : « MM. Benoît, Guillaume et Carpentier », au lieu de « MM. Guillaume et Carpen- tier ». L'appareil actuel de mesures de bases du Bureau International des Poids et Mesures est, en effet, comme on le sait, le fruit de la collaboration étroite du diree- teur de ce Bureau, du directeur-adjoint et de M. Car- pentier. Note DE LA RÉDACTION. Le Directeur-Gérant : Louis Oivier. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Casselte. >» a De 7 18° ANNÉE 30 AVRIL 1907 Revue générale PSS CCnTOES pures el appliquées DirecrEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L, OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Mort de Marcelin Berthelot. — L'étude que la Revue compte consacrer à la vie et à l'œuvre de l'il- lustre philosophe et chimiste français paraîtra dans l’un de ses prochains numéros. H. Moissan. — Après Curie, qu'un accident stupide enlève à la science, c’est Moissan qu'une maladie trai- tresse ravit en quelques jours à l'affection des siens. Nous voudrions, en quelques lignes, rappeler la vie si bien remplie par un labeur incessant de celui qui fut un Maître de la Chimie minérale en France. Né à Paris, le 28 septembre 1852, Ferdinand-Frédéric- Heari Moissan montra de bonne heure son goût pour les recherches expérimentales, car l’année même où il fut reçu bachelier, il publiait, en collaboration avec son maître, P.-P. Dehérain, un travail sur la respira- tion des feuilles à l'obscurité. Recu licencié ès sciences physiques en 1877, pharmacien de première classe en 1879, il devint docteur ès sciences physiques en 1880 avec une thèse sur les oxydes métalliques de la famille du fer. Le fluor était à cette époque un corps inconnu, que quelques chimistes seuls avaient entrevu, comme Frémy dans l’électrolyse du fluorure de potassium fondu, mais sans pouvoir l'isoler et le conserver. La première ambition du jeune chimiste fut de réaliser ce problème. Renonçant à l'emploi des électrolytes fondus, il cherche à retirer le fluor de ses différentes combi- naisons gazeuses : fluorures de silicium, de phos- phore, etc. Mais ce n’est pas sans peine qu'il trouve un asile. Ces coùteuses recherches forcent d'abord _ Moissan à travailler au laboratoire de l'Ecole Normale Supérieure, où seul se trouvait alors l'important matériel de platine nécessaire à ses études; mais bientôt, à la suite des observations de Debray, reculant devant les dépenses occasionnées par les tubes de pla- tine fondus ou détériorés par le phosphore des fluo- rures qu'il essayait de décomposer, le jeune savant dut émigrer vers d'autres laboratoires, où il trouva une hospitalité passagère. C'est en 1886 qu'il réussit la première électrolyse de REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. l'acide fluorhydrique anhydre, qu'un heureux hasard avait rendu conducteur, et isola enfin le fluor. Cette belle découverte mit en relief le jeune chimiste (il avait alors trente-quatre ans); mais ceux qui le connurent à cette époque savent seuls ce qu'il lui a fallu de persévérance, d'énergie et d'audace pour obtenir ce corps si dangereux à manier, d'étude si dif- licile et coûteuse; car il fallait n'employer que des appareils en platine et engager souvent des dépenses considérables avec des crédits infimes. Mais aussi, une fois l'appareil producteur de fluor construit, quelle mine féconde s'ouvre à l'intrépide chercheur : les découvertes de corps nouveaux se suc- cèdent chaque jour : fluorures de platine, de carbone, d'arsenic, etc. Aussi l'Académie des Sciences l’honora - t-elle, en 1887, du Prix Lacaze et, en 1891, l'appela, à trente-neuf ans, à succéder à Cahours. En décembre 1892, Moissan construisit le premier four électrique, dont il allait tirer un si grand parti. Le four électrique existait bien dans l'industrie, mais sous une forme très incommode pour l'étude, C’est en observant à l'Ecole Normale tout le parti que l'on irait, pour la fusion du platine, de creusets en chaux, qu'il eut l'idée d'employer cette matière si peu con- ductrice de la chaleur pour construire le four qui porte son nom. Au début, une petite machine de 8 chevaux lui donne déjà d'intéressants résultats; maître de son procédé, il augmente la puissance de ses fours el emploie des forces électriques de plusieurs centaines de chevaux, que l'industrie met à sa disposition. C'’es! dans ces expériences qu'il reconnut, dans l’action du carbone sur ia chaux, la formation du fameux carbure de calcium tant employé aujourd'hui; il donna la composition et décrivit les propriétés de cet intéressant composé, entrevu déjà par quelques industriels. La facile production de températures très élevées dans son four électrique permit à Moissan d'étudie: systématiquement comment, dans ces conditions, le carbone réagit sur les oxydes en donnant sait le métal, soit un carbure, et c'est ainsi qu'il obtint, dans un état de pureté ignoré jusqu'alors, une foule de métaux peu connus, de carbures, de siliciures, de borures inconnus. Il faut avoir vu le beau spectacle d’un four électrique S 302 en marche pour apprécier la grande habileté expéri- mentale de Moissan, qui, de ces creusets portés à des températures extrèmes, faisait sortir, toujours de plus en plus nombreuses, des découvertes de substances nouvelles dont la description remplit les pages des Comptes Rendus de l'Académie des Sciences. C'est en étudiant toujours le carbone à des tempéra- tures où il se volatilise avec facilité que Moissan songea à ce problème si captivant de la formation du diamant. Despretz avait bien reconnu que, dans l'arc élec- trique, le carbone volatilisé se condense sous forme de graphite; l’on savait aussi que le diamant, chauffé au rouge blanc, se transforme facilement en graphite; le diamant n'était donc pas formé à haute température, et cependant, dans tous ses essais pour le préparer à froid, Moissan obtint toujours du carbone amorphe, L'étude de la terre bleue du Cap et de certaines météorites, notamment celle de Cañon Diablo, où l’on avait déjà trouvé dans du fer des cristaux de diamant, le conduisit sans doute à l’idée que cette gemme avait dû se former sous pression dans de la fonte fondue, et cette hypothèse lui suggéra de nombreuses et belles expériences pour réaliser des milieux propices à sa formation; mais, s'il obtint des produits cristallisés qui semblaient être du diamant, il ne put préparer ainsi que des cristaux microscopiques. Ces expériences rendirent le nom de Moissan popu- laire dans le grand public. Après avoir résolu ces deux intéressants problèmes, Moissan, avec l’aide de collaborateurs dévoués, se pro- posa l'étude systématique de nombreuses substances mal et insuffisamment connues, et il n’est point de partie de la Chimie minérale où ses recherches n'aient porté une intense lumière. C’est ainsi qu'il prouva que l'hydrure de silicium spontanément inflammable doit cette propriété à la présence d'un autre hydrure, comme le gaz de Gingembre doit son inflammabilité au phosphure d'hydrogène liquide; et, en appliquant à la séparation de ces gaz les procédés de la technique moderne, il put montrer comment, avec des froids gradués allant jusqu'à celui que produit l’évaporation de l'air liquide, on peut isoler et purilier les gaz par une espèce de distillation fractionnée. À On ne peut énumérer tous les corps nouvéaux isolés dans ces magistrales recherches; mais il faut citer cependant la préparation du calcium et celle de nombreux hydrures et ammoniums métalliques, qui lui fournissent le sujet de nombreux mémoires. Puis, revenant toujours à son four électrique, Moissan montre que toutes les substances connues, y compris les métaux les plus réfractaires, peuvent y être fondues et distillées, et il déduisit de ces expériences une limite de la température solaire. Mais aussi quelle immense somme de travail repré- sentent toutes ces découvertes accumulées, ses livres sur le fluor, le four électrique, ouvrages traduits en toutes les langues, et son grand Traité de Chimie minérale, en cinq gros volumes, qui est l'exposé complet des découvertes de la science minérale moderne, et dont la bibliographie, faite avec un soin extrême, rend ce livre si précieux pour le chimiste! Cela explique pourquoi Moissan n'avait jamais voulu se tenir bien au courant des conceptions si chan- geantes de la Chimie physique, qui met tout en équa- tions. Il était de la race des expérimentateurs de la vieille école, comme il le disait lui-même. Et je ne parle pas du temps perdu dans les Commis- sions et dans les Ministères, où sa parole était si écoutée. Triste rançon de la gloire que tous ces examens, ces travaux, ces rapports inutiles que l’on impose aux Maitres de la science. Moissan ne fut pas seulement l'honneur de la Chimie francaise, mais encore, comme le montre le prix Nobel qui Jui tut décerné il y a quelques semaines à peine par l'Académie de Stockholm, un des maîtres de la Chimie mondiale. A. Guntz, Professeur à l'Université de Nancy. _ CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE H. W. Bakhuis Roozeboom. — Bakhuis Rooz boom naquit à Alkmaar, le 24 octobre 1854 A l'écol moyenne, ses talents peu ordinairesattirèrentl'attentio de ses précepteurs, surtout de M. Boeke, directeur d l'école et professeur de Chimie; après avoir passt l'examen de sortie, il continua à s'exercer dans. Chimie pratique au laboratoire de M. Boeke. Ains préparé, il put aider M. J. M. van Bemmelen, qu s'était chargé de l'examen des substances formant le sol du Ypolder, puis s’engagea ensuite dans le burea de recherches chimiques du D' Mouton, à La Haye. En 1878, il fut nommé assistant au Laboratoire de Chimie organique de l'Université de Leyde, et c'est dans cette atmosphère scieatifique qu'il trouva, en contact conti nuel avec son chef, M. van Bemmelen, qui lui accor= dait une grande liberté, les circonstances les plus favo: rables pour la continuation de ses études académiques et de ses recherches scientifiques. Après avoir fait connaître, en 1881, un nouveau composé du bromure d'ammonium et du brome, il publia un Mémoire important sur les hydrates du chlore, du brome, de l'acide sulfureux et de l'acide chlorhydrique. Dans ce travail, il montrait comment la constitution des solutions aqueuses se modifie avec la pression et la température et déterminait les courbes des équilibres de dissociation. En 1884, il soutint une thèse sur le même sujet, et bientôt il découvrit qu'à la même température il y a, sous des pressions différentes, deux espèces de solutions de l'acide bromhydrique. Cette découverte importante était due à une expéri- mentation systématique, où le choix de la substance et le caractère des expériences furent déterminés par le but même que M. Roozeboom se proposait. Dans la séance de décembre 1884, M. van Bemmelen fit part de cette découverte à l’Académie des Sciences d'Amster- dam, et la communication de ce phénomène surprenant de Roozeboom fut l'instigation qui conduisit M. J. D. van der Waals à étudier les lois qui se manifestent aussitôt qu'une matière solide de constitution constante change d'état d’agrégation. Le rapportentre les quan- tités physiques qui influencent ce changement, com- muniqué par van der Waals dans la séance de février. 1885, devint le principe directeur des investigations suivantes de Roozeboom. En attendant, M. Roozeboom avait continué ses expé- riences; ainsi, en 1885, il put publier les résultats complets de ses recherches sur l'acide bromhydrique hydraté, illustrés par une représentation graphique de la limitation des domaines où les différentes conditions peuvent se réaliser. Le développement ultérieur des idées de Roozeboom fut beaucoup influencé par l'étude de l’œuvre bien connue de Gibbs, sur laquelle van der Waals dirigea son attention. Après l'étude de ee travail magistral, en suivant la doctrine des phases de Gibbs, il lui fut possible de donner à ses résultats un caractère plus général et d'en appliquer les principes à des substances plus compliquées. Après avoir surmonté d'une manières remarquable les difficultés que lui imposait la néces=. sité de se servir de températures très basses et de pressions de 100 atmosphères et plus, il donnait en 488%, un aperçu systématique des différentes formes de l'équilibre chimique hétérogène, éclairci théoriquement etexaminé expérimentalement pour quelques systèmes: Par des dessins et modèles ingénieux, il fit ressort clairement les changements dans la constitution des substances réunies. Bientôt l'étude de l’astrakanite, composée de trois substances différentes, vint élargir ses idées; ainsi il fut le premier à appliquer la théorie des phases de Gibbs à la Chimie, ce qui ouvrit à cette M science de nouvelles perspectives. En effet, comme la dit W. Nernst, « ce qu'on avait trouvé autrefois sur la formation des sels doubles, c'était la conséquence du M hasard aveugle »; au contraire, on peut maintenant, guidé par la théorie de Roozeboom, découvrir avec certitude tous les composés possibles entre deux, trois et même quatre substances. Dans cette voie, Roozeboom CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 303 …æt, avec lui, ses disciples, Stortenbeker et Schreine- makers, ont recueilli des résultats considérables. En 1896, M. Bakhuis Roozeboom fut nommé profes- seur à l'Université municipale d'Amsterdam, où il suc- céda à van’t Hoff, parti pour Berlin. C’est là surtout “que s'est manifestée la grande fertilité de ses théories dans leur application à la doctrine des cristaux mixtes, à la constitution de l'acier, aux équilibres des mélanges pseudo-binaires, aux cristaux fluides, etc.; de plus, un “grand nombre de thèses soutenues par ses élèves montrent comment Roozeboom sut former des disci- _ples. A Amsterdam, il put trouver le loisir nécessaire à la éalisation d'un but qu'il s'était proposé déjà à Leyde : “celui de rassembler tous les résultats de ses études dans un ouvrage sur la théorie des phases; de ce tra- yail important, qui devait paraitre en trois volumes, «eux volumes seulement ont été achevés. …— Dans notre Académie, à laquelle il appartenait de- puis 4890, il était un des membres les plus productifs: “nous avons encore à l'esprit l'enthousiasme avec lequel il communiqua à maintes reprises les résultats de ses recherches. Tout en étant heureux de ce que Bakhuis -Roozeboom a donné durant sa vie active, la pensée de “ce qu'il aurait éncore pu faire, s'il ne nous avait pas été ænlevé à l’âge de 52 ans, nous rend sa perte encore plus sensible. … Certainement, parmi les personnes qui se vouent aux sciences, il en est peu qui aient eu la chance de trouver “un terrain non encore défriché et d’une fécondité telle que celui exploré par Bakuis Roozeboom, et le nombre des grands hommes, capables de tirer complètement parti d’une telle trouvaille et de récolter en quelques années toute une moisson scientifique, est encore plus petit. Pour y réussir, on doit posséder les facultés caracté- ristiques que nous avons admirées chez notre regretté collègue : non seulement une grande somme d’éru- -dition, mais surtout la prévision scientifique générale, “une force de travail inépuisable et la volonté ardente de parvenir au but proposé sans jamais s'écarter du chemin qui y mène. A celui qui a profité merveilleusement de ces qua- lités admirables et qui a fait progresser la science “qu'il aimait de tout son cœur, nous apportons un hommage respectueux; à l'ami, nous rendons ici notre “dernière salutation*. \ H. G. van de Sande Bakhuyzen, Président de l'Académie des Sciences d'Amsterdam. N 2. — Mathématiques Récentes applications de la théorie des équations intégrales. — La (héorie des équations intégrales, fondée par M. Fredholm et reprise par M. Hilbert, à, comme on sait, permis de résoudre par - une méthode unique, générale et simple, touteune caté- » gorie de questions — problème de Dirichlet, distribution - électrostatique, vibrations harmoniques, ete. — qui se posent à peu près dans toutes les branches de la Phy- “sique mathématique et qui avaient coûté de longs et pénibles efforts avant son introduction. Elle recoit d'ailleurs continuellement de nouvelles applications à d'autres questions analogues, qui auraient offert des difficultés plus grandes encore si on avait voulu les aborder par les moyens antérieurs. Mais, en même temps, il est inévitable qu'elle conduise à résoudre des problèmes entièrement nouveaux et notablement différents des premiers. Un de ces problèmes s’est présenté à M. von Zeipel. Ge savant a appliqué la méthode de M. Fredholm à la discussion d’une idée de lord Kelvin, relative à la dis- tribution des étoiles dans les amas stellaires. Il s’agit “lé savoir si cette distribution peut être assimilée à celle , © Discours prononcé à l'Académie des Sciences d'Amster- «am. que l’on déduirait des théories cinéliques pour des molécules s'attirant mutuellement d'après la loi de Newton, et que l’on obtient précisément par une équa- tion intégrale. I] faut résoudre cette dernière, non plus au point de vue théorique, mais de manière à aboutir au calcul numérique de la solution; et c'est ce que permet la méthode de Fredholm. M. von Zeipel arrive, par cette voie, à constater un accord suffisant avec l'observation, du moins en laissant de côté les parties périphériques de l’amas. Mais, auparavant, une question d'une portée bien plus considérable au point de vue de la philosophie naturelle et de l'explication du monde physique, s'était posée à M. Fredholm lui-mème. Toutes les périodes harmoniques obtenues dans l'étude du son et des divers phénomènes vibratoires de la Mécanique présentent un caractère commun : elles tendent vers zéro à mesure que leur rang augmente. En langage concret: une corde, une membrane peuvent rendre une infinité de sons harmoniques; mais, parmi ceux-ci, ceux dont la hauteur est inférieure à une limite donnée sont en nombre fini. La répartition des raies spectrales offre des circon- slances toutes différentes. Ces raies ont, pour chaque corps, des positions parfaitement déterminées {absolu- ment comme sont déterminés les sons propres d’une corde ou d'une membrane); mais elles vont en se con- densant dans le voisinage de certaines longueurs d'onde particulières, différentes de zéro. Tant qu'on n'était pas en possession d'une théorie gé- nérale de ces phénomènes au point de vue mathéma- tique, on a dû se contenter de noter la différence qui existe entre les deux cas. Mais, actuellement, nous savons que tout phénomène régi par une équation intégrale du type classique, dans laquelle le paramètre qui représente la fréquence figure en facteur dévant le terme intégral, ne peut conduire qu'à des périodes réparties comme celles du son. Cependant, l'analogie entre les deux classes de phéno- mènes est indéniable : l'existence de périodes propres déterminées est assez manifestement el assez étroite- ment liée à celle d’une équation intégrale pour nous montrer comme entièrement nécessaire l'intervention d’une équation de cette espèce dans la production des vibrations spectrales. Mais cette équation ne pourra pas faire intervenir la fréquence sous la même forme que les équations con- nues. M. Ritz, dans une Thèse récente, est parvenu à constituer un système mécanique répondant à ces conditions. Mais ce système est très compliqué. L'in- terprélation mécanique obtenue ensuite par M, Fred- holm est, au contraire, extrèmement simple. Elle consiste à admettre que deux molécules exercent l'une sur l’autre une action proportionnelle à la différence de leurs écarts par rapport à leurs positions d'équi- libre respectives. Dans ces conditions, on trouve une équation intégrale où la fréquence figure dans le coef- ficient, non du terme intégral, mais du terme fini. Il n'est pas démontré que les forces véritablement agissantes soient celles de M. Fredholm; mais il est certain qu'elles doivent se comporter de même vis-à- vis de l'équation intégrale qu'on en déduit. $ 3. — Astronomie Sur le spectre des étoiles nouvelles. — On sait que le spectre des étoiles nouvelles est caractérisé par l'apparition de raies doubles, composées d'une raie brillante, dans la position normale, et d'une raie noire déplacée vers le violet. Ce dédoublement a été constaté dans le spectre de toutes les étoiles nouvelles parues dans ces dernières années. L'explication de lord Kelvin consiste à supposer qu'on est présence d'une éruption d'hydrogène. Par suite d’une collision de deux étoiles, une partie de la masse gazeuse sera portée à une température très 304 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE élevée, sans énergie cinétique; une autre partie sera lancée de tous côtés à une vitesse énorme, sans éléva- tion de température, et cette partie, le gaz refroidi, absorbe les radiations du noyau incandescent. La matière absorbante élant toujours en mouvement vers nous, les raies d'absorption se déplacent vers le violet. Cette théorie ingénieuse a été développée plus tard par MM. Halm, Pickering, et surtout par M. Véry; cepen- dant, on est loin d'en avoir tiré toutes les conséquences, et un spécialiste réputé en ces matières, M. H. E. Lau, vient, dans une intéressante communication", d'établir quelques théorèmes concernant la position, la largeur et la courbe d'intensité des raies d'hydrogène. Toutes les variations spectrales théoriques dépen- dant de l'expansion d'une couche gazeuse, et la cause déterminante peut rester tout à fait indéterminée, de sorte que l’on serait justifié, au besoin, à abandonner l'idée d'une collision sans que les développements de l’auteur perdent leur validité. Si, avec M. Lohse, on invoque l'explosion d'origine chimique, on obtiendrait évidemment les mêmes effets. Toutes les couches gazeuses situées au delà du niveau de la couche explo- sible seront, au moment de la catastrophe, jetées en haut, et les variations du spectre seront absolument parallèles à celles de la théorie de Kelvin. La commu- nication de M. Lau est fort instructive, et nous atten- dons avec impatience qu'il développe, par ailleurs, les théories chimiques, ainsi qu'il en prend l'engagement : ces théories, en effet, présentent le grand avantage que la quantité d'énergie dégagée est très faible, ce qui expliquerait la courte durée de l'activité des étoiles nouvelles. $S 4. — Physique Images de médailles produites par les rayons X et du radium.— Au cours d'expériences faites pour vérifier les résultats de MM. Petri et Kahlbaum, M. Ch. R. Jensen® avait posé une pièce de 4 pfennig, une de 50 pfennigs et une de 10 marks, ainsi qu'un clou de fer et plusieurs fils de différentes ma- tières, sur le côté sensibilisé d'une plaque de Schleussner, de facon à placer le clou entre la pièce d'or d'un côté et les deux autres pièces de l’autre. Or, après avoir exposé la plaque photographique pendant deux heures au rayonnement de 8 à 9 milligrammes de bromure de radium à la distance de 6 centimètres, l'auteur observa un phénomène assez curieux : les chiffres des pièces de 1 et de 50 pfennigs étaient reproduits sur la plaque, bien qu'avec une intensité faible. Cette expérience a été répétée avec une exposition de vingt-quatre heures, le côté des chiffres étant en contact avec la couche sensible. Les reproductions alors obtenues étaient fort distinctes dans le cas des monnaies blanches et de cuivre, tandis que la reproduction de la pièce d’or ne permettait guère de distinguer les détails. Comme le négatif présentait des chiffres clairs sur fond sombre, toute hypothèse relative à un rayonnement émanant des impuretés attachées aux pièces devait être écarté. Dans le cas d’une exposition de quarante-huit heures, le négatif présentait des chiffres sombres sur fond clair. Quant à la reproduction du côté opposé à la couche sensible, il faut, paraît-il, l'attribuer aux différences entre les chemins traversés au sein du métal par les rayons primaires émanant du radium, le rayonnement agissant sur la couche photographique avec une inten- sité d'autant moindre que le chemin parcouru dans le métal à été plus grand. [l convient, cependant, de tenir compte, aussi, des rayons secondaires produits sur le côté supérieur et qui, semble-t-il, augmentent les con- trastes produits par les rayons primaires. Quant à la reproduction du côté voisin de la couche photographique, les chemins parcourus par les rayons primaires et secondaires dans les diverses portions Bulletin astronomique, t: XXIN, p. 291. ? Annalen der Physik, n° 15, 1906. du métal, d'épaisseurs différentes, doivent évidemmen jouer également un rôle important. Or, si, pour de profondeurs constantes de la pièce, l'épaisseur total de la couche métallique traversée par les rayons croi de plus en plus, il faut tenir compte non pas seulemen! du fait que le rapport des chemins plus ou moins grandi s'approche de l'unité, mais encore du pouvoir de péné tration des rayons, qui devient d'autant plus grand qu l'épaisseur des couches métalliques traversées aura ét plus considérable. 11 est possible aussi qu'un rayonne ment émanant du côté tourné vers la couche photo- graphique soit également en jeu. Les résultats obtenus avec des pièces traversées par les rayons X ont été, en partie, fort différents ; ainsi, dans un cas au moins, il a semblé que le rayonnement secondaire émanant du côté voisin de la couche pho= tographique jouait un rôle bien plus considérable. Les différences observées dans les expériences de repro= duction avec des rayons X et du radium semblent être dues, en grande partie, aux différences de pénétration des rayons primaires. Aussi, dans le cas des rayons du radium, les détails du côté opposé à la couche photo- graphique se reproduisent bien plus difficilement qu'avec les rayons X. Dans certaines limites, on peut évidemment s'attendre à voir la différence de chemins des rayons traversant le métal produire des contrastes photographiques d'autant plus forts (toutes choses étant d'ailleurs égales) que le rayonnement est moins pénétrant; il y aura alors d'autant plus de chances pour que le côté opposé soit également reproduit. S 5. — Minéralogie A propos des bases de la Cristallographie. — Nous avons reçu de M. Wyrouboff la lettre suivante : « Mon cher Directeur, « M. G. Friedel, dans un long article inséré dans la Revue, a critiqué d'un ton quelque peu acerbe l'exposé très impartial que j'ai fait des théories actuelles sur la structure des corps cristallisés. C'était, à coup sûr, son droit; mais je n'ai aucune envie de le suivre sur ce terrain et d'entreprendre un tournoi qui intéresserait médiocrement vos lecteurs et dans lequel nous ne serions pas dans des conditions égales. Je résume le mieux que je puis les travaux de toute une génération de savants éminents; M. G. Friedel défend ses idées personnelles par des arguments qu'il a reproduits sous toutes les formeset qui n’ont jusqu'ici convaincu per= sonne de ceux qui peuvent être considérés comme com= pétents dans cette branche si intéressante du savoir. « Recevez, etc. » « G. Wyroubof, « Professeur au Collège de France. » $ 6 — Biologie L'influence des couleurs du spectre sur Ia sporulation des Saccharomyees.— Les recher- ches classiques de Hansen sur la sporulation des diverses espèces de Saccharomyces se sont bornées à l'étude de l’action du temps à des températures variées; aucune recherche n'a été publiée jusqu'ici relativement à l'influence des couleurs spectrales sur la sporulation; quoique Marshall Ward ait fait remarquer l'effet des= tructif de la lumière sur les spores de S. pyriformis: Deux savants anglais, MM. J. E. Purvis et G. R. War= wick, ont décrit dansun Mémoire récent les expériences qu'ils ont exécutées dans le Laboratoire chimique de l'Université de Cambridge, montrant que les rayons de lumière de divers degrés de réfrangibilité influencent l'apparition et la production des spores dans des espèces variées de Saccharomyces, et particulièrement au mo= ment où l'apparition des spores commence à èlre visible. Len LICE 1 Proceedings of the Cambridge P1 ilosophical Scciety; t. XIV, part. 1, p. 30 et suiv. (1907). : E £ f Fr e Î | | | { CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 205 Les couleurs spectrales ont élé obtenues en faisant passer la lumière d'une puissante lampe à huile à tra- vers divers écrans colorés, et les Saccharomyces subi- rent l'incubation à une température de 24 à 25° centi- rades, la température ne variant jamais de plus d'un “demi-degré.Lesauteurs ont employé des cultures pures des diverses espèces de Saccharomyces : à chaque expérience, des cultures fraiches et saines étaient dé- veloppées dans un bouillon stérilisé avant d’être ense- mencées sur des plaques de gypse humide. Chaque - culture était examinée au microscope et, lorsqu'on apercevait la moindre indication de granulations, on développait des cultures fraiches en bouillon jusqu'à ce - que les cellules fussent pleines et remplies de proto- plasma non granulé clair. Alors, elles étaient prêtes pour ètre ensemencées sur des plaques de gypse, et celles-ci étaient placées dans des boîtes dont les parois de devant portaient des écrans colorés. Les cultures “étaient ensuite examinées au microscope de temps en temps. Les conclusions les plus importantes qui peuvent être tirées des observations sont: 1° Les rayons rouges ou rayons de faible réfrangibilité accélèrent la formation des spores plus rapidement que lorsque les cellules sont incubées sous l'influence de la lumière blanche, et - ils paraissent stimuler lactivité de la sporulation plus rapidement que lorsque le développement a lieu dans Tobseurité, quoique, dans ce dernier cas, la sporulation semble avoir été complète à peu près en même temps que dans le rouge ;2° Les rayons verts paraissent retar- der le développement des spores; 3° Les rayons bleuset violets retardentla sporulation d’une facon plus grande ‘encore que les rayons verts; 4# Les rayons ultra-violets sont encore plus effectifs comme retardateurs;ils pa- raissent avoir, de plus, l'effet d’influencer désavanta- geusement la vitalité des cellules, lorsque celles-ci sont ‘exposées à leur influence pendant quelque temps. Ces faits peuvent être expliqués chimiquement, car il est bien connu que les rayons de haute réfrangibi- lité ont une énergie chimique plus grande que ceux de faible réfrangibilité. Cela est peut-être ainsi parce que les premiers excitent des changements chimiques dans da cellule, antagonistes au développement des spores, tandis que les derniers, ayant une énergie chimique bien inférieure, ont peu ou point d'influence, et la sporulation procède dans des conditions plus favora- bles. D'un autre côté, le retard peut être expliqué physiquement, car il est possible que le mouvement vibratoire des rayons de haute réfrangibilité rompe ou neutralise celui du protoplasma des cellules qui aurait pour résultat la formation des spores, tandis que les rayons de faible réfrangibilité sont incapables d'exercer une telle influence. $ 7. — Enseignement Le budget de linstruction publique de 1907. — La discussion du budget de l'Instruction publique, au Sénat, a donné lieu à d'intéressantes ‘observations. Notons d'abord le vote du crédit nécessaire à la création d'une maîtrise de Conférences de Tératolo- gie à l'Université de Paris, et aussi une augmentation de 10.164 francs au bénéfice de l'Ecole des Hautes Etudes. La question de la réforme des études médicales a été abordée par M. le sénateur Reymond, qui a réclamé Ja pérennité de l’Agrégation, la liberté du stage pour les étudiants dans tous les services hospitaliers ; il a surtout insisté sur la nécessité qu'il y a de donner aux futurs médecins une éducation pratique plus complète. Il cite cette réponse typique d'un praticien, incapable d'opé- rer une hernie : « Où l’aurais-je appris? J'ai fait bril- lamment à Paris mes études médicales dans le minimum de temps; j'ai été reçu à tous mes examens avec de bonnes notes; mais, n'ayant fréquenté les hôpitaux ‘que comme stagiaire, je n'ai jamais eu l’occasion d'y toucher un bistouri, et bien moins encore d'y pratiquer l'opération dont il s'agit. » M. Reymond a terminé en demandant la constitution d’une Commission qui com- prendrait, non seulement des professeurs, mais des pra- ticiens', et même des étudiants, D'intéressantes paroles furent aussi prononcées à propos du Muséum d'Histoire naturelle, dont on connait la situation lamentable au point de vue budgétaire. Il y a quelques semaines, M. Lecomte, professeur de Bo- tanique dans cet établissement, poussaitun cri d'alarme etsignalait le danger qui menacait notre grand herbier national, le plus ancien, le plus important des grands herbiers du monde, celui qui renferme, entre autres choses, les collections de Tournefort, de Desfontaines, de Lamarck et de Jussieu *. Au Sénat, M. Strauss a parlé des bâtiments du Mu- séum en des termes qui méritent d'être cités : « Les locaux, dit-il, sont dans un état d'insalubrité et d'in- sécurité qui fait peine à voir. Je n’apprendrai rien à personne en disant que la galerie de Zoologie attend, depuis 1889, son quatrième côté, que la galerie d'Ana- tomie comparée est arrêtée à mi-chemin de son éten- due. Les vieilles galeries de Zoologie, encore occupées faute d'autre place, ainsi que les vieilles galeries d’Ana- tomie comparée, s’'écroulent et ontété condamnées par le Conseil des bâtiments civils. Le mur de la Singerie s'est effondré, et récemment la presse s’est égayée d’un incident assez drôle en apparence, mais qui aurait pu avoir des conséquences tragiques : celui de l'évasion de plusieurs grands singes. Le plafond de lOrangerie s'est abattu sur la salle et il a fallu d'urgence faire sauter toutes les corniches. J'ai même un détail inédit à faire connaître au Sénat : c’est que, pour la répara- tion d'un pavillon des serres, les patrons verriers ont refusé de laisser monter leurs ouvriers. » Le Ministre de l'Instruction publique, dans sa courte réponse, reconnait l'état de délabrement des bâtiments du Muséum; mais les crédits nécessaires, qui s’élève- raient à plus d'un million, lui ont été refusés par les Finances. Il reconnait que l'autonomie financière du Muséum est désirable, mais, avant de l’organiser, il lui parait utile de procéder à une inspection financière de cet établissement. L'Université de Pa — Pour la troisième fois, les professeurs de l'Université de Paris viennent de se réunir en assemblée générale dans les magnifiques salons qui occupent le premier étage de la Sorbonne. Ils étaient venus très nombreux. M. Liard a rendu compte des principaux faits qui ont marqué la vie de l’Université de Paris au cours de la dernière année. Il a exposé qu'après de nombreuses négociations on allait enfin aboutir à la construction prochaine, à frais communs, par l'Etat et la Ville de Paris, d’un Institut Chimique,surun terrain de 9.000 mè- tres carrés, faisant partie de l'immeuble de la congré- gation des Dames de Saint-Michel, entre la rue Saint- Jacques et la rue d'Ulm. Cette construction coûtera 3 millions. Le reste de ce vaste immeuble à été acquis par l'Université de Paris, en vue de son développement futur. L'acquisition aété faite au prix de 1.850.000 francs, et pour cette importante opération l'Université a obtenu de l'Etat une subvention de 750.000 francs. Le reste sera payé avec ses propres ressources. Elle a déjà reçu, pour y contribuer, une somme de 300.000 francs du Prince de Monaco; en échange, elle a cédé au Prince une parcelle de 1.000 mètres carrés du terrain dont elle est devenue proprétaire, pour la construction de l'Institut océanographique. Les travaux vont commencer cette année. C'est une nouvelle cité universitaire qui va s'élever dans cette partie du quartier Latin. Les bâtiments nouveaux seront entourés de jardins. Faisons remarquer qu'à quelques exceptions près tous les professeurs de la Faculté de Médecine sont des praticiens, chefs de clinique dans les hôpitaux. 2 H. Lecoure : Les flores coloniales Scientif., 2 février 1907, p. 153. et le Muséum. Rev, 306 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE € L'échange international de professeurs. — On sait que, depuis quelques années, il a été organisé un échange de professeurs entre l'Allemagne et les autres pays. Cette méthode, qui donne de bons résultats, paraît avoir été surtout appréciée par le corps enseignant français. En effet, 45 professeurs Francais sont attachés à des écoles officielles allemandes, tandis que 19 Alle- mands seulement font un stage en France. L'échange entre l'Angleterre et l'Allemagne est moins actif : il a donné 10 Anglais contre 2 Allemands. N 8. — Sciences diverses Les bases scientifiques de la Sociologie : l'institut Solvay. — Dans une conférence faite en décembre dernier à l'Institut psychologique, M. Emile Waxweiler, l'éminent directeur de l'Institut de Socio- logie créé à Bruxelles par M. Solvay, décrivait en ces termes le but de cette intéressante institution : « Cher- cher la vie dans les phénomènes sociaux, voilà la raison d'être de l'Etablissement que je représente ici. Je dirais presque que c'en est la raison d'être topographique; au-dessous se trouve l'Institut d’Anatomie; à côté, l'Institut de Physiologie, tous deux dus au même fon- dateur, qui donnait corps, par là, à la synthèse de ses préoccupations, et filiait des bâtiments pour affirmer la filiation de ses idées. L'emplacement de l'Institut est déjà une façon de programme; son aménagement inté- rieur ne l’est pas moins. Une vaste salle de 300 mètres carrés renferme toutes les sources de la documentation : livres sur les rayons, périodiques sur les tables, cata- logues de près de 100.000 fiches, collections d'anthro- pologie, d’ethnographie, d'histoire, de technologie et de statistique; sur les galeries de cette salle, s'ouvrent des cellules de travail; c’est là que s'isole le chercheur, loin des querelles de partis et des controverses de doc- trines, dont il doit, plus que tout autre, se garder, car elles sont souvent la matière même de ses investiga- tions. Tenir contact avec les sciences de la vie et se libérer de tous les assujettissements de la politique, voilà deux règles qui sont comme gravées dans la cons- truction même de cet Institut! ». M. Waxweiler terminait sa conférence par cette con- clusion que « la Sociologie n'est pas la science de la société; c’est la science de la vie sociale ». Sans doute, “nous ne sommes hommes que dans la mesure où nous sommes aptes à la société » (Montesquieu), et «il existera de tout temps des espèces sociales, comme il y a des espèces zoologiques » (Balzac), parce que l'être humain est modelé sur le milieu social et que ce milieu est essentiellement variable, — première notion d’ori- gine biologique ; — mais c’est encore un fait purement biologique que cette constatation qu'il n'y a de société que chez les êtres qui possèdent un sysième nerveux perfectionné, et que le degré de sociabilité est préci- sément proportionnel au développement de la sensi- bilité. « La notion d'espèce, dirons-nous encore avec M. Waxweiler, est une des plus essentielles à la Biologie ; elle appartient à la science positive au même titre que la notion d'individu, sinon même davantage. Mais le biologiste se résigne à étudier la vie de l'espèce dans la vie de l'individu, tellement, disait Is. Geoffroy Saint- Hilaire, que la Biologie tout entière pourrait être définie la science du type par l'individu, de la vie collective et successive par la vie individuelle et présente ». Ainsi, la société n’est qu'un concept que l’on ne saurait étu- dier utilement en lui-même; c'est auprès des individus eux-mêmes qu'il faut aller saisir l'expression de la vie ? Cité par la Revue économique internationale, 15-20 dé- cembre 1906. sociale. C’est un savant, M. A. Giard, qui écrivait récem ment : « Désormais, la Sociologie ne peut plus se co prendre que comme une éthologie sociale. » - Ce sont ces idées que M. Waxweiler a développ dans un des travaux de l'Institut, l’'Esquisse d'un Sociologie. Dans une Note sur des formules d'intro duction à lénergétique physio- et psychosocioloqiqu M. E. Solvay ramène à l'énergie universelle les lien étroits qui, selon lui, unissent les phénomènes sociolo giques aux phénomènes biologiques. Deux autre ouvrages, d'une haute tenue scientilique, ont été écri par M. R. Petrucci sur /es origines naturelles de 1 propriété et sur l'origine polyphylétique, l’homotypi el Ja non-comparabilité des sociétés animales. Le pre mier, sorte de « paléontologie économique », étudie | propriété, depuis le règne végétal et les formes infé rieures du règne animal jusqu'à l'homme, pour aboutir à ces conclusions que « la propriété apparaît comme u phénomène lié aux premières manifestations de la vies qu'elle est tout d'abord l'expression d’une structur individuelle et d'une adaptation. Sa forme individuel est déterminée par la loi biologique de protection d l'individu, tandis que sa forme collective dérive de loi de protection de l'espèce, réalisée par les phéno mènes d'association, considérés d'une facon général et abstraction faite du groupement familial ». Dans son: second ouvräge, M. Petrucci, après avoir exposé l'éta actuel de la théorie de l'évolution, montre que les phénomènes sociaux observés dans les sociétés ani- males, n'étant point hérités les uns des autres, ne son pas comparables entre eux. M. L. Wodon a publié des Notes critiques sur quelques erreurs de méthode dans l'étude de l'homme primitif il y prouve que, contrairement à l'opinion de K. Bücher, le mobile économique dirige aussi bien les actes du. primitif que ceux du civilisé. Tout le Mémoire s'inspire très heureusement des données de la psychologie, don le regretté Gabriel Tarde a montré toute l'importance dans le domaine économique. Enfin, le D Houzé a présenté un examen critique d l'Aryen et l'Anthroposociologie, dans lequel i! montre que les prétendues lois de cette pseudo-science ne reposent que sur des erreurs statistiques, anatomiques, psychologiques et historiques. On aperçoit très bien le vaste champ d'investigations: scientifiques qui s'offre à la Sociologie ainsi comprise. Or, jusqu'ici, les sociologues ont emprunté leurs obser- vations de seconde main. Méthode dangereuse, remarque très Justement notre collaborateur M. Paul Lapie, car tout intermédiaire qui se glisse entre l'esprit et l’objet. risque d'introduire l'erreur. L'observation directe est, d'ailleurs, d'autant plus nécessaire que les documents livrés sont forcément incomplets, pour n'avoir pas été dressés en vue des recherches spéciales de la Sociologie. Enquêtes et recherches menées directement, tel est le but que visent les collaborateurs de l’Institut Solvay. Ils ont eu, en particulier, le mérite de bien dégager la: part qui revient au milieu social ; mais leur conception: trop purement biologique les à portés à négliger l'in- fluence considérable que le milieu physique exerce sur les faits sociaux. C’est ainsi que l'idée de propriété — quant à sa forme et quant à son objet — s'éclaire sin- gulièrement par l'étude des conditions naturelles du sol et du climat?. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon: La Zevue donnera prochainement une analyse détaillée de cet ouvrage. 4 Cf. P. CcerGert : Introduction géographique à l'étude de l'économie politique, dans le Bull. de la Soc. neuchäteloise de Gcographie, Neuchâtel, 1907 (sous presse). (ol ol po) = el > 2 =) > a œ =) Cp) > a = la (el T es (== TJ ES el A [e>| p=| — a = © A 7 E* [s>| a Es [æ) (es) a [>| œ 1 = ' [le] © a os 07 LE PEUPLEMENT NATIONAL EN ALGÉRIE (1871-1906) La Monarchie de Juillet eut le mérite de fixer sur le sol algérien une population européenne en majorité française ; la Seconde République rêva d'y instaurer une petite France à l'image de la mère patrie, par une transplantation en masse de prolé- taires et d'artisans, destinés à se transformer en propriétaires ruraux : cet essai de colonisation sociale échoua ; les premières années du Second . Empire marquent encore un progrès de l'immigra- - lion, qu'arrêta bientôt et que découragea la poli- tique arabe de Napoléon IT; enfin, la Troisième République reprit l'œuvre dans un esprit nouveau, celui du « peuplement national »”. C’est à cette dernière phase que M. de Peyerimhoff - vient de consacrer une publication remarquable, présentée modestement comme un Rapport”, plai- doyer habile et convaincu en l'honneur de la colo- nisation officielle. IL y a quelque courage à mettre en vedette cette épithèle suspecte. Au vrai, coloni- sation officielle s'identifie avec peuplement national. Problème ethnique et politique bien plutôt que foncier. La colonisation officielle apparail comme l'instrument et le véhicule de la prépondérance francaise sur l'autre rive de la Méditerranée. Il faut franciser l'Algérie, il faut franciser l'Algérien, tel est le mot d'ordre qui retentit comme un cri d'alarme après trois quarts de siècle d'occupation. L'effort mené depuis trente ans laisse-t-ilaugurer le succès ? Considérons les faits que M. de Peyerimhoff expose, non avec l'optimisme du bureaucrate, mais avec la sincérilé de l'historien. A la fin de l'Empire, le domaine, épuisé par le gaspillage des concessions de faveur, était réduit en Algérie à la portion congrue de 200.000 hec- 1 Cette nécessité du peuplement francais avait été mvoquée par Prévost-Paradol, comme conclusion à la France Nou- velle. L'Algérie est « une terre française qui doit être le plus tôt possible peuplée, possédée et cultivée par des Francais, si nous voulons qu'elle puisse un jour peser de notre côté dans l'arrangement des choses humaines » (13e éd., 1884, p.418). A la même époque (1868-1869), estentre- prise une grande enquête sur la siluation de PAlgérie, sous la direction du comte Le Hon : déjà est signalé le péril que court la prépondérance francaise (Corps législatif, 7 mars 18170, J. Off., p. 421). ? Gouvernement général de l'Algérie. Direction de l'Agri- culture, du Commerce et de la Colonisation. Enquête sur les résultats de la colonisation officielle de 1871 à 1895. Rapport à M. Jonnart, gouverneur général de lAI- gérie, par M. de Peyerimhof, directeur de l'Agriculture, du Commerce et de la Colonisation. Alger, Imp. typ. J. Tor- rent, 1906; t. 1, 243 p., croquis et graphiques dans le texte et hors texte; t. Il, Annexes, 512 p., 10 graphiques, carte tares de lerres arables ; l'insurrection de 1871 lui valut une riche aubaine: il s’arrondit « d’un seul coup »‘de 500.000 hectares, confisqués aux révoltés. Le noyau du séquesire était constitué par le fertile plateau de Sétif; les massifs côtiers à l'Est d'Alger fournirent d'amples surfaces; l'Oranie resta indemne. L'idée colonisatrice fut doublement servie par les événements : car, à la même heure, les Alsaciens et Lorrains s'expatriaient avec une généreuse imprudence ;, l'Algérie s'offrit à eux comme une patrie nouvelle. L'Assemblée Nationale alffecta 100.000 hectares à ces exilés des provinces perdues. Mais ce ne fut pas la vaine manifestation d'un patriotisme sentimental. Car l'Assemblée entendait restaurer les saines pratiques en matière de colo- nisation et qu'on recrutät de vrais colons, c'est-à- dire des cultivateurs déjà pourvus de capital — le minimum fut fixé à 5.000 franes — et travaillant avec leurs propres ressources; aussi le décret du 16 octobre 1871 exigea du concessionnaire l'enga- gement de « cultiver, mettre en valeur et habiter » son lot; l'obligation de résidence est la condition première du peuplement”. L'exécution du plan ne répondit pas aux vœux qui l'avaient inspiré. Au lieu d'agriculteurs aisés, affluèrent des ouvriers de fabriques, ignorants des choses de la lerre. Ils n'avaient pas été appelés, ils furent tout de même élus. C'était, après lout, de la matière française, qui ne périt pas toute : malgré les déchets et désertions, beaucoup de ces pseudo- colons firent souche dans les villes, et, sur les 1.183 familles rurales installées, 277 seulement avaient quitté l'Algérie ou disparu en 1899. « Ce n'est pas un mauvais résultat », prononce avec raison M. de Peyerimhoff*. Même les villages fondés par la Société de Protection des Alsaciens-Lorrains avec des recrues de choix, disposant d'un cau- tionnement de 2 à 4.000 francs, ont perdu plus en couleurs de la Colonisation officielle (AZgérie Nord, 1995), à 1 : 4.600.000€. En dépit des indications du titre, l'exposé ne s'arrêle pas à 1895; il fournit des données plus récentes. Nous en avons ajouté quelques-unes jusqu'au début de 1907. 1 Ce chiftre de 500.000 hectares figure au volume I, p. #1. Mais le tableau de la page 73 porte le total des terres de séquestre, de 1871 à 4895, à 234.375 hectares seulement, total dont le détail, année par année, est enregistré dans le tableau B du volume 11 (p. 483-503) ; d'autre part, le séquestre tant collectif qu'individuel avait donné environ 660.000 hec- tares (I, 16); après restitution aux tribus indûment dépouillées, il reste 446.406 hectares. L'opération ne fut liquidée qu'en 1885; mais des séquestres furent encore pratiqués jusqu'en 1894. 3 Rapport de M. Lucet. J. Off., 1871, p. 3621, n° 580. SM ND 02, 308 de la moitié de leur contingent originel ; des 165 fa- iuilles établies à Boukalfa, Haussonviller, Camp du Maréchal, 80 seulement subsistent". En même temps que les Alsaciens et les Lor- rains, d'autres Français arrivèrent, si bien que, de 1871 à 1880, la population française passe de 130.000 à 195.000 âmes. Mais la population étran- gore s'est accrue dans la mêrne proportion, de 115.000 à 181.000 unités; et celle-ci n'est pas itroduite artificiellement par l'appât d'une con- cession. Espagnols, Italiens, Maltais, offrent spon- tanément la main-d'œuvre, qu'attirent les grands travaux publies; ces groupes sont assurés de la supériorité numérique, parce que leurs femmes sont plus fécondes et ne redoutent pas une nom- breuse progéniture *. Le Français sera investi de la supériorité sociale ; il sera le détenteur privilégié du sol par droit de nais- sance. Le décret du 30 septembre 1878, qui a régi la colonisation pendant un quart de siècle, dénonce la pensée de derrière la tête de l'Administration, elle principe dont elle ne se départira plus pour renforcer le peuplement national: les lots de vil- lage, de 40 hectares au plus, et les lots de fermes, Jusqu'à une superficie de 100 hectares, ne seront concédés qu'à des Français d'origine ou nationalisés, qui ne sont déjà ni attributaires ni cessionnaires de terres domaniales : donc pas de cumul ; autant de lots, autant de titulaires; la portée démogra- phique de cette clause apparaît d'autant plus claire que les deux tiers des lots sont réservés aux immi- grants. Le concessionnaire est tenu de résider cinq ans, jusqu'à l'obtention du titre de propriété définitif, sauf à se substituer quelque remplaçant, aussi qualifié au point de vue de la nationalité, sauf encore la faculté d'abréger le stage suspensif en justifiant d'améliorations apportées au domaine. Le lot de village ne peut être revendu à un indi- gène que cinq ans à partir de l'investiture ; le lot de ferme, même quand il a été acquis à titre onéreux (ce qui devient la règle à partir de 1882), ne peut être revendu à un indigène avant vingt ans. Précautions indispensables et qui attestent combien peu l'Administration est sûre du colon; car celui-ci veut gagner sur la lerre en spéculant et non en travaillant. La vie est dure, en effet, dans ces coins perdus, où on l’a déposé en l'invitant à défricher les broussailles, à bâtir un gourbi; cette tutrice négligente qu'est l'Administration laisse ses pu- pilles se débrouiller dans un milieu inconnu autant qu'ingrat. Aussi les villages se vident, les habitants * Monographies, W, p. 107, 119, 126: G. Guynemer : La colonisation alsacienne-lorraine en Algérie. Rapport au gouv. génér., mai 1891 (Paris, Unsinger, 48 P-). * V. Deuonrés : Le peuple algérien, 1906, p. 278. 3 J. Of., 1er oct. 1878, p. 9513. BERTRAND AUERBACH — LE PEUPLEMENT NATIONAL EN ALGÉRIE (1871-1906) dépérissent'. Cette crise de la colonisalion vers 1580 émeut les Pouvoirs publics, et le Gouverne- ment prépare un effort décisif, un plan de grande envergure. II Le 3 avril 1881, fut déposé à la Chambre un projet de loi portant ouverture d’un crédit de 50 millions pour acquisition de terres et travaux de colonisation en Algérie. Le maitre argument était ainsi formulé : « Tout le monde s'accorde à reconnaitre la nécessité d'implanter dans la colonie une populalion assez dense pour faire. contre-poids, non seulement à l'élément indigène, mais encore à l'élément européen étranger. » L'inspirateur de ce programme d'intérêt na- tional étail Jules Ferry. Depuis son avénement à la présidence du Conseil (30 novembre 1880), il préparait l'intervention en Tunisie: mais ce n'était pour lui qu'un épisode de la grande poli- tique méditerranéenne que la France inaugurait. Est-il téméraire de supposer que, d'une part, les intrigues italiennes en Algérie même, d'autre part la sourde agitation du monde musulman, qui allait éclater dans le massacre de la Mission Flatters, dans la sanglante ruée de Bou-Amama, dictèrent les mesures proposées? D'autres circonstances en illustraient l'opportunité : les viticulteurs du Midi, ruinés par le phylloxera, songeaient à solliciter la terre algérienne. Par une fortune extraordinaire, Ce programme survécut au ministère dont il émanait; il fut recueilli comme un legs pieux par deux cabinets successifs. Il prit sa forme définilive en 1883, sous le patronage des deux ministres Tirard et Waldeck- Rousseau. L'exposé des motifs invoquait encore la néces-. sité politique. « On a dû se demander s'il ne serait pas utile et politique de favoriser, plus qu'on ne l'avait fait jusqu'ici, l'occupation du sol par nos nationaux. » Cette tendance se traduisail dans l’éco- nomie du projet: création de 175 centres nouveaux, où seraient installées 9.649 familles, exactement 38 à 39.000 personnes, à raison de 50 feux sur un périmètre de 2.000 hectares *. La prédilection ! Cte D'HaussoNviLLe : Rev. des Deux Mondes, {tr juillet 1883, p. 90 (d'après les procès-verbaux des Conseils locaux). M. de Peyerimhoff signale, dans les Monographies du volume II, les causes des échecs. ? En 1880, le journal arabe, le Mostake], imprimé en Italie, est distribué à profusion parmi les Arabes d'Algérie. M. Roustan éveille l'attention du Gouvernement de la colonie (P. H. X.: La politique française en Tunisie, 1891, p. 1017-8). * Le projet Constans-Magnin (1881) portait la création de 300 villages, dont 150 sur le domaine. Le projet Waldeck- Rousseau-Tirard date du 3 juillet 4883 (J. Of., Chambre, Doc. Parlem., 1883, 2e vol., p. 1347, n° 2101), complété par un projet sur le mode d'aliénation des terres du 27 juillet (ibid., p. 1431, n° 2245). : 0 BERTRAND AUERBACH — LE PEUPLEMENT NATIONAL EN ALGÉRIE (1871-1906) 309 gouvernementale allait à la concession gratuite, | l'intrus, c'est-à-dire le métropolitain. Celui-ci, seul appât efficace de l'immigration, seul mode comportant l'obligation de résidence. Quant à la vente aux enchères des parcelles domaniales, elle était limitée aux acquéreurs français, excluant les _ étrangers et les indigènes. C'est dans ces mesures restrictives et prohibitives qu'il faut chercher l'idée directrice de cette législation. Le projet fut rejeté (par 249 voix contre 211), moins en raison des combinaisons financières — d'ailleurs ingénieuses' — qu'il impliquait, moins par apitoiement pour les Arabes frappés d'expro- priation, que par l'hostilité des agrariens et pro- tectionnistes de la Métropole, redoutant qu'on _débauchät leurs paysans ou journaliers vers l'Algérie, cette Algérie dont les céréales et les vins menaçaient de concurrencer les blés et vins de France*. Ge même sentiment se manifeste encore dans les deux délibérations que le Sénat consacra à un projet gouvernemental qui lui fut soumis en 1886*, et discuté seulement trois ans et demi après". Il fallut rappeler aux agrariens, partisans des atifundia, que l'on visait à multiplier les petits et moyens possesseurs et non à constiluer une aristocratie foncière (le mot féodal fut mème pro- noncé), et le sous-secrétaire d'État, M. Étienne, évo- quant l'invasion espagnole en Oranie, déclara : Si l'on ne veut pas « contre-balancer cette popula- lion espagnole, je dis qu'il ne faut plus nous occuper de coloniser et que nous devons renoncer à posséder l'Algérie ». Le compte-rendu ajoute : E xelamation à droite*. La loi fut votée ; elle fit le voyage du Luxembourg au Palais-Bourbon, qui la recut dans ses cartons funéraires. ITT Pendant que son sort se débattait au Parlement, la colonisation officielle se poursuivait en Algérie pour le plus grand profil... des Algériens. Ce fut pour ces derniers une abondante distribution de manne territoriale. En 1880, au bout de ja pre- mière décade, avaient élé installées 3.891 familles venues de France, 4.582 algériennes. Et, comme l'appétit vient en mangeant, ies colons prétendirent mettre le domaine en coupes réglées, et exclure d'ailleurs, ne montra pas d'empressement ; en 1892, sur 452 acheteurs du domaine, on compte 38 Fran- cais, et l'Administration se félicite de ce nombre exceplionnellement élevé”. Quant aux candidats concessionnaires, la France, semble-t-il, envoie le rebut de ses campagnes, les individus sur lesquels les communes fournissent de faux renseignements pour s’en débarrasser. Pour ceux-là, la colonisation officielle n’est qu'une forme de l'assistance publique. En dépit de ces déboires, l'Administration, avec un beau courage, continue son œuvre; le gouver- neur général, M. Cambon, rappelle aux champions de « l'Algérie aux Algériens » que «le but essentiel de la colonisation » est l'introduction de Français de France®. Aussi de 1891 à 1900, avec le faible crédit annuel de ® millions, 45 centres sont créés ou agrandis, des essaims français s'enfoncent comme des coins dans la masse indigène et s'avenlurent dans le sud, au seuil de la région pastorale. En 1901, sur les 375 territoires allotis depuis 1871, sont dénombrés 60.116 Francais. Quelle est la propor- tion des métropolitains, des Algériens, des natu- ralisés®? Ce qui se dégage de la statistique, c'est que, des 5.655 chefs de famille métropolitains pri- mitivement établis, iln’en restait sur place, d'après le dernier recensement, que 2.133, plus 587 nou- veaux propriétaires, venus de France. La désertion des Algériens n'a pas été moins intense des 7.646 attributaires primitifs, 3.051 seulement sont demeurés: mais les déchus ou évincés ont été rem- placés par 2.969 nouveaux inveslis. Donc, jusqu à la fin du xix° siècle, la colonisation officielle a été pratiquée surtout au moyen et au profit de l'élé- ment algérien. IV Depuis ces derniers Lemps, l'Administration s'est efforcée de réagir; elle a su, par une propagande avisée, affiches, livrets, création à Paris de l'Office de l'Algérie, par une sélection sévère et judicieuse, recruter des colons pourvus d'un capital, d'un cheptel où d'un matériel agricole. Elle a distribué en 1902 des lots domaniaux à 187 familles métro- politaines et seulement à 106 algériennes"; en 1903, 1 Le rapporteur, M. Thomson, avait proposé la création d'une caisse de colonisation. : Discours de M. Guichard, Chambre, Débats 1883, p. 2989. Le Rapport de M. Marquis au Sénat (Doc. Parlem., 1884-5, p. 15, n° 22) émettait des réserves sur l'interdit qui frappait les étrangers, puisque la France n'avait pas surabondance d'ouvriers agricoles. 3 Sénat, Doc. parlem., 1885-1886, p. 193, n° 166 (20 avril 186) : Projet signé de MM. Sarrien et Sadi-Carnot. 4 Le débat s'ouvrit le 9 décembre 1889 (Sénat, Débats, 1889, p. 1193 et suiv.). 5 Jhid., p. 1208. ‘ Conseil sup. de gouvernement Procès-verbaux et exposé de la situation, sess. ord., 1893, p. 105. Sur les pré- tentions des Algériens, voir un article de Morinaud, du 12 octobre 1889, cité par R. Bercor : L'Algérie telle qu'elle ast (Savine, 1890, p. 298). « Des agrandissements pour les colons, l'attribution de concessions aux seuls fils de co- lons (sie!), voilà le travail auquel devrait s'atteler un gou- vernement digne de ce nom.» : Conseil sup., Session ord., 1897, p. 490. s Sur la naturalisation automatique, qui fonctionna à partir de 1889, v. Demontès, p. 563 et suiv. i Bulletin de l'Office de l'Algérie, 1903, p. 66-10, 1904, p. 368. 310 BERTRAND AUERBACiIL — LE PEUPLEMENT NATIONAL EN ALGÉRIE (1871-1906) les métropolitains font prime, 376 contre 160 con- cessionnaires algériens; en 1904, 207 chefs de familie de France sont affectés à 19 centres. Mais, avec la pénurie des terres et l'afflux des quémandeurs, l'Administration cessa ses largesses, et le décret du 13 septembre 1904 édicta, comme mode normal d’aliénation du domaine, la vente à prix fixe ou aux enchères, exceptionnellement de gré à gré. Mais sont seuls admis comme acquéreurs à titre onéreux les Francais ou naturalisés. Et les restrictions imposées par le décret de 1878 aux seuls bénéficiaires de concessions gratuites attei- gnent les acheteurs eux-mêmes car ceux-ci n'auront pas la faculté de se défaire, suivant leur caprice, du sol qu'ils auront payé à beaux deniers comptants ; ils n'auront pas celle de le délaisser: ils seront des propriétaires attachés à la glèbe. Ils sont tenus, en effet, de transporter leur domicile sur leur domaine, d'y résider avec leur famille d'une facon effective et permanente, de l'exploiter personnellement pendant dix ans, sauf à se substi- tuer une famille remplissant les mêmes conditions d'origine. Enfin — disposilion caractéristique — deux liers des lots à vendre seront réservés aux métro- politains. Et ceux-ci n'ont usé que modérément de ce pri- vilège. Aux premières ventes qui s'ouvrirent au printemps 1905, les Français achetèrent 54 lots pour 350.000 francs, les Algériens 53 pour 367.000": à la seconde expérience, au début de 1906, sur 80 lots à titre métropolitain, 26 seulement furent adjugés ; les Algériens s’en disputèrent 35 sur 43, avec d’étonnantes surenchères”. Malgré tout, en deux ans, l'effectif des colons mélropolitains s'est accru; On ne jugera pas trop modeste l'appoint de 80 à 90 familles, si l'on songe que la qualité prime ici le nombre. Plus efficace est la concession gratuite, toujours en honneur, ce dont témoignent les listes d'attribu- taires publiées par le Bulletin de l Office de l'A lgérie. Grâce aux fonds d'emprunts, le programme à élé simplifié et du même coup adapté aux circons- tances naturelles : pour l'élevage, pour la culture extensive des céréales, la superficie du lot, au lieu du maximum de 40 hectares, peut s'étendre jusqu'à * Ibid., 15 mai 1905, p. 446. Devant les Délégations finan- cières, session de mai 1906 (assemblée plénière, p. 589), le Gouverneur général mentionne que, sur 108 lots réservés aux métropolitains, 1 ont été aliénés :les Algériens en ont acheté 51 des 60 qui leur étaient dévolus. Les enchères montèrent au point qu'un domaine exposé à 10.824 francs fut adjugé pour 41.000. ? Au début de 1907, la troisième vente exposait 455 pro- priétés rurales ; sur 10% destinées aux immigrants, 45 sont déjà vendues; sur les 51 lots à titre algérien, 41 avaient trouvé preneurs { Bull. Off. Algérie, 1er mars 1907, p. 66). les . mental” : les Alpes et le Massif Central sont les: 200, suivant le coefficient présumé du rendement. Les attributaires sont de préférence groupés avec leurs compatriotes, suivant la méthode maintes fois pratiquée du recrutement régional ou départe— pépinières des colons algériens. En somme, depuis la mise en vigueur de la nou- velle charte, 683 familles ont été établies, à titre. graluit et onéreux”; nous défalquons un tiers d'Algériens : devraient rester 455 familles métropo- litaines, c'est-à-dire un contingent de 1.400 à 1.600 personnes. C’est, pour moins de deux années, . un résultat respectable, d'autant plus précieux que: ces nouveaux venus apportent avec eux un pelit capital, instrument de succès et de fortune”. V Etablissons le bilan du peuplement national : 30 milliers de colons métropolitains implantés en Algérie depuis trente ans‘, et au prix de quels sacrilices"! Il Y aurait injustice à mesurer d’après ce chiffre brut la colonisation officielle. Héritière ! à titre onéreux de traditions et d'errements qu'on a pu jusqu'en ces derniers temps dénoncer avec àpreté”, elle s'est rénovée, a pris conscience de son but et de sa méthode; elle a campé dans des régions neuves, et notamment sur les Hauts- Plateaux, des postes avancés de cultivateurs fran- cais; elle renforce la densité des centres anciens: la carte se jalonne de noms nouveaux, toponymie souvent un peu déconcertante, mais qui éhmine les appellations indigènes”; les villages se relient par ! Sur les villages départementaux, voir la monographie de M. V. Deuonrës : Vesoul-Banian. (Bull. Soc. geogr. Algér., t. VIT, 1903, p. 365-427.) En 1905, le village de Gam- betta est peuplé de 19 familles de Mariand, celui de Roknia de 7 familles de Bédejun, deux petites communes des Basses- Alpes, que cet exode a dû vider. ? Rapport général aux Délégations. mai 1906. p: 26. Le rapport compte 1.358 personnes sur 283 concessions gra- tuites: il y a donc lieu d'ajouter à ce chiffre 150 ou 200 per- sonnes de familles d'acheteurs. : ‘ Ce capital se décompose en 1.465.000 francs espèces, 140.000 francs cheptel, 1.811.000 francs immeubles (Dr Caze- NEUVE : Rapport Sur le budget de l'A Igérie pour l'exercice 1907. L. 1, p. 541-542. Doc. parlementaire, 1906, 352 ter). * Peyerimhoff, € 1, p. 95, évalue le nombre des immi- | grants français établis à 25.000 de 1871 à 1895: de 1896 à 1900, l'Algé a reçu 16.500 immigrants européens (De- montés, p. 76): nous affectons généreusement un tiers à nos compatriotes. Remarquons que la Statistique générale de l'Algérie consacre un tableau aux voyageurs et passagers :. elle ignore les immigrants proprement dits. ® La comptabilité de la colonisation a été si embrouillée — intentionnellement — que nous accepterons, pour le coût de l'installation de chaque metropolitain, l'évaluation de M. de Peyerimhoff, soit 1.485 fr. 03. $ Rourre : Rev. des Deux Mondes, 15 octobre 1901. 7 En 1904, nous relevons 9 dénominations nouvelles de centres: 8 en 1905, dont Gambetta, Waldeck-Rousseau- Jeanne d'Arc (! ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE 311 des hameaux et groupes de fermes qui humanisent le paysage algérien. La colonisation officielle régit les manifestations el tentatives de peuplement en apparence les plus spontanées : c'est sur un terriloire concédé que sera bâti le village coopératif de Tirman, à 40 kilomètres de Sidi-Bel-Abbès ; les frais d'aménagement sont à la charge du Gouvernement général”. La colonisation officielle prépare l'assiette et trace le cadre de la colonisalion privée. lei, con- trairement à ce qui s’est passé ailleurs, c'est l'État qui est le pionnier, comme il a été le conquérant, comme il est avec les indigènes le régulateur des transactions foncières”. C'est lui qui est le vrai colon, et il est merveilleux qu'il se soit tiré hono- rablement de sa tâche, ayant à lutter contre la nalure, contre les anciens occupants, contre les Francais d'Algérie et contre les Français de France. Nous n'apprécierons pas ici le rôle de la coloni- sation officielle comme facteur de la prospérité économique de l'Algérie ; c'est l'entreprise politique qui prend une significalion d'aulant plus haute que l'Algérie devient, entre la Tunisie et le Maroc, le boulevard et le foyer de la puissance française dans l'Afrique du Nord. Bertrand Auerbach, Professeur à l'Université de Nancy. LA TAUTOMÉRIE DEUXIÈME PARTIE : CLASSIFICATION, CAUSES ET MÉCANISME DE LA TAUTOMÉRISATION Dans une première parlie*, après un court hislo- rique, nous avons principalement étudié les mé- thodés qui permettent de déceler l'existence de combinaisons tautomères ; nous allons maintenant indiquer les principes de leur classification et rechercher les causes et le mécanisme du phéno- mène de la tautomérisalion. I. — CLASSIFICATION DES COMBINAISONS TAUTOMÉRISABLES. La seule classification qui ait été proposée est celle de Laar*. Cette classification, il faut le dire, n'avait d'autre prétention que de constituer un catalogue des divers tautomères connus à l'époque où elle a paru, et de servir de cadre pour quelques- uns de ceux qu'on découvrirait dans la suite. Cet auteur considère deux grandes catégories de com- binaisons lautomères: le groupe des dyades, ou artiades, etle groupe des {riades, ou périsades. Il nomme dyade le groupement de deux atomes polyvalents A et B, unis directement ou indirecte- ment, et entre lesquels oscille un atome ou un radical monovalent qui s'attache soit sur A, soit sur B. Si les atomes À et B sont séparés par un atome d'un élément polyvalent, le groupement devient une f/riade. Si, enfin, les atomes qui sé- parent À de B sont en nombre supérieur à 1, on aura des artiades dans le cas où leur nombre sera pair, des périsades si leur nombre est impair. S 1. — Catégorie des dyades. Laar n'y considère qu'une classe, comprenant les nitriles et carbylamines: Az: C.R et R.Az: C, les aldéhydes et l'éthénol (hypothétique) — CH:0 et Ne — C.0H. Les alcools cétoniques, tels que l'acétol, sous leurs deux formes : CH3.CO.CH20OH et CH5.C(OH)— CH*, 0 trouveraient aussi place dans cette catégorie, dans un second groupe non prévu par Laar. $ 2, — Catégorie des triades et périsades. 1'e Casse: Un atome de C central. 1 Groupe, où groupe des amides. — Grou- / pements: AzH.C:0 et —Az:COH. Ex.: amides, composés amidés, acide cyanurique, lactames, indols, etc. 1 Voir Bull. Soc, des Etudes algériennes, avril-mai 1905, juillet-octobre 1906. Cf. Comte de RocquiGxy : La coopération dans l'agriculture algérienne (Musée social, Mém. et Doc. 1906, p. 294 et suiv.). 2 Projet d'introduction de l'Act Torrens tunisilié. (Bull. oflive Algérie, 1905, p. 101). 3 Voir la Revue du 15 Avril 1907, &. XVII, p. : Bert. XIX;p: 180} 1 Les artiades et périsades doivent étre envisagées comme résultant de la condensation des dyades entre elles ou avec des triades : 4 | — AzH.C:Az— et —Az:C.OH donnant ainsi | | | —AzH.C:Az.C:OMet —A7:0C:Az:C.0H: 312 2° Groupe, on groupe des thioamides. — Grou- pements : —AzH.C:S et —Az:C.SH. 3° Groupe, ou groupe des amidines. — Groupe- ments : X.AzH.C:AzY et XA7:CAHY. Les types de ce groupe présentent, pour la plupart, la tautomérie virtuelle. Les principaux constituants de ce groupe sont : les amidines, amidoximes, eyanimides, etc. 4° Groupe, ou groupe des fhioacides. — Groupe- ments : H.S.C:0 et S:C.OH. Types mixtes. — À la suite se placent les péri- | sades résullant de la combinaison des types des divers groupes de cette classe. — Ex. : les dérivés dissymétriques des sulfo-urées : AzXH AzX /AzHX < HS. un 1C un ; C£ ; NAZHY Nazy AzHY et quelques autres cas étudiés par Knorr sous le nom de cas de double tautomérie. Ex. : CH*.CO.CH.COPR, CHS.C(OH):C.CO?R, H.C.R H°C-R , CHF.CO.CH. COR, CH. C(OH):C. COR, [| CH*.CO.CH.CO'R, H.C.R CH°.C(OH):C. COR, 2° CLASSE : Deux atomes de C, l'un central, l'autre terminal. 1 Groupe, ou groupe des aldéhydes, acétones, phénols. — Groupements : _c:0.0n el 0:C.CH. Ex. : célones, aldéhydes (dont l’une des deux formes seule est connue), phénols, éthers B-cétoni- ques, maloniques, dérivés quinohydriques, phloro- glucine, composés contenant ce que Claisen ‘nomme les groupements formylique el oxyméthylénique H.C.OH, etc. 2° Groupe, où groupe des thioaldéhydes et th;o- ; | Il acides. — Groupements : — C:CSH et S:C.CH. 3° Groupe, ou groupe des cétimines.— Groupe- ments — CH.C:Az — et — CCM. Ex : produits de condensalion des amines et des aldéhydes et cétones, acides amido, anilido et uramido-acétylacétiques. À cette classe se rattachent les périsades pro- venant de la condensation des triades appartenant aux deux groupes de la 2° classe. Ex. : les pyridones para : C— OH CE 0 HC/ ŸcH HC{ CH Lee ucl Jca Ha Ja Az AzH : Lichigs Ann., t. CCLXXXI, p. 310. r ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE 3° CLASSE : groupe de 3 atomes de C, soit — | CH.C:0= et = C:C.CH—, comprenant les dérivés des carbures non saturés éthyléniques. Ex. : les acides non saturés 6 : RCH?.CH:CH.COH > RCH : CH.CH®.CO°H,. Voire même le benzène, si l'on admet, avec Kékulé, que sa double liaison soit oscillante, etc. 4° CLASSE : Triades exemptes de C. 1° Groupe, ou groupe des isonitrés : HO.Az:Az — et O:AZz.AzH —. Dans ce groupe rentrent tous les dérivés isonitrés, les nitramines et aussi les diazoïques, si, avec Bamberger, on admet que leurs isomères sont représentés par les schémas : R.Az.OH et R.Az:Az.0H. Az k \ Mais si, avec Hantzsch, on rattache leur isomérie | à l'existence d'une forme syn et d'une forme frans, on n'a plus le droit de faire entrer les diazoïques dans ce groupe. 2° Groupe, ou groupe des diazoamidés. Groupe- ments : —AzH:Az:A7 — et — Az: A7.AzH —, présen- tant la tautomérie virtuelle. 3° Groupe, où groupe des acides thiosulfoni- ques. — Groupements : OH NS ER = SZ et D 9° CLASSE : Triades comportant 1 atome de Az central et 4 atome de C terminal. 1° Groupe, ou groupe des nitrosés et isonitrés. Groupements : H.0Az:C— et 0: Az.CH —. Ex. : pseudo-acides, oximes, etc. £° Groupe, ou groupe des Aydrazones. Groupe- ments : — AzH — Az:C—et — Az:Az.CH —. Exemple : l’éthane-azobenzène, qui, sous l'in- fluence des acides minéraux, se transforme en phé- nylhydrazone de l'aldéhyde. Dans ce groupe, l'isomérie de structure confine de si près à la tautomérie qu'il n'a pas été toujours possible de se prononcer dans tous les cas sur la réalité d'existence de l’une ou de l’autre. On rattache à cette classe les pentades, heptades, etc.,etc., obtenues par la condensation des triades appartenant aux divers groupes précédents. Exem- ples : les nilrosophénols : C°H*(0,AzOH Z C'H‘(OH; Az:0 (combinaison de deux triades de la à° classe); la phénylhydrazone de l'éther acélylacétique : CH°.C (:Az.AzH.C'H°).CH*.CO*C'H° (combinaison de deux triades de la 5° classe el d’une triade de la 2°). L’accumulation des triades détermine l'augmen- tation du nombre d'isomères possibles. — L'hy- serme + DT PTT = 7", ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE 313 drazone de l’éther acétytacétique, par exemple, peut exister sous {rois formes : CH5.CH.CH.CO2C?H5| CIS. C.CH?.CO?C?H5|CH*C : CH . CO?C?H5 l Az. Az. C°H° Az: Az.C°H® AZ. AzH.C9H5. _ Ce cas et d’autres analogues sont ceux que Knorr désigne sous le nom de double tautomérie ; l'étude en présente de grandes dificultés, par suite de la superposition des isoméries d'ordre sléréochimique aux isoméries d'ordre tautomérique. 6° cLASsE : Groupements comportant 1 atome de Az entre 2 atomes de C terminaux. Un groupe unique : Groupements : CH.AZ:C — et — C:Az.CH — Mal connu. Les types de ce groupe présentent la taulomérie virtuelle el manifestent d'étroites analogies avec les types décrits dans le 2° groupe de la 2° classe. Types MÉLANGÉs. Sous cetle rubrique, Laar décrit un certain nombre de groupes dérivant des pré- cédents ; il y place : les dérivés Aydropyridiques, les diisoindols : AZI AZ HI REC AN CH RC/ \C< | et H\ | | vu cl Jr DOVE AH les dérivés quinoniques : C= 0 C-——0 1 À ne Ncx ucl_ Jon He Jeu C=0 C 0 les dérivés lactoniques, par exemple les deux formes de l'acide lévulique : CH3.C(OH).CH?.CH2.CIP | | ; Qi — (Bredt) et CH°CO.CH”.CH°.CH°.CO'H ; les acides benzoylbenzoïques, étudiés par MM. Haller et Guyot et H. Mayer : OH ë CO. C'H5 NCHS et CH SCOONH C°H 0 Nco/ les dérivés de l'acide succinique : ù cl AD 20CI Pu c” NS 6 roc et | OS 0 COCL NE LGICI les aldéhydes orthophlaliques de Liebermann : COH / NCHO SAN | et | 0, cooH Je / NY COI et enfin un certain nombre d'autres corps, ne trou- vant pas leur place dans les classes précédentes et qui se réfugient dans celle-ci. IT. — CAUSES PROVOQUANT LA TAUTOMÉRIE. $S 1. — Causes physiques. 1. Action de la chaleur. — Pour une substance tautomérisable donnée, il exisle en général une limite supérieure au-dessus de laquelle un des des- motropes n'existe plus en quantité appréciable, et une limite inférieure au-dessous de laquelle l’autre desmotrope n'existe pas encore. Dans l'intervalle de température compris entre ces deux limites extrêmes, la substance est constituée par un mé- lange allélotrope des deux desmotropes en propor- tions variant avec la température. Les tempéra- tures basses sont peu favorables aux modifications lautomériques”; ainsi,les deux formes aldéhydique C'H5CO®.CH(CH°).CHO et énolique C*H°CO*.C(CSH*): CH(OH) de l'éther formyl-phénylacétique se con- servent toutes deux sans altération si on les main- tient à basse température, tandis que, par éléva- tion de température aux environs de 70°, la forme cétonique se transforme en énol, qui est le desmo- trope stable au-dessus de 75° (Wislicenus). L'énol se trouve donc à l’état métastable aux températures basses. Le plus généralement, l'élévation de tem- péralure favorise l'énolisalion; néanmoins, celte règle souffre de nombreuses exceptions. 2. Action des autres agents. — L'action des autres agents physiques n’a pas été étudiée. $ 2. — Causes chimiques. 1. Action des bases et acides. — Ainsi que nous l'avons déjà dit à plusieurs reprises, les hydrales et alcoolates alcalins employés en excès déter- minent rapidement l'énolisation complète cétols. L'élévation de température favorisera natu- rellement l'action énolisante des bases; au con- traire, l'abaissement de température la diminuera et pourra même la paralyser, ce qui, d’après Stobbe et Wiedermann, serait réalisé pour la température de la neige carbonique. Les hydrates d'autres oxydes métalliques agis- sent de la même facon que les alcalis, mais avec une intensité moindre. Avec des bases faibles, des cas intéressants peuvent se présenter; Wislicenus (loc. cit.) eite, en particulier, celui de l'action de l'hydrate cuivrique sur les deux formes desmo- tropes de l’éther formylphénylacétique, qui lui à des 1 D'après Schenck et Hellenberger (loc. eit.), l'éther acé- tylacétique est uniquement cétonique au-dessous de 1409; ce n'est qu'au-dessus de cette température qu'il commence à être constitué par un mélange de cétoneet d'énol. ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE fourni deux sels auxquels il attribue respectivement les formules : M CH — OM et E—0 | G—C'HS (A CH— C'H5 (2 | COOCH5 COOC°H, La variété n° 2 n'a aucune stabilité et elle se transforme rapidement en variété n° 1. Mais ce fait, à ma connaissance, n'a jamais été constaté que pour les dérivés aldéhydiques, et sa possibilité doit être attribuée au caractère déjà notablement acide de l'atome d'H du groupement — HC: O. L'argent possède une aptitude toute particulière à provoquer la lautomérisalion des molécules de constilution variable. La transformation du cya- aure d'argent en carbylamine en est une preuve. Une autre, également, nous est fournie par les re- cherches de MM. Haller et Blanc! sur les élhers acyleyanacétiques ; ces auteurs ont, en effet, mon- tré qu'en passant à l'état de combinaison argen- tique, le complexe — CO.CH(CAz)CO®R se tauto- mérise en — C(OH):C(CAz)CO*R. Wislicenus et Goldschmidt® ont signalé des faits analogues à propos de l'action d’un iodure alcoolique sur le dérivé argentique d'une amide : R.CO.AzHR.C (: AZH)OAg—R.C (: AZH)OR'. Le rôle obscur de l'argent dans ces lautomérisations a été récem- ment élucidé, tout au moins en ce qui concerne la formation des carbylamines. M. Guillemard a prouvé la formation d'une combinaison double de CAzAg et de carbylamine, qui, insoluble, échappe à la transposition moléculaire, tandis que, si l'on opère avec le KCAZ, la combinaison double inso- luble ne se faisant pas, la carbylamine se lrans- forme en nitrile. Les bases pyridiques et pipéridiniques, d'après Schiff”, agiraient en sens inverse des alcalis et favoriseraient le maintien de la forme cétonique ou le retour de la forme énolique à celle-ci. 11 y a là une anomalie difficilement explicable, attendu que ces bases ont une énergie qui les rapproche des alcalis et qui est, en tout cas, très supérieure à celle de l’oxyde d'argent. Les acides agissent sur les sels des énols acides en produisant un résultat inverse de celui qu’on ob- serve dans l'action des bases; le résultat de leur pré- sence est de ramener plus ou moins complètement à l'état de cétone les énols libérés de leurs combi- naisons salines. Par contre, dans le cas de pseudo- bases, dont les énols ont un caractère basique, la production de cette fonction énol est favorisée par la présence d'un acide susceptible de la saturer. ‘ BI. Soc. Chim., t. XXI, p. 240. ? Ber., t. XXXIII, p. 1467. * Ber., t. XXXI, p. 205. 2. Action des dissolvants. — J'eslime que les dissolvants doivent être placés parmi les réactifs chimiques susceptibles d'agir sur les substances tautomérisables. Un certain nombre de solvants, en effet, réagissent sur ces substances, proportion- nellement à leurs masses, et provoquent leur taulo- mérisation. Un exemple tout à fait typique à cet égard est celui de l’éther dichlorohydroquinone- dicarbonique CSH*O*CF(CO*CH°Y, dont l'une des formes desmotropiques reste inaltérée lorsqu'on le dissout dans le benzène ou l'éther de pétrole, mais qui, au contraire, par dissolution dans l'alcool, se lautomérise à la faveur d'une combinaison, isolable, qu'elle forme avec le solvant‘. Au point de vue de leur action sur les substances tautomérisables, les solvants peuvent se classer en deux catégories : celle des solvants 20 tautomr- risants, tels que le benzène, le chloroforme, le sulfure de carbone, et celle des solvants fautomér:i- sants, tels que l’eau, l'alcool, l'acétone, ete... : l'éther, suivant les cas, se placera dans l’une ou l'autre de ces catégories (le plus souvent dans la première). Sauf quelques exceptions concernant les éthers formylacétylacétiques, les solvants de la première calégorie ne modifient pas l'état d'un desmotrope ni celui d'un mélange allélotrope, tandis que ceux de la deuxième provoquent l’éno- lisalion des formes céloniques et, d'une façon plus générale, favorisent la production d'un desmotrope à fonction hydroxylée. Cette énolisation est d'au- tant plus rapide et plus complète qu'on opère à une lempérature plus élevée ou à une dilution plus grande. Brühl”, qui à étudié, par sa méthode spectro- métrique, le mode d'action des dissolvants sur les substances à constitution variable, a remarqué que. la tautomérisation ne suit pas immédiatement la dissolution, mais qu’elle est précédée d’une période plus ou moins longue, durant laquelle la substance dissoute subit une désagrégation moléculaire. Le même auteur ajoute que les solvants possédant le maximum d'action sont l’eau et les alcools, et qu’enfin l'action de ceux-ci aboutit toujours à uneénolisation complète de la célone. L'exactitude de ce dernier point à été contestée par Wislicenus®, et MM. Hal- ler et Minguin‘ ont montré que, en présence d'alcoolates alcalins, les camphres cyanés, traités par un iodure de radical alcoolique RI, donnent à la fois les dérivés énoliques : Ber.;t: XXI, p. 1154. ? Ber:, t. XXXII, p. 2326. 3 Ber., t. XXXII, p. 2837. + C.R., t. CXXXVI, p. 4525. frotte“ ANDRE KLING — LA TAUTOMÉRIE 315 et les dérivés cétoniques : CHR ; GI alors que ces derniers subissent l’énolisation lors- qu'on les dissout dans un solvant tautomérisant. Perkin seu. (loc. cit.) est arrivé à des résultats ana- logues à propos des solutions aqueuses des glucoses. Enfin, j'ajouterai que Stobbe et Wiedermann” ont conclu, d'expériences sur des dicétones semicy- cliques de la série pentaméthylénique, que les sol- vants tautomérisants provoqueraient indistincle- ment l’énolisation des cétols et la cétonisation des énols; ce seraient des catalyseurs activants, tandis que les non lautomérisants seraient des catalyseurs relardaleurs; une trace d'un catalyseur activant suffirait pour modifier profondément la constitu- Lion d’un desmotrope. C'est précisément l'une des raisons qui avaient engagé Goldschmidt à employer l’isocyanale de phényle comme réactif susceptible de fixer la fonction réelle de certains desmotropes. Il pensait que, le premier effet de ce réactif élant de détruire les moindres traces d'eau que peut con- tenir le desmotrope, la réaction s’effectuerait entre l'excès d'isocyanate et le desmotrope exempt de toute substance étrangère capable de modifier sa fonction. 3. Action des divers réaclifs propres à agir sur l'une ou l'autre des fonctions des deux desmotropes. — Une question intéressante se présente : Etant donnée, par exemple, une substance susceptible de fournir un énol et un célol, qu'adviendra-t-il si on traite l'énol par les réactifs des célones, et inver- sement le cétol par les réactifs des énols? D'après ce que nous savons déjà, nous pouvons répondre à celte question. Dire que nous partons du desmo- trope À, cela signifie qu'à la température à laquelle nous opérons le produit que nous considérons est constitué, pour la plus grande part «, par ledit des- motrope À, mélangé à des traces 8 de l’autre des- motrope B; entre « et 6, l'état d'équilibre est réglé par les conditions extérieures.Si nous faisons réagir sur ce mélange un réactif inapte à se combiner avec A,mais capable de le faire avec B, nous ferons dis- paraitre, sous forme de combinaison, la portion B et nous romprons l'équilibre. Pour compenser cette disparition du desmotrope B, une portion de À se tau- tomérisera en B, qui disparaitra à nouveau, et ainsi de suite jusqu'à destruction complète de la forme A, qui, par étapes successives, se sera transformée d’abord en B, puis en combinaison de B. Ceci nous explique pourquoi une réaction chimique ne peut être spécifique de la fonction réelle d'un desmo- 1! Liebigs' Ann., t. CCCXXVI, p. 341. trope, et pourquoi une réaction colorimétrique, telle que celle au chlorure ferrique, destinée à caracté- riser cette fonction, est illusoire : le réactif intro- duit suffit à déterminer la création de la fonction à déceler, alors que celle-ci pouvait n'exister qu'à l'état de traces à côté de celle dont on voulait la différencier. 4. Action du milieu. — Dans l'action des réaclifs sur les desmotropes, le milieu intervient également pour une part importante; la nature et les propriétés | de celui-ei sont capables d'influencer notablement les réactions qui s'effectuent en son sein. Les résul- tats différents oblenus dans l'action des chlorures d'acides sur l’éther acétylacétique, suivant les condi- tions de milieu, en sont une preuve’: lorsque la réac- tion se fait en milieu alcalin, le chlorure d’acétyle” ou l’éther chlorocarbonique* fournissent un mélange de dérivés C et O. Dans le cas de l’éther chlorocar- bonique, moins acide que le chlorure d’acétyle, c'est surtout le dérivé C qui domine. Si, au contraire, on opère avec la pyridine anhydre, c’est uniquement l’éther O qu’on oblient*'. Tel est encore le cas du propionylcarbinol*, qui, ainsi que je l'ai montré, donne avec la semicarbazide une semicarbazone en solution alcoolique absolue, et un propionylcarbino- late de semicarbazide en solution aqueuse, ou encore le cas décrit par Simon de l’action de l’aniline sur l'acide phénylpyruvique. Schiflé à précisément utilisé cetle action du milieu pour réaliser la séparalion des desmotropes des éthers 8-cétoniques. Il les cétonise par la pyri- dine ou les bases pipéridiniques, ou les énolise par les alcoolates alcalins. Il traite ensuite ces desmo- tropes, fixés dans leurs formes, par un réactif ca- pable de réagir à la fois sur la fonclion cétone et sur la fonction énol, par exemple une amide, et obtient de la sorte, à l’état de pureté, la combinaison de l’un ou de l'autre desmotrope. Wislicenus, | avant Schiff, avait du reste pu, comme il à été dit plus haut, séparer à l’état de sel de cuivre les deux variétés desmotropiques de l’éther formyl-phényl- acétique. Dans bien des cas, une substance tautomérisable fournit, au cours d’une réaction, les deux dérivés 1 Ainsi, par exemple, M. Haller (C. R., t. CIL, p. 974) à montré autrefois que la potasse alcoolique agissait sur les urées, les transformant en cyanale de potasse et ammo- niaque. Or, on sait qu'en milieu aqueux c'est la réaction inverse qui se produit, ce qui fait que, suivant les condi- tions de milieu dans lesquelles on opère, elles se comportent soit comme des diamides, soit comme des isocyanates d'ammoniaque. 2 Ber., t. XXV, p. 410 et 1040. $ Ber., t. XXV, p. 1760. * Ber.,t. XXXIII, p. 1242. KL : Th. F. Se., Paris, 1905. Berich., t. XXXI, p. 1388. « e 316 ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE correspondants à ses deux variélés desmotropiques, et qui possèdent une stabilité suffisante pour que la forme de chacun d'eux soit immuable, Telle l’ac- tion des iodures alcooliques sur les dérivés des camphres cyanés, qui à fourni à MM. Haller et Minguin', puis à M. Haller *, les deux isomères alcoylés, l’un célonique : a dCA7 CO l'autre énolique : C— CAz Î üu— OR non transformables l’un dans l’autre. Il y a également des cas où, par suite de la mul- liplicité des conditions favorisant l'existence d'un des desmotropes ou de ses dérivés, on retombe toujours sur lui alors qu'on cherche à préparer l’autre ou les dérivés de celui-ci. C’est le cas, par exemple, de l'éther benzoylbenzoïque, étudié par MM. Haller et Guyot”, el dont le chlorure fonclionne bien comme tautomère, puisqu'il donne : (CSHS)? ce © CO/L (1) en réagissant sur le benzène, et /COC'HS CH \CO -AzH®, (2) par l’action de l'ammoniaque. Néanmoins si, à l'aide de ce chlorure, on cherche à préparer les éthers alcoylés correspondant aux desmotropes 1 et 2, on échoue et on relombe uniquement sur l’un d'eux, de sfabilité favorisée. La forme desmotropique moins favorisée du chlorure d'éther benzoylben- zoïque n’en existe pas moins à l’état libre; Hans Meyer‘ l'a obtenue et décrite sous le nom de forme +, dans l'action du chlorure de thionyle sur l’éther benzoylbenzoïque. En partant de celte va- riété desmotropique, il à pu préparer toute une série de dérivés, isomères de ceux obtenus par MM. Haller et Guyot, et qui sont les desmotropes 4 vainement cherchés jusqu'alors. Nous citerons enfin des cas extrêmes, où seule l’une des formes desmotropiques est stable : c'est le cas de l’aldéhyde (forme stable), en laquelle se transforme toujours l'éthénol (forme instable), ct les cas de taulomérie virtuelle sur lesquels nous reviendrons dans un instant. . Fe B., CXVIII, p. 690. ? C:R:,t. CXXX VI, p. 789. È Fe $. CRE XXV,; p. 49: # Monalsh.,t. XXV, p. 1171. Nous nous contenterons actuellement de conclure de l’ensemble des faits connus que, de toutes les“ combinaisons tautomérisables, ce sont celles dont l'H mobile n'a pas été remplacé qui subissent le plus aisément la tautomérisation dans un sens oui dans l’autre. Quant à l'influence de la nature des radicaux “ substituants sur la détermination de la forme des- motropique, elle est encore assez vague. Néan-" moins, on constate que, par dissolution, les dérivés formylés se lautomérisent plus aisément que les» dérivés du type acétylacétique’. En outre, ainsi que Claisen l'a exprimé le premier”, « /a forme énolique d'un composé se produit d'autant plus faci- lement que le radical acide lié au groupe méthé- nique présente un caractère plus négatif» (Règle de Claisen). 11 faut ajouter, en outre, que la tendance à l'énolisation augmente avec le nombre de radi- caux négatifs substitués : L'influence de la négati- vité des radicaux substitués sur le maintien de la double liaison nous est indiquée par la suite des dé- rivés du propylène : CH°.CH : CHOH n'est pas stable, tandis que CH°.CH : CHCI, CH°.CH : CHCAz, CH°.CH : CH.CO'H le sont. III. — MÉCANISME DE LA TAUTOMÉRISATION. Pour Laar (loc. cit.), les substances tautoméri- sables sont constituées par des molécules dans les- quelles un atome d'H ou un radical monovalent oscille perpéluellement entre deux positions ex- trèmes, d’où résulterait l'impossibilité d'attribuer une formule à de tels composés. Ceite hypothèse n'est plus soutenable aujourd'hui, d’après ce que nous savons sur la réalité d'existence des variétés desmotropiques. Nous allons chercher à lui substi- tuer une autre explication, reliant la tautomérisa- tion à des causes chimiques. Pour ma part, j'estime que la tautomérie n'est qu'un cas particulier d’un phénomène plus général, celui de la dissociation. Prenons un exemple de tautomérisation d'un desmolrope par action d'un dissolvant : ce sera, si l’on veut, l’acétol, qui, anhydre, existe sous la forme cétonique CH°.CO.CH?OH, mais qui, en solu- tion aqueuse, passe à l’état oxydique : CH°C(OH) — CH?, S 04 ainsi que le prouve l'expérience. Si nous exami- nons des solutions aqueuses d'acétol de teneurs croissantes en eau, el si nous déterminons leur coefficient de viscosité, nous constatons que la t. XXXII, p. 282 L'XXV, p. 1163. 1 Ber., ? Ber., ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE 317 courbe représentative des valeurs de ces coef- ficients présente un certain nombre de points singuliers. Ces points se produisent pour des mélanges dont la composition correspond à celle d'hydrates définis, non isolables, à cause de leur instabilité. Si nous considérons, je suppose, l'hy- drate à 1H°0, nous pouvons lui attribuer la consti- tution CH°.C(OH).CH'OH; or, nous voyons qu'il peut perdre de l'eau de deux façons différentes, en donnant soit le produit cétonique primitif, soit l'oxydique ‘ : OH OH OH 7 CH3.C{ —C< —H — CHA COLCC H OH /H H OH ou CHS.C£ — CH?. à 0” C'est donc par suite d’une hydratation et d'une déshydratation successives que cette tautomérisa- tion s'est réalisée, et c'est à la faible quantité d'énergie mise en jeu au cours de ces deux réac- tions que nous devons leur reversibilité facile pour de faibles variations des conditions du milieu. De même, au cours de la tautomérisation de l'éther dichloro-dihydroquinone-dicarbonique par dissolution dans l'alcool, Hantzseh et Hermann * sont, comme nous l'avons déjà dit, parvenus à isoler une combinaison formée entre la quinone et l'alcool, et par l'intermédiaire de laquelle se produit la tautomérisation. Ce processus de tautomérisa- tion est général, et il est facile de s'assurer de la possibilité de son extension à tous les cas connus de tautomérisation par dissolution dans les sol- vants dits Zonisants *. D'une façon analogue, le changement desmotro- pique est provoqué par l’élévalion de température : le phénomène s'explique encore simplement en supposant une dissociation suivie d'une recombi- naison des molécules dissociées : NT VAUX D RUR: >| à R, MR ILE. Ste dG—C< “+xY Dur R,/ ee il R, RZ NE 1 2 4 KuiNG : Th. F. Se., Paris, 1905. 2 Ber.,t. XXI, p. 1754. * Gourscamipr (B., t. XXIII, 253) explique le mécanisme de Aa tautomérie par une ionisation. D'après lui, si le thioacé- tanilide C‘H°.AzH.CS.CH*, en réagissant sur la soude et un iodure alcoolique, donne le desmotrope C°H°,Az: C(CH#)SR au lieu de l’autre C6H5.Az (R). CS.CHS, cela tiendrait à ce que la soude est ionisée en (ee) et (QD); ces ions se porte- raient.sur les éléments et il en résulterait la réaction dans Je sens suivant : CSH°.A7.C — CH CSHS — Az: C — CHS | I | HS > +HOH S—Na. JR AE OH Na REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1901. aboutissant à la réalisation du type 1 ou du type 2, suivant la température à laquelle on opère et pour laquelle la stabilité de 1 ou de 2 est la plus grande. Un cas curieux, à ce point de vue, est celui que fournissent les recherches tout à fait récentes de M. Guillemard. Cet auteur a constaté que les cya- nures métalliques, chauffés avec des agents d'’al- coylation, dans des conditions déterminées de température et de temps, fournissent un mélange, en proportions variables, de nitrile et de carbyla- mine. À basse température, c’est la carbylamine qui prédomine; à température plus élevée, c'est le nitrile qui prend naissance. La raison en est que la carbylamine produite se combine avec les cya- nures métalliques, pour donner des combinaisons, stables dans le cas du cyanure d'argent, instables dans les autres cas, et qui alors se dissocient pour donner soit de la carbylamine, si la température est basse, soit du nitrile, si la température est plus élevée. Dans ce cas particulier, tout se ramène done à une isomérisation des carbylamines insta- bles en nitriles plus stables. La réaction n’est pas réversible; il n'y a donc pas fautomérisation, mais simplement isomérisation. Enfin, dans le cas de tautomérisation par action de réactifs, une explication analogue s'impose. Si, dans la synthèse des amidines, en particulier, on arrive au même résultat en faisant agir R.CCI1:AzY sur AZIX qu'en faisant réagir R.CCI:AzX sur AZH°Y, la cause en est dans la formation d’un dérivé d'addition RCCI(AZHX)(AZHY), trop instable pour être isolé, qui est le même dans les deux cas'. Par perte de HCI, il fournit l’amidine. Si les deux radi- caux X et Y sont très différents l’un de l'autre, l'élimination de l'acide se fait aux dépens d'un seul des radicaux aminés et l'on n'obtient qu'une seule amidine, celle dont la stabilité est la plus grande. Si, au contraire, X et Y sont peu différents, l'élimination se fait alors indifféremment aux dé- pens de l’un ou de l'autre des restes aminés, et l'on obtient un mélange de deux isomères de pro- priétés physiques extrèmement voisines, mais dont les dérivés de substilution peuvent se différencier nettement. Nous ferons remarquer qu'il est aisé de com- prendre la cause de la diminution d'aptitude à la lautomérisation subie par des molécules tauto- mères dans lesquelles on substitue à l'H des radi- caux lourds ou électro-négatifs. Poursuivons, en eflet, l'analogie que nous avons établie, au début, entre les phénomènes de tautomérie et ceux d'équilibre mécanique. De même qu'une ba- lance dont l’un des plateaux n'aura reçu qu'une faible surcharge pourra osciller aisément autour de 1 Ber.;t. XXNIII,p:.2362. 318 L ANDRÉ KLING — LA TAUTOMÉRIE sa position d'équilibre, mais au contraire se calera pour une forte surcharge, de même la molécule d'une substance tautomérisable oscillera d'autant plus aisément d’une forme desmotropique à une autre que seront plus légers les radicaux attachés à l'atome de C faisant office de pivot. IV. — ConcLusIons. Ce rapide coup d'œil jeté sur l'histoire de la tau- tomérie nous montre que les divers résultats qu'en fournit l'étude peuvent être actuellement rassem- blés en un corps de doctrine assez homogène, malgré quelques points faibles qu'il appartiendra à des recherches ultérieures d’élucider complète- ment. La notion de tautomérie, dont l'opportunité fut si discutée lors de son introduction dans la Science, parait devoir y jouer dans l'avenir un rôle impor- tant. Au point de vue pratique, il est probable qu'elle ouvrira la voie à des synthèses nouvelles, en par- ticulier celles des polyoses, parce qu'elle permettra de mieux connaitre la structure des molécules à reproduire et, par conséquent, de réaliser exacte- ment les conditions de milieu dans lesquelles les édifications moléculaires devront être effectuées. Au point de vue théorique, elle facilitera l'expli- cation de certains phénomènes obseurs dans leur mécanisme. L'analogie si frappante entre les phé- nomènes de tautomérie el ceux de dissociation électrolytique devra particulièrement retenir l’at- tention. Actuellement, on a tendance à ramener les pre- miers aux seconds, ce qui, au point de vue chi- mique, a pour résultat de résoudre la question en la supprimant. Il me semble qu'au contraire las route suivie en sens inverse serait beaucoup plus fertile en horizons nouveaux. Puisqu’en effet nous* savons approximativement expliquer le passage d'un desmotrope organique acide à un autre desmo trôpe neutre, sous l'influence d’un dissolvant, pour quoi ne chercherions-nous pas à appliquer ce connaissances à l'explication des phénomène accompagnant la dissolution des acides, des base et des sels, pour lesquels l'hypothèse de l’ionisa- tion soulève tant de critiques judicieuses? D'autre phénomènes gagneraient sans doute également à un essai d'explication basée sur la tautomérisation : l’action de certains agents catalytiques est peut- être dans ce cas. |; Mais ce qu'il y a de certain, c'est qu'une tenta- tive d'orientation de la tautomérie vers la Chimie minérale ne pourrait manquer d'être fructueuse Elle ne serait, du reste, pas tout à fait nouvelle; les” recherches de M. Hanriot sur l'eau oxygénée nous ont fait voir que ce composé fonctionne tantôt comme un peroxyde d'hydrogène, tantôt comme uns dihydroxyde. M. Maquenne a montré également que l'hypoazotide possède des propriétés qui le” rapprochent des tautomères que nous avons étu-" diés précédemment, et enfin Hantzsch a fait obser… ver que les propriétés des oxydes indifférents s'expliquent assez bien dans l'hypothèse de la tau- tomérisalion. | Espérons que de nouvelles recherches permet-=" tront à cette notion de s’acclimater dans les régions de la Chimie minérale et d'y porter ses fruits. L: » André Kling, | Docteur ès sciences, Chef adjoint de travaux à l'Ecole de Physiqu et Chimie industrielles de la Ville de Paris: , D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 319 REVUE ANNUELLE D’AGRONOMIE Cette revue annuelle d'Agronomie a été long- temps rédigée par M. P.-P. Dehérain. Notre ancien et très regretté professeur accomplissait cette tâche délicate avec la compétence parfaite, la conscience, l'impartialité et le remarquable talent d'exposition que nous lui avons connus. Les lecteurs de la Revue générale des Sciences ont apprécié comme nous la valeur du savant, le mérite de l’écrivain, et nul d’entre eux ne songera à nous reprocher de grandir celui que nous désirons honorer. En reprenant ici, après M. Dehérain, la tâche interrompue, nous aurons toujours le désir d’être clair, la préoccupation de rester impartial. L'objet habituel de nos études est la recherche des faits économiques et de leurs conséquences dans leur rapport avec les questions techniques de l'Agriculture. Nous ne songeons nullement à négliger les con- sidérations de ce genre. Il est impossible, à notre avis, d'en nier l'intérêt. L'Agriculture, comme l’a dit M. de Gasparin, est la science qui recherche les moyens d'obtenir les produits des végétaux de la manière la plus par- faite et la plus économique. Le résultat immédiat ou différé des découvertes scientifiques est tou- jours l'accroissement de la productivité du travail appliqué à la formation des richesses. I. — LA CONSTITUTION DE LA TERRE ARABLE. Des travaux du plus grand intérêt ont été pu- bliés sur cette question en France et aux Etats- Unis. Il nous paraît indispensable d’en faire men- tion et même de les exposer avec quelque détail. La lerre arable a été — principalement et pri- mitivement — conslituée par les débris des roches formant l'écorce solide du globe terrestre. Il ré- sulte de ce fait, constaté sans difficulté, et exposé souvent sans discussion, que l’on peut retrouver dans les terres les minéraux constitutifs des roches originelles. Déjà, le comte de Gasparin avait fait cette remarque dans son Cours d'Agriculture, à propos des propriétés physiques de la terre arable. Après avoir soumis un échantillon à une léviga- tion méthodique, cet auteur examinait la forme des particules, et il insistait sur l'intérêt que pré- sente l'étude de ces fragments. « Avant la lévigation, dit-il‘, les plus gros frag- ments étaient recouverts d'une poussière qui em- {Core DE GasPaRiN : Cours d'Agriculture, t. 1, p. 172 et suiv. Passage cité dans l'ouvrage récent de M. J. Dumonr : La Chimie Agrologique. Paris, Amat, 1907. pêchait d'en distinguer les formes; tout prenait l'apparence grisâtre de l'argile, si ce n’est dans cerlaines terres composées de roches cristallines en décomposition, où le quartz est très abondant relativement aux autres éléments. Maintenant, la lévigation achevée, on reconnaît, à la loupe ou au microscope, plusieurs états différents des parti- cules : 1° les cristaux de quartz, de mica, sont entiers ou peu usés; une partie notable du calcaire estrestée en gros grains ; les éléments de la terre sont à peine mélés, surtout dans les terrains qui ont été formés en place et n'ont pas été transportés par les eaux; 2° d’autres fois, les fragments de quartz sont recouverts d’une couche noirâtre ou ocreuse que l'eau n’enlève pas, mais que l'acide nitrique détache; 3° l'enduit des grosses particules n'est que pulvérulent et, après la lévigation, les frag- ments de quartz paraissent translucides. « Dans les deux derniers cas, les particules sont arrondies et l’on voit clairement qu'elles ont été roulées. Les silex conservent cependant encore une forme tuberculeuse. « Les matières pulvérulentes se comportent ainsi de plusieurs manières différentes; les calcaires se groupent quelquefois en masses de stalactites ou en masses figurées; l'argile, en se séchant, se prend en plaques unies et solides. Il est impossible d'évaluer la ténacité extrème de ses plus petites particules. « On distingue aussi, dans certaines terres, des débris de tests de mollusques qui ont conservé leur apparence nacrée; c'est surtout dans les ter- rains paludéens et dans ceux d’eau douce qu'ils sont abondants.…. « Le terreau peu consommé conserve encore quelques parties de son organisation végétale ; c'est ainsi qu'on le trouve dans les terrains modernes et les terrains paludéens, où les débris végétaux sont parvenus rapidement à la carbonisalion avant d’avoir perdu leurs formes. Dans les terrains an- ciens, le terreau apparait sous forme de petits grains charbonneux, roux ou noirâtres. « L'examen microscopique des terres ne nous a donné jusqu'à présent que des résullats généraux ; mais il faut dire aussi qu’en nous faisant pénétrer plus intimement dans la composition et la struc- ture des terres, cet examen forme singulièrement le coup d'œil et nous accoutume à juger de leurs qualités par leurs apparences extérieures. Il suffit d'un grossissement de 60 à 120 pour distinguer parfaitement toutes ies parties constituantes des sols; une goutte d'acide nitrique, mise en contact avec la terre sur le porte-objet, achève d'éclaircir 320 D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE tous les doutes que fait naître une première vue,et cette connaissance empirique de la forme et de la situation des différents éléments de la terre, sans pouvoir être traduite en principes, nous habitue à démêler certains caractères qui, par la suite, ana- lysés avec sagacité, pourront peut-être prendre une plus grande place dans la science. » Cette étude a été, depuis cinquante ans, reprise et complétée à bien des reprises; presque tous les savants qui s'en sont occupés ont admis pour la terre arable une double cause de formation ou une double constitution. Ainsi, dans une brochure* récemment publiée par M Cayeux, nous trouvons ce passage, qu'il est utile de reproduire exactement: « Toutes les roches qui affleurent à la surface de la terre sont susceptibles de s'allérer ; leur alléra- tion comporte deux phénomènes : la désagréga- tion et la décomposition. «1° Les changements de température de l’atmo- sphère provoquent des dilatations ou contractions, variables suivant une foule de circonstances, et qui, avec le temps, émiettent les roches superfi- cielles, les réduisent en menus débris. Sous cette influence, les roches cohérentes deviennent meubles. Tel est le phénomène de désagrégalion. « 2° L'eau de pluie, chargée d'acide carbonique et d'oxygène, attaque toute les roches qu'elle im- prègne ou traverse. Il n'existe pour ainsi dire pas de dépôts qui résistent à l’action sans cesse renou- velée des eaux météoriques. Elles attaquent, à la longue, les silicates complexes des roches érup- tives, feldspaths, micas, amphiboles, pyro- xènes, ete., et donnent naissance à des carbonates :lealins ou alcalino-terreux solubles. Elles décom- posent ainsi à la température ordinaire les silicates de potasse, de soude, de chaux, d'oxyde de fer, de magnésie, etc. Dans les mêmes conditions, les lerrains sédimenlaires se transforment également et parfois sur une vaste échelle. « Bref, les agents atmosphériques, aidés par un facteur d'une puissance illimitée, — le temps, — ésagrègent et décomposent les roches, même les plus dures et les plus compactes. La transforma- lion, à la fois physique et chimique, qui en est la conséquence engendre des dépôts superficiels meubles. Tantôt ces dépôts restent sur place, et il y a passage insensible de la roche-mère au sol qui en procède; tantôt ils sont remaniés, transportés var les eaux de ruissellement, et ils vont s’accu- iuler à distance de leur point de formation. « Si l’on se met en présence du cas le plus wénéral, on peut dire que la terre arable corres- pond à la zone superficielle des terrains ainsi 1 Cayeux : Constitution de la terre arable (Extrait de la Revue de Viticulture, Paris, 1905). modifiés par les agents atmosphériques et rema-… niés ou non. C'est à bon escient que je passe sous | silence l'intervention de l'homme et des orga- nismes. « Il y à eu accord unanime jusqu'à ce jour sur les données fondamentales de la définition de la terre arable : « matière complexe résultant de la désagrégation et de la décomposition des minéraux essentiels des roches. Cette matière familière de la terre arable implique naturellement la présence, dans ce dépôt, de minéraux décomposés ou en Voie d'altération ». | Deux savants, spécialistes aulorisés, M. Delage, professeur à la Faculté des Sciences, et M. Lagatu, professeur à l'École d'Agriculture de Montpellier, ont observé des faits qui les amènent à conclure dans un sens tout différent. Grâce à un tamis très fin (10 fils au centimètre), “ les auteurs isolent, dans un premier lot, les cailloux et les graviers d'un échantillon de terre. La matière pulvérulente qui passe à travers le tamis représente, pour eux, la terre proprement dile." Celle-ci est alors mouillée de facon à former pâte, roulée entre les mains, et constitue &es cylindres de 5 à 6 centimètres de longueur sur 2 centimètres de diamètre. Séchés, puis imprégnés à chaud d’une . colle spéciale, ces cylindres de terre fournissent à un spécialiste des plaques minces ayant une épais- = seur voisine de 1,100 de millimètre et susceptibles d'être examinées au microscope. Cet examen a. précisément permis aux deux auteurs la consta- tation d’un fait qui les a vivement surpris, comme ils le disent eux-mêmes’ : c’est l'état de pureté dans lequel s'y trouvent les minéraux composants. MM. Delage et Lagatu pensaient, auparavant, et enseignaient que la terre arable est une matière complexe résultant de la désagrégation et de la décomposition des minéraux essentiels des roches. C’est l'opinion classique, telle que l’exprime et la développe M. Cayeux dans le passage plus haut cité. « Mais, disent MM. Delage et Lagatu, aujourd'hui que nous lisons clairement dans la terre arable, nous pensons qu'il faut en rabattre et de beaucoup. En ce qui concerne les phénomènes de désagréga- tion, nous n'avons rien à dire; c'est bien, en effet, un phénomène de ce genre, quelles qu'en soient d'ailleurs les causes, qui a séparé les éléments des roches, lesquels éléments constituent aujourd'hui la terre arable. Mais, en ce qui concerne les phénomènes de décomposition, c'est tout autre chose. Nous avouons volontiers que c’est l'espoir de les constater qui nous a fait surtout entreprendre 1 À. DELAGE et H. LaGaru: Constitution de la terre arable. Montpellier, Coulet, éditeur, 1905 ; p. 10. D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE la présente étude. Lorsque nous avons été en possession de nos premières plaques minces, nous nous sommes précipités sur notre microscope, afin de vérifier avant tout le degré d'impureté ou de décomposition des minéraux composants. Or, c'est en vain que nous les avons regardés sous toutes leurs faces et à tous les grossissements; nous n'avons jamais yu que des espèces minérales d'une pureté absolument parfaite, c'est-à-dire dans l'état où on les rencontre dans les roches d'origine. « Il yen a évidemment qui ont subi des épigé- nies ; il y a, par exemple, des feldspaths épigénisés par la damourite, des micas épigénisés par la chlo- rite, des péridots épigénisés par la limonite ou la serpentine, etc.; les épigénies se rencontrent natu- rellement et fréquemment dans ces minéraux lorsqu'ils font partie intégrante des roches. Ont- elles continué lorsque ces minéraux désagrégés ont formé la terre? C'est possible, mais ce n'est pas démontré, et, dans tous les cas, ces sortes d’alté- rations ne sont pas spéciales à la terre arable et elles n'ont rien de commun avec celles dont il est question dans la définition naturelle de la terre arable. « On remarquera, en effet, qu'il s’agit ici d'une décomposition non par dissociation pure et simple, mais par substitution d'une espèce miné- rale à une autre. Lorsqu'on dit, par exemple, qu'un cristal d'orthose est épigénisé par la damourite, on exprime ce fait que de la damourite se conslilue dans cet orthose, et, s'il arrive que l'épigénie soit totale, on n’a plus alors, sous la forme cristalline non altérée de l'orthose, exclusivement que de la damourile. « En résumé, nous n'avons jusqu'à présent cons- taté l'existence, dans la terre arable, d'aucune espèce minérale en décomposition vraie; les feld- spaths y sont normaux, le quartz normal, de même les micas, la calcite, la tourmaline, l’apatite, le zircon, etc. » En définitive, MM. Delage et Lagatu reconnais- sent bien la présence simultanée et facile à vérifier de fragments minéraux purs et épigénisés dans la terre arable, mais ils affirment que l'examen pétro- graphique de plusieurs centaines de terres n'a pu fournir aucune constatation appuyant l'hypothèse classique d'une activité épigénique au sein de la terre arable. À part leur fragmentation, les miné- raux n'ont pas élé reconnus à un élat différent dans les roches originelles et dans la terre, que cet état soit {a pureté parfaite, l'épigénie partielle ou l'épigénie lotale. Dans une Note postérieure qu'ont publiée les Comptes rendus de l'Académie des Sciences, MM. Delage et Lagatu insistent encore sur ce point spécial et disent précisément : 321" « Nous avons examiné les trois cas possibles : 1° Les minéraux épigénisés de la terre provien- nent-ils tels quels des roches d'origine; 2° ou bien l'épigénie commencée dans les roches s’est-elle continuée dans la terre arable; 3° ou bien l’épi- génie est-elle spontanée dans la terre? Or, tous les cas d’épigénie dans les débris minéraux de la terre s'expliquent aisément par la fragmentation d'un minéral antérieurement épigénisé dans la roche d'origine. Nous n'avons jamais observé dans les fragments rien qui donnât au pétrographe le senti- ment et encore moins la preuve de l'activité épigé- nique saisie in situ. « Si donc il y a dans la terre des minéraux épi- génisés, rien n'autorise à affirmer qu'il ÿ a, dans ce milieu tant différent des roches en plaée, des minéraux en activité épigénique. « Tout nous porte à penser que les décomposi- tions sont consécutives à la dissolution pure el simple. » Il s'agit done bien, comme on le voit, d'une série d'observations toutes personnelles et d’une con- ception nouvelle de la constitution des terres arables. Observalions et conceptions nouvelles se rapportent encore à cette substance si connue des agriculteurs, et que l’on nomme argile. MM. Delage et Lagalu admettent, certes, qu'il existe de l'hydrosilicate d'alumine, mais ils pensent que ce dernier ne constitue nullement à lui seul les produits détritiques appelés argile habituellement. Ces produits, disent-ils, ne sont pas l'hydrosilicate d'alumine des auteurs, mais un mélange extrème- ment complexe où l'on peut trouver et où no avons trouvé de tout. Avant de parler des objections qu'ont soulevées les idées de MM. Delage et Lagalu, nous nous fai- sons un devoir de signaler les travaux sur lesquels on pourrait s'appuyer pour les défendre. Ces tra- vaux sont dus aux chimistes du « Bureau des Sols » à Washington, et notamment au directeur de ce Bureau, M. Milton Whitney. Dans une brochure ‘ publiée le 20 avril 1906, ce dernier dit en propres termes : « Nos livres classiques nous ont enseigné sinon explicitement, au moins de facon tacite, que la terre arable est le produit de la décomposition des roches; la terre serait ainsi de la roche entièrement décomposée. Il n'en est rien; c'est simplement de I roche non agglutinée, et l’on y trouve tous les miné- raux qui se trouvaient déjà dans les roches solides originelles qui se sont désagrégées pour constituer la terre. J'ai pu voir des terres de Californie exac- tement semblables à vos sables de Norfolk ou à 1 Conférence sur la « Fertilité du sol » faite par M. Milton Whitney au Club des Agriculteurs de Rich Neck (Maryland). 322 D. ZOLLA -— REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE vos lerres rapporlées de l'Eastern Shore qui s'étaient formées sur place à l’aide de roches grani- tiques, et il n'y a que des proportions d’eau insi- gnifiantes qui soient intervenues dans cetle for- mation. « Les particules sableuses ne sont pas plus gran- des que celles des terres d'ici, et l’on y retrouve exactement les minéraux contenus dans les roches originelles. « Ces roches se sont désagrégées, et c'est à peine si elles se sont décomposées. C'est là le point sur lequel nous nous étions trompés jusqu'ici: La dé- sagrégation des roches n’est pas forcément accom- pagnée d’une décomposition. Grâce à nos micro- scopes puissants et à des disposilifs appropriés, il nous est possible de voir et d'identifier des parti- cules très ténues de substances diverses; en par- ticulier, nous avons pu identifier dans des argiles les minéraux qui se trouvaient dans les roches qui ont servi à les former. Les argiles sont ainsi des poudres de roches contenant une certaine propor- tion variable de produits de décomposition, mais surtout des particules inaltérées de tous les miné- raux communs constitutifs des roches. Ces miné- raux existent tels quels dans le sol ; ils sont solubles, mais en proporlions très faibles ». Dans un travail intitulé : Les Constituants miné- raux des solutions des sols, deux collaborateurs de M. Whitney, MM. Cameron et Bell, citent précisé- ment les recherches de MM. Delage et Lagatu et ajoutent : « Avec la collaboration du D' Jay. A. Bons- teel, du Bureau des Sols, nous avons étudié des limons et des sables provenant des préparalions mécaniques d'un grand nombre de sols des États- Unis. On a trouvé qu'il était possible d'identifier pratiquement dans chaque terre les minéraux eom- muns qui constituent les roches. On à pu conclure aussi que, comme l'affirment Delage et Lagatu, quelques-unes au moins des espèces minérales possèdent des facettes nettes et inaltérées. « Néanmoins, souvent, en particulier avec les feldspaths, on a pu voir des produits d’altération à la surface des fragments minéraux !, » Nous rappelons ici simplement que MM. Delage et Lagatu conviennent que ce mélange de miné- raux purs ou décomposés peut être constaté; mais ils affirment que ces minéraux allérés se trouve- ront à cet élat dans les roches originelles. Toutes les conclusions nous venons de signaler conduisent encore à d'autres conceptions nouvelles et intéressantes autant que hardies, au sujet des dissolutions minérales servant à la nutri- que ! Frank K. Cameron et JawEs M. BEcc : Les constituants minéraux des solutions des sols. Traduction par M. Henri Fabre. Coulet, Montpellier, 1907. tion des plantes. Les poils absorbants des racines puisent, en effet, des aliments dans les matières - dissoutes et, les minéraux qui fournissent ces malières restant inaltérés, il faut donc que les minéraux eux-mêmes soient partiellement, mais « directement, dissous. Sous des influences multiples, mais surtout sous l'influence de l’eau, il y aurait dissolution de quartz, de feldspath, de mica, d’apatite, de tale, de cal- cite, etc. Ces dissolutions ne sont pas des décom- positions. D’un débris d’orthose pur qui a subi une dissolution partielle, il reste, par exemple, de l'or- those pur; d’un fragment de biotile, il reste de la biotite, et l’on peut alors comprendre comment ou pourquoi les minéraux restent purs. Qnant à l’activité chimique dont la terre est le théâtre, quant aux réactions, dissocialions, combi- naisons que l'on observe dans le sol, il serait possible de les expliquer en admettant que les dissolutions directes des minéraux sont l’acte pré- paratoire et nécessaire aux réactions chimiques ultérieures. Les solutions qui en résultent consti- tueraient le milieu en quelque sorte nourricier où s’accomplissent les phénomènes de minéralisation et où les racines des végétaux viennent puiser des aliments. Ces aliments, fournis en définitive par la dissolution directe des minéraux, sont-ils assez abondants? Nous savons que les quantités dis- soutes sont infinitésimales; mais des expériences précises, dues notamment à M. Th. Schlæsing fils, nous ont appris que les plantes peuvent trouver les éléments dont elles ont besoin — acide phos- phorique et potasse — dans des solutions conte- nant des proportions de l'ordre des millionièmes :. Cette conception est celle qu'ont adoptée les chi- mistes du Bureau des Sols aux Élats-Unis. Voici les conclusions du Mémoire déjà cité de MM. Ca- meron et Bell, sur les constituants minéraux des solutions des sols : 1° Les sols contiennent tous les minéraux com- muns des roches; 2° Il y a toujours au moins une partie de chacune des espèces minérales qui présente une surface libre sur laquelle l'action dissolvante des liquides du sol peut s'exercer ; 3° Les minéraux du sol se dissolvent de façon continue; 4 La concentration des solutions circulant dans les terres arables, en ce qui concerne les princi- paux éléments nutritifs pour les végétaux, suffit au développement des récoltes. D'autre part, dans la conférence faile par M. Mil- ton Whitney au Club des Agriculteurs du Mary- ‘ Voir SCHLOESING FILS : La potasse soluble dans l'eau des sols et son utilisation par les plantes. C. À. de l'Académie des Sciences, séance du 28 décembre 1903. es ie D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D’AGRONOMIE 323 fand', on peut trouver les conclusions suivantes “qui se passent de commentaires : « La solubilité des minéraux est faible, mais elle n’est pas douteuse: elle atteint 8 millionièmes pour d'acide phosphorique d'une terre, et 20 à 25 millio- nièmes pour la potasse. Cela correspond à une proportion élevée pour 1 acre de terre arable d'une profondeur de 12 pouces (30 centimètres) pesant environ 4 millions de livres {1 livre — 453 gram- mes). Dans toutes les terres arables, il y a des particules de roches contenant de l'acide phospho- rique et de la potasse..…. Les minéraux, en se dis- ‘solvant, constituent la solution où les plantes s'ali- mentent. En effet, leur solubilité est faible, je vous J'ai déjà dit, mais elle est sensible. Elle est assez grande pour maintenir une concentration plus que suffisante pour l'alimentation des végétaux. » L'étude minéralogique des sols a donc conduit MM. Delage et Lagatu, aussi bien que les savants américains du « Bureau des Sols »,à une conclusion très nouvelle relative à la dissolution des minéraux eux-mêmes. En France, M. Cayeux, professeur à l'École des Mines, a formulé des objections contre les consta- . tations ou les conceptions de MM. Delage et Lagatu. Dans deux articles de la Æevue de Viticulture, publiés en 1905, et dans une Note parue dans les Comptes rendus de l'Académie des Sciences,en mai de la même année, M. Cayeux affirme nette- ment la présence de minéraux altérés ou en voie de décomposition : « Dans toutes les terres arables, dit-il, dans tous des limons soumis à l'analyse microscopique, la présence de minéraux en voie de décomposition ‘est constante. «Je n'ai pas encore observé une seule terre dont tous les minéraux soient complètement dépourvus de toute trace d’altérations. J'ai reconnu trois classes d'éléments doués de propriétés distinctes : «4° Des minéraux inaltérables; « 2 Des minéraux susceptibles de se dissoudre sans laisser de produits d’altéralion; «3° Des minéraux épigénisés,c'est-à-dire altérés. Les espèces de celte catégorie qui laissent des pro- -duits d’altéralion sont nombreuses; ce sont, pour la plupart, des silicales alcalins, alcalino-terreux, ‘ou ferro-magnésiens. » Quant à la dissolution directe des minéraux — ‘en général — M. Cayeux ne l’admet pas davantage et dit encore : « S'il existe des minéraux en dé- composition dans toutes les terres arables, comme je crois pouvoir l’affirmer, la conception de la dis- solution directe de leurs éléments, qui n’est appuyée par aucun fait d'expérience, cesse d’être une Eypo- ! Loc. cit., publiée le 20 avril 1906 à Washington. thèse nécessaire. On a admis jusqu'à ce jour que les solutions minérales destinées aux plantes s'éla- borent par dissolution ou par décomposition sui- vant la nature des minéraux, et que l’altération de nombreux minéraux — qui ne peuvent se dissou- dre directement — engendre des carbonates s0- lubles qui contribuent à alimenter les végétaux. C'est l'opinion qui s'impose encore dans l'état ac- tuel de nos connaissances. » Nous nous sommes fait un devoir de reproduire exactement ces conclusions, mais c'est également une obligation pour nous de constater que MM. De- lage et Lagalu n'ont jamais nié la présence de mi- néraux épigénisés dans la terre arable. Ils se sont bornés à affirmer que jamais ils n'avaient observé une activité épigénique actuelle, sans confondre ce fait avec la constatation d'un résultat antérieur d'épigénie qui avait pu se produire dans la roche elle-même. Pour eux,les décompositions sont consécutives à des dissolutions préalables, au lieu d'être des phé- nomènes qui précèdent ces dissolutions. Plus récemment, M. Carnot présentait à la Société Nationale d'Agriculture‘ une Note de M.Bieler-Chatelan, chimiste agronome à Lausanne, à propos de l’altération des minéraux de la terre arable. L'auteur admet que l'altération même ac- tuelle des minéraux du sol, qui implique une dé- composition préalable, ou du moins un changement de composition, est un fait d'expérience dûment constaté, expliquant suffisamment à lui seul les phénomènes de dissolution partielle des minéraux complexes. Il cite le cas de la delomie, « qui n’est pas, dit-il, dissoute intégralement par l'eau aiguisée d'acide carbonique. Le carbonate de chaux, y étant beaucoup plus soluble que le carbonate de ma- gnésie, est éliminé en proportion beaucoup plus forte que ce dernier, d’où résulte un appauvrisse- ment graduel en calcaire (et un enrichissement ré- ciproque en magnésie) qui explique, par exemple, la genèse de ces dolomies vacuolaires connues dans les Alpes sous le nom de carnieules.. » Nous ne voulons pas, d'ailleurs, nous étendre davantage et entrer dans le détail des controverses qu'ont pu faire naître les travaux de MM. Delage et Lagatu. Leurs recherches, à coup sûr originales, leur parfaite sincérité, la nouveauté de leur con- ception de l’état des minéraux dans le sol et des dissolutions dont ils peuvent fournir les éléments, cet ensemble de constatations instructives et de déductions hardies est assez inléressant pour mériter une exposilion soigneuse, sinon complète. Nous laissons aux spécialistes le soin de reviser { Bulletin des Séances de la Société Nationale d'Agri- culture, 1906, n° 2, p. 186. 324 D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE: le procès. Il nous suffit d'avoir signalé des faits et des opinions. Quant à l'utilité et à la portée économique des recherches de MM. Delage et Lagatu, elles nous paraissent très sérieuses el, pour s’en convaincre, il suffit de lire attentivement les études analytiques de terres arables qu'ils ont successivement pu- bliées". A la fin d'un de ces mémoires agrologiques et agronomiques tout à la fois, nous trouvons ces lignes qui caractérisent l'intention des auteurs et la portée de leur procédé : « IL est visible que toutes les conclusions de ce travail sont virtuellement inscrites dans la diagnose minéralogique du schiste très granulilisé. Toute l’agriculture du Ségala se lie logiquement à la con- stilution de la roche qui a formé le sol et, dans Ja coupe de cette roche, un esprit averti d'agronomie pourrait lire presque toute l'histoire agricole de cette intéressante région et tracer les règles essen- tielles de la culture. » Les auteurs n’ont, d'ailleurs, jamais ni dit ni pensé que l'analyse qualitative par l'examen miné- ralogique du sol pût remplacer l'analyse chimique. Ils font constamment usage de cette dernière, pour compléter les indications tirées de l'étude minéralogique des sols ?. IL. — LES CONSTITUANTS MINÉRAUX DES SOLUTIONS QUI CIRCULENT DANS LE SOL. Des lravaux importants ont été récemment pu- bliés aux Etats-Unis sur cette question. Dans un Mémoire que nous avons déjà cité, MM. Cameron et Bell, du « Bureau des Sols », à Washington, ont longuement exposé les recherches antérieures re- latives aux constituants minéraux des solutions renfermées dans les terres *. Aux yeux de ces auteurs, le sol est un mélange hétérogène d'organismes vivants et de constituants inertes, solides ou gazeux. On y trouve: des débris minéraux, provenant de la désagrégation et de Ja décomposition des roches; de la matière organique, provenant de débris plus ou moins décomposés de plantes et d'animaux ; une atmosphère toujours plus riche que l'atmosphère ordinaire en gaz car- bonique, en vapeur d’eau et peut-être en d’autres gaz; des organismes vivants, qui sont des espèces variées de bactéries; des ferments et enzymes ; , ‘40 Etude analytique de quelques terres types de l'Aveyron. Terres pseudo-gneissiques du Ségala, chez Carrère, Rodez, 1905. 2° Etude analytique de terres arables formées par le schiste sériciteux granulitisé (Tarn , chez Coulet, Mont- pellier, 1907. * Voir les dernières pages de la brochure intitulée : Con- stitution de la terre arable, par MM. Delage et Lagatu. Montpellier, Coulet, 1905. ? F. K. Cameron et J. M. Bec : Loc. cit. enfin, des solations des constituants précédents. Ces solutions forment l'humidité de la terre et elles sont en équilibre plus ou moins parfait avec ces solides et les gaz au contact desquels elles subsistent. De tous ces constituants du sol, ce sont les solu- tions qui ont le plus d'importance pour la vie des plantes. C'est chez elles, en effet, que les racines vont puiser toutes les substances que les végétaux utili- sent pour leur développement (abstraction faite de l'eau et de l'acide carbonique absorbés par les: feuilles). On sait aussi que les plantes peuvent par- î fois absorber des substances organiques dissoutes « dans les liquides du sol; mais ce cas est excep- tionnel et n’a qu'une importance secondaire pour - le développement de végétaux placés dans des cir- constances particulières. Le liquide qui circule dans les sols étant la seule source d’où les plantes extraient les constituants minéraux absolument indispensables à leur vie, sa composition prend une très grande importance physiologique. MM. Cameron et Bell admettent que les miné- raux du sol se dissolvent d’une façon continue, et, disent-ils, en se dissolvant, comme ils sont cons- . titués par des acides forts et des‘bases fortes, ils … sont plus où moins complètement hydrolysés. Généralement, le produit d'hydrolysation le plus fort reste en solution, et le plus faible est plus ou moins complètement précipité. C'est grâce à ce mécanisme que les principales substances minérales servant de nourriture aux végélaux sont dissoutes et mises à leur disposition‘. Les auteurs américains ajoutent que, tous les sols contenant pratiquement les mêmes minéraux et les mêmes phénomènes s'y produisant, on peut s'attendre à trouver dans tous les sols une solution identique, et ils ajoutent sous forme de conclusion : « La concentration des soiutions circulant dans les terres arables, en ce qui concerne les princi- paux éléments nutritifs pour les végétaux, suffit au développement des récoltes. En outre, cette concentralion est pratiquement la même pour tous les sols. » Cetle proposition parait au premier abord si étrange et en opposition si complète avec les idées. acceptées jusqu'ici, que M. Whitney, chef du Bu- reau des Sols, insiste particulièrement surelle dans la conférence faite devant les membres du Club des Agriculteurs du Maryland”. ! Voir, pour la démonstration, le chapitre du mémoire intitulé : « La solubilité permanente des minéraux et l'hy- drolyse qui s'ensuit ». Loc. cit. * Voir Farmer's Bulletin, n° 257 (Washington, 1906) : An address delivered before the Rich Neck Farmers club of Queen Anne County, Maryland. ç D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 325 « Chose curieuse, dit-il, dans les centaines de solutions extraites de terres et qui provenaient de diverses régions, nous avons trouvé que la compo- sition et la concentration des substances dissoutes sonr sensiblement les mêmes. Ces solutions cireu- lent dans toutes les terres arables de la surface du globe, où elles servent de réserve pour la nutrition des végétaux. Il est curieux de voir que leur com- position est sensiblement identique dans les sols sableux du bord des rivières, dans les terres à blé limoneuses des plateaux, dans les argiles Hagers- town de la vallée de Shenandsah,ou dans les terres noires des prairies de l'Ouest. Les minéraux, en se dissolvant, constituent la solution où les plantes s'alimentent. En effet, leur solubilité est faible, mais elle est sensible; elle est assez grande pour maintenir une concentration plus que suffisante pour l’alimentalion des végétaux. On comprend ai- sément que toutes les terres arables contenant les minéraux constitutifs des roches aient ainsi dans leur sein des liquides ayant à peu près la même composition. « Cela est fort surprenant, mais nos expériences ont démontré qu'il ne pouvait rester de doutes sur ce fait, et toutes les terres contiennent assez de nourriture pour que les végétaux puissent y vivre. » Ces conclusions sont basées sur des observalions nombreuses, que M. Whitney a bien soin d'ailleurs de rappeler : « Afin, dit-il, d'appuyer nos affirmations sur des faits, et d'obtenir une démonstration, étant donné que les conclusions sont absolument contraires à celles que l’on a tirées jusqu'ici de l'étude des terres épuisées, et élant donné aussi le bénéfice que l’on peut retirer de l'emploi des engrais, le Bureau des Sols a envoyé un certain nombre de ses auxiliaires dans {outes les régions des États-Unis. Ces auxiliaires devaient faire des déterminations en plein champ, à l'aide des méthodes les plus sensibles. Ils ont extrait les solutions constituant l'humidité réelle des terres arables, et ils ont trouvé que les terres contiennent foules des proportions pareilles d'acide phosphorique, de potasse, de ni- trates et de chaux. Cela aussi bien dans les sols sableux de nos terrains d’alluvion que dans les terres usées de Virginie, dans les terres fertiles riches en chaux de Pensylvanie que dans les terres noires des prairies de l'Ouest.» Il est bien certain, cependant, que les quantités de matières minérale: dissoutes dans les solutions qui circulent dans le sol sont extrèmement faibles. Les recherches faites par M. Th. Schlæsing fils* l'ont prouvé, et elles ont prouvé aussi que les 1 Ta. SCHLOESING r1Ls : Loc. cil. plantes peuvent utiliser ces quantités si mé- diocres. Pour M. Whitney, il n’est pas douteux que la concentration de la solution, circulant dans la terre arable, ne se maintienne constante par la dissolu- tion des minéraux; il n’est pas moins certain que les plantes puissent vivre avec des éléments nutri- tifs encore moins concentrés ! On devine sans peine la conclusion définitive de ces diverses recherches. Si les solutions contenues dans les sols renferment à peu près toutes les mêmes éléments en quantités suffisantes pour subvenir aux exigences des végélaux qui s’atimentent, on ne s'explique plus pourquoi certaines terres paraissent épuisées; on ne s'explique pas davantage le rôle véritable des engrais, en particulier des engrais minéraux, dont l'influence incontestée était attri- buée jusqu'ici à un apport de malières nutrilives remplacant celles que les récoltes avaientenlevées ; on ne s'explique plus enfin que certains sols soient fertiles tandis que d'autres ne le sont pas, difté- rences justifiées, disait-on hier, par des différences correspondantes dans la teneur des sols en maté- riaux ou minéraux utiles et susceptibles d'être assimilés par les végétaux. M. le Professeur Whitney combat l'opinion géné- ralement acceptée en s'appuyant sur des observa- tions et des expériences dont il interprète les résullats. Pour prouver que les terres ne sont pas épuisées quand elles cessent de pouvoir porter des récoltes, l’auteur cite les faits suivants : Un pot contenant une livre de terre porte six plants de blé en plein développement. En lais- sant ces plants de blé se développer librement pen- dant trois semaines, puis en les coupant pour les remplacer immédiatement par six autres plants, on verrait que le développement de cette seconde récolte serait moitié moindre que pour la pre- mière. La terre contenue dans le pot a-t-elle été épuisée ? On n'aurait pas hésité autrefois à répondre affirmativement. Mais M. Whitney réplique : « S'il en était ainsi, il devrait être possible d'ajouter de nouvelles substances nutritives de ma- nière à rendre possible le développement d’autres récoltes. Or, l'expérience montre aue, quoique nous ajoutions, et au delà, tous les éléments nutritifs exigés pour une seconde récolte, nous ne pourrons pas obtenir que celle-ci se développe convenable- ment si elle est de la même espèce que celle qui l'a précédée et si on la met en terre immédiate- ment après qu'on a enlevé la dernière. » Inversement, est-il possible de rendre au sol soi- disant épuisé sa facullé primitive de porler une récolle et cela sans incorporer des matières miné- rales sous la forme de sels? M. Whitney répond af- 326 D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE firmativement, et dans certains cas, tout au moins, l'addition d’un engrais vert suffit pour obtenir ce résultat. Les liges de cow-pea', coupées et incor- porées au sol sous forme de fragments, rendent à la terre du pot dont nous avons parlé la faculté de porter une deuxième récolte aussi forte que la première. Cet engrais vert agit-il parce qu'il apporte en définitive des matières minérales? Pour le savoir, M. Whitney a calciné l’engrais vert, et les cendres contenant l'acide phosphorique et la potasse ont été additionnées d'autant de nitrates qu'il y en avait dans les pois, puis le tout a été mêlé au sol. Mais ce dernier n'a pas été ferlilisé. « Bien mieux, à l’aide d'autres procédés, ajoute l'expérimentateur, nous avons pu séparer les sels contenus dans du fumier et dans d'autres pots, puis nous les avons ajoutés séparément à des pois de culture. Leur effet n’a pas égalé celui de la matière organique, parce que c’est elle, en effet, qui fertilise cette terre déterminée. » M. Whitney cite encore des exemples de terres dans les Etats de l'Est — ferres épuisées — que l'emploi d'engrais minéraux ne peut pas fertiliser. On à beau, dit-il, ajouter des proportions quel- conques de potasse, d'acide phosphorique et de nitrates : « Elle ne redeviennent pas fertiles pour cela. » IT. — La FErrTitTé pu SoL. M. le Professeur Whitney a longuement exposé les raisons et les faits qui l'ont conduit à se faire de la fertilité ou de ses causes une idée toute différente de celle que l'on à admise jusqu'ici. Quelle raison générale a-t-il indiquée pour ex- pliquer l'épuisement apparent, les différences de fertilité successivement observées à la suite des cultures praliquées, l'efficacité ou l'inefficacité des engrais, elc. Pour lui, les facons culturales, l'a- meublissement, et, par suite, l’aération du sol, le pouvoir absorbant bien connu des terres, l'oxy- dation directe ou l'intervention des bactéries, la présence de l’humus et l'action généralement fa- vorable des matières organiques, enfin les engrais minéraux eux-mêmes, auraient surtout (mais non pas exclusivement) pour effet de transformer ou de détruire des toxines produites par les racines des plantes cultivées. Le savant américain adopte la théorie ou l'hypothèse de de Candolle. Les solutions circulant dans la terre renfermeraient des excreta provenant des racines ou des organes aériens. Ainsi les façons culturales n'ont pas seulement pour effet d'approvisionner les racines en oxygène: ‘ Littéralement: pois à vache : S1NCNSIS. probablement le Vigna elles permettent l'élimination des gaz toxiques pro- venant soit des plantes elles-mêmes, soit de l’action des bactéries sur les débris ou les « excreta » que ces végétaux ont laissés dans le sol. L'air doit encore oxyder les matières organiques excrétées par les plantes et maintenir le milieu dans un bon état sanitaire. La malière organique du fumier et des ‘engrais verts pouvant se transformer en humus semble purifier la terre arable, en modifiant et en enlevant les substances organiques toxiques laissées par les récoltes précédentes. Les engrais chimiques agissent d’une façon ana- logue en modifiant les toxines, de telle sorte que le sol s’en trouve débarrassé. Toutes les substances employées comme engrais auraient un pouvoir comparable à celui que les nitrates possèdent sur les matières organiques. Ainsi la putréfaction des sacs de jute est très rapide quand ils ont contenu du nitrate de soude. Les faibles quantités d'engrais ajoutées et incorporées au sol agiraient de même à l'égard des «excreta » Loxiques, puri- fiant le sol de cette manière et permettant aux plantes de se développer. Les engrais exerceraient une influence de ce genre plutôt qu'ils n’agiraient par l'apport d'éléments nutritifs. Certes, le Professeur Whitney déclare nettement qu'il a simplement observé les efets des «excrela » toxiques. « Nous n'avons pas pu séparer ces substances toxiques, dit-il, et les mettre dans un récipient avec l'étiquette : Ceci est une toxine. Mais je compte que nous pourrons identifier sous peu quelques- uns de ces excrela toxiques. » Voici, d'ailleurs, comment s'exprime le savant américain en résumant sa pensée avec beaucoup de clarté et de réserve : « En cherchant à comprendre les principes de la fertilité des terres, nous avons trouvé que le liquide qui constitue l'humidité de différents ter- rains, qu'ils soient fertiles ou non, contenait la même quantité d'acide phosphorique, de potasse et de nitrates. « Ce n’est pas sans appréhension que nous avons publié cette conclusion, car nous ne la croyions pas admissible nous-même. « Nous avons trouvé que nous avions pourtant raison, et c'est pour cela que j'ai essayé de vous faire comprendre comment je vois que les engrais agissent, et pourquoi il faut les employer. Leur rôle consiste souvent à purifier le sol, et je crois que c'est bien ainsi qu'agissent le fumier et les engrais verts ». Enfin, le Professeur Whitney explique, à l'aide de la même hypothèse, l'utilité de la jachère et celle des assolements. Le sol doit avoir le temps de D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 3217 de se purifier lui-même, el les substances excrétées par une plante ne doivent pas être toxiques pour celle qui lui succède sur le même champ; de là ressort la nécessité d’une rotation bien combinée. Nous trouvons encore dans la conférence du Pro- fesseur Whitney une conclusion logique et lindi- cation d'une expérience curieuse, relatives toutes deux aux « mauvaises herbes » et à leur influence nocive. Cette influence est attribuée généralement à l'épuisement du sol, qui devient incapable de four nir des éléments nutritifs aux plantes cultivées el aux mauvaises herbes tout à la fois. Telle n’est pas l'opinion de M. Whitney. Il rappelle que, dans les régions des Etats-Unis où l'on pra- tique l'irrigation, on se débarrasse soigneusement des plantes sauvages, malgré l'abondance de l'eau et des matières nutritives, parce que les végétaux ‘cultivés sont intoxiqués par les autres plantes et ne peuvent pas se développer dans leur voisinage. A l'Université Cornell (Etat de New-York), on à imaginé un dispositif ingénieux pour meltré en évidence cette influence nocive qu'exercent les plantes les unes sur les autres. On enlasse de la terre dans plusieurs longues boîtes. À l'une des extrémités on sème du blé et à l'autre on répand des graines de mauvaises herbes. Si l'on place une planche de séparation pour empêcher les racines de se mêler, le bléetles mauvaises herbes prennent un développement normal. Dans les boites où la planche n'a pas été placée et où les racines des deux groupes de végétaux peuvent se joindre el s'entre-croiser, le blé cesse de croître comme dans “un champ infesté de mauvaises herbes. Le Professeur Withney suppose que ce ne sont pas, dans ce dernier cas, les éléments nutritifs qui font défaut, attendu que le développement reste normal dans les deux moitiés de la boile pourvue d'une planche de séparation; mais il pense que la présence des mauvaises herbes, dans les boites non pourvues de la planche de séparation, détermine la sécrélion des poisons qui nuisent au blé. A coup sûr, on peut interpréter ces faits d'une autre facon, et il faudrait notamment savoir si le développement rapide des mauvaises herbes n'a pas appauvri la masse de terre où les deux groupes végétaux sont capables de se disputer les éléments nutritifs que leurs racines viennent y puiser. A cet égard, et à propos des conclusions nou- velles, hardies, et encore appuyées sur un nombre de faits insuffisants pour entrainer la conviction, nous ne pouvons que formuler les réserves les plus expresses. Il est clair, cependant, que la nutrition minérale des végétaux est encore fort mal connue.Toutes les observations et toutes les hypothèses suscitant des observations nouvelles sont done intéressantes. C’est pour ce motif que nous avons exposé les résultats et signalé les hypothèses se ratlachant aux travaux des savants américains du « Bureau des Sols ». Nous ne nous croyons pas en droit d'écarter a priori leurs conclusions sans que des recherches nouvelles les aient infirmées, et les faits actuellement connus sont encore susceptibles d’interprétations trop diverses pour qu'il soit permis d'affirmer qu'aucune hypothèse nouvelle n'est capable de les expliquer d'une façon plus sûre. [V. — LA FABRICATION DES NITRATES. L'usage des nitrates comme engrais est, aujour- d’hui, très répandu. Nous importons annuellement, du Pérou et du Chili, plus de 2 millions de quin- taux de nitrate de soude, valant au moins 50 mil- lions de francs. On comprend sans peine l'intérêt que présente la fabrication industrielle de cette substance, soit avec l’aide des ferments spéciaux qui sont capables d'oxyder l'azote, soit grâce à l'emploi de procédés électrochimiques. $ 1. — Les nitrières naturelles. MM. Müntz et Lainé ont publié dansles Comptes rendus de l'Académie des Sciences trois Notes du plus grand intérêt sur la nitrification intensive opérée à l'aide des micro-organismes du sol. La substance nitrifiable, le sulfate d'’ammoniaque, est déjà rapidement transformée, avec production de nitrate, lorsqu'on dispose de la terre franche et du terreau, avec addilion de 2 °/,, de sel ammonia- cal, en lits de 0,50 de hauteur, dans un local clos à la température de 15° à 22°. La couche de terre ensemencée d'organismes nitrifiants donne, par vingt-quatre heures et par kilog, 0 gr. 350 de ni- trate, soit 350 grammes par mètre cube. Le noir animal en grains, employé comme sup- port, active beaucoup la nitrification. Les auteurs ont fait à cet égard des expériences fort cu- rieuses : « Si l'on établissait, disent-ils, sur la surface de 4 hectare, une couche de noir en grain de 2 mètres de hauteur, ayant de place en place des cheminées d'appel déterminant une aéralion, le tout étant, d’ailleurs, clos et abrité avec la possibi- lité d'y entretenir une température de serre chaude, on pourrait, par l’arrosage méthodique avec une solution de sulfate d'ammoniaque à 7 gr. 5 par litre, obtenir la quantité de 12.000 kilogs de sa/pétre par jour, soit, dans l'année, 5 à 6 millions de kilogs. » Ce procédé de fabrication des nilrates ne pour- rait, d'ailleurs, être utilisé que dans le cas de nécessité absolue, pour obtenir des matières pre- 328 mières destinées à la production des explosifs de guerre. Il est clair que l'élévation du prix de revient rendrait la fabrication industrielle impossible; mais les auteurs ont démontré que la nitrifica- tion intensive permet d'obtenir des rendements jusque-là insoupconnés. Dans une seconde Note, MM. Müntz et Lainé ont exposé les résultats de leurs recherches rela- lives au rôle de la matière organique dans la nitri- fication, et ils ont notamment conclu en disant : « Dans l'établissement des nitrières intensives, il ne faut pas craindre d'employer des matières riches en humus, qui apportent une semence vivace et abondante et qui constituent un support favo- rable ». La troisième Note, plus intéressante encore par sa portée que les deux précédentes, vise l’utilisa- tion des tourbières pour la production intensive des nitrates. En étudiant nouveau l'influence exercée par le support sur la nitrificalion des sels ammoniacaux, el après avoir constaté (note deuxième) que les matières organiques agissent plutôt favorablement sur la multiplication des organismes nitrifiants, les auteurs ont remplacé le noir animal en grains par la tourbe. En répandant par intermittence une solulion de sel ammoniacal (sulfate d'ammoniaque par exemple) sur un lit de tourbe ensemencé avec des organismes nitrifiants, la production de nitrate est huit fois plus considé- rable qu'avec le noir animal. Une nitrière de 1 hectare donnerait ainsi 48.000 tonnes de nitrates par an. Avec la tourbe comme support, la nitri- fication devient si rapide qu’elle peut être compa- rée à la fermentation alcoolique tumullueuse. En outre, la nitrification se continue dans des solutions déjà très riches en nitrates, et il suffit de faire repasser sur le lil oxydant les solutions déjà nitrifiées pour que les sels ammoniacaux ajoutés à ces solutions soient lransformés en nitrates. La concentration des solutions de nitrate rend le pro- cédé de fabrication plus avantageux au point de vue économique, et c'est là un résultat du plus haut intérêt. à MM. Müntlz et Lainé se sont enfin demandé si la tourbe, qui est assez riche en azote (2 °/0), ne pourrait pas fournir elle-même l'azote ammonia- cal destiné à êlre nitrifié. Ils ont constaté que, si l’on distille la tourbe dans un courant de vapeur d'eau surchauffée, la presque totalité de l'azote inerte contenu dans cette matière peut passer à l'état d'azote utilisable. La tourbe peut encore être employée comme combustible, de telle sorte qu’elle fournit : ammoniacal { Séance du 19 février 1906. D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 1° La chaleur nécessaire aux opérations diverses: 2° L'azote ammoniacal transformable par les lits oxydants; 3° Le support qui constitue ces lits au sein desquels les organismes nitrifiants peuvent tra- vailler à la nitrification avec une extraordinaire puissance. Les auteurs concluent en disant : « Si l'on considère l'étendue des tourbières en France, c'est par millions de tonnes que se chiffre la quantité d'azote qu'on pourrait retirer el trans- former en nitrates. » Il est à peine besoin de signaler l’exceptionnel intérêt de cette conclusion, tant au point de vue scientifique qu'au point de vue économique. S 2. — La fabrication électro-chimique des nitrates. Nous savons depuis cent vingt-trois ans, depuis 1184, qu'on peut réussir à combiner l'oxygène à l'azote de l'air sous l’action des étincelles élec- triques. : Cavendish a fait celle expérience classique de syn- thèse. À la suite du passage prolongé des étincelles électriques dans l'air, il se forma une petite quantité d'acide azotique qui, mis en présence de la chaux, donna du nitrate de chaux. C'était là malheureuse- ment une simple expérience de laboratoire; on ne pouvait pas songer à produire industriellement des quanlités notables d'acide nitrique par ce procédé coûteux. Depuis 1893, de nouveaux travaux ont été faits, de nouveaux essais ont été tentés, et M. Phi- lippe A. Guye les a exposés ici même‘. En Nor- vège, à Nottoden, on est arrivé à produire de l’acide azolique en utilisant l'arc électrique, l'énergie nécessaire étant fournie par de puissantes chutes d'eau. Combiné à la chaux, qui coûte moins cher que la soude, l'acide nitrique donne des nitrates de chaux. Ceux-ci peuvent être employés comme engrais. M.Schlæsing fils a prouvé que leur usage est aussi avantageux que celui du nitrate de soude du Chili. Quant au prix de vente, élément fort important du problème, on constate aujourd'hui qu'il peut être abaissé au-dessous du cours des nitrates du Chili. Des offres sont failes à la culture francaise depuis quelques mois. Cette fabrication nouvelle des nitrates peut done offrir un intérêt considérable en réduisant les dépenses des cultivaleurs, car la valeur des engrais azolés est certainement réglée par le cours du principal d’entre eux, le nitrate de soude. D. Zolla, Professeur à l'Ecole nationale d'Agriculture de Grignon. ! Voir la Revue du 15 janvier 1906. dés à — BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques . Tannery (Jules), Professeur à la Facultédes Sciences de Paris, Sous-Directeur de l'Ecole Normale. — Leçons d’Algebre et d'Analyse, à l'usage des élèves des classes de Mathématiques spéciales. — 2? vol. in-8°. (Prix : 22 francs.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1906. L'importante modification du programme de la classe de Mathématiques spéciales des Lycées à donné à M. Tannery l'occasion d'écrire un livre attendu depuis longtemps : l'éminent auteur de l’Zntroduction à la Théorie des fonctions était plus qualifié qu'aucun autre pour donner un guide sûr, à la fois aux profes- seurs et aux élèves. Il s'agissait, non pas tant de pré- senter avec une parfaite rigueur les fondements de l'Analyse, mais plutôt d'initier le lecteur aux principes généraux et aux méthodes, en les rendant aussi simples et aussi instructifs que possible, et en en faci- litant l'application : on peut dire que M. Tannery y à parfaitement réussi. L'étendue même de louvrage, dont l’auteur s'avoue quelque peu effrayé, tient préci- sément au désir de faire apparaître d'une facon nalu- relle des notions qui, présentées sous la forme syn- thétique traditionnelle, et avec la concision, lon peut dire même la sécheresse ordinaires, tiendraient sans doute moins de place, mais seraient d'un abord sou- vent déconcertant. Il n’est pas possible de donner ici une analyse détaillée de cet important ouvrage; en voici sommai- rement le contenu: Le premier volume renferme l'in- troduction des nombres irrationnels et le calcul des exposants, l'étude des polynômes entiers et des frac- tions rationnelles, la division et le plus grand commun diviseur algébriques, la théorie des imaginaires, l'ana- lyse combinatoire, les équations du premier degré et les déterminants. Le second volume contient les séries, les généralités sur les fonctions de variables réelles, les dérivées, les séries de fonctions, les appli- cations à l'étude des fonclions et à la séparation des racines, la théorie des équations algébriques, la nota- tion différentielle et ses premières applications géo- métriques, et les notions de calcul intégral : intégrales définies et indéfinies, équations différentielles du pre- mier ordre et linéaires. L'ouvrage débute par l'introduction des nombres irrationnels, définis par la coupure en deux classes de l'ensemble des nombres rationnels ; M. Tannery géné- ralise cette notion et l'applique en toutes circons- {lances où une limite se trouve définie par ses deux classes de valeurs approchées par défaut et par excès, par exemple pour la mesure d'un arc de courbe ou d'une aire plane. A propos des polynômes entiers, il faut noter l'étude préliminaire-du polynôme au voisi- nage d'une valeur a de la variable, étude où s'intro- duisent naturellement les polynômes dérivés; la frac- tion rationnelle est étudiée d’une manière analogue. _ A propos de la division et du plus grand commun diviseur algébriques, M. Tannery ouvre la voie aux notions si importantes d'irréductibilité. Les imagi- naires sont présentées comme restes relatifs au divi- seur +1, et immédiatement appliquées à la généra- lisation des propriétés du polynôme entier résultant du théorème de d'Alembert. Les équations du premier degré précèdent et introduisent les déterminants, qui permettent ensuite d’en compléter la théorie. Pour les propriétés générales des fonctions, l'auteur a fait largement appel à l'intuition et aux représenta- tions graphiques, renvoyant pour plus de rigueur à son /ntroduetion à la Théorie des fonctions. Le cha- pitre des séries entières, récemment introduit en Mathématiques spéciales, est particulièrement inté- ressant; la différenciation de la série, introduite dès le début, permet de trouver immédiatement les déve- loppements en séries usuels, qui sont appliqués au calcul approché des fonctions ; l'extension aux va- riables imaginaires suit immédiatement. L'application à l'étude des fonctions et à la séparation des racines est faite au point de vue pratique et accompagnée de nombreux exemples numériques très soigneusement traités : d'ailleurs, l'auteur a le souci constant de ce genre d'exercices, toujours très étudiés, notamment au point de vue des approximations. L'important cha- pitre de la théorie des équations renferme toutes les questions essentielles : fonctions symétriques, élimi- nation, résolutions des équations simultanées, théo- rème de Descartes, calcul des racines rationnelles, avec de nombreux et très intéressants compléments; nous signalerons notamment la théorie des fonctions symétriques, avec la distinction, souvent omise, entre les fonctions symétriques des n racines d’une équation et les fonctions symétriques de » lettres, et aussi la résolution des équations simultanées, avec son inter- prélation à la recherche des points d'intersection de deux courbes algébriques. La notation différentielle, exposée surtout pour le premier ordre et en mettant en relief la notion de la différentielle totale, trouve son application dans l'étude des premières propriétés des courbes planes x= ft), y=—=œ(t), tangentes, points singuliers, rectification, courbure. Enfin, les notions de calcul intégral débutent par l'introduction de l'in- tégrale définie comme limite de somme, considérée comme mode de mesure d'une aire, laquelle à été éva- luée, d'autre part, au chapitre des dérivées à l’aide d'une fonction primitive. L'ouvrage se termine par les procédés usuels d'intégration indéfinie, en insistant sur le cas particulier important des intégrales atta- chées aux courbes unicursales, et par l'étude de l'équa- tion différentielle du premier ordre et des équations linéaires. Il est à peine besoin de signaler les qualités de net- teté et de précision qui distinguent ce livre; les nom- breux lecteurs de M. Tannery les ont depuis longtemps reconnues et appréciées. M. LELIEUVRE, Professeur au Lycée et à l'Ecole des Sciences de Rouen. 2° Sciences physiques Duhem (P.), Correspondant de l'Institut, Professeur à la Faculté des Sciences de Bordeaux.— La Théorie physique, son objet, sa structure.— 1 vol. 1n-8°, de 450 pages. (Prix : 8 fr.) Bibliothèque de Philosophie expérimentale. Chevalier el Rivière, éditeurs. Paris, 1906. Après s'être presque entièrement consacré à l'inven- tion dans les domaines, contigus, de la Physique et de la Mécanique, M. Pierre Duhem s'est révélé successive- ment un philosophe avisé et un chercheur d'une rare et habile érudition. Dans l'ouvrage dont je voudrais chercher aujourd'hui à donner une idée, il se ras- semble en ses qualités diverses, et, s'appuyant sur un savoir puisé dans vingt années d'enseignement, sur une connaissance du développement de la pensée humaine cherchée à des sources restées ignorées, il nous pré- sente une image de ce que doit être la théorie physique, considérée sous ses divers aspects : instrument de 330 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX découverte et de connaissanee ; il nous dit ce qui en elle doit demeurer, ce qu'elle contient de fragile, ce qui la fait accepter ou doit en préparer l'abandon. Et d'abord, le mot théorre, lorsqu'il s'agit de la Physique, possède des acceptions diverses. Pour les uns, la théorie doit partir des causes ou bien y remonter, et donner, de tout phénomène, une image, pour ainsi dire, mécanique, et une complète représentation. Pour d'autres, elle doit rassembler des rapports entre les grandeurs qui interviennent dans un phénomène, mon- trer comment l'une est cause et l’autre effet, comment, connaissant l'une, on conclut à l’autre sans ambiguïté. Ces deux aspects de la théorie sont acceptables. Le premier est, sans aucun doute, celui vers lequel doit tendre toute recherche, car lui seul donne à l'esprit curieux pleine-satisfaction. : On peut voir dans le phénomène lumineux une émis- sion de matière, ou une vibration, ou un déplacement électrique, et l'on pense, étant ainsi remonté à la source présumée du phénomène, posséder le véritable secret de la Nature. Mais le mécanisme passe, alors que les rapports restent et constituent ce que la théorie a de réellement permanent. La théorie, envisagée comme explication mécanique, est subordonnée à la méta- physique. Dans sa seconde acception, elle dérive seu- lement de l'expérience, fécondée par les Mathématiques. « Une théorie physique, dit M. Duhem, n'est pas une explication. C’est ‘un système de propositions mathé- matiques, déduites d’un petit nombre de principes, qui ont pour but de représenter aussi simplement, aussi exactement que possible, un ensemble de lois expéri- mentales. » Une théorie est ainsi un groupement au deuxième degré; la première condensation est la Loi, qui est l'expression mathématique de faits d'expérience, ras- semblant, à des degrés divers, les mêmes causes et les mêmes effets. L'établissement de la loi constitue déjà, pour la pensée, une considérable économie, parce qu'elle condense, en une formule ou en une courbe, linfinité des rapports possibles entre les causes et les effets. D'ailleurs, la loi est infiniment plus abondante que l'expérience elle-même, puisque, pour cette der- nière, le nombre des valeurs conjuguées qu'elle établit est nécessairement en nombre fini, souvent mème en petit nombre, alors que la loi contient l'infinité des valeurs conjuguées possibles. Mais la théorie engendre une bien autre condensa- tion ; elle réunit la multitude des lois éparses en un seul corps de déductions, logiquement établies en par- tant du petit nombre de principes nécessaires, et déve- loppées en un tout harmonieux. Cependant, la théorie n’est pas seulement une repré- sentation économique des lois expérimentales: elle est encore une classification de ces lois, classification qui, s'il s'agissait seulement de les retrouver dans la case où on les a placées, contiendrait une grande part d'arbi- traire, Mais qui donne à l'esprit sa pleine satisfaction seulement lorsqu'elle peut se réclamer des principes d'une classification naturelle, dans laquelle tout se tient, tout s'enchevêtre en des liens multiples et logiques. Les caractères naturels d’une théorie se marquent surtout alors qu'on lui demande non plus de classer des phénomènes déjà connus, mais de prédire ceux que l'expérience n’a pas encore révélés. Le développement de la Physique nous en offre des exemples nombreux, dont certains sont célèbres. Ce que les théories physiques contiennent de classification naturelle est même la seule chose qu'elles apportent aux théories nouvelles, lorsque les représentations matérielles se modifient, « comme en certains jeux antiques, chaque coureur tendait le flambeau allumé au coureur qui venait après lui, et cette tradition con- tinue assure à la science une perpétuité de vie et de progrès ». C'est ainsi que pensaient Kepler et Newton, c'est ainsi qu'Ampère ou Fourier exposaient leur doctrine. « Les causes primordiales, disait l’illustre auteur de la Théorie analytique de la Chaleur, ne nous sont point connues? mais elles sont assujetties à des lois simples et con- stantes que l’on peut découvrir par l'observation, e dont l'étude est l'objet de la Philosophie naturelle. » Fresnel pensait de même; il voyait dans la théorie non l'explication métaphysique, mais un puissant moyen d'invention : «]] n’est pas inutile de réunir les faits sous un même point de vue, en les rattachant à un petit nombre de principes généraux. C'est le moyen de saisir plus aisément les lois, et je pense que les effort de ce genre peuvent contribuer, autant que les observa- tions mêmes, à l'avancement de la science. » Cependant, il ne faudrait pas être exclusif. Tout moyen d'investigation susceptible de faire progresser. la science a droit à l'existence dans les méthodes de travail des penseurs! L'outil doit s'adapter à l'ouvrier, et les méthodes de la pensée sont infiniment diverses: L'étude d'une théorie physique est donc inséparable d'une investigation dans la nature même des esprits, et c'est à un classement des intelligences que M. Duhem consacre un chapitre de son ouvrage. Sa terminologie, empruntée à Pascal, qualifie les esprits d'arples ou de forts. S'ils ne possèdent qu'une des deux qualités représentées par ces vocables, ils sont amples mais faibles, forts mais étroits. L'amplitude d'esprit consiste dans la faculté de per- cevoir, en même temps, un grand nombre d'objets disparates ; la force d'esprit, à saisir l'abstraction et à conduire une déduction avec une logique parfaite. La constitution d’une théorie abstraite sera une économie pour ces derniers, alors qu'un esprit exclusivement ample y verra un labeur pénible, que l'on pourrait mieux utiliser. L'amplitude se rencontre chez des représentants de tous les peuples. M. Duhem cite, comme un phénomène extraordinaire, au point de vue de l'amplitude, l'esprit de Napoléon. Maïs il est un peuple où l'amplitude est à. l’état presque endémique : c'estle peuple anglais. Tout, dans l’esprit anglais, est preuve d'amplitude : le tradi- tionnalisme, qui ne s’offusque pas de voir accolés les. objets disparates, aussi bien dans la nature matérielle que dans les faits de l'histoire, parce qu'ils sont saisis isolément; la littérature, la peinture, la foule des per- sonnages, des sentiments non classés, que, cependant le lecteur saisit et auxquels il s'attache, montrent cette amplitude d'esprit, qui nous paraît étrange, lorsque nous cherchons notre contentement dans l'harmonie des formes, la simplicité des lignes, la logique dédue- tion des événements et des sentiments. Cette amplitude dans l'esprit des Anglais éclate à tous les yeux dans leur manière de considérer les théories physiques. Les premiers, ils ont renoncé à l'enchainement qui nous semble nécessaire; les plus grands d’entre eux ont professé des doctrines contra- dictoires sans en être choqués, seulement parce que chacune d'elles était un fertile moyen de pousser plus avant la recherche. Un physicien continental, apportant à la Physique un principe nouveau, en montre la /égitimité:; il le définit exactement, afin de pouvoir l'utiliser en toute sécurité. Maxwell, au contraire, introduit, dans les équations de l'Electro-dynamique, le courant de déplacement comme une évidence, en disant simplement qu'il faut que tout circuit soit fermé, Le succès de la méthode est indéniable: le socle est fragile, il est vrai, mais l'édifice grandit et se développe. = L'œuvre de Maxwell est souvent illogique, mais quel est le physicien qui en regrettera l'avènement ? Cependant, les physiciens anglais abusent parfois du modèle. Un grand exemple, dira-t-on, pourrait les y inciter : « Je ne suis jamais satisfait, disait lord Kelvin, tant que je n'ai pu construire un modèle mécanique de l'objet que à J'étudie ». Mais M. Duhem ne pense pas que l'illustre M physicien ait jamais fait, à l’aide d'un modèle, une seule de ses admirables découvertes. Le modèle est. venu après, seulement comme un moyen pédagogique. I fut un temps où le modèle mécanique était encore ee BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 331 plus en faveur, parmi les physiciens anglais, qu'il ne | domaine fini, ou possèdent des branches infinies l'est aujourd'hui. Dans un ouvrage de M. Lodge, qui tit du bruit il y a une quinzaine d'années, les phénomènes de l'électricité sont tous exposés avec des engrenages, des ressorts, des renvois, des cordes, qui constituent une série de systèmes disparates, dont chacun s’appli- que à l'un des aspects des phénomènes électriques. L'effort d'imagination qui a produit ces modèles est amusant, mais les années écoulées depuis lors donnent raison à l'opinion de M. Duhem, suivant laquelle de tels modèles sont à peu près inutilisables comme moyen de découverte. Il ne faut point confondre le modèle mécanique ma- tériel, avec le modèle algébrique ou l’analogie. La recherche des ressemblances entre deux phénomènes, dont l’un est saisi par l'intelligence tandis que l’autre lui échappe encore, contribue beaucoup à éclairer celui-ci. Les oscillations d’un système matériel, celles du courant électrique dans les câbles, l'onde sonore et l'onde lumineuse, ou encore la vague sur une eau calme, présentent des analogies intimes, renfermées dans une relation de cause à effet que l’Algèbre ex- prime semblablement. Le but de la théorie physique étant ainsi exposé, qu'est-ce que M. Duhem appelle sa structure ? La théorie définit la qualité dont elle s'occupe. Entre divers degrés de la qualité, elle établit une gradation, et devient quantitative ; elle implique donc la mesure dès que la qualité à été définie. Mais les qualités ne sont pas toutes irréductibles. Une qualité première peut même n'être que provisoire. En Chimie, les éléments dénommés sont devenus pour nous des qualités premières, comme les terres l'étaient encore il y a juste un siècle. Descartes rêvait des corps qui se réduisaient « à l’étendue et à son changement tout nud »:; nous en sommes loin aujourd'hui, avec la diversité des éléments, dernier échelon provisoire d'une série de qualités premières, auxquels on s'est arrêté, par des simplifications successives, et qui cesseront peut-être bientôt de représenter des qualités irréductibles. Un certain nombre de qualités premières ayant été classées comme telles, le premier devoir d’un physicien qui constatera l'existence d'un phénomène nouveau, sera de chercher à le reconstituer à l’aide des qualités premières : « Quand on réussit, dit Sainte-Claire De- ville, on éprouve une bien vive satisfaction à étendre, pour ainsi dire, le domaine d’une loi physique, à augmenter la simplicité et la généralité d’une grande classification. Mais, quand un fait échappe à toute explication. il faut en chercher d'autres qui lui soient analogues. Quand on les a trouvées, il faut les classer provisoirement au moyen de la théorie qu'on s'est formée ». La déduction mathématique est une image des phé- nomènes, mais cette image ne peut être absolument fidèle, pour bien des raisons, dont la plus évidente réside dans le fait que les Mathématiques sont d'une infinie précision, alors que l'exactitude des mesures physiques est limitée. Ainsi, dire que l'intervalle de deux traits est de A centimètre peut avoir des sens très divers. Un mathé- maticien considérera la précision de cette indication comme parfaite. Pour un physicien, elle signitiera sim- plement que cet invervalle diffère moins de 1 centi- mètre que ne l'indiquent les limites de la précision des mesures d’où cette indication a été déduite. Dans l'immense majorité des phénomènes, la préci- sion mathématiques accommodede l'imprécision imhé- rente aux faits matériels, parce qu'en modifiant très peu le point de départ, on modifie très peu la suite des phénomènes. Ainsi, presque toujours, les déduc- tions mathématiques s’éloigneronttrès peu de la réalité physique. Cependant, tel n’est pas toujours le cas. M. Hadamard a montré que certaines lignes géodésiques, tracées sur des surfaces à nappes infinies, restent toujours dans le lorsque leur départ diffère infiniment peu. Quand la direction d’une de ces lignes est donnée mathématiquement, on peut dire si elle s'échappera jusqu'à l'infini. Mais, aussi longtemps que cette direc- tion n'est donnée qu'avec une précision physique, toute conclusion est impossible. Ainsi, la déduction mathématique sera, dans un cas semblable, toujours inutile à la connaissance du phéno- mène physique, qui ne fournira jamais au calcul des données assez précises pour que les résultats du calcul ne s'éloignent pas indéfiniment de la réalité. Le calcul de M. Hadamard est simple, paraît-il. Le classique problème des trois corps est infiniment plus complexe. S'il est régi par des conditions analogues, l'astronomie d'observation ne permettra jamais de dire si un système stellaire est stable ou instable. Mais, avant de rechercher les lois mathématiques d'un phénomène déduit de l'observation, ou préala- blement à la comparaison des conséquences d’une théorie aux données de l'expérience, il faut que celle- ci soit interprétée, car l'expérience de physique n'est pas la simple observation d'un phénomène. Il faut, en plus, que la chose vue soit élaborée dans le sens d'un jugement abstrait et symbolique. Regnault, examinant les lois de la compressibilité des gaz, ne donne pas le résultat de ses mesures par la description d’un mano- mètre et d’un cathétomètre, mais bien par la relation entre une pression et un volume spécitique. L'expé- rience subit ainsi une longue élaboration, et ce qui en reste est une sorte de quintessence ramenée à un sym- bole. La loi qui s'en déduit exige, pour être appliquée à la réalité concrète, que l'on connaisse et que l'on accepte tout un ensemble de théories. La Physique, d'ailleurs, ne s'accroit pas, comme la Géométrie, par juxtaposition de nouvelles conquêtes, définitives et certaines. Une loi découverte est une loi approchée. Elle symbolise un phénomène sous un aspect simple et provisoire, qui, dans la suite, se compliquera de toutes les exceptions que l’on pourra découvrir. La surface de l’eau tranquille est plane, disaient les Anciens. Elle est une partie du géoïde terrestre, dirions-nous. Mais les actions capillaires nous donneraient un démenti. Puis celles-ci sont, à leur tour, modifiées par les actions électriques, de telle sorte que la loi primitive, d'une idéale simplicité, finit par atteindre un haut degré de complication. Si l'on se reporte à l'histoire des découvertes en Physique, on verra que ce sont ces complications, plus ou moins apparentes, qui l'ont fait progresser en augmentant sans cesse notre connaissance de la Nature. Mais, heureusement, tandis que l'observation ajoute de nouveaux éléments à la science, la théorie produit des condensations embrassant des ensembles de plus en plus grands, de telle sorte que l'économie suit presque pas à pas la complication. A plus d’une reprise, deux théories se sont trouvées en conflit, et l'expérimeutum crucis à décidé pour l'une ou pour l’autre. C'est ainsi que la mesure de la vitesse relative de la lumière dans l'air et dans l’eau a donné le coup de grâce à la théorie de l'émission. Cependant, on eût pu la sauver encore, au prix de nouvelles hypothèses et de nouvelles complications. Elle était déjà fortement ébranlée par le fait de toutes les additions qu'elle avait subies pour s'adapter au progrès de la connaissance. À chaque instant, on eut pu la juger insuffisante. L'expérience de Wheatstone l’a jetée à terre parce que la limite était dépassée. Mais, si l'on y regarde de près, on ne voit pas de raison décisive pour que son abandon se soil produit à ce moment plutôt qu'avant ou après. Et l’on arrive à conclure, avec M. Duhem, que c'est, au fond, le bon sens qui est juge en dernier ressort de la viabilité d'une théorie. L'expérience de M. Wiener est un autre exemple frappant du fait qu'une expérience ne décide pas pour ou contre une théorie; elle décide seulement en faveur 332 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX d'un ensemble de relations. M. Wiener avait montré une contradiction expérimentale, qui pouvait mettre en défaut la théorie de Neumann. M. Poincaré à reporté la contradiction sur la théorie des phénomènes pho- tographiques, et l'idée de Neumann a paru moins chan- celante. La méthode inductive, qui semble partir d’un fait isolé, parfaitement bien établi, ne présente donc pas le degré de certitude absolue que l’on serait tenté de lui attribuer. Ampère, qui, après Newton, l'appliqua dans des travaux immortels, en expose avec une parfaite clarté les principes. Mais, si l'on examine l'élaboration qui permet de passer des résultats d'expérience aux lois élémentaires, on voit qu’elle repose sur une série d'hypothèses, évidentes si l’on veut, et qui, cependant, suppriment le contact immédiat entre le fait brut et celui que l'on retient. Le développement de la Physique est soumis, comme toute chose, au principe de continuité. En aucun moment ne surgit une révolution; et, si nous croyons en connaître dans l'histoire, c'est que nous sommes inconscients de l'ambiance dans laquelle les lois ont müri. M. Duhem nous en donne un exemple frappant, dans l'histoire du principe de la gravitation, à l'exposé duquel ses récentes études sur la Mécanique le pré- paraient de première main. Croyance, chezles Anciens, à une cause métaphysique, la tendance des graves à se placer dans un certain ordre; puis, plus tard, attraction de la matière vers certains points de l’espace; puis aussi croyance à la parité des matières rassemblées dans les divers astres, la matière terrestre tendant vers le centre de la Terre, la matière lunaire vers celui de notre satellite, sans que ce dernier soit attiré vers la Terre. Puis, comme l’action de la Lune sur les marées était évidente, on invoquait son attirance pour l'humi- dité, attribuée par les uns à sa lumière, par d'autres à quelqu'une de ses qualités inconnues. La découverte de la pierre d'aimant mit en honneur la théorie aiman- tique de l'attraction, fortement soutenue par Sca- liger. Plutarque, en un écrit que Kepler a traduit et com- menté, professait déjà que la Lune ne tombe pas sur la Terre à cause de sa force centrifuge. Kepler, le premier peut-être, enseigna que toute matière attire toute autre matière; il admettait aussi la loi inverse du carré de la distance, bien qu'il ne sût pas en apporter des preuves suffisantes. Mais ce fut Newton qui donna la preuve complète, établie, comme on Sait, par la comparaison de l'attraction à la surface terrestre, à celle qui règne à la distance où se trouve la Lune. C'est depuis lors que cette loi a gardé sa forme définitive, parce que l'expérience en avait dé- montré l'exactitude. L'exemple est particulièrement instructif; et, insis- tant sur la nécessité pour l'expérimentateur d'étudier l'histoire des découvertes, M. Duhem peut, en pensant tout particulièrement à notre connaissance de la gra- vitation, soumettre cette remarque au physicien : « En lui retraçant la longue série des erreurs et des hésita- tions qui ont précédé la découverte de chaque principe, l'histoire le met en garde contre les fausses évidences : en lui rappelant les vicissitudes des Ecoles cosmologi- ques, en exhumant de l'oubli où elles gisent les doc- trines autrefois triomphantes, elle le fait souvenir que les plus séduisants systèmes ne sont que des représen- tations provisoires et non des explications défini- Lives ». J'arrêterai là cette analyse, très étendue et cependant bien incomplète, de l'ouvrage de M. Duhem, mais non Sans exprimer l'espoir que beaucoup de physiciens le liront, pour leur profit, et pour le bénéfice du progrès de la science qui grandit sans cesse par leur incessant travail. Cu.-Ep. GUILLAUME, Directeur adjoint du Bureau international des Poids et Mesures. 3° Sciences naturelles Grandeau (L.), Znspecteur général des Stations agr0- nomiques, Rapporteur général de l'Agriculture à l'Exposition universelle de 4900. — L’Agriculture et les institutions agricoles du monde au com- mencement du xx° siècle. Tome 11. — 1 vol. de 143 pages avec phototypies, graphiques et cartes.“ Imprimerie Nationale, Paris, 1906. C'est le tome II de l'intéressant ouvrage dont la Revue à donné le compte rendu il y a quelques mois. Ce livre complète ce qui est relatif à l'Europe. Les quatre cinquièmes de l'ouvrage sont consacrés à la France, et cette partie est magistralement traitée ; nous en souhaitons la lecture à tous ceux qui aiment la terre et sont séduits par les problèmes si complexes de l'Agriculture. Le chapitre des «Considérations générales » comporte notamment la situation comparative de l'Agriculture française à la fin du xvnr et à la fin du xixe siècle. C'est un exposé de grande valeur, qui a utilisé les do- cuments relatifs aux dernières enquêtes décennales. et qu'il serait si souhaitable de pouvoir étayer aujourd’hui d'une nouvelle enquête agricole semblable à celle de 1892. : Le tableau qui est tracé par l’auteur est fécond en aperçus généraux sur les questions agricoles d'hier et d'aujourd'hui : la production agricole de la France accrue de 212 °/, depuis un siècle, alors que la popula- tion s'est augmentée seulement de 52 °/,, montre admirablement la puissance réelle des 100 milliards de capitaux agricoles francais, dont les 9/10 sont représen- tés par la valeur du sol. Ces capitaux produisent annuel- lement un revenu brut de 13.500 millions, grevé de 10.800 millions de charges, dont 4.100 millions de sa- laires, et ne laissent que 1.155 millions de bénéfices nets. En ne tenant pas compte des gages et salaires, cela ne fait donc que du 1,15 °/,. A une telle lecture, on se prend de sympathie pour ces 7 millions de cultivateurs fran- çais, dont la propriété immobilière paie 47 °/, d'impôts directs, alors que la propriété mobilière paie seule- ment environ 5 °/,. On comprend que les réformes de demain, qui doivent assurer, dit-on, une plus équitable répartition des charges, doivent, avant tout, veiller à un traitement plus bienveillant de la propriété foncière, de cette mère nourrice qui fait sortir, chaque année, du sol de la France, 4 milliards de francs avec les céréales, 1.235 millions de francs avec le lait, 920 mil- lions avec la vigne, 650 avec la pomme de terre, et 390 avec les betteraves, ces deux dernières plantes si peu cultivées il y a un siècle. L'Agriculture française s’est transformée, elle a fait de grands progrès; elle est aujourd'aui pourtant dans une période peu aisée, mais on peut soupçonner, pour elle, de meilleurs len- demains possibles si, d'un côté, elle sait se laisser guider par la science et fréquenter les écoles tech- niques, si, d'autre part, on sait la délivrer des excès de la fiscalité. En France, nous dit l’auteur, les céréales rendent seulement en moyenne 7 pour 1, alors qu'il est possible d'obtenir #7 pour 1 sur certains sols anglais. Est-il admissible que le 1/7 de notre production en céréales soit nécessaire à nos semailles de l’année suivante? Est-il admissible que notre rendement moyen en blé soit aujourd'hui de 45 à 19 hectolitres à l'hectare, alors qu'il est de 27 hectolitres en Angleterre, alors surtout qu'un accroissement supplémentaire de récolte de 2 hectolitres à l'hectare représenterait pour la France un revenu nouveau de 300 millions? Il n’est pas dou- teux que notre agriculture méconnait encore trop les données modernes de la science agricole, industrielle et commerciale. ; L'auteur y insiste, et nous y insistons aussi : il nous manque en France le goût de l'enseignement agri- cole; de cet enseignement qu'on recherche si peu, au- quel on marchande malheureusement les crédits, et Béte rs érhihe Are BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 333 qui saurait payer si bien les faibles avances qui lui seraient faites. Il nous faut imiter les fondations américaines rela- tives aux sciences agricoles, il faut systématiquement entreprendre le relèvement de nos rendements, amener les fils de cultivateurs et les fils de la bourgeoisie sur les bancs des Ecoles d'Agriculture, alléger les charges fiscales de l'agriculture, arrêter l'exode de la popula- tion rurale en implantant au village les petites indus- tries qui doivent remédier au chômage hivernal. L'auteur expose avec une grande clarté les questions sociales posées par la classe rurale. Avec Le Play et avec Renan, il flagelle le code qui dissocie, à chaque succession, l'œuvre collective et l'unité morale de la famille agricole. M. Grandeau donne, dans son livre, un tableau vraiment suggestif de l'agriculture française : ila mis sa grande érudition au service d’une grande cause. Eomonp GAIN, Professeur adjoint à la Faculté des Sciences, Directeur des Études agronomiques et coloniales à l'Université de Nancy. 4 Sciences médicales Dubruel (D' E.), Médecin-Major des Troupes colo- niales. — Le Béribéri. (Prix de Médecine coloniale à la Faculté de Médecine de Bordeaux.) — 1 vo! in-8° de 1571 pages. (Prix : 4 fr.) Bordeaux, 1906. De nombreuses théories ont été formulées sur la pathogénie et la nature de cette maladie singulière qu'est le béribéri : le D° Dubruel s’est proposé d'assem- bler les documents et matériaux épars dans les publi- cations françaises et étrangères, et de faire une mono- graphie sur cette question encore obscure. On ne saurait nier le caractère endémo-épidémique du béribéri. L'armée japonaise en a offert récemment une imposante démonstration dans les plaines de Mandchourie, puisque, sur cent malades, vingt-cinq étaient atteints de kakké, et que cette maladie a donné une léthalité de près de 6 °/, des malades. L'auteur de cette brochure se rattache à l'opinion de l'origine infectieuse du béribéri. Il écarte l'hypothèse de la nature paludéenne de cette maladie, parce que l'exa- men du sang est resté négatif; celle de l’ankylosto- miase, parce que l'ankylostome est fort commun dans certains pays où le béribéri est inconnu (au Caire notamment). Il croit également qu'on doit re- jeter, pour interpréter cette névrite périphérique, l'idée d’une intoxication analogue au lathyrisme ou à la pellagre, due à une altération chimique des aliments. De nombreux auteurs : Baelz et Scheube, Stanley, Ogata, Pekelharing et Winckler, etc., ont attribué le - béribéri à un parasite développé sur le riz, si employé dans l'alimentation, en Chine et au Japon. M. Dubruel admet que le riz est le facteur à peu près constant de la névrite béribérique, en apportant avec lui un mi- crobe pathogène spécial, encore inconnu, mais proba- blement sporulé et résistant à la cuisson. Selon lui, tout aliment amylacé pourrait constituer un milieu de culture favorable au germe de la maladie. Telle est cette monographie consciencieuse, docu- mentée et bien faite. . D' H. VINCENT, Professeur à l'École d'application du Val-de-Grâce, Membre de l'Académie de Médecine. 5° Sciences diverses Carles (Georges). — La Turquie économique (Déve- loppement et mise en valeur des ressources de l'Empire ottoman). — 1 vol. in-16 de 117 pages. Préface de M. E. Levasseur, membre de l'Institut, Professeur au Collège de France. Chevalier et Rivière, éditeurs. Paris, 1907. Un homme d'Etat, défendant la politique coloniale, REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 19017. disait qu'il ne fallait pas se « laisser hypnotiser par la trouée des Vosges ». Peut-être estimerait-il aujour- d'hui que nous avons trop bien appliqué son conseil, et que, pour avoir voulu trop embrasser, nous ne savons plus étreindre. Un peu partout, nous avons fondé des colonies qu'il ne sera peut-être pas facile de défendre, et, cédant à la séduction de lointains mirages, nous avons trop facilement abandonné ces contrées méditerranéennes où une politique heureuse et une longue tradition nous avaient créé une situation vrai- ment privilégiée. C'est ainsi que, peu à peu, nous perdons notre influence dans le Levant, et qu'à la suprématie fran- caise, autrefois incontestée, tend à se substituer une hégémonie étrangère. Ce n’est pas le lieu, ici, de mon- trer les erreurs de notre politique extérieure, mais ce que nous pouvons dire, du moins, c'est que, dans le Levant, ces erreurs pourraient être réparées dans une certaine mesure, si nos industriels et nos commerçants faisaient montre de plus d'ardeur et de plus d’ini- tiative. Cette thèse, nous sommes heureux d’en voir la démonstration, avec de précieux documents à l'appui, dans un travail de tout premier ordre, dû à M. Georges Carles. Il y a vingt-cinq ans, le pavillon allemand se montrait à peine en Orient; aujourd'hui il supplante le nôtre de plus en plus. Les statistiques nombreuses, puisées aux meilleures sources, qui sont reproduites’ dans La Turquie économique, sont à cet égard triste- ment significatives. Comment remédier à cette situa- tion, par quels moyens nos commerçants doivent-ils lutter, et dans quelle mesure les Pouvoirs publics peuvent-ils leur venir en aide, c'est une partie, très bien conçue, du livre de M. Carles. L'auteur, et il faut l'en féliciter, a vu cependant plus haut et plus loin. 11 n’a pas voulu se borner à une sorte de monographie commerciale, si bien composée füt- elle, et il a tenu à étudier le développement et la mise en valeur des ressources de l'Empire ottoman. Ces richesses sont nombreuses, et tous ceux qui ont eu l'occasion de voyager dans la Turquie d'Europe, en Syrie, en Palestine, dans tout le Levant, ont pu s'en convaincre. Mais, évidemment, il ne suffit pas que la terre puisse produire et que la population — quoi qu'on prétende — soit industrieuse. S'il n'est pas tou- jours exact de dire qu'un peuple a le Gouvernement qu'il mérite, — car le Turc vaut mieux que ses maîtres du jour, — on peut affirmer que, dans une très large mesure, la prospérité d'un Etat est fonction de son régime politique et administratif. Là où le pouvoir repose sur l'oppression, où la concussion est élevée à la hauteur d'un principe de gouvernement, où, selon la forte expression de l'historien, l’on crée vraiment le désert pour affirmer que l’on donne la paix, tout effort se brise, toute tentative est vouée à l'échec, toute volonté est impuissante, — aussi longtemps, du moins, que dure un pareil régime. Mais l'étude si complète de M. Carles montre que ce régime ne peut subsister indé- finiment : derrière la Turquie officielle, — quelques hommes, — il y a une Turquie libérale qui à fait beaucoup déjà, et dont l'œuvre serait certainement plus avancée encore, si elle avait pu compter, en Europe et chez nous, sur l'appui, tout au moins moral, auquel elle a droit. Ce n'est pas une des pages les moins inté- ressantes d’un excellent livre que nous sommes heu- reux de faire connaître, et, peut-être, le savant éminent et respecté qui à donné une instructive préface à cet ouvrage s'en souvenait-il un peu lorsqu'il souhaitait « que les utiles renseignements et les conseils » de l'auteur « parviennent à leur adresse et soient proli- tables à la nation turque dont nous sommes amis et aux intérêts français qui sont les nôtres .». Lucien RouLLet-CHÉRY. g'* 334 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 18 Mars 1907 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. F. Riesz étend à toutes les fonctions sommables, de carré sommable, son théorème relatif aux systèmes orthogonaux de fonctions. — M.T. Lalesco décrit une nouvelle méthode pour la recherche des solutions périodiques des équations diffé- rentielles linéaires. — M. H. Lebesgue présente ses recherches sur le problème de Dirichlet. — M. L. Rémy étudie une surface du sixième ordre liée aux fonctions abéliennes de genre trois. — M. G. Barré démontre un certain nombre de théorèmes relatifs aux hélices consi- dérées comme génératrices d’une surface. — M. G. Hil- leret signale l'existence de certaines fonctions qui permettent d'abréger le calcul de la valeur de x par les méthodes élémentaires des périmètres et des isopéri- mètres. — M. Jouguet donne les formules relatives aux ondes de choc et de combustion sphériques se propageant dans un état d'équilibre homogène, — M. A. Etévé propose d'employer, pour assurer la stabilité longitudinale automatique des aéroplanes en air agité, outre la bride élastique déjà connue, la bride automatique et le gouvernail double équilibré. — M. Giacobini présente les observations, les éléments et l'éphéméride de la nouvelle comète qu'il a décou- verte, le 9 mars, à l’aide de l’équatorial coudé de l'Observatoire de Nice. — M. P. Bruck a également déterminé les éléments de cette comète d'après les observations faites à Nice et à Besançon. — MM. E. Es- clangon, Rambaud et Sy, et P. Chofardet communi- quent respectivement leurs observations de la nouvelle comète Giacobini (1907 a), faites aux Observatoires de Bordeaux, Alger et Besançon. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. W. Ritz a imaginé un système tourbillonnant, à chacun des états d'équilibre dynamique (en nombre infini) duquel correspond une vibration émise par un corpuscule, l'ensemble de ces vibrations reproduisant exactement le spectre de l'hy- drogène. — M. H. Moissan a observé que l'amalgame de platine, agité avec de l’eau, forme une émulsion à demi solide, avec une forte augmentation de volume, résistant à l’action du temps et de la chaleur. — M. Alb. Colson montre que, dans le cas des sulfates chromiques, l'ionisation est sans effet sensible sur l'abaissement cryoscopique. — M. Em. Vigouroux, par action directe de Ni etSn purs, a formé des alliages contenant 73,64 °/,, 83,65 °/, et 92,71 °/, de Sn. Le pre- mier est sonore; tous les trois sont non magnétiques. — M. A. Bouchonnet à préparé le métaarsénite de rubi- dium, les orthoarséniates mono-, bi- et tri-rubidiques, le pyroarséniate et le métaarséniate de rubidium. — M. R. Fosse à fait agir le p-p-tétraméthyldiamino- benzhydrol sur les éthers B-cétoniques, les B-dicétones et le malonate d'éthyle; il y a condensation avec élimi- nation d’une molécule d’eau. — MM. J. Wolf et À. Fernbach ont reconnu que l’'amylose, sous sa forme naturelle, se distingue de l'amylose artificielle par une résistance beaucoup plus grande à la saccharification par l'extrait d'orge. — M. A. Haller a constaté que la cire de aphia Ruffia de Madagascar semble en majeure partie constituée par un alcool en C2°Hi°0 (ou un mélange d'alcools ayant cette composition moyenne) ; cette cire s'écarte des cires d'abeilles, de Chine, de Carnauba, et ressemble à celles qu'a isolées M. Etard des feuilles vertes des Graminées. — M. A. Chauveau montre que les mutations chimiques que subit, dans l'organisme, la ration carnée, pour aboutir à sa des- tination immédiate, dépensent plus d'oxygène, done plus d'énergie, lorsque la protéine de cette ration se transforme en glycose, chez le diabétique, que quand elle se change en graisse, chez le sujet sain. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. G. Marinesco et J. Minea : Changements morphologiques des cellules nerveuses survivant à la transplantation des ganglions M nerveux (voir p. 194). — M. Ch. Henry, interpolant les + principales expériences de M. Chauveau sur l'énergéti- : que musculaire, conclut que, pour la contraction stati- & que et la contraction dynamique négative, la dépense . spécifique est une fonction croissante avec la charge; pour la contraction dynamique positive, les courbes de É variation de la dépense sont des paraboles.—M.M. Han-\ riot a étudié l’action toxique de la téphrosine:; les symptômes produits sont : ivresse, secousses convul- sives alternant avec la paralysie, polypnée. et mort par arrêt respiratoire, le cœur continuant à battre. — MM. R. Dubois et F. Vlès ont constaté que l’action f musculaire est seule capable de produire la reptation de Ja Fissurelle et l'adhérence au substratum de sa sole plantaire. — M. Leclere du Sablon a reconnu que la fécondation, qui n’est pas nécessaire pour les variétés de figues cultivées en France, est cependant possible etaugmente alors le poids dela récolte. —M.Ch.Gatin a. observé la présence de plages poreuses à la base des radicelles, sur les racines et sur le pétiole du cotylédon dans des germinations de palmiers ; ces formations - sont à rapprocher des fossettes poussiéreuses des Marat- tiacées. — M. G. Grandidier a étudié deux crânes d’un Lémurien sub-fossile de Madagascar, le Palaeopro- % pithecus maximus. Ses caractères semblent indiquer un animal fouisseur et peut-être nageur. — M. Michel Lévy a déterminé les paramètres qui caractérisent les magmas de la série des roches éruptives du Mont- Dore ; il semble y avoir deux magmas à propriétés très différentes (scorie, fumerolle), qui se mélangent en diverses quantités. — M. E. Oddone communique quelques constantes sismiques déduites du tremble- ment de terre du 4 avril 1904 dans les Balkans: on a observé un intervalle de 33 minutes entre les secousses I et V, IIL et VI, Viet X- Séance du 25 Mars 1907. M. le Président annonce le décès de M.M. Berthelot, secrétaire perpétuel de l'Académie, et de M. le Colonel Laussedat, associé libre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Boussinesq pré- sente une théorie approchée de l’écoulement sur un déversoir vertical en mince paroi, sans contraction latérale et à nappe libre. — M. L. Lecornu commu- nique ses recherches sur une généralisation du mou- vement de Poinsot. — M. F. Ferber arrive à la conclu- sion suivante, dans ses études sur les aéroplanes : Qu'une surface se meuve orthogonalement ou presque tangentiellement à sa trajectoire, la résistance que l'air lui oppose est la même: 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Becquerel a constaté que l’abaissement de température modifie considéra- blement les intensités des mouvements lumineux de périodes différentes qui constituent le phénomène de la phosphorescence. Les vibrations lumineuses de diverses bandes du spectre d'émission des sels d'ura- nium sont, à basse température, polarisées dans des directions différentes. — M. J. Becquerel démontre et vérilie expérimentalement que le pouvoir rotatoire magnétique et ses variations aux environs des bandes d'absorption des cristaux augmentent lorsque la tempé- rature diminue jusqu’à celle de l’air liquide. — M. Foix montre que l'oxyde de thorium, dans les manchons des lampes à incandescence, est théoriquement inutile ; Fe ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES pratiquement, il est indispensable, caril sert de corps à l'oxyde de cérium dont le squelette, à l’état pur et sous une trop faible épaisseur, serait trop ramassé et trop fragile. — MM. F. Laporte et R. Jouaust ont oh- servé que l'intensité lumineuse d’une lampe électrique à incandescence est pratiquement constante, quelles que soient les variations de la température ambiante. — M. G. Meslin explique la formation des cannelures supplémentaires dans les spectres produits par les réseaux parallèles. — M. G. A. Hemsalech montre que, dans le cas de l’étincelle de capacité, la décharge initiale constitue la première décharge du condensa- teur, tandis que, dans le cas de l’étincelle de self- induction, la décharge initiale est constituée par une étincelle produite par la décharge des électrodes de la capacité desquelles elle dépend, et elle sert uniquement à préparer le passage aux oscillations de la décharge du condensateur. — MM. E. Briner et E. Mettler ont étudié la formation du gaz ammoniac à partir de ses éléments sous l'action de l’étincelle électrique. Le rendement est maximum sous une pression voisine de 100 millimètres; il est alors de 17 grammes de gaz AzH* par kilowatt-heure. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. C. A. Ktenas consi- dère les assises de Pélaghia ainsi que la couche calcaire d'Athènes comme l'équivalent de l’Angoumien ; on y rencontre un fossile caractéristique, l'Hippurites atheniensis. Séance du 2 Avril 1907. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Bubl signale une extension de la méthode de sommation de M. Borel. — M. J. Boussinesq donne le calcul de la contraction inférieure d’une nappe sur un déversoir en mince paroi et de hauteur modérée, à nappe libre, armé à sa partie supérieure d’une plaque horizontale rejetant vers l’'amont lesfilets fluides inférieurs. — M. E. Oddone a obtenu une nouvelle constante sismique : c’est le temps T, — 17% + {min. que mettent les ondes sis- miques longitudinales à traverser la Terre. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Em. Vigouroux a isolé des bronzes de nickel, par traitements à HAZzO® et à KOH fondue, un composé Ni Sn, poudre cristalline blanc d'argent, non magnétique; D — 8,44. — MM. E. Kayser et H. Marchand ont constaté que les levures accoutumées aux sels de manganèse produisent dans les moûts ordinairesune fermentation plus rapide, une lus grande disparition de sucre et une plus grande ormation d'alcool. — M. J. Trabot aétudié l'évolution du carbone, de l'eau et des cendres chez l'orge en fonction de l’âge. 30 SCIENCES NATURELLES. — MM. P. Carnot et A. Le- lièvre montrent qu'au cours des régénérations rénales il existe, dans le sang circulant et dans la glande régé- nérée, un excitant de la prolifération cellulaire rénale (néphro-poïétine), capable de provoquer cette même prolifération chez des animaux neufs. — M. E. Roubaud a constaté que les larves de Simulium damnosum qui vivent dans les ruisseaux de l'Afrique équatoriale sont pourvues de véritables branchies rectales exsertiles ; c'est là un fait d'adaptation à la vie dans les eaux des contrées chaudes. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 12 Mars 1907. M. le Président annonce le décès de M. F. J. Herr- gott, associé national. M. G. Pouchet présente un Rapport sur une com- munication du Consul général de France à Batavia, signalant l'existence à Java d'une plante exerçant une action antidotique de l'intoxication par la strychnine. Séance du 19 Mars 1907. M. le Président annonce le décès de M. M. Berthe- lot, membre de l'Académie. 339 Séance du 26 Mars 1907. M. F. Raymond signale l'existence d’un syndrome vestibulaire, correspondant à un trouble du sixième sens des physiologistes, le sens de l'orientation. La recherche de ce syndrome est de la plus haute impor- tance; il est, en effet, la traduction clinique d’une lésion du labyrinthe, c'est-à-dire de la branche vesti- bulaire du nerfauditif. Le sujet chez lequel le fonction- nement labyrinthique est touché n'est plus renseigné sur la direction des divers mouvements de translation de la totalité de son corps; il en résulte une rupture d'équilibre pouvant aller jusqu'à la chute, avec ou sans vertige visuel. — M. Kelsch donne quelques renseigne- ments sur les revaccinations pratiquées à Paris dans la dernière quinzaine; les séances vaccinales de l'Aca- démie, qui comptent en temps normal de 0 à 5 clients, ont vu ce chiffre s'élever à 1.500 en moyenne. Cette augmentation est due à l'émotion provoquée par l'épi- démie locale de Dunkerque etau bruit fait autour d'elle par la presse; mais de telles épidémies locales ne sont pas rares: elles se présentent chaque année dans plu- sieurs départements. Les revaccinations devraient donc se faire régulièrement et normalement; il est, en effet, à craindre que des revaccinations hâtives, comme celles de ce mois, ne donnent pour la plupartun résul- tat nul. Séance du 2 Avril 1907. MM. A. Poncet et R. Leriche estiment qu'il existe des lipomes d’origine tuberculeuse ; pour eux, la tuber- culose doit prendre place, à côté des autres infections, dans l’étiologie des néoplasies d'ordre inflammatoire, SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 23 Mars 1907. M. A. Netter montre que la brièveté de l’incubation, dans les accidents provoqués par l'ingestion de cer- taines huîtres, n'exclut pas la possibilité d’une infec- tion. — MM. M. Doyon et Cl. Gautier ont vu l'incoa- gulabilité absolue du sang apparaître le troisième jour après l’extirpation du foie chez la grenouille. — M. A. Mayer à constaté qu'on peut, par l’action lente, à froid, des acides et des bases sur l’albumine dialysée, lui donner toutes les propriétés des albumines électro- positives et électro-négatives. — M. E. Fauré-Frémiet estime que le macronucleus des Infusoires, constitué par un véritable tissu de microsomes, peut toujours être considéré comme un chromidium, mais il est entièrement indépendant de l'appareil mitochondrial. — M.J. Gaillard a traité cinq cas de fièvre typhoïde chez des enfants par les injections intra-veineuses d'argent colloïdal électrique à petits grains et a obtenu une guérison rapide. — M. M. Hanriot : Sur l’action de la téphrosine (voir p. 338). — M. Ed. Chatton a observé une nouvelle Haplosporidie, parasite de l’épi- thélium de l'intestin moyen des Daphnies, qu'il nomme Caullerya Mesnili. — M. F. Battelli et Ml: L. Stern ont constaté qu'une température élevée a un effet défa- vorable sur l’activité respiratoire du foie isolé, ainsi que sur la conservation du pouvoir oxydant des muscles. — M. E. Maurel résume ses recherches sur l’utilisa- tion des aliments ingérés pendant la grossesse par la cobaye et la lapine. — MM. V. Audibert et P. Valette ont reconnu que la splénectomie provoque chez l'homme une éosinophilie marquée (23 °/,), qui tombe à 6°, six mois après l'opération. — M. Ph. Eisen- berg a observé que le bacille du charbon symptoma- tique et le vibrion septique élaborent dans leurs cultures une hémolysine à action assez forte. — M. G. Cha- magne montre que le suc de feuilles de digitale ren- ferme un ou plusieurs colloïdes négatifs et que la partie active de la plante se trouve combinée ou absorbée par ces colloïdes. — M. G. Vallet décrit un procédé de numération des hématoblastes d'après le rapport qui existe entre eux et les leucocytes. — MM. CI. Gautier, A. Morel et V. Monod montrent que la coloration rouge- 336 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES cerise du lait en présence d'alcalis concentrés ne néces- site que la présence du lactose et d’un corps albumineux. — M. L. Lepage présente une canule à soupapes pour l'anesthésie. — M. J. Cluzet a déterminé les coeffi- cients de la formule d’excitation (Q — à + bt) d'un cer- ain nombre de muscles et de nerfs, normaux et anor- maux. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 19 Mars 1907. MM. Alezais et Peyron ont étudié le développement des paraganglions lombaires chez le chat, le chien et l'homme, — Les mêmes auteurs concluent d'une étude sur les tumeurs dites gliomateuses des capsules surré- nales qu'elles sont d’origine sympathique. — M. J.Cotte a reconnu l'absence d'hématine et de biliverdine chez l'Actinia equina. — MM. F. van Gaver et P. Stephan montrent que le corps flottant du liquide péricardique du Ciona intestinalis contient un parasite, auquel ils donnent le nom de Cardiosporidium cionae; c'est un sporozoaire, mais assez différent des formes connues. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 5 Mars 1907 M. L. Gentes a constaté que le lobe nerveux de l'hypophyse et le sac vasculaire sont des dépendances de portions voisines de la paroi de l'infundibulum; on ne peut les considérer comme des organes homologues. — M. H. Sérégé maintient ses conclusions sur l'indé- pendance vasculaire du foie droit et du foie gauche. D'autre part, il a reconnu l'existence d'un double courant sanguin dans la veine porte. — M. C. Sauva- geau signale l'existence de la sexualité chez l'Halopte- ris (Stypocaulon) scoparia. — M. G. Denigès décrit quelques réactions nouvelles de l'inosite, applicables à sa recherche dans l'urine : réduction de la liqueur de Fehling, précipité jaune avec l'acétate mercurique, coloration jaune avec l'acétate de baryte. — M. H. Char- rier décrit la structure de la trompe du Nephthys Homberqgi. — M. J. Gautrelet à déterminé la toxicité de certaines couleurs d'aniline; les colorants actifs sont, en général, les plus toxiques. — MM. A. Auché el L. Tribondeau décrivent un nouveau flacon compte- gouttes pouvant rendre des services dans la technique histologique. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 15 Mars 1907. M. Ch. Nordmann a étudié les effets magnétiques de léclipse totale de Soleil du 30 août 1905. Il s'est super- posé, à l’agitation générale des aimants qui régna le 30 août 1905, une perturbation magnétique particulière accompagnant l’éclipse, et dont l'effet fut, en toutes les stations, de ramener l'aiguille de déclinaison vers l'Est (c’est-à-dire vers sa position moyenne) d’une frac- tion notable de son élongation occidentale normale. La valeur de cette force perturbatrice fut, là où l'éclipse était totale, certainement au moins égale à 88.10-6 gauss et sans doute trois fois supérieure (ce qui correspond à une déviation de 3' de la déclinaison à Philippeville). La valeur maxima coïncida en toutes les stations étu- diées avec la plus grande phase de l’éclipse elle-même. Il semble que l’on peut concevoir de la manière sui- vante les causes physiques qui ont produit ce phéno- mène : il a été démontré, notamment par les travaux de Schuster, que la variation diurne de l'aiguille aimantée est due à un potentiel variable, extérieur à la surface de la Terre et qui tourne dans l'atmosphère avec le mouvement diurne du Soleil, attirant la pointe Nord de la boussole le matin vers l'Est, l'après-midi vers l'Ouest. Quel que soit le mécanisme par lequel les rayons solaires produisent dans l'atmosphère supé- rieure Ce potentiel variable, il est naturel de penser que la suppression du rayonnement solaire doit avoir pour effet une diminution de ce potentiel variable, et que l'aiguille doit tendre à revenir à sa position d'équi- libre, dont ce potentiel l'écartait normalement. Or, précisément aux heures où avait lieu l’éclipse, l'aiguille est habituellement à l’ouest de sa position normale et l'éclipse s'est accompagnée d’une rétrogradation de l'aiguille vers l'Est. — M. P. Culmann présente les instruments suivants construits par la maison Zeiss: 1° Un spectrographé de MM. Pulfrich et Lôüwe pour les radiations visibles et ultra-violettes. L'instrument peut servir pour la vision et pour la photographie. Pour la vision, il est autocollimateur. Ce dispositif, tout en réduisant les dimensions de l'appareil, a l'avantage de réaliser automatiquement le minimum de déviation au moyen d’une simple rotation du prisme. 2% Le microscope de mesure de M. Lôwe. Cet instrument doit servir à faire des mesures avec une précision inter— médiaire entre celle d'une simple règle et celle de la machine à diviser. Le tube du microscope, avec la cré- maillère de mise au point, est monté sur un chariot qui se déplace au moyen d'une vis micrométrique dont le tambour est gradué en centièmes de millimètre. 3° La lampe à arc au mercure de M. Siedentopf. Les pôles positif et négatif sont concentfriques, comme dans le modèle de MM. Fabry et Pérot. 4° Le brüleur au sodium de M. Lüwe, destiné à être employé avec les réfracto- mètres à réflexion totale ou incidence rasante qui exigent une grande source de lumière. (À suivre.) SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE 22 Mars 1907. M. le Président annonce le décès de M. Marcelin Berthelot, président d'honneur de la Société. La séance est levée en signe de deuil. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 13 Décembre 1906 (fn). M. F. W. Aston présente ses recherches sur la lon- queur de lespace Sombre cathodique pour diverses densités de courant et pressions dans différents gaz. Elles le conduisent à cette conclusion que l’espace sombre peut être considéré comme une région d'élec- trisation positive voyageant vers la cathode et dans laquelle la charge positive totale équilibre exactement la charge négative sur la cathode. Le mouvement des ions positifs peut être montré d’une façon frappante par un tourniquet en mica monté à l’intérieur de l’es- pace obscur et qui se met à tourner violemment dans la direction opposée à celle qu'on attribue aux rayons cathodiques émanant de l’électrode. — M. H. G. Plim- mer conclut de ses nouvelles observations sur les effets produits sur les rats par les trypanosomes de la fièvre de Gambie et de la maladie du sommeil que ces deux maladies ne peuvent plus être considérées comme diffé- rentes, puisque leurs agents ont produit des effets semblables sur les animaux étudiés. Séance du Séance du 2% Janvier 1907. M. J. Lunt : Sur la présence de l'europium dans les étoiles. Ayant obtenu, par des mesures sur la ligne du calcium À 4435,851 dans le spectre d'x Boûtis et de & Geminorum, des valeurs de vitesse radiale en désac- cord avec celles qu'on déduit d’autres lignes stellaires, l'auteur suspecta cette ligne de n'être pas pure dans les étoiles précédentes. La vitesse radiale résultante était celle qu'aurait donné une ligne perturbatrice très proche de celle du calcium et placée à environ À4435,753. Or, Exner et Haschek ont signalé une forte ligne de l'europium à X4435,75. La recherche d’autres lignes fortes de l’europium dans le spectre d’Arcturus révéla plusieurs lignes stellaires fortes anormales dont la position coïncide avec celle de lignes de l'europium; l'auteur conclut que tous ces faits ne peuvent s’expli- quer sans admettre la présence de l'élément rare en È î ? + ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES question. [1 montre qu'il existe également dans la Ychromosphère solaire. — Le comte de Berkeley pré- “sente ses recherches sur l'application de l'équation d'état de Van der Waals aux solutions, en particulier aux résultats des mesures directes de pression osmo- tique à 0vC. Par l'introduction d’une troisième cons- tante, il est parvenu à deux équations auxquelles obéis- sent les valeurs expérimentales : (7 + E)(—2)=nr (1) ( ns —2)( —1)= RT (2), “où p est la pression osmotique, RetT la constante des eaz et la température absolue, tandis que le v de l'équation (1) est le volume d’eau qui contient 1 gr.- - mol. du corps dissous et le v de l'équation (2) le volume “de solution contenant 1 gr.-mol. Les deux équations “ donnent des valeurs impossibles pour les points criti- ques. — Sir James Dewar et H. O. Jones : Sur un nouveau fer-carbonyle et sur l'action de la lumière et de la chaleur sur les fers-carbonyles. Les auteurs ont poursuivi leurs expériences sur l’action de la Tumière sur le fer-pentacarbonyle liquide et sur l’action de la chaleur sur le composé solide qui en résulte, le difer- rononacarbonyle. Au cours de ces expériences, de nouvelles et intéressantes observations furent faites, et un nouveau composé de fer et d'oxyde de carbone fut découvert. L'action de la lumière sur le fer-penta- carbonyle seul ou en solution a pour résultat la forma- tion de Fe*CO)’ et d'oxyde de carbone, excepté dans deux cas : 4° lorsque le solvant est du nickel-carbo- nyle ; 2° lorsque la température est supérieure à 56°C. L'absence de toute action due à la lumière au-dessus de 56°C. a été confirmée par l'emploi de tubes renfer- mant un petit manomètre, qui ne présenta pas de changement de pression lorsqu'aucun solide ne se dé- posait, et montra que le dépôt de solide est une preuve > délicate de la moindre action. A 35°C. se forme un dépôt solide, et la pression se développe en cinq minutes, au soleil. De 45° à 50°C. se forme un dépôt solide, et la pression se développe en trente minutes, au soleil. A 56°C. aucun dépôt de solide ne se forme et il ne se développe aucune pression pendant cinq à douze heures d'exposition au soleil. On à mesuré la rapidité de la réaction et l’on a trouvé que c'est une réaction de premier ordre. La marche de la décompo- sition a été comparée à la marche de la réaction entre le chlorure ferrique et l'acide oxalique, étudiée par Lemoine ; on a trouvé que le fer-carbonyle est légère- ment plus sensible à la lumière que le mélange em- ployé par Lemoine. Les auteurs ont aussi mesuré la marche de l’action inverse de l’'oxyde de carbone sur le solide, qui se produit dans l'obscurité, et ils Font trouvée très faible à la température ordinaire, mais ayant un coefficient de température presque normal ; la vitesse est presque triplée pour une augmentation de 10°C. On peut ainsi proposer une explication rai- sonnable de l'absence de toute action de la lumière au-dessus de 56°C. Si l'action directe induite par la lumière a un coefficient de température très faible, comme la réaction étudiée par Lemoine, l’action op- posée étant environ 240 fois plus rapide à 56°C. qu'à 46°C. empêcherait facilement l'accumulation de quan- tités appréciables des produits de la décomposition. L'action de la chaleur sur le diferrononacarbonyle seul produit une décomposition représentée par l'équation : 2Fe?{C0}° — 3Fe(C0} + Fe + 3C0. Lorsqu'on chaufle le solide en présence d'hydrocarbures, d'éther, de bro- mobenzène ou de fer-pentacarbonyle, on obtient cepen- dant des solutions vertes; il se produit du fer-penta- carbonyle, mais aucun gaz ne se dégage; si lon emploie comme solvant l'alcool, la pyridine, l'acétone ou l’acé- tonitrile, on obtient des solutions rouges, mais aucun gaz ne se dégage; avec du nickel-carbonyle comme solvant, il se dégage du gaz et il se dépose du fer. Des solutions vertes, dans des conditions convenables, se déposent des cristaux verts lustrés, qui forment un nouveau composé, le fer-tétracarbonyle, x[Fe(CO)'|, formule dans laquelle x à une valeur élevée, probable- ment voisine de 20. Le nouveau composé à un volume moléculaire de 84 pour l'unité Fe(COi', et il est très stable. Il n’est pas décomposé par l'acide chlorhydrique concentré chaud ; il est attaqué par l'acide sulfurique concentré chaud, donnant du monoxyde de carbone et du sulfate ferreux; il est rapidement décomposé par l'acide nitrique froid. Le fer-tétracarbonyle se dissout dans les hydrocarbures, l'éther, le fer-pentacarbonyle, le nikel-carbonyle, l'acétone et l’acétonitrile pour don- ner des solutions vertes qui ne changent pas par un court chauffage et qui déposent le composé vert sans chan- gement lorsqu'elles sont évaporées en dehors du con- tact de l'air; dans la pyridine et l'alcool, le composé se dissout pour donner une solution verte, qui se trans- forme lentement au froid et rapidement par la chaleur dans une solution rouge. Les solutions vertes présen- tent une bande d'absorption caractéristique dans le jaune, tandis que les solutions rouges ne présentent aucune absorption sélective. x SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 8 Mars 1907. MM. F. T. Trouton et $S. Russ ont recherché la vitesse de récupération de la charge résiduélle dans les condensateurs électriques quand la différence de potentiel des plaques est maintenue constante. Ils ont employé deux méthodes. Dans la première, utilisée avec les condensateurs en mica, le potentiel, observé avec un électromètre, est maintenu constant au moyen d'une résistance variable qui est graduellement aug- mentée lorsque le courant de récupération diminue. La haute résistance nécessaire consiste en deux plaques métalliques horizontales séparées par de lair ionisé; un écran mobile peut être introduit entre les plaques de façon à diminuer graduellement la section de la résistance de l'air. La seconde méthode a été utilisée quand la charge résiduelle est assez grande. Le courant passe dans un galvanomètre amorti et la valeur du courant de récupération est mesurée à chaque instant; dans ce cas, la différence de potentiel entre les plaques peut ètre considérée comme constante, puisqu elle est pratiquement nulle. La courbe courant-temps se montre voisine d'une hyperbole. On en conclut que la quantité d'électricité récupérée à un moment quelconque suit la loi Q — à log (pt), semblable à celle qu'ont trouvée Rankine et d'autres pour la récupération de tension dans les corps élastiques surétirés quand la déforma- tion est maintenue constante. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 7 Mars 1907. MM. M. Barrowclifet F.-B. Power poursuivent leurs recherches sur l'acide chaulmoogrique, G‘#H*0°,F.680. L'oxydation ménagée le convertit en un mélange de trois acides hydroxydés; une oxydation plus complète donne un mélange d'acide n-pentadécane-xx!y- tricar- boxylique, CO*H.(CH°)*.CH(CO*H).(CH°)®.CO*H,F.68 et d'un acide cétonique C9*H,(CH?}°.CO.(CH?)®.CO'H; ce dernier fournit à son tour par oxydation les acides u-dodécane et n-undécanedicarboxyliques. On en déduit pour l'acide chaulmoogrique l'une des deux formules suivantes, un état de tautomérisme existant probable- ment entre ces deux structures : cu cH2 cu Ÿ CH (CHE) 2COH 2e «CH ZN G{CHE)2COH cale TT cel cr L'acide hydnocarpique, G®H**0*,F.60°, homologue de l'acide chaulmoogrique, fournit par oxydation de l'acide n-tridécane-ax'y-tricarboxylique, F.60°, et de l'acide 338 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES n-décanedicarboxylique. Il possède une forme analogue à celle de l'acide chaulmoogrique, avec 10CH2 dans la chaîne latérale au lieu de 12. — MM. R.-J. Caldwell et S.-L. Courtauld ont constaté que, dans l'hydrolyse de l'amygdaline par les acides, la séparation des deux molécules de glucose a lieu en deux étapes; on obtient d'abord le glucoside du mandélonitrile, qui se dédouble ensuite en HCA7, benzaldéhyde et glucose. — Les mêmes auteurs montrent que le glucoside du mandélonitrile esLisomère avec la prulaurasine et la sambunigrine. — M. S.-J.-M. Auld, en hydrolysant l'amygdaline par lémulsine, a obtenu soit le glucoside du mandélonitrile et du dextrose, soit la benzaldéhydecyanhydrine et un «5-disaccharide, qui se résout à son tour en deux molécules de dextrose. — M. H.-D. Law, en réduisant électrolytiquement les aldéhydes aromatiques en solu- tion alcaline, a obtenu des composés du type de l'hy- drobenzoïne; si un CH° est substitué en 0 où m, il ne se forme que des produits résineux. En solution acide, on obtient à froid des alcools primaires. — MM. G.-T. Morgan et Ed. Cohen ont préparé les sulfonates aro- matiques de cérium, qui sont des composés cristallins solubles. — MM. H.-M. Dawson et C.-G. Jackson ont constaté que le système Na?S0*511°0 peut exister à 25° sous six formes différentes, caractérisées chacune par un volume défini : 1° pentahydrate primaire; 2° pentahydrate secondaire ; 3° tétrahydrate secondaire et solution saturée; 4 pentahydrate primaire et solu- tion saturée; 5° monohydrate secondaire et solution saturée; 6° liquide. — M. Th. $. Price a observé que le persulfate de potassium cause une dépression molé- culaire du point de congélation des solutions aqueuses de H°0* moindre que dans l’eau ; on en déduit qu'il se forme un composé instable en solution. Il en est de même pour le sulfate de K et H°0°. — MM. E-.F.-J. Atkinson, H. Ingham et J.-F. Thorpe, en traitant par HS0* concentré froid le B-imino-a-cyano-fB-0-tolyl- propionate d'éthyle, ont obtenu le 1 : 2-naphtylènedia- mine-2-carboxylate d’éthyle ; le B-imino-#-cyano-a-phé- nyl-6-0-tolyléthane, soumis au même traitement, fournit le 1:3-diamino-2-phéaylnaphtalène. — M. A.-W. Bain, en faisant réagir le dibromure d'éthylène sur la dia- cétylacétone sodée, à obtenu un composé cyclique C'H100,F.62°-639, qui s'isomérise facilement par chauf- fage avec HCI concentré en donnant un dérivé de la pyrone. SOCIÉTÉ ANGIAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE BIRMINGHAM Séance du 6 Décembre 1906. M. P.-F. Frankland fait une étude sur les nouveaux procédés d'emploi de l’azote atmosphérique et la fabri- cation de composés azotés. Séance du 1% Février 1907. MM. P.-F.Frankland el H. Silvester communiquent leurs recherches sur /a purification bactérienne des eaux d'égouts ayant reçu une forte proportion de liquides résiduaires des usines à gaz. Cette présence occasionne des difficultés considérables, mais non insurmontables, dans Ja purification bactérienne; d'autre part, l’oxyda- tion de ces eaux par des composés chimiques revien- drait à un prix beaucoup trop élevé. En utilisant des lits à grande surface, assurant un triple contact, et en n'admettant qu'une quantité restreinte d’eau d’égouts sur les lits, les auteurs ont obtenu une purification satisfaisante avec des eaux contenant jusqu’à 9 °/, de résidus d'usines à gaz. Les effluents ne se putréfient pas, permettent la vie des poissons, présentent des chiffres raisonnables pour l'ammoniaque albuminoïde et l’oxy- gène absorbé, tandis qu'ils sont presque invariablement exemptsde sulfocyanures etcontiennent une abondance de nitrates. Les expériences faites sur le poisson doré montrent qu'il peut vivre au moins vingt-quatre heures sans préjudice dans une solution contenant jusqu'à 250 parties de CAZS dans 100.000. Par contre le Z. col communis est affecté même par 40 parties de CA7S dan: 100.000. SECTION CANADIENNE Séance du 18 Janvier 1906. M. W.-G. Miller a étudié les dépôts arsénifères de cobalt et de nickel et ceux d'argent de Temiskaming (Ontario). Il y a trouvé les corps suivants : Ag, Bi natifss graphite; nicolite, NiAs; chloanthite, NiAs°; smaltite, CoAs*; érythrite, Co*As*0*,8 H°0 ; annabergite, NisAs?08, 8H°0; argentite, AgS; millérite, NiS; mispickel, FeAsS; cobaltite, CoAsS; dyscrasite, Ag5Sb; pyrargy- rite, Ag'SbS*; tétrahédrite, Cu“Sb?S7, Séance du 10 Mari 1906. M. R. Harcourt étudie les produits à base de farine de blé ou d'avoine récemment lancés dans le commerce sous le nom de « breakfast food » (aliments pour dé- Jeuners). Il arrive à la conclusion qu'ils constituent une nourriture très économique ; cependant, ils ne sont pas appropriés à tousles consommateurs, et les denrées pré-digérées doivent être recommandées à ceux qui ont de la difficulté à digérer l’amidon. Séance du T Février 1907. -M. F.-W. Babington a expérimenté les méthodes de détermination de l'alcool méthylique dans l’acétone. Il propose de leur substituter une nouvelle méthode basée sur l'éthérification de l'alcool par l'acide borique et la titration de l’éther formé. SECTION DE LIVERPOOL Séance du 42 Décembre 1906. M. H. Bassett jr signale deux cas d’électrolyse du sol, qui se sont produits à la suite de perte de courant par des cables électriques, et qui ont abouti à la forma- tion d’un alliage liquide de sodium et de potassium aux dépens des alcalis du sol. Séance du T Janvier 1907. MM. C. Bergtheïl et R. V. Briggs montrent que la méthode de Bloxam pour la détermination de l'indigo- üne dans l’indigo commercial (par sulfonation avec l'acide sulfurique fumant) donne invariablement des résultats trop faibles; il faut multiplier ceux-ci par un facteur égal à 1,026 pour avoir le résultat exact, SECTION DE LONDRES Séance du 4 Février 1907. MM. G. Young et B. Caudwell décrivent un appareil pour la production de CO? dans la détermination de l'azote dans les composés organiques par la méthode absolue ; ils utilisent l’action de H?S0“ concentré sur K°COS. SECTION DE NEW-YORK Séance du 25 Janvier 1907. M. S. F. Peckham conclut de ses recherches que toutes les poussières (de charbon, de bois, de blé, de” sucre, de savon, et en général toute poussière capable de brûler) sont dangereuses. Aucune flamme libre ne doit être portée dans un endroit où existent des pous- sières de ce genre, et l'on doit éviter autant que pos- Oo sible leur présence. SECTION DE LA NOUVELLE-ANGLETERRE Séance du 7 Décembre 1906. M. A. H. Gill à étudié les appareils d'Ordway et Mackey destinés à mesurer l'aptitude des huiles à pro- duire la combustion spontanée; celui de Mackey donne les résultats les plus concordants dans le temps le plus court. i SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 23 Janvier 1907. M. F. J. R. Carulla à étudié l'emploi de la solution étalon d'ammoniaque en acidimétrie. En prenant les précautions que réclament les propriétés particulières de cette solution, on obtient d'excellents résultats. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 143 Décembre 1906. M. W. Waldeyer présente un Mémoire relatif à l’arte- ria vertebralis, Mémoire où il discute un certain nombre de variétés, en particulier le cas où l'artère entre dans l'annexe non pas de la sixième, mais de la cinquième vertèbre du cou. Cette variété se présente plus souvent du côté gauche que du côté droit, notamment toutes les fois (autant que le font voir ces expériences) que l'artère prend sa naissance de l'arc aortique. Séance du 20 Décembre 1906. M. A. Engler présente ses contributions à la connais- sance des formations végétales du Transvaal et de la Rhodésie. Bien que ce dernier pays soit traversé par un réseau de chemins de fer, sa flore n'était jusqu'ici que peu explorée. L'auteur a eu l’occasion de faire des études originales sur ces formations végétales, lors du voyage de l'Association Britannique pour l’avancement “des Sciences, en août-septembre 1905. Après avoir décrit en détail l'habitus des flores de ces différentes contrées, il étudie les conditions climatériques qui en sont la base. — M. H. Braus, professeur à Heidelberg, adresse une Note sur la morphogenèse des requins inférieurs. L'auteur y étudie la taxonomie, les œufs et leurs enveloppes, ainsi que l'existence dans la Méditer- ranée de ces poissons. L'examen des embryons de Notidamides et de Spinacides, dont M. Braus discute la position systématique relativement aux autres embryons de requins, lui permet d'approfondir leur différenciation historique, ainsi que les facteurs efi- caces de leur évolution actuelle. Séance du 10 Janvier 1907. M. Stumpf présente une Note au sujet de ses obser- vations sur les sons de combinaison. Ces observations, dans lesquelles l'influence des harmoniques supé- rieures était éliminée au moyen de dispositifs d’inter- férence, ont démontré à l'évidence, pour deux sons simultanés { et 2, l'existence des sons de combinaison suivants : 10 }—1{, ht; 2 2h—1,2t— h, 3h — 21, 3t— 2h. Ces sons se rangent avec les sons primaires en deux séries arithmétiques indépendantes. Ils se déduisent immédiatement de l'effet des vibrations pri- maires, les sons de combinaison, comme on le démontre, ne formant de nouveaux sons de combi- naison, ni entre eux, ni avec les sons primaires. Cependant, le son 2 — t, dans le cas de h:1<2:1,et le son 24— } (lequel par définition même s'évanouit pour 2: 1) possèdent seuls une intensité considérable. Séance du 17 Janvier 1907. M. Munk présente un deuxième Mémoire sur les fonctions du cervelet. La fonction spécifique de cette parlie du cerveau consisterait à conserver ou à régler l'équilibre pendant la marche et dans les attitudes ver- ticale, horizontale et assise du corps. Le cervelet est, dans ces différents cas, mis à contribution au fur et à mesure des besoins du moment. A légal des autres organes centraux de l'appareil moteur (le grand cer- veau, la moelle épinière, les centres principaux, les centres de la moelle), dont chacun agit sur le centre subordonné à sa fonction spécitique, il agirait sur les centres de la moelle et musculaires dans la région de l’épine dorsale et des extrémités, en exci- tant ces centres avec une intensité variable, mais tou- Jours peu considérable. ALFRED GRADENWITZ. SOCIÈTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 8 Février 1907. MM. J. Frank et R. Pohl rendent compte de leur méthode pour déterminer la mobilité des ions dans les ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 339 petites masses gazeuses. Les mobilités des ions, dans le cas des gaz difficiles à produire, seraient tout particu- lièrement intéressantes à connaître pour des raisons d’un ordre théorique. Or, toutes les méthodes jusqu'ici connues demandent des quantités relativement consi- dérables de gaz. La méthode de M. Rutherford, qui consiste à déterminer la mobilité d’un ion par son amplitude dans un champ alternatif, est la seule qui permette d'opérer avec des quantités réduites. Or, cette méthode, sous sa forme originale, étant malheureuse- ment limitée aux ions de l'effet photo-électrique, ne donne que les mobilités des ions négatifs, les vitesses des ions positifs dans le cas en question étant extrè- mement réduites. Les auteurs ont donc modifié la mé- thode de Rutherford, de facon qu'elle puisse servir à déterminer avec une grande précision la mobilité des ions des deux signes engendrés par les substances radio-actives et par les rayons X, même dans quelques centimètres cubes du gaz. Après avoir été engendrés en dehors du condensateur de mesure, les ions sont transportés dans le champ alternatif en direction pa- rallèle à la direction du champ, à travers de petits trous pratiqués dans l’une des plaques du condensa- teur, à une vitesse si peu considérable qu'ils n’altei- gnent point une distance sensible de la plaque. Dans la présente Note, les auteurs étudient les ions de l'air atmosphérique ; dans un travail ultérieur, ils entendent appliquer leur procédé à la détermination des mobi- lités des ions de l’hélium. — MM. E. Gehrcke et C. Reichenheim présentent une seconde Note sur les rayons anodiques. Dansleur Note antérieure, présentée à la même Société, les auteurs avaient fait voir que l'anode, dans des circonstances convenables, émet des rayons qui paraissent composés de particules positi- vement chargées et animées d’un mouvement de pro- pagation. Or, les rayons anodiques autrefois étudiés étaient tous engendrés par des anodes se trouvant à un potentiel peu élevé; aussi la vitesse des rayons, devant être assez petite, ne permettait-elle qu’un temps d'obser- vation de quelques minutes. Le dispositif décrit par les auteurs donne des rayons anodiques plus rapides; les anodes qu'il comprend se prêtent à des expériences plus prolongées. Ces recherches viennent jeter un jour inattendu sur les phénomènes se passant dans l'arc voltaique. C'est, comme on le sait, l'anode qui, dans le cas de l'arc voltaïque, présente une discontinuité de potentiel considérable etune vaporisation très intense. Or, comme les électrodes en général contiennent du carbone, il est plausible qu'elles émettent des rayons anodiques. L'existence de ces rayons expliquerait par- faitement l'ionisation positive au sein de Farc. — M. O. von Baeyer présente un Mémoire ‘sur la struc- ture des raies spectrales les plus fines. Dans un travail antérieur, l’auteur, en collaboration avec M.E. Gehrcke, avait indiqué une méthode basée sur les points d'inter- férence, pour décomposer les raies spectrales. Dans la présente Note, il répète avec des ressources perfec- tionnées les mesures antérieures sur les lignes spec- trales les plus fines pour lesquelles on à constaté l'existence de satellites. Cette méthode permet de séparer « les fantômes » des véritables satellites. Le nombre de satellites constaté a pu être ainsi augmenté dans certaines limites. ALFRED GRADENWITZ, ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du T Février 1907. 4° Sciences pHysiques. — M. F. Hopfner : Le rayonne- ment solaire sur la Terre et l'absorption des rayons calorifiques par l'air atmosphérique d’après la loi de Lambert (1). — M. G. Urban a reconnu que l'a-naphto- quinone s'ajoute” à l'hydroquinone pour former une quinhydrone mixte. — M. F. Glassner, en faisant réa- gir l'acide salieylique sur le chlorure phénylacétique en présence d'AICÉ, à obtenu l'acide désoxybenzoine- 4-oxy-3 carbonique, qui peut être dédoublé en toluène et acide 4-oxyisophtalique ou en p-oxydésoxybenzoine et CO®. — MM. M. Stritar el R. Fanto : La théorie du processus de la saponification. 29 SCIENCES NATURELLES. — Mile A. Glinkiewicz décrit trois parasites observés sur le Pachyuromys duprasi : le Ayobia muscu, l'Eremophthirius Werneri et le Xenopsylla pachyuromyidis. — M. G. Mayr à déter- miné les fourmis récoltées sur le Haut-Nil par M. EF. Werner et découvert une nouvelle espèce : le Cremasto- gaster Werneri. — M. F. Schorn a étudié les cellules muqueuses de quelques Urticacées ; elles ressemblent à celles des Malvacées et des Tiliacées, exception faite pour la Girardinia palmata, où le mucus se présente sous forme de cystolithes et ne dérive pas de la mem- brane cellulaire. Le mucus sert probablement à retenir l'eau et augmente la force de résistance de la plante contre la sécheresse. — M. von Hôhnel décrit 47 es- pèces nouvelles de champignons. Séance du 14 Février 1907. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. R. Girtler étudie les valeurs extrèmes des fonctions qui satisfont aux équations de Laplace. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. F. Ehrenhañft a mis en évidence, par des observations à l’ultramicroscope, l'existence d’un mouvement moléculaire brownien dans les gaz. Les vapeurs des métaux Ag, Au, Pt, volatilisés dans l’arc,se condensent en petites particules oscillant dans l'air, dont les dimensions moyennes ne sont qu'une petite fraction de la longueur d'onde moyenne de la lumière. Les particules ultramicroscopiques de la vapeur de l’oxyde de zinc présentent aussi ce mouve- ment brownien. -— M. J. Sterba a étudié l’action chi- mique des rayons cathodiques. Sous l'influence de ceux-ci, NaCI dégage du CI et le résidu a une réaction alcaline ; le nitrate de soude est en partie transformé en nitrite; le chlorate de potassium forme de l'hypo- chlorite et du chlorure. — M. G. Goldschmiedt est parvenu à préparer de l'acide fluorhydrique anhydre dans les vases en cuivre. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de Janvier et Février 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. S.Pincherle s'occupe du lien qui existe entre la loi de formation des coeffi- cients dans un développement asymptotique, et la singularité de la fonction représentée. — M. E. AI- mansi : Sur les équations de l’élasticité. — M. G. Fu- bini démontre que le problème de Dirichlet,au moins pour certaines conditions, peut se considérer comme limite d’un problème ordinaire de minimum; dans une deuxième Note, l'auteur s'occupe de quelques nou- veaux problèmes auxquels est applicable le principe de Dirichlet. — M. H. Lebesgue : Encore une obser- vation sur les fonctions dérivées. — M. P. Pizzetti donne l'expression de la valeur maximum de la diffé- rence entre deux angles correspondants de deux triangles géodésiques ayant les mêmes côtés. — M. L. Rolla à cherché une méthode qui permette de vérifier, d'une facon propre à la démonstration dans les cours, les résultats obtenus par M. Volterra en étudiant les corps plusieurs fois connexes; M. Rolla à trouvé un procédé optique qui se rattache à la double réfraction produite par les déformations dans la gélatine. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — MM. A. Battelli etL. Magri décrivent les particularités que l'on observe dans la constitution de l’étincelle électrique, et qui changent notablement lorsque varient les conditions de la dé- charge. En soumettant l’étincelle à l’action d'un champ magnétique intense, l'influence du champ est remar- quable seulement quand la décharge est à longue périoce. — MM. A. Battelli et A. Stefanini transmet- tent une étude expérimentale sur la relation qui existe entre la pression osmotique et la tension superficielle. — M. F. Piola s'occupe des courants de Foucault dans le noyau conducteur interne d'un solénoïde parcouru par un courant alternatif; dans une autre Note, M. Piola, après avoir examiné la distribution du champ ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES fils cylindriques conducteurs placés dans un solénoïde parallèlement à l'axe de ce dernier, lorsque la diffé rence de potentiel active aux extrémités du solénoïde était alternée sinusoïdale, reprend son étude dans 1 cas où cette différence est due à la décharge d'un condensateur. — M. O. M. Corbino ajoute quelque observations aux recherches de MM. Battelli et Magr sur l'hystérèse magnétique du fer pour des couran de haute fréquence, en observant qu’elles confirment ce qu'il avait énoncé : c'est-à-dire que l'augmentation: de l'aire d’hystérèse avec la fréquence visible dan: les figures obtenuès par lui n’est pas due aux couran de Foucault. — M. G. Magri décrit l'appareil qui lui permis d'exécuter des recherches sur les solvant inorganiques à basse température. — M. G. Gallo pré sente une méthode d'analyse des produits sidérurgiques qui renferment une grande quantité de chrome. M. G. Landini étudie l'influence de la formaline su le pouvoir rotatoire du glucose en rapport avec la théorie de la multirotation. — MM. A. Angeli et L. Marino donnent une notice préliminaire sur l'acide santoninique, sur la santonine et sur les relations probables qui existent entre la structure de cette subs= tance et celle de quelques sesquiterpènes que l'on rencontre dans la Nature. — MM. E. Paterno et L. Spallino décrivent leurs recherches sur la constitution: du dioxyéthylène.— MM.G. Plancher et U. Ponti onk fait des recherches relatives à l'action du chloroforme sur l’a-méthylindol et sur quelques pyrrols. — M. U: Grassi s’est proposé d'établir la part que prend l'hydrogène dans l'augmentation de la conductibilité de l’eau privée d'air, lorsque dans cette eau on fait passer de l'hydrogène en présence du bromure de radium. Cette augmentation de conductibilité semble dépendre d'une action spécifique des gaz dissous dans l’eau, et les émanations du radium n'ont aucune in— fluence. — MM. L. Mascarelli et M. Martinelli décri- vent la manière dont se comportent cryoscopiquement les dérivés iodyliques dissous dans l’acide formique. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. ©. Scarpa a mesuré la radio-activité de produits divers du Vésuve; il a re- connu qu'en général ces produits possèdent une radio- activité comprise entre un millième et un demi-mil-« lième de celle de l'uranium, et qu'il semble se confirmer une activité plus grande pour les produits plus anciens: — M. F. Eredia s'occupe de laquantité de pluie tombée à Rome dans les années 1825 à 1905; et il arrive à la conclusion que les mois de décembre, novembre et Janvier sont les plus pluvieux, et que le maximum appartient au mois d'octobre. — M. A. Rosati transmet une étude cristallographique sur les séléniates de thorium octohydratés. — M. M. Gortani démontre, à l’aide d'espèces fossiles, l'existence du Dévonien inférieur dans le versant italien des Alpes Carniques. — M.E. Clerici indique la meilleure composition des liquides qui peuvent servir, par leurs densités diffé- rentes, à séparer les minéraux. — M. N. Strampelli a exécuté à l'Ecole d'Agriculture de Rieti une série d’ins téressantes expériences sur la sélection et sur l'hybri= dation du froment et du maïs; les variétés obtenues présentent une grande résistance aux parasites et à l'affaissement. — M. G. Pollacei décrit les expériences, récemment exécutées par lui, qui confirment l'exis=" tence de la formaldéhyde dans les plantes vertes, ë % magnétique et du flux d'induction dans un faisceau den sr À A existence signalée pour la première fois par l’auteur en 1899. — M. R. Perotti démontre qu'il est possible, pour l'examen bactériologique agraire du terrain, de perfectionner la méthode du dénombrement des germes, en recourant à l'extrait aqueux de tourbe pour la culture des microbes. — M. M. Chio décrit ses re= cherches sur les courants de démarcation des muscles. ERNESTO Mancini. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 18° ANNÉE N ° 9 15 MAI 1907 Revue générale Des Sciern pures et appliquées Direcreur : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L, OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Le Colonel Laussedat. — Né à Moulins (Allier), le 19 avril 1819, Aimé Laussedat était entré à l'Ecole Polytechnique en 1838, pour en sortir, en 1840, dans l'arme du génie. Capitaine en 1846, chef de bataillon . en 1863, lieutenant-colonel en 1870, colonel en 1874, il fut admis à la retraite en 1879 et recut à cette occasion la croix de commandeur de la Légion d'honneur. Membre de l’Académie des Sciences depuis 1894, il avait été, en 1900, élevé à la dignité de grand oflicier. Attaché à ses débuts aux tra vaux de fortification de Paris (plus spécialement, à la construction du fort de Romainville), il avait été chargé, en 1846, d'impor- Mantes études sur la frontière des Pyrénées occiden- tales, qui lui valurent de flatteuses appréciations de la part du général (depuis lors maréchal) Vaillant. C'est au cours de cette mission que son attention se porta, pour la première fois, sur les ressources que la chambre claire offre au lever des plans, ce qui, par la suite, devait déterminer l'orientation principale de sa carrière scientifique. -Appelé en 1851 au Comité des fortifications pour y diriger le Service topographique et cartographique, il était, la même année, nommé répétiteur du Cours d’Astronomie et de Géodésie de l'Ecole Polytechnique, dont il devenait titulaire en 1856. De 1860 à 1870, il entreprit plusieurs expéditions en vue de l'observation photographique des éclipses de Soleil et des passages de Mercure sur cet astre. A cette occasion, il avait, dès 1860, imaginé un instrument aujourd'hui connu sous le nom d'héliographe horizontal et qui a servi, en 1874 et en 1882, aux astronomes français et américains, pour l'observation des passages de Vénus. La guerre franco-allemande vint détourner le Com- mandant Laussedat de ses travaux scientifiques. Forte- ment attaché à son devoir mihtaire, qui, à ses yeux, primait tout le reste, il se dévoua tout entier aux fonc- tions de commandant du génie de Paris (rive gauche), qui lui avaient été confiées en juillet 1870. On lui dut notamment, à celte occasion, les mesures les plus effi- caces pour empêcher la pénétration de l'ennemi dans les carrières qui règnent sous une partie de l'enceinte REVUE G'NIHALE DES SCIENCES, 1907. et des forts, et conjurer les tentatives d'incendie par des brülots lancés sur la Seine. 11 fut, en outre, chargé par le Gouverneur de Paris d'une autre mission, pour laquelle le désignait évidemment sa compétence spé- ciale : la reconnaissance, au fur et à mesure de leur exécution, des travaux de l'assiégeant, incessamment surveillés de douze observatoires pourvus, par ses soins, d'un personnel d'élite et d’un instrument excellent, le télémeétrographe, qu'il avait lui-même imaginé en 1850. Il prit encore une part non moins active à l’organisation de notre système de télégraphie optique. ; Mais ce fut à l'époque de la libération du territoire que le rôle du Colonel Laussedat prit la plus haute importance. Membre de la Commission de délimitation de la frontière franco-allemande, il parvint, à force de patriotique énergie, à préserver de l'annexion plus de 50.000 habitants et de 50.000 hectares de territoire autour de Belfort et dans le voisinage de Longwy. De tous les services qu'il a rendus, c'est celui dont, bien légitimement, il se montrait le plus fier. De 1872 à 1879, le Colonel Laussedat se consacra à l'étude des divers moyens de communication par voie aérienne (télégraphie optique; éclairage à distance; pigeons voyageurs ; aérostation militaire) avec le con- cours d'une Commission où il eut le mérite de faire entrer des hommes comme le colonel Mangin et le capi- laine Renard. Directeur des études à l'Ecole Polytechnique en 1879, il quitta ce poste en 1881 pour prendre la direction du Conservatoire des Arts et Méliers, qu'il a gardée jus- qu'en 1900. Il avait d'ailleurs débuté au Conservatoire, dès 186%, à titre de suppléant de Ch. Dupin dans la chaire de Géométrie appliquée aux Arts, dont, à son tour, il était devenu titulaire en 1873. Mais l’œuvre qui a valu au Colonel Laussedat sa prin- cipale notoriété — peut-être plutôt encore au delà qu'en deçà de nos frontières — et à laquelle son nom restera plus spécialement attaché, est celle qui a trait à l'exécution des levers topographiques par restitution des perspectives fournies par la photographie. Cet art, aujourd'hui très avancé, qu'il a désigné sous le nom de Metrophotographie (auquel certains auteurs ont pro- posé de substituer soit celui de Photogrammetrie, soit celui de Pholotopographie), lui doit ses méthodes et 9 342 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE ses instruments fondamentaux. L'idée de ramener le problème topographique à une restitution perspective, idée qui ne s'était présentée antérieurement à Beau- temps-Beaupré qu'à titre purement accessoire et sans qu'il l'eût mise au point, s'est offerte pour la première fois en 1846 à Laussedat qui, pendant soixante ans, à fait de sa mise en valeur l'objet d'une sorte d’apostolat. C'est d’abord la chambre claire qui lui a permis de la réaliser. Dès 1851, il s'efforçait de substituer, à l'emploi de la chambre claire, les procédés photographiques alors encore dans l'enfance; et, en 1857, il arrivait à fixer le type de l'appareil propre à pénétrer dans la pratique courante, ce photothéodolite auquel, depuis lors, il n’a cessé d'apporter des perfectionnements suc- cessifs et d'où dérivent tous les appareils du même genre imaginés jusqu'en ces derniers temps par divers inventeurs en vue du même objet. La méthode photographique de lever, comme il arrive presque toujours aux nouveautés scientifiques, n'a pas été sans soulever quelques discussions, voire mème assez passionnées ; à côté d'adeptes enthousiastes, qui ont peut-être eu tendance à en vouloir rendre l’em- ploi par trop exclusif, elle a trouvé des détracteurs qui se sont refusés à en reconnaître le mérite. De tels débats finissent, en fait, par être profitables à la science, en forçant les tenants des diverses doctrines en présence à les perfectionner incessamment en vue de répondre victorieusement aux objections de l’ad- versaire : et l'on ne peut que se féliciter du développe ment parallèle des méthodes concurrentes, qui vient, somme toute, accroître les ressources dont peut dispo- ser l'homme de science personnellement désintéressé dans la question et qui saura, suivant le cas, tirer pro- fit de l'une ou de l’autre. Certes, la Métrophotographie n'a rien fait perdre de leur intérêt aux méthodes topométriques classiques, elles-mêmes en progrès de jour en jour; mais on ne saurait nier qu'à côté d'elles, elle a fait naître des res- sources nouvelles d’une grande importance. Il suffit, pour l'attester, de rappeler ici les remarquables tra- vaux de Deville au Canada, de Pio Paganini en Italie, de Meydenbauer en Allemagne, de von Hübl, Dolezal, Eder en Autriche, sans compter ceux du commandant Javary, de H. etJ. Vallot en France. Ce mouvement très intéressant, c'est, sans aucun conteste, au Colonel Laus- sedat que revient l'honneur d'en avoir été l'initiateur. IL lui a d’ailleurs été donné de voir, en ces dernières années, un de ses jeunes camarades, le capitaine du génie Saconney, entrer résolument dans la voie que lui-même avait ouverte un demi-siècle auparavant et y réaliser du premier coup de nouvelles conquêtes propres à le rassurer définitivement sur l'avenir de sa méthode: ce lui a été, comme couronnement de sa longue et laborieuse carrière, une très vive et très légitime satisfaction. M. d'Ocagne, ù Professeur à l'Ecole des Ponts et Chaussées. $ 2. — Astronomie Disparition apparente des quatre satel- lites de Jupiter. — Les quatre gros satellites de Jupiter, régulièrement observés par les astronomes depuis leur découverte en 1610, disparaissent quelque- fois entièrement à notre vue, parce qu'ils passent de- vant ou derrière la planète, de telle sorte que celle-ci se montre momentanément privée de son cortège ha- bituel. Les satellites qui passent devant se confondent dans le ton lumineux du disque et sont parfois impossibles à discerner : la marche de leur ombre est plus visible. Ceux qui passent derrière sont éclipsés dans le cone d'ombre de la planète et par le disque lui-même. Ils se trouvent à peu près tous sur notre rayon visuel. Ce curieux phénomène, sur lequel M. Flammarion a déjà appelé l'attention dans son Astronomie populaire, et qu'il à succinctement annoncé dans son Aunuaire astronomique pour cette année, se produira le 3 octobre prochain. Les satellites I, III et IV passeront derrière Jupiter, tandis que le IT passera devant (fig. 1). Voici les heures de ces incidents astronomiques : Satellite I. Eclipse de 18:23m à 21h48m. — Il. Passage devant la planète de 19h56 à 22h52m, — III. Eclipse de 16b40® à 20h6m. — IV. Passage derrière la planète de 16h28m à 21r{m; On voit donc que, de 49: 56® à 20b 6", les quatre satellites seront invisibles et que Jupiter offrira aux observateurs cet aspect très rare de ne pas être accom- pagné de satellites. Ce jour-là, pour Paris et la France, Jupiter se lèvera après minuit. Le phénomène sera donc invisible pour nous et pour l’Europe entière. Il sera observable en Asie et en Océanie. Les lecteurs de la Revue qui habitent l'Inde, l’Indo- Chine, Java, la Chine, le Japon, l'Australie seront bien inspirés d'observer ce rare phénomène. Une petite Fig. 1. — Disparition des satellites de Jupiter le 3 octobre 1907, de 19 h.56 m. à 20 h. 6 m. lunette suffira. Nous recevrons avec plaisirleurs obser= valtions. La même combinaison s’est produite le 21 mars 1874: A l'Observatoire Amsherst (Etats-Unis), on a observé la disparition des quatre satellites pendant près de deux heures. Voici les conditions de l'observation (temps moyen astronomique de Paris) : ; Satellite 1. Eclipse commt à 1916. Emersion à 211332, — II. Passage de 18h49m à 21h36m. _ JIl. Immersion à 18bäm,, Emersion à 211302. _ JV. Immersion à 18h44». Emersion à 21h72. Par conséquent, disparition des quatresatellites de 49h 160 à 21h7m, heure moyenne — 20! 11" du 21 mars, ou le 22 mars à 82 {1% du matin. M. Flammarion a conclu pour cette curieuse combi= naison à la période : 1907,7538 — 1874, 2186 — 33 ans 3352 ou 33 ans 195 jours. Cette période comprend : ; \ 6.923 révolutions duler satellite. A 3.446 — Ie — é srhele — Ile — 131 = IVe = x attendre au retour du même Nous pouvons nous { 1941,289, c'est-à-dire pour phénomène pour la date CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 049 le 46 avril 1941, sauf la correction héliocentrique. M. Flammarion à observé un phénomène analogue à son Observatoire de Juvisy, le 15 juillet 1891, à 10 heures du soir. Ce jour-là, Jupiter, en se dégageant à son lever des brumes de l'horizon, s’est montré sans satel- lites, à l'exception du I® qui lui était presque contigu à l'ouest. Les trois autres étaient invisibles, le Ier et le IVe passaient devant le disque et le Ie passait derrière. Le III venait de traverser la planète et était sorti du disque à 8h 2%, d'après le calcul. Lever de Jupiter à 10h 8; première observation utile à 10h 35m, Dans cette soirée du 15 juillet 1891, des quatre satellites de Jupiter, trois ont passé devant le disque de la planète et l’autre derrière aux heures suivantes : IIIe. Passage de 4h44m à Sh2m, Ile. Eclipse à 6h6m, Emersion à 11n9m, Ier, Passage de 10h13m à 12h31m, IVe. Passage de 10h34m à 14h10m. Le Ie satellite est sorti du disque à l'instant indiqué par le calcul, juste dans le prolongement du bord infé- rieur de la bande équatoriale boréale. Le IHI° s'éloi- gnait du disque, un peu au-dessus du prolongement du bord supérieur de la bande équatoriale australe. Le IVe passait sur la région australe de Jupiter et se déta- chait de cette région assez claire, comme un petit disque sombre, aussi foncé que les parties les plus foncées des bandes équatoriales, et que l’on aurait pu prendre facilement pour l'ombre d'un satellite. Ce petit disque était légèrement allongé dans le sens ver- . tical. On remarquait au-dessus de lui, sur la planète, un - nuage gris moins sombre que ce satellite, et que le mouvement de rotation de la planète entrainait un peu moins rapidement que le mouvement du satellite. Ce ton du satellite, plus foncé que la surface atmosphé- rique nuageuse de Jupiter, a persisté jusqu'au méri- dien central et pendant toute la durée du passage. Le méridien central à été traversé à 12h 22%, Cette obser- vation confirme la conclusion, déjà basée sur des obser- vations antérieures, que la surface du IVe satellite de Jupiter est très sombre. De ces quatre petits globes, c'est celui dont la surface réfléchit le moins la lumictre solaire. Le Ier satellite avait sans doute le même éclat que la zone de la planète devant laquelle il est passé, car l'observateur n'a jamais été sûr de le bien reconnaitre. Cette combinaison du 15 juillet 1891 n'est pas la même que celle de cette année et de 1874. Au lieu du 11e satellite passant devant Jupiter et des trois autres passant derrière, le 11° passait derrière et les trois autres passaient devant. Elle s'était produite le 21 août 1867, plus complètement qu'en 1891, car tous les satel- lites ont été quelque temps ensemble devant ou der- rière le disque, et la disparition totale a duré 4h 45®, le 2 août 1867, de 10h 13% à 4140 58m du soir. M. Flam- marion en conclut donc pour Fintervalle entre les deux dates : a se ê 23 ans 897 ou 23 ans 328 jours. Cette période comprend 523 révolutions du IVe satel- Jite, 1.220 du IIIe, 2.458 du [Ie et 4.934 du 1°". (L'angle des rayons vecteurs de Jupiter et de la Terre peut ame- ner une obliquité qui empêche la disparition d'être simultanée pour l'observateur terrestre.) Nous pouvons donc nous attendre à voir le phénomène se reproduire le 8 juin 1915. Cette disposition des satellites de Jupiter s'était également présentée, avec disparition (totale, le 27 septembre 1843, et nous avons là une confir- mation de la période qui vient d'être déduite, attendu que 1867,638 — 1843,740 — 23,898. La disparition apparente des satellites de Jupiter peut s'opérer encore par une autre combinaison. Le le satellite peut passer derrière la planète, et les trois autres devant. C'est ce qui est arrivé le 15 octobre 1883. Le II° peut passer devant et les trois autres derrière (23 mars 1874). Mais les quatre satellites ne peuvent jamais être à la fois en conjonction ou en opposition. Par une autre combinaison encore, une disparition analogue s’est produite le 20 octobre 1895, de 228 28n à 22h 29m {t. m. astr.). L'époque est donc : 1895, 8020. Voici la disposition : Ier. Eclipse commençant à 18155m, Emersion à 22h99m, Ile. Passage commencant à 220: finissant à Oh55m le 94, IIIe. Eclipse commencant à 20h49m; finissant à Ob{m le 21. IVe. Passage commençant à 22h2$m;: finissant à 258 Je 21. donc : les I‘ et IIIe derrière Jupiter, et les II° et IVe devant. } La disparition complète des satellites de Jupiter a été observée aux dates suivantes : 45 Mars 1611, par Galilée. 12 Novembre 1681, par Molyneux. 23 Mai 1802, par William Herschel. 1% Avril 1826, par Wallis. 21 Septembre 1843, par Griesbach. 21 Août 1867, 22 Mars 1874, ë 13 Octobre 1883. par divers observateurs. 20 Octobre 1895, Il n’y a pas bien longtemps encore, on croyait ce phénomène très rare, et lamiral Smyth, dans son remarquable ouvrage Cycle of Celestial Objects (1844), citant la seule observation de Molyneux, ajou- tait que cette conjonction ne se reproduirait que dans trois mille billions d'années ! L'événement est plus fréquent, mais n’en est pas moins intéressant. $ 3. — Art de l’Ingénieur La protection des théâtres contre l’in- eendie.— La question de la sécurité dans les théâtres est toujours des plus intéressantes et des moins résolues, malgré sa très grande importance pour presque chacun de nous. À ce sujet, M. G. Richard a signalé, à l’une des dernières séances de la Société d'Éncouragement pour l'Industrie nationale, un remarquable travail qui vient d’être publié par M. J.-E. Freeman dans le 27 vo- lume (1906) des Transactions’ de l'American Society of Mechanical Engineers. Les incendies de théâtres sont bien plus fréquents qu'on ne le croit en général; d'après M. O0. Sachs, on en aurait, au siècle dernier, compté environ une centaine de réelle importance, dont un certain nombre, un tiers environ, ont été de véritables désastres. Tel est le cas de l'incendie de l'Iroquois Theatre, de Chicago, en 1903, qui fit plus de 600 victimes. C’est cet incendie qui fut le point de départ des études de M. Freeman, dont voici un très court aperçu. L'incendie du théâtre de Chicago fut provoqué par la chute d’un charbon de lampe électrique sur les décors; en cinq minutes, la scène, où les décors comprenaient près d'un hectare de toiles et 3.000 mètres carrés de gaze, fut entièrement en feu. Le toit de la scène était fermé; on ouvrit, au fond, un jour sur le dehors, par lequel il se précipita un courant d'air qui abattit le rideau d'amiante et projeta dans la salle un torrent de fumée et de gaz qui ne brûüla pas, mais qui asphyxia presque instantanément les 600 victimes, dont 70 °/, furent tuées dans les galeries supérieures, et 7 seulement au parterre, parce que la fumée était lancée vers le haut des galeries. D'après M. Freeman, il ne serait, très probablement, rien arrivé de bien grave si l’on avait pu ouvrir immédiatement au-dessus. de la scène un très large jour, d’une section égale au dixième environ de la surface de son plancher, par où se serait fait un appel d'air très énergique, comme dans une immense cheminée, sans plus de fumée dans la salle que devant une véritable cheminée. Il recommande donc très vive- ment l'établissement de pareïls jours ou panneaux de 344 ürage, s'ouvrant automatiquement dès que leurs sup- ports, des plombs fusibles par exemple, atteignent une température de 60° environ. En été, ces jours seraient naturellement ouverts pour la ventilation. La justesse de ce conseil est évidente; le tout est de trouver un système qui ne rate pas au moment psychologique; l’auteur en propose un, très ingénieux et simple, et dont il garantit l'efficacité pourvu qu'on l'essaie chaque jour. Il resterait peut-être à trouver un moyen empé- chant, automatiquement si possible, l'administration du théâtre d'oublier cet essai quotidien, ce qui n'empêche pas les vantaux de M. Freeman d’être, sous cette réserve, très intéressants à signaler à qui de droit. A côté de ces vantaux, M. Freeman recommande, très instamment aussi, l'emploi, partout excepté dans la salle même, d'extincteurs arroseurs automatiques. Ces appareils, peu employés encore dans les théâtres, en raison sans doute de leur prix élevé d'environ 25 francs par bouche, donnent, dans les filatures notamment, d'excellents résultats. Leur effet est très souvent rapide et sûr, et il n'y à guère à craindre de dégâts par suite d'ouverture intempestive des bouches. On compte, aux Etats-Unis, dans 2.000 usines, environ 3 millions de ces bouches, avec, en moyenne, une cin- quantaine de fuites par an, soil d’une bouche sur 60.000, c'est-à-dire pratiquement rien. Et, d'ailleurs, les compagnies d'assurance garantiraient volontiers les dégâts insignifiants de ces fuites. Parmi les théâtres d'Europe qui emploient de ces arroseurs, on peut citer celui de Bayreuth, qui en compte 666, et n'en à jamais été importuné. Quant aux extüincteurs en bâtons de poudres sèches (bicarhonate de soude) et aux diverses grenades, qui ne renferment, sous les dénominations les plus igni- vores, que de l’eau salée avec 5°/, environ de sel ammo- niac ou de chlorure de calcium, M. Freeman les consi- dère, à juste titre semble-t-il, comme de simples bluffs. Le rideau séparant la salle de la scène doit être en tôle d'acier garnie d'amiante vers la scène, et non en amiante qui perd presque immédiatement sa ténacité au feu, et laisse voir le feu, cause de panique. L'ignifugation des décors : tissus et gazes, par le meilleur des ignifuges, le phosphate d'ammoniaque, est considérée, par M. Freeman, comme pratiquement irréalisable et, d’ailleurs, comme peu efficace; dès que le feu est assez intense pour présenter un danger réel, ces étoffes ignifugées s'enflamment tout d’un coup très vivement en émettant des gaz particulièrement asphy- xiants; l’auteur décrit, à ce sujet, des expériences très variées et nombreuses qui paraissent coneluantes. Son avis n'est guère plus favorable en ce qui concerne l'igni- fugation des bois, qui ne sont jamais pénétrés que très superticiellement par les substances ignifuges. Toute cette partie du mémoire de M. Freeman est particuliè- rement intéressante el pleine.de decuments nouveaux. Le Mémoire de M. Freeman se termine par des con- sidérations très intéressantes sur les dégagements : échelles, escaliers, couloirs, qu'il faut faire, propor- tionnellement, au moins quatre fois plus grands aux zaleries supérieures, presque toujours immédiatement attaquées par les fumées et les flammes. 11 faut, en outre, toujours réserver au théâtre au moins deux issues, sur deux rues différentes, pour en permettre l'évacualion par lune des façades en cas de feu sur l'autre ou en face de l'autre, dans la rue. M. Freeman ‘ donne, sur les dispositions à prendre pour ces déga- gements el sorties, nombre de conseils et de dessins des plus remarquables et intéressants pour les archi- tecles, mais sans espérer pouvoir triompher du princi- pal facteur de la plupart des désastres, l'irrésistible affolement des paniques. $ 4. — Physique L'unité des longueurs d’ondes lumineuses. — L'adoption, par Angstrôm, du dix-millième de micron comme unité des longueurs d'onde dansle spectre était, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE pour deux raisons, largement motivée à l'époque des mesures classiques du grand spectroscopiste suédois. D'une part, la précision atteinte alors était telle que les chiffres certains du résultat pouvaient être contenus dans un nombre entier; d'autre part, le micron n'était pas encore d'un emploiassez courant en métrologie pour qu'il y eût lieu de tenir compte du fait que l'unité parti- culière adoptée en constituait un sous-multiple peu pratique. Mais, depuis lors, le micron est devenu l'unité des petites longueurs, et les mesures spec- trales, singulièrement perfectionnées, dépassent beau- coup en certitude l'unité d'Angstrom. L'emploi des superbes réseaux de Rowland à permis à l’auteur de donner des valeurs relatives des longueurs d'ondes exactes à moins de un cent-millième, et s'il est vrai que leurs valeurs absolues étaient erronées de un trente-millième environ, au moins y avait-il déjà avantage, pour les comparaisons des longueurs d'onde entre elles, à conserver une ou deux décimales supé- rieures. Plus tard, l'emploi du comparateur interfé- rentiel de M. Michelson a permis de garantir sûrement le millionième, et enfin les récentes mesures de MM. Benoit, Fabry et Perot peuvent prétendre fixer, à une unité près, le chiffre du dix-millionième. Hätons-nous de dire que cette précision ne saurait être sensiblement dépassée, au moins en valeur absolue, parce que c'est celle avec laquelle le mètre prototype définit pratique- ment l'unité de longueur. Dans ces conditions, les raisons qui avaient engagé Angstrom à choisir une unité attribuant quatre chitfres significatifs à la valeur des longueurs d'onde lumineuses n'existent plus. Si l'on voulait conserver, comme il l'avait fait, des nombres entiers, l'unité devrait être prise mille fois plus petite, et les nombres seraient de sept chiffres; mais, pour toutes sortes de raisons, une telle proposition ne viendra à l'esprit de personne. Si, dans l'expression des longueurs d'onde, aucune: habitude n'avait été prise, il estabsolument certain que l'hésitation ne serait permise qu'entre deux unités: le micron ou le millième de micron; le micron, parce qu'il est d’un usage courant, et parce que, grâce à un heureux hasard, le premier chiffre signiticatif des longueurs d'onde usuelles s'inscrirait immédiatement après la virgule; le millième de micron, parce que la virgule couperait le nombre après les trois premiers. chiffres, le divisant ainsi conformément aux usages de la numération. Ces deux manières d'écrire les longueurs d'onde sont effectivement très répandues, et pourraient, sans aucun inconvénient, subsister côte à côte. Pour les indications approximatives, dans lesquelles on se limite à un petit nombre de chiffres, l'évaluation en fonction du micron est à la fois pratique et très usitée. Pour les expressions plus exactes, où l’on donne tous les chiffres connus, le millième de micron est tout indiqué. Ainsi, la longueur d'onde du rouge du cadmium s'écrirait 0,643 ou GAJUE SATO. Entre ces deux données ne peut exister aucune am— biguité, même si l'on oublie d'inscrire l'unité. Il n'en est pas de même dans l'emploi, concurremment au mil- lième de micron, de l'unité d'Angstrüm, qui, étant seulement dix fois plus petite, peut conduire à quelque confusion. Les mesures spectroscopiques les plus ordi- naires couvrent, en effet, aujourd'hui un intervalle de longuéurs d'onde dont le rapport est supérieur à 10. Un usage très répandu a consacré, pour la grande majorité des physiciens, l'emploi du micron et du millième de micron en spectroscopie. C'est, notamment, en fonction de ces deux unités que sont exprimées les longueurs d'onde dans le /?ecuerl des données nume- riques publiées par la Société française de Physique; et, bien que l'unité ait été omise en tète de la plupart 1 Je conserve ici l’abréviation uy, bien qu'elle soit défee- tueuse, et convienne logiquement au millionième de micron. Elle est malheureusement d'un us snéral, auquel je me conforme. PT CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 345 «les tableaux, il n'est pas un physicien qui puisse s'y tromper. Les résultats des recherches déjà classiques des physiciens allemands, celles de M. Lummer et de ses collaborateurs, celles de M. Rubens, sont tous exprimés en fonction du micron, qui est aussi l'unité usuelle dans l'expression de la loi de Wien. Si donc l'usage était seul en cause, indépendamment des bonnes raisons précédemment indiquées, aucun physicien attaché aux études générales ne proposerait aujourd'hui d'autre unité principale que le micron et d'autre unité secon- daire que son millième. Seuls, au surplus, un certain nombre de spectrosco- pistes sont, par une vieille habitude, restés fidèles à l'unité d’Angstrom. Non point tous cependant, et l’on peut citer, comme notable exception, Robert Thalén, qui fut le collabora- teur et l'ami d'Angstrôm; il à rapporté, en effet, au micron les résultats de toutes ses dernières détermina- tions, et n'emploie l'unité d'Angstrôm que lorsqu'il reproduit ses résultats. La question de pieuse tradition envers un des maîtres de la spectroscopie pourrait sembler ainsi tranchée. Elle l’est plus définitivement encore par le fait que, dans ses.beaux travaux d’éner- gétique du spectre, M. Knut Angstrüm a aussi employé le micron comme unité. L'adoption d'une seule unité pour le spectre viendra prochainement en discussion au sein du Congrès des études solaires, et plusieurs des membres influents de cette assemblée semblent favorables à l'unité d’Angstrüm. L'un de leurs arguments est basé sur l'affirmation que le Congrès de Physique de 1900 aurait sanctionné cette unité. Il est donc important de ra- mener les faits à leur juste portée. Il avait été constitué, effectivement, au sein du . Congrès, une Commission chargée de délibérer sur quelques questions trop spéciales pour pouvoir être utilement discutées dans des séances de sections. Cette Commission se réunit une seule fois, et émit, avec un peu de hâte, quelques vœux plus ou moins heureux ou malheureux, sur lesquels il fut décidé que, pour ne pas engager l'avenir sur des questions au sujet des- quelles on était encore très divisé, le Congrès ne voterait pas en assemblée générale. L'une des ques- tions mises à l’ordre du jour était précisément l'unité «lu spectre, et nous étions en pleine discussion lorsque M. Langley, venu tardivement à la séance, et mis rapi- à Ë È que l’on puisse, î ù v 7 ‘0 v — SACS 3 8 = °s “ ME Le STE ; quel que soit l'o- ü ET, à . h CN ù vu mn o E : 9 CMRCUES EN RSR RU EUR CR = pérateur, compa- ù DM TRE NC CONO RC RS ECS LR ë SU CLIS GS TOR TTC BC EC J rer les chiffres re treme relpees similaires. Il est 36 66 18 57 30 33 32 ; évident que la valeur de la moyenne géné- rale donnée dé- pend en grande partie du nombre des résultats d'où elle est déduite. Aussi, pour dres- ser les tables pré- sentées au Con- grès, tables qui, entre parenthèses donnent la com- position de 300 est pas moins im- posée par l'état aliments diffé- rents d'origine de nos connais- sances el surtout par l’absolue né- cessité de rester simple. En met- tant à part cer- tains principes confondus sous des dénominations trop générales, on ne fait que compliquer encore ce qui est déjà très complexe pour un profane. Or, comme je l'ai déjà dit, le côté pratique passe ici avant les questions de science pure. Les tables alimentaires doivent donc donner en premier lieu la composition chimique de la partie comestible de l'aliment, puis, afin de se conformer à la réalité, celle de l'aliment considéré au moment de son achat, c'est-à-dire avec ses déchets naturels quand il en comporte. Ce n'est pas tout. À côté de __—_— — A Fig. 3.— Courbes de comparaison de la teneur centésimale des différents morceaux du bœuf (partie comestible) en principes nutritifs digestibles. Courbe de la teneur centésimale des aliments en eau. L'échelle de la courbe des cendres (courbe inférieure) est différente de celle des autres courbes. animale et de 200 aliments d'’ori- gine végétale, j'ai profilé de tous les documents déjà publiés ou iné- dits qu'il m'a été possible de me procurer. L'ouvrage déjà cité de Künig, les der- nières publications d'Atwater sur la composition de près de 4.500 aliments d'origine américaine, les travaux de M. Balland, pharmacien principal de l’armée, à qui l’on doit l'étude complète et détaillée de plus de 200 substances alimentaires, m'ont été d'un grand secours. Les chiffres que j'ai pré- sentés résument 3.700 analyses de produits d'ori- gine animale et 7.500 d'aliments d'origine végétale. Ce sont là, à ma connaissance, les moyennes les plus générales publiées jusqu'à ce jour. Je sais mat. mat. mat. = azotées, grasses. minérales. 364 J. ALQUIER — LES ALIMENTS DE L'HOMME ————————————————_————…—…—……——…. ….—.—...—..".—.). —_—__—_ _ bien que certains, par principe, leur refusent malgré cela toute valeur. Les aliments de compo- silion homogène, objecte-t-on, sont très rares. On n'ingère pas de suite deux bouchées du même morceau de viande ou du même plat de légume qui se ressemblent et représentent, à poids égal, le même apport nutrilif. Les écarts de composition, souvent considérables, enregistrés par les divers laboraloires, en sont, ajoute-t-on, la meilleure preuve. Pourtant, et je me suis déjà longuement expliqué à ce sujet en parlant des déchets, lors- que l’on a en digestibililé des principaux composants nulritifs des aliments, et voici les coefficients moyens aux- quels on est arrivé pour le régime mixte : Sur 100 grammes de principes ingérés, l'homme soumis au régime mixte en digère : Dans les aliments d'origine végétale 84 grammes. 90 97 Dans les aliments d'origine animale Matières azotées. . . . 97 grammes. L 95 98 grasses. — hydrocarbonées. La comparaison de ces chiffres n'est pas sans intérêt : elle dé- mains, comme dans le cas pré- montre que les aliments d'ori- gine animale sont plusdiges- Choux frise Choux Fleur Artichauë Chicoree frisée Laïtue en ce qui con- + cerne la ma- E sent, un très FACE : î S grand nombre RS SNS See PL = d'analyses du SR Se ER ee même aliment SR An SPEARS, ayant porté sur DIS Ùù se 7e des échantil- lons de prove- nances et de compositions très diverses, en prenant la moyenne arith- métique des nombreux ré- sultats obtenus séparément, on arrive à un chif- tière azotée, que les ali- ments d'’ori- gine végétale. Ces derniers laissent, chez l'homme, de forts résidus excrémentiels , par suite du peu de digesti- tibles, surtout. fre unique, très lulose,desprin- acceptable et cipes ligneux voisin de la 30 L congénères el moyenne telle Ne. des albuminoï- qu'elle doit T2 des,inelusdans exister réelle- les cellules ment dans la ou membranes. nature. C’est cellulosiques ainsi que les peu altaqua- tables présen- blesparlessues tées au Congrès indiquent très vraisemblable- 4re échelle. mentlacompo- 2 échelle. Jon dE sitionchimique 3e échelle, } 277 = générale que l’onesten droit, jusqu'à nouvel ordre, d'attribuer aux substances alimentaires quand on se livre à des calculs ou à des enquêtes portant sur de grandes masses d'aliments. Quant à la teneur centésimale des aliments en principes ulilisables digérés, on peut la déduire, au moyen de coefficients appropriés, des données directement fournies par l'analyse chimique. On a, en effet, beaucoup éludié de tous les côtés la Fig. 4. — Courbes de comparaison de la teneur centésimale de divers légumes et salades (partie comestible, en principes nutritifs digestibles. Courbe de la teneur centésimale des aliments en eau. FEOpfE ANS Len digestifs. Il ne faut cependant pas interpréter celte remarque comme une al- laque directe mat. azotées. mat. hydrocarbonées. mat. grasses. mat. minérales (cendres). contre les ali- ments d'origine végétale, car si, d’une part, les substances cellulosiques n’apportent que peu de principes alimentaires à l'homme, dont le tube diges- tif n’estpas organisé pour les digérer, leur ingestion ennotable quantitéest, d'autre part, néanmoinsutile. La cellulose constitue le seul principe dont les ani- maux disposent pour donner à la ration un volume suffisant et entretenir les contractions de l'intestin. bilité de la cel- PAUL DUTOIT — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIQUE 365 Un point reste à éclaircir, avant de clore les explications nécessaires à la compréhension géné- rale des tables alimentaires. Comme ces dernières concernent le plus souvent des aliments crus, on peut, non sans quelque hésitalion, se demander si elles renseignent suffisamment sur la valeur nutri- live des aliments cuits. La détermination de l'apport alimentaire doit se faire dans l'assiette et non pas au marché. Il est évident que la composi- tion centésimale et la valeur nutritive varient selon que l'aliment est cru ou cuit. Mais cela n'empêche pas que l’on retrouve, après cuisson, les principes qui préexistaient dans l'aliment mis à cuire. La diminution de poids, bien connue de tout le monde, des aliments bouillis, cuits à la poële ou rôlis, a pour cause presque unique la vaporisalion de l’eau sous l'influence de la chaleur. Quand l'eau et le jus dans lesquels a cuit l'aliment ne sont pas perdus, on retrouve dans l'assiette la même quantité de matières azolées, grasses et hydrocarbonées que dans l'aliment avant cuisson. Les figures 3 et 4 donnent, telles qu'elles figu- rent dans mes tables, les teneurs en principes nutritifs digestibles de la partie comestible des différents morceaux de la viande de bœuf, puis des différents légumes et salades. Comme nous avons précédemment indiqué les déchets pour cent de tous ces aliments, il est facile, en rapprochant les chiffres des graphiques 1 et 3 d'une part, puis 2 et 4 d'autre part, d'établir la teneur en principes digestibles de ces mêmes aliments considérés tels qu'achetés, c'est-à-dire avec leurs déchets. Dans une deuxième partie, nous étudierons les ap- plications des principes que nous venons de poser. J. Alquier, Ingénieur-agronome, Chimiste-expert près les Tribunaux, Attaché au Laboratoire de recherches alimentaires de la Cie générale des Voitures à Paris. REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIQUE Peu de sciences ont un objet aussi étendu et, par suite, aussi peu défini que la Physico-Chimie; cela présente, au point de vue de la classification dans les répertoires de Chimie, des difficullés qui vont grandissant chaque année. Dans les débuts, on convenait d'y faire entrer l'étude des relations stoechiométriques, l'application des principes de Thermodynamique aux réactions et aux équilibres chimiques et, d'une manière générale, tous les pro- blèmes se rattachant à l'énergie mise en jeu dans la transformation chimique. Aujourd'hui que les méthodes et les théories physico-chimiques se sont imposées, non seulement aux physiciens el aux chimistes, mais aux physiologisles,aux biologistes, aux géologues, ele., si l'on voulait classer sous le titre « Physico-Chimie » tous les travaux dans les- quels ces méthodeset ces théories sont appliquées, comme cela se faisait il y a dix ans, nos revues déborderaient dans les autres sciences ; aussi l’arbi- traire le plus absolu règne-t-il généralement. Les journaux consacrés aux analyses des travaux de Chimie adoptent chacun une classification diffé- rente. Il est fréquent qu'un même mémoire soit placé sous la rubrique « Physique» dans le Cen- tralblatt de Rudolphi, sous la rubrique «Chimie inorganique » dans le Centralhlatt de Berlin ou dans le Bulletin de Paris, .et sous la rubrique « Chimie physique » dans le Journal of the Chemical Society. Ce dernier recueil semble avoir adopté le système le plus rationnel. Les travaux dans lesquels les méthodes physico-chimiques sont appliquées pour résoudre un problème quelconque de Chimie (inor- ganique, organique, analytique, physiologique, etc.) rentrent dans ces dernières disciplines, et la Phy- sico-Chimie ne comprend plus que les relations nouvelles et l'étude de ces grands domaines, à peine défrichés, de l'ionisation des gaz, de la ra- dio-aclivité et des fausses solutions. Pour le mo- ment, ces derniers sujets d'étude relèvent plutôt de la Physique mathématique : la Stoechiométrie ne s'en est pas encore emparée. Ainsi défini, le champ dela Physico-Chimie se restreint considérablement. Cette question de classification, qui devra être tranchée dans un avenir prochain, car elle com- plique singulièrement les recherches bibliogra- phiques, ne pouvait être passée sous silence au début d'une revue des travaux de Chimie physique en 1906. Nous ajouterons encore que notre objectif a élé surtout de donner, sous une forme très abrégée, un aperçu des principaux résultats expé- rimentaux acquis au cours de l’année dernière, en laissant de côté certains chapitres tels que la théorie moléculaire des fluides, la radio-activité, les fausses solutions, l’ionisation des gaz, qui ont déjà fait et feront encore l’objet de revues spéciales dans ce journal”. 1 Pour la bibliographie, nous renvoyons à l'Index des Périodiques publié par le Journal de Chimie physique, dont le classement par sujet et par ordre alphabétique de noms d'auteurs facilite bien les recherches. 366 PAUL DUTOIT — REVUE ANNUELLE I. — STOECHIOMÉTRIE. S 1. — Poids atomiques. L'année 1906 marquera dans le domaine des poids atomiques. Les méthodes physico-chimiques de détermination des poids atomiques, basées sur « corrigées » des gaz, ont conduit à modifier la valeur indiquée par Stas pour l'azote. M. Ph.-A. Guye a mis en évidence ce fait que les poids atomiques les plus sûrs sont actuellement ceux qui sont reliés directement à O, C et Az. Le poids atomique de l'argent peut être calculé aussi de plusieurs manières: il devra être abaissé de 107,93 à 107,89, ce qui entrainera une correction du même ordre de grandeur sur tous les poids alo- miques reliés à l'argent, c'est-à-dire sur la grande majorité de ceux-ci. Les principales déterminations de poids atomi- ques effectuées en 1906 sont indiquées dans le tableau suivant : les densités ÉLÉMENTS POIDS ATOMIQUES BASES OBSERVATEURS Sodium. AD 107, 93 Cobalt | Richards Chlore * \ et collabo- Strontium. . » HÉREUUEE Potassium. . CERTES lode Ag — 107,9? / Baxter Brome » > et collabo- Manganèse . » \ rateurs. Cadmium . » lode O—146 Gallo. Terbium OBS 2 IDG Urbain. Dysprosium. » » Urbain. Tellure . O—16 Az—1#4;01 Norris. Bismuth u Mebler. Tantale . 181,0 Hinrichsen et Sahlbom. $S 2. — Pression osmotique. Une contribution importante à la détermination des poids moléculaires par les méthodes osmotiques est apportée par Morse et Frazer. Ces observateurs continuent leurs recherches sur la détermination expérimentale des pressions osmotiques de solu- tions aqueuses de sucre avec la membrane de ferro- cyanure de cuivre. Les précautions minutieuses apportées dans toutes les parties de ces expériences rendent celles-ci tout à fait remarquables. Il ressort des nouvelles valeurs que la pression osmotique d'une solution de sucre, même concentrée (jusqu’à 25 atmosphères), coïncide exactement avec la pres- sion gazeuse qu'exercerait un gaz parfait à la même concentration moléculaire,àla condition d'exprimer cette dernière en molécules-grammes par unité de poids de dissolvant. Avec cette notation, on obtient une concordance parfaite entre l'abaissement cryos- copique du sucre dans l’eau, observé et calculé. Berkeley et Hartley ont annoncé récemment qu'ils avaient poursuivi ces mesures de pressions osmo- | tiques jusqu'à 135 atmosphères et vérifié, dans ces DE CHIMIE PHYSIQUE conditions, les formules des gaz parfaits pour le calcul de ces pressions. Les différentes théories concernant l'osmose ont: aussi reçu l'appoint de nouvelles expériences: Battelli et Stefanini confirment partiellement la théorie de Moore, Jäger et Traube, d'après laquelle ce serait la différence des tensions superficielles de deux liquides ‘solutions) séparés par une membrane semi-perméable qui déterminerait le sens et la vitesse de l'osmose. Le passage du courant ten- drait à égaliser les tensions superficielles des deux côlés de la membrane. L'influence spécifique de la membrane a été éludiée par Kahlenberg, qui vérifie et complète les observations de Raoult et G. Flusin: à savoir que le courant passe du liquide qui imbibe le mieux lamembrane à celui qui l'imbibe le moins: Il y a toujours un courant en sens inverse, qui peut cependant être très faible. Dans ce cas, la mem- brane est dite semi-perméable. Le même observa- teur cile des cas où, non seulement la pression osmotique, mais même la direction de l’osmose varie par un changement de membrane. Il déter- ; mine la pression osmotique du sucre de canne et de quelques sels dans la pyridine, — le caoutchouc vulcanisé joue dans ces cas le rôle d’un semi-per-" méable parfait, — el constate que la loi des gaz ne s'applique pas, même d'une manière approchée. D'après cet observateur, le courant osmotique est déterminé par l'attraction réciproque @es deux liquides et par l'attraction entre ceux-ei et la mem- brane. Dans le même ordre de faits, Barlow constate qu'une membrane peut être perméable à une sub- stance ou non, suivant la concentralion de celle-ci, … ou suivant le solvant. È Hudson remarque, après lord Kelvin et Helett, que l'augmentation de la pression extérieure agis- sant sur un liquide provoque un faible accroisse-. ment de la tension de vapeur, el vice-versa. Il vérifie n que la diminution de pression nécessaire pour abaisser la tension d'un dissolvant de pà p' est pré- cisément égale à la pression osmotique que possè- derait une solution dont la tension de vapeur serait p'. Tout se passe comme si, dans la solulion, le dis- … solvant était sous une pression interne négative tendant à le dilater. ‘ L'incertitude qui règne sur la nature des pres- sions osmotiques diminue l'intérêt des nombreux Mémoires traitant de leur calcul. Kohnstamm, Speus, Bancroft, entre autres, s'en sont occupés. Le premier établit qu'il n'entre dans la formule que des grandeurs thermiques, tandis que le dernier. y fait figurer la chaleur de dilution. Ce désac-. cord entre les formules existe depuis bien des années. Da PAUL DUTOIT — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIQUE 907 $ 3. — Solutions. L'existence, dans les solutions, de combinaisons moléculaires — ou ioniques — entre le corps dissous et le dissolvant, de «solvates » pour em- ployer un néologisme heureux, est très générale- ‘ment admise. Les méthodes d'investigation ne sont cependant pas toutes concluantes. Jones accumule un grand nombre d'observations sur les abaisse- ments cryoscopiques et les élévations ébulliosco- piques de solutions concentrées de sels, — et de quelques composés organiques, — dans l'eau, les alcools méthylique et éthylique. Il calcule la com- position des solvates d'après les anomalies cryos- copiques et ébullioscopiques; leur complexité di- minue lorsque la température s'élève. Les ions peuvent aussi former des combinaisons: ceux qui . possèdent le plus grand pouvoir hydratant ont le plus grand coefficient de température de la conduc- tivité électrique. Dans certains cas, la teneur en dissolvant de ces solvates diminuerait avec la dilution, ce qui, sui- vant une remarque de Billz, est contraire à la loi des masses. C. Lewis explique aussi la variation de couleur avec la dilution de quelques solutions aqueuses (CoCl, CaCF, elc.) par une variation de l'hydratation ; le nombre de molécules d’eau com- binées est plus pelit dans Jes solutions concentrées. Les expériences de Lobry de Bruyn sur la combi- naison des ions et du dissolvant ont élé reprises et développées par Morgan et Kanolt. Buchbück, par une méthode presque semblable, constate que, pen- dant l'électrolyse de solutions diluées de HCI, l'ion Cl migre avec 4 H°0 et et l'ion H' avec 4 HO. S'appuyant sur ces expériences et sur diverses hypothèses, Bonsfield calcule le rayon, à diverses dilutions, d'un ion combiné avec nH°0. Sutherland développe sa théorie d'après laquelle les cations transformeraient (H°O) en (H°0), tandis que les anions provoqueraient la transformation inverse, La relation qui existe entre la viscosité 7 d'une solution et sa conductibilité À a provoqué de nou- velles recherches de la part de Massoulier, de Jones et ses collaborateurs. Le produit xà est générale- ment constant pour un même dissolvant et un même électrolyte. Il ne l’est pas quand ces condi- tions ne sont pas remplies. D'après Walden, au contraire, le produil #1. est constant pour tous les dissolvants. $S 4. — Propriétés additives et constitutives. L'étude des propriétés additives et constitutives est momentanément délaissée. À citer cependant la valeur d'un nouveau coefficient de réfraction alomique (— 0——2,73 pour la raie D), donnée | par Homfray. Les réfraclions et dispersions mole- culaires (RM et AM) d'un grand nombre de compo- sés, principalement acétyléniques, ont été déter- minées par Moureu. Cet auteur a constaté des RM et AM anormales chez tous les corps de la série acéty- lénique. Il semble que, dans celle série, les RM ne constiluent pas une propriélé additive; la valeur expérimentale dépasse d'autant la RM calculée : 1° qu'il y a plus de radicaux électronégatifs dans la molécule; 2° que ceux-ci sont plus près d’une, ou surtout de deux triples liaisons; 3° que le dérivé acétylénique appartient à la série aromatique. Hess vérifie la proportionnalilé qui existe, dans les solutions, entre les écarts à la règle des mé- langes appliquée aux densités et aux indices de réfraction. Les {ensions superficielles et leur application à la détermination despoids moléculaires des liquides par la méthode d’Eütvos, Ramsay et Schields ont fait l’objet de recherches de Carrara (liquides orga- niques), Zemplen (solutions d'électrolytes), Grun- mach (gaz liquéfiés); d'après ce dernier auteur, l'azote et l'oxygène seraient tous deux polymérisés à l'état liquide; il en serait de même de HCI et PH°, d'après Steele. Le pouvoir rotatoire et les relations entre cette propriélé et la constitution chimique ont suscité une vingtaine de travaux, surtout d'auteurs anglais. Thomas et H.-0. Jones ont entrepris à nouveau la vérification de la règle du produit d’asymétrie de Guye. Ils ont cherché des séries homologues dont aucun terme ne pût être polymérisé, et pour cela déterminé le pouvoir rotatoire des ions (CH*) (C°H° Az(C'H°)(R)' et (CH*)(C‘H°)Az(C'H‘CH')(R). Le produit d'asymétrie et le pouvoir rotaloire des séries homologues obtenues par le remplacement successif de R passent par un maximum sans qu'il y ait proportionnalité absolue entre les deux quan- tités. L'introduction d'une double liaison dans un des radicaux reliés au C asymétrique exalte le pouvoir rotatoire, surtout quand la double liaison est voisine du C asymétrique (Haller et March, Klages et Sautter) ; c'est un fait dont il faudra tenir compte pour une théorie complète du pouvoir ro- tatoire. Chez les corps actifs de la série aromatique, la substitution en position ortho a le plus grand effet, celle en para le plus petit, sur la variation du pou- voir rolatoire (J.-B. Cohen et Armes). Des consta- tations analogues avaient été failes, il y a quelques années, par Guye et Babel. D'après Winther,les variations du pouvoir rota- loire {+} avec la température sont, pour toutes les longueurs d'onde, proportionnelles aux variations du volume spécifique v; soit A(z) = KAv. Lorsque la constante K a la même valeur pour le corps pur 368 PAUL DUTOIT — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIQUE et pour ses solutions, cela indiquerait l'absence de combinaison ou de réaction en solution. Marckwald donne un second exemple d’un corps actif sans carbone asymétrique, au sens ancien du mot, mais contenant le groupe IFH | ———0; IH? | c'est la confirmation des idées de Pasteur, d'après lequel le pouvoir rotatoire ne dépend que de l'ab- sence d'éléments de symétrie dans l'édifice molé- culaire. Grossmann et ses collaborateurs continuent l'étude des variations de (x) avec la concentration, dans le cas de corps à très grand pouvoir rotatoire: ils expliquent l'allure des courbes par la dissocia- tion et l'hydrolyse. $ 9. — Formules empiriques. Le chapitre des formules empiriques, ou d'expé- rience, s’est enrichi de quelques relations nou- velles : L'une, de Wiebe, concerne le coefficient de dila- tation cubique a, soit : x) 213" Une autre, de Flavitzky, donne la relation entre le nombre de molécules N,, N,, des corps existant dans un cryohydrate, les abaissements des points de fusion f,, /.. de chacun des corps pris par rapport au point de fusion du cryohydrale, et les poids moléculaires M,, M,, des composants. La relation N4M, — N,/,M, permet de tirer des conclusions intéressantes sur la polymérisation des corps. La formule de Mills, L—{(at/3 = D'#) — Gans la- quelle L est la chaleur latente de vaporisation d'un liquide diminuée du travail extérieur, d et D les densités du liquide et de la vapeur saturée prises à la même température que L, — a été vérifiée pour dix nouvelles substances. aT?—$ (r — température de fusion, 8 IL. — CINÉTIQUE CHIMIQUE. SLI Réactions générales. Les travaux ont été moins nombreux en 1906 que les années précédentes, et le fait n’a rien que de nalurel: le plus grand nombre des réactions simples ou faciles à suivre analytiquement ont été étudiées, et l'on se heurte, dans les cas plus compliqués, à des difficultés expérimentales ou mathématiques qui restreignent le champ de re- cherche. Les réactions suecessit es, du type M ZM, ZM, conduisent à des équations différentielles impos- sibles à intégrer. Rakowski en a donné la résolution, ? î par approximation, pour quelques cas simples; il constate, après d’autres, que « cette partie de la Cinétique chimique finit dans un cul-de-sac mathé- malique ». De Lury donne également une méthode d'intégration de ces équations, par approximation et avec le secours du planimètre. Kaufler traite expérimentalement un cas particulier d'une réac- tion de ce type : la saponification par KOH de C'°H'(CAZz)". Comme c’est toujours le cas, la première réaction (saponification du premier CAz) s'effectue PSE — SO LE avec la vitesse la plus grande. L'équation est sim- plifiée lorsque l’un des corps (KOH) est en excès tel que les deux réactions sont pratiquement du premier ordre. La constante de vitesse calculée, toujours par approximation, a donné de bonnes valeurs. Bray discute des cas dans lesquels on peut ad- mettre la formation de « corps intermédiaires ». Lors de l'oxydation de l'ion l' par H°0*, K°S*0*, en HIO*, CrO’, etc., le corps intermédiaire est 10’, . dont le potentiel d'oxydation est plus faible que celui de 10°”. Dans la réduction de CI10* par I, Az0O”, Zn, etc., le corps intermédiaire est CIO”. La formation d'un corps intermédiaire instable, mais pouvant cependant être isolé, a été prouvée par Friend dans la réaction : H*O°+ K°S°0* — 92KHSO* + O?. Bredig continue l'étude de la cinétique des réac-: tions dans l'acide sulfurique concentré. La réaction (COOH) — CO* + CO + H°0 est si fortement para- lysée par des traces d’eau, que l'on possède, dans la détermination de la constante de vilesse de cette réaction, une méthode plus sensible qu'aucune autre pour déceler l’eau dans H*S0*. La même réaction, qui dure quarante minutes dans un acide à 0,1 °/, d'eau, s'effectue en vingt beures en pré- sence de 0,6 ‘/, d'eau. L'eau paralyse du reste toute une série de réactions. L'oxydalion de l'hydrogène par l'acide rique concentré à été l'absence de catalyseurs, la réaction ne peut être décelée qu'à partir de 105°. Les mélaux nobles, Os, Pd, Pt, les sulfales de Hg, Ce, La, Nb catalysent positivement, les sulfales alcalins négativement. En présence de Hg, la réaction est déjà appréciable à la température ordinaire. Cette observation a son importance pratique pour les manipulalions avec l'hydrogène pur. L'eau en petite quantité (< 9 °/,) ne modifie pas la réaction. Elle ne modilie pas non plus la décomposition de Az°0 ; cette réaction dimo- léculaire a été suivie par Hunter, entre 300° et 900°. D'après Jahn,la décomposition de l'ozone est du deuxième ordre; la réaction dont la vitesse est mesurée semble être : O? + O0 —20*. sulfu- éludiée par Milbauer. En PAUL DUTOIT — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIQUE 369 Bodenstein et Plotnikow ont déterminé la vilesse de la réaction dimoléculaire C'H* + Br° — C'H'Br° à — 78° ; le coefficient de température (entre — 78° et 98°) de cette réaction est considé- rable. Un autre coefficient de température anormal est celui de la réaction CCFCOOH — CHOC + CO* dans l'aniline: Goldschmidt et Brauër l'ont trouvé égal à 4,41. - La saponificalion de l'éther diazoacétique est catalysée par les ions H; cette réaction esl, d'après Bredig, plus sensible que l'inversion du sucre el se prête mieux à la détermination de la concentration des ions H. La silice catalyse l'oxydation de CO; ce dernier corps, qui paralyse un si grand nombre de réactions, agit aussi comme catalyseur négatif dans les réac- tions où il prend lui-même part (Bodenstein). La vitesse de racémisation a fait l'objet de plu- sieurs recherches: elle suit presque toujours la loi des réactions monomoléculaires (Winther, Wede- kind). En Chimie organique, Holdermann à éludié l'in- fluence du catalyseur sur la sulfonation et la nitra- lion. On n'oblient pas les mêmes dérivés en l'absence d’un catalyseur qu'en présence de celui-ci (Hg). .Lœb et ses collaborateurs continuent l'étude des réactions pyrogénées, dans lesquelles on obtient des dérivés non saturés ou condensés à partir des dérivés saturés. Quelques-unes de ces réactions suivent un schéma simple. Menschutkin sen. a résumé dans un travail de fond de longues recherches, destinées à devenir classiques, sur les séries polyméthyléniques. Peu de mémoires donnent autant que celui-ci lim- pression de la précision que l'étude cinétique des réactions a introduite dans le domaine de la Chimie organique. Une des conclusions est que, de deux corps identiques, comme nombre de C et compo- sition, dont l'un est à chaine ouverte et l’autre un dérivé polyméthylénique, le second réagit loujours plus rapidement. La différence est la plus marquée pour les noyaux à à, puis 6 carbones; elle est la plus faible pour les noyaux à 7 carbones. La vitesse de réaction diminue lorsque le poids moléculaire augmente, aussi bien pour les corps à chaine ouverte que pour les noyaux. Pickard, Littlebury et Neville ont étudié l’action de la Z-menthylcarbimide sur 14 alcools; ceux-ci se classent, d’après leurs vilesses de réaction, sensi- blement dans l'ordre indiqué par Menschutkin pour la réaction : anhydride acétique et alcools en solu- tion benzénique. Il y aurait lieu de mentionner encore un grand nombre de vitesses de réaclions isolées dont on trouvera la mention bibliographique dans le réper- toire du Journal de Chimie physique. $ 2. — Réactions photochimiques. C'est un des chapitres à l'ordre du jour dans lequel les travaux sont chaque année plus nom- breux. Divers chimistes étudient les synthèses, copulations, condensations, transformations stéréo- chimiques des corps organiques, s'effectuant irré- versiblement sous l'influence prolongée de la lumière. Ciamician etSilber ont continué leursrecherches, entreprises depuis plusieurs années, et récapitulé les résultats obtenus à ce jour. Les travaux de Benrath, Chattaway, Ciusa, Szilard, sont dans la même direction. Parmi les réactions inorganiques, la dissociation réversible de l'ion Fe(CAz)" quadri- valent en 6CAz et Fe décelable analytiquement, a été étudiée par Foster, après Berthelotet Haber. La dissociation photochimique réversible des iodures | alcalins dissous dans quelques liquides organiques a été suivie par Nicollier et Dutoit. En ce qui concerne la théorie des réactions pho- tochimiques, il faut mentionner les publications de Trautz, lequel a montré, contrairement à ce qui était admis jusqu'à maintenant, que la lumière peut, dans cerlains cas, ralentir les vilesses de réaction et jouer ainsi le rôle de catalyseur négatif. Il existe des cas où une réaction est calalysée par une partie du spectre et paralysée par l’autre. La règle serait que, lorsqu'une réaction est accom- pagnée de « luminescence », la radiation émise catalyse positivement (à comparer avec la loi de Grotthus). Le même auleur a trouvé pour valeurs des coefficients de température des vitesses de diverses réactions photochimiques des nombres compris entre 2,4 et 3,5, alors que la plus forte valeur connue jusqu'ici était 1,40. Luther, qui, en 1905, avait publié une remar- quable étude sur la transformation réversible de l'anthracène en dianthracène, et établi, pour l'ex- pression mathématique de cette réaction, une théorie d’après laquelle la vitesse des réactions photochimiques serait proportionnelle à l'intensité lumineuse et à la première puissance de la concen- tration du corps « actif », a repris les expériences de Slator. Il a pu établir, en collaboration avec E. Goldberg, que la chloruration photochimique du benzène, dont la vitesse paraissait être propor- tionnelle à la deuxième puissance de la concentra- lion en chlore, est en réalité une réaction plus compliquée qu'on ne l'admettait, et que l'oxygène de l'air y intervient et se comporte comme un cata lyseur négatif. Ce rôle parait être général pour toutes les chlorurations. Les périodes d’induction et de déduction connues depuis plus d'un siècle 370 PAUL DUTOIT — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIQUE seraient simplement dues à des varialions de la concentration de l'oxygène. Cette action semble même plus générale, d’après d'autres recherches indépendantes; ainsi Bach constate que la réduction photochimique de l’acé- tate d'uranyle est catalysée lorsque l'oxygène est chassé par un courant de CO?. Burgess et Chapman admettent aussi que la période d'induction qui existe, quand un mélange d'H et de CI humides est soumis à l’action de la lumière, est due aux impuretés présentes. Lorsque le mélange est par- faitement pur, il n’y a pas d’induction. Wildermann poursuit ses études tendant à dé- montrer que le potentiel chimique d'un corps est différent à la lumière et à l'obscurité. Il confirme par de nouvelles expériences, dont le détail n'est malheureusement pas donné, son postulat : Tout équilibre entre deux états de la matière est, à | volume constant et sous l'influence de la lumière, déplacé dans le sens qu'accompagne la plus grande absorption de lumière. On peut envisager aussi ce postulat comme un cas particulier du théorème fondamental de Le Chatelier (opposition de la réac- tion à l’action). IIT. — EÉQUILIBRES CHIMIQUES. . d.InK Q La formule (1) : TT = pp re permet devre- présenter les valeurs de la constante d'équilibre K que dans un intervalle limité de température, par suite de la variation de la chaleur de réaction Q avec la température. Si l’on exprime Q en fonction de T suivant une série, et que l’on introduise celle-ci dans (1), l'on obtient, après intégration, une constante dont la valeur ne pouvait être calculée. dA dQ AT dt aux environs de T —0, ce qui n'est rigoureusement exact que pour T — 0. Il arrive ainsi à représenter par une formule unique toute la courbe d’un équi- libre. Cette relation est trop récente et le matériel de vérification encore trop restreint pour qu'on soit fixé sur les applications dont elle est suscep- tible. La détermination expérimentale des constantes d'équilibre dans tous les domaines de la Chimie et des sciences biologiques, l'analyse des courbes de fusion, de vaporisation, de solubililé de mélanges à deux, trois ou plusieurs composants, offrent encore un champ de recherches immense. C'est par cen- laines qu'on compte, dans la seule année 1906, les mémoires s’y ratlachant. Il serait difficile de tout citer, même en passant sous silence les travaux dont l'objet n’est pas exclu- sivement chimique. Nernst a fixé celte valeur en posant Les analyses des courbes de fusion des mélanges binaires de corps simples, jointes à l'étude micro- graphique des fontes et des alliages, ont été nom- breuses; plusieurs sont des 2° ou 3° vérifications de travaux antérieurs. Nous résumons dans le tableau suivant les résultats obtenus: une moitié provient du laboratoire de Tammann : De l'ensemble des observations faites jusqu'ici sur les combinaisons des corps simples entre eux, Tammann conclut : 1° que les éléments d'un groupe (Cu, Ag, Au), (Zn, Cd, Hg), etc. ne forment pas de combinaisons entre eux; 2° qu'un élément se combine avec tous les termes d'un groupe na- ramener SRE COMPO - COMBINAISONS DÉCÉLABLES SANTS par la courbe de fusion OBSERVATEURS Mg-Su MgSn | Kurnakow et Ste- Mge-Ph Mg?Ph Ÿ panow. Mg-Te MSTÉ, MeTI, M£*TIs Grube. Mg-Na 0 Mathewson. Mg-Cd MgCd Grube. Mg-Zn MgZn° Grube. Mg-Bi MgBi* Grube. Mg-Sb MgSb? Grube. | Mg-Ag MgaAg, MaAg Schemtschuschny. | AI-Sb AISb Tammann. AI-Na 0 Mathewson. Al-Bi (l Gwyer. | Al-Zn 0 Gwyer. | AIT] 0 Dœrinckel. Zn-Na ZnNa Mathewson. Zn-Au ZnAu, Zn°Au*’, ZnAu Vogel. SAo 7n3A0? 7 ox et'O | Zn-Ag PESeS HS CR et, Petrenko. Zn-5Sb Zn®Sb?, ZnSb Schemtschuschny. Cd-Au Cd'Au, Cd#Au* Vogel. Cd-Na CdÿNa, Cd'Na Matewson. Cd-Cu Cd*Cu?, CdCu* Sahmen. Cd-As Cd“As? Schemtschuschny. Cd-Sb (Cd#Sb?), CaSb Treitschke,. Sb-Ni SbNi, Sb'Ni5, Sb5\it, SbNi* Lossew. Sb-TI 0 Williams. Sb-Sn (l Gallagher. Sb-Ag SbAgt Petrenko. Sb-Au Sb?Au Vogel. Sb-As é (l Schemtschuschny. Sb-Na SbNa, SbNas Mathewson. Sb-Te Sb?Te*, Sb°Te?, SbTet° Pélabon. Sb-$e Sb?$e*, Sh?Se7 Pélabon. LIT QnN- 3Na4 > R SENNU NS PR de DEUÉ Mathewson. Sn-As Sn°As? Schemtschuschny. Sn-Cu SnCu Shepherd et Blough.. Fe-Mn (l Lewin et Tammann. « Fe-Si Fe?Si, FesSi GuertleretTammann. Ag-TI,Bi 0 Petrenko. Cu-TI 0 Dœærinckel. Cu-As CuAs, CuÿAs? Friedrich. Na-Pb Na‘Pb, Na*Pb, NaPb, NaPb5 Mathewson. Na-Bi NaBi, NaBi Mathewson. S-Phb PbS Friedrich et Leroux. S-RD Rb?S*, Rb?S, Rb?S1, Rb°S°,Rb?$5 Biltz et Wilke. S-Cs Cs?S?,, Cs°Ss Biltz et Wilke. S-AS S'As! Borodowski. S-P S5P, S5P2, Ssp2, Ssp4 Giran. S-Fe Voir diagramme Treitschke et Tamman:. S-Bi SP (pas de BiS) Aten. Si-Ni (SÉNI), SINPe et B, (SiSNi), À Guertler, Treitschke | 3 SiNi, (SiNi‘), SiNi ÿ et Tammann. Si-Mn SiMn, SiMn* Dærinckel. P-Cu PCu* Heyn et Bauer. “ PAUL DUTOIT — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIQUE turel ou avec aucun. Ces règles présentent quelques exceptions (NiFe, Brl, ete.). Les alliages Fe — C ont fait l'objet d'une étude de Charpy, qui censlate que la solidification de l’'eutectique : cémentite-cristaux mixtes, à lieu à 4.450° et non à 1.050° : le graphique de Roozeboom est à modifier de ce fait. Benedicks publie égale- ment un diagramme modifié, tenant compte de ce que la cémentile, combinaison endothermique, est en équilibre instable. L'analyse des courbes de fusion dans le cas des composants PbCI — PbO indique trois combinai- sons seulement, soit 1, 2 et 4 mol. de PbO pour 1 PbCË (Ruer),. Pour les cas des composants H°0—HCIO*, 5 hydrates avec 1, 2, 2 1/2, 3 1/2 et 3 mol. d’eau (van Wyk). Une série de travaux de von Narbutt, Aten, Kre- mann, est consacrée à la déterminalion, par la même méthode, des combinaisons moléculaires de composés organiques, phénols, anilines, pyridine, nitro-dérivés, ele. L'analyse des courbes de fusion, jointe à celle des courbes de vaporisation, a élé appliquée dans plu- sieurs cas. En Chimie inorganique, les combinai- sons IBr (Meerum Terwogt) et S°CF, SCI, SCI* {Aten) ont été déterminées ainsi une fois de plus. Un des chapitres les plus importants de la Mé- canique chimique appliquée consiste dans la fixation exacte des constantes d'équilibre intéres- sant l'industrie; Nernst et ses collaborateurs ont Co Case Co deux vitesses de réaction qui y conduisent. Ces constantes n'étaient que très approximativement connues jusqu'ici; elles sont maintenant fixées entre 1.500° et 3.000°. Le même auteur, en collaboration avec von Wartenberg, a repris l'étude des équilibres : fixé la constante de l'équilibre et celle des > 92H20 = 2H°4+0% et 2C0° 2 2C0+0°, à différentes pressions et entre les températures de 4.000° et 2.250°. M. Langmuir a également dé- terminé ces équilibres; il obtient des valeurs qui sont en général de 10 °/, plus faibles, dans le cas de l’eau, et de 7 °/, plus faibles, dans le cas de CO”, que les valeurs indiquées par Nernst. Ces dernières valeurs étaient elles-mêmes environ moitié plus faibles que celles que l'on calculait d’après les données de Sainte-Claire Deville et Le Chatelier. Il est à remarquer que la force électromotrice de la pile à gaz tonnant, calculée à partir de la dissocia- lion de l’eau à la température ordinaire (extrapo- lation des observations de Nernst),donne1.2925 volts, en concordance remarquable avec la nouvelle valeur de Lewis. 3174 Les constantes des équilibres : Ca OH solide + SO# CaSO® solide + 20H! > <= et Ca(OH}° solide + CO‘ Est CaCO® solide + 20H' ont été fixées, dans le premier cas, par Herold, dans le second, par Bodländer. La réaction est presque totale quand on remplace Ca(OH} par Sr(OH). Parmi les équilibres des systèmes à trois com- posants indépendants, il faut encore mentionner la réaction classique : > BaSO* — K?C0* _;_ BaCO® + K°50*, dont l'étude a été reprise par Mevyerhoffer, ainsique: les réactions : BaSO® + K?CrO* 22 BaGrO* + K?SO6, BaCO* + K2Cr0' © 3aCrO: + K°CO*, étudiées par Scholtz et Abegg. Enfin, van l'Hoffet ses collaborateurs (d'Ans, Blasdale, Farup) con- tinuent à aceumuler l'énorme matériel expérimental nécessaire pour élucider la question de la formation: des dépôts salins océaniques. Les régions d'exis- tence de la calcite borosodique, du pentaborate tricalcique, de la polyhalite, la formation de la tachhydrite, du borax octaëdrique, l'étude de l’an- hydrite, de la syngénite, de la glaubérite, de la krugite à 83° représentent l'apport dans ce domaine en 1906. Les tensions gazeuses de décomposition d'un certain nombre de substances ont aussi été déter- minées par Lewis; celles de l'oxyde d'argent, qui intéressent l’électrochimie, ont été fixées entre 300° et 450°. L'influence hétérogènes a qui à étudié, de la pression sur les équilibres fait l'objet de recherches de Briner, à ce point de vue, les systèmes : AZH® gaz + H?S gaz 7 AZH'HS sel; CO? gaz + 2AZH° gaz < co*(AzH°)? sel; PH gaz + HCI gaz PH:CI sel, en leur appliquant avec succès les lois de la Statique chimique. Un très grand nombre de mémoires traitent de la déterminalion des combinaisons et des équilibres en solution, par la méthode des solubilités. Une étude de fond sur les chromates alcalins par Schreinemakers est à citer dans ce domaine. L'hydrolyse a fait aussi l'objet de plusieurs recherches. Denison et Steele ont établi une nou- velle méthode qui utilise leur appareil pour la détermination des nombres de transport. Naumann et Müller ont aussi créé une méthode pour mesurer le degré d'hydrolyse des sels ammoniacaux, par distillation de la solution dont on maintient cepen- dant le volume constant. Cette méthode a été per- fectionnée par Abel. ü PAUL DUTOIT — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIQUE La queslion des pseudo-acides a soulevé une dis- cussion théorique qui se prolonge (Hantzsch, Euler). La vitesse d'inversion du sucre en présence de quelques-uns de ces pseudo-acides a élé déterminée par Torrese. IV. — ÉLECTROCHIMIE. La théorie de la dissociation électrolytique, appli- quée aux dissolvants autres que l'eau, semblait en défaut dans beaucoup de cas: les recherches | publiées en 1906 restreignent toujours plus le nombre des exceptions à la loi, en même temps qu'elles la précisent. Walden a terminé la publica- tion d’un travail d'ensemble sur les « ionisants » organiques. Les conductivités d'un même sel, — l'iodure de tétréthylammonium, — dans 40 dissol- vants ont élé déterminées à deux températures el à différentes concentrations, ainsi que les viscosités et coefficients de température de la viscosité. Les lois approchées suivantes ont été établies : 1° Les concentrations auxquelles un même sel est égale- ment dissocié dans divers dissolvants sont inverse- ment proportionnelles à la troisième puissance des constantes diélectriques des dissolvants ; 2° Le pro- duit de la conductivité moléculaire limite par le coefficient de température de la conductivité est constant pour tous les dissolvants; 3° Les solutions salurées d'un même sel, dans différents dissolvants, ont le même degré de dissociation. Dutoit et ses col- laboraleurs ont déterminé les conductivités de solu- tions extrêmement diluées d’électrolytes binaires dans 12 dissolvants organiques et inorganiques. Dans tous les cas, on arrive à une valeur limite absolument constante; l’anhydride sulfureux ne fait pas même exceplion. La loi de Kohlrausch est vérifiée, la loi de dilulion d'Ostwald s'applique aussi à partir d'une certaine dilution. La dissocia- tion est, dans un même dissolvant, une propriété additive. Les conductivités dans le succinonitrile, déter- minées par Bruni et Manuelli, sont considérables, bien que ce dissolvant polymérise les alcools, acides, etc., organiques. é Dans les acides chlorhydrique, bromhvdrique, iodhydrique liquéfiés, dans l'hydrogène sulfuré et phosphoré, la conductivité des solutions diminue avec la dilution (Steele, Mc Intosh et Archibald). Il en est de même de KI en solution dans l’iode Lewis et Wheeler), ainsi que des solutions d'une combinaison de la diméthylpyrone et de l'acide tri- chloracétique dans le bromure d'éthylène, le chlo- roforme et le benzène (Plotnikofr). Une étude théorique de Brillouin est consacrée à la discussion des conditions d'équilibre d'une. molécule dans un champ électrique, de l'action | acide, les potentiels des peroxydes sont, à l’excep- électrique entre deux ions dans un milieu de cons- tante diélectrique donnée. La relation entre le pou-« voir dissociant d'un liquide et sa constante diélec- trique est moins simple que celle indiquée par Nernst et Thomson, ou trouvée expérimentalement par Walden. Les déterminations de nouvelles constantes électrochimiques ont été relativement peu nom- breuses. Le potentiel de l'électrode d'oxygène a élé fixé à nouveau par Lewis, celui de quelques peroxydes par Mazzuchelli et Barbero. En solution + L'on MER Tam. 1 tion de l'acide persulfurique, presque identiques à celui de l'eau oxygénée. Maitland fixe le potentiel de I > 2l'et Fe:: > Fe::. Les constantes de dissociation de bases cycliques (Dedichen), d'indicateurs (Salm), d'acides monoba- siques non salurés (Fichter et Müller) ont été obte- nues par différentes méthodes (conductivité, colo- rimétrie, inversion du sucre et saponification}. Depuis les travaux de Brochet et Petit, ainsi que de Pearce et Couchet, de nombreuses recherches, théoriques et expérimentales, sont consacrées à l'électrolyse par le courant alternatif. Gundry étudie l'influence de la fréquence sur le rendement, dans un long mémoire impossible à résumer, Broca et Turchini les variations de résistance d’un électro-. | lyte pour les courants de haute fréquence. La vitesse des réactions électrochimiques suit | les lois des réactions hétérogènes établies pour ce cas par Nernst. Le même auteur et Merriam don- nent un nouvel exemple tiré de l'étude des cou- rants résiduels (Reststrom). Farup étudie la vitesse de réduction électrolytique de l'azobenzène, qui 1 RSA ; tend vers l'ordre ; lorsque l'agitation de l'électro- lyte est intense; Lewis et Jackson la vitesse de | séparation de H sur Hg (2 H — H°). Le chapitre des préparations par l'électrolyse devient de plus en plus vaste. En Chimie orga- nique, les oxydations, les réductions et les conden- sations ont fait l’objet d'un nombre considérable de recherches, dont la plupart se trouvent consi- gnées dans les publications des offices de brevets. En Chimie inorganique, les travaux, moins nom- breux, sont peut-être plus importants encore par leurs applications industrielles. 3 D'excellentes revues en ont été publiées par la Zeitschrift für Elektrochemie et sont résumées dans le classique Jahrbhuch für Elektrochemie. Nous nous bornerons à signaler iei les travaux qui se poursuivent, dans une direclion à la fois théo- rique et pratique, aux laboratoires de Færster et de Guye, sur l’électrolyse des chlorures aicalins. Paul Dutoit. Professeur à l'Université de Lausanne: BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 373 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 3 1° Sciences mathématiques _ Santerre (S.). — Psychologie du Nombre et des Opérations élémentaires de l’Arithmétique, avec Do une préface de M. le D' Pierre JANET. — 1 vol. …. gr. 1n-8° de x\v-178 pages. Octave Doin, éditeur. Paris, 1907. Depuis quelques années, les ouvrages sur la Philo- sophie des Mathématiques foisonnent. Celui-ci se dis- tingue de la plupart des autres en ce qu'il s'attaque seulement aux notions les plus élémentaires. I] le fait en un style simple et précis, avec un soin extrème de définir exactement chaque terme employé, chaque notion nouvelle introduite. Dans sa longue préface, -M. Janet dit avec grande raison que, si le sujet est mathématique, l'esprit du livre est entièrement psy- chologique. Il en profite pour effectuer une charge énergique (suivant la mode) contre l'intuition, et pour développer des théories sur lesquelles, à notre avis, il y aurait beaucoup à dire; mais c’est du livre, et non de la préface, que nous voulons parler ici. Il se divise en deux parties : Phénomènes et sys- tèmes de phénomènes; Le nombre et les opérations élé- mentaires de l'Arithmétique. La première comprend quatre chapitres : Notions pychologiques fondamen- tales, Relations fondamentales entre les faits de “conscience, Etude du système, Relations entre les sys- . (èmes. Les deux chapitres dont se compose la seconde partie sont intitulés : Le nombre, Opérations élémen- taires sur les nombres. C'est surtout de ceux-là qu'il convient de parler. La définition du nombre, trop longue pour pouvoir être reproduite, est purement verbale et conventionnelle. Celle de l'égalité consiste en l'énonciation de deux mots séparés par le mot égal, ou de deux signes A, B, séparés par le signe =. -Cet ordre d'idées conduit à des propositions qui appa- “raissent comme des (ruismes aux mathématiciens yulgaires. Par exemple, il faut plus d'une demi-page pour établir que A — A. Citons encore ce théorème : « L'addition d’un même nombre à des nombres égaux entre eux donne des résultats égaux ». En somme, celte philosophie mathématique, soi- disant fondée sur l'observation psychologique, dédai- gnant l'intuition et prétendant repousser tout emprunt à la considération du monde extérieur, nous paraît reposer sur un sophisme fondamental. Les paroles mêmes que je prononce, les signes que je trace, font partie du monde extérieur, aussitôt ces paroles pro- noncées et ces signes (racés. S'imaginer, par le plus subtil raffinement, qu'on peut s’en passer, est une pure illusion. Et puis, le malheur, c’est qu'il faut employer des mots pour exprimer les idées; et certains de ces mots, comme premier, dernier notamment, révèlent la pétition de principe, d’ailleurs inévitable‘. Je crois que, dans cette direction, on ne fera faire de progrès ni à la science mathématique, ni à la psychologie. Il n'en est pas moins vrai qu'une œuvre comme celle-ci, bien écrite et consciencieuse, mérite d'attirer l'attention des esprits déjà formés, ne fût-ce que pour * À l'appui de cette observation, il est bon de citer lex- luellement la phrase suivante (page 103), qui précède la définition du nombre (p. 106) : .“ Dans la première partie de ce travail, j'ai mis en lumière dix-huit notions, tirées uniquement de l'observation psycho- logique. » ; Comment l'auteur ne s'est-il pas aperçu qu'en écrivant le mot dix-huit, il postule ce qu'il va plus tard définir ? REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. les fortifier dans la doctrine contraire, en les obligeant à réfléchir. Il faut seulement veiller à ce que de telles théories ne pénètrent pas dans l’enseignement, où elles produiraient de véritables désastres, en semant le scep- ticisme et le dégoût, en rendant obscur ce qui est clair. Ce qu'il faut louer sans réserve, par exemple, c'est la pensée très juste qu'exprime M. Santerre à la fin de son ouvrage, lorsqu'il dit que « la notion d'égalité, de somme, de produit et de quotient, ne s'applique pas seulement au nombre, mais peut être étendue à tout système de grandeurs ». Rien n'est plus vrai, mais avec des restrictions, toutefois, lesquelles sont inhé- rentes à la nature même des choses. Si l’auteur, sor- tant du domaine des nombres entiers de l’Arithmé- tique, avait Simplement envisagé les imaginaires ordinaires de l'Algèbre, il aurait constaté que, si deux quantités sont inégales, cela ne veut pas dire que l’une soit plus petite ou plus grande que l’autre; en consi- dérant les quaternions, il aurait reconnu que la mul- tiplication n'est plus commutative, tout simplement parce que l'addition sphérique ne l’est pas non plus. Dans l’ordre d'idées où est orienté l’auteur, on finit par aboutir à cette définition de la science mathéma- tique : C’est une science où l’on étudie des choses qu'on ne connaît pas, et où l’on ne sait pas si ce qu'on dit est vrai. J'estime qu'il y a mieux à faire, que les mathéma- ticiens gagneraient à un retour vers l'intuition et le bon sens, n’exeluant nullement la rigueur, grâce à un contrôle raisonnable; et que la Psychologie avancerait plus rapidement si elle usait plus largement de la méthode expérimentale, au lieu de se fondre dans une métaphysique nuageuse et de se jeter dans des subti- lités rappelant celles des sophistes d'autrefois. C.-A. LalsanT, Examinateur d'admission à l'Ecole Polytechnique 2° Sciences physiques Cotton (A.), Chargé de Cours à l'Université de Paris, et Mouton (H.), Docteur ès sciences, Attaché à l'Institut Pasteur. Les Ultramicroscopes et les Agents microscopiques.— 1 vol. 1n-8° de 232 pages. (Prix : 5 fr.) Masson, éditeur. Paris,1907. Le grand intérêt que les biologistes attachent à tout moyen qui leur permet d’apercevoir de plus fins dé- tails de structure, et l'intelligence du rôle important que doivent tenir les colloïdes dans les sciences phy- siques et naturelles, ont récemment attiré l'attention sur certaines questions de technique et de théorie qui se trouvent liées si étroitement, malgré leur diversité apparente, qu'on ne peut étudier l’une d'elles sans se trouver logiquement amené à étudier les autres. C'est ainsi qu'il est impossible de s'intéresser aux solutions colloïdales sans chercher à connaître les moyens qui permettent de percevoir directement leur line structure granuleuse. Cela conduit à étudier la théorie physique du microscope et à discuter la limite de visibilité des objets microscopiques. Quand cette discussion aura montré que, par un éclairage conve- nable, on peut encore voir des objets bien après qu'ils sont devenus trop petits pour qu'on en puisse distin- guer la forme (de la même façon qu'on « voit » les étoiles), on voudra connaître les propriétés des parti- cules ultramicroscopiques ainsi découvertes. Il sera impossible, alors, de ne pas observer qu'elles s'agitent spontanément d’une facon parfaitement irrégulière, et l'on sera amené à étudier les caractères, si curieux, du mouvement brownien. Fe lien BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Revenant alors à ces milieux troubles, tels que l’eau de savon ou les « verres d’or », dont on avait com- mencé par suspecter l'homogénéité, on verra sans peine que l’état colloïdal est caractérisé par l'existence de granules ultramicroscopiques en suspension dans le dissolvant. La structure granulaire ainsi perçue directement permettra d'expliquer simplement beau- coup de propriétés des colloïdes. Il sera, en particulier, intéressant d'observer sur chaque granule le phéno- mène élémentaire qui se traduit macroscopiquement par la coagulation de la solution ou par son transport dans le champ électrique. Certains problèmes de Physique pure se poseront en cours de route, et recevront une solution plus ou moins complète. La polarisation de la lumière par les granules, la manière dont ils se comportent dans un champ magnétique, sont, à ce point de vue, particulièrement intéressantes. Enfin, on désirera connaître ce que la Piologie a déjà gagné et! ce qu'elle peut espérer de gagner par ces techniques et par ces théories. Et l’on sera ainsi conduit à parler, par exemple, de diastases, de toxines ou de microbes ultramicroscopiques. Tel est l'ensemble des questions dont MM. Cotton et Mouton ont condensé l'exposition dans le petit livre que nous présentons aux lecteurs de la ARevue. Us l'ont fait d’une facon particulièrement claire et simple, aisément accessible à tous ceux qui s'intéressent aux sciences physiques et naturelles sans être pourtant des spécialistes. Mais cette clarté n'est pas la clarté illu- soire à laquelle atteignent trop de prétendus vulgari- sateurs en masquant les difficultés qu'ils devraient signaler ; nulle part elle n'a été obtenue aux dépens de la sincérité scientifique. Le lecteur notera qu'un grand nombre de réflexions ou d'observations sont l'œuvre personnelle des auteurs. Dans le chapitre 17, par exemple (Théorie du micros- cope), la théorie de lord Rayleigh a subi plusieurs simplifications et retouches; dans le chapitre im (Appa- reils ultramicroscopiques), on verra, malgré l'impar- tialité avec laquelle sont décrits les différents procédés d'observation, que l'appareil de beaucoup le plus simple est dû aux auteurs. La seconde partie du chapitre 1v (Etude des dépôts d'argent, émulsion de Lippmann, gélatines colorées par l'or et l'argent) est entièrement personnelle. On voit ici, pour la première fois, que l’argenture est fondée sur certaines propriétés des colloïdes. Je signalerai encore comme originales et particuliè- rement intéressantes les observations sur les phéno- mènes qui précèdent la coagulation : en admettant que les granules s'immobilisent seulement quand ils se touchent, j'avais dit que les grains visibles dans les coagulums (donc séparés par le microscope) doivent ètre eux-mêmes des agglomérations. MM. Cotton et Mouton ont vu que souvent les granules agissent à distance appréciable les uns sur les autres, et que l'agglutination peut déjà exister entre granules dont la distance est de l’ordre du micron. Le transport électrique des colloïdes, connu macros- copiquement, a été vu pour la première fois au micros- cope par les auteurs, qui lui ont donné divers aspects curieux (dans un champ alternatif, où chaque granule décrit un segment de droite, et dans un champ tour- nant, où il décrit un cercle). Majorana avait montré que l'hydroxyde ferrique colloïdal devient biréfringent dans un champ magné- tique. MM. Cotton et Mouton ont beaucoup étudié ce phé- nomène et ont réussi à prouver qu'il est dû à l’orienta- tion par le champ des granules de ce colloïde, qui sont probablement constitués par des cristaux extrême- ment petits. Enfin, en lisant le dernier chapitre, consacré aux applications biologiques, on verra que le microbe de la « péripneumonie des bovidés », qu'on avait déjà réussi à cultiver, a été vu pour la première fois d’une facon bien nelte par les auteurs, sous forme de corpus- cules brillants dont le nombre grandit rapidement après ensemencement dans un bouillon d'abord stérile: On devine aisément que des résultats analogues pour: ront prendre une importance pratique considérable. JEAN PERRIN, Chargé du cours de Chimie physique à la Faculté des Sciences de l'Université de Paris Herbette(Jean), Préparateur à la Faculté des Sciences de Paris. — Contribution à l'étude de l'Isomor: phisme. Thèse pour le Doctorat ès Sciences ph siques.— 1 vol. in-8° de 94 pages. Gauthier-Villars: Paris, 1907. Le but final des recherches cristallographiques e la détermination de l’arrangement et de la structure desparticules composant les substances cristallisées. Le problème est loin d’être résolu, et l’un des phénomènes dont il importe le plus de connaître les lois pour ré soudre la question est certainement l’isomorphisme Pendant longtemps, on s’est tenu à la définition étroite de Mitscherlich, et c'est seulement depuis : quelques années qu'on a reconnu la complexité du phénomènes on l'a envisagé de différentes manières et il a été l'objet de recherches nouvelles, extrêmement fécondes Le travail de M. Herbette, exécuté au Laboratoire de M. Wallerant à la Sorbonne, ajoute à ces récents tra vaux un apport considérable. L'auteur examine d'abord ce qu'il faut entendre pa isomorphisme et discute les trois caractères assignés par Mitscherlich au phénomène : 4° analogie des for mules chimiques ; 2 ressemblance des formes cristal lines; 3° syncristallisation en toutes proportions des substances considérées. Les observations de M. Wyrou: boff ont montré que la première condition n'étai pas nécessaire, et on va voir que le second carac tère peut faire défaut. Quant à la syncristallisation em toutes proportions, elle n’est pas toujours réalisable, puisqu'elle exige que les corps supposés isomorphess puissent être dissous, fondus ou vaporisés ensemble: Donc un des trois caractères peut manquer quand les deux autres apparaissent et il n'est pas actuellement possible d'établir si lun d'eux prédomine sur les autres. L'auteur a ensuite cherché à résoudre les trois que tions suivantes : 1° Peut-il y avoir isomorphisme entre des corp appartenant à des symétries différentes? M. Wallerant avait bien constaté, en étudiant les mélanges de nitrates fondus, qu'il y a un passage ininterrompu d’une forme uniaxe à une forme biaxe ; mais une série continu n'avait pas été obtenue par cristallisation de corp dissous: en outre, M. Wyrouboff, en étudiant les solu tions de SO'K® et de SO“Na°, avait observé la formation de sels doubles, alors que ces deux sulfates fondus donnent des cristaux mixtes dont les propriétés son continues. M. Herbette a découvert que le tartrate hydraté de thallium (forme nouvelle M)orthorhombiques cristallise en toutes proportions avec le tartrate hydraté de potassium monoclinique. Les propriétés géométriques et optiques des cristaux varient d'une manière gra duelle avec les quantités relatives des deux corps mélangés, mais ne sont pas nécessairement COMmprise entre celles de ces dernières à l’état pur; | 20 L'étude des mélanges de chlorate et de nitrate dem potassium à permis d'arriver aux conclusions suivantes « De ce qu'un corps dimorphe A est, sous l’une de ses formes, isomorphe d’un corps B, il ne s’ensuit pas nécessairement que le corps B possède une seconde forme isomorphe avec l'autre forme de A. Si B ne pos sède pas de forme de ce genre, on peut, en faisan cristalliser A sous la forme qui ne convient pas à l'isoler à l’état pur d’une dissolution qui renferme à LE fois À et B »; 1 3° Les mélanges de chlorure et de bromure de bas ryum ont fourni des faits très intéressants. On sait que ces deux sels sont monocliniques et l’on peut supposers par analogie, qu'ils sont isomorphes. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 37,5 . Or,suivant la quantité relative de chaque sel dissous et le degré de concentration de la solution, il se pro- -duit trois espèces de cristaux : a) Des cristaux monocliniques identiques à ceux de - chlorure de baryum et pouvantcontenir jusqu’à 12,4°/, de bromure de baryum ; b) Des cristaux monocliniques identiques à ceux de .bromure de baryum et renfermant jusqu'à 114,5 °/, de . chlorure de baryum ; … c) Une forme nouvelle de cristaux mixtes, encore monoclinique, mais incompatible avec les deux précé- dentes et contenant de 25 à 60 «/4 de bromure de ba- ryum. Il vient à l'esprit qu'il y a formation de sels “doubles; mais M. Herbette a constaté que tel n'est pas le cas. Les angles des cristaux de cette troisième forme, suivant la quantité de l'un des composants, peuvent varier de quelques minutes et même d'un degré dans certaines zones; mais il n'y a pas de pas- sage avec les deux autres formes. _ Ces différentes sortes de cristaux offrent des pro- priétés intéressantes, en particulier, celle de se grouper régulièrement ensemble, phénomène très important au point de vue de l'étude des réseaux cristallins. Le chlorure et le bromure de baryum ne sont donc pas isomorphes. » L'auteur compare les modifications que subissent les cristaux mixtes, quand la composition chimique varie, aux modifications que subissent bon nombre de corps -cristallisés quand la température change. On peut voir par ce très rapide exposé l'importance du travail de M. Herbette. Indépendamment des re- cherches dont nous venons d'indiquer la haute portée philosophique, on y trouve la description cristallo- graphique de sels nouveaux et d'ingénieux apercus sur les macles de chlorure et de bromure de baryum. P. GAUBERT, Assistant de Minéralogie au Muséum national d'Histoire naturelle. Marie (C.), Docteur ès sciences, Préparateur à la Faculté des Sciences de Paris. — Manuel de mani- pulations d’Electrochimie, avec Préface de M. H. Moissan. — 1 vol. in-8° de x1-166 pages avec 57 figures. (Prix : 8 fr.) H. Dunod et E. Pinat. Paris, 1907. Le manuel de M. Ch. Marie‘, suivant rapidement le traité de MM. Lorenzet Hostelet, nous montre la faveur croissante dont jouit l’'Electrochimie.Ce dernier rejeton de la famille chimique, si féconde, n’en est pas le membre le moins intéressant, et l'étude de l'Electro- : chimie est devenue aussi utile pour le chimiste que celle de la Chimie organique. Comme toujours, les travaux pratiques du labora. toire doivent être le complément nécessaire des lecons magistrales. Les étudiants trouveront dans le livre actuel une série graduée d'exercices choisis. Les manipulations d'ordre général comprennent la Vérification de la loi de Faraday et celle des ampère- mètres ou compteurs, la mesure de la résistance des électrolytes et des forces électromotrices, avec l'étude de la surtension. Les préparations électrochimiques minérales (au nombre de 11) et organiques (20) sont décrites d'une facon très claire, quoique concise. Cet exposé se termine par quelques pages fort intéressantes (dues à la plume de M. Brochet) sur l’électrolyse par courant alternatif. L'auteur insiste à plusieurs reprises sur la densité du courant; il eùt peut-être été utile de consacrer à ce - facteur important une manipulation spéciale, telle que loxydation classique de l'acide oxalique dans deux cuves en série, avec des anodes de surface très diffé- rentes. Nous ne doutons pas que le livre de M. Ch. Marie ne recoive un excellent accueil et nous le recommandons vivement à tous ceux quis'intéressent à l’Electrochimie. P.-Th. MULLER, + Professeur à l'Université de Nancy. ? Voir Revue gén. des Se., t. XVIII, p. 1033 (1906). 3° Sciences naturelles Leriche (M.).— Contribution à l'étude des Poissons fossiles du Nord de la France et des réglons voi- sines (Æxtrait des Mémoires de la Société géologique du Nord de la France, t.N, Mémoire n° 1).— 1 vol. in-ko de 431 pages avec 19 planches et 79 figures. Le Mémoire que M. Maurice Leriche a présenté à la Faculté des Sciences de l'Université de Lille comme thèse de doctorat ès-sciences constitue une innovation des plus heureuses : c’est la première fois, en France, croyons-nous, qu'une étude paléontologique où la stra- tigraphie ne vient qu'en seconde ligne constitue une thèse de Géologie. Ce nouveau modèle de thèse néces- site,chezle géologue qui l’entreprend, desconnaissances approfondies et variées qui ne peuvent s'acquérir du jour au lendemain, un sens critique que la pratique assidue et pénétrante des fossiles peut seule donner. La paléontologie des Poissons est particulièrement dé- licate : elle exige, en effet, d’une part la connaissance parfaite des poissons actuels et des différentes pièces dures de leur squelette, et d'autre part les variations que présentent avec l’âge, le sexe, la position dans la cavité buccale, les dents, qui constituent les restes de poissons que l’on rencontre le plus fréquemment — d'ailleurs isolées — dans les terrains sédimentaires. C’est faute de ces connaissances que la plupart des au- teurs qui ont cité des poissons fossiles ont contribué — par la création à tort de genres ou d'espèces, etpar des déterminations erronées — à enlever aux poissons fossiles la valeur stratigraphique que la mobilité très grande de ces animaux doit 4 priori leur donner pour les parallélismes à grande distance. M. Leriche, en utilisant ses propres découvertes, les collections du Musée Gosselet de l'Université de Lille et du Musée royal d'Histoire naturelle de Bruxelles et quelques collections particulières, a pu donner une étude aussi complète que possible des Poissons silu- riens et dévoniens, des Poissons paléocènes et des Pois- sons éocènes du nord de la France et arriver à des résultats intéressant à la fois la Stratigraphie et la Pa- léontologie générale. C'est ainsi qu'à propos des poissons siluriens et dévoniens du nord de la France découverts à Liévin, Pernes-en-Artois, Crespin et, toujours au sud du bassin houiller, à Huy en Belgique, l’auteur montre l'identité de composition de la coupe du Silurien supé- rieur et du Dévonien inférieur de Liévin avec celles qu'on peut relever aux environs de Ludlow, à l’est du Pays de Galles, et la grande extension du facies de l'Old red Sandstone dans les schistes et grès bigarrés (schistes de Fosse, schistes d'Oignies) du Gédinnien supérieur du bord septentrional et du bord méridional du bassin de Dinant. Au point de vue paléontologique, M. Leriche a pu reconstituer d’uné facon complète le Pteraspis Crouchi et aussi, grâce à l'étude des im- pressions qui se correspondent sur les moules internes des boucliers dorsal et ventral, il a montré qu’elles ne pouvaient être rapportées qu'à des fentes branchiales, et non, comme le croyait M. Patten, à des traces d'insertion de muscles de pattes articulées. Les Ostra- codermes constituent donc un groupe de Poissons. De plus, ces poissons sont très primitifs, agnathes, et cet agnathisme serait primordial, tandis qu'il est secondaire chez les Lamproies (Agnathes actuels). Les poissons crétacés du nord de la France, déjà étu- diés dans un Mémoire antérieur de l’auteur, appar- tiennent aux étages Albien, Cénomanien, Turonien et Sénonien, la faune de ce dernier terrain étant la plus riche et la plus variée. La répartition stratigraphique des différentes formes décrites est précisée. Cette faune présente la plus grande analogie avec la faune des mers anglaises; à côté de formes qui ont une grande extension verticale, il en existe d’autres qui ont une réelle importance stratigraphique : le ?{ychodus rugosus caractérise les couches de passage du Turonien 376 au Sénonien et le Sénonien inférieur, l'Oxyrhina ma- chrorhiza VAlbien,le Ptychodus polyqyrus var. marqi- nalis la craie phosphatée à Actinocamax quadratus, les Corax pristodontus var. Kaupi et Pseudocorax affinis var. lævis le Sénonien. L’abondance des Squa- lidés dans les dépôts phosphatés indique une relation de cause à effet. Au point de vue paléontologique, des dentures complètes de Pfychodus ont été recons- tituées et les affinités du genre éteint Corax précisées. C'est en s'appuyant en particulier sur les poissons fossiles que M. Leriche a été amené à subdiviser les terrains tertiaires inférieurs en Paléocène (Montien et Landénien) et Eocène proprement dit (Yprésien, Luté- tien, Ledien, Bartonien) : il y a, en effet, un changement brusque et profond entre la faune ichthyologique tem- pérée du Paléocène et la faune du reste de l'Eocène, qui renferme surtout des formes tropicales se retrou- vant dans presque toute l'Europe, le nord de l'Afrique et les Etats-Unis. Les poissons paléocènes (41 espèces, 26 genres) pré- sentent, dans le Montien comme dans le Calcaire piso- litique, une association de formes crétacées et de formes tertiaires ou à aflinités tertiaires ; le genre Lepidosteus y fait son apparition comme au Portugal eten Amérique. Cette faune paléocène se retrouve en partie au Dane- mark et en Angleterre, où les « Thanet sands » et les « Woolwich and Reading beds » du Bassin de Londres présentent les mêmes formes que le Landénien belge. L'étude des poissons éocènes de la Belgique, du nord de la France, du bassin de Paris, de la Haute Italie (Monte-Bolca, Monte-Postale), de l'Algérie et de la Tunisie, à fourni à l'auteur des résultats intéressants à la fois au point de vue paléontologique, au point de vue phylogénique, au point de vue des conditions géogra- phiques des différents bassins étudiés. L'abondance des débris de Squalidés a amené M. Le- riche à établir une nouvelle nomenclature de la den- ture (dents symphysaires, antérieures et latérales ayant chacune ses caractères distincts) et, en partant de là, à reconnaître à quelle série appartiennent les dents isolées que l’on rencontre dans les dépôts tertiaires : des dentures entières d'Odontaspis, de Lamna, d'Oxy- rhina, de Physodon, de Galeus, de Galeocerdo ont pu ètre reconstituées, en même temps que la position systématique de certains genres et espèces créés par différents auteurs était mieux précisée et rectifiée. L'étude du Triodon antiquus, le plus ancien Gymno- dontidé actuellement connu, a montré qu'au cours de son développement il passe par un stade Diodon et qu'il doit exister des Diodons pré-éocènes dont les Diodons éocènes (comme le Diodon pulchellus du Ledien et du Wemmelien) seraient les descendants directs. Bien que la faune ichthyologique des dépôts éocènes constitue un ensemble assez homogène, l'auteur a pu distinguer et préciser, soit par quelques formes spé- ciales, soit par l'apparition et le développement de certaines familles et de certains genres, les caractères des différents étages. La comparaison du Bassin de Paris et du Bassin franco-belge au point de vue de leur faune ichthyolo- gique éocène amène à des conclusions importantes : les Elasmobranches sont les mêmes ; ils sont seulement beaucoup moins répandus dans le Bassin franco-belge que dans le Bassin de Paris; les formes communes de Téléostéens sont beaucoup moins nombreuses. C'est qu'en effet le Bassin belge était largement ouvert vers la pleine mer et les poissons pélagiques nageurs, très abondants en effet, y accédaient facilement: le Bassin de Paris, séparé du précédent par le haut fond de l'Artois, constituait un golfe plus fermé, plus calme, où les Labridés, en particulier, habitants des eaux tran- quilles, pouvaient mieux se développer; en même temps, dans ce bassin fermé, les oscillations du rivage étaient plus sensibles, et les poissons exclusivement fluviatiles (Amiïa Barroïsi, Lepidosteus suessionensis) qui manquent dans le Bassin belge pouvaient s'y déve- lopper et abandonner leurs débris dans les formations BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX lagunaires ou d’eau douce si fréquentes aux différente époques à la périphérie du golfe parisien. Dans k Haute-Italie, la mer éocène était encore plus calme quoique largement ouverte, et les espèces littorales adoptées à la vie planctique deviennent prédominantes La faune ichthyologique des phosphates d'Algérie et de Tunisie est encore trop peu connue pour permettre de déduire les conditions géographiques de la mer éocène où ces dépôts se formaient et surtout pour précise l'âge exact de ces phosphates. Les restes de poissons éocènes du Nord de la France étant particulièrement abondants dans la butte ter: tiaire de Cassel (Mont des Récollets), l’auteur a publié deux photographies très intéressantes des dépôts de cette région, qu'il interprète d'une manière toute personnelle : pour lui, le Laekénien (Lutétien supé= rieur) y ferait défaut, plutôt par suite d'une érosion que par absence de sédimentation ; il y a de même une lacune correspondant au Wemmelien (Bartonien infé- rieur). À La bibliographie et la synonymie des espèces sont faites avec la conscience et le soin qui caractérisen tous les travaux de l'auteur (quelques géologues lui reprocheront peut-être le trop grand développement qu'il leur a donné) ; en outre, la précision des descrip tions de M. Leriche, l'exactitude de ses déterminations, faciles à contrôler sur des reproductions photogra- phiques particulièrement exactes, font de ce livre uné œuvre systématique de haute valeur, indispensable tous ceux qui voudront s'occuper de la détermination des poissons fossiles. E M. Leriche est déjà connu par de nombreuses publi cations sur la stratigraphie et la paléontologie des dépôts crétacés et tertiaires du nord de la Frances aussi est-il forcé de nous renvoyer souvent à ce travaux : nous aurions aimé, en particulier pour la stratigraphie des terrains tertiaires, avoir dans le même volume un résumé des caractères stratigra phiques et paléontologiques des différents étages ave lesquels la plupart des lecteurs ne sont pas familiarisés. Ce léger reproche n’enlève d’ailleurs aucune valeur au travail si documenté que nous venons d'analyser et qui contient des documents inédits pour l’histoire des poissons et des résultats importants pour la géologie des terrains silurien, dévonien, paléocène et éocène H. Douxaui, : Maitre de Conférences de Géologie et de Minéralogie à l'Université de Lille. 4 Sciences médicales Gaultier (René), Chef de Clinique adjoint à la Fa culté de Médecine de Paris. — Précis de Coprolo gie clinique. — 1 vol. de 384 pages avec À planclié coloriée et 65 microphotographies. (Prix : 7 fr} J.-B. Baillière et fils, éditeurs. Paris, 1907. Jusqu'à ces derniers temps, l'étude scientifique et pratique des troubles de lassimilation intestinale n'avait pas été faite en France. La méthode d'examen n'était indiquée dans aucun traité classique. M. René Gaultier a comblé cette lacune en donnant, dans un petit volume très précis, la description des méthodes d'examen macroscopique, microscopique, chimique et bactériologique des matières fécales, en publiant des figures nombreuses qui illustrent la description et per mettent de reconnaître les éléments normaux ou ano maux que contiennent les fèces. Il a exposé, en outre» la technique complète qui permet d'étudier les fone tions d’assimilation intestinale d’un individu : repas d'épreuve, manière de recueillir les fèces, procédés d'examen, manière de raisonner sur les résullats ana lytiques obtenus. Grâce à ces renseignements, non seulement le coprologiste pourra apprendre à analyser les matières fécales. mais le médecin pourra déduire de l’analvse des renseignements sur la fonction d'abs sorption intestinale d’un malade, et sur le diagnoste de l'affection dont il est atteint. MarCEL LABBÉ, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris: N ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES AT ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 8 Avril 1907. 40 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Barré démontre que, si, dans le mouvement d'une hélice circulaire, pour une position de celle-ci correspondant à une variation nulle du rayon du cercle principal, le mou- vement élémentaire du trièdre lié à la courbe se réduit à une translation suivant l'axe de l’hélice correspon- dante, celle-ci est une géodésique de la surface. — M. W. Stekloff présente ses recherches sur un pro- blème d'analyse intimement lié avec le problème du refroidissement d’une barre hétérogène. — M. F. Riesz généralise le théorème qu'il a donné précédemment aux systèmes orthogonaux de fonctions d'une ou de plusieurs variables, définies dans un ensemble mesu- - rable quelconque, sommables et de carré sommable. — M. P. Helbronner à déterminé par des opérations éodésiques l'altitude du Grand Pic de la Meige; elle est de 3.982,3 mètres. — M. G. Millochau présente des épreuves du spectre solaire infra-rouge, obtenues avec des plaques sensibilisées par le vert malachite. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. L. Teisserenc de Bort et L. Rotch ont étudié les caractères de la circulation océanique intertropicale. Les vents alizés de N. à E. s'étendent jusqu'à quelques centaines de mètres de hauteur: au-dessus, on trouve des courants de direc- tion différente: enfin, vers 2.000 mètres, on trouve les courants à composante sud qui forment le contre-alizé. — M. À. Blanc à observé l’action du champ magné- tique sur l'air ionisé en mouvement. Les intensités des forces auxquelles sont soumis les ions sont pro- :portionnelles à leurs mobilités. — M.G.-A. Hemsalech à mis en évidence les oscillations d'ordre supérieur (harmoniques) dans l'étincelle électrique. Ces harmo- niques sont, sinon uniquement, du moins en grande partie, la cause de la luminosité de la vapeur métallique dans l'étincelle. — M. H. Pellat estime qu'un atome plat ne peut pas être stable; la forme stable de l'atome doit donc être voisine d'une forme sphérique. — M. T. Tommasina fait remarquer, à propos de la pré- cédente note de M. Pellat, que les atomes ne sont pas électriquement neutres, mais en général électrisés, ce qui renforce les conclusions de l'auteur. — M. Krebs décrit un appareil pour la mesure, à chaque instant, de l'écoulement des liquides. L'écoulement a lieu par un orifice en mince paroi, avec ufe vitesse proportion- nelle au débit, et la pression produisant cette vitesse est mesurée par une différence de niveau. — M.P. Vil- lard montre que l'établissement de la décharge dans un tube précède la gaine négative, premier effet de l'émission cathodique, et que les phénomènes lumi- neux procèdent de l’anode vers la cathode, conformé- ment à l'hypothèse de la chaîne anodique. — M. L. Guil- let a constaté que le nickel et l’étain sont susceptibles de former quatre solutions solides et une combinaison NiSn; les alliages renfermant moins de 38 °/, d'étain sont seuls magnétiques à la température ordinaire. — M. E. Rengade a déterminé les densités des protoxydes de Na(2,25), K (2,32) .Rb (3,72), Cs (4,78). Ces protoxydes, chauffés au-dessus de 400°, sont décomposés en bioxyde et métal qui se volatilise. Ils sont réduits par H vers 180°-200°. Leurs vapeurs ne se diffusent que très lente- ment dans le vide. — M. W. Oechsner de Coninck à constaté que les p-oxybenzoates de Ba et de Ca, traités par les acides, se décomposent en donnant des sels de Ba et Ca, CO? et du phénol. Ces mèmes sels, chauftés à 2850, se décomposent en donnant une matière colo- rante rouge. — MM. E. Tassilly et J. Leroïde, en fai- sant réagir I et HgO sur l’acétylgaïacol en solution de CCI, ontobtenu l’acétyliodogaiacol, F. 74, que la potasse transforme en p-iodogaiacol, F.87°-88°; la méthylation de ce dernier donne le p-iodovératrol, F. 349-359. — M. P. Gaubert montre que la coloration artilicielle des fibres de chrysotile et des autres minéraux cristallisés pouvant absorber les couleurs d’aniline est un phéno- mène purement physique, dû à la pénétration dans le réseau du cristal de molécules de la substance en dis- solution. — MM. L. Dupare et A. Pearce ont décou- vert, dans un quartzite de l'Oural, une nouvelle amphi- bole, qu'ils dénomment tschernichewite; elle présente un polychroïsme intense et une grande dispersion. — M. H. Pottevin a étudié l’épuration des eaux d’égouts par les filtres à tourbe. Elle se fait parfaitement (la totalité de l'Az ammoniacal et de l'Az organique étant éliminée) avec des eaux contenant jusqu'à 200 milli- grammes d'Az par litre. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. V. Babès montre que la graisse des capsules surrénales ne se trouve pas dans la substance médullaire, mais surtout dans la substance corticale; elle fait défaut ou est très réduite dans la plupart des maladies septiques et putrides. — M. C. Cépède a constaté que les jeunes sardines, sur la côte du Boulonnais, ont une alimentation végétale importante, sinon exclusive; le contenu intestinal est, en elffet, constitué par un magma de Diatomées. — M. Chifflot signale la présence de l'Ustilago Maïidis Corda sur les racines adventives du Zea Mays L. et de sa variété quadricolor. Ces racines présentent des bio- morphoses caractérisées par des pseudo-dichotomies de leur point végétatif et par l'hypertrophie sans hyperplasie des tissus envahis. — M. R. Bréon à cons- taté l'existence, sur les plages de sable du Pas-de-Calais, de galets et de sables provenant de roches cristallo- phylliennes et éruptives anciennes, analogues à celles de la Bretagne ou du Pays de Galles. Les galets peuvent avoir été transportés par des radeaux de glace. Séance du 15 Avril 1907. M. Aimé Witz est élu Correspondant pour la Section de Mécanique. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. MM. R. Bourgeois el Noirel ont déterminé la forme du géoïde dans la région du Sahel d'Alger, d’après leurs observations de dévia- tion de la verticale. Le géoïde accuse, dans tous les azimuts, une courbure beaucoup plus forte que l’ellip- soide. 20 ScreNCEs PHYsiQues. — M. G. Berlemont décrit un nouveau procédé de réglage des tubes à rayons X. En placant dans le champ cathodique une tige d'Al, si on relie cette tige à la cathode et que l’on fasse passer dans le tube un faible courant pendant 2 à 3 minutes, le tube devient très dur: si, au contraire, on relie la tige à l’anode en laissant fonctionner le tube norma- lement, il mollit graduellement. — M. J. Meunier à déterminé les limites d'inflammabilité des mélanges explosifs de vapeurs d'éther et d'air. La limite infé- rieure paraît être voisine de 75 grammes d'éther au mètre cube d'air, la limite supérieure de 200 grammes. — M. H. Moissan, dans un pli cacheté déposé le 5 novembre 1906 et ouvert en séance, avait annoncé que l’amagalme d'Am, formé par action de l’'amagalme de Na sur un sel d'Am, renferme du Na et ne peul exister qu'en présence de ce dernier. Dans l'électrolyse des sels de Na avec une cathode de Hg, il se forme un composé bleu, soluble dans le mercure. — M. P. Le- beau à reconnu que la magnésie est réduite par le charbon au four électrique avec production de magné- sium et de carbure de magnésium, qui sont en grande 318 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES partie détruits par l'action des gaz du four, qui se dif- fusent à travers les tubes de charbon. — M. M. Houdard a observé que le sulfure d'aluminium, au four élec- trique, donne avec le sulfure de manganèse et le sul- fure de fer deux combinaisons doubles : APS‘Mn et AËS'Fe, comparables aux aluminates et cristallisées. — M. C. Chabrié, en faisant réagir le pentachlorure de tantale sur l'amalgame de sodium, à obtenu un sous- chlorure TaCl°.2H°0, soluble faiblement dans Feau. — MM. Ch. Moureu et I. Lazennec, en chauffant les amides acétyléniques R.C : C.CO.AzH° en solution alcoo- lique avec une amine secondaire ou avec la pipéridine, ont obtenu les amides 5-cétoniques correspondantes R.CO.CH.COAZH. — MM. P. Sabatier et A. Mailhe, en hydrogénant directement la pyridine sur le nickel réduit, n'ont pas obtenu de pipéridine ; mais tout parait indiquer qu'il y à rupture du noyau et formation d'amylamine CH°.CH°.CH*.CH°.CH°.AzH. — MM. Eug. Charabot et G. Laloue ont constaté, chez la verveine, la migration des composés odorants de la feuille vers l'inflorescence. Mais, pendant l’accomplissement des fonctions de la fleur, l'essence s'accumule dans les racines et dans les tiges, tandis que les feuilles et les inflorescences consomment une partie de leur matière odorante. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Chauveau rappelle qu'il a publié en 1873 les premiers exemples de l’in- fection tuberculeuse de l'appareil respiratoire par la voie de l'appareil digestif, sans la moindre atteinte portée à l'intégrité absolue de ce dernier appareil. — MM. S. Arloing et E. Forgeot estiment que les subs- tances introduites dans le tube digestif sous forme de particules solides, extrêmement fines, animées de mouvements browniens sous le microscope, sont main- tenues en dehors de la muqueuse intestinale et ne sauraient être l’origine de l'anthracose pulmonaire. — M. R. Chudeau décrit un certain nombre de gisements fossilifères lutétiens dans le Soudan et le Sahara. Séance du 22 Avril 1907. La Section de Minéralogie présente la liste suivante de candidats à la place laissée vacante par le décès de M. Marcel Bertrand : 1° M. Douvillé; 2 MM. M. Boule, L. de Launay, E. Haug, P. Termier et F. Wallerant: 3° M. J. Bergeron. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. B. Gambier pré- sente ses recherches sur les équations différentielles du second ordre et du premier degré dont l'intégrale générale est à points critiques fixes. — M. C. Popovici communique ses études sur les équations aux inté- grales réciproques. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Guyot à mesuré les forces électromotrices de chaines liquides à extré- mités identiques d'électrolytes binaires formés d'ions plurivalents. Les résultats ne concordent pas avec la théorie de Nernst, — M. P. Villard décrit de nou- velles expériences montrant que la déviation magné- tique de la lumière positive ne peut s'expliquer qu'en assimilant celle-ci à un conducteur. — MM. J. de Kowalski et C. Garnier ont constaté que la quantité de terres rares qui détermine la phosphorescence d'un sulfure alcalino-terreux excité par la lumière ultra- violette est bien moindre que celle qui, ajoutée à Ja chaux, excite sa phosphorescence cathodique. — M. L. Bruninghaus a déterminéla phosphorescence dedivers composés calciques manganésifères ; l’optimum d'éclat est donné par une proportion de 0,5 de MnO pour 99,5 de Ca0. — M. A. Karl, en chauffant du sulfure de zinc avec divers sels, à obtenu des substances qui présentent à un haut degré le phénomène de la tribo- luminescence; l'émission de lumière par écrasement est visible même en plein jour. —M. P.Lebeau montre que la facilité avec laquelle l'amalgame de platine produit des émulsions avec l’eau doit être considérée comme la résultante des phénomènes dus aux tensions superficielles qui s’exercent entre l’eau ou un autre liquide, l'amalgame de platine et le mercure. — M. L. toujours de la même facon sous l’action des réactifs — M. Ed. Defacqz à observé que le siliciure de @ à 50 °/, de Si forme avec le tungstène amorphe, à température du four électrique, ‘un nouveau siliciur Si®lu. Ce corps s'obtient également en réduisant p Al, en présence de S, un mélange de silice et d’anhy dride tungstique. — MM. P. Sabatier et A. Mailhe.,e hydrogénant l’isocyanate d'éthyle sur le nickel réduit ont obtenu principalement de la méthyléthylamine avec un peu d'éthylamine, de diéthylamine et de trié thylamine. L'isocyanate de phényle, dans les même conditions, donne de l’aniline et de la diphénylurée — MM. L. Bouveault et R. Locquin, en condensan les dérivés sodés des acyloïines de la sérié grasse ave leséthers acétiques, ont obtenu des acides en C'H2240® qui renferment probablement une chaine fermée trian gulaire. — M. M. Delépine montre que la formule d l'aldéhydate d'ammoniaque est bien celle d'une éthy lidène-imine trimérisée, car il a pu en préparer | dérivé trinitrosé, F.161°. L'hexaéthylidène-tétramin de Kudernatsch est identique à la tricrotonylidène tétramine de Wurtz. — M. M. François décrit un procédé de recherche et de dosage de l'ammoniaqu dans la monométhylamine et les amines grasses très volatiles, basé sur l'emploi d'un réactif contenant Hg, KI et NaOH. — M. P. Nicolardot : Sur la compo- sition et l'analyse du wolfram et de la hubnérite (voir p. 381). 39 SCIENCES NATURELLES. — M. A. Chauveau démontre que le virus tuberculeux humain, ingéré par de jeunes Bovidés, peut se comporter comme le virus bovin ingéré en petite quantité, en provoquant d'emblée là tuberculose primitive du poumon et des ganglions broncho-médiastinaux. — M. J. Kunstler estime qu'il n'est actuellement pas rationnel de chercher à recons- tituer expérimentalement les processus vitaux, qui sont le fruit d'une évolution multi-séculaire. — M. C. Cé- pède déduit de ses observations que la sardine ne paraît pas avoir de préférence bien nette soit pour une nourriture animale, soit pour une nourriture vé- gétale. Maïs il est impossible de dire si elle ne préfère pas, aux divers stades de son évolution, une nourriture spéciale. — M. E. de Cyon déduit dè ses recherches que l'hypophyse est un autorégulateur de la pression sanguine intra-cranienne, en même temps quelle entretient l'excitation tonique des nerfs modérateurs du cœur; la glande pinéale agit surtout d’une manière mécanique, comme régulateur de l’afflux et du reflux des liquides céphalo-rachidiens dans l'aqueduc de Sylvius. — M. C. Queva a étudié la différenciation des tissus du stipe et de la fronde chez les Æquisetump®, leurs massifs libéro-ligneux doivent être considérés comme des faisceaux unipolaires simples. — M. G. Bi- gourdan signale l'enregistrement, aux sismographes de l'Observatoire de Paris, du tremblement de terre du: Mexique du 15 avril et de deux secousses dans la nuit du 18 au 19 avril. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 9 Avril 4907. MM. Vaillard et Ch. Dopter présentent les résultats du traitement de 243 cas de dysenterie bacillaire par le sérum des chevaux immunisés contre le bacille dysentérique. Sur 200 malades traités dans les hôpi= taux ou à la campagne, la mortalité a été de 5 °/,; encore la plupart des décès sont-ils dus à d'autres causes que la dysenterie. Le sérum apaise en quelques heures les douleurs abdominales, le ténesme et les épreintes, fait fléchir la fréquence des selles et fait disparaître le sang de celles-ci; la guérison est très rapide. Dans les 43 autres cas, relatifs à des aliénés, la mortalité a été supérieure, surtout chez les infirmes, säteux et cachectiques. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 979 Séance du 16 Avril 1907. M. A. Béhal est élu membre titulaire dans la Section de Pharmacie. MM. A. Poncet, Lacomme et L. Thévenot ont constaté que les cultures d'actinomycose ne renferment pas de toxines solubles. L'empoisonnement actinomy- cosique doit être attribué aux réactions des éléments offensés. Séance du 23 Avril 1907. M. E. Delorme conclut de ses recherches statistiques que, sous les drapeaux, en France, la syphilis primi- tive est plus de trois fois moins fréquente que dans la population civile de mème âge: il en est de même pour les autres maladies vénériennes. La morbidité syphi- litique est, dans l’armée, en décroissance progressive comme celle des autres maladies vénériennes. L'armée française occupe avec l'armée allemande la tête des armées européennes par son minimum de maladies vénériennes. Ce remarquabl: résultat est en partie dû aux grands efforts faits dans l’armée pour assurer l'éducation morale du soldat, lui enseigner l'hygiène prophylactique et le soustraire aux dangers du dehors. Toutefois, le relâchement des mesures administratives et policières, la substitution progressive de la prosti- tution clandestine à la prostitution surveillée des inscrites doivent inspirer des craintes au sujet de la persistance de l'excellent état sanitaire actuel, ear la prostitution clandestine est de beaucoup la plus dan- gereuse, — M. A. Robin donne des renseignement(s sur le fonctionnement de l'Office antitubereuleux qu'il a installé à l'Hôpital Beaujon. Il à traité, en 1905, 935 malades et donné #.385 consultations ; les résultats sont encourageants étant donnée la faible somme dépensée : à peine 7.000 francs. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 13 Avril 1907. M. L. Lepage présente une canule droite, à soupape, pour la respiration artificielle, permettant de faire varier l'intensité de l'insufflation. — MM. J. Jolly et A. Vallée concluent de leurs recherches que la nature nucléaire des granulations basophiles des hématies n'est pas démontrée; elle est même peu probable. Il Sagirait plutôt d'une modification du discoplasma. — M. A. Gombault déduit de ses études histologiques sur l'adulte et l'embryon des Lombrics que le tissu des landes de Morren est d’origine mésodermique vascu- aire. — M. A. Netter démontre l'efficacité des sels de caleium dans le traitement préventif et curatif de lur- ticaire. Les sels de Sr peuvent être substitués dans certains cas à ceux de Ca. — MM. A. Netter et L. Riba- deau-Dumas signalent une épidémie d'origine alimen- taire due à des bacilles du type paratyphique B et remarquable par la précocité des accidents, qui sont survenus dix heures après l’ingestion. — M. G. Rosen- thal est parvenu à accoutumer à la vie aérobie le bacille du tétanos, avec perte progressive-de ses fonctions, d'abord réparable en culture anaérobie, puis irrépa- rable. — M. J. Nageotte signale l'apparition précoce d'arborisations périglomérulaires formées aux dépens de collatérales du glomérule dans les ganglions rachi- diens greffés. — M. P. Salmon à obtenu de bons effets dans le traitement, par l’atoxyle, de 27 malades atteints de syphilis. — M. A. Lécaillon présente quelques re- marques au sujet d’un Mémoire récent de K. Friede- rich relatif à l'origine des feuillets germinatifs et à la formation de l'intestin moyen des Coléoptères. — M. J. Arrous à constaté que, chez le chien et le lapin, le coefficient diurétique des différents sucres en injec- ions intra-veineuses varie en raison inverse de leur poids moléculaire. — M. E. Gellé montre le rôle de l'augmentation de pression intra-thoracique et de la Compression du cœur droit dans les accidents asphyxi- ques par sténose des voies respiratoires. — MM. Léo- pold-Lévi et H. de Rothschild ont obtenu de bons effets dans le traitement de 61 cas de constipation par la méthode thyroïdienne ; il y aurait donc une consti- pation hypothyroïdienne. — MM. E. Marchoux et A. Salimbeni ont découvert, chez une Æ/y/a voisine de H. Lateristriga, un trypanosome nouveau qu'ils nom- ment Tr. Borrelli. — M. G. Martin à également dé- couvert chez un lézard, le Mabuia raddouti, un trypa- nosome qu'il désigne sous le nom de Tr. boueti. — M. F. Battelli et M!!! L. Stern ont constaté que le foie et le rein ne diminuent pas l'activité respiratoire des muscles, tandis que le poumon, le pancréas, la rate et le cerveau la‘font baisser plus ou moins fortement. — MM. J.-L. Chiré et A. Mayer, par la ligature simulta- née, temporaire, des deux veines rénales pendant dix minutes, ont obtenu quatre fois sur sept, chez le chien, des crises épilepliques suivies de mort rapide. — M. F. Dévé a reconnu que l'origine de fa branche porte antérieure n'est pas fixe : dans la règle, elle naît secon- dairement de la branche de bifurcation droite du tronc porte, mais elle peut naître primitivement, et même tirer son origine de la branche porte gauche. — M. E. Malvoz signale l'existence du Tenia nana en Belgique; il en a observé 31 cas en trois ans. — M. B. Zebrowski à comparé les deux méthodes de dé- termination de la nature du sang par les précipitines et par la fixation de l’alexine et leur attribue la même valeur. — M. T. Stiennon à observé l'absence de pha- gocytose après l'injection de bacilles encapsulés de charbon bactéridien chez le cobaye. - M. L.-0. Cos- movici propose de réserver le terme de sécrétion aux phénomènes de fonte des cellules de Pintérienr des acini des glandes ou des cellules sécrétrices, et celui d'excrétion à lépuration de l'organisme des produits de la désassimilation, produits nuisibles. — M. P. Por- tier communique des observations faites au Spitzherg sur un jeune phoque conservé en captivité. L'animal peut dormir dans l'eau; toutes les deux minutes, il se rapproche de la surface pour venir respirer sans s'éveiller. — M. H. Coutière signale la présence de mâles en excès chez deux espèces de Synalphées re- cueillies en grande quantité par lA/batros dans une station du golfe du Mexique. Ce phénomène parait en rapport avec le surpeuplement de la station. — MM. P. Nobécourt et L. Rivet ont observé la présence de leucocytes dans les selles des nourrissons atteints d'infection gastro-intestinale aiguë ; elle est en rapport ayec l'intensité et la persistance de l'infection. — M. Ph. Eisenberg à constaté que la toxine du hacille du charbon symptomatique peut agir instantanément sans période d'incubation ; elle n'est pas complètement détruite à 50°C. — M. L. Lapicque propose une loi nouvelle de l'excitation électrique du nerf : NE ln ES) basée sur une conception physique du phénomène. — MM. C. Levaditi et J. Roché montrent que la des- truction critique des spirilles dans la tick-fever n'est liée ni aux bactériolysines, ni aux qualités opsoni- santes des humeurs ;'celles-ci en sont plutôt la Consé- quence. Séance du 20 Avril 1907. M. H. Iscovesco à constaté qu'à l’état ordinaire un colloïde négatif nese laisse pénétrer ni par un colloïde positif, ni par un colloïde négatif. Mais, lorsqu'on fait agir un courant électrique, un colloïde négatif se laisse traverser par un colloide de même signe, tout en con- ünuant à être infranchissable pour un colloide de signe opposé. — M. P. Portier a déterminé la tempé- rature de congélation du sang et de quelques liquides internes de Mammifères et d'Oiseaux du Spitzherg. — M. A. Gombault montre que les quatre paires de glandes de Morren des lombrics ne sont qu'un organe unique, cavité périæsophagienne ouverte par les deux bouts. Les saillies qui ont été décrites comme des 380 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES glandes ne sont que le résultat de la dilatation produite entre chaque dissépiment par l'accumulation des con- crétions calcaires. -- M. A. Netter attribue le bon effet du chlorure de calcium dans Ja pneumonie à la neutralisation de la pneumotoxine et au rétablissement de l'équilibre nécessaire entre les ions métalliques. — M. A. Lécaillon, à propos du récent Mémoire de Frie- derich sur le développement des Chrysomélides, estime que l'idée de considérer comme un blastopore l'extré- mité postérieure de l'œuf complètement segmenté peut être soutenable, mais que celle de nier que les cellules sexuelles peuvent se former pendant la segmentation ne l'est pas. — M. Ch. A. François-Frank décrit un dispositif pour la prise de vues instantanées micropho- tographiques avec l'arc voltaique. — M. P. Lassa- blière conclut de ses recherches que les poudres de viande constituent un agent de dénutrition très actif et qu'on ne peut les ranger au nombre des aliments physiologiques. Probablement, elles sont non seu- lement inutiles, mais dangereuses. — MM. Trillat el Jarricot décrivent un monstre humain acardiaque pour lequel ils proposent le terme d'hémisome. — M. Ch. Richet a constaté que la dose qui provoque le vomissement chez les chiens anaphylactisés n'est que le quart de la dose normale, quelquefois mème le dou- zième. — M. B. Zebrowski a reconnu que, dans la plupart des systèmes hémolytiques, la sensibilisatrice ou ambocepteur etle précipitinogène sont indépendants l'un de l'autre. — M. T. Stiennon montre que l'inacti- vité des leucocytes sur les bacilles encapsulés du charbon ne provient pas d’une altération des premiers. — Mie L. Fassin a observé une diminution notable de la teneur du sérum en alexine hémolytique et bacté- ricide chez les animaux thyroïdectomisés. — M. J. Arrous estime que l’action diurétique des sucres est en rapport, d'une part avec leurs propriétés physiques, de l’autre avec leur action excito-sécrétoire sur la cellule rénale. — MM. M. Doyon et Cl. Gautier ont constaté que la ligature du tronc cœliaque et dé l'artère mésen- térique supérieure, pratiquée après l’ablation de l'in- testin, détermine des convulsions et une diminution sensible de la teneur du sang en fibrine. — MM. Ch. Porcher et Ch. Hervieux font une étude comparative des procédés de caractérisation de l’acétone dans les liquides organiques; les deux meilleurs sont celui à la p-nitrophénylhydrazine et celui de Penzoldt. — M.R. Dubois montre que la lumière solaire intense est nuisible à la Bonellie, qui la fuit; mais, si on la force à subir son action, elle s’entoure d'un nuage vert de fluorochloro-bonelline; cette émission de pigment paraît constituer un moyen de défense. — MM, P. Verdun et L. Bruyant estiment qu'il n'existe pas actuellement de raison suffisante pour considérer comme deux espèces différentes la grande et la petite variété de la douve de Chine. — M. A. Brissemoret à reconnu que la purgation que provoquent les imines quinoniques est surtout le résultat d'une exagération des sécrétions intestinales. — MM. M. Garaier et P. Thaon ont observé que l’hypophysectomie totale est constamment suivie de mort; mais celle-ci n’est pas forcément immédiate. — MM. G. Kuss et E. Lobstein démontrent de nouveau que l'ingestion de noir de fumée ne détermine pas d'anthracose pulmonaire, et seulement dans certains'eas l'anthracose mésentérique. — M. L. Lapicque critique la théorie récente de Her- mann sur l'excitation électrique du muscle par les décharges de condensateurs. — M. L. Follet signale la présence de nombreux spirilles. dont plusieurs spécifiques, dans la salive des syphilitiques. — M1: P. Cernovodeanu et M. V. Henri ont constaté que la toxine tétanique possède toutes les propriétés d'un col- loïde négatif. Le bouillon de culture où se trouve la toxine renferme en plus un colloïde positif, qui peut ätre séparé par transport électrique. — M. N. Fies- singer a étudié l’action des hémolysines sur le paren- chyme hépatique; la cirrhose qu'elles provoquent est une cirrhose de remplacement. — M. E. Feuillié a re- | connu que les abcès provoqués au cours de l'albumi= nurie ont pour effet de faire disparaitre presque tota= lement lalbumine de lurine. MM. A. Marie et Requier ont fait l'analyse chimique du cerveau d’un. paralytique général saturnin ; l'hémisphère le plus. malade s'est trouvé contenir le moins de plomb. — M. M. Jungano a isolé, dans un cas de cystile fétide, un nouveau microorganisme donnant des colonies res- remblant à des flocons de neige. — MM. J. Ville et E. Derrien signalent un cas d'histonurie avec réaction. de Bence-Jones. MM. Léopold-Lévi et H. de Rothschild expliquend le mécanisme de la médication thyroïdienne dans la constipation par une action exei- tatrice sur le système neuro-musculaire de l'intestin: — MM. C. Levaditi et Inmann montrent que le pou= voir opsonisant des sérums neufs est dû à l'inter- vention du complément et, dans une faible wesure, à celle de l'ambocepteur normal contenu dans ces sé rums. — MM. C. Levaditi et K. Kæssler, par une étude comparative des anti-opsonines et des anti-Com= pléments, confirment l'identité entre le complément et l'opsonine des sérums neufs. à RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 9 Avril 4907. MM. J. Sabrazès et L. Muratet ont observé de l'éosinophilie dans un cas de kyste hydatique du foie ouvert dans les voies biliaires avec défécation de mem- branes. — M. H. Sérégé montre que l'existence d’un double courant dans la veine porte est d’une constance remarquable dans les conditions physiologiques nor= males. — M. J. Sellier à constaté l'existence de la présure dans le suc digestif de l'Aphrodite aculeata. SOCIÉTÉ FRANCAISE DE PHYSIQUE Séance du 15 Mars 1907 (fin). MM. C. Tissot et G. Hemsalech : Sur les phénomènes. de résonance dans le cas des transformateurs à circuit magnétique ouvert et leur utilité pour la production de fortes étincelles. Dans la télégraphie sans fil, ainsi que dans certaines applications spectroscopiques, on se sert de transformateurs à haute tension dont le secon- daire est relié à un condensateur. Les différents expé-=" rimentateurs qui ont utilisé le dispositif ont observé que, pour une certaine valeur de la capacité du conden: sateur en dérivation sur le secondaire, il est possible d'accroître dans une mesure plus ou moins grande la longueur de l’étincelle de décharge. En mème temps se produit un phénomène remarquable. Si l'on intercale dans le circuit d'alimentation du primaire une bobine de réactance de valeur convenable, on peut réduire le nombre d'étincelles par seconde.Il est aisé, par exemple, pour un courant d'alimentation de 42 à 50 périodes: d'obtenir une seule étincelle par seconde. L'intérêt du phénomène, au point de vue des applications, réside dans le fait que l'on concentre ainsi en quelque sorte dans un nombre restreint de décharges puissantes l'énergie mise en jeu däns le transformateur. Ces cons ditions peuvent être avantageuses en télégraphie sans fil. Dans le cas où l’on se sert d'un détecteur d'ampli= tude, l'effet utile, proportionnel à l'amplitude de l'os cillation dans le circuit inductif qui excite l'antenne, \ est indépendant de la fréquence même des trains d'onde. Il y a done intérêt à accroître le plus possiblen cette amplitude et à n'émettre que le nombre des trains juste suffisant pour produire sur le récepteur des effets discontinus capables de donner lieu à l’enre gistrement continu du signal. Ce sontles transformateurs à circuit magnétique ouvert qui paraissent le mieux sen prèter à la réalisation des conditions de résonance ques l'on envisage ici. Les auteurs signalent deux procédés. pratiques pour obtenir une résonance déterminée : 1° prendre un transformateur à circuit très ouvert et donner à la self-induction du secondaire la valeur voulue, ce qui est toujours possible et facile à réaliser & ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 381 pratiquement sans modifier le voltage secondaire, en faisant varier en rapport inverse la section du noyau de fer et le nombre des tours du secondaire; 2° réaliser un transformateur sans fuites et ajouter en série avec le secondaire des bobines de self de valeur voulue. La résonance se produit alors uniquement sur les selfs additionnelles, qu'il y aurait avantage à construire sans fer. — M. A. Blondel rappelle que le transformateur à - résonance est connu et employé en France et en Alle- magne depuis au moins trois ans. Il montre que le régime est la superposition de trois autres: un régime alternatif ordinaire amené au voisinage de la résonance, un régime oscillatoire amorti, apparaissant à chaque - étincelle, et un régime très amorti qui n'apparait guère qu'au moment où l’on branche le transformateur sur un réseau. C'est la combinaison de ce dernier régime oscillatoire syntonisé avec le régime alternatif qui pro- duit l'effet utile de ce réglage, à savoir la difficulté de . rallumage de l’étincelle après la décharge du condensa- - teur el sa rareté, réglable à volonté dans certaines limites. Cela rend l’étincelle sûrement active 4 condition d'écarter suffisamment les électrodes. — M. P. Villard - estime que de bons transformateurs à circuit magné- . tique fermé sont préférables à des appareils dont le caractère principal est une mauvaise utilisation des matériaux. Il est sans doute fort ingénieux de mettre à profit les défauts de ces instruments, mais on n'est malheureusement pas maitre de ces défauts, et l’on ne . peut, par suite, régler à volonté les constantes du cir- cuit. — M. Devaux-Charbonnel étudie la vitesse de fonctionnement des appareils télégraphiques rapides. 11 y a lieu, en Télégraphie, de distinguer la vitesse de transmission et le rendement. La première est d'ordre purement électrique. Elle dépend des phénomènes qui se produisent sur la ligne et dans les appareils lors de l'émission d'un signal, c’est-à-dire d'un courant de polarité déterminée. L'intensité, au poste récepteur, n'arrive à sa valeur maximum ou à sa valeur de régime permanent qu'au bout d’un certain temps, et il à été reconnu, par expérience, tout au moins pour les lignes aériennes, que, pour arriver distincts, les signaux ne doivent se succéder qu'à des intervalles bien définis et tels que la période variable du précédent soit à peu près terminée quand le suivant apparaît. La vitesse de transmission pourra donc se définir comme le nombre maximum de signaux successifs qu'on pourra (rans- mettre dans un temps donné, une seconde par exemple. Le rendement, au contraire, dépendra de la manière dont les appareils transmetteurs et récepteurs permet- tront de produire et de recevoir les émissions élémen- taires de courant, et aussi des nombres d'émissions qui seront nécessaires pour former une lettre, car lessignaux doivent naturellement être traduits en langage ordi- naire. Le rendement sera donc le nombre de lettres transmis par seconde. Il dépendra naturellement de la vitesse de transmission, mais, en outre, il variera beau- coup avec les procédés mécaniques employés pour mettre en œuvre les appareils. Aussi est-il impossible de faire une étude du rendement en général; il faut examiner chaque système en particulier. On peut toute- fois formuler les conclusions générales suivantes La résistance de la ligne n'intervient pas dans la durée de la période variable. Elle détermine seulement l'in- tensité en régime permanent, et le moment où le récep- teur commence à fonctionner. La vitesse de transmis- Sion dépend de la capacité et de la self-induction de la ligne. On à donc intérêt à réduire ces deux quantités. La capacité a une valeur a peu près indépendante de la nature et du diamètre du fil Mais on diminuera la self en employant des lignes en cuivre au lieu de lignes en fer. Pour les appareils, il y aura le plus grand intérêt à réduire leur self-induction. La durée de la période variable est considérablement augmentée par la présence de l'appa- reil Morse et même de l'appareil Baudot. Au contraire, les appareils Siemens et Pollak ont une influence beau- coup moindre, et même, pour le dernier, on peut dire qu'elle est presque négligeable. Il semble donc qu'on ‘par l'action de valences généralement latentes; par la soit arrivé à la limite de vitesse qu'un appareil est susceptible de permettre, car la durée de là période variable ne dépend plus que des constantes électriques de la ligne. La vitesse de transmission sera, par exemple, pour upe ligne en cuivre de 500 km. : Morse. Baudot : Siemens et Halsk Pollak et Virag . 0S0421, soit 24 signaux par sec. 0,0071, 140 — 0,0026, 355 — 0 .0023, 435 De L'habileté du constructeur consistera à faire des récep- teurs capables d'enregistrer correctement les signaux à la vitesse voulue. Supposons cette condition réalisée, le rendement dépendra du nombre de signaux élémen- taires qui seront nécessaires pour former une lettre de l'alphabet ordinaire. SOCIETE CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 12 Avril 1906. M. E. Rengade entretient la Société des propriétés de quelques oxydes alcalins (voir p.377). — M. P. Nico- lardot rappelle les difficultés que lon éprouve dans l'analyse du minerai de tungstène le plus répandu, le wolfram, par les méthodes ordinaires, et il indique le procédé dont il se sert depuis plus de trois ans. Le wolfram, réduit en poudre, mème grossière, est attaqué avec une extrême facilité par la potasse ou par la soude en fusion, L'auteur décrit ensuite les moyens de sépa- rer et de doser successivement les divers éléments qui se trouvent, soit dans la liqueur, soit dans le résidu. Il ajoute que cette méthode fixe définitivement la for- mule du wolfram, qui, pour quelques chimistes, était une combinaison de bioxyde de tungstène et d'oxyde ferrique. Le wolfram est bien un tangstate ferreux, parce que, dans les mêmes conditions, le bioxyde de tungstène ne s'attaque que très difficilement par les alcalis en fusion. Il termine en indiquant quelle est, selon lui, l'étymologie du mot wolfram. M. Nicolar- dot montre, enfin, comment il a réussi à analyser rapi- dement les composés et alliages de vanadium par l'em- ploi de l'acide oxalique. — M. Kling présente une note de M. Hinard : Sur le dosage de l'extrait sec des laits. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 6 Décembre 1906 (fn). M. W. Ellis a comparé les valeurs des éléments magnétiques déduites de la carte magnétique anglaise de 1891 avec les observations récentes. Il conclut que les variations séculaires ont subi une modification depuis l'époque où la carte a été établie, surtout pour la déclinaison magnétique et l'inclinaison. — M. W. Sutherland : Sur la chimie de la globuline. L'auteur cherche à mettre en formules les résultats expérimen- taux de Hardy et Mellanby. 11 montre que la solution de la globuline et sa précipitation ont lieu dans les conditions de l'équilibre chimique. Si p est la fraction d'une suspension de globuline dissoute dans une solu- tion saline dont la concentration est la fraction qg de G exactement suffisante pour dissoudre la suspension en entier, on à : p ({—q) — Ag (1--p), où A est le rapport de la vitesse de solution à la vitesse de pré- cipitation. On établit de même une équation pour la précipitation de la globuline par un excès de sulfate d’ammonium : p (1<+p) — 28,8 (ce — 8,152), où p est la fraction du tout que forme la globuline précipitée et c la concentration de la solution de sulfate en grammes par centimètre cube. L'auteur développe ensuite une théorie de l’état colloïdal, où il suppose qu'un colloïde consiste en molécules qui sont chimiquement uni suppression de ces valences, la masse se résout en molécules simples. A l’aide de cette théorie, on peut expliquer un grand nombre de résultats d'expérience. Il est probable que la globuline possède une masse 382 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de 40.000 et une basicité 2 (peut-être 60.000 et basi- cité 3). Un groupe C'#H#A7°0#, relié aux polypetides el aux peplones, constilue la structure prédominante des albumines. Séance du 31 Janvier 1907. M. Frank Horton : Sur la décharge d'électricité négative du calcium chaud et de la chaux. Ce Mémoire contient un compte rendu de quelques expériences dans lesquelles la perte négative du calcium chaud a été comparée à celle du platine et de la chaux dans des conditions analogues. La perte négative d'une bande de platine chauffée par un courant électrique fut d'abord étudiée. Cette bande fut ensuite couverte avec du calcium métallique par sublimation d’un fil de calcium électriquement chauffé, situé dans le tube de décharge près de la cathode. L'auteur détermina à plusieurs températures la perte négative de la bande couverte de calcium. Il laissa ensuite de l'oxygène pur entrer dans l'appareil, le calcium déposé sur la cathode étant ainsi oxydé en chaux. Ensuite, on enlève l'excès d'oxygène et on mesure de nouveau la perte négative. Puis on introduisit de l’hydrogene dans l'ap- pareil et on rechercha l'effet de ce gaz sur la perte négative. On peut résumer comme suit les résultats obtenus : 4° la perte négative du calcium est plus grande que celle du platine à la même température ; 2 en oxydant le calcium déposé sur la cathode en chaux, il se produit une grande augmentation dans la perte négative, contrairement à ce qu'on attendait, car on supposait que la présence dans la molécule de chaux de l'atome électro-négatif de l'oxygène agirait comme force attractive tendant à retenir le corpus- cule s’'échappant, et que par conséquent la perte de la chaux serait moindre que celle du calcium dans les mêmes conditions; 3° la perte négative de la chaux dans l'hydrogène est beaucoup plus considérable que dans l'air ou l'hélium. — M. B. Hopkinson décrit un calorimètre enregistreur pour les explosions. Là chambre à explosion est entourée, dans sa partie cylindrique, d'une bande de cuivre enroulée en hélice. La méthode consiste à enregistrer l'augmentation de résistance de la bande de cuivre quand l'explosion se produit; l'augmentation de résistance est proportion- nelle à l'augmentation de température moyenne de la bande. Connaissant la capacité calorifique du cuivre, la chaleur totale qui l’a traversé à chaque instant peut être obtenue d’après le diagramme enregistré, après application de certaines corrections La résistance est obtenue en faisant passer un courant connu (d'environ 8 ampères) à travers la bande et en enregistrant le potentiel aux bornes de la bande au moyen d'un gal- vanomètre à réflexion. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 22 Mars 1907. M. Pochin présente un instrument décrivant des spirales logarithmiques, au moyen duquel les prinei- pales propriétés des logarithmes et des spirales équian- gulaires peuvent être établies comme résultats expéri- mentaux. — M. W. A. Price décrit un instrument construit sur des principes analogues et qui permet de tracer la courbe exponentielle y = a e *lè., — M. T. H. Blakesley décrit des assemblages de barres disposées en croix de telle façon que leurs extrémités soient toujours sur une circonférence; ces « treillis loga- rithmiques » peuvent servir pour certains calculs. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 21 Mars 1907. M. Em. Fischer, continuant ses recherches sur les polypeptides, à préparé un octodécapeptide, la /-leu- . CH°C'H*. SO et d'acide d/-benzylméthyléthylpropyl® cyltriglycyl-/-leucyltrigycyl-1-leucyloctaglycylglycine: — M. F.S. Kipping, en sulfonant le d/-benzylméthyl= éthylpropylsilicane, a obtenu un mélange d'acides ben= zyléthylpropylsilicolsulfonique, (C°H°) (C°H°) Si (OH}: silicanesulfonique (CH*)(C?H°)(C#H7) Si. CH2CFHE, SSH, dont il a isolé les sels de Zzmenthylamine, F.210°-2120et 1219-1239, — M. H. J. H. Fenton a obtenu, dans de conditions appropriées, par l’action de Mg sur un® solution aqueuse de CO*, une quantité appréciable de formaldéhyde. D'autre part, il a réduit par Mg l'acide formique en aldéhyde.— M. G.T. Moody communique de nouvelles expériences qui montrent que, dans Ja rouille du fer, le métal est d’abord dissous par un acide avec formation de sel ferreux, qui ultérieurement: s’oxyde en rouille. — M. J. Ch. Philip a étudié l'in fluence des non-électrolytes et des électrolytes sur la solubilité des gaz peu solubles dans l'eau. Il suppose que ces substances n’ont par elles-mêmes aucune in= fluence; mais, si une hydratation intervient, la partie du solvant ainsi combinée n'absorbe plus de gaz. — MM. W. J. Pope et S. J. Peachey, par action de CIFMgl sur le chorure platinique, ont obtenu l’iodure de triméthylplatiniméthyle (CH*)*PtT; bouilli avec AgO, il est converti en hydrate (CH*)#Pt.0H. L'hydrate, traité par l'acide nitrique, donne le nitrate, et celui-ci le chlorure par précipitation avec un chlorure alcalin. — MM. R.S. Morell et A. E. Bellars, en ajoutant à une solution alcoolique de guanidine divers sucres, ont obtenu des précipités blancs microcristallins, dont la formule. pour les composés avec le dextrose, le lévulose et le mannose, est 3 C°H#06.2 CAZ*H5. Ces composés en solution présentent la mutarotation. — M'le A. Homer, par l’action d’AICI sur lé naphtalène, a obtenu : le £f- dinaphtyle, le tétraméthylnaphtalène, le tétraméthylé- rythrène C#H® et le tétranaphthyle C{H*%. — M. P. C. Ray a préparé l’hyponitrite mercureux à l’état pur. Il est décomposé par la chaleur avec dégagement d’Az, Az0 et AzO; l'hyponitrite d'argent donne les mêmes gaz. — MM. Th. S. Patterson et J. Kaye ont préparé le diacétyl-i-tartrate de /-menthyle et mesuré sa rota- tion optique ; les résultats fournissent un argument décisif contre l'hypothèse de van't Hoff concernant la superposition optique. —- MM. R. W. L. Clarke et A. Lapworth, en condensant le cyanhydrate de benzyl- idène-aniline avec la carvone, ont obtenu la phényl- imino-$-benzoyldihydrocarvone, qui est hydrolysée par les acides en deux $-benzoyldihydrocarvones sté= réoisomères. — MM. C. F. Cross, E. J. Bevan et F. J. Briggs ont constaté que l'amidon imbibé de CS* et traité par NaOH est transformé en éther xanthogé-= nique del’amidon.— MM. R. Robertson et S.S. Napper. décrivent une méthode pour la détermination de petites quantités de peroxyde d'azote, basée sur les change- ments observés dans le spectre d'absorption caracté- ristique de ce corps lorsque sa concentration augmente dans des mélanges dilués. — Les mêmes auteurs ont étudié la décomposition du coton-poudre lorsqu'il est chauffé : dans le vide, dans un courant de C0, dans le bioxyde d'azote, dans l'air. Dans tous les cas, plus d’un dixième de l'azote dégagé l’est sous forme de peroxyde: — MM. J. N. Collie et Th. P. Hilditeh, en faisant agir l'acide sulfurique à 85 °/, sur l'acide déhydracétique et versant le produit dans l’eau, ont obtenu un acide isomère, F. 99%, qui est un acide pyronecarboxylique: SOCIÈTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES 1 SECTION DE MANCHESTER Séance du 8 Mars 1907. M. F. Howles expose quelques-uns des récents pro- cédés de combustion électro-thermique de l'azote at mosphérique. Cette question a été traitée à plusieurs reprises dans la /evue. FH | | #1 ACADÉMIES ET SOCIETÉS SAVANTES 383 ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 30 Mars 1907. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. H. Schoute pré- sente au nom de M. $S. L. van Oss : Æquilibre de systèmes de forces et de rotations dans l'espace :,. Dans le cas de onze forces suivant des droites fixes quel- conques, il n'y a en général qu'une distribution uni- que des rapports des intensités, de manière que le système des forces soiten équilibre. Pour que » forces (1>n>#4) en équilibre n'admeitent qu'une distribu- tion unique des rapports des intensités, il faut et il suffit qu'elles appartiennent simultanément à 21— - complexes linéaires. Rapport entre les théorèmes fon- -damentaux de la géométrie de l'espace &, et ceux de la théorie des vis de M. R. S. Ball. — Ensuite M. Schoute présente la thèse de M. M. G. de Boer : « De ralionale -krommen van den vijfden graad in R,enR, » (Les courbes rationnelles de l'ordre cinq dans les espaces e, etc). — Enfin M. Schoute présente au nom de M. F. Schuh, pour les Mémoires de l'Académie : « Sur le lieu des points du plan dont la somme des distances à n droites données est constante, et les questions analogues pour les espaces à trois et plusieurs dimen- sions ». Sont nommés rapporteurs MM. Schoute et J. Cardinaal. — M. C. Lely : Vitesse du courant dans un canal ouvert à Panama. Après un examen minu- tieux, le Gouvernementaméricain a commandé l'exécu- tion d'un projet de canal à haut niveau (de 25,9 de hauteur au-dessus du niveau moyen de la mer) à trois systèmes d'écluses ; à côté de ce projet, une minorité du « Board of consulting Engineers » avait proposé un canal à niveau à un seul système d'écluses. Ce système figurerait comme séparation entre Océan Atlantique et l'Océan Pacilique ; de part et d'autre de ce système d'écluses, le canal serait en communication libre avec les deux océans, Maintenant on se demande s'iln'aurait pas été possible d’omettre, dans le projet de la minorité, ce système d'écluses et de construire un canal tout à fait ouvert, comme le canal de-Suez. En 1879, la Com- mission technique du Congrès international de Paris jugea un système d'’écluses, près de l'extrémité de Panama, absolument nécessaire; cette opinion se basait sur l'hypothèse qu: ce canal sans écluse présenterait des vitesses de courant de 2 à 2,50 à la seconde, dues au mouvement des marées, quoique les auteurs du projet original, MM. Wyse et Reclus, eussent conclu, par analogie avec le canal de Suez, que les vitesses ordinaires ne surpasseraient pas 0",90 (sous l'influence du vent 4%,30 à 1,35) par seconde. M. Lely examine de plus près cette question des vitesses de courant dans ün canal sans écluse. Sa conclusion s'accorde avec celle de l'Académie des Sciences de Paris en 1887, que les vitesses de courant dues au mouvement des marées et dans un canal sans écluse ne seraient pas préjudicia- bles aux intérêts de la navigation. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. W. H. Julius : Lon- queurs d'onde des maxima démission et d'absorption ‘dans le spectre ultra-rouge trouvées antérieurement. Si l’on veut déterminer le lieu d'une bande d'émission ou d'absorption du spectre ultra rouge obteou à laide d'un prisme de sel gemme, la longueur d'onde corres- pondante montre toujours une incertitude, pour une partie considérable du spectre, plus grande que ler- reur probable de l'observation: cela tient à ce qu'on n est pas tout à fait d'accord sur l'allure de la ligne de dispersion du sel gemme. Récemment, M. W.J. H. Moll à comparé entre elles les deux lignes de dispersion qu'on déduit des séries d'observations de M. H. Rubens et M. S. P. Langley à l’aide de la formule de Ketteler. Les résultats de Langley se rapportent à la tempéra- ture de 20°; ceux de Rubens ont été réduits à cette température. M. Moll trouva que le parfait accord entre les deux lignes dans le spectre visible a pour consé- quence que, dans toute la partie ultra-rouge, les lon- gueurs d'onde des rayons d'indices de réfraction don- nés d'après Langley surpassent celles de Rubens; ainsi à 1,5 p, la différence est 0,028 w, et cette diffé- rence s'élève à 0,062 w pour 3 environ, pour dimi- nuer ensuite à 0,032 & pour 8,5 p. Si l'on cherche réci- proquement la différence entre les indices de réfrac- tion attribués par Langley et Rubens à des rayons de la mème longueur d'onde, les déviations dans tout le domaine de 4 & à 8,3 p sont sensiblement égales à 1,5 unité de la quatrième décimale : cependant, les moyens dont on dispose à présent permettent une exactitude beaucoup plus grande. Quand l'auteur publia ses premiers résultats sur les spectres d'émission et d'absorption ultra-rouges (1887-1891), il n'avait en main que les déterminations de la dispersion du sel gemme de Langley, limitées à 5,3 p; aussi, il les exprima dans la forme originale, c’est-à-dire en angles de déviation minima, réduits à la température de 10°. Pour le besoin d'une évaluation grossière des longueurs d'onde, il prolongea la ligne de dispersion de Langley par une droite. Malheureusement, ces résultats, obtenus à l’aide d'extrapolations, ont été insérés dans plusieurs manuels (Winkelmann, Kayser, Chwolson). Ici, l'auteur corrige ses résultats antérieurs ; il fait connaître les indices de réfraction découlant immédiatement de ses observa- tions et y joint les longueurs d'onde déduites des lignes de dispersion de Langley et de Rubens.— Ensuite, M. Julius présente la thèse de M. W. J. H. Mol: « On- derzoek van ultra-roode spectra » (Examen de spectres ultra-rouges). — M. J. D. van der Waals : Contribu- tion à la théorie des mélanges binaires. Suite (voir Rev. génér. des Se., t. XVIII, p. 299). Discussion dé- taillée de la forme des lignes g— const. en présence . 124 à : rs : de la ligne Ta — 0; à chaque point d'intersection de d EU . e d'y à la ligne g—c avec la ligne Lo la tangente à la Î Ù dx Ÿ ligne g—e est parallèle à l'axe des x. Groupe de lignes g=— e à volume maximum et volume minimum. Point d'inflexion de la ligne g— € à l’intérieur de la dy dx? points de plissement. Groupe de lignes g= € à quatre points d'intersection avec la ligne spinodale. Points de plissement homogènes et hétérogènes. Nouvelle forme de l'équation différentielle de la ligne spinodale. — Ensuite, M. Van der Waals présente : La forme de l'isotherme empirique pendant la condensation d'un mélange binaire. Dans la position des axes coordonnés admise par l’auteur, l'isotherme empirique ne possède en général aucun point à langente horizontale. Cas d'exception. — M. H. Kamerlingh Onnes, aussi au nom de M. W. H. Keesom : Contribution à la connaïis- sance de la surface % de van der Waals. XV. Cas où l'une des deux composantes est un gaz sans attraction, à molécules admettant des dimensions. Suite (voir Rev. gén. des Se., t. XVII, p. 300). 7. La forme des lignes spinodales et des plis dans le cas où les molé- cules de l’une des deux composantes exercent une attraction faible. — M. C. H. Wind : Une hypothèse sur l'origine des rayons Rüntqen. L'auteur suppose que non seulement les éléments du rayon cathodique, mais, à côté de ceux-ci, les atomes de l’anticathode seraient les centres principaux d'émission des rayons Rôntgen. L'admission de cette hypothèse donne une signitication plus importante à la détermination expé- rimentale de la « longueur d'onde » de ces rayons, à cause de son rapport intime avec le diamètre des atomes. Plusieurs questions attendent une solution expérimentale. — M. H. A. Lorentz présente la thèse de M. H. B. A. Bockwinkel: « Van de stralingsverschijn- selen in bewogen stelsels » (Des phénomènes de rayon- nement dans des systèmes en mouvement), et au nom de M.J.M. van Bemmelen: « De ontdekking van soda- bereiding uit keukenzout door Leblanc-Dizé ». (La pré- paration de la soude d'après le procédé Leblanc-Dizé). 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. A. W. Hubrecht : ligne — 0, ete. Etude de la ligne spinodale et des 384 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES La génération des corpuscules rouges du sang de Galeopithecus volans. — Rapport de MM. Hubrecht et Max Weber sur l'étude de M. Hans Strahl de Giessen : « Der Uterus puerperalis von Ærinaceus europaeus L. » {L'utérus puerpéral du hérisson). Le travail va paraître dansles Mémoires de l'Académie. — Enfin, M. Hubrecht présente la thèse de Me M. van Herwerden : « Bijdrage tot de kennis van menstrueelen eyclus en puerperium » (Contribution à la connaissance du cycle menstruel et de l’état puerpéral), et de lui-même : « Normaltafeln zur Entwicklungsgeschichte des Koboldmaki und des Plumplori » (Tableaux normaux sur l'embryologie du Tarsius spectrum et du Nycticebus tardigradus). — M. C. E. A. Wichmann présente au nom de M. L. Rutten: Les Trichéchides fossiles de la Zélande hollandaise et de la Belgique. 1. Description du crâne, comparaison avec celui du Morse. 2. Comparaison du crâne avec les Trichéchides fossiles déjà connus. — M. J. W. Moll présente la thèse de M. Ph. van Harreveld : « Die Unzulänglichkeit der heutigen Klinostaten für reizphy- siologische Zwecken ». (L'insuffisance des clinostats actuels pour les recherches physiologiques sur les excilations). — M. G. C. J. Vosmaer présente la thèse de M. G. J. de Groot : « Aanteekeningen over de ontwikkeling van Scoloplos Armiger » (Annotations sur le développement du Scoloplos Armiger). P. H. ScHoutTe. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de Mars 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Millosevich annonce qu'il a découvert une étoile variable dont il donne la position ; l'éclat de cette étoile, de couleur jaune, est en décroissance. — M. S. Medici donne la démonstration du théorème sur lequel M. Fubini, dans une précédente communication, s'est appuyé pour prouver que Je problème de Dirichlet, dans certaines hypothèses, peut se considérer comme un problème de minimum. — M. H. Lebesgue : Sur la recherche des fonctions primitives par l'intégration. 20 Sciences PHYSIQUES. — M. A. Battelli a déterminé les chaleurs spécifiques des liquides se solidifiant à des températures très basses ; les liquides étudiés ont été l'éther éthylique, l’éther de pétrole, les alcools éthy- lique et amylique, le toluène, le bromure d’éthyle, le sulfure de carbone. — M. A. Blanc à entrepris des expériences pour déterminer la diminution de l’activité d'une préparation de radiothorium qui renferme des quantités non appréciables de thorium; il a cherché à établir la loi de désactivation et la valeur de la con- stante correspondante. Cette constante est de 737 jours pour la désintégration de la moitié du nombre d'atomes existant dans une certaine masse de radiothorium. — M. A. Gallarotti a repris les expériences de Perrin et de Mac Clung sur l'ionisation des gaz avec les rayons Rôntgen; ceux-ci sont arrivés à des conclusions très différentes sur la relation entre l'intensité de l'ionisa- tion et la température ; M. Gallarotti a trouvé que cette intensité est indépendante de la température. — M. L. Marini établit une compataison entre les aéromètres à immersion partielle et à immersion totale, pour la mesure de la densité de l’eau de mer, qui ont été employés dans plusieurs expéditions ; et il montre les modifications à apporter à ces instruments et les méthodes de mesure qui donnent des indications exactes jusqu'à la cinquième décimale. — MM. A. An- geli et G. Marchetti, après avoir étudié la facon dont se comportent les indols et les pyrrols sous l'action de l'acide nitreux, donnent une plus grande généralisation à la réaction qu'ils ont découverte, examinant les dérivés dans lesquels l'hydrogène aminique est rem- placé par l’oxhydrile. — M. G. Gallo expcse une méthode qui sert à la détermination volumétrique exacte du titane. — M. I. Bellucci et M. F. Donnini décrivent leurs recherches sur un cobaltite cobalteux et potassique. — MM. G. Magri et G. Ercolini indi- quent un procédé pour séparer quantitativement le fer du titane et de l’aluminium, appliquant l'emploi de la membrane à l'analyse électrolytique quantitative. M. L. Cambi a fait des recherches sur la formation des sels doubles dans des solvants différents de l’eau. M. R. Ciusa et C. Agostinelli communiquent leurs expériences sur l'action du chlorure de picryle sur les phénylhydrazones des aldéhydes aromatiques. — M. B* Oddo décrit d'autres combinaisons des composés organo-magnésiens mixtes avec les bases pyridiques et quinoléiques. — M. G. Buglion et I. Simon, obser vant que, depuis quelque temps déjà, on établit em pharmacologie une distinction marquée entre action et toxicité physique, et action et toxicité chimique des: médicaments, ont entrepris l'étude pharmacologique fondée sur les lois physico-chimiques, des solutions de l'alcool et des anesthésiques. — M. G. A. Barbie s'occupe du passage, par oxydation, des composés céreux aux composés cériques ; avec M. A. Volpino, le mème auteur étudie les propriétés catalytiques de éléments des terres rares, propriétés que l’on utilise dans la Chimie industrielle. : 3° SorENCES NATURELLES. — M. G. Di Stefano s'occupe des prétendus phénomènes de charriage en Sicile, qui ont été signalés par MM. Lugeon et Argand ; il démontre que cette hypothèse manque de base, puisqu'elle est contredite par les conditions géologiques. — MM. C. De Stefani et A. Martelli ont examiné les stratifications de l'ile d’Arbe au Guarnero et en décrivent les fossiles: — M. L. De Marchi démontre que les déplacemen élastiques produits dans les couches terrestres par le transport continu des matériaux des zones de dégra- dation continentale aux zones de sédimentation océa nique, sont suffisants à expliquer les lignes générales du relief terrestre et les caractères fondamentaux des: rides orogénétiques. — M. A. Rosati décrit deux roche ‘importantes du vallon de Monfeis, près Demonte; ce« sont un schiste octolithique et une amphibolite sodique, dont il a fait l'étude microscopique. — M. E. Clerici remarque que l'indice. de réfraction est un excellent. moyen de détermination des minéraux, mais que la méthode d'immersion dans des liquides dont on connait. déjà l'indice peut être améliorée, en substituant aux liquides organiques, dont on fait ordinairement usage, les solutions aqueuses que l'on prépare au moment même de s'en servir ; il donne des détails sur cette pré paration et sur la manière d'opérer. — M. A. Serra présente jes résultats de ses recherches chimiques sur les échantillons de pyrrotine de la Sardaigne qui se trouvent à l'Institut de Minéralogie de Sassari. — M. L Pigorini signale et décrit la diminution de la toxicité du nitrate d'argent traité avec du disulfate sodique, et l'influence que la lumière exerce sur ce phénomène. — M. A. Russo expose les méthodes qu'il a suivies et le résultats obtenus, pour augmenter artificiellement las production du sexe féminin chez les lapins, et pour fixer dans la première génération des croisements les variétés récemment obtenues. — M. U. Mosso rappelle la sensation de fatigue, d'épuisement que l’on éprouve au commencement de la digestion, et il décrit une série de recherches qu'il a exécutées pour étudier, ave l'ergographe, les courbes de la fatigue, avant et aprè l'ingestion des aliments. Ces expériences, très détail lées, démontrent qu'il doit se former dans notre orgas nisme, après avoir mangé, des produits toxiques qu sont portés par le sang aux muscles, dont ils dimi nuent l'activité. Ces substances toxiques sont rapides ment éliminées ou détruites, et leurs effets dépenden de la qualité et de la quantité des aliments. ERNEsTO Mancini. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. = 18° ANNÉE N° 10 30 MAI 1907 Revue générale D cCences i pures el appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions scientifiques Election de M. H. Douvillé à l'Académie des Sciences. L'Académie a récemment nommé membre de sa Section de Minéralogie, en remplacement de feu Marcel Bertrand, M. H. Douvillé, professeur de Géologie à l'Ecole des Mines. On doit au nouvel académicien une longue suite de recherches d'ordre paléontologique, stratigraphique et tectonique, relatives : d’une part à la détermination des terrains de plusieurs régions de l'Afrique et de l'Asie d'après des échantillons de leurs faunes fossiles rap- portés par nos explorateurs, d'autre part aux grandes questions de Géologie générale actuellement à l’ordre du jour. M. Douvillé a notamment pris une position d'avant-garde dans la discussion des faits qui, depuis les beaux travaux de Suess et de Marcel Bertrand, commencent à jeter quelque lueur sur l'architecture du globe terrestre et son évolution depuis la période primitive jusqu'à nos jours. Ses savantes investigations ont fortement contribué au progrès des études des- tinées à relier la Géologie à la Mécanique et à l'As- tronomie. Election de M. H. Le Chatelier à lAcadé- mie des Sciences.— Dans sa séance du 6 mai 1907, PAcadémie des Sciences a élu M. H. Le Chatelier membre de sa Section de Chimie, en remplacement de feu Henri Moissan. Cette élection vient consacrer offi- ciellement la valeur de travaux qui, sans doute par suite de leur diversité apparente et de l'appel qu'ils ont dû faire à plusieurs groupes de sciences, n’ont pas toujours été appréciés autant qu'ils le méritaient. M. H. Le Chatelier s'est fait depuis longtemps le champion de l'application de la science à l'industrie; mais, mieux préparé et plus persévérant que la plupart de ceux qui avaient tenté quelque effort dans ce sens, il ne s’est pas laissé arrêter par les réelles difficultés rencontrées sur son chemin. Les problèmes scientifiques dont l'étude des phéno- mènes industriels nécessite la solution sont, en effet, des plus compliqués; en ce qui concerne, en particu- lier, les industries qui utilisent les phénomènes d'ordre REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. chimique, on n'y voit qu'exceptionnellement intervenir les lois simples de la stæchiométrie chimique, et on y utilise surtout des réactions incomplètes, de même qu'on y prépare principalement des corps dont la cons- titution complexe permet de réaliser des propriétés exceptionnelles, mélanges dont le microscope seul permet de déceler l'hétérogénéité ou même mélanges isomorphes ou solutions solides, toutes choses que les études de Chimie scientifique laissaient complètement de côté il y a encore quelques années. M. H. Le Chatelier a donc été naturellement conduit à des travaux portantsur ce qu'on a appelé la Mécanique chimique ou la Physico-chimie, et il a contribué, pour une part importante, à établir les principes de cette science naissante, à en préciser et à en généraliser l'application. Les lecteurs de la Revue générale des Sciences ont eu la primeur de certaines des études qu'il a publiées sur ce sujet, soit seul, soit en collabo- ration avec M. Mouret. Ces recherches, d'ordre pure- ment théorique, qui avaient pour but de classer les phénomènes complexes laissés de côté jusque-là dans les études scientifiques proprement dites, M. H. Le Chatelier les a appliquées à de nombreuses questions industrielles, dans lesquelles il est arrivé ainsi à d’im- portants résultats pratiques. Sans vouloir énumérer ces différentes applications, nous rappellerons : les recherches sur la combustion et l'inflammation des mélanges gazeux (notamment du grisou), effectuées en commun avec Mallard, et qui ont conduit à la décou- verte des explosifs de sûreté actuellement employés dans les mines grisouteuses; les études sur les chaux, ciments et mortiers, sur les produits céramiques, et enfin les études sur les alliages métalliques, études qui forment la base de la nouvelle branche de science à laquelle on donne le nom de Métallographie. Au cours de ces différentes recherches, M. H. Le Chatelier à créé des appareils dont plusieurs sont devenus d’un usage courant et parmi lesquels il con- vient de citer spécialement le pyromètre thermo-élec- trique, qui fournit une solution particulièrement heu- reuse de la mesure des températures élevées et dont onne compte plus les applications, tant dans les usines que dans les laboratoires en France et, plus encore peut-être, à l'Etranger. G. Charpy. 10 295 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 2. — Nécrologie | D. I. Mendéléeff. — La Russie vient de perdre l'un de ses plus grands savants, dont la réputation était universelle : Dmitri Ivanowitch Mendéléeff, né le 7 février 183%, à Tobolsk, en Sibérie, mort à Saint- Pétersbourg, le 2 février 4907. I fit son éducation au Gymnase de Tobolsk et dans la Section scientifique de l'Institut Pédagogique de Saint-Pétersbourg, institution qui a pour but de former des professeurs de gymnases. Il eut une brève période d'activité comme professeur, et obtint ensuite le diplôme de Magister Chemiæ à l’Université de Saint-Pétersbourg en 1856. Après un séjour de deux ans à Heidelberg, il devint Professeur de Chimie à l'Université de Saint-Pétersbourg, fonction qu'il conserva jusqu'à sa mort. Mendéléeff à été un écrivain très prolifique; il a travaillé dans chaque branche de la science chimique. Il augmenta nos connaissances sur la Minéralogie et la Géologie chimique et entreprit plusieurs recherches de grande importance en Chimie organique. Il à publié en 1863 la première encyclopédie russe de Chimie technique. Son influence sur l'industrie du pétrole russe à été des plus considérables. Mais la réputation de Mendéléeff repose pricipalement sur ses contribu- lions à la Chimie physique et à la Philosophie chi- nique; parmi les plus importantes, on peut citer ses recherches sur les volumes spécifiques, entreprises à la suite du travail de Kopp, tandis qu'il était encore étudiant, en 1855, et continuées jusqu'en 1870. Mendéléeff était considéré comme un professeur de talent. Deux générations de chimistes russes lui doivent leur formation. Son Traité de Chimie organique fut le travail marquant de l'époque; ses « Principes de Chi- mie », imprimés en 1869, eurent sept éditions en Russie et trois en Angleterre. C'est un véritable trésor d'idées, duquel les savants ont constamment tiré des sug- gestions pour de nouvelles recherches. bans ce livre, Mendéléeff a développé la grande gé- néralisation connue sous le nom de Loi périodique. Partant de cette idée que les deux signes ou mani- festations de la matière sont : 4° la masse, 2° l'indivi- dualité, et qu'à la fois la matière et les éléments chimiques sont indestructibles, il en déduisit qu'il doit exister quelque lien ou quelque union entre la masse et les éléments chimiques et, par conséquent, aussi entre les propriétés d'un élément et son poids atomi- que. Cette conception l’a conduit à comparer les poids atomiques et les propriétés typiques des éléments; il en résulta un Mémoire, lu devant la Société chimique russe en mars 1869, intitulé : « Sur le rapport des propriétés et des poids atomiques des éléments ». Ce Mémoire renfermait, en somme, tous les points de Ja Loi périodique telle qu'elle est maintenant générale- ment acceptée, et dans les articles subséquents de ‘auteur on ne trouve que des applications des mêmes principes. Dans son traité, Mendéléeff indique que, lorsqu'il arrangea le système périodique, il fit usage des pré- cédentes recherches de Dumas, Gladstone et Pettenkofer sur les poids atomiques des éléments alliés; il ne con- naissait pas les travaux de de Chancourtois et de New- lands. Ce dernier, cinq ans auparavant, avait attiré l'attention sur la périodicité des propriétés des éléments disposés dans l’ordre de leurs poids atomiques, et avait suggéré que les espaces inocvapés dans la table pou- vaient être remplis par des éléments alors inconnus, ou par des éléments connus dont les poids atomiques n'avaient pas été déterminés exactement. Le travail de Newlands, cependant, avait été recu avec incrédulité et inéme dérision, et il était réservé à Mendéléeff d'éveiller l'intérêt réel du monde scientifique sur ce sujet, On le doit particulièrement au fait qu'il avait une si profonde convicüon de l’universalité du principe qu'il avait énoncé, qu'il n'hésila pas à pronostiquer en sa faveur el même à corriger des poids atomiques acceptés. Ainsi il prédit non seulement J'existence, mais aussi les propriétés générales et la conduite chimique de nouveaux éléments jusqu'alors non découverts, pour remplir les blancs de la table qu'il avait construites et lorsqu'on isola le gallium, le scandium et le germaz= nium, on reconnut qu'ils réalisaient ces prédictions d'une manière frappante; l'existence des gaz inertes de l'atmosphère avait été aussi déduite de la Loi. De plus, les recherches de Roscoe et de Zimmermann ont montré: que Mendéléeff avait eu aussi raison en réduisant le poids atomique de l'uranium à 120, le faisant ainsi cor- respondre avec le système périodique, alors qu'en 1869, on l'avait généralement fixé à 240. La dernière œuvre du chimiste russe fut sa « concep= tion chimique de l'éther », que la Æevue a fait con- naître à ses lecteurs‘. Elle témoigne de la profondeur et de l'originalité des vues de Mendéléeff. $ 3. — Astronomie La figure des planètes. — M. Liapounoff publie? la première partie des recherches qu'il avait annoncées précédemment sur l'équilibre d'une masse fluide animée d'un mouvement de rotation. Cette première partie est déjà complète à elle seule, et contient toute: la solution générale de la question. Le géomètre russe s'est proposé, on le sait, de trouver, pour les figures d'équilibre peu différentes d'un ellipsoide de Maclaurin ou d'un ellipsoide de Jacobi, non plus une première approximation, mais uue solution rigoureuse, représentée par des déve= loppements dont la convergence puisse être établie. En partant de figures peu différentes d’un ellipsoïde, M. Liapounoff impose d'ailleurs à ces figures, par rap port à l’ellipsoïde en question, une sorte de « voisinage du premier ordre » (au sens que ce mot a chez Weiïer= strasss) : c'est-à-dire qu'il admet (au moins dans le travail actuel) non seulement que la distance entre les deux surfaces est partout très petite, mais que les oscillations de cette distance sont aussi limitées en rapidité. Ë Dans ces conditions, par un point quelconque de 1 surface limite cherchéeS, faisons passer un ellipsoïde homofocal à l'ellipsoide primitif E. L'attraction de la couche comprise entre E et E' peut évidemment s développer suivant les puissances de la différence Ÿ qui existe entre les paramètres qui définissent les deux ellipsoides. Il s'agit ensuite d'évaluer l'attraction de la couche (tantôt positive et tantôt négative) comprise entre E' et S. A cet effet, imaginons que, pour chaque point de S, on réduise € dans un même rapport : (compris entre zéro et un). La couche à évaluer sera, elle aussi, réduite dans un rapport du même ordre que «; et, ainsk modifiée, son attraction sera développable suivant les puissances de :. On constate que, moyennant les limi tations précédemment admises pour £ et ses variations, ce développement a un rayon de convergence supérieur à l'unité, de sorte qu'il est valable pour := 1 et repré sente le terme complémentaire cherché. Le premier membre de l'équation du problème ayant ainsi été développé en somme de termes de différents ordres, on peut procéder par approximations succe sives. Chacune d'elles conduit à la résolution d’une équation intégrale de Fredholm. { L'emploi de la méthode générale de Fredholm n'est, d’ailleurs, pas nécessaire dans ce cas. Grâce à ce fait qu'on part d'un ellipsoïde, les fonctions de Lamé uffisent,. Pour que l’on trouve des figures d'équilibre nom ellipsoïdales, il faut que le déterminant de l'une quel=« conque de ces équations intégrales (lesquelles ne diffèrent entre elles que par leurs seconds membres} F ‘ Voyez la Revue du 15 août 1904, p. 719. 2 Memoires de l'Ac. des Sciences de Saint-Pétersbourg (année 1906), 3 Voir la Revue du 29 février 1904. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 387 it nul. On obtient ainsi deux suites indéfinies d'équa- ns, dépendant chacune d’entiers arbitraires et déter- inant un ellipsoide de Jacobi ou un ellipsoide de aclaurin. Au voisinage de l’un quelconque de ces ipsoïdes, existent des figures d'équilibre correspon- dant à une certaine expression de la quantité &, savoir un développement suivant les puissances de deux para- ètres « et n, lesquels ne sont pas indépendants, mais iés par une certaine relation que l’on apprend éga- lement à former. On peut obtenir des majorantes pour les différents termes de ces développements et démontrer, par con- séquent, leur convergence. Les figures voisines des ellipsoïdes de Jacobi ont un ou deux plans de symétrie. Celles qui sont voisines des ipsoides de Maclaurin en ont un nombre quelconque, ou sont même de révolution. 11 reste un certain nombre de questions intéressantes àrésoudre, telles que celle de savoir combien de figures correspondent à une valeur donnée du paramètre nr, lequel correspond à l'accroissement de la vitesse angu- aire de rotation; celle de savoir s'il existe des figures d'équilibre ayant avec un ellipsoïde au voisinage d'ordre éro (c'est-à-dire avec limitation de €, mais non de ses Variations, etc.); c'est à elles que M. Liapounoff se réserve de consacrer un travail ultérieur. $ 4. — Navigation Le mouvement de la navigation dans les ports français en 1905. — La Direction gé- nérale des Douanes vient de publier le T'ableau yénéral du Commerce et de la Navigation pour 1905. 11 y a, dans ce gros volume, une mine de documents du lus haut intérêt, dont il peut être intéressant d'envi- Sager quelques chiffres. … Si l'on considère la période qui s'étend de 1886 à 1905, au point de vue du mouvement général de la navi- ation, pour notre pays, on voit que le tonnage des ntrées et des sorties n’a cessé de progresser (22 mil- lions de tonneaux de jauge en 1886; 37.920.100 ton- neaux de jauge en 1905) ; mais on voit aussi que la plus rande part revient aux pavillons étrangers dans cette xtension du mouvement maritime de nos ports. ÆEn 1905, par exemple, il ne revient à notre flotte de commerce, dans les transports ressortissant à la navi- ation de concurrence, que 3.066.763 tonnes à l'entrée 118,76 °/,) et 2.198.537 tonnes à la sortie (41,22 o 6) tandis que les parts afférentes aux pavillons étrangers sont de 81,24 °/, à l'arrivée et 58,78 °/, au départ. — Du reste, il ressort des données de divers tableaux sur l'évaluation du fret payé en 1905, que la moyenne des sommes payées aux compagnies de navigation “étrangères, pendant l'année 1905, pour le transport de nos marchandises d'importation et d'exportation, aurait “été de 580.000 francs environ par jour. —… Le port de Marseille continue à figurer en tête des «ports français où le trafic offre le plus d'activité. Pen- dant l'année 1905, sa part dans les transports mari- times a été de 6.521.439 tonnes de 1.000 kilogs. Le Havre en compte 3.248.291; Dunkerque, 2.998.931 ; - Bordeaux, 2.898.858; Rouen, 2.789.092: Nantes, 1.319.247: Saint-Nazaire, 1.251.815 ; Cette, 794.559 : Bayonne, “153.318; La Rochelle, 732.540; Caen, 663.984; Bou- logne, 606.695; Dieppe, 471.085: Saint-Malo, 419.133: Calais, 400.537; Brest, 369.315; Pauillac, 339.634: . Saint-Louis-du-Rhône, 338.740 : Cherbourg, 300.197; Rochefort, 253.921; Le Tréport, 252.817; Honfleur, 231.455. C'est surtout à l'entrée que se manifeste l'activité de notre mouvement maritime. Ainsi, en 1886, le tonnage es navires chargés ayant fréquenté nos ports repré- sentait à l'entrée 12.554.394 tonneaux contre 9.164.767 tonneaux à la sortie, soit, sur 109 tonneaux à l'entrée, 3 tonneaux à la sortie. Depuis, la situation s'est amé- lorée ; mais l'écart reste encore considérable entre le tonnage d'entrée et celui de sortie; les chiffres de la dernière année correspondent à 79,06 à la sortie contre 100 à l'entrée. La différence (20,94) représente le ton- nage centésimal des navires qui, entrés avec char- gements, ont dû, par suite de la rareté du fret d’expor- tation, repartir sur Jest. $ 5. — Physique Phénomènes présentés par les feuilles d'aluminium dans les champs électrosta- tiques. — Les expériences faites par M. E. Bandl : sur les phénomènes présentés par les feuilles d'alu- minium minces au sein d'un Champ électrostatique sontremarquables surtout à cause de certaines analogies avec les phénomènes cosmiques. Un petit morceau de feuille d'aluminium, ayant été inséré dans l’espace intermédiaire entre les boules d'une machine de Wimshurst, flotte librement dans le champ polaire de ces dernières. Dans certains cas, l’on peut même introduire dans le champ polaire deux ou trois morceaux de feuille d'aluminium, qu'on réussit toujours à maintenir en suspension, soit indépen- damment les uns des autres, soit en une chaine com- mune, Dans cette expérience, il convient d'éliminer toute influence perturbatrice des différentes parties de l’ap- pareil sur les conducteurs polaires, ainsi que toute perte monolatérale de tension sur l’une des boules polaires. Dans le cas d'une rotation constante de la machine, la feuille suspendue exécute des mouvements lents; quelquefois, l’on observe même une faible vibra- tion. Des séries d'étincelles, reliant la feuille métal- lique avec l'un des pôles ou avec les deux, sont aperçues souvent à l'obscurité. Lorsqu'on interrompt le fonctionnement de la ma- ; chine, ces phénomènes continuent sans changement apparent pendant un certain temps, pourvu que la machine comprenne des condensateurs. Cependant, la feuille suspendue est graduellement troublée, com- mençant à osciller entre les deux boules avec une vitesse et une amplitude croissantes, aussi longtemps que la charge du condensateur y suffit. Cette dernière ayant été consommée, la feuille est généralement pous- sée en dehors du champ, tandis que dans d’autres cas (moins fréquents) elle va adhérer à la boule. Après avoir été lancée en dehors du champ, la feuille peut y être ramenée immédiatement en actionnant de nouveau la machine électrostatique. Bien que ces phénomènes ne s'expliquent point d'une façon absolument suffisante, les considérations qui suivent sufliront peut-être à en donner une inter- prétation au moins partielle : En vertu des effets dits de «pointe ». la feuille d'alu- minium est, à tour de rôle, chargée et déchargée par les deux boules, étant par là sujette aux forces corres- pondantes d'attraction ou de répulsion des pôles. La feuille métallique, en raison de la rapidité d'alter- nance du sens de la charge, exécute des vibrations longitudinales dont l'amplitude est amortie à un degré notable par la résistance mécanique relativement grande de l’air. Dans le cas d'une tension électrique suffisamment élevée, cette alternance de direction peut devenir si rapide que les vibrations résultantes échappent à l'observation visuelle, grâce aux effets amortisseurs considérables et à la fréquence élevée. Aussitôt que cet état de choses est établi, la feuille semble rester suspendue sans mouvement dans le champ électrique. Ces considérationssont confirmées parles phénomènes qui suivent : Un morceau court de fil métallique très mince, ayant été introduit entre deux boules métalliques reliées aux pôles d’une machine à influence et plongées dans de l'huile de lin, présente dans un champ électrique des ! Physikalische Zeitschrift, n° 4, 1907. 358 phénomènes tout analogues aux feuilles d'aluminium, quoique les vibrations soient observées bien plus dis- ünctement (peut-être en raison de la masse plus grande du fil métallique). Si la charge des boules dépasse une certaine limite, une décharge par étincelles s'établit au sein de l'huile par l'intermédiaire du fil métallique suspendu. Immédiatement avant ces décharges, ces vibrations sont tout particulièrement fortes. L'effet de la résistance mécanique de l'huile se manifeste d’une facon évidente dans ce phénomène. Comme toute perturbation monolatérale du champ électrostatique peut troubler ces phénomènes, ceux-ci sont très probablement dus uniquement à l’action du champ. Certains effets de pression électrostatique, inconnus jusqu'ici, peuvent cependant y jouer éga- lement quelque rôle. Or, lorsqu'on vient à déformer la feuille métallique, en l'écrasant par exemple légèrement entre les doigts, les phénomènes de flottaison se compliquent immédia- tement de nouvelles composantes de mouvement entrant en jeu. Le point le plus caractéristique de ces phénomènes, c'est que la feuille, dans la plupart des cas, exécute une rotation autour de son axe. Loin de rester suspendueau milieu de l'intervalle des deux boules, la feuille s'approche maintenant de l'une de celles-ci, s’attachant le plus souvent au segment supé- rieur. À mesure que cette « toupie électrique » s'ap- proche de la boule, la rotation devient en général de plus en plus rapide. Cependant, dans le cas d'un fonc- tionnement parüiculièrement intense de la machine, la feuille s'élève fréquemment vers des hauteurs considé- rables, sans qu'il y ait une perte correspondante de la vitesse de rotation. Ces phénomènes s'accompagnent d'un vent électrique assez fort, émanant de la feuille tournante. L'auteur a fait certaines autres expériences d’un grand intérêt sur la toupie électrique. Après avoir éloigné l’autre boule polaire aussi loin que possible de la première (reliée au besoin à la terre), de facon à constituer un champ monopolaire, la feuille suspendue, tournant autour de son axe, se met à exécuter un autre mouvement de révolution autour d'une partie consi- dérable de la surface de la boule (le plus souvent à quelque distance de cette dernière), touten y tracant les courbes lumineuses les plus variées. Dans une chambre obscure, ces courbes se projettent comme lignes lumi- neuses à la surface de la boule polaire en question. La feuille tout entière devient à son tour lumineuse et les figures si variées dues à la rotation et à la révolution sont d'autant plus belles que la forme de la feuille est plus compliquée. Si la distance traversée dans le mouvement de ro- tation de la feuille augmente d’une facon notable pour une raison quelconque, le mouvement tout entier devient le plus souvent irrégulier, la toupie se rendant de la proximité des pôles vers l'équateur de la sphère polaire. Ce mouvement peut même être réglé à un cer- tain degré à l’aide d’un conducteur (même un doigt). Si la feuille métallique est maintenue pendant quelque temps au voisinage immédiat de l'équateur de la sphère, elle se met le plus souvent à tourner autour de l'équa- teur ou autour d'un autre grand cercle de la sphère, à une vitesse modérée et à une distance considérable du conducteur. Dans le cas d’une révolution pareille, la rotation axiale est soit retardée, soit suspendue. L'auteur signale l’analogie évidente qui existe entre ces rotations et révolutions combinées ét les phéno- mènes de mouvement d'un système cosmique plané- taire ou solaire. Dans les deux cas, il y a, en effet, un corps central agissant comme source d'énergie et autour duquel tourne un autre corps de substance affine, qui parfois exécute une rotation autour de son axe. Bien que ces analogies ne soient aucunement par- faites, elles pourraient suffire à expliquer certains phé- nomènes de perturbation planétaire, tels que les fluc- tuations de l'axe, etc., lesquels ne sont point dus à un effet de gravitation immédiat. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 6. — Electricité industrielle Emploi de conducteurs électriques en s dium. — La hausse du prix du cuivre attire dem en plus l'attention sur l'emploi des autres métaux pi les canalisations électriques. On a surtout envi jusqu'à ce jour l’utilisation de l'aluminium, déjà re mandable pour son inaltérabilité à l'air et sa légè et que les prix actuels rendent plus économique qu cuivre; mais il fallait, semble-t-il, une certaine diesse pour songer à l'emploi d'un métal aussi mou aussi altérable par l'air et par l'humidité que le sodi C’est pourtant ce dernier métal que préconise Ping nieur Betts, à la suite d’une série d'essais des pluse cluants. Une étude intéressante à faire à ce point dèe# -était de comparer les conductibilités par unité de po et par unité de volume des métaux les plus usuels conductibilités peuvent se résumer dans le tab suivant : CONDUCTIBILITÉ CONDUCTIB par unité de volume par unité ATUMINUMENEE EE CN ATEN EEE. LU Cadmiumis- PEN PRNDE Calcium . 45,1 100 Cobalt. 16,9 Cuivre. 97,6 3 Étain . . 14,4 6 Fenets 14,6 6. Magnésium 3944 75 Nickel .28 5-00 M2 59 5 OR RENE, TR TR 6 0 13 Potassium eee E-rea s6 SOUMET TN PAUSE al LAC EEE T6 14,5 On voit donc que, si l'argent et le cuivre ont la grande conductibilité par unité de volume, c'e sodium, et, après lui, le calcium, le potassium, } minium et le magnésium qui ont la plus grande ductibilité par unité de poids : cette conductibilitéa pour le sodium, triple de celle du cuivre, qui n'occu que le sixième rang dans ce tableau. D'autre part, est arrivé maintenant, par les procédés électrolytique à abaisser à 0 fr. 85 le kilogramme et même au-dess le prix de revient du sodium. i La grande difficulté consistait à trouver un dispos spécial permettant d'employer ce métal sans qui s'altérer. Le procédé de M. Betts consiste à lenfert dans des tubes de fer ou d'acier, après l'avoir fait dre. Pour que le remplissage puisse se faire absolun à l'abri du contact de l’air, l'opération a lieu dans marmite hermétiquement close, terminée inférie ment par une tubulure commandée par une valw chacune de ses extrémités, le tube de fer ou dag destiné à recevoir le sodium porte un coude vissée raccordé à un petit tube vertical : ces raccords perme tent d'introduire un excès de sodium pouvant com ser la contraction qui se produit lors du refroidissemé du métal en fusion. Le tube étant porté à une temp ture supérieure à celle de la fusion du sodium, quies 96°, on le remplit en mettant le dispositif en commun cation avec la tubulure de la marmite : on n'arrête. remplissage que lorsque le sodium s'élève à un cen niveau dans le tube vertical situé à l'extrémité opp de celle où est fixée la tubulure, extrémité qu'on soin de surélever de 30 centimètres environ. On le refroidir le sodium; on dévisse les coudes, on détach l'excès de métal et l'on ferme les bouts avec des bol chons vissés garnis d’un mélange de graphite et d'huile On n'a plus alors qu'à raccorder les tubes et qu'à peindre extérieurement pour les préserver des atteintes de l'air extérieur. Un conducteur de 40 mètres de longueur, formé dix tubes reliés entre eux, fut abandonné pendant nel mois à l’action de l'air sans subir la moindre altération Essayé avec un courant continu de 500 ampères, à 1 $ CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE :89 émpérature de 0°, il donna une résistance exactement le à celle qui avait été calculée. M. Betts conclut de ses expériences que l'emploi du sodium pour les canalisations électriques permettrait lé réaliser une économie très appréciable. Néanmoins, ës conducteurs ne devraient être employés qu'en léhors des habitations, des bois et, en général, de tout u où il pourrait y avoir à redouter des incendies; car ne trop forte chaleur, dilatant le sodium, aurait pour ultat de faire éclater son enveloppe. Bien que la question n’en soit encore qu'à la période lessais, on doit savoir gré à M. Betts des résultats btenus, qui ouvrent dès maintenant la voie à des Xpériences plus étendues, permettant de se rendre ompte si cette utilisation du sodium doit rentrer défi- Mitivement dans le domaine industriel. $ 7. — Chimie Les actions électrolytiques dans le ciment armé. — On sait que l’une des propriétés les plus importantes du ciment armé, celle qui en permet une plication véritablement pratique, est qu'il empêche f-même arrête l'oxydation des fers et aciers bien Snfermés dans un ciment de bonne qualité, dense et in; mais les ciments armés ne sont pas exposés seu- ent aux actions oxydantes ordinaires des eaux et ës intempéries : ils peuvent être, et ils seront de us en plus avec l'emploi universel de l'électricité, osés à des actions électrolytiques ; il est donc très éressant de savoir comment ils résistent à ces actions. C'est ce dont s'est, tout récemment, occupé D. A. Knudson, dans une série d'expériences des plus lémarquables, publiées dans les comptes rendus de American Institute of electrical Engineers de fé- Mier 1907, et que M. G. Richard a rapportées à l'une dernières séances de la Société d'Encouragement. Les expériences de M. Knudson lui ont montré que : Je ciment humide est de 10 à 15 fois plus conducteur le l'électricité que le ciment sec; 2° un courant entrant ar un fer enveloppé de ciment et sortant par ce ciment humide oxyde le fer tout comme sil était enfoncé ans le sol, et aux points où le courant sortirait du fer sol, pendant cette corrosion électrolytique, il se froduit une action destructive et désagrégeante du ciment lui-même. US Voici quelques détails sur ces expériences. Elles ürent exécutées, après trois années de prise, sur des locs de ciment Portland de 250 millimètres de dia- tre sur 300 de hauteur, plongés dans un baquet mé- allique rempli d'eau pure ou salée et traversés, au Centre, par un tube de fer de 50 millimètres de dia- mètre, pénétrant de 400 millimètres dans le bloc. rsqu'on ne faisait pas passer de courant de la tige 1 baquet au travers du ciment, on retrouvait, après Me trentaine de jours de plongée dans l’eau, le bloc le ciment et son tube parfaitement intacts. Avec un Ourant très faible de 0,1 ampère, au bout de ces liges étaient oxydées avec une perte de poids d’envi- on 2 °,,; le ciment n'y adhérait plus que très faible- ment. D’autres essais, avec différents types de ciments, …ont.donné des résultats encore plus frappants. Ces résultats semblent des plus importants pour les constructions en ciment armé sous terre et à la mer, Plus ou moins exposées à des actions électrolytiques le long des tramways ou des canalisations électriques sujettes à des fuites. Ils ne sont pas définitifs ni géné- ralisables, applicables a priori à tous les ciments, notamment à ceux que l’on réussirait à protéger par une couche de goudron par exemple ; il est aussi bien - évident que les constructions en ciment armé ne “Seront que rarement situées dans des conditions aussi favorables que celles’ de ces expériences à l'action … électrolytique, singulièrement diminuée, d’ailleurs, par | l'emploi des courants alternatifs. Néanmoins, ces réserves faites, les résultats des expériences de } rente jours, le ciment était devenu très fragile et les M. Knudson méritaient d'être signalées comme révé- lant un nouvel élément de complication, et des plus sérieux, à cette question si grave et si embrouillée des actions électrolytiques provoquées par les canalisations de toute espèce sur tout ce qui les touche d'assez près. $ 8, — Biologie La place réelle des Mésozoaires Tricho- plax et Treptoplax. — Ed. van Beneden avait établi autrefois un embranchement des Mésozoaires pour recevoir tous les organismes ayant un degré de com- plication intermédiaire entre les Protozoaires et les Métazoaires. À un certain moment, cet embranchement a été assez bien rempli; mais peu à peu les formes qu'on y rangeait en ont été délogées, soit par suite d'une meilleure appréciation de leur nature, comme les urnes ciliées de la cavité générale des Sipunculiens, soit parce que leur existence même est devenue plus que problé- matique : tels la Salinella de Krenzel et les Gastréades agglutinantes d'Hæckel. En voici encore deux, le Tri- choplax et le Treptoplax, qui quittent les Mésozoaires pour rentrer dans un groupe bien défini, celui des Cni- daires. Ces formes très curieuses, dont l'existence objective est bien certaine, ont toujours été rencontrées dans des aquariums d’eau de mer, à Trieste ou à Naples; ce sont de petits organismes rampants, de forme irrégulière, constitués par un tissu cellulaire interne et un épithélium vibratile de recouvrement, sans aucune différenciation d'organes, et qui se mul- tiplient activement par division. Krumbach® vient de retrouver des Trichoplax dans un aquarium, renfer- mant de l'eau de mer provenant de Trieste, où vivait une petite colonie de l'Hydraire Clavatella, qui donne naissance à la Méduse marcheuse connue sous le nom d'Æleutheria. Frappé de la ressemblance extraordinaire qui existe entre les tissus de la Méduse et ceux du Tri- choplax, Krumbach a pensé que ce dernier pourrait bien provenir de l'Eleutheria. Celle-ci, en effet, après s'être longtemps multipliée par bourgeonnement, arrive à maturité sexuelle à la fin d'octobre et commence à rejeter des larves d'abord nageantes (Planulas), qui se laissent ensuite tomber au fond ou s'accolent aux glaces de l'aquarium; c'est à ce moment (début de novembre) qu'apparurent sur les glaces quelques Trichoplax. n’est pas douteux que ces derniers ne sont autres que des Planulas plus ou moins modifiées; Krumbach s'en est assuré par des élevages et des coupes histologiques. Les Trichoplax se multiplient activement par division, ainsi qu'il est connu, et on ne sait trop ce qu'ils de- viennent ensuite; il est probable, du reste, qu'ils dispa- raissent. Si le rapport génétique entre l'Hydraire et le Trichoplax est maintenant bien certain, il reste à savoir si le Trichoplax est un stade normal du déve- loppement, ou si, au contraire, c'est une forme parano- male, suivant l'expression d'Eblers, sorte de déviation du développement régulier sous l'influence de conditions spéciales. Le Trichoplax adhierens Fr. Eilh. Schulze provient de la Méduse Æleutheria Krohni (Trieste); le Treptoplax reptans Monticelli provient de l'Æleutheria Claparedei (Naples). $ 9. — Sciences médicales La maladie du sommeil. — La Mission d'étude de la maladie du sommeil vient d'envoyer de Brazza- ville des renseignements intéressants. Le D' Martin, chef de cette mission, a constaté que l'évolution et la multiplication du Trypanosome de Gambie, cause de la maladie, s'effectuent chez un Moustique du genre Ste- gomyia aussi bien que chez la Mouche Glossinia pal- palis, qui était considérée jusqu'ici comme étant par excellence l'agent inoculateur du parasite. Il est vrai que M. Laveran, dans son étude sur les He EE RE — 1 Krumeacn : Trichoplax, die umgewandelte Planula einer Hydromeduse (Zool. Anzeiger, XXXI, 1907, p. 450). 390 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE trypanosomiases, faisait l'an dernier des réserves sur ce point : il voyait dans la Glossine, non le seul, mais le principal agent de propagation, acceptant sur ce point le résultat des travaux de Dutton et de Bruce. L'obser- vation du D' Martin justifie le bien fondé de cette réserve. Cette nouvelle constatation a une réelle impor- tance. On sait, en effet, que c’est déjà au genre Ste- gomyi1a, et en particulier à l'espèce Stegomyia fasciata, qu'est due la propagation de la fièvre Jaune. Cette espèce, qui habite le sud des Etats-Unis et la côte orien- tale de l'Amérique du Sud, se trouve aussi sur les deux côtes d'Afrique, pénétrant assez loin à l'intérieur des terres. Il faut donc, si l'on veut arrêter les progrès de la maladie du sommeil, engager contre le Moustique la lutte déjà entreprise contre les Mouches. On le fera avec d'autant plus de profit qu'en combattant le Mous- tique, on travaillera à réduire deux maladies au lieu d'une seule. Aussi, à Brazzaville, on a commencé le débroussaille- ment de la région urbaine et on organise un service municipal d'hygiène. $ 10. — Géographie et Colonisation A la Société de Géographie de Paris. — Voici la liste des prix décernés par la Société, en 1907 : Grande médaille d'or de la Société, au lieutenant- colonel Bourgeois, pour la Mission francaise de la me- sure de l'arc méridien de Quito (1901-1906). Prix Alexandre de La Roquette (médaille d’or), au capitaine Roald Amundsen, pour la traversée du pas- sage du Nord-Ouest et le voyage du Gjæa au pôle ma- gnétique (1903-1906). Prix Duchesne-Fournet (6.000 francs et une médaille spéciale), à M. René Chudeau, pour sa traversée du Sahara et du Soudan. Prix Pierre-Félix Fournier (1.300 francs et une médaille spéciale), au capitaine P. Larras, pour ses itinéraires au Maroc. Prix Ducros-Aubert (1.400 francs et une médaille d'or), au marquis de Segonzac, pour ses missions au Maroc, Prix Edouard Foa (1.500 francs et une médaille spé- ciale), à M. Pierre Prins, pour ses itinéraires dans le Dar-Fertit et la Haute-Kotto. Prix Eugène Potron (600 francs et une médaille spéciale), à M. Raoul Blanchard, pour son ouvrage « La Flandre ». Médaille d'or de la Société, à M. Paul Lemoine, pour ses études géologiques dans le nord de Mada- gascar. _ Prix Barbié du Bocage (médaille d'or), à M. F.-J. Clozel, pour son ouvrage « Dix ans à la Côte d'Ivoire ». Prix Henri Duveyrier (médaille d'or), au lieutenant- colonel E. Laquière, pour ses travaux géographiques et ses recherches sur le préhistorique dans le Sahara. Prix Auguste Logerot (médaille d’or), à M. le Dr Paul Rivet, pour ses travaux sur les races indiennes de l'Equateur. Prix Léon Dewez (médaille d'or}, à M. J.-B. Vaudry, pour ses explorations en Bolivie. Prix Louise Bourbonnaud (médaille d'or), au com- mandant de Montessus de Ballore, pour ses travaux sur les tremblements de terre. Prix Conrad Malte-Brun {médaille d’or), au prince Louis d'Orléans-Bragance, pour son ouvrage « A tra- vers l’Indo-Kush ». Prix Jules Girard (médaille d’or), à MM. L. Joubin et Joseph Guérin, pour leurs travaux océanographiques sur les côtes de France. Prix Ehrard (médaille d'or), à M. Victor Huot, pour ses travaux cartographiques. Prix Janssen (médaille spéciale de vermeil), au lieu- tenant Henri Freydenberg, pour ses observations sur la région du Tehad. Prix. Charles Maunoir (médaille de vermeil), à Me Fernande Sadler, pour sa monographie d'une commune de France (Grès-sur-Loing). Prix Juvénal Dessaignes (médaille de vermeil), M. Fernand Rouget, pour son ouvrage « Expansion coloniale au Congo ». Prix Francis Garnier (médaille de vermeil), at commandant Etienne-Edmond Lunet de la Jonquière pour ses travaux sur l’ethnographie des populations du Tonkin. Prix Armand Rousseau (médaille de vermeil), à M. l'abbé Richard, pour sa « Géographie de l'empire dé Chine ». Médailles d'argent de la Société, à MM. V. Demontès pour son ouvrage « le Peuple algérien »; à M. André Cheradame, pour ses publications coloniales: à M. René Pinon, pour ses publications coloniales. Prix Alexandre Boutroue (médaille d'argent), à M. Jea# Chautard, pour ses travaux sur la géologie du Foutæ Djallon. Prix Charles Grad (médaille d'argent), à M. Eugène Ferrasse, pour son ouvrage « l'Hydrologie des bassins de la Cesse et de l'Ognon ». Prix William Huber (médaille d'argent), à MM. Charles Knapp, Maurice Borel, V. Attinger, pour le « Diction naire géographique de la Suisse ». Prix Alphonse Milne-Edwards (médaille d'argent) au général Paris, pour son « Index briologicus ». Prix Alfred Moiteni (médaille d'argent), à M. Pau Trouillet, pour ses illustrations coloniales. Prix Alphonse de Montherot (médaille d'argent), à M. Georges Flusin, pour ses travaux sur le glacier dt Pelvoux. Prix Jomard (Monuments de la géographie), à M. Emile Salone, pour son « Histoire de la colonisation française au Canada ». Le Bureau élu pour 1907-1908 est composé ainsi qu'il suit : Président : M. Le Myre de Vilers; Vice-Présidents : M. le D° Harmand et le Professeur Marcel Dubois ; Secrétaire : M. le lieutenant-colonel Bourgeois; Secrétaire général : M. le baron Hulot. $ 11. — Enseignement et Sociétés A propos des réformes du P.C. N.— Par un8 circulaire ministérielle, les différents professeurs, chargés de l’enseignement du P. C. N. dans les Faculté des Sciences, viennent d'être informés qu'un « Comité de perfectionnement de l’enseignement des Science physiques, chimiques et naturelles, préparatoire ai études médicales » a été institué, et que « les membres de ce Comité se trouvent chargés d’une Mission per manente d'inspection des Facultés des Sciences en c qui concerne l’enseignement du P. C. N. » Le Comité comprend exclusivement des professeurs de l’Université de Paris : MM. Bouchard, Lannelongu Dastre, Lippmann, Guignard. Cette sorte de tutelle di méthodes d'une Université sur celles d'autres Univers sités est évidemment une preuve que les méthodes de centralisation excessive n’ont pas encore fait leur temps en France. Dans les pays d'impérialisme officie comme l'Allemagne, nous croyons que l'indépendance des diverses Universités est mieux sauvegardée. Mai notre but, ici, n'est pas d'examiner si nos Université sont libres de leurs méthodes propres; nous voulons appeler l'attention sur un côté plus spécial de la que tion du P. C. N. Les termes particuliers de la décision que nous rap= pelons ci-dessus semblent montrer que l’on envisagera désormais l’enseignement du P. C. N. comme unique" ment « préparatoire aux études médicales ». £ Les professeurs chargés de cet enseignement dans les Universités de province sont assez surpris, paraît-il, de cette nouvelle orientation donnée à l’enseignement du P. C. N. Orientation assez imprévue pour eux; puisque les Facultés des Sciences n’ont pas été con= CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 391 sultées sur la question, ni sur les nouveaux pro- grammes. Lors de l'organisation initiale du P. C. N. par M. Liard, il y a douze ans, il avait été dit qu'il s’agis- sait d'un enseignement préparatoire général qui devait convenir à diverses catégories d'étudiants. Les étudiants en médecine forment le groupe le plus important, il est vrai, mais d’autres séries d'étu- diants profitent de ces enseignements, à la suite parfois de décisions officielles qui n’ont pas été rapportées; les candidats à l'agrégation de philosophie d’une part, les candidats à divers diplômes d'Université, des candidats aux grades du professorat de l'enseignement primaire supérieur, des auditeurs libres, d'autre part, semblent aujourd'hui tout à fait oubliés lorsqu'on parle de ré- former le P. C. N. Nous connaissons une Faculté des Sciences où le nombre des étudiants P. C. N. non destinés aux études médicales, représente, en 4907, 1/5 du nombre des étu- diants P. C. N. futurs médecins. Cette proportion s'élève même jusqu'à 4/5 pour certains cours, ceux de Chimie, non représentés d'ailleurs dans le Comité de perfectionnement. Et cette Faculté est certainement une de celles qui ont le mieux compris les idées qui ont présidé à l’organisation des Universités provin- ciales. L'originalité de celles-ci ne peut se main- tenir, et se développer, qu'en dehors de toute tutelle d'Université sœur dont les conditions de vie sont toutes différentes. L'Université de Paris n’a peut-être utilisé le P. C. N. que comme enseignement préparatoire aux études médicales, cela est possible. Nous le répétons, et tout le monde le sait, ce n’est pas dans cet esprit que le P. C. N. à été créé. Il semblerait donc équitable, et mème désirable, de n'en pas bouleverser l’organisation actuelle, en l’unifiant sans nécessité sur un nouveau plan, avant d’enquêter préalablement sur les consé- quences qui peuvent en résulter pour les Facultés des Sciences de province. Celles-ci ont des intérêts particuliers. Quelques-unes pourraient désirer le maintien du P. C. N. comme «enseignement préparatoire général », plutôt que de le voir se transformer en «enseignement spécial d'initia- tion aux études médicales ». 11 s'agit là d'une question de principe très importante. Si la dernière solution est adoptée, il semble que la place du P. C. N. ne sera plus nécessairement dans les Facultés des Sciences. Sa vraie place sera dans les Fa- cultés de Médecine; on l'entend dire déjà. Les représentants des Facullés des Sciences au Con- seil supérieur de l'Instruction publique laisseront-ils faire cette réforme? Plusieurs de nos Facultés des Sciences ne peuvent plus se passer d'un enseignement préparatoire. Elles devront rétablir chez elles un autre P.C. N., prépara- toire aux enseignements scientifiques supérieurs et aux enseignements appliqués. L'existence de deux P. C.N., dans deux Facultés voi- sines d'une même Université, est-elle admissible ? Nous ne voulons pas dire que l’organisation du P. C. N. est intangible. Le P.C. N. passe par une sorte de crise de maturité. Déjà, il y a quelques années, M. Caullery a émis des idées sur une réforme du P.C.N. dans l'intérêt des enseignements scientifiques des Fa- cultés des Sciences. Nous demandons que cet intérèt spécial de nos Facultés des Sciences ne soit pas négligé. Aussi, peut-on souhaiter que le Comité de réforme et de perfectionnement soit élargi, que la réforme enfin ne soit pas exclusivement faite dans le sens que peuvent suggérer et désirer les Facultés de Médecine. Les inté- rêts des étudiants en médecine et les intérèts des étu- diants en sciences pures ou appliquées doivent être, semble-t-il, l'objet d'une égale sollicitude. Personnel universitaire. — M. Curtel, docteur ès sciences, directeur de l'Institut régional agrono- mique et œnologique de Bourgogne, est nommé pro- fesseur adjoint à la Faculté des Sciences de Dijon. M. Grimbert, agrégé près l'Ecole supérieure de Phar- macie de Paris, docteur ès sciences, est nommé pro- fesseur de Chimie biologique à ladite Ecole (fondation de la Ville de Paris). ; M. Villar, agrégé des Facultés de médecine, chef des travaux de Médecine opératoire à la Faculté de Méde- cine de Bordeaux, est nommé professeur de Médecine opératoire à ladite Faculté. M. Paquier, docteur ès sciences, chargé d'un cours de Géologie à la Faculté des Sciences de Toulouse, est nommé professeur de Géologie à ladite Faculté. M. Moureu, agrégé près l'Ecole supérieure de Phar- macie de Paris, est nommé professeur de Pharmacie chimique à cette Ecole. M. James, docteur ès sciences, maître de conférences de Zoologie à la Faculté des Sciences de Toulouse, est nommé professeur adjoint à cette Faculté. M. OŒchsner de Coninck, docteur ès sciences, chargé de cours à la Faculté des Sciences de Montpellier, est nommé professeur de Chimie à cette Faculté. Un legs de quatre millions à lFUniversité de Paris. — Au cours de la dernière séance tenue par le Conseil de l'Université de Paris sous sa prési- dence, M. Liard, vice-recteur, a donné lecture du tes- tament par lequel M. Commercy, décédé récemment, a légué à l'Université de Paris un capital de quatre millions. Suivant la volonté du généreux testateur, les arré- rages de cette fondation seront employés, confor- mément à la proposition du Conseil de la Faculté des Sciences, à favoriser le développement scientifique de l'Université de Paris, notamment par des bourses im- portantes en faveur de jeunes savants désireux de pour- suivre, en toute liberté, des recherches scientifiques. Association des Anatomistes. — La neuvième réunion de l'Association des Anatomistes vient d’avoir lieu à Lille, du 24 au 28 mars, sous la présidence de M. le Professeur Hallez, la vice-présidence de MM. De- bierre, Curtis et van Gehuchten. Plus de 80 membres français et étrangers étaient présents. Quarante com- munications ont été faites. Les séances de l'après-midi ont été entièrement consacrées à des démonstrations macroscopiques et microscopiques, qui furent plus nombreuses encore que les communications. C'est une preuve de la vitalité de l'Association, largement ouverte à tous les anatomistes, qui sont priés de se considérer comme invités à ses réunions. L'Assemblée a décidé que la dixième session aurait lieu à Marseille, du 12 au 15 avril 1908, sous la prési- dence de M. le Professeur Jourdan, la vice-présidence de MM. Darboux, Alezais et Trolard. L’entomologiste Latreille. — La municipalité de Brive (Corrèze) vient d'informer l'Académie des Sciences qu'un Comité s'est formé pour ériger dans cette ville un monument à la mémoire de Pierre André Latreille, que les naturalistes de sa génération avaient surnommé « le prince de l'Entomologie ». Né dans cette ville en 1762, Latreille mourut à Paris en 1832, après avoir été professeur au Muséum d'Histoire natu- relle et membre de l’Académie des Sciences. L'inauguration de ce monument aura lieu le 16 juin prochain, et l'Académie y délègue MM. Edmond Perrier, directeur du Muséum et compatriote de Latreille, et Bouvier, titulaire actuel de la chaire de ce savant. Enfin la Société d'Entomologie sera représentée par M. Pierre Lenne, son président. 392 MAURICE D'OCAGNE — LA MÉTHODE NOMOGRAPHIQUE DES POINTS ALIGNÉS LES PROGRÈS RÉCENTS DE LA MÉTHODE NOMOGRAPHIQUE DES POINTS ALIGNÉS Instaurée en 188% par la publication du Mémoire intitulé : Procédé nouveau de calcul graphique’, la méthode des points alignés a été développée suc- cessivement dans la brochure où a paru la première esquisse de la Nomographie considérée dans son ensemble *, puis dans le Traité ® où cette nouvelle doctrine a pris toute son ampleur. Il nous sera, au surplus, bien permis de rappeler que ce sont les avantages que nous avons retirés de cette méthode qui nous ont incité à entreprendre l'édification de la théorie générale dans laquelle elle est venue se fondre avec toutes les autres méthodes particulières proposées par divers au- teurs, et dont aucune, d’ailleurs, sauf celle dite de l’anamorphose, de Lalanne, n'avait vu le jour avant elle *. Sans revenir sur les avantages pratiques, sou- vent mis en relief, de la méthode des points ali- gnés, qu'atteste d’ailleurs suffisamment l'abondance des applications signalées plus loin, nous insiste- rons toutefois sur le fait qu'elle a donné la possi- bilité de représenter directement des équations à plus de trois variables. Ceci appelle un mot d'explication. On peut bien, au moyen de nomogrammes à lignes concourantes”, ! Ann. des Ponts et Chaussées, novembre 1884, p. 531. ? Nomographie. Les calculs usuels efectués au moyen des abaques. Paris, 1891. Voir aussi la Revue du 30 sept. 1891. 3 Traité de Nomographie. Paris, 1$99. * Jci se place une observation capitale : si l'on excepte celles qui en sont elles-mêmes dérivées (double alignement, alignements parallèles ou en équerre, etc.), la méthode des points alignés présente avec toutes les autres méthodes nomographiques, au point de vue mathématique, cette dif- férence essentielle qu'elle dérive de l'interprétation des équations que nous avons appelées de disjonction, au moyen de coordonnées tangentielles (et même, pratique- ment, de coordonnées tangentielles spéciales dites paral- lèles), tandis que — ainsi qu'il découle de notre théorie géné- rale — toutes les autres résultent de l'interprétation des équations de disjonction au moyen de coordonnées ponc- tuelles. Les nomogrammes à points alignés (et leurs dérivés) apparaissent donc comme constituant le domaine tangentiel corrélatif du domaine ponctuel embrassant tous les autres types de nomogrammes, pour lesquels la relation de posi- tion fondamentale est le concours en un point au lieu de l'alignement sur une droite. 5 J1 faut compter parmi ceux-ci les types particuliers sur lesquels l'introduction de certains éléments mobiles a seu- lement pour effet de suppléer au tracé sur le plan fixe de systèmes de lignes entre lesquelles devraient être consta- tées des relations de concours; tel est le cas des abaques hexagonaux (T. N., p. 70), sur lesquels le transparent à trois index concourants tient lieu de trois faisceaux de droites parallèles; des abaques polaires (T. N., p. 119), sur lesquels l'échelle tournante remplace à la fois un système de cercles concentriques et un faisceau de droites convergeant au centre commun de ces cercles, etc. représenter certaines équations contenant plus de trois variables, mais simplement-par juxtaposition de nomogrammes relatifs chacun à trois variables seulement, lorsqu'il est possible de faire appa- raitre l'équation à n variables donnée comme le résultat de l'élimination de n—3 variables auxi- liaires entre 1—2 équations ne contenant chacune que trois variables prises parmi ces 27—3 varia- bles, données et auxiliaires’. Mais ce n'est que grâce à l'introduction d'éléments mobiles, permet- tant de réaliser des systèmes nomographiques non condensés”, qu'il a été possible d'atteindre direc- tement à une quatrième dimension; et c’est un tel progrès que, pour la première fois, le principe des. points alignés a permis de réaliser. Rappelons aussi l'extrême souplesse introduite dans l'application de ce principe par l'intervention de l'homographie la plus générale?, qui n'avait peut-être été utilisée jusque-là que pour des fins purement spéculalives. Enfin, en mettant en évidence, sans conteste possible, les avantages pratiques des modes de représentation graphique où les seuls éléments cotés sont des points, la méthode des points alignés en à fait naître d'autres, où les points cotés sont soumis à divers modes d'association dérivés de l'alignement pur et simple (alignements concou- rants, parallèles, en équerre, etc.) ou se ramenant à la distribution sur des lignes, invariables de forme, plus générales *. La théorie même des points alignés n'est pas restée slagnante. Le problème principal qu'elle soulève consiste, chaque fois que cela est possible, à mettre les équations à trois variables z,, z,, z. sous la forme du déterminant : fiTit LAELE 13933 (où /;, g;, dx désignent les fonctions de la seule variable z;). Cette transformation est depuis long- temps connue pour les lypes canoniques : 1 Exposé synthétique des principes fondamentaux de la Nomographie. Paris, Gauthier-Villars, 1903, n° 9. 2 Tbid., n°:2; 3 T. N., nos 60 à 62. 4 A cette dernière catégorie se rattachent les nouveaux nomogrammes, dits à points équidistants, de M. Gerce- vanoff (Saint-Pétersbourg, 1906). # 4 MAURICE D'OCAGNE — LA MÉTHODE NOMOGRAPHIQUE DES POINTS ALIGNÉS 393 H)A+f+fñ—=0 (échelles rectilignes concourantes)! (2) filets — À (échelles rectilignes non concourantes)? (3) Aigsthhatf;=0 (2 échelles rectilignes et 1 curviligne}. La question se pose dès lors de reconnaitre les types généraux réductibles à ces types canoniques, et plus particulièrement ceux qui le sont par simple projection, en raison des facilités spéciales de construction correspondantes. - En ce qui concerne les types (1) et (2), la ques- tion est, depuis longtemps, entièrement résolue *. Toute équation linéaire par rapport à trois fonc- tions ne contenant chacune que l’une des variables (équation d'ordre nomographique 3) peut être ramenée projectivement au type (1) ou au type (2) (réductibles eux-mêmes l'un à l’autre par anamor- phose logarithmique) si le diseriminant de cette équation est nul au positif. S'il est négatif, la réduc- tion, comme l’a montré M. Fontené, peut encore se faire, mais en exigeant alors une anamorphose transcendante”. M. Clark a découvert* que, moyennant la multi- plication de l'équation par un facteur parasite con- venable, fonetion de deux des variables, z, et z, par exemple, on pouvait, dans tous les cas, cons- truire projeclivement un nomogramme à points alignés pour une équation d'ordre nomographique 3, à la condition toutefois de renoncer à l'emploi exclusif d'échelles rectilignes; les échelles (z,) et (z.) doivent, en effet, être disposées sur une même conique, l'échelle (z,) restant rectiligne, et le type canonique correspondant s'écrit : (4) hf + (4+h)ga + hs = 0. Ce nouveau point de vue a, en outre, amené ce savant professeur à un résultat capilal concernant les équations d'ordre nomographique 4 (formées linéairement au moyen d'une fonction de chacune des variables z, et z, et de deux fonctions de z.), savoir : si une telle équation n'est pas réductible au type (3) ci-dessus, elle l’est nécessairement au type (4), et est, par suite, représentable en points alignés par le moyen d'un nomogramme sur lequel, l'échelle (z,) restant quelconque, les échelles (z,) et (z,) sont encore disposées sur un support conique commun. L'introduction de la notion nouvelle de valeur DIN, ch. III; SeCt. 117 A° 200. N., ch.lil, sect. 11 B et C. EAN ch. Il sect AS 4 Acta mathematica, 1897, p. 301, et T. N., ch. VI, sect. n1 B. 5 Nouv. Ann. de Math., 1900, p. 49%. 5 Mémoire sous presse à la Revue de Mécanique, dont les principaux résultats ont élé communiqués au Congrès de Cherbourg de FAssoc. fr. pour l'avancement des Sciences (1905). Ces résultats, énoncés sans démonstration, ont été établis par des voies différentes de celle de l’auteur et dif- férentes aussi entre elles, d’une part par M. Soreau (second mémoire cité plus bas), de l'autre par nous-même (Notes des Comptes rendus citées plus bas). critique nous a d'ailleurs permis de retrouver, en même temps que tous nos résultats d'antan, ceux tout récents de M. Clark, d'une facon vraiment simple et, en quelque sorte, intuitive”. Ajoutons que l'immense majorité des équations qui se rencontrent dans la pratique appartiennent à la catégorie de celles qui se ramènent projective- ment aux types fondamentaux (1), (2), (3) ci-dessus Si, d’ailleurs, il s'en trouve, par hasard, une qui échappe à ce caractère, on peut l'y ramener approximalivement, au moins dans un champ de variation suffisamment borné, en utilisant pour cela l'ingénieux procédé graphique du capitaine Lafay *. Nous signalerons enfin la forme élégante donnée par M. Soreau* à la théorie générale des nomo- grammes à alignements composés (concourants, parallèles, en équerre), y compris l'étude de la réduction des équations à certains lypes cano- niques correspondant à des formes particulières, fréquentes dans les applications, de nomogrammes de cette sorte. AT Mais si, pour une discipline qui vise — comme c'est ici le cas — un objet pratique, les progrès de la théorie ne doivent pas être tenus pour négli- geables, c'est bien plutôt encore le nombre et la variété de ses applications qui méritent de retenir l'attention. À cet égard, la méthode des points ali- gnés se présente, peut-on dire, dans des conditions exceptionnelles. La moisson qu'elle avait fait lever dès après la brochure de 1891, et que nous avons eu déjà l’occasion de signaler aux lecteurs de cette Revue*, s'est accrue, depuis le Traité de 1899, dans des proportions qui dépassent même ce qu'on pouvait être en droit d'espérer de prime abord. Nous ne pouvons songer à donner ici un tableau de toutes ces applications qui, même nécessaire- ment incomplet, occuperait un assez grand nombre de colonnes de la Revue”. Mais nous en choisirons parmi elles quelques-unes, venant se grouper ! Comptes rendus de l'Académie des Sciences des 2$ jan- vier (p. 190), 29 avril (p. 895) et 13 mai 1907 (p. 1027). La théorie nouvelle, fondée sur la considération des valeurs critiques, sera développée dans le volume de l'Encyclopédie scientifique (Doin, éditeur), où va être publié le cours libre de Calcul graphique et Nomographie que nous venons de professer à la Sorbonne. 2 (Génie civil, t. XLIX, 1902, p, 298. 3 Bull. de la Soc. des ingénieurs civils, août 1901, p. 830, et mai 1906, p. 320. + T. IX, 1898, p. 116. 5 Nous avons pu réunir, dans notre cabinet de l'École des Ponts et Chaussées, tant au moyen d'extraits de divers recueils techniques que d'envois dus aux auteurs memes, une collection de plus de 200 exemples d'applications de la méthode, sans compter ceux que nous avons établis nous- mème, que nous serons toujours heureux de placer sous les yeux des personnes que le sujet intéresse. 394 MAURICE D'OCAGNE — LA MÉTHODE NOMOGRAPHIQUE DES POINTS ALIGNÉS autour de plusieurs sujets principaux, et où se ren- contre la traduction nomographique, non pas de telle ou telle formule isolée, mais de tout un ensemble de formules. Avant de procéder à celte énumération, nous devons dire que les importantes publications de M. Soreau qui viennent d'être citées renferment un nombre considérable d'applications se rattachant à la plupart des branches que nous allons passer en revue, et qu'il y aurait lieu de faire le rappel du nom de cet auteur à propos de chacune d'elles : 1. Physique générale. — Une mention spéciale doit être donnée à la remarquable traduction en points alignés de la célèbre formule de Van der Waals, pour les différents gaz usuels, par le capi- taine Lafay ', qui rend absolument parlante la dis- eussion des conséquences auxquelles elle conduit- 2. Electricité — L'application aux courants alternatifs a été indiquée par M. J. Eichhorn*, au montage des lignes électriques aériennes par M. Liégeois”. 3. Pésistance des matériaux. — Dans ce domaine, déjà riche de la belle collection de nomogrammes de M. le professeur ingénieur D. Gorrieri* pour le calcul des poutres chargées (de tous les types usités dans la pratique), des applications particulières nouvelles ont été traitées en grand nombre, notam- ment par MM. les ingénieurs Rieger, Proell, Wolff, Ulkowski, Morel. 4. Hydraulique. — Rappelant ici l'élégante solu- tion par composition d'échelles parallèles donnée par le lieutenant-colonel Bertrand pour le caleul des distributions d’eau”, nous y joindrons l'ensemble dû à M. l'ingénieur Wolff, chef du Service des irrigations en Egypte”, pour l'écoulement de l’eau dans les canaux, ainsi que ceux de M. l'ingénieur | Morel pour l'écoulement par déversoir. >. Constructions navales. — À l'occasion des essais du cuirassé République, M. l'ingénieur en chef de la marine Callou a réduit les calculs qu'exige une lelle opération à des nomogrammes à échelles parallèles, sur lesquels les alignements sont pris grace à un dispositif spécial très pratique. 6. Machines. — Nombre de formules intervenant dans la construction des machines, particulière- ment dans celle des chaudières marines, ont été * Feuilles autozraphiées du Cours de Physique de l'École Polytechnique. ? Western Electrician, 1901, p. 162. * Le Génie civil,t. L, p. 407. * Atti del Collegio degli Ingegneri ed Architetti in Bo- logna (1895) et T. N., p. 192. * Bevue du génie militaire (1894) et T. N., p. 159. * Diagramms {ur egyptian engineers, Le Caire, 1904. traduites en nomogrammes à échelles parallèles par M. l'ingénieur Vaës'. De même, M. l'ingénieur Proell à traduit en nomogrammes à points ali- gnés*, en les groupant sur une même feuille, toutes les formules intervenant dans la construc- tion des turbines à vapeur. Les pompes et ventilateurs ont donné lieu à des applications dues à M. Wolf et à M. Suttor. M. Dague a utilisé la méthode en vue de diverses questions relatives aux machines-outils”. 1. Calculs nautiques. — M. le lieutenant de vais- seau Perret, aujourd'hui professeur à l'Ecole navale, a entrepris, avec un plein succès, de réduire à des nomogrammes à points alignés tous les calculs qui se présentent dans la pratique de la Navigation‘, y compris même ceux qui se rap- portent aux occullations d'étoiles”. Une étude analogue a été poursuivie en Italie par M. le professeur Molfino, de l'Ecole navale de Livourne, tandis que son collègue M. le professeur Pesci fondait sur la méthode des points alignés une foule de solutions élégantes de problèmes de Cinématique navale”. 8. (réodésie. — Outre les remarquables nomo- grammes établis par M. le lieutenant de vaisseau Perret pour la préparation des observations circom- méridiennes à l’astrolabe à prisme” (à l'occasion de la nouvelle détermination de la différence de longitude Paris-Brest), il convient de citer ici ceux qui ont été construits par M. E. Deville, chef du Service géodésique du Canada, pour la détermina- tion de la hauteur et de l’azimut de l'étoile polaire”. 9. Topographie. — M. le capitaine de Larminat a complété son excellente l'opographie pratique par 1 Technische Rekenplaten, Gouda, 1904. Une traduction française de cet important mémoire est en préparation. ? Revue de Mécanique, 1er semestre 1905, p. 161. * Bulletin technologique, 1905. “Annales hydrographiques, 1904, et Congrès de Cherbourg de l'A. F. A. S., 1905. Tous ces calculs se ramenant à des résolutions de triangles sphériques, il n'est pas inutile de rappeler ici qu'après avoir fait connaître un nomogramme permettant une telle résolution complète dans tous les cas possibles (T. N., n° 124), nous avons, grâce à l'introduction, eu certains cas, de triangles auxiliaires dits annexes, ramené cette solution générale (Comptes rendus de l'Ac. des Sc., t. CXXX VIII, 1904, p. 70, et Bull. de la Soc. math. de France, 1904, p. 196) au seul emploi d'un nomogramme d'une construction infiniment plus simple, que nous avions fait connaitre en même temps que le précédent (T. N.. n° 123), mais qui ne peut s'appliquer directement que dans quatre cas sur six. De telles solutions générales n'enlèvent a'ailleurs rien à l'intérêt pratique des solutions visant la détermination isolée d'un élément particulier, ce qui est le cas pour les calculs nautiques. 5 Problème dont nous avons aussi indiqué une solution nomographique (Comptes rendus, t. CXXX, 1900, p. 556). 5 Rivista marittima, de 1896 à 1901. 7 Annales hydrographiques, 1905. “ Trans. of the Roy. Soc. of Canada, t. XII, sec. m1, 1906. mt cn hate oran dlnhe ets ht tend de à de G. DE LAMARCODIE — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DE L'ÉLECTRICITÉ 395 un fascicule annexe contenant, entre autres, huit nomogrammes applicables aux divers calculs de réduction ou de correction qui se présentent dans les levers ordinaires. M. W. Läska, professeur de Géodésie à l'Ecole technique supérieure de Lemberg, a fait également d'utiles applications des nomogrammes à points alignés aux calculs topopraphiques'; le capitaine du génie Lelarge aux levers téléphotographiques”. 40. Artillerie. — Le tir des armes à feu s'est par- ticulièrement bien prêté à l'application de la mé- thode des points alignés entre les mains de nom- bre d'officiers, parmi lesquels nous citerons, en France, les capitaines Lafay et Batailler et le com- mandant Chauchat*, en Russie, le colonel Lan- gensheld, en Italie, le capitaine de frégate Ronca* et le capitaine Ricci”, en Espagne, le général Ollero’, etc. A1. Avialion. — Le capitaine du génie Lelarge, déjà cité, a bien voulu nous communiquer en mi- nutes une collection d’une dizaine de nomogrammes relatifs à divers problèmes d'aviation, qui, nous l’espérons, seront un jour ou l'autre livrés au public. 12. Assurances. — Les calculs d'assurances ont été aussi l’occasion pour M. Poussin, actuaire, de faire connaitre toute une importante série de no- mogrammes à points alignés”. 13. Recherche des lois empiriques. — Nous avons eu déjà occasion de montrer, en empruntant un remarquable exemple à M. l'ingénieur des mines Rateau*, les services que le principe des points alignés peut rendre dans la recherche des lois empiriques. Indépendamment des travaux pour- suivis dans la même voie par M. Soreau*, nous tenons à signaler un emploi nouveau du même principe, proposé par M. le capitaine Batailler’, pour la détermination des coefficients de certaines formules d'interpolation d'un usage fréquent, no- tamment en Balistique. 14. Calcul graphique général. — VW convient enfin de mentionner que, par l'heureuse introduction du principe des points alignés dans certains problèmes rentrant dans le domaine du calcul graphique général, M. F. Boulad, ingénieur des chemins de fer de l'Etat égyptien, est parvenu à des solutions très pratiques de problèmes qui se posent journel- lement dans l'étude de la résistance des ponts”. Maurice d'Ocagne, Professeur à l'École des Ponts et Chaussées. L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DE L'ÉLECTRICITÉ EN FRANCE ET A L'ÉTRANGER Il se produit actuellement, on ne peut le nier, une véritable évolution dans l’enseignement. Les vieux programmes classiques et universitaires semblent quelque peu démodés et peu en rapport avec les transformations dues au progrès moderne. Notre siècle est surtout un siècle scientifique et industriel, et c'est vers les applications industrielles de la science qu'une véritable poussée entraine actuellement la jeunesse studieuse et laborieuse. Le succès des écoles professionnelles s'accentue * Zeitschrift für Vermessungswesen, 1905-1906. M. Läska a entrepris aussi, de concert avec M. Ulkowski, la publi- cation d'un recueil de nomogrammes techniques (AtJas de Nomographie), dont la première feuille parue est relative aux levers tachymétriques. ? Revue du Génie, sept. 1906. * Sauf ceux du capitaine Lafay (Revue d'artillerie, 1895, et T. N., p. 206), ces travaux sont encore inédits. * Manuale del tiro, accompagné d'un bel atlas et com- plété par les Cenni di Nomogralia du professeur Pesci ; Livourne, 1901. 5 Nomogralia, Rome, 1901. 5 Nomogralia balistica, Ségovie, 1903. chaque jour davantage, et la diversité des bran- ches de l'industrie a comme conséquence immé- diate la nécessité de créer des écoles spéciales pour chacune de ces branches. Or, s’il est une industrie qui semble être la caractéristique de notre siècle, c'est assurément l'industrie électrique. Les applications de l'électricité ont révolutionné notre époque : transport à distance, lumière, traclion, télégraphie, téléphonie, électro-chimie, radiogra- phie sont autant de conquêtes de cet agent mys- térieux et puissant qui, en si peu d'années, à absolument transformé la face du monde et nous procure chaque jour denouvelles surprises. L'ensei- gnement de l'électricité, la formation d'ingénieurs- électriciens, rompus à la fois aux exigences de la théorie et de la pratique, étaient donc une nécessilé ‘ Sur l'application des procédés graphiques aux calculs dassurances. Paris, 1904. AMEN MIORSTE Bull. de la Soc. des ing. civils, août 1901, p. 492. Revue d'artillerie, 1906, p. 185. Annales des Ponts et Chaussées, 2e trim. 1906, p. x > © 396 G. DE LAMARCODIE _—_ L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DE L'ÉLECTRICITÉ à laquelle on ne pouvait se soustraire. Malheureu- sement, la routine l'emporte souvent pendant trop longtemps sur le progrès, et nous avons pu voir en France, aux débuts des applications de l’électri- cité, quelles incapacités cachait ce titre d'/ngé- nieur-électricien, dont se paraient pompeusement le moindre serrurier et le plus infime plombier, parce qu'ils savaientgarnir une pile et poser des sonneries électriques, et se croyaient pour cela aptes à faire des installations de lumière et de transport de force. M. E. Sartiaux a fait, en 1901, dans l'£ngineering, une étude sur l'Ingénieur-électricien, dont nous croyons devoir citer cerlains passages parce qu'ils résument fort bien cette question : « L'art de l’Ingénieur-électricien, dit M. Sartiaux, estun arttoutmoderne, né pour répondreau besoin d'une industrie nouvelle, qui s’est développée plus rapidement en France que l’organisation même de l’enseignement de l'électricité. « Si l’on remonte à une quinzaine d'années en arrière, on remarque que l'électricité en France existait à peine, et le petit nombre de jeunes gens qui voulaient suivre la carrière d'Ingénieur-élec- tricien devaient recourir à des écoles spéciales établies notamment en Belgique et en Suisse. « Les savants et quelques praticiens s’occupaient seuls autrefois de l'électricité et des questions qui s'y rattachent. Les premiers n’envisageaient que les études théoriques et abstraites : on leur doit cependant des découvertes remarquables sur les lois qui régissent les phénomènes électriques. « Les praticiens et les professionnels de cette époque, bien qu'ayant contribué à la réalisation d'un grand nombre d'applications, opéraient né- cessairement avec des méthodes quelque peu empiriques, conséquences naturelles de l'insuffi- sance des connaissances sur les lois et les phéno- mènes de l'électricité; par suite, ni les savants, ni les praticiens de celte période ne peuvent être con- sidérés comme de véritables ingénieurs-électri- ciens… « Pour exposer ce qu'est aujourd'hui l'ingénieur- électricien, il faut d'abord rappeler que c'est de l'an- née 1881, époque de la première et mémorable Expo- sition d'Électricité qui a eu lieu à Paris, que date le développement des applications de l'électricité en France et à l'Étranger : c'est à ce moment que les savants et les industriels ont entrevu nettement l'avenir et le succès de l'industrie électrique, et la nécessité de s'adjoindre comme collaborateurs des ingénieurs-électriciens capables d'étudier et de réaliser les projets de construction de l'outillage électrique et de diriger les installations qu'il en- traine. Le Congrès international d'Électricité de 1881, en créant, d'autre part, un système d'unités électriques rattachées intimement à la Physique et à la Mécanique, a certainement. et largement faci- lité le développement de l'industrie nouvelle. « Ajoutons que, peu de temps après, des publi- cations techniques spéciales et périodiques sont venues apporter aux électriciens les résultats d'études et d’expériences faites dans le monde entier, soit dans les laboratoires, soit chez les industriels eux-mêmes. « De cette poussée est né le besoin d'avoir, dans l'industrie, des ingénieurs-électriciensréunissant à la fois les connaissances théoriques et pratiques nécessaires. Malheureusement, à cette époque, les programmes d'études de l'Université et des Écoles techniques, qui vont en France moins vite que le progrès, n'avaient rien prévu pour l'Electrotech- nique, et les ingénieurs-électriciens durent se faire, pour ainsi dire, eux-mêmes. » Il s'agissait donc de créer, de toutes pièces, un enseignement d’un ordre tout spécial, n'ayant pas encore existé jusqu'à ce jour. À la base, il fallait placer la théorie, mais une théorie débarrassée de toute spéculation pure et se bornant aux principes généraux ayant leur application dans la pratique. Si l'on considère notamment l'enseignement mathématique, il est évident que les calculs des dé- rivées, des intégrales et des différentielles usuelles, indispensables pour l'intelligence des phénomènes mécaniques et électriques et leur adaptation à l’in- dustrie, ont leur place tout indiquée dans les pro- grammes des écoles professionnelles d'électricité, mais que, par exemple, la théorie générale des équations a peu de raison d'y figurer. Une chose essentielle, c'est de rompre les élèves à l'habitude des applications numériques et du passage d’un système d'unités à un autre. L'Elec- trotechnique, la Mécanique appliquée, les travaux d'atelier et de laboratoire, le dessin industriel con- sistant surtout en croquis à main levée et cotés, doivent occuper un rang prépondérant dans cet enseignement. Nous allons voir comment, à l'Étranger d'abord et en France ensuite, ce programme général a été appliqué. Parmi les pays qui s’empressèrent d'organiser l'enseignement technique de l'Électricité, il faut citer en premier lieu la Belgique. L'Institut électrotechnique de Liége peut être considéré comme un établissement modèle. Un généreux et intelligent donateur, M. le sénateur Georges Montefiore, comprit l'étendue des besoins de l'industrie électrique naissante et offrit les sub- sides nécessaires à l'instruction des ingénieurs que demande cette industrie. C'est en 1883 que, G. DE LAMARCODIE — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DE L'ÉLECTRICITÉ 397 sur son initiative, le Gouvernement belge créa l'Institut électrotechnique adjoint à l'Université de Liége et désigné habituellement sous le nom d'/ns- titut Monteliore. En 1894, M. O. de Bast, le distingué sous-direc- teur de cet élablissement, exposait dans cette Revue l’organisation des études qui y étaient faites et que nous rappelons en quelques mots. L'Institut reçoit deux catégories d'élèves aspi- rant au diplôme d’ingénieur-électricien : 1° Les ingénieurs el les officiers, qui peuvent acquérir ce diplôme en consacrant une année à l'étude de l'Électrotechnique; ces étudiants forment la Section des ingé- nieurs. Peuvent être ad- mis à la Seclion des ingénieurs, et con- courir pour l'obten- tion du diplôme, les ingénieurs civils des mines et les ingé- nieurs des construc- tions civiles, por- teurs d’un diplôme entériné, les ingé- nieurs des mines et les ingénieurs méca- niciens diplômés par l'Université de Liége, les ingénieurs et of- ficiers d'armes spé- ciales porteurs de diplômes ou de bre- vets délivrés par les écoles du pays ou de l'étranger, dont les programmes sont reconnus équivalents, sous le rapport des études scienti- fiques préparatoires, à ceux du grade de candidat ingénieur ; 2° Les jeunes gens qui possèdent des connais- sances générales sur les sciences mathématiques et physiques et qui se préparent à l'examen d'in- génieur-électricien, en suivant, pendant deux an- nées, les cours de l’Institut, ainsi que les cours d'application ci-après, donnés à la Faculté tech- nique de l'Université : Mécanique appliquée, phy- sique industrielle, descriplion des machines, archi- tecture industrielle, métallurgie, chemins de fer» dessins et projets de machines et de constructions industrielles. Les élèves de cette catégorie consti- tuent la Section des élèves électriciens. Peuvent être admis à celte section les étudiants pourvus du diplôme de candidat ingénieur ou déclarés admissibles, après examen, par la Faculté des Sciences de l’Université de Liége. Fig. 1. L'enseignement spécial donné à l'Institut électro- technique Montefiore se compose de cours et d'exercices pratiques : 4° Un cours sur la théorie de l'électricité et du magnétisme ; 20 Un cours de mesures électriques ; 3° Un cours d'Electrotechnique divisé en trois parlies : a) élude des générateurs de courant, des moteurs et des transformateurs ; 2) application de l'énergie électrique à l'éclairage, au transport de la puissance, à la traction et à la métaliurgie ; c) lélé- graphie et téléphonie; 4 Un ensemble d’exercices pratiques d'atelier et de laboratoire et de travaux graphiques. Le grand dévelop- pement donné à ces exercices est le côté caractéristique de l’enseignement de l'Institut. C'est par des travaux d'atelier que les élèves com- mencent : ils sont ainsi familiarisés avec les détails de construction et le ré- glage des appareils, elils acquièrentl'ha- bileté manuelle né- cessaire pour réussir dans les manipula- tionsélectriques. Les instruments de me- sure exécutés à l’ate- lier sont employés, concurremment avec les appareils appartenant aux collections de l'Institut, dans les essais élec- triques. Les élèves s'exercentensuite dans les laboratoires à l'application des méthodes de mesures. Ils ont à monter complèlement les circuits et à installer tous les appareils de mesure nécessités par les essais, Parallèlement aux travaux de laboratoire, ils font des exercices à la salle de dessin : problèmes d'application sur la théorie de l'électricité, calculs par la méthode des vecteurs et celle des imagi- naires, projets de machines à courant continu, d'alternateurs, de transformateurs, d’alterno-mo- teurs, d'installations électriques, etc. Les locaux occupés par l’Institut ont pour noyau les bâtiments servant auparavant à l'£cole normale des Humanités, aujourd'hui supprimée. Des bâti- ments annexes renferment l'usine de machines molrices, un auditoire pouvant contenir 400 étu- — Institut Electrotechnique de Liege : vue extérieure du bâtiment principal. 398 G. DE LAMARCODIE — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DE L’ÉLECTRICITÉ diants, un musée etun club pour les anciens élèves et les élèves actuels. L'Institut est dirigé par M. Eric Gérard, l'éminent professeur de l'Université de Liége, assisté de M. de Bast, sous-directeur, de M. Fontaine, chef des tra- vaux, et d’un personnel d'élite. Depuis 1883 jusqu'en 1905, les cours de l'Insti- tut ont été fréquentés par 2.055 élèves, dont 792 Belges, 392 Italiens, 219 Russes, 175 Fran- çais, etc. L'Association des anciens élèves et des élèves de l'Institut est des plus florissantes. Elle tient des séances périodiques de haut intérêt, et édite des Comptes rendus qui ont pris rang parmi les meil- leures publications électrotechniques, ainsi qu'un Bulletin d'offres et de demandes d'emplois, qui aide au recrutement des ingénieurs-électriciens. L'enseignement de l'Electrotechnique à été organisé, en Belgique, non seulement à Liége, mais encore aux Universités de Gand et de Louvain, ainsi qu'à l'Ecole des Mines de Mons. Des écoles techniques d'ordre moins élevé, telles que les Ecoles industrielles de Bruxelles, Charleroi, Seraing, Tour- nay,etc., ont des cours spéciaux d'électricité suivis d'applications pratiques. II En Allemagne, l’enseignement de l'électricité est une branche importante des dix grandes Ecoles techniques supérieures d’Aix-la-Chapelle, Berlin, Charlottenbourg, Brunswick, Dantzig, Dresde, Hanovre, Stuttgart, Munich, Darmstadt et Karls- ruhe. C'est seulement dans ces deux dernières villes qu'il existe des Instituts électrotechniques autonomes. Dans les autres Ecoles techniques supé- rieures, l'Electrotechnique est réunie soil à la Méca- nique, soit à la Physique, pour former une section spéciale de l'enseignement. L'Institut électrotechnique de Karlsruhe, dirigé par le savant professeur Arnold, jouit notamment d'une réputation universelle. Il possède de très vastes laboratoires et ateliers et une salle de ma- chines admirablement bien installés. La durée complète des études y est de quatre ans, comme d’ailleurs dans les autres Ecoles techniques supé- rieures allemandes. L'enseignement y est à la fois théorique et pratique. Le nombre actuel des élèves est d'environ deux cents. Indépendamment de ces Ecoles supérieures, il existe en Allemagne un grand nombre d'Ecoles techniques, où l'étude de l'électricité est faite de facon très complète, surtout au point de vue pra- tique. Il faut citer en particulier, dans le Grand- Duché de Saxe, le T'echnicum de Mitweida, spécial pour l'Electrotechnique et la Mécanique, et, dans le Grand-Duché de Mecklembourg-Strélitz, le Technicum de Strélitz, qui a une section d'ingé- nieurs électriciens. Enfin, il existe à Würzbourg une Æcole supérieure de Construction de machines et d' Electrotechnique. III En Suisse, l'£cole d'Ingénieurs de T Université de Lausanne et V' École Polvtechnique de Zurich ont organisé un enseignement de l'Électrotech- nique suivi par de nombreux éludiants de tous les pays. L'École d'Ingénieurs de [ Université de Lausanne date de 1853. Elle est d'origine privée, et l'État fut étranger à sa création : elle ne fut incorporée à l'Académie qu'en 1869. C'est une École technique supérieure, distincte des établissements d'instruc- tion technique secondaires qui, sous le nom de Technicum ou d'Écoles d’arts et métiers, se sont multipliés en Suisse dans ces dernières années. Les conditions générales d'admissibilité sont les mêmes que celles exigées pour l’immatriculation à l'Uni- versité. L'École exige, comme préparation prélimi- naire, des études secondaires complètes, sanction- nées par un diplôme de fin d'études. L'École d'Ingénieurs de Lausanne est divisée en quatre sections, correspondant aux quatre direc- tions principales des études techniques actuelles : Génie civil, Mécanique industrielle, Chimie, Élec- tricité industrielle. Les études sont divisées en quatre années, et le passage d'une année à l’aulre s’opère à Ja suite d'une promotion dont le résultat est basé sur le contrôle des études pendant l'année universitaire. Ce qui a caractérisé jusqu'ici l'ensei- gnement donné à l'École des Ingénieurs de Lau- sanne, c’est que les programmes ont été établis afin de généraliser le plus possible les études des futurs ingénieurs, plutôt que de les spécialiser : « Nous reconnaissons volontiers, dit M. A. Palaz, l'éminent directeur de cette École, que le maximum du résultat est obtenu par ceux qui poussent leurs efforts dans une seule et même direction, mais nous croyons que c’est à la fin des études seule- ment, et même après la sortie de l'École, que cette spécialisation a sa place marquée ». En appliquant ce principe (que certains peuvent contester), le programme est organisé de manière que tous les cours principaux sont suivis indistinclement par tous les élèves, quelle que soit la spécialité à la- quelle ils se destinent plus tard. La spécialisation des élèves, suivant la division de l'École qu'ils ont choisie, s'effectue à l’aide des cours spéciaux, des exercices pratiques et des projets. Ces cours, exercices et projets sont très nom- breux pour la Section d'électricité, qui est des plus G. DE LAMARCODIE — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DE L'ÉLECTRICITÉ 399 importantes. Les élèves électriciens font des tra- vaux pratiques non seulement au laboratoire d'Électricité générale, mais encore au laboratoire d'Électro-chimie, où travaillent également les élu- diants de la Section de Chimie. L'École Polytechnique de Zurich comprend huit divisions qui sont : 1° l'École d'Architecture ; 2° l'École du Génie civil; 3° l'École de Mécanique industrielle; 4° l'École de Chimie industrielle; 5° l'École forestière d'Agriculture et de génie rural; 6° l'École normale des Sciences mathématiques et naturelles ; 7° la Section générale de Philosophie et d'Économie politique; 8° la Section des Sciences militaires. Les étudiants qui se deslinent à l’industrie électrique suivent les cours de l'École de Méca- nique industrielle et participent aux travaux du Laboratoire d'Électrotechnique et de la division électrique du Laboratoire des machines. Le Labo- ratoire d'Électrotechnique est également ouvert aux étudiants de l'École normale des Sciences ma- thématiques et nalurelles. La durée de l’enseigne- ment, pour les étudiants de l'École de Mécanique industrielle, est de sept semestres. Des diplômes sont délivrés à la fin des études. Les établissements d'instruction technique se- condaire, correspondant à peu près à nos Écoles d'arts et métiers, ont presque tous des cours spé- ciaux d'électricité fort bien organisés. Il faut citer, en particulier, les Écoles techniques de Winterthur, Berthoud et Bienne. IV L'Angleterre a relativement peu d'écoles tech- niques et n'a pas d'écoles uniquement spécialisées pour l’enseignement de l'électricité industrielle. Cependant, cet enseignement est donné d'une facon à la fois théorique et pratique dans des collèges techniques, où il constitue une section importante. Parmi ces collèges, il faut citer notamment, à Londres, le City and Guilds technical Finsbury's College et le City and Guilds central technical | College. Le premier comprend quatre sections : 1° Section des ingénieurs mécaniciens et de mathématiques | appliquées; 2° Section des ingénieurs électriciens et des applications de la physique; 3° Section des chimistes industriels et techniques; 4° Section des | arls appliqués. Le second de ces établissements comporte trois sections : 1° Section des ingénieurs mécaniciens et de constructions civiles; 2° Section des ingénieurs- électriciens ; 3° Section de Chimie. Dans l’un comme dans l’autre de ces collèges, | destiné à l'enseignement pratique se fait dans des labo- ratoires, où les élèves vont travailler par groupes sous la direclion de préparateurs électriciens. Actuellement, en Angleterre, presque tous les élablissements d'enseignement supérieur ont des chaires d'Electrotechnique. Il en est ainsi à l’Uni- versity College, à Londres; aux Universités d'Ox- ford et de Cambridge, à l'University College, à Liverpool, au Yorkshire College, à Leeds ; à l'Owens College, à Manchester, etc. Sir Oliver Lodge à également établi, à Birmingham, une Sec- tion d'Electrotechnique. Il en est de même à Du- blin, à Glascow et à Edimbourg, où des chaires d'Electrotechnique sont venues compléter l'ensei- gnement scientifique des Universités. En Russie, l’/nstitut Electrotechnique de T Em- pereur Alexandre II, à Saint-Pétersbourg, qui ressort de l'Administration générale des Postes et Télégraphes, prépare des ingénieurs électriciens se destinant aux carrières industrielles et aux services télégraphiques et téléphoniques. Cel établissement, qui dépend du Ministère de l'In- térieur, compte 300 élèves. La durée des études est de cinq ans. De même, l'Institut Polytech- nique de Saint-Pétershourg, qui ressort du Ministère des Finances et auquel sont inscrits 1.800 étudiants, à une Section d'Electrotechnique. Les autres écoles techiques supérieures russes, telles que celles de Moscou, de Riga, de Kiefr, de Varsovie, de Kharkoff, n'ont pas de sections spéciales pour l'électricité, mais des Sections de Mécanique où l'Electrotechnique occupe une place de plus en plus importante. Ea Italie, il existe à Naples un /nstitut supérieur d'Electricité, et Turin possède l'École supérieure de Ferraris, destinée exclusivement aux ingé- nieurs, aux professeurs et aux élèves de l'École militaire d'Artillerie et de Génie, qui veulent se spécialiser dans l'électricité. Enfin, l’Znstitut tech- nique supérieur de Milan comprend, parmi les | huit sections entre lesquelles son enseignement se répartit, l’Institut électrotechnique Carlo Erba, former des ingénieurs-électriciens. Le Musée royal industriel de Turin a également une Section d'électricité, et la plupart des Uni- versités italiennes ont des chaires d'Electrotech- nique. En Amérique, l'Electricité et la Mécanique sont spécialement enseignées dans plusieurs grands Etablissements, dont les principaux sont: Massa- chusetts Institute of Technology, à Boston; Cor- nell University, à Ithaca, New-York ; Columbia University, à New-York; Stevens Institute, à Ho- boken, New-York ; Armour Institute of Techno- logy, à Chicago; Lehigh University, à Bethlehem; Purdue University,à Indiana. 400 G. DE LAMARCODIE — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DE L'ÉLECTRICITÉ V En France, ce n'est que bien longtemps après la Belgique, l'Allemagne et la Suisse que fut inauguré l'enseignement industriel de l'électricité. C'est au pays de la houille blanche, au centre du Dauphiné. si riche en puissances hydrauliques, qu'un dis- tingué professeur de Faculté, M. Paul Janet, actuel- lement directeur de l'École supérieure d'Élec- tricité, prit cette intelligente initialive. Ces débuts datent de 1892; ils furent des plus modestes et se bornèrent lout d'abord à des cours municipaux du soir : le succès en futsi grand que, de toutes parts, on réclama la fondalion de cours réguliers d'élec- tricité. Les particuliers, les industriels apportèrent leurs subventions, et la Chambre de Commerce, suivant le mouvement, y joignil la sienne : des petits travaux pratiques vinrent dès lors compléter les cours théoriques, et, dès 1893, l'Université de Grenoble instiluait, à la Faculté des Sciences de cette ville, une chaire d'Électricité industrielle, sous le patronage de la Chambre de Commerce de Grenoble, du Conseil général de l'Isère et de la Municipalité de Grenoble. Prenant rapidement une importance de plus en plus grande, cet enseignement fut centralisé dans une organisation spéciale, qui prit le nom d'/nstitut électrotechnique de Grenoble, et fut installé dans un bâtiment séparé. Cette organisation comprend à la fois : 1° Une École électrotechnique, où se trouve donné à tous les degrés l'enseignement théorique et pratique de l'électricité industrielle ; 2° Un Bureau d'essai, de vérification et de con- trôle de tous les appareils électriques usuels; 3° Un Laboratoire de recherches propre à con- tribuer à l'avancement de la science électrique. L'enseignement donné à l'Institut se compose : 1° De cours et de conférences sur toutes les matières concernant la production et l’utilisation industrielles de l'énergie électrique ; 2° Detravaux pratiques de laboratoire et d’atelier concernant les mesures électriques usuelles et com- portant le maniement et la pose de tout anpareil- lage électrique d'usage courant; 3° D'exercices d'établissement de plans el devis d'installations électriques de tous genres; 4° De visites d'usines; 5° D'exercices de conduite de machines et stages dans des usines électriques. Des cartes d'auditeurs, délivrées gratuitement sur demande adressée à M. le Doyen de la Faculté des Sciences, permeltent aux personnes qui en sont munies l'accès aux lecons d'Électricité indus- trielle, qui ont lieu une fois par semaine. L'admission aux conférences et travaux pratiques est réservéé aux étudiants en Électricité indus trielle, immatriculés sur les registres de la Faculté des Sciences. ; La durée normale des études à l'Institut est de deux années, une année étant consacrée à l'étude de la production et de l’utilisation industrielles de l'énergie électrique par courants continus, et une année à l'étude de la production et de l’utilisation de l’énergie électrique par courants alternatifs. Tout étudiant ayant subi avec succès, dans le cours de ses deux années d'études, les deux exa- mens de fin d'année correspondant aux deux parties du cours, recoit un diplôme appelé Brevet d'études électrotechniques. L'exemple donné par la Faculté de Grenoble fut vite suivi par d'autres Facultés, qui organisèrent des cours spéciaux d'Electrotechnique. Grâce au concours et aux subventions de l'Elat, du Conseil général de Meurthe-et-Moselle, de Ja Ville de Nancy et de généreux industriels, bienfai- teurs de l’Université, la Faculté des Sciences de Naney créa en 1900 un /nstitut d'Electrotechnique ayant pour mission de donner aux étudiants une instruction complète sur tout ce qui concerne les applications de l'électricité. Un-des laboratoires de l'Institut est affecté aux essais, vérifications et éta- lonnage d'appareils que peuvent demander les industriels et le public. La Faculté a complété ensuite l'Institut électrotechnique par une Section spéciale de Mécanique appliquée, ayant pour objet d'instruire les éludiants sur toutes les applications de la Mécanique. Les deux sections de l’/nstitut d'Electrotech- nique et de Mécanique appliquée, quoique indépen- dantes l’une de l’autre, ont plusieurs enseignements communs. Les étudiants onl tout intérêt à com- pléter les connaissances qu'ils ont acquises dans une des sections en suivant, pendant une année d'études complémentaires, les cours supérieurs de l’autre section. Dans la Section d'Electricité, l’en- seignement, pendant les deux premières années, a pour fondement les cours de Mathémaliques, de Physique et de Chimie de la Faculté des Sciences, avec les travaux pratiques correspondants : il com- porte des compléments de Mécanique appliquée et de dessin. Pendant la troisième année, il porte sur l’Electrotechnique proprement dite, avec des projets et des travaux pratiques. Les projets à effectuer dans le cours de celte année sont au nombre de trois : 1° un projet de construction d'une machine à courant continu; 2° un projet de construction d'une machine à courants alternatifs; 3° un projet d'installation : réseau d'éclairage et de transport d'énergie, réseau de tramway, etc. En fir d'études, un jury d'examen décide s’il y a lieu de délivrer à l'éludiant le diplôme d’/ngénieur-électricien, S'il dure ie. 9 A dan, 6j LS ‘ : ' _ G. DE LAMARCODIE — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DE L'ÉLECTRICITÉ A01 st dans la Section d'électricité, ou le diplôme d'/#- . génieur-mécanicien, s'il est dans la Section de A la Faculté de Poitiers, il existe également un cours d'Electricité industrielle avec travaux pra- . mécanique. A Lille, un /nstitut de Physique industrielle fut - créé à la Faculté des Sciences : des cours et labo- ratoires d'Electrotechnique y furent fondés et lar- gement dotés par l'Etat et l'Université. La durée des études est de trois ans. Ces cours et travaux - pratiques sont fréquentés à la fois par des ingé- . nieurs désireux de se spécialiser et par des étu- .diants qui veulent entrer dans l’industrie sans passer par aucune école spéciale, L'enseignement - comprend : {° le dessin industriel et des travaux d'atelier; 2° des essais de machines, des projets, des visites d'installations électriques et des stages dans les usines de la région. La sanction des études est un diplôme d’/ngénieur-électricien de l'Université de Lille, délivré par le Président du Conseil de l'Université, après examens qui com- prennent des épreuves écrites, un avant-projet électrotechnique, une épreuve pratique et des épreuves orales. On exige également la présentation d'un appareil entièrement étudié et construit par le candidat ou la soutenance d'une thèse originale sur une question d’'Electrotechnique. A Marseille, grâce au concours de la Ville, une chaire de Physique industrielle fut instituée en 190%. Les frais de première installation furent couverts par une souscription. L'enseignement s'est, en fait, spécialisé dans l'électricité : il comprend, chaque semaine, un cours public et deux confé- rences en hiver, trois conférences en été. Le cours public, qui a lieu le soir, est suivi par trois ou quatre cents auditeurs de toutes catégories. Les conférences sont exclusivement réservées aux étu- diants et aux personnes immatriculées à la Faculté. Deux fois par semaine, il y a séance de travaux * pratiques. Les diplômes délivrés sont des certificats de Physique industrielle et des brevets d'Elec- tricilé. À Bordeaux, il a été fondé, par l'initiative de la Société des amis de l'Université, des cours d'Elec- tricité industrielle répartis sur trois années. Ces cours se font le soir. Ils sont publics et ont surtout un but de vulgarisation. Ils sont complétés par des manipulations pratiques. Un laboratoire d’étalon- nage complète l'organisation. La Faculté de Lyon a créé un cours de Physique industrielle consacré surtout à l'électricité. Il y est fait trois lecons par semaine, dont deux ont pour objet l'Electrotechnique et les mesures électriques, et l’autre le chauffage et l'éclairage industriels. Des travaux pratiques ont lieu une fois par semaine : ils consistent surtout en mesures et étalonnages. Après examens, la Faculté délivre des certificats d'études supérieures de Physique industrielle. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. tiques une fois par semaine. Les travaux consistent surtout en essais de lampes, de compteurs, etc... et en contrôles d'appareils de mesures. Après examen, il est délivré aux bacheliers un certificat d'Électricité industrielle et aux non-bacheliers un brevet d'électricien. A Clermont-Ferrand, l'enseignement de l’Électri- cité industrielle à la Faculté se réduit à un cours d'une heure et à une séance d'expériences pratiques chaque semaine. Les deux catégories de diplômes décernés après épreuves sont: 1° un certificat d'Électricité industrielle réservé aux étudiants et assimilé aux certificats d'éludes supérieures ; 2 un brevet à toute personne ayant suivi les cours. À Dijon, le cours d'Electricité est compris dans celui de Physique industrielle : il comporte chaque semaine une leçon d'Électrotechnique et une séance de travaux pratiques. Un certificat d'études supe- rieures en Physique industrielle est délivré aux étudiants ayant salisfait aux examens. VI Pendant que l'impulsion donnée par Ja Faculté de Grenoble était l'origine d'un mouvement général en faveur de la création de chaires d'Electrotech- nique, la Société internationale des Electriciens fondait l'£Zcole supérieure d'Electricité, fondation qui avait eu pour prologue celle du Laboratoire central d'Electricité. C'est à la suite de l'Exposilion de 1881 que, par un Rapport en date du 24 février 1882, M. Cochery, alors Ministre des Postes et Télégraphes, avait proposé au Président de la République la création de ce Laboratoire, créalion sanctionnée le même jour par un décret. Le Laboratoire fut inauguré le 10 février 1888, sous l’intelligente direction de M. de Nerville, Ingé- nieur des Télégraphes. Il avait pour but de faire les étalonnages d'instruments de mesure, les essais photométriques sur les lampes à are et à incandescence, les études de machines, d'accumu- lateurs, de matériaux magnétiques et de matières isolantes, etc. A l’origine, quelques élèves furent admis à y travailler sous la direction des préparateurs, mais sans y suivre un enseignement régulier. En dehors de l'Ecole supérieure de Télégraphie, destinée uni- quement aux Ingénieurs des Postes et des Télé- graphes, il n'existait pas à Paris d'enseignement supérieur de l'Electricité. Il y avait là une lacune à combler, et la Société internationale des Elec- triciens l'avait compris. En 1885, le Président de cette Société, M. Georges Berger, émettait l'idée de 10* 402 G. DE LAMARCODIE — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DE L'ÉLECTRICITÉ la création d'une Ecole supérieure d'Electricité, dans une lettre adressée au Ministre du Com- merce : «Je vous demande, M. le Ministre, lui disait-il, de voir au delà de la fondation du Laboratoire. N'avons-nous pas le droit de prévoir le moment où nous pourrions fonder, à côté de celui-ci, une Ecole pratique d'Electricité ? « L'Électricité, par ses développements et sa vulgarisation, est arrivée à constituer véritablement une branche spéciale des sciences physiques ; elle touche à tout, on a besoin d'elle partout : en Méca- nique, dans la Métallurgie, dans les recherches et applications de la Chimie. Elle domine toutes les sciences positives ; on a besoin de spécialistes élec- triciens, et ceux-ci n'ont pas d'Ecole spéciale où ils puissent se former. La Société Internationale des Electriciens offre à l'Etat son concours pour com- bler cette lacune dans l’enseignement scientifique pratique. » C'est à la suite de ces circonstances que l'École supérieure d'Electricité fut fondée et ouvrit ses portes, .rue de Slaël, le 1° décembre 1894, avec 12 élèves. M. Janet, qui était remplacé à Grenoble par M. Pionchon, en avait été nommé Directeur. Comme il fallait des bâtiments et un matériel neu- veau, M. Mascart, membre de l'Institut, Président de la Commission administrative du Laboratoire, n'hésita pas à faire appel à la libéralité des indus- triels. Une vaste souscriplion fut ouverte, et, grâce aux premiers fonds récoltés, l'Ecole put fonc- tionner, modestement d'abord, mais avec un succès toujours croissant. Cette École, qui a pour objet de former des ingénieurs-électriciens, ne recoit que des jeunes gens possédant déjà une somme de connaissances étendues. Chaque année, le Conseil de perfectionnement arrête le nombre de places à mettre au concours. Sont dispensés de ce concours les anciens élèves des Écoles Polytechnique, Centrale, des Ponts et Chaussées, de l'Ecole supérieure des Mines et de l'École des Mines de Saint-Étienne, et les anciens élèves médaillés des Écoles d'Arts et Métiers. Sont admis également de droit les licenciés ès sciences qui ont le certificat de Physique générale et celui de Mécanique rationnelle. Les étudiants étrangers, dont les titres ont élé reconnus suffisants, peuvent aussi être dispensés du concours. Enfin, chaque année, un certain nombre d'officiers (en général, quatre d'artillerie et deux du génie) y sont délé- gués par le Ministre de la Guerre. Le Ministre de la Marine y délégue aussi parfois des officiers et des ingénieurs des constructions navales. De plus, par décision du Ministre du Commerce et de l’In- dustrie en date du 5 mai 1902, la première année _ de l'École supérieure de Télégraphie se fait, sauf quelques cours spéciaux, à l'École supérieure d'Électricité. Le but de l'École est de donner à ses élèves, ou du moins de leur compléter les connaissances théoriques et pratiques exigées par l'industrie moderne. Comment atteindre ce but? M. Janet l'expose en quelques mots : « La définition même du mot pratique, dit-il, est bien délicate à donner quand il s’agit de l'appliquer à l'enseignement. Au sens strict du mot, il faudrait - essayer d'enseigner auxélèves tout ce qu'ils auront à exécuter plus tard; mais il semble bien que ce programme, peut-être séduisant à première vue, n'est et ne peut être qu'une utopie, parce que, le nombre des cas particuliers étant indéfini, un ensei- gnement ne peut prétendre à les embrasser tous. IL faut donc suivre un programme, peut-être plus modeste en apparence, mais plus sûr en réalité, et prendre comme règle d'enseigner aux élèves la partie essentielle de ce qu'ils auront à exécuter, tout enleur mettant entre les mains un outil assez puis- sant pour leur permettre de ne pas être embarrassés devant les cas imprévus que leur avenir industriel leur réserve. Get outil, c’est l’enseignement général ou théorique; mais, de même que le mot pratique, le mot /héorique peut avoir bien dessens différents, etil est clair par exemple qu'on ne l'entend pas de la même facon lorsqu'on l’applique à la théorie des électrons ou à la théorie de la machine dynamo- électrique. Nous sommes en droit, au moins pro- visoirement, d'écarter d'une école d'ingénieurs les théories purement spéculatives; encore, faut-il se souvenir qu'elles peuvent, du jour au lendemain, ètre appelées à jouer un rôle important dans la pratique : les oscillations électriques et les ondes électro-magnétiques nous en fournissent un exemple éclatant. Toujours est-il que, le chemin ainsi dé- blayé, le programme de l’enseignement général comporte encore un grand degré d'arbitraire et demande à être posé avec discernement. » Et M. Janet conclut en disant que les conditions que l'on s'est imposées à l'École supérieure d'Électri- cité consistent « ou bien à donner aux élèves la plus positive des méthodes industrielles qu'ils auront à appliquer du jour au lendemain dès leur entrée dans l’industrie, ou bien à leur assurer, par des exercices rigoureusement choisis, la connais- sance approfondie des lois de l'électricité, le sens des méthodes expérimentales, l'appréciation des erreurs, l'évaluation des ordres de grandeur des quantités usuelles ». eme De scott items tons dde ét 7 | L'enseignement de l'École comporte deux grandes branches : l’enseignement oral par cours et confé- rences, qui oceupe loutes les matinées pendant le premier semestre, et l'enseignement pratique, occu- G. DE LAMARCODIE — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DE L'ÉLECTRICITÉ 103 pant toutes les après-midi du premier semestre et _ les journées entières du second. Les cours réguliers sont au nombre de deux, à raison de trois leçons par semaine chacun : le cours d'Ælectrotechnique générale et le cours de Mesures électriques. Il ÿ a, en outre, chaque semaine, six conférences faites par des Ingénieurs spécialistes sur les diverses explications de l'énergie élec- trique. L'enseignement pralique se compose d'exercices de laboratoire, d'essais de machines, d'exercices d'atelier et de stages industriels. On a adopté à l'École supérieure d'Électricité, pour tous les exercices 2° L'installation et la distribution de force motrice et d'éclairage ; 3° Le calcul d'une dynamo à courant continu ; 4 Le calcul d’une machine ou appareil à courant allernalif; »° La construction. Ils subissent, de plus, des interrogations dans le cours de l'année, des examens généraux de fin d'année, et reçoivent des notes pour tous les exer- cices praliques. Le diplôme d'/ngénieur-électricien est donné à tout élève ayant eu la moyenne 14 pour toutes ces notes, affectées de certains coefficients en rapport avec l'importance des matières correspon- delaboratoire et d'essais de machines, un prin- cipe général, qui ne peut que donner d'excellents résultats : c’est de n’a- voir aucune installation fixe faite d'avance. L'é- lève est obligé de choisir lui-même les appareils dont il a besoin et d'en assurer le montage com- plet, depuis la mise en place jusqu'à l'entier fonctionnement. Ces exercices et essais don- nent lieu à des rapports rédigés par les élèves et remis chaque semaine . aux chefs de travaux compétents. Les travaux d’alelier consistent en construc- tions d’électro-aimants, épissures et enroulements. Les travaux de pure mécanique, les exercices de lime et de tour, après avoir occupé pendant quelques années une place importante dans le programme de l'École, ont été notablement réduits et, tout en n'étant pas complètement supprimés, ont été ramenés à leur plus simple expression. Il y eut à ce sujet des divergences de vues très grandes dans le Consei de perfectionnement, et c'est après des discussions très approfondies que cette partie du programme fut ainsi modifiée. Des visites d'usines, des stages dans les grandes usines électriques et enfin une excursion électro- technique en pays étranger, laissée facultative, com- plètent l'ensemble de l’enseignement pratique de l'École. Les élèves exécutent dans le courant de l'année cinq projets concernant : - 1° L’appareillage ; Fig, 2, — Ecole supérieure d'Electricité de Paris de l'Ecole. : rue gencrale de la salle des machines dantes. La dernière promotion sorte de l'École (promotion 1905-1906), et comprenant 80 élèves, avait la composition suivante : Licencics ès-sciences . . . . . . . 1) Anciens élèves médaillés des Écoles d'Arts et Métiers. . . 11 Elèves étrangers, diplômés d'Écoles techniques supérieures. c la FROM FONOL OMR EE 9 Anciens élèves de l'Ecole Centrale des Arts et Manu CIURES ER TU AN TR 6 Officiers délégués par le Ministère de la Guerre. Anciens élèves de l'École Polytechnique. . . . 3 Officiers de Marine , SP SRE EC TE 0 LR © Anciens élèves de l'École des Mines de Saint- Etienne. Ro ET Élèves TECUSIAUICONCOUTS EME EN 057199 MOLIER eee te Ne EUR 080 Le nombre total des élèves ayant passé par l'Éco!e supérieure d'Électricité, depuis sa fondation jusqu à la sortie de la promotion 1905-1906, est de 632, sur lesquels 523 sortis avec diplôme. 104 Les situations occupées par eux se décomposent ainsi : Ateliers de construction . . . . . . . . . . . 149 Arméeet Marine. . 4": MN ne. 71 Stations centrales MUR ed 1 Chemins de fer Travaux publics . . . . . . Enseignement et laboratoire . . . . . . . . . 34 Électrochimie MSN ST EU EL SR PSE UC 23 Tramways électriques . . . . . . A NN AT) Divers PE CON CREEE EC RES En EUR SEL Motale. FER CU re te 523 VII La fondation de l’Æcole supérieure d'Electricité avait certes fait faire un grand pas à l’enseigne- ment de l'électricité, et l'on doit reconnaitre les immenses services rendus par celte institution à notre industrie; mais l'Ecole supérieure n’est accessible qu’à un petit nombre d'élus, insuffisant pour satisfaire au recrutement du personnel tech- nique qu'exige le développement de l'industrie électrique en France. Le besoin se faisait sentir d’un enseignement abordable à des jeunes gens ayant fait de bonnes études secondaires : enseignement qui, tout en n'atteignant peut être pas le niveau de celui de l'Ecole supérieure, mais heureusement complété par des travaux d'atelier et de laboratoire, permit à ces jeunes gens de se créer une situation de chef de service ou d'ingénieur dans l'industrie électrique. Il y avait place, en un mot, pour des écoles, jouant, pour cette industrie spéciale, le rôle que jouent nos Ecoles d'Arts et Métiers pour l'industrie mécanique en général. En conformant les programmes de ce nouvel enseignement, pour la partie théorique, au programme d'admission à l'Ecole supérieure, on formait en même temps pour cette Ecole une pépinière de futurs élèves ayant une instruction préalable spécialement dirigée vers les applications pratiques, instruction pratique que ne possèdent pas la plupart des candidats et que les quelques mois passés rue de Slaël ne peuvent leur permettre d'acquérir complètement s'ils n’en ont déjà les premières bases. L'Etat ne prenant pas l'initiative de la création de ces écoles d'électricité à la fois théoriques et pratiques, c'était à l'initiative privée qu'il appar tenait de les créer. Ce fut l'idée qui inspira un ingénieur distingué, M. Charliat, lorsque, il y a sept ans environ, il fonda sur ce principe l'Æcole pratique d'Électricité industrielle, dont la réussite a justifié la création. L'enseignement spécial de cette Ecole, où les cours théoriques sont. complétés par des travaux pratiques, est complété par des examens de sortie, à la suite desquels il est délivré par un jury aux G. DE LAMARCODIE — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DE L'ÉLECTRICITÉ élèves méritants un diplôme de fin d'études. 4 cours préparatoire permet de donner aux jeunes gens, dont les connaissances mathématiques sont insuffisantes, le complément d'instruction néces- saire pour suivre les cours normaux. Un cours, d'automobilisme est également professé à cette Ecole. d C'est alors que l’on comprit qu'il y avait encore des perfectionnements à apporter à ce genre d'en- seignement. L'organisation de l'internat, qui n'avait pas encore élé faite et qui était une garan- tie pour les familles, était notamment une modi- fication qui s'imposait. De plus, n'était-il pas justes de consacrer par un diplôme d’ingénieur-électri- cien, après examens passés devant un jury com- posé de notabilités scientifiques et industrielles, l'instruction professionnelle de jeunes gens dignes de ce titre et capables de remplir les fonctions qu'il imposait? La valeur et la notoriété des | signatures apposées au bas de ces diplômes ne garantiraient-elles pas, même sans l'estampille de l'Etat, que le titulaire du titre pouvait en assumer la responsabilité ? C'était d'ailleurs l'idée qui avait guidé la Société internationale des Electriciens, lorsque, sans l'intervention officielle, elle avait décidé de délivrer des diplômes d’ingénieurs-élec- triciens aux élèves sortant de l'Ecole supérieure d'Electricité ? Tels furent les principes qui servirent de base, … en 4902, à la fondation de l'Ecole d'Electricité et de Mécanique industrielles, par un actif et intelli- gent ingénieur M. Chuvin. Cette Ecole, installée rue Violet, au centre d’un quartier industriel, reçut un aménagement con- forme au genre d'enseignement qui devait y être donné. Un laboratoire d'électricité, un atelier muni de tous les types usuels de machines-outils permi- rent de donner aux élèves l'instruction pratique, complément nécessaire de l'instruction théorique, et les familles, rassurées par l'organisation d'un internat, n’hésitèrent pas à envoyer de province à. Paris leurs fils pour s'y créer, dans l'industrie élec- trique, une situation indépendante et en rapport avec le mouvement général qui porte actuellement toutes les jeunes intelligences vers la carrière industrielle. On put constater alors, plus que jamais, qu'un vrai courant s'était établi qui entrai- nait vers cet enseignement nouveau non seulement … des fils d'industriels et d'ingénieurs, mais des fils d'officiers, de magistrats, de propriétaires, de rentiers, peu préparés par l’atavisme à la situation. d'ingénieur, et pourtant heureux, chaque jour, après les heures consacrées au tableau noir, d'en-! dosser pendant quelques heures la cotte de l’ou- vrier. L'Æcole d'Electricité et de Mécanique indus- trielles avait débuté avec une vingtaine d'élèves: 04 G. DE LAMARCODIE — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DE L'ÉLECTRICITÉ 405 par des accroissements succesifs et rapides, elle en compte actuellement près de 400. La durée normale des études est de trois ans, et un cours ‘préparatoire permet de préparer l'instruction “théorique des élèves, qni ne sont pas encore aptes “à entrer dans les cours normaux. Un cours d'auto- mobilisme complète les cours théoriques et prali- ‘ques d'Électricité et de Mécanique. Chaque année, “un jury composé d'examinateurs et de professeurs -des grandes Ecoles de l'Etat et de directeurs ou ingénieurs des principales Sociétés de construc- tions mécaniques ou électriques, délivre deux sortes » de diplômes : 1° le diplôme d'ingénieur-électricien aux élèves sortants jugés dignes d'exercer ces fonctions; 2° le diplôme de fin d'études à ceux qui, sans posséder suffi- samment les connais- _sances théoriques qu'on doit exiger d’un ingé- 'nieur, sont capables de diriger des ouvriers et _ de rendre des services appréciables dans un établissement indus- triel. A côté de l'Ecole su- . périeure d'Electriciteé, des cours spéciaux -d'Electrotechnique créés dans cerlaines Facultés et des Ecoles pratiques d'Electricité dont nous venons de parler, il y a - lieu de citer, comme complétant fort bien . l'ensemble de l'enseignement de l'Electrotechnique - en France, les cours d'Électricilté industrielle de l'Ecole de Physique et de Chimie et du Conser- vatoire des Arts et Métiers et ceux qu’organisent certaines grandes maisons d'électricité pour se former un personnel d'ouvriers spécialistes et de contremailres expérimentés. VIII Comme on le voit, le progrès si rapide des applications industrielles de l'Electricité à eu comme conséquence inévitable la création d'un enseignement spécial. C'est l'Etranger qui en à eu l'initiative, mais la France maintenant suit le mouvement. En tous cas, en France comme à l'Etranger, on Fig. 3. — Ecole d'Electricite et de Mecanique industrielles de Paris : s’est aperçu enfin que l'ingénieur ne doit plus se confiner exclusivement dans de hautes spéculations mathématiques, d'intérêt purement didactique. La théorie ne doit être qu'un échelon pour arriver aux applications pratiques. Dans l’industrie électrique, plus peut-être que dans toute autre industrie, il est nécessaire que l'ingénieur, le chef de service, ne se contentent pas de manier des formules : ils doivent savoir tout aussi bien manier la lime, le burin et le marteau, souder des càbles et enrouler des induits. Ayant ainsi exécuté eux-mêmes le travail de l’ouvrier, ils seront à même de le juger en pleine connaissance de cause et en toute équité : ils sauront mieux diriger, mieux apprécier. Ayant côle du pare. passé par le dur labeur du chantier et de l'atelier, ils y gagneront une autorité qui, sans cela, leur ferait défaut, et, étant plus compétents, ils seront plus justes dans leurs rapports avec leurs subor- donnés. L'enseignement technique et professionnel est ainsi, non seulement une œuvre utile et féconde, mais aussi une œuvre sociale. On ne peut donc qu'applaudir aux initiatives intelligentes qui, à défaut de celle de l'Etat, ont un enseignement théorique et pratique, spécialement adapté à l'industrie qui actuellement domine toutes les autres : l’industrie électrique. créé G. de Lamarcodie, Ancien élève de l'Ecole Polytechnique, Professeur à l'Ecole d'Electricité et de Mécanique industrielles. 496 LES ALIMENTS DE L'HOMME DEUXIÈME PARTIE Dans un premier article’, nous avons vu quelles | sont, en l'état actuel de nos connaissances, les diverses données qu'il semble utile de faire figurer dans les tables alimentaires. Mais ce sont là des bases scientifiques et non des conclusions suscep- tibles de la moindre application pratique. Il faut cependant chercher à utiliser ce que l'on sait sur la composition chimique de la partie digestible des aliments pour mesurer, c'est-à-dire exprimer par un chiffre précis, la valeur nutritive des subs- tances analysées au laboratoire. I. — COMPARAISON DE LA VALEUR ALIMENTAIRE DES TROIS GROUPES FONDAMENTAUX DE PRINCIPES NUTRITIFS. La mesure de toute chose comportant le choix préalable d’une unité de mesure, les résultats doivent être rapportés à une unité fixe de valeur nutritive ou, plus simplement, à une unité nutritive qu'il faut tout d’abord choisir. Ce point réglé, il reste à convenir d'un mode de calcul permettant d'obtenir le nombre d'unités nutritives apportées à l'organisme par un même poids, 100 grammes par exemple, des différents aliments à comparer. Les laboratoires agricoles disposent de plusieurs procédés pour rechercher les fourrages équivalents au point de vue nutritif”. Examinons donc les modes de calcul les plus usités de la valeur des aliments du bétail, afin de retenir celui qui se con- forme le mieux à nos connaissances actuelles sur la | nutrition animale. On a enseigné pendant longtemps que la valeur nutritive des aliments dépend de leur teneur plus ou moins grande en matières azotées. S'il en est ainsi, et si l'on tient compte de ce que la partie digérée des aliments intervient seule dans la nutri- ion, l’unilé nutrilive ne peut être qu'un certain poids, choisi une fois pour toutes, de matières azo- tées digeslibles. Cette convention conduit inévita- blement, inutile de le démontrer, à faire classer en tête les aliments qui, sous le même poids, appor- tent le plus de protéine assimilable. Comme il est | 4 Voir la Æevue du 15 mai 4907, t. XVIN, p. 356. ? Dierkicu et KôniG Zusammensetzung und Verdau- lichkeit der Futtermittel, A891,t. II. O. KeLLNER : Deutsche landwirth. Presse, 1903, n° 85,n° 88. Ta. Preirrer : Mittheilungen der landw. Institute. Bres- lau, 1903. A. MaLcèvre : Comple-rendu du Se Congrès de l'alimen- tation ratioznelle du bétail. Paris, 1904. J. ALQUIER — LES ALIMENTS DE L'HOMME APPLICATIONS PRATIQUES aujourd'hui acquis à la science que les matières non azotées du règne animal et du règne végétal (graisses, hydrocarbonés) possèdent une valeur nutritive trop élevée pour qu'on la néglige, le pro= cédé uniquement basé sur l’'équivalence azotée des aliments est absolument illogique. Ila fait son temps. Depuis quelques années, on emploie de préfé- rence un autre mode de calcul, venu d'Allemagne, qui, tout en conservant quelques affinités avec le précédent, repose cependant sur une base plus scientifique. L'unité nutritive choisie est le kilo- gramme d'amidon digestible, pris comme type d’aliment hydrocarboné. Pour convertir en unités autrilives le kilogramme de matières grasses et der mualières azotées digestibles, voici comment on s'y. prend. En ce qui concerne les graisses, leur trans- formation par le calcul en unités de nature hydro- carbonée s'opère en tenant compte de l’équivalence au point de vue caloritique de ces deux catégories de principes nutritifs. Ce nouveau terme « valeur calorifique » deman- dant quelques explications, nous devons ouvrir ici une parenthèse pour rappeler, sommairement, sa définition. Le publie ne considère le plus souvent dans l'aliment que la matière. L'aliment apporte | cependant autre chose. Il donne des forces et doit être, pour cette raison, considéré comme une source d'énergie. L’aliment n'est donc autre que le mé- lange de sa propre matière et d’une certaine quan- üté de travail non réalisé, mais réalisable, ou de chaleur non encore développée, mais prête à être libérée. Ceci posé, dès que l’on à eu reconnu l'uti- lité de comparer entre elles les quantités d'énergie « contenues dans les divers composés organiques, il a fallu recourir aux conventions. Malgré son existence indéniable, l'énergie n'est guère suscep- tible d'être évaluée numériquement. Ce qui parut le plus simple, ce fut de prendre comme mesure du potentiel, c'est-à-dire de l'énergie en puissance ou virtuelle d'une substance, la chaleur dégagée par sa combustion intégrale. Quand on brüle dans un aliment tout ce que le feu peut décomposer et détruire en présence de l'oxygène de lair, il ne reste, en effet, que des cendres, incapables de four- … nir de l’énergie. Aussi admet-on que tout le poten- tiel de la substance brûlée s’est transformé en cha- leur et, comme cette dernière est forcément libérée, il devient facile de la mesurer au moyen des appa- reils et des méthodes propres à la calorimétrie. La COR, © VA x . an +. J. ALQUIER — LES ALIMENTS DE L'HOMME détermination par combustion de la valeur énergé- tique des aliments est, du reste, fort rationnelle. En recueillant dans un vaste calorimètre la chaleur produite par un homme au repos, ne se livrant à aucun travail museulaire etne variant pas de poids, on trouve que la chaleur perdue, en grande partie par le rayonnement de la peau, est justement égale à la somme des chaleurs de combustion des aliments consommés pendant la durée de l'expé- rience. Ceci démontre que le corps humain se com- porle comme les appareils calorimétriques de nos laboratoires, où les matières hydrocarbonées et les graisses se brûlent en présence de l'oxygène jusqu'à combustion complète, c'est-à-dire en ne laissant comme produit final qu'un mélange d'eau el d'acide carbonique, privé de toute énergie. Nous verrons, par la suite, qu'il n'en est pas tout à fait de même pour les matières azotées. Leur combustion ne se fait pas dans l'organisme aussi complètement que dans le calorimètre. Mais, en ce qui concerne les graisses et les hydrocarbonés, les premières dégagent, pour un même poids brûlé dans le corps, 2,3 fois plus environ de chaleur que les autres. Si donc 100 grammes d’amidon digestible représentent conventionnellement une unité nutritive, 100 grammes de graisse digestible correspondent logiquement à 2,3 unités nulritives. Jusqu'ici, rien dans le procédé qui ne soit rigou- reusement conforme aux connaissances scienti- fiques actuelles. Voyons maintenant comment, dans le procédé en question, lesphysiologistes agronomesdéterminent, lors du caleul de la valeur nutritive des aliments du bétail, le coefficient dont ils affectent la troi- sième catégorie des principes nutritifs fondamen- taux, celle des matières azotées.Ils s'appuient pour cela sur des considérations Lirées de la relation nu- tritive, c'est-à-dire du rapport du poids des ma- tières azolées contenues dans 100 grammes, par exemple, de l'aliment considéré à celui des matières non azotées totales (graisse et hydrocarbonés) contenues dans le même poids!.Si, dans une ration reconnue pratiquement satisfaisante, la relation nutritive est de 1/5,se basant sur ce que le régime, pour être bien utilisé, doit apporter à l'animal 5 parties d'hydrocarbonés et de graisse réunis pour 1 de matières azotées, ils admettent que les hydro- carbonés ou les graisses valent, à poids égal, et au point de vue nutritif, cinq fois moins que les matières azotées. 100 grammes de ces dernières, coneluent-ils, correspondent donc, dans l'exemple choisi, à cinq unités nutrilives. 1 Suivant l usage, le poids des matières azotées est repré- senté au numérateur par 1. Le dénominateur indique, par conséquent, le poids en bloc des graisses et des hydrocar- bonés apportés par l'aliment pour 1, en poids, de principes azotés. 407 Celte manière de raisonner ne supporte pas la critique. On se rend compte tout de suite que le coefficient élevé ainsi attribué à la valeur nutritive des principes azotés conduit aux mêmes résultats quele procédé des équivalents azotés précédemment condamné. Il donne infailliblement la préférence aux aliments riches en azote, alors qu'il n'existe aucune raison, nous l'avons déjà dit, pour ne prendre uniquement en considération dans les aliments que leur partie azotée. La Physiologie moderne a très sensiblement modifié nos idées sur le rôle nutritif des albumi- noïdes. À ces derniers il faut sans doute demander ce qui est nécessaire pour satisfaire largement le besoin impérieux d'albumine de l'organisme; mais, passé cette limite, l'aliment azolé ne peut que constituer une cause de danger pour la santé, par suite des déchets toxiques qui se produisent à ses dépens. Cela signifie, en termes moins scienti- fiques, que les viandes de boucherie et certains produits d'origine animale, très riches en azote, sontloin de mériter comme aliments la faveur sur- faite dontils jouissent dans l'opinion du public. La question de l'azote a beaucoup trop hypnotisé le public inconscient et le monde savant lui-même. L'hygiène alimentaire s'en ressent. On commence heureusement aujourd'hui à abandonner les an- ciens errements. En faisant intervenir la relation nutritive pour calculer la valeur nutritive des aliments azotés, on s'expose, on le voit, à de sérieux mécomptes. Le procédé est, du reste, sur presque tous les points en contradiction complète avec ce que l’on sait de la nutrition animale. C’est ainsi, autre con- séquence erronée, qu'il assigne à la matière azotée une valeur d'autant plus élevée que l’animal en a moins besoin. Il est facile de le démontrer. Per- sonne n'ignore que la relation nutritive change suivant les conditions de l'animal à nourrir. L'homme, d'après les nombreuses données acquises sur les régimes alimentaires les mieux appropriés à ses besoins, ingère, par exemple, en dehors de toute considération scientifique, pour 4 partie en poids de matières azotées digestibles, 4 parties à peine de matières non azotées digestibles, quand il est au repos, puis de 5,5 à 6 lors d’un travail moyen, près de 7 si le travail devient fatigant, et parfois 8 quand il arrive à être surmené. La phy- siologie donne raison à l'instinct. Celui-ci guide bien l'homme en lui faisant ingérer relativement d'autant moins d’albuminoïdes qu'il travaille da- vantage. La destinée physiologique des protéiques n’est pas, en effet, de fournir de l'énergie lorsque les muscles se contractent. On a démontré que le tra- vail augmente très peu l'usure incessante et régu- lière des tissus, presque exclusivement de nature 108 J. ALQUIER — LES ALIMENTS DE L'HOMME azotée, de ces derniers, et de plus qu'il s'accomplit de préférence aux dépens des substances hydro- carbonées ou, ‘après épuisement de ces dernières, aux dépens des graisses. Pourquoi reconnaitrait-on alors à l'aliment azoté une valeur huit fois plus grande que celle des hydrocarbonés dans la ration de l'homme soumis à un travail très dur, et quatre fois seulement plus grande dans le cas du repos absolu ? Raisonner ainsi revient à nier tout ce que l'on sait actuellement sur la qualité des sources d'énergie mises à contribution pendant la contrac- tion musculaire et la production du travail par les moteurs animés. IT. — MESURE DE LA VALEUR NUTRITIVE DES ALIMENTS. Tout compte fait, pas un des procédés dont on s'est couramment servi jusqu'à présent pour cal- culer la valeur nutritive des aliments ne repose sur des bases exactes. Les méthodes que nous ve- nons de condamner attribuent toutes à la matière azotée une supériorité injustifiée sur les autres principes nutrilifs el, en s'éloignant ainsi par trop de la réalité, elles conduisent à des résultats sans intérêt. Le problème serait-il donc insoluble? Non, certes, car il n’est pas impossible de trouver des conventions permettant d’alteindre le but cherché sans se heurter aux connaissances défini- tivement acquises sur la nutrilion animale, et voici comment : D'accord avec la Physiologie, nous avons conclu précédemment que, pour comparer la valeur nutri- tive des matières grasses à celle des hydrocarbo- nés, on peut logiquement affecter chacune de ces deux catégories de principes d’un coefficient pro- portionnel à la quantité d'énergie que chacune est susceptible de mettre à la disposition de l’orga- nisme. Pourquoi n'userait-on pas du même artifice lorsqu'il s’agit de comparer la valeur alimentaire des matières azotées à celle des matières hydrocar- bonées? En ce qui concerne ces dernières, ainsi que les graisses, nous avons déjà rappelé que les unes et les autres dégagent toujours approximativement la même quantité de chaleur, soit qu'on les brûle in vitro dans le calorimètre, soit qu'on les laisse s’oxyder in vivo dans le corps des animaux. La mesure de l'énergie que les matières azotées appor- tent à l'organisme s'opère, par contre, moins facile- ment, car les chiffres fournis directement au labo- ratoire par la calorimétrie doivent être, en ce que les concerne, corrigés et diminués de plus de 1/6 environ si l’on veut se conformer à ce qui se passe en réalité dans l'organisme animal. Cela tient à ce que la combustion de la matière albuminoïde n'y est jamais complète. Elle laisse comme résidus une foule de produits azotés, analogues à l’urée, qui, par une oxydation plus avancée, sont encore susceptibles de fournir de la chaleur, et quittent par conséquent l'organisme sans avoir élé utilisés complètement. Les physiologisles prévenus se sonl en consé- quence employés à déterminer aussi exactement que possible la quantilé d'énergie que la matière azotée ingérée digestible peut céder au corps. Les résullals ont sans doute varié avec la nature des aliments, car la qualité de la matière protéique, de même que celle de la matière grasse et de la ma- tière hydrocarbonée, n'est pas toujours la même; 1 mais, malgré cela, les chiffres obtenus se sont trouvés, pour chaque catégorie de principes, très. voisins les uns des autres. Voici, à ce sujet, les. valeurs calorifiques de 1 gramme des divers prin- cipes nutritifs digestibles, telles qu'elles ont été obtenues par des méthodes sur lesquelles je ne puis m'étendre ici, en les faisant réellement brûler dans l'organisme mens, L'unité de mesure du Per calorifique est, je le rappelle, la calorie. TABLEAU |. — Valeur calorifique de 1 gramme des difrérents principes nutritifs digestibles ‘. HYDRO- | CAREO- NÉS NATURE DES ALIMENTS PROTÉINE | GRAISSES calories Viandes et poissons. . . . .| 4,4 OEUISE SR EN EN TE CR EU D Produits d'origine animale dans le régime mixte (Moy. DÉNErAlE) PET CCE 9,40 Céréales. . . 5 al Légumineuses (lé gumes sec 's). ; ,31 Légumes ÎTAIS EE 3,1 31 Produits d'origine calories 3,89 3,89 calories 9,38 9,49 végétale dans le régime mixte (Moy. générale) . . . NOURRITURE TOTALE (mélange 31 de produits d'origine ani- male et d'origine végétale) dans le régime mixte) (Moy. générale) tte La comparaison de ces nombres n'est pas sans intérêt pratique. Elle nous montre que les subs- 1 La valeur calorifique des principes digestibles est déduite- de celle des mèmes principes bruts, ingérés, en tenant compte de la digestibilité de ces derniers. L'expérience di- recte trouve, par exemple, que 4 gramme de matière azotée insérée dégage 4,013 calories, et que cette matière azotée est digestible dans la proportion de 92 e/,. { gramme de Es ; 2 EL - : s . 4,013 matière azotée digérée doit donc correspondre à 09% ” soit 4,36 calories, chiffre que nous avons ci-dessus indi- qué. Le pouvoir calorifique moyen des hydrocarbonés étant encore de 4,013 calories et leur digestibilité de 97 ©), le gramme d'hydrocarbonés digestibles a pour pouvoir calo- +. 401 NUS t rifique DIT — ï,14 calories environ. Le pouvoir calorifique des principes digestibles seul est intéressant à connaitre et seul doit intervenir dans les rai- sonnements. La valeur brute des principes ingérés n'a pas, en effet, on le comprend facilement, la mème signification vis-à-vis de l'organisme que vis-à-vis du calorimètre. J. ALQUIER — LES ALIMENTS DE L'HOMME 109 tances nutritives organiques se séparent en deux groupes bien distincts. Dans le premier figurent les matières grasses, dont le pouvoir calorifique est le plus élevé, et qui, pour cette raison, sont Suscep- tibles, sous un poids donné, de dégager beaucoup plus d'énergie que les autres principes. Cela tient à ce que les graisses sont très riches en carbone, l'élément combustible par excellence. Les matières azotées et hydrocarbonées, dont les chaleurs de combustion dans l'organisme n'atteignent pas la moitié de celle des matières grasses, forment le second groupe. Cela montre à quelles erreurs on s'expose en supposant, ainsi qu'on le croit vo- lontiers, que, dans les principes nutritifs azotés, il y a bien plus d'énergie accumulée que dans les hydrocarbonés, ce qui signilie, en termes moins scientifiques, que les substances d’origine animale les plus riches en protéine, comme les viandes de 4,14 calories lorsqu'il est fourni à l'organisme par un régime mixte moyen, on voit que À gramme de matières azotées digestibles, de pouvoir calorifique : 4,36 0. A PELOE Fe 4,36,équivaut alors à > soit : 1.05 unité nutritive. et 4,14 Le gramme de matière grasse digestible, suscep- tible de libérer dans le corps 9,4 calories, vaut de 9,4 ; ne même Du soit 2,26 unités nutritives. Le calcul L des unités nutritives d’un principe organique quel- conque ne présente pas plus de difficultés. Pour l'alcool, si l’on adopte le chiffre de 7,184 calories comme valeur calorifique du gramme d'alcool ayant réellement pénétré dans le sang, la valeur en unités nutritives de ce gramme d'alcool absorbé est, par ; 1,184 u LE 2 conséquent, de TNA 1,73 unités nutrilives. Sr Le tableau II facilite encore mieux la compré- TaëLEau IL — Valeur calorifique et équivalence en unités nutritives de 1 gramme des divers principes nutritifs digestibles. MATIÈRES AZOTÉES MATIÈRES GRASSES MATIÈRES HYDROCARBONÉES NATURE DES ALIMENTS (régime mixte) Valeur Unités Valeur Unités Valeur Unités calorifique nutritives calorifique autritives calorifique nutrilives —————"—…— | —— | ——— | — ——— | ——— Produits d'origine animale, moyenne PÉDETAIPE Me des l=ble 4,41 1513 9,40 2,42 3,89 1,00 Produits d'origine végétale, moyenne Dénerale Ne UE ee dec 4,83 1,17 9,31 2:96 4,1% 1,00 Ensemble de la nourriture mixte, moy. générale. . . . 4,36 1,05 9,40 2,26 & AE 1,00 | = boucherie, les œufs, ete., sont loin de mériter, en tant qu'aliments, la faveur dont elles jouissent. On comprend encore mieux l’exirème imporlance de ces dernières remarques depuis qu'il est nette- ment établi que, dans certains cas, les principes nutritifs sont équivalents vis-à-vis de l'organisme lorsqu'on les substitue suivant des poids capables de libérer, sous forme de chaleur, la même quan- tité d'énergie. C'est ainsi que 1 gramme de matière azotée peut parfois satisfaire aussi bien aux besoins dynamiques de l'organisme que 1 gramme d'hydro- carbonés, mais moins bien que 1/2 gramme de graisse. Revenons maintenant à la détermination de la valeur des aliments et résolvons cette fois le problème en ayant recours aux données d'ordre calorifique. Pour comparer entre elles les trois catégories fondamentales de principes nutritifs, nous n'allons faire intervenir que leurs chaleurs respectives de combustion, telles que les donne l'expérimentation directe sur l'animal. Si l'on con- tinue à prendre comme unité de valeur nutritive ou comme unité nutritive : 1 gramme d'hydrocar- bonés. digestibles, de valeur calorifique égale à hension et l'application du procédé. Il indique la valeur calorifique et, en regard, la valeur en unités nutritives du gramme de chacune des trois grandes catégories de principes alimentaires digestibles, lorsque ces derniers sont fournis à l'homme par un régime mixte normal. D'après cela, pour calculer les unités nutritives de 100 grammes d'un aliment, on ajoute au poids d'hydrocarbonés digestibles contenus dans ces 100 grammes sa teneur centésimale en matières azotées digestibles multipliée, suivant le cas, par les coefficients moyens 1,13; 1,17; 1,05 ci-dessus indi- qués, puis sa teneur centésimale en matières grasses digestibles multipliée par l'un des divers facteurs concernant les graisses 2,42; 2,25; 2,26. On arriverait au même résultat en calculant, d’après le pouvoir calorifique des divers principes nulri- tifs digestifs, les calories lotales apportées par la partie digestible de 100 grammes de l'aliment en question et en divisant le nombre ainsi obtenu par 44, pouvoir calorifique moyen de 1 gramme d'hy- drocarbonés digestibles, choisi comme unité de valeur nutritive. L'avantage du premier procédé, c'est que le publie comprend généralement mieux 410 J. ALQUIER — LES ALIMENTS DE L'HOMME la signification du terme « unité nutritive », alors que l’équivalence en « calories » lui inspire moins confiance et lui semble plus scientifique que pra- tique. Le procédé simplifie, en outre, les résultats trouvés, car on se figure beaucoup mieux la valeur de 100 grammes de pain en la cotant, par exemple, 62, nombre des unités nutrilives, qu'en la cotant 255, nombre des calories totales fournies à l'orga- nisme par le même poids d'aliment. Tel est le mode d'évaluation de la valeur nulri- tive que j'ai adopté pour comparer entre eux les aliments de l'homme, étudiés dans les tables aux- quelles je faisais allusion au commencement de cet article. Le procédé, bien que conventionnel, est rationnel, personne ne le contestera, et, dans la pratique, j'espère l'avoir démontré, il esl suscep- tible de rendre de grands services. On peut cepen- dant lui reprocher de ne donner que la valeur nutritive de la partie utilisable des aliments, alors que, pour comparer les diverses substances entre elles avec une exactitude rigoureuse, la réalité des choses voudrait que l’on fasse seulement entrer en ligne de compte les parties utilisées : «utilisables » et « utilisés » ne sont pas synonymes. Avant d'avoir un effet physiologique réellement utile, tout principe nutrilif doit, en effet, être digéré, assimilé, mis à même en un mot d'être utilisé par l'organisme. Nous avons tenu compte de la diges- tibilité incomplète des aliments, mais non de l'influence si grande, on le reconnait de plus en plus, du travail de la digestion, c'est-à-dire de la préhension, de la mastication buccale, de l’insali- vation, de la déglutition, du transport du bol alimentaire le long du tube digestif, etc. Ces actes consomment de l'énergie et, pour se la procurer, l'organisme animal est obligé de détruire une partie de ses réserves. Au moment où l'aliment pénètre dans l’économie, le travail de la digestion a donc déjà à lui seul beaucoup diminué sa valeur escomptée. Par suite du mouvement nutritif et après sa diffusion dans le sang, l'aliment subit en- core de nouvelles transformalions. L’assimilation, par exemple, l'utilise comme matériaux de cons- truction pour constituer des réserves à l'organisme. La désassimilation, d'autre part, le détruit, soit tout de suile, soit après sa mise en réserve pour satisfaire aux dépenses d'entretien et le transformer en chaleur ou en travail. Ces opérations de con- struction, de transmutation, de désassimilation nécessitent {cujours, elles aussi, un nouveau tra- vail et empruntent de l’énergie à l'organisme‘. ‘ En ce qui concerne le bétail, cette question a été très soigneusement étudiée. Kellner et Kübler, à Môckern, pour les ruminants, Züntz, Lehmann, Hageman, à l'Institut agro- nomique de Berlin, pour le cheval, ont déterminé les pertes d'énergie subies par la matière organique pendant sa trans- formation en produits utiles (viande, lait, travail), afin de Pour être complètement exacl, il faudrait encore tenir compte de l’action réciproque des principes assimilés les uns sur les autres. Il en esl dont la présence à certaines doses épargne l'usure des autres. Une ration insuffisante en protéiques peut, par exemple, devenir suffisante quand on l’enrichit en graisses etsurtout en hydrocarbonés. L'influence spéciale de certains aliments sur le système ner- veux n'est pas non plus un facteur négligeable. Quoi qu'il en soit, la valeur nutrilive et dynamique d'un aliment considéré au moment de son inges- tion dépasse toujours celle de la partie digestive réellementutilisable du même alimentet a fortiori celle de la partie vraiment utilisée. L'état de nos connaissances ne nous permettant pas encore d'évaluer avec une exactitude suffisante les pertes moyennes subies, avant leur utilisation, par les grandes catégories de principes nutritifs, nous n'avons fait porter nos calculs que sur les unités nutritives digérées utilisables. Ces dernières suffisent en tout cas à fixer nettement les idées sur la quantité de matière et d'énergie mise à la disposition de l'homme par les divers aliments dans le régime mixte normal. 5 III. — TABLES DE SUBSTITUTIONS. Malgré ces dernières réserves, peut-on cependant considérer comme équivalents vis-à-vis de l'orga- nisme humain tous les aliments qui, sous le même poids, apportent le même nombre de calories ou d'unités nutritives utilisables? La question a un intérêt pratique, car l'alimentation rationnelle con- siste uniquement à savoir composer des rations équivalentes avec des substances de nature et de composition très différentes, autrement dit à savoir substituer les aliments entre eux. Le consomma- teur écoutera certainement d'une oreille moins rebelle le chimiste et le physiologiste le jour où ceux-ci, sans parler de la composition chimique et connaitre le véritable effet physiologique utile des aliments. Chez les ruminants, le déchet est considérable : sur 100 par- ties utilisables de fourrages grossiers (foin, paille), le bœuf n'en utilise en réalité que 56. Ce déficit de 44 0}, se répartit ainsi en chiffres ronds : il y a perte de 22 o}, due au travail de l'ingestion, de la mastication, de la rumina- tion; de 9 0, due au travail que nécessite la propulsion dès aliments d'un bout à l’autre du tube digestif (péristal- tisme, etc.): de 9 °/, par suite des fermentations intenses qui se produisent dans les estomacs des ruminants; enfin de 4 °/, due aux dépenses d'énergie inhérentes à la autri- tion intime et aux métamorphoses subies par les aliments digérés (métabolisme). Le cheval n'utilise de mème que 48 0, de ce qui est utilisable dans le foin : sur 100 parties utilisables de l'avoine, il lui en reste, px contre, S0 environ de disponibles pour la production du travail. Toutes ces pertes se reproduisent en petit chez l’homme. On a cons- taté chez ce dernier une élévation de près de 30 ©}, des échanges nutritifs, rien qu’en excitant le tube digestif au moven de substances laxatives (sulfate de soude ou de magnésie) prises à petites doses. J. ALQUIER — LES ALIMENTS DE L'HOMME de la digestibilité et des calories, mettront à sa disposition des tables de substitutions permettant de remplacer à première vue les aliments les uns par les autres, à valeur nutritive égale, et facilite- ront ainsi l'établissement des rations ou les moditi- cations à apporter, suivant les circonstances, aux régimes courants consacrés par la pratique. Rien n'étant plus simple que d'opérer une substi- tution rationnelle entre deux ou plusieurs aliments lorsque l’on est fixé sur leur valeur nutrilive com- parée, j'ai donc présenté au dernier Congrès des tables de substitutions, calculées d’après le nombre d'unités nutritives utilisables apportées par les aliments et indiquant par combien de tel aliment il faut remplacer 100 de tel autre. L'esprit du publie n’est pas encore fait à ces sortes de calculs, que l’on a de suite dénommés ironiquement « les mathématiques alimentaires »,et certains se sont apitoyés sur le sort du malheureux consommateur, condamné par la science à recevoir les calories ou les unités nutrilives nécessaires sans qu'il ait le droit de se préoccuper de la nature des aliments. Pour montrer le peu de iogique du procédé, on a feint de prétendre que l’on fournissait, parexemple, la même chose à l'organisme en mettant à sa disposition 62 unités nutritives sous forme : PRIX MOYENS à Paris Soit de 100 grammes de pain coûtant environ 0 fr. 040 — 6% grammes de sucre — 0 fr. 042 — 129 gr. de gigot de mouton — 0 fr. 335 — 85 ce. ec. d'eau-de-vie — 0 fr. 382 — 954 grammes d'épinards = 0 fr. 400 Nos conventions premières, uniquement basées sur les lois de la physiologie de la nutrition, con- seillent cependant de ne mettre en pratique le système scientifique des substitutions que sous certaines conditions et réserves, tout particulière- ment indiquées dans mes tables et que voici très résumées. Pour que les aliments comparés l’un à l’autre puissent avoir le même effet utile vis-à-vis de l’or- ganisme humain, il faut, avant tout, qu’ils soient voisins quant à leur teneur en principes nutritifs nécessaires, c'est-à-dire en malières azotées albu- minoïdes et en matières minérales. Les premières, nous le savons, ne sauraient être remplacées par aucun autre principe nutritif, à moins naturelle- ment que la ration n'en contienne plus que l'usure des tissus n'en réclame, tandis que les graisses et les hydrocarbonés peuvent, dans une certaine limite que nous verrons, se substituer à valeur énergé- tique égale. Pour éviter toute erreur de ce côté, il est facile, on l’accordera, de mettre le consomma- teur à même de comparer lui-même les aliments au point de vue de leur teneur en malières azotées. Il suffit que les tables alimentaires qu'il consulte A donnent, tout calculé, le rapport des unités nutri- tives digestibles de provenance protéique et des unités nutritives fournies en bloc par les matières grasses, et hydrocarbonées digestibles. Suivant l'usage, les matières azotées sont représentées par 1 au numérateur de ce rapport. Le dénominaleur indique, par conséquent, le nombre d'unités nutri- tives d’origine non azotée (graisses et hydrocar- bonés) contenues dans l’aliment à côté de 1 unité nutritive de nalure azotée. Lorsque les relations des unités nutritives de deux aliments sont iden- tiques ou très voisines, une unité nutritive utili- sable de l’un des deux aliments se comporte, vis- à-vis de l'organisme humain et en ce qui concerne l'apport azoté, comme une unité nutritive de l’autre. Pour plus de précaution, il est non moins utile que le public trouve encore dans les tables de substilu- tions la teneur en matières azotées digestibles de chacune des quantités d'aliments qui y figurent. Cela lui permet de se rendre compte d'un simple coup d'œil si un certain poids d'aliment, tout en ayant la même valeur nutritive globale qu'un certain autre poids d'un autre aliment, contient à peu près la même quantité de matières azotées. En ce qui concerne les matières minérales, bien qu'elles soient aussi nécessaires que les protéiques, nos connaissances actuelles ne permettent pas de renseigner exactement le consommateur sur ce que doit être la ration journalière minérale, tant au point de vue de la qualité que de la quantité. On a, il est vrai, constaté que l'alimentation courante, prise en dehors de toute considération scientifique, apporte, sous une forme convenable et en quantité suffisante, les éléments inorganiques minéraux nécessaires à la vie‘. Les hygiénistes soulèvent également d’autres ob- jections, que voici, contre l'emploi, dans la pratique courante, de ssubstitutions à valeur nutritive égale. La science physiologique autorisant à remplacer les graisses par les hydrocarbonés et vice versa, en se basant, pour mesurer leur valeur nutritive, sur la chaleur de combustion de ces deux principes, sur la foi des chiffres fournis par le calorimètre, le con- sommateur peut donc, a-t-on fait remarquer, se trouver contraint à donner régulièrement la préfé- rence aux aliments gras. Ces derniers n'appor- tent-il pas, en effel, sous un poids donné, plus du double de l'énergie contenue dans les pro- ! Là fixation par l'organisme animal et surtout par l'or- ganisme adulte de la matière azotée et des composés miné- raux, quel que soit l’état de ces derniers, dépend bien plus de l'activité cellulaire et des aptitudes spécifiques de l'in- dividu que de la qualité de l'alimentation et de son abon- dance. La suralimentation azotée n'occasionne que très rarement une surproduction de chair maigre musculaire. La suralimentation minérale n'enraie pas infailliblement la déminéralisation (rachitisme, phosphalurie, déchlorura- tion, épuisement des réserves ferrrugineuses etanémie, etc.). 412 téiques et les hydrocarbonés? Comme les graisses ne se rencontrent en abondance que dans les pro- duits d'origine animale, dont on ne doit pas, si l'on écoute les médecins, user en grandes quantités, voilà, a-t-on prélendu, le procédé condamné par l'hygiène, à moins que le consommateur ne dispose d'un critérium lui permettant de ne pas dépasser une juste limite. Eh bien, ce critérium existe. La nature a heureusement doué l'homme d'un instinct qui pressent les J. ALQUIER — LES ALIMENTS DE L'HOMME instinctifs et le bon sens nous guident, on le voi!, très suffisamment, et ne nous laissent ingérer que des qualités et des quantités d'aliments en rapport avec la constitution anatomique, la capacité, les habitudes, les sécrétions de notre estomac et de notre intestin. En ne l’oubliant pas, on évite les erreurs précédemment signalées, mais dues unique- ment à l'exagération flagrante des défauts d'une méthode que certains se sont plu à ne pas appli- quer raisonna- dangers de ces [— = 5 blement. sortes de régi- s . * à Lorsqu'on opè- mes exclusifs. Le 9 ES EN Ë È re des substitu- ss vo îr : . consommateur Ë 9 ù à S SAS >: Ea tions, il faut de : È = CL ER EN EEUTS È oo à È : rejette de lui- RES UE RO Ë Sue o + > même, lors de la à ; CCR Re EU ol SE Ce SE 9 ; ? 5 même les substi- Re SR aus ë SEE de REMISE < mise en pratique S : HN 0 CR 2 TL à RS UT tutions condui- CO AS È CLR CR è $ de la formule à fran Prix FA Pa 50ri _ sant à un abus 185 45 1,20 1,33 340 390 160 440 188 [e] & SAS 150 110 41,35 1,20 270 110 théorique propo des corps gras, Rel= esse sée, tenir comp- car, sans avoir Jsse hs 137 Les Les lex hou Hs ke. 18 has he h2s Lo 50 2 ze Jos es Paso te, cela va encore fait de physiolo- 9279 de soi, de la dis- gie et sans con- \ tinction que tout naitre les règles élémentaires de l'hygiène, il sait que l'estomac supporte mal les doses éle- vées de graisses. L'homme gnore pas davan- tage qu'il s'ac- commode beau- coup mieux des assez n'i- hydrocarbonés, et il est du reste US ; L *os6 051 d'autant plus DES Len 037 7033 poussé à les aug- le monde sait faire entre les aliments légers, qui passent faci- lement, et les. aliments lourds, dont la digestion est lente et pé- nible', puis entre les aliments qui plaisent et ceux que l’on n'aime pas. Ne pas tenir compte des idio- syncrasies, c'est- à-dire des goûts. menter dans sa ration qu'ils coû- tent moins cher que les corps gras. Devant cette dernière re- marque, il est permis de se de- mander l’homme n'est pas poussé, par un excès inverse, à trop demander aux hydrocarbonés. On peut encore répondre que non, car les principes hydrocarbonés dominent surtout dans les aliments d'origine végé- tale; or, comme ceux-ci sont généralement riches en ligneux, la ration devient de suite trop volumineuse si l’on en abuse. L'homme qui dispose d’un tube di- gestif d'omnivore, différent de celui des herbivores, a vite fait de s'en apercevoir. En résumé, les goûts (avec déchets). Unités (sans déchets). au kilog élue s). alors si . — Comparaison de la valeur nutrilive ct de la valeur vénale des différents morceaux de viande Unités nutritives utilisables équivalentes à nutritives utilisables équivalentes à 100 d'aliment brut Sommes en francs qu'il faut dépenser pour avoir, rents morceaux, l'équivalent nutritif de { frane L Prix (en francs) des 100 unités nutritives utilisables (pour les prix | 1 FBogre Mas del et des aptitudes spéciales de ceux dont on se pro- pose de modifier le régime, re- vient à ruiner l'estomac et la santé : ce qui, je crois, n’a ja- mais étéle but de l'alimentation rationnelle. de bœuf. 100 d'aliment brut dans les diffé- d’ aloyau. 1 Pour cette raison, un tableau de substitutions, calculé en tenant compte de l'équivalence au point de vue des unités nutritives utilisables, ne peut être consulté utilement, lors d'une application pratique, que s'il ne porte que sur des ali- ments comparables quant à leur nature et quant à l'inten- sité du travail occasionné par leur digestion et assimilation. Un de mes tableaux de substitutions ne compare, par exemple, que les différents morceaux de viande de bœuf, un autre que les différentes charcuteries, un autre que les J. ALQUIER — LES ALIMENTS DE L'HOMME 113 IV.— PRIX RESPECTIFS DES TROIS GROUPES FONDAMEN- TAUX DE PRINCIPES NUTRITIFS. Nous avons posé en principe que l'alimentation rationnelle doit répondre à deux sortes d'exigences de nature très différente, mais qu'il est cependant nécessaire de satisfaire toutes deux en même temps. On ne peut l’établir que 5 conformément Ÿ ? & 2 aux lois phy- se à * È $ En, siologiques à : LUE : : - Ê régissant le ù €. HSE Ë Ë ë fonclionne- ST RS MRC à St & = — francs 0#2 0,35 020 0,70 Prix moyen du ment normal 0,30 0,50 0,80 0,40 0,40 0,65 Kilo à Paris demande; mais la natureet, par conséquent, la com- position chimique influent également un peu sur le prix de vente. Personne n'ignore que les aliments peu azotés, offerts principalement par le règne végétal, sont beaucoup moins chers que les produits d'origine animale, presque totalement privés d'hydrocar- bonés, mais très riches en principes azo- tés et en ma- tières grasses. Il est donc in- téressant de déterminer les Choux Frise Choux Fleurs Artichaut Chicorée frisee —— ——— 0,50 0,42 0,37 0,35 0,50 0,60 0,90 0,30 0,60 125 et régulier de l’organisme Relation nuérikive Ja.6 Vase o.ss 9 hoso Pare 39 ao os 87 6,50 eo Las her L8 570 50 DAT 1300 32 prix auxquels humain. Il faut, en outre, qu'elle attei- gne ce premier but, tout en faisant dépen- ser le moins possible au consomma - teur. Les tables alimentaires, et surtout Îles tables de subs- tilutions, dont tout le monde peut compren- dre la signifi- RES l’on paie dans les divers ali- ments les trois groupes fon- damentaux de principes nu- tritifs [ma- tières azo- tées, matières grasses “ef hydrocarbo - nés]. Voici quel artifice on à cherché à résoudre ce problème dé- licat. On est parti de cette con- vention que - par cation, résu- ment les con- : | ; 012 0,5% 0,32 naissances 1 1 EE nécessaires à l’établisse - ment d’une ra- tion satisfai- sant aux con- ditions physio- logiques d’une bonne alimen- tation. Lacom- paraison de la valeur nutritive et de la valeur vénale des aliments permet de se conformer ensuite aux conditions économiques d’une bonne alimen- tation. Le prix des aliments, comme, du reste, de tout ce qui se vend, est réglé avant tout par l'offre et la Unités nutritives utilisables (avec déchets). (sans déchets). kilog indiqués. principaux légumes frais et salades. Les comparaisons d’en- semble entre aliments disparates n ont d'intérêt qu'au point de vue économique. 2. — Comparaison de la valeur nutritive et de la valeur vénale de divers légumes et salades. Unités nutritives utilisables équivalentes à 100 de parties comestibles Courbe de comparaison des sommes (en francs) qu'il faut dépenser pour avoir l'équivalent nutritif de 1 france de pommes de terre. Prix en francs des 100 unités nutritives utilisables pour les prix au la valeur vé- nale des ali- ments dépend uniquement de leur te- neur en ma- tières azotées, équivalentes à 100 d'éléments bruts TASSE SRE hydrocarbo- nées. Posant ensuite : x = le prix du gramme ou du kilog de matière azotée y —le prix du gramme ou du kilog de matière grasse z — le prix du gramme ou du kilog matière hydrocarbonée brute ou diges- tible suivant de les conventions, et plusieurs analyses ayant donné la composition de la denrée examinée (il faut au moins trois ana- A4 J. ALQUIER — LES ALIMENTS DE L'HOMME lyses ou moyennes d'analyses), en représentant par : a, a!, a", les trois taux trouvés de matière azotée, 959% — — grasse, Bb — — hydrocarbonée, TagLeau II. — Prix aliments azotés ou gras sont plus chers, mais cela n'empêche pas que tel morceau de boucherie, ou tel légume, ou tel fruit jouit d'une certaine faveur auprès du public à cause de ses qualités diététiques, de revient de divers aliments et des principes nutritifs digestibles qu'ils contiennent. PRIX moyen à Paris (au détail) du kilog d'aliment brut (avec déchets) PRIX du kilog ALIMENTS partie comes- tible 1 EE ——_—_— — Bœuf, aloyau. . — plates côtes . Veau, longe . — épaule. . . . Mouton, gigot. 4 — poitrine h: rutes côtes. Porc, épaule et basses côtes. — côtelette carré Jambon fumé Poulet. : Hareng frais. Carpe . OEuf. Pain blanc. Farine de frome nt. Lentilles. . PRIX 100 grammes de de matières | de azotées digestibles (MA) PRIX PRIX de de de 100 grammes | 100 grammes matières d'hydrocar- grasses bonés digestibles digestibles (MG) (MH) RAPPORT du prix de MA à celui de xG RAPPORT des prix de MH :MA:MG œ 2 = + CD RmO-Ir ND D 00 CO == He SUN IS > © OO © D © db Fe 09 19 & © OC DO D > CO de © CE CO LU it ee O0 de 19 SOS ND © D © GO NN & NN Co Sos osssosocos* on arrive au système suivant de trois équations à trois inconnues : ax+ qgy + hz=P —le prix de denrée analysée, ax + g'y + h'z=P' —]le prix de la denrée — a!x + g'y + h'z = P'— Je prix de la denrée — qui donne les valeurs de x, y, z. On se rend compte de suite que le procédé est illogique et ou de la difficulté que l’on a à se le procurer; tan- dis que tel autre aliment, qui en vaut bien d’autres à tous les points de vue, n’est pas prisé, unique- ment parce que l'usage ou le goût du jour veulent qu'il en soit ainsi. La méthode d'évaluation algébrique des varia- lions, dans les divers aliments, du prix des groupes que, dans la pratique, il se- rait dangereux d'en user pour comparer au point de vue Pain blanc Pois casses Lentilles Macaroni 1,20 è Boudin nient d'aboutir le plus souvent à des valeurs négatives. Je l’ai constaté en gue sèche fondamentaux E de principes ù $ nutritifs pré- NE ÿ sente encore RE 3 cet inconvé- : Lo] ë È Lait de vache Bœuf Flanchet Porc, poitrine Saucisses Mouton hautes Moules Ca économique les n (Paris) en ARTE men ‘ © aliments entre 8 DS 0 Me de . 4 © = Le] o o Ce eux. Le prix — ; & La des aliments dépend avant tout, en effet, n,83 12,61 15,76 --- 60 08 17,92 ESS se {as S ss AZ ETAPE QT S cherchant à l'appliquer aux aliments de 576 18,00 19,25 1 14,4 o a [77223.04| 1,60 [77772220,98| 2,40 16,45 280 772119 37 575 13,62 nous l'avons l'homme. dit. de l'offre et Fig. 3.— Prix (en centimes) sur le marché (chilfres gras) de 100 unités nutri- Le système tives prises dans les aliments bruts (avec déchets) indiques. Se Yo k de la demande. d'équation à Me LE E Ce que coûtent les matières azotées des 100 unités nutritives. He à ŒUCUn FO Ce que coûtent les hydrocarbonés et graisses réunis des 100 unités nutritives LOS nement na Sa prises dans F les aliments d'origine animale, ne donne raison d'être, | — — végétale, qu ‘exception - s'ilse trouve en contradiction avec cette loi économique universel- lement reconnue. Sans doute, en règle générale, les 1 Déduit du précédent en tenant compte des déchets. nellement des chiffres positifs. Lorsque, dans l'aliment consi- déré, on peut ne pas lenir comple des hydrocar- bonés, ce qui arrive pour la plupart des produits d'origine animale, comme il ne reste que deux J. ALQUIER — LES ALIMENTS DE L'HOMME A15 inconnues, l'équation se résout plus facilement. Le tableau IT donne quelques-uns des résultats de nos calculs. V. — COMPARAISON DE LA VALEUR NUTRITIVE ET DE LA VALEUR VÉNALE DES ALIMENTS. IL eût été inté- ressant de trou- ver, pour cha- que catégorie d'aliments, un rappart suffi- samment cons- Marmelade de Fruits Bœuf, plates côtes lat Porc,Epaule, pl. de côtes Hareng saur Vin rouge ord® Hareng frais Carotte Chocol Bœuf flanc, bavette Revenons à la compuraison de la valeur nu- tritive et de la valeur vénale des aliments, carré Œuf de poule Jembon fume Bœuf,paleron épaule Foie de bœuf Mouton côtelettes Mouton épaule Maquereau Pied. de porc {ant entre les Prix moyen (Paris, . . oO prix des trois .50 [exe] 1 [3 qui permet, nous l'avons © a œ 1,20 à ü 3 ñ 1,503 20 2,40 D 1,00 3, 1,50 grands grou- pes de princi- pes nutritifs; mais, en pré- sence des écarts enregis- trés ile faut 28,55 15,76 132,47 96e | 28,55 (6,08 17,40 S 25,27: 1#+0 23,87 m77777726,86 - 4,90 21,96 1306 14,89 16,08 dit, de se con- former aux conditions éco- nomiques d’une bonne alimentation. Quand on con- LL À] 735411 7723816 TITI 6,5 m7 2 24,28 VIII 25 34,46 TLIITIT A 8,2 4| #0 0 RE 757 Sogsem rs d'or renoncer àpré- Fig. 4. — Prix (en centimes) sur le marché (chiffres gras) de 100 unités nutri- nait le nombre senter des coef- ficients réelle- On remarquera A = — que, dans les viandes et autres produits d'origine animale, et cela contrai- tives prises dans les aliments bruts (avee déchets) indiqués. E Ce que coûtent les matières azotées des 100 unités nutritives. Ce que coûtent les hydrocarbonés et graisses réunis des 100 unités nutritives ment moyens. prises dans 8 les aliments d'origine animale, d'unités nutri- üuves des ali- ments à com- végétale. parer, on trou- ve sans Îa | moindre difficulté celui d’entre eux qui, tout compte fait, présente le plus d'a- rement aux lois des équi- valences phy- siologiques des aliments, Sardine à l'huile longe Veau, collet Veau Lepin vantages. Il suffit, pour cela, de se laisser guider cul. Foie de veau Haricots ve Veau, on paie le plus souvent la ,00 | Peau, épaule, 2. o 3 o Sn 3 o Ÿ 5 o à 9 ‘2 9 2, 1 1 par le prix de » K9 d'aliment IE 1 e ° o o o l'unité nutri- 1,00 Q | Pomme 2,20 -|3,20 graisse infi- niment moins cher que la matière azo- T2 tée. Dans Îles produits d'o- rigine végé- tale (pain, fa- rine, lentille), les prix des matières az0- tées et hy- se ol Cu tive. Ce prix : est obtenu en divisant Île prix de 100 grammes de l'aliment con- sidéré par le nombre d’u- nités nutriti- vescontenues dans ces 100 grammes. L'aliment Île - drocarbonées sont, au con- lraire, assez E Ce que coûtent les matières azotées des 100 unités nutritives. plus avanta- Fig. 5. — Prix (en centimes) sur le marché (chiffres gras) de 100 unités nutritives ceux est celui prises dans les aliments bruts (avec déchets) indiqués. a dont l'unité voisins lun Ce que coûtent les hydrocarbonés et graisses réunis des 100 unités nutritives nutritive coû- de l’autre et prises dans À les aliments d'origine animale, te le moins bien infé- — — végétale. cher. On ne rieurs à Ceux de la graisse, ainsi que cela doit théoriquement exister. saurait insis- ter davantage, tellement le raisonnement et le calcul sont simples à comprendre et à exécuter. PP D À tt Éd tt Éd dE Dés à ne Lies de Su à dé és. D AS ÉÉÉÉÉR ÉRS — REPAS SERVIS DANS LES GRÔMERIES REPAS SERVIS DANS LES RESTAURANTS A PRIX FIXE REPAS SERVIS DANS LES BOUILLONS POPULAIRES Qc type 1er type 2° type 2 œufs sur Saucisson , le plal . 868r5 1/2 litre de lait. . +: 438,0 lpain . . 63,0 Sardine à l'huile. 128'|Longe de veau. . Beurre... Beurre. Ragoüt de mouton: Longe de MOutON Pormes de terr Macaronit vère de Comté. Fromage ni 101 crème. Crème. . 40 Lentilles + 200 ain... AIT 500 |[Gàteau-, O0 Vin rot Pain . 000 Vin blane, 305 €. €. Menus . BTE Aufr, 25 A fr, 05 = Ne diffèrent que par la’‘quantité de vin bue. Matières azotées 102,304 58,963 82,270 34,979 36,936 19.402 373,450 329,596 140,834 ee { du vin 8,213 6,8 l vin.:44,250 : 0 22,12 20,496 33,600 ives digé C olé : k 39,228 109,465 81,281 82321 188.398 802102 6 J. ALQUIER — LES ALIMENTS DE L'HOMME Par — par l'Alc: Total des Unilés nutritives . . Rapport des Unité aux Unités nutrilives non azotées. Prix des 100 Unités nutritives. 59,471 (Ù 181,020 381,663 39,774 , 336,459 35,868 533,710 152,084 58,800 0 fr, 613 0 fr. 159 0 fr, 215 208, 704 29,400 ü01,899 416 drocarbt 0 fr. 189 J. ALQUIER — LES ALIMENTS DE L'HOMME "au Les figures 1 et2 complètent ce que les précédents graphiques nous ont déjà appris sur les différents morceaux de la viande de bœuf et les principaux légumes et salades. Elles permettent de comparer entre eux,au point de vue réellement économique, les aliments de chacun de ces deux groupes. Il faut nalurellement s'entendre sur la signilica- tion exacte donnée ici au mot « prix ». Nos graphi- ques désignent sous cette rubrique la valeur vénale moyenne de l'aliment sur le marché de Paris ; mais, pour les comparaisons économiques, il vaut mieux calculer le prix de l'unité nutritive en partant du prix de l’aliment servi et tel que dans l'assiette, c'est-à-dire en se basant sur le prix de vente ma- joré de tous les frais accessoires de transport, de main-d'œuvre, de cuisine, d’assaisonnement, de cuisson (combustible), etc. Le fromage, qui n'exige ni préparation ni cuisson, livre certainement l'unité nutritive à meilleur compte que son équivalent aulritif de viande crue. Cerlains aliments deman- dent un assaisonnement spécial qui coûte et que l'on doit logiquement envisager. Les figures 3, # et 5 montrent l'intérêt de la com- paraison des prix moyens des 100 unités nutritives prises sur le marché de Paris sous forme de 60 ali- ments de loute nature choisis parmi les plus cou- rants. Le tableau indique, en outre, ce que coûtent d'une part la partie azotée el d'autre part la partie non azotée de ces 100 unités nulrilives, données que l’on oblient en partageant le prix des 100 uni- tés nulrilives proporltionnellement à la teneur de l'aliment en protéiques d'une part, puis en hydro- carbonés et graisses réunis d'autre part. L'examen des graphiques montre que les prin- cipales catégories d'aliments courants, tels que les viandes de boucherie, les charcuteries, les poissons ou crustacés, les légumes, les fruits, les sucreries, etc., sont tout aussi bien représentés dans la classe des aliments réellement avantageux (fig. 3) que dans celle des aliments moyennement économiques (fig. 4) ou dans celle des aliments les plus chers (fig. 5). En tête du premier graphique (fig. 3) figurent, par exemple, les légumes secs, le pain, le saindoux, cerlaines charcuteries, ce qui n'élonnera personne, puis le sucre et le beurre, le lait et les figues, ce à quoi le consommateur s'attend probablement moins, et enfin plusieurs morceaux de boucherie (mouton, bœuf). Cette dernière constatation se trouve en complète con- tradiction avec les conclusions de ceux qui, acluel- lement, enseignent que la viande de boucherie occupe la première place parmi les aliments de luxe. Si la science de l'alimentation rationnelle veut faire œuvre ulile et pratique, il ne faut pas qu'elle se montre, de parti pris, intransigeante, quel- que louables que soient se< intentions. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. VI. — APPLICATION PRATIQUE DES DONNÉES PRÉCÉDENTES. Afin de conclure en des termes bien faits pour que l’on comprenne loute la portée sociale de ces raisonnements, j'ai calculé la valeur nutritive de différents types courants de repas à bon marché servis, à Paris, dans les crèmeries, puis dans les restaurants à prix fixe et dans les bouillons popu- laires, et cela dans le but de la comparer à leur valeur vénale. Tousles chiffres concernant la nature et le poids des aliments, ainsi que la composition chimique des menus disculés dans le lableau IV, sont empruntés à l'une des enquêtes alimentaires si cConsciencieusement poursuivies sur place par M. Tribot, attaché au laboraloire d'Energétique d'Ernest Solvay. Il ne s'agit donc pas là de repas ficüifs, mais de résultats moyens déduits de nom- breuses pesées et analyses ayant porté, pour cha- que type, sur vingt ou trente échantillons d'ali- ments prélevés dans les quartiers du centre de Paris. Nous avons dit, au débul de cel arlicle, qu'il fallait au Nous basantsur les prix auxquels reviennent les 100 uni- parler argent consommaleur. tés nutritives, dans chacun de ces lypes de repas, ainsi que sur le nombre d'unités nutritives suscep- tibles de subvenir largement aux besoins journa- lières d'un homme moyen fournissant un travail moyen (950 unil‘s nulrilives environ), nous mon- trerons au Parisien de condilion modeste, mais qui veut et doit s'alimenter suffisamment, que ses dépenses de table vont varier du simple au triple, presque au quadruple, suivantqu'il prend ses repas à la crèmerie, ou dans un restaurant à prix fixe, ou dans un bouillon populaire. \'e Coût de l'alimentation suivant les genres de repas. TABLEAU | REPAS REPAS REPAS servis dans'les servis dans les! servis dans les | BEVIS SCANS A restaurants bouillons crèémeries à prix fixe populaires | — | | 1 type | 2° type |1° typel2#type|) 1 type typel | fre NC fe cc |Nfr c fr. c fr fo ci] Par jour. > 82 523) O > (4 3 910095 Par an. .12.126 4811.914 06/1551 331745 51/1.206 691724 71| Ces chiffres se passent de commentaires et leur intérêt pratique, je l'espère, donnera à réfléchir à ceux qui doutent encore de l'utilité et de la possi- bilité des applications sociales de la science de l'Alimentation. J. Alquier, Ingénieur-agronome, Chimiste expert près les Tribunaux, , Attaché au Laboratoire de Recherches alimentaires de la Compagnie générale des Voilures à Paris. 410** A18 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Duhem (P.), Correspondant de lInstitut, Professeur de Physique théorique à la Faculté des Sciences de Bordeaux. — Recherches sur l’Elasticité. — 1 vo/. in-4 de 218 pages (Prix : 12 fr.) Gauthier-Villars, éditeur. Paris, 1906. L'objet de ces recherches est d'établir des résultats utilisables pour l'étude des corps mous ou pâteux qui forment la transition entre les fluides et les solides. Après avoir étendu les formules de G. Kirchhoff et de M, Boussinesq, concernant les déformations finies d'un milieu continu, au cas où les masses élémentaires qui composent le milieu sont soumises à des actions non newtoniennes, M. Duhem étudie les lois de l’équi- libre et du mouvement des corps vitreux. Une impor- tante application est faite aussitôt au cas particulier où les actions tant extérieures qu'intérieures sont new- toniennes et où le milieu est faiblement écarté de son état initial. Dans l'hypothèse simplificative où les actions auxquelles le milieu est soumis sont purement superlicielles et où la température est uniforme et constante, l’auteur retrouve des résultats donnés na- guère par O0. E. Meyer, L'étude de la propagation des ondes dans les susdits milieux conduit, pour diverses conditions de conduc- tibilité calorilique, à une série de propriétés très élégantes. Trois chapitres sont consacrés aux conditions de stabilité d'un milieu élastique quelconque, vitreux ou non, et à l'étude du déplacement de l'équilibre. Enfin, un exposé de la théorie générale des ondes dans les milieux élastiques dénués de viscosité com- plète et étend certains théorèmes de M. Hadamard ; il est suivi d’une théorie des ondes au sein des milieux doués de viscosité, et l'ouvrage se termine par un im- portant chapitre sur la continuité de l'état liquide et de l’état vitreux,. Par les méthodes employées et par la nature des résultats obtenus, le présent livre est comme la suite des « Recherches sur l’'Hydrodynamique », que M. Du- hem a publiées il y a deux ans. Il apporte une contri- bution sérieuse à l'étude théorique des corps pâteux. A la vérité, les milieux sont supposés dénués d'hystérésis, ce qui exclut la possibilité des déformations perma- nentes et restreint la portée expérimentale des conclu- sions; mais M. Duhem laisse entendre que les principes de sa théorie des déformations permanentes lui per- mettront de se débarrasser de cette hypothèse res- trictive. A. BOULANGER, Professeur adjoint de Mécanique à la Faculté des Sciences de Lille. Lombard |Joanny) et Caen (Julien). — Le contre- maitre-mécanicien. — 1 vol. in-8° de 505 pages avec 330 figures. ‘Prix : 7 fr. 50.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1906. MM. Lombard, chef d'ateliers à l'Ecole nationale d'Arts et Méliers de Lille, et Caen, inspecteur de l'Association des Industriels de France contre les acci- dents du travail, ont mis en commun leur savoir, leur expérience el la documentation spéciale acquise par leurs fonctions, pour rédiger un vade-mecum du contremaitre-mécanicien, lui permettant de faire rapi- dement et correctement les calculs d'atelier, d'assurer la sécurité des ouvriers et d'appliquer les lois qui régissent aujourd'hui le travail. La premiére partie de l'ouvrage est un formulaire, dans lequel on à reproduit des notions très élémen- " BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX - Es dus N taires d'Arithmétique, de Géométrie, de Trigonométrie, de Physique, de Chimie, de Mécanique et d’Electricité, avec des exercices numériques montrant au lecteur comment on applique les théories. Des tableaux de chiffres, recueillis dans les agendas, complètent assez inutilement cette partie technique; quelques-uns de ces tableaux devraient être retouchés, notamment celui des monnaies, qui retarde de près de quarante ans. L'étude des moyens d'établir l'ordre dans les ate=. liers, et l'examen des précautions à prendre pour assurer aux ouvriers une bonne hygiène et prévenir. les accidents, forme la deuxième partie du livre; l& troisième est consacrée aux lois ouvrières. Le lecteu trouvera là un certain nombre de pages vraimentintéres= santes et utiles; les questions traitées sont encore peu. connues du publie, bien que leur importance croisse chaque jour. Signalons les règlements sur le travail des adultes, des enfants, des filles mineures et des femmes, les lois relatives aux accidents du travail, au contrat de travail, aux syndicats professionnels et aux retraites. ouvrières. Les industriels doivent connaitre, mieux encore que les contremaîtres, ces questions nouvelles qui sont plus que toutes les autres à l’ordre du jour : à ce titre, nous leur recommandons le livre de MM. Lom- bard et Caen. AIMÉ Wirz, Doyen de la Faculté libre des Sciences de Lille: Correspondant de l'Institut. - Villepontoux (L. F.), Directeur d'Ecole primaire supérieure. — Cours d’Arithmétique.— 1 vo/. in-A6. de 310 pages. (Prix : 4 fr.) F. de Rudeval, éditeur, Paris, 1906. Ce cours est spécialement écrit pour les élèves des Ecoles normales et des Ecoles primaires supérieures et professionnelles, dont il passe en revue tout le pro- gramme ; l'auteur y a ajouté, en outre, un chapitre sur les approximations numériques. De nombreux exer- cices, pour la plupart donnés dans les divers examens de l'enseignement primaire, complètent chaque livre de cours. 2° Sciences physiques Turpain (Albert), Professeur adjoint à la Faculté des Sciences de Poitiers, — Leçons élémentaires de Physique (à l'usage des candidats au P.C. N.). Avee une préface de M. P. Garse, doyen de la Faculté des Sciences de Poitiers. — 2 vol. in-8° de 451 et 194 p. avec fig. (Prix : 12 fr.) Vuibert et Nony, éditeurs, 63, boulevard Saint-Germain, Paris, 1906. Comme contenu, cet ouvrage renferme les matières habituelles du cours de Physique du P. C. N. Mais ce qui en fait surtout l'intérêt, c’est l'esprit dans lequel il est rédigé, esprit que l’auteur de la préface, M. Garbe, caractérise en ces termes : « Il ne s’agit plus de sou- mettre l'esprit des élèves à cette gymnastique spéciale et bien ordonnée qui montre l'enchainement des sciences et le mutuel appui qu’elles se prêtent. Tout en leur rappelant comment un grand nombre de phéno- imènes physiques trouvent leur explication dans les principes de la Mécanique, on a laissé généralement, de côté l'appareil mathématique et l’on profite de ce qu'on est en présence de la plus délicate et de la plus féconde des sciences expérimentales pour développer chez eux le sens de l'expérimentation et de la critique expérimentale, En même temps qu'ils voient, par des exemples bien choisis, le développement progressif et déjà très avancé de certaines questions, on leur mon- us dont … à ae. je id LÉ dé cé BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 119 tre la science qui se fait aujourd'hui. » Voilà plu- sieurs années que M. Turpain professe suivant cesidées, et le succès que son cours a obtenu à Poitiers démontre que sa méthode est bonne et profitable ; son livre per- mettra à d’autres d’en apprécier la valeur. Merklen (François), Directeur technique de la Savon- nerie Charles-Roux, à Marseille, — Etudes sur la constitution des Savons/du commerce. — 1 vol. gr. in-8°, de 206 pages, avec une préface de M. HALLEr, membre de l'Institut. Imprimerie Barlatier. Mar- seille, 1907. 11 serait banal de dire que la recherche scientifique est un des plus actifs ferments du progrès industriel, en ce sens qu'elle ramène toutes les opérations de nos manufactures à des principes généraux. Et cependant, lorsqu'elle est effectuée hors de l'usine, ses consé- quences d'ordre positif ne sont pas toujours en rapport avec la portée philosophique de ses déductions. C'est que le phénomène étudié, ramené par le savant à ses grandes lignes et examiné isolément, se trouve par là même affranchi de toute complication réelle. Mais, dans la pratique, il y a, outre les phénomènes secon- daires, permanents, qui favorisent, contrarient, mul- tiplient ou annulent les effets du phénomène essentiel, des contingences nombreuses qu'il est indispensable d'envisager. Aussi tel fait qui paraît, au point de vue scientifique, simple et lucide, se compliqueets'obseurcit plus ou moins dans le domaine des applications. En conséquence, la recherche d'ordre spéculatif ne sera réellement fructueuse qu'à la condition d’être com- plétée et adaptée aux réalités pratiques. Voilà pour- quoi on ne saurait trop applaudir à l'introduction des savants dans les usines. Le présent ouvrage témoigne éloquemment de la haute utilité de leur intervention directe et permanente dans nos manufactures. L'art du savonnier ne consiste pas seulement à pré- parer, à l'aide de telle ou telle matière grasse, des sels de soude chimiquement définis, mais bien à trans- former ces sels de soude en cette multitude de savons commerciaux de composition et d'aspect si variables. Si les découvertes de Chevreul ont fait connaitre au savonnier la nature des produits qu'il transforme, elles ne l’ont pas complètement renseigné sur la marche des opérations à effectuer. Elles n'ont donc pas produit dans l'industrie de la savonnerie tout le bouleverse- ment qu'elles pouvaient faire présager. D'autre part, les méthodes générales de travail, créées par l'empi- risme, n'ontpas été modifiées dansleurs grandes lignes, et les perfectionnements partiels qu'elles ont subis sont dus autant à l'évolution de l'industrie de la soude, à l'emploi de la vapeur etaux observations journalières d'ingénieux praticiens, qu'aux lumières et aux pré- cisions apportées parla méthode scientifique. M.Haller, dans son remarquable Rapport sur les produits chimi- ques à l'Exposition de 1900, s'exprime ainsi à ce sujet : « Les différents stades des procédés de saponi- fication sont toujours observés de la même manière, c'est-à-dire empiriquement; on n'a pas la curiosité de chercher, balance, liqueurs titrées et réactifs indicateurs en main, les réactions chimiques qui se passent dans les diverses étapes du processus qui doit aboutir au produit final cherché. » Les considérations qui précèdent font ressortir tout l'intérêt du mémoire de M. Merklen, dont le but à été précisément d'élargir le champ des recherches en étudiant d’une facon méthodique le travail de la matière saponifère. L'auteur ne s'occupe pas des procédés de saponifica- tion, mais bien de la transformation des sels de soude des acides gras en savons commerciaux et plus parti- culièrement en savons liquidés. La première partie de son intéressant travail envi- sage la question au point de vue théorique, la seconde au point de vue pratique. De nombreux essais font ressortir, abstraction faite de toute considération théorique, que la composition des savons liquidés est absolument variable, qu'elle est fonction de la nature des acides gras, de la composi- tion du «gras » et de la température à laquelle on opère. M. Merklen montre que les sels de soude des acides gras se comportent au cours de la fabrication comme des substances colloïdales, et que les savons du com- merce doivent être considérés comme des combinai- sons « d'absorption », dont la propriété la plus carac- téristique est la variation continue. Alors que la matière cristalloïde ne peut donner lieu qu'à un nombre limité de réactions, ce nombre est indéfini pour la matière colloide. Celle-ci réagit sur toutes les substances au con- tact desquelles elle se trouve. Tout influe sur sa com- position. C’est ainsi que, dans la fabrication du savon, chacune des substances qui interviennent d'une facon essentielle ou accessoire, normale ou accidentelle, laisse la trace de son contact et exerce son action sur la composition et sur les qualités du produit final. Le travail de M. Merklen mérite une attention toute particulière au moment où l’industrie de la savonne- rie se débat au milieu de difficultés nombreuses, créées par la hausse simultanée et sensible de toutes les matières premières qu'elle met en œuvre. La lecture de cet ouvrage est à recommander, non pas seulement pour le profit qu'on peut attendre de résultats si con- sciencieusement enregistrés, mais encore pour les nou- velles recherches d'ordre positif qu’elle peut inspirer. EUGÈNE CHarABoT, Docteur ès sciences, Inspecteur de l'Enseignement technique. De la Coux (H.), /ngénieur-chimiste, Inspecteur de l'Enseignement technique. — L'Eau dans l'Indus- trie. 2° édition. — 1 volume gr. in-8° de 543 p. avec 435 fig. (Prix : 16 fr.) H. Dunod et E. Pinat, édi- teurs. Paris, 1907. Dans le compte rendu qu'il a donné ici même! de la première édition de cet ouvrage, M. Ed. Urbain en pré- disait le légitime succès et, pour conséquence, l’appa- rition future d’une nouvelle édition. Aujourd'hui, cette prédiction se réalise. Afin detenir son œuvre au courant des derniers pro- grès de la technique, M. de la Coux l’a complétée d'une étude spéciale sur les corrosions des générateurs de vapeur industriels et marins, phénomènes qui causent de nos jours des préjudices considérables à l'industrie et à la marine. Ainsi mis au point, le livre de M. de la Coux est assuré de fournir encore une brillante carrière. 3° Sciences naturelles Guébhard(Adrien)etCossman(M.),Depéret(Ch.), Hitzel (E.), Jacob (Ch.), Jeancard (P.), Kilian (W.), Koby (F.), Lambert (J.), Repelin (]J.), Sa- vin (L.-.).— Les Préalpes Maritimes. II. Paléon- tologie. Stratigraphie. — 1 vol. 1n-8° de 932 pages avec planches. Paris, Soc. géologique de France; Nice, Soc. des Lettres, Sciences et Arts des Alpes- Maritimes, 1906. A l'occasion de la réunion de la Société géologique de France dans les Alpes-Maritimes, en 1902, M. le Dr A. Guébhard publiait un compte rendu des excursions géologiques qu'il avait dirigées aux environs de Grasse. Un deuxième fascicule, édité par lui en 1906, complète cette première étude. Ce fascicule réunit un certain nombre de Mémoires, dus à divers auteurs, sur la stra- tigraphie et la paléontologie de cette intéressante région : k W. KictaAN et A. GuéBnarp : Etude paléontologique et stra- tigraphique du système jurassique dans les Préalpes mari- times. — P. Jeancarn : Note sur l’affleurement charbonneux de Vescagne, — M. Cossmax : Sur un gisement de fossiles bathoniens près de Courmes (A.-M.). — In. : Nouvelles 1 Voir la Revue du 30 octobre 1900, p. 1049. 420 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX recherches sur les fossiles bathoniens de Courmes (A.-M.) — Lauserr et Savix : Note sur un Echinide nouveau du Batho- nien de Saint-Cézaire (A.-M.). — F. Kogyx : Sur les Polypiers jurassiques des environs de Saint-Vallier de Thiey (A.-M.). — VW. Kia: Sur quelques fossiles remarquables de l'Hau- lerivien de la région d'Escragnolles (A.-M.). — A. Guépnanp et Cn. JAcor : Note sur deux gisements à Brachiopodes dans le Barrémien des Alpes-Maritimes. — E. Hyrrzez : Sur les fossiles de l'étage albien recueillis dans la région d'Escra- s#nolles (A. — d. Rereun : Contribution à l'élude du Crélacé supérieur à la limite du Var, des Basses-Alpes et des Alpes-Maritimes. — A. GuéenarD : Note sur les débuts de l'Eocène aux environs de Vence (A.-M.). — LamperrT el Savix : Note sur deux Echinides nouveaux de la Mollasse burdigalienne dite de Vence (A.-M.). — J. LamBEert : Etude sur les Echinides de la Mollasse de Vence (A.-M.). — Cu. De- PÉRET et À. GuéBnaRo : Sur l'âge des Labradorites de Biot. — A. GuéenarD : Liste récapitulative des Taches éruptives de l'Ouest du Var. — In. : Relevé des horizons à silex obser- vables dans les Alpes-Maritimes. — Ip. : Sur les Brèches et Poudingues observables entre Siagne et Var. Nous ne pouvons songèr à résumer ces divers travaux qui, à des points de vue divers, constituent tous une mine de renseignements précieux. La première étude mérite cependant une mention toute spéciale; car les matériaux recueillis par M. Guébhard dans tous les étages jurassiques sont nombreux. Déterminés par M. Kilian, ils ont permis de formuler une classification précise des diverses formations, et d'en établirle paral- lélisme avec les régions classiques. De plus, les con- clusions d2 nos savants confrères doivent fixer l’atten- tion et constituentun progrès sérieux dans nos connais- sances géologiques sur cette partie des Alpes. La composition du Jurassique, disent les auteurs, « donne l'impression que les Préalpes maritimes cor- respondent au bord méridional d'un géosynclinal, et semblent indiquer — comme M. Kilian l'a fait remar- quer dès 1888 — le voisinage d’un littoral ou, tout au moins, d'un haut fond dans la direction du Sud-Ouest ». En outre, il est remarquable de constater, pour la partie terminale du Jurassique, une reproduction frappante des conditions de faciès observées dans le Jura fran- conien. Au point de vue paléontologique, le trait le plus caractéristique des faunes étudiées est l’associa- tion d'espèces de l'Europe centrale avec des types méditerranéens. : Les récoltes de M. Guébhard ne se sont pas limitées au système jurassique ; il à également réuni de belles séries de fossiles crétacés. M. Kilian à décrit quelques Ammonites de l’'Hauterivien d'Escragnolles, et M. Ch. Jacob quelques Brachiopodes de la région de Vence et de Gourdon. Ce dernier auteur à pu constater que ce Barrémien montre, par sa faune, un caractère plus neltement néritique que l'étage des environs d'Escra- gnolles. M. le capitaine Hitzel a décrit quelques espèces provenant de l'Albien des environs d'Escra- gnolles et de Nice. M. Repelin s'est occupé de fossiles du Crétacé supérieur recueillis par M. Guébhard dans des localités situées à la limite du Var, des Basses- Alpes et des Alpes-Maritimes. : Dans le Tertiaire, MM. Lambert et Savin ont décrit des Echinides provenant de la Mollasse de Vence, appartenant à l'étage burdigalien. Les Clypéastres s'y développent avec une richesse et une variété de formes absolument remarquables. Un de ces fossiles le Clypeaster laganoides Agassiz) a été radiographié par M. Pierre Goby, ce qui à permis de distinguer les caractères internes. Ceux-ci, chez les Our ins, sont variés et complexes; ils l’'emportent en valeur sur ceux de la surface, au point de vue de la détermination des espèces. On comprend donc l'intérêt de cette décou- verte, et que, dans certain cas, la radiographie pourra rendre de sérieux services aux paléontologistes. Un problème stratigraphique important a pu être résolu, grâce aux recherches de M. Guébhard et aux déterminations de M. Depéret: c’est celui de l’âge des Labradorites de Biot. La date peut en être fixée à la fin du Miocène supérieur, ou tout au moins au début du Pliocène. Elles sont ainsi contemporaines des pre- mières éruptions du Plateau Central français, et du plissement définitif de la chaîne alpine. c Ce rapide examen du recueil publié par M. A. Guébhard suffit pour en montrer le puissant intérêt. Editée avec luxe, — chaque monographie ayant une couverture spéciale, — accompagnée de 28 planches et d'un grand nombre de figures, cette publication fait le plus grand honneur au savant physicien (M. Guéb- hard est agrégé de physique des Facultés de Médecine), qui sait faire un si noble usage de ses loisirs et de sa fortune. Il serait à souhaiter qu'il trouvät beaucoup d'imitateurs. J. RÉviz, Président de la Société d'Histoire naturelle de Savoie. MetchnikofF (D: Elie), Sous-Directeur de l'Institut Pasteur. — Essais optimistes. — 1 vol. in-8° de 438 pages avec 27 fig. Maloine, éditeur. Paris, 1907. L'œuvre biologique de M.Metchnikoff est aujourd'hui universellement connue. Depuis quelque temps, nous assistons à une nouvelle évolution de son génie : tout en restant biologiste expérimentateur, M. Metchnikoff s'est révélé biologiste philosophe et observateur profond de la nature humaine. Ce qui caractérise essentiellement les conceptions philosophiques de l’auteur, c’est que, toutes profondes qu'elles soient, elles apparaissent simples et claires et s'imposent dès l’abord à l'esprit comme sortant des entrailles mêmes des faits observés, et l’on se demande avec étonnement comment des idées aussi vraies ont pu échapper à la totalité des g°ns pen- sants, tant on se les assimile facilement. Les lecteurs des « Essais » précédents’ se rappellent qu'en décrivant certaines désharmonies de la nature humaine, le biologiste insiste surtout sur celle qui est la plus criante de toutes et qui est la vieillesse telle qu'on la connaît aujourd'hui, cette veillesse précoce et pathologique qui coupe court à la vie, alors que l'homme n'a pas terminé son cycle normal et qu'il est loin encore d'éprouver cet instinct de la mort qui doit ètre le couronnement de la vieillesse physiologique. C'est à « l’orthobiose », c'est-à-dire à une lutte inces- samment dirigée contre les éventualités de morbidité, que, d'après M. Metchnikoff, il appartient de réparer cette désharmonie qui fausse l’évolution normale de la vie; c’est à elle qu'incombe le devoir d'étudier le mal, c'est-à-dire le mécanisme de la vieillesse, et d'en ap- porter le remède. Quand l'homme, fort des résultats de cette étude, aura compris les causes de son mal, il pourra tâächer de modifier sa propre nature, tout comme il modifie, avec succès d’ailleurs, la nature des animaux et des végétaux. Les études sur la veillesse, commencées dans le livre paru en 1903, sont poursuivies et plus approfondies dans ce nouveau livre. Ce dernier est composé de neuf chapitres dont voici le sommaire : I. Etudes sur la vieil- lesse. IT. La longévité dans la série animale. III. Etude sur la mort naturelle. IV. Faut-il tenter de prolonger la vie humaine? V.Les rudiments psychiques de l'homme. VI. Quelques points d'histoire des sociétés animales. VIT. Pessimisme et optimisme. VIIL Gœthe et Faust. IX. Science et morale. Chacun de ces neuf chapitres est une fourmilière de faits et d'idées; ils nous découvrent des apereus nouveaux là où l’on s'y attend le moins, à propos de faits dont la banalité n'arrête plus l'attention de per- sonne. Devant l'impossibilité de résumer le livre en- tier, nous nous contenterons de dire ce que l'auteur pense de l'optimisme, ce terme constituant le titre même de son livre. De tout temps, les hommes les plus cultivés profes- saient des idées pessimistes en ce qui concerne la vie humaine ; ils ne se lassaient pas de dire que l'existence n'est tissée que de malheurs. Or, en recherchant l'ori- gine de ce pessimisme, on ne tarde pas à découvrir ! Etudes sur la nature humaine. Æssai de philosophie optimiste. Troisième édition, 1904. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX qu'il réside surtout dans la brièveté de la vie, et, chose remarquable, ce pessimisme, d'après l’auteur, ne s'ob- serverait que chez les hommes jeunes. Au fur et à me- sure que l'on avance en âge, on constaterait que les pes- simistes d'autrefois manifestent un revirement de plus en plus marqué vers l'optimisme. Les exemples de ce changement de vues sont légion. A quoi donc est-il dû ? Il est dû, répond M. Metchnikoff, au développement d'un nouveau sens, inconnu ou à peu près inconnu de la jeunesse; ce nouveau sens est celui de la vie, que l'on n'acquiert qu'après avoir beaucoup vécu. C'est l’évolu- tion de cet instinct de la vie qui constitue la base de la conception optimiste. Il en est de ce sens comme de tous les autres, louie, l'odorat, le goût, lesquels sont susceptibles d'être per- fectionnés. Personne n'ignore combien le sens de la perception des couleurs se développe chez les artistes, ou.combien surprenant est le sens des obstacles chez les aveugles-nés. Pourquoi ne s'attacherait-on pas à développer chez l'homme le sens de Ia vie, lequel ne doit pas être moins perfectible que les autres sens ? Combien de personnes y a-{-il chez lesquelles cé sens est développé d’une facon imparfaite ou chez lesquelles il ne se manifeste que très tardivement! Venons done en aide à la nature, développons donc ce sens de bonne heure: adressons-nous surtout à la jeunesse, si portée au pessimisme, en lui expliquant que cet état psychique est transitoire et que, en vertu des lois de la nature humaine, il doit faire place, avec l’âge, à une concep- tion diamétralement opposée, à une conception opli- miste de la vie! Telle est la théorie; il s'agit maintenant de la démontrer. À cet effet, l'auteur étudie des biographies d'hommes célèbres, et c'est là qu'il puise la preuve de sa théorie. Il a l'heureuse idée de s'arrêter de préférence sur Gœthe, dont l'existence remarquablement active est con- nue dans ses moindres détails. Il nous représente Gæthe à différents stades de sa vie et nous montre comment lui, jeune pessimiste, hanté des idées de suicide, est devenu sur le tard optimiste convaincu. Certes, au cours de cette métamorphose, Gœæthe n'était pas sans avoir des retours à des idées pessimistes ; mais ce furént des accès de courte durée, et, à partir de l’âge de qua- rante ans, il entra résolument dans la phase optimiste. Cet homme de génie, qui nous offre l'exemple d'une des vies les plus complètes et les plus harmonieuses qui se puissent imaginer, se sent heureux de vivre; après une carrière d'activité aussi intense que variée, il atteint une vieillesse sereine, sans que pour cela son activité se soit démentie jusqu'à la mort, survenue à quatre-vingt-trois ans. Ces deux états si opposés, M. Metchnikoff les re- trouve dans les deux parties de Faust, qu'il est d'usage de considérer comme deux œuvres complètement dis- tinctes et que M. Metchnikoff, au contraire, considère comme se complétant Fune l’autre : « Dans la première partie », dit-il, « nous voyons le jeune pessimiste, plein d'ardeur et d’exigences, prêt à mettre fin à ses jours et ne s'arrêtant devant rien pour apaiser sa soif d'amour ». « Dans la seconde partie, c'est un homme mûr et vieux qui continue à aimer les femmes, quoique d’une facon différente; un homme assagi et optimiste qui, après avoir satisfait les aspirations de sa vie indi- viduelle, consacre le reste de ses jours au bien de l'humanité et qui, ayant atteint un siècle d'existence, meurt avec un sentiment de béatitude suprème, on dirait presque en manifestant l'instinct de la mort naturelle. » Est-ce donc autre chose que la quintessence de la philosophie de M. Metchnikoff, incarnée dans la per- sonne de Faust? Au cours de la dissection à laquelle il se livre sur l'âme de Gœthe, l’auteur nous fait remarquer que l'amour fut le plus grand stimulant du génie de Gæthe, et, si Gœthe a conservé jusqu'à la période ultime de sa vie Ja vigueur si étonnante de son génie poétique, c’est parce qu'il n'a jamais cessé d'aimer. Jusqu'à la fin de ses jours, Gæthe, qui fut toute sa vie un grand amoureux, « éprouvait le besoin d’être entouré de jolies femmes... La sœur de sa bru raconte qu'il aimait beaucoup que de jeunes femmes restassent dans son cabinet pendant qu'il travaillait; elles ne devaient exécuter aucun ouvrage manuel et devaient se tenir muettes ». Le cas de Gœthe n’est pas exceptionnel; l'auteur nous entretient du rôle que joue l'amour dans toute pro- duction artistique : « Le génie artistique », dit-il, « et peut-être le génie, en général, sont très intimement liés à la fonction sexuelle ». Et à l'appui de cette for- mule osée, il cite Victor Hugo, Ibsen et même Schopen- hauer, cet ennemi irréductible des femmes, chez lequel aussi « la création intellectuelle a été liée à l'excitation érotique ». Dans le dernier chapitre, consacré à la Morale et à la Science, M. Metchnikoff passe en revue les différentes doctrines que l'on a formulées sur la morale. La place nous manque pour entrer dans les détails. Disons seu- lement qu'à la morale religieuse avec l'outre-tombe en perspective, ainsi qu'à la morale sentimentale des phi- losophies laïques, il oppose la morale basée sur la foi robuste dans la science; la science, qui a déjà fait preuve de ce qu'elle peut, est seule de taille, selon lui, à triompher de toutes les misères et de toutes les déshar- monies de la nature humaine. M. Metchnikoff n’admet « ni l'idéal kantien des gens vertueux, faisant la bonté par pur devoir, ni celui de Spencer, des hommes qui éprouvent le besoin instinctif d'aider leurs sembla- bles »: son idéal à lui est « celui des hommes qui pourront se suflire à eux-mêmes et qui ne permet- tront pas qu'on leur fasse du bien ». 4 Sciences médicales Martinet (D' Alfred), ancien interne des Hôpitaux de Paris. — Les Aliments usuels : composition; préparation; indications dans les régimes. — 1 vol. de 328 pages. (Prix : # francs.) Masson et C*, éditeurs. Paris, 1907. Nous appartenons à une époque où une foule de questions, jusque-là abandonnées à la routine et à l'empirisme, tombent dans le domaine de la science. L'alimentation est une des plus passionnantes parmi ces questions. C'est là ce qui fait l'opportunité et l'intérêt du petit livre dans lequel M. Martinet a passé en revue, d'abord au point de vue biologique, les aliments usuels, miné- raux et organiques, et leur rôle dans la nutrition; puis, au point de vue culinaire, les aliments d'origine ani- male et végétale, solides et liquides, leur préparation culinaire, leur introduction dans les régimes de l'homme sain et du malade. Un tel programme à fait toucher l’auteur à bien des questions dont la solution n'est pas encore définitive. Les documents chimiques, physiologiques et patholo- giques sur lesquels on peut s'appuyer sont de valeur très inégale, et il est bien difficile, quand on n’a paseu la possibilité de reprendre soi-même, au point de vue expérimental, ces diverses questions, de donner un avis qui fasse autorité. Aussi, bien des opinions de l'auteur, sur l’évolution des phosphates dans l'orga- nisme et les phosphaturies, sur l’évolution des albu- minoides et la formation des sulfo-éthers et de l'acide urique, sur le régime des diabétiques, sur l'alimenta- tion du soldat japonais, etc., nous paraissent-elles cri- ticables. Il n'en reste pas moins vrai que le livre de M. Mar- tinet, fournissant des indications générales sur une série de questions qui sont à l’ordre du jour, est d'une lecture fort utile et rendra de réels services. D' M. LaBgé, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. 422 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 29 Avril 1907. M. H. Douvillé est élu membre de l'Académie dans la Section de Minéralogie. — La Section de Chimie présente la liste suivante de candidats à la place devenue vacante par le décès de M. Moissan : 1° M. H. Le Chatelier; 2° MM. A. Etard, E. Jungfleisch et A. Lebel: 3° MM. A. Béhal, L. Bouveault, A. Colson, M. Hanriot et Ch. Moureu. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Humbert, par l'emploi des fonctions elliptiques, démontre et étend quelques propositions relatives aux représentations d'un entier par une somme de dix ou douze carrés. — M. Ch. Goldziher présente ses recherches sur la nature analytique des solutions de certaines équations aux dérivées partielles du second ordre. — M. Z. Kry- gowski étudie le développement des fonctions hyperel- liptiques en séries trigonométriques. — M. E. Barré poursuit ses recherches sur les surfaces engendrées par une hélice circulaire. — M. M. d’Ocagne étudie la représentation de l'équation d'ordre nomographique 3 la plus générale par un nomogramme conique. — M. Jacob présente un intégromètre à lame coupante qui permet de réaliser l'intégration numérique d’un certain nombre d'équations linéaires. — M. G. Lipp- mann décrit un collimateur vertical ayant pour objet de rendre le zénith visible dans le champ d’une lunette visuelle où photographique sous la forme d'un point lumineux. — M. G. Le Cadet présente ses observations de l’éclipse de Soleil du 14 janvier 1907 faites à l'Obser- vatoire de Phu-Lien (Tonkin). La température de l’air s’est abaissée de 2,5, ce qui a amené une perturbation de l’oscillation barométrique diurne. — M. Em. Belot montre que sa loi de distribution des satellites s'ap- plique aux systèmes de Jupiter et de Saturne. — M. B. Brunhes à constaté qu'un courant horizontal exerce, sur un tourbillon vertical sinistrorsum mobile, une force horizontale perpendiculaire au courant et dirigée vers sa gauche; la force est dirigée vers la droite du courant si le tourbillon est dextrorsum. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Pellat détermine la charge e portée par un ion électrolytique monovalent en ne faisant intervenir que des données relatives à l'électrolyse; elle est égale à 1,1 X 10 —2, On en déduit pour la valeur du rayon de cet ion 7,8 X 10 —* cm. — M. F. Beaulard a reconnu que la constante diélectrique de la glace est de l’ordre de grandeur du carré de l'indice optique (1®— 1,71). Le pouvoir inducteur spé- cifique de l'eau au voisinage de 0° paraît être de 3,072. — M. H. Abraham a conslaté qu'en dehors des cas de résonance le meilleur téléphone ne transmet pas à l'oreille la millième partie de l'énergie qu'il recoit de la ligne. — MM. A. Quidor et A. Nachet présentent un nouveau microscope, suflisant pour toutes les recherches de laboratoire, et qui permet, en outre, de prendre des microphotographies stéréoscopiques de toutes les préparations. — MM. O. Boudouard et H. Le Chatelier rappellent qu'ils ont déterminé, antérieure- ment à M. Jj. Meunier, la limite inférieure d’inflamma- bilité des mélanges d'éther et d'air et fixé celle-ci à 60 mgr. d'éther par litre. — MM. E. Briner et E. Car- doso ont déterminé les compressibilités et les tensions de vapeur des mélanges d'oxyde de méthyle et d'acide sulfureux; ils ont reconnu la formation d'une combi- naison (CH°)0.S0?, — M. Morel Kahn a reconnu que la réduction de la baryte et de la strontiane par le charbon peut être réalisée à une température voisine de celle de la fusion du platine, avec formation des carbures correspondants. — M. Binet du Jassonneix a observé que le cuivre dissout, à haute température, environ 1,6°/, de Cr, qui se sépare, pendant le refroi- dissement, sous forme d'une mousse formée de fila- ments et de cristallites, dans un état de très grande division, que l’on peut isoler par dissolution du cuivre dans l'acide azotique. — M. Em. Vigouroux a constaté qu'en présence du Pb, du Bi ou de Sb, le siliciam en excès réagit sur le cuivre seul pour donner naissance à un siliciure de cuivre Cu‘Si, qui surnage en majeure partie soit le plomb, soit le bismuth, et paraît unifor- mément réparti au sein de l’antimoine. — M. E. Ren- gade a reconnu, dans l'oxydation directe du rubidium, la formation d'un oxyde noir Rb°05, intermédiaire entre le bioxyde et le peroxyde. On l'obtient régulièrement en dissociant le peroxyde Rb°0* aux environs de 550° dans le vide. — M. A. Wahl, en faisant réagir le chlorhydrate d'hydroxylamine sur le dioxytartrate de sodium, à obtenu un nouvel acide dioximidosuccinique, F.168-170°. L'action de HCI sec sur le dioximidosuc- cinate d'éthyle et l'évaporation dans le vide en présence de KOH fournissent un dioximidosucecinate isomère. — M. P. Sabatier, en faisant passer des vapeurs d'alcool allylique et un excès d'H sur du nickel réduit à 130-1709, à obtenu de l'alcool propylique: l'oxyde d’allyle, dans les mêmes conditions, donne l’oxyde de propyle. — MM. Tiffeneau et Daufresne ont observé que les dibromures des éthers phénoliques allyliques, par chauffage avec de l'acétate de K, fournissent des acétobromhydrines; celles-ci ont la propriété de se transformer en cyclopropanols par chauffage avee KOH alcoolique. — MM. A. Trillat et Sauton montrent que l'amertume du lait (et, par suite, celle des fromages) pourra se produire chaque fois qu'il aura été contaminé par un germe capable de produire des aldéhydes et de l’ammoniaque où par plusieurs espèces microbiennes fournissant, les unes des aldéhydes, les autres de lammoniaque. — M. P. Fauvel a reconnu que le sali- cylate de soude n'augmente pas la production de l'acide urique et des xantho-uriques dans l'organisme, mais qu'il en modifie seulement l’excrétion; à dose suffi- sante, il accélère cette dernière. 3° SCIENCES NATURELLE:. — MM. G. Marinesco et J. Minea ont observé, dans plusieurs cas de tabes, de compression de la moelle et même à l’état normal, la présence de petits ganglions sympathiques situés au-dessous des ganglions spinaux. — MM. P. Carnot et A. Lelièvre ont reconnu que le rein embryonnaire contient des substances néphropoiétiques tout particu- lièrement actives, qui semblent agir également chez l'homme dans certains cas d’altérations rénales. — M. A. Favraud signale la découverte d'une mâchoire humaine, à menton droit, dans une brèche quaternaire à industrie paléolithique, au Petit-Puymoyen (Cha- rente). — M. J. Brunhes montre que le mécanisme de l'érosion glaciaire, tout en produisant des effets mor- phologiques spéciaux, se trouve, d'une manière logique et étroite, rattaché au mécanisme de l'érosion par les eaux courantes. — M. J. Thoulet explique le phéno- mène de la progression des sables le long des rivages maritimes par l’action des vagues, qui produit un léger déplacement vers l'Est des matériaux qu'elles en- trainent, et par celle des courants. Séance du 6 Mar 1907. M. H. Le Chatelier est élu Membre de l'Académie, dans la Section de Chimie. — Une Commission spéciale présente la liste suivante de candidats à la place d’Aca- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 123 démicien libre laissée vaccante par le décès de M. A. Laussedat : 1° M. J. Carpentier , 2° MM. V. Cornil et L. Teisserenc de Bort. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. B. Gambier poursuit la détermination des équations différentielles du second ordre et du premier degré dont l'intégrale générale est à points critiques fixes. M. Ch. Michel déduit de ses recherches sur les congruences de droites le théo- rème suivant : Pour qu'une surface réglée soit un hélicoïde, il faut et il suflit que : 4° les droites de la surface fassent un même angle avec une direction fixe; 20 les génératrices rectilignes de la développable isotrope circonserite à la surface fassent partie d'un complexe linéaire dont l’axe soit parallèle à cette direction. — M. V. Crémieu présente un dispositif auto-amortisseur du roulis des navires; il consiste dans une lame pendulaire, placée dans le plan longitu- dinal du navire et qui oscille dans un liquide très vis- queux. La force vive oscillatoire du navire se trouve automatiquement dissipée sous forme de chaleur. — M. H. Deslandres décrit des dispositifs pour l'étude continue de la répartition des éclats sur la surface du Soleil ; cette étude décèle l'existence de variations du rayonnement solaire ou, tout au moins, l'existence de perturbations importantes. — MM. Cirera et Balcelli ont observé, à Tortosa, des perturbations magnétiques et électriques considérables de janvier à mars de cette année, qui ont coincidé ou avec l'apparition d’une grande région d'activité dans le bord E. du Soleil, ou avec le passage par le méridien central d'une région .active, ou avec un surcroit extraordinaire d'activité dans une zone voisine du méridien central. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Pellat arrive à la conclusion que l'atome plurivalent est composé d'atomes sphériques juxtaposés, fous de même rayon, et séparés, tout au moins dans le mercure, par une distance inférieure au diamètre de ces atomes. — M. T. Argyropoulos a réalisé un condensateur parlant en le reliant à un microphone et en le portant, par une source séparée, à un potentiel de 220 volts. — M. L. Torres rappelle que l'appareil de télémécanique sans fil proposé par M. Gabet repose sur des principes iden- tiques à ceux qui ont été employés dans son télékine. — M. G. D. Hinrichs montre que les déterminations de M. Baxter confirment exactement la valeur 80 pour le poids atomique absolu du brome. La valeur infé- rieure que donne l’auteur provient des chiffres erronés de Ag et CI qu'ilemploie dans ses calculs. — M. Ph.-A. Guye à constaté que la valeur R (volume d’une mol. gr. de gaz parfait à 0° el sous { atm.) n’est pas tout à fait constante; elle croît avec la température critique du gaz. Celte variation est régulière et peut être représentée par la formule : R':=22,#10 (1 H10—"*T*). — MM. E. Jungfleisch et M. Godchot, en faisant réagir l'xæ-bromopropionate d'éthyle sur le lactate d'éthyle sodé, ont obtenu le dilactylate d'éthyle, d'où l’on retire l'acide dilactylique (4 + /), F.106°, identique à celui que fournit l'action de la chaleur sur le lactate de Ca. — MM. P. Sabatier ct A. Maïlhe, en hydro- génant les carbylamines forméniques sur le nickel réduit au-dessous de 1809, ont obtenu : 1° des produits goudronneux de polymérisation ; 2 desnitriles isomères RCAz, qui fournissent ensuite des amines et AzH°; 3° principalement des produits d'hydrogénation nor- maux R(CH*)AzH. — MM. À. Haller et A. Guyot ont observé que les amines aromatiques tertiaires, et même certaines amines secondaires telles que la diphényl- amine, sont susceplibles de se condenser avec un grand nombre de molécules organiques en présence de AICI. Ainsi la diméthylaniline se condense avec l'indigotine, le benzile, la benzophénone, l’isatine, etc. — M. H. Leroux, par oxydation chromique du décahy- dronaphtol-x, à obtenu la décahydronaphtylcétone-z, F. 320, dont l'oxime, K. 165, fournit la décahydrona- phtylamine-x, Eb, 96°-970 sous 14 millimètres. — M. G. Warcollier a constaté que la sucrase de la pomme n'existe plus dans le moût de pommes; cependant, les moûts riches en saccharose fermentent aussi rapide- ment que les moûts pauvres ; cette disparition du sac- charose est due à la sucrase de la levure. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H. Kronecker démontre que c’est l’anémie aiguë des parois du cœur qui fait cesser les pulsations franches et apparaître le phéno- mène de la trémulation fibrillaire. En outre, les deux ventricules ne sont pas inséparables dans leur fonc- tionnement, mais sont liés par des centres nerveux coordonnés qui peuvent être paralysés par des anémies partielles. — MM. C. J. Salomonsen et G. Dreyer ont reconnu que des hématies exposées pendant quelque temps aux rayons Becquerel se décomposent de telle facon que, par unité de temps, le nombre d'hématies hémolysées pour 100 reste invariable., — M. M. Dehon a constaté que l'alimentation lactée possède, contrai- rement aux idées reçues, un pouvoir labogénique infé- rieur à celui d'aliments tels que la viande et le pain. — M. J. Tur montre que les blastodermes anidiens zonaux représentent les parties périphériques de germes issus d’une fécondation normale, mais dont la partie centrale à subi une destruction plus ou moins complète. Il s'agit ici d’un phénomène pathologique et non tératologique. — MM. C. Nicolle et Cuénod sont parvenus à inoculer au singe (Waeacus sinicus) le virus de la conjonetivite granuleuse de l'homme. La structure des granulations qui se sont développées montre une identité absolue avec ceile du trachôme spontané de l’homme.— M.E.-L. Bouvier à reconnu que l'A/emipe- næopsis villosus est l'état jeune de la Funchalia Wood- wardi, tandis que la Grinmaldiella Hichardi en est le stade larvaire ultime. — MM. L. Léger et O. Duboscq ont étudié lévolution nucléaire du schizonte de l'Aggregata Eberthi. — MM. J. Dumont et Ch. Dupont ont constaté que la culture répétée des Légumineuses fourragères sur un même sol ne constitue pas un pro- blème matériellement insoluble, puisqu'il est possible, par l'apport d'engrais humiques et l'addition de terre vierge (terreautages), d'accroître d'une façon notable le rendement de ces différentes plantes. — M. R. Viguier a reconnu que le genre Sezanella est une Sterculiacée. Il constitue un intermédiaire entre les espèces de Lasiopétalées à ovaire sessile et les Hélictérées dont l'ovaire et les étamines sont portés sur un axe commun allongé. — M. J. Bergeron montre que la serpentine de là série cristallophyllienne de l'Aveyron et du Gard est due à l'action du granite sur le calcaire dolomi- tique. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 30 Avril 1907. M. Fournier présente un Rapport sur un Mémoire du D' Brunswic-le-Bihan concernant la blennorragie rectale et ses complications. Cette affection est très fréquente dans la population musulmane de Tunisie; elle a pour complications la périrectite aiguë, la péri- rectite chronique et le rétrécissement blennorragique du rectum. — MM. F. Widal et A. Philibert ont observé, en pleine épidémie de grippe, un jeune homme qui fut pris brusquement de céphalée atroce, avec fièvre et signe de Kernig. La ponction lombaire ramène le sixième jour un liquide louche et puriforme, contenant des polynucléaires normaux, et aseptique. La céphalée céda immédiatement à la ponction. Trois jours après, le liquide de ponction était redevenu clair, avec for- mule lymphocytique. — M. R. Blanchard signale l'exis- tence d'une spirochétose- humaine en Colombie; elle est transmise par la piqûre des Argasinae du genre Ornithodorus. Les habitants du pays sont plus ou moins réfractaires à linfection, apparemment par suite d'ino- culations antérieures ayant créé limmunité; ce sont surtout les voyageurs et les émigrants qui en sont victimes. La prophylaxie consiste dans la désinfection des locaux d'habitation, des nattes, des toiles de tentes, etc. — M. N. Gréhant communique l'analyse d'échantillons d'air pris dans diverses mines de houille. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Séance du T Mai 1907. M. le Président annonce le décès de M. P. Poirier, membre de l'Académie. M. A. Netter présente le Rapport de la Commission chargée d'étudier les accrdents consécutifs à l'ingestion des huïtres. En voici les conclusions : De nombreux et regrettables exemples ont justifié depuis 1896 l'avis de l'Académie au sujet de l'apparition possible d'acci- dents gastro-intestinaux et même de fièvres typhoïdes à la suite de la consommation d'huîtres ayant séjourné dans une eau polluée. Le seul moyen d'empêcher ces accidents est de ne livrer aux consommateurs que des huîtres protégées contre toute souillure. L'Académie émet le vœu qu'une enquête à la fois topographique, chimique et bactériologique soit instituée par les auto- rités maritimes. A cette enquête seront soumis les pares ostréicoles, d'élevage, d'étalage, d’engraissement et d'expédition, ainsi que les bancs naturels d’huitres. On ne devra conserver que les parcs dont cette enquête aura établi la salubrité, ou dans lesquels les mesures nécessaires réclamées au cours de cette enquête auront été réalisées. Il sera également nécessaire de surveiller le transport et la vente des huîtres et de s'assurer qu'aucune contamination n’est alors possible. Enfin, on ne tolérera l'entrée des huîtres étrangères que lorsqu'elles proviendront de parcs soumis à une sur- veillance analogue et seront munies de certificats d'origine, — MM. R. Blanchard et H. Papillon signa- lent la présence d’un Dipylidium caninum chez un enfant de dix mois, nourri au sein et au biberon. Il faut admettre que les puces vivant sur les chiens et les chats sont la cause ordinaire de la contamination. — M. L. G. Richelot décril un cas d'appendicite dans lequel l'os coxal fut traversé par le pus de la fosse iliaque. Il pense que les lésions appendiculaires étaient autrefois aussi fréquentes qu'aujourd'hui, mais non reconnues comme telles ou désignées sous d'autres noms. — MM. V. Cornil et P. Coudray montrent, par l'étude des ostéomes expérimentaux et des myostéomes extirpés chez l'homme, que, dans le muscle, le tissu osseux. de lostéome naît aux dépens du tissu con- jonctif et non de la fibre musculaire plus ou moins transformée. re SOCIETE DE BIOLOGIE Séance du 21 Avril 1907. M. le Président annonce le décès de M. Ch. Féré, membre de la Société. MM. H. Labbé et G. Vitry ont reconnu que les sulfo-éthers urinaires persistent dans le jeune jusqu'à la mort; ils suivent les variations de l'azote urinaire et sont en rapport avec la destruction de l'albumine. — M. L. Lapicque a constaté que la durée utile des dé- charges de condensateurs, dans les expériences d’exci- tation, varie avec la capacité employée. La quantité d'électricité dépensée par une décharge de conden- sateurs coupée au bout de la durée utile est moindre que la quantité nécessaire pour une onde rectan- gulaire durant le même temps. — MM. P. Verdun et F. Bruyant signalent l'existence de la douve du chat (Ospithorchis felineus) au Tonkin et son association, chez l’homme, avec la douve de Chine (Clonorchis sinensis). — M. E. Feuillié explique par la réno- vation leucocytaire la cessation de l'albuminurie au cours de l'intoxication mercurielle continue. — M. M.Jungano a isolé, dans un cas de cystite et dans un cas d'infiltration gangreneuse du périnée, un staphy- locoque anaérobie, différent du Micrococeus fetidus de Veillon. — MM. Léopold-Lévi et H. de Rothschild admettent que le corps thyroïde possède une fonction régulatrice de l'équilibre calcique de l'organisme, ce qui expliquerait son influence sur le système nerveux et sur la constipation. — M. J. Sabrazès considère l'afflux d'hématies à granulations basophiles comme un phénomène de régénération pathologique. — M. Aug. Pettit montre que le rein de l'éléphant est un organe plurilobé, intermédiaire aux formes conglobées et plu- riréniculées les plus typiques, caractérisé par le déve- loppement d'un système contractile cloisonnant. — M. P. Thaon a constaté que, de toutes les glandes à sécrétion interne, l'hypophyse est celle où l'évacuation directe du produit sécrété dans le capillaire sanguin est le plus nettement apparente. — MM. Ch. Dubois et F. Castelain ont reconnu que la section simultanée du sympathique et du moteur oculaire commun est la condition nécessaire et suffisante pour abolir la dila- tation réflexe de la pupille et que le trijumeau ne joue aucun rôle dans la transmission de ce réflexe, — M. R. Dubois montre que la purpurase agit sur la purpurine cristallisée extraite du Murex brandaris pour la transformer à la lumière en pourpre ; celui-ci colore la laine d'une facon indélébile. — M. L. Mar- chand distingue la « folie maladie », concordant avec des lésions cérébrales guérissables quelquefois, de la « folie infirmité », caractérisée par un développement vicieux du cerveau — M. P. Remlinger a constaté que l'immunisation contre la rage est facile à réaliser par voie rectale, très difficile, sinon impossible, à obtenir par voie buccale. — MM. L. Bierry et G. Schaefer ont préparé la lactase et l'émulsine animales à l’état rela- tivement pur par dialyse et filtration sur sac de collo- dion de macérations intestinales. — MM. C. Levaditi et Inmann montrent que l’'opsonine normale est iden- tique au complément; or, comme ce complément ne circule pas librement dans le plasma, il est à supposer que ses propriétés opsonisantes ne jouent pas un rôle actif dans le processus défensif de l’immunité natu- relle. — MM. J. P. Langlois et P. Garrelon ont re- connu que la polypnée thermique centrale ne peut se maintenir à son chiffre initial quand la capacité respi- ratoire du sang est réduite à 60 °/,, la pression restant constante. Si la pression baisse graduellement, la polypnée diminue dans une proportion de même ordre. — M. P. Fauvel a constaté que les œufs n’ont aucune action sur l’excrétion de l'acide urique et des xantho- uriques. — M. A. Desgrez et MI: B. Guende montrent que l'ingestion quotidienne prolongée d'un acide mi- néral, à petites doses non toxiques, augmente chez le cobaye la proportion du soufre peroxydé. — MM. J. L. Breton et P. Marie ont observé une influence toxique des vapeurs de zine, et de plomb surtout, sur l’incubation des œufs de poule. — M®: de Ludre et M. P. Marie ont constaté également que les vapeurs métalliques, en particulier celles de plomb, ont une action suspensive sur les cultures microbiennes aérobies.— M. O0. Gengou a reconnu que le citrate de soude exerce une action empéchante sur l'hémolyse des globules par le sérum d’anguille. — MM. A. Mayer et F. Rathery ont observé que l'augmentation de lexcrétion du chlorure de sodium et du sucre amène l'apparition de vacuoles nombreuses dans le protoplasma des tubes contournés du rat; l'injection de pilocarpine et de théobromine amène aussi lFapparition de vacuoles un peu diffé- rentes. — MM. Guillemard et R. Moog décrivent un dispositif pour l'étude de l'exhalaison de la vapeur d’eau. Séance du 4 Mai 1907. M. A. Gautié a déterminé la teneur en bactéries de quelques huîtres de Cette et de Marennes; la présence du B. Coli parait être la règle chez les premières (26 fois sur 30) et l'exception chez les secondes (5 fois sur 30). — MM. Léon Bernard et Laederich ont réalisé, par diverses actions locales sur le rein, des néphrites de types variés, qui, tout en se différenciant de celles de l'bomme, peuvent être utilisées pour les recherches expérimentales. — M. H. Iscovesco à constaté que l’ovalbumine coagulée prend une charge négative en présence de l’eau distillée et une charge positive en présence du suc gastrique ou de l’eau- acidulée. Le courant électrique fait pénétrer la pepsine dans l’oval- bumine du côté positif. — M. H. Piéron a observé l'existence, dans la salive du ZLasius ,niger, d'une … role ts odiait di ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES J * diastase provoquant l’'inversion du saccharose, l'inver- tine. — MM. A. Mayer el E. F. Terroine ont reproduit artificiellement des jécorines : ce sont les produits de la précipitation simultanée du glucose et des lécithal- -bumines. — MM. A. Mayer et F. Rathery ont étudié -les modifications histologiques du rein normal au cours des diurèses provoquées chez le rat; on note l'appari- tion de vacuoles et la disparition des stries rouges du rein normal. — M. M. d'Halluin montre que les trac- tions rythmées de la langue peuvent exercer une action inhibitoire sur le cœur et la respiration, surtout dans certains cas d'intoxication par le chloral, le chloro- - forme ou la morphine. — M. A. Ronchèse décrit une + méthode rapide et sûre de dosage de lammoniaque - au moyen du formol, ajouté en grand excès. — M. J. Martin recommande l'emploi des vapeurs d'éther et de chloroforme dans le traitement des myases des cavités naturelles et pathologiques ne communiquant ni avec le nez, ni avec la bouche. Pour les autres, on n'em- ploiera ce procédé, et avec précaution, que si les autres traitements n'ont pas réussi. — M. G. Rosenthal à constaté que le bacillogène tétanique conserve, bien qu'atténué, le pouvoir spécitique d'être agglutiné par le sérum antitétanique. — MM. H. Busquet et V. Pachon ont reconnu que le potassium produit l'arrêt du cœur - en paralysant directement la fibre musculaire car- diaque, impuissante, dès lors, à se contracter d'elle- même. — MM. H. Hérissey et Ch. Lefebvre ont observé la présence du raflinose dans le 7axus haceata (feuilles et jeunes rameaux). — M. L. Follet à rencon- tré, dans les expectorations des cancéreux, un micro- organisme qui se présente, le plus souvent, sous l’as- » pect d'une levure très caractéristique, à double contour. “ — MM. G. Péju et H. Rajat ont observé que le Aicro- coccus prodigiosus, placé dans un milieu alcalin, pré- sente des variations chromogènes allant du rouge au jaune et au blanc porcelaine. — M. L. Mangin signale l'existence de la Colpomenia sinuosa (algue qui emporte les huîtres) dans la Manche, à Cherbourg, Gatteville et Saint-Vaast. — M. P. Remlinger montre la persistante du virus rabique dans la salive du chien guéri de la rage. — M. H. Vincent estime que la possibilité de la - guérison spontanée de la rage expérimentale n'est pas douteuse. — M.J. Arrous à reconnu que les modili- cations cireulatoires normales produites par les injec- tions intraveineuses de sucres consistent dans laug- mentation de la pression et du volume du rein et de l'amplitude des pulsations. Il n'y a pas de rapport constant entre l'action diurétique des sucres el les réactions cardio-vasculaires qu'ils provoquent. — M. E. Cabannes a observé que les substances toxiques des sérums hétérogènes se trouvent dans les matières albu- minoides et surtout dans les corps enzymoides du sérum entrainés par précipitation. — M. P. Fauvel à constaté que les sels alcalins, notamment le bicarbo- - nate de soude, n'augmentent pas l'excrétion urique, du moins avec un régime sans purines. — Ml P. Cer- novodeanu et M. V. Henri montrent que la toxine téla- nique, injectée dans un musele, doit passer par la voie sanguine et lymphatique pour provoquer le tétanos de l'animal. L'absorption nerveuse, même si elle existe, ne peut pas, à elle seule, provoquer le tétanos. — MM. C. Levaditi et J. Roché expliquent le mécanisme de la rechute dans la tick-lever par laccoutumance vis-à-vis des anticorps des quelques rares spirilles qui ont échappé à la destruction phagocylaire au cours de la première crise, accoutumance qui se transmet à leurs descendants. — MM. C. Levaditi el Inmann ont reconnu que les opsonines des sérums spécifiques ne sont identiques ni avec les opsonines normales (com- pléments), ni avec les agglutinines. Elles ontune cons- titution complexe el se rapprochent des ambocepteurs. — MM. H. Guillemard et R. Moog ont constaté que l'exhalaison de la vapeur d'eau diminue dans Flair raréfié et augmente très rapidement avec la tempéra- ture. — M. T. Stiennon a observé qu'il existe un rap- port très étroit entre la virulence d'un bacille et sa faculté « capsulogène ». La bactérie paraît retirer du sang le produit qu'elle utilise pour former sa gaine. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 22 Avril 14907. MM. Simon, L. Spillmann et Richard ont observé, dans deux cas de tuberculose ulcéro-caséeuse à marche aiguë, diverses bactéries saprophytes circulant dans le sang des malades. — MM. P. Haushalter et Sabotier ont provoqué expérimentalement le rachitisme chez de jeunes poulets élevés dans un espace confiné et peu ‘clairé. — M. G. Etienne signale un cas de cholé- cyslite scléro-atrophique d'origine éberthienne non typhoïdique. — M. Dufour présente un photomètre hétéro-chromatique avec lequel il à entrepris des recherches sur la question des valeurs en peinture. — M. L. Cuénot a observé la présence de néphro- phagocytes dans le cœur (revêtement endothélial) et le rein (tissu lymphoïde) des poissons osseux. — MM. P. JeandelizeetJ. Parisotontconstaté une diminution de la pression artérielle chez deux sujets atteints d’insuf- fisance thyroïdienne. — MM. P. Haushalter et P. Jeandelize ont observé un athérome de l'aorte chez une myxædémateuse âgée de 43 ans; l'insuffisance thyroïdienne paraît être la cause de cette affection. — MM. G. Etienne, P.Jeandelize et L. Richon signalent des malformations organiques multiples, portant sur la rate, le rein, l'appareil génital et peut-être le foie, chez un castrat naturel. — MM. L. Richon et P. Jean- delize montrent que l'ovariotomie pratiquée chez la lapine dans le jeune âge donne tantôt une augmen- tation, tantôt une diminution de longueur des os. — M. L. Mercier a observé la présence du Bacillus Cuenoti dans les cellules de l'enveloppe folliculaire de l'œuf et dans les cellules de la tunique péritonéale des gaines ovariques chez la Blatte. — M. J. Parisot à remplacé la palpation digitale par le pléthysmographe de Hallion et Comte dans ses expériences de sphygmo- manométrie. MM. A. Weber el R. Collin ont observé sur un embryon humain l'existence d'un faisceau surnuméraire du ligament péronéo-calcanéen ; c’est peut-être un rudiment de muscle extenseur de rayons de la nageoire abdominale disparus. — M. A. Weber signale certaines formes de transition entre les ébauches vasculaires et les ilots sanguins dans l'aire opaque des embryons de canards. : SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 19 Avril 1907. MM. P. Weiss et A. Cotton présentent leurs mesures du phénomène de Zeeman sur les raïes bleues du zine. Les raies étudiées ont été les trois raies de longueurs d'onde 4810, 4722, 4680, à chacune desquelles correspond une série secondaire. Le but du travail était d'abord de voir si l'effet Zeeman varie proportionnellement au champ (pour la raie 4810, Reese, puis Kent, avaient signalé des écarts atteignant 30 °/, avec cette loi simple) et, en second lieu, de faire une mesure absolue du phénomène en déterminant les valeurs en gauss des champs employés. Ces recherches ont été faites en utilisant un gros électro-aimant que M. Weiss a fait construire pour l'Institut de Physique du Polytechnicum de Zürich. Les champs employés ont varié de 25.575 à 35.980. Ces champs ont été mesu- rés avec soin en les comparant par la méthode balis- tique à un champ de comparaison plus étendu et très uniforme. Les clichés ont été obtenus avec un réseau concave de Rowland de 86 millimètres de largeur, dans le troisième et le quatrième spectres, particulière- ment intenses. [ls ont été mesurés par les deux obser- vateurs d'une facon tout à fait indépendante. Les nom- bres concordants ainsi obtenus ont fourni les résultats suivants : 4° L'effet Zeeman pour ces raies varie, dans les limites indiquées, proportionnellement au champ. Le résultat contraire de Reese et Kent s'explique sim- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES plement en tenant compte des intensités relatives des composantes latérales que ces physiciens n'avaient pas séparées. Ces intensités décroissent rapidement à partir du centre, et, si la pose est insuffisante, les composantes extrêmes n'apparaissent pas sur les clichés; 2 Les résultats relatifs à la place des diverses composantes sont tout à fait en accord avec les règles simples indiquées par Runge et Paschen dans leurs beaux travaux sur les relations de l'effet Zeeman avec les séries de raies; 3° Si l’on appelle 5 (2) l'écart entre les deux composantes latérales de la raie 4680 (qui donne un triplet pur) ou bien entre les composantes extrèmes des deux raies 4722 et 4810, on obtient, pour la valeur de la constante K qui définit la valeur du changement magnétique des raies des deuxièmes séries secondaires du zinc, la valeur suivante : K — = 1,875 X 10—4 (2 en cm., 3f en gauss). avec une erreur relative ne dépassant pas 1 °/,. Farber avait trouvé 1,813 X°10—#, Le résultat précédent peut être utilisé à la mesure, par le procédé indiqué par Zeeman, d'un champ non uniforme en ses différents points (photographie d’une raie avec un spectroscope : sans astigmalisme et mesure de l'écart entre les com- posantes aux différents points du cliché). Il présente un intérêt théorique évident, notamment au point de vue de la théorie des électrons. Si l’on applique au triplet pur 4680 la théorie élémentaire de Lorentz, on en déduit pour le rapport de la charge d'un électron à sa masse 6/m—2rvK=—3,534 X 107, et la valeur ainsi trouvée est valable, non seulement pour les séries secondaires du zinc, mais aussi pour toutes les raies correspondantes du cadmium, du magnésium, du mer- cure, du strontium, étudiées par Runge el Paschen. Elle est bien du même ordre de grandeur que celle (1,878 X 10°) admise aujourd'hui à la suite de mesures concordantes sur les rayons cathodiques, mais ne pré- sente avec celle-ci aucune relation numérique simple. M. Jean Perrin observe qu'on parait être à peu près au bout de ce qu'on peut donner comme peine et habi- leté pour avoir un champ magnétique intense avec un électro-aimant. On a vu qu'on obtenait péniblement ainsi 30.000 gauss dans un centimètre cube. Il serait évidemment plus commode d'en avoir cent mille, ou mieux un million dans un décimètre cube. Or, il n’est peut-être pas inutile de dire que cela n'est pas irréali- sable. On y arriverait en renvneçant au noyau de fer (qui devient de moins en moins utile) et en construi- sant un solénoïde suffisant, Les spires seraient refroi- dies par de l'air liquide. Des calculs très simples montrent qu'un sacrilice de quelques millions de francs suflirait pour obtenir un million de gauss. La chose sera donc facile du jour où elle sera jugée assez importante. Or, un champ magnétique puissant appa- rait comme le seul moyen efficace que nous ayons d'agir profondément sur la matière. Il est désirable de créer dès maintenant un courant d'opinion dans ce sens. — M. C. Féry présente son radio-pyromètre à dilatation. Cet appareil est basé sur la loi de Stéfan (radiation totale); il indique la température d’un four par l'échauffement obtenu en amenant l'image du four sur une Spirale bimétallique spéciale et très sensible. La dilatation de cette bilame, enregistrée par l'aiguille qu'elle fait mouvoir Sur un cadran porté par l'appareil, est proportionnelle à la quatrième puissance de la température absolue du four (Stéfan). La concentration des rayons caloriques est obtenue au moyen d'un miroir concave doré à la surface ; l'appareil se présente done sous la forme d'un télescope. — Puis le même auteur décrit son calorimètre enregistreur Lheriho- électrique pour les gaz et les liquides combustibles. Le principe de cet appareil consiste à évaluer les calo- ries, dégagtes par la combustion du gaz où du liquide, par les inillivolts fournis par une pile thermo-élec- trique spéciale chauffée par un brûleur utilisant le combustible en étude. L'appareil $e compose de deux verres à gaz, réunis à Jeur partie inférieure par ur tube métallique en U. Le brûleur fonctionne dans ur de ces tubes, l'appel d'air se faisant par l’autre. Le deux verres de lampe sont fermés par deux quadrillag métalliques analogues à ceux utilisés dans le brûleur Méker. Sur le centre de ces deux quadrillages, Sor soudées les extrémités d'une lime de constantan ; ( réalise ainsi, en fermant Je circuit sur un galva mètre, un couple thermo-électrique constantan-cuiv l'une des soudures étant continuellement chauffée par les produits de la combustion, et l’autre maïntent au contraire, à la température ambiante par l'appel d'air qui se produit au travers des mailles du quadril lage. Sile brûleur, dans le cas des gaz combustiblé est muni d’un régulateur de débit, et si on l’attelle un galvanomèlre enregistreur, la courbe tracée don les variations du pouvoir calorifique pendant la durée de l’enregistrement. L'appareil est étalonné avec H pur. Si, au contraire, la pile thermo fait tourner un compteur électrique, le rapport des indications de compteur à celles d’un compteur à gaz (remplacan régulateur de débit), ou au poids brûlé pendant, même temps pour les liquides, est proportionnel au pou voir calorifique. — M. Jean Perrin : Le transport dt 1ons et l'existence des hydrates. Beaucoup de solutio laissent déposer des composés définis cristallisés con nant, pour un nombre entier et petit de molécules solvant, un nombre entier et petit de molécules du cor dissous. Tel est le cas pour l’eau (hydrates), pour mercure (amalgames), etc. Beaucoup de ces combinaïs sons sont particulièrement instables et ne donnen pas de composés de substitution. C'est en partie à ca de ces composés qu'on a créé l'expression de combinà sons moléculaires, Supposant par là de facon confuse que deux genres différents de liaisons peuvent exist entre atomes dans les combinaisons chimiques. Ce lan- gage n'est d'ailleurs pas accepté par tous les chimistes" D'autre part, l’existence hypothétique de molécules d'hydrates en solution aqueuse a été plusieurs fois invoquée en faveur de théories que cette hypothèse permettait de concilier avec l'expérience. On a auss admis que les ions formés par rupture de la molécule se partagent l'eau qu'elle contenait et sont, par suite, hydratés. De plus, et indépendamment de l’eau ainsi liée chimiquement aux ions, il est raisonnable d’ad= mettre, par analogie avec ce qu'on sait sur la facon dont les ions d’un mélange gazeux servent de centres de condensation aux molécules d'eau, que chaque ion. entraîne avec lui, par attraction électrique, un cortège de molécules d'eau. M. Perrin a cherché si la dise sion des phénomènes d'électrolyse ne permettrait p de calculer le nombre de molécules d'eau ainsi entrais nées par chaque ion, que ce fût par liaison physique ou chimique. Si l’on admet, comme on fait généralemen que le quotient de vitesse des deux ions d'un électrolyt par rapport aux molécules neutres, dans un mêm champ, reste à peu près le même tant que la solution reste étendue, on peut alors calculer le degré d'hydra= tation des divers ions. L'auteur s'attendait à une hydra lation notable. Or, il est remarquable que, faisant ces calculs, on trouve le résultat simple que le nombre de molécules d'eau charriées par chaque ion se réduit à ® dans les limites de précision des analyses. 11 n'ya done pas d'hydrates d'ions. Ceci crée dès lors une forte pré- Somption pour qu'il n'y ait pas non plus de molécules d'hydrates. Les hydrates cristallisés seraient des empi: lements réguliers de molécules, contenant forcément, par suite de la structure triplement périodique @ cristal, un nombre entier et petit de molécules du di solvant pour un nombre entier et petit de molécules corps dissous : ce qui explique les formules simples d ces hydrates. En accord avec cette conception, les er taux des hydrates (tel le gypse) possèdent les ci bandes d'absorption de l'eau dans l'infra-rouge, alors: que les cristaux de brucite [Mg{OH}°}, où l'on sait par ailleurs que l’eau est chimiquement combinée, ne les possèdent pas. En particulier, si l’on se rappelle que ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 427 métaux purs sont mono-atomiques, on sera porté à enser que deux atomes de métal ne se soudent pas facilement et l'on doutera qu'il existe des molécules ‘correspondant, par exemple, aux huit amalgames cris- allisés de potassium dont on a reconnu V'existence. Plus généralement, il est probable que les alliages, même à l'état cristallisé, sont des empilements réguliers, mais non pas de véritables combinaisons. Du même coup disparaissent les difficultés soulevées par ces com- ‘posés, au point de vue de la saturation des valences. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 26 Avril 1907. . M. Tiffeneau étudie le mécanisme des transpositions pinacoliques; la ÆRevue publiera prochainement un “article détaillé du même auteur sur la question des -transpositions. — M. M. Delépine expose le résultat de ses recherches sur les produits de condensation de laldéhydate d’ammoniaque. — M. P. Nicolardot décrit le procédé qui lui permet de doser exactement l'eau dans les cuirs. — Dans une seconde communication, il fait l'historique de l’origine des mots beryllium et glucinium. | SOCIÈTE DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 26 Avril 1907. . M. A. E. Garrett décrit ses expériences sur Ja con- «duction électrique produite par le chauflage des sels. Un grand nombre de composés, spécialement les sels halogénés, produisent par chauffage jusque vers 360° une conductivité aisée à déceler. Dans la plupart des cas, une formule de la forme : À 1— 207 Pr -_ où Lest le courant de saturation, 4 et b des constantes - et 0 la température absolue, représente, avec une bonne . exactitude, la relation entre le courant de saturation el — la température absolue. Les courants de saturation ont “ été obtenus à la fois pour les ions positifs et négatifs. ions positifs sont aussi des centres chargés avec des quantités considérables des produits dus aux change- ments chimiques subis par les sels chauffés. — M. W. titués par la bobine mobile d'un électro-dynamomètre, suspendue par un système bifilaire. — M. W.S. Tucker -montre que la relation donnée par Stark entre la chute de potentiel cathodique et la température dans un et la température, affectent les courbes d'où Stark à déduit son équation. On a observé, en outre, une “grande diminution de température à mesure qu'on Séloigne de la cathode, alors que Stark considérait kins présente un appareil simple pour illustrer méca- niquement les lois des tangentes et des sinus. Arpis x SOCIETE DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 22 Mars 1907. … Les ions négatifs sont de vrais centres chargés, çar ils Mine po être déviés par un champ magnétique. Les 4 « B. Croft présente des solénoïdes qui se meuvent sous l'action du champ magnétique terrestre. Ils sont cons- ‘tube à vide est sujette à caution. Les pertes dues aux courants de convention, et qui varient avec la pression l'espace sombre cathodique comme ayant une tempé- rature voisine de celle de la cathode. — M. J. A. Tom- Séance anniversaire annuelle. La Société procède au renouvellement de son Bureau, qui est ainsi constitué pour l’année courante : Président : Sir William Ramsay ; Vice-Presidents : MM. J. J. Dobbie, R. Messel, Sir A. Pedler, MM. W. H. Perkin, A. Smithells el W. P. Wynne; Trésorier : M. Al. Scott; Secrétaires : MM. M. O. Forster et A. W. Crossley ; Secrétaire pour l'Etranger : M. H. T. Brown. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE LONDRES Séance du 3 Novembre 1906. MM. À. E. Mann el C. E. Stacey décrivent les méthodes qu'ils emploient pour lanalyse chimique des alcools commerciaux ;: elles comprennent les déterminations suivantes : force de ES acidité totale, acides volalils,acides fixes, aldéhydes, furfural, éthers, alcools supérieurs, extrait, matières colorantes. Séance du 4 Mars 1907. M. R. Threlfall présente les résultats de quatre années d'expériences sur la mesure et l'essai du qaz de gazogène. Le gaz est mesuré avec un tube de Pitot, auquel l’auteur à apporté quelques perfectionnements. La détermination de la production du gaz par le dosage de AZH° ou par la balance du carbone donne des résul- tats inexacls, en général (rop élevés. Pour déterminer le soufre dans le gaz Mond, l’auteur propose de retirer HS par aspiration au travers d’une solution de chlorure de cadmium et de brûler le gaz dans las- pirateur au moyen d'un appareil spécial. SECTION DE MANCHESTER Séance du 8 Février 1907. M. J. W. Mellor étudie quelques changements phy- siques et chimiques qui se produisent dans là cuisson des poteries. La réaction entre les divérs constituants du corps de la poterie s'arrête avant qu'un état d'équi- libre soit atteint. La chimie des poteries est donc sur- tout une chimie de réactions incomplètes. Dans la cuisson, la composition du flux change constamment à mesure qu'il dissout les matériaux les moins réfrac- traires. Séance du S Mars 1907. M. H. J. Bailey expose ses recherches sur la forma- lion du sel bleu dans l’industrie de l'ammoniaque. Elle paraît due à la présence des cyanures volatils dans le saturateur pendant un temps suffisamment long pour leur permettre d'agir sur le fer présent dans l'acide ; elle peut avoir lieu très rapidement dans une solution fortement acide, SECTION DE NEW-YORK Séance du 15 Février 1907. M. H. H. Rusby se demande s'il serait possible d'introduire et de cultiver le campbrier pour la pro- duction du camphre dans d’autres contrées que celles où il pousse à l'état natif. Il est certain que le cam- phrier pourrait s'acclimater dans la plupart des contrées sud-tropicales ; mais les conditions, physiologiques el pathologiques, de la production du camphre par le végétal étant peu connues, il ne s'ensuit pas qu'on pourrait créer actuellement une industrie du camphre florissante dans d’autres pays que ceux qui le four- nissent aujourd'hui. —M. G. Drobegg décrit les mé- thodes de purification et de raffinage du camphre naturel. Les impuretés du camphre brut sont l’eau, l'huile de camphre, Le fer, le sable, le bois, etc. On les sépare soit par resublimation, soit par cristallisation du benzène. — M. V. Coblentz fait l'histoire des em plois du camphre en Pharmacie et en Médecine. — M. R. C. Schuepphaus étudie les applications tech- niques du camphre. Les deux tiers de la production lolale sont consommés par l'industrie du celluloïd ; contrairement aux idées courantes, le camphre n'entre guère dans la fabrication des explosifs et des poudres sans fumée. — M. E. J. Pond signale les diverses méthodes qui ont abouti à la synthèse du campbhre. La plupart n'ont qu'un intérêt scientifique ; une seule est 498 ACADÉMIES ET SOCIËÈTÉS SAVANTES w devenue industrielle : elle consisté dans la prépara- tion du chlorhydrate de pinène au moyen de l'essence de térébenthine qui contient 70 °/, de pinène; ce chlorhydrate est converti en camphène, celui-ci en isobornéol, et ce dernier est finalement oxydé en camphre. On à aussi préconisé l’action de divers acides sur l'essence de térébenthine, qui donne un mélange d'éthers bornyliques et isobornyliques, qui peuvent être oxydés en camphre. -— M. J. E. Crane et C. M. Joyce décrivent les diverses méthodes d'analyse du camphre, qui reposent sur la sublimation, la détermi- nation de la densité et du pouvoir rotatoire, SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 8 Mars 1907. MM. H. Zahn et H. Schmidt adressent une Note rela- tive à l'effet Hall et à quelques phénomènes alliés pré- sentés par les alliages de Heusler. L'effet Hall, abstrac- tion faile des valeurs extrêmes observées pour le tellure et le bismuth, et des valeurs relativement grandes caractéristiques de l'antimoine et du carbone, se dé- montre le plus facilement dans le cas des métaux ferro- magnétiques (fer, acier, nickel et cobalt). Les autres phénomènes caractéristiques du champ magnétique, et notamment l'effet thermo-magnétique, sont aussi très marqués dans le cas de ces métaux. Or, comme les propriétés magnétiques exercent évidemment une influence importante sur la grandeur de ces effets, les auteurs s'attendaient à les retrouver avec une intensité extraordinaire dans les bronzes magnétisables de man- ganèse découverts par M. Heusler. Ils ont, en effet, constaté que ces alliages présentent l'effet Hall et l'effet thermo-magnétique à un degré relativement élevé, voire même supérieur au fer, bien que les composants individuels des alliages ne manifestent ces mêmes effets qu'avec une faible intensité, Ilest intéressant de remar- quer que les valeurs relatives aux alliages, abstraction faite de ceux du plomb, diffèrent jusque par leur signe de celles qui sont caractéristiques des composants. Séance du 22 Mars 1907. M. F. F. Martens adresse une Note sur l'examen optique des vibrations de diapasons. Suivant la méthode usuelle, on rend ces vibrations visibles en attachant un petit miroir à la surface extrême du bout supérieur de l’une des branches du diapason. Les rayons lumi- neux réfléchis par le miroir viennent frapper, soit un miroir tournant, qui résoudra en une ligne sinusoidale la tache lumineuse élargie en bande, soit un autre petit miroir qui, attaché d'une façon analogue à un autre diapason perpendiculaire au premier, engendrera les figures bien connues de Lissajous. L'auteur propose de modifier cette méthode en attachant le miroir, non pas au bout supérieur, mais au milieu environ de la branche du diapason, qui, par là, sera influencé à un degré beaucoup moindre, alors que les rotations du miroir resteront sensiblement identiques. Il est possible aussi d'imprimer aux rayons lumineux une rotation double en attachant deux miroirs aux surfaces inté- rieures, en regard l’une de l'autre, des deux branches du diapason. Un avantage de ce dispositif, c'est l'absence de toute influence perturbatrice due à une rotation du diapason tout entier, rotation qui se produit toujours en amorcant ce dernier. — Le même auteur vient de faire la démonstration de la propagation du son dans une conduite de Toepler. La valeur de la vitesse de pro- pagation ainsi trouvée, réduite à l'air sec à 0°, étant d'environ 296 mètres par seconde, est intermédiaire entre les valeurs isothermique et adiabatique. — Il décrit, d'autre part,un dispositif de démonstration des vibrations sonores au sein de l'air. Un diaphragme étroit est disposé à proximité du foyer d'un petit miroir concave, projetant, après réflexion sur un miroir tour- nant, une image nette du diaphragme sur un écran blanc éloigné. Le miroir concave est attaché au bord inférieur de la plaque de mica d’une capsule phonog phique du commerce, dont l'ouverture est reliée un bout de caoutchouc à l'entonnoir accoustique à lon sueur variable. Les vibrations sonores seront tracées sûr l'écran. — MM. F. Handke et F.F. Martens décrivent un dispositif de démonstration, au moyen de mem branes à miroir latéral, des ondes stationnaires d'un flûte, destiné à se substituer aux capsules de Kônig Les mêmes auteurs ont fait des expériences sur un tube à interférence de Quincke à deux voies sonores. HIS placent le diapason servaut de source sonore devant l'une des ouvertures du tube à interférence; l’autre ouverture est fermée par une membrane en caoutchoue portant un petit miroir à son bord inférieur et dont la tension produit la résonance au son rendu par la source sonore. Le miroir projette sur un écran l'image d'un filament de Nernst, image qui, pendant les oscillations de la membrane, sera étirée en une bande longue large. Cette méthode peut être variée de différente manières. — M. J. E Lilienfeld présente un secon Mémoire sur certains phénomènes nouveaux, se pro= duisant dans la colonne positive de l’efflave électrique: Depuis sa première communication sur ces mêmes phénomènes, faite dans la séance du 16 novembre 1906, les conditions expérimentales, et notamment celles qui régissent la production des fluorescences caractéris= tiques, ont élé précisées : il importe essentiellement de réaliser un vide aussi avancé que possible et une grande densité de courant de décharge. Aussi ces phénomènes sont-ils limités aux portions du tube dont, la section peut être resserrée à volonté, à savoir à la colonne positive. Une autre façon d'exprimer ces con- ditions est de dire que les phénomènes en question se, trouvent liés à un état stationnaire de la décharge dans lequel le nombre des électrons négatifs conduisant le, courant est aussi grand que possible en comparaison du nombre de molécules gazeuses par unité de volume: Un nouveau moyen d'assurer un videexceptionnellement. avancé consiste à rincer les vases à l’aide d'oxygène pur et sec, pendant le passage de décharges gazeuses intenses. L’oxygène, activé par la décharge, enlève, semble-t-il, et le mercure et les hydrures de carbone absorbés par le verre. La fluorescence rouge semble être liée au résiän gazeux occlus dans les parois de verre, tandis que la fluorescence bleue est due proba= blement au silicium renfermé dans les verres et le quartz. Il reste à démontrer si ces fluorescences sont provoquées soit par le rayonnement positif, soit par le concours de ce rayonnement avec d'autres produits de la décharge. — M. W. Biegon von Czudnochowski décrit une échelle de vides à ajustement automatique: En raison des modifications des phénomènes de dé= charge observées pour des tensions décroissantes; M. Cross à pu établir une échelle de vides comprenant 6 vases à décharge identiques et remplis du même gaz, mais à un degré de raréfaction différent. L'échelle autc matique imaginée par l’auteur est, au contraire, indé= pendante des conditions locales et du gaz choisi. Le dispositif qu'il vient de construire comprend un sys= tème de 6 vases à vide cylindriques communiquant. entre eux et renfermant des électrodes en aluminium Au voisinage du bout inférieur de chaque vase, on. soudé un tube recourbé deux fois à angle à peu pr droit ei qui porte à son autre extrémité un petit flacon et dans sa partie antérieure un tube étroit à bout pol obliquement. Ce tube est introduit dans le flacon vase à vide antérieur de la série. Après avoir rempli tous les flacons de mercure, les échelles des tubt étroits y plongeant donneront les degrés de vide, qui peuvent s'assimiler à ceux de l'échelle de Cross. ALFRED GRADENWITZ. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 18° ANNÉE N° 11 45 JUIN 1907 Revue générale Pos Sciences pures el appliquées DIRECTEUR : Adresser tout ce qui concerne LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE & 1. Miss Agnes Mary Clerke. — Le 20 janvier de cette année, la mort enlevait à l’Astronomie l'un de meilleurs historiens, Miss Agnes Mary Clerke. — Nécrologie ses Sans avoir été un astronome au sens littéral du mot, Miss Clerke s’est acquis, par son grand talent de vul- garisalion, un nom qui restera dans la littérature scientifique. Née en Irlande, le 10 février 1842, Miss Clerke recut une instruction solide et vint résider en Italie, où elle continua ses études, de 1870 à 1877. A partir de cette époque, elle vint se fixer à Kensington, près de Londres, et ne quitta son cabinet de travail qu'en de rares ocea- sions, nécessaires pour se perfectionner dans sa science de prédile ction. C’est ainsi qu'en 1888, à l’âge de quarante-six ans, nous la retrouvons à l'Observatoire Royal du Cap de Bonne-Espérance, faisant un stage prolongé et cher- chant à acquérir une connaissance approfondie de l’Astronomie pratique sous l'habile direction du Dr Gill, aujourd'hui Sir David Gill. Son esprit très cultivé s’'intéressait aux questions les plus diverses, à tel point qu'en 1892 elle publiait sur Homère une étude fort intéressante {Familiar studies in Homer), qui prouve en faveur de sa vaste érudition. Dans cette œuvre, que nous nous bornons à signaler, Miss Clerke montre que ses idées sur les Grecs primitifs étaient loin d'être superficielles; elle y aborde même différentes controverses historiques, qu'elle sait traiter de main de maitre. En 1900, elle visite, au cours d'un long voyage à bord du yacht Palatine, les grandes capitales du nord de l'Europe. Mais, de tout temps, l'Astronomie avait eu ses faveurs et, en 1885, elle publiait son premier ouvrage important : À Popular History of Astronomy during the XIX% Century. Les astronomes surent apprécier l'œuvre à sa juste valeur, puisqu'en 1902 paraissait une quatrième édition complètement mise à Jour. En réalité, son Histoire de l’Astronomie au xix° siècle commence avec le grand Herschel. « Le présent volume, disait-elle dans la première édition, n'a pas la préten- tion d'être une histoire complète et très étendue de l’Astronomie pendant la période indiquée. Son but est REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1901. de présenter une vue des progrès de la science céleste, sous son jour le plus caractéristique, depuis l'époque de Herschel. » [Test donc tout naturel qu'elle ait toujours eu un plaisir spécial à revenir sur ce point de départ, d'autant que Herschel est un personnage dont la vie est excessivement intéressante à étudier. C’est probable- ment à raisons que nous devons la publication, en 1895, de son délicieux opuscule : Les Herschel et l’'Astronomie moderne, ouvrage qui contient la biogra- phie de Sir William Herschel, et celles de sa-sœur Caroline et de son fils Sir John Herschel. Cette Histoire de lAstronomie est de beaucoup sa contribution la plus importante à la littérature scien- tifique. Elle y travaillait encore dans les derniers mois de sa vie et se préparait à mettre au point les docu- ments qui devaient faire de la cinquième édition une œuvre unique en son genre. Toutefois, elle venait de publier, en 1906, un petit volume intitulé : Modern Cosmogonies et qui comble en partie les lacunes de l'Histoire, lacunes, hâtons-nous d'ajouter, dues prinei- palement aux progrès de la science astronomique de- puis 1902. Son second ouvrage de quelque importance à pour titre : The System of the Stars et fut publié en 1890. Les progrès réalisés en quinze années, les découvertes nouvelles, les mesures plus précises opérées dans les grands observatoires, obligèrent l'auteur à remanier son premier texte et à introduire de nouveaux chapitres dans l'édition de 1905. C'est à propos de cet ouvrage que M. Gregory s'exprime ainsi : « Aucun écrivain en Astronomie n'a une plume aussi alerte que Miss Clerke ; nous pouvons passer sur le style, quelque peu fleuri à l'occasion, lorsque nous songeons à la quantité énorme de lectures et d'analyses qu'il a fallu pour mener à bien une telle entreprise. Cet ouvrage est si remarquable qu'il devrait être familier à tous ceux qui s'occupent de Physique astronomique... Il est seulement regrettable que l’auteur n'ait pas donné un plus NES aperçu de tout ce que l’on à publié sur ce sujet. » Ces ouvrages, malgré leur étendue, n'épuisaient pas l'activité de Miss Clerke comme écrivain. Entre temps, elle publiait de nombreuses biographies d'astronomes dans l'Encyclopédie Britannique, ou dans le Diction- naire national de Biographie, et elle collaborait à des [nl ces 430 revues spéciales ou générales, telles que: The Observa- tory où AXnowledge. En 1892, elle recevait le prix Actonien de cent gui- nées pour ses travaux astronomiques, et, en 1903, la Royal Astronomical Society la comptait parmi ses membres honoraires. Cette mème année, comme pour répondre à ce grand honneur, Miss Clerke publiait un troisième grand ou- vrage : Problems in Astrophysies. Elle l’écrivit, nous dit-elle, sous l'inspiration et les conseils de Sir David Gill, auquel il est dédié. Ce livre sera une vraie révélation pour tous ceux qui s'intéressent à la science, aussi bien pour les profanes que pour les savants dont les loisirs sont occupés par des recherches ayant un tout autre objet. Les vues générales y abondent et la lecture de ce volume est bien propre à montrer quel vaste champ occupent actuelle- ment les recherches astronomiques, comme aussi à donner les conclusions des travaux modernes sur le plan général et l'unité de notre Univers. Les spécialistes eux-mêmes, déjà engagés sur ce ter- rain, économiseront bon nombre d'heures consacrées aux recherches fastidieuses dans les livres ou les revues, en consultant ce chapitre de l'histoire de la science. Aux qualités d’un habile compilateur de méthodes et de résultats, Miss Clerke joignait celles d'un remar- quable écrivain. Son style pittoresque et imagé rend très agréable la lecture de tous ses ouvrages, où le fini littéraire ne nuit jamais à la valeur scientifique. On regrette seulement parfois que l'auteur n'ait pas reçu une éducation scientifique plus forte, pour arriver à juger à leur vraie valeur certaines recherches impor- tantes qu'elle a, d'ailleurs, très heureusement signalées. Cela mis à part, nous ne pouvons que souscrire pleine- ment à l'appréciation si juste qu'un critique moderne a faite de son œuvre : « Aucun de ceux qui étudient l'histoire de l’Astrono- mie ne peut manquer de reconnaitre la grande dette contractée vis à vis de miss Clerke pour son importante contribution à la science astronomique ; aucun travail- léur, dans le vaste champ de l'Astronomie sidérale moderne ouvert par le génie de Herschel et considéra- blement élargi par l'application du spectroscope, n'aura garde d'oublier la reconnaissance due à cette femme incomparable pour l'accomplissement de son œuvre gigantesque. Il semble, en effet, que nul autre écrivain n'aurait pu, comme elle, classer et interpréter cette masse énorme de documents et de matériaux accumu- lés depuis si peu de temps, et indiquer toujours la route à suivre pour explorer de nouveaux horizons dans le domaine si étendu d’une science qui englobe toutes les autres. » Abbé Th. Mcreux, Directeur de l'Observatoire de Bourges. $ 2. — Astronomie Le retour de la comète de Halley. — L'astro- nome anglais Hollis vient d'appeler l'attention sur le prochain retour de la comète de Halley, dont la période moyenne est à peu près de soixante-dix-sept ans. Mais, en raison des déplacements de son orbite causés par l'attraction planétaire ou par d'autres influences per- turbatrices, la révolution actuelle serait, environ, de deux ans plus courte. En 1862, le Dr Angstrôm montra que ces périodes inégales ont suivi une courbe parfaitement régulière, et, si la période dont il s’agit maintenant s'accorde avec la continuation de cette courbe, le prochain retour n'aurait lieu qu'en 1913: cependant, d'autre part, M. le Comte de Pontécoulant ayant, en 1864, calculé l'orbite de cette comète avec la plus rigoureuse précision, en a conclu que le prochain passage au péri- hélie arrivera le 23 mai 1910. M. Cowell et M. Crom- melin ont fait, conjointement, une comparaison minu- tieuse des irrégularités de l'orbite et sont parvenus au mème résultat que Pontécoulant, avec une légère diffé- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE rence de date, celle-ci devant être, selon eux, quel= ques semaines plus tôt. ' Naturellement, cette date est celle du passage au périhélie; mais, quoique la célèbre comète de Halley ne puisse être comptée parmi les plus remarquables d'éclat, il ne serait peut-être pas impossible de la voir « dès l'automne prochain, car elle se rapproche de nous chaque jour davantage. $ 3. — Météorologie Radio-activité de la pluie. — MM. Costanzo et C. Negro, qui ont étudié, comme on le sait, la radio- activité de la neige, viennent de publier ‘ les résultats. de leurs recherches sur la radio-activité de la pluie, qui a fait l'objet, de leur part, d’intéressantes études systé- matiques à Bologne durant le printemps de 1906. Leurs investigations ont été accompagnées d'observations … barométriques, thermométriques et anémométriques. Il résulte des observations publiées que la pluie frai- chement tombée est {oujours radio-active : cette radio- activité est l'objet d’une diminution rapide et disparait sensiblement au bout de deux heures. La pluie d'orage, principalement si elle est accompagnée de grêle, est très fortement radio-active. La pression, la température, : la force et la direction du vent, n'ont pas révélé d'influences nettes au cours des nombreuses observa- tions ?. ; $S 4. — Art de l’Ingénieur Les moteurs des sous-marins. — Les ques- tions relatives à la plongée, à la tenue en immersion et à l’utilisation militaire des sous-marins sont actuel- lement résolues, en France du moins, d'une manière satisfaisante. Sans doute, il y a encore des progrès à faire ; mais on est sorti de la période des tätonnements, et tout le monde est d'accord sur la voie où l’on doit chercher les perfectionnements de détail. É Le problème des moteurs, quoique plus simple en apparence et moins mystérieux, est moins avancé, et aucune des solutions essayées ne s’est jusqu'ici montrée réellement supérieure aux autres. La meilleure preuve en est que, sur les quatre grands sous-marins de types différents mis en chantier au 1* janvier de cette année, il y a trois systèmes de moteurs différents, dont un est entièrement nouveau. En outre, il a fallu, pour atteindre en marche à la surface la vitesse relativement faible de 15 nœuds, donner à ces sous-marins des dimensions très supérieures à celles qu'on avaitatteintes jusque-là (700 à 800 tonneaux de déplacement total, contre un maximum antérieur de 450). On peut s'étonner de ce chiffre, lorsqu'on se rappelle que des torpilleurs de 150 tonnes marchent à la vitesse de 30 nœuds. Aussi n'est-il pas sans intérêt de montrer les difficultés particulières qu'offre le problème des moteurs dans le cas des sous-marins. Elles tiennent aux conditions spéciales qu'impose la. nature même de ces bateaux. En premier lieu, leur coque, au lieu d’avoir simplement la solidité nécessaire pour résister à la mer, doit être assez robuste pour sup- porter la pression correspondant à une immersion assez grande : le chiffre de 40 mètres est un minimum, qui oblige à employer des tôles d'acier d'un centimètre … d'épaisseur au moins. Le poids de la coque en est accru, et, au lieu de représenter seulement 28 à 30 cen- tièmes du déplacement total, comme sur les torpilleurs, il en prend de 40 à 42 centièmes. L'armement, l’'équi- page et les installations intérieures exigent à peu près. 25 centièmes du déplacement : il ne reste donc pour le moteur que 35 centièmes au plus, alors que les torpil- leurs disposent de 40 à 45 centièmes. Encore ne peut-on pas toujours, faute de place, utiliser tout ce poids: on est impérativement limité ! Phys. Zeilschr., 15 décembre 1906. 2 Cf. Bull. de la Soc. belge d'Astr., t. XII, p. 122. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE par le diamètre de la coque, par les ballasts très encombrants qui servent à produire l'immersion, et par la nécessité de ménager des couloirs aliant d'un bout à l’autre du bâtiment : en pratique, la fraction du déplacement affectée à l'appareil moteur ne dépasse pas 30 centièmes. RTE RS . > C'est là une première cause d'infériorité. Mais, en outre, le poids qu'on peut affecter au moteur doit être réparti, sur les sous-marins, entre deux appareils, Fun pour la marche à la surface, l’autre pour la marche - en plongée. Malgré quelques essais dont nous parlerons plus loin, il n'est pas encore possible d'utiliser en plongée — c'est-à-dire le bateau complètement fermé, sans communication avec l'air extérieur — d'autres appareils que les moteurs électriques, alimentés par des accumulateurs; sans doute, ces moteurs peuvent suffire pour la marche à la surface, mais il faut alors, mème pour obtenir une distance franchissable assez “faible, un très grand nombre d'accumulateurs, et l'on sait quel poids représente l'énergie emmagasinée sous cette forme : 120 kilogs par cheval pour les accumula- teurs, 30 à 40 kilogs par cheval pour les moteurs élec- triques ; un appareil moteur de 200 chevaux pèsera au moins 30 tonneaux; il ne trouvera pas place sur un sous-marin jaugeant moins de 100 tonneaux, et il ne lui donnera qu'une vitesse de 10 nœuds au plus, pen- dant 2 heures. C’est ainsi qu'étaient müûs nos premiers sous-marins, mais on à vite renoncé à cette solution trop onéreuse, etqui,en outre, fait dépendre trop étroitement le bateau de sa station de chargement installée à terre. On a donc réduit le poids affecté à la propulsion électrique, et l’on a mis un moteur thermique — machine à va- peur ou moteur à pétrole — dans le double but d’as- surer la marche à la surface dans de meilleures con- ditions, et de recharger les accumulateurs pour la plongée, de manière à donner plus d'autonomie au sous-marin. La fraction du déplacement affectée au moteur ther- .mique à varié suivant que l’on voulait assurer au bâti- ment une marche plus ou moins longue en plongée. Elle ne dépasse guère 10 centièmes sur les bâtiments les plus récents, en y comprenant l’approvisionnement de combustible. La première solution essayée chez nous a été la machine à vapeur, avec chaudière chauffant au pétrole ; l’ensemble du générateur et du moteur pèse à peu près 45 kilogs par cheval (on arrive à un chiffre bien infé- rieur sur les torpilleurs, mais seulement avec des puis- sances très considérables). La machine à vapeur a le double inconvénient de faire une fumée qui rend le sous-marin visible de loin lorsqu'il marche à la surface, et d'exiger une cheminée qu'il faut rentrer avant de plonger ; le sous-marin qui en est muni est donc obligé de s’immerger à plus grande distance de l'ennemi, et il met plus de temps à faire cette opération. On a donc cherché à s'en affranchir en employant le moteur à pétrole. Mais les vapeurs d'essence donnant des risques d'explosion dans un milieu confiné comme celui du sous-marin, il a fallu recourir aux moteurs à pétrole lampant, qui sont beaucoup plus lourds que ceux à essence : alors que certains types de ces derniers arrivent à ne peser que 3 ou # kilogs par cheval, les moteurs à pétrole lampant ne descendent pas pour le moment au-dessous de 40 kilogs. On arrivera sans doute à faire mieux, mais la question est de celles que l’on étudie à l'heure actuelle et l’on ne peut pas compter sur un résultat immédiat. La solution du moteur à pétrole n’est donc encore que peu supérieure, au point de vue du poids, à celle de la machine à vapeur. Par contre, elle est plus avan- tageuse au point de vue de l'encombrement. Mais elle est loin, pour le moment, de donner la mème sûreté de fonctionnement, surtout lorsqu'il s'agit d'une marche prolongée. On cite, il est vrai, des moteurs d'atelier de mèmes modèles qui marchent sans inter- ruption pendant des mois : mais ces moteurs pèsent de 150 à 200 kilogs par cheval, et leurs conditions de fonctionnement ne sont pas les mêmes, On voit combien est complexe la question des mo- teurs de sous-marins. Il faut ajouter encore que l'utili- salion de la puissance motrice est forcément beaucoup moins bonne, en plongée, qu'elle ne l’est sur les bâti- ments de surface : le sous-marin immergé, en effet, est alourdi du poids de l'eau qu'il a embarquée dans ses ballasts pour produire son immersion. Il en résulte, pour une mème puissance, une perte de vitesse qu'on peut évaluer à près d'un tiers par rapport à la marche à la surface. Pour s'affranchir du poids considérable que repré- sentent les accumulateurs ef moteurs électriques, on a proposé plusieurs solutions, qui utilisent dans la marche en plongée le moteur de surface. Unie de ces solutions consiste à alimenter le moteur à pétrole au moyen d'air comprimé contenu dans les réservoirs que l’on vide à l'intérieur du bâtiment. Elle a été essayée sur le sous-marin Ÿ, et l’on a dù y renoncer, à cause des variations de pression, absolument insupportables pour les hommes de l'équipage, que produisait ce fonc- tüonnement. Le gain réalisé sur le poids n’était même pas très considérable, car, le moteur à pétrole consom- mant à peu près 2 mètres cubes d'air par cheval et par heure, il fallait emmagasiner des quantités très grandes d'air comprimé, dans des réservoirs très lourds. On à aussi préconisé, pour la plongée, un moteur à ammoniaque semblable à ceux qui fonctionnent dans les usines frigorifiques : mais lammoniaque coûte trop cher pour qu'on puisse appliquer ce principe à des appareils de quelque puissance, surtout à bord où il est impossible de recueillir les résidus du fonction- nement. Enfin, un des derniers sous-marins mis en chantier comporte une solution originale : il est mû par une machine à vapeur dont la chaudière est entourée d’une couche épaisse de matière à base d'amiante, qui empêche le rayonnement. Quand on plonge, on cesse d'alimenter les fournaux, mais la chaudière continue à produire de la vapeur et la machine peut encore tourner pendant assez longtemps. Quoique la distance franchissable en plongée soit dans ces conditions assez restreinte, il sera intéressant d'expérimenter le système. Mais la solution n'est pas encore trouvée, qui per- mettra aux sous-marins d'atteindre des vitesses com- parables à celles des bâtiments de surface. C’est là leur point faible, et il n'y pas d'apparence qu'on y remédie avant longtemps. $ 5. — Physique La conductivité électrique et la force thermo-électrique des composés de métaux lourds. — La seule difficulté s'opposant à l'examen électrique des composés métalliques purs réside dans la préparation d'échantillons convenables. La conduc- tivité et les forces thermo-électriques, qui sont com- prises dans les mêmes limites que celles des métaux et électrolytes, se déterminent, en effet, facilement avec les méthodes élaborées pour ces derniers. La pro- duction de baguettes ou de plaques pures et bien cohé- rentes, indispensables à cet effet, n'est cependant pos- sible qu'exceptionnellement par voie de fusion, soit dans le cas le plus intéressant des composés de métaux lourds, soit dans celui des métaux eux-mêmes. Les expérimentateurs ont, par conséquent, eu recours à l'emploi, soit de cristaux trouvés dans la nature, soit de baguettes obtenues par compression de la substance pulvérulente. La première méthode, qui, avec un choix soigneux des: échantillons, donne de bons résultats, n'est évidemment que d'une application limitée ; d'autre part, il est rare de trouver dans la nature des substances pures d'une composition constante. L'autre méthode, bien que d'une application générale, donne des résultats absolument incertains. Les baguettes ob- 432 tenues par compression de la poudre donnent le plus souvent des valeurs plusieurs fois plus grandes que la résistance réelle, tout en passant par des variations irréversibles dans le cas d’une température variable et en présentant les effets de cohéreur bien connus. M. K. Bädeker! vient de préconiser une ingénieuse méthode pour obtenir ces composés à l'état pur, se prêtant à l'examen de leurs propriétés électriques. Il produit à cet effet des miroirs métalliques par projec- tion cathodique, puis les transforme dans le composé voulu par l’action de la vapeur du métalloïde corres- pondant. Le nombre de corps réalisés de cette façon est évidemment extrêmement grand. La projection du métal se fait de la facon usuelle sur du verre ou du mica. Des morceaux convenables, dé- coupés dans ces miroirs, sont introduits séparément dans une éprouvette en présence d'une faible quantité du métalloide, après quoi le vide y est fait. Dans cer- tains cas, la combinaison s'établit spontanément; le plus souvent, il convient cependant de chauffer avec précaution. Les couches minces de composés ainsi obtenues sont extrémement cohérentes. La méthode proposée par l'au- teur pour mesurer leur épaisseur par des pesées faites sur une micro-balance est, semble-t-il, d'une précision équivalente aux méthodes optiques dans le cas des couches supérieures à 100 pu, tout en étant d'un em- ploi possible pour des épaisseurs décroissantes jusqu'à quelques eu. Le coefficient de température de la substance la mieux conductrice examinée par l’auteur, à savoir le Cus, s'approche de la valeur moyenne des métaux purs. Il en est de même probablement de sa conductivité. Le sulfure d'argent passe, semble-t-il, de la conduction électrolytique à la conduction métallique au point de transformation (175°). Le séléniure d'argent présente la conduction métallique en dessous et en dessus de son point de transformation (133°). Le Cul* présente un cas de conduction électrolytique d’une grandeur anor- male. L'auteur mesure enfin les forces thermo-électriques de certains composés à conductivité métallique par rapport au cuivre entre 20 et 2200. Les résultats de ces mesures sont donnés en détail dans le travail original. $ 6. — Electricité industrielle Dispersion du brouillard et des fumées par l'électricité. — La présence de brouillards et de fumées présente des inconvénients, non seulement pour la navigation et la sécurité des chemins de fer, mais aussi pour l'hygiène. Un célèbre physicien écos- sais, Aitken, a pu établir, par une série d'expériences des plus coneluantes, que la condensation de la vapeur d'eau à l’état de brouillard résulte surtout de l'in- fluence des poussières en suspension dans l'atmo- sphère. Avec Tyndall et Gérardin, il a reconnu que les particules solides des fumées ont la propriété de con- denser autour d'elles la vapeur d’eau et d'être ainsi l’origine des brouillards, qui contribuent au développe- ment des pires maladies, notamment de la tuberculose. Pour se rendre compte de l'intérêt qu'il y aurait à s'en débarrasser, il suffit de rappeler les résultats de l’ana- lyse des brouillards des grandes villes. A Londres et à Manchester, ces analyses ont donné les résultats suivants : Carbone libre. : « :- 41,5 Hydrocarbures 13,1 Bases diverses . CR 2,1 Acide Sulfurique "Cm Ne 4,6 Acide chlorhydrique 1% Ammoniaque ou sels ammoniacaux. 1,4 Fériet oxydes de fer: CT 21 Autres matières minérales . . . . 32,2 ‘ Annalen der Physik, n° 4, 1907. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE A Paris, l'air moyen contient, par 100 litres calculés à 0° et sous la pression [de 760 millimètres, les gaz combustibles suivants : Hydrogènellibres. "A SIc AC" Æ Formène NAS EN C ETES MAP AC RER Benzène et analogues … . : . 1. Ac C1 Oxydes de carbone . . . . . 0 c. c’2 De plus, les fumées et brouillards ont la propriété d'arrêter en partie la lumière solaire, qui, d'après des savants tels que Pasteur, Duclaux, Roux, etc, est un destructeur énergique des microbes nuisibles à l'organisme. Cette perte de lumière atteint, dans les grandes agglomérations, jusqu'à 40 ou 60 °/9. On comprend donc quel intérêt présente tout pro- cédé ayant pour but de remédier à ces inconvénients. Diverses expériences ont été faites dans cet ordre d'idées, notamment en France, par l'ingénieur Dibos,. et en Angleterre, par le savant bien connu, Oliver Lodge, expériences qui se poursuivent encore en ce moment et qui déjà ont donné des résultats très dignes d'attirer l'attention. k C'est en 1884 que Lodge, pour la première fois, indiqua que des décharges à haut potentiel ont pour effet de condenser les poussières autour des élec- trodes et de les faire déposer sur les corps avoisi- nants. Ces travaux sont repris depuis 1905. Ils ont commencé par des expériences de laboratoire. Le phy- sicien anglais se servait de machines électrostatiques, dont une des électrodes était terminée par une pointe métallique recouverte d'une cloche en verre: Si l'on introduit des fumées sous la cloche, ces fumées, se condensant presque instantanément, se précipitent sur l’électrode et sur le plateau qui supporte la cloche. Ce procédé ne pouvait guère être employé utilement en dehors du laboratoire, d'autant plus que les machines électrostatiques sont trop sensibles aux influences de l'humidité pour pouvoir se prêter facile- ment à des expériences extérieures. Aussi maintenant Sir Oliver Lodge a-t-il substitué des dynamos à courants alternatifs aux machines électro statiques; mais des redresseurs transforment ces cou= rants, de facon que les décharges à haut potentiel fournies par ces dynamos soient émises toujours dans le même sens. Presque en même temps que Lodge reprenait ses recherches à l’Université de Birmingham, l'ingénieur francais Dibos se livrait en France à des travaux des plus intéressants. En 1904, il installait un premier poste d'observation à Wimereux-Plage (Pas-de-Calais). [IL opérait avec une machine électrostatique fonction= nant sous un potentiel de 140.000 volts et alimentant une antenne munie d’un râteau-diffuseur à pointes métalliques. Ce dernier appareil était à 10 mètres au= dessus d'une villa haute de 15 mètres et située à 40 mètres d'altitude au-dessus du niveau de la mer. Alors que l’opacité du brouillard ne permettait pas de distinguer des personnes placées à 2,30 de l'obser= vateur, M. Dibos put obtenir des zones d’éclaircies de. 50 à 60 mètres de rayon. Il put observer que ces éclaircies circulaires augmentaient sensiblement quand le vent ramenait vers le poste d'observation les fumées de la ville de Boulogne-sur-Mer, située à 3 kilomètres à vol d'oiseau. Il en conclut que plus le brouillard est chargé de poussières, plus il est sensible à l'influence des décharges électriques et facile à disperser. Les expériences furent reprises plus tard avec des cou- rants dynamiques et confirmèrent les premiers résul- tats. Oliver Lodge, de son côté, est arrivé, au moyen d'ondes électriques, à disperser des brouillards sur une zone de 400 à 110 mètres de diamètre. A la suite de ces essais, il a établi sur les rives de la Mersey, en An= eleterre,et sur les bords de la rivière Chicago, en Amé— rique, des postes où il a pu étendre ses expériences. Les travaux simultanés de Dibos et de Loûge ne sont encore que des essais; mais les résultats déjà obtenus … permettent de bien présager de l'avenir. Déjà l’obten- CHRONIQUE ET ÇORRESPONDANCE 433 intervention de ce genre‘. M.E.-A. Martel à émis, dans son champ particulier d'investigations, des doutes tion d’une zone d’éclaircie de 100 mètres de diamètre est un avantage très sérieux pour la marine et favorise . les entrées et sorties de port. Sur les voies ferrées, elle permet la visibilité des signaux à une distance appré- ciable. On ne peut que suivre avec intérêt la continuation et l'extension de ces expériences, qui peuvent avoir des conséquences de la plus grande importance et aboutir à la solution complète d'un problème de la plus haute portée pratique. $ 7. — Géologie L'action comparée de lérosion torren- tielle et de l'érosion glaciaire. — L'étude appro- fondie des régions alpines a permis de considérer comme indiseutables, d'une part, l'existence de plu- sieurs glaciations, séparées par des périodes de retrait interglaciaires, et décomposables, elles-mêmes, en oscillations de moindre amplitude, d'autre part, le surcreusement (Uebertiefung) des vallées principales. C'est au Professeur Penck, de Berlin, que revient l'honneur d'avoir mis ces faits en lumière, et l'on peut dire qu'actuellement tous nos géologues français s'y sont ralliés. Seulement, tandis que M. Penck et ses collègues allemands attribuent ce surcreusement à la seule action glaciaire, les glaciologues français en cherchent la cause principale dans le travail des eaux courantes, et en particulier de celles du torrent sous- glaciaire. Sans doute, l'érosion glaciaire peut occasionner des ruptures de pente, faconner des cuvettes locales; mais, de là. à l’approfondissement des vallées actuelles, il y a loin. On ne saurait oublier, par ailleurs, que les névés et les champs de glace sont en même temps, et dans une mesure au moins égale, des agents de con- servation du modelé topographique. M. W. Kilian, le savant professeur de Grenoble, dans une récente étude ‘ où il a repris la question qui nous occupe, cite l'exemple suivant : Pour la vallée de l'Arc, près de la Praz (Savoie), l'approfondissement attribuable au sur- creusement est de 1.074 mètres, différence entre l'alti- tude du seuil de la Bissortelle, là où elle subit une brusque rupture de pente (2.031 mètres), et le con- fluent de ce torrent avec l'Arc (957 mè tres). Or, un tel travail est en disproportion évidente avec les effets excavants observés dans les glaciers actuels. Au con- traire, de l'étude si documentée de M. Charles Rabot sur les Débäcles glaciaires*?, ainsi que d'un travail ré- cent de M. Paul Girardin*, il résulte que les eaux cou- rantes produisent en un temps très limité de puissants effets d'érosion, qui forment toute une phase de l'his- toire d’une vallée. La dernière débàäcle du Charmaix, à Modane (23 Juillet 1906), a permis de constater suc- cessivement, dans l'espace de quelques heures, le creusement du lit, l'érosion latérale par éboulement, la formation de lacs, la construction de terrasses, etc. D'autre part, une bonne partie des terrains que lon considère comme glaciaires n'ont pas cette origine. Telle est, en particulier, l'opinion de M. Charles Rabot. Les matériaux laissés par les glaciers ont été repris et déplacés par les torrents, entrainés par les débâcles glaciaires, mélangés aux produits des éboulements, des glissements, des avalanches printanières. M. Sta- nislas Meunier a constaté, dans les Préalpes vaudoises, que des galets de calcaire ou d’autres roches tendres peuvent être striés de la même façon qu'ils l’auraient été par le glacier, et cependant en dehors de toute * W. Kicrax : L'érosion glaciaire et la formation des ter- rasses. La Géographie, 15 novembre 1906. mr ion de (réographie historique et descriptive, n° 3, % P. Girarnix : La débâcle du Charmaix aux Fourneaux, dite « Eboulement de Modane ». La Géographie, 15 septem- bre 1906. semblables : « Après tout ce que le travail des eaux souterraines m'a montré depuis seize ans, parmi toutes les régions caverneuses de l'Europe, en fait d'œuvres de polissage et striage des roches, faconnage de mar- mites de géants et de pierres arrondies, uniquement dues à l'érosion mécanique et tourbillonnaire des cou- rants, des doutes me sont venus sur la justesse d’in- terprétation debien des manifestations données comme glaciaires ; et je me demande, en profane comme gla- ciériste, mais en empiriste exercé comme hydrologue, si une bonne partie des soi-disant traces glaciaures, aujourd'hui considérées comme classiques, ne passe- ront pas plus tard, à travers le crible de notions et discussions ultérieures, au rang de simples incidents de la vie et du labeur des cours d’eau ? ». M. Jean Brunhes, qui a publié tant d'observations originales sur le travail des eaux courantes et la tac- tique des tourbillons, a été naturellement amené à se demander quelle part revient dans l'érosion glaciaire à l'action du torrent sous-glaciaire. Dans deux Notes s pré- sentées à l’Académie des Sciences*, M. Brunhes a in- sisté sur plusieurs contradictions que présente. le sur- creusement par les glaciers. C'est ainsi qu'on attribue, dans l’ensemble, aux vallées glaciaires, une forme en U, et aux vallées torrentielles, une forme en V. Remar- quons d'abord, avec M. Kilian, que cette forme dépend surtout de la nature de la roche entamée par le cours d'eau. Mais, à côté de cela, il faut également recon- naître que la forme en U est aussi celle des vallées jeunes, en particulier de celles dites cañnons. La forme en V n'apparait que plus tard par l’aplanissement des versants, à mesure que l'érosion poursuit son œuvre. Nous avons pu voir, sur des reliefs authentiques, moulés par M. Jean Brunhes, que le chenal du petit ruisselet forme une série de paliers, comportant une représentalion topographique à courbes fermées, ana- logue à ceile d'un «trog » glaciaire. Enfin, lesanciennes vallées glaciaires des Alpes renferment un certain nombre de bosses et de barres, dont quelques-unes sont bien formées d'éboulements post-glaciaires (col- lines de Sion), tandis que d'autres ont une origine certainement préglaciaire (barres de Saint-Maurice, du Kirchet)#, Celles-ci, de nature calcaire, ont été à peine rabotées au passage par le glacier, qui n'a pas réussi à les surcreuser. En outre, en avant du front immédiat de beaucoup de glaciers actuels, on observe un certain nombre de bosses arrondies, d'étendue variable, mais d'aspect semblable. Si l'on remarque, en outre, que les eaux torrentielles sous-glaciaires ont réussi à creuser non seulement des marmites, mais encore de véritables gorges (glacier inférieur de Grin- delwald), que ces eaux circulent ordinairement dans deux sillons latéraux pour se rejoindre en avant du front du glacier, on peut concevoir, avec M. Jean Brunhes, l'érosion glaciaire de la manière suivante : « Dans le cas général et normal, l’eau, sous le glacier, menant l'attaque, creuse les sillons entre lesquels subsiste une sorte d'échine longitudinale, plus ou moins continue, tandis que de part et d'autre du lit glaciaire se dressent deux grandes parois latérales qui sont tout naturellement raides et parfois verticales comme celles d’un canon. La glace, à son tour, inter- 4S, Meunier : Etude géologique sur le terrain à galets striés des Préalpes vaudoises. Revue générale des Sciences, 1902, p. 300-308. 2 La Nature, 16 juillet 1904. 3 Sur les contradictions de l'érosion glaciaire (28 mai 1906). — Sur une explication nouvelle du surcreusement glaciaire | (5 juin 1906). # Sur ces deux barres, cf. Maure Luceox : Sur la fré- quence dans les Alpes de gorges épigénétiques et sur l'exis tence de barres calcaires dans quelques vallées suisses Lausanne, Corbaz, 1901 ;: et, en outre, sur la barre du Kir- chet : L. ne LacGer : Etude de morphologie glaciaire. Le Hasli im Grund. Annales de Géographie, 15 juillet 1903. 431 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE vient incessamment pour profiter du travail ainsi pré- paré et pour le modifier dans une très réelle mesure ; elle arrondit et polit les sillons, les saillies, les parois; elle rabote et elle déblaie; par la pression de sa masse en mouvement, elle faconne surtout le dos central isolé et tomme « miné » sur ses deux flancs; elle le débite par morceaux et souvent parvient à l'emporter tout entier, sauf précisément aux lieux et places où subsistent les « témoins » révélateurs, bosses, buttes ou barres. » Cette interprétation, qui considère l’éro- sion glaciaire comme un simple cas spécial de l'érosion torrentielle, confirme parfaitement les observations personnelles que nous avons faites, depuis plusieurs années, auprès de quelques-uns des principaux gla- ciers des Alpes suisses !. Pierre Clerget, Professewr à l'École supérieure de Commerce de Lyon. $ 8. — Géographie et Colonisation La «Revue du Monde musulman ».— Jusqu'à présent lesétudes orientalistesont été plutôtthéoriques et traitaient de l'histoire, de la philologie, de l'histoire religieuse... dans le passé. Les Orientaux eux-mêmes reconnaissent les services que leur. ont rendus nos _orientalistes pour la préservation de leur histoire, de leur langue et de leur littérature. Aujourd'hui, ce n’est plus le passé seul qui nous in- téresse : le mouvement actuel du monde musulman attire de plus en plus notre attention. Cette orientation nouvelle était tout particulièrement nécessaire : pour faire face aux besoins de notre époque, aux relations qui se sont établies entre l'Orient et l'Occident, il faut diriger les études orientales vers un but plus pratique. C'est la tâche qu'a entreprise la /evue du Monde musulman, dont les premiers numéros viennent de paraître, sous la direction de notre éminent collabo- rateur M. Alfred Le Chatelier, professeur au Collège de France. Les sujets qu'elle traite sont de nature à intéresser tous les lecteurs en général et à montrer sous leur véritable jour le mouvement, la vie du monde musulman. Si l’on songe à l'ignorance des Européens en ce qui concerne l'Orient islamique, on ne saurait assez ap- précier les services qu'est appelée à rendre la ZÆevue du Monde musulman. Les événements qui se passent en Orient et en Afrique devraient nous être familiers à tous. Ils montrent l'intérêt qu'offre la nouvelle publi- cation, principalement pour nos hommes politiques. $ 9. — Enseignement et Sociétés L'enseignement médical des hôpitaux. — Sur l'initiative de M. Lucas-Championnière et de MM. Babinski, Variot, Hirtz, Darier, Bazy, Sergent, etc., il vient de se constituer une Association d'enseigne- ment médical des hôpitaux de Paris. M. Souques a été nommé secrétaire général, et M. Labbé secrétaire géné- ral adjoint. Plus de quarante médecins et chirurgiens des hôpitaux ont adhéré aux statuts de l'Association. Ce nouvel enseignement se donnera surtout dans les hôpitaux, mais il y aura un local central où les jeunes médecins et chirurgiens des hôpitaux viendront faire des cours et conférences. En outre, cette Association se propose de s'adjoindre au besoin des personnalités médicales ou scientifiques extra-hospitalières qui viendraient faire des conférences dans le local central. Cet enseignement n’a d'autre but que de compléter l'enseignement officiel de la Faculté de Paris. Le concours de FEcole Normale Supérieure et des Bourses de Licence. — Dans une des der- 1 Comme étude générale sur les glaciers suisses, cf. l'ar- ticle Suisse, du D'-lionnaire géographique de la Suisse. Cet ouvrage, extrèmement riche comme documentation, est publié sous la direction de M. Charles Knapp, professeur à l'Académie de Neuchätel, nières séances du Conseil de l'Université de Paris, M. Liard a rendu compte des résullats des concours communs institués, l'an dernier, pour l'admission à l'Ecole Normale Supérieure et pour l'obtention des bourses de licence près les Facultés des départements. Les jurys de ces concours étaient composés de profes- seurs de l'Université de Paris et de professeurs des Univertés des départements. Ù Pour la Section des Lettres, 158 candidats; 64 ont été. inscrits sur la liste d'admission; 35 ont été nommés à l'Ecole Normale ; 27 ont accepté des bourses dans les. départements. : Pour la Section des Sciences, 263 candidats; 400 ont été inscrits sur la liste d'admission ; 22 ont été nommés à l'Ecole Normale; mais, tandis que les années précé- dentes, pour atteindre un chiffre moins élevé, il fallait, par suite des options pour l'Ecole Polytechnique, des- cendre jusqu'au 50° de la liste, cette année, parmi les 22 premiers, 3 seulement ont opté pour l'Ecole Poly- technique, de sorte que le contingent de l'Ecole Nor- male à été atteint sans descendre au delà du 25°. Sur les autres, dont le rang ne permettait pas la nomination à l'Ecole Normale, 38 ont opté pour l'Ecole Polytechnique, et 24 ont accepté des bourses dans les Universités des départements. Dans les deux concours des Lettres et des Sciences, au témoignage des membres du Jury, les résultats ont été très supérieurs à ceux que donnaient les anciens cou régionaux pour l'attribution des bourses de icence. Association italienne pour lavancement des Seiences.— Une Association pour l'avancement des Sciences vient de se fonder en Italie, et sa première réunion aura lieu au mois de septembre prochain à Parme. La nouvelle Association se propose d'imiter les Associations similaires florissantes en Angleterre, en France, en Amérique, dans un but de propagande scientifique, en rendant l'Association accessible à tous ceux qui s'intéressent à la Science et à ses applica- tions. En réalité, ce n'est pas une Association nouvelle qui surgit, mais la continuation, après une longue suspen-! sion, de la Société des Savants italiens, qui tint son premier Congrès à Pise en 1839, et qui continua ses réunions jusqu'à l’année 1850. Dans un récent article ‘, notre collaborateur M. Man- cini à fait l'histoire de cette Société et de ses travaux; il montre que l’ancienne Association, ayant en appa- rence un caractère scientifique, servait admirablement à un but politique, favorisant les communications et: les accords des patriotes italiens. Ces réunions éveil- lèrent les soupcons des gouvernements; et, en effet,” dans les Congrès, après leur début, la liberté de lan- gage et d'opinions devint toujours plus marquée. Ce caractère politique, qui prédominait dans l'Association, | en fit délaisser les travaux et amena sa disparition ! lorsque l'Italie eut reconquis son unité et sa liberté. Maintenant, après une longue période de travail dans les Académies, Ecoles, et Laboratoires, l'Italie, a pris place parmi les nations qui contribuent effi- cacement au progrès scientilique. Des sävants dis- tingués comme MM. Artini, Blaserna, Bignami, Car-” dani, Bodio, Celoria, Fano, Fo, Golgi, Jona, Luzzatti, Marchiafava, Monticelli, Pantaleoni, Issel, Millosevich, Paternd, Pirotta, Sella, Volterra, Pesci, Pigorini, Ro- miti, Stringher, se sont mis à la tète du Comité de préparation de l'Association nouvelle, et consacrent leurs efforts et leur autorité au succès de cette der-! nière, dont les statuts et les règlements seront fixés à . Parme. Nul doute que cette noble initiative ne soit accueillie avec grande faveur non seulement en Italie. (où l'Association compte déjà de nombreux adhérents}, mais dans tous les pays qui se rallient à l’œuvre com mune du progrès des sciences. 4 Nuova Antologia du 15 avril 1907. JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE ET LA POLITIQUE ETHNOGRAPHIQUE DE L'ADMINISTRATION BRITANNIQUE Parmi les États de l'Inde, il est instructif d'élu- dier, ne fût-ce que sommairement, les Élats et tribus qui relèvent de la Birmanie. Notre Indo- Chine, dans la partie que nous appelons Laos, en a qui leur sont comparables. Et ce qu'ont fait les Anglais, nous en pouvons tirer quelque ensei- gnement profitable. Ces tribus et États forment quatre groupes prin- cipaux, qui habitent surtout la Haute-Birmanie. Ce sort, en partant du Sud-Ouest, remontant au Nord, puis redescendant vers l'Est elle Sud-Est: les (‘hins, les Xachins, les Shans et les Karennis. I. — KaREnNiS, CHis, KACHINS, SHANS. Les Karennis se lrouvent, au Sud-Est, sur la Salween, entre 18 et 20 degrés de latitude Nord, à cheval sur ses rives, comme les États Shans, mais plutôt sur la rive droite. On en rencontre quelques- uns beaucoup plus au Sud, mais dans le bassin de l'Iraouaddy, à travers les districts de Bassein et de Thong-wa, et convertis au christianisme el pro- babiement transplantés. Les Karennis forment cinq États distincts. Les Chins se rencontrent surtout à l'ouest de la Birmanie, dans la partie qui la soude à l’Inde Orien- tale, àl’Assam, entre 21°45 et 24 degrés de latilude Nord et 93°20 et 945 de longitude orientale (Green- wich). Le territoire qu'ils occupent, entre les monts d'Arakan et le bassin de la rivière Chindwin, forme un parallélogramme d'environ 250 milles de longueur et 100 à 150 milles de largeur (peut-être 48.000 kilomètres carrés). Ce n’est pas un plateau ; c'est un terrain fortement plissé, une série de chaines plus ou moins parallèles, des crêtes qui séparent de profondes vallées : les vallées du Ku-la- Lan (Koladyne), du Manipur, ele. Les Chins ne sont pas agglomérés en États. Disséminés sur un vasle territoire et émietlés en tribus (ils ne font, d'ailleurs, partie de la Birmanie que depuis peu), ils relèvent de centres adminis- tralifs : les Chin Hills proprement dits, près des Lushai Hills et de Manipur, ou Chin Hills du Nord, sont administrés par un Political Officer, dont la résidence est à Falan; au-dessous d’eux, les Chin Hills de la frontière, sur le cours supérieur de la Chindwin, par le Deputy Commissioner de la Haute Chindwin (Fort White); plus au Sud, les Pakoku Chin Hills relèvent de la division de Nimbu ; enfin, ceux de l’Arakan Hill relèvent du Commis- sioner de la division d'Arakan. Les Xachins sont surtout dans le bassin de l'Ira- ouaddy, à cheval sur les deux rives, entre 23°30 et 26°30 degrés de latitude Nord, et 96 et 98 degrés de longitude orientale. Ils sont massés surtout dans les districts de Myitkyina (prononcez Mitchina) et de Bhamo; mais on les rencontre éparpillés bien ailleurs : dans le district de Katha, dans l'État de Momeit (Mong-Mit), dans les États Shans du Nord, notamment dans celui de North-Hsenwi, qui se trouve sous le tropique du Cancer. Leur territoire a une superficie d'environ 19.000 milles carrés (50.000 kilomètres carrés). C'est une série de chaines de montagnes séparées par des vallées qui toutes courent vers l'Iraouaddy. Les Shans occupent l'est de la Birmanie. Ils forment plusieurs groupes : l’un, États Shans du Sud, àcheval sur la Salween, a pour capitale admi nistrative Taunggyi (21° latitude Nord, 97% longi- tude orientale); l'autre, entre l'Iraouaddy et la Sal- ween, depuis le 24° de latitude Nord jusqu'au 20°, forme ce qu’on appelle les États Shans du Nord, dont la capitale administrative (mot fort ambitieux) est Lashio (23° lalitude Nord et 98° longitude orien- tale). Rien de pittoresque comme le chemin qui va de Mandalay à Lashio le long de la rivière Man- San, Lantôt lac sans ride, tantôt rapide courant que coupent vingt chutes d'eau, dont une à sept étages, et que surmontent, cà et là, des rochers entassés, semblables aux vieux burgs du Rhin. La Salween, elle, est d'une beauté sauvage. Très longue, plus longue probablement que lIraouaddy, elle prend sa source très au Nord, en un point inconnu, dans la région qui donne également naissance à l'Iraouaddy, au Yang-Tse et au Brahmapoutra. Elle est en même Lemps très étroite (son bassin n'a pas ? degrés jusqu’à son entrée en Basse-Birmanie), et traverse une vallée profonde, que surplombent des monts de 1.000 et 2.000 mètres. Elle pénètre en territoire britannique dans l'État Shan de North- Hsenwi (Hsenwi du Nord) et coule à travers les États Shans du Nord au Sud. Entre l'Iraouaddy et la Salween, le plateau shan a une hauteur moyenne de 600 à 1.000 mètres. Ailleurs s'élèvent des masses montagneuses considérables. A l'Ouest de la Salween, le Loi-Ling, le plus élevé sur cette rive, a 2.900 mètres. Dans l'État de Hsenwi du Nord, plusieurs pics dépassent 2.300 mètres. Les chaines parallèles ont de 1.300 à 1.700 mètres de 436 hauteur. L'ensemble des États Shans, Nord et Sud, forme une superficie d'environ 40.000 milles carrés, soit 104.000 kilomètres carrés. Shans est le nom général que la géographie a cru devoir donner à ces peuples. Mais eux s'en donnent vingt autres: Tai, Hlai, Pai-i, Moi, Muong, Tho, Do, Khamti, elc., sous lesquels on les retrouve dans les parties voisines de l'Indo-Chine, sou- mises à d’autres dominations. Ils ont d'ailleurs cinq ou six écritures et alphabets différents, étrangers, au moins par quelques côtés, à tous les peuples qui les entourent, énigme de la science ethnographique et de la géographie. Autant qu'on peut savoir, ils semblent être tous originaires de la Chine du Sud-Ouest. Leur type chinois fort marqué (plus accusé d’ailleurs chez les Shans qui relèvent de l'Empire du Milieu) atteste une origine commune. Mais la configuration même | du territoire qu'ils occupent a dû les pousser à se diviser jusqu'à l’'émiettement et spontanément les différencier peu à peu. L’attraction exercée par les pays voisins aura fait le reste. Le climat du plateau shan est très variable. De décembre à mars, il y fait froid partout. Le ther- momètre descend parfois à 10° Fahrenheit. Pendant la saison opposée, il monte, à l'ombre, à 80, 90 et 100°. Les pluies commencent à la fin d'avril, au début de mai, et durent, avec des intervalles, jus- qu'en août. Leur hauteur moyenne est de 60 pouces dans les vallées les plus larges (1,50), de 100 pouces (2,50) sur les montagnes les plus hautes. Getle chaleur et cette humidité semblent être un obstacle aux projets de quelques personnes qui, sans auto- rité d'ailleurs, ont lancé l’idée de réserver la Haute- Birmanie et les États Shans à l'émigration euro- péenne. Il se peut que des Sikhs du Punjab, des Musulmans de la frontière Nord et de l'Est, sau- raient s’y acclimater et y coloniser. Des Européens, il est permis d'en douter. II. — LEs KACHINS ET LA POLITIQUE LE LONG DE LA FRONTIÈRE CHINOISE. Les Kachins ne sont pas des populations agglo- mérées sur de vastes territoires d'un seul tenant. Ils habitent les montagnes, dans divers districts dont ce sont d’autres populations qui habitent les plaines. Et cela longtemps a donné et donne encore lieu à d’étranges scènes de désordres : irruption soudaine de Kachins, pillage et vol, fuite vers la montagne avec le butin. Au point de vue adminis- tratif, ils forment plusieurs groupes. Ce sont, sans parler des États Shans du Nord : 1° les Kachins des Chin Hills; 2° les Kachins de la Division Cen- trale de la Birmanie, qui se rencontrent dans les Etats Shans de Thaungdut(orthographié quelquefois JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE Hsawngsup), de Zingalein Kamti (Sinkaling Hkamti) et de Kalè, aujourd'hui supprimé; 3° les Kachins de la Division du Nord, qui se rencontrent dans les Etats Shans de Momeit (Mongmit) et de Wuntho (aujourd'hui supprimé) et dans les districts de Katha, à l'Ouest de l'Iraouaddy, de Bhamo, à che- val sur l’Iraouaddy, et de Myitkyina. C'est à Myitkyina surtout et à Bhamo que j'ai eu occasion de les étudier. Myitkyina, qui est leur capitale administrative la plus importante, est le chef-lieu du district de ce nom (population, en 1901, 67.399; revenu 197.194 roupies, non compris le household tax des Kachins). C’est une petite ville | presque entièrement neuve, qui ne date guère que de l'occupation anglaise (1895). Elle est située, par 150 mètres d'altitude, en plaine, dans un climat char- mant, avec des saisons suffisamment marquées. Eloignée de la mer de 1.600 kilomètres, elle y est reliée par un chemin de fer et par l'Iraouaddy. Toutefois l'Iraouaddy, navigable pour des steamers de fort tonnage jusqu'à Bhamo, ne l’est plus au- dessus que pour de simples chaloupes à vapeur. Son cours est alors resserré et, à travers des défñlés imposants, torrentueux en tout temps, il devient, lors des crues dues à la fonte des neiges, qui lui font des eaux glaciales, terrible et magnifique. A cette place, il roule de l'or; à quelques milles au- dessus de Myitkyina, une société lave le sable au moyen de dragues et fait de bonnes affaires. Une autre capitale administrative des Kachins est Bhamo, chef-lieu du district de ce nom. Ce district comprend 4.186 milles carrés (le mille carré égale 2,6 kilomètres carrés); sa population (en 1901) est de 79.515 habilants, son revenu de 158.231 roupies (à l'exclusion des Forêts et des Postes et Télégraphes). Bhamo, ville située sur l’Iraouaddy, centre d'une assez forte agglomération chinoise, fut, dès après la prise de Mandalay, con- voitée par les Anglais et leur fut un temps disputée par la Chine, qui y prétendait un droit de propriété. En dépit de ces prétentions, les Anglais s’en empa- rèrent et, malgré des protestations un moment sou- tenues par les armes, la gardèrent. Comme je n'aurai plus guère à revenir sur les Kachins, je veux donner ici quelques détails sur la manière dont les Anglais ont compris leurs rapports avec eux. Le district de Bhamo a à sa têle un fonctionnaire anglais, du rang de Deputy Commissioner. Celui que j'y ai connu avait fait son apprentissage pen- dant plusieurs années dans les Etats Shans. Comme Bhamo est sur la frontière de Chine et que les Kachins se trouvent, dans les montagnes, mi-partie en Chine et mi-partie en Birmanie, on a exigé de ce fonctionnaire qu'il allât en Chine, y séjournât deux ans et apprit suffisamment de chinois pour le fra Macé JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE 437 parler et, à larigueur,lelire et l'écrire ou, plus exac- tement, contrôler le lettré qui lira ou écrira pour lui. Le district est partagé en trois subdivisions : une d'elles est celle des Kachins. A la tête des deux autres subdivisions, peuplées surtout de Birmans et de Chinois, sont des fonctionnaires birmans, élevés dans les écoles anglaises, que contrôle d'ail- leurs le Deputy Commissioner anglais. À la têle de celle des Kachins est un Anglais. C'est là une des règles de l'administration appliquée aux pays où l’on rencontre plusieurs races concurrentes. On n'y donne jamais autorité sur les diverses tribus indi- gènes à un fonctionnaire de la race autrefois domi- nante, toujours à un Anglais. Dans un des Etats Shans du Nord, — nous le verrons plus loin, — se rencontre une abondante population Kachin : ils y sont soumis, non à un fonctionnaire Shan, mais à un Anglais. Autre dérogation. Par toute la Birmanie, le Com- missaire (Commissioner), dans les divers districts de sa division, remplit les fonctions de juge cri- minel. Ici, spécialement pour les Kachins, c'est le Deputy Commissioner. La raison en est que le Commissaire ne sait rien des Kachins; le Deputy Commissioner connaît à fond la langue et les mœurs. ll en est de même pourle Jeputy Com- missioner de Katha. Et la même règle s'applique aux fonclionnaires des autres services : forêts, tra- vaux publics (notamment à Myitkyina), etc. C'est que les Kachins ont des mœurs bizarres, qui parfois étonnent et effraient. On les rencontre qui traversent la ville, à la file indienne, sans dire mot. Et l’on a bientôt fait de prononcer : « ce sont des brutes ». Celui qui les à fréquentés en juge mieux. Il sait que celte allure dans les villes est la conséquence d’une longue habitude prise ailleurs. Dans leurs montagnes, par ces sentiers étroits, ils sont forcés de marcher l’un derrière l’autre, et de prendre garde à tant de choses qui les menacent : les lianes, les épines, les fauves, les hommes. Et, ayant à veiller pour leur vie, ils restent muets. On sait aussi que, de temps à autre, ils expulsent de leurs villages les individus dangereux ou indis- ciplinés, les cervaux brûlés, etc. (bad characters). Les anciens, les plus sages ou les plus forls, s'en- tendent pour les chasser de la communauté. Et l'ignorant aussitôt de crier : cruels barbares. Point. Ils savent que chez eux d'un mot peut jaillir une querelle. Des injures s'échangent; une têle vole et voilà des vendettas (feuds) qui mettent aux prises des familles et des villages. Mieux vaut prendre les devants, expulser un mauvais sujet et sauver toute une populalions Pour ces raisons, à cause de leur étrangeté même, on met à leur tête des fonctionnaires à ce préparés, qui les comprennent el les apprécient. L'unité administrative chez les Kachins est le Hill tract. Un village, même un hameau, peut être | 4 » . . . “ ns . déclaré Aill tract et, par suite, soumis à la législa- tion spéciale qui a été faite pour les Kachins. C'est le Deputy Commissioner qui les déclare tels, sui- vant les besoins du service. Son autorité s'étend jusqu'à la frontière. En maint endroit, cette frontière est incertaine. Cela donne lieu à des difficultés qu'on ne résout qu'à force de tact et de décision. Cette frontière, qu'on ne l'ima- gine pas comparable à la frontière franco-allemande, par exemple. Pas de nationalité distincte qui cesse brusquementen un point; mais une foule de petites organisations indépendantes, sans lien entre elles, qui débordent tantôt d'un côté de la frontière et tantôt de l’autre. Le rôle du fonctionnaire anglais a été de les amener peu à peu à se reconnaitre sujets tributaires. Cela importait à divers points de vue : d’abord fermer un asile commode, durant les pre- mières années de l'occupation, aux rebelles et aux ennemis de l'ordre; plus tard, aux contreban- diers (opium, armes, spiritueux); ensuite faci- liter le commerce de Birmanie au Yunnan, dont les routes principales passent par les montagnes des Kachins, qui en profitent pour lever des droits de passage (/o/1s) indûs sur les caravanes. Les Anglais ont imaginé, sur cette frontière de Chine, dans le but de régler les affaires, de recourir à des conférences. Ces conférences, il en est de deux sortes. Parfois, ce sont les fonctionnaires anglais des États Shans et des districts de Bhamo et de Myitkyina qui, chaque année, sur un point voisin de la frontière, se joignent aux consuls britanniques de ces provinces chinoises pour, avec eux, examiner la situalion telle que l'ont faite les derniers événements. Tantôt ce sont sim- plement les fonctionnaires (anglais) de district qui se réunissent aux fonctionnaires chinois voisins, sortes de « gardiens de la marche », afin d'arriver, d'un commun accord, au règlement des affaires pendantes. C'est à la suite d'arrangements de ce genre que l’on à pu, sans avoir à négocier d’abord à Pékin, prolonger en territoire chinois la route militaire de Bhamo jusqu'à la plaine de Banwaing, et que l’on va, d'ici à peu, ouvrir un tramway à vapeur. Il n'y a là rien encore qui soit une concur- rence au chemin de fer du Tonkin au Yunnan. Mais la méthode est ingénieuse et valait la peine d’être signalée. III. — Lus Érars Snaxs. $ 1. — Leur situation en face de la Birmanie. J'ai dit quelle énigme scientifique demeure l'his- toire de ces populations shanes. Il semble qu'elles aient eu un grand passé, dont, cà et là, apparais- JOSEPH CHAILLEY -— LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE sent encore des restes imposants : fossés, remparts de 10 à 20 pieds de hauteur, derrière lesquels rien que des débris informes. Quoi qu’il en soit, les États shans sont aujourd'hui soumis au protec- torat des Anglais, héritiers des droits des Birmans, avec lesquels ils élaient entrés en rapport dès le xvu° siècle. Presque tous les Shans sur lesquels porte ce protectorat furent, avec le temps, plus ou moins birmanisés. Ceux qui semblent l'avoir été le plus furent ceux de Bhamo (qui le furent extrème- ment et ceux de l'Ouest et du Nord-Ouest. A la fin du règne du roi Thibau, il y avait une soixantaine d'États, tous indépendants les uns des autres, grands ou petits, dont les chefs étaient appelés, suivant leur importance, Sawbwa, Myosa, Ngwekunhmu. En principe, ils devaient payer tribut. Ceux qui étaient proches de la Birmanie des plaines, où la puissance birmane se faisait sentir, s’y soumetlaient régulièrement; les'autres, ceux au delà de la Salween (à plus forte raison, du Mékong), de façon intermittente, suivant les circonstances. Le total de ces divers tributs s'élevait nominale- ment, sous Thibau, à environ 50.000 livres sterling (750.000 francs), à quoi il faut ajouter 20.000 livres sterling (500.000 francs) d'impôts sur la production et le commerce du pickled tea, sorte de condiment fort apprécié. $ 2. — L'Intrusion anglaise. Au lendemain d'une conquête (1885) qui rendait vaines à jamais toutes les combinaisons par les- quelles une politique étourdie avait un instant paru menacer les ambitions britanniques en Birmanie, les Anglais, qui ne se hâtent jamais d'occuper effective- ment les territoires dont ils ont lieu de croire qu'ils ne peuvent plus leur échapper, auraient probable- ment laissé passer du temps avant d'aller promener leur drapeau le long de la Salween, s'ils n'y avaient été prématurément provoqués. Vers 1885, toule cette région était extrêmement troublée. Nombre de chefs shans : ceux de Moné, de Yatsauk, Maingpun, Mankme, et beaucoup d’autres de moindre impor- tance, s'élaient rassemblés au delà de la Salween, dans l'État de Kentung, et là, sous la direction du prince héritier birman, Limpin (fils de l'héritier apparent, assassiné vingt ans plus tôt, en 1866, par le prince Myingun, lequel a joué un rôle jusque dans l'histoire coloniale de la France), avaient formé une confédération, dont le but était de ren- verser le roi Thibau. À ce moment précis, les Anglais entrèrent en Birmanie. Grande surprise pour des barbares qui ne suivaient que de loin la politique du Gouvernement de l'Inde. Le roi Thibau baltu et exilé, il semblait que la confédéralion eût dû se dissoudre. Mais les chefs entendaient d’abord se venger de quelques-uns d'entre eux qui avaient { . refusé d'entrer dans leurs projets : ceux de Hsipaw et de Nyaunggwé. Ceux-ci aussitôt réclamèrent la protection des Anglais. Dès le mois de février 1887, les Anglais marchèrent à leur secours. En mai, la confédération fut brisée el le prince Limpin exilé à Calcutta. Bientôt, au centre des « États Shans, sur le bord du lac Inlé, fut élevé un fort (Fort Stedman), origine de la ville de Taunggwi, où réside aujourd'hui le surintendant des États Shans du Sud. Ensuite les colonnes de pacification parcoururentle pays, et recurent la soumission des Sawbwas. Ceux qui se montrèrent loyaux furent confirmés dans leurs droits actuels, même les usurpateurs (comme Saw-On, usurpateur de l'État de Myaunggwé), sauf à reconnaitre les droits éven- tuels du prince légitime. Vers 1889, les‘ États | Shans du sud purent être considérés comme soumis (Durbars de Moné et de Fort Stedman). Ceux qu'on appela ensuite États Shans du Nord ne furent occupés qu'un peu plus tard. Vers 1893-1894, on commenca à les délimiter d'avec la Birmanie. Et ce n'est guère que vers 1895 qu'on songea à organiser leur administration. ; $S3.— Division des États Shans en quatre groupes. Les États Shans forment aujourd'hui quatre groupes : ceux du Sud et du Nord, dont il a déjà été question, et ceux et qui relèvent dela Division* du Nord et de la Division centrale de Birmanie. Les Élats du Sud sont au nombre de 48, y com- pris les 3 États Karennis cités plus haut. Ils for- ment 5 blocs distincts : 4 en decà, 1 au delà de la Salween, tous placés sous l'autorité d’un surinten- dant. Les États Shans du Sud sont en général plus avancés que ceux du Nord : plus riches, mieux outillés et plus aptes à supporter le contact et à recevoir l'empreinte de l'Administration anglo- birmane. Tous n'ont pas, loin de là, la même importance, à n'en juger que par le tribut que chacun d'eux paie au Gouvernement local (c'esl-à- dire à la province de Birmanie) et qui varie de 40.000 à 2 ou 3.000 roupies. Les Etats qui dépendent de la Division nord de la Birmanie (il y en a deux) ne sont, à vrai dire, shans que de nom. La population comprend à peine 20 °/, de race shane. Le chef (Sawbwa) n'a pas d'autorité. Il est placé sous le contrôle étroit du Deputy Commissioner du « District des Mines de Rubis », partie de la Division du Nord. Ceux de la Division centrale (il y en a trois) avaient à leur tête, au temps des Birmans, tantôt un fonctionnaire birman, tantôt un Sawhwa shan. Depuis les Anglais, tous ont un Sawhwa. Is varient 1 On appelle, en style administratif, Division la réunion de plusieurs districts. La Haute-Birmanie en forme trois. JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE 45 singulièrement en richesse, depuis l’état de Kalé, qui paie un tribut de 19.000 roupies par an, jusqu'à celui de Zingalein-Kamti, qui n'en paie que 50. 5 ; P Enfin, les Etats Shans du Nord, que j'ai réservés pour la fin, parce que ceux-là je les ai visilés, el que je les puis prendre comme exemples, sont au nombre de cinq (sans compter les Wa-States, qu'on n'occupe pas et dont on sait peu de chose) : Hsipaw, Tawngpieng, Hsen-wi du Nord, Hsen-wi du Sud, Manglun. $ 4. — Les cinq États Shans du Nord. L'Etat de Hsipaw a une superficie d'environ 5.000 milles carrés (1 mille carré égale 2 kil. 6) et une population (1901) de 103.870 habitants. Son budget a été prévu en recettes : année 1901-1902, à 348.000 roupies; année 1902-1903, à 354.000; année 4904-1905, à 482.198. Il comporte toujours des non-valeurs de 5 à 10 °/,;. Les dépenses se sont élevées, en 1901-1902, à 330.000 roupies et, en 4902-1903, à 325.500, dont 40.000 roupies pour frais des funérailles du précédent Sawhwa. Ce Sawbwa, Kun-saing, s'était, en 1884, enfui de ses Etats, par crainte du roi de Birmanié, et était allé vivre à Rangoon. Mais il y avait transporté ses habitudes de chef barbare et omnipolent : dans un accès de colère, il tua deux hommes. Condamné à mort par la justice anglo-indienne, il vit le pouvoir politique commuer sa peine en deux années de prison et peu après le gracier (sir Ch. Crosthwaite). A la chute du roi Thibau, il rentra dans ses Etats. Dès 1897 (27 janvier), le premier des chefs shans, il se rendait à Mandalay el faisait sa soumission aux Anglais. Cela lui valut la remise de dix années de tribut et l'extension de son pouvoir sur de pettis Etats voisins qui lui furent subordonnés. Par curiosité d'esprit ou habileté de courtisan, il visila l'Angleterre à deux reprises, en 1893 et en 1898, et y fit élever son fils. Celui-ci a aujourd’hui trente ans. Joli homme, et qui a eu le tact de garder le costume national, il laisse administrer ses Etatspar de bons fonctionnaires que la Birmanie lui prête. Il est passionné d'arboriculture, et tire vanilé et quelque revenu de ses beaux vergers d'orangers. Il est franc-macon et assiste aux tenues. Mais le Gouvernement le dissuade d'aller à Rangoon, où il ferait des dettes. Il en fait tout de mème. Son père avait trois femmes; lui en a seize, et sa liste civile n'est pas même celle qu'avait son père : 60.000 rou- pies. De temps à autre, on le morigène et on arrange ses finances particulières. Alors libre d'in- quiétude, il recommence à s'endetter. Le Hsen-wi du Nord est, à plusieurs égards, un spécimen digne d'attention. À cheval sur la Sal- ween, il renferme des races en lutte : les Shans et les Kachins ; et il a à sa tête — fait qui n’est pas non plus rare dans l'Inde — un chef étranger à la ace de ses sujets. De race, ilest Wa, et d'éduca- tion Shan; en même temps, il a de ses sujets qui sont Kachins. Sur ceux-ci, le Gouvernement bri- tannique lui a, après expérience, refusé autorité directe et les fait adminislrer par un de ses agents, fonctionnaire anglais. Enfin — détail qui vaut d'être noté — cet Etat n'est qu'une fraction d'un Etat, jadis plus important, qu'on appelait Hsen-wi, sans qualificatif. Quand les Anglais arrivèrent en Haute-Birmanie, ils trouvèrent que cet Etat avait deux prétendants : l'un, en possession du pouvoir, étaitun usurpateur; l’autre, que, pour des raisons politiques, le roi Thibau avait jeté et depuis long- temps gardait en prison à Mandalay, était le chef légitime. Ils leur rendirent une juslice qui rappelle Salomon : ils coupèrent l'Elat en deux ,et donnèrent le Sud au prince légitime et à l'usurpateur le Nord. Le Hsen-wi du Nord mesure 6.330 milles carrés, et renferme une population de 145.000 habitants : 115.404 sur la rive gauche de la Salween, constatés par un recensement régulier, et 3.000 environ sur la rive droite. Ce sont notamment 45.000 Kachins, des Shans un peu plus nombreux, des Chinois et des Palaungs. Les Kachins, courts, trapus, vigoureux, assez véridiques el toutefois voleurs émérites de bétailet de chevaux, sont très entêtés etlents à comprendre l'utilité de la loi ou de la discipline. Ils sont ici moins turbulents qu'en Birmanie, à Myitkyina. Ils cultivent l'opium, qu'ils vendent, et le blé. Les Chinois, émigrés du Yunnan, cullivent, eux aussi, l'opium et le blé, mais ils ne sont pas venus à Kotan pour s'y fixer lous à perpétuelle demeure. Beaucoup ne font que passer. Ils gueltent un bon coup, et s'enfuient en Chine avec leur butin. Les Shans, fixes et sédentaires, cultivent le riz, le sé- same, l’arachide, le tabac. Ni les uns ni les autres ne sont l'idéal du cultivateur ou du contribuable. Aussi l'État s'efforce d'atlirer des colons des terri- toires d'alentour et notamment de Birmanie ou des régions d'au delà &e la Salween. Illeur donne de la terre et leur fait remise d'impôt la première année. Le Sawbwa, âgé d'environ cinquanle-cinq à soixante ans, est un vigoureux gaillard. Quoique de race Wa, il a le type européen, non pas mongol. Très religieux, il a quatre femmes et beaucoup d'enfants. Un Anglais administre, en son nom, les Kachins turbulents et que révolterait l'immixlion d'un Wa. Lui-même administre les Shans. Il est entouré d'un tas d'agents, de parents, d'amis, qui lui constituent une sorte de Conseil des Anciens. Il les consulle et fait ce qu'il veut. L'administrateur anglais, même dans ces parties JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE éloignées, n'est pas livré à lui-même. Il observe des règles, qui lui ont été prescrites par le Gouver- nement local de Birmanie. S'il s'en écarte, il doit en donner les motifs. Ilestassisté d’un Shan, agent du Sawbwa, au nom de qui il lève le revenu. Il ne lui est pas toujours facile de ne point franchir la ligne de démarcation. Les populations ne sont point cantonnées par masses en des territoires dis- tincts : ici des Shans et là des Kachins. Au con- traire, elles sont très mélées; si bien que constam- ment le fonctionnaire anglais, au cours de ses tournées, passe de l’un à l’autre. Chez les Kachins, il est tout puissant : agent politique, fonctionnaire administratif, juge. Chez les Shans, il n’a d'autre rôle que de s'informer, et, s’il constate quelque irrégularité, de la signaler au Sawhwa. Le territoire se divisechezles Shans en 45 cereles, chez les Kachins en 41. A la tête du cercle est un chef que, chez les Shans, le Sawhwa nomme et, chez les Kachins, le peuple élit et que le fonction- naire anglais confirme. Les cercles shans se ressem- blent tous; ceux des Kachins peuvent être très dif- férents : l'un comprend 3 villages, l’autre 90. Les villages, à ieur tour, ont, l'un 2? maisons, et l’autre 100. Kachins et Shans paient un impôt de tant par famille : les Kachins, 2 roupies 8 (ia première fois en 1904-1905, et les Shans, 5 roupies. Le budget de l'État en 1904-1905, s'élevait à 128.171 roupies (l'année précédente à 98.829). Le Hsen-wi du Sud à une superiicie approxima- tive de 2.400 milles carrés et une population de 67.836, aujourd'hui peut-être 80.000 habitants. (Il y a eu, en 1901, un recensement régulier.) L'État, on le voit, est peu important; à cause de quoi l'agent anglais, qui le contrôle, a en même temps autorité sur l’État voisin, Manglun. La population se compose presque uniquement de Shans purs, 62.000 ou 63.000; sauf en un dis- trict, peuplé de Kachins (6.000 ou 7.000); à quoi il faut ajouter quelques Palaungs (2.000), des Chinois (1.000) et des Yang-Lams (3.000), quelques Las et quelques Muhsë} montagnards du Sud-Ouest du Yunnan. Le chef, environ cinquante ans, de bonne souche, comme on l'a vu, est paresseux. Il a une trentaine de femmes, et une garde de 100 hommes, ce qui lui donne une haute idée de sa puissance. Il gou- verne à l'aide de ministres (amats), si ce terme ambitieux est de mise : un premier ministre, qui est en même temps principal juge civil et criminel, et quelques autres : ministre du revenu, des tra- vaux publics, ministre secrétaire et ministre de la police (un des moindres), qui gagnent 50 roupies par mois (100, le premier). Au-dessous, tout autour du Sawhwa,ses parents, ses serviteurs, ses hommes de confiance. L'État se divise en 24 cercles. Chaque cercle, . d'une superficie variable (100 à 150 milles carrés), a à sa tête un fonctionnaire, qui est à la fois fonc- tionnaire administratif, percepteur (mais jusqu'ici non pas juge). Sa paye consiste en une commis- sion (10 °/;) prélevée sur l'impôt qu'il perçoit. C'est lui qui fait les rôles pour l'impôt sur les foyers (Louse-hold). 11 les communique à l'agent anglais, lequel les contrôle, s’il yalieu, accompagné d'un des hauts fonctionnaires du Sawbwa. Le con- trôle, on le conçoit, n’est pas facile. La preuve de malversätions, ce sont les contribuables qui la fournissent, en fuyant dans un État voisin. Le Hsen-wi du Sud fait un commerce assez actif avec la Birmanie, le Siam et les Elats Shans du Sud. En Birmanie, il importe, jusquà Mandalay, le fameux pickled tea; il en exporte du riz, du sel (c'est le plus fort article), du pétrole, du poisson séché, des coltonnades de Manchester, de la noix d'arech, des filés de coton, du lait condensé. Au Siam, ils exportent du pétrole et du sésame. Tout cela ne fait pas un gros total. L'État de Mang-lun à une superficie d'environ 2,500 milles carrés, 3.000 avec ses cinq États su- bordonnés, etune population peut-être de 30.000 ha- bitants (on dit même 50.000 avec les États). C'est un pays montagneux, à cheval sur la Salween. Avant la venue des Anglais, les deux provinces actuelles formaient deux Etats. Le chef de la pro- vince de l'Ouest refusa de reconnaitre l'agent poli- tique ets’enfuit chez les Was. Ce que voyant, son voisin de l'Est alla à la rencontre de ce même agent, qui le fit chef du tout. Le chef actuel, qui a plus de soixante-dix ans, est, lui aussi, un Wa (à quoi ne parviennent pas les barbares en pays civilisé?), qui, bien que con- verti au bouddhisme, est demeuré très influent sur les habitants de sa première patrie. Il parle shan comme sa mère, et le shan est la langue officielle du pays. Le Gouvernement a deux capitales : celle du Sawbwa et celle de ses ministres, à 15 kilomètres l’une de l’autre, Paris et Versailles. Les méthodes d'administration sont encore plus rudimentaires que dans les autres États Shans, et le contrôle anglais y est beaucoup moins strict. Les habitants y perdent, car le Sawbwa a parfois la main un peu rude, et le revenu de l'État n'y gagne pas: ce revenu ne dépasserait pas 10.000 roupies par an (mais c'es là un chiffre que donne le Sawhwa lui-même, qui peut-être — les Anglais le disent et s'efforcent d'en faire la preuve — l'affaiblit à plaisir). Le tribut qu'il paie au Gouvernement local n'est que de PE I SR PS CU ITR JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE 441 500 roupies. Les grandes dépenses consistent en travaux publics, principalement en routes qui ser- vent surtout aux mouvements desestroupes(!). Car il est souvent forcé de faire la guerre à des voisins belliqueux; un État Wa qui le borde au Nord et à l'Est, et les Chinois à l'Est. À cet égard, on le laisse parfaitement libre, car il travaille en fait pour la domination anglaise. Et les Anglais, qui, à défaut de lui, devraient se charger de la besogne utile qu'il fait actuellement, n’ont garde ni de se substituer à lui, ni de gêner sa politique. Au con- traire, à diverses reprises, ils lui ont prêté main forte. IV. — POLITIQUE DE PACIFICATION. Toute la politique coloniale contemporaine repose sur la politique indigène; et toute la politique indi- gène d’abord $ur la politique de pacification. Comme on a commencé à pacilier, on continue à adminis- trer. Les méthodes de pacification commandent les méthodes d'administration. Les deux périodes se lient et se mêlent. Les Anglais excellent dans l’art de pacifier. Ce n'est pas, au moins, qu'ils y apportent plus de sympathie pour les peuples. Leur cœur, au con- traire, est peut-être moins engagé; mais ils ont, depuis longtemps, l'expérience de ces périodes dé- licates. Leurs fautes de jadis les ont guéris des ambitions prémalurées et des démarches impru- dentes. Ils se connaissent en courage et crient très haut leur admiration pour les héros; mais ils ré- compensent la prudence et l'ingéniosité. $S 1. — Les conditions naturelles de la pacification et les instructions données au «Political Officer ». En Birmanie, la conquête avait été facile, Trois semaines avaient suffi pour détrôner le roi Thibau. Mais trois années furent nécessaires pour réduire les dacoits. Surles frontières, dans les régions mon- tagneuses des Chins, des{Kachins, des Shans, les populations élaient sur le qui-vive; la moindre faute pouvait leur faire prendre les armes. On n évita une guerre qu à force de tact. Là où l'ennemi était en force, il fallait ne se montrer qu'avec une force supérieure. Chez les Chins, par exemple, il y avait telle tribu, les Tah- sons, qu'on supposait capable de mettre en mou- vement, avec leurs alliés, 10.000 hommes; on se présenta chez eux avec une colonne, considérable pour le pays, de 800 hommes et 4 canons. Nul n'osa bouger. Ailleurs, dans la région des Kanhaws(1891-1892), voiciles instructions prudentes, détaillées, formelles et larges qui furent données. Une colonne accom- pagnera partout le Political Oflicer. Elle devra être assez forte pour empêcher toute opposition ou briser toute résistance. Appuyé sur une telle force, sans y recourir jamais, le Political Officer devra par- courirle pays, rassemblerautantd'informations qu'il pourra, pénétrer dans les villages et expliquer aux hommes les instructions des Anglais; à savoir les lier à nous par le paiement d’un tribut, les gou- verner par l'intermédiaire de tel d’entre leurs chefs qu'auront accepté les notables et la population; confier à chaque chef ainsi choisi un territoire soigneusement délimité, en tenantcompte des droits traditionnels, et enfin lui délivrer un sanad, ou titre d’investiture, qui énonce pour l'avenir la na- ture de ses relations avec le Gouvernement local de Birmanie, c'est-à-dire ses droils et ses devoirs. Ce sanad contiendra notamment : 1° une délimi- talion du territoire du chef et de son peuple; 2° la fixation pour les cinq années suivantes du tribut à payer sur le pied de 1 roupie par foyer; 3° l'in- terdiction au chef de se livrer à des raids sur le territoire voisin; 4° l'engagement de sa part d’ex- trader les meurtriers, dacoits, rebelles, etc.; enfin, 5° une déclaration de soumission aux autorités britanniques. Quand, malgré toutes ces précautions prises, la tribu — ce qui était rare — résistait, force alors était de sévir : arrêter les chefs, confis- quer les fusils et armes diverses, saisir le bétail, parfois même brûler les maisons. Dans les Kachins Hills, près de la frontière de Chine, non loin du Fort Sadon, qu'habitent des tribus qui, pour la première fois, allaient se rencon- trer avec des Européens, les instruclions données étaient plus fermes et plus prudentes encore. Il- était enjoint au Political Officer de ne pas chercher à occuper fout le territoire sur lequel, à titre de successeurs des rois birmans, les Anglais pour- raient prétendre des droits. Il aurait à faire un choix et à se déterminer, dans ce choix, par le plus ou moins de tranquillité de chaque région. Il tra- cerait alors une ligne frontière entre les districts occupés et les districts réservés. Dans les districts occupés, on ferait de l'administration; sur les dis- tricts réservés, on se contenterait d'établir une surveillance. A tous les habitants qui viendraient se fixer en deçà de la ligne frontière, on garantirait la paix et la jouissance de leurs biens ; en revanche, ils devraient se soumettre aux lois d’impôt et de police, et notamment livrer leurs armes, payer des licences pour le nombre de fusils qu'on laisserait à chaque village, et surtout renoncer aux feuds (vendettas) traditionnelles, et attendre justice de l'intervention du Gouvernement. Ces haines de famille à famille, ou plus souvent, de tribu à tribu sont le fléau de régions. Vengeances poursuivies d'âge en âge, deltes im- payées el comptes à régler, les lancent périodi- ces JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE 112 quement les unes contre les autres. Il était enjoint | minera une soumission durable. Il y faut — au aux fonctionnaires de s'assurer par de soigneuses enquêtes s'il existait des causes de haine ou de dettes; de procéder à l'examen des comptes res- pectifs (car tout peut s'arranger avec de l'argent); de fixer les sommes à payer de part et d’autre et de surveiller l'exécution régulière et intégrale des engagements ainsi acceplés. Après quoi, tout raid, même pour cause de vengeance, serait sévèrement puni. Chez les Kachins, on se heurta à la grosse diffi- culté de l'esclavage. On se garda bien de prendre quelque décision tranchante. Les instructions de 1892-1893 sont du ton le plus mesuré. Les fonc- tionnaires recurent l’ordre d’insister, en tant que cela serait possible et politique, pour que les escela- ves pris dans les raids antérieurs fussent restitués; mais ils'ne devaient pas se mêler d'intervenir en faveur d'esclaves qui s'étaient volontairement mis en esclavage pour acquitter une dette ou qui, es- claves héréditaires, étaient bien traités par leurs maitres. Enfin, ils déclareraient aux Kachins que le Gouvernement anglais désapprouve l'esclavage et que la loi anglaise le condamne; que le Gouver- nement ne donnera donc à ce régime ni appui ni encouragement; qu'il punira les mauvais traite- ments, et que, si un esclave s'enfuit, il n'aidera pas le propriétaire à le rejoindre. A l'égard des États Shans, la conduite politique fut du même genre. Je n’ai rien à ajouter à ce que je viens de dire pour ce qui est des États Shans du Sud et du Nord. Quant à ceux qui étaient soit en- globés dans les territoires de la Haute-Birmanie, soit serrés entre la Birmanie et l’Assam, on prit les mesures variées que commandait la condition de chacun d'eux. On laissa provisoirement de côté celui de Hkamti-Long, qui depuis longtemps s'était soustrait à l'influence birmane. Celui de Mong-Mit fut placésous le contrôle d’un agentpolitique. Quant à celui de Wuntho, après une période de soumis- sion apparente, le Sawbwa s'enfuit à l'approche des Anglais; son fils, agréé par eux, l’alla bientôt, rejoindre dans la brousse et fut déposé. L'État fut alors annexé: une partie de la population fil sa soumission; et aussitôt le Gouvernement anglais inaugura son habituelle méthode de pacification, ouvrit des routes, installa des postes et télégra- phes, jalonna un chemin de fer. En 1891, l'insur- rection était domptée. Le dernier dacoit fut pris en 1896. Toutefois la pacification d'un pays n'est pas encore l’apaisement des esprits. L'apaisement est l'œuvre du temps. Les Anglais, experts en poli- tique indigène, ne s'y trompent pas. Une colonne qui traverse un État, des fonctionnaires qui circu- lent parmi les villages, ce n'est pas cela qui déter- moins provisoirement — joindre une force mili- taire à demeure. Aussi, soit sur la frontière de Chine, soit au cœur des États Shans, ont-ils élevé des forts capables de résistance (Chine : Sima ou fort Morton, Sadon ou fort Harrison; États Shans : fort Stedman), dont les communicalions avec le | reste du pays sont assurées par des routes, des | sentiers, l’héliographie, et bientôt, sur divers | points (États Shans du Sud et du Nord), des che- mins de fer; enfin, à l'intérieur de ces groupes d'États, une double police : police civile et police militaire. S2. — La police civile et la police militaire. La police civile est, en Birmanie comme dans | l'Inde, organisée de la façon la plus intéressante (non pas parfaite). Je ne puis la décrire ici. Je me bornerai à dire qu'elle ne pénètre pas parmi les tribus des montagnes. Le montagnard n'aime pas les Birmans qui la composent. Il ne l'y tolère pas. La police militaire a été très perfectionnée en Birmanie. Elle y a rendu des services, surtout durant la période de pacification, beaucoup plus que les troupes régulières. Elle-même est une armée. C'est elle qui fournit les garnisons des forts, les escortes des fonctionnaires, etc. Ses offi- ciers sont tirés des régiments réguliers de l'Inde. Ils s'engagent dans la police militaire pour une période de deux à cinq années, quelquefois renou- velable, et retournent ensuite à leur corps. Les hommes sont recrutés sur place dans le pays. Toutefois or n’y admet pas les Birmans : ce sont tous Shans ou Karennis. On s'efforce d'y intro- duire quelques hommes de chaque Etat. Ce service, | au début très impopulaire, est aujourd'hui re- cherché. Dans les États Shans du Nord, la police civile a trois stations centrales ; la police militaire en à quatre. C'est environ une force de six cents hommes. Il faut peut-être doubler ce nombre pour avoir l’eflectif total dans l'ensemble des États et tribus. Sur un territoire de 260.000 kilomètres carrés, c'est peu. Mais l'Administration y supplée par sa vigilance et ses règlements. Chez les Kachins, par exemple, le Deputy Commissioner à de grands pouvoirs. Un homme est-il suspecté de vouloir troubler la paix publique? Le Deputy Commis- sioner peut lui demander de fournir caution de sa bonne conduite pendant trois ans, el, au besoin, l'expulser. Il peut aussi rendre le village collecti- | vement responsable du désordre ou des crimes commis. Un buffle ou un cheval disparait, des villageois se rendent à une fête en armes, deux villages se font la guerre, surtout après une tenla- tive de conciliation : dans tous ces cas, le Deputy PRO NS 0 VU RL UT LS D IT a ; JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE Commissioner peut rendre le village collective- ment responsable. Même la tribu : son attitude hostile au gouvernement, sa complicité établie avec des dacoits, des attaques contre une caravane de marchands, peuvent entrainer pour elle la pri- vation de ses armes et des amendes, dont partie peut être versée aux victimes comme compensa- tion, ce qui éteint toute action judiciaire. Enfin, un dernier argument, auquel on à recours, sur- tout quand une région tout entière est incriminée, est le blocus. C’est un procédé assez familier au Gouvernement de l'Inde : ici, on l'a employé, en 1903, contre les Piya Chins, dans les montagnes d’Arakan. Au surplus, pour pacifier les esprits, on ne comp- lait pas seulement sur la force ou sur l’adminis- tration. On attendait davantage — paradoxale con- fiance — des méthodes pacifiques. J'ai déjà indiqué qu'on demandait des services économiques d’abord, politiques ensuite, aux travaux publics; je dois y ajouter l'hygiène. Nombre de maladies désolent ces populations : la fièvre, la syphilis, la lèpre, la petite vérole, le goilre et toutes sortes d’affections de la peau. Jus- qu'ici, elles ne connaissent pas les médecins et se livrent aux pires empiriques. Les Anglais ouvri- rent des dispensaires et quelques hôpitaux, parmi lesquels un hôpital ambulant, qui traite chaque année trois à quatre mille malades. Ils instituèrent des agents vaccinateurs, qui vont vacciner à domi- cile ceux-là seulement qui y consentent. Enfin ils imposent ou conseillent, suivant les cas, certaines pratiques d'hygiène, concernant l'emplacement des villages, le débroussaillement autour des postes, l'usage des latrines, ele. Je n'ai pas besoin de dire qu'on témoigne le plus grand respect envers toutes les croyances. Chaque confession célèbre ses fèles et chôme ses saints. À Lashio, je me souviens que, durant mon sé- jour, les bureaux furent fermés les jours de pleine lune, pour que les clercs bouddhistes pussent aller prier au monastère voisin. V. — LES INSTRUMENTS DE CETTE POLITIQUE. Dans un pays comme celui qui nous occupe, que la nature à fragmenté et qu'habitent tant de popu-" lations différentes et ennemies, un conquérant sans expérience eût trouvé facile et naturel de se débar- rasser de lous ces principicules impuissants et de faire passer partout le niveau de l'administration britannique. Les Anglais s'en sont bien gardés. C'eût été faire l'union de tous contre un. Ils étaient trop heureux de rencontrer des États organisés, rudiment et base des organisations futures, et 143 maintinrent en place les chefs et, parmi eux, la hiérarchie traditionnelle. S 1. — Les chefs indigènes. La seule innovation qu'ils se permirent fut, chez les Chins et les Kachins, la réduction du nombre des chefs. Ce ne sont pas là les chefs des États Shans, qui ont chacun leur État de dimensions res- pectables. Comme Chins et Kachins sont une démo- cratie, ils n'ont pas chez eux de ces personnages qui dominent sur un vaste territoire. Dans une même vallée, sur,une même seclion de frontière, on compte les chefs par dizaines. Mais ils sont héréditairement investis de grands privilèges, pro- priélaires de terres qu'on cultive pour eux, tiltu- laires d’une part dans les animaux sacrifiés. Pour ces raisons, il eût été risqué de les supprimer et incommode de les conserver tous. On imagina de faire parmi eux une sélection : ici, chez les Chins, on créa un panchayal, un Conseil supérieur des Anciens, auxquels les divers chefs de la même taille auraient à soumettre leurs différends; là, chez les Kachins, dont les chefs connaissent déjà une sorte de hiérarchie à deux degrés (dewwa, chef de village; {aunghok, chef de tract), on composa, avec six de ces derniers, dûment appointés (30 et 40 roupies par mois), une sorte de tribunal, sans pouvoirs bien arrêtés, chargé de trancher les procès et d'arranger les querelles, sous le haut contrôle du fonctionnaire anglais. Chez les Shans, on maintint l'antique hiérarchie des Sawbhwas, Myosas et Nywekunhmus, se réser- vant, à l'occasion de services rendus, de les élever de classe. Eux aussi sont des chefs héréditaires, par ordre de primogéniture, mais (quoiqu ils soient bouddhistes ou animistes), selon la règle musul- mane, le frère ainé du défunt étant préféré au fils. Peu actifs, voire paresseux, volontiers enclins à négliger les devoirs de leur charge, ils passent leur lemps parmi leurs femmes. Ce sont de pauvres défenseurs de l’ordre. Ils jouent, — ce qui est par- fois leur seule ressource, — pressurent les popula- tions et souvent sont de connivence, peut-être même de compte à demi, avec les criminels, qu'ils soustraient aux recherches de la police. Cela leur vaut des amendes, comme leur passion de jeu a été cause d'un gambling Act, loi qui interdit le jeu. D'ailleurs — on s'en doute — des ressources diminuées ne signifient pas pour eux des dépenses réduites. Tous ont des dettes, qu'ils s'efforcent de dissimuler aux Anglais. Car la sanction immédiate est l'amputation de leur liste civile. Cela ne les arrêle pas. Les créanciers pourtant savent que les dettes contractées sans l'autorisation du Gouver- nement sont nulles et qu’ils n’en pourront toucher pu EE JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE par grâce qu'une fraction dérisoire. Les prodigues trouvent toujours des prêteurs. Cette contrainte, d’ailleurs, que la règle anglaise leur impose, a sa contre-partie : des honneurs, des droits reconnus et, au besoin, appuyés, etc. De temps à autre, un J/yosa est promu Sawbwa; un Sawbwa se voit décerner le C. I. E. (le cordon de Commandeur dans l’ordre de l'Empire indien), ou l'honneur du salut de neuf coups de canon, ou encore la faveur d'accroitre (de 2 à 10) le nombre d'hommes armés qu'il peut entretenir, ou d'amé- liorer la qualité des armes : au lieu de couteaux dahs), des lances; au lieu de lances, des fusils. Comme tous les hommes, ils sont sensibles à de telles distinctions. Après cela, viennent des avantages plus subs- tantiels. Le Gouvernement, à l'ordinaire, les sou- tient contre leurs rivaux, leur permet de désigner leur successeur, leur assure de la part de leurs peuples les redevances et services traditionnels, les constitue, sous cerlaines réserves, que je dirai, juges au civil et au criminel, etc. Tout cela est contenu dans un Sanad spécial. Celui de l'Etat de Kentung (que je prends entre plusieurs autres renferme les stipulations suivantes : Fixation du chiffre du tribut que l'Etat doit payer à la Province (de Birmanie), sauf à celle-ci à lui en faire remise pour tant d'années : Interdiction d'entretenir aucun rapport avec les autres Etats, sans l'autorisation du Gouvernement ; Cession au Gouvernement de l'Inde du droit de propriété sur toutes les forêts et les mines de l'Etat ; Respect des coutumes et des droits traditionnels de la population ; Protection du commerce et entlrelien des voies de communication ; Nomination d'un délégué du chef auprès du surintendant (agent des Anglais), si celui-ci le dé- sire ; En cas de disputes avec d’autres Etats, accepta- tion de l'arbitrage du surintendant ; En cas de construction par le Gouvernement local de Birmanie d’un chemin de fer à travers l'Etat, obligation de céder les terrains nécessaires gratuitement, s'ils sont à l’Elat, moyennant indem- nité, s'ils sont à des particuliers ; Assujettissement de l'opium et des spiritueux importés de l'Etat en Birmanie à des droits égaux aux tarifs soit des douanes, soit d’excise: Extradition des criminels réfugiés dans l'Etat accordée, et assistance prêtée aux fonctionnaires qui les poursuivent; Limitation des droits de justice reconnus au chef de l'Etat, quand sonten cause des Européens, Amé- ricains ou fonctionnaires du Gouvernement. On ne prétend point que ces obligations réci- proques soient toutes respectées. Le Gouverne- ment sait à qui il a affaire et quand il convient d'insister. Ce sont là des précautions prises, dont il tire parti avec discernement. Au surplus, il s'efforce de faire avec ie temps l'éducation de ses collabo- rateurs. Les chefs titulaires, il les instruit, non par l'étude, mais par la vue des choses. Il les fait voyager par groupes, les envoie au loin par voie ferrée et a soin de ménager opportunément les arrêts et les spectacles. Le voyage s'interrompt à Mandalay et à Myingyan, où des troupes sont pas- sées en revue. Il se poursuit jusqu'à Rangoon, où ils voient la mer, un port, une marine, un com- merce. On veut qu'ils se rendent compile de la puissance britannique et de la petitesse de leur Etat, et qu'ils apprécient la civilisation matérielle de l'Europe. Ou encore on les fait assister, conduits par un cicerone habile, à quelque prodigieuse céré- monie, comme le Durbar de Delhi, en 1902, où ils virent des centaines de chefs, lous plus riches et plus puissants qu'eux, inclinés devant ce même Gouvernement auquel ils ont dû se soumettre. On ne se flatte pas qu'ils retirent d'un tel enseigne- ment toutes les leçons qu'il comporte. Souvent, on s'aperçoit que ce qui les a frappés, c'est tel détail infime ou ridicule: dans un cirque, un chien sur un éléphant, etc. Peu importe : le spectacle agit eb suggère à la longue des réflexions. Ou encore, dans leur propre région, on réunit en un durbar le plus grand nombre possible de chefs de villages et on leur explique que, tous, ils sont astreints aux mêmes demandes, comme tous ont droit aux mêmes faveurs. L'égalité dans la soumis- sion les console et les encourage. Ce n’est pas tout : après l'éducation pratique des pères, l'éducation théorique des fils. Comme pour les princes des Indes, on a créé une école de fils | de chefs. On avait songé à la placer à Rangoon, sous la tutelle de maîtres anglais :les parents sem- blèrent ne pas s'en soucier. On la mit à Taung- gyi, capitale des Etals sud. Elle a été un succès imprévu. Les élèves aiment l'école plus que la mai- son paternelle; ils demandent parfois à y rester durant les vacances. Ils étudient et profitent. On , Soigne leur corps autant que leur esprit: on les dresse aux différents sports, football, cricket, etc.; on leur enseigne le birman et l'anglais et, pour les futurs chefs, ce que doit savoir un fonctionnaire chargé de l'impôt et de la justice. L'école, créée, en 1902, pour 50 élèves, a débuté avec 14. Elle en a eu successivement, en 1903, 63: en 1905, 73. Elle a eu d'abord deux professeurs: il lui a fallu en engager d’autres, et plus de serviteurs. | Dès à présent, elle est trop petite. Elle recoit non Da i JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE 445 seulement les fils de chefs, mais ceux des fonction- naires et des Shansles plus importants. Et l'exemple a porlé : de cinq ou six côlés, on réclame, pour d’autres catégories d'enfants, une école anglo-ver- nacular, c'est-à-dire le double enseignement de la langue locale et de l'anglais, langue impériale. $S 9 S 2. — Les fonctionnaires anglais. Voilà pour les chefs indigènes. Voici pour les fonctionnaires proprement dits. Ce sont des agents politiques, des advisers (conseillers), qu'on place près des chefs (Sawhwas). En principe, ils n'admi- nistrent pas; ils donnent des conseils. Mais, comme ces conseils ne sont pas exactement suivis, ils se voient souvent forcés de prendre en main la direc- tion des affaires; ils ont soin alors de s'abriter derrière un homme du chef. Les apparences sont sauves. Ces fonctionnaires ne sont, d’ailleurs, pas nom- breux. On prétend administrer à si peu de frais qu'on lombe dans la parcimonie. Voici des années que le surintendant des États Shans (Sud) réclame un adviser près du Sawbwa de Yaunghwe, qui joue, vend la justice et pressure les populations : on le lui refuse. Les forêts, immenses, sont mal gardées. Le commerce du bois les guette et déjà y pénètre. Les tribus y pratiquent en liberté cette sorte de défrichement vagabond qu’on appelle {aunggya eul- tivalion, et qui, si boisé que soit le pays, risque d'en appauvrir à l'excès la richesse forestière : le Gouvernement local refuse des forestiers. Les tra- vaux publics en ces régions sont rudimentaires. Encore est-il probable que les adrisers manquent des connaissances praliques pour construire des ponts; cela se voit à la facililé avec laquelle les inondations les emportent. On réclame des agents des travaux publics; on n'en peut oblenir du Gou- vernement local. J'ajoute que les quelques fonctionnaires qu'on a pu lui arracher, c'est trop peu de dire qu'ils sont ambulants, — c’est leur méthode et elle est excel- lente, — ils sont vagabonds. Pour les nécessités innombrables etimprévues d’un service trop pauvre en personnel, on les déplace fréquemment et à l'improviste. Or, rien ne peut davantage répugner aux indigènes et nuire à l'administration. L'Angle- terre, l'Empire britannique, l'Inde, voire l'Empereur et le Vice-Roi, ce sont là, pour ces populations, des entilés incomprises. Ce qu'ils comprennent, ce qu'ils aiment ou redoutent, c'est tel homme dont ils connaissent le visage et l'humeur, et en qui ils incarnent le Gouvernement. Le leur changer, ne fût-ce que tous les ans, c'est mettre à rude épreuve leur fidélité et, plus encore, leur palience. En même temps c'est décupler, pour le nouveau venu, la besogne et les difficultés. Un fonctionnaire des MEVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 107. États Shans du Nord rend compte, dans un rapport public, qu'il n’a, sur des milliers de roupies, que 30 roupies d’arriéré à faire rentrer, et déclare que la levée de l'impôt lui est devenue fort aisée, depuis que les chefs de villages le connaissent : ils lui apportent spontanément leur dû. C'est le résullat heureux d’une influence personnelle née d’un long séjour. Le Gouvernement l'oublie trop. Au surplus, c'est là un reproche qui passe par-dessus le Gou- vernement de Birmanie et atteint le Gouvernement de l'Inde. Les fonctionnaires des États Shans ont des ori- gines diverses. Aucun ne provient du célèbre Civil Service. L'un apparlient au /rovincial Service (de Birmanie), en principe réservé aux indigènes, mais qu'au début, lors de l'annexion de la Haute- Birmanie, on ouvrit à quelques Européens, spécia- lement qualifiés et choisis : il y a tel poste délicat, sur la frontière, parmi les tribus combattives, qu'on ne pouvait confier à des indigènes. L'autre sort de l'Inde. Il a demandé à passer, avec sa solde, dans le Service politique et il a été admis dans la Zurma Commission. Il aime ce genre de vie. Il perle l'hindoustani, le birman, le shan, le kachin et un dialecte usité dans le district de Katha, le maru. Tous, d'où qu'ils proviennent el à quelque service qu'ils doivent ètre d'abord affectés, sont tenus, dans les trois ans de leur nomination, de passer un exa- men portant sur le droit, l'impôt, le service de trésorerie et le birman [deux examens spéciaux). S'ils y échouent, ils seront licenciés et replacés dans leur précédent emploi. Mais ils sont avertis de cette éventualité et prennent leurs mesures pour y échapper. Et le Gouvernement local, quand il est satisfait de leurs services, a intérêt à se les atta- cher et les aide, en leur assignant un poste où l'étude de telle partie du programme leur soit facilitée. Nul autre qu'un Européen ne peut être nommé adviser. Les indigènes de chaque région naturelle- ment peuvent entrer au service de leur maitre. Mais, là où les races sont mêlées, l'autorité n’est confiée qu à un Européen. Le meilleur fonctionnaire birman ne sera pas placé dans un État Shan ou dans une tribu Kachin; le meilleur fonctionnaire shan ne pourra pas, même dans l'État auquel il appartient, être mnis à la tête d'un district qu'habi- tent des Kachins. On ne veut pas donner prétexte à des luttes de nationalités. Le Birman méprise le Shan ou le Kachin comme barbare; le Kachin mal- mène le Birman comme poltron. Les fonctionnaires européens des États et des tribus de la frontière birmane ne sont pas déme- surément payés. Voici quelques chiffres pour les États Shans du Nord. Le surintendant, qui à auto- rité sur l'ensemble et réside à Lashio (État de Hsen- {AS wi du Nord), recoit 16.200 roupies (à 1,65 ou plutôt 1,85 la roupie); il a sous ses ordres, l'Assis/ant Commissioner, qui réside dans l'État de Hsipaw, à 8.400 roupies, deux Æxtra-assistant Commis- sioners, chacun à 6.000 roupies, et enfin deux Assistant political Oflicers, à 5.340 roupies. A quoi il faut ajouter quelques menus frais supplé- mentaires. Dans les tribus Kachins, proches de la frontière de Chine, qui relèvent des districts de Myitkyina et de Bhamo, l'organisation est différente. Ces districts sont à la fois pays de plaines, qu'habitent des Bir- mans, et de montagnes, qu'habitent des Kachins. A la tête de chacun d'eux est un Deputy Commis- sioner, recruté comme sont tous les autres Deputy Commissioners (l'an est membre du CivilService), mais choisi pour ces postes à cause d'aptitudes par- ticulières (connaissance des langues, des mœurs, etc.). Sous leurs ordres, pour administrer les tribus des montagnes, sont des Civil Officers. Ceux-ci non plus n'ont pas une origine spéciale. Ils pro- viennent du Provincial Service de Birmanie et ont été (comme les Deputy Commissioners) choisis, ordinairement sur leur démande, et à cause de certaines qualifications (services rendus, caractère, manières, etc.). Ils sont ägés d'environ trente ans et célibataires. S'ils venaient à se marier, il leur faudrait rentrer dans le Provincial Service. Ils gagnent 300 roupies par mois, plus 100 roupies pour parer à certaines dépenses spéciales et 10 rou- pies par jour pour frais de voyages. Ils ont comme perspective suprême le grade d'Æx/ra-assistant Commissioner, au traitement de 800 roupies par mois. Ce qui les a altirés vers ce service, c'est leur humeur, leur goût d’une vie aventureuse, et aussi les occasions de se distinguer et de mériter de l'avancement, des décorations, etc. Le premier devoir de ces fonctionnaires est d'apprendre à connaitre les populations qui leur sont confiées. Cela est d’une importance capitale. Exemple : les Kachins sont très portés à vivre en toutes petites sociétés, en clans minuscules. Ce point était, au début, ignoré. Dès qu'on le connut, on décida de dissoudre les cercles qui contenaient des Kachins de tribus différentes el d'en recons- tituer de moindres, à raison d'un cercle par groupe de la même tribu. Au contraire, les Shans et les Palaungs s'accommodent de vivre tous ensemble. On peut constiluer des villages composés des uns et des autres, sous un chef indifféremment d'une ou d’autre origine. Puis ce sont les langues : la variété des dialectes shins ou chans. Quoique de la même famille, ils sont presque incompréhensibles les uns aux autres. Le shan s'écrit en six caractères différents, et il semble que les plus éloignés s'entendent mieux JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE- IRMAN que les plus proches. Le kachin jusqu'ici ne s'écrit pas. On y a, tant bien que mal, adapté les caractères romains. Pour encourager les fonctionnaires à apprendre ces langues, on leur offre des primes : 1.000 roupies après l'examen passé, et, en outre, aux militaires, 50 roupies d'augmentalion de solde par inois. En sus de quoi vient la besogne administrative. On leur donne des instructions générales et on s'en rapporte à eux pour le détail et l'application. Un procédé administratif, usité par toute l'Inde, est ce qu'on appellele {our. Tous les fonctionnaires, grands ou petits, à quelque service qu'ils appar- tiennent : administration proprement dile, impôts, travaux publics, ete.,sont tenus de circuler à travers leur circonscription, chaque année un nombre de mois qui varie avec la saison, la durée des pluies, et l'étendue du territoire. Et ce n’est pas une série de voyages précipités, du centre à un point quelconque, pour revenir au centre, où la besogne attend et presse ; ce sont des déplacements lents et prolongés du fonctionnaire, suivi de quelques-uns de ses agents. Durant chaque tour, il est relié au centre et tout ensemble expédie la besogne cou- rante et, sur place, voit les lieux, connaît les gens, solutionne les affaires en cours, contrôle la gestion des agents locaux, et donne des directions pour l'avenir. Naturellement, ce procédé est recommandé aux Political Officers des Etats Shans. Il exige, on le conçoit, surtout dans des pays où les communica- tions sont lentes, qu'au moins un agent subordonné demeure au centre. Or, souvent le Political Officer est seul; il lui est alors impossible de profiter d'un moyen si efficace d'entrer en rapports avec la population. Il y a là un vice de méthode ou plutôt un parli pris d'économies qui serait ridicule, si ce. n'élait un système : le Gouvernement de l'Inde et même celui de Birmanie estiment que ces pays neufs peuvent attendre et qu'il importe, dans l’im- mensité de l'Empire, de distribuer les crédits là où l'emploi en sera le plus fécond. Un bon fonction- naire profite du {our pour lever la carte des régions traversées, délimiter les villages en vue de l'impôt foncier, vérifier l'élat des routes, lever le tribut promis, estampiller les fusils autorisés, contrôler la valeur des mentions inscrites sur ses registres, ete. Dans les deux districts de Bhamo et de Myitkyina, le Deputy Commissioner n'a pas à faire @e tour dans ses montagnes. Il a pour cela ses Civi/Offcers. Lui, va les visiter seulement à leur quartier général. Son rôle est de contrèler leur besogne, de vérifier leur diary chaque semaine ou chaque mois, de recevoir appel de leurs sentences ou de les vérifier ; au besoin, de les évoquer spontanément, si l'affaire. lui parait intéressante, ete. En somme, théoriquement toujours, et souvent JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE en pratique, l'administrateur anglais se tient très près des populations qu'iladministre, — voilà pour la connaissance des hommes et des choses, — et est constamment soumis au contrôle de son supérieur; — voilà pour le rappel àla discipline, à la morale, | à la civilisation. NI. — MÉTHODES ET PROCÉDÉS :; LOT ET JUSTICE. J'ai déjà dit, mais je ne saurais trop redire, que les Anglais montrent partout un extraordinaire souci de la légalité. Leurs sentences ne sont peut- être pas plus voisines de la justice idéale que les nôtres ; mais quand le juge anglais rend un juge- mentcritiquable, ce n’est pas,au moins, parce qu'on . l'avait laissé sans textes et sans directions, en plein arbitraire. Et le justiciable ne peut accuser le Gou- vernement ni de légèreté ni d’indifférence, encore moins d'injustice préconcue. Il a fait des lois et donné des juges. Nulle part ce souci n'apparait mieux que dans ces régions, on n'ose dire barbares, que sont les Etats Shans et les montagnes des Chins et des Kachins. Qui étudie leur condition politique, les premiers documents qu’il rencontre, ce sont des textes concernant la loi et la justice. $ 1. — La spécialité des lois. Le Gouvernement de l'Inde: 1° a formulé des lois précises : Xachins Regulations, Shan States Reqgu- lations, Chin Hills Regulations; 2 a institué des juges, qui ne sont sans doute pas dignes de siéger à la Cour de Cassation ou au Banc du Roi, mais qui présentent cependant de réelles garanties : tout fonctionnaire qui peut êlre, par suite des nécessités de service, exposé à siéger comme Juge, a dû passer sur place (en Birmanie) un examen sur le droit; 3° a prévu le droit d'appeler devant des juridictions suivies; 4° a réservé cerlaines affaires plus délicates à la connaissance de juges plus qualifiés. J'insiste sur le premier point, qui est digne d'’at- tention. L'idée n'est pas venue au Gouvernement de l'Inde qu'on püt appliquer à ces pays neufs la loi anglaise, ni même la loi de l'Inde, qui est pour- tant récente et faile spécialement pour l'Inde; ni méme une loi semblable à celle de l'Inde ; ni même une loi qui serait commune à tous les États Shans, tribus Chins, Kachins, etc., ou commune seule- ment à toutes les parties d’un même Etat. Non, il a cru nécessaire de faire, et il a fait des lois spéciales pour cette partie de l’Empire de l'Inde et pour les diverses parties de cette partie. Les Etats Shans (et lesautres régions montagneu- ses de la frontière) ont, aux termes d’une loi célèbre (Viet. 33, c.3), été, par une décision de 1886, déclarés 1 & ES scheduled districts et, par conséquent, échappent à l’action de toute loi qui ne leur aura pas élé spécia- lement déclarée applicable par le Gouvernement local, avec l'autorisation ou la sanction du Gouver- nement de l'Inde. On a donc, à l'usage des Etats Shans, ou bien extrait cerlains textes de la législa- lion en vigueur dans des terriloires similaires de l'Inde, ou bien fait des lois particulières. De plus, comme certaines portions de ces Elats, les capi- tales, par exemple, se trouvent, par suite de cir- constances que tout le monde devine, passablement en avance sur le reste du territoire, on leur a spécia- lement appliqué certaines lois, qui ne conviendront que beaucoup plus tard à l’ensemble de la région. Ce n'est pas tout. On eût pu croire que ce qui élait bon pour les États Shans l'était, naturelle- ment, aussi pour les Kachins. Les Kachins sont en retard sur les Shans. Ils forment donc, aux termes de Vict. 33, c. 3, un scheduled district distinct. Et quand il s'en trouve — ce qui est fréquent — égarés dans les États Shans, c'es! leur législation propre qu'on leur applique, la Xachin Hill Requ- lation, et non pas la Shan States Regulation. Au fur et à mesure que le temps amène des progrès, la première législation cède la place à d’autres, mieux appropriées aux circonstances nouvelles. Mais, comme ces populations n'ont pas nécessaire- ment marché toutes du même pas, on légifère à nouveau et à des dates distincies pour chacune d'elles, en particulier : en 1895 et en 1902 pour les Kachins; en 1896, pour les Chins; en 1889, 1890, 1901, pour les Shans, etc. Ce ne sont pas, on s'en doute, des lois compli- quées. Elles concernent d'importantes questions : l'esclavage, les crimes commis envers l'État, les délits forestiers, les preuves, les peines, la procé- dure, l'exécution des condamnations à mort et les. conditions auxquelles elle est subordonnée, etc. Tout cela est court et, autant que possible, clair. On guide le juge par la main et pas à pas. « Voici ce que c'est qu'un meurtre, et voici quels éléments il y faul rencontrer réunis : l'intention, l'intention méchante el la volonté. Quand l'un des trois élé- ments ne se rencontre pas, il n'y a pas meurtre. » Et cela était utile à dire parce que, dans la coutume locale (que modifie cette loi, de 1890), l'intention n'est pas un élément constitutif du crime de meurtre. Et ce sont des lois humaines et prudentes. Humaines, les lois pénales qui cherchent — élé- ment nouveau pour ces peuples — à proportionner les peines aux délits. Prudenles, les lois civiles, qui pour les matières délicates, dans les questions qui touchent à la religion, à la succession, au mariage, déclarent s’effacer derrière celle de la religion des parties (hindoue, bouddhiste, musul- 118 JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE mane). Elles vont même jusqu'à dessaisir les juges ordinaires, pour en saisir de plus élevés, qui pré- sentent plus de garanties; et encore leur enjoi- gnent-elles de s'entourer d’assesseurs indigènes, dont ils devront prendre l'avis, sans être toutefois tenus de le suivre. S2. — La Justice civile et la Justice criminelle. Dans toules ces régions, la population est encore sauvage. Elle a peu de scrupules sur le moyen de se procurer ce qu'elle veut : tantôt le bien d'autrui, tantôt la vie d'autrui. Les crimes y sont fréquents : contrebande, fausse monnaie, rupture et vol des fils télégraphiques, vol de bétail, meurtres, attaques à main armée, dacoitisme ou raids dans le but de piller ou de faire des esclaves, et même, bien qu'on n’en ait pas de preuves cer- taines, suppression des enfants naturels. Les crimes que la loi qualifie de violents : dacoitisme, meurtre, vol à main armée, doivent être immédiate- ment portés à la connaissance du Political Officer. Ce n'est pas qu'on redoute quoi que ce soit qui ressemble à un soulèvement. Mais les fonction- naires indigènes sont indolents, quelquefois läches devant le crime. Ils se contenteraient volontiers de fermer les yeux : le Political Officer les encourage ou les oblige à poursuivre. Dans les États Shans, la justice civile et crimi- nelle est organisée de façon rudimentaire, comme il convient, avec le minimum nécessaire et sufti- sant de garanties. Les juges sont les mêmes, dans les deux cas. Ce sont, en première instance, pour les affaires ou les crimes les plus considérables, le chef de l'État (ou plus exactement son délégué spécial, car, lui, ne siège jamais), et pour les autres ses fonctionnaires. En appel, c’est tantôt l'agent politique de l'État, tantôt son supérieur, le surin- tendant du groupe d'États. En principe, le chef de l'État a qualité pour juger ses propres sujets. Mais c'est l'agent politique qui devient compélent quand les intéressés sont des Birmans, des Indiens, des Chinois, des membres d'une tribu autre que celle du chef; ou encore quand ses sujets le récusent pour causes (spécifiées par la loi) de suspicion légitime. Aux Européens sont assurées de plus grandes garanties. C'est à propos des Kachins que les scrupules judiciaires des Anglais ont été portés le plus loin. Comme il y a trois variétés de Kachins (suivant le lieu où ils résident), il y a aussi trois organisations distinctes de la justice criminelle: On ne peut songer à en exposer ici les différences. Voici le système qui prévaut dans les montagnes qui relè- vent de Myitkyina. Les simples délits sont jugés par les chefs de villages, qui appliquent les cou- tumes locales; l'injure, la violence, le Lort causé au bétail, le vol, l’adultère, par les fonctionnaires civils; enfin le vol de bétail, le meurtre, le dacoi- tisme, devant le Deputy Commissioner, confor- mément au Code pénal. Les condamnations à mort ne deviennent définitives qu'après confirmation par le Commissaire de la division. Les appels sont portés, suivant les cas, devant le fonctionnaire civil, le Jeputy Commissioner ou le Commissaire lui-même. VII. — POLITIQUE ÉCONOMIQUE, AGRICULTURE ET COMMERCE; TRAVAUX PUBLICS; FINANCES. Les Anglais devaient se heurter et se sont heurlés aux obstacles prévus. Les populations indigènes avaient leurs coutumes el leurs méthodes séculaires. Le conquérant occidental survient : il prêche une morale et impose une conduile qui vont bouleverser la vie économique. Soil; mais comment indemniser ceux que l’on ruine? $ 1. — La révolution économique. Les Chins, par exemple, avaient deux moyens de s'enrichir : enlever du bétail et faire des esclaves. L'un et l'autre sont désormais interdits. Comment vivre désormais? Et de quoi vivre? Du commerce? de l’agriculture? Il se passera du temps avant que l'agriculture leur agrée et que le com- merce les enrichisse. Le Gouvernement s’évertue : il introduit des cultures nouvelles; il recommande la pomme de terre; il indique les usages du cachou, etc. Le goût du travail se répand. Ceux qu'on pillait et ceux qui pillaient concourent main- tenant à la production. Et voici que les Chins exportent des nattes ‘qu'ils fabriquent), de la cire, des feuilles de maïs et importent du riz, du sel, du bétail, des gongs. Les Kachins fréquentent volontiers le marché de Mogaung et de Myitkvina. Ils y vendent des légumes et des graines qu'ils cultivent, du riz, du sésame, ou les produits spontanés de la forêt : cire, caout- chouc, elc. Ils ont d’ailleurs peu à vendre. Leurs procédés de cullure sont rudimentaires. Ils en sont à ce qu'on appelle en Birmanie Taunggya cultiva- tion. En janvier, ils coupent la jungle (la forêt nalurelle), là où elle est la plus épaisse, et quand elle est sèche, à la fin de mars, au début d'avril, ils la brûlent. La terre se couvre d'un lit épais de cendres : c'est là-dessus qu'ils sèment. Qu'en ob- liendront-ils? Cela dépend de la pluie et des orages. Ils n'auront de récolte que si la pluie a élé abon- dante et opportune, et si l'orage n'a pas entrainé et dispersé les cendres sur le flanc de la montagne. D'ailleurs, à tout événement, récolle misérable : quelques épis par-ci par-là, juste de quoi ne pas JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE 449 mourir de faim. L'année d'après, les arbres que le feu a touchés meurent (mince perte, le bois y est de mauvaise qualité), et la jungle jaillit de plus belle du sol engraissé par les cendres. Pour que le Kachin püt vivre de l’agriculture, il lui faudrait descendre dans la plaine et s'y fixer. Il en est tenté quelquefois. De la montagne, il voit le Shan ou le Birman qui laboure, sème et récolte à point nommé. Cela le tente : lui aussi sera labou- reur. Il achète des bullocks (une paire de bœufs) et se met au travail. À quelque temps de là, s'il sent quelque malaise, il fait venir le prêtre (c’est le conseiller de tous les jours), qui lui tire son horos- cope : « Les esprits (nats) sont mécontents, déclare-t- il. Tu ne les apaiseras qu'avec le sang d’un hullock.» Il se soumet, tue son bœuf, et le voilà ruiné à demi. A quelque temps de là, nouvel embarras, nouvelle consultation; même sentence et même sacrifice. Les bœufs sont morts; la charrue reste inutile; le Kachin en est réduit à ne plus cultiver que par des procédés primitifs. De nouveau, le voici en danger de mourir de faim. La plaine ne lui a pas été plus favorable que la montagne. Et cependant, là où le sort l’a placé, il ne peut vivre que de la terre et s'enrichir que par l’agriculture. Mais il faut que d'abord l'éducation et l'exemple des Anglais et des Birmans l’aient émancipé de cette absurde religion animiste. Question de temps. Dans leurs transactions, ils connaissent l'usage de la monnaie : ce n'est pas nécessairement la roupie; ce peut être un lingot d'argent ou un poids donné d’opium. Ils sont à mille lieues d'imaginer que, depuis vingt ans et plus, l'argent ait pu baisser et que la roupie, qui jadis valait 2 shillings (2 fr. 50 à peu près), ne vaille plus que 1 shilling 4 pence (1 fr. 65). Les Shans aussi sont des agriculleurs. Ce sont surtout de grands caravaniers. À pied, à cheval, à mulet, ils vont partout. On les rencontre sur les deux rives de la Salween; chaque groupe de trans- porteurs à son territoire réservé. Hommes de la terre, ils récoltent du riz, du coton, du thé que l’on confit, et de l'opium; ils élèvent de ces bœufs porteurs et dé ces poneys qu'utiliseront les cara- vanes. Hommes du trafic, ils exportent du thé séché, du pickled tea, des peaux, des cornes, du sucre brut, des pommes de terre, des laques, du tabac en feuilles (pour envelopper les cigares), et importent du coton, de la soie, des filés, des salai- sons, du bétel, du cuivre, du pétrole. C'est un com- merce qui se fait avec le Yunnan, le Siam et la Birmanie. On fait tout pour le développer. On a -ouvert le chemin de fer de Lashio à Mandalay (fragment inachevé de la fameuse voie sur le Yun- nan, par Kunlon Ferry). On a supprimé certains impôts intérieurs. On a accordé aux marchandises qui transitent, à travers la Birmanie, vers la Chine un drawback (restitué à Bhamo) des 7/8 sur les droits du tarif de douanes, et même à l'opium le droit de passer sous plombs. Sur les routes com- merciales qui conduisent en Chine, on a régle- menté le trafic el assuré la sécurité des caravanes, en levant sur les marchandises des droits, qu'on répartit entre lés divers chefs, pour leur tenir lieu de ceux qu'ils levaient eux-mêmes. Jusqu'ici, ces mesures ingénieuses n'ont pas sensiblement accru le trafic. On cherche enfin à tirer parti de la richesse que sont les forêts, cela surtout dans les États Shans du Sud. On a érigé une division forestière, consti- tué des réserves et fermé entièrement certaines régions à l'exploitation et au trafic. Le Gouverne- ment britannique s'est déclaré propriétaire, à par- ür de 1901, de tout le bois qui proviendra des forêts. Rien ne peut sortir sans son approbation. Il marque les arbres à abattre, consent des baux, estampille les billes autorisées, ete. Les prix qu'il obtient varient de 4 à 6 ou 7 roupies et même jus- qu'à 10 roupies par bille. Quand, dans une forêt, l'exploitation a abattu le nombre de billes déter- miné, la forêt est alors fermée pour une période. Malheureusement, les fonctionnaires forestiers sont trop peu nombreux. Le Gouvernement ne suffit pas à défendre son bien. Bien entendu, dans les parties reculées, comme les Karennis, il n’en est pas queslion; il s'y pratique une exploitation qui est un gaspillage. Mais au cœur même du groupe, en plein État Shan, les fraudes ne sont pas facilement réprimées. C'est un chef (Sawba) qui exporte du teck sans autorisation ; on le frappe, s'il est pris, d'amende de 10 à 15.000 roupies. Ce sont sur les billes des marques qu'on altère ou qu'on appose frauduleusement, c'est le bois de teck qu'on vend avant maturité, etc. Malgré ces détournements, les recettes augmentent. Il y a quinze ans, les forêts des États Shans du Sud rap- portaient quelque 33.000 roupies. Elles en ont rapporté, en 1902-3, 121.000, avec des dépenses qui n'étaient que de moitié. Ces chiffres grossiront, On compte sur d’autres ressources encore : du charbon, ou plutôt du lignite, des mines de cuivre et de plomb, certains produits tinctoriaux naturels abondants, enfin sur une agriculture développée et mieux conduite. Il n’est pas douteux que, dès à présent, les tribus et États ne soient plus pros- pères qu'avant la venue des Anglais. Peut-être même sont-ils plus heureux. $S 2. — Les travaux publics. Il n'est personne aujourd'hui qui ne sache l'in- fluence des travaux publics sur la paix et la pros- périté des possessions. À cet égard, les Français 450 JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE ont réalisé en vingt ans de gigantesques progrès. Leur polilique, notamment dans l'Afrique du Nord et Occidentale, est un modèle. Les Anglais, qui, en ces régions, s'en inspirent, ont, en Inde, donné des exemples, qu'ils ne pouvaient se dispenser de suivre dans les États Shans et les tribus incivilisées de Birmanie. À peine y furent-ils établis qu'ils se mirent à construire des lignes télégraphiques, à percer des routes : sentiers muletiers ou routes carrossables; à jeter des ponts; à élargir les pistes et à les empierrer, etc. Des voies nouvelles et pra- tiques furent ouvertes des États Shans du Sud à ceux du Nord et, de tous, à la Birmanie. Et par- tout, à mesure que ces travaux s’exéculaient, on constatait qu'il s'ensuivait un développement du trafic. C'est en Birmanie une habitude administrative excellente de dresser, pour chaque district, un programme de roules et de chemins. Tous les deux ou trois ans, on le revise, et l'on pense ainsi assurer la continuité du plan. Malheureusement, ces programmes demeurent trop souvent sur le papier. L'argent fait défaut, l'exécution est ajournée, les hommes changent et les conceptions se modifient. Le programme, qui fut originairement dressé pour les Kachins du district de Myitkyina, était vaste. Il ne fut réalisé que pour partie. Même cette partie est considérable. Les routes qu'on y a ouvertes sont revenues en moyenne à 3.000 roupies le mille, ponts inclus. Elles ne mesurent que 7 pieds de largeur, et ne sont pas empierrées. Le terrain n’a rien coûté. Dans des régions où le personnel est si restreint, lesagents techniques font presque entièrement dé- faut. Ce sont trop souvent les fonctionnaires de l’ordre politique et administratif qui jouent le rôle d'ingénieurs. Ils font les alignements, déterminent les niveaux, et remettent l'exécution à des employés indigènes. Les ponts ont été ordinairement confiés à des charpentliers de Mandalay. La plupart sont très courts : 4 à 6 mètres; mais quelques-uns en ont 100 à 200 : pour ceux-ci, on avait songé à faire venir des ingénieurs européens ; comme ils eussent coûté trop cher, on les a confiés à des charpentiers birmans, sous la surveillance d'agents indigènes des travaux publics. Après les routes, les chemins de fer. Dans les États Shans, il y en a un, il y en aura bientôt deux: le premier jusqu'ici s'arrête à Lashio et relie les États du Nord à Mandalay; le second se détachera du grand tronc Rangoon-Mandalay et ira jusqu'à Taunggyi, capitale des États du Sud. Quant aux Kachins,leurs centres principaux: Katha, Myitkyina, Bhamo, sont déjà reliés au reste du monde, soit par la voie ferrée, soit par l'Iraouaddy, qui, l’un et l’autre, descendent jusqu’à Rangoon. Un procédé où les Anglais aux Indes sont pas- sés maitres, l'irrigation, n’a été jusqu'ici que rare- ment utilisé dans ces régions. Le pays s’y préterait et les frais seraient restreints, mais les habitants ne réclament pas encore ce genre de travaux. Tout au plus y peut-on compter deux ou trois douzaines de barrages fort modestes en travers d'un cou- rant. Ces divers travaux, le Gouvernement s'efforce de les faire entreprendre et payer par les chefs de chaque Etat. Pour les y encourager, il leur fait spontanément remise du tribut annuel qu'ils doi- vent lui verser. C'est un argument qui a sa valeur, et un procédé qui a son efficacité. Aux divers Etals du Sud, on a ainsi remis des sommes annuelles qui s'élèvent à quelque 40.000 roupies. L'agent poli- tique de chaque État a l’ordre d'offrir au chef de ces remises de tribut. L'argent ainsi obtenu est ou dépensé dans l’année ou mis de côté — non sans tentation pour le chef ni péril pour le Trésor, — | jusqu'à ce qu'il ait atteint le total exigé par les devis de quelque travail important : tel le pont de l'Etat de Hsipaw, qui coûta 200.000 roupies. Les chefs qui ne veulent pas se plier à cette politique de travaux publics n'y gagnent rien : le Gouverne- ment lève sur eux l'intégrité du tribut. Des travaux publics, même modestes, sont, en ces régions, des entreprises malaisées. Au début, quand les routes manquent encore, lous les maté- riaux doivent être transportés à dos d'homme. Ce qui en Europe exigerait une voiture et deux che- vaux est la charge de 100 coolies. Chez les Chins, au début de l'occupation (1890-1891), le commissa- riat (intendance) en réquisitionnait 30.000, et les travaux publics, 50.000. Le recrutement n'en est pas trop difficile, dès qu’ils sont assurés d'être bien trailés et payés équitablement. Les salaires varient d'un point à l'autre: 6 à 12 annas par jour; la moyenne semble être 8 annas (environ 80 cen- times). Ailleurs, chez les Kachins, ils travaillent quelquefois à la tâche, ou encore moyennant des remises d'impôt. On obtient d'eux maintenant presque autant de main-d'œuvre qu’on en réclame. Ils ont compris : l'avenir impose la régularité du travail et du commerce. Fini de se ruer de la mon- tagne sur la plaine : « Donne ce que tu as; tant de corbeilles de riz, tant de piment, de l'huile, des bœufs ». Et vite, tout ce butin à la montagne. Au- jourd'hui, les routes ouvrent les retraites jadis inaccessibles ; la police prévient ou punit. Le temps t'. du pillage est passé. Pour vivre, il faut produire et. vendre. Et ils se résignent à travailler aux routes. Il arrive, rarement, que l'habitant refuse le tra- vail, parce qu'il est ici paresseux et riche, là, pa- resseux et sans besoins. On doitalors tirer la main- d'œuvre de l'Inde, de l'Assam : des Ur yas ou autres. JOSEPH CHAILLEY — LES TRIBUS DE LA HAUTE-BIRMANIE 151 Mais c’est l'exception. Elle tend même àdisparaitre. La loi du travail triomphe partout où le fruit du travail est protégé. $S 3. — Les Finances. Les finances des Etats sont ce qu'est leur condi- tion économique. Dans les Etats et tribus de Bir- manie, on ignorait jusqu'à hier ce qu'est un budget. Le chef levait l'impôt conlumier, pressurant .ses sujets, s’il le pouvait, et tout le produit de l'impôt tombait dans sa bourse. Les Anglais ont tàché d'introduire là quelques règles salutaires. Ils ont aboli les impôts qui vexent le contribuable ou em- pêchent la création de la richesse, déterminé un emploi raisonnable des sommes levées et sagement limité la liste civile du chef. En particulier, ils ont partout exigé un tribut (en moyenne de 20 à 30 °/, du total), qui fût à la fois un signeextérieur de leur souveraineté et un capital soustrait au gaspillage du prince. Les impôts varient d'Etat à Elat, ou plutôt de population à population, mais peu ;ce sont presque partout des droits d’excise ou de licence sur les liqueurs et quelques produits des forêts ou des mines; des kadaws coutumiers, sorte de centimes additionnels, el le Lousehold tax. Cet household tax a deux aspects : ici, il est une taxe sur la famille, quel que soil le nombre de huttes qu'elle habite; là, une taxe sur l'habitation, quel que soit le nombre de familles qu'elle abrite. Chez les Shans et chez les Kachins de Bhamo, c'est une taxe sur la famille ; chez les Chins et les Kachins de Myi- tkyina, une taxe sur l'habitation: Le taux en est variable, suivant la richesse du pays; chez les Kachins, 2/8 (2 roupies 8 annas) à l'est de l'Ira- ouaddy, et à à l’ouest; chez les Chins, 2 ou 3 rou- pies. Partout, le produit en est toujours infime : 200.000 roupies chez les Kachins de Myitkyina, 55.000 chez les Chins. Et les Anglais, si désireux qu'ils soient d'accroitre le rendement de l'impôt, prennent, doivent prendre certaines mesures qui le retardent. Ils suppriment, par exemple, les droits de péage sur les routes, et de ce chef, voilà pour le seul Etat de Hsipaw | 7.000 roupies de recettes en moins. Ils suppriment les douanes, interdisent le Zikin et veillent, autant qu'ils peuvent, à ce que les chefs ne rétablissent pas indüment ces impôts supprimés. Pour ces raisons, le tribut exigé du chef ne saurait être bien élevé. J'ai déjà cité quelques chiffres à titre d'exemple. Chez les Shans de Myelat (pour quinze Etats), ilétait de 50.000 roupies ‘en 1902-1903; il a été, pour la période 1905-1907, fixé à 62.850 roupies. On n'ose pas l'accroitre da- vantage. Les habilants sont pauvres. Ils importent beaucoup plus qu'ils n'exportent; l'argent sort de leur pays. Elever davantage le tribut amènerait les habitants à se priver de poisson salé, de bétel, de parapluie, d'étoffes de soie, etc. L'ensemble des États Shans du Sud (dont ceux de Myelat font partie) a payé, depuis vingt ans, un tribut qui n’est pas toujours allé en augmentant. En 1887, tout au commencement de l'occupation, on en avait fixé le chiffre, arbitrairement et sans base d'évaluation sérieuse, à 315.000 roupies. Mais il fallut en rabattre. Dès 1888, on le ramena à 161.000. Dix ans plus tard, en 1897, il n'était encore que de 205. 100 roupies (y compris les 5.000 roupies que paient les Etats d'au delà de la Salween). En 1902-1903, le gouver- nement local, escomptant les résultats du chemin de fer projeté qui devait relier les Etats Shans du Sud au grand tronc de Birmanie, a relevé ces chiffres de 20 à 30 °/,. C'était excessif. Le chemin de fer n’a pas élé sanctionné par le Gouvernement de l'Inde; l'enrichissement prévu ne s'est pas produit, en sorte que le tribut est lourd et se paie difficilement. Les États Shans du Nord, beaucoup moins nom- breux, sont plus importants; leur tribut est relati- vement élevé. Un d’entre eux jusqu'ici ne paie rien, Manglun; le Gouvernement s'est laissé tromper par le Sawbwa, qui a prétexté des dépenses de postes- frontières, lesquels n’ont jamais existé. Les quatre autres paient entre eux (période de 1897 à 1902) 86.000 roupies, et (période de 1903 à 1907) 130,500 roupies. Ce n'est pas là toutefois la somme qui entre dans les coffres du Gouvernement. Par- tout 1l y a de l'impayé, 7 à 8.000 roupies dans les États du Sud, 15 à 20.000 dans ceux du Nord. De plus, le Gouvernement fait aux chefs — je l'ai déjà dit — remise d'une forte fraction du tribut, à la condition que la somme en soit affectée à des travaux publics. La plupart de ces États-tribus coûtent au Gouver- nement de Birmanie. Certains États, comme celui de Momeit, certaines tribus, comme les Kachins, ont des recettes égales ou supérieures à leurs dépenses. Les autres, États Shans du Sud et du Nord, tribus Chins, ne font pas leurs frais. Le Gou- vernement ne s'en inquiète pas outre mesure. Il dépense ce qu'il juge utile dans les États Shans à l'avenir desquels il croit; ailleurs, il laisse faire le temps. VIII. — RÉSULTATS ET PROGRÈS. En tout pays, après vingt années à peine, il se- rait difficile de mesurer le progrès. Ce l’est davan- tage dans celui-ci, où les Anglais sont loin d'avoir appliqué tout leur effort, et n'ont attaché que peu de personnel et consacré que peu d'argent à le développer. Et toutefois, même au bout d'une si A52 GEORGES MESLIN — CLASSIFICATION DE PHÉNOMÈNES AFFECTÉS D'UN SIGNE brève période, on constate que quelque chose a élé changé et dans le pays etdans ceux qui l'habitent. Bien entendu, il importe, pour être équitable, de distinguer entre les lieux et les races, et de ne pas comparer certains États très peuplés et presque civilisés, comme celui de Hsipaw, aux Was encore impénétrés et qui en sont jusqu'ici à la guerre habituelle. Un premier résultat a élé d'imposer à l'esprit des populations la notion de ce qu'est le Gouvernement anglais. Pendant des années, ils en ignoraient tout. Sa puissance d’abord. Le chef de l'État de Wuntho, quand il vit les affaires se gâter dans l'État de Mo- meit, en augurait que cette diversion allait le tirer d'embarras. Il souleva son peuple et fut détrôné. Les populations des Chin-Hills eurent affaire à deux colonnes anglo-indiennes, l’une venue de Birmanie et l'autre du Bengale. Elles crurent que c'étaient là deux tribus, momentanément alliées contre eux, mais dont l'alliance, évidemment passagère, ne devait pas les inquiéter. Et ils ne crurent pas (peut- être ne croient-ils pas encore) à une occupation per- manente. Durant des siècles, ils avaient vécu de raids sur les villages birmaaæs, et dans le mépris de cette Puissance qui n'avait jamais pu les réduire. Les nouveaux venus ne le pourraient pas davan- tage. Aujourd'hui cette opinion doit être autre. Au surplus, dès le premier jour, ils ont témoigné n'avoir contre les Anglais ou leurs sujets anglo- | indiens aucune haine de race ou de religion. Ils se mélaient aux cipayes; ils ne semblaient pas être entièrement réfractaires à l’action d’un bon gou- vernement.1Ils sont devenus moins méfiants, moins soupconneux. Ils constatent qu'à la présence des Anglais, ils ont gagné plus de sécurité et plus de facilités à faire le commerce. C'est là aussi le sen- | timent des Shans et des Kachins. Les sentiers mule- | | tiers, les ponts, notamment ces ponts suspendus métalliques qui d'un jet franchissent les gros affluents de l'Iraouaddy, les étonnent et leur en imposent. Ceux qui sont proches des plaines ou qui y séjournent pour leurs affaires, se rendent compte de l'ordre qui y règne, de la richesse qui y grandit. Is laissent là leur costume pour celui des Birmans, | et les étoffes de coton pour la soie. Ils prennent conscience d'obligalions et de devoirs nouveaux. Spontanément ils viennent verser leur tribut. Ceux des monts n'en sont pas là encore. Leur esprit ne s’est pas ouvert, ni leur humeur assouplie. Ils attendent qu'on vienne à eux; et c’est ce que fait le Civil Officer, qui les visite et circule à travers leurs villages durant des jours enliers. D'autre part, ils voient de nouveaux venus s'éta- blir sur leur territoire : des gens d'au delà de la frontière, qui la franchissent et demandent la pro- tection d'un gouvernement régulier. Ils constatent même que des agriculteurs du pays voisin y aban- donnent des terres plus fertiles; la sécurité du tra- vail et du profit apparaît ainsi de plus de prix que la fertilité du sol. Ce qu'ils n'arrivent pas encore à comprendre, c'est que leurs congénères demeurés hors de la règle britannique, en Chine ou ailleurs, échappent à la contrainte, qu'elle impose, d'ordre et de disei- pline, et qu'ils peuvent encore à leur guise attaquer et razzier. Mais une expérience promptement acquise leur apporte d'encourageantes comparai- sons. Ils se soumettent, travaillent, acquittent l'im- pôt, et, comme dans les contes moraux, vivent en paix et ont beaucoup d'enfants. C'est une conclusion que les Anglais peuvent porter à leur actif. Joseph Chailley, Directeur général de l'Union coloniale française. LA CLASSIFICATION DE CERTAINS PHÉNOMENES AFFECTÉS D'UN SIGNE A PROPOS DES PHÉNOMÈNES DE DICHROÏSME MAGNÉTIQUE Les phénomènes que j'ai étudiés sous le nom de phénomènes de dichroïsme magnétique sont relatifs aux actions exercées sur la lumière par l'association d'un solide et d'un liquide (particules cristallines en suspension dans un non-électrolyte) lorsque cette liqueur ‘ est placée dans un champ magnétique, et traversée par des rayons normaux aux lignes de force. 1 11 ne s'agit pas d'une dissolution; c'est pourquoi j'ai désigné ces groupements sous le nom de liqueurs mixtes. Ce dichroïsme consiste en ce fait que les deux vibrations principales (parallèles aux lignes de force et perpendiculaires à ces lignes) sont inégalement modifiées quant à leur amplitude”, Ce dichroïsme est donc susceptible d'un signe, suivant la com- posante qui sera le plus énergiquement modifiée. J'ai cherché à rattacher le signe de ce dichroïsme aux propriétés des constituants, de facon à établir 1 II peut aussi y avoir une différence de phase, c'est-à-dire une polarisation elliptique. (J. Cuauoier : Comptes Rendus, 1906, t. CXLIT, p. 201). heseigenames tt - ve RS TS TS GEORGES MESLIN — CLASSIFICATION DE PHÉNOMÈNES AFFECTÉES D'UN SIGNE 453 une règle générale permettant de grouper tous les cas ou encore de prévoir le signe du dichroïsme d'une liqueur constituée par l'association d'un solide et d'un liquide déterminés. Cette recherche m'a paru tout d'abord entourée d’une certaine difficulté : en effet, en prenant un même liquide, le sulfure de carbone, et en lui as- sociant différents solides, le bichromate de potasse, l'azotate de soude, etce..…., le signe du dichroïsme ne se maintient pas; il ne dépend donc pas seu- lement des propriétés des liquides. Il ne se main- tient pas non plus lorsqu'à un même liquide, on associe des sels d’un même métal ou encore des sels formés avec un même acide (azotates, par exemple). De même, si à un sel, le bichromate de potasse, par exemple, on associe différents liquides, le sulfure de carbone, la benzine, lal- cool, le signe du dichroïsme ne se conserve pas; il change même d'un carbure à un carbure voi- sin : il ne dépend donc pas seulement des pro- priétés des solides. Bref, le groupement de tous les cas rencontrés semblait d'une extrême com- plexité. Après beaucoup de tätonnements, je suis arrivé à énoncer la règle suivante : « On peut ranger tous ces corps, solides et liquides, à la suite les uns des autres dans un ordre tel que, en associant un liquide à un solide, la liqueur présentera le dichroïsme positif si le solide figure dans ce tableau après le liquide, et le dichroïsme négatif si le solide est avant Le liquide, pourvu que, en mème temps, l'indice de réfraction du solide soit supérieur à celui du liquide. Si lindice du solide est inférieur à celui du liquide, la règle précédente s'applique en sens inverse. » On peut encore s'exprimer d'une autre facon et dire que le signe du dichroïsme est donné par le signe de : (Ns — Ni) (Ds— ni), N désignant le numéro d'ordre du corps considéré dans le tableau et n désignant son indice. Tous les cas possibles pourront done être prévus à l'aide du tableau précédent, où, à côté de chaque corps, on inscrira, avec son numéro d'ordre, la valeur de son indice. Cette règle s'applique sans exception à tous les cas (plus de 300) pour lesquels J'ai constaté le signe du dichroïsme. Nous sommes en présence d'un phénomène ma- gnéto-optique qui doit dépendre des propriétés optiques et des propriétés magnétiques des corps associés; le second facteur 2:—n, met en évidence les coefficients optiques, et il y à lieu alors de penser que le premier facteur N,— N; se rattache de même à quelque coefficient magnétique (susceptibi- lité magnétique, coefficient d'aimantation, ete.); on peut espérer que l'étude de ce phénomène per- mettra de remplacer ces valeurs N, qui étaient jusqu'ici des numéros d'ordre, par quelque autre coefficient ayant une signification physique. C'est ce que j'ai fait, et c'est pourquoi j'ai entrepris la détermination des coefficients d'aimantalion et des susceptibilités des différents solides et liquides que J'avais utilisés. De plus, il y a là un exemple de classification des phénomènes physiques que l’on peut envisager à un point de vue plus général. C'est ce qui m'a amené aux considérations dé- veloppées ci-après. Soient deux groupes de corps : d'une part, des liquides L’, L',...; d'autre part, des solides $,,S,, .….; tels que l'association d'un liquide et d'un solide donne une liqueur présentant un certain phéno- mène affecté du signe +ou du signe —, par exem- ple le dichroïsme positif ou négatif, ou un courant électrique dirigé dans un sens ou dans l’autre, une différence de potentiel au contact, une force élec- tromotrice thermoélectrique, un effet Peltier, une production d'électricité positive ou négative, un dégagement ou une absorption de chaleur. Je me propose de rechercher s'il est possible de repré- senter Le signe du phénomène en question, pour une liqueur déterminée, à l’aide de coefficients propres à chacun des liquides et des solides que l'on associe. A ce propos, on peul se poser un certain nombre de questions : Est-il toujours possible de déterminer pour cha- eun des corps un nombre où un numéro d'ordre : K', K”,... pour les liquides; K,, K,,.. pour les solides, de telle sorte que le signe du phénomène pour une liqueur L'S$, soit donné par le signe de la différence des coefficients K” et K, ? L'expérience montre qu'une telle solution n'est pas toujours possible. Il est facile de s’en rendre compte en cherchant à procéder au classement sui- vant, qui équivaut au fond à la recherche pré- cédente : Peut-on ranger tous ces corps à la suite les uns des autres dans un ordre tel que l'association d'un solide et d'un liquide donnera toujours une liqueur à phénomène positif lorsque le solide figurera sur cette liste après le liquide, et donnera, au contraire, une liqueur à phénomène négatif lorsque, sur cette liste, le solide sera classé avant le liquide? On peut s'assurer par un exemple qu'une telle classification n’est pas toujours possible. 454 GZORGES MESLIN — CLASSIFICATION Supposons, en effet, qu'on ait d’abord formé le tableau : qui représente les phénomènes suivants : L'S, + L'S L'S L"S2 CAT + _ et qu'on ait alors observé, avec un autre corps solide S,, les phénomènes que voici : L'Sy — L'S, + IL faudrait, pour représenter ces deux derniers phénomènes, placer S avant L': [L'S; —] et aussi après L': | [L'Ss +]; S, occuperait donc deux places différentes et il fau- drait lui donner deux numéros d'ordre ou deux coefficients. La solution du problème, tel qu'il est posé, n'est donc pas toujours possible. Inversement, si nous nous donnons d'avance un tel tableau, le signe de chaque groupement sera dé- terminé sans ambiguïté, Nous dirons alors que le phénomène ne dépend que d'une variable, et, de plus, qu'il est susceplible d'une représentation lineaire. Réciproquement, il se peut que le phénomène soit susceptible d’une représentation linéaire; il dépend alors d’une variable ou d'un coefficient propre à chaque corps (loi des tensions de Volta, loi des forces électromotrices thermo-électriques, loi du rayonnement, etc.). On reconnaïtra que le phé- nomène ne dépend, dans ces conditions, que d’une variable, et est susceptible d'une représentation linéaire, à ce caractère qu'une telle classification sera possible. L'ordre de classement pourra donner une indi- cation sur la nature de la grandeur spécifique (in- dice, densité, chaleur spécifique, pouvoir diélec- trique, résistivilé, température, etc.) qui exerce son influence, puisque le numéro d'ordre des corps figurant dans le tableau est une fonction de ce coeflicient et doit varier comme ce coeflicient ou, d'une manière générale, comme cette fonction (par exemple, la puissance réfractive 6, reliée d'une facon simple à l'indice, par l'équation 9 — 1° —1), Si même celle fonction est du premier degré, c'est- à-dire si le signe du phénomène est donné par le signe de la différence des grandeurs spécifiques elles-mêmes, l'expérience pourra indiquer aisément DE PHÉNOMÈNES AFFECTÉS D'UN SIGNE cette dépendance; on conslalera, en particulier, que le phénomène en question s'annule et change de signe avec la différence de ces coefficients (par exemple les indices) et seulement avec elle, qu'il varie proportionnellement à cette différence, ete… Dans certains cas, cette dépendance pourra être plus difficile à mettre en évidence, surtout s'il s'agit d'un coefficient qui ne soit pas l'objet d'une détermination expérimentale directe, soit qu'il y ait lieu de faire intervenir une fonction d'un coef- ficient spécifique directement obtenu (7— 1 ou 1 + 4x K), soit qu'il s'introduise une combinaison de plusieurs coefficients trouvés séparément (le Fine Dal ee 2e pouvoir réfringent, ris le coefficient critique ou combinaison de deux des éléments critiques, = T 2 . » 5 elc.). On concoit, en effet, par ces exemples que les coefficients « influents » ne sont pas tou- jours atteints directement par l'expérience et qu'on est peu familiarisé avec le sens général de leurs tableaux couramment consultés (densités, indices, chaleurs spécifiques, etc.). Toutes les remarques précédentes, relatives à la classification linéaire, ne sont exactes que si le phénomène peut être représenté par la différence de deux fonctions, l’une relative au solide, et l’autre relative au liquide. Mais on comprend qu'il puisse se présenter un cas plus compliqué et que le phénomène, tout en dépendant d'une seule variable caractéristique de chaque corps, lui soit rattaché d'une facon plus complexe ; par exemple, il peut arriver que le phénomène, au lieu d'être déterminé par K°—K,, dé- pende d'une fonction de ces coefficients F(K?, K,), K” et K, étant eux-mêmes des fonctions des gran- deurs spécifiques obtenues par l'expérience (indice, densité, etc.). Dans ce cas, la représentation linéaire, dont il a été parlé, ne suffit plus. On peut alors songer à un classement bi-linéaire en se servant de deux droites inclinées Os et O7 (fig. 1 sur chacune desquelles on classerait, d'une part les solides sur Os, d'autre part les liquides sur O7, le signe du phénomène pro- duit par le groupement LS étant alors indiqué par la parité du quadrant dans lequel tombe le point figuratif T obtenu par les deux coordonnées déter- minées par les deux corps L ets. variations, lorsqu'ils ne sont pas groupés dans les - nid mans à cotes. en tsis 54 /i it d'os chat GEORGES MESLIN — CLASSIFICATION DE PHÉNOMÈNES AFFECTÉS D'UN SIGNE 455 Toutes les fois que le phénomène est ainsi relié à un coefficient relatif à chacun des corps, la fonc- tion F(K’, K,) est connue pour chaque groupement, ce qui fixe la position du point figuratif. En se donnant d'avance la répartition des solides et des liquides sur deux échelles Os et O7, on déter- mine ainsi une fonction dont le signe est suscepti- ble de la repré- sentation bi-li- les néaire. Mais, quement, on peul s'assurer, COmIme r'éCipro- Fig. 2. plus haut, qu'une telle tion n'est pas toujours possible. Soit, en effet, la disposition ci-contre (fig. 2) phénomènes que voici : représenta- qui représente les LS! + MS L'S! L'S" + Supposons qu'avec un autre corps S'"”, on ait observé les groupements : L'S" —; L'S"""—. Il fau- -drait done que S"' figurät à la fois du côté de S" pour représenter le signe de L'S"— et côté de S' pour permettre de figurer le L'/S/!"—, Si cette représentalion est possible, on [ I ; 1 aussi du signe de en conelura que le phénomène ne dépend que d'une seule variable et qu'il est susceptible d'une représentation bi-linéaire; l'exemple précédent montre comment on procèdera à un tel essai en partant d’un solide et d'un liquide et en intro- duisant successivement dans ce graphique chacun des autres corps étudiés. L'expérience pourra permettre de distinguer nettement si l’on a affaire à un classement linéaire ou à un classement bi-linéaire. Dans le premier cas, en effet, le phénomène s'annule lorsque les deux coeflicients deviennent égaux entre eux et non pas lorsqu'un des coeffi- cients devient nul. Dans le deuxième cas, au contraire, le phéno- mène ne s'annule pas lorsque les deux coefficients deviennent égaux entre eux, mais seulement lorsque l’un des coefficients devient nul (ou tout au moins prend une valeur constante déterminée, si l’on à été amené, pour plus de généralité, à déplacer les axes parallèlement à eux-mêmes, ce qui revient à augmenter les coefficients d’une quantité con- stante), Ces deux modes de représentation, linéaire et F bi-linéaire, sont tout à fait distincts entre eux, et l’un des deux ne peut être considéré comme un cas particulier de l’autre, car celui-ci intro- duit la différence des coefficients, tandis à que celui-là fait intervenir les signes re- latifs des coefficients. £ Ils peuvent cependant, dans un cas par- e ticulier, se réduire à une même forme ! c'est le cas où le classement linéaire ras- semblerait en un même groupe (fig. 3) l’ensemble des corps de mème nature, les , liquides par exemple, qui sépareraient en È deux groupes les corps de l’autre catégo- rie, sans qu'il y ait enchevètrement. Fig. 3. La classification bi-linéaire grouperait alors (fig. 4) tous les liquides d'un même côté de l'origine O, et, dans un cas comme dans l'autre, on en sera averti en procédant à la représentation graphique. Si une telle représentation bi-linéaire n’est pas possible, on en conclura que le phé- nomène ne dépend pas du signe du rapport des deux coefficients spécifiques, tels que K'et K,, et il faudra en- visager une dépendance plus complexe. Pour poursuivre cetle analyse, nous supposerons dans la suite que c’est seulement la différence des Fig. 4. coefficients ou de leurs fonctions qui intervient. II Si le phénomène ne dépend pas d'une seule variable, on peut songer à le représenter avec deux variables en se posant la queslion suivante : Est-il possible de déterminer, pour chacun des corps, deux coefficients : x! y! s'il s'agit d'un liquide L', XY Sil s'agit d'un solide S, ‘appartenant d'ailleurs à deux suites distinctes, la suite des x et la suite des y), de telle sorte que le signe du phénomène présenté par une liqueur L?S, soit donné par le signe du produit (x — x,) (y"—y,) n ou, ce qui revient au même, du quotient 2? > % Pour répondre à cette question, on peut encore avoir recours à une interprétation géométrique de la facon suivante : On prendra deux axes de coordonnées Ox, O7 et on représentera chaque corps Lou S par un point figuratif dont les deux coordonnées seront les deux coefficients x, y relatifs à ce corps (fig. 5). 456 GEORGES MESLIN — CLASSIFICATION DE PHÉNOMÈNES AFFECTÉS D'UN SIGNE - = Si, ensuite, on envisage une liqueur formée par l'association de L’'et des,, il suffira de joindre les deux points L', $,; le coeffi- cient angulaire de la droite qui les réunit fera connaitre à TS Se par son signe my, c'est- à-dire le signe du phénomène. La question qui se pose alors est la suivante : Une telle représentation, que nous appellerons représentation en surface, est-elle toujours pos- sible? On peut répondre que non, soit par analogie avec le cas précédemment traité, soit en se reportant au cas où le phénomène dépendrait de trois variables: mais il semble difficile de mettre directement en évidence cette impossibilité comme on l'a fait plus haut, en raison de l'espèce d'indétermination qui se présente au sujet de la position du point figu- ralif, lequel peut être reporté entre certaines limites, soit plus à gauche, soit plus à droite, soit plus haut, soit plus bas; on peut, en effet, se demander si, par de tels déplacements pour tous les points, on n'arriverait pas à salisfaire toujours à toutes les conditions imposées par l'expérience. Mais il n'en est rien, ainsi qu'il résulte d'une démonstration indirecte que je donnerai plus loin. Pour tenter une telle classification, on pourra opérer de la façon suivante : On placera arbitrairement un corps quelconque, un liquide L, par exemple (fig. 6), ce qui signifie qu'on adopte des unités convenables pour les coef- ficients d’abscisse x et pour les coeflicients d’ordonnée 35 on tracera par le point L des parallèles aux axes, de facon à déterminer des qua- drants pour lesquels les points, joints à L, donne- ront des droites dont les coefficients angulaires se- ront, soit positifs (qua- drants impairs), soit négatifs (quadrants pairs): les solides seront ainsi divisés en deux groupes, ceux destinés aux quadrants pairs et ceux destinés aux quadrants impairs, mais jusqu'ici leur place y est indéterminée. Y Fig. 6. On introduira un liquide L' et on cherchera dans quel quadrant il faut placer le point L' et comment il faut grouper les solides pour conserver les mêmes représentalions des phénomènes produits par les solides associés au liquide L', ete. On voit, sans insister davantage, qu'un grand nombre de positions satisfont aux conditions im- posées et qu'il y a une large indétermination, du moins si l'on n'a à sa disposition qu'un petit nombre Fig. 7. d'expériences; ainsi, les graphiques ci-dessus (fig. 7) représentent les mêmes phénomènes, à savoir : LS" LS” LIS! L'S" + Il en est de même pour les quatre graphiques de la figure 8 qui représentent : ES! LS" L'S" + L'S! + Nous verrons d’ailleurs plus loin comment on peut contribuer à lever cette indétermination par des considérations théoriques et expérimentales. Lorsqu'on lente ainsi un tel classement avec deux paramètres (classement en surface), on peut se Fig. 8. demander ce qui arriverait si le phénomène était susceptible d’un classement linéaire et à quel carac- tère on s'en apercevrait. Remarquons d'abord qu'il est toujours bon d’es- sayerleclassementlinéaire et de ne tenter l'autre que si le premier a été reconnu impossible; toutefois, | si cet essai n'avait pas été fait, on s'apercevrait de GEORGES MESLIN — CLASSIFICATION DE PHÉNOMÈNES AFFECTÉS D'UN SIGNE FSs [SA la facon suivante quil aurait donné un résultat satisfaisant : Si, pour l'un des axes, tous les liquides peuvent se grouper en un même point, et de même tous les solides en un autre point (fig. 9) sans qu'il y ait intercalation, e’est qu'on peut attribuer à tous les liquides un même coefficient, ou encore un même coefficient à tous les solides d’une part et un autre coefficient à tous les liquides d'autre part, ou enfin à tous les corps des cofficients quelconques, pourvu que les coefficients des solides soient tous infé- Kig. 9: Fig. 10. rieurs (ou tous supérieurs) à ceux des liquides, de facon que la différence n’intervienne pas. Au point de vue graphique, cela signifie que le plan pourra être partagé en deux régions (fig. 40) par une parallèle à l'un des axes, l'une de ces régions étant réservée aux solides et l’autre aux liquides. Il est facile de voir que c’est en s’astreignant à cette condition qu'un classement «linéaire » pourra être transformé en un classement « superficiel » donnant des résultats équivalents, c'est-à-dire tel que le coefficient angulaire de la droite L'S, sera constamment de même signe que la différence des numéros d'ordres (liquide-solide) adoptés dans le premier mode de représentation. En résumé, la réduction ne sera possible que si, sur l’un des axes, il n'y a pas enchevétrement des solides et des liquides. Et, réciproquement, s'il y a enchevêtrement pour un seul de ces corps, il y aura contradiction entre les résultats des deux classements, ce qui nous fournit la proposition suivante : Si le phénomène dépend réellement de deux va- riables, il est impossible de le représenter par un classement linéaire. Il ne sera susceptible d'une telle représentation que s'il dépend, quant au signe, d'une seule variable pour les groupements étudiés. IL est utile d'ajouter ces derniers mots, car il se peut qu'une étude incomplète du phénomène fasse croire à une simplification de classement". RE NP RS ES OPEN ER EP RIRE ! C'est justement ce qui m'est arrivé lorsque j'ai commencé létude du dichroïsme magnétique; il s'est trouvé par hasard Mais on peut alors généraliser la démonstration précédente pour faire voir qu'un phénomène quel- conque n'est pas susceptible d'une représentation en surface malgré l'indétermination dont nous avons parlé plus haut. Imaginons un phénomène qui dépende de trois variables et dont le signe soit déterminé par ie signe du produit des différences de trois coefficients : (x—x,)(7"— 75)(z"— 7,), c'est-à-dire d’une quan- lité proportionnelle au produit des trois cosinus directeurs de la droite L'$,, quantité qui change de signe suivant le trièdre qui contient la direction en question. On est en présence d'un mode de classement qu'on peut appeler «représentation en volume » ou « cubique », et l'on peut rechercher dans quelles circonstances ce mode se réduira à une représenta- tion «en surface. ». Comme plus haut, on peut s'assurer que ce cas se présente lorsque l’espace peut être divisé, par un plan parallèle à l’un des plans de coordonnées, en deux régions telles que l’une d'elles contienne les liquides et l’autre les solides. Là encore, il n'y aura pas enchevétrement sur lun des axes; mais, s’il y a un tel enchevêtrement, la réduction n'est pas possible. Il en résulte qu'un système qui dépend effective- ment de (rois variables ne peut êlre représenté par un classement en surface, ce qui nous permet de compléter ce qui était dit plus haut à ce sujet. Le signe d'un phénomène ne peut donc, en gé- néral, être représenté par un classement à deux va- riables malgré l'indétermination inhérente à un tel classement, et Ja possibilité d'une semblable repré- sentation permettra de conclure à un phénomène lié seulement à deux variables dans les conditions indiquées antérieurement. | Occupons-nous maintenant de la méthode pra- tique à employer pour procéder à ce classement dont dévra résulter la connaissance des deux coef- ficients x, y, propres à chaque corps. L'indétermination diminuerail singulièrement si, pour tout un groupe de corps, par exemple pour les liquides, les coefficients élaient connus, de telle sorte que leur position dans le plan puisse être fixée tout d'abord sans incerlitude. De même, elle diminuerait également si, pour tous les corps, les solides et les liquides, J'’ün des coefficients était connu. que, pour les liqueurs d'abord étudiées, le solide avait un indice toujours supérieur à celui du liquide; c'est pour cette raison que la loi des indices ne m'était pas apparue. Je n'y ai été conduit qu'en multipliant les expériences el en recon- naissant alors la nécessité de substituer au classement linéaire, primitivement adopté, un classement superficiel pour lequel l’un des coefficients n’elait aulre que l'indice. 495 Celle circonstance se présente lorsque des consi- dérations théoriques font penser que le phénomène est lié à la différence de deux grandeurs spécifiques déterminées, ou encore lorsque l'expérience montre que le phénomène en question s'annule avec la dif- férence de ces deux coefficients spécifiques et change de signe avec elle. Silenest ainsi, on procédera de la facon suivante: Désignons symboliquement par &,, le signe du phénomène produit avec l'association des deux corps L'S,; on a par hypothèse : Gp = (x — Xp) (V'—Yp); chaque parenthèse représentant de même le signe de la quantité qui figure dans l'intérieur, on for- mera le signe du quotient : C°np A — Xp. Le numérateur étant connu par l'expérience etle dénominateur élant déterminé par les considéra- tions précédemment indiquées, on aura : . de telle sorte que le premier membre représente symboliquement un phénomène qui ne dépend que d’une variable 4’, et que nous pourrions figurer par un classement linéaire. L Par cette méthode, un classement en surface peut se ramener à un classement linéaire, pourvu que l'on connaisse la loi relative à l’une des va- riables. Si l'on fait cette tentative en s'adressant à une variable z, autre que l'une des variables influentes x où y, On obtiendra une expression : P°np (x2— xp) {van — y;) 20 — Zp 20 — 75 qui ne sera pas susceptible d'un classement linéaire tant que la variable Z ne se réduira pas à l’une des variables x, y, ou ne variera pas comme elle. On peut donc dire, en général, que, lorsque la tenta- tive de réduction d'un classement superficiel à un classement linéaire aura réussi, c'est qu'on aura trouve l’une des variables influentes. Inversement, lorsqu'une telle tentative aura échoué, on pourra dire que la variable essayée n'était pas la variable influente ou que le phéno- mène dépendait de plus de deux variables. III Comme exemple et comme application des théo- ries précédentes, je citerai les tentatives que j'ai faites pour classer les phénomènes du dichroïsme magnétique : GEORGES MESLIN — CLASSIFICATION DE PHÉNOMÈNES AFFECTÉS D'UN SIGNE 1° Le classement linéaire ou bi-linéaire était impossible : 2 Le classement linéaire devenait possible lors- qu'on tenait compte de ce que j'ai appelé la loi des. indices (voir au préambule de cet article), ce qui signifiait justement que le phénomène était relié au signe de »,—17, (différence des indices du solide et du liquide); 3° Lorsqu'on ne tenait pas compte de la loi des indices, il était impossible de classer le phénomène en prenant comme variable unique : a) soit les coefficients d'aimantation spécifique (en poids) ; D) soit les susceptibilités magnétiques (en vo- lumes) ; ce) soit les indices (ce qui signifie que le phéno- mène ne dépend pas de la variation des seuls in- dices; il n'y a donc pas contradiction avec ce qui vient d’être dit plus haut). A cause de l'importance que prenait alors « la loi des indices », je l'ai établie par des détermina- tions multiples, en montrant par exemple que, pour une même association d'un liquide et d'un solide d'indices voisins et dont on venait à faire varier la température, de facon à annuler la diffé-, rence des indices et à la changer de signe, le phé- nomène de dichroïsme magnétique s'annulait et changeait lui-même de signe ; 4° En tenant compte alors de la loi des indices, c'est-à-dire en considérant », — », comme lune des variables, le classement linéaire ne réussit pas non plus : a) soit lorsqu'on le base sur les indices seuls (c'est ce qui a été déjà dit); s b) soit lorsqu'on prend pour point de départ les susceptibilités magnétiques. Il réussit, au contraire, avec les coefficients d’ai- mantation. Si, d’ailleurs, on tente ce classement linéaire sans idée préconçue au sujet dela deuxième variable, on trouve un classement dont les numé- ros d'ordre indiquent la suite des coefficients d'’ai- mantalion spécifique croissants, ce qui signifie que les corps sont rangés dans l'ordre des coefficients d'aimantation, sous les réserves qui vont être indiquées. Dans la première étude que j'ai faite en 1903 du dichroisme magnétique, j'avais obtenu un classe- ment qui, pour les liquides, coïncidait avec l'ordre des coefficients d'aimantation, du moins pour ceux de ces corps dont les constantes magnétiques avaient été déterminées; quant aux solides, on ne pouvait rien dire de net à ce sujet, car bien peu 1 Ce renversement est possible parce que les liquides pré- sentent, en général, une variation d'indice beaucoup plus rapide que les solides sous l'influence d'un changement de température {(benzine et sulfate de potasse). : de. ñ s! J. WOLFF — EXPÉRIENCES SUR L'AMIDON 459 des sels employés pour constituer ces liqueurs avaient été l'objet de déterminations, les expé- riences ayant surtout porté sur les métaux. Pour combler cette lacune, j'ai d'abord entrepris l'étude des constantes magnétiques (coefficients d'aimantation et susceptibilités magnétiques) des liquides organiques et des sels qui avaient été ulilisés ‘. Étant en possession de ces nombres, on peut alors constater que la coïncidence signalée est bonne, en ce qui concerne du moins les liquides. Pour les solides, la discordance est susceptible d'une explication dont je me contenterai ici d'indi- quer le principe. D'une part, on remarquera que les solides en question sont tous des corps anisotropes, car les corps amorphes et les sels cristallisés dans le sys- tème cubique n’ont jamais fourni deliqueurs actives. En vertu de celte anisotropie, ces corps ont, non pas une constante magnétique unique, mais des coefficients variables avec la direction considérée, et variables dans un intervalle d'autant plus consi- dérable que l'anisotropie est plus accentuée. D'autre part, on sait par les travaux de Curie, par les recherches récentes de M. Langevin, que le diamagnélisme et le paramagnétisme ne sont pas attribuables à la mème cause; ils suivent des lois entièrement différentes, notammentsous l'influence de la température, et il y a même lieu de croire que ces deux manifestations peuvent se superposer, Si bien que le paramagnétisme apparent est suscep- tible « de masquer le diamagnétisme sous-jacent ». Or, la détermination directe des coefficients d'ai- mantation par la balance magnétique fournit d'un coté l’action moyenne, car, le coefficient & étant variable avec la direction considérée, définir comme coefficient moyen : l JE ir J Oudw” o on peut et, si la détermination se fait sur ure multitude de petits cristaux orientés de toutes les façons possibles, l'action réelle fait intervenir le coeffi- cient moyen qui dépend de la distribution dans l’espace des axes magnétiques. D'un autre côté, cette détermination fournit l’action totale relative aux deux genres de mani- festation magnétique, et elle ne ferait connaitre la constante du diamagnétisme « fondamental » qu'en l'absence du paramagnétisme « perturbaleur » dans les solides. Si, au contraire, dans les expériences de di- chroïsme où chaque cristal devient indépendant, les propriétés magnéliques superticielles et acei- dentelles n'interviennent pas, le tableau formé fera connaître l'ordre de classement des coefticients effi- caces pour les sels étudiés, et, de la sorte, des obser- vations purement optiques donneront d'utiles ren- seignements sur le diamagnétisme « sous jacent », qui semble étre le magnétisme « essentiel » de la matière. Georges Meslin. Professeur de Physique à la Faculté des Sciences de Montpellier. EXPÉRIENCES SUR LA NATURE DE L’AMIDON ET SES RÉACTIONS SELON LES CONDITIONS DE MILIEU La question de la transformation de l'amidon dans le plantes a fait, depuis Sachs, l'objet de nom- breuses recherches et hypothèses; elles sont trop connues pour qué nous ayons besoin de les rap- peler. Nous voudrions simplement exposer ici quelques expériences que nous avons faites sur les réactions variables de l'amidon selon les condi- tions de milieu et qui nous semblent jeter quelque lumière sur les métamorphoses de ce corps dans la Nature. Il L'étude de l’amidon est intimement liée à celle des diastases qui l'accompagnent partout dans la Nature. 1 Annales de Chimie et de Physique, février 1906. L'amidon qui se dépose dans les feuilles dispa- rait très vite à l'obscurité sous l'influence de ces diastases, tandis que l’amidon coagulé ou rétro- gradé, préparé artificiellement dans le laboratoire, n'est que partiellement attaqué par la macération de malt, même à Ja température de 70° C., et ce n'est qu'à condition de le dissoudre à haute tempé- rature (150°) que 'on arrive à le saccharitier com- plètement”. L'amidon, tel qu'il prend naissance dans les feuilles, ne peut donc être comparé à celui qui se dépose dans nos matras * 1 E. Roux : C: R:., p. 943 et 1259. 2 Le phénomène de rétrogradation de l'empois d'amidon, découvert par M. Maquenne, et celui de la coagulation dias- tasique des empois fluidifiés, observé pour la premiere fois 460 J. WOLFF -— EXPÉRIENCES SUR L’AMIDON Néanmoins, nous avons rencontré, M. Fernbach et moi, dans une variété de pois verts, el en pro- portions considérables (25 °/,), de l'amidon iden- tique à celui que nous préparons dans le laboratoire par rétrogradation ou coagulation. M. E. Roux à également signalé la présence d'amylocellulose (amidon non saccharifiable dans les conditions ordinaires) en proportions moindres (4 à S °/,) dans les pois secs, les haricots et le maïs. L'amidon qui se dépose dans les organes de réserve de ces végétaux semble donc différent de celui qui se dépose temporairement dans Îles feuilles. MM. Maquenne et Roux’ ont, en effet, dé- montré que la matière amylacée peut exister sous des formes plus ou moins condensées, depuis l'ami- don soluble à la température de l'ébullition jusqu'à la variété qui ne peut se dissoudre qu'à 150°. Nous savons aussi, depuis les expériences déjà anciennes de Lintner, qu'à l'état cru les amidons de diverses origines se comportent de facon très différente vis- à-vis de la diastase du malt. On en avait conclu que ces différences étaient caractéristiques pour chaque espèce : ; QUANTITÉ % : D AMIDON TRANSFORME a ) Température d'attaque TEMPÉRA- TURE de gélifica- 55° 60° 650 tion Pomme de terre. 5,0 521 90,3 650 Orge. 53,3 92,8 96,2 800 Malt vert 58,6 9251 96,2 » Froment. 62,2 SAS 94,6 71 à S00 Riz CM OT }Orl 31,1 sûo MAS EN R » 18,5 54,6 A l'époque où ces expériences ont été faites, on n'a pas tenu compte de la présence d'amylose insoluble à 100°, parce qu'on ignorait que cette forme de l'amidon, connue depuis sous le nom d'amylocel- lulose, fût soluble à des températures supérieures et entièrement transformable en maltose après dissolution. : J'ai repris ces expériences à un point de vue un peu différent, et j'ai constaté qu'à l'état cru le riz de Mandchourie s'attaque très difficilement, alors que le riz de Piémont se saccharifie* très bien. C'est ainsi que l'amidon de maïs Cuzco, rouge ou blanc, cultivé au Mexique, se transforme lotalement à l'état cru à 65°, alors que l'amidon de maïs ordi- naire est faiblement attaqué par les diastases du malt. Voici un tableau qui résume quelques-unes de par MM. Fernbach et Wolff, permettent de se rendre compte comment, dans certains cas particuliers, l'amidon peut se déposer dans les cellules végétales sous une forme diffici- lement attaquable par l'amylase, mais n'éclairent pas d'un jour nouveau la question d'origine. 1 Bull. de la Soc. chimique, t. XXXIIT, p. 471. 2 Bien que le choix du terme ne soit pas heureux, on entend par «saccharification » la transformation globale de l'amidon en dextrine et maltose. nos expériences inédites (nous n'avons pas déter- miné les proportions de dextrine et de maltose) : AMIDOK TRANSFORMÉ à 65° Riz du laboratoire . 25,4 % Riz de Mandchourie . 7: 29,2 Riz de Piémont (variété Java) 89,5 — variété Bertone). 89,5 BeétmenTenuatE ere AA) Maïs Or Mare Ce le Cl Maïs dent de cheval . 2. . : mm... 55,5 Cuzotrouger AMENER ENER CORNE Cnzco blanc ni4e SRE AE PRO L'examen microscopique de ces divers échan- tillons ne révèle rien d'anormal au point de vue morphologique. Nous voyons ainsi que les propriétés physiques de l'amidon cru peuventétre très différentes, même pour les variétés d'une même espèce. Cette résis- tance plus ou moins grande des amidons crus envers l'amylase ne suffit pas pour classer les es- pèces dans telle ou telle catégorie, puisqu'elle peut varier avec le climat; mais elle permet d’expli- quer comment, dans les organes aériens ou de réserve‘ d'une même plante, on peut trouver de l’amidon à des états physiques fort différents. M. Maquenne à d'ailleurs montré que la fécule crue, qui est inaltaquable dans les conditions ordi- naires par les diastases du malt, devient presque entièrement saccharifiable (sauf un résidu de 3 °/, d’amylocellulose) si lon a eu soin de la triturer fortement dans un mortier. IT Les phénomènes de décomposition sont, en gé- néral, beaucoup plus faciles à suivre que ceux d'assimilation. Si le mécanisme en est mieux connu, c'est grâce aux diastases, dont le rôle, comme on sait, consiste à détruire progressivement des maté- riaux complexes pour les ramener à des composés de plus en plus simples, que l'on peut recueillir el doser. On en connaît le point de départ et le point d'arrivée. Les phénomènes qui procèdent par syn- thèse sont soumis dans la Nature à des influences si subtiles et si complexes que leur mécanisme semble, le plus souvent, échapper à notre entende- ment. C'est aussi pour cette raison que l'on connait beaucoup mieux les produits de dédoublement de l'amidon et les lois qui régissent leur transforma- tion que les substances et les lois qui concourent à sa naissance. Cependant, lorsque nous voulons reproduire dans le laboraloire ce que nous voyons dans la Nature, nous nous trouvons fréquemment 1 En effet, ceux-ci sont protégés par une enveloppe contre. les rayons du soleil, où bien ils sont enfoncés profondément dans le sol. ee D « J. WOLFF — EXPÉRIENCES SUR L'AMIDON A61 arrêtés par des obstacles insurmontables, et ce que nous observons in vitro nest le plus souvent qu'une imitation grossière des phénomènes natu- rels. Lorsqu'une graine commence à germer, il se produit à la fois un travail de dégradation et un travail d'assimilation. Tandis que, d’un côté, les grains d’amidon se désagrègent, se liquéfient et se saccharifient sous l'influence d'agents diasta- siques connus sous les noms de cylase, d'amylase et de dextrinase, sécrétés par le scutellum' de l'embryon, d’un autre côté la vie se manifeste par la fonction respiratoire et l'assimilation des pro- duits de la saccharification et de la protéolyse” par la plumule (jeune plante) et les radicelles. Ce travail de nutrition, qui se fait aux dépens de lalbumen, permet à la jeune plante de se développer rapide- ment, et il se poursuit jusqu'à épuisement complet des réserves d’amidon et de matière azotée. Par- venu à ce stade de son développement, le végétal puise dans l'atmosphère et dans le sol les principes nécessaires à sa vie. Il est bien évident que l’on ne pouvait songer un seul instant à suivre ces phénomènes dans leur complexité ; il a fallu les disséquer, les prendre un à un et les étudier séparément et méthodiquement. Les mieux étudiés sont ceux qui se rapportent à la saccharification et à la protéolyse, et l'étude en est relalivement facile, parce qu'elle peut se poursuivre en dehors de la cellule vivante. Elle consiste, pour la saccharification, à soumettre l’amidon extrait des végétaux à l'action d'une macération diasta- sique de malt dans des conditions que l’on peut faire varier à volonté. Quant à la protéolyse, on l’étudie sur la macération elle-même ; car celle-ci renferme à la fois les matières albuminoïdes, des composés azotés solubles et les diastases protéo- lytiques. Il est bien évident que l'on ne réunit pas dans ces conditions tous les éléments qui seraient nécessaires à une étude rationnelle de phénomènes naturels aussi complexes; tout ce que l’on peut dire, c’est qu'en dehors de la cellule vivante les choses se passent ainsi”. Parmi les auteurs qui se sont occupés de cette question, les uns ont étudié les produits de la sac- charification aux diverses températures, n’envi- sageant que le côté chimique du problème, tandis que les autres se sont préoccupés du côté phy- siologique, en notant au fur et à mesure du dé- veloppement de la graine la quantité d'acide car- ! C'est la membrane en forme de bouclier qui sépare l'embryon de l'albumen (sac nourricier). * On nomme protéolyse la digestion des produits azotés par les diastases dites protéolytiques. * Le phénomène de la respiration, qui joue un rôle si actif pendant la germination, est nécessairement négligé lorsqu'on étudie les lois de la saccharification. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. bonique dégagée par sa respiration, les propriétés des tissus élaborés et l’activité croissante des dias- tases destinées à agir les unes sur l'amidon, les autres sur les matières azotées. III Les travaux de Dubrunfaut, de Payen et Persoz, Musculus, Guérin-Vary, O’Sullivan, Brown et Morris, Brown et Héron, Effront, Pottevin, Naegeli, Prior, Windisch, Kjeldahl sont trop connus pour que nous nous étendions longuement sur eux; aussi me bornerai-je à passer rapidement en revue les faits les plus récemment acquis à la science. Parmi ceux-ci, les phénomènes dits d'activation méritent plus particulièrement d'attirer notre attention. Kjeldah]l à remarqué que de très petites quantités d'acide favorisent la saccharification diastasique, et que celle-ci se ralentit ou s'arrête dès que l’on dépasse cette petite dose favorisante. M. Fernbach, serrant la question de plus près, trouve que l'addition d'acide phosphorique ou sul- furique, en transformant les sels neutres en sels acides, hâte notablement la saccharification par la diastase, mais qu'une trace d'acide libre l’entrave. Il préconise à cette occasion l'emploi du méthyl- orange, vis-à-vis duquel les phosphates neutres ont une réaction alcaline. Ce réactif passe du jaune clair au jaune orangé dès que les phosphates neutres sont entièrement transformés en phos- phates acides. M. Fernbach a pu établir ainsi que c'est la neutralité parfaite à ce réactif qui hâte le plus la saccharification diastasique. Il à fait d'ail- leurs la même constatation en ce qui concerne la protéolyse des matières azotées du malt. Tout récemment, MM. Maquenne et Roux ont trouvé que, lorsqu'on neutralise l'empois d'amidon en se servant de l’orangé comme indicateur, par l'addition d'acide sulfurique, en ayant soin d'ajouter en plus à l'empois la quantité d'acide nécessaire à la neutralisation des 2/3 de l'extrait de malt environ, on augmente considérablement le rendement en maltose. On estimait généralement que, dans les conditions les plus favorables, on pouvait trans- former 80 °/, de l’amidon en maltose. Un empois, qui, au bout de vingt-quatre heures de séjour à 50°, donne, danses conditions ordinaires, 89,8 de maltose, en fournit 97,2 si l’on a eu soin de neutra- liser l’'amidon. Si on prolonge les deux expériences pendant quarante-huit, soixante-dix-huit, quatre- vingt-seize heures, on voit la quantité de maltose augmenter progressivement pour atteindre 98,3 °/, dans le premier cas et 100,5 dans le second. On voit aussi que le facteur «temps » joue un rôle important dans cette transformation. MM. Ma- quenne et Roux s'appuient sur le fait que la pre- 11° 162 J. WOLFF — EXPÉRIENCES SUR L’AMIDON mière phase de la saccharification est très rapide, tandis que la seconde progresse avec une très grande lenteur, pour conclure que l’amidon est formé de deux substances présentant des caractères différents. Ils nomment la première amylose et la seconde amylopeetine. Se basant encore sur d'autres considérations que nous ne pouvons exposer ici, les mèmes auteurs estiment que l’amidon renferme environ 80 °/, d'amylose et 20°/, d'amylopectine. Vers la même époque, j'ai constaté, avec M. Fern- bach qu'en prolongeant l'action de l'extrait de malt sur l'empois de fécule pendant un temps suf- fisant à la température de 50°, on arrive à trans- former la plus grande partie de la dextrine en mal- tose, Dans une expérience où l’on opérait en milieu neutre, on à pu obtenir au bout de quatre-vingt- seize heures 103,8°/, de maltose pour 400 d'amidon". Nous avons montré, en outre, que l’action favo- risante du milieu neutre s'exerce aussi bien sur la dextrine que sur l'amidon. Pour le prouver, nous ajoutons l'acide après la transformation de lamidon en dextrine et maltose. C'est peut-être à tort que l'on a désigné ces phé- homènes sous le nom d'activation; car, en réalité, il ne s'agit là que d’un oplimum d'action. C'est un milieu neutre à l'orangé qui convient le mieux aux diastases du malt. MM. Maquenne et Roux ont découvert également une propriété curieuse de l'extrait de malt. Lors- qu'on abandonne celui-ci sous une couche de toluène, à la température ordinaire, il acquiert avec le temps la propriété de transformer beaucoup plus rapidement en maltose les portions les plus réfractaires de la dextrine. Ainsi, un extrait de malt conservé pendant un mois environ peut accroitre sa puissance de 40 °/,. Cela veut dire que, si au bout de vingt-quatre heures un extrait de malt ordinaire produit, par exemple, 94 °/, de mal- tose d'amidon, lé même extrait conservé peut en produire 403,4 pendant le même temps. Il faut noter que, pour obtenir ces résultats, il n'est nulle- ment neutraliser l’amidon. Men- tionnons, pour terminer, les observations d'Effront nécessaire de au sujet des propriétés activantes de l'asparagine dans les milieux parfaitement neutres. Des doses minimes de cet acide amidé favorisent beaucoup la saccharification. Si l’on représente par 1 la quan- tité de mallose qui a pris naissance dans les con- ditions ordinaires, on peut représenter par 10 l'ac- célération due à l'asparagine. IV Dans toutes les expériences que nous venons de — ! Théoriquement, 100 parties d'amidon pourraient donner en s'hydrolysant, 105,5 de maltose. rapporter, on n’a envisagé qu'un côté du problème de lasaccharification, c'est-à-dire la transformation de l’amidon cru ou gélifié en maltose et en dextrine, et on a laissé dans l'ombre la partie essentielle du phénomène : la liquéfaction. Jusqu'ici, on s'est contenté d’effleurer cette question, ce qui est assez surprenant, étant donnée son importance. En effet, que voyons-nous dans la nature? Nous constatons d'abord, avec Effront, que le pouvoir liquéfiant de l'amylase s'accroît pendant la germination d'une facon beaucoup plus intense que le pouvoir saccha- rifiant. Mettons en regard les chiffres obtenus par Effront pour ces deux actions* : DURÉE POUVOIR POUVOIR de la germination saccharifiant liquéfiant BHOUTSMENENENC I RNENT 1,06 6,6 ON UP et PEER TRES 11,4 à = . 4,40 43,1 Aa — : 1,38 16,4 16 — . : 1,80 18 ot 0 0 22,8 23 — do 2,50 32 D NRC MERE 2,30 36 CA RES : 2,10 40 39 — 2,18 40 Ces chiffres sont suggestifs et montrent combien la Nature est généreuse à l'égard de la diastase liquéfiante. Ce n’est pas sans raison : en effet, elle joue un rôle prépondérant dans l'attaque des grains crus. D’autre part, la pratique enseigne que, sous l'influence des diastases du malt, les empois se liquéfient avant de se saccharifier. Cette liquéfac- tion peut se faire au bout de quelques minutes, même à la température ordinaire. L'amidon non gélifié se comporte tout différemment, ainsi que nous l'avons vu plus haut. L'attaque des grains crus, surtout lorsqu'il s’agit de la féeule, se fait très mal à 50°, À la température ordinaire, quelle que soit l'origine de la matière amylacée, et quelle que soit la durée du temps de contact, l'attaque est presque nulle. Nous ne pouvons donc pas repro- duire in vitro, dans les conditions où il se trouve réalisé dans la Nature, le phénomène de la liqué- faction des grains crus. En effet, un grain d'org peut germer dès la température de 5°, en passant par un optimum à 20°, la limite supérieure étant voisine de 37°. Nous savons bien que la cytase séerétée par le scutellum accomplit un travail pré- paratoire de désagrégation. Mais nous connaissons mal les circonstances qui favorisent l’action liqué- fiante de l'amylase. Nous inclinops à penser que la respiration de la graine, par la chaleur qu'elle déve- loppe, n’est pas un facteur négligeable au point de vue de la liquéfaction. Il suffit de se rappeler com- bien la température s'élève dans les couches infé- rieures des grains en germination entassés dans 1 C. R., t. CXLI, p. 626. vice 6 7e ty ie A J. WOLFF — EXPÉRIENCES SUR L'AMIDON les germoirs. Toute cette chaleur à son foyer au sein même de la graine. Pourquoi ne serait-elle pas utilisée au profit de l’action liquéfiante? La du milieu semble aussi une influence sur la marche du phénomène. Mais abandonnons pour le moment le domaine de la Physiologie et contentons-nous d'explorer celui de la Chimie biologique. Quelques auteurs semblent attribuer à une seule diastase des propriétés à la fois liquéfiante et saccharifiante. Toutefois, depuis que Duclaux à émis des doutes à ce sujet, et s'est prononcé d'une facon calégorique en faveur de la conception de deux diastases différentes, la question a été exa- minée de plus près par quelques auteurs. Pottevin a montré nettement que l’on pouvait séparer les deux actions en chauffant de l'extrait de malt à 80°. Dans ces conditions, l’action liquéfiante seule per- siste. D'autre part, MM. Maquenne et Roux attri- buent à une diastase liquéfiante la propriété de solubiliser l'amylopectine. Nous-même avons re- marqué que, sous l'influence de la diastase de l'orge, les empois peuvent fournir une proportion consi- dérable de maltose avant de se liquéfier (environ la moitié de l'amidon employé). C'est surtout à la température ordinaire que cette aclion est remar- quablement nette. En outre, nous avons pu mesurer le pouvoir liquéliant et saccharifiant de nombreuses macérations de malt, avant et après passage sur bougie Chamberland, et nous avons constaté que le pouvoir sacchariliant reste très sensiblement le même alors que le pouvoir liquéfiant disparait presque complètement. Voilà donc quelques argu- ments sérieux en faveur de l'hypothèse de Duclaux. Enfin il était intéressant de pouvoir démontrer qu'il est possible, sans action chimique brutale et sans l'intervention de l’amylase, de réaliser la liqué- faction des empois en dehors de toute action saccha- rifiante. Je viens d'arriver récemment à ce résultat en soumettant de la fécule gélifiée à l’action de l’eau oxygénée en milieu légèrement alcalin. Ce phénomène est évidemment le résultat d'une oxydation; l’alcalinité semble également y jouer un rôle. En premier lieu, l’ammoniaque facilite le déga- gement d'oxygène et, en second lieu, elle semble fixer certains éléments acides fortement unis à l’amidon, tels. que les phosphates acides, par exemple. M. Fouard' à étudié l’action des acides et des bases sur des solutions colloïdales d'amidon? et il a démontré que les acides et les sels à caractère acide, en se fixant sur l'amidon, produisent sa coagulation, alors que les bases et les sels à carac- réaction exercer * Du laboratoire de M. Etard, à l'Institut Pasteur. 2 C, R. du 4 mars 1907, 463 tère basique permettent à l’amidon coagulé de se redissoudre”. D'après l’auteur, cet amidon col- loïdal est le premier colloïde organique bien défini présentant le phénomène de reversibilité. Suivant qu'un phosphate est acide ou basique, on observe une coagulation ou une liquéfaction. Dans une Note antérieure”, j'ai insisté sur l’action liqué- fiante des corps à caractère basique lorsqu'on les fait agir sur de l’amidon préalablement oxydé en milieu acide. Ce produit, après lavage à l’eau dis- tillée, renferme encore des phosphates acides et se gélifie par la chaleur. Il suffit de traces de com- posés basiques pour amener une dissolution rapide de l’empois. Ce sont là évidemment des phéno- mènes du même ordre. On ne peut s'empêcher de faire un rapproche- ment entre ces phénomènes d’oxydation el la liqué- faction diastasique* à laquelle on est tenté d’attri- buer une origine peroxydasique ou catalytique. Malgré ces apparences, nous n'avons pu jusqu'ici fournir une preuve qui justifie cette manière de voir. Nous avons répété sans succès les expériences de M. Petit. M. Petit rapporte des expériences où il a pu liquélier des empois à l’aide de mélanges d’al- bumine, d'oxyde de fer et de manganèse, el nous sommes d'avis que les substances dont il s’est servi dans ses recherches n'étaient point exemptes d’a- mylase. Effront vient, d’ailleurs, de démontrer que les spores du Bacillus subtilis, que renferme fré- quemment l’albumine, sécrètent de l’amylase, même après avoir été chauffées pendant 10 minutes à 1109. Nous venons de voir que les solutions colloïdales d’amidon qui ont servi à M. Fouard de point de départ pour ses recherches se prennent en gelée sous l'influence des acides et des sels acides, alors que les corps basiques produisent l'effet inverse en permettant à cette gelée de se redissoudre. (Ces changements d'état se font plus vite à froid qu'à la température ordinaire.) Dans le premier cas, le colloïde fixe de l'acide ; dans le second, il le resti- tue, ou plutôt ce sont les bases qui le lui enlèvent. J'insiste sur ces faits parce qu'ils nous permettront d'interpréter des phénomènes en apparence contra- dictoires. Le produit préparé par M. Fouard, d’après un procédé imaginé par M. Fernbach et moi, se distingue de l’amidon ordinaire par certaines pro- priétés que nous allons décrire, et qui sont imhé- rentes à son mode de préparation. La fécule est laissée quelque temps en contact avec de l’eau chlorhydrique à 1°/,,, puis lavée à fond à l’eau distillée, séchée à 30° et enfin chauflée quelques heures à l’étuve vers 100°. Le traitement à 1 Les sels neutres n'ont aucune action. 2 C. BR. du 11 décembre 1905. 3 La macération du malt, comme l'on suit, renferme une peroxydase (diastase oxydante) et de la catalase. l'acide chlorhydrique faible a pour but d'enlever les bases alcalino-terreuses et de transformer les phosphates neutres en phosphates acides. Si on examine l'amidon‘après sa dessiccation à 30°, l'em- pois qu'il fournit est aussi visqueux qu avant tout traitement. Au point de vue physique, rien ne le distingue de l’amidon primitif, malgré l'enlèvement des terres alcalines et la transformation des phosphates neu- tres en phosphates acides, car, si on lui restitue, par un simple lavage à l’eau calcaire ou alcaline, suivi d'un lavage à l’eau distillée, les bases qu'il a perdues, et si on le sèche de nouveau à 20°, le chauffage à l'étuve vers 100° ne le transforme plus en amidon soluble. Mais si, après traitement à l'acide, lavage et des- siccation, on le soumet à l’action de la chaleur sèche vers 100°, son état physique se modifie petit à petit, et il se transforme progressivement.en amidon soluble, C'est grâce à l'absence de phosphates neu- tres que l'amidon peut se transformer par la cha- leur en une modification soluble”. Lorsque son état physique à été ainsi modifié, sa solution colloïdale absorbe, pour sa saturation, la même quantité de soude ou de potasse que l'em- pois obtenu après dessiccation à 30°. Il résulte de mes dernières expériences que celte absorption d'alcali est due, exclusivement, à la transforma- tion de phosphates acides en phosphates neutres, et nullement à une combinaison des bases avec l'amidon. Au point de vue chimique, cette modifi- cation de l'amidon présente exactement les mêmes propriétés que l'amidon primitif, mais l'addition de chaux ou de soude, au produit soluble, ne per- met plus de le transformer en empois. Cette petite digression était nécessaire pour éta- blir qu'entre les expériences de M. Fouard et celles que je vais rapporter, il n'y à nulle contradiction. M. Boidin avait déjà attiré l'attention sur la faei- lité avec laquelle on peut solubiliser les moûts de grains sous pression lorsqu'on à soin de transfor- mer les phosphates neutres qu'ils contiennent en phosphates acides. Il attribue aux phosphates neu- tres une influence gêénante, et aux phosphates acides une influence favorisante. Les températures auxquelles il opère sont telles (150°) que l'amidon non seulement est liquéfié, mais encore sacchari- fié. Nous avons repris ces expériences, M. Fernbach et moi, en nous servant d'un amidon très pur et très voisin de la neutralité, et nous avons eu soin de ramener la réaction de l'empois à la neutralité parfaite avant d'y ajouter les substances dont nous voulions mesurer les effets. Nous avons comparé ‘ Avant son séjour à l'étuve à 1000. fait ressort de nombreuses expériences. 2 Ce J. WOLFF — EXPÉRIENCES SUR L'AMIDON entre elles les viscosités obtenues par un chauffage à 120° pendant trente minutes, mais nous n'avons pas observé dans ces conditions d'action sacchari- fiante avec le phosphate acide. Nous avons pu constater ainsi que l’optimum correspond à la neutralité à l’orangé. Celle-ci est obtenue quand les phosphates neutres sont trans- formés en phosphates acides, el lorsque l'amidon ne renferme que des sels neutres à l’orangé. On obtient ce résultat par addition d'acide sulfurique en présence de cet indicateur. Des traces d’alcali, de terres alcalines, d'ammoniaque mème, empé- chent la liquéfaction, grâce à la transformation des phosphates acides en phosphates neutres. Ces derniers, à des doses très faibles, exercent donc naturellement une influence anti-liquéfiante. La liquéfaction diastasique des empois obéit à des influences analogues. Comme nous l'avons vu pour la liquéfaction sous pression, c'est la neutralité au méthylorange qui favorise le plus l'action diastasique liquéfiante. Les terres alcalines, les alcalis, les phosphates neutres (alcalins à l’orangé), entravent considérablement cette action. Un petit excès d'acide minéral libre contrarie fortement l'action diastasique. Cette in- fluence génante est encore bien plus manifeste si, au lieu d'ajouter l'acide à l'empois avant l'addition de diastase, on ajoute l'acide directement à la ma- cération de malt. Dans ce cas, l'effet est foudroyant et irrémédiable, car la neutralisation immédiate par un alcali de la totalité de l'acide ajouté ne rend pas à l'extrait de malt sa propriété liquéfiante. La macération de malt supporte beaucoup mieux l’ad- dition d'acides organiques, tels que l'acide lac- tique ou l'acide succinique. Ce dernier surtout est facilement supporté par la diastase à des doses assez fortes et son influence favorisante est très remarquable si le temps de contact n'est pas trop prolongé. Les phosphates acides, à doses massives, exercent également une action favorable sur la dias- tase, grâce à leur faible acidité. Les sels neutres sont sans action appréciable. Il se dégage des expériences de M. Fouard et des nôtres que, dans les phénomènes de liquéfaction, de coagulation et de décoagulation, les principaux facteurs qui entrent en jeu sont : 4° la réaction des sels ; 2° l'état physique de l'amidon. Telles sont, brièvement résumées, les dernières recherches sur cette question si complexe de l'ami- don. Le moment n'est peut-être pas éloigné où, gräce aux efforts combinés de la Physique, de la Chimie et de la Physiologie, nous verrons s'enchai- ner harmonieusement des faits qui, hier encore, ne semblaient avoir entre eux que des liens bien J. Wolff, Atlaché à l'Institut Pasteur de Paris. fragiles. } î é » d H DAS RAt CLS BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Fourrey (E). — Curiosités géométriques. — 1 vol. de vur-427 pages. (Prix : 3 fr. 50.) Vuibert et Nony, éditeurs. Paris, 1907. Comme dans ses « Récréations arithmétiques », l'auteur à voulu instruire en récréant. Rien de didac- tique, ni même de systématique. Pas d'autre lien entre les divers chapitres que le souci de rester élémentaire. Ainsi, après quelques pages historiques et critiques sur les « définitions », viennent les vingt-quatre types de démonstrations du théorème de Pythagore, et, entre ce chapitre et les « Paralogismes », s’intercale l'étude détaillée de « casse-tête » géométriques. La deuxième partie (la Géométrie de mesure) débute par « les ancêtres de nos instruments de dessin et de topo- graphie » et continue par la mesure des polygones et du cercle, et de leurs divisions, puis par la stéréotomie. I n'y est naturellement pas question des procédés ordinaires et généraux que tous les livres de Géométrie enseignent à grand renfort de théorèmes; on y trouve les solutions particulières et surtout les curieuses méthodes de l'Antiquité et du Moyen-Age. Une dernière partie traite d'applications diverses : géométrie et calcul, mélanges historiques. À signaler une intéressante étude sur les alvéoles des abeilles. Le volume ne contient pas, à proprement parler, des « Récréations » et « Jeux » (comme dans Lucas ou Ahrens, par exemple), mais aussi la rubrique « subti- lités » y est réduite judicieusement à très peu de chose. En résumé, l'ouvrage, qui contient une foule de notes bibliographiques et historiques, peut être recom- mandé à ceux qui, possesseurs des éléments, veulent perfectionner et aiguiser leur esprit, Une dernière remarque : À la tèle du livre est une esquisse de l'His- toire de la Géométrie élémentaire. Qu'il soit permis de constater ici et de regretter qu'on en soit encore en France à attendre une Histoire en quelque sorte déti- nitive des Mathématiques. A cet égard, l'Allemagne possède les excellentes « Vorlesungen über Geschichte der Mathematik » de M. Cantor. E. Devos, Professeur à l'École professionnelle de Genève. Féret (R.), Ancien Elève de l'Ecole Polytechnique, Chef du Laboratoire des Ponts-et-Chaussées de Bou- logne-sur-Mer. — Etude expérimentale du Ciment armé. — 1 vol gr. in-8° de l'Encyclopédie indus- trielle Lechalas, de 777 pages, avec 196 figures. Gau- thier- Villars, éditeur. Paris, 1907. La première partie décrit les expériences effectuées depuis treize ans, on peut presque dire depuis les premières applications du ciment armé. Certaines de ces expériences ont été exécutées par des méthodes assez rudimentaires, beaucoup moins précises que celles qu'on emploie aujourd'hui. L'auteur a pensé avec raison qu'elles pouvaient néanmoins donner des indications utiles, notamment des arguments pour ou contre les nouvelles théories qu'on pourra émettre sur le ciment armé. Une chose en effet, ressort, clairement de la seconde partie, consacrée aux théories et calculs : c’est que la ® théorie du ciment armé est loin d'être fixée. Cette seconde partie montre la difficulté du problème, par la multiplicité mème des facteurs qu'il faudrait faire intervenir pour pouvoir calculer exactement un ouvrage quelconque en ciment armé. Heureusement, dans la pratique, une pareille précision n'est pas nécessaire. La bibliographie qui suit réunit en une nomencla- ture fort complète les livres et articles publiés sur la question, classés méthodiquement pour que le lecteur y trouve groupés les documents relatifs à tel point qui l'intéresse. Enfin, dans une quatrième partie, l’auteur expose des aperçus nouveaux sur les résistances des mortiers et bétons aux divers genres d'efforts, agissant avec ou sans chocs, exercés d’une manière continuellement croissante ou répétés un grand nombre de fois. En par- ticulier, il donne beaucoup de détails sur l’adhérence de ces matériaux entre eux et avec les pierres et le fer, question très peu étudiée jusqu'ici. Le livre est riche en documents et chiffres de toute espèce, fort bien présentés et commentés par un spécialiste de premier ordre. GÉRARD LAVERGNE, Ingénieur civil des Mines. 2° Sciences physiques Hobart (H.M.), Membre de l'Institut britannique des Ingénieurs électriciens. — Moteurs électriques à courant continu et alternatif. Théorie et cons- truction. — Traduit de l'anglais par F. Acnaro, Ingénieur à la Societé alsacienne de Constructions mécaniques. — À vol. gr. 1n-8° de 459 pages avec 526 figures et 2 planches. (Prix : 25 fr.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1907. Le nom de M. Hobart commence à être bien connu des électriciens en Angleterre, aux Etats-Unis et en Allemagne, et son livre sur les moteurs électriques à rencontré dans ces trois pays un éclatant succès. Aussi faut-il féliciter M. Achard de l'avoir mis à la portée du public francais. L'étude des moteurs électriques a fait déjà l'objet de nombreux ouvrages. Mais la plupart nécessitent une application de connaissances mathématiques élevées. L'ouvrage de M. Hobart, au contraire, à été concu dans un esprit essentiellement pratique, l'auteur sef- forcant de mettre en relief les questions les plus impor- tantes en les présentant sous une forme qui permet de renoncer presque entièrement à l'emploi des formules algébriques. La question de la commutation dans les moteurs à courant continu est, entre autres, traitée par une méthode très simple ; et la déduction, faite sur un exemple numérique, de la théorie du moteur asyn- chrone triphasé est également à signaler. L'absence de formules est, d'ailleurs, compensée par une riche série d'exemples numériques, où les calculs entiers de moteurs de différentes provenances sont développés dans tous leurs détails. C’est là le guide le plus sûr qu'un calculateur novice puisse rencontrer, tandis que le praticien trouve un vif intérêt à com- parer ces exemples avec le fruit de sa propre expé- rience. Nous ne doutons pas que praticiens et étudiants ne fassent un accueil favorable à l'ouvrage de M. Hobart. Dufour (A.), Ancien élève de l'Ecole Normale Supé- rieure, Professeur au Lycée Louis-le-Grand. — I. Sur les spectres de l'hydrogène. — II. Sur l'ac- tion de l'hydrogène sur le silicium et la silice. (Thèses de la Faculté des Sciences de Paris). — 1 vol. in-8° de 102 pages avec 4 planches en photo- typie. L. Barnéoud, imprimeur. Laval, 1907. L'étude de M. Dufour est surtout recommandable par le soin avec lequel il s’est attaché à varier les con- ditions dans lesquelles il a produit les spectres de l'hydrogène pur, Il s'était principalement donné pour 466 but de rechercher l’origine du second spectre de ce gaz, spectre à lignes nombreuses et peu intenses, qui fut jadis attribué à l'acétylène, mais que, contraire- ment à l'opinion de Cornu, les recherches plus récentes de Ames, de Hutton, de Schumann, de Lewis, de Par- sons, ont bien rattaché à l'hydrogène. M. Dufour à voulu, par des expériences plus nombreuses et plus variées que celles de ses devanciers, et en construisant avec grand soin des tubes en silice où en anhydride borique fondu, écarter quelques doutes qui subsistaient encore à la suite des travaux de Richards sur le rôle de la vapeur d’eau dans la production des deux spectres de l'hydrogène. L'étude des tubes de Geissler sous faible pression, aussi bien que celle des tubes à arc sous forte pression, dans des conditions qui excluent absolument la présence de tout composé carboné, ou d'hydrogène silicié, ou de la vapeur d’eau, amènent l'auteur à la conclusion bien établie : que le spectre constitué par l’ensemble des raies He, H6, I... et du second spectre est caractéristique du gaz traversé par la décharge, et que ce spectre est bien celui de l'hydro- gène sec. Quant au spectre obtenu par la décharge dans la vapeur d’eau sous une pression de quelques centimètres de mercure, il est composé à peu près uniquement du spectre stellaire de l'hydrogène, Hx,H6,H+..., obtenu aussi bien dans ce gaz absolument sec ; il n’est done pas dû à la vapeur d’eau elle-même, mais au produit de sa dissociation. Après avoir repro- duit les tables À des raies du second spectre obtenues par Hasselberg, puis par Frost, M. Dufour fait connaitre celles qu'il a mesurées entre À 4935 et 13662 avec un réseau concave de 3 mètres de rayon, en faisant jouer à la partie capillaire de son tube de Geissler, donnant une image linéaire, le rôle de fente. A notre avis, l’auteur eût été mieux inspiré en projetant sur la fente conservée. l'image, observée « en bout », du tube placé horizontalement, celui-ci pouvant d’ailleurs être en verre ordinaire, car la translucidité de cette matière est complète pour les radiations dont il s’agit. On eût obtenu ainsi des lignes beaucoup plus vives, facilement photographiables dans les spectres du second et du troisième ordre, en donnant une exactitude plus grande que la demi-unité d’Angstrüm. En se contentant de cette approximation, il eût été plus avantageux d'employer un spectrographe à prisme, comme l’a fait, par exemple, Eder dans son beau travail sur le spectre de flamme de l'hydrogène (spectre de la vapeur d'eau) que M. Dufour ne cite pas. Cette légère critique étant faite, nous constaterons tout l'intérêt que pré- sente, dans ce mémoire, l'étude du phénomène de Zeeman dans le second spectre, avec un tube intro- duit dans un électro-aimant, la décharge se produisant parallèlement aux lignes de force. Le plus grand nombre des lignes est insensible au champ magnétique; parmi celles qui se dédoublent, la plupart présentent le phénomène normal : écartement maximum pour les composantes polarisées parallèlement aux lignes de force. Quelques raies présentent le phénomène inverse, dont on connait peu d'exemples. En discutant diffé- rentes hypothèses suggérées par tous ces faits, l'auteur conclut à la probabilité de la dissociation de l'hydrogène, en faibie proportion sans doute, et se pro- duisant vers 1.100°; cette théorie, comme celle des ions, explique l'absence du second spectre de l'hydro- scène dans le spectre de la vapeur d’eau, ét donne une interprétation suffisante des différents spectres fournis par les tubes à hydrogène et par les astres. Ce Mémoire tire surtout son intérêt des conditions variées mises en jeu et des précautions, rationnellement observées, pour la préparation des expériences. Il est suivi d’une seconde thèse portant spécialement sur l'action exercée par l'hydrogène sur les tubes de silice, et sur la réduction de celle-ci à haute tempé- rature, ce qui explique les expériences de Boussingault et de Schutzenberger sur la siliciuration des creusets de platine. À. DE GRAMONT, Docteur ès sciences. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 3° Sciences naturelles Lucas (C. P.). — A historical Geography of the British Colonies. Tome 1. The Mediterranean and Eastern Colonies. 2° édition, revisée par M. R. E. Sruggs. — 1 vol. in-18 de 304 pages, avec fiqures et cartes. (Prix: 6 fr. 25.) The Clarendon Press. Ox- ford, 1906. : Cet ouvrage, qui en est à sa deuxième édition, est l'une des meilleures géographies élémentaires des colonies anglaises. Le premier volume concerne les possessions qui se trouvent sur ou près de la grande route commerciale des Indes et de l'Extrême-Orient : Gibraltar, Malte, Chypre, Aden, Somaliland britan- nique, Ceylan, les Maldives, Maurice et ses dépendances, les Seychelles, les Etablissements du détroit de Ma- lacca, les Etats Malais fédérés, Bornéo, Labouan, Bru-. nei, Sarawak, Hongkong et Wei-ha-wei. Pour chacune de ces possessions, l’auteur donne une courte histoire de la colonie, le mode d'administration actuel, la géographie physique, les productions du sol, la description de la population et des villes, le com- merce et les voies de communication. De bonnes cartes accompagnent le texte. s Cet ouvrage rendra service à tous ceux qui veulent acquérir une idée générale de ce que sont les colonies … de nos voisins d’outre-Manche. Massart (J.), Professeur à l'Université de Bruxelles. — Recueil de l'Institut botanique Léo Erréra. Tome VI. — 1 vol. gr. in 4°. (Prix : 25 francs.) La= mertin, éditeur. Bruxelles, 1907. Ce recueil, fondé par Erréra, est continué mainte- nant sous la direction de M. Massart. Le tome VI con- tient les travaux récents de l'Institut botanique de Bruxelles, et parmi eux quelques Mémoires d Erréra laissés inachevés par sa mort, mais que ses collabora- teurs et élèves ont mis au point, grâce aux notes détail- lées laissées par le regretté savant. Les travaux con- tenus dans le sixième volume sont les suivants : J. Massarr. — Sur l'irrilabilité des plantes supérieures (pp. 1-56). I. La position d'équilibre des plantes supérieures est amenée par le conflit ou la collaboration de multiples facteurs : De nombreux organes ne sont pas réellement en équi- libre ; tel est le cas des rameaux couchés, qui tendent naturellement à se relever, mais qui sont maintenus de force en direction horizontale par suite de l'absence de zone motrice dans leurs tissus. II. Les résultats du premier chapitre sont complétés par les observations sur l'inégale croissance en épais- seur des Ficus grimpants. Divers excitants modifient la croissance et déterminent un véritable balancement. L'interférence de la lumière avec la croissance en épaisseur est très nette dans les rameaux et les tiges aériennes des Ficus grimpants, la face la moins éclai- rée étant celle qui s'épaissit le plus. Cette action de la lumière est due non à son intensité, mais à sa direction. IIT. Trois sortes de racines aériennes se rencontrent sur les Ficus grimpants : 1° des racines adhésives pré- coces, naissant sous les nœuds, sur n'importe quelle. face ; elles croissent devant elles jusqu'à ce qu'elles rencontrent un obstacle; 2° des racines adhésives tar- dives, naissant sur tout l'entre-nœud à la limite de l'ombre et de la lumière; elles fixent la lumière et sont sensibles au contact; 3° des racines nourricières, qui naissent sur la face des rameaux tournée vers la terre; elles fixent la lumière, descendent vers la terre et sy ramifient. Pa. Mozze. — Un alcaloïde dans Clivia miniata Benth. (pp-57-72 avec 2 pl. color.). L'auteur a découvert dans le Clivia miniata un alcaloïde qu'il nomme cliviine et qui est contenu dans nastisme, géotropisme, phototropisme, etc. É BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 467 toutes les parties de la plante. Dans la racine, le rhizome et la feuille, il est localisé dans les cellules à raphides et les cellules compagnes des tubes criblés ; dans les feuilles très jeunes, il peut aussi en exister dans l’épiderme et dans quelques cellules du méso- phylle. Dans la hampe florale, les rayons de l'ombelle et la paroi de l'ovaire, on rencontre la cliviine dans les ! cellules à raphides. Le tégument externe de l’ovule, le style, les étamines et les pétales en renferment égale- men£. L. Erréra. — Sur Ja limite (le petitesse des organismes (pp. 73-82). On peut admettre avec une grande probabilité qu'il ne saurait exister d'organismes qui soient, quant aux dimensions, aux Bactéries ordinaires, ce que celles-ci sont aux êtres supérieurs : l'existence de microbes quelques centaines de fois plus petits que ceux que nous connaissons serait déjà une impossibilité. Josépnine Wéry. — Quelques expériences sur l'attrac- tion des Abeilles par les fleurs (pp. 83-124). Pour l'Abeille, l'attraction exercée par la forme et le coloris des fleurs est environ quatre fois plus forte que celle qu'exercent leur pollen, leur parfum et leur nec- tar réunis. L. Erréra. — Conilits de préséance et excitations inhibitoires chez les végétaux (pp. 125-152, avec 6 pl.). Lorsqu'on à brisé la flèche d’une Conifère, celle-ci se trouve remplacée par d'autres rameaux. Dans les Picea, les Abies, Larix, Pinus, etc., c'est l’une des branclres les plus proches du sommet qui se substitue à lui; de plusieurs branches à peu près équidistantes, c’est celle qui déjà s'est montrée la plus vigoureuse qui l'emporte. Tant que le sommet existe avec sa vi- gueur normale, le relèvement n'a pas lieu, même si l'on a complètement enlevé l'écorce au-dessous de lui par annélation. Il semble que, dans ce cas, l'influence du sommet, autrement dit son action inhibitoire, se transmet par l'intermédiaire des cellules de la moelle et des rayons médullaires. Chez les Araucaria, la Suppression du sommet n’en- traîne pas le relèvement d'un rameau latéral : il se développe au-dessous du sommet lésé des bourgeons qui se substituent à lui. De plus, l'annélation élimine totalement l'influence inhibitoire dusommet,quisemble alors se transmettre exclusivement par l'écorce. En résumé, on peut admettre que le sommet envoie vers les rameaux latéraux des excitations inhibitoires qui les empêchent soit de se développer (Araucaria), soit de se redresser (Picea). Gette action cheminerait en descendant tantôt exclusivement par l'écorce, tan- tôt par toutes les cellules du tronc ; elle peut même se transmettre de la flèche du sujet à un rameau latéral grefté. F. van RyYssELBERGHE. — Sur les propriétés physico- chimiques des mélanges dissous et la détermination physiologique de leur pouvoir osmotique (pp.157-221). Il est presque impossible de résumer ce travail, bourré de chiffres; nous en extrairons seulement ces données: 10 que les travaux basés sur l'analyse de la pression osmotique cellulaire sont entachés d'erreur s'ils ne tiennent pas compte de la dissociation particu- lière des corps dissous dans le suc cellulaire ; 2° que la théorie de Mac Gregor sur la condition d'équilibre et la constitution intime des mélanges d'électrolytes dissous, ainsi que la théorie des solutions isohydriques d'Arrhenius, qui lui sert de base, sont bien fondées. L. ErRÉRa. — Sur les caractères hétérostyliques secondaires des Primevères (p. 225-256; avec 1 pl.). Chez le Primula elatior, il existe deux formes: ma- crostyle et microstyle, différant non seulement par le pollen et les papilles stigmatiques, mais encore par la hampe, les feuilles et le poids des graines (celles des fleurs macrostyles sont plus légères). D'autre part, les fleurs microstyles sont plus souvent que les autres l'objet d'une fécondation directe. Si donc l'équilibre est maintenu entre les deux formes, c’est grâce à l'existence de caractères hétérostyliques secondaires qui rendent les fleurs macrostyles plus voyantes et par suite plus attractives pour les insectes, augmentant ainsi les fécondations homomorphes donnant un excès d'individus macrostyles qui compense la prédominance des pieds microstyles. A. JACQUEMIN. — Sur la localisation des alcaloïdes chez les Léqumineuses (pp. 257-297 ; avec 4 pl.). Dans les Légumineuses à alcaloïdes, l'épiderme, les tissus parenchymateux et la moelle renferment le maximum de substance active. Les cotylédons en sont très riches, mais la proportion diminue beaucoup pen- dant le verdissement ou l'étiolement. Les téguments de la graine en contiennent rarement; enfin, il y en a de grandes quantités dans les points végétatifs de la tige, de la racine et des bourgeons. ; L. ErréRa. — Sur l'hygroscopicilé comme cause de l'action physiologique à distance, découverte par E1f- ving (pp. 303-366 ; avec 5 pl.). Les expériences d'Erréra ont été faites principale- ment avec des cultures de Phycomyces nitens, et quelques-unes avec des racines de Pois, Fève, Maïs, etc. IL en résulte que seuls les corps hygroscopiques exercent une action attractive sur les filaments du Champignon ou les racines des plantes en observation. Dans les phénomènes découverts par Elfving, l'agent inconnu qui attire ou repousse est tout simplement la vapeur d'eau; l'action exercée par certaines autres substances provient de ce quelles absorbent ou émettent de l’eau. Elle dépend, bien entendu, de la température, de l’état hygrométrique et aussi de la rapidité du phénomène ; ce n’est que dans certaines conditions d'oplimum que le tropisme se manifestera. (Ce Mémoire est accompagné de deux annexes, l’une de Clautriau sur lhygroscopicité du camphre, l'autre montrant que la culture de Phycomyces sur pain élève sensiblement la température du milieu nutritif.) M. Macraux et J. Massart. — Sur les excilants de la division cellulaire (pp. 369-421 ; avec 5 pl.). Ce Mémoire renferme une série d'expériences sur le Chilomenas Paramæcium, faites en vue d'étudier l'in- fluence des facteurs externes sur la karyokinèse. La chaleur et l'alcool accélèrent la division du Chilomonas, et cette accélération est d'autant plus vive que la tem- pérature ou la concentration de l'alcool sont plus éle- vées. Un échauffement brusque provoque la division d'un grand nombre de cellules. L'addition d'alcool donne la même réaction que l’échauffement, mais le nombre de cellules entrant en division est plus consi- dérable : c’est ainsi qu'en ajoutant à la culture 6 °/° d'alcool, toutes les cellules se sont déjà divisées au bout d’une heure, et #8 °/, des cellules se divisent une seconde fois. : La lumière atténue légèrement le phénomène. Les auteurs admettent que l'on peut considérer la division du Chilomonas comme un réflexe non ner- veux dont on connaît les principales phases et dont on peut à volonté faire varier l'intensité. Par contre, ni la lumière, ni la température ne semblent avoir d'action sur la karyokinèse dans les racines d'A/lium Cepa, et les résultats obtenus avec des tiges d'Asparagus officinalis sont tout à fait imprécis. Nous ne terminerons pas cette rapide analyse sans dire toute la satisfaction que nous avons éprouvée à la lecture de ces très intéressants travaux el sans formu- ler le vœu que l'activité des continuateurs du regretté 468 Erréra permette à l'Institut botanique de Bruxelles de publier souvent des recueils d’un aussi haut intérêt. L. Lurz, Secrétaire général de la Société botanique de France. 4° Sciences médicales Bériel (D'), Ancien Interne des Hôpitaux de Lyon, Préparateur au Laboratoire d'Anatomie patholo- gique de la Faculté de Médecine de Lyon. — Syphi- lis du poumon chez l'enfant et chez l'adulte. — 1 vol. in-12 de 340 pages. (Prix : 4 fr.) Steinheil, éditeur. Paris, 1907. C'est toujours une certitude délicate à obtenir que celle de la nature des manifestations viscérales de la syphilis. Quel que soit le parenchyme atteint par la syphilis, le constatanatomique lui-même n'apporte pas toujours des preuves irréfragables ; et le diagnostic clinique, si important à établir puisqu'il aboutit à une thérapeutique vraiment active, en est presque toujours réduit à des hésitations et à des tâtonnements. Bien souvent, on vise la maladie « au jugé »; on soupçonne fort que c’est à elle qu'on a affaire; on n’en est pas sûr. C'est pourquoi toutes les études propres à préciser les caractères de la syphilis viscérale retiennent l’atten- tion, en attendant que des éléments de diagnostic plus définitifs soient mis en notre possession, tels que ceux que la découverte du regretté Schaudinn peut faire entrevoir. M. Bériel a étudié une des plus confuses de ces manifestations : la syphilis pulmonaire. Les lésions syphilitiques du poumon sont, la plupart du temps, con- fondues avec la tuberculose. Leur diagnostic diffé- rentiel repose sur un contrôle anatomique. La syphilis détermine dans le poumon la production de groupe- ments cellulaires qu’on appelle des gommes. Celles-ci forment des masses arrondies, assez dures, d'une cou- leur blanc grisätre et d’un volume variable. Les plus petites sont à peine appréciables à l'œil nu, les plus grosses atteignent les dimensions d'une mandarine. M. Bériel semble mettre en doute l'existence des petites gommes microscopiques et dit — à tort, croyons-nous — que ces gommes miliaires ressortissent à la tuber- culose. Les gommes peuvent siéger dans tous les points du poumon : souvent, elles font saillie sous la plèvre. Quand la gomme est bien développée, elle présente à la coupe une partie centrale nécrosée, où l’on trouve parfois les vestiges d'un vaisseau, et une partie péri- phérique formant autour de la précédente un véritable anneau fibreux. Cette coque fibreuse est quelquefois séparée de la partie centrale, qu'elle contient comme la coque d’une amande son noyau. Il arrive aussi que des tubercules (non syphilitiques) soient ainsi encap- sulés et prennent l'aspect de gommes, ce qui prête à la confusion. Il n’y à pas d’ailleurs de signes histolo- giques pathognomoniques qui permettent d'affirmer la nature syphilitique d’une production gommeuse. Et s'il arrive que les deux affections, syphilis et tuber- culose, coïncident chez le mème sujet, la confusion est inextricable. Outre les gommes pulmonaires, la syphilis détermine la production de bandes scléreuses, dures, qui forment des brides à direction plus ou moins rayonnée, des sortes de travées fibreuses, qui donnent à l'organe l'aspect ficelé. Autour d’elles se développent les néofor- mations à épithélium cubique que Cornil, puis Tripier ont décrites. M. Bériel à traité avec détail et précision la partie histologique. Les figures données pour éclairer le texte sont assez nombreuses, malheureusement rudimen- taires. Elles suffisent pour évoquer un souvenir chez le lecteur habitué à examiner des coupes, mais elles ne peuvent servir, ni à une étude critique, ni à l’ensei gnement. C’est dommage qu'un histologiste distingué tel que l’auteur se soit contenté de ces images, alors qu'il était édité chez M. Steinheil, dont l'illustration BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX histologique est particulièrement soignée dans maints ouvrages sortis de sa maison. C’est chez le nouveau-né hérédo-syphilitique et qui meurt peu de temps après la naissance qu'on a des chances de trouver les lésions les plus pures. Aussi le soin que met M. Bériel à décrire la pneumonie blanche des nouveau-nés est-il très justifié. Cette pneumonie transforme le poumon du fœtus, souvent à peine viable, en un bloc massif de couleur blanchâtre, faiblement rosé, comparable aux lésions compactes appelées hépa- tisations. Mais, à l'inverse du poumon vräiment hépa- tisé, imperméable à l'air par suite de l'encombrement alvéolaire, le poumon blanc du nouveau-né se laisse distendre par l’insufflation. Levaditi, Bériel et Favre, Jambon ont pu trouver dans les néoformations pulmo- naires le tréponème de Schaudinn, agent causal de la syphilis. Les lésions de l'adulte sont la pneumonie syphiliti- que et les dilatations bronchiques. Celles-ci sont géné- ralisées et se présentent souvent sous la forme d’agglo- mérations de petites ampoules. Elles convertissent une zone pulmonaire en un véritable tissu aréolaire, ou bien déterminent de véritables cavernes et des ulcères. Les parois des bronches dilatées sont assez constamment noyées dans un tissu fibrillaire, vasculaire, et infiltré de petites cellules. M. Bériel, à propos des foyers nécrosés, insiste sur l'importance d'en reconnaître his- tologiquement l’origine bronchique. A signalerle chapitre du développement et de l’évolu- tion des gommes. L'auteur montre bien que la gomme n'est pas une production spéciale, toujours identique à elle-même, mais qu'au contraire elle diffère suivant le tissu où elle se développe. Dans le poumon, on y reconnait le tissu pulmonaire même, et cela tient à ce que les oblitérations artérielles locales jouent un rôle prédominant. La gomme serait donc tout à fait com- parable à un infarctus. Cela est très important à con- sidérer à cause de l’avenir des gommes, puisqu'elles peuvent se résorber, aboutir à une rétraction cicatri- cielle, c’est-à-dire à la guérison. M. Bériel passe ensuite en revue les diverses formes des pneumosyphilides : la syphilis pulmonaire con- génitale de l'enfant nouveau-né, dont la plus typique est la pneumonie blanche ; les formes bronchitiques, broncho-pneumoniques, gangreneuses; le poumon gommeux, ulcéro-gommeux; la forme pneumonique ; les seléroses pulmonaires: les bronchectasies et leurs variétés. Puis il étudie les conditions, encore très obscures, qui président aux déterminations pulmo- naires de la syphilis, que celle-ci soit acquise ou héré- ditaire. Les dilatations des bronches ont, dans l’étude de la syphilis pulmonaire, une grande importance. Elles sont si fréquentes que «l’on esten droit de se demander si toutes les dilatations bronchiques ne sont pas syphi- litiques ou parasyphilitiques ». Cette notion a déjà été mise en relief par Tripier; M. Bériel soutient cette même thèse et s'appuie sur les caractères des lésions anatomiques, tels que l’hyperplasie et la vascularisation du tissu atteint, les exsudations cellulaires et les néo- formations alvéolaires à épithelium cubique. Il se base aussi sur ce fait que les bronchectasies se rencontrent près de la naissance et dans l’âge mür, périodes de prédilection de la syphilis pulmonaire. En outre, les antécédents syphilitiques sont très fréquents chez les bronchectasiques. L'ouvrage se poursuit par l'étude clinique des mani- festations pulmonaires syphilitiques et leurs associa- tions avec d’autres manifestations viscérales de la syphilis ou avec la tuberculose. La quatrième partie est consacrée au traitement, qui ne diffère pas de la médi- cation spécifique usuelle. : Le travail de M. Bériel fait honneur à l'Eco'e de Lyon et constitue une monographie fort utile, qui non seule- ment met la question au point, mais élucide quelques parties obscures. Dr A. LETIENNE. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 13 Mai 1907. M. A. de Lapparent est élu Secrétaire perpétuel de l'Académie pour les Sciences physiques, en remplace- ment de M. Berthelot. — M. J. Carpentier est élu membre libre de l’Académie en remplacement de M. Laussedat. 49 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Em. Picard com- munique ses recherches sur une équation fonctionnelle qui se présente dans la théorie de certaines équations aux dérivées partielles. — M. Ed. Maillet poursuit ses études sur les fractions continues arithmétiques et les nombres transcendants.— M. Ernest Fischer démontre le théorème suivant : Soit Q l’ensemble des fonctions réelles f d’une variable réelle x telles que fet f* soient sommables dans un intervalle fini. Si une suite de fonc- tions appartenant à Q converge en moyenne, il existe dans Q une fonction f vers laquelle elle converge en moyenne. — M. S. Bernstein propose une méthode générale pour la résolution du problème de Dirichlet. — M. M. d Ocagne étudie la représentation des équa- tions d'ordre nomographique #, à 3 et # variables. — M. Canovetti déduit de ses expériences sur la résis tance normale de l'air au mouvement des corps la for- mule : R—0,0324V°+0,432V. Quant aux surfaces avec angle d’° incidence e, la loi des sinus donne des résultats notablement supérieurs à ceux de l'expérience. — M. Dautriche a constaté que, lorsqu'on comprime un explosif sous des densités croissantes, la vitesse de détonation augmente d’abord, passe par un maximum, puis diminue suivant une loi asymptotique. — M.Cog- gia présente ses observations de la planète nouvelle LB faites à l'Observatoire de Marseille. — M. M. Stefa- nik rend compte de l'expédition qu'il à entreprise au Turkestan pour l'observation de l’éclipse solaire du 14 janvier 1907; une chute de neige de vingt-quatre heures a empêché toute observation. : 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. J. Becquerel déduit de ses observations sur les changements des bandes d'absorption des cristaux que lamortissement du mou- vement vibratoire des électrons absorbant la lumière est sensiblement proportionnel à la racine carrée de la température absolue. — M. M. Deprez montre que. dans le condensateur parlant de M. Argyropoulos, l'adjonction de la force électromotrice auxiliaire per- met d'accroître, dans une proportion presque aussi grande que l’on veut, l'intensité du son dû au mouve- ment vibratoire des armatures du condensateur. — M. J. Guyot a mesuré les différences de potentiel au contact de deux solutions d'électrolytes et a trouvé Es résultats assez en accord avec la théorie de Nernst. M. G. Claude compare les deux modes de détente em- ployés dans la liquéfaction de l'air : détente avec tra- vail extérieur récupérable et détente par simple écou- lement. Le premier donne un rendement bien supérieur. — M. L. Bruninghaus poursuit l'étude de la phospho- rescence des composés calciques manganésifères. Les composés de masses moléculaires de plus en plus élevées présentent des couleurs de phosphorescence de réfrangi- bilités croissantes et dont les spectres subissent un décalage progressif dans le sens des longueurs d'onde décroissantes. — M. P. Lebeau, en faisant réagir le fluor sur le sélénium dans un tube en cuivre, à obtenu un tétrafluorure liquide SeF‘; le composé gazeux obtenu par M. Prideaux dans un tube en verre paraît tre un oxyfluorure. — M. A. Job à constaté que l'hydrate de cobalt, dissous en milieu alcalin, s’oxyde spontanément. Deux atomes de cobalt retiennent un atome d'O avec formation de Co*0*, et mettent en jeu un autre atome d'O qui se fixe sur le milieu organique jouant le rôle d'accepteur. — M. O. Boudouard a vérifié par l'analyse chimique l'examen micrographique et l'étude de la fusi- bilité l'existence du silicate aluminocalcique Si0*.AFO*. 2Ca0. — M. L. Guillet a reconnu que les aciers au bore normaux sont constitués par une solution solide fer-bore à très faible teneur en bore, de la perlite et un borocarbure de fer; ce dernier amène une très grande fragilité, qui disparaît par trempe lorsqu'il est entré en solution. — M. A. Granger propose l'emploi du permanganate de potassium pour éliminer lhypo- sulfite de sodium qui reste dans les plaques photogra- phiques après le fixage. L’excès de permanganate est éliminé à son tour par l'acide oxalique.— M. A. Guyot, en condensant les éthers oxaliques avec les amines aromatiques tertiaires, a obtenu comme produit ultime des acides hexalkyltriamidotriarylacétiques. — MM. R. Lépine et Boulud ont observé que la glycolyse nor- male du sucre virtuel du sang peut être troublée par l'action des ferments signalés par Me Sieber et surtout abondants dans les sangs pathologiques. — M. A. Mou- neyrat donne ses résultats de dosage du fer dans un srand nombre de tissus vivants. — M. A. Magnan à extrait les pigments d’un certain nombre de peaux de Batraciens, en faisant digérer celles-ci d’abord dans l'alcool absolu, qui dissout un pigment vert, puis dans l'acide acétique, qui dissout un pigment brun jaunâtre. 30 SCIENCES NATURELLES. — MM. H. Busquet et V. Pachon ont observé que la grandeur de l'action cardio- inhibitrice exercée par les divers sels de potassium parait proportionnelle à la teneur des solutions en po- tassium ionisé. — M. Ch. Janet décrit les phénomènes d'histogénèse du tissu adipeux remplaçant les muscles vibrateurs histolysés après le vol nuptial chez les reines des Fourmis. — M. W. Lubimenko a constaté que l'assimilation des matières organiques emmagasinées dans les graines ou les bulbes par une plante supérieure est influencée par la lumière; son maximum corres- pond à une intensité lumineuse très faible. — M. M. Mol- liard a reconnu que la formation du liber intra-ligneux est liée à l'accumulation de matériaux organiques dans l'axe du radis. — MM. J. Costantin et H. Poisson dé- crivent quelques plantes à caoutchouc du sud de Mada- gascar : le kokomba (Mascarenhasia Geayi), le kidroa (W. kidroa) et les Landolphia mamolava et mamavo. — M. L. Mangin a observé que la membrane des carapaces de Péridiniens est constituée par de la cellulose associée à des composés pectiques et de la callose. — M. M. Dubard divise les //l1péées en cinq genres : /lJipe, Payena, Kakosmanthus, Dasyaulus et (Ganua. — MM. P. Girardin et F. Nussbaum ont lrouvé à la Chaux d’Arlier les traces de deux glaciations super- posées, la plus ancienne débordant la plus récente. — M. J. Thoulet montre que, si, après avoir débarrassé un calcaire de la masse de son carbonate de chaux, on recueille par un traitement approprié les minéraux dits rares qui Nf sont contenus, ceux-ci, une fois reconnus au microscope, renseigneront sur les conditions de l'océan, disparu aujourd'hui, au sein duquel ils se sont déposés autrefois. 21 Mai 1907. MATHÉMATIQUES. — M. J. Hadamard montre que, malgré les recherches récentes de Gold- zieher, l’objection de Dubois-Reymond relative à la variation des intégrales doubles reste fondée en fait. M. E. Cartan démontre que les systèmes automorphes Séance du 1° SCIENCES 470 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES qui se présentent dans l'intégration d’un système dif- férentiel donné, admettant un groupe de transforma- tions G de structure connue, s'intègrent au moyen d'équations différentielles et, suivant les cas, de systèmes d'équations aux dérivées partielles linéaires à une fonction inconnue d'un certain nombre de variables indépendantes. — M. Barré poursuil ses recherches sur les surfaces engendrées par une hélice circulaire. — M. J. Guillaume adresse ses observations du Soleil faites à l'Observatoire de Lyon pendant le premier tri- mestre de 1907. Le nombre des groupes de taches et leur surface totale ont augmenté; il en est de même pour les facules. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. R. Benoît, Ch. Fabry et A. Pérot ont procédé à une nouvelle détermination du mètre en longueurs d'onde de la raie rouge du cad- mium ; ils ont trouvé comme moyenne que le mètre équivaut à 1.553.164,13 À, la valeur de X étant égale à 0,643.846.96 uw. — M. A. de Gramont a reconnu que les raies ultimes, ou de grande sensibilité, sont les mêmes pour l’étincelle condensée, avec ou sans self, pour l’étincelle non condensée, pour l'arc et pour les flammes très chaudes. — M. H. Abraham déduit de ses expériences que le seuil des sensations de l'oreille nor- male correspond à des variations de pression ayant une amplitude d'environ # dix-millionièmes de milli- mètre de mercure. — M. D. E. Tsakalotos, en com- binant la loi de Trouton-Nernst avec l'équation de Van't Hoff et Le Chatelier, a obtenu la relation : qui permet de calculer les élévations moléculaires des points d'ébullition des dissolutions en connaissant seu- lement le poids moléculaire du dissolvant et son point d'ébullition. — M. J. Meunier confirme, par de nou- velles expériences, la valeur de 200 mgr. au litre comme limite supérieure de l’inflammabilité des mé- langes explosifs d'éther et d'air. — M. M. Houdard, en chauffant l'aluminium avec les métaux de la famille du fer dans une atmosphère d'HS, a obtenu des sulfures doubles AS5.MnS, APS:.FeS, APS®.CrS. — M. E. De- rome à constaté que les silicates de lithium, chauftés à haute température, subissent une dissociation partielle avec dégagement de lithine à l'état gazeux. — M. 9. B. Senderens a observé que le phosphore réagit catalyti- quement à chaud sur les alcools, en les décomposant en eau et carbure éthylénique ; les phosphates, en par- ticulier celui d’alumine, jouissent de la même pro- priété déshydratante. — MM. A. Kling et P. Roy ont reconnu que l’amalgame de magnésium agit sur des aldéhydes grasses pour les aldoliser comme le feraient les alcalis caustiques, puis réduit l’aldol formé. — MM. P. Sabatier et A. Maïlhe ont étudié l'hydrogéna- tion des dicétones forméniques par le nickel réduit. Les diones « ne sont pas dédoublées et donnent des pro- duits d'hydrogénation régulière; les diones $ se scin- dent et l'hydrogénation porte sur les troncons; les diones + donnent des diols et leurs anhydrides. — M. W. Oeschsner de Coninck a étudié les solutions aqueuses ef alcooliques de p-oxybenzoate de calcium et déterminé leur poids spécifique. — M. A. Guyot décrit les produits de condensation de l’oxalate d'éthyle avee la diméthylaniline en présence d’AICF ; ce sont : le p- diméthylamidophénylglyoxylate d’éthyle, F. 95°; le tétraméthyldiamidophényglycolate d’éthyle, F. 1429, et l'hexaméthyltriamidotriphénylacétate d'éthyle, F. 176°. — M. G. Darzens, en condensant la cyclohexanone et homologues méthylés avec l'x-chloropropionate d’éthyle, a obtenu les éthers glycidiques trisubstitués correspondants, au moyen desquels on peut préparer l'hexahydroacétophénone et ses homologues méthylés. — M. M. Delépine à préparé les sulfocarbimides de la série grasse en combinant les amines avec CS*, ajou- tant de la soude, puis de l'acétate basique de plomb et ses portant à l'ébullition, ce qui provoque le dégagement de la sulfocarbimide. — M. A. Magnan décrit les pro- priétés des pigments qu'il a retirés de la peau des Batra- ciens ; les plus foncés peuvent passer aux plus clairs sous diverses influences, mais on n'a pas observé la transformation inverse. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Nepveu a reconnu que les tissus de l'iris sont directement excitables par la lumière chez toutes les classes d'animaux à iris, sauf les Mammifères. — M. G. Nicolas a constaté que les différents organes aériens des plantes vasculaires ont chacun son intensité et son quotient respiratoires propres. Ceux qui sont chargés essentiellement de la fonction assimilatrice (limbe, phyllodes et cladodes) sont ceux qui ont l'intensité respiratoire la plus forte et le quotient respiratoire le moins élevé. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 14 Mai 1907. M. R. Brunon, étudiant l'alcoolisme en Normandie, montre que les efforts courageux et tenaces des anti- alcooliques ont eu depuis une vingtaine d'années une influence incontestable sur les gens cultivés et la classe riche. Par contre, chez les employés, dans la classe ouvrière et parmi les paysans, l'alcoolisme augmente, surtout parmi les femmes et les enfants; l'adolescent et l'apprenti s'adressent de plus en plus à l’absinthe. — M. G. Weiss donne lecture d’un travail sur la détermination des verres périscopiques pour la correction des amétropies de l'œil. — M. Darier lit une note sur l'application des médicaments par injections intra-veineuses. Séance du 21 Mai 1907. M. Doléris présente un Rapport sur un Mémoire du D' Ballenghien concernant l'opération de Gigli dans la pratique obstétricale. Il lui paraît que la symphyséo- tomie reste actuellement supérieure à la pubiotomie comme résultats. — M. Lannelongue a reconnu que la toxicité urinaire s'élève dans l’appendicite aiguë en raison de la gravité de la maladie; lorsqu'elle descend à 25 urotoxies ou moins, elle esl une indication pres- sante d'opérer immédiatement. Par contre, dans les appendicites prolongées où chroniques, elle devient une contre-indication opératoire, réclamant un ajour- nement lorsque le malade est encore sensiblement infecté. — M. N.Gréhant rappelle qu'avant d'autoriser un ou plusieurs ouvriers à travailler dans un puits ou une fosse, il est bon d'y faire descendre par une corde une cage contenant un animal, afin de se rendre compte de la respirabilité des gaz du fond. — M. le D+ Marage lit un mémoire sur la portée de certaines voix. — M. ie D" Béclère donne lecture d’une note sur les phénomènes dits de préréaction, consécutifs à l'exposition de la peau aux rayons Rüntgen et au rayonnement du radium. — M. A. Broca lit un travail sur la vision de signaux colorés à grande distance et la manière de les reconnaître. — M. le D‘ Cany donne lecture d'un mémoire sur l'absorption par le poumon. Séance du 28 Mai 1907. MM. L. Landouzy et L. Laederich signalent un cas de malformation cardiaque et d'hypoplasie aortique chez une enfant née à terme, morte à dix semaines de broncho-pneumonie. Cette dystrophie cardio-aortique était d’origine hérédo-syphilitique, comme l'ont prouvé l'examen de la mère et la présence de spirochètes dans les tissus de l'enfant. Il semble que le traitement de lésions pareilles pourrait être avantageusement poursuivi par la médication spécifique. — M. Lanne- longue donne quelques renseignements complémen- taires sur la mesure de la toxicité urinaire dans les infections, l’appendicite en particulier. M. le Dr Bardet lit un mémoire sur les propriétés physiques et.chimiques des solutions colloïdales de métaux, con- sidérées dans leurs rapports avec les applications thé- ÉNRNTT R, || ce LR 2 “ment fixées : ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES A7 rapeutiques. — M. le D' de Lapersonne donne lecture d'un travail sur les indications et,résultats du traite- ment optique dans le strabisme. — M. le Dr Tscher- _ning lit un mémoire intitulé : Phénomène entoptique dépendant de la circulation du sang dans la rétine. — M. le D' Lepage donne lecture d'une note sur l'opé- ration césarienne tardive. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 11 Mai 1907. La Commission nommée par la Société pour étudier la question de l’anthracose pulmonaire dépose les con- clusions suivantes : 1° La Commission n'a pas constaté le passage de particules de charbon de l'intestin aux ganglions mésentériques dans les conditions primitive- cobayes sacrifiés six heures après l'intro- duction d'encre de Chine dans l'estomac, soit par ingestion, soit à la sonde. 2° D'autre part, la Commis- sion a constaté le passage des poussières dans le cas d'ingestion répétée. Il serait désirable que les condi- tions exactes el le mécanisme du passage fussent l’objet d'études approfondies. 3° La Commission a réservé la question de l’anthracose pulmonaire. MM. M. ét H. Labbé rejettent toute méthode clas-" sique de dosage de l’urée par lhypobromite comme ne donnant pas de résultats exacts. — MM. E. Bourquelot et H. Hérissey montrent que la sambunigrine est un dérivé de l'acide phénylglycolique droit; elle doit cor- respondre à un isomère encore inconnu de l'amygda- line. — MM. Ch. Achard et R. Demancke, en accrois- sant où diminuant l'œdème par des actions mécaniques chez des malades, ont provoqué une concentration ou une dilution du sang de la circulation générale, — M. F. Battelli et M!° L. Stern ont constaté que les substances des tissus animaux qui diminuent l'activité respiratoire des muscles sont précipitées par HCI ou l'acide acétique dilués; elles sont rendues inactives par Pébullition. — M. H. Roger à observé que la salive rendue inactive par le chauffage vers 100° récupère en grande partie son action saccharifiante par addition de salive fraiche. — MM. A. Policard et M. Garnier, par injection de doses massives de phlorhizine dans le tissu cellulaire sous-cutané, ont déterminé des lésions rénales disposées en foyers circonserits; l’altération porte uni- quement sur l'épithélium à bordure striée: des tubes contournés du rein ét consiste dans une dégénérescence vitreuse caractéristique. — M. G. Lafon présente un nouvel appareil pour l’anesthésie. — MM. E. Enriquez et L. Ambard ont constaté que le régime déchloruré exalte les sécrétions déprimées par des lésions chro- niques de l'estomac et, d'autre part, diminue l'hypersé- crétion gastrique. — M. M. d'Halluin montre que l'épreuve de la réaction sulfhydrique, appliquée par Icard au diagnostic de la mort réelle, n’a pas une valeur absolue, car elle n’est souvent que la manifestation de putréfactions stomacales. — M. R. Turro à préparé la typhotoxine par dissolution du bacille d'Eberth dans la soude à 0,5 °/,. — M. E. Bardier a reconnu que les sels de magnésie agissent sur le système neuromuscu- laire à la facon du curare. — MM. G. Péju et E. Char- penan signalent un cas d’anthracose pulmonaire avec hydrothorax à liquide noir constitué par des pous- sières de charbon en suspension. — M. J. Arrous estime que tous les sucres sont diurétiques; il n'y à entre eux à ce point de vue qu'une différence de degré. — M. F. Guégen présente une pipette protégée pour prélèvements aseptiques. — MM. Ch. Dopter et Oberthur ont provoqué expérimentalement l’encé- phalite aigue en injectant dans la substance cérébrale du chien quelques gouttes de substances telles que : essence de térébenthine, alcool, éther, staphylotoxine. — M. R. Dubois montre que la luciférine, corps pho- togène extrait des siphons de la Pholade dactyle, prend naissance par l’action d'une zymase sur un autre produit qu'il appelle proluciférine. — MM. Léo- pold-Lévi et H. de Rothschild ont constaté que le corps thyroïde exerce une action trichogène sur le système pileux. La chute du sourcil est générale- mentune manifestation d'hypothyroïdie. — M. A. Com- bault a étudié la circulation dans les glandes calcifères des Lombrics. — M. E. Feuillié a observé qu'il existe un lien étroit entre l'existence dans le sang d’une plus ou moins grande quantité de leucocytes en voie de dégénérescence et la production de nodules, d'ædèmes ou d’abcès aseptiques provoqués. — M. Ciuea a reconnu que le froid a une action favorisante sur l’apparition du tétanos expérimental. — M. M. Letulle signale un cas de métamorphose cancéreuse des glandes brunné- riennes du duodénum ; les autres glandes n’ont pas subi la transformation cancéreuse. — M. H. Iscovesco a constaté que la charge de l'ovalbumine coagulée est électropositive en présence du suc pancréatique ; cette charge est inversée en présence de suc pancréatique dialysé ou bouilli. — M. H. Piéron signale chez les Grapsius varius une autotomie évasive, dépendant de ganglions supérieurs, c'est-à-dire apparaissant non comme un réflexe simple, mais comme un réflexe psychique, sinon un acte volontaire. — M. R. Gaultier estime que le sympathique, par l'intermédiaire de la circulation, joue un rôle de régulateur dans la sécré- tion chlorhydrique de l'estomac. — MM. M. Doyon, C1. Gautier el A. Policard montrent que la ligature du trenc coeliaque et de l'artère mésentérique supé- rieure, pratiquée chez le chien auquel on vient de faire subir l’extirpation de l'intestin, détermine en quelques heures des lésions rénales graves. — M. A. Ronchèse décrit l'application à l'urine de son procédé de dosage de l’'ammoniaque par le formol. — MM. C. Levaditi et Inmann ont constaté que l’opsonine des sérums neufs (complément) et celle des sérums spécifiques (ambocepteurs) exagèrent la phagocytose, qui peut s'opérer aussi en dehors de leur intervention. Les subs- tances opsonisantes, en se fixant sur le-corps des microbes, déterminent un changement physico-chi- mique dans la constitution de l'envelope microbienne, changement qui rend les bactéries plus aptes à être englobées. — MM. C. Levaditi et A. Marie n'ont pu déceler, dans le liquide céphalo-rachidien des para- lytiques généraux ayant donné une séro-réaction posi- tive, des anticorps syphilitiques capables d'agir directe- mentsurle Treponema pallidum. — MM. H.Guillemard et R. Moog montrent que les conditions climatériques qui caractérisent les grandes altitudes ne favorisent nullement l’exhalation de la vapeur d’eau. Séance du 18 Mai 1907. M. le Vice-Président annonce le décès de M. A. Char- rin, membre de la Société. M. F. Guéguen propose l'emploi de réactifs en poudre, obtenus en triturant finement dans un mortier les matières colorantes avec du sucre; ils permettent de préparer instantanément des solutions colorantes limpides. — Mie À. Drzewina et M. G. Bohn ont cons- taté qu'il suffit d’un séjour de vingt-quatre heures dans une solution d'eau de mer pour exercer une action sti- mulatrice sur la croissance des embryons de ana temporaria et de Bufo vulgaris; une solution isoto- nique de NaCl à peu ou pas d'effet. — M. Ciuca montre que l’hypothermisation favorise l'infection strepto- coccique par l’action nécrosante qu'elle exerce sur les leucocytes. — M. Lafforgue a obtenu des cul- tures homogènes et sans voile du PB. mesentericus par ensemencement sur une vieille culture stéri- lisée et filtrée. — Mie E. Stefanescu a reconnu que les corpuscules de Negri peuvent se trouvér dans les glandes parotides des animaux enragés, mais que leur présence n’est pas constante. — M. J. Salmon estime que les formes variées des rudiments squelettiques des ectroméliens ne sont pas la conséquence d’un arrèt de développement des segments des membres: elles ré- sultent, dans chaque cas particulier, d’un mode évolutif propre. — MM. J. Basset et H. Carré montrent que, chez le chien, la muqueuse digestive brusquement et ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES violemment congestionnée est perméable aux germes habituels de l'intestin. — M. H. Iscovesco à observé que la gélatine a une charge électropositive en présence d’eau distillée ou d'eau contenant des sels de métaux monovalents,etélectronégative en présence de solutions de sels bivalents. — MM. H. Rajat et G. Péju ont trouvé des formes levures, voisines du muguet, dans le pus de cinq cas de lésions fétides, Et care As putrides, de l'appareil pleuro-pulmonaire. — Ch. Hervieux à reconnu que non seulement Vindol et le scatol, mais aussi les autres composés de la même série : méthyl-, diméthyl-, triméthyl- et éthylindol, sont dépourvus de toxicité. — M. E. Maurel à étudié l'influence des voies d'administration sur la dose minima mortelle de brom- hydrate de caféine pour la grenouille et le lapin. — M. G. Lafon présente un appareil pour le dosage de l'urée et de l'azote total. — M. E. Bataillon a déter- miné le moment des émissions polaires chez la gre- nouille rousse suivant la répartition topographique des œufs. — M. M. Letulle à étudié l'histogenèse de l’épi- thélioma cylindrique du gros intestin ; ses observations ne peuvent guère s'expliquer par la théorie parasitaire du cancer. — M. P. Mulon a constaté que, lorsque les surrénales ont longtemps fonctionné, ou beaucoup fonctionné, ou lorsqu'une surrénale a fonctionné seule à la place de deux, on y trouve plus de pigment et moins de graisse. — M. H. Piéron montre qu'il existe, dans l’autotomie protectrice des crabes qui semble devoir être considérée comme réflexe, des irrégularités difficilement explicables. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX 7 Mai 1907: M. Ch. Pérez présente ses recherches sur l'histolyse du tissu adipeux larvaire des Muscides; il y a résorp- tion des cellules grasses par phagocytose leucocytaire, mais ce processus est loin d'être général pour toutes les cellules, chacune subissant des circonstances par- ticulières individuelles. — MM. H. Verger et Brandeis ont injecté des cultures de streptocoque dans le scia- tique du lapin et ont observé des lésions qui vont en décroissant à partir du quatrième jour. — MM. Coyne et Brandeis décrivent un fibrome lacunaire du sein dans lequel quelques culs-de-sac glandulaires ont subi une transformation de leur épithélium aboutissant à la constitution de masses cornées. — M. J. Gautrelet a observé des crises épileptiformes résultant de l'appli- cation à l'oreille du lapin d'une anode imbibée par une solution de sulfate de strychnine où même par des solutions de NaCl, KCI, CaCF. L'épilepsie est précédée de phénomènes d'excitation, puis de paralysie. — M. C. Sauvageau confirme que la cause immédiate du ver- dissement des huîtres dites de Marennes est l’ingestion par elles d'une Diatomée, le Navicula ostrearia, qui possède une substance bleue fixée sur le protoplasma. — Le même auteur a observé que le thalle rampant des Cladostephus est formé originellement par l’accroisse- ment, en largeur et en hauteur, de stolons rampants d'où s'élève un bouquet de filaments au milieu des- quels prend naissance, également sur le stolon, la pousse indéfinie. — M. J. Kunstler a constaté que le poisson-chat (Amiurus nebulosus) détruit en général les autres poissons avec lesquels il se trouve et dispa- rait lui-même plus ou moins vite dans nos eaux. — M. J. Chaine a étudié la langue des Téléostéens; elle estdépourvue de formations musculaires, mais possède, par contre, des ligaments résistants. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 3 Mai 1907. M. V. Crémieu : l?alances et navires aulo-amortis. Si l’on place dans l'intérieur d’un système oscillant quelconque un pendule, oscillant lui-même autour d'un axe coïncidant avec celui du système extérieur, on dispose ainsi d’une direction fixée dans l’espace, avec Séance du un couple déterminé. On peut utiliser cette direction fixe pour produire des mouvements d’un liquide entourant le pendule intérieur. La viscosité du liquide ainsi mise en Jeu amortira les mouvements oscillatoires du système, sans que les effets capillaires ou des poussées viennent modifier l'équilibre. Ce système a d'abord été appliqué aux balances; il fonctionne bien pour de faibles sensibilités. Pour les hautes sensibilités, on ren- contre des difficultés qui ne sont pas encore résolues. Pour les navires, très analogues aux balances, le système s'applique aussi très bien. Le modèle de navire présenté à la Société de Physique est amorti de telle facon que son coefficient de décroissement en eau calme, dont la valeur normale est égale à 0,02, se trouve, avec les amortisseurs, porté à 0,3. Un roulis sur houle syn- chrone, faisant 8° au point d'inflexion, se trouverait ainsi réduit de 24° à 505. — M. Ch. Ed. Guillaume : Terrains polygonaux des contrées polaires. Plusieurs explorateurs, en particulier Nordenskjüld, ont signalé la structure polygonale des terrains d’alluvion des con- trées polaires, coupés par des fissures qui limitent des figures fermées dans lesquelles les hexagones prédomi- nent. organisée par la /?evue générale des Sciences, M. Guil- laume a été très frappé par l'aspect de ces terrains, dont il à pris quelques photographies. Il les a vus notamment dans le fond d’Ice Fjord, le plus grand golfe du Spitsherg, situé vers 78° de latitude. Ces terrains s'étendent entre la mer et les premières pentes des montagnes; ils sont à peu près horizontaux, formés de sables argileux, stériles ou recouverts de saxifrages. Les polygones ont un diamètre de l’ordre de 0,30; les fis- sures ont quelques millimètres de largeur et semblent atteindreune profondeur d’une vingtaine decentimètres. A cette profondeur, le terrain est encore gelé à la fin de juillet. M. Guillaume pense qu'on peut appliquer à la formation des fissures la théorie des tourbillons étudiés par M. H. Bénard. Au moment de la fonte des neiges, les terrains, gorgés d’eau, forment une sorte de boue liquide, dans laquelle de lents mouvements sont possibles. La température de la surface est com- prise entre 0° et 4°, tandis que celle du fond est voisine de 0°. L'eau de la surface a donc une tendance à tomber et se trouve dans les conditions où des tourbillons peu- vent se former. Comme appui à cette théorie, M. Guil- laume mentionne l'observation, faite par M. P. Hastier, suivant laquelle certains polygones semblent fertiles et d'autres stériles dans toute leur étendue. On en conelu- rait que chacun d’éux forme bien une cellule isolée, dans laquelle une surface peut être entièrement fertile ou stérile, suivant la nature du terrain (tourbeux ou argileux) trouvé à une faible profondeur. M. Guillaume tient toutefois à donner, sous toutes réserves, la‘théorie qui précède. Il serait particulièrement intéressant d'ob- server ces terrains au printemps, à l’époque où l’exis- tence des tourbillons pourrait être vérifiée. — M. Henri Abraham étudie le rendement acoustique du téléphone et la sensibilité absolue de loreille. Les courants élec- triques fournis par la ligne font vibrer la membrane du téléphone, et une partie de l'énergie de ces vibra= tions pénètre dans l'oreille. Quel rapport y a-t-il entre l'énergie utilisée par l'oreille et l’énergie fournie par la ligne? On a une évaluation par défaut de la puissance électrique dépensée, en multipliant la résistance de l'appareil par le carré de l'intensité du courant. On peut, d'autre part, obtenir une évaluation par excès de l'énergie utilisée par l'oreille en calculant l'énergie dis- ponible dans les vibrations de la membrane : le rapport de ces deux quantités sera une limite supérieure du rendement cherché. L'auteur calcule que, pour un cou- rant de 200 périodes, dont l'intensité maxima serait de 1/300 ampère, les puissances mises en jeu seraient : Puissance électrique. . . 700 C.G.S. (par défaut). Puissance mécanique 1 C.G-S. (par excès). Le meilleur téléphone ne transmet pas à loreïlle la millième partie de l'énergie fournie par la ligne. Les Au cours de la récente croisière au Spitzberg : supers mec en ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 473 mesures qui viennent d'être rappelées, rapprochées de l'estimation du courant minimum nécessaire pour faire parler le téléphone, permettent de se faire une idée de l'extraordinaire sensibilité de l'oreille. — M. G. Berle- mont décrit un nouveau procédé de réglage des tubes à rayons X, En plaçant dans le champ cathodique-une tige d'aluminium convenablement préparée, si on relie cette tige à la cathode et que l’on fasse passer dans le tube un faible courant pendant deux ou trois minutes, il devient très dur et se maintient dans cet état; si, au contraire, on relie la tige àl’anodeen laissant fonctionner le tube normalement, il mollit graduellement; ce moyen assez lent permet donc de ramener un tube trop dur à l'état voulu sans crainte qu'il devienne trop mou. Dans le cas de durcissement du tube, la tige d'aluminium reliée à l’anode et servant d’anode s’échauffe et dégage de l'hydrogène dans le vide; lorsque, au contraire, on veut durcir le tube, la tige étant reliée à la cathode, il se produit une absorption de l'hydrogène par cette tige. M. P. Villard rappelle à ce sujet qu'en 1897 il a présenté à la Société un régénérateur d'ampoules qui se composait également d’une électrode auxiliaire en aluminium ou en magnésium, et permettait de mollir ou de durcir à volonté l’ampoule qui en était munie. Ce dispositif a été peu après complètement abandonné, les praticiens ayant fait justement observer que la faible provision de gaz contenue même dans le magnésium était absolument disproportionnée avec les exigences d'un service intensif et qu'un véritable robi- nel serait nécessaire. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 10 Mai 1907. M. Ch. Girard envoie un mémoire intitulé : Sur la distillation des vins dans le vide. — M. C. Coffignier adresse une note sur la composition du sulfure indus- triel de zinc. — M. I. Lazennec entretient la Société des recherches effectuées par lui, en collaboration avec M. Ch. Moureu, sur l'hydralalion des amides des acides a$- acétyléniques. — M. L. Guillet expose les méthodes qui lui ont permis de faire une étude appro- fondie des alliages étain-nickel. — M, M. Delépine à transformé léthylidène-imine (aldéhydate d’ammo- niaque anhydre) en le dérivé trinitrosé (CH*.CH : A7. Az0)° que laisse prévoir la formule trimérisée (CHF. CH : AzH)', précédemment proposée par lui. Ce dérivé nitrosé est différent de celui que Kudernatsch a pré- paré à partir d'une base qu'il appela hexaéthylidène- tétramine, et obtint par chauffage de l'aldéhydate d’ammoniaque avec Flammoniaque. M. Delépine montre que l’hexaéthylidène-tétramine est identique à la crotonylènamine de Wurtz. Il rappelle que la den- sité de l'aldéhyde crotonique est 0,8715 et non 1,033, comme cela est presque toujours indiqué. — M. R. Delange communique le résultat de ses recherches sur l'action du PCF sur quelques composés aromatiques renfermant le complexe : A0) CHEZ * b SOCIETE ROYALE DE LONDRES Séance du 7 Février 1907. Major W. H. Horrocks : Expériences faites pour déterminer les conditions dans lesquelles des bacté- ries « spécifiques» dérivant des eaux d'égouts peuvent être présentes dans l'air des tuyaux de ventilation, des drains, des chambres d'inspection et des égouts. La plupart des hygiénistes, à l'heure actuelle, croient que, lorsque les eaux d’égouts sont dans un état de putré- faction et que des bulles de gaz, s'élevant de ces eaux, s'échappent à leur surface, des bactéries peuvent être projetées dans l'air des égouts. On considère aussi comme possible que, lorsque les eaux d'égouts ont séché sur la surface des tuyaux, des bactéries puissent être séparées comme particules sèches et transportées à quelque distance par des courants d'air passant à travers les tuyaux. Mais il n’est pas généralement admis que le simple passage d'eaux d'égouts infectées à tra- vers un système de drainage bien conduit, causera aussi la projection de bactéries spécifiques dans l'air contenu dans les tuyaux. Des expériences approfondies ont montré que : 1° l'éclatement des bulles à la surface des eaux d'égouts dans des conditions artificielles peut causer l'éjection de bactéries, lesquelles, s'il y a des courants d'air, peuvent être (transportées à quelque distance ; 2° des bactéries spécifiques, ayant séché sur les tuyaux de ventilation d'un système de drainage, peuvent être séparées et portées par des courants d'air passant à travers le système ; 3° des bactéries spécifiques peuvent être projetées d'eaux d'égouts «fraîches », cou- lant à travers un égout dans les conditions naturelles, indépendamment de la création des bulles et de la sépa- ration des particules séchées. L'éjection des bactéries se produit, non seulement lorsqu'on emploie des mi- crobes purs, tels que ceux obtenus sur des cultures sur agar, mais aussi lorsque les selles de typhiques sont employées comme agent infectant. Les résultats obte- nus, spécialement en ce qui concerne l’éjection de bac- téries des eaux d'égouls « fraiches », ont une grande importance et indiquent que la disjonetion du système d'évacuation d'une maison et de l'égout public est un principe judicieux, et qu'il ne serait pas sage de rem- placer la soupape de disjonction et de ventiler les égouts au moyen des tuyaux de ventilation des maisons ou des tuyaux du sol. — MM. Robert Muir et W.B. M. Martin : Sur les propriétés de combinaison de lopso- nine d'un sérum immunisant : 4° L’opsonine thermola- bile d'un sérum normal et l'opsonine thermostable d’un sérum immunisant forment deux classes distinctes de substances. En plus de leur différence marquée en ce qui concerne leur résistance à la chaleur, elles diffèrent dans leurs relations de combinaison; 2 L'opsonine thermostable de lanti-sérum étudié est une vraie anti-substance et possède les caractères com- parativement spécifiques des anti-substances en géné- ral; on na pas encore déterminé si elle possède la constitution d'une agglutinine ou d'un corps immuni- sant, quoique certains faits seraient en faveur de la première hypothèse ; 3° Des émulsions d'organismes autres que celui qui a été employé dans limmunisation (Staphylococcus aureus) n'absorbent pas l'opsonine im- munisante ; d’un autre côté, elles absorbent de grandes quantités de l’opsonine normale analogue à un complé- ment; 4° De puissants absorbeurs de compléments, corpuscules rouges ou bactéries traitées par un corps immunisant ou un précipité de sérum, n'ontpas d'effet sur l'opsonine immunisante thermostable, tandis qu'ils éloignent presque complètement l'opsonine la- bile du sérum normal et du sérum immunisant égale- ment. Séance du 1% Février 1907. M. S. S. W. Smith : L'analyse lhermomagnétique des alliages nickel-fer météoriques et artificiels. L'au- teur a déterminé les changements de perméabilité ma- gnétique d'un spécimen-type de fer météorique octaé- drique entre 0° et 8500 C. et les a comparés à ceux d'un acier au nickel contenant à peu près la même propor- tion de fer que la météorite et à ceux d'un échantillon de fer presque pur. Les courbes perméabilité-tempéra- ture peuvent s'interpréter au moyen de la théorie des solutions solides et de la formation de cristaux mixtes. On en conclut que les cristaux mixtes du type pauvre en nickel sont, à la température de transition, en équi- libre avec une solution solide plus riche en nickel que ces cristaux. Des données thermomagnétiques, on dé- duit que le fer météorique de Sacramento est composé principalement d'un alliage Fe Ni contenant 6 à 7°/, de Niet, en outre, d’une petite quantité d'un alliage com- plexe, contenant 25 à 30 °/, de Ni, mais dont le consti- A74 tuant le plus riche en nickel renferme environ 40°/, de ce corps. — M. R. Threlfall à préparé une grande quantité de sélénium à l’état pur en employant la mé- apparait plus grande que si rien n'était interposé entre le télescope et l'œil, en conclut que l'agrandissement de la tache remarqué par plusieurs observateurs, lors des éclipses de Lune, n'est qu'un phé- _nomène dù à l’affaiblissement de la lumière. Il a répété l'expérience pendant la pleine Lune et a pu confirmer ce qu'avance le D° Wirtz. Mais il ajoute que, quoique cet agrandissement existe sans nul doute, il n'a pas assez de valeur pour expliquer le changement marqué dans la grandeur de Linné pendant les éclipses lunarres, et il pense qu'il est dù au dépôt d'une gelée blanche autour du cratère pendant les éclipses partielles ou totales *. S 3. — Art de l’Ingénieur Les roulements à billes sur les voitures de chemins de fer. — Le Service des chemins de fer a entrepris en Aliemagne, depuis 1903, une série d'essais, qui se poursuivent toujours, sur l'emploi de roulements à billes pour les essieux des wagons. Les wagons en expérience pèsent 18 tonnes à vide et 30 à 33 tonnes en charge, cette charge se répartis- sant sur trois essieux. Au début, les roulements à billes ne furent appliqués qu'aux essieux centraux; plus tard, on les appliqua ésalement aux essieux extrêmes. En novembre dernier, les essieux centraux, ainsi munis, avaient parcouru environ 160.000 kilomètres et les essieux extrêmes 90 à 120.000 kilomètres. Les essais faits permirent d'établir qu'à une witesse de 40 kilomètres à l'heure l'effort de traction est diminué. | de 12 °/, pour l'entrainement des wagons et de 15 à 20 o/, pour le démarrage. Lorsqu'on arrive à des vitesses plus élevées, telles que celles de 90 à 100 kilo- mètres à l'heure qu'atteignent les trains rapides, la plus grande partie de l'effort est employée à vaincre la résistance de l'air : 20 °/, à peine de la puissance totale absorbée sont dépensés par le frottementsur les essieux. L'économie procurée par les roulements, tout en res- tant la mème en valeur absolue, se réduit alors à 2°/, environ par rapport à l'effort total, dont la résistance de l'air consomme la plus grande partie à la vitesse de 100 kilomètres, tandis qu'elle entre peu en ligne de compte pour une vitesse de 40 kilomètres. i En tous cas, les roulements à billes présentent, pour les grandes vitesses, l'avantage fort apprécié de réduire considérablement l’échauffement des essieux: et au point de vue de la réduction de l'effort de traction, ils constituent une économie fortappréciable sur les trains à faible vitesse, tels que les trains de marchandises, ? British Astr. Assoc., janvier 1907. ou lorsque, comme dans les tramways électriques, les voitures sont assujetties à des démarrages rapides et souvent renouvelés. C'est ce qui ressort d’une facon indiscutable des expériences faites à Berlin, dans le Hanovre et dans le Wurtemberg, sur les chemins de fer de l'Etat prussien. $ 4. — Physique L'unité des longueurs d'onde lumineuses. — Dans sa séance du 2% mai, le Congrès des Etudes solaires a adopté la résolution dont le texte ci-après lui a été présenté par une Commission insliluée à cet effet : « La longueur d'onde de la raie rouge de la lumière du cadmium produite par un tube à électrodes est 6.438, 4696 angstrôms dans l'air sec à 45° du thermo- mètre à hydrogène, sous 76 centimètres de mercure, la valeur de g étant 960,655! (latitude de 450). Ce nombre servira de définition à l'unité des longueurs d'onde. » Pour ceux qui n'ont pas suivi de près les dernières recherches en spectroscopie, une telle définition, dont la forme frappe par son étrangeté, peut sembler in- compréhensible. Le sens en est, en réalité, le suivant : Les récents travaux de MM. Benoît, Fabry et Perot ont conduit à admettre, pour la longueur d'onde de la raie rouge du cadmium, dans les conditions précitées, la valeur la plus probable 07,643. 846. 96. Cette valeur semble exacte au dix-millionième près environ, et il est peu vraisemblable que de nouvelles expériences modifient de plus d'une unité son septième chiffre. La résolution du Congrès pourrait donc ètre énoncée, aux valeurs numériques près, dans les termes que voici : On définit, à l'aide d'une longueur d'onde lumineuse, dans des conditions bien déterminées, une nouvelle unité de longueur qui est, au dix-millionième près environ, égale au dix-millième de micron. La nouvelle unité, qui est en principe indépendante, peut être envisagée au point de vue de son essence même, et à celui de son ordre de grandeur. Fai déjà dit, dans un récent article ?, les multiples inconvénients de l'emploi du dix-millième de micron comme unité en général, ét comme unité des longueurs d'onde en particulier. M. Mascart y est revenu au sein du Congrès, mais s’est buté à une résolution déjà prise à Oxford, et qui, dans l'opinion de M. Schuster, secré- taire général de l'Union des Etudes solaires, doit ètre considérée comme irrévocable. Plusieurs spectrosco- pistes, en effet, parmi les plus éminents, ont pris une telle habitude des quatre chiffres qu'ils ont manifesté une invincible aversion contre la notation la plus géné- ralement admise et la plus rationnelle. Si nous considérons la définition dans sa forme, nous ne pouvons nous défendre d'un certain malaise à l'idée que, tandis que les physiciens ont soigneusement élaboré et fait péniblement adopter un système cohé- rent d'unités, entièrement fondé sur les étalons du mètre et du kilogramme internationaux, en même temps que sur la vitesse angulaire de la rotation de la Terre, on choisit, de propos délibéré, une nouvelle unité de longueur dont la valeur numérique, rapportée au mètre, est à la merci d'une détermination expéri- mentale. Il semble que l'on soit revenu au temps où Jacobi définissait lunilé de résistance par un fil de cuivre, ou Siemens par une colonne de mercure de dimensions arbitraires. Telle est la nature de la nouvelle définition au point de vue purement logique; et, comme le mètre ou un de ses sous-multiples décimaux n'y est pas nommé, jai pu faire observer au Congrès que les physiciens attachés au système reposant sur les étalons métriques pouvaient se dispenser de la discuter, puisqu'elle leur est en principe étrangère. Mais il est ici des questions pratiques assez impé- \m /sec?. { Que 2 Voir la Revue du 15 mai 1607, p. 34#. AS0 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE ieuses pour avoir fait fléchir la logique, et il faut bién en accorder le bénélice aux spectroscopistes. D'abord. ils n'ont nullement la prétention d'imposer aux physiciens l'unité qu'ils ont créée uniquement pour eux. Ils désirent s'en servir seulement dans le domaine qu'ils cultivent, et l’abandonneront en quittant les études spectrales dans lesquelles elle restera cantonnée. Mais là, ils comptent l'employer exclusivement, pour éviter le gros ennui que leur causerait, dans l'avenir, le changement de la valeur numérique de leur échelle. Quelques spectroscopistes sont, en effet, actuelle- ment occupés, sous les auspices de l'Union interna tionale des Etudes solaires, à établir, avec la plus haute précision que l'on puisse atteindre aujourd'hui, la valeur numérique des longueurs d'onde de premier et de second ordre, dans toute l'étendue du spectre. Or. comme en toutes choses, les déterminations absolues sont, ici encore, nécessairement subordon- nées, au point de vue de l'exactitude, aux mesures relatives. Si done on n’adoptait pas, pour l'échelle, une valeur bien définie et dépendant uniquement du spectre lui-même, on ne pourrait profiter indéfiniment de toute la précision que des travaux ultérieurs pourront conduire à réaliser. La valeur numérique de la longueur d'onde de la raie étalon étant admise 2e varietur, on peut lui rapporter toute autre longueur d'onde sans s'exposer à d'incessantes modifications des tables. I ne faut pas oublier, en effet, que l'établissement d’une échelle numérique étendue des raies spectrales constitue un travail énorme, dont la simple impression est fort coûteuse. Rowland a donné la longueur d'onde de plus de vingt mille raies, dont la nomenclature constitue tout un volume. Les spectroscopistes vou- draient, aujourd'hui, faire œuvre immuable, et ne plus avoir, dans l'avenir, à reviser leurs tables que dans le détail. L Ce désir est légitime ; il s'est fait jour depuis long- temps, ets'est manifesté sous des formes diverses. L'une des propositions, faite il y a quelques années, consis- tait à désigner par { (ou par 10.000) la longueur d'onde d'une raie arbitrairement choisie. Plus récemment, M. Hartmann, de Potsdam, eût voulu que l'on adoptät une unité apportant le changement minimum aux nombres de Rowland, erronés en moyenne de 1/30.000 environ. L'unité aurait été ainsi, à un trente-millième près, un sous-multiple décimal du mètre, Inicron ou dix-millième de micron. Les spectroscopistes ont très sagement agi en repous- sant ces deux propositions, et en laissant se produire une détermination absolue nouvelle, dont le résultat à brillamment confirmé celle, vieille déjà de quinze ans, de MM. Michelson et Benoit. Au lieu de faire cette cote mal taillée au travers des déterminations de Rowland, ils ont adopté une unité qui est aussi voisine d'un sous- multiple décimal du mètre que lon peut aujourd'hui la connaitre, et qui, dans l'avenir, a bien des chances de ne pas subir de modification sensiblement supérieure à l'ordre de précision avec lequel le mètre international définit l'unité fondamentale de longueur. Prenons done les choses telles qu'elles sont; les spectroscopistes avaient un besoin évident d’une unité prise dans le spectre lui-même; ils ont attendu, pour la tixer, d'être certains de la réaliser au dix-millionième près environ au voisinage d’un sous-multiple décimal du mètre, et c’est bien tout ce que les physiciens pou- vaient leur demander. Dans l'avenir, les spectroscopistes emploieront l'ang- strôm, dont la définition voulue est assez indépendante de celle des unités usuelles pour que les physiciens puissent l'ignorer. Cela permettra à ces derniers, sans créer d'équivoque, de continuer à se servir du micron comme unité du spectre, avec la certitude d'être d'accord au dix-millionième près avec les spectrosco- pistes, en avançant, dans les résultats publiés par ces derniers, la virgule de quatre chiffres, C'est plus qu'il n'en faut pour l'immense majorité des applications de l'analyse spectrale. Et si, dans un avenir plus ou moins éloigné, une petite correction était nécessaire, on aurait le choix, ou d'admettre pour l’angstrôm une valeur qui ne serait plus égale au dix-millième de micron, mais en resterait très voisine, ou de définir des conditions de densité de l'air pour lesquelles l'égalité serait rétablie. Pour ces dernières, l'ordre de grandeur est déter- minatif du sens pratique du changement. D'après l’exac- titude attribuée à la nouvelle comparaison du mètre avec les longueurs d'ondes lumineuses, quelques centièmes de degré dans la température, un dixième de millimètre dans la pression sont à peu près les limites entre lesquelles on peut avoir à déplacer les conditions dans lesquelles s'établit la densité choisie de l'air où se propagent les mouvements lumineux. Une telle modification n’entraîne pas le plus petit inconvénient. Elle rompt, il est vrai, la belle harmonie du nombre entier, mais cela constitue un défaut de simple esthétique. Pour l'avenir, les positions sont nettement établies. Les spectroscopistes auront, sans changer leurs habi- tudes, réalisé la stabilité qu'ils désiraient pour leurs travaux, et les physiciens pourront, en conservant les leurs, certainement plus rationnelles, utiliser, par une transposition très simple, les résultats que leur fourniront les premiers. Ch.-Ed. Guillaume, Directeur-adjoint du Bureau international des Poids et Mesures. $ 5. — Electricité industrielle Un nouvel appareil pour létude des eou- rants alternatifs. — Au cours de leurs recherches d'ultra-microscopie, MM. Cotton et Mouton viennent - de montrer le parti qu'on pourrait tirer de l’ultra-mi- croscope pour l'étude du transport électrique des colloides. Les particules de ces substances, qui dans l'ultra- microscope apparaissent comme des points brillants sur fond obscur,se meuvent, en effet, sous l’action du courant électrique,se rendant soit au pôle positif, soit au négatif, suivant la nature du colloïde et du liquide dans lequel celui-ci est suspendu. Sous l’action des courants alternatifs, ces particules vibrent à l'unisson du courant et se présentent alors sous la forme de lignes lumineuses. En déplaçant le produit colloïdal par un mouvement, perpendiculaire à celui des parti= cules, imprimé au plateau du microscope, l'on aper- coit, grâce à la persistance des images rétiniennes, une courbe lumineuse. Les expérimentateurs vérifient que ce mouvement des particules est synchrone du cou- rant. Sous la forme que lui donnent les expérimentateurs français, cette belle expérience ne se prête point encore à l'étude pratique des courants alternatifs, la courbe lumineuse étant trop faible pour être photo- graphiée et trop peu persistante pour être saisie dans tous ses détails par l'observation directe. Dans un Mémoire récemment paru dans un pério- dique d'électricité italien‘, M. A. Trenzio décrit une modification de ce procédé, modification grâce à laquelle les emplois techniques deviennent parfaite- ment possibles. On imprime au produit colloïdal, déposé sur le plateau du microscope, un mouvement de va-et-vient perpendiculaire à celui qu'exécutent les particules sous l’action du courant; puis le nombre d'inversions de ce mouvement alternatif est rendu égal à la période du courant ou à un sous-multiple de ce dernier. Si le sens du mouvement alternatif est inverti au moment où la particule ultra-microscopique est arrivée à un maximum de la courbe, cette dernière sera parcourue en sens inverse, et ainsi de suite, Si l'inversion ultérieure coïncide avec un autre maximum. Si, au contraire, les inversions ont lieu en un point ——_—_—_—_—_— 1 L'Elettricista, n° 2, 1907. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 481 quelconque de la courbe, celle-ci se déplacera pendant chaque demi-périodè d'une quantité d'autant plus - grande que l'inversion à été davantage retardée ou - devancée. Ce n'est qu'en opérant l'inversion du mouve- ment au moment voulu qu'on réalise l’immobilisation chimiques. C'est ainsi qu'il n'est point susceptible de brûler, comme le charbon. M. Hiorth a cependant, il y a déjà quelque temps, réussi à produire du carbure en fondant du graphite en présence de chaux, avec une consommation d'énergie qui paraît peu élevée. Tandis que le charbon généralement employé dans ce même but doit, en elfet, être converti, au préalable, en gra- phite, l'emploi immédiat de celui-ci doit nécessairement économiser de la force motrice. Les résultats encoura- geants donnés par ces expériences ont engagé l’auteur - apparente de la courbe dans le champ de l'ultra-mi- - croscope; celte courbe pourra alors être obsérvée ou - photographiée très facilement. » La précision avec laquelle la particule du colloide * suit à chaque moment les variations du courant dépend du rapport entre sa masse et sa charge. Si cette masse était nulle, la particule prendrait à chaque moment une vitesse proportionnelle au champ élec- trique. Bien qu'en réalité cette vitesse soit influencée par l'inertie de la masse, l'erreur commise en négli- geant cette dernière sera parfaitement insensible. L'auteur propose de construire un ultra-microscope dont le plateau prendrait un mouvement de va-et-vient sous l'action d’un petit moteur électrique synchrone, actionné par le courant même qu'on étudie. Ce mou- vement du moteur serait transmis à un disque excen- trique dont la manivelle donnerait le mouvement alternatif. L'inversion serait opérée au moment voulu en ajustant pendant l'expérience l'orientation du disque jusqu'à ce que la courbe se présente immobile dans le champ de l’ultra-microscope. Nouvelle ligne électrique en italie. — Les chemins de fer de l'Etat italien ‘ ont adopté la traction électrique sur la ligne de Giovi, près de Gènes, et ont chargé la Compagnie Westinghouse de la transformation, qui comportera la traction par courants triphasés à faible fréquence au moyen de locomotives extrème- ment puissantes : système analogue à celui de la ligne de la Valteline, en service satisfaisant depuis plusieurs années. La fréquence adoptée est de 15 pps et l'usine doit comporter actuellement deux turbo-alternateurs triphasés de 5.000 kw. et 13.000 volts, tournant à 900 tours par minute. Cette vitesse très réduite impose pour le groupe générateur des développements en surface et volume assez considérables et en font le turbo-alternateur le plus puissant construit jusqu'à nos jours. L'usine génératrice alimentera trois sous-stations composées de transformateurs statiques, réduisant la tension à 3.000 volts. $ 6. — Chimie industrielle Un nouveau procédé d'extraction du fer. Dans une conférence récemment donnée à Christiania, M. A. Hiorth a indiqué un nouveau procédé permettant d'extraire le fer des minerais de Norvège, dans des conditions exceptionnellement avantageuses avec l'aide exclusive de matières de ce pays. | La Norvège, comme on le sait, fait actuellement une exportation fort importante de minerais de fer, lesquels sont raffinés à l'étranger, tandis que les besoins du pays sont satisfaits par l'importation d'articles fabriqués avec le métat extrait de ces mèmes minerais. Or, les gisements de minerais si étendus du pays pourraient, grâce à ses richesses en houille blanche, être mis à profit au moyen de quelque procédé électrométallur- gique, s’il était également possible de rendre la Norvège complètement indépendante de l'étranger en la pour- voyant du carbone nécessaire comme agent de réduction. M. Hiorth a eu l'idée d'utiliser à cet effet les dépôts de graphite dont certaines parties du pays abondent, ce qui serait d'autant plus avantageux que ce graphite ne présente pas le degré de pureté requis pour d'autres emplois, tels que, par exemple, la fabrication de creu- sets, crayons, etc. Le graphite est, on le sait, la variété la plus lourde et la plus pure de carbone trouvée dans la Nature, tout en étant extrêmement stable par rapport aux réactions ? Electrical Review, n°9 20, 16 mai, p. 830. à se servir de cette mème substance comme agent de réduction. On peut affirmer que, dans les hauts-fourneaux, il faut environ une tonne de charbon pour réduire une tonne de fer, tandis que, dans le four électrique, la quantité maxima de charbon correspondant à la même quantité de fer n’est que de 1/3, la chaleur de fusion étant fournie par l'électricité. En Norvège, une tonne de charbon coûte environ 30 francs, tandis qu'une tonne de graphite, dans la plupart des ports norvégiens, s'obtient à un prix trois fois moindre. C’est dire que le coût du carbone serait réduit à environ 1/9, en compa- raison du procédé des hauts-fourneaux, grâce à l'emploi du graphite dans le four électrique. L'auteur n'hésite pas à affirmer que ce procédé permettrait de produire le fer dans des conditions plus avantageuses que dans la plupart des autres pays; les expériences de laboratoire qu'il vient de faire démontrent, en effet, que le graphite est un agent de réduction excellent des minerais de fer. C'est ainsi qu'on produit, dans le four électrique, du fer cru très pur, à partir même de minerais de qualité inférieure et au moyen de graphite renfermant, comme impuretés, plus de 30 °/, de silicates et de silice. Le fer ainsi produit en utilisant un carbone pratique- ment dénué de valeur et un minerai de fer ne se prè- tant guère aux autres procédés, estsensiblement exempt des impuretés de la matière brute, lesquelles se retrou- vent dans les scories. Or, même ces dernières pour- raient rendre des services comme excellente matière de construction. Les expériences de M. Hiorth excitent une vive curiosité, non pas seulement en Norvège, mais à l'Etran- ger. L'Institution Carnegie vient de leur manifester son intérêt en accordant à l’auteur un subside pour ses recherches. $ 7. — Biologie Examen entoptique de la circulation réti- nienne.— On sait qu'il est possible, dans certaines circonstances, de voir la circulation du sang dans les capillaires de sa propre rétine. C'est ainsi que Pür- kinje et S. Müller, en fixant très exactement un lin détail d’une surface très vivement éclairée, ont vu des points brillants apparaître toujours au mème point du champ visuel et décrire toujours le même trajet: ils considéraient ces points brillants comme les globules rouges fortement éclairés, circulant dans les capillaires rétiniens. Vierordt moditia le procédé de Pürkinje en substituant à l’éclairement continu un éclairement intermittent : il dirigeait, à cet effet, son regard sur un fond éclairé, et agitait devant son œil les doigts de la main tenus écartés. Ainsi pratiquée suivant les procédés de Pürkinje ou de Vierordt, l'expérience est loin d'être nette ; il suffit, pour obtenir de meilleurs résultats, d'interposer devant l'œil plusieurs épaisseurs de verre bleu, en choisissant autant que possible des bleus ne laissant passer qu'une lumière monochromatique. M. le D' E. P. Fortin a fait connaitre à la Société de Biologie (2 mars 1907) un dispositif nouveau qui rentl l'expérience infiniment plus nette. Grâce aux lampes d'éclairage par les vapeurs de mercure, on obtient une source lumineuse qui, dans le spectre, ne donne naissance qu'à quatre bandes colorées, dont deux sont très voisines l’une de l'autre dans le bleu. On peut supprimer les deux autres bandes en interposant soit des verres bleus, soit une gélatine de cobalt. L'éclairage produit par ces lampes est d'ailleurs intense el équivaut à plusieurs centaines de bougies. En regardant, dans ces conditions, le tube à vapeurs mereurielles illuminé, le champ visuel semble un liquide en ébullition. De tous côtés, on voit surgir de petits tubes coudés très brillants dont les sinuosités se déplacent en tous sens; ce sont les capillaires. Isappa- raissent et disparaissent avec une extrème rapidité. Dans leur calibre, on voit très nettement serpenter de pelites sphères noires, tantôt isolées, tantôt se suivant par cinq ou six et obturant totalement le capillaire : ce sont les globules rouges. On pourra donc, à l'avenir, répéter avec un succès certain les observations de Pürkinje et de Vierordt, en adoptant le dispositif de M. Fortin. Valeur alimentaire des poudres de viande. — Pour apprécier la valeur alimentaire d'une substance, il ne suflit pas de déterminer qualitativement et quan- titativement sa composition chimique. Telle substance, qui contient en proportions convenables des protéines, des graisses et des hydrocarbonés, n’est pas de ce fait nécessairement un aliment précieux; la valeur alimen- taire de deux substances chimiquement équivalentes peut être essentiellement différente. Ce sont là des principes importants au point de vue de l'hygiène ali- mentaire, dont la démonstration ne saurait être trop précisée. La poudre de viande, par exemple, ne diffère pas essentiellement au point de vue chimique de la viande dont elle provient; or, la viande est un aliment de pre- mier ordre; dès lors, beaucoup de gens concluent que la poudre de viande est également un aliment et un reconstituant de premier ordre. Ce en quoi ils se trompent grandement, ainsi que l’établissent des re- cherches faites par M. P. Lassablière au Laboratoire de Physiologie de la Faculté de Médecine de Paris. M. Lassablière nourrit deux chiens avec du bouillon et de la poudre de viande (8 gr. 80 par jour et par kilo- gramme de chien); il constate que cette alimentation est insuffisante, le poids des chiens diminuant rapide- ment. Au bout de trente-deux jours, les animaux sont dans le marasme le plus profond, et ont perdu 31 0/, de leur poids. Or, si l'on donne à un chien 40 grammes de viande par jour et par kilogramme de son poids, on le peut maintenir indéfiniment en équilibre de poids ; et pourtant #0 grammes de viande ne représentent pas l'équivalent de 8 gr. 6 de poudre de viande. D'autre part, si l'on abandonne un chien au jeûne absolu, la mort ne survient que vers le quarantième jour, l'animal ayant perdu 40 °/, de son poids. ‘ Il semble donc résulter de là que l'alimentation avec la poudre de viande n'est pas non seulement nulle, mais dangereuse, puisqu'elle provoque la mort plus rapidement que la privation absolue d’aliment. Cette conclusion est justifiée par des expériences dans lesquelles des chiens sont soumis pendant des périodes de cinq jours chacune, alternativement au Jeûne absolu et à une alimentation composée de bouillon et de 11 gr. 1 de poudre de viande par jour et par kilo- gramme de leur poids. Dans ces conditions, les pertes de poids des chiens sont, pendant les périodes d’ali- mentaiion, le double de ce qu'elles sont pendant les périodes de jeûne absolu. On doit rapprocher ces faits de ceux qu'on a observés dans le jeûne salin. On sait qu'un animal nourri avec des aliments débarrassés par lessivages ou par opéra- tions chimiques convenables des sels qu'ils contiennent meurt plus vite qu'un animal de même espèce soumis au jeûne absolu; et cela alors même qu'on à ajouté aux aliments désalés les sels dont on les avait privés. C’est donc que, dans l'opération du désalage, on a modifié les aliments de facon à les rendre inutilisables ou insufti- samment utilisables par l'organisme, et qu'on les a transformés en produits possédant au moins une faible toxicité. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Les faits de M. Lassablière sont de même ordre, et confirment cette conclusion que l'alimentation des êtres vivants ne doit pas seulement répondre à des condi- tions quantitatives, mais aussi à des conditions quali- tatives très précises et très impérieuses. 5 $ 8. — Enseignement et Sociétés La Revue de lEnséignement des Sciences. — 11 vient de se fonder un périodique mensuel, La Revue de l'Enseignement des Sciences, dont le but est de « servir les intérêts généraux de l'Enseignement des Sciences en travaillant à son développement, en récla- mant pour lui la place que mérite son importance pour la formation des esprits et la préparation à la vie pro= ductive ». La rénovation qui s’est faite dans l’ensei- gnement scientifique depuis lapplication des pro- grammes de 1902 justifie la nécessité de ce journal professionnel, d'autant mieux que les revues univer— sitaires et pédagogiques s'occupent presque exclusive- ment des lettres et des langues vivantes. Dans les premiers numéros, nous relevons des articles intéressants : de M. J. Lemoine, sur l'Optique géomé- trique et les ondes ‘lumineuses; de M. Grévy, sur examens et examinateurs; de M. Berson, sur la respon- sabilité dans les accidents de laboratoire; de M.Chauvet, sur l’enseignement pratique de la Géologie, ete. Les Laboratoires scientifiques du Mont- Rose. — Le 15 août prochain, si le temps le permet, » aura lieu l'inauguration des Laboratoires scientifiques. pour les recherches alpines, au Col d'Olen, à l'altitude de 3.000 mètres, sur le Mont-Rose. L'édifice comprend des Laboratoires de Botanique (dans la serre), de Bac- tériologie, de Zoologie, de Physiologie, de Physique terrestre et de Météorologie. Pour les recherches à de plus grandes altitudes, un Laboratoire international de Physiologie et une chambre pour l'étude de la Physique terrestre seront disponibles dans la Capanna Regina Margherita, sur la pointe Gnifetti, à 4.560 mètres. : Les Laboratoires du Col d'Olen seront pourvus du matériel nécessaire et des instruments le plus ordi- M nairement employés dans les recherches respectives. ; Les pôstes d'étude pour les recherches alpines sont M au nombre de 18, ainsi répartis : Belgique 2, Angle- terre 2, Allemagne 2, France 2, Autriche-Hongrie 2, Suisse 2, Amérique 1, Italie 5. Outre la table d'étude dansles Laboratoires respectifs, une chambre est fournie M gratuitement pour chaque poste, avec l'usage de la bi- { bliothèque et des locaux en commun. Les savants qui désireraient occuper ces postes « doivent s'adresser à M. le Professeur A. Mosso, à Turin, qui leur donnera les renseignements utiles. La « British Science Guilde ». — Cette Asso- ciation, qui à pour but la propagation et la protection de la science et qui comprend de nombreuses person- nalités scientifiques, vient de tenir à Londres son assemblée annuelle. On sait que cette Société intervient souvent et efficacement auprès des Pouvoirs publics pour défendre les intérêts scientifiqnes. C est ainsi que, récemment, elle faisait porter la subvention du Labo- ratoire national de Physique de 125.000 à 250.000 francs. La Guilde s'occupe aussi des questions d'éducation. Elle vient de constituer deux Commissions, l'une pour l'enseignement élémentaire, Vautre pour l'enseigne= ment secondaire, et toutes deux ont mission d'établir dans l'éducation la prédominance de l'esprit et des méthodes scientifiques. Parmi les membres de ces commissions, nous relevons des noms illustres comme ceux de Sir William Ramsay, Sir Archibald Geikie, Lord Avebury, etc. Voilà une Ligue qui agit et qui peut exercer une influence profonde sur l'avenir d'une nation. C'était un exemple à citer. Puisse-t-il toucher les savants et les parlementaires de notre pays. G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE 483 LES PRINCIPES GÉNÉRAUX ET LES RELATIONS FONDAMENTALES DE L'ÉNERGÉTIQUE Il nous paraît d'autant plus utile de publier cette belle étude de M. Hostelet sur l'Energétique, que le nom méme de cette science est aujourd'hui abusivement prononcé par toute une catégorie de personnes étrangères aux Mathématiques. Depuis qu'un certain nombre de mécaniciens, soucieux de bannir de leur science toute hypothèse métaphysique, ont tenté de substituer aux doctrines et aux notations ordinaires de la Mécanique le système énergétique, de très braves gens ont eu la candeur de croire qu'enfin la notion d'énergie venait de faire son apparilion dans le monde. À les entendre, les équations de l'ancienne Mécanique n'auraient Jamais tenu comple des énergies en jeu dans les phénomènes chimiques ou biologiques. Quelle stupéfaction serait la leur S'ils apprenaient que la grande ambition de l'Energétique est de fixer, pour tous les phénomènes physiques, les grandeurs représentatives des qualités en action et d'en préciser les rapports d'équivalence et de dépendance! Sous la bannière de la science nouvelle s'est subitement enrôlée une pléiade allière de médecins et de nourrisseurs, tout frémissants du zèle de lapostolat et bien décidés à introduire désormais dans leurs théories sur l'alimentation de l'homme et du bétail, sur la nutrition et la contraction des muscles, le dosage, eflectue selon les anciennes méthodes, du travail produit, des énergies accumulées ou dépensées. Avec une parfaite bonne foi, ces honnêtes expérimentaleurs croient ainsi faire de l'Energétique! Lisez les programmes ou comples-rendus des congrès de meuniers, de vétérinaires et de médicastres, voire de physiologistes, vous les trouverez infestés de mémoires ou de menaces de mémoires sur celle méritoire entreprise. Aucun des spécialistes que nous visons n'oserait Se considérer comme un homme distinqué, s'il négligeait de faire résonner bien haut dans ses discours ce grand mot d'Energétique, dont le sens lai échappe, mais qui médusera ses auditeurs. Il semhle qu'en le prononçant on se décerne à soi-même un brevet évident de science transcendante. On le servira donc à tout propos et surtout hors de propos, de même que, depuis une boutade, maintenant célèbre, de M. Laurent Tailhade, des nuées de folliculaires nous servent quotidiennement el sans dégoit le « geste » de Chose ou de Machin. La Science ne saurait étre responsable de la façon dont les incompétents l'interprétent. Pour son bon renom, elle a cependant intérêt à répudier leur concours et à les écarter de ses débats. NOTE DE LA DIRECTION. conditions l'on a établi Ja correspondance numé- rique de chacune des grandeurs physiques qu'ils relienL. L'Énergétique étant en pleine période de forma- tion, son unité n'apparait pas toujours facilement I. — INTRODUCTION. 1. — Une discipline unique lend à se constituer dans les sciences physiques et chimiques. Certains savants, qui s'occupent surtout des développements mathématiques de cette théorie, la désignent volon- tiers sous le nom de 7hermodynamique générale”, en reconnaissance de la participation essentielle de la Thermodynamique proprement dite à sa forma- tion; d’autres, plus expérimentateurs, préfèrent la nommer Ænergétique?, parce que l'énergie en est la notion fondamentale. Cette discipline a pour but de donner l'intelligence des généralisalions expé- rimentales, des principes qui en résultent, des répercussions que ceux-ci apportent dans l'étude de toutes les catégories de phénomènes et des transformations que ces principes subissent par suile des acquisitions expérimentales nouvelles. Enfin, si ces principes ont élé traduits mathémati- quement, elle apprend comment et dans quelles * 4 Dune : Evolution de la Mécanique, 1903. - ? H. Le Caarezier : Journal de Physique, 1895. — OsrwaALn : Revue gén. des Sc., 1891. et, surtout, l'expression de ses principes et de ses notions essentielles n'est pas toujours adéquate aux caractères expérimentaux auxquels ils se rap- portent. Cetle dernière circonstance doit être attri- buée, en partie sans doute, à l’origine en quelque sorte industrielle de la Thermodynamique, sortie, en réalilé, de l’élude des moteurs thermiques. Les termes de cette science, primitivement adaptés à leur fin particulière, ont élé conservés lorsque l'application de ses méthodes a été étendue à tous les phénomènes de la matière, en sorte que leur sens trop limité ne peut que difficilement convenir à l'expression de faits tout à fait généraux. De cette mauvaise adaptation résulte une grande difficulté à saisir les procédés généraux que l'Énergélique fournit pour l'établissement des rapports entre les circonstances phénoménales les plus compliquées et les faits élémentaires qui dominent les sciences physiques, et pour la traduction de ces rapports en relations mathématiques. 2. — Autrefois, pour expliquer les propriétés des corps et établir entre elles des relations, on s'ef- forcait de les réduire à la figure et au mouvement, c'est-à-dire d'en trouver une explication mécanique. Grâce surtout au développement de la Thermody- namique, On à appris à considérer explicitement et systématiquement les propriélés des corps comme pouvant être irréduclibles entre elles : tel corps possède les qualités d’être chaud, d’être électrisé, d'être sapide, d'être composé de tel et tel corps simples. Ce postulat de l'irréductibililé des qua- lités, posé à la base de l'Énergétique, a été impli- citement admis au début de la Physique, et ce ne fut que le développement admirable et rapide de la Mécanique rationnelle qui amena les savants à entrevoir l'explication de tous les phénomènes naturels par les théories mécaniques, dont les prin- cipes provenaient pourtant de l'interprétation des phénomènes physiques les plus simples *. Parmi ces qualités, il en est qui peuvent déter- miner des états distincts du corps ou du système de corps auxquels elles sont liées, états qui, bien que distincts, se reconnaissent comme étant de même espèce : états thermiques, électriques, etc. Nous concevons ainsi par elles diverses grandeurs dans le monde physique. C'est à l'expérience de déméler ces grandeurs, de les définir avec préci- sion et d'établir une correspondance numérique entre leurs états, c'est-à-dire de les exprimer par un nombre qui croit ou décroit en même temps qu'elles. Les sciences physiques se sont développées en modifiant leur système de qualilés, grâce à une connaissance plus étendue des propriétés des corps et à une critique plus exacte des caractères spéci- fiques des qualités dont on avait reconnu l'exis- tence. C'est ainsi que l’on réunit à présent sous le nom d'énergie rayonnante les phénomènes calo- rifiques, lumineux et électriques, que l'on avait groupés en catégories distinctes, parce que direc- tement ou indirectement ils affeclaieut nos sens de manières différentes. 3. — Parfois, des hypothèses ont été énoncées qui tendaient à rejeter ces distinctions et à ramener tous les phénomènes aux conséquences d’un pelit nombre de principes : on concevait le monde phy- sique comme étant composé d'une infinité d'atomes animés de mouvements, soumis ou non à des actions réciproques, ou encore on le supposait con- sStitué par un fluide continu, incompressible, au sein duquel se perpétuaient des mouvements tour- billonnaires. Ces conceptions ont certainement joué ! Maca : La Mécanique, trad. franc. de E. BERTRAND, 1903. G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE un rôle considérable dans le développement des sciences physiques : elles ont fourni aux faits des interprétations suggestives et même des relations numériques, dont l'utilité se restreint, d’ailleurs, à un domaine toujours limité. Mais, comme elles restent sans contact immédiat avec l'expérience, elles ne nous aident pas à développer en nous l'ap- titude à dégager une notion des faits d'observation et à l'adapter aux acquisilions nouvelles, aptitude sans laquelle la science s'arréterait bientôt. Aussi, ces hypothèses, sans pouvoir être pros- crites des sciences physiques, n'y entrent que comme auxiliaires et conservent un caractère pro- visoire. Ce sont les notions et principes expérimentaux qu'il importe de connaître. Et, comme leur sens actuel s’étaye sur la suite de leurs sens antérieurs, il faudra, pour le comprendre bien, se pénétrer de leur évolution. Non pas que l’enseignement de cette évolution doive de toute nécessité suivre fidèlement l'histoire : il suffit qu'il soit idéalement constitué, de manière à composer une filiation aussi cohérente que le permet notre conscience des procédés d'acquisition scientifique. 4. — Toute l'Énergétique actuelle pourrait être constituée à l’aide des notions et des relations qui se dégagent du principe des travaux virtuels, résu- mant l'étude de l'équilibre des forces appliquées à un système de corps, du théorème des forces vives, auquel aboutit l'étude du mouvement local des corps libres, du principe de Carnot, du principe de Joule, fourni par l'étude des phénomènes méca- niques et des phénomènes thermiques, et enfin de la loi d'Ohm, fournie par l’élude des courants élec- triques'. En effet, en faisant dépendre la production d'un travail mécanique de la différence de tempé- rature des deux sources de chaleur, le théorème de Carnot a conduit à la notion exacte de cause déterminante des changements ou action motrice, avec ou sans liaison entre les diverses catégories de phénomènes. Il a, en outre, fourni le type de la correspondance numérique absolue, lorsqu'on y eut introduit le principe de l'équivalence de la chaleur et du travail. Enfin, l’acte même de la transforma- lion, du changement d'un corps ou d'un système de corps est régi par des liaisons qui dépendent essentiellement du temps et qui sont ou des résis- tances vives, comme l'a montré l'étude des mou- 1 Pourquoi s'obstine-t-on à parler de la « loi d'Ohm »? Ohm n'a pas découvert la loi qui porte son nom : il s'est borné à l'énoncer, sans aucunement l'établir; son mérite consiste à avoir émis cette erreur que, si l'électricité se pro- page comme la chaleur, il doit en résulter que l'intensité d’un courant est égale au quotient de la force électromotrice divisée par la somme des résistances du circuit. Or ce der- nier rapport a été mis debout par Pouillet et non par Ohm. NOTE DE LA DIRECTION. G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE 485 vements locaux, ou des résistances passives, ainsi que Ohm l'a défini dans ses recherches sur la pro- pagalion de l'électricité dans les conducteurs, ou encore des déformations ou des liaisons cachées que l’on désigne, selon les circonstances, par frot- tement, par hystérésis, ete. Nous ferons donc une revue d'ensemble de ces notions et de ces lois particulières en nous placant à un point de vue qui permette d'en dégager les caractères essentiels. Nous pourrons alors en gé- néraliser le sens et la portée, de manière à les retrouver dans loutes les catégories de phéno- mènes et à adapter les principes qu'elles fournissent au domaine entier de la Physique et de la Chimie. IL — DÉFINITION DE LA TEMPÉRATURE ET DE LA QUANTITÉ DE CHALEUR. 1. — L'origine de la notion de température est la sensation de chaud et de froid indépendante, de la nature du corps qui en est l'occasion et que l’on considère comme le support d'une qualité ainsi manifestée. L'égalité de température de deux corps est marquée par la cessation de changements appa- rents qui se montrent toujours associés à nos sen- sations de chaleur, et qui consistent ordinairement en des variations de volume concomitantes. Cette définition de l'égalité de température est justifiée par l'expérience, qui vérifie, en effet, que deux corps, séparément en équilibre de température avec un troisième, le sont entre eux. Partant de la considération de corps supposés homogènes et de propriétés invariables dans un domaine thermique étendu, on a défini une tempé- rature plus grande qu'une autre en rapportant la première au volume le plus grand et la deuxième au volume le plus petit, puisqu'il y avait ainsi con- cordance avec le degré d'acuité de notre sensalion. Dès lors, admettant une proportionnalité entre la grandeur variable — température — considérée comme cause, et la grandeur variable — volume — considérée comme effet, on a adopté la convention connue de la gradualion du thermomètre à mer- cure : V100 — Vo (1) t— 100 L ns On aurait pu choisir aussi bien la relalion : (2) température ou 6 = f (4), où { représente encore le degré marqué par le thermomètre à mercure, pourvu que la fonction f{t) soit supposée croissante avec {°. Mais celte convention eût été moins commode et, d'ailleurs, eût paru particulièrement arbitraire. 1 H. Poincaré : Thermodynamique, p. 60 et suiv. Que la graduation ne soit pas, en effet, indépen- dante du corps choisi, c'est ce que l'expérience a montré par l'étude des dilatations. 2, — Deux corps À et B sont à des températures différentes, {, et /., /, étant plus grand que {,; ces corps étant mis en présence, /, s'élève et /, s'abaisse. On observe que l'augmentation de /, est double, si l'on prend une quantité double du corps B. De ce fait est née la notion de quantité de chaleur, et l'on dit que B cède de la chaleur à A : on fre done un sens déterminé au déplacement de la chaleur d’après la définition donnée à la température. Pour définir l'égalité et le rapport numérique de deux quantités de chaleur, on à eu recours aux phénomènes de changements d'états et particuliè- rement à celui de la fusion de la glace, dans lequel le poids de la glace fondue, qui est l «effet » observé, apparait comme proportionnel à la quantité de chaleur communiquée, qui en est la « cause ». L'expérience, prouve par la comparaison des me- sures, que, dans ce procédé, le choix du corps dit « calorimétrique » est arbitraire. 3.— La quantité de chaleur acquise par un corps dépend évidemment des grandeurs qui spécifient l'état de ce corps. Or, si nous considérons des corps homogènes qui ne subissent pas de changements chimiques, l'étude des actions thermiques et méca- niques nous apprend que leur état est complète- ment défini par une relation de la forme : (3) o(pvt) = 0, où y désigne le volume d'une masse arbitraire, mais constante, du corps, et habituellement le volume spécifique, p la pression, { la température. Ces deux dernières variables sont donc les facteurs déterminants des changements thermiques et des déformations élastiques et on les appelle pour cette raison facteurs d'intensité où d'action motrice. Pour ces corps homogènes, la quantité de chaleur d@, empruntée pour une transformation élémen- taire, s'exprime donc: (4) d = dy(pvt), relation à laquelle il faut joindre l'équation de liaison (3); d@Q ne dépend donc ici que de deux variables indépendantes. L'expérience a défini deux coefficients calori- fiques : la chaleur spécifique à pression constante C, et la chaleur spécifique à volume conslant €. Prenons done pet v comme variables indépendantes afin d'exprimer d@ explicilement en fonction de coefficients accessibles à l'expérience el nous aurons la relation connue : dt dt )| Q— —_— C—"\ (5) d@ = C ar d + 0 Ts 1p. AS6 III. — LE PRINCIPE D'ÉQUIVALENCE ET SES CONSÉQUENCES. 1. — Les considérations qui précèdent sont indé- pendantes de toute hypothèse sur la nature intime des phénomènes calorifiques. Mais les propriétés mathématiques de l'équation (5) différeront suivant les idées admises au sujet de la chaleur. Ainsi, dans l'hypothèse du calorique et de son indestruc- tibilité, que Carnot admetlait, d@ serait une diffé- rentielle exacte. Mais nous savons, à présent, que l’accomplissement d'un effet mécanique peut don- ner lieu à un effet thermique, et réciproquement. Il en résulte donc que la chaleur recue par le corps considéré, en passant d'un état À à un état B, a pu se transformer, en partie plus ou moins grande, en effet mécanique; de sorte que sa quantité dépend du chemin suivi. La grandeur fra A n'est donc pas une fonction potentielle : il faut connaitre la relation entre r et p, de A à B, pour pouvoir l'intégrer. Par la considération de systèmes de corps quel- conques, mais tels qu'un changement calorimélri- que neutralise complètement un changement méca- nique, Joule et Mayer ont élabli qu'à un change- ment calorifique donné correspond un travail cons- tant et ils en ont induit le principe de l'équivalence du travail et de la chaleur. On appelle équivalent mécanique de la chaleur, et l'on désigne par J, le travail qui neutralise un changement correspondant au développement d'une quantité de chaleur égale à 1 calorie dans le système considéré. 2. — On regarde donc comme démontrée par l'expérience la proposition suivante, qui est la traduction directe des conditions d'expérience de Joule : Si un système de corps, après avoir décrit un cycle de transformations, revient à son état initial, le travail fourni au système par les forces extérieures est égal au produit de l'équivalent J et de la quantité de chaleur reçue par le milieu exté- TICEUT.: 6 1 dés de, en donnant le signe — au travail fourni au sys- tème. Si l’on écrit l'équation (6) sous la forme : on en conclut qu'il existe toujours une fonction U telle qu'il est possible d'établir une correspondance univoque entre chacune de ses valeurs et chacun des états du système dont les changements se mani- G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE festent extérieurement par des effets mécaniques et des effets thermiques. La variation de cette fonc- tion potentielle U de l’état A à l’état B: B # (dEe+ JdO), AA exprimera la somme des travaux subis par les forces extérieures et de la chaleur que le milieu extérieur a recue. Celte somme est indépendante du chemin suivi par le système. Elle définit une nouvelle grandeur physique, que l’on appelle éner- gie interne, puisqu'elle représente et évalue la propriélé générale d’action que le système a en puissance dans un état donné et qui se manifeste sous un aspect double de quantité de chaleur et de travail pouvant se substituer l’un à l’autre par quantités équivalentes. Celte correspondance numérique ne peut être expérimertalement établie qu'à partir d’un état choisi arbitrairement comme origine : l'énergie interne d'un système n’est donc définie qu'à une constante près. 3. — Dans un sysième isolé, 46, el dQ sont séparément nuls, et tout changement que le système subit laisse par conséquent l'énergie interne cons- tante. Tel est le principe de la conservation de l'énergie. Dans le cas particulier d'un corps dont les états sont définis par 9 (py{) = 0, les travaux élémen- taires subis par les forces extérieures s'expriment par pdyv; si donc les changements de vitesse sont négligeables, on peut écrire :° (S} — AU = pdv + Jd@. 4. — Ces notions de transformation, d'équiva- lence et d'énergie se sont étendues à tous les modes de manifestations d'un corps ou d'un système de corps. Nous pouvons résumer comme suit les divers caractères généraux que ces notions comportent, ainsi que les lois de correspondance numérique qui en résultent. D'après nos connaissances actuelles des faits physiques et chimiques, tous les changements, à quelque catégorie qu'ils appartiennent, sont en dépendance réciproque : un changement ne peut se produire dans un système donné sans entrainer un ou plusieurs changements conséquents de même catégorie ou de catégories différentes. Il y a done corrélation et transformation où mieux substitu- tion des qualités. Nous savons composer des systèmes particuliers dont les changements se compensent, c’est-à-dire des systèmes dont nous pouvons délimiter les actions sur l'extérieur par l'emploi d’« écrans », mécaniques, thermiques, électriques, chimiques, etc. Grâce à ces systèmes isolables, nous avons pu me G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE 487 RE —————_————…— ————"—"—"—"—"—"—"—”—"—"—"—"…"…"”"’— "—…" ’ . ’"’”"”"’" "— —…— — ———— établir qu'à un changement antécédent, correspond un changement conséquent de grandeur constante, quel que soit le mode de liaison choisi. Il y a donc équivalence et détermination dans la grandeur de l'effet d'un changement et l'on peut mesurer celle- ci en ja rapportant à un effet particulier, choisi comme étant le plus pratique et le mieux défini. C'est ce que l'on a fait dans l'exemple de la glace, cité plus haut. 5. — Dès lors, en adoptant une convention d'additivité et une convention de neutralité, on peut faire correspondre à tout changement un nombre positif où négatif qui indique ce qu'on peut attendre de son effet extérieur lolal, c'est-à- dire qui mesure ce changement. Cet effet peut se manifester sous des aspects mécaniques, élastiques, thermiques, lumineux, électriques et chimiques; mais les évaluations expérimentales de ceux-ci, traduites en un nombre homogène au travail d'un poids qui descend, se ramènent à la forme + *4Ph, où Æ a sa valeur absolue déterminée d'après l'unité de changement qui a été adoptée. Le même effet peut être mesuré en quantilé de chaleur ou de toute autre forme d’aclion : le choix n'est guidé que par une question de réalisation pratique de la mesure‘. : La grandeur qui représente la propriété géné- rale d'action sous n'importe quelle forme est ap- pelée énergie, el la fonction potentielle qui définit la mesure de l'accroissement de la puissance ou capacilé totale d'action d'un système, qui passe d'un état 0, choisi arbitrairement, à un état quel- conque M, est appelée accroissement de l'énergie interne : (9) AU — ASkPh, ou, explicitement et d'après nos conventions de signes (6): ®A _ 7 Rdée Edo EaiWe eee), ces différents termes se rapporlant respeclive- ment aux modes mécaniques, calorifiques, élec- triques, elc. Quant à l'équation du principe de l'énergie relatif aux systèmes isolés, elle s'écrit alors : (10) TM = - J KidEe + kdOe + kÿdWe + ...)—0. LA IV. — LES FONDEMENTS EXPÉRIMENTAUX ET LES CONSÉQUENCES DU PRINCIPE DE CLAUSIUS. 1. — D'après la définition de la température et celle de la quantité de chaleur, les températures 1 J. Perrin : Les deux principes de la Thermodynamique. Revue de Métaphysique et morale, 1902. des corps en présence tendent à s'égaliser, et le corps qui s'est refroiài a cédé de la chaleur à celui qui s'est échauffé. La chaleur ne peut donc passer directement d'un corps à un autre plus chaud. Mais, on sait, à présent, que, par l'intermédiaire de certaines liaisons qu'on peut appeler transfor- mateurs d'énergie, il est possible d'élever la tem- péralure d'un corps au moyen d'aclions méca- niques. Pourrait-on, par des transformations appropriées, faire passer indirectement de la cha- leur d'une source froide à une source chaude, lorsque le système qui a servi d'intermédiaire est revenu à son état initial? L'expérience répond que non. C'est la négation de cette possibilité qui cons- litue le principe de Clausius. 2, — De ce dernier principe et de celui de l'équivalence résulte immédiatement le corollaire suivant : Il est impossible, avec une seule source de chaleur, de produire une modification mécanique qui ne s'effectuerait pas spontanément, c'est-à-dire, dans le langage des ingénieurs, de faire fonc- lionner un moteur thermique. En conclusion, quelles que soient les transfor- mations thermiques d'un système à température uniforme et leurs liaisons avec l'extérieur, du tra- vail ne peut être produit et de la chaleur ne peut ètre reçue par le milieu extérieur sans chute de température, c'est-à-dire sans la dégradation de l'énergie thermique. 3. — Nous savions déjà par l'étude des dépla- cements des corps qu'un système quelconque de corps pesants ne peut se mouvoir de lui-même que si la masse pesanle dans son ensemble descend”. L'étude des déformalions des corps expansibles montre qu'aucune déformation ne peut spontané- ment s'accomplir sans une diminution de pression. C'est ce même caractère d'un sens déterminé dans la transformation que l’on retrouve donc dans les phénomènes thermiques comme dans les phéno- mènes mécaniques, ainsi que dans toutes les mani- festations d'énergie électrique, rayonnante, chi- mique : les phénomènes naturels ne procèdent d'eux-mêmes que dans un sens déterminé, qui est marqué par la diminution de certains facteurs d'intensilé ou d'action motrice. Mais, pour que l'équilibre existe, il ne faut pas nécessairement que les facteurs d'intensité de même catégorie soient égaux. Car la tendance à l'homogénéité, c'est-à-dire à l'égalité des actions motrices, est contrariée par le fait que des actions motrices de calégories différentes peuvent s'équi- librer : c'est ainsi qu'une lension électrique peut être équilibrée par un poids, par la lraction d'un ressort élastique, ete. IL n'y a que pour la chaleur —— 4 Macu : La Mécanique, p. 74. 458 G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE qu'on ne connait pas de liaison qui permette l'équi- libre direct d’une aclion motrice thermique par une autre de catégorie différente : on doit alors recourir à l'artifice d’un transformateur. Nous désignerons cette tendance des phéno- mènes sous le nom de principe de la dégradation de lénergie, ou plus exactement de la dégrada- tion de l'action motrice. On donne habituellement un autre sens à cetle expression : dégradalion de énergie, qui est alors employée concurremment avec celle de dissipation de l'énergie pour indiquer la tendance générale qu'ont toutes les formes de l'énergie à se trans- former en chaleur. Mais nous distinguerons nelte- ment ces deux expressions. 4. — Les mécaniciens ont défini sous le nom de travail l'expression numérique de l'action déterminante du mouvement ou de la déformation d'un système; et leur énoncé du principe des tra- vaux virtuels — d’après lequel il ne peut y avoir changement mécanique que si un travail positif peut être effectué — exprime le caractère phéno- ménal précédent sous une forme quantitative, applicable à tous les modes d'action mécanique. Pouvons-nous énoncer un théorème analogue pour les systèmes dont les transformations sont à la fois mécaniques et thermiques? A cette fin, con- sidérons un système partiellement isolé, par exemple le système formé de deux sources de chaleur, dont la plus froide sera envisagée comme milieu extérieur, et dans lequel un changement thermique se fait, non directement suivant la règle des mélanges, mais par l'intermédiaire de change- ments mécaniques accompagnant une succession d'états indépendants du temps. C'est le cas simple étudié par Carnot et qui lui a permis de déterminer ce qu'il a appelé capacité maximum de puissance motrice, c'est-à-dire le travail maximum qui peut être effectué du fait que l'unité de quantité de cha- leur a élé cédée par la source chaude à la source froide. 5. — Le cycle dit de Carnot définit un tel système à liaisons complètes indépendantes du temps. Dans ce cycle, le système est, en effet, par- faitement isolé et formé d’une suite d'élats d’équi- libre, de manière qu'il n’y a ni conduction, ni rayonnement de chaleur, ni frottement, ni visco- sité qui transforme ou dissipe dans le milieu exté- rieur l'énergie cédée en passant d'un état au sui- vant. Si le transformateur, ou, suivant l'expression habituelle, si le moteur thermique actionne un système dont le changement consiste à élever un poids, la source chaude aura accompli, lorsque ce moteur sera revenu à son élat initial, une trans- formation ouverte dont les effets extérieurs consis- teront en un travail effectué sur les forces exté- rieures et en une réception de chaleur par la source froide. Ce cycle ne répond évidemment qu'à une con- ception théorique, à laquelle on recourt pour le placer dans des conditions de simplicité phéuomé- nale qui en permettent l'interprétation mathéma- tique. Cependant, cette conception ne sort pas du monde naturel; elle n’est que l'expression limitée d’un cycle réalisable. On sait qu'un tel cycle est ordinairement appelé réversible, parce qu'il dé- finit une modification idéale qui sépare deux ensembles de modifications exactement inverses les unes des autres, celles-ci pouvant s'accomplir spontanément et celles-là ne pouvant résulter que d'une contrainte extérieure *. Telle quelle, la considération du eyele de Carnot n'aura d'application directe que pour autant qu'elle conduise à une approximalion pratiquement suffi- sante. Mais, sa portée dépasse cette question d’ap- plication immédiate. Ce cas, bien qu'il soit si parti- culier, établit, en effet, les rapports de dépendance entre des actions motrices de qualités différentes, et l'on peut donc prévoir qu'il nous conduira à une compréhension intégrale d'une de ces relationsentre les phénomènes naturels dont l'acquisition cons- titue le but même de l'effort scientifique. 6. — En désignant par @, la quantité de cha- leur fournie par la source chaude et par €. le travail produit par le transformateur dans le par- cours entier du cycle, on établit que le rapport 1e. dire du transformateur, mais uniquement des tem- pératures !, et {, des deux sources et, de plus, que ce rapport, appelé rendement, est maximum, ainsi que nous l’avions fait pressentir. 7. — On en déduit que ne dépend pas du système de liaisons, c'est-à- Ge o(t,) — pt) pe Ne $ (11) : ue Ja o(t (!) représentant une fonction inconèue du degré de tempéralure indiqué par le thermomètre à mer- cure. On pourra donc définir, avec W. Thomson (Lord Kelvin), une graduation des températures absolues, c'est-à-dire indépendante du corps témoin, en con- venant de noter les températures d'après les valeurs ‘T de cette fonction & ({). Mais, comment élablir ces valeurs? Remarquons que É fe _Ti—T (11 bis) ja, — Dr donne = re f2) DT ja: 6e 4 Dune : Préface de la Thermodynamique de Marois. G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE 489 Si donc on prend T,, correspondant à un état quel- conque défini par {,, comme origine de la gradua- tion absolue, on peut établir une correspondance numérique entre les valeurs #/{/) de T et le travail fourni par le transformateur lorsque la source chaude, à cette température origine, lui cède la quantité de chaleur @, : = Ge—n. TT —=—10si T,—T,=—n si Il suffirait donc de connaitre les familles des lignes isothermes et adiabatiques d'un corps quel- conque pour fixer celte graduation destempératures absolues. Or, celles-ci sont très approximativement connues pour les gaz parfaits et, de plus, la gradua- tion obtenue au moyen de celte règle coïncide avec celle du thermomètre à hydrogène; ce dernier con- stitue done un appareil donnant, à la lecture directe, les degrés de température absolue. Ainsi, le théorème de Carnot fournit une corres- pondance numérique entre les états d'intensité de la température et ceux d'une grandeur physique, le travail, qui sert de commune mesure à tous les phénomènes d’énergélique (12). C’est là un des exemples les plus achevés d'adaptation d'un con- cept physique à un plan d'ensemble d'organisation mathématique de notre représentation des phéno- mènes naturels, basé sur une étroite corrélation avec les postulats les plus généraux que nous fournit actuellement l'expérience. 8. — Les résultats de cet effort d'adaptation sont immédiats. On sait que la relation (11) peut s’écrire : a 9 - 1Q \ en Ge G ) ne 0 —11}F (43) T, + T, u 7 T @, désignant la quantité de chaleur reçue par la source froide; Clausius, qui, le premier, en a fait la remarque, à démontré que cette propriété appar- tient à tous les cycles fermés quelconques. Il en : OPETTSS P. résulte que TT définit une deuxième fonelion J potentielle S qui se rapporte au transformateur et qui est donc en correspondance avec chacun des états de celui-ci, fonelion où T représente la tem- pérature uniforme du transformateur à un état donné, et d@ la quantité de chaleur reçue par lui réversiblement en passant de cet état à un état voisin. Cette fonction $S est appelée entropie. De même que l'énergie interne, elle ne peut être connue qu'à une constante près. Pour évaluer ses varialions, on partira donc d'un état origine qui sera autant que possible le même que celui de U. 9. — Cette correspondance numérique nouvelle doit, sans doute, se rapporter à une grandeur phy- sique importante, qu'il est nécessaire de réchercher pour ne pas disjoindre notre intuition physique des relations formelles de l'Énergétique. La formule de Carnot s'écrit, avec la notation de l’entropie : (14 ES SET): S,—$, représente ici, indifféremment, la variation de l’entropie $’ de la source chaude, après que le transformateur a décrit un cycle fermé, ou encore la variation de l’entropie S du transformateur lui- même, lorsqu'il a décrit la modification isotherme à la température T, : (SAONE (Si — So): Considérons maintenant la transformation ou- verte qui consiste en la cession d'une quantité de chaleur @, par un corps uniquement susceplible d'échanges thermiques avec le milieu extérieur, ce corps étant la source chaude et le milieu extérieur la source froide, tous deux en liaison complète et réversible par l'intermédiaire du transformateur. Nous aurons done, en prenant l’élat final de l'iso- therme T,, pour définir l'entropie origine de ce COrps : (15 Ge—JS'(— AT,). De cette relation indépendante du temps, il résulte que l'échange de chaleur par voie réversible entre le corps et le milieu extérieur peut mettre en action un système mécanique dont la puissance motrice totale est proportionnelle au produit de l'entropie de ce corps S'par la chute de température entre le corps et le milieu extérieur. L'entropie représente done la capacité thermique de puissance motrice d’une quantité de chaleur cédée réversiblement au milieu extérieur, pour une différence de tempéra- ture égale à 4°. On peut encore traduire la relation (15) sous la forme d'une condition d'équilibre : un système sera en équilibre si la puissance motrice disponible du fait de l'échange réversible de la chaleur, dans la transformation élémentaire, est équivalente aux travaux mécaniques accomplis par suite desliaisons établies par le transformateur. 10. — A présent que nous connaissons la valeur de la puissance motrice propre à l'échange ther- mique par voie réversible, nous pouvons déter- miner la somme des puissances motrices mises en jeu, par exemple, dans la {transformation réversible élémentaire d'un corps défini par 4{pvT) —0, dont on exprime explicilement la variation d'état en fonction des variables indépendantes. Partons de la relation (8) fournie par le principe d'équivalence et nous aurons, en remplacant d@ par — T4 : (16 — dU = — JTAS + pdv, puisque le corps est envisagé ici dans ses manifes- 490 tations extérieures et non comme un transformateur thermique. Afin d'exprimer la somme des actions motrices, remplacons — JTdS par — J(ITS — SAT) el nous aurons : — dU = — dJTS + JSdT + par, d'où, en posant : 17) P—U— IS, 18 — dP — JSAT + pdv. La fonclionqg, composée de fonctions potentielles, définit done une nouvelle fonclion en correspon- ‘ dance numérique avec chacun des états du corps considéré. La variation de cette fonction exprime la puissance motrice totale disponible ou accumulée par le fait du passage du corps d'un état donné à un état voisin, lorsque ce passage s'effectue par changement réversible élémentaire, à la fois ther- mique et mécanique. Si donc cette variation est nulle, le système est en équilibre, ainsi qu'il résulte de (45). V. — LES POTENTIELS STATIQUES DE PUISSANCE MOTRICE. 1. — Nous pouvons donc étendre l'application du principe des travaux virtuels pour les systèmes conservalifs à l'expression des conditions d'équi- hbre des systèmes dont les liaisons avec l'extérieur permettent des transformalions réversibles, ther- miques et mécaniques. Seulement, ces fonctions évaluant le travail Lotal comporteront non seule- ment des vecteurs et des coordonnées, mais encore des termes exprimant des quantités de chaleur. 2, — Observons que, pour établir l'expres- sion (18), nous avons appliqué le procédé général d'expression mathématique des changements phy- siques. Ce procédé consiste, en effet, à substituer aux changements effectifs des changements équi- yalents, composés de un ou plusieurs changements faciles à définir et à évaluer : tel est le déplacement d'un corps dans l'espace, qui est remplacé par la combinaison d'un mouvement de translation et d'un mouvement de rotation; Lel est, aussi, l'échange thermique réversible d’un corps, qui est accompli par l'intermédiaire d'une source et d'un transfor- mateur parcourant un cycle de Carnot. Par la superposition des changements composants, on passe de l'élat initial du changement effectif à son état final, sans tenir compte des états intermé- diaires. Si l'on voulait cependant réaliser chacun de ceux-ci, on recourrait à la méthode des limites, au moyen de laquelle on resserre les échelons, de manière que le changement réel et le changement équivalent ne diffèrent plus l’un de l’autre que d'une quantité moindre que toute quantité donnée. G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE 3. — La fonction D n'est pas la seule dont la variation évalue le travail qui peut être effeclué .dans le passage réversible d'un corps d’un élat à un autre. Si l'on voulait, en effet, exprimer expli- cilement, en fonction des facteurs d'intensité ou d'action motrice p et T, les manifestations exté- rieures résultant de ce changement, il suffirait de remplacer pdv par (dpv — vdp) dans l'expression du travail total (18) : — JSAT + dpv — vdp—=— 4%, (20) — JSAT — vdp—— dd", en posant : (19) B—U—JTS pr. ®' représente encore une fonclion potentielle qui évalue le travail effectué par suite de la variation réversible élémentaire des facteurs d'intensité. Si la pression est constante, on déduit de (20) que : — D! Co —dT JS: JS représente donc la capacité thermique de travail résultant de l’abaissement d'un degré de tempéra- ture. De même, si la température est constante, on aura : — dpt 22 LME = — v représente donc la capacité élastique de travail résultant d'une diminution de pression égale à l'unité. Ces dénominations sont justifiées par le fait que les coeflicients JS et v seraient » fois plus grands en prenant » kilogs du corps. Ainsi, si l'on a plusieurs cylindres identiques renfermant un même gaz et que la pression extérieure, la même pour tous, diminue de — dp en produisant un déplace- ment de » pistons, ce changement rend évidem- ment disponible un travail total proportionnel au nombre de cylindres, c'est-à-dire au volume du gaz employé. : 4. — Il résulte des équalions (17), (18) et (16) que la connaissance de d permet de déterminer les trois grandeurs S, p et U, si l'on connait T et vet, par conséquent, toutes les grandeurs qui définissent complètement un corps homogène n'ayant pas d'autres manifestations extérieures que des délor- malions et des échanges thermiques réversibles. La fonclion ®' jouit de la même propriélé : c'est pourquoi d et d' ont élé nommés par Massieu fonctions caractéristiques du corps et par Gibbs fonctions thermodynamiques fondamentales. Pour nous, qui cherchons principalement à définir les grandeurs qui servent de base à l'intel- ligence des phénomènes naturels et à établir leurs correspondances numériques, les fonctions telles G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE A91 que D et Dont un caractère spécial. Etant donnée la corrélation des changements par laquelle certains facteurs d’aclion motrice augmentent dans une transformation spontanée, elles expriment par leurs variations la grandeur d'une cause générale déter- minante de changements dont les facteurs d'action motrice représentent des formes particulières. La variation de cette grandeur résultante est nulle lorsque le changement s’accomplit dans des cir- constances limites déterminées, c'est-à-dire par une suite d’étals indépendants du temps (change- ments réversibles). Bien que cette grandeur s'exprime en travail, nous l'appellerons potentiel statique de puissance motrice totale, afin de ne pas lier ses effets à des actions exclusivement mécaniques. 5. — Si, à partir d’une valeur correspondant à un état donné du système, la variation de ce potentiel est nulle, c'est-à-dire si la puissance motrice totale ne diminue pas, la cause déterminante de change- ments est nulle el, par conséquent, le système ne peut se transformer de lui-même. Nous trouvons ainsi une condition d'équilibre : (23) èd — 0 dont l'expression généralise le principe des chan- gements virtuels pour le système conservatif; nous retrouverions, d'ailleurs, celui-ci dans le cas parti- culier des déformations des corps en supposant l'élat thermique invariable. Une variation posilive de ce potentiel indiquerait encore que le système est forcément en équilibre. On peut, d’ailleurs, en donner facilement la dé- monstralion directe. Supposons, par exemple, que l'on ait (18 — JSAT > — vdp; comme v est essentiellement positif et qu'on peut choisir une origine de l’entropie telle que S soit toujours positive, il en résulte qu'en combinant ce système avec un autre en équilibre dont la condi- tion est donnée par: 0O——JSAT— 1'dp, on aura : —(v+v)(—dp)>90 ce qui est impossible. Nous en concluons donc qu'une transformation, à partir d'un état d'équilibre, n’est spontanément réalisable que s'il en résulte une diminution de la puissance motrice Lotale. Gest ce que nous désigne- rons par /e principe de la tendance à la diminution de la puissance motrice totale. 6. — Les notions que nous venons d'acquérir en partant du principe de Clausius doivent être étendues aux autres qualités que l'expérience dis- tingue. A chaque qualité physique sont associés deux facteurs, l'un qualificatif, que j'appelierai support de puissance motrice (masse spécifique, entropie, quantité d'électricité, ete.), et l’autre intensif ou fac- teur d'action motrice (niveau, température, poten- liel), ce dernier déterminant le sens et la grandeur de la modification du premier lorsque l'inten- sité n’est pas uniforme dans les diverses parties d'un même corps ou dans les divers constituants d'un système. Cette tendance à l'égalité des fac- teurs intensifs d'une même qualité peut cependant, ainsi que nous l’avons déjà signalé, être contrariée du fait que deux tensions de qualités différentes peuvent s'équilibrer. Bien que, comme on le voit par l'exemple de la tempéralure, l'intensité ne soit pas nécessairement une grandeur additive, il est toujours possible de la mesurer, en ce sens que les nombres peuvent servir à en repérer les degrés. Pour üxer le nombre correspondant à une intensité donnée, il faut dis- poser d'échelles convenables, dont l'établissement estessentiellementlié à celui d'instruments étalons. Ainsi, l'on dispose de thermomètres pour mesurer les degrés de température absolue, ce qualificalif signifiant, ainsi que nous l'avons rappelé, que la gradualion est indépendante des propriétés spé- ciales du corps témoin et ramenée à une capacité de production de travail mécanique. .Il semblerait, à première vue, que la mesure des facteurs quantitatifs ne présente pas de difficulté, puisqu'elle se ramène en principe à la détermina- tion d'un rapport par une combinaison d'additions et de soustractions. Malheureusement, il est rare qu'on puisse faire ces mesures directement et l’on est presque toujours forcé de ramener la mesure d'une charge à celle d'une tension. C’est ainsi que les masses, coefficients des résistances vives, sont mesurées par des poids, les charges électriques par des tensions et les charges caloriliques par des va- riations de lemipéralure. 7. — Cette mauière de procéder introduit un coeflicient nouveau, qui est, pour un corps donné, ou dans un espace donné, le rapport de dépen- dance entre la variation de la charge et celle de la tension correspondante. Ce rapport, appelé capacilé, est-il constant? Et suivant quelle loi varie-t-il avec les conditions extérieures ? Ce n’est que lorsque ces problèmes seront résolus qu'on pourra justifier la mesure indirecte du facteur quantitatif d'une qua- lité donnée, La capacité d'un corps pour une forme d'énergie peut varier, en effet, puisque la charge peut grandir ou diminuer bien que l'intensité reste constante. Ce fait, qui nôus conduit tout naturellement à la notion de la charge latente, c’est-à-dire de charge n'entrainant pas la variation du facteur intensif, 492 G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE fait ressorlir l'importance de ces problèmes. Mais on voit par (21) et (22) que ces problèmes de capa- cité dépendent tous de la notion de potentiel sta- tique de puissance motrice totale d'un système, puisque les coefficients différentieis représentent précisément les capacités absolues de chacune des qualités pour l'élat considéré. 8. — L'expérience a montré que, pour certaines qualités, la somme de tous les éléments quantita- tifs relatifs à chacune d'elles reste invariable dans toutes les transformations que subit un système de corps isolé. C’est ainsi que Lavoisier a pu énoncer la loi de la conservalion des masses, et Faraday celles des charges électriques. On peut encore énoncer la loi de la conservalion des équivalents chimiques pour autant qu'on se trouve dans les conditions habituelles d’expérimentation : celte restriction est nécessaire, depuis que M. Ramsay ! a constaté la transformation des espèces par le passage direct du radium à l'état d'hélium. Ces lois nous fournissent donc des relalions entre ces facteurs quantilalifs qui joueront, dans le traite- ment mathématique des phénomènes physiques et chimiques, le même rôle que les équations de liaison en Mécanique ordinaire. Pour ee qui concerne la somme des charges thermiques qui correspondent, ainsi que nous l'avons vu, à l’entropie, elle ne reste invariable que dans des changements dont les liaisons sont indépendantes du temps. Dans les transformations spontanées d’un système isolé, celte somme grandit sans cesse: mais, ces dernières transformations se rapportent aux liaisons dépendantes du temps, que nous examinerons plus loin. 9. — Considérons un système partiellement isolé, c’est-à-dire qui n'échange avec l'extérieur qu'une espèce déterminée d'énergie. I résulte des définitions mêmes qu'une transformation n'est pos- sible que par la variation concomitante d'au moins une tension et, réciproquement, l'équilibre ne peut exister que si les tensions sont égales. Le dépla- cement d'énergie qui lui est corrélatif provoquera en chaque endroit du système une variation de tension plus ou moins considérable, suivant la capacité qui lui correspond. Nous remarquerons, à ce propos, que l'énergie peut être même absorbée entièrement par la charge latente comme, par exemple, dans les changements d'états d'agréga- tion, de sorte que l'intensité reste constante: par conséquent, un déplacement d'énergie peut n'être pas accompagné d’une variation de tension et, dans ce cas, il ne pourra pas se produire sponta- nément. On voit ainsi que les variations d'énergie ne régissent pas directement les transformalions. » 4 Ramsay : Zeitschrift für phys. Chem., 1903. Ces indications, qui s'appliquent à toutes les formes d'énergie, donnent l'intelligence claire et précise des difficultés que rencontre l'application pure etsimple des principes de la Thermochimie. Un système chimique tend à être modifié par suite des différences entre les tensions chimiques et non pas par suite des différences de l'énergie interne entre les états initial et final de la réaction. Ce n’est donc pas le sens du déplacement calorifique qui décide de celui des réactions chimiques, comme on l'a cru longtemps : il n'en est ainsi que lorsque les capa- cités thermiques restent constantes. Or; ces der- nières varient considérablement, en particulier dans les changements d'états d'agrégation. Le principe, nommé inexactement, du fravail maxi- mum, n'est donc pas ici applicable, ainsi que Berthelot l'avait, d’ailleurs, remarqué. Pour pré- dire le sens de la transformation d'un système à une certaine température, la donnée que la Ther- mochimie devrait nous fournir est l'excès de la tonalité thermique sur la chaleur latente de trans- formation du système à la température considérée. 10. — La fonction U, énergie interne, n'est done pas explicile au sujet du sens et de la grandeur des transformations d'un système. Aussi Gibbs, Helmholtz, Duhem et d'autres savants ont-ils défini des fonctions spéciales appelées énergie libre, po- tentiel thermodynamique, etc., que l'on peut géné- raliser et étendre à toutes les formes d'énergie, et qui permeltent d'exprimer les diverses circons- tances que présente un élat donné d'un système dont les liaisons sont indépendantes du temps. Nous avons précédemment signalé ces fonctions, que nous avons nommées polentiels statiques de la puissance motrice totale, voulant rappeler par là plus élairement la grandeur physique dont elles sont la traduction mathémalique. - Ainsi, imaginons un système qui subit, à partir d'un état donné, une transformation réversible con- sislant en déformations élastiques, en échanges thermiques, en déformations de champ électrique, en réactions chimiques; la condition d'équilibre du système dans son état actuel sera obtenue en égalant à O0 la somme des travaux accomplis pour réaliser chacune de ces transformations. On évaluera celles-ci par des changements équi- valents pour lesquels on recourra à des écrans tels que pistons, condensateurs, parois semi-per- méables, etc. VI. — TRANSFORMATIONS DONT LES LIAISONS DÉPENDENT DU TEMPS. 4. — Les fonctions potentielles qui expriment la diminution de puissance motrice totale, du fait du passage du système, par voie réversible, d'un G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE 493 élat d'équilibre à un autre, ne peuvent pas définir les circonstances de mouvement. L'élat dynamique fait naître, en effet, des liaisons autres que celles que nous avons spécifiées : ce sont précisément celles qui dépendent essentiellement du temps. Elles se traduisent physiquement par ce fait général que toute transformation demande un temps plus ou moins long pour s'accomplir et, pendant l'acte de la transformation, des liaisons internes ou externes du système entrent en jeu et se mani- festent par des déplacements locaux, par des cou- rants de diffusion, par un dégagement de chaleur, lors même que les tensions sont uniformes, ou encore par des produclions de puissance motrice telles que celles qui résultent des perturbations électrodynamiques ou des pressions hÿdrodyna- miques. L'étude de ces phénomènes nécessite l'introduc- tion de notions nouvelles. C'est ainsi que les méca- niciens ont été amenés à créer la notion de masse, dont la grandeur est la caractéristique du mouve- ment local du système matériel considéré, et celle de force vive, pour désigner la puissance motrice À y 2 accumulée m —-, du fait que le corps de masse m est en état dynamique caractérisé par la vitesse y. Ils ont créé aussi les notions de frottement et de viscosité pour représenter les liaisons dépendantes du temps pour lesquelles la modification méca- nique, glissement d’un solide sur un autre, écou- lement d'un fluide dans un tube, déplacement d'un solide dans un liquide ou un gaz, engendre des changements d'état physique et chimique et de la chaleur lors même que les grandeurs calori- fiques restent constantes. Mais ces dernières liai- sons ne conslituent point des sources de puissance motrice : elles se traduisent uniquement, pour le milieu extérieur, par un gain de chaleur qui cesse avec la transformation. On les appelle donc résis- tances passives, landis que la masse représente une résistance vive capable d'action motrice. 2.— D'après le principe de la conservation de l'énergie dans un système isolé, la perte de puis- sance motrice totale provenant du changement du Système d’un état à un autre, doit être compensée par les eflets des liaisons dépendantes du temps, qui se manifestent comme résistances vives ou pas- sives et par les échanges directs de chaleur. La chaleur engendrée par suite des effets dus à la viscosité el aux liaisons cachées a des expressions mathématiques différentes suivant la modification que l’on considère. 3. — Afin d'illustrer la relation fondamentale de la Dynamique générale, prenons l'exemple de écoulement en régime permanent d'un liquide dans un tube incliné. Le résultat de l'écoulement en REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 19017. régime se traduit par le passage par seconde d'une certaine quantité de liquide de l’état de repos au ni- veau libre $S à l’état dynamique caractérisé en une section s, du tube par la vilesse uniforme v. La varia- tion de puissance motrice totale de la quantité I de liquide qui s'écoule par seconde se compose de la variation due au changement d'état statique A, augmentée de la puissance motrice provenant des pressions hydrodynamiques AIT et diminuée de l'accroissement de la force vive de la quantité de liquide considérée. La force vive, constituant une source de puissance motrice, peut, en effet, être considérée comme un des termes composants de la fonction dynamique de puissance motrice totale. On sait qu'on a donné à cette forme spéciale de l'énergie le nom d'énergie cinétique. Ad se calculera aisément si l’on remarque quil se compose uniquement de travaux mécaniques, consistant en l’abaissement, par seconde, d’une quantité de liquide I, de poids 14, d désignant la densité, de hauteur L:; AIT s'évaluera par le travail de délente provenant des différences des pres- sions hydrodynamiques quand la section du tube n'est pas uniforme. Quant au travail absorbé par suite de l'accroissement de forces vives, il sera 2 donné par —> puisque après une seconde la quan- 5] tité I de liquide est animée d’une vitesse uniforme v. Le travail absorbé par la viscosité, proportionnel au débit I, s'exprimera par 61,0 désignant le coeffi- cient des résistances passives, c’est-à-dire la quan- tilé de puissance motrice absorbée par l'unité de poids du liquide écoulé. D'après le principe énoncé plus haut (2), on aura donc : 1 p 1 7 si rar dt = pldt, dt 2 5} 24) et en représentant par ÿ la puissance motrice dyna- mique lotale disponible, fonction qui est bien distincte du potentiel statique des puissances mo- trices, la relation (24) devient : 25 —— pl. On reconnait là une loi analogue à celle de Ohm. Mais il ne faut pas oublier que le coefficient p à, d'après les déterminalions expérimentales, des di- mensions diftérentes de celles du coefficient de résis- : le tance électrique : on trouve, en effet, que 9 — ER Le problème de la nature intime de ces liaisons de viscosité ne se pose, à priori, qu'à ceux qui cherchent à faire rentrer leur représentation de tous les phénomènes naturels dans la représenta- tion d'une catégorie de ces phénomènes. Pour ce qui nous concerne, nous ne nous en préoccupe- 12* 494 G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE rons pas ici plus que nous ne l'avons fait de la nature essentielle de la chaleur. 4. — Nous pourrions introduire dans un Sys- (ème à changements thermiques et mécaniques des liaisons telles que le déplacement d'un poids par l'intermédiaire d’un dispositif approprié, ou machine, ainsi que nous l'avons considéré précé- demment dans l'étude des moteurs thermiques. De cette manière, la puissance motrice tolale dispo- nible serait en partie utilisée à produire un effet particulier. On exprimera celte nouvelle liaison en ajoutant au deuxième membre de l'équation fonda- mentale de la Dynamique générale un terme dépendant ou non du temps, mais qui modiliera toujours la vitesse de transformations. Alors même que l'accroissement de la force vive lotale serait négligeable, la puissance motrice. absorbée par la : viscosité et par les échanges thermiques directs ne le serait ordinairement pas. De sorte que la puis- sance motrice disponible du fait de la variation du potentiel statique ne peut être totalement employée à produire l'effet cherché. Comme dans l’étude des moteurs thermiques on se préoceupe d'utiliser la puissance motrice dispo- nible, on à traduit par le principe de la dissipation de l'énergie ce fait, qu'une partie de la puissance motrice disponible est rendue inutilisable comme source de travail mécanique par des liaisons dé- pendantes du temps ou irréversibles. Cette expres- sion est d'ailleurs incorrecte, car l'énergie ne se dissipe pas et il serait plus exact de dire : le prin- cipe de la dissipation de la puissance motrice disponible comme source de travail atile. Notons que l'on n’a pas toujours en vue d'utili- ser le travail mécanique. Ainsi, si l’on veut dispo- ser de l'énergie électrique, la différence de poten- tiel aux bornes d'un générateur ou d’un récepteur sera alors la donnée intéressante. Nous devons donc dire, d'une manière toute générale, que, pour évaluer la puissance motrice utilisable, on isole, dans l'expression de la fonction dynamique de puissance motrice, le terme qui se rapporte à la forme d'énergie considérée (travail mécanique, différence de potentiel, etc.). 3. — La relation (25) peut être étendue à loutes les formes d'énergie : il suffira de faire entrer dans la fonction 4 tous les termes exprimant la grandeur des diverses sources d'actions motrices et d'écrire dans le deuxième membre de cette relation l'en- semble des termes qui évaluent les causes de dissi- pation de puissance motrice. On obtiendra ainsi l'équation fondamentale de la Dynamique générale, à laquelle on peut donner le nom de principe de l'absorption, dans le temps, de la puissance motrice dynamique totale. 6. — Supposons que, dans un système donné nous puissions élablir la variation de la fonction ÿ de la puissance motrice lotale, à partir d'un état déterminé pour toutes les directions possibles de transformations. Dès lors, on reconnaitra que ce système est susceptible de se transformer sponta= nément au fait que diminue en passant de l'état, donné statique ou dynamique à un état voisin. Cette propriété peut généralement se constater pour de multiples changements élémentaires à partir de l'état considéré. Ainsi, dans le cas d’un corps pesant posé sur un plan incliné poli, le potentiel de puis- sance motrice totale décroit pour une infinité de déplacements. Mais l'expérience nous apprend que le corps livré à lui-même suivra toujours une seule et même direction, qui est la voie de plus grande pente ou de chute la plus rapide. De même, pour un fluide qui s'écoule (exemple du déversoir) ou pour la chaleur qui se propage, la voie suivie sera celle de l'écoulement le plus rapide, c’est-à-dire du débit maximum. Ce sont là, d'ailleurs, des cas par- ticuliers du postulat fondamental des sciences de la Nature : tout phénomène est physiquement déter- miné. Ce principe de la détermination physique entraine une propriété mathématique de minimum ou de maximum, qui lève l'indétermination actuelle, de la correspondance numérique que nous avons établie. On retrouve cette propriété mathématique dans les principes de moindre résistance, de moindre action, de moindre contrainte, de stabilité, de l'équilibre, etc.; loin de comporter une signification … mélaphysique quelconque, elle exclut, au contraire, . toute obscurité pour affirmer simplement de lan manière la plus nette que les phénomènes naturels … procèdent dans un sens déterminé el d'une seule manière”. | 7. — Lorsque les grandeurs physiques que nous avons distinguées sont dans des conditions qui répondent aux définitions que nous leur avons données, nous sommes donc à même de traduire mathémaliquement les conditions d’équilibre et de mouvement d’un système pouvant subir des chan= gements quelconques. On pourrait traiter les cas d'équilibre comme des cas particuliers du problème dynamique. général. Mais il est souvent plus simple de les étudier directement. Aussi onl-ils été généralement abordés les premiers. | Admettons donc qu'un système quelconques puisse subir à la fois des transformations mécani- ques, thermiques, électriques et chimiques en. étant soumis à des modifications réversibles. Dès lors, la variation du potentiel statique de la puis-. sance motrice totale du système est nulle. On auras RE CR LS $ { 4 Macu : Loc. cit. G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE 49 Qc donc les deux expressions d'équilibre équivalentes, l'une exprimant l'hypothèse même : (26) IS(— dT} + v(— dp) + q(— dQ) + ...—=0, les facteurs d'intensité étant pris comme variables indépendantes, l'autre obtenue par voie de con- séquence mathématique : (27) d®' ou d(U—JTS + pv + Qg+Eum)—=0. L'on prendra l'une ou l'autre de ces relations, suivant les circonstances spéciales du problème. _ C'est ainsi que la seconde relalion sera tout indi- quée si, les tensions étant donc considérées comme les variables indépendantes, on connait les fonctions $, r,Q el y, ainsi que U qui est, d’ailleurs, représenté par la donnée calorimétrique. La solution du problème d'équilibre, quel qu'il soit, exige donc d'abord que l'on puisse définir un système de liaisons externes qui rende la transfor- mation réversible. D'une manière générale, les tensions doivent être uniformes. De plus, la con- dition de réversibilité exige, pour les déformations élastiques, que leurs tensions soient constamment équilibrées par une pression extérieure ; pour les échanges thermiques, qu'ils soient isothermes ou adiabatiques; pour les déplacements d'électricité, qu'ils se fassent par l’intermédiaire de condensa- teurs; et pour les actions chimiques, qu'elles se produisent par l'intermédiaire de parois semi-per- méables. On sait que les parois osmotiques ne cons- tituent qu'un exemple particulier de ces parois semi-perméables, el, si elles ont acquis une impor- tance capitale, c'est par suite des problèmes qu'elles ont permis de résoudre en ramenant l’action motrice d’une transformation chimique à un travail extérieur. Lorsque ces procédés suffisent, on peut évaluer la varialion du potentiel de puissance motrice et, par conséquent, mettre le problème en équation. : 8. — Si le système n'est pas homogène, on le décompose, pour définir complètement ses trans- formalions intérieures, en parties homogènes, et l'on emploie la méthode des limites pour déter- miner les surfaces frontières, c'est-à-dire les régions de séparation de ces parties homogènes. L'on obtient ainsi un certain nombre de phases que l’on étudiera séparément comme aulant de systèmes particuliers, les liaisons réciproques étant con- sidérées comme des manifestations extérieures aux systèmes limitées par une surface frontière. On sait que Gibbs a établi cette méthode d'une manière qui semble être définitive. Entre ces phases homogènes, il existe donc des régions frontières qui ne répondent pas à la défini- lion d’homogénéité. Elles manifestent des pro- priélés spéciales qui se traduisent par des tensions superficielles, des lensions électriques ou des phénomènes analogues qui s'opposent à la ten- dance à l'homogénéilé. Il faudrait en tenir compte dans l'énoncé-des forces de liaison; mais on les néglige lorsque les phases sont de dimensions telles que l'énergie propre à ces liaisons serait infime par rapport à celle des autres manifeslations exté- rieures à la phase considérée. Beaucoup de résultats théoriques infirmés par l'expérience proviennent de ce que l’on a négligé celle énergie de frontière, sans avoir au préalable vérifié sielle était relative- ment très petite. 9. — Ainsi, considérons une masse de composi- tion homogène qui ne peut avoir avec l'extérieur d'autres liaisons que des échanges de chaleur et des déformations mécaniques. Sa condition d'équilibre est alors donnée par (20) : 28 JSAT “+ vdp — 0. S'il se produit en son sein des transformations chimiques, S et y ne sont pas enlièrement définies par p et Tel dépendent d'autres paramètres que l'expérience nous apprend à spécitier. Ces para- mèlres devront exprimer des variations dans les proportions des composants et même dans leur nombre, ainsi que cela se présente dans la dissocia- tion de l'eau à haute température. 10. — Il ÿ a lieu de définir ici avec précision un composant chimique. Est composant chimique tout corps susceplible d'être séparé d’une masse homo- gène ou d'un système hélérogène et tel qu'il ne pourra à lui seul, par aucune circonstance phéno- ménale, reproduire la masse homogène ou recons- lituer le système, ainsi que chacune des autres par- lies séparées de celui-ci: H° et O0” dans la dissocia- tion de la vapeur d'eau constituent des compo- sants chimiques différents. Certains corps tels que M et OH, dans la dissociation électrolytique de H°0 liquide, bien que ne pouvant pas être séparés de la masse homogène, sont considérés comme des constituants, étant donnés les caractères phénomé- naux qui les distinguent. Cette définilion du cons- lituant chimique marque bien la distinction entre une décomposilion chimique et un changement d'état d’agrégation d'un corps. En effet, toute phase provenant d'un tel changement peut, à elle seule, reproduire, par des modifications de pression, de température ou autre facteur physique, les autres phases de ce corps. Parmi les composants chimiques d'un système, on distingue les composants dépendants etles com- posants indépendants. Celle distinelion est toute relative aux conditions expérimentales du système et n'est vraie que dans des limites données ; elle est basée sur ce fail d’observalion qu'il suffit de définir les états de certains composants pour connaitre 496 ceux des autres. Ainsi, entre certaines limites de température, les états de H° et de O° étant don- nés, on en déduira l'état de H°O gazeux. En dehors des limites d'application de cette relation entre les composants dépendants et les composants indépendants, relation qui implique la réversibilité, le constituant dépendant peut devenir lui-même constituant indépendant: Lelest H°O à la tempéra- ture ordinaire. Les corps simples et les radicaux chimiques sont des composants que l’on considère comme indé- pendants dans toutes les circonstances expérimen- tales où se place le chimiste. Mais on sait que les études récentes de la radio-activité ont montré que la propriété d'indépendance et de conservation des constiluants a des limites et qu'elles ont même conduit certains physiciens à énoncer le principe de dissipation ou d'évolution des espèces. Que ce principe vienne à être établi de manière à emporter la conviction, il n'en résultera en Énergétique que cette simple modification : un paramètre qu'on à supposé constant jusqu'à présent doit être consi- déré comme variable dans certains problèmes ex- périmentaux donnés. 11. — Je terminerai ces considérations générales sur les caractères implicitement contenus dans les équations de liaison, en faisant remarquer que la considération mathématique de frottementchimique proprement dit résulte, peut-être, de l'ignorance où nous sommes de tous les étals et combinaisons des éléments et des radicaux chimiques: ainsi H° et 0? peuvent être, à la température ordinaire, dans des états différents de ceux où ils se trouvent à la température de dissociation de l'eau. Pour com- prendre physiquement les frolttements proprement dits, il faut tenir compte aussi que des actions mo- trices de catégories différentes peuvent s'équilibrer, et que le principe de l'égalité des tensions des ac- tions motrices de même espèce n'est donc pas contredit par le fait de la permanence d'un système chimique dont les tensions ne sont pas égales, ainsi qu'on le voit dans le mélange de la vapeur d’eau, de l'oxygène et de l'hydrogène. 12. — Le problème de la Dynamique générale. Considérons, à présent, le cas entièrement général d'un système en acte de transformation. Il n'y aura de loi de correspondance numérique que si les états des grandeurs physiques qui sont introduites dans les relations mathématiques sont dans des condi- lions qui répondent aux définitions que nous leur avons données. Nous sommes donc obligé d’ap- porter cette première restriction qui, parfois, pourra être levée par l'emploi des méthodes de la Mécanique statistique ‘. La où ces conditions seront salis- ‘ Giess : Llementary Principles in Statistical Mechanics. G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE "| | —]—]]—] "]—]—]— ————]—]—]— ]] —_ _ ___—___ _——"—|—|"|" faisantes, il suffira d'exprimer que la diminution, pendant le temps df, de la fonction dynamique de la puissance motrice totale du système est équiva- lente à l'énergie absorbée par les résistances pas- sives de toute espèce : 29 dy = Spidt; : se compose, comme on le sait, des puissances motrices résullant des pressions hydrodynamique, osmodynamique, des forces électrodynamiques, des forces vives, en un mot toutes les puissances motrices provenant de toutes les actions motrices reconnues agissantes dans le syslème ; les 5 com- prennent les différents coefficients de résistances passives provenant de la propagation des fluides par écoulement ou par diffusion, de la chaleur, de l'électricité, des transformations dans la constitu- tion même des corps du système; et les 1 repré- sentent les différentes vitesses de transformation et les débits du système. Les équations de liaison sont données par les lois de la conservation des masses, des équiva- * EE lents chimiques et, en outre, par les relations qui expriment les variations réciproques des diverses espèces de tensions avec l’état du système. Les va- riables indépendantes sont délerminées par la no- menclature des composants indépendants et des facteurs d'intensité indépendants, ainsi que nous l'avons exposé dans l'étude du problème de l'équi- libre. Quant à l’état final du système, ou même à la succession des états du système, elle dépendra du mode de variation imposé aux grandeurs indépen- dantes. C’est ainsi, par exemple, que l'on obtient des corps différemment composés et constitués suivant la vitesse de refroidissement d’une fonte en fusion. De même encore que dans le problème de l'équi- libre, sile système est complexe, on le décomposera en systèmes composants homogènes, que l'on étu- diera séparément en définissant toutes les liaisons extérieures dans leurs états dynamiques. 13. — Prenons l'exemple de l'électrolyseur en activité. Un équivalent total définit tous les débits ou rendements chimiques composants c'est l'intensité du courant électrique. Or, d'après le principe de la détermination unique, les transfor- mations doivent être telles que celte intensité totale I du courant soit maximum pour une puis- sance motrice totale donnée. Si done, de la rela- lion (29), on dégage I des termes qui composent les deux membres, on aura : (30) 5l—0"—Nou 1 Sr Nous rappellerons que cette condition a été dé- montrée directement par Maxwell, pour la loi d'Ohm, dans le cas de la distribution du courant G. HOSTELET — LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ÉNERGÉTIQUE 497 dans un réseau métallique. Cet illustre physicien l'énonce sous la forme du théorème suivant: « Dans tout système de conducteurs qui ne renferme pas de f.e.m. intérieure, la chaleur engendrée par des courants distribués conformément à la loi d'Ohm est moindre que si les courants avaient élé dis- tribués de quelque autre manière compatible avec les conditions obligatoires d'arrivée el d'écoulement du courant’. » Cette propriété de l'intensité maximum traduit en même temps une condition de stabilité du régime du courant électrique. Il en résulte que, dans le cas d'un électrolyseur en fonctionnement, on assurera un régime de transformation aux électrodes en y fixant l'intensité totale du courant’. . Cette conclusion apporte la justification des mé- thodes empiriques des anciens électrochimistes qui voyaient dans la densité du courant l'élément | capilal, alors que les modernes pensent que, seule, la tension de séparation a un sens el une action vérilables. 14. — En résumé, on doit placer à côté des notions de corrélation et d'équivalence celle de tension qui doit être introduite dans toute catégorie de phénomènes. C'est la différence des tensions qui régit le sens des transformations d'un système : l'équilibre n’est possible que si les tensions d'une même ecalégorie sont égales. Souvent la variation d’une tension d'espèce donnée entraine celle des | tensions d’autres espèces : c'est le potentiel de puis- sance motrice totale qui exprime leurs dépendances mutuelles. Si cette fonction tend à diminuer, il y | aura transformation, et cela dans un sens qu'on peut | toujours exprimer malthématiquement. Si, au con- traire, elle tend à augmenter ou à rester invariable, le système demeurera en équilibre : la tendance à la variation de la tension d'espèce donnée est contre- balancée par les tendances à la variation des ten- sions des autres espèces. Des liaisons nouvelles apparaissent pendant l'accomplissement d'une transformation, soit sous forme de puissances motrices, soit sous forme de résistances passives. Quant aux caractères de la transformation, ils sont déterminés, à chaque instant, par la tendance à la vitesse maximum. VII. — ConNcLUSION. Il serait indispensable d'entrer davantage dans le détail des applications de ces principes géné- raux pour en saisir la portée et pour connaître les auxiliaires indispensables à l’organisation ma- 1 MawweLL : Trailé de l’Electricité et du Magnétisme, t. I, p. 464 et 478. 2 G. HosreLet : Zeitschrift für Electrochem., 1905. thématique de notre représentation objective des phénomènes naturels. Mais le but de ce travail est plus limité. On a critiqué, comme étant exces- sive, l'extension, faite par M. Duhem, des procédés de traduction mathématique de la Mécanique ra- tionnelle, dans ses admirables études sur l’évolu- tion de la Mécanique‘; on n'y a même vu parfois qu'un pur formalisme. Cette critique ne se justifie nullement : l'Énergétique n'imite pas la Mécanique, mais substilue aux principes adaplés à une calé- gorie de phénomènes des principes adaptés à plu- sieurs calégories de phénomènes et embrassant les premiers. Comme tout problème achevé, la mise en équation des phénomènes mécaniques projette les plus vives lumières sur les autres problèmes de la philosophie naturelle. En ce sens, l'œuvre de M. Mach, surtout dans la Mécanique, est éminem- ment suggestive. Ce qui donne une valeur exceptionnelle aux prin- cipes de la Mécanique basée sur le concept fravail, c'est le fait, dominant la Physique actuelle, qu'entre toutes les catégories de phénomènes, il y a corré- lation et équivalence. Grâce à ces propriétés générales, on peut, en effet, établir pour tous les concepts physiques une correspondance numé- rique, en substiluant aux changements effectifs des changements équivalents el en choisissant pour ces derniers les changements consistant en une production de travail. Par ce choix, on trouve dans le principe des travaux virtuels, une base à l'orga- nisation mathématique de notre représentation des phénomènes nalurels; il suffit d'introduire dans l'expression de ce principe les termes équivalents aux modifications appartenant aux diverses calé- gories des phénomènes physiques. L'étude des propriétés des relations ainsi obtenues conduit alors aux fonctions caractéristiques de la Thermo- dynamique générale. C'est la voie qui a été histo- riquement suivie et que l’on conserve d'ordinaire dans les exposés classiques de l'Énergétique. Mais, afin de bien marquer le caractère général des notions et principes de celte discipline et aussi d'en faciliter l'intuition physique, il serait néces- saire de suivre un procédé d'exposilion plus sys- tématique et d'exprimer ces notions et ces principes d'une manière plus appropriée à un point de vue d'ensemble. C'est ce que j'ai essayé de faire dans ce travail, en me basant principalement sur l'exemple donné par la catégorie des phénomènes thermiques. Georges Hostelet, Docteur ès sciences. 1 Voyez la Revue générale des Sciences des 30 janvier, 15 et 28 février, 15 et 30 mars et 15 et 30 avril 1903. 498 LES CAUSES ET LE MÉCANISME DE L’'ALTÉRATION Lorsque l'air atmosphérique est enfermé dans une enceinte où il est soumis à des causes quelcon- ques d'altération, on lui donne le nom d'air confiné. Parmi les nombreuses causes d'altération de l'air confiné, il en est qui sont parfaitement connues; telle est, par exemple, la présence de gaz étrangers à l'atmosphère : gaz carbonique et grisou des grottes, des galeries de mines, des puits; gaz sulfhydrique des fosses d'aisances; oxyde de carbone des divers foyers à combustion; telle est encore la diminution de la quantité d'oxygène, sous des influences diverses. Par contre, on ne sait encore que fort peu de chose sur d'autres causes d'altération, très impor- tantes par les accidents qu'elles produisent. C'est le cas, par exemple, de la respiration pulmonaire et de la sécrétion cutanée, qui provoquent, au bout d'un certain temps, sans qu'on sache encore bien pourquoi, des effets physiologiques fâcheux sur les individus qui vivent dans un air confiné. L'expé- rience montre aussi que la ventilation, même très active, est insuffisante pour faire disparaitre les odeurs désagréables qu'a fait naïlre la viciation de l'air et, là encore, l'explication fait complètement défaut. Les diverses Substances capables de produire dans ces conditions Faltération de Fair sont incon- nues et ont recu jusqu'ici le nom de miasmes, qui ne donne aucune idée de leur nature et de leurs propriétés. Divers savants ont bien cherché à les déterminer, mais aucun d'eux n'a jamais pu trouver un gaz nouveau dans les produits dé la respiration. Pourtant MM. Brown-Séquard et d'Arsonval avaient cru remarquer, dans l'air confiné, la présence de principes alcaloïdiques toxiques. En injectant à des lapins 12 à 30 centimètres cubes de vapeur d'eau condensée venant des poumons, ils avaient obtenu une mort rapide de ces animaux. Mais MM. Dastre et Loye, Offmann, Wellenhof, Russeau-Giliberti, G. Alessi, Lehmann et Jessen, Ben, Bauer, Forma- nek, n'ont pu confirmer ces résultats. Il est cependant certain que l'air déjà inspiré est désagréable et peut, même si l'on rétablit sa teneur normale en oxygène et si on le débarrasse de son acide carbonique, provoquer des malaises assez sérieux, tels que : sensation de pesanteur, serrement de tête, diminution de la capacité d'attention, som- nolence, oppression, tendance au vertige et à la nausée. La respiration modifie donc la composition chinique de l'air. H. HENRIET — LE MÉCANISME DE L'ALTÉRATION DE L'AIR CONFINÉ 2 DE L'AIR CONFINE Un savant allemand, le Professeur Flugge', de Breslau, a donné dernièrement pour unique cause” de l'altération de l'air confiné, l'élévation de la tem- pérature et de l'humidité, en considérant que la pol- lution chimique n'existe pas. Parmi les expériences les plus curieuses qu'il donne à l'appui de cette doc- trine, je citerai les suivantes, exécutées par Erck- lentz et Paul à l'Institut d'Hygiène de Breslau : On place divers sujets en observation dans une cage de verre de 3 mètres cubes. Dès que la tem- pérature et l'humidité augmentent dans la cage, les. sujets éprouvent des malaises. Si le sujet respire l'air confiné de la cage, mais le corps en dehors de celle-ci, tout accident dis- parait, pour se reproduire si l'on augmente la tem- pérature et l'humidité extérieures. Si le sujet, le corps placé dans la cage contenant de l'air confiné, respire de l'air extérieur pur, il éprouve les mêmes malaises que s'il inhalait l'air confiné de la cage, à la condition que la tempé- rature et l'humidité de l'air pur soient les mêmes qu à l'intérieur de la cage. ; Il est certain que, sous diverses latitudes, on rencontre fréquemment associées une température et une humidité semblables à celles que Flügge considère comme susceptibles de provoquer des indispositions, et pourtant il n'en résulte aucun inconvénient. Par suite, la vapeur d'eau et la température n'interviennent pas seules dans le phénomène de la viciation de l'air confiné, et 1 hy- pothèse de Flügge est pour le moins incomplète. Je montrerai, d'ailleurs, tout à l'heure comment on peut expliquer, d'une facon rationnelle, quel- ques-uns des résultats du savant allemand. Il con vient toutefois de remarquer que ses expériences ne sont appuyées que sur les impressions ressenties hole 2 fem off hs par ses sujets, impressions qui peuvent être très M variables suivant leur état nerveux. En définitive, pour avoir aujourd'hui une notion du degré de pollution d'une atmosphère confinée, on se contente de doser la proportion d'acide ear- bonique qu'elle renferme, car celle-ci est sensible- ment proportionnelle à la quantité des matières excrélées de nature inconnue. Mais, dans le cas où, pour une raison quelconque, il existe une produc- tion d'acide carbonique étrangère à la respiration, telle qu'un foyer, ou bien des appareils d'éclairage M 1 C. Fzucce : Zeitschr. f. Hyg. und Infektionskrankh:, t. XLIX, 1905. H. HENRIET — LE MÉCANISME DE L'ALTÉRATION DE L'AIR CONFINÉ 199 par le gaz ou le pétrole, la proportion d'anhydride carbonique que renferme l'air ne peut plus donner aucune idée de l’état d'altération de l'air. On sait, en effet, que, dans une enceinte où il existe une quantité d'acide carbonique relativement très grande, de 4 à 5 millièmes par exemple, sans aueun autre gaz étranger, les conditions de fonc- tionnement de l'appareil respiratoire restent nor- males et l'on n'éprouve aucun des malaises ordi- naires de l'air confiné. L'acide carbonique par lui-même est done incapable de vicier l'air' et l'on n'en peut tenir compte dans l'appréciation de l’altération par cet air qu'aulanl n’émane que du seul phénomène respiratoire. On voit, d'après ce qui précède, que la viciation d'une atmosphère par la respiration est une ques- tion encore bien vague. Pour quelles causes et par quel mécanisme l'air d’uae enceinte s’altère-t-il? D'un long travail exécuté à l'Observatoire de Montsouris et que j'ai publié antérieurement”, ainsi que de quelques recherchesrécentes, je puis extraire les éléments nécessaires à la solution de ce pro- blème. subie qu'il On sait que l'air exhalé par les poumons contient de l'oxygène, de l'azote et de l'acide carbonique, ces gaz étant lès seuls que, malgré les recherches les plus délicates, on ait pu mettre en évidence ; mais on y rencontre encore en abondance de la vapeur d'eau. Or, si l'on condense celte vapeur, on obtient un liquide incolore, d'une odeur légère, fade, et qui présente une réaction chimique neutre. Distillé en présence d'une base, 1l dégage un gaz à forte odeur ammoniacale, très alcalin et très soluble dans l’eau. Chauffé, au contraire, avec un acide fixe tel que l'acide sulfurique étendu, il laisse passer à la distillation des produits acides doués de propriétés chimiques très réductrices telles que : réduction du nitrate d'argent à l'ébullition et de l'acide chromique à froid en solution sulfurique. Il suit de là que l’eau de condensation qui provient des poumons contient un ou plusieurs sels dont l'acide et la base sont volatils. Si, maintenant, on laisse dessécher à la tempéra- ture et à la pression ordinaires, au-dessus de l'acide sulfurique, un certain volume d'eau con- densée à la sortie de l'appareil respiraloire, on obtient un résidu correspondant environ à 450 mil- ligrammes par litre d'eau. 11 est possible qu'à la température ordinaire quelques substances aient déjà disparu par suite de leur grande volatilité, 1 À condition de ne pas dépasser la proportion d'acide carbonique que contient l'air expiré, et qui est considérable puisqu'elle atteint plus de # 0/0. 2 H. Hexrier : Thèse, 1906. mais, dans la circonstance, il est impossible d’en tenir compte. Le résidu restant, examiné au microscope, pré- sente un aspect qui paraît entièrement cristallin. Chauffé à 36° pendant vingt-quatre heures, il perd 21 °/, de son poids; si on le maintient pendant le mème temps à 80°, il perd 54 °/, de son poids initial. Après chauffage à 80°, si on le regarde à nouveau au microscope, son apparence est encore cristalline, mais on constate que certains cristaux ont disparu en laissant loutefois leur empreinte. Si, à ce moment, on porte le résidu sur la flamme du gaz, il reste cristallin, mais brunit très légère- ment et seulement par places, ce qui prouve que les matières organiques non volatiles ne s'y ren- contrent qu'en très faible quantité. Le restant est donc d'origine minérale. En effet, une partie est soluble dans leau et donne avec le nitrate d'argent un précipité blane insoluble dans l'acide nitrique et soluble dans l'ammoniaque; cette portion contient done des chlorures. La partie insoluble dans l'eau se dissout entièrement dans l'acide chlorhydrique et fournit avec l’oxalate d'ammonium, en solution acétique ou ammoniacale, un précipité blanc d'oxalate de calcium. Ainsi, la vapeur d'eau exhalée par les poumons contient des matières solides, moilié environ est formée de sels ammoniacaux volatils et l'autre de sels fixes dont l’origine est vraisem- blablement due à un entraînement des liquides du larynx ou des fosses nasales. Quant aux sels am- moniacaux, bien que volatils ea lotalité seulement à une température supérieure à celle du corps, comme ils sont aisémententrainables par la vapeur dont une d'eau, il n°y a rien de surprenant à les y rencontrer mème à 37°. Ces composés rendent l’eau condensée très facilement putrescible, car ils forment une sorte de bouillon de culture où se développent divers microorganismes. Dès que les produits de la respiration sont rejetés dans l'air, ils souillent cet air, puisque ce sont des excrela, et, comme ils jouissent de propriétés r6- ductrices, alors qu'au contraire j'ai montré qu'un air pur est éminemment oxydant grâce à l'ozone qu'il renferme toujours, il y à lieu de penser que plus les substances expirées seront nombreuses, plus l’altération de l'air sera grande, et que, dans une salle donnée, la pollution de l'air confiné pourra croitre indéfiniment. Or, ce dernier point est inexact. J'ai établi, en effet’, un principe absolument général, qui s'applique aussi bien à l'air extérieur qu'à Fair confiné, et d'après lequel un second phé- RER CPR ES Li RS 4 H. HeNRIET : Loc. cit. 500 H. HENRIET — LE MÉCANISME DE L'ALTÉRATION DE L'AIR CONFINÉ nomène se superpose à celui de la viciation : c'est d'eau. Quand la vapeur d'eau se condense dans l'air, elle entraine la condensation de la vapeur avec elle toutes les substances solubles contenues dans cet air et les dépose en même temps que les gouttelettes liquides; les gaz insolubles, au con- trairé, se dispersent dans toute la masse gazeuse. En ce qui concerne l'air confiné, on voit, d'après cela, que les substances exhalées par les poumons sont susceplibles de condensation, puisqu'elles sont très solubles dans l’eau, tandis que l'acide carbo- nique ne l’est pour ainsi dire pas. Donc, si les con- ditions sont telles que, dans une enceinte, la con- densation se produise, dès qu'elle aura commencé, la pollution restera sensiblement la même, puisque chaque addition de substances étrangères sera suivie de la condensation d'une quantité égale de ces mêmes substances. Par contre, la proportion d'anhydride carbonique pourra croitre indéfini- ment, mais ne donnera plus alors d'indication pré- cise sur le degré de pollution de l'air analysé. | Examinons maintenant comment se produit la condensation dans une atmosphère confinée. Si la température de la salle est basse : 15° par exemple, la tension maxima de la vapeur d'eau à cette température élant voisine de 13 millimètres de mercure, on concoit qu'il ne faudra pas beau- coup de vapeur pour saturer l'air, et sicette vapeur est fournie par la respiration, la quantité de subs- lances expirées sera faible. La température restant constante, si la quantité de vapeur d’eau augmente, il y aura condensation, et les parois de l'enceinte se recouyriront de gouttelettes tenant en dissolution les produits de la respiration. La pollution de l'air a augmentera plus à partir de ce moment et restera faible. Seules augmenteront les gouttelettes liquides déposées et la proportion d'anhydride carbonique expiré. Si la température est plus élevée : ple, la tension maxima de la vapeur d'eau étant 25 millimètres de 26° par exemm- égale pour cette température à mercure, soit presque le double de ce qu'elle était précédemment, il faudra, pour saturer l'air, une quantité de vapeur double, et la condensation qui fixe la limite de pollution ne se produira que lorsque l’allération de l'air sera le double de ce qu'elle était à 15°, Ainsi, plus la température est élevée, plus, dans une atmosphère confinée, la vicialion de l'air augmente. Et cette augmentation n'est pas proportionnelle au temps, mais se produit d'autant plus vite que la température est plus haute, carles sécrétions de la peau deviennent alors beaucoup plus abondantes. L'explication de quelques-unes des expériences rapportées par Flügge devient alors très simple, et il est de toute évidence que, lorsque, dans la cage de verre où étaient enfermés les sujets, la tempé- rature et l'humidité augmentaient, les malaises devaient se produire puisque la pollution de l'air de la cage augmentait avec la température. En faisant respirer à un homme l'air souillé de la cage, en ayant soin de maintenir son corps dans l'air extérieur, Flügge devait nécessairement re- tarder l'apparition des symptômes alarmants, car l'inspiration des substances exhalées par les pou- mons produit un état fébrile qui, élevant la tempé- rature du corps, tend à augmenter les malaises éprouvés; mais, si le corps est placé dans l'air frais, l'évaporation cutanée se produit aisément et s'oppose à l'état fébrile. Quant à l'expérience d'après laquelle le sujet placé dans la cage et respirant de l'air frais éprouve les mêmes symptômes que s'il était tout entier plongé dans l'air confiné, elle parait peu vraisem- blable. C'est qu'en effet elle se rapproche un peu du cas du scaphandrier, qui, dans des conditions particulièrement défavorables, peut encore exé- cuter des travaux fort pénibles. II Lorsque la durée de séjour dans une atmosphère confinée a été assez longue pour qu'il se produise des condensations, celles-ci, comme je l'ai dit, dé- posent sur les parois de l'enceinte des gouttelettes chargées des matières qu'elles ont dissoutes. Un hygromètre placé à ce moment dans la salle ne marquera vraisemblablement jamais 100, car ül se trouvera toujours une ou plusieurs parois, et particulièrement les vitres des fenêtres, qui seront à une température inférieure à celle de l'air am- biant, ce qui occasionnera, en vertu du « principe de la paroi froide », une condensation sur ces parois, bien que le milieu de la salle ne soit pas complètement saturé de vapeur d'eau. Les gouttelettes liquides se déposeront aussi sur les papiers, les tentures et les vêtements des per- sonnes présentes. Ces divers supports conserveront alors les substances dissoutes pendant un temps qui peut être très long et deviendront de véritables bouillons de culture pour de nombreux microor- ganismes. Qu'on vienne, après que la condensation s'est produite, à aérer complètement la pièce, de facon à rendre à l'atmosphère intérieure sa teneur normale en acide carbonique, on n'en constatera pas moins l'odeur désagréable due aux produits expirés. Ce phénomène est très fréquent, et nombre de personnes ont été à même de l'observer : les chambres de malades, les salles d'école, d'hôpi- taux, de réunion, etc., gardent fort longtemps une odeur indéfinissable, dont il est très difficile de se débarrasser. M. Albert-Lévy, directeur à l'Obser- UT noi: he net salam te tte dt Éd RÉ OS ES + H. HENRIET — LE MÉCANISME DE L'ALTÉRATION DE L'AIR CONFINÉ 501 valoire de Montsouris, qui étudie l'air du Métropo- litain de Paris depuis son origine, a constaté que le matin, à la reprise du travail, et bien que pendant la nuit la ventilation soit assez active pour que l'air de l'intérieur des tunnels ait repris une com- position identique à celle de l'extérieur, il règne sous les voûtes une odeur semblable à celle que possèdent les voitures et les stations pendant la journée. Cela est très aisément explicable. Tout d'abord, comme c'est généralement le cas, si l'air que l'on envoie dans une enceinte pour remplacer celui qui est vicié se trouve à une température inférieure à celle de ce dernier, l'eau condensée reste liquide. Elle commencera à s'évaporer lentement si l'air pur envoyé est relativement sec, et l'évaporation se pour- suivra jusqu'à ce que l'air soit saturé de vapeur à la température considérée : d'où dégagement lent d’odeurs. Il faut remarquer, cependant, que les choses ne se passent ainsi que dans le cas où la sur- face condensante est imperméable et si les goutte- lettes n'ont pas gardé l'état sphéroïdal. Dans les tentures et les vêtements, il en est tout autrement. M. Langevin a établi une théorie que j'ai rapportée tout au long ailleurs", grâce à laquelle il démontre qu'il peut liquides d'un diamètre égal à 1/100.000 de milli- mètre, en équilibre avec la vapeur d'eau salurante exister des gouttelettes et même non saturante, Une fois formées, ces gout- telettes ne peuvent disparaître que si on les soumet à une surchauffe suffisante, une certaine compres- sion de l'air ne permettant pas de les évaporer. Or, dans les étoffes, tentures ou vêtements, ces goutte- lettes garderont facilement l'état ,sphéroïdal puis- qu'elles ne mouillent pas aisément les fibres et pourront pénétrer dans toute l'épaisseur du tissu en raison de leur petitesse. Les tissus se mettant très difficilement en équilibre hygrométrique avec l'extérieur et conservant pour ainsi dire une atmo- sphère qui leur est propre, dès qu'ils sont imprégnés de gouttelettes, celles-ci persistent et, avec elles, les substances qu'elles ont dissoutes. C'est par suite de ce phénomène que les vêtements, même extérieurs, peuvent transporter des produits odorants, en quan- tité infime, à des distances considérables. L'odeur particulière des couvertures militaires, dont le D° Ligouzat® à fait récemment une si intéressante étude, n'a pas d'autre origine. Ces phénomènes de condensation présentent des inconvénients graves, en ce sens qu'ils rendent les corps qui sont pénétrés par l’eau condensée très aptes à entretenir des cultures microbiennes. Pour les vêtements, en particulier, il serait désirable qu'ils ‘ H. Hexrier : Loc. cit. ? Dr Licouzar : Revue d'Hygiène, mars 1907. puissent tous être lavés, même ceux qui sont le moins en contact avec la peau. Dans l'intérieur des locaux, le d'éviter la production de la condensation et, pour cela, il conviendrait de maintenir une aération constante. La Chambre des Députés à Paris, par exemple, où des ventilateurs puissants renouvellent constamment l'air pendant les séances, ne possède aucune odeur particulière et cela parce qu'aucune condensation ne s'y produit. Dans les appartements, il suffirait de maintenir toutes portes intérieures ouvertes et une simple fente de fenêtre de 3 à 4 cen- timètres de largeur pour produire une ventilation continue, grâce au peu d'étanchéité des portes el fenêtres extérieures. Pour ces raisons, l'emploi des bourrelets l'hiver doit être rigoureusement proscrit. La ventilation est surtout nécessaire la nuit, dans mieux serait les chambres à coucher, etle maintien d'une fenêtre entr'ouverte par tous les temps est une précaution essentielle et généralement suffisante pour éviter toute odeur et pour conserver à l'air une composi- lion voisine de celle de l'atmosphère extérieure. Cette précaution ne peut jamais présenter d'incon- vénients, quoiqu'en pensent certaines personnes : elle est d'ailleurs la seule qui permette de faire dis- paraitre, d'une façon radicale, les causes d'intoxica- tion par des gaz délétères, comme l'oxyde de car- bone, qui fait encore, les nuits d'hiver, de trop nom- breuses victimes, III De tout ce qui précède, il résulte que, pour appré- cier, dans une atmosphère confinée, la marche de la viciation de l'air, acide carbonique est insuffisant : d'abord, parce que ce gaz peut augmenter indéfini- ment tandis que la pollution respiratoire ne peut pas dépasser un maximum ; ensuite, parce qu'après ventilation, sa proportion peut être très faible, bien qu'il existe encore sur les parois des condensations intenses ; enfin, parce que l'acide carbonique peut, dans une même enceinte, avoir plusieurs origines. En revanche, on à vu que l’état hygrométrique de l'air augmente dans un air confiné, jusqu'au moment où se produit la condensation en un point quelconque. Si done on dispose un hygromètre enregistreur dans une enceinte, on verra les ordon- nées de la courbe aller d'abord en croissant, puis rester constantes, la courbe formant alors un pla- teau. Et c'est à partir du moment où la courbe fait plateau qu'on peut considérer comme atteinte la limite de pollution maxima. En examinant les nombreuses courbes hygro- métriques obtenues par M. Albert-Lévy dans les tunnels du Métropolitain, on remarque que, dans ceux qui sont le moins bien ventilés, où la tempé- 502 rature est constante et varie à peine d'un degré _ l'état trique de l'air est minimum le matin vers à heures à la reprise du travail et voisin de 60; puis il aug- mente, el‘vers midi atteint sa valeur maxima, à peu près égale à 80, laquelle se maintient sensi- blement constante jusqu'à minuit. L'écart journa- lier entre le maximum et le minimum est de 45 à 20 degrés hygrométriques. À partir de minuit, où tout mouvement cesse, l'humidité s'abaisse jusqu'au matin, à cause de la ventilation nocturne, et ainsi de suite. On peut donc dire que c’est vers midi que la pollution atteint son maximum dans le tunnel, et, si l'humidité ne dépasse guère 80, cela tient à ce que certaines parois, plus froides que l'air lui- même, provoquent la condensation. Seulement, comme je l'ai déjà montré, à un degré hygrométrique élevé ne correspond pas nécessairement une pollution élevée, puisque c'est la température qui détermine la proportion de vapeur pouvant exister dans une atmosphère donnée; on peut donc dire, ainsi que Flügge, et dans les vingt-quatre heures, hygromé- bien que ce savant soit parti d'un principe erroné, quà une température et une humidité élevées correspondront des malaises, et j'ajoute, contraire- ment à Flügge, que ceux-ci seront dus à une vicia- tion intense de l'air. Il reste à déterminer expérimentalement quelle est la température minima qui, jointe à l'état hygrométrique maximum qu'on peut atteindre en pralique par le fait de la respiration, commence à produire des malaises. J'appellerai ce nouveau facteur : fempérature critique d'air confiné. On concoit qu'à cette température et à toutes celles qui lui seront inférieures, pour tout état hygrométrique plus faible que le maximum, il n'y aurà jamais de malaises, et l'atmosphère sera d'autant plus pure que l'état hygrométrique sera plus faible. A. OFFRET. — LE X° CONGRÈS GÉOLOGIQUE INTERNATIONAL AU MEXIQUE La température critique d'air confiné, bien qu'encore indéterminée, parait cependant devoir être assez élevée : 25° environ ; aussi sera-t-il facile, sous nos climats, de ne jamais la dépasser. I suf- fira donc, pour maintenir dans de bonnes condi- tions. d'aéralion l'atmosphère d'une enceinte, de veiller à ce que : d'une part, la température eri- tique d'air confiné ne soit jamais dépassée et, d'autre part, à ce que l'état hygrométrique soit aussi faible que possible. Il faut cependant remarquer que l'air extérieur contient une proportion de vapeur d'eau corres- pondant en moyenne à un état hygromélrique de 65 ; mais, comme les maxima dépassent parfois 95 et que les minima s'abaissent jusqu’à 20, on voit que l'homme peut vivre aisément dans un air rela- tivement sec. Il n'y aura donc aucun inconvénient à abaisser le plus possible la tension de la vapeur d'eau dans un air confiné. Les inspecteurs du travail, ainsi que les chefs d'industrie, en placant dans les ateliers un ther- momètre et un hygromètre enregistreurs, pourront suivre avec la plus grande facilité, l'état de salu- brité de l'air. Il leur suffira, en effet, de régler la ventilation ou la réfrigération, de telle sorte que la température critique d'air confiné ne soit jamais atteinte et que l'état hygrométrique de l'air ne dé- passe pas une certaine valeur, qui devra être d'au- tant plus faible que la température sera plus élevée. . L'observation de ces règles assurera à peu de frais et grâce à une surveillance constante, puisqu'elle pourra être exercée par tous les inté- ressés, l'entretien d'une atmosphère aussi pure que possible et dont l'influence ne sera jamais nuisible à la santé des travailleurs. H. Henriet, Docteur ès sciences. LE X° CONGRES GÉOLOGIQUE Le X° Congrès géologique international s'est tenu au Mexique dans le cours de l'été dernier. Pour là seconde fois depuis la création de ces Congrès, les géologues et les minéralogistes du monde entier ont quitté l'Ancien continent pour se rendre dans le Nouveau, où les avait déjà attirés en 1891 l'invitation de leurs confrères des Etats-Unis. Ils n'ont pas eu à regretter leur longue équipée. Depuis l'Exposition de 1878, où, d'après une inspi- ration venue des Etats-Unis, mais grâce à l'initiative des géologues et minéralogistes francais, a été tenu à INTERNATIONAL AU MEXIQUE Paris le premier Congrès géologique international, l'institution n'a cessé de grandir et de rendre les plus grands services. | Fondés pour faciliter entre les géologues et pétro- graphes du monde entier un accord indispensable à divers titres, tout spécialement au point de vue de l'établissement d'une carte géologique de l'Europe, les Congrès géologiques de Paris, Bologne, Berlin, Londres, Washington, Zurich, Saint-Pétersbourg, Paris, Vienne, ont vu cet accord s'établir petit à petit de facon satisfaisante, PL 1727 rar mans ei Te Er PT. 6 Qui Cr an bre arret gen A-S > “ A. OFFRET — LE X° CONGRÈS GÉOLOGIQUE INTERNATIONAL AU MEXIQUE 503 Lacarte géologique del'Europe,dont lapublication malérielle a été confiée à l'Allemagne, est actuelle- ment en voie d'achèvement, grâce au concours empressé des différents Services géologiques d'Eu- rope. Et cette publication, d'une importance capi- tale, est déjà par elle seule une preuve indéniable de l'utilité de ces Congrès géologiques internatio- naux. Ce n'est point la seule, et il serait vraiment trop long de donner ici l’énumération des rapports si importants dus aux Commissions de spécialistes constituées dans ces Congrès, ainsi que celle des innombrables publications géologiques et pétro- graphiques dues à l’activité des dix Congrès géolo- giques internationaux qui se sont succédé depuis 1878. Mais il convient de signaler à part une des œuvres les plus fécondes de ces Congrès. La Géologie et la Minéralogie, si elles sont à un point de vue des sciences de cabinet, sont surtout et avant tout des sciences de plein air. C'est sur le terrain, en face desfaits, que se posentles problèmes, que se forment les convictions. C'est devanteux que doivent se développer les discussions. Les organisateurs des Congrès géologiques ont mis celle vérité en aclion. Ils ont profité de la réu- nion, en un seul point du monde, de savants accourus des quatre points cardinaux pourles mettre à même d'examiner sur le terrain les points les plus intéressants de la géologie du pays où se réu- nissait le Congrès. IIS ont donné à ces Congrès des durées de plusieurs mois, qui leur ont permis d'or- ganiser de véritables voyages géologiques où, sous la direction des spécialistes nationaux les plus qua- liiés, les géologues étrangers ontété mis en présence des problèmes les plus susceptibles de les intéresser. EL petit à petit, d'un Congrès à un autre, ces voyages ont pris une imporlance de plus en plus grande. Faut-il rappeler iciles magniliques voyages du Congrès de Russie en 1897, qui ont permis à un grand nombre de géologues de visiter les parties les plus diverses et les plus éloignées de ce vaste empire: la Finlande, les Provinces baltiques, lOural, le Donetz, la Transcaucasie, la Crimée et même une partie de l'Arménie russe ? Trois ans plus (lard, pendant FExposition de 1900, la France avait à son tour l'honneur de recevoir à Paris, pour la deuxième fois, le Congrès géologique international. Et, du 3 1900, 35 excursions géologiques, admirablement orga- août au 2 octobre nisées el dirigées par les spécialistes les plus auto- risés de notre pays, permirentaux savants étrangers d'étudier les régions les plus intéressantes de notre territoire. À leur tour, les géologues autrichiens organi- sérent .en 1905, pendant le Congrès de Vienne, 14 voyages géologiques (comprenant de nombreuses subdivisions) à travers le Tyrol, la Bohème, la Transylvanie, la Hongrie, la Bosnie, l'Herzégovine, la Dalmatie, qui ont laissé le meilleur souvenir à tous ceux qui eurent la satisfaction d'y assister. Le développement méthodique de ces voyages géologiques à permis ainsi aux divers géologues ou minéralogistes du monde entier de visiter presque toute l'Europe, au cours des huit Congrès qui Sy sont succédé ! Le Congrès de Washington leur avait donné, en 1901 ,unavant-goûtde l'Amérique du Nord, grâce à la grande excursion du Yellowstone Park et des Montagnes-Rocheuses. Ils viennent de compléter leurs connaissances grâce au Congrès de Mexico, qui fut, à ce point de vue, comme à bien d’autres, digne de ses prédécesseurs. Le dixième Congrès géologique international à eu une durée de près de deux mois. Une série de voyages, du 20 août au 4 septembre, en à conslilué le début. Puis vint le Congrès pro- prement dit, qui s'est tenu à Mexico du 6 au 14 sep- tembre. De nouveaux voyages l'ont complété du 1B septembre au 13 octobre. L'éclat du Congrès à été très vif, aussi bien à Mexico que dans les divers États de la Fédération mexicaine. Près de 300 congressistes se sont trouvés réunis à Mexico au moment de la session, Une bonne cen- tiine de ces congressistes avait élé fournie par le Mexique même. Puis venait une soixantaine d'Américains du Nord, venus du Canada ou des États-Unis. Parmi eux se trouvaient les géologues les plus réputés des Universités ou des Geological Surveys de ces deux pays. L'Amérique centrale élait représentée par des délégués du Guatemala, du Honduras et du Venezuela; Cuba avait aussi quelques représentants. L'Europe avait fourni, de son côté, près d'une chiffre élevé, si l'on tient compte de l'éloignement: la centaine de congressistes, relativement durée de la traversée d'Europe au Mexique est, en effet, de près de trois semaines. Comme toujours, les savants allemands étaient en majorité parmi ces Européens; puis venaient, en nombre presque égal, les Anglais, les Autri- chiens et lés Francais. Mais, dans la dizaine de Francais représentant notre pays et parmi lesquels il faut citer, en toute première ligne, notre confrère en géologie, M. le général de division de Lamothe, j'avais le regret d'être le seul professeur d'Univer- sité francaise. La Belgique, la Bohème, l'Espagne, la Hongrie, l'Italie, la Norvège, la Roumanie, la Russie, la Suède et enfin l'Australie, la Chine, le Japon et les 504 [es Philippines avaient également quelques repré- senlants. IT L'ouverture du Congrès eut lieu le jeudi 6 sep- tembre 1907 dans le Salon de Actos de la Mineria, autrement dit dans la grande salle de l'Ecole des Mines de Mexico, une des plus anciennes écoles des quinfit, il ya l'admiration d'Alexandre de Humboldt. première fois depuis l'institution Congrès géologiques, la séance fut présidée par le Chef de l'Etat, le général Porfirio Diaz, de la République Mexicaine, haut protecteur du Congrès, entouré du corps diplomatique et de tous parmi lesquels il convient tout spé- cialement de signaler le Président d'honneur du Mines du monde, plus de cent Pour la ans, des président les ministres, Congrès, M. Aldasoro, sous-secrétaire d'Etat, chargé du Ministère de Fomento, Colonizacion e Industria, dont relevait le Congrès. Et cette marque de haute bienveillance donnée au Congrès par le Président de la République fut loin d'être la seule. Elle n'a été, au contraire, que la manifestation officielle de l'intérêt très vif que le Gouvernement mexicain, sous l'impulsion per- sonnelle de son chef, n'a cessé de prendre à l'orga- nisation de ce Congrès. Appui financier et appui administratif lui ont été prodigués par le Gouver- nement fédéral et tout le personnel administratif des différents États. Après les discours officiels, M. Tietze, directeur du Service géologique d'Autriche, et M. Diener, professeur de (Géologie à l’Université de Vienne, ancien président et ancien secrétaire général du IX Congrès géologique international, ont, confor- mément à l'usage, remis leurs pouvoirs entre les mains de l'Assemblée, en même temps qu'ils lui proposaient comme successeurs M. Aguilera, di- du Service géologique du Mexique, et M. Ordonez, sous-directeur du même service. Cette proposition fut ratifiée à l'unanimité par l'As- semblée, qui couvrit également de ses applaudis- sements les discours du nouveau Président et du nouveau Secrélaire général, heureux de les remer- cier du dévouement qu'ils n'avaient cessé de pro- diguer depuis trois ans à la préparation du X° Con- grès géologique international. Conformément à la tradition des Congrès géolo- giques internalionaux, tous ces discours furent faits La même langüe fut d’ailleurs em- ployée dans tous les actes officiels et dans toutes les publications du Congrès. recteur en français. Les autres séances se linrent dans l'/nstituto geo- logico Nacional, magnifique établissement inau- guré à l'occasion du Congrès etque le Gouvernement mexicain a affecté au Service géologique fédéral. A. OFFRET — LE X° CONGRÈS GÉOLOGIQUE INTERNATIONAL AU MEXIQUE Établi avec luxe et en même temps avec beau- coup de sens pratique, ce bel établissement, situé dans le quartier de Santa Maria, comprend, au rez-de-chaussée, des salles de collections et, au premier étage, la bibliothèque ainsi que les diffé- rents laboratoires ou ateliers, placés chacun sous la direction d'un chef de service. De vastes ter- rains ont élé réservés en vue des agrandissements futurs. Deux grandes salles de conférences, pourvues de lanternes à projections électriques, avaient été mises dans l'Instituto geologico Nacional à la dis- position des congressistes, et, dans le grand Hall central servant de vestibule, se trouvaient installés les bureaux de l'Administralion du Congrès, ainsi qu'un bureau de poste et un bureau télégraphique en relation avec les câbles, organisés spécialement pour le Congrès. é III Les séances du Congrès furent intéressantes et suivies par un grand nombre de membres. Selon l'usage, un programme détaillé des différentes séances avait été remis à chaque congressiste, et les comptes rendus imprimés des séances leur furent distribués chaque jour. Cette organisation n’a cessé de fonctionner avec le plus cran ordre, au grand profit de la bonne marche du Congrès. Mais, grâce à une innovation intéressante, un certain nombre de communications des congressistes furent l'objet d'une publication immédiate et intégrale sous la purent être clôture du forme de brochures séparées qui remises avant da Congrès. Ce tour de force d'impression scientifique, exé- euté en si peu de temps et en langue étrangère, mérite vraiment d'être signalé. Je citerai spécialement parmi les communiea- lions qui nous furent distribuées : aux congressistes Ueber Krystallisationschieferung und Piezokrystallisa- tion, par M. Becre. Apercu sur la géologie du Mexique, par M. AGuILERA. Le climat de l'Afrique du Nord pendant le Pliocène supérieur et le Pleistocène, par le général pE LAMOTRE. Les volcans du Mexique A leurs rapports avec le relief et la tectonique du pays, par M. AGUILERA. Sobre los fenomenos de las Pegas, par M. Sazvanor CALDERON. Some notes on the metamorphic rocks near the granite of Galway (Connaught), par M. Ricxaro JoN AN- DERSON. La Sierra Madre occidentale de l'Etat de Chihuahua, par M. Eouuxn Oris HAvery. Climatic variations, their extent M. GREGORY. Les œufs d'insectes des lacs de Chalco et Texcoco, des environs de Mexico, et la formation des oolithes, par M. L. Cayeux. A brief statement of the results accomplished by the and causes, par A. OFFRET — LE X° CONGRÈS GÉOLOGIQUE INTERNATIONAL AU MEXIQUE 505 Mexican petroleum Company at Ebano, San Luis de Potosi, Mexico, par M. DonExG. La Basi dei vulcant vulture ed Etna, par M. pe Lorenzo. The Drift of Galway, par M. ANDERSON. Ueber Aviculiden von palaeozoischem Habitus aus der Trias von Zacatecas, par M. Fairz FRECH. Efemerides del Volcan de Colima, par M. PRESRITERO SEVERO Diaz. Carte géologique de FAmérique du Nord, par M. Bar- LEY WILLIS. Climats des temps géologiques, leurs développements et leurs causes, par M. MarsDEN Manson. Interglacials periods in Canada, par M. CoLEman. On the paleontological work of the Swedish antarctic Expedition, par M. G. ANDERSON. Pour éviter l'éparpillement des idées, le Comité d'organisation du Congrès, suivant en cela l'exemple du Comité d'organisation du Congrès de Vienne, avait décidé de mettre à l'ordre du jour du Congrès quatre sujets principaux : Les conditions du climat aux époques géolo- giques ; La genèse des gisements métallifères; Les rapports entre lx tectonique et les masses éruptives; La classification el la nomenclature des roches. Ce programme s'est trouvé trop vaste pour le temps dont disposait le Congrès et les discussions ne purent avoir lieu que sur les deux premiers sujets. Mais les mémoires relalifs aux deux der- niers furent déposés et paraîtront dans les comptes rendus in extenso du Congrès. En dehors des communications proprement dites où la discussion était admise, des conférences avec projections, mais non accompagnées de discussion, eurent lieu pendant le Congrès. L'une des plus intéressantes fut celle de M. Law- son, professeur de Géologie à l'Université de Ber- keley (Californie), sur le tremblement de terre de San Francisco, en avril 1906. Cette conférence ren- fermait l'exposé des principaux résullats, encore inédits, réunis par la Commission d'enquête à la- quelle appartient M. Lawson, Commission nommée à la suite de ce redoutable séisme, dont il me fut possible, après la clôture du Congrès, d'aller exa- miner, à San Francisco mème, les terriliants résultats. Parmilesautres conférences, je citeraiencore celle de M. Sabatini sur la dernière éruption du Vésuve, celle de M. Anderson, lue par M. Sjügren, sur les ré- sultats de Expédition antarctique suédoise, et celle de M. Adains, de Montréal, sur la carte géologique générale de l'Amérique du Nord. Cette œuvre considérable, vivementattendue par les géologues du monde entier, et destinée à être le pendant de la carte géologique d'Europe due à l'initiative des Congrès géologiques internationaux, a vu le jour précisément au Congrès de Mexico. La publication de cette carte est l'œuvre collective des trois services géologiques du Canada, des Elats- Unisetdu Mexique: elle futréalisée grâce à un Comité constitué par la Geological Society of America el composé de MM. Russell, président; J.C. Aguilera, Bailey Willis, Adams, C. W. Hayes. Cette carte est à l'échelle de 1/5.000.000 et mesure 2 mètres sur 1%,50; elle est accompagnée de deux courtes notices explicatives par MM. Bailey Willis et Aguilera. Le Service géologique des Etats-Unis a fourni les fonds nécessaires pour Fimpression et la publica- tion de cette carte, et la nomenclature adoptée fut celle du Service géologique des Etats-Unis. Elle n'engage en aucune facon les Services géologiques du Mexique et du Canada. Le Mexique à participé aux dépenses par l'achat d'un certain nombre d'exemplaires, qui furent remis gracieusement aux congressistes, grâce à la bien- veillance du Gouvernement mexicain. La distribution de cette carte et de la notice de M. Aguilera, intitulée: « Apercu sur la géologie du Mexique pour servir à l'explication de la carte géo- logique de l'Amérique du Nord », ainsi que celle de son autre brochure : «Les volcans du Mexique dans leurs relations avec le relief et la tectonique du pays », fut accueillie par les congressistes avec une très grande satisfaction, car ces œuvres leur furent très précieuses dans le cours de leurs diverses excursions. Il est presque inutile d'ajouter que c'est avec la même salisfaction qu'ils recurent également, à leur arrivée à Mexico, le guide du X° Congrès géo- logique international. Composé sur le modèle des guides des trois derniers congrès, il comprend en réalité trente et une brochures distinctes, accompagnées de figures et de cartes géologiques, adaptées aux différentes excursions ou sections d'excursions qui ‘eurent lieu à l'occasion du Congrès. El, comme ses prédé- cesseurs, il a le mérite de présenter une précieuse mise à jour de la majeure partie des connaissances géologiques du pays dont il s'occupe. On voit, par l'exposé sommaire qui précède, et qui ne relate, bien entendu, qu'une partie de l'œuvre du X° Congrès géologique international, que cetle œuvre fut en tous points intéressante et que la réunion de Mexico mérite une place honorable à côté de ses devancières. Qu'ilme soit permis, en terminant cette première partie, de faire connaitre également quelques déci- sions intéressantes du Congrès. L'une d'elles fut relative au prix triennal Spendia- roff. Le prix pour 1906 fut accordé à M. Tschernys- chew, le distingué président du Comité géologique russe, pour son travail : « Die obercarbonischen | Brachiopoden des Ural und des Timan. » 506 A. OFFRET — LE X° CONGRÈS GÉOLOGIQUE INTERNATIONAL AU MEXIQUE Le thème proposé pour le prix à décerner par le futur Congrès est le suivant : « Description d'une faune en rapport avec son évolution géologique et sa distribution géographique ». Enfin, le Congrès a décidé, sur l'invitation du Gouvernement suédois, transmise par M. Sjügren, de tenir sa XI° session à Stockholm. La date de la réunion est provisoirement fixée à 1909. Mais le Comilé d'organisation suédois à la liberté de re- culer la réunion en 1910, s'il le juge nécessaire. FAVI Il me reste maintenant à donner pour finir un comple-rendu sommaire des réceplions diverses auxquelles fut convié le Congrès pendantson séjour à Mexico, ainsi que des voyages où excursions qui l'ont précédé, complété ou suivi. Le fêtes furent nombreuses, trop nombreuses, peut-être ! Le 5 septembre, un diner nous réunissait pour la première fois au restaurant de Chapultepec. Le 6 septembre, une réception nouvelle avait lieu à l'Instiluto geologico nacional. Le 7 septembre, un banquet nous était offert par la ville de Mexico au Palacio municipal. Le S septembre, un concert avait lieu à 6 heures du soir à l'Alaméda de Santa Maria, puis à 9 heures un bal commencait dans les salons du cercle (ca- sino) du quartier de Santa Maria. Et, comme la colonie francaise de Mexico, qui occupe en cette ville une situation considérable, avait tenu à fêter également ses compatriotes, el que ce jour du 8 sep- tembre était le seul à moitié disponible, en ce méme jour, un grand diner nous était offert à 7 heures du soir dans le beau Cercle francais de Mexico, et un bal brillant, qui dura jusqu'à 5 heures du matin, compléta la réunion. Et les congressistes francais ne purent concilier leurs devoirs de Fran- cais et de géologues qu'en oscillant en automobiles entre les deux salles de bal. Puis, le lendemain 9 septembre, à 7 heures du malin, un train spécial nous emmenait à Guerna- vaca, L'excursion, organisée par la Sociedad geolo- gica mexicana, fut en tous points admirable. Les mots manquent pour décrire la splendeur du spectacle qu'offre du col de l'Ajusco (3.000 mètres) l'immense bassin de Mexico, si magnifiquement bordé d'innombrables volcans, parmi lesquels se détachent, couverts de leurs neiges perpétuelles, le Popocatepelt (5.420 mètres) et lixtacihualt 5.110 mètres). Et, de l’autre côté du col, la descente sur Guer- navaca, pour être moins grandiose, n'en offre pas moins des points de vue admirables. Inutile d'ajouter qu'un banquet nous attendait à Guernavaca. Présidé par le gouverneur de l'État de Morelos, il eut lieu en plein air sous la colonnade située au premier élage du palais de Fernand Cortez, devenu actuellement le Palais du gouverneur. Le lendemain, 10 septembre, c'était au tour du sous-secrétaire d'État, chargé du Ministère de Fo- mento, Colonizacion e Industria, M. Aldasoro, pré- sident d'honneur du Congrès, de nous recevoir le soir au Ministère de Fomento. Le 11 septembre avait lieu à quelques heures de Mexico l'excursion aux Pyramides de San Juan Teotihucan, offerte par le Ministère de l'Instruction publique et des Beaux-Arts, comportant naturelle- ment un banquet. Et, comme la journée n'était vraiment pas assez chargée, quelques-uns de nos plus aimables compatriotes avaient eu l'idée de la compléter, pour les Francais, par une visite à une grande hacienda voisine, appartenant à une de nos compatrioles et consacrée en majeure partie à la culture du Maguey et à la fabrication du Pulque, la boisson nalionale mexicaine. La série des fêtes fut close, le lendemain 12 sep- tembre, par une garden-party suivie d'un diner et d'un concert au Palais de Chapultepec, résidence d'été du Président de la République, le général Porfirio Diaz. Et cette fète laissera aux congres- sistes un souvenir impérissable, lant à cause de l'éclat de la fête qu'en raison de la magnificence du site et de la beauté du spectacle qu'offre dans toutes les directions, sur le grand fer à cheval de volcans neigeux qui entourent Mexico, et partieu- lièrement sur l'Ixtacihualt (5.110 mètres), le Popo- catepelt (5.420 mètres), l'Ajusco et le Neyado de Toluca, la terrasse de ce Palais de Chapultepee, sommet d'un immense dyke d'andésite sur lequel s'élevait jadis le palais de Moctezuma, remplacé par le château actuel, et au pied duquel s'élèvent encore, pleins de vie et de’ grandeur, les vieux et rigantesques ahuehuètes (Taxodium micronatum) o* (me) qui virent la conquête de Fernand Cortez. V * Il me reste à parler des excursions du Congrès. Quelques-unes eurent lieu pendant le Congrès même.,Mais celles-ci, naturellement, ne purent être nombreuses, étant données les occupations déjà multiples des congressistes. Le 7 septembre eut lieu une excursion pétrogra- phique au Pédregal de San Argel, extrémité fron- tale d'une immense coulée de lave qui, partie de l'Ajusco, est arrivée presque aux portes de Mexico. Le 13 septembre, veille de la clôture du Congrès, eut lieu, à 100 kilomètres de Mexico, une autre excursion plus importante aux mines argentifères de Pachuca. A. OFFRET — LE X° CONGRÈS GÉOLOGIQUE INTERNATIONAL AU MEXIQUE 307 Ces mines, célèbres depuis des siècles, sont maintenant de nouveau en pleine activité, grâce à l'introduction des procédés de cyanuration qui, en cette localité comme en bien d'autres au Mexique, se substiluent à l’ancien procédé du patio. Les excursions antérieures au Congrès furent au nombre de quatre. L'une d'elles, précédant immédiatement le Con- grès, eut lieu du 2 au 4 septembre. Elle eut la forme d'une sorte de boucle allongée se dirigeant de Mexico vers Jalapa, Vera-Cruz et Orizaba, c'est- à-dire en définitive vers le golfe du Mexique. Sous la direction de M. Ordonez, le distingué sous-directeur de l’nstituto geologico nacional, nous fümes mis à même d'examiner pendant deux jours les phénomènes néo-voleaniques, si bien étudiés par lui, de la Sierra Madre orientale, soit sur la roule de Mexico à Jalapa, à proximité du coffre de Perote (4.090 mètres), soil aux environs de Jalapa, le long de la ligne de chemin de fer, encore inachevée, qui, entre la Sierra Madre el le golfe du Mexique, se dirige directement de Jalapa vers Cordoba en passant au pied du pie d'Orizaba (5.560 mètres). La troisième journée fut consacrée à l'étude du Crétacé moyen des environs d'Orizaba et à la tecto- nique de la Sierra Madre, sous la direction de M. Bôse, membre de l'/Anstitulo geologico nacional. Trois autres excursions, d'une durée plus longue, avaient précédé cette excursion vers l'Est. C'étaient les excursions du Centre, du Sud et de l'Ouest. Celle du MM. Flores et Ordoûez, permettait la visite du centre, dirigée successivement par Nevado de Toluea et du Jorullo. Celle du Sud comprenait la visite du massif archaïque du Canon de Tomellin et celle des érup- tions rhyolitiques des environs de Tlacolula, sous la direction de M. Ordonez, puis celle des célèbres ruines de Mitla aux environs de Oaxaca, sous la direction du célèbre archéologue de Berlin, le pro- fesseur Seiler, et enfin l'examen du Crétacé infé- rieur des environs de Tehuacan, sous la direction de M. Aguilera. Enfin, l'excursion de l'Ouest, placée sous la direction de M. Waitz, membre de l’/nstituto geolo- gico uacional, élail organisée de facon à permettre la visite des geysers éteints de San Andrès, celle des sources thermales d'Agua Fria et enfin celle du Volcan de Colima, encore en activité actuellement au bord du Pacifique. Les dates fixées pour ces excursions avaient été très heureusement combinées de facon à permettre au besoin le passage d’une excursion à l'autre. Et c'est ainsi qu'en sacrifiant la fin de l'excursion du Sud, consacrée au Crétacé, il me fut possible de participer à la partie la plus importante de l'excur- | sion de l'Ouest, consacrée à l'ascension du Volcan | | de Colima. Ces excursions furent toutes deux bien réus- sies, malgré les difficultés considérables d'orga- nisation que suscilaient le transport et le logement des congressistes dans des régions soit peu habitées comme Mitla, soit complètement inhabitées comme la région de Colima, où il fallut transporter, loger et nourrir les congressistes pendant trois jours à près de 4.000 mètres d'altitude, et à douze heures de cheval de tout centre habité. Et ceux de nos compagnons qui se rendirent au Jorullo, où les difficultés n'étaient guère moindres, n'ont pas rapporté de leur excursion une opinion moins favorable. Après le Congrès, une gigantesque excursion de près de 5.000 kilomètres et d'une durée de vingt jours permit aux congressistes de visiter presque toute la partie du Mexique siluée au Nord de Mexico. Deux trains composés de wagons Pullman du dernier modèle, c’est-à-dire d'un extrême confor- table, transportèrent les congressistes aux cratères du Valle de Santiago, aux mines de Guanajuato, à Zacatecas, aux mines et aux usines de Mapimi, aux mines de soufre de Conejos, à la frontière des Etats- Unis, à El Paso. Là, un groupe de congressistes se sépara pen- dant quelques jours de l’exeursion principale pour aller visiter les fonderies de Douglas, les mines de Bisbee, de la Copper Queen Co, les mines de Cananea. les fonderies et mines de Nacozari. Ce groupe vint six jours après, se refondre à Saltillo avec le groupe principal, qui, pendant cette séparation, avait vi- sité Parral, Québradilla et Parras; puis tous les congressistes réunis partirent pour Concepeion del Oro, Mazapil, la Sierra de Santa Rosa, las Espe- ranzas, Monterrey, San Luis de Potosi et Mexico, examinant en route le Crétacé supérieur fossilifère, les mines d'argent et de charbon, ainsi que les puits de pétrole de cetle immense région. Ce voyage colossal fut exécuté sous la direction de MM. Agui- lera, Ordoûez, Doheny, Büse, Burckhardt, Flores, Ludlow, Robles et Villarello, et avec l’aide de toutes les autorités locales qui ne cessèrent de combler les congressistes d’attentions de tout ordre. Terminé le 4 octobre avec un plein succès, ce voyage fut immédiatement suivi d'un autre, orga- nisé avec le même confort et dirigé cette fois tout à fait au sud, vers l'isthme de Tehuantepec, el qui ne se termina que le 13 octobre. Placé sous la direction de M. Büse, il fut con- sacré à l'étude de la tectonique de la Sierra Madre orientale, du Pliocène, du Miocène supérieur, du Crétacé, puis, pour finir, des schistes cristallins de l'archaïque et des roches granitiques ou porphy- riques des environs de Tehuantepec. 508 Il se termina à Salina-Cruz sur le Pacifique, à l'extrémité de cette ligne de chemin de fer, dite de l'isthme de Tehuantepec, que vient d'ouvrir une société anglaise, dirigée par Sir Weetman D. Pear- son et vigoureusement soutenue par le Gouver- nement mexicain. Complétée par la création, à ses deux extrémités, de deux ports bien aménagés situés à Coatzacoalcos, sur le golfe du Mexique, et à Salina-Cruz, sur le Pacifique, cette œuvre considérable, poursuivie sans bruit par le Gouvernement mexicain, est actuellement en plein fonctionnement. Assurée d'un trafic considérable, grâce à des contrats avec des compagnies de navigation, elle est, pour la Compagnie anglaise qui la créée et pour le Gouvernement mexicain qui l’a soutenue, une source certaine de prospérité, au moins jus- qu'à l'ouverture encore lointaine du canal de Panama. Dans cette œuvre, comme dans bien d'autres, le Gouvernement mexicain à montré une énergie, une continuité de vues, une intelligence nette des intérêts du pays qui lui fait le plus grand honneur, et qui explique la prospérité considérable dont jouit actuellement ce pays. Et la sensation de cette prospérité n'est pas une des impressions les moins vives qu'a rapportées de ce pays l’auteur de ces lignes. Vingt-cinq années ont suffi à la créer; vingt- cinq années pendant lesquelles le général Porfirio Diaz, président sans cesse réélu des Etats-Unis du Mexique, n'a cessé de diriger les affaires du pays avec une autorité sans cesse croissante. C'est vers lui, en première ligne, que s'élève la reconnaissance nationale ! Ce sera vers lui, en même temps que vers les collaborateurs dévoués dont il sut s'entourer, que s'élèvera l'hommage de recon- naissance qu'adresse, au Haut Protecteur du X°Con- grès géologique international, le délégué du Gou- vernement français à ce congrès. Qu'il lui soit éga- lement permis, en terminant, de transmettre au- jourd'hui à ses compatriotes les assurances de vive A. OFFRET — LE X° CONGRÈS GÉOLOGIQUE INTERNATIONAL AU MEXIQUE sympathie pour la France qu'il n'a cessé de ren- contrer au Mexique, et qu'a bien voulu lui, con- firmer, dans une audience personnelle, le Président de la République mexicaine. Il m'est du reste impossible de clore ces lignes sans reporter l'hommage de cette sympathie vers ceux qui en furent les créateurs, vers tous ces bons Francais qui, par leur travail assidu, par leurs succès intellectuels, commerciaux et industriels, ont su effacer à jamais le souvenir de la malencon- treuse intervention de Napoléon II et qui ont fait de la colonie francaise au Mexique une des plus riches, une des plus puissantes, une des plus con- sidérables, et je puis ajouter une des plus aimées parmi les colonies étrangères du Mexique. Je ne saurais oublier, en effet, le spectacle des fêtes organisées par elle à Mexico pendant près d'un mois à propos du 14 juillet, fêtes auxquelles il me fut donné d'assister et qui témoignent, par l’affluence des Mexicains à s'y rendre, de leur sym- pathie pour la France. Je ne saurais oublier non plus l'accueil affectueux que recurent les membres francais du congrès dans maintes villes du Mexique, à Mexico tout particu- lièrement, pendant plus d'un mois, de la part des membres de la colonie francaise, heureux de se grouper autour du très sympathique représentant de la France au Mexique, M. le Comte Peretti de la Rocca, pour nous fêter et causer avec nous du pays auquel ne cesse de les rattacher le plus pur patrio- tisme. Que mon dernier mot soit pour eux : La colonie francaise du Mexique fait le plus grand honneur à la mère-patrie et la France a le droit d'être fière de son rejeton. Il ne lui manque que d'être suffisamment connue. L'avenir y pourvoira! A. Offret, Professeur de Minéralogie théorique et appliquée à l'Université de Lyon. Délégué du Ministère de l'Instruction publique, du Ministère des Travaux publics et de l'Université de Lyon au Congrès de Mexico. Vice-Président du X° Congrès géologique international. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 4° Sciences mathématiques 509 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 2° Sciences physiques Gandillot (Maurice). — Essai sur la Gamme. — { ro/. Remoundos (Georges), Ancien Elève de l'Ecole Nor- male Supérieure, Maitre de Conférences à l Université d'Athènes. — Sur les zéros d’une classe de fonc- tions transcendantes. Thèse de la Faculte des Scien- ces de Paris. —1 vol. in-8°. Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1907. M. Remoundos s’est proposé, dans ce très intéressant travail, d'étendre aux fonctions multiformes le théo- rème classique de M. E. Picard, à savoir qu'une fonc- tion uniforme F{z) peut prendre, au voisinage d'un point singulier essentiel isolé zZ= x, toutes valeurs, sauf, peut-être, deux valeurs au plus, dites valeurs excez- tionnelles. S'inspirant d'une proposition énoncée comme probable par M. Painlevé, à savoir qu'une fonction multiforme à v branches doit avoir, au voisi- nage d'un point singulier essentiel isolé, au plus 2v va- leurs exceptionnelles, M. Remoundos a d'abord cherché à vérifier cette prévision; il a choisi pour cela la voie indiquée par M. Borel, à propos du théorème de M. Pi- card, et qui résulte de l'impossibilité de certaines iden- tités de la forme: in D'Giterofts Z)= 0, i=n autrement qu'en prenant tous les G nuls, les G et les H désignant des fonctions entières de z assujetties à cer- taines conditions trop longues à préciser ici. Dans la première partie, l'auteur étudie le cas des fonctions ayant un nombre fini de branches au voisi- nage d'un point singulier essentiel isolé, et il justifie la prévision de M. Painlevé. Il examine le cas du point singulier essentiel à l'infini, et généralise pour le cas d'un pointsingulier essentiel quelconque, en s'appuyant sur des travaux récents de M. Maillet. La seconde partie s'applique aux fonctions multi- formes qui ont un nombre infini de branches au voisi- nage d’un point essentiel isolé. Le premier chapitre concerne en particulier des fonctions d'un nombre in- fini de branches pour lesquelles le nombre des valeurs exceptionnelles est limité. Dans le second chapitre, l’auteur tâche de généraliser pour toute fonction u et z définie par: F(z,u)=0, F étant une fonction entière de zet de u; il établit que l'ensemble des valeurs ex- ceptionnelles est dénombrable et possède l'infini pour point limite; à cette occasion, il aborde le problème intéressant et difficile des identités de M. Borel, quand le nombre des termes y devient infini. Enfin viennent quelques applications aux équations différentielles, re- latives aux points d'indétermination complète (M. Pain- levé). Une dernière partie est consacrée à rattacher au sujet traité et à compléter les résultats de M. Borel re- latifs à Ja croissance régulière des fonctions entières. M. LELIEUVRE, Professeur au Lycée et à l'Ecole des Sciences de Rouen. Pesloüan (Ch. Lucas de). — N. H. Abel. Sa vie et son œuvre. — 1 vol. 1n-8° de 168 pages. Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1907. M. L. de Pesloüan n'a pas voulu écrire un fragment de l'Histoire des Mathématiques, mais la vie d'un mathématicien : il n'a donc pas séparé le récit de l'existence d'Abel de l'analyse de son œuvre. Il nous donne ainsi une étude des plus intéressantes, qui ne peut manquer de communiquer au lecteur les senti- ments d'admiration que l’auteur professe pour Abel. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. in-8° colombier (31 X 22) de xvi-575 payes avec 453 fig. (Prix : 32 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1907. Le titre de cet ouvrage est trop modeste : l'auteur dit lui-même que, se proposant tout d’abord de chercher les lois de formation de la gamme moderne, il a été entrainé par son sujet, et qu'il a trouvé les lois de l'har- monie comme conséquences immédiates de ses pre- mières recherches. Il s’agit donc ici d'une véritable théorie de la musique; car ce traité renferme le mode de formation des gammes modernes, des gammes an- ciennes et même de gammes qu'on peut appeler futures, étant encore inusitées, et, en outre, les lois de for- mation des accords consonants et dissonants, base de l'harmonie ancienne et moderne, leur mode d'emploi et de résolution, les règles de la modulation et de la composition musicale. L'auteur critique les traités d'har- monie existants, discute les prescriptions établies, en propose, lorsqu'il y a lieu, de nouvelles. En un mot, il donne aux lecteurs les moyens de se rendre un compte précis de leurs impressions musicales, de faire l'analyse logique d'une pièce de musique quelconque, et d'en exprimer les résultats au moyen d’une série de termes et de signes nouveaux établis rationnellement. Il en résulte que l'ouvrage est long : l’auteur s'en excuse en disant que, « s'il avait exprimé ses opinions sans justifier leur différence avec les idées ayant cours, le lecteur n'eût cessé de lui faire mentalement des objections : le livre eût été court, mais non convaincant. Il a donc paru nécessaire de prévoir ces objections et d'y répondre ». D'autre part, il y a dans cet ouvrage une centaine de mots nouveaux, bien choisis d’ailleurs, qu'il faut absolument s'assimiler au fur et à mesure, et inscrire sous forme de vocabulaire, ce qui facilitera beaucoup la lecture et l'intelligence de l'ouvrage. Il y a là certainement une difficulté qui rend la lecture pénible pendant quelque temps ; mais le but à atteindre est si intéressant pour ceux qui aiment la musique ! Il vaut bien qu'on se donne, en commencant, un peu de peine. Le lecteur doit ètre également prévenu qu'il lui faut posséder des connaissances musicales élémentaires : les noms des échelons de nos gammes actuelles majeure et mineure, les noms et la nature des intervalles qui les forment, diatoniques et chromatiques, quintes, tierces, quartes…, les diverses clefs, au moins celles de sol et de fa, leurs armures en dièses et bémols caractérisant les divers tons, des notions sur les instruments de mu- sique :violons, violoncelles pianos, orgues harmoniums, cors, elc. Dans une première partie, dont l’auteur semble faire bon marché, et qui nous paraît, au contraire, très utile et très importante, il donne quelques notions d'acous- tique indispensables, et il « s'efforce de pénétrer le mécanisme suivant lequel se produisent nos sensations musicales ». C'est là que se trouvent les seuls faits expérimentaux sur lesquels il s'appuie, et les prin- cipes qui lui servent à échafauder toutes les théories suivantes. Pour M: Gandillot, « si l'on n'a pas encore réussi à établir la théorie de la musique, cela tient sans doute à ce que, le plus souvent, on a tenté de la fonder sur les particularités du fonctionnement des corps sonores, alors que c’est celui de notre intelligence dont il con- vient en réalité de tenir compte. Or, on dispose pré- cisément à ce sujet d'une donnée très sûre et par- 12% 510 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX faitement suffisante; c'est le principe de la consonance, philosophiquement très plausible, et qui peut s'ex- primer ainsi : Je musicien aime à associer les sons dont les hauteurs sout en rapports simples! S'appuyant sur cette base étroite, mais solide, il est facile de recons- ütuer toute la musique, gamme et harmonie ». Par rapports simples, l'auteur entend des rapports numériques et HE ar ithmétiques Fmple. exprimés avec les nombres 1, 2, 3, 4, 5, 6, 8, 9, 10 (le nombre 7 est momentanément exclu pour des ae exposées dans le cours de l'ouvrage), et d’une manière générale par une expression de la forme : 2,3*,5», où m, n, D sont des nombres entiers, positifs ou négatifs. Il com- plète sa pensée en ajoutant que les sons associés seront d'autant plus aimés du musicien que les rapports nu- mériques qui les expriment seront plus simples. Cette définition, en quelque sorte philosophique ou psychique, de la consonance, des intervalles musicaux consonants, dans laquelle des rapports de nombres sont au premier plan et les sensations des musiciens au second plan, n'est pas nouvelle : c'est celle de Descartes! et d’Eu- ler*; celui-ci en a déduit jusqu'aux plus extrêmes consé- quences. M. Gandillot ne l’a pas suivi jusque-là, et avec raison; mais il est de son école : il s'éloigne entièrement de celle de Rameau, d'Alembertet Helmholtz, en ce sens qu’il ne se sert, pour édifier sa théorie musicale, ni du principe de la résonance multiple dont les deux pre- miers faisaient la base dela musique, ni des battements, ni des sons résultants, dont le troisièrne a fait un usage si remarquable dans sa théorie physiologique de la musique. En général, il se méfie du témoignage de l'oreille, et ne s’en sert volontiers que pour corroborer les résultats de ses déductions rationnelles. Pour lui, le fait fondamental est le suivant : « Parmi les notes que la Physique permet de réaliser, le musicien n'en emploie qu'un petit nombre, celles dont les fré équences forment entre elles des proportions simples. Plus la proportion est simple, plus leur accord est consonant ». Et l'idéal de l'accord consonant est celui que forment les notes : ut, uf, sol, ut, mi, sol, nt,, parce que les fréquences des notes simultanées an le forment sont proportionnelles aux nombres : À, 2, 3, 4, à, 6, 8. Il admet ensuite : que les intervalles musicaux sont représentés par les rapports suivants et dans l’ordre décroissant de consonance : la : 3 l’octave 2, la quinte = la tierce majeure -; + quarte = 3 8 la sixte mineure — et la sixte majeure . Enfin la dis- ñ S , s 6 la tierce mineure 5° sonance étant le aire de la consonance, on classe parmi les dissonances les intervalles suivants : seconde J 9 É 16 Es j 15 majeure =» seconde mineure TL septième majeure 8? ee) Je : 9 septième mineure 5° Les musiciens pourraient élever quelques critiques sur cette classification des intervalles consonants au sujet de leurs effets acoustiques. Quant aux rapports ci-dessus, ils sont admis depuis Zarbin par la grande majorité des théoriciens. Les expériences de Helmholtz, celles que nous avons faites, Cornu et moi, en enre- gistrant les vibrations de deux sons émis simultanément comme ils le sont dans les accords, bases de l'harmonie, ont montré que l’on pouvait les accepter sans difficulté, surtout quand il s’agit d'édifier une théorie sur les pro- priétés et l'emploi de ces accords. Cette définition, en quelque sorte mathématique, de la consonance et de la dissonance étant admise, et les rapports numériques ci-dessus acceptés pour les inter- valles musicaux, l’auteur construit graduellement son édifice théorique avec une logique imperturbable, en se 1 Abrégé de la Musique, 1610. * Tentamen novæ theoria Musicæ, 1730. servant au besoin de représentations sc hématiques de toute espèce, dont la plupart sont fort ingénienses. Cet édifice peut en quelque sorte être considéré comme composé d'une base ou fondement, constitué par ce que l'auteur appelle les échelles musicales, d'étages constitués par les diverses gammes, et d'un cou- ronnement formé par les accords consonants et dis- sonants. Nous ne pouvons donner ici qu'un résumé rapide des idées de l’auteur sur ces sujets. Echelles. — TN appelle échelle une série de sons ren- fermés dans un intervalle d’octave, aussi nombreux et aussi consonants que possible, c "est-à-dire représentés par les rapports numériques les plus simples. Par une analyse serrée des éléments de la question, on ne trouve que trois sons satisfaisant aux conditions posées, et formant entre eux trois intervalles, savoir : la tierce : 6 : : 5 | mineure {—-—;, la tierce majeure Dr et la quarte J , | 2° qe En commençant par la tierce majeure T, on a mi sol ut. En commençant par la tierce mineure £, on | obtient l'échelle mineure LT. g, ut mi sol ut. Mais on voit qu'il peut y avoir quatre autres formes, savoir : g.T.t. sol ut ini sol : t.q.T. m1 sol ut mi, toutes deux majeures, et deux autres mineures: ait. T. sol ut mi, sol: Te ie sol ut mi. En tout six échelles qui peuvent ètre employées : en particulier, les sonneries de clairon utilisent les sons de la première échelle majeure ut mi sol ut, qu'on appelle échelle de touique majeure, repré- sentée par Ta. Mais le nombre des échelles n'est pas limité à six. On peut en construire en prenant pour point de départ (pour base; soit l’un des trois sons des échelles précé- dentes, soit d’autres sons, pourvu qu'on satisfasse tou- jours le mieux possible au principe de la consonance. C'est ainsi qu'une échelle importante de la forme ma- jeure T.f.q. peut être construite sur le troisième échelon | sol, appelé note dominante (ou simplement dominante), sommet de la première échelle majeure, savoir : sol si | ré : c'est l'échelle dite dominante majeure représentée par D,. Il est évident qu'il existe aussi une échelle de dominante mineure, D;, qui est sul si, ré. Deux autres échelles, aussi importantes que les précédentes, dont le sommet se confond avec la tonique ut, sont formées en prenant pour base le son fa situé à une quinte inférieure d’ut et qu'on nomme note dominée dut, savoir : une échelle dite dominée majeure, À, de la forme T.{.q. fa la ut : l'autre, dominée mineure, A;, de la forme {.T.g. fa la» ut. Et ainsi de suite. Il va sans dire que chacune de ces nouvelles échelles a ses variantes comme les deux premières. On voit le grand nom- bre de groupements élémentaires de trois sons qu'on peut ainsi constituer logiquement. Gammes. — Mais, quelle que soit l'utilité de ces échelles ou types élémentaires pour l'analyse musicale, ils n'offriraient pas de ressources suffisantes aux com- positeurs. Il faut en arriver à des groupements renfer- mant dans l'intervalle d’une octave un plus grand nom- bre d’échelons, et usités depuis des siècles : ce sont les gammes. L'auteur appelle gamme, d'une facon générale, « toute collection de sons faisant avec une même tonique des rapports assez simples pour que l'intelligence les sai- sisse aisément ». Il s'agit toujours, bien entendu, de rapports 2umériques, Car sans cela la définition serait à peu près indéterminée. En réalité, l'auteur forme les gammes en groupant logiquement les sons renfermés dans une ou plusieurs des échelles déjà définies, réduits s'il le faut d’une ou plusieurs octaves pour être renfermés dans l'intervalle d'une seule octave. En prenant deux échelles successives de tonique et de dominante majeures, T; D, par exemple, on cons- tituerait une gamme majeure particulière composée des sons: ut ré mi, ré sol Si ut (le son étant réduit d'une | octave), qui offrirait quelques ressources musicales, mais | l'échelle majeure T.f.q représentée par les noms : ut. : | À à becs. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX o11 encore restreintes, et qu'on pourrait appeler gamme binaire. On arrive à nos gammes actuelles, qui sont {ernaires, en groupant les sons de trois échelles tonique, domi- nante et dominée T, D, et A. C'est ainsi que notre gamme majeure habituelle est formée des sons des trois échelles A, Ta, Do, fa la ut, ur mi sol, sol Si ré, réunies dans une même octave et sous la forme connue :ut ré m1 fa sol la si ut (en y joignant l’octave supérieure). Une gamme d'uf mineur est formée semblablement des sons des échelles A;, T;, D;, fa lab ut, ut mib sol, sol sit re, sous la forme : ut ré mib fa sol lab sib ut. (C’est une variante de la gamme d’ut mineur usitée où sir est remplacé par si). Mais l’auteur remarque que les échelles T, D, A vont être combinées de plusieurs autres manières que les majeure T, D; Aa et mineure T:D; A;: on peut combiner l'une de ces deux formes, A, par exemple, avec deux autres de quatre manières différentes, savoir : Aa Ta Da; Aa Ta Di; Aa Ti Da; Aa Ti Di. Il en est de même pour les combinaisons de À; avec les deux autres. On obtient ainsi huit variétés de gammes ternaires, qu'on peut grouper en quatre genres rapportés à deux types ou modes caractéristiques, quatre au mode dit majeur, et quatre au mode mineur, où le troisième échelon de la gamme, mi, appelé mediante, fait avec le premier, ou tonique, un intervalle de tierce mineure. On obtient ainsi, sur ut pris comme tonique, huit gammes ternaires, dont quatre majeures et quatre mi- neures; mais, comme chacune d'elles peut affecter trois formes, ainsi qu'on l’a indiqué plus haut, suivant qu'on la commence par la tonique, la dominante ou la mé- diante, c'est en réalité vingt-quatre gammes différentes formées sur une tonique, et par la seule condition essentielle que tous les intervalles qu'elles renferment soient exprimés par des rapports numériques aussi simples que possible. Cette classification originale pouvant, en raison de sa nouveauté, sembler un peu artificielle, l'auteur s’em- presse de la justifier par des exemples tirés du plain- chant, de Mendelssohn, de Berlioz, Gounod, Reyer, Chabrier et Wagner. Il fait remarquer d’ailleurs qu'on peut, par combinaison d’autres échelles telles, que mi sol si par exemple, avec les précédentes, composer une foule d'autres gammes: mais les gammes ternaires ci-dessus sont les plus employées. Seulement on ne peut relier entre elles, au hasard, deux ou plusieurs échelles; il faut, pour être acceptables, qu'elles présentent entre elles des relations plus on moins intimes, que l’auteur appelle parentés, et qui s'appliquent aussi bien aux échelles qu'aux gammes. L'auteur indique quatre sortes de parentés qu'il appelle : homotonie, quand les échelles ont leurs bases à l'unisson (ut mi sol et ut mit sol); connexion, quand deux échelles ont deux échelons et par suite une tierce commune, relative si la tierce est majeure (/a ut mi, ut mi sol), corrélative si la tierce est mineure (ut m1 sol, mi sol si) ; voisinage, quand une échelle a pour base la note qui est le sommet de l’autre. Les mêmes noms sont appli- qués à des gammes ayant même tonique, ayant leurs échelles toniques connexes, ayant leurs échelles toni- ques voisines. On voit que ce sont les échelles qui caractérisent ces degrés de parenté, et l'on commence à saisir ainsi le rôle important qu'elles doivent jouer dans la composition musicale, d'autant plus que ce sont les seuls groupements de sons entièrement consonants d’après la définition acceptée. Nous ne pouvons suivre l’auteur dans le dévelop- pement de ses idées sur les gammes; on trouvera dans son Æssai (huitième partie) une étude approfondie et très originale de la gamme, considérée dans son acception tout à fait générale, qui conduit à la consti- tution régulière et logique de centaines de gammes comprenant les gammes anciennes, les modes de plain- chant, nos gammes modernes et une foule d’autres, susceptibles d'utilisation future. Accords. Harmonie. — Ici la question se complique. Si l’on comprend jusqu'à un certain point que l'oreille d'un musicien soit tolérante quand il entend des séries de sons successifs formant des mélodies, il semble bien qu'elle doit se montrer beaucoup plus exigeante quand on lui fait entendre des groupes de sons simulatnés ou accords, et quand on les fait se succéder les uns aux autres. Il doit se produire là évidemment des effets physiologiques et psychiques complexes, dont il parait difficile d'établir une théorie vraimentscientifique, ainsi que l'ont essayé par exemple Euler, d’Alembert, Helm- holtz, ét surtout, comme l’a tenté notre auteur, une théorie fondée uniquement sur des relations numé- riques. C'est pourquoi les auteurs des traités d'har- monie en usage dans les conservatoires, et dont quelques-uns, comme Chérubini et Reber, étaient des compositeurs de grande valeur, mais sans éducation scientifique étendue, n'ont, à proprement parler, donné que des règles de composition empiriques, fondées avec plus ou moins d’approximation sur l'expérience des maîtres qui, pendant des siècles, ont écrit de la musique considérée comme admirable par la majorité des mu- siciens. Il s'agissait, dans l'ouvrage que nous analysons, de réviser ces règles, de mettre en évidence ce qu'elles ont de vrai, ou de faux, ou d'incomplet; d'en justifier scientifiquement l'emploi, de le généraliser quand il y a lieu. Il a fallu pour cela consacrer la quatrième partie du livre, formée de six chapitres, à établir une définition nouvelle de la dissonance des accords, fondée sur l'em- ploi de notes provenant d'échelles différentes, en mon- trant qu'elle conduit à des conséquences vérifiées par l'expérience des musiciens ; à la genèse, par réunion d'échelles, dés accords dissonants naturels et altérés, ceux-ci étant définis comme formés de Sons provenant de gammes différentes ; à la préparation et à la réso- lution des dissonances, en expliquant rationnellement des faits exacts, mais qu'on attribue généralement à de vagues attractions exercées sur certains degrés des gammes par certains autres. Ce n’est pas, il est vrai, qu'il n'existe pas de faits où les choses ont l'air de se passer comme si des attractions de cette nature existaient: bien au contraire. En effet, tous les musiciens savent que, lorsqu'on leur fait en- tendre une série de sons successifs ou superposés, soit par suite d'une sorte d'instinct musical, soit-par l'effet de l'habitude de lire et d'entendre de la musique, soit pour les deux motifs à la fois, ils rattachent ces sons à un son principal, à un son de référence ou, si l’on veut, en employant un terme technique, à une certaine tona- lité. C'est là un phénomène très connu, très exact et tout à fait général : l'auteur l'appelle rattachement. Ce phénomène, d'importance capitale pour l'harmonie, est aussi fort délicat à expliquer rationnellement, si l’on veut y mettre quelque précision. L'auteur à consacré une partie fort longue de son livre (la quatrième) à en rechercher et à en exposer les lois, en se servant de schémas géométriques suggestifs, mais sans avoir recours, comme on l’a fait avant lui, à la considération des sons résultants, pour cette raison qu'ils sont le plus souvent trop faibles pour être entendus,etque,dans le cas d’une musique pensée et non entendue, ils sont sûrement inexistants. Pour lui, le son de référence est celui avec lequel les sons entendus ont les rapports numériques les plus simples; c’est celui dont le nombre de vibrations est représenté par le plus grand commun diviseur des nombres relatifs aux sons entendus ou ses octaves. Seulement il admet que l’on apprécie simul- tanément, mais distinctement, la périodicité des sons particuliers ainsi que celle de l'accord qu'ils forment entre eux: or, c’est là une affirmation qui aurait besoin, à ce qu'il semble , d’être prouvée physiologiquement. Néanmoins les conséquences tirées de ce point de départ s'accordent avec les résultats de l'expérience des musiciens : c'est l'essentiel. Nous espérons en avoir assez dit pour faire com- D12 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX prendre comment l’auteur à édifié sa théorie, com- ment il à pu. construire rationnellement un très grand nombre de groupements ou types musicaux, déter- miner leurs relations ou rattachements, montrer com- ment on peut passer des uns aux autres scientifique- ment, en quelque sorte, en restant toujours attaché à ce qu'il a appelé le principe de la consonance. On voit alors comment il à pu sans grande difficulté comparer, dans une pièce de musique quelconque, les accords, éléments de l'harmonie, aux types caractéristi- ques qu'ila établis, et constituer ainsiles bases d’une ana- lyse scientifique de la musique. C'est la neuvième partie de l'ouvrage qui renferme les applications musicales de ces théories, appuyées sur de nombreux exemples empruntés à Mozart, Meyerbeer, Verdi, Reyer, Wagner. Un chapitre est consacré à l'étude des modulations; les autres à l'analyse des traités d'harmonie existants, en indiquant le sens dans lequel il y aurait lieu d'en modifier la rédaction et les remaniements à faire à la terminologie musicale. La dixième partie de l'ouvrage se rapporte au tem- pérament : elle comprend d'abord l'étude théorique de cette question, qui a soulevé tant de discussions, mais qu'il à bien fallu résoudre, puisque l'emploi des instruments à sons fixes, comme les pianos et les orgues, les flûtes, les clarinettes, les hautbois, etc. oblige les instruments omnitones, comme le larynx humain, et les instruments à cordes à n'exécuter en quelque sorte que de la musique approximative. L'au- teur étudie, en employant surtout des constructions graphiques, diverses solutions de cette question : il montre ensuite comment on peut passer de la théorie à la pratique, et indiquer la construction d’un instru- ment qui permettrait de réaliser dans les instruments à clavier le tempérament à » sons dans l’octave au lieu de 12. L'ouvrage se termine par un résumé d’une vingtaine de pages. Quand on l'a lu, ou plutôt étudié avec soin, on éprouve la sensation agréable de voir beaucoup plus clair dans un sujet extrèmement complexe. Il s'y joint cependant une sorte d'hésitation à croire que le point de départ de l’auteur soit réellement aussi simple qu'il en à l'air. Se priver systématiquement, dans une théorie musicale, des données physiques et physiologiques que peut fournir l'organe de l'ouie, même celles qui en sont indépendantes, et réduire à peu près, en ce qui concerne la musique, les sensations auditives à l'ap- préciation de rapports numériques ou au contrôle de théories de forme mathématique, cela semble une tentative hardie, et inspire tout d'abord une certaine méfiance. Quoi qu'il en soit, le but que s'est proposé l'auteur en écrivant cet essai nous semble atteint : en tout cas, c'est un livre rempli de faits et d'idées expri- mées le plus souvent sous une forme nouvelle, logi- quement et solidement liées; il est très intéressant pour tous ceux qui aiment la musique, et qui désirent se rendre compte des impressions qu'elle produit. E. MERCADIER, Directeur des Etudes à l'Ecole Polytechnique, 3° Sciences naturelles Demangeon (Albert), Professeur-adjoint à l Univer- site de Lille. — Dictionnaire manuel illustré de Géographie. — 1 vol. in-8& de 860 pages. avec fig. Prix cartonné: 6 fr.\ Librairie Armand Colin. Paris, 1907. Nous signalons avec plaisir l'apparition dece diction- naire, dont la principale originalité consiste à donner, outre la nomenclature des noms de Lieux, indispensable à tout volume de ce genre, un choix de 1oms de choses, de définitions, de renseignements relatifs aux diffé- rentes branches de la Géographie : atmosphère, mers, relief des continents, géologie, roches, végétations, terrains, animaux domestiques, peuples et races, cultures, industries, commerce, géographes, explora- teurs, cartographie, etc. La science de l’auteur, qui s'est d'ailleurs adjoint comme collaborateurs des géologues et des géographes compétents, MM. J. Blayac, I. Gallaud, J. Sion et A. Vacher, nous est un sûr garant de la valeur de l'ouvrage. Il s'y est glissé quelques petites incorrections, inévitables dans un manuel de ce genre. Ainsi, la capitale de la Bolivie est, depuis la révolution de 1899, La Paz, et non plus Sucre; Le Bourget est situé à 4 kilomètres au N. E. de Paris, et non à #1 kilomètres; Novibazar n'est pas l’une des trois villes principales de la Bosnie; elle fait partie d'un sandjak indépen- dant; il n'est pas fait mention de Beira, l'un des prin- cipaux ports de la côte orientale d'Afrique ; par contre, sa voisine, Quilimané, n'est pas reliée par une voie ferrée à Prétoria, ete. Mais ces légères imperfections pourront disparaître dans une seconde édition, que nous souhaitons prochaine. Pardé (L.). — Arboretum National des Barres. Enumération des végétaux ligneux indigènes et exotiques qui y sont cultivés. — 2 vol. grand in-8?, dont 1 vol. de texte (400 pages) et un vol. atlas (95 planches et plans). Librairie des Sciences naturelles P. Klincksieck. Paris, 1907. Les collections d'arbres que nous possédons en France ne sont pas nombreuses, mais celle qui se trouve dans le Domaine National des Barres offre un intérêt tout spécial par le nombre et le groupement en massifs des espèces contenues, ainsi que par leur ancienneté, qui permet de tirer des conclusions du plus haut ensei- gnement pratique. Ce domaine comprend 627 espèces ligneuses, tant européennes qu'américaines ou asiatiques, et plus de 250 variétés. Les premières plantations ont été effectuées par Ph. A. de Vilmorin, qui acheta le domaine en 1824 pour y introduire des espèces d'origines diverses. En 1866, l'Etat en devint acquéreur et y constitua un centre d'enseignement forestier et de contrôle pour les semen- ces, tout en augmentant considérablement les collec- tions. Un travail d'ensemble donnant le bilan de toutes ces richesses, mettant surtout en relief les résultats que l'on peut tirer de ce magnifique champ d'expériences presque séculaire, fait honneur à l'Administration qui en à assumé la direction et à l’auteur qui l’a entrepris. M. Pardé a catalogué toutes les espèces contenues dans le domaine, en les groupant par familles et par geures, suivant l'ordre adopté dans le Catalogue de Kew pour les feuillus et dans le W/anuel des Conifères de Beissner pour les résineux. Chaque espèce est indiquée par son nom latin et francais, avec mention du pays d'origine, la liste des synonymes, ainsi que les désigna- tions les plus communes en Amérique, en Allemagne et en Angleterre. Sans insister sur la description bota- nique, l'auteur résume les essais d'acclimatation qui ont déjà été tentés dans les différents pays d'Europe. Il montre, en s'appuyant sur des auteurs tels que Sar- gent, Cieslar, Schwappach ou Lavallée, les exigences au point de vue du climat et du sol, l'aptitude plus ou moins développée de chaque variété à se reproduire naturellement de semences dans nos régions, les qualités et les défauts du bois, variables suivant les conditions de croissance et les usages auxquels ces bois peuvent se prêter. Dans le groupe des Pins, par exemple, plus de 30 espèces sont décrites, ainsi qu'un grand nombre de variétés. Les plus importantes d'entre elles donnent lieu à une longue critique des résultats obtenus, car elles sont maintenant représentées dans le domaine par des futaies de générations différentes: les unes formées de sujets -issus de graines directement importées du pays d’origine, les autres obtenues par la germination des graines récoltées sur le domaine mème. Tels sont le Pin sylvestre de Riga, de Hagueneau, le Pin Laricio de Calabre et beaucoup d'autres. M. Pardé montre que, on is BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 513 sans exagérer l'importance des résultats d'expériences localisées en une seule région, certaines variétés restent supérieures aux autres et que, en outre, on ne perçoit pas de différence appréciable pour une même variété entre les différents massifs. Il serait à souhaiter que des expériences du même genre, entreprises dans d’autres régions, pussent permettre d'établir des points de com- paraison. Citons, parmi les autres genres abondamment repré- sentés les Chênes et particulièrement les Chênes d’Amé- rique, qui constituent un massif de plus de 10 hectares; les Epicéa, les Sapins, les Frènes, les Peupliers, etc. Cette analyse rapide montre que ce travail, loin d’être une énumération d'espèces, contient de nombreuses observations pratiques qui en font un véritable « traité de culture forestière » et qui dénotent de la part de l'auteur une érudition profonde du sujet. Resté, en effet, pendant plus de cinq années professeur à l'Ecole forestière des Barres, et ayant effectué de nombreux voyages à l'Etranger, M. Pardé se trouvait particulière- ment à même de mener à bien un travail de ce genre. Le volume de texte se termine par une longue table des matières, qui permet de retrouver de suite le genre ou l'espèce auxquels doivent être rapportés tous les noms français ou étrangers, ainsi que les synonymes latins figurant dans le texte; en outre, des remarques et des annotations nombreuses au bas des pages donnent des caractères pratiques précieux pour différencier des espèces parfois confondues. L'ouvrage est complété par un volume de planches qui contient 22 plans, indiquant la place exacte, dans le domaine, de chaque arbre signalé et des photographies parfaitement reproduites. G. FRON, Docteur ès-sciences, Chef des Travaux botaniques à l'Instilul national agronomique. 4° Sciences médicales Laveran (A.),, Membre de l'Institut et de l'Académie de Médecine.— Traité du Paludisme (deuxième édi- tion). — 1 vol. de 622 pages, avec 58 figures dans le texte et une planche en couleur. (Prix: 12 francs.) Masson et Ci°, éditeurs. Paris, 1907. C'est en 1880 que M. Laveran à découvert l'hémopa- rasite pathogène du paludisme et, depuis cette époque, avec une admirable et incessante activité scientifique, ce savant à consacré à l'étude du paludisme, des trypanosomiases et des maladies exotiques, un grand nombre de publications, de mémoires ou de livres, dont quelques-uns font époque et dont chacun apporte son contingent de connaissances neuves el précises. M. Laveran vient de faire paraitre une seconde édition de son Traité du Paludisme. Depuis la précédente édition, en effet, les notions que l’on possède sur l’étiologie de l'affection se sont considérablement raf- fermies et précisées. L'hypothèse émise pas M. Laveran, en 1884, sur le rôle des moustiques dans la propagation de l'hématozoaire, a été vériliée par les recherches de Ronald Ross, P.et Th. Manson, Jancson, Grassi, Bignami et Bastianelli, Schüffner, Schoo, etc. Les moustiques du genre Anopheles n'interviennent pas seulement, en effet, par l’inoculation du parasite qu'ils ont antérieu- rement absorbé en suçant le sang d’un paludéen. Ils servent encore de substratum indispensable à l'évolu- tion et àlareproduction sexuée de l'Hemamæba malari®. Celle-ci se fait dans l'estomac de l'Anopheles, d'où les sporozoïtes pathogènes, devenus libres après matura- tion des ookystes, se répandent dans le corps de l'in- secte et, spécialement, dans ses glandes salivaires. Cette découverte a transformé entièrement la pro- phylaxie du paludisme, partout où cette maladie exerce des ravages. Débarrassée des obscurités qui voilaient ses modes de transmission, la fièvre palustre, sous toutes ses formes, est aujourd’hui l’une des affections les mieux connues dans ses causes, sa prophylaxie et son traitement. Tels sont les divers points que M. Laveran à magis- tralement exposés dans la deuxième édition de son « Traité du paludisme ». On peut donc ajouter que ce dernier livre constitue une œuvre presque entièrement nouvelle. Pour avoir relégué au second plan les conditions climatériques et telluriques qui gouvernent l'affection, la découverte de l’hématozoaire et de sa transmission par les Anopheles, n'en a, cependant, nullement dimi- nué l'importance pratique. M. Laveran le faitressortir. Je note, à propos des conditions favorisantes indivi- duelles de l'infection palustre, que l’auteur ne partage pas l'opinion de R. Koch et de Firket sur la possibilité d'une immunisation spontanée par une atteinte anté- rieure. Si cette hypothèse offre quelque possibilité pour la race nègre, — bien que l'hémamibe fréquente com- munément le sang des noirs, mêmé adultes, — elle doit être rejetée pour les sujets de race blanche et les créoles, dont la réceptivité s'exagère même par un séjour prolongé ou un retour dans les pays palustres. L'étude morphologique et biologique de l’Hemamæba malariæ à fourni à M. Laveran l’occasion de défendre l'unité du paludisme. Golgi et, à sa suite, Canalis, Fr. Schaudinn, tendent à considérer au moins trois espèces de parasites: celui de la fièvre tierce, celui de la quarte et celui des fièvres tropicales. M. Laveran et plusieurs autres ont combattu la doctrine de la pluralité des hématozoaires. Les faits d'observation clinique, le résultat des inoculations expérimentales à l’homme, enfin l'étude microscopique du parasite dans un grand nombre de cas, témoignent certainement que les di- verses variétés de l'hématozoaire ne sont pas étroite- ment inféodées au type fébrile de l'affection. A l'étude très complète de l'hématozoaire, M. Laveran a joint un chapitre nouveau consacré au rôle des Culicides dans la propagation des parasites, ainsi qu'à la description de ces insectes et à leur répartition à la surface du globe. On trouvera, dans ce chapitre, les indications utiles pour la capture, la conservation et la dissection des Anopheles. La symptomatologie si polymorphe du paludisme, les complications que peut entraîner cette maladie, ne sont pas traitées avec moins d’ampleur. Il en est de même des lésions anatomo-pathologiques. N’est-il pas singulier, à cet égard, de constater que Chomel, Gri- solle, Rochard, Dutroulau, admettaient qu'il n'existe pas d’altérations constantes des viscères, dans le palu- disme? Privés du secours du microscope, les premiers observateurs ne pouvaient, en effet, vérifier l'existence du pigment et de la mélanémie. Je voudrais encore appeler l'attention sur la descrip- tion du traitement du paludisme et sur l'étude magis- trale qui est faite de la prophylaxie de cette affection. Si jamais l'importance des recherches pures de labora- toire avait besoin d'être défendue, elle trouverait sa justification, peut-être la plus éclatante, dans l'histoire du paludisme, de son parasite et du cycle évolutif de celui-ci dans le sang de l’homme et dans le tube digestif des Anopheles. La prophylaxie rationnelle du paludisme se réclame entièrement, en effet, de ces belles découvertes. Elle commande la destruction des moustiques et de leurs larves, la protection individuelle contre leurs piqûres, la défense mécanique de l'habi- tation, l'emploi préventif de la quinine, à côté des mesures hygiéniques générales relatives à l’assainis- sement du sol, à la culture, à l'habitat, au vêtement et à l'alimentation. Dans ce nouvel ouvrage de M. A. Laveran, on retrou- vera la description documentée, la manière à la fois sobre et complète, toujours très personnelle, qui ca- ractérisent les travaux de l'illustre savant. à D' H. VINCENT, ProS$esseur à l'École d'application du Val-de-Gräce. 514 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 27 Mai 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Fischer signale quelques applications de son théorème sur la conver- gence en moyenne. — M. M. Brillouin montre que la viscosité des liquides dépend, pour une proportion notable, de la diffusion des molécules, et pour une proportion moindre, quoique comparable, du transport de centre à centre au moment du choc. — M. G. Lipp- mann signale que M. Schwartzschild a décrit avant lui le collimateur vertical suspendu et que la priorité de cette invention lui appartient. — M. B. Baïllaud à reconnu que les positions des étoiles de repère con- cernant la planète Eros déduites des clichés de Tou- louse présentent divers écarts systématiques, qui dis- paraissent en modifiant légèrement le mode de réduc- tion des observations. — M. P. Salet a constaté que la lumière émise par les protubérances solaires n’est pas polarisée, contrairement aux déductions des théories de Schmidt et de Julius. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Hergesell présente les résultats de l'exploration de l'atmosphère libre au- dessus des régions arctiques. La décroissance de tem- pérature est très lente jusqu'aux plus hautes couches atteintes (0°,48 pour 100 m.); l'humidité augmente rapidement avec la hauteur. Les courant aériens sont d'abord des courants locaux, surmontés ordinairement d'une couche stagnante, à laquelle succèdent des cou- rants de circulation générale {rès vifs. — M. L. Besson donne une nouvelle théorie de l’anthélie, des paran- thélies et des halos blancs de Bouguer et d’'Helvélius, basée sur les assemblages polyédriques dans l’espace des cristaux prismatiques de neige décrits par M. Do- browolski. — M. M. de Broglie a observé dans les gaz issus des flammes la présence de centres électrique- went neutres, susceptibles de se charger sous l'in- fluence des radiations du radium ou des rayons de tontgen, en se transformant en centres chargés de faible mobilité analogues aux gros ions. — MM. H. Buisson et Ch. Fabry ont mesuré une série de lon- gueurs d'onde dans le spectre du fer pour l’établisse- ment d'un système de repères spectroscopiques. — M. H. Abraham a reconnu que, même avec le procédé d'amplification de M. Argyropoulos, la sensibilité du téléphone électrostatique polarisé reste très inférieure à celle du téléphone électromagnétique pour la trans- mission de la parole. — M. G. Gaïn, en combinant les bases alcalines avec l'acide hypovanadique en présence de l'acide sulfureux, a obtenu des sulfites doubles bien définis : 3(S02V°04).SO?K20.5H°0 ; SO®V?0:1.2(S02.Rb°0). 2H°0 ; 5(SO*V?0").SO2Na?0.2H°0, etc. — M. H. Pélabon a étudié la fusibilité des mélanges de Se et Sb. Quand la teneur en Se est comprise entre 27 et 46 °/,, le liquide de fusion est un mélange de PbSe et de Se. Par refroidissement, le séléniure se dépose d’abord et il reste une solution saturante de Se dans PbSe, qui se soliditie à 673° en se séparant de Se en excès. — M. R. Lespieau, en traitant par l’eau le dérivé magnésien du bromure d'allyle, a obtenu les éthers méthyliques des allyl- et propargyl-carbinols. — M. Goris a retiré des noix de kola fraîches un nouveau principe cristallisé, la kolatine, substance phénolique de formule C*H:°0*. il disparaît pendant la dessiccation de la graine. — M. À. Briot : Sur la présure du figuier (p. 516). 3° SCIENCES NATURELLES. — M. J. Tissot indique quelles sont les conditions physiologiques auxquelles doivent satisfaire les appareils respiratoires pour per- mettre sans danger le séjour et le travail de l'homme dans les atmosphères irrespirables. — M. Marage a déterminé le travail développé pendant la phonation et qui est exprimé par le produit VH du volume d'air qui s'échappe des poumons pendant un temps donné par sa pression. Les hommes, en particulier les voix de basse, se fatiguent beaucoup plus en parlant que les femmes et les enfants. — MM. A. Desmoulières et A. Chatin ont reconnu que l'action favorisante des eaux sulfurées sur le traitement mercuriel s'explique parce qu'elles augmentent la puissance solubilisatrice du sérum sanguin à l'égard des albuminates de mer- cure. — M. M. Ringelmann a mesuré le travail méca- nique fourni par 26 paires de bœufs de la race d’Au- brac. Une paire de jeunes bœufs, n'ayant pas encore toutes leurs dents de remplacement, fournit en travail normal un effort moyen de 197 kilogs à une vitesse moyenne de 0,65 mètre par seconde. — M.J. Pelle- grin a constaté que la gibbosité frontale, peu pro- noncée chez le Ptychochromis oligacanthus, atteint, au contraire, de grandes dimensions chez le Pbhetsi- leanus ; elle paraît transitoire et précéderait la période du frai. — M. H. Coutière a observé que la durée de la vie larvaire chez les Eucyphotes est extrêmement variable, chaque espèce différant de ses voisines sous ce rapport. — M. P. Berthon a fait un certain nombre d'observations qui sont contraires à l'hypothèse d’os- cillations du rivage dans la baie du Callao, formulée par certains savants. — M. G. Deprat a étudié les manifestations volcaniques dans la région du Logoduro: et du Campo d'Ozieri, en Sardaigne ; on n’y trouve pas moins de quinze cônes importants, avec de nombreuses coulées et bouches de sortie, — M. J. Bergeron con- clut, de la continuité des dômes du terrain houiller dans le bassin de-Saarbruck et dans celui de la Lor- raine française, à la continuité d'allure de tout le houiller. — M. R. Zeiller a étudié les empreintes végé- tales fournies par les sondages houillers de Meurthe- et-Moselle. Il en déduit que les sondages de Pont-à- Mousson, Atton et Epply appartiennent à l'étage des charbons gras, ceux de Dombasle à la zone des flambants supérieurs, ceux de Lesménils à la zone des flambants inférieurs. Séance du 3 Juin 1907. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. C. Caratheodory signale quelques applications du théorème de Landau- Picard. — M. E. Goursat présente ses recherches sur les invariants intégraux. — MM. Loewy et P. Pui- seux montrent qu'il y a peu de raisons de croire que les volcans lunaires soient dus au bombardement de notre satellite par des corps détachés de la Terre en mème temps que la Lune et qui seraient tombés sur cette dernière après la formation d'une croûte déjà épaisse. 20 ScrencEs PHYSIQUES. — Le P. Ed. El. Colin a ob- servé que la déclinaison magnétique à Tananarive & diminué de 9/16", par bonds successifs, de mai 1906 à avril 4907; l'inclinaison a diminué de 919" et la com- posante horizontale de 0,000.38. — MM. H. Abraham et Devaux-Charbonnel décrivent les modifications qu'ils ont apportées au galvanomètre à cadre mobile pour courants alternatifs de Fun d'eux, afin de l'uti- liser à la détermination des amplitudes, de la puissance et des phases des courants téléphoniques.— M. P. Sève montre qu'en envoyant une force électromotrice alter- native dans un condensateur, il chantera à l’octave aiguë du courant, tandis que l'adjonction d’un voltage continu le fait chanter à l'unisson. — M. Wologdine | Le ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 5415 à plaque photo- présente un pyromètre enregistreur les graphique fixe, propre surtout à déterminer courbes de refroidissement et d'échaufflement des corps. — M. G. D. Hinrichs décrit un appareil con- tinu à pression constante pour la préparation de l'oxy- gène dansles cours et pour l'analyse. C'est un appareil de Kipp dans lequel on fait agir de l’eau oxygénée acidulée par H?SO* sur de la pyrolusite. — Sir W. Ramsay annonce que, contrairement aux assertions de M. Lebeau, Le gaz préparé par M. Prideaux est bien de l’hexafluorure de sélénium et non un oxyfluorure. — M. Em. Vigouroux, en faisant réagir SiCl® sur Ag, n'a obtenu aucune combinaison de Si avec Ag. Avec Cu, la limite de siliciuration par SiCl‘ en excès tend vers 2,7 °/,, ce qui correspond au composé Cu''Si. — MM. F. Bodroux et H. Taboury, en faisant réagir l'éthéro-iodure de Mg sur les éthers-sels des acides gras a-bromés, ont obtenu les éthers-sels des acides ras «æiodés correspondants. — M. J. Hamonet, en aisant réagir un éther formique HCO?R sur le dérivé magnésien RO (CH®}MgX, a obtenu un diéther RO (CH2)}'CHOH(CHE)"OR, qui, traité par PCI, puis réduit, fournit un éther bi-primaire RO (CH?)%+ OR. Ii a pré- paré de cette façon le 1 : 7-diméthoxyheptane, Eb. 189°- 190. — M. L. Henry, en faisant réagir CH*MgBr sur le mésoxalate d’éthyle, a obtenu la dioxyacétone tétra- méthylée : (CH*)*C(OH). CO.C(OH)(CH°)°, F. 1170-1189. — M. A. Guyot, en précipitant par AzH* les solutions des sels des éthers tétralkyldiamidodiphénylglycoliques, a obtenu des éthers tétralkyldiamidodiphényl-ami- doacétiques, ou leucauramines exocarboxylées. L'oxy- dation par le ferricyanure de K les transforme instan- tanément en auramines. — M. H. de Béville à étudié l'action des dérivés organomagnésiens sur les alkyli- dène-cétones cycliques. — M. H. Duval à constaté que, lorsqu'on diazote le diaminodiphénylméthanedi- carbonate d’éthyle à température un peu élevée, le tétrazoïque formé réagit sur lui-même en donnant naissance à un composé bis-azoique mixte : C PS Re C2H°CO?.C°H5. Az : Az Az: Az.C°H°.COCU, F. 280° avec décomposition. — M. J. M. Albahary dé- crit une nouvelle méthode de séparation et de dosage des acides organiques dans les fruits et les légumes. — M. P. Carles à reconnu le fluor dans les coquilles des mollusques non marins. Le fluor est plus répandu qu'on ne le supposait dans les eaux de rivière et de marais ; il existe aussi dans les feuilles dont se nour- rissent les escargots. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. H. Vallée décrit, sous le nom de cuti-réaction, un nouveau procédé de diagnostic expérimental de la tuberculose : chez les animaux tuberculeux, le dépôt, sur une surface cutanée rasée et scarifiée, de quelques gouttes de tuberculine brute provoque, au bout de 2% heures, une réaction cutanée manifeste, nulle chez lesanimaux sains. — M. A. Mouneyrat à constaté que, sous l'in- fluence de la ventilation que produit la pratique de l'automobilisme, le nombre des globules rouges el le taux de l’hémoglobine s’accroissent dans de grandes proportions, ainsi que les phénomènes de nutrition. — M. N. A. Barbieri a étudié la structure du névraxe après avoir détruit, par les solutions d'acides faibles, le conjonctif intramédullaire (névroglie). — M. P. Lesne à déterminé les parasites xylophages du Mani- çoba : le principal est un Coléoptère curculionide du genre Coelosternus ; les galeries creusées par les larves sont quelquefois le point de départ des galeries d'un Scotylide du genre Xyleborus. — M. Ed. Heckel à observé, sous l'influence de la superfumure en pots, des phénomènes de mutation gemmaire culturale chez le Solanum tuberosum. — M. Gard à constaté, par l'étude anatomique, que le Cistus Pouzolzii est une espèce autonome. Le C. Creticus doit être rattaché au. C. sillosus, le C. candidissimus au C. vaginatus. — M. Pauchet a reconnu que, toutes les fois qu'une anthère présentera une assise sous-épidermique non lignifiée, à éléments cellulosiques disposés comme chez le charme, le chêne et le hêtre, la déhiscence aura lieu en place. — M. E. Gourdon à étudié un microgranite alcalin recueilli sur la terre de Graham par l'Éxpédition antarctique Charcot. C'est une roche probablement filonienne d'un type fort rare, à ranger dans la catégorie des microgranites à aegyrine et riebeckite. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 4 Juin 1907. M. le Président annonce le décès de M. M. F. RôlI, correspondant étranger de l'Académie. M.H. Benjamin présente un Rapportsur le concours pour le Prix Louis Boggio. — M. H. Hallopezu conclut d'une série de 120 observations que l’anilarsinate de soude exerce, comme l'a établi M. Paul Salmon, une action puissante sur l'agent infectieux de la syphilis et constitue un agent de traitement spécifique égal, sinon supérieur, à ses deux aînés. Les infections secondaires associées, de même que les deutéropathies syphilitiques, semblent lui être réfractaires. On arriverait probable- ment à guérir la syphilis par les injections d’anilarsi- nate de soude si l'on pouvait les renouveler assez long- temps à doses suffisantes; malheureusement, on est constamment arrêté, après un nombre variable de ces injections, par des accidents d’intolérance. On peut les éviter en limitant à un petit nombre les injections, n'employant les doses élevées que pour les deux pre- mières, en espaçant les suivantes et en les arrètant dès l'apparition des sensations anormales.— M. L. Jacquet donne lecture d'un mémoire sur le traitement simple de certaines dermatoses. — M. Wallich lit un travail sur l’étiologie de quelques albuminuries gravidiques. — M. Bar présente un mémoire sur l'épidermisation de l’épithélium de l'amnios dans l'oligo-hydramnie. — M. Bonnaïre donne lecture d'un travail sur une série de 19 opérations césariennes, pratiquées à l'hôpital Lariboisière. Séance du 11 Juin 1907, MM. A. Chantemesse et Kahn montrent que l'hyper- leucocytose provoquée par l'injection sous-cutanée de nucléinate de soude est particulièrement utile pour prévenir ou modérer l'évolution d'une péritonite ayant son point de départ dans l'infection des organes que recouvre la séreuse : péritonite spontanée ou péritonite provoquée par une intervention chirurgicale \appendi- cite, etc.). Mème si elle ne guérit pas la péritonite aiguë, elle accroît les chances de succès d’une opération chi- rurgicale consécutive. — M J. Lucas-Championnière estime qu'il faut opérer le rein flottant et que l'opéra tion est indiquée, non seulement par les phénomènes douloureux accompagnant un abaissement manifeste, mais surtout par les troubles nerveux et tous les phé- nomènes de déchéance. La gravité des troubles nerveux n'est pas une contre-indication, mais elle est une indi- cation formelle à l'intervention ; même des cas d’alié- nation ont été heureusement influencés par l'opération. _- M. Maygrier donne lecture d'un mémoire sur l'éle- vage et la survie des prématurés nés à la Maternité de la Charité (1898-1907). — M, Ch. Moureu lit un travail sur les dégagements gazeux des sources thermales. — M. Béclère décrit un nouveau procédé de localisation des corps étrangers métalliques intra-oculaires : la sté- réoradiographie avec repères cornéens. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 27 Mai 1907. M. Lassablière a extrait des huîtres fraîches une substance qu’il nomme ostréo-congestine, car, injectée dans le sang des lapins, elle provoque la mort avec des phénomènes de congestion intense des organes. — 516 MM. L. Le Sourd et Ph. Pagniez ont observé que les hématoblastes purs, isolés du sang, sont susceptibles de provoquer la coagulation du fibrinogène desliquides d'hydrocèle. — MM. Léopold-Lévi et H. de Rothschild signalent quelques petits incidents qu'ils ont remarqués au cours du traitement thyroidien et qui font partie de ce qu'on appelle communément le nervosisme. — MM. E. Jeanselme et Barbé ont trouvé 39 fois de la lymphocytose du liquide céphalo-rachidien sur 53 sujets syphilitiques examinés. La lymphocytose est extrème- ment fréquente dans la céphalée et la roséole, mais non constante. — MM. Piquand et Dreyfus ont observé plusieurs cas d'albuminurie transitoire, au cours de l'anesthésie lombaire expérimentale par la stovaine. — MM. M. Breton et G. Petit ont constaté, dès le début &e la fièvre typhoïde, une diminution de l'index cyta- sique ou opsonisant du sérum, précédant l'apparition de la réaction agglutinante, qui en est d’ailleurs indé- pendante. — MM. H. Busquet et V. Pachon ont mis en évidence la nature tétanique imprimée à la contrac- tion cardiaque par la vératrine; cette tétanisation pro- vient de l'augmentation notable de l'excitabilité de la fibre musculaire, — MM. Sacquépée et Loiseleur ont reconnu qu'à l’élat normal le sang de la circulation générale chez les animaux est presque toujours stérile, même pendant la période digestive. L'infection san- guine hétérogène expérimentale ne peut y être réalisée qu'exceptionnellement. — M. G. Lafon propose une méthode de dosage rapide du glucose par la liqueur de Fehling, avec addition d'une forte quantité d’alcali pour empêcher toute précipitation et maintenir la liqueur incolore. — M. E. Bataillon montre que la segmenta- tion parthénogénésique chez les Anoures a pour stock chromatique initial la plaque équatoriale de la deuxième figure polaire. — M. M. Letulle communique ses re- cherches sur le carcinome plasmodial, qui constitue un exemple typique de parasitisme épithélial normal. — MM. G. Péju et H. Rajat ont étudié les réactions des bactéries vis-à-vis des matières colorantes : les unes restent indifférentes; les autres fixent énergique- ment la couleur; d'autres, enfin, fixent la couleur et la détruisent. — M. G. Péju a observé deux abcès térébenthinés provoqués dans un but thérapeutique et qui contenaient de nombreux staphylocoques. MM. L. Nattan-Larrier et A. Brindeau ont constaté qu'à l'état normal les parois utérines sont infiltrées de nombreux éléments cellulaires caractéristiques, dans lesquels il est facile de reconnaitre des cellules plas- modiales, éléments d’origine fœtale. — M. F. Battelli et Me L. Stern montrent que, dans les muscles de bœuf ou de cheval, existent une ou plusieurs substances qui augmentent les combustions des muscles frais de lapin et de cobaye; ces substances se laissent extraire par l’eau. — M. E. Maurel étudie l'influence des prin- cipales voies d'administration sur la dose minima mor- telle de sulfate de spartéine pour la grenouille et le lapin. — M. P. Remlinger conclut, d'expériences faites sur le chien et le lapin, que l'inoculation de virus fixe seul possède un pouvoir immunisant supérieur à celle du sérum antirabique ou du mélange virus-sérum. — MM. L. Alquier et L. Theuveny ont observé des alté- rations du foie et des reins consécutives aux ablations de la thyroïde et des parathyroïdes chez le chien. — M. Ch.-A. François-Franck a étudié, par la chrono- photographie, les mouvements actifs et passifs des branchies flottantes respiratoires et locomotrices. — MM. H. Vaquez et Aubertin ont observé une hyper- plasie médullaire des glandes surrénales chez un malade atteint de néphrite chronique avec hypertrophie con- sidérable du ventricule gauche. Séance du 1° Juin 1907. MM. A. Gouin et P. Andouard ont constaté un abaissement des dépenses vitales chez les Bovidés au début de l'existence. — M. Ch. Remy signale un cas de trichinose chez un malade qu'il opérait pour un néoplasme de l'omoplate; la présence des kystes para- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES sitiques n'a pas empêché les muscles de se réunir sans suppuration. — MM. M. Doyon, CI. Gautier el A. Poli- card montrent que l’ablation du foie détermine chez la grenouille des lésions rénales très nettes, localisées au segment à bordure striée. — MM. Sacquépée et Loïi- seleur ont reconnu que le froid, la chaleur, le refroi- dissement et l'injection hypertonique sont quatre facteurs énergiquement favorisants de l'infection san- guine chez le cobaye, le lapin et le rat. — M.H. Vin- cent a également observé que l'hypecthermie et les solutions hypertoniques de NaCl favorisent certaines infections en diminuant la résistance de l’organisme. — M. E. P. Fortin est parvenu a observer la fovea par vision entoptique en agitant devant l'œil un disque opaque percé d’un trou sténopéique et en se servant d’un éclairage monochromatique bleu pur. — M. Ch. Porcher a constaté que le chromogène qu'on retrouve dans l'urine après administration d'éthylindol n'est pas un conjugué indoxylique vrai. — M. Ch. Hervieux montre qu'il n'y a pas lieu d'attribuer à l'indoxyle une réelle toxicité pour l'organisme. — M. H. Vaquez a reconnu que l’action du nitrite de soude sur la cireu- lation est des plus variables suivant les sujets; la dose eflicace est séparée de la dose dangereuse par un faible écart, ce qui constitue un réel inconvénient. — M. L. Camus a étudié les ferments solubles de l'agent vaccinal sur des solutions de vaccin;il n'y a trouvé qu'un ferment coagulant. — M. A. Combault a observé, chez l'Heliodrilus Calignosus, que le sang chemine d'avant en arrière dans les quatre vaisseaux ventraux; de là, il gagne le vaisseau dorsal en fournis- sant les capillaires intestinaux et tégumentaires. — M. H. Piéron n'a pu mettre en évidence, dans le sang défibriné des animaux insomniques, l'existence d’une substance hypnotoxique, capable de reproduire nette- ment le besoin de sommeil quand on injecte ce sang à des animaux normaux. MM. R. Legendre et H. Piéron ont constaté, après un sommeil réparateur, le retour à l'état normal des cellules nerveuses altérées par l'insomnie expérimentale. — M. R. Legendre montre que l'aspect des neurofibrilles intracellulaires peut varier beaucoup avec la méthode d'imprégnation employée. — MM. A. Gilbert et M. Herscher ont observé une polycholie accusée dans l'ictère grave, capable de produire une cholémie égale à celle réa- lisée par l'obstruction complète des voies biliaires. — MM. M. Garnier et L. G. Simon ont reconnu qu'une modification du régime alimentaire (régime carné chez le cobaye et le lapin) peut amener l'apparition de microbes intestinaux, surtout anaérobies, dans le sang. — MM. L. Lapicque et P. Girard ont constaté que la domestication des animaux a pour effet de diminuer le poids de l’encéphale. — MM. M. Loeper et J. Ficai montrent que l'amylase urinaire est un ferment d’origine extra-rénale et la lipase urinaire un ferment d’origine rénale; la lipasurie notable indique la désintégration du parenchyme rénal. — M. G. Rosenthal a observé que le microbe anaérobie de reconstitution annule l’aérobisation et revient à la biologie anaérobie complète. — M. H. Roger a reconnu que le suc gastrique annihile rapidement l'action amy- lolytique de la salive et que la neutralisation du mélange ne permet pas au ferment de reprendre son action. Mais il suffit d'ajouter une trace de salive fraiche pour qu'une abondante saccharification se produise. — M. H. Iscovesco a constaté que la bile, qui contient des pigments électronégatifs, peut diffuser dans un mélange solide composé de gélatine, lécithine et oval- bumine. Cette diffusion peut être empêchée ou activée suivant le sens du courant que l’on dirige à travers ces milieux. — M. E. Guyenot montre que le nerf vague, à côté de son action ralentissante, possède une action antitonique sur le cœur, qui est limitée à la période diastolique. — M. L. Cruveilhier a reconnu que, de même qu'un sérum peut être actif sans renfermer de fixateur, un sérum peut contenir un fixateur sans pos- séder aucun pouvoir thérapeutique. Te . ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 517 M. O. Josué est élu membre titulaire de la So- ciété. Séance du 8 Juin 1907. M. E. Guyénot a reconnu que le pneumogastrique droit seul agit sur la fréquence du cœur en la ralen- tissant; les deux pneumogastriques diminuent le - tonus du muscle cardiaque. — MM. M. Loeper et J. Ficaïi montrent que la lipase est un produit de la cel- - lule rénale; elle s'élève notablement dans la plupart des lésions rénales. — M. Al. Carrel a transplanté la cuisse d'un chien sur un autre chien: la circulation se rétablit dans le membre transplanté et les tissus se cicatrisèrent, mais l'animal mourut, entre temps, de septicémie. — M. E. Maurel a étudié l'influence des principales voies d'administration sur les doses minima mortelles de convallamarine pour la grenouille, le - pigeon et le lapin. — M. L. Tixier montre que les ulcérations du pylore déterminées chez le lapin par l’action de HCI sont suivies d'une destruction impor- tante des hématies. — MM. M. Villaret et L. Tixier ont observé que le liquide céphalo-rachidien après la mort renferme de nombreuses cellules épithéliales de revêtement appartenant aux plexus choroïdes. — MM. A. Gilbert et M. Herscher signalent l'existence, au cours de la colique de plomb, d'une polycholie accusée, contrastant avec l'atrophie au moins appa- rente du foie. — M. A. Sicre à constaté l'existence d'une sensibilisatrice spécifique dans le sérum des animaux immunisés contre le Aicrococcus melitensis et dans le sérum des malades atteints de fièvre médi- terranéenne ; elle paraît être indépendante du pouvoir agglutinant. — MM. L. Nattan-Larrier et A. Brindeau montrent que les cellules géantes intermusculaires de l'utérus gravide sont des éléments migrateurs dérivés de l’ectoderme villositaire; la cellule plasmodiale dé- rive de lacellule de Langhans.— M. A.Calmette estime que l'intestin normal est perméable à beaucoup d’es- pèces microbiennes. Le sérum normal des animaux sains possède des propriétés nettement bactéricides à l'égard des microbes hôtes normaux de l'intestin de ces mêmes animaux. Les microbes pathogènes qui traversent l'intestin peuvent infecter l'organisme lors- qu'ils ne rencontrent pas une défense suffisante. — M. A. Besredka a reconnu qu'on peut empècher ou, au moins, atténuer les accidents d’anaphylaxie : 4° en chauffant le sérum; 2° en faisant usage des narco- tiques. — M. R. Legendre a éludié la disposition des neurofibrilles dans les cellules à noyau ectopique. — MM. Sacquépée et Loiseleur ont constaté que le même microbe qui, à l'état virulent, se trouve capable de réaliser chez l'animal normal une infection sanguine, perd cette propriété lorsqu'il se trouve avirulent. — M. E. Fauré-Frémiet montre que l'£pistylis galea est très voisin, par tous ses caractères anatomiques, de la Campanella. — Me A. Drzewina et M. G. Bohn, en faisant agir diverses solutions salines sur les embryons de Rana temporaria, après l’éclosion, ont reconnu que le stade pendant lequel se fait l'operculisation est une période critique, car alors apparaissent des monstruo- sités caractéristiques. — M° L. Lapicque a observé que la strychnine exerce une action sur l’excitabilité du nerf moteur, accélératrice à dose faible, ralentissante à dose forte. — M. F. Repiton propose un procédé de dosage de AzH° basé sur sa combinaison avec l’aldéhyde acétique. — M. G. Rosenthal a reconnu que la sporu- lation aérobie du vibrion septique, du bacille d'Achalme et du bacille du tétanos crée des races nouvelles aérobies de ces germes, qui gardent les propriétés biologiques du germe anaérobie. — MM. E. Brissaud et Bauer ont observé, chez le lapin ictérique, une augmentation de la résistance des globules rouges. — MM. H. Roger et L. G. Simon ont constaté que la salive, momentanément annihilée par le suc gastrique, est capable, dans le duodénum, au contact du suc pancréatique, de collaborer activement à la sacchari- fication de l’amidon. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 21 Mai 1907. MM. Alezais et Imbert ont enlevé, chez un garcon de six ans, une tumeur précoccygienne à laquelle l'exa- men histologique conduit à attribuer une nature para- sympathique. — M. A. Briot a constaté que la coagu- lation du lait frais par le suc de figuier est retardée ou empèchée par l'existence dans ce lait d’une antiprésure. La chaleur détruisant cet anti-ferment, le lait stérilisé se trouve de ce fait plus facilement coagulé que le lait frais. — M. C. Gerber montre que la cloison de la silique des Crucifères ne peut pas être considérée comme formée par la duplicature des régions latérales de deux carpelles vasculaires, ainsi que le voudrait la théorie de Celakowski. — Le mème auteur à reconnu que l'arc libéroligneux renversé de l'Aubrieta deltoidea a une double origine : sa région centrale provient de l'arc primitif valvaire, et ses parties latérales des ares pri- mitifs placentaires. — M. L. Bordas à étudié la struc- ture des glandes cutanées ou glandes sternales des Ves- pidae. — M. L. Perdrix a déterminé la résistance des spores du Bacillus subtilis aux différentes températures dans une atmosphère saturée de méthanal. La désin- fection d'un appartement par le méthanal est d'au- tant plus rapide que la température est plus élevée, — M. J. Livon a étudié le cordon ombilical dans la syphilis; on ne trouve pas de lésions spécifiques pro- prement dites. SOCIETE FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 17 Mai 4907. M. H. Ollivier : Expériences de capillarité. Les gouttes d'eau de moins de 10 mm. c. qui s'échappent d'un orifice percé dans une paroi enduite de cire, puis enfumée, sont de volume constant; elle ne présentent pas, comme les grosses gouttes, de ligament visible, ni de goutte satellite. Le ménisque restant en arrière est de volume négligeable; il n’y a plus à distinguer la goutte tombée de la goutte totale. Leur volume est donné par la loi de Tate corrigée de la pression hydro- statique ; il diminue quand la durée de formation des- cend au-dessous de { ou 2 secondes. Toutes les compli- cations qu'on rencontre dans l'étude des gouttes dis- paraissent par l'emploi des petites gouttes. 1° Propriétés nouvelles des petites gouttes. La formation des gouttes à un orifice très petit et non mouillé présente deux périodes : une période d'attente @,, après laquelle la goutte perle brusquement; une période de grossisse- ment lent @,, après laquelle la goutte tombe. 0, — 0 si l'appareil est rigide et sans fuite. Si le liquide est en contact avec un corps élastique de volume v, 0, est proportionnel à v et au coefficient d'élasticité du corps. On met ainsi en évidence non seulement la compres- sibilité des gaz, mais encore celle des liquides et des solides. On peut, par exemple, mesurer par ce procédé le coefficient de compressibilité de l'eau, compri- mée par la pression capillaire d'une petite goutte. 20 Phénomènes de rejaillissement. Une goutte d'eau qui frappe une surface solide ne rejaillit que dans un seul cas : celui où la surface n’est pas touchée par l’eau (surface enduite de noir de fumée, d'anhydride arsé- nieux, etc.). Pour les petites gouttes, le phénomène se réduit à une subdivision de la goutte en deux goutte- lettes, dont la plus petite est projetée très haut, suivant la direction de la normale. Le phénomène est régulier ; les gouttes projetées suivent des trajectoires toujours les mêmes, indépendantes de la nature de l'enduit pul- vérulent. On peut s'en servir pour apprécier de faibles changements dans la composition des liquides de grande tension superficielle. Pour une hauteur de chute donnée, la hauteur atteinte par la goutte qui rejaillit donne la valeur de la tension superficielle vraie, et non pas celle que l’on mesure par les méthodes statistiques : la différence est très notable avec les solutions col- loïdales (oléates). Quand on fait varier la hauteur de 518 ACADÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES chute, la hauteur de rejaillissement passe par une série de maxima el de minima qui correspondent aux espaces parcourus par la goutte pendant les périodes successives de sa vibration. 3° Chronophotographies. Les chronophotographies représentant le choc des gouttes sur les surfaces enfumées, sur les surfaces enduites de cire et sur l’eau, montrent, dans le cas du rejaillisse- ment régulier sur le noir de fumée : 4° l’aplatissement de la goutte, d'abord par gradins, puis complet; 2° l'afflux de liquide vers l'axe de la goutte et la production d'un jet central qui entraine toute la goutte; 3° le décou- page, par la tension superficielle, du cône soulevé en sphérules dont la première, animée d'une plus grande vitesse, se détache; 4° la vibration du reste de la goutte. Dans le cas de l’eau tombant sur la cire, le rejaillisse- ment est empêché par l’adhérence normale de l’eau à la cire. Le rejaillissement de l’eau sur l’eau se compli- que généralement du phénomène des gouttes roulantes. — M. Pierre Sève rappelle qu'une flamme de gaz d'éclai- rage convenablement réglée constitue un manomètre très sensible qui a déjà été employé en particulier par M. Rubens et par M. Been. Un tube en T recoit du gaz par sa tubulure centrale. Le gaz s'échappe librement à l'un des orifices et est enflammé à l'autre. On règle l'inclinaison de l’appareil pour obtenir une grandeur de flamme facilement reconnaissable (partie éclairante minimum par exemple). Le niveau inférieur du tube est presque déterminé à { mm. près. Une surpression à l’orifice non allumé se traduit par une variation de la longueur de la flamme; on peut compenser cette surpression en abaissant l'extrémité allumée. De cette dénivellation et de la connaissance des poids spécifi- ques de Pair et du gaz d'éclairage, on déduit la surpres- sion, La sensibilité de ce manomètre (le millimètre d'air) est comparable et peut-être supérieure à celle de lap- pareil à xylène de Tôpler ou du manomètre à deux liquides (Krebs, M. Le Chatelier). En plaçant l'orifice non allumé dans l'entrefer d'un électro-aimant donnant un champ H, on peut ainsi mettre en évidence et même mesurer la susceptibilité K de l'air (celle du gaz est KH° négligeable) par suite de la surpression qui se 2 produit quand on excite l'électro. L'orifice enflammé doit être abaissé. de 2 cm. environ pour 10.000 gauss. On peut opérer sur l'oxygène ou sur un autre gaz à l’aide d'une cuve convenable entourant les pièces polaires, ouverte par le haut et traversée par un courant du gaz considéré. M. Sève montre ainsi que l'oxygène est 5 fois plus magnélique que l'air et que le gaz car- bonique ne l’est sensiblement pas. ; SOCIETE ROYALE DE LONDRES Séance du 17 Janvier 1907. MM. E. F. Bashford, J. A. Murray et W. Cramer présentent leurs recherches sur la résistance naturelle et induite des souris à la croissance du cancer. Is ont constaté que les souris chez lesquelles un carcinome à l’état de développement a été absorbé spontanément peuvent être complètement protégées contre l’inocula- tion subséquente de la même tumeur et, à un degré moindre, contre celle d’autres tumeurs. De la même facon, l’immunité suit l'absorption de tumeurs après exposition au radium. La protection peut être induite — ou,quand elle existe naturellement, renforcée — par l'inoculation d'un fragment de tumeur quand aucune croissance ne s'est produite. Cette protection est spéci- tique et ne peut être induite chez les souris que par inoculation de tumeurs de la souris. La protection peut être également induite par l'inoculation de tissus nor- maux de souris, en particulier du sang. — M. Ch. Bol- ton a étudié la pathologie de lhydropisie produite par l'obstruction des veines caves supérieure et infé- rieure et de la veine portale. Il montre que l'hydropisie se produit quand les veines et les capillaires sont dis- tendus et quand le sang coule avec une vitesse réduite, et elle dépend probablement ‘entièrement d'un état { d’altération des parois des vaisseaux et non d'une alté- à ration de la nutrition des tissus. L'augmentation de pression capillaire ne joue aucun rôle dans la produc- tion de cet œdème, non plus que la pression artérielle, qui peut être normale ou inférieure à la normale. — M. C. C. Dobell présente ses observations sur le cycle évolutif de l'Adeleaovata À. Schn., parasite de l'intestin du Lithobius forfcatus. 11 a également découvert, chez le même animal, une nouvelle Grégarine. Séance dn 31 Janvier 1907 (fin). MM. H. B. Dixon et L. Bradshaw ont étudié lex- plosion du gaz électrolytique pur par l'analyse photo- graphique de la flamme explosive dans le gaz sec et humide. Pour autant qu'on peut en juger d'après la nature de la flamme, les expériences montrent que l'absence de vapeur d'eau n'influe pas sur l'explosion d'un mélange d'oxygène et d'hydrogène une fois que la flamme a été allumée par une étincelle. — M. L.- Bradshaw : L'allumage des mélanges qazeux par com- pression. Dans les expériences précédentes sur l’ex- plosion du gaz électrolytique, l'auteur a dbservé un nouveau phénomène : il consiste en une onde lumi- neuse, partant d'une extrémité du tube à explosion, et s’avançant à la rencontre de la flamme explosive qui jaillit de pointes métalliques au milieu du tube. L'auteur attribue cette inflammation spontanée du gaz à une onde de compression qui se meut, d’après les mesures prises, avec une vitesse à peu près égale à celle d'une onde sonore. — M. W. N. Hartley : Sur la thermo-chimie des spectres de flammes à des tempéra- tures élevées. 4° Les oxydes de calcium, de strontium et de baryum ne sont pas dissociés par la chaleur seule, parce qu'ils ne présentent pas de spectre dans une flamme d'oxyde de carbone; 2° Ils sont réduits par l’action combinée de la chaleur et de l'hydrogène dans la flamme oxyhydrique et par l’action du cyanogène dans la flamme du cyanogène; 3° La coloration de la flamme est due au métal, parce que non seule- ment le spectre de flamme de la chaux est exacte- ment le même que celui du calcium, mais aussi les chaleurs de formation de CaO, Sr0O et BaO ont presque la même valeur, et que là où l’oxyde de calcium peut être réduit, les autres oxydes pourraient, par consé- quent, subir une réduction identique. Que le composé pis de strontium ou de baryum dans la flamme soit un - sulfure ou un oxyde, le même spectre se produit; mais on n'est pas certain que le sulfure de baryum ne soit pas converti en oxyde par la vapeur d'eau de la flamme. L'explication, donnée par Lenard, de la colo- ration de la flamme par les sels alcalins semble ne pas être applicable à la coloration de la flamme de l’oxyde de carbone par les sels haloïdes des métaux alcalino-terreux. Séance du 21 Fevrier 1907. MM. G. A. Buckmaster et J. A. Gardner : La déler- mination du chloroforme ‘dans le sang des animaux anesthésiés. Les auteurs arrivent aux conclusions sui- vantes : 4° La méthode de détermination du chloro- forme basée sur la réaction de Dumas, quoique ne pos- sédant pas un haut degré de précision, est cependant suffisamment exacte pour la plupart des besoins pra- tiques; telle qu'elle a été employée par M. Nicloux, elle est simple et rapide, et capable de donner des résultats satisfaisants pour la détermination de petites quantités de chloroforme dans l'air ou en solution simple, comme! dans l'urine. 2° Dans le cas où le sang des animaux anesthésiés à été coagulé avant le mélange avec l'alcool acide, les résultats donnés par la méthode de Nicloux sont uniformément trop faibles. 3° Si la coagulation a été empêchée par l’oxalate, les résultats se rapprochent de la vérité, tout en étant encore un peu faibles. 4° Il est probable que la méthode de Nicloux donne des résultats trop faibles quand on l’applique aux organes ou tissus qui ne se désintègrent pas quand on les fait bouillir avec l'alcool acide. — M. Percy Groom : La symétrie longitudinale chez les Phanérogames. Ce Mémoire décrit une méthode graphique pour relever les distances longitudinales qui séparent les membres es plantes et donne les résultats obtenus par cette méthode, comme suit : Sur un papier quadrillé, les entrenœuds successifs (ou autres segments) sont enre- istrés comme ordonnées successives, et la courbe qui en résulte est appelée la courbe des entrenœuds (ou utre courbe). Dans une plante type, la courbe des entrenœuds de l'axe principal est une courbe réguliè- rement ascendante-descendante, tandis que celles des branches successives, en commençant à la base de la plante, changent plus ou moins complètement et gra- duellement de cette courbe complète en une courbe purement descendante. Ces courbes d’entrenœuds sont inhérentes aux diverses espèces, quoique capables de .- modifications sous des conditions extérieures variables. Chez les Chénopodiacées à feuilles alternes, la courbe des entrenœuds présente invariablement une forme en zigzag périodique, et en réunissant les ordonnées alternes, elle peut être divisée en deux «sous-courbes » qui sont fréquemment non synchrones comme pé- riode. Les deux sous-courbes de l'axe principal sont du type ascendant-descendant, tandis que celles des branches successives, tracées à partir de la base, chan- . gent plus ou moins dans la forme purement descen- dante. Des deux sous-courbes une est la « sous-courbe des entrenœuds » et l’autre est « la sous-courbe de déplacement ». L'auteur donne des preuves en faveur . de l'hypothèse que la phyllotaxie originale des Chéno- - podiacées est opposée, que la sous-courbe d'entrenæud représente une modification de la courbe d'entrenœud - originale et que la sous-courbe de déplacement repré- sente une série de segments intercalés, enregistrant “les distances jusqu'auxquelles les feuilles simples ont été déplacées de lu disposition opposée originale. Cette hypothèse est confirmée par le fait qu'une courbe de déplacement identique est formée en enregistrant les hauteurs des branches successives au-dessus de leurs feuilles sous-tendantes chez certaines Borraginées. On prouve aussi que les Borraginées ont probablement des feuilles opposées et que, chez le Solanum Dulcu- mare, les déplacements familiers de la feuille le long de la tige sont dissimulés par d'autres placées au-des- sous. — Ml: M. Wheldale présente ses recherches sur l'hérédité de la coloration des fleurs chez l'Antirrhi- AU INAJUS. “4 Séance du T Mars 1907. M. A. Mallock a recherché une expression qui représente d'une facon générale Ja résistance de l'air. Il arrive à la conclusion que la résistance d'un corps se mouvant dans un gaz compressible peut être repré- sentée par une somme de trois termes : 1° la pression positive sur l'avant ; 2° la pression négative sur l'ar- rière ; 3° la force nécessaire pour engendrer les ondes gazeuses qui accompagnent le corps. Il arrive à deux formules pour les projectiles à pointe et à avant plan qui concordent assez bien avec les résultats de l’expé- rience. — M. J. T. Bottomley communique un certain nombre d'expériences faites sur des électroscopes à feuilles d'or dans lesquels on à fait le vide et qui montrent que les variations de la température exté- rieure exercent un effet mécanique sur les feuilles, effet dont la cause exacte n’a pu être encore élucidée. — M. M. W. Travers a étudié l'absorption de l’eau par le coton et la laine soigneusement desséchés. En portant en abscisses les quantités d’eau absorbées et en ordonnées les pressions, on obtient des courbes con- caves du côté des ordonnées, contrairement aux résultats de Trouton. — MM. R. S. Hutton et J. E. Petavel ont étudié es réactions du four électrique sous de hautes pressions gazeuses. La formation du carbure de cal- cium dans une atmosphère de CO à la tension de 760 millimètres ne diminue pas d'une facon appréciable le rendement. Si le carbure est refroidi dans une ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES “A 519 | | | atmosphère de CO, une réaction inverse à lieu au point de solidification, mais elle est limitée à la surface du lingot. L'aluminium métallique peut être produit au moyen d'Al°0* et C par une reaction purement thermi- que; la température la plus basse à laquelle cette réaction ait lieu coïncide avec le point de fusion de l’alumine ; le métal est d'abord produit sous forme de vapeur. 1907. M. A. E. H. Love étudie la stabilité qravitationnelle de la Terre. Il y a des raisons dynamiques de croire que la lithosphère s’est consolidée suivant un certain type de forme, et que sa forme actuelle est approxima- tivement de ce type. Il parait donc probable que la forme n'a pas changé beaucoup, mais que la plupart des changements qui ont eu lieu dans la consolidation sont de la nature d’ajustements de la figure à des con- ditions dynamiques changeantes. — M. T. H. Laby a déterminé /ionisation totale de divers gaz par les rayons de l'uranium. L'oxyde U°O$ à été choisi comme source de rayons x. L'auteur a obtenu les valeurs sui- vantes pour l'ionisation totale, celle de l'air étant prise comme unité : Az°0, 0,99; AzH*, 0,90; CO*, 1,03; C*H°, 4,27; C5H!?, 4,345 ; CHSCHO, 4,05; (C2H°)°0, 1,29; CH°Br, 1,02; CHSCT, 1,18; SO®, 0,94. Si l'on compare ces valeurs avec celles qu'a obtenues M. Bragg pour l'ionisation due aux rayons + du radium, on constate une concor- dance remarquable. Ces valeurs vérifient également les hypothèses de Kleeman et de Bragg, d'après lesquelles l'ionisation moléculaire spécifique (ionisation par unité de volume) est une propriété atomique additive et est approximativement proportionnelle au volume de la molécule ionisée. — M. R. D. Kleeman à étudié /l'10- uisation de divers gaz par les rayons «, 6 et y. Pour les rayons «, les nombres trouvés par l’auteur sont à peu près identiques à ceux de la communication pré- cédente. Si l'ionisation est bien une quantité additive. la quantité d'énergie nécessaire pour faire un ion d’un atome de ces différents gaz est indépendante de la combinaison chimique. Les particules « dépensent la moindre quantité d'énergie pour ioniser les atomes de soufre et la plus grande quantité pour ioniser ceux d'azote. L'ionisation totale due aux rayons y est la sui- vante, celle de l'air étant toujours prise comme unité : NEA 1015 CU 1/08 CHA LE CH*°CHO, 1,42 ; (C?H°)°0, ,#1 ; CHE, 1,16; C?H°CI, 1,42 1,39; O?, 1,04. L'i0- es produite par les rayons B est presque CrOPtES ment la même que celle que produisent les rayons + ces deux ionisations sont également des proprié ‘tés additives. — M. Francis Gotch : Les enregistrements par lélectromètre capillaire des changements élec- triques pendant le battement naturel du cœur de qre- nouille. Voici les principaux points communiqués dans ce mémoire : 1° Les changements électriques pendant l'activité rythmique naturelle du cœur de grenouille, lorsqu'il est conservé in situ et alimenté de sang, res- semblent dans tous les points essentiels à ceux qui ont été observés par Walter, Starling, Bayliss, Eintho- ven, etc., dans le cœur des Mammifères, mais ne cor- respondent pas avec ceux qu'ont observés Engelmann, Burdon-Sanderson, etc., dans le ce de grenouille excisé et excité artificiellement; 2° Le caractère plus prolongé de l’activité du cœur de IL et la faci- lité avec laquelle la place d’un changement quelc onque peut être déterminée prouvent clairement que le trait spécial du battement naturel est l'existence de deux variations électriques principales de même signe ; 3° Ce fait peut s'expliquer parce que le premier changement ou « changement de base » est plus prolongé et d'une amplitude plus grande que le « changement de som- met »; 4° L'augmentation d'amplitude du changement de base est principalement causée par le fait que, quoique le changement de base se produise le premier, l'ensemble de la base n'y participe pas entièrement, la partie environnant la naissance de l'aorte restant en repos jusqu'à ce que l’activité se soit transmise au Séance du 1% Mars 220 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES sommet; cette partie aortique, devenant alors active, produit l'effet terminal; 5° Chaque onde de contraction, partant ainsi de la jonction auriculo-ventriculaire, se propage au sommet et retourne du sommet à la partie de la base qui environne la sortie de l'aorte; de là, elle se répand jusqu'au bulbe aortique; à 15° C. la vitesse de propagation est d'environ 130 millimètres par se- conde, c'est-à-dire que 6/100 de seconde après le pre- mier changement de base, un changement de sommet est perceptible, et 6/100 de seconde après celui du som- met, on observe un second changement de base aor- tique ; 6° L’onde de retour se manifeste lorsque le cœur est distendu par le sang, et elle est associée avec la persistance de la condition tubulaire primitive du cœur qui prévaut dans le cœur du crapaud; 7° L’onde de retour se révèle dans les enregistrements sous forme d’un double renversement de la condition électromo- trice du contact de toute la base; elle est d’abord gal- vanométriquement négative (activité de base), puis tout à coup positive {activité de sommet), et ensuite encore soudainement négative (seconde partie aortique de l'activité de base). Ces faits sont confirmés par des enregistrements faits dans des conditions variées, comprenant des altérations de température locales, des lésions locales et des changements de position des contacts de l'électromètre. ù SOCIETE DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 2% Mai 1907. M. A. Campbell a mesuré l'inductance mutuelle à l'aide d’un galvanomètre à vibration par la méthode de Carey Foster, qui compare cette inductance à une capacité, mais en la modifiant légèrement par l’addi- tion d'une résistance en série dans la branche du con- denseur. Cette modification laisse inaltérée la formule M — KRy, qui donne l'inductance en fonction de la capacité K (en farads) et des résistances R et r:. L'auteur présente un galvanomètre à vibration d’un nouveau type, qui possède une bobine mobile contrôlée par une suspension bifilaire ajustée. — MM. W. Wilson et W. Makower ont observé qu'après avoir équilibré l'ionisation produite par les rayons « du radium C par celle que produisent les rayons 6 et ; plus pénétrants, au bout d'un certain temps les deux ionisations ne sont plus exactement égales. Cet effet est attribuable aux rayons $ de faible mobilité émis par le radium B présent avec le radium Cet dont la période de décrois- sance est différente. — M:$S. G. Brown présente des appareils de relai pour les longs câbles télégraphiques sous-marins. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 16 Mar 1907. MM. W. Barlow et W. J. Pope montrent qu'il n'existe que deux assemblages compacts homogènes simples de sphères, l'un possédant la symétrie cubique holoédrale, l’autre la symétrie hexagonale holoédrale avec le rap- port axial a:c —1:0,8165. Les assemblages homogènes compacts de deux ou plusieurs espèces de sphères se rapprochent de l’un ou l’autre de ces types ou d’une combinaison des deux. Toutes les formes cristallines connues présentées par les éléments peuvent être inter- prétées au moyen de ces principes géométriques. — M. J. Hubner a étudié quantitativement l'absorption des matières colorantes basiques, acides et directes par le coton, la laine et la soie à diverses températures, et l'a comparée à celle du charbon de bois, du graphite, de la terre de Chine et du noir de fumée. Les fibres ani- males se comportent vis-à-vis des colorants comme le charbon de bois, tandis que le coton se comporte comme le graphite. Ces deux derniers sont pratique- ment inaffectés par les colorants acides, à froid et à chaud, tandis que la laine ou le charbon de bois les absorbent, — MM. J. J. Sudborough et E. R. Thomas ont déterminé les constantes d’éthérification des acides acryliques substitués; l'existence d’une double liaison en position 45 diminue la vitesse d'éthérification. — MM. J. J. Sudborough et G. Williams ont constaté que les deux acides 4&-bromocinnamiques, traités par Br, donnent le même acide ze$-tribromo-£-phénylpro= pionique, F.1510-152°, tandis que les deux acides & fournissent le même acide 25£-tribromo-6-phénylpro- pionique, F.1469-1470. — MM. J. J. Sudborough et J. Thomas ont étudié l'addition du brome aux acides oléfiniques à 15° en solution de CCÉ. Les acides ayant la double liaison en 45 ne réagissent que lentement à l'obscurité; la lumière solaire accélère la réaction. Les autres acides réagissent en quelques minutes. —M.J.J. Fox propose une méthode de séparation du Cd et du Zn, basée sur la précipitation du premier à l’état de sulfure en présence d'acide trichloracétique.— MM.J.B. Cohen et W.E. Cross expliquent comme suit le méca- nisme de la bromuration des composés acylaminés : CH.CH*.AZH.COCH*— CHS.CSH.AzBr°H.CO.CH— CHS. CSH#.AzBr.COCH* — CH°.CSHBr.AzH.COCHS. — M. G. D. Lander, en traitant par les alkyloxydes de Na les chlo- rures d’amide des oxanilates de méthyle et d'éthyle, a obtenu les anilido-semi-ortho-oxalates triméthylique et” triéthylique, F.80°-829 et 69-70°,5. — MM. W. H. Perkin jun. et R. Robinson, en condensant l’o-hydroxybenzal-M déhyde avec l'acétophénone ou l'hydrindone, ont obtenu. des dérivés du 1:4-benzopyranol, voisins de certains dérivés de la brésiléine et de l'hématéine. — MM. J.T." Hewitt et Th. F. Winmili ont préparé le diiodure d'arsenic et reconnu par l'ébullioscopie dans CS? qu'il possède la formule As'I*. — M. F. J. Thorpe a constaté que le y-imino-x-cyano--phénylbutyrate d'éthyle, traité par H?SO* concentré froid, se condense en 1 : 4-naphty- lènediamine-3-carboxylate d'éthyle. L'acide correspon- dant, chauffé à 200° dans un courant d'H, donne la 4:4-naphtylène-diamine. — M. S. J. M. Auld a observé que tous les pseudo-acides contenant le groupe CO.A7H donnent avec le mercure des sels mercuri-acides, for- mant eux-mêmes des sels alcalins. — MM. J. B. Cohen et H.J. Hodsman ont constaté que, parmi les nitro- et chloronitrotoluènes, ceux qui contiennent le groupe nitro en ortho sont le moins rapidement oxydés, tandis que ceux qui le renferment en para sont le plus oxydés; les composés méta occupent une position intermédiaire. — M. R. E. Slade a reconnu que la magnésie peut être réduite par le carbone à une température inférieure au point d'ébullition de la magnésie.— MM. R. H. Pickard et J.Kenyon, en traitant le p-nitrotoluène par un halo- génure organo-magnésien,ontobtenu un composé jaune qui est décomposé par les acides avec formation de p-nitrosotoluène, p-tolylhydroxylamine, pp'-azoxyto- … luène et p-toluidine. — M. T. S. Moore présente une méthode pour la détermination de l'équilibre en solu- tion aqueuse des amines, pseudo-acides et bases, et lac- tones, basée sur la mesure de la répartition de la sub- stance entre l'eau et un autre solvant. Il applique les résultats à la détermination des constantes d'ionisation vraie et d'hydratation de la pipéridine, de lammoniaque et de la triéthylamine. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES ï SECTION DE LIVERPOOL Séance du 13 Mars 1907. M. W.-C. Williams communique les analyses d'un certain nombre de rhums de la Jamaïque. Voici la composition moyenne d'un rhum ordinaire : alcool, 19,1 °/, en volume; solides totaux, 0,43 gr. par 100 ce.; acides totaux, 78,5 gr. par 100 |. d'alcool; acides vola- M tils, 61 gr. par 100 L.; éthers 366,5 gr. par 100 lit.;. alcools supérieurs, 98,5 gr. par 100 1.; furfural, 4,5 gr. par 1001.; aldéhydes, 15,3 gr. par 100 1. Le rhum « par- fumé », qui est le résultat d’une fermentation spéciale et qui est employé seulement pour des coupages, con- tient en moyenne plus du double d'éthers. — M. F. Bale CR PES 4 ‘ ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 521 signale un nouveau procédé pour le traitement des résidus des salines, qui contiennent généralement 889/ de NaCl, 10 °/, de gypse et 2 °/, de sulfate de Na et Mg. Il consiste à les faire bouillir avec 4 fois leur poids d'eau, ce qui les dissout complètement en laissant une - solution saturée de sel et un dépôt de gypse. Séance du 10 Avril 4907. M. W.-F. Reid indique que, malgré la production « relativement abondante du caoutchouc à notre époque, on a trouvé intérêt à régénérer le caoutchouc des objets hors d'usage (pneumatiques, semelles, etc.) pour l'employer de nouveau dans l'industrie. Cette produc- tion de caoutchouc régénéré atteint 10.600 tonnes par an aux Etats-Unis; elle est aussi très importante en Angleterre. Ce caoutchouc régénéré est de qualité infé- rieure à celle du caoutchouc naturel. SECTION DE LONDRES Séance du 8 Avril 1907. M. H. de Mosenthal a étudié quelques propriétés du coton et du coton nitré (cellulose et nitrocelluloses). En lumière polarisée, la couleur observée passe du blanc au jaune, à l'orange, puis au bleu à mesure que la nitra- tion est plus élevée. La densité, qui est de 1,61 pour la cellulose du coton, augmente légèrement avec la nitra- tion : 1,67 et 1,66 pour les di et trinitrocelluloses. L'in- dice de réfraction diminue un peu avec la nitration. Entin, la nitrocellulose en solution est douée d'un pou- voir rotatoire droit. — MM. E.-A. Mann et T.-N.Kirton communiquent les analyses de quelques eaux-de-vie naturelles et falsifiées. SECTION DE MANCUESTER Séance du 8 Février 1907. M. W.-F.-A. Ermen propose la méthode suivante pour l'examen des amidons commerciaux : L'amidon est mis en suspension dans l’eau froide, puis on y ajoute rapidement une solution à 40 °/, de NaOH et on agite continuellement jusqu'à ce que la solution commence à s'épaissir. On mesure alors sa viscosité, qui est carac- ristique pour chaque sorte d'amidon. Séance du 5 Avril 1907. M. W.-B. Hart a étudié l'influence de la condition physique et de la composition chimique du plomb com- mercial sur sa durée dans les chambres de concentra- tion de Pacide sulfurique. Un état physique défectueux du plomb peut provenir d'une mauvaise fusion ou d'un excès de pression dans le laminage des feuilles. Il se traduit soit par une mauvaise structure, avec Joints de cristaux développés, par où peuvent se produire des fuites ; soit par une rupture de l’arrangement molécu- laire, produisant une surface plus attaquable par l'acide. Une composition chimique défectueuse résulte de la présence d'impuretés, qui agissent : {° physiquement, par la formation d’alliages très fusibles (surtout avec Bi etSn), sources de perforation locale du plomb; 2° chimi- quement, par augmentation d'action de l'acide sur le plomb; la présence de Sb est particulièrement à redou- ter, tandis que Cu, As et Ag ont peu d'effet. SECTION DE Séance du 22 Mars 1907. NEW-YORK M. E. C. Worden a déterminé la so/ubrilité du per- mauganate de potassium. Voici quelques valeurs trouvées : 4° C., 3,145 °/, ; 400, 4,21; 200, 6,11 ; 30°, 8,31; 400, 411,44; 500, 44,35 ; 609, 48,03; 700,.22,24; 750, 24,44. — M. H.S. Riederer propose une méthode de trai- tement pour les plaies chromiques, fréquentes chez les ouvriers des fabriques de chromates et bichro- mates ; elle se produisent partout où une petite quan- tité de ces composés peut entrer sous la peau, et s'étendent considérablement en devenant très doulou- reuses. En les lavant avec une solution de bisulfite de soude à 5 °/,, celui-ci réduit l'acide chromique à l'état d'hydrate de chrome, qui est inoffensif, et la plaie guérit rapidement. Cette méthode a été employée avec succès dans plusieurs fabriques. SECTION DE NOTTINGHAM Scance du 26 Mars 1907. MM. J. Golding et H. B. Hutchinson ont étudié la culture de 1 betterave à sucre dans la région du Midland (Angleterre). Les engrais artificiels contenant de l'azote, de la potasse et des phosphates, tout en maintenant la qualité de la racine, ont augmenté le rendement en sucre par acre. Des quatre variétés essayées, la variété Kleinwanzleben à fourni le plus haut renderaent en sucre. Les terres grasses et fermes conviennent le mieux à la culture de la betterave, tandis que les sols tourbeux sont tout à fait impropres. La meilleure distance entre les racines a été de 36 à 48 cm. è SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 22 Mars 1907 (fin). M. W. Biegon von Czudnochowski présente une contribution à l'histoire de nos connaissances relatives à l'ionisalion des gaz. Il fait remarquer que, contrai- rement à l'opinion courante, il existe un certain nombre d'observations, antérieures aux recherches de Coulomb, sur la déperdition de l'électricité, et qui font ressortir les caractères essentiels de l’ionisation d’une facon bien plus frappante que les expériences de ce savant. Certains phénomènes ont même été, dès l’ori- gine, expliqués d’une façon bien en harmonie avec nos connaissances actuelles, C’est ainsi que Priestley, dès 1767, décrivait une expérience de Nollet, suivant laquelle le fer incandescent décharge, à la chaleur blanche, les corps positivement chargés. M. J. Cavallo (en 1779) signale des expériences analogues et montre que le métal incandescent, étant approché d'un éela- teur, y déclanche des étincelles, — la charge restant égale, — pour des distances plus grandes des électrodes que le métal froid ou le verre incandescent. L'approche d'une flamme produit les mêmes effets, tandis que la lumière du Soleil, concentrée par un miroir concave, reste ineflicace. Comme enfin ces effets sont détruits par l'interposition, entre le corps incandescentet l'écla- teur, d'un morceau même extrèmement mince de verre ou de toute autre substance, ces observateurs anciens émettaient l'opinion que la décharge était due à une «émanation » rendue par la flamme ou le corps incan- descent. D'autre part, une lettre de Benjamin Franklin, adressée, le 1° septembre 1747, à M. P. Collinson, décrit les décharges produites par la lumière d'une bougie ou celle d’un corps incandescent, mais jamais sous l'action de la lumière du Soleil concentrée par un miroir. L'auteur vient de répéter l'expérience de Franklin, qu'il trouve illustrer d’une facon très frap- pante et fort commode tous les phénomènes caracté- ristiques de l'ionisation par les corps incandescents. — M. Br. Glatzel décrit les mesures qu'il vient de faire dans les circuits oscillatoires. Les méthodes indiquées par l'auteur sont destinées à éliminer les effets nui- sibles des fluctuations d'énergie. Bien qu'il s'agisse en premier lieu de mesures de capacités, même minimes, on étend sans peine aux mesures de self-inductions les méthodes imaginées par l'auteur et qui se basent sur des dispositifs différentiels utilisant la résonance. — M. H. Starke décrit un appareil de démonstration des différences de phases de deux courants alternatifs. L'axe de l'alternateur (ou, de préférence, celui d’un petit moteur synchrone actionné par ce dernier) porte un disque de carton noir d'un diamètre d'environ 15 à 20 centimètres, sur lequel on a collé une bande radiale étroite de papier blanc. Dans le cas d'un éclai- rage continu, ce disque présente une coloration uni- formément blanche. Lorsque, au contraire, cet éclai- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES rage est remplacé par des éclairs lumineux inter- mittents, se produisant avec l'alternance même du courant (de facon que chaque éclair coïncide avec la tin d'une période entière), le rayon blanc sera vu immo- bile. Cet éclairage alternatif est facilement fourni par les étincelles de décharge d'une bouteille de Leyde reliée à une bobine d’induction actionnée par le même alternateur. Comme les étincelles se reproduisent après chaque demi-période, le rayon se présente en deux positions diamétrales, traversant le disque sous la forme d’un diamètre blanc dont la position est modifiée suivant la phase de l’étincelle éclairante, illustrant ainsi les différences de phase. — M. E. Ladenburg adresse une Note sur l'effet photo-électrique aux tem- pératures élevées. Une explication de l'effet photo- électrique à été donnée, en 1902, par M. Lenaïd, qui a fait voir que la lumière ultra-violette possède la faculté de produire une émission d'électrons négatifs partant de plaques métalliques négativement chargées. Ces électrons n’empruntent point l'énergie repré- sentée par leur vitesse initiale à la lumière (laquelle ne fait qu'amorcer ce phénomène). En effet, la vitesse des rayons est indépendante de l'intensité de la lumière, tandis que le nombre d'électrons déclanchés varie en raison directe de cette dernière. L'énergie des élec- trons projetés doit donc exister dans les électrons avant l'action de la lumière. Il fallait done s'attendre à ce que l'intensité de l'effet photo-électrique fût accrue par une augmentalion de l'énergie des élec- trons, réalisée, par exemple, en augmentant la tempé- rature de la plaque exposée à la lumière. L'auteur vient de faire des expériences destinées à élucider cette question, en se servant d'un vide assez avancé pour que les parcours libres des électrons soient con- sidérablement supérieurs à la distance des électrodes. Les résultats de ces expériences font voir qu'un accroissement de 800° de la température de la plaque n'influe en rien ni sur le nombre ni sur la vitesse des électrons déclanchés par la lumière. — MM. P. Nord- meyer et À. L. Bernouilli ont déterminé la chaleur spécifique de certains éléments, alliages et composés entre — 1859 et Æ 209, en appréciant, par des pesées, la quantité d'air liquide vaporisée par une quantité pesée de la substance en essai. — M. F. Neesen vient de com- parer huit parafoudres à haute tension, de formes dif- férentes, et un paratonnerre à plaques télégraphique, au point de vue des effets protecteurs qu'ils sont capables d'exercer en dérivation sur le circuit élec- trique qu'ils sont destinés à protéger. Une augmen- tation de l'effet protecteur est due, non pas à une réduction des résistances chimique ou inductive, mais, semble-t-il, à la production d'oscillations élec- triques. — M. W. Biegon von Czudncchowski décrit un dispositif de mise en circuit pour appareils à vide, servant à la démonstration des phénomènes de décharge électrique. Ce dispositif évite les inconvé- nients de ceux dont on s’est servi jusqu'ici, à savoir leur longueur excessive et leur maniement difficile. Séance du 3 Mai 1907. MM. J. Franck el R. Pohl adressent un Mémoire sur la mobilité des ions dans l'hélium. Leurs recherches ont été exécutées au moyen d'un dispositif qui leur avait servi auparavant pour déterminer les mobilités des ions au sein de petites quantités de gaz; elles cons- tituent, semble-t-il, le premier ensemble d'expériences pareilles sur un gaz mono-atomique. La mobilité de l'hélium se trouve n'être inférieure, suivant l'état actuel de nos connaissances, qu'à celle de l'hydrogène, ce à quoi il fallait s'attendre, la mobilité des ions gazeux étant inversement proportionnelle à la racine du poids moléculaire. — MM. E. Gehrcke et O. Rei- chenheim adressent une troisième Note sur les rayons anodiques. Ils y étudient les déviations électrique et magnétique, déviations dont le sens s'accorde avec l'hypothèse d'un rayonnement composé de particules positives. De leurs recherches, les auteurs tirent la conclusion que les rayons anodiques constituent phénomène parfaitement analogue aux rayons cath diques. Ils possèdent, en effet, les caractères essentiels de ces derniers, transportant des charges électriques projetant des ombres bien définies des corps placé sur leur chemin, étant verticaux à la surface de l'éle trode, subissant des déviations électriques et magn tiques et excitant la fluorescence des corps qu'ils fra pent. ALFRED (GRADENWITZ. ACADEMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 28 Février 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. F. Hocevar : Sur l& détermination des diviseurs quadratiques des form algébriques. — M. W. F. Meyer : Sur la théorie de torsions et des quaternions. — M. J. Zahradnicek : Sur la théorie des surfaces de second ordre, qui sont définies par le tétraèdre polaire et le point milieu. — M. R. Girtler propose de mesurer le danger de rup- ture des corps élastiques déformés par le potentiel des forces de tension. 29 SCtENCES PHYSIQUES. — M. G. Jaumann expose sa théorie du rayonnement dans les champs électroma= gnétiques élevés. Pour lui, tous les rayonnements élec. tromagnétiques sont accompagnés d'oscillations chi- miques, et les propriétés matérielles (coefficient diélectrique et pouvoir conducteur) d'un milieu soumis à un rayonnement subissent de petites modifications rapidement périodiques. Il arrive à des équations plus générales que celles de Lorentz. — M. K. Siegl a étudié l'effet Doppler sur les rayons-canaux dans l'oxygène. — MM. S. Meyer et E. von Schweïidler ont séparé de l'actinium un produit de décomposition radio-actif, à rayonnement peu pénétrant, non volati- lisable au rouge et à constante de décroissance de douze jours. — M. G. Hofbauer a reconnu, par des études spectrales, que le Soleil renferme principale- ment, comme terres rares : Yt, Sc, La, Ne et Ce; les autres s'y trouvent en très faible quantité. — M. R. Stummer, en condensant l'anhydride phtalique avec le carbazol, à obtenu surtout l'acide carbazol-Az-carbonyl o-benzoïque et peu d'acide cétonique. Avec l'oxyde de: biphénylène, on obtient, par contre, principalement l'acide biphénylène-oxyde-céto-0-benzoïque. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. F. Hochstetter : Sur. la manière dont les embryons de la tortue de marais se débarrassent de leurs enveloppes et dont les jeunes de cet animal quittent l'œuf. — M. F. Steindachner décrit d'abord une nouvelle espèce de Psilichthys, le P. came- roni, trouvée dans le fleuve Cubutao (Etat de Sainte- Catherine, Brésil; puis trois nouvelles Characinées, les Tetrayonopterus sanctae Filomenae, victoriae et costae, et un Corydoras, le C. raimundi, trouvés dans le Rio Parnahyba. — M. K. Byloff communique ses re- cherches sur la structure et la conduite biologique des Trypanozoon Lewisi et Brucei. Séance du T Mars 1907. 1° Sciences PHYSIQUES. — MM. F. Exner et E. Has chek ont constaté, par des mesures sur les spectres du La, du Nd et du Pr, que les lignes spectrales, observées. au réseau à échelons, montrent, ainsi que leurs satel= lites, une grande variabilité avec les conditions di luminosité, dans ce sens que, pour une densité de vapeur croissante, les satellites du côté du rouge croissent toujours plus rapidement en intensité. Done, malgré la constance de la longueur d'onde des radia= tions isolées, il y a un déplacement du maximum d'intensité. — M. N. Stucker a observé que la sensibi- lité aux différences de tons varie beaucoup dans les diverses régions sonores. — M. H. Bouvier : Augmen- tation de la conductibilité calorifique de l'air à l’état comprimé. — M. Zd. H. Skraup a constaté que 1 désamidoglutine fournit comme bases hexoniques de l'arginine, de l'histidine, mais pas de lysine. A la place | de cette dernière, on obtient un picrate soluble, dont Rs nn — à ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 223 la décomposition fournit de l'acide aminooxyvalérique et de l'acide aminovalérique. 20-SCIENCES NATURELLES. — M. R. Wagner a étudié la morphologie du genre Creochilon. — M. A. Nalepa décrit un nouveau champignon des galles, l£riophyes bartschiae, qu s'attaque aux feuilles de Bartschia alpina. Séance du 14 Mars 1907. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. W. F. Meyer : Sur le traitement algébrique d'un théorème fondamental de Staudt dans la Géométrie de position. — M. E. Weiss : Sur le calcul d’une trajectoire elliptique au moyen de deux rayons et de l'angle compris. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Kirpal a observé que l’éthérification de l'anhydride quinolique par l'alcool méthylique fournit surtout l’éther . Les deux acides cinchoméroniques isomères possèdent la même con- stante d'affinité. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. F. Siebenrock présente ses recherches sur une famille de tortues, les Cinos- ternidae, qu'il constitue avec les genres Claudius, Staurolypus et Cinosternum, les deux premiers con- stituant la sous-famille des Staurotypinae et le dernier celle des Cinosterninae., — M. K. Holdhaus expose les résultats de ses excursions zoologiques en Italie. La faune de Coléoptères de la Sicile a un bien plus grand nombre d'espèces communes avec le Nord de l'Afrique qu'avec le continent tyrrhénien. Par contre, l'ile d'Elbe, par sa faune de Coléoptères, se rattache étroitement au continent tyrrhénien. Séence du 21 Mars 1907. 1° SCIENCES PHYSIQUES. MM. R. Schneider et J. Kremar ont mesuré le rayonnement nocturne à Vienne; il atteint son maximum en septembre entre 9 heures et 10 heures du soir. Une surface horizontale de 1 cm* rayonne en moyenne 71 gr.-cal. par une nuit claire entre 8 heures du soir et 3 h. 3/4 du matin, — M. K. Pribram a vérifié sur l'hélium et l’acétylène la loi d’après laquelle le faisceau positif, dans la décharge touffue, surpasse le négatif en dimensions d'autant plus que la mobilité des ions négatifs dans le gaz con- sidéré est supérieure à celle des ions positifs. De l'aspect du faisceau dans l’argon, on déduit que le ranport des deux mobilités, encore inconnu pour ce gaz, est supérieur à 1,43, valeur de l'hélium. — M. P. Cermak a déterminé l'effet Peltier pour le fer-constantan entre 0° et 560° C.; les valeurs par coulomb en gr.-cal. Sont : 09, 3,4; 200, 3,6; 1300, 4,5; 2400, 6,2; 3200, 8,2; 5609, 12,5 X 10 —%. — M. H. Walter a déterminé l'état d'équilibre de la réaction Na*C0* + Ca(OH} 7 CaCO* + 2NaOH à 890 et à 106°-110. La caustilication est plus complète à SO. M. H. Walter ont étudié les conditions d'existence des carbonates doubles calco-sodiques. Les solutions calco- sodiques en équilibre à 41° renferment de la gaylus- site ; à 40° et au-dessus, de la pirssonite, — M. A. Kaïlan montre que la constante de la formation de C?H°CI, au moyen de HCI et C?H*OH, calculée d'après l'équation d’une réaction monomoléculaire, n’est indépendante de la concentration en HCI que dans l'alcool absolu; dans l'alcool contenant de l’eau, la constante prend une valeur d'autant plus grande que la concentration en HCI est plus forte. — Le même auteur à constaté que la vitesse d'éthérification de l'acide 1 : 2 : 4-dinitroben- zoïque par l'alcool à 99,9 °;, et au-dessus, à 25°, est proportionnelle à la quantité d'HCI présente. — MM. M. Kohn et O. Morgenstern, en traitant l’éthvldiacéto- nalkamine par HBr fumant et distillant avec KOH le produit de la réaction, ont obtenu l'Az-éthyl-æyy-trimé- thyltriméthylène-imine. L'iodométhylate, transformé en base ammonium, et distillé avec KOH, fournit le 2-méthyl-2-méthyléthylaminopentène, avec lequel on peut préparer un hydrocarbure C‘H%, le 4-méthylpen- tadiène. — MM. M. Kohn et K. Schlegl ont fait subir à la diméthyldiacétonalkamine un traitement corres- R. Wegscheider et | da éparé des dérivés homologues aux pré- pondant et préparé des d homolo: at cédents. — M. M. Kohn à obtenu, par action du chlorure de benzyle sur la diacétonalkamine, la ben- zyldiacétonalkamine et de la tribenzylamine. — Le même auteur a constaté que les méthylcétones non saturées se condensent avec les amines pour former des bases cétoniques, qui sont réductibles en amino- alcools correspondants. — MM. M. Kohn et J. Giaconi ont préparé par la méthode précédente, à partir de l'-isométhylhepténone et de la méthylamine, le 2-méthyl-#-méthylaminoheptanol. — M. E. Mayerhofer a étudié les produits de condensation de l’aldéhyde p-diméthylaminobenzoïque avec la dibenzylcétone et la phénylacétone en présence de HCI. — MM. Zd. H. Skraup et R. Witt ont fait agir l’eau de brome sur la caséine et étudié ensuite les produits de l'hydrolyse, qui sont assez différents des produits d'hydrolyse de la caséine normale. 20 SCIENCES NATURFLLES. — MM. E. Finger et K. Land- steiner ont expérimenté sur un virus syphilitique obtenu au bout de deux ans après passage sur trente- deux singes. Il est encore très virulent pour le chim- panzé. Mais, inoculé aux singes inférieurs, il se trans- forme en devenant très virulent pour le Macacus rhesus et en perdant sa virulence pour le chimpanzé,. 1] paraît possible d'arriver par cette voie à préparer un vaccin. — M. V. Apfelbeck présente ses recherches sur la faune des Coléoptères du Montenegro et de l'Albanie. — M. F. Heritsch signale la découverte d'un gisement de Carbonifère inférieur à Productus giganteus dans la zone des « grauwackes » des Alpes orientales. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 26 Avril 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — Rapport de MM. Schoute et Cardinaal sur le mémoire de M. F. Schub intitulé : Sur Je lieu des points du plan dont la somme des dis- tances à n droites données est constante, et les pro- blèmes analoques dans les espaces à trors et à plusieurs dimensions. En considérant les éléments géométriques « plan, droite, point » du titre comme des espaces &,, £,, & à deux, une, aucune dimensions, on trouve sans peine la généralisation suivante du problème posé « Dans l’espace &, à p dimensions, on donne 7 espaces =; déterminer le lieu des espaces &, dont la somme des distances aux z espaces &, donnés égale une constante donnée ». L'auteur s'est restreint au cas r —0, où il s’agit du lieu d'un point. Dans le premier chapitre, il suppose q = p + 1, pour les cas p— 72,3, m; ici, il con- sidère la distance d’un point à un espacé &» _1 comme une quantité toujours positive, de manière qu'il trouve dans le plan un polygone convexe, dans l'espace un polyèdre convexe et dans l'espace &, un polytope con- vexe; de ce polytope, il fait connaître les nombres d'Euler et d'autres caractères particuliers. Dans le second chapitre, il traite par l'analyse le cas de » droites données dans notre espace; ici, il remplace la somme des valeurs absolues des distances par la somme algébrique. Ainsi il trouve une surface de l’ordre 2*, dont il étudie les courbes singulières et les points sin- guliers. La partie la plus attrayante se rapporte au cas de deux droites qui se croisent, parce qu’elle met un trait d'union entre deux surfaces connues, la surface de Kummer à seize points doubles et seize plans touchant la surface suivant une conique, et la surface romaine de Steiner à trois droites doubles concou- rantes. Si la somme constante surpasse la distance des deux droites données, le lieu est une surface de Kummer, spécialisée par l'existence de deux droites doubles à l'infini; si la somme constante égale la dis- tance des deux droites données, le lieu est une surface de Steiner dont le point de concours des trois droites doubles se trouve à l'infini. Le travail paraîtra dans les Mémoires de l'Académie. — Rapport de MM. Julius, J. C. Kapteyn et Schreinemakers sur le mémoire de M. A. Brester Jr. intitulé : Essai d'une explication du © 19 ra ACADÈMIES ET SUCIÉTÉS SAVANTES mécanisme de la périodicité dans le Soleil et les étoiles rouges variables. Dans ce travail volumineux, l'auteur plaide l'idée émise par lui en 1888 que le Soleil est en repos, c'est-à-dire exempt des mouve- ments et éruptions brusques qu'on croit y voir. Il démontre que la conviction généralement admise de l'existence de ces mouvements rapides ne se base que sur les déplacements des raies du spectre qu'on explique à l’aide du principe de Dôppler, dont il expose les contradictions. De son côté, il émet l'hypothèse que ces déplacements des raies du spectre sont dus à un processus chimique de la matière en repos, accom- pagné de phénomènes de luminescence se propageant dans la direction visuelle. D’après sa théorie, le Soleil est principalement gazeux; la photosphère est une couche de nuages qui descend continuellement, s'éva- pore dans les parties inférieures et se renouvelle du côté supérieur par l'accroissement de produits de con- densation nouveaux. Les sources mécaniques et endo- chimiques de chaleur sont les facteurs principaux dans le ménage du Soleil; au contraire, les processus de condensation et de combinaison chimique des parties extérieures forment les causes immédiates des varia- tions visibles du disque. Explication nouvelle de la période de onze années. Quoique les rapporteurs ne puissent souscrire à l'argumentation et aux conclu- sions de l’auteur, son travail, qui fait preuve d'étude approfondie, paraîtra dans les Mémoires de l Académie. 29 SGENCES PHYSIQUES. — J. D. van der Waals : Con- tribution à la (héorie des mélanges binaires. Troisième partie. Etude de la ligne spinodale et du lieu des points de plissement en des parties déterminées de la surface. ÎTr ’ A Le cas at Influence de la valeur de Te sur la forme du pli et donc aussi sur la miscibilité dans la forme fluide; cette influence est comparable à celle 2. . pe de a Cas où la courbe ds 0 coupe la courbe DU à is sde — 0 — M. H. A. Lorentz présente au nom de M. J. J. van Laar : Sur la forme de la ligne des points de plissement et des 11qnes spinodales, dans le cas où lattraction mutuelle des molécules de l'une des compo- santes d'un mélange binaire de substances normales est petite. L'auteur fait ressortir que plusieurs résultats qui figurent dans la dernière communication de MM. H. Kamerlingh Onnes et W. H. Keesom (Æev. génér. des Se., t. XVIII, p. 382) ont été trouvés et publiés par lui. — Rapport de MM. Mac Gillavry, Julius, Zeeman, Wind et de Bruyn sur la ventilation des salles du Musée de peinture à Amsterdam. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. M. W. Beyerinck: La fermentation lactique dans le lait. Dans le lait aban- donné à lui-même et contenant donc, à cause de l'in- fection spontanée, les microbes les plus fréquents, on observe régulièrement certaine flore microbienne dont la constitution dépend principalement de la tempéra- ture et de la tension de l'oxygène. Si cette tension est petite, de manière que les microbes se trouvent dans le lait sous des conditions tant soit peu anaérobies, cette flore est d'une constitution simple et cause des fermentations déterminées, principalement la fermen- tation due à l'Aerobacter, la fermentation butyrique et la fermentation lactique, dont la première et la seconde se caractérisent par le développement d'hydrogène et d'acide carbonique, tandis que la troisième, qui se présente sous différentes formes, n’engendre à côté de l'acide lactique que de l'acide carbonique au plus. Quelquefois, cette fermentation lactique est accom- pagnée d'une formation de substances muqueuses, formées par les parois des cellules gonflées des fer- ments lactiques. Dans l'économie de l’homme, les fer- mentations lactiques sont utiles, les deux autres au contraire nuisibles. L'expérience de la fermentation dont on se sert dans l'industrie comme pierre de touche de la pureté du lait doit constater l'absence totale ou sensible des microbes Aerobacter et des ferments bu- tyriques. Un verre de lait placé dans un bain d'eau à 4#0°ne doit pas faire naître du gaz de fermentation: à cause de la prédomination des ferments lactiques, les autres microbes doivent être supplantés. Propriétés des ferments lactiques actifs : Lactococcus, Lactoba- cillus et Lactosarcina. Facteurs de variabilité : les cir- constances qui dominent cette variabilité ne sont pas encore entièrement connues; sans doute, on doit compter ici une pression de l'oxygène trop éloignée de la pression optimum du fonctionnement vital, ce qui est manifeste dans le cas du bacille du sérum allongé (Lactococcus hollandiae), caractérisé par une formation extrèmement considérable de substances muqueuses, de manière que la veine liquide est tellement visqueuse qu'elle semble solidifiée. Culture élective des microbes de la fermentation lactique muqueuse, des lactocoques de la fermentation de la crème, des bacilles lactiques. Le Yoghurt et la Maya Bulgare. — M. J. W. van Wijhe: Sur l'existence de vertèbres cartilagineuses dans le développement du cräne des Oiseaux. Si l'on se pose la question de l’origine probable de la génération des vertèbres, dans la tête, il est évident qu'il faut exclure le domaine auditif et celui qui est situé devant l'organe auditif; dans le premier domaine, les myo- tomes ont disparu pendant la formation du cartilage, tandis que ceux du second se sont déplacés pour faire partie de la sphère oculaire. Ainsi ce n'est que dans le domaine occipital qu'on peut s'attendre à trouver deux ou trois vertèbres. Jusqu'à présent, personne ne les avait remarquées. quoique ce domaine ait été exploré non seulement suivant la méthode des séries de sections parallèles, mais aussi suivant la méthode du bleu de méthylène (Æev. génér. des Se.,t. XIII, p. 704), beaucoup plus efficace. D'après cette dernière méthode, ni M. Noordenbos ni l'auteur ne les ont trouvées dans le crâne des Mammifères et des Sélaciens; au lieu de vertèbres, ils trouvèrent le cartilage parachordal bien connu, qui accompagne la chorda dans les régions occipitale et auditive. Il est vrai que d'autres expéri- mentateurs ont parlé d’ébauches de vertèbres dans l'occiput; mais les parties observées par eux n'étaient pas cartilagineuses et ne formaient que des amas de cellules mal limités ne méritant pas le nom de ver- tèbres. Au contraire, M. F. Sonies, assistant de l’au- teur, a découvert. par la méthode du bleu de méthylène, deux vertèbres cartilagineuses dans l’occiput d'em- bryons de poule et de canards vers le sixième jour du couvage. Ce qui explique que ces vertèbres n'aient pas été trouvées plus tôt, l'embryon de la poule formant dans tous les laboratoires d'embryologie la matière classique de recherche, c'est que la période durant ï laquelle ces vertèbres se présentent est d’une durée extrèémement courte; il faut qu'on atteigne précisément le moment où le cartilage se présente dans les deux. premières vertèbres du cou; avant que le cartilage. se manifeste dans les autres vertèbres, les deux ver-. tèbres occipitales se sont déjà confondues avec le car= tilage parachordal. Donc le cartilage parachordal des oiseaux ne forme pas une unité morphologique. On y. discerne avec M. Sonies deux parties distinctes : une partie de devant, dont les myotomes sont dégénérés, et une partie de derrière, se présentant dans la forme de deux vertèbres s'unissant bientôt à la partie de devant, etc. — M.G.C.J. Vosmaer présente au nom de M.B.van Tricht : Sur l'influence des nageoires sur la forme du myotome du torse. Introduction. Différentiation de la museulature dorsale et de la musculature latéro-ven- trale. Le travail est illustré par une planche. — M. GC: Winkler présente au nom de M.L. J.J. Muskens: Etude anatomique des connexions dans le cervelet. Troisième partie (voir /tev. génér. des Se., t. XN, p-1.054,t. XVII, p.160) (A suivre.) P:H.Scxoure- Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. à » 18° ANNÉE N° 143 15 JUILLET 1907 Revue générale des NCiencC pures el appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L, OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Astronomie Détermination des dimensions absolues des étoiles variables.—Silalumière metun temps appréciable à franchir l'orbite d'une étoile double dont les composantes s'éclipsent mutuellement, on peut admettre que cette circonstance n'influe pas sur les époques de maximum d'éclat, mais que les éclipses intermédiaires seront alternativement avancées et re- tardées. La pé sriode se trouve ainsi partagée en quatre intervalles inégaux; mais il est probable que la varia- tion de lumière n’estpas simplementliée aux conditions géométriques des éclipses, et que des changements physiques importants s'accomplissent au cours d'une révolution, quand l'orbite est excentrique. Le D' Roberts estime que ces causes de dissymétrie introduisent dans l'éclat apparent des termes proportionnels au sinus et au cosinus de l’anomalie vraie, comptée de la ligne de visée. L'application de ces principes fut faite aux deux variables à courte période U Pégase et RR Centaure : pour la première, dont on possède une série étendue d'observations, la valeur 5,9 minutes du temps employé par la lumière à franchir le demi-diamètre de l'orbite paraît mériter une certaine confiance. Le chiffre cor- respondant pour RR Centaure est de 0,3 minute : il semble moins plausible. Mais, de toutes façons, il s'agit là d'un procédé ingénieux dont il est permis d'attendre d'heureux aperçus sur les systèmes lointains. Les éléments de Vénus. — En voulant déter- miner à la fois les corrections de tous les éléments de la Terre et de Vénus, Le Verrier et Newcomb ont été conduits à manier des systèmes fort compliqués d'équa- tions simultanées. Pour échapper à cet inconvénient, M. Cowell admet’ que la correction de la longitude de chaque planète est une fonction linéaire du sinus et du cosinus de cette même longitude : la même forme ana- lytique doit convenir aux rayons vecteurs, et l’on se trouve en présence de six inconnues seulement à déter- miner par l'expérience. Les résultats ne peuvent être 1 Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, t. LXVI, p. 307. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. mais, comme les tables sont déjà très exactes, on peut tolérer dans les corrections une incertitude du vingtième environ de leur valeur. Il à paru utile d'augmenter le poids des observations dans les périodes où elles sont rares, pour se rapprocher d'une distribution uniforme : les (hPaus formés per- mettent alors de déterminer, pour 1885,0, un système plausible de corrections à faire subir aux éléments de Vénus, tels que les a donnés Le Verrier. qu ‘appproximalifs : S 2. — Art de l’Ingénieur Le tonnage des cuirassés modernes. — Tandis que, parmi les cuirassés en service dans toutes les marines, ceux qui composent les escadres de pre- mière ligne actuelles ont un déplacement de 15.000 ton- neaux au maximum, les chantiers maritimes construi- sent partout des unités dont aucune ne jauge moins de 18.000 tonneaux. Il y a peu de semaines, un ingénieur américain proposait même les plans d'un bâtiment atteignant 26.500 tonneaux, et il n'y a rien d'impos- sible à ce que les dimensions des navires qu'on mettra en chantier dans quelques années se rapprochent de ce chiffre. C'est l'expérience de la guerre russo-japonaise qui à déterminé cette évolution d'idées et cette augmentation de dépenses, car, le prix de la tonne restant sensible- ment le même, le coût d'un navire de 18.000 tonneaux dépasse à peu près de moitié celui d'un navire de 12.000. Les combats d'Extrème-Orient ont, en effet, démontré que les pièces de gros calibres, efficaces encore aux très grandes distances, sont presque seules à produire un effet utile contre les bâtiments très pro- tégés des marines modernes. Cette constatation a amené toutes les marines à supprimer, sur les nou- veaux cuirassés, l'artillerie moyenne (les petites pièces étant conservées pour la défense Rare les torpilleurs), et à constituer uniquement l'armement principal pat des canons de gros calibre, c'est-à-dire de 25 à 30 cen- timètres de diamètre. Bien que le nombre total des pièces soit considéra- blement diminué (le Dreadnought, de 18.000 tonnes, n’a que 10 canons de 30 centimètres, tandis que le For- midable, de 15.000 tonneaux, porte 4 canons de 30 cen- 13 526 limètres et 12 de 15 centimètres), il en résulte une augmentation de poids de l'artillerie correspondant à 1.200 tonneaux. Or, tout changement d'un des poids dont la somme détermine le déplacement d’un navire a une répercussion sur tous les autres éléments de ce déplacement : si on augmente l'artillerie, il faut, pour garder la même vitesse, le mème rayon d'action et la mème protection, accroître en mème temps le poids des machines, celui du charbon embarqué et celui de la cuirasse. Toutes, choses égales d’ailleurs, l'augmentation du déplacement est égale, pour un grand cuirassé, au produit de la variation d’un des éléments par le coeflicient 2,5 : ainsi, 1.200 tonneaux d'artillerie en plus produisent une augmentation de déplacement égale à 1.200 X 2,5 — 3.000 tonneaux. De même, si l’on veut augmenter la vitesse, le sys- tème des machines restant le même, il faut ajouter environ 700 tonneaux par nœud : pour filer 20 nœuds au lieu de 18 {c'est-à-dire 3 kilom. 700 de plus à l'heure), sans rien changer à l'armement ni à la protec- tion, le déplacement doit passer de 18.000 à 19.400 ton- neaux; à 2.700 francs la tonne (prix des récentes constructions en France), l'augmentation de prix cor- respondante est de près de 4 millions. Le plus grand avantage des turbines, dont lutilisation aux grandes vitesses est supérieure à celle des machines alterna- tives, a été de permettre un gain semblable sans aug- menter le poids ni, par suite, le prix de revient. Il y à d'ailleurs avantage, si l’on se résout à aborder les grands tonnages, à'en adopter de très grands. Le rendement des sommes consacrées à la construction devient meilleur : si, en effet, on veut amener sur le champ de bataille 36 canons de 30 centimètres, on peut les répartir de différentes manières, et par exemple en mettre 6,9 ou 12 sur chaque cuirassé; où aura, suivant le cas, une division formée de 6, 4 où 3 bâtiments. Toutes choses égales d’ailleurs (vitesse, rayon d'action et protection), le tonnage de chacun des cuirassés sera respectivement de 14.000, 17.000 et 20.000 tonneaux, et l'ensemble de la division jaugera en tout 84.000, 68.000 ou 60.000 tonneaux. La différence de-prix de revient sera, par rapport à la première solution, de 48 °/ç en faveur de la seconde, et de 28 °/, en faveur de la troisième. La solution théorique la plus avantageuse consiste- rait à réunir tous les canons sur un même navire qui dépasserait 40.000 tonneaux. Elle est irréalisable pour longtemps, ne füt-ce qu'à cause des dimensions des ports. Mais, dans les limites où le permettent ces amé- nagements, et aussi la nécessité de naviguer en esca- dres à rangs serrés (ce que les grands déplacements rendent de plus en plus difficile), il y a intérêt à aug- menter encore le tonnage des unités de combat et à atteindre 20.000 où même 21.000 tonneaux. Ces chiffres ont été adoptés, le premier par les Etats-Unis, le second par le Japon, pour leurs récentes mises en chantiers, et il ne parait pas douteux que cette solution ne soit la plus logique. $ 3. — Physique Les flammes électriques. — Les décharges ex- plosives produites entre les bornes d’un cireuit élec- trique présentent, quant à leur aspect etleurs caractères généraux, de grandes différences, suivant la charge, le potentiel, la résistance et la self-induction du circuit, Ja forme et la nature des électrodes, le gazambiant, ete. Certaines variétés de décharges électriques, d’une beauté toute particulière, ne pouvaient jusqu'ici être réalisées qu'au moyen d’un appareillage extrêmement puissant. Les décharges globulaires, observées par M. Righi entre de longs tübes de verre, ne se produi- sent, par exemple, qu'au moyen de batteries de grands condensateurs électriques, alimentées par une puis- sante machine à influence. D'autre part, des décharges à flammes étendues ont été obtenues par V. Thodarsson avec un transformateur de 20 kw. sous 500.000 volts. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE tee -la surface de l'électrode. EN JUIN 4, le pis 07 ur. . Ces belles décharges à flammes, d'un aspect si brillant, peuvent cependant, comme vient de le mon- trer M. I. Schincaglia, professeur à Ancône, être réa= lisées par tout le monde, à l’aide d’un dispositif fort. modeste’. Le savant italien se sert, à cet effet, d'une bobine de Ruhmkorff, capable, dans les conditions les plus favorables, de donner entre les bornes du secon- daire une étincelle d'environ 350 millimètres de lon- gueur. À cette bobine sont reliées les électrodes d'un éclateur muni de boules en laiton, susceptibles de se déplacer dans toutes les directions, alors que les bornes du primaire (dont la résistance est réglée au. moyen d'un rhéostat au sulfate de cuivre) sont ali= mentées avec du courant alternatif à 110 volts. Toutes les parties du circuit secondaire sont parfaitement isolées. Les contacts doivent être aussi parfaits que possible. É L'expérience étant disposée de cette façon, la bobine d'induction, on le voit, agit comme un transformateur à haute tension. Les boules de l’éclateur ayant été rapprochées à environ { centimètre de distance, on. observe des étincelles rectilignes du même aspect que celles que donne une machine électrostatique ordinaire. Aussitôt que la résistance du secondaire s'accroît, les boules étant progressivement éloignées l'une de l’autre, les étincelles cessent de se produire et, à leur place, ap- paraît, sans discontinuité aucune, une langue de feu à contours rectilignes, qui finit par prendre l'aspect d’une flamme véritable étendue dans le sens de la lon- gueur, affectant la forme d'une fusée ou d'un serpent, et une couleur d'un rose jaunâtre, à l'exception des portions centrales, qui prennent une nuance blan- châtre. Cette flamme est entourée d’une auréole peu lumineuse. Lorsqu'on les expose à une action soufflante, ces flammes, loin de se séparer en étincelles, comme celles qu'on obtient avec les interrupteurs électrolytiques, s'éteignent, pour se reproduire d'une manière iden- tique, toutes les fois que les électrodes sont rappro= chées à 1 centimètre de distance. La forme des flammes, qui est d'une grande variété, dépend de la position relative et des mouvements des électrodes de l'éclateur. La portion supérieure d'une flamme produite entre des électrodes verticales exécute un mouvement très vif, enveloppant tantôt l’électrode tout entière et tantôt la touchant à peine, tandis que la partie inférieure reste immobile. Bien qu'étant assez lumineuses, ces flammes ne sont pas riches en rayons actiniques, au moins pas en rayons pour lesquels le verre est transparent. Une vue instantanée, prise avec une pose d'environ 1/50 de seconde, ne montre que les points terminaux de la flamme. Pour réaliser des photographies vraiment satisfaisantes, il faut faire durer le temps de pose aus moins une seconde. Si les boulesde l’éclateur, après avoir été rapprochée pour la production des étincelles ordinaires, sont élois gnées l’une de l'autre en direction horizontale, on ob= serve une décharge angulaire, comme si deux langues de feu, s'attirant entre, elles, émanaient de chaque électrode. Après une période relativement courte, cett décharge se met à exécuter un mouvement extrème; ment rapide, promenant son point d'origine sur toute Des phéaomènes très intéressants s’observent en remplaçant les électrodes par des électrolytes..Si l'un des boules est plongée dans un vase rempli d’une solu tion saline, de facon que la moitié au moins de À boule sorte en dessus du niveau du liquide, la décharge à flamme s'obtient tout de suite sans étincelles préli minäirés. L'une des extrémités de ces flammes reste sensiblement immobile à la surface de l’électrode sus périeure, tandis que la position de l'extrémité inférieur change sans cesse, produisant un bruit craquelant e des détonations continuelles à la surface du liquides 1 L'Elettricista, t. V, p. 258. J CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 527 4 N à n » - Ta couleur de ces flammes est bien souvent d’une vont « . teinte extrèmement vive, variable suivant la nature de l'électrolyte. Si les bornes du circuit secondaire sont reliées à un tube dont l'air subit une raréfaction graduelle, on ob- serve les colorations les plus brillantes, variables sui- - vant le degré de raréfaction. Pour un degré donné et pour une résistance très faible du primaire, M. Schin- caglia observe par exemple un faisceau lumineux de rayons jaunes, semblables à un jet liquide, et dans lequel sont suspendues des myriades de particules in- candescentes émanant des électrodes. La fluorescence des parois de verre, que l’on observe pour un degré de vide donné, disparait alors, et bien que ce phénomène soit d'un grand éclat, son action sur la plaque photo- graphique est relativement faible. Les expériences précédentes (continuées par M. Schin- caglia) se réalisent facilement, même comme expé- riences de Cours, pourvu qu'on prenne toutes les pré- cautions nécessaires. En accroissant dans de fortes proportions l'intensité de courant du circuit primaire, M. Schincaglia a pu obtenir des flammes d'une hauteur allant jusqu'à 20 centimètres, flammes qui, en quelques secondes, ont fondu de longs tubes en verre, sans que les fils du circuit secondaire aient été échauffés outre mesure. Toutefois, il convient de ne pas pousser trop loin des expériences pareilles. En plongeant les boules de l'éclateur dans de l'huile de vaseline, on augmente beaucoup l'éclat des flammes électriques. Alfred Gradenwitz. S 4. — Electricité industrielle Les tramways électriques à trolley sans rails en Allemagne. — Un Rapportofticiel adressé au Ministère allemand des Chemins de fer par M. Vol- korts, ingénieur à Munster, et une étude récente de l'ingénieur Ernst Nickel, de Berlin, nous donnent des renseignements intéressants sur les tramways élec- triques sans rails fonctionnant actuellement en Alle- magne. Bien que ces tramways ne soient encore qu'au nombre de quatre, parmi lesquels celui qui relie les carrières de pierres de Grevenbrüek (Westphalie) à la gare du même nom, les résultats obtenus jusqu'à ce jour sont tellement satisfaisants que ce mode de trac- tion va certainement prendre une bien plus grande extension. C’est en 1901 que fut établi en Allemagne, d’après le système Schiemann, le premier tramway de ce genre. La Canalisation, qui est aérienne, est constituée per deux conducteurs distants l'un de l’autre de 0%,50 el élevés de 5%,50 à 6 mètres au-dessus du sol. Un trolley amène le courant à la voiture automotrice, mais les tiges de ce trolley permettent au véhicule de s'écarter ide3 mètres environ de part et d'autre de la ligne : lautomotrice peut ainsi dépasser les voitures dans le mème sens et laisser passer celles qui circulent en sens inverse. L Dans le cas d'une rencontre de deux automotrices électriques sur la même ligne, l'une d'elles détache du conducteur sa tige de trolley pour.livrer passage à l’autre. Un moteur identique actionne l’essieu d'avant et l’essieu d’arrière, et les essieux tournent dans des paliers à billes, ce qui, en diminuant le frottement et en permettant une notable économie sur le graissage, facilite beaucoup le roulement. Les moyeux de roues sont en fer, les rais et les jantes en bois. Quant aux bandages, ils étaient au début en caoutchouc; mais, ‘actuellement, on a adopté définitivement des bandages “en;fer, qui, avec l'adjonction d’un: sablier, ne patinent ni ne dérapent sur les chaussées les plus glissantes, même lorsque la pente atteint 1/10. La suppression des rails simplifie les conditions de roulage et diminue considérablement les frais d'établissement et d’entre- tien. On à pu établir que ce mode de traction peut devenir plus économique que la traction animale et que, notamment à Grévenbrück, l'emploi du tramway électrique à trolley säns rails a abaissé à 0 fr, 412 le prix de la tonne kilométrique, qui, avec la traction animale, variait auparavant entre 0 fr. 32 et 0 fr. 37. Chemins de fer à courant alternatif simple. — Dans le Technical Year Book, publié par Percival, Marshall et C°, de Londres, on trouve nombre de sta- tistiques intéressantes, parmi lesquelles la suivante, relative à une question entièrement à l’ordre du jour! : celle des lignes de traction à courant alternatif simple, entreprises dans le monde entier, et soit en service, soit en construction à cette heure. La plupart sont des lignes de chemins de fer, Leur nombre est de 36. Leur longueur totale est de 1.300 kilomètres. S 5. — Photographie La reproduction des couleurs par la pho- tographie. — Reproduire l’image avec ses couleurs réelles a toujours été le rêve le plus caressé par le photographe. Le jour où Niepce et Daguerre inventaient la photographie, ils pensèrent à ce complément de leur découverte et, le 4 septembre 1827, Niepce écrivait « M. Daguerre est parvenu à lixer sur sa substance chi- mique quelques-uns des rayons colorés du prisme: il en à déjà réuni quatre et il travaille à réunir les trois autres, afin d’avoir les sept couleurs primitives. » Mais Niepce et Daguerre lui-même n'avaient qu'un faible espoir de réussir et ne considéraient leurs re- cherches que comme un objet de curiosité. Leurs suc- cesseurs ne furent pas plus heureux, et Poitevin, qui s’acharna sur le problème, n'obtint que des résultats incomplets el incertains. En 1868, la solution de la question en était au même point qu'au temps de Daguerre en 1827, lorsqu'elle fut brusquement entrevue, et simultanément, par deux hommes de génie, un poète, Charles Cros, et un chi- miste, Ducos du Hauron. Ducos du Hauron avait déjà imaginé le procédé tri- chrome, c’est-à-dire la formation de l'image sur trois plaques sensibles au moyen d’un jeu d'écrans colorés. Trois épreuves au charbon, colorées respectivement en jaune, en bleu et en rouge, et superposées dans un ordre convenable, étaient tirées sur les trois clichés. Leur superposition donnait à peu près les couleurs de la Nature. Cette formation de l’image en couleurs, obtenue par un procédé imparfait et peu pratique, mais pourtant très intéressant, ne satisfaisait pas l'auteur. Il entrevit alors la possibilité d'établir un écran unique, rempla- cant les trois écrans de Ja trichromie et filtrant les diverses radiations du spectre pour les reproduire côte à côte sur une seule et unique: surface sensible. Il avait imaginé de tracer, sur un papier transparent, une série de raies alternativement rouges, jaunes et bleues, aussi minces que possible, de largeur égale el sans intervalles. Vue de près, la surface de ce papier montrait les rayures trichromes; vue de loin, par transparence, elle apparaissait blanche; quand on la regardait par réflexion, elle semblait grise, à la con- dition, bien entendu, d'éviter toute dominante dans les couleurs. On le voit, c'est la première idée des écrans colorés qui à donné la solution du problème. Et Ducos du Hauron qui, le 23 novembre 1868, prenait un brevet pour ce procédé, supposait « qu'on recouvrait le papier du côté de l'impression trichrome par une émulsion sensible, Dans la chambre noire, les trois couleurs simples devaient se tamiser à travers ce papier el former chacune son empreinte positive, c'est-à-dire son empreinte en clair sur la raie correspondante ». Les conclusions de Ducos du Hauron étaient assez vagues, et d'ailleurs l’état de l'industrie photographique Electrical Engineering, n° 1537, 18 mai, p.,763. 528 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE ne lui aurait pas permis de réaliser son idée, qui ne sortit jamais du domaine théorique. Il n’en résulte pas moins que, dès 1868, Ducos du Hauron avait trouvé le filtre qui devait tamiser les rayons lumineux et les répartir sur la couche sensible. En 1885, un Irlandais ingénieux, le D' Young, trouva qu'on pouvait avantageusement remplacer les trois raies, jaune, rouge et bleue, de Ducos du Hauron par trois autres : violette, verte, orangée, reconnues pré- férables par Helmholtz. Le DrJoly, quelque temps après, crut trouver une application industrielle de ce procédé et fit breveter l'emploi d’un écran imprimé avec les trois couleurs désignées par Helmboltz. Il placait son écran contre la plaque sensibilisée par une émulsion pan- chromatique. Le cliché obtenu donnait par contact une épreuve positive. Cette image, vue à travers l'écran suffisamment repéré, montrait une image en couleurs; mais cette image, bien rudimentaire, était comme em- prisonnée par la grille que formait l'écran. On voit, par ce très sommaire exposé, que, depuis dix ou douze ans, on entrevoyait la solution du problème. Cette solution dépendait presque uniquement de la linesse que l’on pouvait donner à l'écran tamiseur de la lumière. Le jour où il deviendrait possible de l’ob- tenir à peu près invisible, la plaque pour l'obtention des couleurs serait trouvée. Un instant, la question parut résolue dans un autre sens. Avec une méthode scientifique et une déduction rigoureusement exacte, M. Lippmann, en 1891, avait tiré d’un phénomène physique connu sous le nom d'in- terférences une conclusion vraiment remarquable, et, passant de la théorie à la pratique, montrait à ses auditeurs émerveillés des clichés reproduisant, avec toutes leurs finesses et une absolue vérité, les colora- tions naturelles. Seulement, ces clichés ne pouvaient se voir que par réflexion. Ils exigeaient une manipulation compliquée et certainement difficile à suivre en dehors d'un laboratoire de physique bien outillé. Bien que les opérations aient été simplifiées, cette méthode n'a guère été adoptée par les amateurs, en raison des soins minutieux qu'elle exige. Il est vraisemblable qu’on n'en restera pas là. La découverte de M. Lippmann passionna justement le monde scientifique et, bien qu'elle n'eüt rien de commun avec celle de Ducos du Hauron, par les com- paraisons qu'elle suscita, elle rappela l'attention sur le problème de la photographie des couleurs par le pro- cédé pigmentaire. Que fallait-il pour le résoudre ? Une émulsion pan- chromatique, c’est-à-dire sensible à toutes les couleurs, et un écran capable de laisser passer, en les distribuant convenablement, les rayons lumineux. L'émulsion était déjà connue. L'écran fut réalisé de deux manières différentes, d'une part, par MM. Lumière à Lyon, et d'autre part, par un neveu de Ducos du Hauron, M. R. de Bercegol, pour le compte de la Société Jougla. L'écran imaginé par MM. Lumière! se compose de grains de fécule très fins, colorés respectivement en rouge-orangé, violet et vert. Ces grains, dont chacun représente environ un dix-millième de millimètre, sont répartis en nombre égal pour chaque couleur sur une plaque de verre. Primitivement, les mterstices laissés entre les grains étaient bouchés par une pous- sière impalpable de noir de fumée. Mais cette opéra- tion, qui se faisait à la main, étant difficilement con- cillable avec les procédés mécaniques, MM. Lumière ont, parait-il, pris le parti d'y renoncer et l'ont avan- tageusement remplacée par un tassement, un écrase- ment des grains de fécule, produit au moyen d’un rouleau de buis qui comprime la plaque couverte de son écran. Cet écrasement ne va pas sans quelque difficulté. Mais on à remédié à la casse en donnant à ! Nous ne pouvons passer sous silence la belle séance de pro eclions qui a élé donnée par le journal /'/Jlustration, et dans laquelle M. A. Lumière à exposé, devant un audi- toire d'élite, Les résultats obtenus. la plaque comme support une lame de plomb, qui pré- sente une malléabilité et en même temps une résis- tance suffisantes. Cet écran, composé de particules colorées avec les trois couleurs indiquées ci-dessus, quand on le regarde par transparence, nous apparait incolore. Vu au microscope, il se compose de grains serrés les uns contre les autres sans intervalles visibles, et l’on y distingue très nettement les trois couleurs rouge- orangé, vert et violet. Théoriquement les grains doi- vent être égaux en volume et en nombre. Les trois couleurs doivent être également réparties sur la plaque. Mais, pratiquement, cette égalité de répartition est. chose difficile à obtenir. 11 peut donc se produire des plages, des amas mal mélangés qui influeront un peu, mais fort peu, sur le résultat final. Le procédé de la Société Jougla est tout autre et dérive directement de la conception première de Ducos du Hauron. Il s’agit d'une véritable impression. Chaque millimètre carré de la plaque de verre reçoit, par un procédé que garantit un brevet secret, 800 petits carrés teintés consécutivement en rouge-orangé, vert et violet, sans superposition, ni intervalle. L'écran, sorte de damier trichrome, est donc formé par une espèce de pellicule recouverte d'une multitude de petites lignes teintées comme il convient et qui, sans se recouvrir, se touchent de facon à ne laisser passer aucun rayon de lumière blanche. On voit que l'écran imaginé par la Société Jougla est moins fin que celui de MM. Lumière ; en revanche, il est plus homogène, puisque, du fait de la fabrication même, le nombre des petites lignes est le même pour chacune des couleurs mises en œuvre. Quoi qu'il en soit, dans les deux cas, l'écran déposé sur le verre est isolé par un vernis imperméable à l'eau; et sur ce vernis on coule, par les procédés ordinaires, une émulsion panchromatique d'une extrême finesse et d'une grande sensibilité. Si l’on pouvait mettre sans autre précaution la plaque dans la chambre noire et l’exposer aux rayons du soleil, on remarquerait que l’'émulsion est à peine rendue moins sensible par suite de l'interposition de l'écran trichrome. Mais, soit devant l'objectif, soit derrière, il faut placer un verre jaune spécial, destiné à assurer le panchromatisme rigoureux de la plaque en absorbant les radiations dominantes par lesquelles la plaque sensible serait trop vite impressionnée, le vert et le bleu notamment. Le verre jaune présente l'inconvénient inévitable d’affaiblir la lumière, partant d'exiger une plus longue exposition. Les émulsions ainsi préparées et l'appareil étant pourvu de son écran compensateur, on dispose dans les châssis les plaques de facon à ce que le verre soit tourné du côté de l'objectif. Cette disposition a pour but d'obliger la lumière à traverser l'écran coloré avant de venir impressionner la couche sensible. Cet écran coloré, qu'il se compose de grains de fécule, ow d'une trame polychrome, laisse passer ou absorbe les rayons lumineux, selon qu'ils sont de même nature ou de nature contraire à ceux des écrans qui les reçoivent. Supposons que nous ayons à photographier quatre fleurs unicolores, dont l'une est rouge, la deuxième jaune, la troisième bleue et la dernière blanche. Les rayons lumineux émis par la fleur rouge seront absorbés par les éléments verts du réseau, le vert étant complémentaire du rouge, et passeront, au contraire, en totalité par les éléments rouge-orangés et partiel- lement par les éléments violets, qui laisseront passer le pourpre de la fleur rouge. La plaque sera done impressionnée sous les éléments rouge-orangés et violets, alors qu'elle restera inaltérée sous les éléments verts. ‘ C'estun verre recouvert d'une pellicule de gélatine teintée- Dans le procédé Jougla, la pellicule seule, sans verre, forme ect an. D >. 1 A CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 529 Au développement, les parties impressionnées noir- ciront, tandis que les autres ne subiront aucun chan- gement. Si l'on fixait alors, sur les éléments rouge- orangés et violets, il y aurait du noir; sur les éléments verts, il n'y aurait rien, le bromure d'argent ayant été dissous dans l'hyposulfite de soude. La fleur rouge paraitrait donc verte, le vert étant la couleur complé- mentaire du rouge. La fleur jaune sera reproduite par les éléments rouge- orangés et verts, etles radiations jaunes seront arrèlées par les éléments violets. Elle sera donc représentée sur plaque par sa couleur complémentaire, le violet. la | La fleur bleue sera représentée par le rouge-orangé complémentaire du bleu. La fleur blanche sera représentée en noir, chacun des écrans laissant passer la partie de la lumière blanche qui lui correspond. Ce qui est vrai des couleurs simples l’est également de toutes les nuances, si fugitives ou si délicates qu'elles soient. Le tableau suivant résume ces explications : GRAINS DE FÉCULE qui laissent passer ces radiations RADIATIONS SIMPLES Rouge. Orangés et violets. Orangé. Orangés. Jaune. Orangés et verts. Vert. Verts. Bleu. Verts et violets. Violet. Violets. En résumé, l'opération photographique proprement dite comporte quatre phases : 4e Un premier développement, qui réduit le bromure d'argent en produisant de l'argent métallique sous les éléments qui ont transmis les radiations de la lumière ; 2 Un bain de permanganate acide ou de bichromate _acide, un oxydant, qui a pour but de dissoudre l'argent métallique produit par le premier développement; 3° Un second développement, qui évidemment ne peut plus agir sur l'argent métallique produit par le premier, puisque cet argent a disparu dans la deuxième opération, mais qui va agir sur les parties respectées par le premier développement. En effet, ce développe- ment se fait en pleine lumière. Le bromure d'argent resté intact s'impressionne à son tour, et, sous l'action de ce second développement, il se produit de l'argent métallique sur toutes les parties de la plaque qui n'avaieut pas été impressionnées dans la chambre noire ; 4° Un fixage qui enlève l'excès de bromure d'argent non réduit dans les opérations précédentes. Ces manipulations comportent un complément d’ex- plication. La fleur rouge que nous voulons reproduire verra, nous l'avons dit, ses rayons rouges passer à travers les éléments orangés et violets, et ces mêmes rayons seront arrètés par les éléments verts. Sur la plaque sensible, après le premier développement, image, si on pouvait la voir, serait opaque derrière les éléments qui ont laissé filtrer les rayons. Après le bain de permanganate, l'argent métallique étant dissous, les particules violettes el orangées se découvrent. Au deuxième développement, qui doit nécessairement se faire en plein jour, les parties de la plaque situées devant les éléments verts, les seuls qui restent, s'im- préssionnent à leur tour dans l’action du développe- ment; il s'y forme de l'argent métallique, qui bouche, en quelque sorte, les éléments verts et partiellement les éléments violets, de telle facon que, par transparence, seuls les éléments orangés et une partie des violets demeurent visibles; or, ce sont là précisément ceux qui donnent la sensation parfaite de la couleur rouge. On voit donc, d’une part, qu'il y a une inversion complète de l’image, et, d'autre part, que la plaque photographique joue le rôle d'un écran opaque ou transparent selon les cas. Cet écran cache ou découvre certaines parties de l'écran trichrome, et c'est par ce jeu de parties transparentes ou opaques qu'il laisse voir les couleurs de l'écran trichrome, lesquelles se comportent comme la nature elle-même. En réalité, dans le procédé indiqué par MM. Lu- mière, il y à quelques opérations complémentaires qui ne sont pas essentielles, telles que l'éclaircisse- ment du cliché après le deuxième développement et le renforcement pour lui donner plus de vigueur. Enfin les lavages doivent être sommaires pour ne pas trop fatiguer la couche sensible, qui est d'une extrème délicatesse, et qu'il sera bon de protéger, en fin de compte, par un vernis spécial. Les opérations photographiques pour le traitement des plaques autochromes où ommicolores sont un peu plus compliquées et un peu plus délicates que celles des plaques ordinaires. Mais elles ne dépassent en aucune facon les moyens dont dispose un amateur soigneux. Elles lui donnent, par contre, la possibilité de reproduire la Nature avec toute sa vérité et sa vie même. La seule difficulté consiste dans l'appréciation exacte du temps de pose. Sans doute, les opérations photo- graphiques laissent toujours une certaine marge el l'expérience donne la juste mesure. Mais le temps de pose est plus strict avec les plaques en couleurs qu'avec les autres, puisque le développement est nécessaire- ment automatique. Ces plaques produisent un cliché positif unique, que l'on ne peut encore songer à reproduire sur le papier; mais, puisqu'elles acceptent une projection agrandie, elles peuvent, théoriquement du moins, donner des agrandissements ou des réductions sur des plaques identiques. La reproduction en est possible sous cette forme. On trouvera mieux sans aucun doute. Il n’en est pas moins certain que la Science et l'Industrie, dans une fraternelle union, viennent d'accomplir un prodige et marquent une étape nouvelle dans la voie du progrès. Ch. Boulanger, Préparateur à la Faculté des Sciences de Paris. $S 6. — Agronomie La protection et l'aménagement de Ia mon- tagne. — Nous avons récemment attiré l'attention sur la diminution des précipitations el sur les nom- breux faits de desséchement qui en résultent". De nouvelles observations confirment le phénomène, en particulier, dans les départements du Calvados, d'Ille- et-Vilaine, de l'Hérault. La moyenne des pluies enre- gistrées à l'Observatoire du Parc-Saint-Maur a été de 597um 7 en 1874-1883, 540mm 7 en 1884-1893 et 522mm,8 en 1894-1903. En Afrique, le capitaine Fourneau si- gnale une nouvelle preuve du desséchement progressif de l'Afrique centrale : le niveau du Niger diminue d'une manière constante *. M. E. F. Gautier a reconnu qu'au Sahara actuel, l'époque quaternaire à été relati- vement humide; mais l'asséchement des oueds saha- riens n’en serait pas moins dû à une cause purement mécanique : le progrès incessant des énormes masses de sable qui, d'El Goléa à Tindouf, ont barré aux eaux de l’Atlas le chemin du Sud *. En décrivant ensuite l'effet désastreux du ruisselle- ment sur les pentes déboisées*, nous avons montré que le remède, c’est l'arbre. Si, dans les pays de plaine qui sont plus spécialement consacrés aux cultures, il est préférable d'utiliser le rôle de régulateur que pos- sèdent les grands réservoirs naturels, tels que lacs et étangs®, en région montagneuse, le reboisement s’im- pose. RE —— 1 Cf. La Revue du 15 septembre 1906. 3 La Géographie, 15 mars 1907. 3 Annales de Géographie, 15 janvier 1907. ‘“ Cf. La Revue du 15 mars 1907. 5 Cf. sur ce point spécial un second Rapport de M. be Grossouvee, ingénieur en chef des mines : L'aménagement et la conservation des eaux. Société d'Agriculture du Cher. Bourges, 1907. 530 La forêt constitue non seulement le moyen le plus efficace de conservation des terrains en pente, mais elle offre encore un revenu des plus fructueux au pro- priétaire du sol. Dans les départements du nord-est de la France, nombre de communes jouissent d’un revenu forestier qui leur permet de supprimer toute espèce d'impôt". D'autre part, nous savons, par le Mémoire que M. A. Mélard a présenté au Congrès international de Sylviculture, tenu à Paris en 1900, que la produc- tion des bois d'œuvre dans le monde devient de plus en plus insuffisante, A l'heure actuelle, sept pays seu- lement jouissent d'un excédent de production : l’Au- triche-Hongrie, la Suède et la Norvège, la Finlande et la Russie, les Etats-Unis et le Canada. Et encore cet excédent est-il fort menacé, en Autriche-Hongrie, en Russie et aux Etats-Unis, par l'accroissement de la production et le développement industriel, et, en Nor- vège, par l’'appauvrissement même des forêts. L'inter- vention du temps comme facteur principal dans la production ligneuse a une conséquence économique irès curieuse. En thèse générale, toute augmentation des prix payés par le consommateur a pour résultat d'accroître la production. Au contraire, quand il s’agit du bois, toute majoration des prix encourage les pro- priétaires imprévoyants à réaliser les capitaux fores- tiers; d'où résulte qu'à toute augmentation de la demande correspond une destruction et, par consé- quent, une diminution de la production. L'augmenta- tion de la valeur des bois d'œuvre est un des faits commerciaux qui méritent le plus d'attirer l'attention. Si rémunérateur, cependant, que soit le reboisement, il forme un placement de longue immobilisation, pra- ticable surtout pour les collectivités possédant des réserves disponibles. On évalue généralement à cinq ou six millions le nombre des hectares à reboiser dans la France entière, ce qui implique une dépense de près d'un milliard. Ces chiffres conduisent à cette Conclu- sion qu'il n’y a que l'Etat, les communes et les asso- ciations très puissantes qui soient capables de tenter cet effort. Aussi bien, faut-il souhaiter voir bientôt transformée en loi une proposition récemment déposée à la Chambre des Députés et autorisant les associations reconnues d'utilité publique ou déclarées à posséder des bois et des terrains à utiliser pour le reboisement. Cette proposition, qui modifie les articles 6 et 41 de la loi du 1® juillet 1901, et dont l'initiative vient de M. Paul Descombes, a été approuvée par le Congrès du Sud-Ouest navigable, ainsi que par de nombreux Con- seils généraux. Si le reboisement apparaît comme le moyen le plus énergique et le plus durable de fixation du sol monta- gneux, il n'est pas le seul. Surrell, dans son ouvrage classique sur les torrents des Hautes-Alpes, recom- mande aussi le gazonnement et l'embroussaillement. « Les herbes et les broussailles, aussi bien que les arbres, écrit-l, protègent la surface du sol, divisent les courants qui tendent à le raviner, empèchent la concentration subite des eaux, et en absorbent une certaine portion dans l'humus spongieux qui se forme * Pau DEsco: dans la chaine 1905. ? J. GrrAm : ; collectifs, 4 bro °s: Etude sur l'aménagement des montagnes es Pyrénées, 2° éd. 1 broch. Bordeaux, rientation vers le reboisement des capitaux a. Bordeaux, 1906. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE à leur pied. Et s’il faut soixante ans pour créer une véritable forêt, si plusieurs Siècles seront peut-être nécessaires pour parvenir à boiser certains revers déchirés, où les difficultés redoublent en nombre et en puissance, il suffira de quatre à cinq années pour permettre à cette même végétation de se rendre définitivement maîtresse d'un terrain. » Ce mode de protection, dont nous avons maintes fois constaté l’ef- ficacité en de nombreuses régions du Jura et des Alpes suisses, est évidemment inférieur au reboise- ment comme résultat hydrologique, comme garantie de durée; il ne supporte pas la surcharge du pâturage, mais il à l'immense avantage de produire rapidement ses effets, et il reste la seule ressource pour la conso- lidation des revers pierreux, dépourvus de terre. Rien n'empêche d’ailleurs, sur les pentes qui s'y prêtent, de l'améliorer successivement en le parsemant d'arbres, de façon à constituer ces pâturages demi-boisés qui forment les meilleures régions d'élevage du Jura. ; Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. : $ 7. — Biologie Les parathyroïdes de la tortue. — On sait, grâce aux travaux de Moussu, de Vassale, de Lusena, de Doyon, etc., que les thyroïdes et les parathyroïdes des Mammifères et des Oiseaux sont des organes essen- tiellement différents au point de vue physiologique : l'ablation des thyroïdes chez l'animal adulte ne déter- minant aucun trouble apparent ou ne produisant que des troubles trophiques (homme, singe), leur ablation chez l'animal en voie de développement déterminant un trouble et un arrêt de développement, l’ablation des parathyroïdes provoquant rapidement la mort à la suite d'accidents paralytiques ou convulsifs. Poursuivant cette étude chez les animaux à sang froid, M. Doyon vient de montrer que, chez la tortue d'Afrique adulte comme chez les animaux à sang chaud, lablation des thyroïdes paraît inoffensive, tandis que l’ablation des parathyroïdes provoque des paralysies et la mort. Il existe, chez la tortue d'Afrique, deux parathyroïdes très petites (moins de { millimètre de diamètre), situées une de chaque côté, à la base du cou, loin de la thyroïde, très près et au-dessous du thymus, contre la crosse des aortes, au niveau du point où ces vaisseaux s'infléchissent en arrière. M. Doyon détruit ces para- thyroïdes en les cautérisant avec une pince à mors très effilés. Il pratique une incision de chaque côté du cou et attire avec un crochet-mousse la crosse de l'aorte correspondante; la parathyroïde ayant été cautérisée, la plaie est suturée : l'opération peut être conduite sans la moindre hémorragie et sans lésion des tissus voisins. La destruction de l’une seulement des parathyroïdes. ne produit aucun accident appréciable, prochain ou éloigné; la destruction des deux parathyroïdes pro- voque des paralysies débutant toujours par le train antérieur, et la mort qui survient du troisième au huitième jour après l'opération. La destruction ou l’ablation de la thyroïde, même totale, ne produit pas d'accidents, au moins chez la. tortue adulte. Ê \ ) CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES 231 LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES PREMIÈRE PARTIE L'étude de la propagation des ondes sismiques à travers le globe terrestre présente un grand intérêt } au point de vue géophysique, car elle peut donner des renseignements sur la constitution intérieure de la Terre, renseignements qu'on à vainement attendus du calcul de la précession des équinoxes et de celui des marées. À cause de l'extrême importance de la question et des difficultés sérieuses qu'on y rencontre, il faut procéder dans ces études avec la plus grande circonspection; il faut juger les méthodes avec la ÉTUDE DE LA PREMIÈRE PHASE propageant avec des vitesses différentes el suivant des chemins différents. Si l’on jette un coup d'œil sur un sismogramme obtenu par une station située à grande distance du centre sismique (fig. 1 et 2), on voit que les vibra- tions sont loin d'être uniformes: elles ne présen- tent. pas non plus le caractère de vibrations $'a- morlissant continuellement; au contraire, ce sont des perturbations arrivant successivement avec des intensités différentes. On a donc bien toute une série d'ondes à examiner. F BoppEmAns” dl Fig. 1. — Tremblement de terre de Calabre du ? septembre 1905, enregistré à O-Gyalla, à 1.020 km. du foyer, par un pendule Bosch. — La photographie ne contient pas toute la perturbation. {Photographié à l'Institut météorologique du Royaume de Hongrie.) plus grande sévérité pour éloigner toute solution arbitraire. Depuis quelques années, une centaine de sismographes enregistreurs fontionnent dissé- minés dans le monde entier; une grande quantité de tremblements de terre ont été enregistrés, les résultats sont là; il ne reste qu'à chercher une fonction empirique, ou basée sur quelque théorie, qui donne des résultats se rapprochant le plus pos- sible des données expérimentales. Ce rapproche- ment sera mesuré par la méthode des moindres carrés. En examinant plusieurs sismogrammes de pro- venances différentes, on est frappé immédiatement par une première loi : la durée des vibrations dans un observatoire augmente avec la distance de celui-ci au centre sismique; la durée est donc une fonction de cette distance. Il en résulte que /e foyer émet dans un temps très court des ondes se Le sismogramme est partagé, en général, en trois parties d'aspect assez différent : la partie préliminaire, la partie principale et la partie finale. Les vibrations préliminaires sont partagées en deux phases. Les ondes de la première phase sont caractérisées par une amplitude et une période faibles ; la seconde phase est formée d'ondes ayant une amplitude et une période légèrement supé- rieures à celles de la première, mais cette différence est si faible que, souvent, il est impossible de distinguer les deux phases. Après les ondes de courte période des phases préliminaires viennent des ondes de grande période et d'amplitude moyenne. Ces ondes forment la troisième phase, la première de la partie princi- pale. Le maximum des périodes tombe sur cette phase. La quatrième phase est formée des ondes d'amplitude maximum; leur période est bien infé- 532 rieure à celle de la phase précédente. Les périodes et les amplitudes des ondes de la cinquième phase sont un peu inférieures à celles de la quatrième phase, mais la différence est petite. Après la cinquième phase commence la partie finale, composée d’ondes à période et amplitude inférieures à celles des ondes de la partie princi- pale, mais supérieures à celles de la partie pré- liminaire. En examinant divers sismogrammes, on remar- que que la durée des phases en une même station est aussi une fonction de la distance du foyer à cette dernière et que cette durée diminue avec elle. On en peut tirer des conclusions importantes; ainsi : 1° Aucune des phases ne peut être considérée CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES Les mesures de l’angle d'émersion des ondes! . ont montré que les foyers sismiques sont silués à 50-100 km. au plus sous la surface de la Terre; ainsi, pour des distances supérieures à 4.000 km. la profondeur du foyer peut être négligée dans les calculs et l'on peut supposer, au moins en pre- mière approximation, que le foyer est situé sur la surface de la Terre. Le lieu du tremblement est en général à peu près connu. Nous avons vu que /a distance d'une stalion au foyer est une fonction de la durée des vibrations à cette station. Si l'on réussissait à déterminer cette fonction, elle permettrait de cal- culer le lieu de l’origine en connaissant la durée de vibration en trois observaloires. L'époque à l’origine n’est connue qu'approxima- Fig. 2. — Tremblement de terre observé à une station éloignée du foyer (d > 10.000 km.). — Le foyer était situé dans comme « la résonance continuée de la note propre du terrain », comme cela semble à M. Berloty' pour la phase finale; en effet, dans ce cas, cette phase ne devrait pas augmenter avec la dislance du foyer; 2° Les vibralions ne peuvent être considérées comme résultant de divers chocs successifs au foyer, comme le dit, dans un travail remarquable, M. Ho- race Lamb”; 3° Les vibrations enregistrées doivent corres- pondre à des vibrations réelles de l'écorce terres- tre; elles ne peuvent être formées uniquement par des vibrations propres du sismographe. * Etudes, 1906, p. 492. ? On the propagation of tremors over the surface of an elastic solid. Philosophical Transactions of the Royal Society, série A, vol. CCI, p. 42. tivement; pour la délerminer plus exactement, il faudrait connaître la loi de propagation des vibra- tions. Ne la connaissant pas, on est conduit à faire des lois hypothétiques, et à choisir entre elles celle qui donne les meilleurs résultats. Plusieurs hypothèses ont élé proposées pour expliquer la propagalion de ces ondes. Nous allons examiner les suivantes. I. — EXAMEN DES DIVERSES HYPOTHÈSES SUR LA PROPAGATION DES ONDES. 14° MM. Omori, Imamura, Nagaoka et d’autres savants japonais supposent que la propagation des 1 Les secousses d'un tremblement de terre arrivent de l'intérieur de la Terre à une même station d'observation dans des directions données: l'angle que la direction du CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES 533 ondes sismiques s'effectue à la surface de la Terre ou parallèlement à elle à une certaine profondeur. Des expériences exécutées au Japon à l’aide des explosifs ont montré que la vitesse de propagalion des ondes élastiques à la surface de la Terre est d'environ 3,3 km. par seconde. Le mouvement vibratoire à l'intérieur d'un milieu continu se décompose en deux ondes : l’une longi- tudinale, Pautre transversale, suivant que les vibra- tions se font dans la direction de la propagation du mouvement, ou perpendiculairement à elle; tandis que les corps solides transmettent les deux sortes de vibrations, dans les liquides et dans les gaz les vibrations transversales ne se propagent pas‘. La théorie de l'élasticité donne, pour la vitesse de l'onde longitudinale dans un milieu indéfini : Et —5) FN 1—25)° où E est le nodule de Young ou coefficient d’élas- ticité, 8 la densité, 5 le rapport de la dilatation lon- gitudinale à la contraction transversale, ou coeffi- eient de Poisson. La vitesse de l'onde transversale est: : E VV Nagaoka a déterminé ces constantes pour un grand nombre de roches, et il a trouvé comme vitesse de propagation des valeurs très en accord avec l'expérience citée *. E qu'on remonte l'échelle géologique depuis les roches quaternaires jusqu'au terrain archéen. Ex. : Il a constaté que le rapport + augmente à mesure Tuf quaternaire . . PNA MEN RENE Schiste chloriteux . . 0,023.101% 0.164.101% 0,497.101* L 1 Si l’on suppose => valeur presque la même pour tous les corps, on trouve, pour la vitesse de choc forme avec l'horizon est son angle d'émergence ou d’émersion. À proximité du foyer sismique, la direction de la secousse peut être observée directement: là des failles et des fissures se produisent, en général perpendiculairement à cette direction, dans le sol el dans les bâtiments. Si le foyer est éloigné, l'angle d'émergence peut être déterminé en mesurant la composante verticale et horizon- tale de la secousse à l’aide de deux pendules, l'un vertical, l’autre horizontal, et dont les constantes respectives sont connues. : ! Plusieurs sismologues, en admettant que les ondes de la seconde phase sont des ondes transversales, ont cru prouver que la Terre était solide jusqu'à une très grande profondeur, ou mème entièrement. M. Osmond Fisher a combattu cette manière de voir. Oldham croit qu'il est possible qu'à une pression de plusieurs millions d'atmosphères les liquides mêmes transmettent des ondes transversales(R.-D. OLnam: Constitution of the interior of the Earth. Quarterly Journal of the Geological Society, août 1906). ? H. NaGaoka : Publications of Earthquake investigation, n° #, Tokyo, 1900. l'onde longitudinale dans le granit, 4,96 km. sec. En supposant la propagation parallèle à la sur- face, les ondes-de la partie principale du sismo- gramme se propagent bien à la vitesse de 3-4 km. sec., mais la vitesse des frissons préliminaires peut atteindre 17 km. sec., ce qui correspond, en suppo- sant cette onde longitudinale, à un milieu dont le D rapport + est égal à 1,94.10%. Or, la plus grande E valeur + mesurée a été de 0,892.10" pour la topaze; la différence est donc importante. Pour expliquer cette vitesse excessive de propagation, Nagaoka a été amené à supposer l'existence d'une . à E couche sous le terrain archéen, pour laquelle 9 est maximum; il nomme celte couche « strate de vitesse de propagation maximum ». D'après lui, dans les couches plus profondes, ce rapport irait en décroissant. L'existence d’une pareille couche est possible, car d’un côté on constate l’'augmenta- tion du rapport avec l'ancienneté des couches, c'est-à-dire avec leur profondeur; d’un autre côté, il est indiscutable que la température augmente avec la profondeur; or, si la température augmente, le module d'élasticité et la densité diminuent; par contre, si la pression augmente, le module d'élas- ticité et la densité augmentent; il est donc pos- sible que l'effet de ces différentes causes détermine cette couche « maximum »; les premières ondes se propageraient alors dans celte couche. 99 M. J. Milne a formulé, il y a un certain nom- bre d'années, l'hypothèse de la propagation en ondes sphériques, à vitesse constante; les rayons sont rectilignes, la propagation se faisant le long des cordes ; mais il l'a abandonnée dans la suite. 3° M. R. Küvesligethy, professeur à l'Université de Budapest, sécrétaire général de l'Associalion sismologique Internationale, partant de l'hypothèse que les rayons sismiques se réfractent d’après la formule de Newton : 2—1 ML NNET à dei UE a déterminé les rayons de vibration, en supposant la densité de la Terre donnée par la formule de Roche en fonction du rayon 7: 2 1 — 0,766 2,5 (R—rayon de la Terre). EAU Il trouva que ces trajectoires de vibration sont des coniques : nie ellipse. nl ot c droites (parallèles). D: ° On peut supposer que les ondes de la première phase préliminaire sont des ondes élastiques longi- tudinales traversant la Terre, les ondes de la seconde phase des vibrations transversales ; en effet, le rapport de leur vitesse est égal environ à 2, ce qui est conforme à la théorie : APE s () = s =. 2. Les ondes de la phase principale se propageraient en ondes de surface. En 1885, Rayleigh, dans son travail : « On waves propagated along the plane surface of an elaslic solid' », écrivait que les ondes de surface doivent jouer un rôle important dans Fig. 3. — Trajectoire des ondes réfléchies. les tremblements de terre; se propageant en deux dimensions seulement, elles doivent acquérir sur les autres une prédominance toujours grandissante avec la distance au foyer, ce quise vérifie remarqua- blement. 6° Ces hypothèses donnent une explication accep- table pour les ondes les plus rapides des trois pre- mières phases, mais que dire des autres ondes de ces phases et des phases suivantes ? Ce qui est certain, c'est que ces ondes ne sont dues ni à la vibration propre des pendules, ni à celle du terrain, que ce sont des ondes arrivant successivement. Dernièrement, M. Wiechert a donné une explica- tion de certaines ondes, qui, d’après lui, sont dues à des réflexions. On verra plus tard que, si l’on suppose que les ondes préliminaires traversent la Terre, la trajectoire de l'onde la plus rapide est très voisine d’une droite, car sa vitesse est cons- { RAYLEIGE : Scientific Papers, vol. II, p. 441. CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES tante; dans ce cas, on peut concevoir que la pre- mière onde arrive en ligne droite, la seconde après une réflexion, la troisième après deux, et ainsi de suile, théoriquement, jusqu’à l'arrivée des ondes réfléchies une infinité de fois (fig. 3). Les temps d'arrivée des diverses ondes seraient alors : 6 sin? Fe : 32e v,” Nr VAT: Vs, On verra plus tard que la vitesse des ondes les plus rapides estenviron 12 km./sec.ou 0,113 rayon/ minute, ce qui donne, pour unestation à 15.000 km. du foyer, les temps de passage suivants : 1re onde. 156.3 minutes. DR RL nn Mel Pin — get t UP RERO — he, — . . 20,6 — Dr: 45 120 EN ns A CAC EME RE VOD SO RONDES Il y aurait, entre la première et la seconde onde, un espace de temps de 3,5 minules, que rien ne pourrait combler, contrairement à ce qu'on voit dans lous les sismogrammes. De plus, les ondes devraient se succéder loujours plus rapidement, ce qui n'est pas le cas ; les ondes de la même phase arrivent presque dans des intervalles de temps constants. En mesurant les angles d'émersion, on pourrait vérifier expérimentalement la réflexion - des ondes successives. On voit que les réflexions ne donnent pas l'explication du problème. Pour démontrer que, néanmoins, nos appareils enregis- trent de telles ondes réfléchies, il faut faire des mesures d'angles d'émersion pouvant donner la preuve expérimentale. Ce qui est certain, c'est que les ondes réfléchies ne peuvent pas parcourir des distances Lelles que deux fois le diamètre de la Terre; en effet, dans ce cas, il faudrait observer ces ondes aussi à des stations rapprochées du foyer. Le temps que l'onde réfléchie met pour arriver à la distance 9 du centre est, en supposant que la propagation se fait en ondes sphériques : S'il s'agit d’une station proche du foyer, on a ap- proximativement { — — IL en résulte qu'à une sta- 4 lion distante du foyer de 500 km., l’arrivée de l'onde réfléchie doit avoir lieu environ 34,7 mi- nutes après l'arrivée de la première onde directe; or, cela n'a jamais été observé. 7° Enfin, ajoutons une nouvelle hypothèse aux précédentes. Supposons la Terre formée d’un noyau intérieur liquide portant une écorce mince : la perturbation se propagerait dans l'écorce terrestre CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES ©z Ce Ge en ondes de surface (Rayleigh), et sur la surface du noyau liquide en ondes de translation : phéno- mène analogue à celui d'un tremblement de terre se produisant sur le lit d’un océan et faisant naitre une onde de translation. On a constaté que la vitesse de propagation de l’onde sismique marine est exactement la même que celle de la marée, ce qui, du reste, était à prévoir, car la vitesse de pro- pagation d'une perturbation est indépendante de la cause qui la produit; elle ne dépend que du milieu. L ! Elle se propagera dans la mer environ à la vitesse de V—V 2h; il est évident que cette formule est inutilisable pour des profondeurs telles que le noyau intérieur; néanmoins, si l’on prenait h— 6.370 km., alors on aurait v—11,3; pour h—2R, on a v—15,9 km. sec. à la place des 14,1 km. sec. qu'on a trouvés, comme on verra, dans le cas de la propagation superficielle. Ces chiffres sont en tout cas du même ordre. Cauchy a étudié le mouvement de la surface d'une masse fluide de profondeur indéfinie, primi- tivement en repos, puis mise en mouvement par une cause donnée appliquée au fluide sur une sur- face très restreinte. Il a trouvé que plusieurs ondes se propageront sur la surface et que le mouvement de propagation de ces ondes sera uniformément accéléré. Dans une certaine hypothèse, Cauchy a obtenu les rapports d'accélération suivants pour les ondes successives : 4re onde 1 | 6e onde 0,092 DRE us (OLeb0 TE 0,077 3e — M 0 912 8e — 0,068 4e — 0,148 9e — 0,058 RC — 0,114 l 40e , — 0,052 Il trouvait pour l'accélération absolue de la pre- mière onde, dans un autre cas, 6,56 m. sec.* Nous examinerons l'hypothèse de la propagation des perturbations sismiques en ondes accélérées, se propageant sur la surface du noyau intérieur. On peut alors considérer ces ondes comme les phases successives; il est compréhensible, dans ce cas, que l'écorce reste en mouvement pendant tout le passage de ces ondes, comme un navire sous l'effet de la houle. On peut aussi concevoir que ces ondes provoquent, au contact de l'écorce, en chaque point, des perturbations secondaires, perturbations qui se propagent dans cette dernière et qui peuvent être enregistrées à la surface, en se succédant con- tinuellement dès que la première onde est arrivée. M. O. Hecker, de Potsdam, a exposé, à la quin- zième Conférence de l'Association Géodésique In- ternationale en septembre 1906 à Budapest, des ! LappaREeNT : Géologie, p. 531. ? AucusriN Caucuy : OEuvres complètes, € I. diagrammes obtenus représentant le mouvement des bateaux sous l'influence de la houle; il a utilisé ces diagrammes pour la détermination de la gravité en mer entre Sydney, San-Francisco et Yokohama. Ces diagrammes ressemblent extraordi- nairement à la partie principale des sismogrammes, obtenus à grande distance du foyer. Il faut encore faire remarquer un faittrès impor- tant : c’est que les tremblements de terre d’origine volcanique, dont le foyer est situé sûrement plus près de la surface de la Terre que celui des autres tremblements, n'ont jamais été enregistrés à des distances un peu grandes, mème quand ils étaient très puissants". Si la Terre était solide, sans discontinuité entre l'écorce et le noyau, ce phénomène serait inexpli- cable; en effet, les ondes de même intensité traver- seraient la Terre également bien en venant de n'importe quelle origine. Ce phénomène est également défavorable à l'hypothèse de la propagation en ondes de surface; en effet, ces dernières devraient se propager égale- ment bien, quelque petile que soit la profondeur du foyer. Dans notre hypothèse, où la propagation des perturbations se fait par le noyau, il est compré- hensible que les tremblements ayant le foyer entre le noyau et l'écorce se propageront à très grande distance; ceux dont le foyer est éloigné du noyau intérieur n'ébranleront l'écorce que très peu, de manière que la perturbation ne pourra se propager au loin. Si les premières ondes des phases pouvaient encore être expliquées en supposant la Terre conti- nue, les autres resteront inexplicables. De plus, quoique les mesures d'angle d’émersion soient encore peu avancées, on à déjà établi que même les ondes de la partie principale et finale possèdent des angles d'émersion différents de zéro. Il en résulte que ces dernières se propagent à une cer- taine profondeur, et, si ce sont des ondes de surface, il doit exister une surface de discontinuité à l'inté- rieur. En résumé, toutes ces raisons paraissent établir, indépendamment de nos hypothèses, l'existence du noyau intérieur. Notons encore l'explication de la prédominance des phases principales du sismogramme dans l'hypothèse que toute la perturbation sismique se propage en ondes de surface. Plusieurs sismologues ont remarqué que, dans la phase principale, la période des ondes est toujours très proche de celle du sismographe; la théorie de ces appareils nous indique que les ampli- ! B. BEerLOTY : Etudes, 1906, p. Ti. 536 tudes doivent être, dans ces condilions, maximum, ce qu'on constate réellement. Avant de commencer l'étude des différentes phases, il nous faut connaîlre les causes d'erreur qui influent sur les données. La principale résulte du fait que les sismographes n'ont pas la même sensibilité; les premières vibrations enregistrées ne correspondent pas nécessairement à la même secousse. Les catalogues sismiques montrent que, dans un même observaloire, deux sismographes peuvent partir à des époques distantes de plusieurs minutes; à des stations différentes, mais également distantes du foyer, les premières ondes peuvent être enregistrées en des temps très différents. Les phases préliminaires ayant des amplitudes très faibles, il peut arriver qu'une partie de ces phases se trouve perdue ou bien que des sismographes encore moins sensibles ne partent qu'à la phase principale. Pour avoir des résultats acceptables, il faudrait ou bien avoir partout des appareils de même construction, apériodiques et autant que possible de même sensibilité, ou bien, ce qui serait mieux, déterminer de temps en temps d’une manière exacte les constantes des sismographes pour pou- voir comparer les résultats. En tout cas, les résul- tats donneront, pour la vitesse des premières ondes, une limite inférieure. (Dans ce qui suit, on enten- dra par vitesse d'une phase la vilesse de l'onde la plus rapide de la phase.) Si l'étude de la première phase présente déjà des difficultés, celle des autres phases en offre encore davantage; en effet, dans ce cas, il faut déterminer dans les divers sismogrammes des vibrations cor- respondantes, c’est-à-dire sensées provoquées par la même onde sismique. Les causes d'erreurs aug- menteront encore par le fait que les lectures seront faites par des personnes différentes. On devra utili- ser beaucoup d'observations; le poids d'une obser- vation sera petit et il faudra être modeste dans les conclusions. Les autres causes d'erreurs sont moins impor- tantes. En général, on assimile le foyer à un point, tandis qu'en réalité il peut avoir des dimensions considérables ; l'erreur commise peut être appré- ciable pour les petites distances, mais pour les grandes elle sera négligeable. IT. — ÉTUDE DE LA PREMIÈRE PHASE. Nous allons commencer par l'étude de l'onde la plus rapide de la première phase au point de vue des différentes hypothèses. Dans ces calculs, on supposera la terre sphérique et on négligera la profondeur du foyer; la précision obtenue sera CH. JORDAN -— LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES bien suffisante pour une première approximation, au delà de laquelle, avec les observations ac- tuelles, il serait téméraire de se hasarder. Les dates seront exprimées en temps moyen de Greenwich de 0 à vingt-quatre heures. $ 1. — Tremblement de terre de Ceram du 29 septembre 1899. Ce sisme a été très soigneusement analysé par M. E. Rudolph, dans un article du Beitraege zur Geophysik, en 1903. La seule objection qu'on puisse faire contre sa manière de procéder, c'est que la détermination du commencement de la per- turbation au foyer est faite arbitrairement. D'après l’auteur , seize stations ont enregistré le commen- cement de la première phase; de ces seize observa- tions, il en prend deux quelconques, et en suppo- sant la vitesse constante et la perturbation se propageant le long du grand cercle, il calcule l’époque de l'origine par la formule : di t—t CA ONRE= 7 où d, et d, sont les distances des stations à l’origine, comptées le long de l'arc de grand cercle, #, et #, les temps d'observation aux stations, enfin , le temps à l’origine. Il répète le calcul dix fois, sur dix combinaisons deux à deux des seize stations, et il prend la moyenne des dix valeurs de {, ainsi obtenues. Il est évident que le résultat aurait été différent si, des 120 combinaisons possibles, on avait choisi dix autres combinaisons. Le résultat est donc arbi- traire. En admettant une vitesse de propagation cons- tante, le seul moyen rigoureux de calculer le temps de l’origine, en même temps que la vitesse, est la méthode des moindres carrés. Chaque observation nous donne une relation à deux inconnues : di û y? tit comme on à plus de deux observations, le système d'équations obtenu est incompatible. Pour le rendre compatible, nous supposerons les observations t; affectées d’erreurs A; le système deviendra : lo + Fe ti — Ai ( n équations. 7 Nous déterminerons la valeur la plus probable des : inconnues, c'est-à-dire celle qui rend la somme des carrés des erreurs minimum. Cette méthode donne, dans le cas de l'hypothèse 1 Beitraege, t. NI, p. 292. ? La valeur des inconnues sera : CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES 537 de la propagation superficielle pour ce tremble- ment : v—16,13km./sec.; (—117n5,91m; e,—0,711m; YZA'—8,3:; les distances d; des stations à l'origine sont alors comptées le long des grands cercles. Si nous supposons en second lieu une propaga- tion en ondes sphériques, et si nous comptons les distances d; le long des cordes reliant les stations à l'origine, on aura : F—12,25 km./sec.; /ç—1714,41m; La formule utilisée dans cette hypothèse était : Vau : ot At al VY La seconde hypothèse donnant une somme de carrés d'erreur légèrement moins grande que la première est meilleure ; nous trouverons plus tard d'autres raisons pour la préférer à la première. L'époque obtenue du commencement à l'origine 17 h. 4,47 m. s'écarte de celle de Rudolph : 17 h. 1,08 m.'; par contre, elle s'accorde assez bien avec celle d'une détermination parue dans le Natuurk. DISTANCE STATIONS en degrés Batavia. Tokyo . Calcutta . Bombay Dorpat . Victoria Le Cap. Laibach Hambourg Trieste . u Gôttingen. . Padova. Quarto . Strassburg . Paisley. Cordoba 21,80 40,25 46,90 59.04 98,84 104,26 104,64 108,76 109,16 109,40 109,88 110,72 114,64 119,28 115,20 143,36 EAt min.. E(At)* min.? to — 17 h.. v en km./sec. ; y en megam./min.*. €, en min. . ARC vitesse constante CORDES vitesse constante ARC accélération constante KÜVESLIGETHY L'hypothèse de la propagation en ondes accélé- rées donne des résultats encore plus avantageux ; en effet, on a dans ce cas : ÉA° — 6,55. (Suite de la note de la page -précédente.) la somme des carrés des erreurs : = s æ ei EA—n|t%—t—{u4t—d.t)-|; = l'erreur moyenne de fi, a? EE n—92? son erreur probable 0,6745 €, ; quant aux inconnues calculées par la méthode des moindres carrés, leur erreur moyenne sera : —— > IDOUTW Ei—E€e L/ ———— ; l'erreur probable : pour V, Er — pour v, 0,6745 ev ; pour {, 0,6745 e ; leurs poids D 1 1 En et —;, En Et d et {représentant les moyennes de di et ti; dt la moyenne Tijdschrift voor Ned. Indie (1900, p. 196) et égale à 17 h. 3, 4 m., avec celle de Benndorf”, égale à des produits dti; & la moyenne des carrés: d° le carré de la moyenne d: enfin » le nombre des observations. IL est nécessaire d'insister sur ces formules, car plusieurs sismologues ont procédé contrairement au principe des moindres carrés: en eflel, ce dernier exige que la somme des carrés des écarts entre la valeur observée et calculée de certaines quantités soil minimum; comme les seules données actuelles en sismologie sont des temps d'observa- tions, il faut toujours raisonner sur la somme des carrés des écarts de temps ô4/; or, dans plusieurs publications, on trouve des calculs basés sur des raisonnements différents: par exemple E(èv)? — minimum (voir Laska : Mitteilungen, t. XIV, p. 4), ou bien E (vêt}? — minimum (voir KôvesLi- Getuy : Determinatio elementorum seismicorum primae motus Ceramensis phaseos exhibita. Abrégé du Bulletin de la Société Hongroise de Géographie, p. 28, 1905). Dans ces deux cas, les écarts considérés sont pris entre des valeurs dont aucune n'est mesurée directement, deux valeurs étant simplement des résultats de deux calculs différents: cette manière de procéder est manifestement contraire au principe des moindres carrés. On trouve dans la littérature sismique d'autres exemples de ce genre. ! Beitraege, t. VI, p. 248. ? Mitteilungen der Erdbebenkommission der Akademie der Wissenschaften in Wien, t. XXIX. les 538 CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES 17 h.3,5 m. et enfin avec celle de Küvesligethy', soit 17 h. 5,46 m. Par suile de la valeur trop faible du temps de Forigine obtenue arbitrairement par Rudolph, il trouve * que la vitesse de propagation augmente avec la distance de l’origine. L'erreur commise par lui est évidente ; en effet, il détermine le temps de l'origine en supposant la vitesse de propagation constante, et, en acceptant les résultats ainsi obtenus, il conclut que la vitesse est variable. C'est une contradiction. Le tableau I montre les erreurs dont les diverses observations doivent être affectées dans le cas des diverses hypothèses ; en somme, ces erreurs sont admissibles. $ 2. — Tremblement de terre du Japon du 30 janvier 1902. Ce tremblement a élé décrit par M. Imamura *. Délerminons comme précédemment, par la mé- thode des moindres carrés, le temps à l'origine et Tagceau Il. — Tremblement de terre du du 30 janvier 1902. Japon li ARC CORDES ONDES A Pa accélérées en mi- d en en A nutes | minutes STATIONS minutes en min. 0,68 0,46 0,35 0.44 0,14 1,07 0,72 0,82 0,06 0,16 0,14 0,53 0,10 0. 0$ 0,48 0,88 0,17 0,12 0,58 0,18 0,02 0,38 0,1 | Mizusawa. . | Tokyo . Osaka | Irkoutsk . Calcutta Taschkent Batavia. | Madras. . - Bombay . . | Victoria | Jurjew . Tiflis . Nikolajew : . Hambourg . . Strassburg . Trieste : . Pola . Padova , Shide. . Roma. . sc Rocca di Papa. . | Ischia Catane . , 0,40 0,24 0,17 0,25 0,37 0,88 0,50 0.62 0,43 0,03 0,08 0,39 0,01 0.1! Ü wie! 0.S1 0.08 0,02 0,47 0,02 0,18 0,20 0,29 la vitesse de propagation ; nous obtenons dans l’hy- pothèse de la propagation le long de l’are : v — 13,45 km./sec. ; Eo—0,91m "LA 6712; dans celle de la propagation le long des cordes : ÿ—12,08 km./sec.; (,—1,08m; €, —0,44n; LA? — 3,98 : * Abrégé du Bulletin de la Société Hongroise de Géogra- phie, 1905. ? Beitraege zur Geophysik, t. VI, p. 264. ? Publications of Earthquake Investigation, n° 148, Tokyo, 190%. dans l'hypothèse de la propagation le long de l'arc à accélération constante : v—0,0865 még./min.?;. /4,——2,14m; €, —0471m; DA2—59% On voit que, dans ce cas, la seconde hypothèse est meilleure que les deux autres. $ 3. — Tremblement du Japon du 31 janvier 1902. Ce tremblement a été publié en même temps que le précédent par M. Imamura dans les Publica- tions (n° 18) déjà citées. ; Si l’on effectue le calcul sur les 14 stations dis- ponibles, on obtient dans les trois hypothèses : Propagation le long de l'arc : V—13,01 km./sec.: 1 —0,808m;) =5.—0;45m; 742 2/39 Propagation le long des cordes : r—114,861km./sec.s. 4 —0,610; << — 0,350; SA HE Arc, accélération constante : 7=0,08606 még./min.®; {4 ——2,53m; <,—0,#1m: SA—2,62 La seconde hypothèse se trouve de nouveau être TagLeau III. — Tremblement de terre du Japon du 31 janvier 1902. ti ARC CORDES A A en en minutes | minutes ONDES . 4 accélérées STATIONS en mi- nutes en min. Mizusawa. Tokyo 3 Osaka # Irkoutsk . Taschkent Bombay 1 Jurjew . muse Nikolajew …. Hambourg . . . Strassburg . . : Trieste » . Shide. .-. | Roma Ut = D 10 PSE de © O2 re pe © 19 KO de ÿ 5) n .9 ).6 .Ù A | 2 la meilleure ; en effet, dans ce cas, la somme des carrés des erreurs est la plus petite. $ 4. — Tremblement de terre du Guatemala du 19 avril 1902 à 2 heures. Il a été décritpar Rockstroh dans Nature (t: BXVI et LX VIT), et analysé par Imamura dans les Publi- cations (n° 16). Les temps d'observation sont pris dans la communication de Imamura. La méthode des moindres carrés donne, avec l'hypothèse de 4 En considérant la faible précision des méthodes etobser- vations sismiques, le kilomètre et la seconde sont des unités trop petites: Laska, Benndorf et d'autres ont donc proposé comme unités le mégamètre (105 m.) et la minute, unités très pratiques, qui rendent l'application des formules très simple. ; ‘propagation le long des cordes, comme temps d'ori- La somme des carrés des erreurs d'observations CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES 539 gine 2 h. 23,82 m., comme vitesse 11,08 km./sec. était 17,48, avec 15 stations utilisées. TagLeaU IV. — Tremblement de terre du Guatemala. DIS- ti ARC CORDES ONDES TANCE L A A accélérées PEATIONS en enyne en en A | degrès | nutes | minutes | minutes | en min. Toronto”... .| -30,8|/ 30,5 | * 0,23 1,59 1,38 | Victoria . «le 43,2108463 4 — 10,21 0.43 Edinburgh . . .| 77,0! 36,0 0,76 0,25 | Bidston. .-. . .| 717,2] 25,0 |=— 0,26 |—’0,71 |— San Fernando. .| 717,4| 34,8 |— 0,49 |— 1,00 | — Shide..... . .|. 18,1|.35,4 |— 0,02 |— 0,37 |— Re ee TT. 183672 ü,70 0,14 Wellington. 100.7| 38,0 0,21 |— 0,57 | — 0,2: Christehurch . .| 103.6| 31,2 [— 0,90 |— 1,68 |— 1,34 Tokyo . . .| 410,5| 38,8 |— 0,05 |— 0,76 |— 0,41 LelCap -2... | 144,0| 354 |—10,82 |—1,49 |— 1,15 Bombay . 143,3| 43,4 1,02 1,40 1,24 | Calcutta 143,4! 44,0 0,90 1,67 1,81 Perth. . 150,0! 43,8 0,62 1,4% 1,06 | Batavia. 160,7! 43,7 |— 1,54 |— 0,01 | - 0,92 | PAS --. » » 1,71 17,48 13,12 | LES EU ENFANTS » » 0,77 1,16 1,03 | Ham iSec. » » AN 11,08 pou y megam./min.*. » » » » 0,05376 | lo ) » 606 |[2h93m 82|2h[8m$4 | Si nous comparons les vilesses obtenues à l’aide des deux hypothèses pour les quatre tremblements étudiés, nous avons en km./sec. ARC CORDES Ceram (29 septembre 1899, . 16,1 12 Japon (30 janvier 1902. . 13,5 12,1 Japon (31 janvier 1902) in à 13,0 14,9 Guatemala (19 avril 1902) . . 17,2 11,1 Tandis que l'hypothèse de la propagation le long des grands cercles a donné des vitesses différentes, Tagceau V. — Tremblement de terre de l'Alaska du 1°" janvier 1902. DISTANCE CORDES ONDES | STATIONS en fs accélérées| degrés A | | Victoria ss SA — 0,21 |— 0,16 | MOKVO RER UE | 37 — 0,03 |— 0,07 Baltimore --. . . 64 0,89 0 83 | SAONE 11 — 0,64 |— 0,60 ZA? » » 41,25 1,08 | CO Re detente » ) 5h2{m4 | 5h16m09 EE Ste » » 0,19 0,175 vikime/SeC ee » » 11,35 » y megam./mmin.? . » » » 0,0511| | celle de la propagation en ondes sphériques a fourni, par contre, des vitesses concordantes, La seconde hypothèse est donc plus avantageuse. 4 Publications, n° 16, 1904. $ 5. — Tremblement de terre de l'Alaska du 1‘' janvier 1902 à 5h. Il a été aralysé par Imamura. Le nombre des observations utilisables n'était que de quatre. En supposant que la perturbation se propage par ondes sphériques, le temps de l’origine, déterminé par la méthode des moindres carrés, est de 5 h. 21, % m., la vitesse de 11,35 km./sec. La somme des carrés des erreurs est 1,25. $ 6. — Tremblement de terre du Turkestan du 22 août 1902 à 8 h. Il a été analysé par Imamura dans les Publica- tions (n° 16), où il indique comme temps d'origine 3 h. 1,6 m. La méthode des moindres carrés a donné, en supposant des ondes sphériques, 3b.1,28 m. comme temps d’origine et 11,19 km./sec. Tagceau VI. — Tremblement de terre du Turkestan de 22 août. T DISTANCE STATIONS en degrés ONDES accélérées| CORDES | Taschkent . Bombay . Irkoutsk . Madras. | Tokyo . | Shide , | Edinburgh . D + & 10 = = ,20 ,60 2,58 ,08 ,15 18 Paisley. | Batavia. . . . | San Fernando Perth. . Le Cap. Victoria D = © OS ON © CO OO © © DO & CE Cr N he S œ 7,35 0,82 3h{m98 | 9h57m(4 11,19 » » 0 ,06958 y megam./min.* . comme vitesse, la somme des carrés des étant 7,77, pour 13 stations utilisées. La dance des temps d'origine est excellente. Dans l'hypothèse des ondes accélérées, la somme des carrés des écarts est inférieure (7,35). erreurs Concor- $ 7. — Tremblement de terre de Calabre du 8 septembre 1905. Il a été étudié par M. G. B. Rizzo'. Nous avons accepté les chiffres donnés par M. Rizzo sans les critiquer, en écartant toutefois trois observations manifestement mauvaises. Nous avons comparé l'hypothèse de la propagation en ondes sphériques à celle de la propagation en ondes superficielles accélérées. Les résultats sont donnésautableau VII, 1 Memorie della Reale Accademia delle Scienze di Torino, série 11, & LVIT, 1906. 540 CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES On voit que, dans ce cas, la seconde représentation est plus avantageuse. Tagceau VII — Tremblement de terre de Calabre du 8 septembre 1905. DISTANCE Soie ONDES STATIONS en méga- ti accélérées mètres A A Messine . .| 0,084 6,1 — 0,70 15440] HCATANE ER 0,174 0,3 — 0.63 0,99 MTÉCHTA ee 0,213 EI 0N ET 0,78 | Rocca di Papa . .| 0,434 0,8 — 0,51 0,31 EUThINO EEE 0,616 0,9 — 0,67 | — 0,20 STERTE REP EC 0,640 1,0 — 0,61 | — 0,18 MAtheness rue: 0,673 ou 046 | 1008 | Carloforte 0,677 172 — 0,46 | — 0,09 | Florence . . . . .| 0,682 1,4 — 0,21 0,10 | Quarto Castello. .[ 0,688 1,3 — 0,38 | — 0,02 MPOlR EM EEE 0,698 41 0,01 0,35 UN EME MONET Er 7 1,8 0,06 0,36 Belgrade . A REY 2,9 0,42 0,68 Teste Ce ete 0,183 ar — 0,12 0,11 | Venise SE 0,798 44 — 0.74 | — 0,53 ITaibache. 2... 110298 44 — 0,74 | — 0,53 |Padova. . . . . . 0,811 APT — 0,16 0,03 | Temesvar. . . . .| 0,879 1,8 — 0,16 | — 0,05 SAONE EM 1:12 0,883 1,8 — 0,16 | — 0,06 Pavie NTM CAE 0,920 115) — 0,11 | — 0,05 ÉRIRIT D - -- 0,931 2,0 — 0,10 | — 0,10 | O-Gyalla. PEN SN NO END AU | Kremsmunster. .| 1,037 2,5 0,31 0,26 Vienne. NAN CS ET TO NRNTCE MEN ENCE 1,098 2,5 0,23 0,11 | Hohenheïm. . . .| 1,232 2,5 0,03 | — 0,19 | Strassburg . .-. .| 1,274 au — 0,83 | — 1,08 CrACOVIE PM EE 1,289 2,3 — 0,25 | — 0,51 Heidelberg . . . 1,297 2,5 — 0,06 | — 0,33 Plauen : 1 1215336 2,6 — 0,02 | — 0,32 Tortosar 7 1.341 2,8 0,16 | — 0,14 lJéenass . -2-0)"21,30 2,8 0,10 | — 0,23 | DeIP2IS 1,421 2 0,16 | — 0,19 | Gottingen 2 04402 3,2 0,36 | — 0,03 | Potsdam . . . . . 1,527 3,2 0,31 | — 0,10 Istccles: OA e 61S; 3,4 0,38 | — 0,08 | Hamburg. . . . . 1,703 Sr 0,56 0,06 Shide : 1,896 3,1 0,21 | — 0,24 | TS ÉCRIS € 1,900 3,8 0,317 | — 0,20 | | San-Fernando 1,979 479 0,65 0,06 Batoum . LOL 998 530) 0,32 | — 0,27 CONTE E 2,10% 4,1 0,37 | — 0,25 Liverpool. . . . .| 2,178 4,0 0,16 | — 0,48 | DOLPAE CC 2,306 4,6 0,58 | — 0,08 Achalkalaki . . .| 2,336 4,8 0,74 0,07 UPS EEE 2,341 4,6 0.53 | — 0,14 | Edinburgh 2,316 4,8 0,67 0,01 Paisley-11E 0 - 2,426 4,6 0,41 | — 0,28 RER QUBR © va: 2,447 5,0 0,78 0,10 l Moscou .: . © . .| 2,46 5,1 0,86 0,17 Punta Delgada .| 3,649 Ta 1,42 0,75 Tachkent. . . . .| 4,467 142 0,15 | — 0,39 Bombay. =. ,85? 9,3 0,39 0,22 IrKOUISK NE 6,595 9,9 0,0% 0,10 Kodaikanal. . . .| 6,894 9,6 — 0,64 | — 0,48 Calcutta . 6,970 9,8 — 0,53 | — 0,35 Toronto SMS 1,531 10,8 — 0,23 0,13 Victoria B. C. 9,530 42,9 — 0,40 0,57 | Osaka EEE 9,747 13,3 — 0,24 0,80 HOME g/s12 | 429 |— 0,70 0,35 BASE. - 1-0 » » 13,65 9,99 EM Te. » ) 0,49 0,41 4 0 NO ERENRE » » 0767 | — 2"72 ER ISee:... de » » 11,43 » | y IMmégam./min? . » » » 0,08406 | En résumé, dans l'hypothèse de la propagation en ondes sphériques, les sept tremblements de terre qu'on vient d'étudier ont donné pour la vitesse des chiffres assez concordants. Il reste à examiner s'il n'y a pas d’autres repré- sentations encore plus avantageuses. $ 8. — Hypothèse de Benndorf. En 1905, Benndorf a (Mitteilungen der Erdbe- benkommission der Akademie der Wissenschaften in Wien) proposé une formule pour exprimer le temps que l'onde de la première phase met à par- courir une distance donnée. Soit / la distance de l'origine à lastation d'observation, mesurée lelong d'un grand cercle et exprimée en mégamètres, {le TasLeau VIII. — Comparaison de l'hypothèse de Benndorf avec les autres hypothèses. BENNDORF | ONDES CORDES accélérées = HIDE OU DIN ee © © DS O0 1 =) D UE OI = He de De Wuosuouweuouwoumeumetemiour D ds mi à © UD OS D he O © LD LO20IBRBSSSU EURE (] 0, 0, (] 1 2 3 4 5 6, 6, 7 ÿ 8 9 9 0 1 1 2 1 1 1 1 Le (PL) one norr DO EU io we Home Lol = e 19 SOS om # © =1 e (72 ra = Ca yen temps cherché exprimé en minutes. Voici la for- mule de Benndorf: t— 0,04 + 1,7 1— 0,042 1°; | d'après cette formule, la vitesse de la perturbation varie entre 0,558 et 50 mégamètres/minutes ou entre 9,7 et 833 km./sec. quand la distance varie de 0 à 20 mégamètres. Benndorf a tiré sa formule de 252 observations de tremblements de terre enregistrées à différentes stations. La première colonne du tableau VIH con- tient les distances en mégamètres, la seconde le CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES temps que l'onde a mis à parcourir cette distance. Ce chiffre étant une moyenne de » observalions, » est son poids;la troisième colonne contient ces nombres ». Pour se rendre compte des résultats de la formule de Benndorf, j'ai calculé les écarts entre les temps de l'observation et ceux donnés par la formule. Ces écarts figurent dans la qua- trième colonne. La somme des carrés des écarts est 37,12. En utilisant la méthode des moindres carrés poursuivie jusqu'ici, et en supposant que la per- turbation se propage en ondes sphériques à vitesse constante, nous obtiendrons comme correction gé- nérale du temps de l’origine 0,51 m. (la formule de Benndorf donne 0,4), comme vitesse 11,92 km./sec. et comme somme des carrés des erreurs 23,69. Il en résulte que la formule de Benndorf, tout en étant plus compliquée, donne des résultats moins DA été réunies en une moyenne. [l a déterminé la vitesse par la formule : Le tableau IX donne ces vitesses, comptées le long de l'arc; on voit que la concordance n’est pas très bonne, les vitesses variant entre 12,63 et 17,09 km./sec. Omori en tire pour la vitesse super- ficielle 14,1% km./sec. Si nous calculons à laide de cette vitesse les temps {, —#,, on obtient les écarts entre les temps observés et calculés, qui sont con- tenus dans la septième colonne, On a : DA — 8,59. v— 14,14 km./sec.; E — LUN: Si nous déterminons la vitesse par la méthode des moindres carrés, en supposant que la propa- galion se fait en ondes sphériques, on obtient : ZA3—17190; 12,75 km./sec.; e — 1 U7NmMIn.: Tagceau IX. — Vitesse de neuf tremblements de terre entre Tokyo et l'Europe centrale. TOKYO EUROPE CENTRALE ARC (OMORI) 12 ONDES e CORDES 2 DATES e accélérées Z Distance Distance A Z t de l'origine 1e de l'origine! v A A er km en km Il 1899, 7 Mars Shore 0ù55m5 390 4n 6m9ÿ5 9.630 13,43 0,41 — 0,04 2 SEMOTE RE A3 598 59 ss0 3,39,6 9.533 13,44 } 0,42 0,71 3 MÉTIER G S70 1,18,2 9.707 17,09 So ET 2 # API TOILLE LE NME 740,1 800 7,49,0 92513 16,46 — 1,48 — 1,59 — 1,30 Hi] 24 Novembre. . .| 18,45,4 S50 18,55 ,4 9.625 14,65 — 0,38 — 0,45 — 0,11 6 1900, 5 Novembre. . .| 7,4,7 230 » » » » » » gl LAPS TN Eee et 11678 1.250 1,16,5 9.240 13.08 0,73 0.6 1,23 8 PACE PRE 0 610 9,36,0 9.022 12,63 1,15 0,93 0,19 9 10 Août. 18,33,8 610 15,46,65 9:222 13,21 0,68 0,51 0,39 bons que la méthode simple à vitesse constante ; donc il n’y a aucune raison d'introduire sa nouvelle hypothèse. Par contre, ces 252 observations, don- | nant une vitesse de 11,92 km./sec., viennent sin- | gulièrement appuyer nos résultats obtenus jus- qu'ici: moyenne, 11,89 km./sec. La cinquième colonne du tableau VIIT contient les écarts A obtenus en supposant la propagation ‘en ondes sphériques, la sixième les écarts A dans la supposition des ondes accélérées; cette dernière représentation est moins avantageuse; en effet, la somme des carrés des erreurs est 47,47. $S 9. — Examen des objections d'Omori contre la propagation rectiligne. Examinons les objections qu'on a faites contre la propagation rectiligne des vibrations. Omori a dé- terminé * la vitesse apparente superficielle de 9 tremblements de terre, entre Tokyo et l'Europe centrale ; les observations de l'Europe centrale ont ! Publications, n° 13, 1903, p. 131. RFVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. En refaisant le calcul au point de vue de la pro- pagation en ondes accélérées, on trouve un résultat encore meilleur : y = 0,09298 mégam./min.; €, — 0,99 min.; XA°— 6,81. L argument de Omori contre la propagation rec- tiligne des perturbations de la première phase est l'observalion du tremblement de terre de Caracas du 29 octobre 1900 : Tokyo à 14.160 km. du foyer. Europe centrale à S.272 km. du foyer. 9ù 29,37m 9h 22,17m Il en résulte une vitesse de 13,62 km. le long de l'arc et 8,59 km./ sec. le long de la corde; la pre- mière ne s'écarte pas trop de la moyenne, la se- conde s’en écarte trop. Cette observation est déci- dément favorable à la propagation le long des grands cercles. Comme il ne s'agit que d'une obser- vation isolée, on ne peut l’accepter comme preuve, d'autant plus que, dans la série de Omori servant à déterminer la vitesse de 14,1 km./sec., écarts considérables avec cetle moyenne. Une sen- sibilité moins grande de l'appareil de Tokyo expli- 13" il ya des querait tout, les amplitudes enregistrées à Tokvo n étant que de 0®",1. Le tremblement de terre de Caracas donne aussi des résultats défavorables avec la formule de Benn- dorf; en effet, celle-ci donne, comme différence de temps observé entre les observations de Tokyo et de l'Europe centrale, 4,4 minutes, au lieu des 7,2 observées réellement. $S 10. — Observations d'Imamura. Imamura à publié‘ la vitesse de 13 tremble- ments de lerre correspondant à des observations faites à Hongo (Tokyo); il a calculé ces vitesses dans la supposition que les ondes se propagent surla sur- face et il en a déduit pour la vitesse des premières ondes 13,1 km./sec. Redéterminons les temps d'observations correspondant à ces vitesses et cal- culons la somme des carrés des écarts entre ces temps observés et ceux calculés à l’aide de la va- leur y— 13,1; nous obtenons 21,47, ce qui corres- pond à une erreur moyenne de 1,34 minutes, va- leur beaucoup plus grande que les erreurs obtenues jusqu'ici. Même si on éloigne l'observation n° 276 manifestement mauvaise, la somme des carrés des erreurs reste 9,91 min. Si l’on veut comparer les hypothèses de la propagation le long des cordes et le long de l’are à l'aide des données d'Imamura, il faut se rendre compte que les temps que l'onde a mis à par- courir la distance d; ont été déterminés par lui dans la seconde hypothèse; pour la première, il faudrait déterminer de nouveau les temps de l’origine et rectifier les temps /:; nous nous contenterons de corriger ces temps dans le cas des 3 tremblements déjà étudiés (n°° 9, 239 et 271). Nous accepterons les autres; il est évident qu'en les corrigeant, le ré- sultat serait encore plus favorable. Les observations * sont favorables à la propagation le long des cordes; en effet, la somme des carrés des écarts n’est que 2,60, contre 9,91 obtenu dans l'autre hypothèse. S.11. — Courbe de Milne. Il y a encore d’autres appuis à la propagation en ondes sphériques ; ainsi Milne a publié, dans le Geographical Journal (1903), une courbe repré- sentant le temps que la première onde met à par- courir la distance entre l’origine et une station donnée quelconque. Cette courbe correspond bien à une propagation recliligne. $ 12. — Hypothèse de M. Kovesligethy. L'hypothèse de Küvesligethy pour la propagation des ondes est, en principe, la suivante : On consi- 4 Publications, n°9 16. 1904 * Ces observations seront résumées dans le tableau | de la deuxième partie de cet article. CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES dère la Terre formée par des couches sphériques concentriques, la densité étant fonction du rayon r; celle-ci est donnée par la formule de Roche : où d, est la densité superficielle (2,5), « une cons- tante (0,764) et R le rayon de la Terre. On suppose, de plus, que les rayons sismiques sont réfractés d’après la loi de Newton : | d d, », étant l'indice de réfraction de la couche super- ficielle. On a : fs, et …— 14 Du théorème de Fermat 54 — 0, il résulte en coor- données polaires, le pôle étant au centre de la Terre : (2) Va = Vin. 2, Cosedr dw — Van amer" rV nr — n°, cos e En substituant 2 en fonction de r d’après les for- mules de Roche et Newton, on obtient, en intégrant, l'équation des trajectoires de vibration. e repré- sente l'angle d'émersion, c'est-à-dire l'angle que la tangente à la trajectoire forme avec l'horizon aw point où cette dernière rencontre la surface de la Terre. Dans l'hypothèse Roche-Newton, ces trajec- toires sont des coniques. On a : ds _n, PETER V= ———"y,; AS = — — Gcw dt n n, COS e n?rdr ndi= — ; a?rdr (5 v,ni(t— to) = / a ——— we JroV nr —ne cos e Si nous intégrons l'équation (1) entre les limites =. r=r,vw—=0,etr—=R,w—>#, représentant la dis- tance superficielle de la station d'observation à l’épicentre, on obtient + en fonction de e; à l'aide de cette relation, on élimite e de l’équation (2) pour avoir enfin une relation de la forme : t— to = F(Vi, Dis Dos lo; los D; 1), où wa élé remplacé par les coordonnées géogra- phiques du lieu d'observation et du foyer sismique : b, 1, et b,, L; r, est la distance du foyer au centre de la Terre, {, l'époque du tremblement à l'origine. Si ces valeurs étaient connues, la formule : (3) Ai ti — 19 — F(r,, 2, bo l5, ro: D;1 donnerait l'erreur d'observation commise à la sta- tion s;; à chaque stalion correspond une telle équa- tion; si elles étaient linéaires, on pourrait déter- miner les inconnues de manière que la somme des CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES 543 carrés des erreurs soit minimum; la méthode serait alors rigoureuse. Comme les équations sont loin d'être linéaires, il faut connaitre les valeurs approchées de 5 des inconnues, soit v',,n°,, lo, D', r',; ensuite, on pose : HW, Dos Jos Los Ds 1) —=F(r!,+ôv,, nl, + 6n, bi + ho; 16 Flo, T'o + Êro); puis on développe par la formule de Taylor; en supposant que les produits et les puissances supé- rieures des corrections sont négligeables, on obtient ainsi des équations linéaires à 6 inconnues : IFRS dF , Ai=ti—i,—F— £ CET èn, dvs dn, L dE . dE ï dE . — — — —— Ùl, — — rs. TRE TRAIT On disposera de ces inconnues pour rendre la somme des carrés des écarts minimum, ce qui donne les 6 équations, dites « normales », qui dé- terminent les corrections : JA; TA; IA; L NIAT TEE = NTA ER — (1; ue — 0; OC (CE pæ dti jud(dn, AY i i dAi D ge Na ue Via de mi dl) —J d\ôb;) Ju uôr: Küvesligethy a mis ces équations sous une forme facilement applicable au calcul !. Il reste à voir si ses formules satisfont réellement à la condition que les corrections d'ordre supérieur sont négligeables, Nous pouvons profiter de l'application que Kü- vesligethy a faite de ces formules au tremblement de terre de Ceram du 29 septembre 1899”. Après deux déterminalions successives, il obte- nait comme résultat final : 1 — 123,192 v —= 12,115 km./sec. D—=0102536 D, — 0,988 lo = 11 h. 5,376 min. h = indéterminé. Calculons, d'après les formules indiquées au Seis- monomia, les temps d'observations correspondant à ces valeurs aux différentes stations: nous obtien- drons des écarts À entre les temps observés et cal- culés; ils sont contenus dans l’avant-dernière co- lonne du tableau [ (p. 537). On a eu : EAiÿ——1,3£min.; SA°—10,22 min’; -—= 1,01 min. En supposant la propagation en ondes sphériques, nous avons trouvé pour le même tremblement de terre : 8,01 min”, chiffre bien inférieur à celui que nous venons d'obtenir; or, comme la propagation en ondes sphériques n’est qu'un cas particulier de l'hypothèse de Küvesligethy, son « équation aux dû nous donner des résul- corrections » aurait tats correspondantà une somme de carrés d'erreurs au plus égale à 8,01 min.*; il en résulte que, mal- gré les diverses transformations et les changements de variables, l'équation aux corrections n’a pas été mise sous une forme telle que les produits et les carrés des erreurs soient négligeables. Nous avons vu que l’une des équations normales était : or, de l'équation (3), il résulte que : dAi dts =, et par suile : EAï— 0. Comme nous avons obtenu une somme d'erreurs de —7,34 min., nous voyons que les résultats sont incompalibles avec les équations primitives, nou- velle preuve que l'équation aux corrections de Kü- vesligethy n'était pas utilisable dans les conditions où il se trouvait et où l’on se trouve forcément en général. $ 13. — Seconde hypothèse de Benndorf. Benndorf vient de publier un second article ? où il part du même point que Küvesligethy; mais, sans fixer la fonction 2—f(r), il traite la question en général ; il montre que des formules précédentes (1) et (2) on obtient simplement : 1 a Var ne cos? Cr Vidit — n,2 COS e — fl Te = Cette formule peut servir à la détermination de la vitesse superficielle apparente des ondes. En effet, déterminons les variations de ® et de { quand le paramètre cos e varie : ôt êp EE TT À DT COS a (cos €) O(Cos €) Ês n,? COS edr = — D;,9, Jr rVnre—necose d'où la vitesse superficielle apparente : êg _ Va ôl cos e 2 = Cette formule a été obtenue déjà par Kôvesligethy dans le cas moins général. Considérons cos e comme fonction de z et inté- grons : LR ViZo cos ed ; cette formule importante permettra, en connais- sant une quantité suffisamment grande de valeurs de e en fonction de », de déterminer { en fonction de cette dernière. ! KOvVESLIGETUY : Scismonomia, publié en Jatin.à Modène. # Mathematlikai Ertesitü, t. XXIX, p. 83 (1906). i Mitieilungen der Erdhehenkommission 1n Wien, n°31, 1906. H. ROGER — LA SÉCRÉTION SALIVAIRE Comme application, Benndorf a utilisé les 11 dé- terminations d'angle d’émersion de Schlütter (Beitraege, 1903), pour montrer graphiquement que les résullats de cette équation s'accordent assez bien avec ceux tirés de sa formule, que nous avons éludiés au tableau VIIL. Nous avons vu que celte dernière a donné des résultats moins favo- rables que la simple propagation en ondes sphé- riques. En somme, jusqu'ici les méthodes basées sur la réfraction des ondes sismiques n'ont pas donné de bons résultats. $ 14. — Résumé des résultats sur l'onde la plus rapide des tremblements. 1° Nous avons traité des tremblements de terre dans l'hypothèse de la propagation superficielle dans6cascomportant en tout89observations ($1 à 6). Réunissons ces 89 observations et délerminons la vitesse rendant minimum la somme des carrés des erreurs correspondantà toutes ces observations, en redéterminant évidemment les temps d’origine de ces tremblements. Les équations deviennent : CEE TE g+lo—h=a etc.; ) les équations normales : ar = _ ee _ qeint + not + ilot + malo RE TRE — Enu(—0 de = qd+lo—t=Ù vit tlo—th=0 HEAC etc le résultat final est : V=—14,03—+ 0,17 km./sec.; n—89. 2° La propagation en ondes sphériques à vitesse constante a été éludiée dans dix cas ($ 1 à 40), en tout sur 417 observations. En rendant minimum la somme des carrés des erreurs des 417 observations, on trouve V—11,968—+0,042 km./sec.; ZA?—94,95; Es —0,48; n—#%17 accélé- 19): 3° L'hypothèse des ondes superficielles à ration constante a été appliquée neuf fois {S en tout sur 405 observations. En rendant minimum la somme des carrés des erreurs de ces 405 observations, nous obtenons : y — 0,0811 + 0,0018 mégam./min.®:; EA?— 169,49; Ee — 0,64; m— 405. Nous pouvons donc conclure que, en première approximation, les perturbations sismiques les plus rapides se propagent en ondes sphériques à vitesse constante d'environ 12 km./ sec. Il est intéressant de faire remarquer que « Imamura a trouvé le même chiffre‘ en étudiant - la vitesse de propagalion de la première phase entre deux stations rapprochées, Tokyo et Osaka. Dans un deuxième article, nous ferons l’élude de la seconde et de la troisième phases des tremble- ments de terre. Ch. Jordan, Docteur ès Sciences, Directeur du Bureau hongrois des Calculs sismologiques. LA SÉCRÉTION SALIVAIRE La salive est un liquide digestif que sécrètent trois paires de glandes principales et une série de glandules disséminées dans toute l'étendue de la bouche. La quantité produite en vingt-quatre heures varie Suivant l'espèce qu'on envisage. Chez les ani- la sécrétion salivaireést très intense. Un cheval nourri maux qui consonanent des aliments très secs, de foin élabore,len une journée, jusqu'à 42 litres de salive; les ruminants peuvent en produire 56 litres. Ilest difficile de mesurer avec exactitude la quan- lité de que homme ; L'évaluer approximativement à 500 ou 600 grammes. salive sécrète un on peut Ces chiffres ne représentent que des moyennes. Les variations quotidiennes sont considérables et, pour une bonne part, sont en rapport avec la nature de l'alimentation. La salive est destinée à humecter les aliments, à permettre leur dégustation, à favoriser leur déglu- lition. Elle renferme un ferment principal, la ptya- line ou amylase, qui s'attaque aux féculents et transforme l’amidon en dextrine et en maltose. Accessoirement, elle agit sur d'autres substances alimentaires, notamment sur le saccharose, qu'elle est capable d'intervertir. | Le rôle primordial dévolu aux féculents dans l'alimentation des herbivores et des omnivores semblait devoir fixer l'attention sur les fonctions « Action du sue 1er juin 1903. Rocer et SIMON saccharifiantes de la salive. Cependant, la plupart des physiologistes attachent peu d'importance au pouvoir zymotique de cette sécrétion el insistent surtout sur son rôle mécanique. Des travaux récents, poursuivis dans mon 15h68 raloire*, conduisent à une conclusion différente. # Publications, n° 18, p. 97. ? Rocer : Le réflexe œsophago-salivaire. La Presse médi= cale, 14 décembre 1904: $S mars 1905. — Le réflexe gastro-sali= vaire. Zbid., 43 juin 1906. Alimentation et digestion, 1 vol. in-8° de 524 pages, Paris, 1907. — Action de la salive chauffée. Soc. de Biologie, A1 amai 1907. — gastrique sur la salive. Zbid., F Le humides Milieu —/f mn H. ROGER — LA SÉCRÉTION SALIVAIRE 545 Aussi m'a-t-il semblé intéressant d'exposer, dans une revue d'ensemble, les résultats nouvellement acquis. La vue ou l'odeur des aliments, le dépôt sur la muqueuse buccale desubstances sapides provoquent immédiatement un écoulement de salive : c'est le {lux alimentaire. Si l’on dépose sur la muqueuse buccale un corps irritant, caustique ou nauséabond, une abondante sécrétion se produira qui diluera la substance nui- sible, en atténuera les effets, en facilitera l'expul- sion : c'est le /ux protecteur. Supposons maintenant qu'un corps étranger un peu volumineux, un bol alimentaire, s'arrête dans l'æsophage.Nous verrons encore intervenir la sécré- tion salivaire. Un réflexe se produira, réflexe so- phago-salivaire, qui a pour point de départ la mu- queuse œsophagienne et pour voie de conduction les nerfs pneumogastriques. Par sa viscosité, la salive aidera à la progression de l'obstacle. Mais elle remplira en même temps un rôle excito-moteur. On sait, en effet, que les excitations de l'æsophage n'aboutissent qu'à des constrictions locales; elles ne déterminent pas de péristaltisme. C'est ici qu’in- tervient la salive : elle excite le pharynx, provoque des mouvements de déglutition qui, sous forme d'ondes, se propagent à toute l'étendue de l’œso- phage. On comprend maintenant le rôle et l'impor- tance du réflexe œsophago-salivaire. Ce réflexe, je l'ai étudié chez le chien, le lapin, le cobaye. M. Carnot en à démontré l'existence chez l'homme. On peut, en tenant compte de l'effet final, considérer le flux salivaire produit flux moteur. La salive peut intervenir pour combattre par son alcalinité l'hyperacidité gastrique, La sécrétion est encore mise en jeu par un réflexe, réflexe gastro- sativaire, prenant naissance dans l'estomac et sui- vant la voie des pneumogastriques. Chez un chien, porteur d'une fistule œsophagienne, j'introduis de l'eau acidulée; au bout de quelques minutes, un abondant flux de salive se produira, qui cessera dès qu'on aura neutralisé le contenu stomacal, Le même phénomène peut s'ob- server chez l'homme souffrant d'hyperchlorhydrie. Le flux salivaire agit chimiquement : c'est un {ux alcalinisant. Le principal rôle de la salive consiste à saccha- rifier l'amidon. On sait, depuis les travaux de MM. L. Maquenne et ainsi comme un excilo- dans l'estomac Action synergique de la salive et du suc pancréatique. Soc. de Biologie, 8 juin 1907. — L. G. Simon : L'activité diasta- Sique de la salive mixte. Journ. de Physiol. et de Pathol. générale, 15 mars 1907. Eugène Roux, que l'amidon contient deux sub- stances principales : l’une, l'amylose, facilement saccharifiable; l’autre, l'amylo-pectine, qui confère à l’empois sa consistance. En chauffant le malt à 80°, ces auteurs en ont détruit le ferment saccharifiant, tandis qu'ils ont vu subsister l'action liquéfiante. J'ai obtenu un résultat analogue avec la salive. Seulement, l'expérience est assez délicate : les deux ferments perdent leur activité à une température très voisine. À 70°, l'amylase est affaiblie, mais non détruite; à 76°, toute action est supprimée. C'est à 72° qu'on obtient les meilleurs résultats. La salive qui à été portée à cette température liquéfie encore l'empois, mais ne le saccharifie plus. On peut donc, comme pour le malt, parvenir à dissocier les deux effets. L'action saccharifiante varie dans diverses con- ditions, physiologiques ou pathologiques. Les recherches que M. Simon à poursuivies dans mon laboratoire établissent que, pendant les repas, la quantité et l’activité de la salive augmentent. L'intensité de la sécrétion dépend surtout de la sécheresse des aliments; elle est en rapport avec leur qualité physique. La puissance diastasique est en rapport avec leur qualité chimique; c'est au cours d'un repas composé exclusivement de fécu- lents qu'elle atteint son maximum. L'hypersécrétion et l'hyperactivité se prolongent pendant les deux heures qui suivent l'ingestion, c'est-à-dire pendant la durée de la digestion stoma- cale; entre la troisième et la cinquième heures quantité et activité tombent c'est l'indice d'une après le repas, au-dessous du taux primitif : sorte de fatigue, d'un épuisement de l'organe. Ces recherches mettent bien en évidence la loi de l'excitabilité spécilique des glandes. Quand les féculents prédominent, le ferment amylolytique est sécrété en abondance. Voici un autre exemple, encore plus saisissant peut-être, de la même loi d'adaptation. Si l'on fait agir de la salive sur du saccharose, on obliendra des traces de sucre interverti. Encore est-il que le résultat n'est pas constant. Sur huit échantillons de salive que j'ai examinés, je n’en ai trouvé que cinq renfermant une petite quantité d'invertine. Disons au sujet qui se prête à l'expé- rience de sucer un morceau de sucre; au bout de six où huit minutes, la salive sera devenue capable d'intervertir nettement le saccharose; et cette pro- priété, elle laura perdue, plus ou moins complète- ment, au bout d'une demi-heure. Quelques physiologistes admettent que la salive agit encore, mais d'une facon accessoire, sur d'autres substances; elle pourrait dédoubler cer- tains glucosides et même peptonifier la fibrine. Enfin, elle est capable d'aider indirectement à la H. ROGER — LA SÉCRÉTION SALIVAIRE digestion gastrique; en se mélangeant au lait, elle rend ce liquide aéré et mousseux; le caillot qui se produit dans l'estomac est spongieux, et, partant, plus facilement attaquable par le suc gastrique. Une fois déglutie, que devient la salive? La ptyaline agit encore dans les milieux légère- ment acides. Mais, dès que l'acidité augmente, elle ne tarde pas à perdre ses propriétés. C'est ce qui fait admettre que son action est transitoire et, par conséquent, peu importante. Dans le milieu acide de l'estomac, elle est rapidement annihilée. Les intéressantes recherches de Grützner con- duisent à une tout autre conclusion. Cet auteur fait avaler à des animaux d'espèces différentes, chiens, chats, lapins, cobayes, rats, grenouilles, des pätées colorées diversement. Au bout d'un temps variable, il enlève l'estomac, le congèle et le coupe. Les substances introduites les dernières se trouvent toujours dans la partie moyenne. Les premiers ali- ments sont appliqués sur la paroï et forment une couche protectrice; le suc gastrique ne peut pénétrer Jusqu'au centre de la masse; aussi la réaction y reste-t-elle alcaline, même après un séjour de deux ou trois heures, et l’action amylolytique de la salive continue facilement. La stratification alimentaire est surtout nette dans la région du grand cul-de-sac; à mesure que la digestion se poursuit, les aliments sont repoussés vers l’entonnoir pylorique, où s'achève la liquéfac- tion; la masse alimentaire s'acidifie dans sa tola- lité et le rôle de la salive semble définitivement achevé. IT La salive qui à perdu son action au contact du sue gastrique peut-elle être réactivée? Nous arrivons ainsi à l'étude d'un problème tout nouveau. Il résulte des recherches poursuivies dans mon laboratoire que la salive dont l’action à été détruite peut encore contribuer à la saccharification. Envisageons l'influence la plus brutale, celle de la chaleur. Je chauffe de la salive humaine au-dessus de 80°. Tous les physiologistes sont d'accord pour admettre qu'à cette température le ferment est complètement et irrémédiablement perdu. Si j'ajoute, en effet, de l'eau amidonnée, aucune saccharification ne-se pro- duit. Je prends de la salive et, après l'avoir centri- fugée, je la distribue dans des tubes à raison de 2 centimètres cubes, puis je chauffe pendant dix ou quinze minutes au-dessus de 80°, entre 85 et 100. A cette salive rendue inactive, j'ajoute 10 centi- mètres cubes d’eau amidonnée à 1 °/, et une goutte, soit 0 €. €. 05, de salive fraiche. Cette goutte de salive, versée dans une même quantité d'eau ami- donnée, donne dans l'étuve à 37°, après un séjour d'une demi-heure, 0 gr. 007 de sucre, compté en glycose (moyenne de 14 dosages). Or, les tubes qui ont élé additionnés de salive chauffée, c'est-à-dire de salive inactive, sont bien plus riches en sucre; ils en contiennent de 4 à 5 fois plus, soit en moyenne 0 gr. 032 (moyenne de 21 dosages). Si l'on diminue la dose de salive chauffée, la sac- charification est un peu moins intense; cependant, | avec 1 centimètre cube, elle atteint encore 0,025 {moyenne de 13 exp.), au lieu de 0,007 gr. La quantité de sucre produite est d'autant plus considérable que le chauffage a été moins élevé. Cependant, les différences ne sont pas très mar- quées, comme le démontrent les chiffres suivants (la quantité de salive soumise à la chaleur était de 2 centimètres cubes) : TEMPÉRATURE QUANTITÉ DE SUCRE 850. . 0E047 900. 0.045 HSE 0,041 1000. . 0,033 Si l’on augmente la dose de salive fraiche, les dif- férences restent très nettes, mais sont moins consi- dérables. En ajoutant à 1 centimètre cube de salive chauffée 2 gouttes de salive normale, on obtient 0,029 de sucre, alors que ces deux gouttes, à elles seules, donnent avec le même empois 0 gr. 014 (moyenne de 7 exp... En diminuant la dose de salive fraiche, on obtient des résultats plus intéressants. Voici une de mes expériences. Chaque tube renfermait 2 centimètres cubes de salive humaine, préalablement chauffée à 85° pendant 15 minutes; on avait ajouté 10 centi- mètres cubes d'eau amidonnée à 1°/,,etenfin on avait réactivé avec des quantités décroissantes de salive fraiche. On avait fait en même temps une deuxième série de tubes contenant l'empois pur et les mêmes doses de salive active : QUANTITÉ DE SUCRE SE QUANTITÉ Tubes Tubes de contenant la salive contenant salive fraiche chauffee l'eau amidonnée cent. cubes grammes grammes 0,0%. . 0,037 0,004 002% 0,033 0,003 U'01 EE 0,022 0,003 0,005 . . 0.013 0,002 0.0025. . 0 :007 û DODI25 0 Ce 0,002 (l : D'DODBE EEnT (l (L : La salive chauffée reprend-elle au contact de la salive fraiche son pouvoir antérieur? Il suffit de faire agir sur de l’eau amidonnée des doses crois- santes de salive. H. ROGER — LA SÉCRÉTION SALIVAIRE 547 Voici les moyennes fournies par 34 dosages: cent. cubes grammes MISE LM IT DORE ET à C,007 0,1. 0,014 0,2. 0,023 0,25 Ô . 0,034 DÉDÉSERER CU 2 CC NERCR 0.047 I RÉ RMOMEeE à 0.07 2 : 0,074 Le mélange de 2 centimètres cubes de salive chauffée et d'une goutte de salive fraîche donne en moyenne 0,032 gr. de sucre; c'estce que l'on obtient avec cinq gouttes de salive normale. Les résultats que j'ai rapportés soulèvent toute une série d'hypothèses. On peut se demander s'il n'existe pas dans la salive deux substances, une substance sensibili= satrice el une substance hydrolysante. Ce serait élendre à cette sécrétion les résultats obtenus dans l'étude d’un grand nombre de processus biologiques. Il est vrai que, dans nos expériences, le chauflage est tellement élevé qu'on hésite à admettre une pareille interprétation. On peut supposer que l’action adjuvante de la salive chauffée est due à la présence des matières organiques; on sait que les peptones favorisent l'amylolyse, mais cette influence est beaucoup moins marquée que dans mes expériences. La salive conserve donc une certaine action spécifique. Ces premières recherches nous éloignent des con- ditions physiologiques. Les expériences suivantes vont nous y ramener. III Prenons de la salive et mettons-la en contact avec du sue gastrique. Le pouvoir saccharifiant est rapidement perdu. Au bout de quelques heures ou même de quelques minutes, on peut neutraliser le mélange ; la saccharification ne se produit plus. Cette action défavorable dépend en grande partie de l'acide chlorhydrique. Cependant, à égalité de dose, l'acide agit moins énergiquement que le suc gastrique artificiel. Après avoir été soumise à l'action, même pro- longée, de l'acide chlorhydrique ou du suc gas- trique, la salive n'est pas devenue complètement inactive. Pour qu'elle puisse servir à la saccharifi- cation, il suffit de lui ajouter une trace de salive fraiche. Voici, à titre d'exemple, une de mes expériences: Dans des tubes contenant chacun 4 centimètre cube de salive humaine, j'introduis 4 centimètre cube de suc gastrique artificiel ou d'eau acidulée. La teneur en acide varie, dans les deux séries, de 0,3 à 10°/,. Après être restés pendant dix-huit heures à 37°, les liquides sont neutralisés. Puis je verse dans chaque tube 10 centimètres cubes d’eau amidonnée à 1 °/,. Des tubes ainsi préparés, les uns sont gardés comme témoins, les autres recoivent chacun une goutte, soit 0 c.c.05, de salive fraiche. Après un nouveau séjour d'une demi-heure à l’étuve, les fermentations sont arrêtées par immer- sion dans l'eau bouillante et les dosages sont pra- tiqués suivant les procédés habituels. Le tableau suivant rend compte des résultats. La série L se rap- porte au suc gastrique, la série IT à la dilution d'acide chlorhydrique. La colonne À comprend les tubes témoins; la colonne B comprend les tubes réactivés par la salive fraiche. Le sucre est compté en glycose : TENEUR I II en ES ST HCI A B A B A0 0/0 (] 0,035 (l 0,04 ) — û 0,038 (] 0,043 25 — (l 0.04% 0,001 0,043 1,25 — . 0,006 0,048 0,008 0,045 0,6 —. 0,009 0,049 0,05 0,051 0,3 — 0.05 0,057 0,052 0,052 La goutte de salive qui à servi à réactiver les liquides donnait, dans 10 centimètres cubes d’eau amidonnée, 6 milligrammes de sucre ; 1 centimètre cube donnait 54 milligrammes. Il est intéressant de remarquer que l'action de l'acide chlorhydrique ou du sue gastrique ne se fait pas suivant une courbe régulière, En diminuant les doses de moitié, selon une progression géomé- trique descendante, on voit que les effets défavo- rables cessent brusquement. Dans l'expérience que je rapporte, un suc gastrique artificiel contenant 0,6 °/,, HCI entravait fortement la saccharitica- tion ; celle-ci est presque normale avec une dose moitié moindre. Si l'on emploie une simple dilu- tion d'acide, l'effet est le même, mais la quantité d'acide qui est supportée est deux fois plus consi- dérable. Il va sans dire que ces chiffres n'ont pas Les effets varient suivant l'échantillon de salive, mais ils obéissent toujours une valeur absolue. à la même règle. Si l'on compare ces expériences avec celles que j'ai poursuivies sur la salive chauffée, on trouve entre les deux séries de recherches les plus grandes analogies. La seule différence porte sur l'intensité de l'attaque. Le suc gastrique ou l'acide agissent moins énergiquement et moins profondément que la chaleur. Il est d'ailleurs possible que ce rappro- chement soit plus apparent que réel. Peut-être les modifications sont-elles tout à fait différentes dans les deux cas. Un autre résultat, assez curieux, c'est qu'avec une faible dose d'acide, la salive n'es pas complè- tement annihilée: elle saccharilie faiblement, mais elle saccharifie encore; elle produit, par exemple, | S ou 9 milligrammes de sucre. La salive normale, | versée à la dose minime d'une fraction de goutte dans de l’eau amidonnée, donne une plus faible proportion de sucre, et cependant elle est capable part de son influence. Il est donc nécessaire qu'il y ait au moins une trace de salive normale pour que le processus saccharifiant puisse reprendre. Le ferment affaibli ne peut jouer le même rôle. L'action de la salive normale peut être mise en évidence par une autre méthode, en apparence plus ; conforme que la précédente à ce qui se passe dans les conditions physiologiques, en réalité plus com- de rendre à la ptyaline inactive la plus grande plexe. Dans 100 centimètres cubes d'empois d'amidon à 3°/,, Je verse de la salive; j'agite rapidement le mélange; je prélève une petite quantité pour doser le sucre produit et je verse le reste dans 50 centi- mètres cubes d'un sue gastrique artificiel, dont l'acidité est de 2,4°/,,. Je laisse en contact trois heures dans l'étuve à 37°. Au bout de ce temps, la quantité de glycose à légèrement augmenté. Elle était primitivement de 4 milligrammes; elle est montée à 5 milligrammes pour 10 centimètres cubes d'empois. La fermentation est d’ailleurs complète- ment arrêtée, et, si l’on neutralise le liquide, elle ne reprend pas. J'ajoute alors dans 10 centimètres cubes une goutte de salive et, au bout d'une demi- heure, je trouve 51 milligrammes de sucre; avec 2 gouttes, la quantité de sucre atteint 80 milli- grammes. Dans les tubes témoins, contenant sim- plement de l’empois, les mêmes doses de salive donnent 5 et 20 milligrammes de sucre. Les différences sont, on le voit, très considé- rables ; mais il faut remarquer que la salive ajoutée à l'empois a eu le temps de produire, avant d’être soumise à l’action du suc gastrique, non seulement une petite quantité de sucre que le dosage met en évidence, mais aussi une certaine quantité d'ami- don soluble et de différentes dextrines. Elle à donc commencé la saccharification et préparé la termi- naison finale. Si nous rapprochons nos diverses recherches, nous arriverons aux deux conclusions suivantes : arrête rapidement l'action amylolytique de la salive, et la neutralisation du mélange ne permet pas au ferment de reprendre Le suc gastrique son action. Il suffit d'ajouter une trace de salive fraiche pour qu'une abondante saccharification se pro- duise. Le résultat tient bien de la présence de la salive; la pepsine ou le chlorure de sodium résultant de la l'acide sont sans influence neutralisation de aucune. H. ROGER — LA SÉCRÉTION SALIVAIRE IV On peut admettre que, dans les conditions phy- siologiques, une petite quantité de salive échappe à l’action du suc gastrique et vient, dans le milieu alcalin du duodénum, réactiver la salive altérée. Mais on est immédiatement conduit à se demander si le suc pancréalique n'exerce pas une influence analogue. Ce suc contenant également un ferment amylolytique, il est tout naturel de supposer qu'il agit synergiquement avec la salive et sert à la réactiver. Pour résoudre ce nouveau problème, j'ai entre- pris, avec l’aide de M. Simon, plusieurs séries d'ex- périences. Le suc pancréatique à été recueilli sur des chiens auxquels on introduisait une canule dans le canal de Wirsung; la sécrétion a été provo- quée par des injections intra-veineuses de sécrétine. Nos expériences ont été conduites de la facon sui- vante : Nous mettons 10 centimètres cubes de salive humaine en contact avec 10 centimètres cubes de. suc gastrique artificiel contenant 2,5 °/,, de HCI. Nous laissons dix-huit heures à l’étuve; puis nous alcalinisons légèrement le mélange et nous le dis- tribuons dans des tubes à raison de 2 centimètres cubes. Nous ajoutons 10 centimètres cubes d'eau amidonnée à 4 °/,. Un tube est gardé comme témoin; aucune saccharification ne s'y produit; la. salive a donc perdu sa propriété fondamentale. Dans les autres tubes, nous ajoutons du suc pan- créatique; comme ce suc est très actif, nous n'em- ployons que des fractions de gouttes. Par compa- raison, nous additionnons un des tubes d'une goutte de salive humaine. Nous placons ces divers mélanges à l'étuve pendant une demi-heure. Puis nous arrê- tons les fermentations en plongeant les tubes dans de l’eau bouillante et nous dosons le sucre formé. Nous avons toujours le soin de faire agir les. mêmes quantités de salive et de suc pancréatique. sur une dose identique d'eau amidonnée. Voici les chifires obtenus dans deux séries d'ex= périences. La colonne À comprend les tubes ren- fermant la salive annihilée par le suc gastrique; la colonne B comprend les tubes témoins renfermant l'eau amidonnée : QUANTITÉ ÉLAPAE ge en gouttes A B A B Sue pancréalique : 1/64 . 0,00 0.004 0,029 0,006 1/32 0,015 0,008 0,033 0,007 1/16 0,027 0.01 0,041 0,008 1/8. 0.039 0,023 0,045 0,009 1/4. 0,046 0,034 0,046 0,013 1/2. 0,047 0,039 0,047 0,018. 4 ” » 0,052 0,027 2. 5 Ù » 0,057 0,033 Salive : 4” 0,024 0,006 0.045 0,00% 20 » 0.044 » » H. ROGER — LA SÉCRÉTION SALIVAIRE 549 Les résultats des deux séries sont concordants; s'ils ne sont pas absolument superposables:{ c'est que nous mettons en présence deux liquides de sécrétion, dont la la résistance el l'activité sont évidemment variables. On peut répéter avec le suc pancréatique l'expé- rience que nous avons faite avec la salive. Dans 200 centimètres cubes d'un empois d'amidon à 3°/,, nous versons 20 centimètres cubes de salive. Nous agitons vivement, Au bout de quinze secondes, nous prélevons 10 centimètres eubes du mélange : la quantité de sucre est de 0 gr. 003. Nous plon- geons le reste dans 100 centimètres cubes d'un suc gastrique artificiel contenant 2,5 °/,, de HCI. Nous laissons trois heures à l’étuve. La teneur en sucre est montée à 0 gr. 005. Nous alcalinisons légèrement le liquide, nous le distribuons dans des tubes à raison de 10 centimètres cubes. Nous ajoutons ensuite, ainsi que dans des tubes témoins conte- nant simplement de l'empois d'amidon, des quan- tités variables de suc pancréatique ou de salive. Au bout d'une demi-heure, nous faisons les dosages. Voici les résultats : constitution, QUANTITÉS TUBES TUBES en contenant 10 c.c. contenant 10 c.c. gouttes du mélange d'empois d'amidon Sue pancréatique : De ere 0,005 0 1/64. 0,013 traces 4/32: 0,019 0,002 1/16. 0,028 0,005 1/8 . 0,044 0,008 1/4 . 0,062 0,021 AD er AE 0,069 0,031 ANR Er NE 0,09 0,04 et Note 0,69 0,056 k. 0,09 0,08 Salive : PE ADN TER 0,034 0,002 INERENTE PA 0.051 0,005 DE 0,079 0,019 12 » 0,05 OMAN » 0,063 AU e- » 0,1 Un caleul très simple établit que chaque tube contenait 0 ce. 6, soit 12 gouttes, de salive annihilée par le sue gastrique. Ces 12 gouttes donnant 0 gr. 05 de sucre, c'est, semble-t-il, au contact de 2 gouttes de suc pancréatique que la salive à re- trouvé son action. Il faut cependant remarquer que cette expérience est très complexe. La salive ne produit pas seulement du sucre. Au moment où le sue gastrique à agi, elle avait transformé une certaine quantité d'amidon en amidon soluble et en dextrines, substances facilement saccharifiables. Notre expérience n'a done de la valeur que si on la rapproche des recherches précédentes. V Bien qu'incomplètes, les expériences que J'ai rapportées mettenten lumière divers résultats nou- veaux ou peu connus. Elles établissent la multi- plicité des actions exercées par la salive. Elles démontrent le rôle de cette sécrétion dans les mou- vements de l'œsophage, dans la neutralisation de l'hyperacidité gastrique. Enfin, elles établissent nettement l'adaptation spécifique des ferments, de la ptyaline et de l’invertine salivaires. Le fait le plus important, c'est que l'action zymotique de la salive continue au delà de l’es- tomac. Pour ne rien préjuger de la nature des phé- nomènes, il est plus exact de dire qu'après avoir été annihilée par le sue gastrique, la salive colla- bore activement, dans l'intestin, à la saccharitica- Lion de l'amidon ; elle agit synergiquement avec le suc pancréalique. On voit avec quel soin est assurée, dans l'orga- nisme, la saccharification de l’amidon. C'est que les féculents jouent dans l'alimentation et la nutri- tion un rôle primordial. Aussi les ferments amylo- lytiques sont-ils extrêmement répandus. On en trouve dans presque toutes les sécrétions, on en trouve dans.les organes, dans les tissus, dans le sang. Si l'amidon pouvait échapper aux divers ferments qu'il rencontre dans le tube digestif, S'il pénétrait dans l'économie, il serait rapidement transformé en sucre et ainsi il pourrait encore remplir le rôle important qui lui est dévolu. H. Roger, Professeur de Pathologie expérimentale à la Faculté de Médecine de l'Université de Paris. 3550 CHARLES PLAYOUST — UNE PAGE DE L'HISTOIRE DES MATHÉMATIQUES UNE PAGE DE L’HISTOIRE DES MATHÉMATIQUES EN FRANCE AU XVI SIÈCLE Les travaux de Paul Tannery sur les Œuvres de Fermat, les Œuvres de Descartes, ses publications sur une Correspondance d Ecolätres au XT° siècle et le Traité du quadrant de maître Robert Anglès ont été une intéressante mise au point de l'état de la Science avant et après le xvi° siècle. Durant ce der- nier, les Maîtres n'ont pas manqué, dont pourtant Jacques Pele- üer du Mans, Jean Borrel Butéon et Guillaume Gos- les noms sont peu où point connus : selin de Caen, ont été signalés à l'attention du public mathématique par un article excellent de M. Wer- theim, de Francfort’, sur la Logistica de Butéon . (Joan Buteonis Logistica quæ et arithmetica vulgo dieitur. Lyon, MDLIX) et par deux articles très documentés de M. IH. Bosmans, de Bruxelles, l'un° sur le Je Arte magna de Guillaume Gosselin (Paris, MDLXXVII), l'autre* sur l'AZgèbre de Jacques Pele- ter (Paris, MDLIV). C'est à M. Bosmans que j'em- prunte les éléments de cette rapide étude. Il est curieux de constater les bégaiements, les gaucheries de ces premiers initiateurs de la théorie des équations; et l’on se prendrait volontiers à sou- rire de leur naïf enthousiasme à la découverte de tel procédé, aujourd'hui familier aux tout débutants, si l’on ne se souvenait que la Science est redevable à la patience et à l'ingéniosité de ces vieux cher- cheurs de la simple élégance de ses méthodes actuelles. [. — LE CALCUL ALGÉBRIQUE. L'Algèbre, dit Gosselin, a pour but de déterminer la valeur des inconnues, ce qui se fait au moyen des équations. Dans l'idiome de Peletier, la cos est l'algèbre; les nombres cossiques sont les expressions renfermant l'inconnue; les signes cossiques les lettres et autres caractères graphiques par lesquels on les représente. Les absolus où nombres absolus sont les termes tout connus; les absolus des cos- siques les coefficients des inconnues. Il est à noter que jamais les quantités-connues ne sont représen- tées par des lettres, mais loujours par des chiffres. Les nombres radicaux sont les puissances exactes des nombres entiers; chaque nombre radical porte lui-même un nom particulier. Le premier nombre radical est « le quarré, lequel nous appellerons « nombre censique; de ce mots cens, comme si un , ————————————————_—_—_—_—_____ tr 1 Bibliotheca Mathematica, 3° sér., t. IN, pp. 213-219. * Bibliotheca Mathematica, 3° sér., 1. VII, pp. 44-66. * Revue des Questions scientiliques, janvier 1907. « nombre quarré fust le cens ou revenu de sa Le second nombre radical est le cubique, puis viennent le cen- sicensique, le sursolide ou premier relat, le censi- cubique, etc... De même, chaque puissance a sa notation propre, variable avec chaque auteur. Pele- tier emploie quelques caractères qui ne font pas partie de l'alphabet. Gosselin en fixe le sens dans le tableau suivant : « racine multipliée par soy-mesme ». L.2.0.4.C.8.00.16.RP.32.0C.64.RS.128. CC. 512 (1). D'après cela, l'équation : 12 LM 1 QP 48 œqualia 144 M 24 LP 2 Q se transeril en écriture moderne : 12X — x? +48 —146—2:x +2 x, car il est à remarquer que les algébristes francais ne se servent pas encore des signes + el —, bien qu'ils soient d'un usage courant en Allemagne*. Au lieu et place de ces signes, ils emploient les lettres P.et M. ou p.et m.,ou même ne mettent rien, comme on le voit dans certains exemples de Gosselin : Agate 4 1 1 1 1DTAZ BC æquale 13 pour DTA SRB PRES Gosselin emploie pour les radicaux, soit simples (latera), soit composés (Zatera ligata), des notations auxquelles il faut s'habituer : ainsi LCS, LL16, LVLIOPLS, LVCL5PLC10 doivent se lire : V8 Vie VV LE Ve NV VS El Le calcul algébrique ne donne guère lieu à obser- valions; on dirait de nos manuels d'Algèbre élé- mentaire, dont on aurait cherché à vieillir le style. Pourtant la théorie de la division est signalée avec insistance comme quelque chose de nouveau (am in Cardano modum hunc non invenies) : « Il faut bien adviser qu'en la division les signes cossiques soyent mis tout consécutivement, de telle sorte que nul des entredeux soit obmis. » C'est dire qu'il faut ordonner les polynômes dividendes et divi- seurs, en tenant Peletier donne un exemple emprunté à Stifel, et s'écrie triomphant : « Par cette prattique se peut cognoistre, qu'il n'y à rien qui ne soit réduisible compte des coefficients nuls. en art. » On peut noter aussi l'habitude de bitrer au fur et à mesure les éléments employés, ainsi { RP.,RS., signifient: Relatum primum, Relatum secundum. ? Arithmetica integra. Authore MICHABLE STIFELIO. Vorim- bergæ, MDXLIII. ht ‘as tut à un fé cn nd 1 “nr d & TS _ Lie CHARLES PLAYOUST — UNE PAGE DE L'HISTOIRE DES MATHÉMATIQUES 531 que le déplacement fort usité du diviseur à chaque nouveau terme, afin de garantir la sûreté de lopé- ralion. Peletier passe à côté de la théorie des logarithmes sans en soupconner l'importance. D'ailleurs, au xvI' siècle, ils étaient considérés comme sans utilité et simples jeux d'esprit (Jucunda tractatio), récréa- tions mathématiques sur la théorie des nombres. II. — LES ÉQUATIONS A UNE INCONNUE. Peletier nomme extraction de racines la résolu- tion des équations à une inconnue : ce nom étrange provient de la coutume systématique d'isoler, dans le premier membre, le plus haut signe, c'est-à-dire la plus haute puissance de l'inconnue dont on à, au préalable, ramené le coefficient à l'unité, Trouver la première puissance de celle inconnue, quand on en connaissait l'expression d'une puissance supé- rieure, se disait très naturellement : en extraire la racine. Combien y a-t-il d'espèces d'équations? « Quel- ‘ques géomètres, dit Gosselin, soutiennnent à tort que le nombre des équations est illimité. Mais si on veut bien faire réflexion que toute quantité con- tinue est ligne, surface ou corps, on devra convenir qu'on ne peut raisonnablement admettre que trois espèces d'équations; el prévoyant les objections que soulèvera pareille assertion — on possédait la solu- tion de l'équation du quatrième degré — il ajoute : utut sit, nostra hæc est sententia, quam postea, Juvante Deo, demonstrabimus. Pour la résolution de l'équation du premier degré, rien de saillant quant à la méthode. Peletier fait pourtant remarquer, à propos de la {ransposi- tion des lermes : « Tout cecy est fondé sur ceste commune conception d'entendement, qui est que si de deux égaux vous ostez portions égales, les remanents sont égaux. Vous voyez comme l'Algèbre fait son proffit de choses si confessées et si vul- gaires, par le moyen desquelles se résolvent des difficultés qui semblent être impossibles à soudre, » Il est intéressant, au point de vue historique, de relever, Lant chez Butéon que chez Peletier et Gos- selin, des exemples d'équations dont le premier membre est égalé à zéro. L'opinion qui a cru long- temps voir dans l'exemple proposé par Stifel un cas isolé, semble ainsi controuvée. Les algébristes de la seconde moitié du xvr° siècle emplovaient cette notation, que Descartes ne fitque systématiser. La résolution de l'équation du second degré, ou extraction de racine censique, n’a rien de neuf. On ramène l'équation à l’une des trois formes : X—pX +9 =G—PX, X—=px—(. Les formules de résolution sont déjà classiques : on n'est pourtant pas peu étonné de voir la que- relle que Gosselin cherche à Nonius. Celui-ci, à propos de l’équation où le terme du second degré est affecté d’un coefficient, el que nous écririons : ax bx —C indique les transformatious suivantes : &a°x? + 4abx = kac (2ax + D}? = b? + 4ac PR DE ac — h ä Gosselin n'a pas assez d'ironie pour critiquer ce procédé! Pourquoi cette multiplication par 4a? Pourquoi surtout prendre pour inconnue 2x? on pourrait tout aussi bien prendre 3x, 4x, ete.! Peletier signale l'équation x? = px — q comme admettant deux solutions; de fait, elle a deux racines positives quand p et q sont positifs. Ignore- t-il les nombres négatifs? Il semble pourtant en avoir pressenti l'utilité, car, à propos de certain problème, il fait remarquer que l'on pourrait encore vérifier cet exemple, « mais c'est par nombres absurdes qui sont nombres feincts au-dessous de rien » et il ajoute : « Vous voyez les nombres feincts au-dessous de rien n'estre pas sans usage, car par eux se fait la preuve des exemples et se montre la vérification des règles. » A l'occasion des équations du second degré, Peletier explique d'une façon élégante l'extraction de la racine carrée des polynômes, sans pourtant y attacher d'autre importance que celle d'un pur jeu d'esprit; car, dit-il, « l'opération, pour réussir, doit s'exécuter sur un exemple cherché et faict artificiellement ». La partie la plus originale de l'Algèbre de Pele- tier est sa « nouvelle et compendieuse manière de trouver l'estimation et valeur des équations ». Cette invention compendieuse consiste à se servir des propriétés des racines pour résoudre les équa- tions : on y trouve quelques-unes des plus anciennes propositions connues, énoncant cerlaines propriétés des racines en fonction des coefficients. Par exemple, si l'équation du second degré est de l’une des deux formes : =(p+1)x—p, x=— p est nécessairement racine de l'équation. Si une équation du troisième degré (à coefficients entiers) d'une des formes : x2—(p —A)x +p, X8— px? + q, X3— px? — q, X—IQ px; admet une racine rationnelle entière, le carré de cette racine doit être un diviseur entier du terme tout connu. Il réclame en termes exprès la paternité de ces théorèmes. Mais un des titres de gloire les plus sérieux que l'on puisse revendiquer pour sa 552 CHARLES PLAYOUST — UNE PAGE DE L'HISTOIRE DES MATHÉMATIQUES mémoire, est d'avoir indiqué, pour la recherche des racines rompues rationales d'une équation, un pro- cédé, très imparfait sans doute, mais qui, en se perfectionnant, est devenu la théorie de la recherche des racines commensurables des équations. On ne peut s'empêcher de constater combien infructueux et rares sont, chez les algébristes de cette époque, les essais de généralisation. Ils ont surtout souci « d'exemplifier l'énoncé des règles », et l'emploi des chiffres pour représenter les quan- lités connues devait s'opposer nécessairement à tout développement général. On remarque égale- ment combien sommaire est la discussion des pro- blèmes, souvent réduite à une simple vérification. Le chapitre que Gosselin consacre à l'équation du 3° degré est très court, fort incomplet, et ne signale même pas tout ce que l’on savait alors de la résolution de cette équation; il se contente de dire que le problème n'a pas encore recu de solution complète, qu'il en reparlera plus tard.… IIT. — LES ÉQUATIONS A PLUSIEURS INCONNUES. Les équations à plusieurs inconnues se rencon- trent déjà chez Diophante; mais l'algébriste grec n'employait jamais plus d'un signe graphique pour désigner les inconnues. On discute pour savoir à qui revient l'honneur d'avoir le premier représenté les inconnues multiples par des lettres différentes. Quoi qu'il en soit, Peletier en fait usage, et s'efforce d'en faire apprécier l'utilité à ses compatriotes. Il y avait là une hardiesse qui est plus que d'un simple vulgarisateur; car, à cette époque, des maitres tels que Scheubelius et Gemma Frisius faisaient fi de la découverte. Mais autre chose était de concevoir simplement l'idée des équations à plusieurs lettres, autre chose de réussir à les résoudre avec une facile élégance. La théorie des racines secondes est loin d'être cons- tituée, Ainsi Butéon, en 1559, pose le problème : Inveniamus quatuor numeros quorum primus cum semisse reliquorum faciat 17; secundus cum aliorum triente 12; tertius cum aliorum quadrante 13; item quartus cum aliorum sextante 13, c'est-à-dire, soit à résoudre le système : 1 X+s(yY+z+t)=11; yLl(xL2+5—15; z+S(x+y 013; + 1, NOT t+=(x+Fy+7)—=13. œ Butéon en essaie la solution de trois manières diffé- rentes, ettrois fois il s'embrouille; il arrive, par des soustractions, à réduire le noinbre des inconnues à deux, mais ne parvient à achever que par tâtonne- ments. Le premier, Gosselin trouve moyen, en 1578, de résoudre le problème d'une manière sûre et méthodique, en éliminant régulièrement les incon- nues et ramenant successivement le système à des systèmes d'équations à trois, deux et une inconnue. Il s'en montre très fier, surtout après F'aveu découragé de son devancier, qui avait caché sa déconvenue sous « l'obscurité innée de ces choses, que l’art peut bien éclaircir un peu, mais en aucune facon dissiper complètement ». Quelle est la cause de cette étonnante impéritie? M. Bosmans signale comme probable l'influence de Diophante, lequel n'employait qu'une seule lettre pour désigner les inconnues; d'où nécessité, passée à l'état de principe avoué chez tous les algébristes, d'exprimer, le plus tôt possible, la valeur de toutes les inconnues en fonction d'une seule..., d'où com- plication des solutions. La méthode de résolution d'un système d'équa- tions par quantités sourdes est assez mal définie par Gosselin. Les quatre problèmes qu'il traite par cette méthode ont tous pour notes caractéristiques, d'abord l'emploi explicite d'une seconde inconnue, « la quantité sourde », ensuite une espèce d'élimi- nation par substitution. Mentionnons encore pour mémoire, chez Peletier, une espèce de commentaire du 10° livre des Éléments d'Euclide, relatif aux nombres incommensurables et à la théorie des radicaux; il apporte des simplifi- cations au calcul des radicaux, à la transformation des radicaux superposés en somme ou différence de radicaux simples. L'initiative est heureuse à une époque où cette partie des Mathématiques est encore dans un état si rudimentaire. Somme toute, du De arte. magna de Gosselin, ouvrage que Kästner qualifiait de sebr qut, nur kurz, il ressort que cet auteur eut l'art de jeter la lumière sur les découvertes des autres, de les perfectionner et de les mettre à la portée du plus grand nombre. Quant à Pelelier, plus hardi que son contemporain, il fit preuve d'un talent vraiment original et tint le premier rang parmi les mathématiciens francais de son temps. Cela suffit, comme l'a dit M. Enestrüm, pour qu'il ne soit plus permis de passer son nom complètement l'histoire de l'Algèbre. sous silence dans Charles Playoust. . BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX ue 553 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Nielsen (N.), Privat-Docent de Mathématiques à l'Université de Copenhague. Handbuch der Theorie der Gamma-Funktionen. TRAITÉ DE La THÉORIE DES FoncrIONs Gamma. — 4 vol. in-8° de 326 pages. (Prix : 16 fr.) B. G. Teubner, éditeur. Leipzig, 1907. La fonction gamma a joué un rôle important dans le développement de l'Analyse moderne, et cependant, depuis l'apparition du Traité de Legendre, aucun auteur ne lui à consacré un ouvrage spécial. Le pré- sent volume est le résultat de plus de vingt années d'études et de recherches de l’auteur; c'est une revue d'ensemble des principales propriétés de la fonction gamma et des fonctions voisines, sous la forme la plus élémentaire possible. Aussi nous ne doutons pas qu'il ne rencontre un accueil favorable dans le milieu des mathématiciens. Stodola |A.), Professeur à l'Ecole Polytechnique de Zurich. — Les Turbines à vapeur (Zraduction fran- çaise, d'après la 3° édition allemande, par M. E. Han, Directeur du Laboratoire de Mécanique à l Univer- sité de Nancy). — 1 vol. gr. in-8° de 633 pages avec 434 figures. (Prix : 25 fr.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1907. Le traducteur de ce remarquable traité signale, dans sa préface, la pauvreté relative de notre littérature scientifique française dans l'important et fécond do- maine des turbines à vapeur. Il n'existe, en effet, que deux ou trois ouvrages écrits dans notre langue sur la question, ouvrages d'un caractère plus descriptif que théorique, et un certain nombre de monographies, d'une valeur incontestable, mais éparses dans les revues techniques. L'œuvre de M. le Professeur Stodola, dont la troisième édition allemande va être épuisée, est, au contraire, un traité complet de la matière, dans lequel l'auteur expose une théorie savante, basée sur une connaissance parfaite des éléments du problème et sur de remarquables recherches originales; ce n’est pas une compilation érudite et documentée : c'est une étude approfondie et personnelle, à laquelle la grande autorité du professeur éminent de l'Ecole Polytechnique de Zurich donne une valeur considérable. [1 fallait donc que ce livre fût traduit et M. Hañn doit être félicité d’avoir osé entreprendre ce travail considérable, et de l'avoir mené à bonne fin. Le livre de M. Stodola est écrit avec une méthode et dans un ordre que nous devons faire ressortir d’abord et dont témoignent les titres des sept chapitres qui le composent. Chapitre I : Théorie élémentaire de la turbine ; Chapitre IT : Influence des résistances opposées à l'écoulement de la vapeur ; Chapitre HT : Théorie thermodynamique de la tur- bine ; Chapitre IV : Construction des pièces principales des turbines ; ü Chapitre V : Etude des systèmes principaux de tur- bines ; Chapitre VI : Problèmes spéciaux de la théorie et de la construction des turbines; Chapitre VIT : Considérations sur les machines ther- miques et leur avenir. La théorie élémentaire conduit à la détermination des dimensions, de la puissance et du rendement des turbines à l’aide du théorème sur les quantités de mou- vement; mais une théorie plus complète exige d'abord l'étude de l'influence des résistances rencontrées par la vapeur, qui produisent des pertes d'énergie cinétique et des variations de température et de titre de la vapeur; ces effets doivent être connus avant d'aborder les équations donnant les transformations de l'énergie dans les aubages de la turbine et l'état final de la vapeur à sa sortie. M. Stodola emprunte à la Ther- modynamique et à ses belles expériences person- nelles les données dont il a besoin pour établir sa théorie et aboutir au calcul définitif des éléments d'une machine. Il s'attache en particulier à l'analyse des effets des ajutages de diverses formes, de la récupéra- tion de la chaleur engendrée par les frottements, de l'influence du frottement des roues, ete., et recourt avec habileté aux diagrammes entropiques, suivant les méthodes de Mollier et de Boulvin et en utilisant les abaques de Proell. Les praticiens trouveront dans ce livre deux cha- pitres, spécialement écrits pour eux, consacrés à l'étude des principaux systèmes de turbines et de leurs détails de construction; l'auteur décrit avec précision les divers types et il enrichit ses exposés par de nom- breux renseignements empruntés à son expérience et aux indications qui lui ont été fournies par ceux qui construisent et par ceux qui emploient les appareils. L'intelligente libéralité des mécaniciens lui a permis d'illustrer son texte par des figures soignées, qui sont de véritables dessins d'exécution, reproduits avec toutes les coupes utiles, et accompagnés de cotes exactes. La publication de semblables documents montre que les constructeurs ne craignent pas la concurrence. Un curieux chapitre est celui dans lequel sont passés en revue les innombrables brevets pris chaque jour par des inventeurs en quête de nouveautés sensationnelles, et trop souvent ignorants des résultats les plus élémen- taires de la théorie : M. Stodola y relève « une foule de propositions absurdes ». Il déclare, d'ailleurs, qu'il « ne faut pluss'attendre à voir paraitre quelque grand prin- cipe inconnu, capable d'entrainer des modifications profondes dans les systèmes actuels ». Sous le nom de problèmes spéciaux de la théorie sont étudiées quelques questions qui n’ont pu trouver place dans les chapitres précédents, ou bien que l’au- teur à traitées sans doute dans l'intervalle de la publi- cation des éditions successives de son ouvrage : nous y signalerons en particulier des considérations sur la vitesse critique des arbres de diamètre variable chargés uniformément sur toute leur longueur. Ce chapitre VI, ainsi que le dernier, consacré à des généralités sur les machines thermiques, gagnerait à être incorporé dans les études théoriques et pratiques qui forment le corps du traité. Ce remaniement sera opéré sans doute dans Ja nouvelle édition qui est en préparation. L'examen sommaire de la turbine à gaz est rejeté à la fin du livre; on trouvera, dans les quelques pages qui lui sont consacrées, l'indication d'une méthode semi- analytique et semi-graphique de calcul des dimen- sions. M. Stodola ne paraît pas convaincu du grand avenir que quelques ingénieurs ont entrevu pour ce genre de machines et il déclare, non sans raison, que ces turbines ne permettront probablement pas de réaliser de progrès dans l'utilisation de la chaleur ; 1l énumère, d'autre part, les difficultés toutes spéciales que présentera leur construction. Le compte rendu que nous venons de faire de l'œuvre magistrale du savant professeur de Zurich est assuré ment trop bref pour mettre en pleine lumière toutes les richesses qu'elle renferme ;-mais ce que nous en avons dit suffira pour faire ressortir le grand savoir et la BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX ” V L . MOTS ER d. richesse de documentation qui caractérisent ce livre remarquable et lui procurer de nombreux lecteurs. AIMÉ Wirz, Doyen de la Faculté libre des Sciences de Lille. Correspondant de l'Institut, 2° Sciences physiques Bouty (E., Professeur à la Faculté des Sciences de Paris. — Troisième supplément au Cours de Phy- sique de l’Ecole Polytechnique, par MM. Jamin et Bouty. Radiations, Electricité, Ionisation. — 1 vol. in-8° de 420 pages avec 104 figures. (Prix : 8 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1907. M. Bouty apporte un souci scrupuleux à maintenir à jour son cours de Physique générale, d'une très précieuse documentation, et qui demeure toujours unique en France. Dans ce troisième supplément", il s'est proposé de faire pénétrer dans l'Enseignement les théories nouvelles qui ont déjà relié et éclairé tant de faits épars et de résultats isolés; il a pu souvent prendre comme point de départ les remarquables Rapports du Congrès de 1900, qui avaient déjà mis au point toute une série de matières controversées ou imparfaitement connues jusque-là. Il s'est attaché par- ticulièrement aux questions relatives à l'étude du rayonnement et de l'électricité, en insistant sur l'ioni- sation dans les gaz. Une revue des principales questions exposées mon- trera les services que peut rendre cet ouvrage. On trouve au début les lois du rayonnement du corps noir, les lois de Stefan et de Wien relatives à l'énergie totale et au déplacement du maximum d'énergie en fonction de la température, puis les formules de Wien, et de Lummer et Jahnke concernant la loi de réparti- tion de l’énergie, enfin les lois d'émission déterminées expérimentalement par Lummer et Kurlbaum. Le mode d'exposition de Larmor relatif à la pression de radia- tion permet de rattacher la loi de Stefan à la théorie électromagnétique et aux lois de la Thermodynamique. L'étude du rayonnement des gaz (Rubens et Prings- heim) est suivie des travaux relatifs à la classification des séries de raies des spectres d'émission, et de l'in- dication des limites nouvelles du spectre : la limite est particulièrement reculée du côté infra-rouge, par suite de l'existence des rayons restants de Rubens. Les pouvoirs réflecteur et dispersif des couches métal- liques obtenues par projection cathodique fournissent l’occasion de revenir sur les théories de la dispersion et sur l'interprétation de la formule de Ketteler. La question des ondes hertziennes indique d’abord les genres d'action capables de fournir des expériences de cours, ainsi que les résultats nouveaux relatifs à la polarisation et à la dispersion électrique, M. Bouty fait ressortir la cause du désaccord entre les diverses dé- terminations de la constante diélectrique par les oscil- lations hertziennes, puis il expose les recherches de M. Lamotte et de M. Drude à l'égard des oscillations électriques d’ordresupérieur,lesméthodesde MM. Broca, Tissot, Duddell pour la mesure de l'intensité efficace des courants alternatifs de haute fréquence mis en jeu par la télégraphie sans fil et la téléphonie, et aussi la théorie nouvelle de M. Blanc relative aux cohéreurs. La confirmation (Crémieu-Pender) des effets électro- magnétiques de la convection électrique a permis d'expliquer le phénomène de Zeeman. L'étude de l’électrolyse débute par les formules de Helmholtz, relatives aux piles de concentration et à la variation de la f. 6. m. de polarisation avec la pres- sion. Il est nécessaire de faire une réserve à l'égard de la réversibilité de ces phénomènes; elle s'impose après les conclusions formelles de M. Bouty, puis de M. Rothé sur la capacité de polarisation. Premier et deuxième suppléments, Pevue gén. des Sciences, 45 juin 1896, p. 545, et 15 octobre 1900, p. 1108. Les perfectionnements récents dans la théorie ionique de l’électrolyse comprennent d'abord l'extension aux équilibres électrolytiques, par Van t' Hoff et Ostwald, de la loi de Guldberg et Waage, puis l'explication de la neutralisation des acides par les bases. M. Nernst a levé l’objection tirée de la diffusion, et son interpréta- tion explique en même temps la f. é. m. entre deux électrolytes. La théorie de Nernst relative à la consti- tution des métaux le conduit à l'interprétation de la couche double, au calcul de la f. 6. m., et à la théorie de la pile. ; La théorie de l’ionisation débute par les phénomènes relatifs à la condensation de la vapeur d'eau. Les mesures (Wilson) relatives à l'influence des rayons Ræntgen sur la condensation ont permis non seulement de déterminer la dimension des gouttes produites, mais encore de démontrer l'existence, dans l'air normal, d'ions des deux signes, portant des charges égales, mais présentant des masses différentes. Etant donnée la tendance qu'ont les ions libérés de se recombiner à nouveau par suite de leur rencontre, M. Rutherford a pu mesurer la durée moyenne de l'existence d’un ion libre. La détermination en valeur absolue de la charge des ions a été d'abord déduite par M. J. JL Thomson de la mesure de leurs mobilités relatives, déterminées par les méthodes de MM. Townsend, Zeleny et Langevin. D'autre part, les déterminations du rapport e/m de la charge électrique à la masse d’un corpuscule résultent des mesures relatives aux trajectoires des ions sous l’action d'un champ électrique et d’un champ magné- tique, et la connaissance de ce rapport conduit à la fixation de la charge absolue des ions, qui est la même pour n'importe quel ion gazeux ou électrolytique, et aussi à l’évaluation du nombre des molécules d’un gaz, d'où l’on conclut la masse d'une molécule d'hydrogène et la masse des corpuscules constituant les rayons cathodiques, c'est-à-dire la masse des électrons. Dans son exposé des phénomènes de radio-activité, M. Bouty a mis à profit non seulement les différents mémoires publiés, mais encore le cours professé à la Sorbonne par M. Curie. Il insiste en particulier sur les vitesses des rayons + et $, qui peuvent, pour ces derniers, dépasser les 9/10 de la vitesse de la lumière. Connaissant la théorie relative à l'accroissement ap- parent de la masse d’un corpuscule électrisé en mou- vement (J. J. Thomson et Max Abraham), on est conduit, d'après ces vitesses, à admettre que la masse de l’électron est d'origine purement électromagné- tique. L'émanation, à laquelle la radio-activité est due pour la plus grande part, est un gaz éphémère dont le mode de destruction présente une complication extrême, en passant par une série de corps intermédiaires pour arriver à l'hélium comme produit ultime et stable. L'étude de la décharge débute par les travaux de M. Bouty sur la cohésion diélectrique des gaz : il existe une valeur critique du champ pour laquelle le gaz cesse d’être un diélectrique pour devenir un conduc- teur, et c’est alors que commence la luminescence du gaz. Les expériences de MM. Schuster et Hemsalech démontrent, d'ailleurs, l'égalité des potentiels explosifs et des potentiels d'effluve; en même temps, elles montrent que, dans l’étincelle oscillante, les oscilla- tions sont dues à l’auréole seule et non au trait de feu. C’est la mise en œuvre de la pression développée par l’étincelle qui a conduit M. Wood à ses photogra- phies si remarquables sur la propagation, la réfraction, la diffraction des ondes sonores. En ce qui concerne la décharge dans les gaz raréfiés, on a pu étudier le mode de distribution du champ dans les diverses régions de la décharge, ainsi que les lois de variation de l'étendue de ces régions : auréole négative, espace sombre de Crookes, espace obscur de Faraday, enfin lumière posi- tive. Et M. J. J. Thomson est parvenu à édifier une théorie qui explique dans tous leurs détails les diverses particularités de la décharge dans les gaz raréfiés: D'autre part, M. Stark a précisé le mode de production 1 + BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Qt © ©% des spectres de lignes et de bandes d'un même gaz. La dernière partie est consacrée aux instruments de mesure nouveaux, aux progrès dans la théorie et la construction de la bobine d'induction, et se termine par les propriétés de l'arc au mercure et de la lampe à mercure de Cooper Hewitt. Dans son ensemble, ce nouvel ouvrage de M. Bouty offre à tous ceux qui désirent connaître de plus près les progrès de la Physique, pendant la période remar- quablement féconde de ces dix dernières années, un tableau scrupuleux de l’enchainement des travaux qui ont déterminé l’évolution des idées et conduit à l'édi- fication des théories nouvelles. E. Haunié, Professeur à l'Ecole navale. Schweizer (V.). — La Distillation des Résines et les produits qui en dérivent (7raduit de l'allemand par M. Henri Muraour). — 1 ol in-8° de 242 payes, avec 67 figures. (Prix: 1fr. 50.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1907. Le titre principal de l'ouvrage (la distillation des résines) répond assez mal au contenu. L'auteur, en effet, parle peu de la distillation de la gemme et de la térébenthine, alors qu'il s'étend longuement sur le chauffage du copal et du succin et sur la préparation de sous-produits résineux, comme le gaz de résine, les graisses pour voitures, les savons résineux, les résinates colorés, les noirs de fumée (50 pages), les encres d’im- primerie (50 pages). ; Cependant, le chapitre sur le travail des huiles de résine renferme des indications intéressantes pour nos industriels. L'auteur allemand est très sobre de ren- seignements sur l'extraction et la fabrication des résineux français; mais, comme son ouvrage ne fait pas double emploi avec les livres déjà publiés, nous n'hési- tons pas à en conseiller la lecture aux personnes que l'in- dustrie des résines intéresse. E. RABATE, Ingénieur agronome, Professeur départemental d'Agriculture. Hollard (Dr A.), Chef Chemiker des Laboratoriums der « Compagnie francaise des Métaux », 1n Paris, et Bertiaux (L), Chemiker der « Compagnie française des Métaux ». — Metall-Analyse auf electrochemi- schem Wege.— 1 vol. in-8°. Knapp, éditeur à Halle, 1907. Ce volume est la traduction allemande du livre dont la Æevue a rendu compte dans le numéro du 15 no- vembre 1906, et il est un nouveau témoignage de l'in- térèt que présente la savante étude de MM. Hollard et Bertiaux. 38° Sciences naturelles Fraser (Malcolm A. C.), Government Statistician and Registrar general. — Western Australian Year- Book for 1902-04 (132 édition). — 1 vo/. in-8° de 1283 pages avec T3 fig. et 16 cartes et diagrammes. Government Printer, Perth, 1906. M. J. Machat a présenté aux lecteurs de la Revue les deux volumes de la 12° édition de cet Annuaire. La 13° édition paraît tout entière en un volume, mine pré- cieuse de documents sur l'Australie occidentale. Nous ne reviendrons pas en détail sur le contenu de l'ouvrage; nous nous contenterons d'en extraire quelques chiffres significatifs La population a passé de 213.327 âmes à la fin de 1902 à 254.557 au 31 octobre 1905. Le nombre total d'acres de terrains cultivés s’est élevé de 229.922 en 1902 à 377.391 en 1904; la production de l'or fin (prin- cipale richesse minérale du pays), qui était de 1.703.416 onces en 1901, a monté à 2.064.801 onces en 1903, pour redescendre un peu à 1.983.230 onces) en 1904; l'Australie occidentale tient toujours le troisième 1 Voyez la Reyue du 30 octobre 1905, p. 95%. et du 30 avril 1906, p. 3S6. rang des pays aurifères, après les Etats-Unis et le Transvaal." Enfin le commerce d'importation s'est abaissé de 7.218.352 liv. sterl. en 1902 à 6.672.480 livres en 1904, tandis que le commerce d'exportation s'élevait, durant la même période, de 9.051.358 à 10.271.489 liv. sterl. Ces chiffres témoignent du développement progressif du pays; et la facon dont tous les documents de ce volume ont été rassemblés et mis en œuvre fait le plus grand honneur à l'actif statisticien de la colonie, M. Malcolm A. C. Fraser. IPS Fron (G.), Zangénieur agronome, Docteur ès sciences, Chef des travaux botaniques à l’Institut national Agronomique. — Traité élémentaire de Manipula- tions de Botanique appliquée à l'étude des plantes agricoles. — 1 vol. in-8° de 228 pages, orné de nom- breuses gravures. (Prix : 10 fr.) Librairie des Seiences agricoles, Ch. Amat, éditeur. Paris, 1907. Les traités de Sciences naturelles appliquées, établis- sant un trait d'union entre les ouvrages de science pure et ceux qui développent les questions d’applica- tion à un point de vue pratique, sont encore rares. Le développement de l'Enseignement supérieur agri- cole a provoqué cependant une heureuse éclosion de véritables bibliothèques, où la pratique de l’agriculture est méthodiquement déduite de faits scientitiquement constatés. Mais ces ouvrages traitent de questions spé- ciales et envisagent plus l'application que le fait scien- tifique lui-même, supposé déjà connu; les livres qui se proposent spécialement pour but de montrer les rapports qui existent entre les deux ordres de faits sont bien peu nombreux dans notre littérature scien- tilique. Le traité de Botanique appliquée à l'Agriculture et à l'Industrie, de Vesque, est déjà loin; il ne comprend que la partie systématique et l'indication des applica- tions ést un peu noyée dans l'exposé de détails d'ordre exclusivement scientifique. L'excellent Traité de M. Parmentier est une heureuse acquisition dans ce domaine de la littérature scientifique; il comporte l'exposé de la Botanique générale appliquée à la cul- ture des plantes et l'étude spéciale des plantes agri- coles et de leurs maladies. À l'encontre de Vesque, M. Parmentier a un peu trop dissimulé l'armature scientifique, base d'une étude rationnelle, pour les détails de la pratique agricole, faisant parfois de l'agriculture plutôt que de la Botanique appliquée, Nous pourrions citer encore les utiles atlas de M. De- lacroix. Il existe, enfin, de nombreux ouvrages n'em- brassant qu'une région de la Botanique appliquée, en se plaçant, d'ailleurs, bien plus au point de vue de l’uti- lité pratique qu'à celui des faits scientifiques qui en sont la source. Un traité de Manipulations de Botanique agricole faisait absolument défaut, et si les élèves des Ecoles d'Agriculture et des Universités avaient pour les guider les conseils de leurs Maîtres, il n’en était pas de même des travailleurs isolés, désireux de pousser un peu loin l'étude des plantes agricoles, qui se trouvaient entiè- rement livrés à eux-mêmes. Bien souvent, il devait leur arriver de se décourager et de renoncer à l'effort devant une étude que l'absence de guide leur faisait paraître ardue. M. G. Fron, avec l'autorité que lui donnent sept années d'expérience acquise comme chef des Travaux de Botanique appliquée à l’Institut agronomique, est venu combler cette lacune. Mais il faut dire que le cadre limité qu'il a adopté ne lui a pas permis de la combler complètement.'A voir la précision et la sûreté d'information avec laquelle il a développé les sujets qu'il traite, on regrette vivement qu'il n'ait pas donné à son ouvrage un plus grand développement, et qu'il s'en soit tenu à une partie seulement de l'objet d'un Traité de manipulations de Botanique appliquée. C'est ainsi que M. Fron a laissé de côté la Cryptogamie : Pathologie végétale et Microbiologie ; c'est grand dom- 550 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX mage, car, dans ce domaine particulièrement, le tra- vailleur a besoin d'un guide. Il lui faudrait un traité simple et clair, sélectionnant, parmi les faits touffus que signalent les compendieux ouvrages sur la ma- üère, ceux qu'ilest utile de connaitre pratiquement ; il lui faudrait le fil d'Ariane lui permettant de se gui- der dans le dédale compliqué des formes de champi- gnons parasites; il lui faudrait un guide Jui montrant la méthode et la technique à employer pour .expéri- menter les phénomènes les plus intéressants de la Microbiologie agricole. Un Traité de manipulations de Botanique cryptogamique appliquée rendrait les plus grands services. On regrette que M. Fron, qui sait adroitement élaguer pour mettre en évidence les faits importants, ne l'ait pas entrepris. Mais, sans plus nous attarder à des regrets superflus sur ce qui n'est pas fait, félicitons-nous du livre qu'il vient d'écrire. L'auteur fait tout d'abord une étude rapide des appareils indispensables à une étude botanique : mi- croscope, loupe montée. En prenant comme exemple les amidons, il montre par quels procédés on peut réaliser une observation détaillée : fixation, colora- tion, montage des préparations. Il passe en revue les réactifs qui permettent de caractériser les diverses substances entrant dans la constitution de la cellule et particulièrement celles qui se recommandent à notre attention par leur utilité. Nous trouvons d’ailleurs cà et là, dans l'ouvrage, l'exposé de détails complémen- taires sur la technique, lorsque l'étude de points par- ticulièrement délicats nécessite la miseen œuvre d’une méthode nouvelle, C'est ainsi qu'à la page 105 se trouve indiquée la méthode des inclusions et des coupes en séries, L'auteur passe ensuite à une étude complète, au point de vue botanique, d'un certain nombre de plantes types, choisies parmi les plantes agricoles. Ce sont : Liliacées : Aïl, Asperge; Graminées : Blé, étude de la plante suivie de l'exposé de la classification de cette importante famille, avec indication des caractères des subdivisions et genres. L'auteur aurait pu men- tionner, dans sa bibliographie, le bel ouvrage de Stebler sur les plantes fourragères; la Vigne; Légumineu- ses: la racine de Fève, les nodosités d’origine bac- térienne, la tige, l'inflorescence, la feuille et le fruit, la classification et les principales espèces; la Betterave ; le Chanvre; le Lin, distinction microchimique des fibres de Chanvre, Lin et Ramie; Solanaeées : la Pomme de terre; Composées : Topinambour; Crucifères : Mou- tarde, Chou; Convolvulacées : Cuscute; structure des bois de quelques végétaux forestiers : Chêne, Hêtre, Peuplier, Epicéa, etc. En outre, à la fin de plusieurs chapitres, l’auteur indique, sous le nom d° «exercices », un certain nombre de manipulations se rapprochant de celles sur lesquelles il vient de donner des détails et qui servent de type. Les caractères généraux et les grandes lignes de la classification, cités en tête de chaque famille, sont, pour ainsi dire, démontrés par l'étude détaillée de quelques végétaux types, choisis parmi les plantes utiles. A la fin des chapitres se trouvent quelques indi- cations bibliographiques permettant au chercheur de se référer à certains ouvrages pour y trouver des com- pléments d'informations. Des figures assez nombreuses et de fort belles photomicrographies viennent aider à l'intelligence du texte. Telles sont les grandes lignes du Traité que M. Fron a lui-même qualifié d’élémentaire. Nous exprimerons encore une fois, en terminant, le regret que l’auteur ait limité son travail à un cadre trop réduit, ce qui l'a obligé à restreindre l'étude des produits utiles que renferme la plante pour consacrer une part relative- ment considérable de son volume à des études plus spécialement botaniques. Tel qu'il est, le traité de M. Fron rendra les plus grands services à ceux que leurs études, ou leur profession, conduisent à étudier par eux-mêmes les plantes agricoles : botanistes, pro- fesseurs d'agriculture, élèves des Universités et des Ecoles d'agriculture, et nous devons le remercier d’avoir enrichi d'un excellent ouvrage le domaine encore si peu cultivé de la littérature de la Botanique appliquée. Ce livre était d'autant plus à signaler qu'il n'en existait pas encore d’analogues. J. BEAUVERIE, Chargé du Cours et des Travaux pratiques de Botanique appliquée à l'Université de Lyon. Viguier (D: C.), Professeur de Faculté des Sciences (Station zoologique d'Alger). — Sur les conditions de la Pêche en Algérie (Bulletin de l'Enseignement professionnel et technique des pêches maritimes). — 1 vol. in-8° de 90 pages. Challamel, éditeur. Paris, 1907. N M. Viguier à quelque courage, à une époque où la vogue est à la piscifacture marine, de venir jeter une note discordante dans le tableau, et de mettre en garde contre les errements où pourrait entraîner la mode nouvelle en Algérie. Il montre combien les es- paces accessibles aux pêcheurs sont réduits du fait de la proximité des grands fonds, et l'accès de cette sur- face est encore en partie interdit aux filets traînants par les règlements administratifs. Aussi la pêche ne peut-elle nourrir qu'une population fort restreinte, et les tentatives de création de villages de pêcheurs bretons ont misérablement échoué. Les essais de can- tonnement et de pisciculture y sont voués aussi à un échec certain. Tout au plus peut-on espérer empêcher le dépeuplement des côtes par l'interdiction de cer- tains engins, tel le lamparo, qui détruisent en masse les jeunes poissons, - A. BRIOT, Chef des Travaux de Zoologie à la Faculté des Sciences d'Aix-Marseille, 4° Sciences médicales Roger (G.-H.), Professeur à la Faculté de Médecine de Paris, Médecin de l'Hôpital de la Charité. — Ali- mentation et Digestion. — 1 vo/. gr. in-8° de 524 pages avec 57 fiqures. (Prix : 10 fr.) Masson ei Cie éditeurs. Paris, 1907. Sous ce titre, M. Roger publie les lecons de son cours de Pathologie expérimentale et comparée qui, pendant deux années, a porté sur le tube digestif. Les acquisi- tions de la science moderne sur les questions d’alimen- tation et de digestion sont exposées avec un grand sens critique et une merveilleuse lucidité, qui rendent la connaissance de cet ouvrage aussi intéressante qu'in- structive ; en lisant M. Roger, on retrouve le plaisir que l’on a eu à l'entendre. Partant des belles recherches de Claude Bernard et de celles, plus récentes, de Pawlof, et usant de la mème technique expérimentale, M. Roger complète par des expériences personnelles un certain nombre de notions qui étaient encore inobservées sur la sécrétion réflexe de la salive, du suc gastrique et du suc intestinal, sur le rôle de la mucine et de la mucinase, sur les varia- tions de la toxicité du contenu intestinal, sur la pro- duction de lentérocolite muco-membraneuse et la reproduction expérimentale des appendicites; il étudie les bactéries de l'intestin, leur rôle à l’état physiolo- gique et au cours des infections, et en particulier au cours de l’occlusion intestinale. Grâce aux recherches personnelles de l’auteur, effectuées au laboratoire de Pathologie expérimentale, en collaboration avec ses élèves, le livre de M. Roger présente un exposé compleb du mécanisme de la digestion, en même temps qu'une excellente lecon de Physiologie expérimehtale. Sans doute, toutes les questions ne sont point encore résolues, il reste encore à travailler beaucoup pour pénétrer dans son intimité le processus digestif; M. Roger, lui-même, fait prévoir de nouvelles découvertestet promet de nous les exposer un jour. En attendant, il a déjà apporté une pierre précieuse à l'édifice indéfini de la science. Dr MarcEL LABBE, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris- Fales =D ia ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 557 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 10 Juin 1907. 41° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Tzitzeica présente ses recherches sur les surfaces dont la courbure totale en chaque point M est proportionnelle à la 4° puissance de la distance d'un point fixe O au plan tangent mené en M. — M. Giacobini annonce la découverte d'une nouvelle comète (1907 c) faite dans Ja nuit du {°° juin à l'Observatoire de Nice. — M. J. Comas Sola à reconnu que le satellite I de Jupiter est très allongé ; sa forme est celle d’un ellipsoïde de révolution très aplati, dont l’aplatissement serait d'environ 1/#. — MM. A. Hansky et M. Stefanik communiquent leurs observa- tions astronomiques faites au sommet du Mont-Blanc du 31 août au 5 septembre 1906. Les conditions atmos- phériques donnent une nettelé d'images si parfaite que ce lieu d'observation est à recommander pour l'étude de la surface des planètes. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Villard poursuit ses recherches sur les deux formes de décharge électrique dans les gaz. L’arc électrique et l'étincelle condensée sont des décharges réduites à la lumière positive; dans l'ampoule de Crookes, c'est la lumière positive qui a disparu et la décharge se réduit à l'émission cathodique. — M. A. Leduc applique les formules relatives au volume moléculaire au calcul de la variation de la force élastique maxima de la vapeur d'eau avec la tem- pérature. — M. A. Rosenstiehl montre qu'il existe des éthers et des sels à hydrolyse lente (bradolytes); il y a également des éthers à hydrolyse instantanée (sténo- lytes); ilen est peut-être de même d’un certain nombre de sels. — M. L. Guillet a étudié les relations entre le diagramme des alliages binaires et leur malléabilité. En général, toutesles solutions solides ne correspondant pas aux extrémités du diagramme et les combinaisons ne sontjamais malléables, du moins à froid. —M. H.-L. Dejust à constaté que le graphite pulvérisé jouit de propriétés oxydantes (par l'oxygène qu'il condense) et décolorantes; il décolore les solutions de tour- nesol, le vin rouge, le réactif sulfo-indigotique. — M. À. Job montre que l’acétate de nickel, chauffé lon- uement vers 100°, excite vivement l'oxydation de l'hy- roquinone, grâce à la présence de l'hydrate libre qu'il renferme, — M. H. Gaudechon a reconnu que la base ammonio-mercurique se forme instantanément dans l’action du HgO précipité sur AzH° dissoute. De tousles hydrates signalés, (AzHg°)°0 —Æ H°0 est stable à la tem- pérature ordinaire en atmosphère sèche. L'eau à 1000 décompose intégralement la base en AzH® et HgO diffé- rant des formes rouge et jaune connues. — M. G. Gain à obtenu des combinaisons de l'acide hypovanadique avec divers acides oxygénés : V?0#,5Se0*.10 H°0, V°0* 3P°0*.10H*0, V?0*.3 As°05.10 H°0, etc. — MM. Ch. Mou- reu et I. Lazennec, en condensant les nitriles acétylé- niques et B-cétoniques non substitués avec l'hydroxyl- amine, ont obtenu des isoxazolonimines. Les amides et éthers-sels acétyléniques donnent, avec l'hydroxyla- mine, des isoxazolones identiques à celles qu'on obtient avec les amides et éthers-sels B-cétoniques correspon- dants. — M. R. Delange montre que les corps conte- nant le groupe 0 77 cc Qu DER se transforment par l’action de l’eau à froid en carbonates diphénoliques : 70 Ar. KA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. — MM. L.-J. Simon et Ch. Mauguin étudient le méca- nisme de la synthèse des dérivés quinoléiques par la réaction de Dœbner. — MM. G. Bertrand et Mut- termilch démontrent que la diastase oxydante ren- fermée dans le son de froment n’est pas une laccase, mais bien uue substance du type de la tyrosinase. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H. Martel propose d'appliquer la radioscopie et la radiographie à l'inspec- lion des viandes tuberculeuses, en se basant sur le fait que les lésions tuberculeuses du bœuf et du porc sont facilement envahies par les dépôts de sels de chaux. — MM. 0. Josuéet L. Bloch ont reconnu qu'il existe, dans la couche corticale des capsules surrénales, des sub- stances fortement hypotensives, qui, chimiquement, sont différentes de l’adrénaline. — M. J. Tissot pré- sente un appareil très sûr permettant le séjour et le travail longuement prolongés de l'homme dans les atmosphères irrespirables. — M. G. Vasse à assisté au dépecage d’une grande femelle d'Eléphant qu'il venait de tuer au Mozambique; les poumons ne présentaient aucune adhérence pleurale. — M. P. de Beauchamp a constaté que l'estomac des Rotifères, composé d’une seule couche de cellules d’une seule espèce, opère un véritable tri des substances qu'il absorbe, rejetant immédiatement les unes sous forme de grains très acidophiles, mettant les autres en réserve sous forme de globules plus ou moins basophiles et de graisse. — M. A. Lacroix a fait l'étude des produits projetés, roches blanches ou de couleur claire, qu’on trouve sur les flancs du Vésuve et de la Somma; toutes ces roches sont caractérisées par une grande richesse én potasse. — MM. L. Duparc et F. Pearce décrivent les roches basiques de la chaîne de Tschissapa (Oural du Nord) ; la plus abondante est une tilaïte compacte, à grain fin, accompagnée d’une troctolite typique. —M.J.Savornin a reconnu que les grès de Boghari sont en majeure partie du Carténien et que cet étage est incontestable- ment représenté, au sud du Tell, par une bande plissée ininterrompue depuis le méridien de Sétif jusqu'à celui de Boghari. — M. A. Thévenin a étudié le squelette du Bothriospondylus Madagascariensis; 1 est très voisin du Mosasaurus d'Amérique et paraîl avoir vécu à la même époque quele Cetiosaurus. — M. P. Bertrand montre, par l'étude de la trace foliaire, que l'Ankyrop- teris Bibractensis consutue bien un geure distinct. Séance du 17 Juin 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. W. Stekloff déve- loppe une méthode nouvelle pour résoudre plusieurs problèmes du développement d’une fonction arbitraire en séries infinies. — M. Barré poursuit l'étude des surfaces engendrées par une hélice circulaire. — M. L. Filloux décrit divers mécanismes permettant de réaliser l'intégration de l’hodographe par le moyen de la lame coupante.— MM. Læœwy et P. Puiseux estiment que la théorie de l’affaissement local, sous l'influence du refroidissement, des dégagements de gaz, de l’ajus- tement isostatique, peut expliquer l'histoire des mers lunaires aussi bien que celle des grands cirques. — M. G. Bigourdan propose d'ajouter, au mode habituel de publication des observations équatoriales, la lecture adoptée du mouvement diurne et de donner quelque moyen d'évaluer l'erreur dont cette lecture peut être affectée. — M. J. Guillaume adresse ses observations de la comète Daniel (1907 d\ et celles de la comète Gia- cobini (1907 c) faites à l’équatorial coudé de l'Observa- toire de Lyon. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Maillard décrit latrombe qui s’est abattue le 22 mai dans le département du Loi- 13**% 558 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ret et qui a été caractérisée par un double mouvement de translation et de giration, puis par des phénomènes de happage produits par un abaissement considérable de la pression atmosphérique. — M. J. Becquerel à observé que les bandes d'absorption des cristaux se déplacent la plupart du temps vers les petites longueurs d'onde lorsque la température s'abaisse; toutefois, dans le xénotime, un grand nombre se déplacent dans le sens opposé. — MM. G.-A. Hemsalech et C. de Watteville décrivent une méthode nouvelle de pro- duction des spectres de flamme des corps métalliques. Sur le trajet d’un courant d'air, on fait éclater des étin- celles entre deux électrodes métalliques, puis on con- duit cet air avec du gaz dans un brûleur, dont la flamme fournit un spectre caractéristique. — M. Ch.-A. François-Franck présente des microphotographies en couleur de pièces histologiques obtenues avec les nou- velles plaques autochromes Lumière. — MM. G. Urbain et C. Seal ont observé que certains excitateurs de la phosphorescence cathodique des systèmes complexes exercent, sur d’autres excitateurs dela série des terres rares, une influence paralysante. — M. F. Wallerant a étudié les transformations polymorphiques desmélanges isomorphes de trois corps: azotates d’ammonium, de thallium et de cæsium ; il représente graphiquement les résultats. — M. Ph.-A. Guye montre que, si l'on calcule les poids moléculaires des gaz liquéfiables au moyen de la formule usuelle des densités-limites, toutes les valeurs sont trop faibles par rapport aux nombres déduits des poids atomiques chimiques. — M. G.-D. Hinrichs, en appliquant sa méthode de calcul directe et absolue aux récentes déterminations du poids atomique du manganèse de MM. Baxter et Hines, trouve pour ce corps la valeur exacte 55. — M. P. Lebeau, en faisant agir le fluor sur le sélénium en présence du verre, à obtenu des produits de densité et de composi- tion variable, dont une fraction seulement donne des chiffres correspondant à SeFf. — MM. E. Baud et A. Astruc ont constaté que l'acide arsénique est un peu moins acide que l'acide phosphorique ; l'introduc- tion de deux groupes CH® dans le premier diminue l'acidité d'environ 3 cal. pour chacun d'eux. — M. de Forcrand à obtenu l'oxyde de lithium anhydre Li0 par la simple déshydratation de la lithine ou de son hydrate à 7809. — M. H. Baubigny, à propos d'une note récente de M. Flanders, rappelle qu'il a indiqué déjà en 1895 l'emploi du ferrocyanure de K en présence de AzH'CI pour la recherche du Ca en présence de Ba et Sr. —M. M. Houdard, en fondant au four électrique un mélange de sulfure et d'oxyde d'Al ou de Mg, et attaquant la matière fondue par HCI étendu, à obtenu un résidu insoluble d’'alumine ou de magnésie cristal- lisée. — M. Em. Vigouroux a observé que les alliages de Ni et Sn renfermant jusqu'à 40 v/, de Sn, et qui sont magnétiques, abandonnent sous l’action de lacide nitrique etde la potasse un composé Ni° Sn non magné- tique ; au-dessus de 40°/, de Sn, ces alliages ne sont plus magnétiques. — MM. Tiffeneau et Daufresne, en chauf- fant les acétates métalliques avec le dibromure d'ané- thol, ont obtenu des diacétates du glycol de l'anéthol ; ce glycol, F. 446°, traité par H?S0*, donne de l’anisyla- cétone. — M. G. Blane décrit une nouvelle méthode de cyclisation des acides adipiques et piméliques subsü- tués, qui consiste à les transformer en leurs anhydrides et à distiller lentement ceux-ci à la pression ordinaire. — MM. V. Grignard et G. Vignon ont préparé le dérivé dimagnésien du dibromopentane-1 : 5. Avec CO*, il donne des dérivés cycliques en C'; avec le diacétyle, il donne des dérivés en C7. — M. E. Fouard a observé qu'à concentration égale en ions H les acides ont même pouvoir coagulant sur les solutions colloïdales d'amidon ; toutes les solutions alcalines, à concentration égale en ions OH, présentent le même pouvoir stabilisant. — M. J. Wolf a étudié l’action comparée des extraits d'orge et de malt sur les dextrines les plus résistantes : le premier agit faiblement au début et perd toute action au bout de quarante-huit heures; le second les transforme peu à peu en maltose. -- MM. M. Piettreet A. Vila montrent que les cristaux d'oxyhémoglobine de cheval séparés de leur eau-mère contiennent 0,8 à 0,95 c. c. d'O par grammé de matière supposée sèche ; mais ils peuvent absorber davantage d°0 (1,4 à 1,7 €. c.): — M. V. Martinand a reconnu que l'hydrolyse du sac= charose est faite dans les organes de la vigne par l'intermédiaire de la sucrase naturelle du raisin ; il en existe un excès considérable, qui suffit à intervertir, tout le saccharose dans le moût et le suc des fruits: 3° SCrENCES NATURELLES. — M. A. Calmette décrit un nouveau procédé de diagnostic de la tuberculose chez l'homme, qui consiste à instiller dans l'œil une goutte d'une solution aqueuse de tuberculine; au bout des six à dix heures, les tuberculeux présentent une con gestion très apparente de la conjonctive palpébrale. — M. H. Vallée à constaté une réaction analogue chez les animaux (bœuf, cheval) tuberculeux. — M. N--A: Barbieri n'a pas observé d'autorégénération des nerfs. Dans une évolution strictement physiologique, le bout périphérique d’un nerf sectionné reste inexcitable et dégénère toujours; le bout central ne régénère pas, mais il est excitable et garde sa structure normale. — M. A. Giard signale un certain nombre d'observations nouvelles qui tendent à démontrer que l'oblitération des cavités pleurales est un phénomène normal chez tous les éléphants. — M. H. Piéron montre que l'auto= tomie protectrice des crabes est toujours sous la dépen- dance de la masse ganglionnaire ventrale, avec con= trôle probable des ganglions cérébroïdes. L'autotomie évasive dépend essentiellement des ganglions süpé= rieurs et n'exige que comme relais nécessaires les centres de la masse ventrale. — M. C. Gerber à reconnu que le faisceau inverse du Zilla macroptera; très important par sa constance, n'a pas, comme certains étaient portés à le croire, une valeur pure= ment fonctionnelle (fournir des éléments conducteurs aux ovules). Il n’est pas non plus sous la dépendance absolue du système libéroligneux placentaire normal. — M. R. Chudeau présente quelques observations sur la géologie du Sahara central. On y a reconnu la présence de l'Archéen, du Silurien, du Dévonien, du Crétacé inférieur et supérieur et de l'Eocène. — M. G. B. M. Flamand signale l'existence du terrain carboniférien aux environs de Taoudeni (Sahara sud=, occidental), d'après la détermination des fossiles rapportés par le lieutenant Mussel. — M. Deprat a. étudié les éruptions posthelvétiennes antérieures aux volcans récents dans le nord-ouest de la Sardaigne: Les roches qu'elles ont produites sont : des basaltes holocristallins riches en pyroxène et péridot, des labradorites augitiques, enfin des labradorites eb basaltes à hypersthène. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 48 Juin 1907. M. le Président annonce le décès de M. Costa de Bastelica, Correspondant national. — M. G. Weiss est élu membre titulaire dans la Section de Physique et de Chimie médicales. M. Ch. Monod présente un Rapport sur le concours pour le Prix Godard. — M. Farabeuf apporte un cer= fain nombre de considérations anatomiques en faveur de la symphyséotomie. — MM. Variot et Quinton donnent lecture d'un Mémoire sur le traitement de l'eczéma des nourrissons par les injections sous-Cutas nées d'eau de mer. ‘ Séance du 25 Juin 1907. M. le Président annonce le décès de M. Thierry, Correspondant national. — MM. Manquat el Abelous sont élus correspondants dans la Division de Médecine. M. A. d’Arsonval présente le Rapport sur le cons cours pour le Prix Apostoli, et M. Chauvel celui sur le concours pour le Prix Meynot. — M. Ch. Bouchard commanique un Rapport sur un travail de MM. P&. cité respiratoire et de la ' ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 539 Tissié et A. Blumenthal relatif à l'étude de la fatigue dans la course en montagne, faite sur des guides. Ces auteurs ont noté à la suite de la fatigue : une augmen- tation de la température, une diminution de la capa- tension artérielle, une diminution des globules rouges et une forte augmen- tation des globules blancs. — M. E. Kirmisson signale la fréquence relative des cas d’invagination intestinale chez les petits enfants, avec issue fatale par suite de diagnostic trop tardif. Il importe d'établir le diagnostic aussitôt que possible et d'opérer immédiatement la désinvagination, qui donne des résultats d'autant meilleurs qu'elle a été faite plus tôt. — M. A. Marie lit un travail sur la folie pellagreuse des Arabes d'Egypte. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 15 Juin 1907. MM. C. Levaditi et J. Me Intosh ont étudié l'in- fluence de l’atoxyl sur la spirillose provoquée par le Spirillum gallinarum. Ce médicament modifie l'orga- nisme en ce sens qu'il rend l'infection légère et qu'il provoque une crise précoce, analogue à celle qui met fin à l'infection naturelle. — MM: H. Labbé et G. Vitry ont constaté que la bile renferme constamment des sulfo-éthers; les matières fécales n’en contiennent que très peu. — MM. M. Loeper et P. Boveri ont reconnu que les sels de Ca déterminent une hypertrophie no- table du cœur et se fixent dans le muscle cardiaque; la diminution de la chaux alimentaire entraine une diminution de la chaux cardiaque. — M. Meillère à observé que l'inosite demeure inattaquée en culture anaérobie aussi bien par le bacille d'Eberth que par le colibacille, tandis que, en milieu nettement aérobie, elle est rapidement détruite par le bacille d'Eberth et respectée par le colibacille. — M. CE. A. François- Franck a préparé des microphotographies en couleur de pièces histologiques au moyen des nouvelles plaques autechromes Lumière. — M. A. Borrel et M! P. Cer- novodeanu ont reconnu que la membrane ondulante du Spirochaete Balbiani, parasite de l'huître, est insérée sur le corps du parasite suivant une ligne spi- ralée qui fait une révolution complète. — M. L. Ca- zalbou montre que, si les Stomoxys peuvent entre- tenir la contagion de la souma dans un même trou- peau, ce sont probablement les Tabanus qui la font rayonner. — M. P. Wintrebert a constaté que la pré- sence dans l’eau d’une certaine quantité de CO? com- patible avec la vie des larves n’accélère pas les phéno- mènes de la métamorphose chezles Batraciens anoures. — MM. R. Lépine et Boulud, après compression de l'aorte près de sa bifurcation, ont observé une dimi- nution anormale des matières sucrées et une augmen- fation du pouvoir glycolytique dans le sang des veines fémorales. — M. F. Battelli et Mie L. Stern ont isolé sous forme de poudre brune la substance activant les oxydations organiques qui existe dans l'extrait mus- culaire. — M. A. Policard estime que l'attribution à un parasite, par Giglio-Tos, d'une figuration parti- culière des noyaux des cellules épithéliales du- tube contourné du rein d’un surmulot doit être considérée comme très problématique. — M. L. Tixier montre que les anémies consécutives aux ulcérations expéri- mentales du pylore sont dues à la formation d’une substance hémolytique dans le sérum. — M. G. Brissy a congelé par l'air liquide certaines pièces histolo- giques, qui se laissent ensuite facilement couper au rasoir. — MM. H. Bierry et J. Giaja estiment qu'il y a lieu de distinguer les ferments Solubles qui hydro- lysent la populine et la phloridzine et de les désigner sous les noms de populinase et de phloridzinase. M. G. Rosenthal a constaté que le vibriogène septique reste agglutinable par le sérum antiseptique de Le- clainche-Morel, ce qui constitue le dernier vestige de sa parenté avec le vibrion septique. — M. V. Pachon a reconnu que le canard, qui présente comme tous les oiseaux plongeurs une grande résistance à l'asphyxie { par submersion, résiste moins qu'un pigeon à l'as- phyxie dans l'air confiné. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 10 Juin 1907. M. A. Prenant conclut de ses recherches sur l'in- testin d'un supplicié que les cellules de Paneth sont des cellules muqueuses spéciales, différentes des cel- lules muqueuses caliciformes. — M. C. Champy à pré- paré, par injections répétées à dose faible de cantha- ridate de potasse chez le lapin, un sérum antitoxique contre ce corps, mais assez faible. — M'° Asvadourova a étudié l’origine et la structure des cellules pigmen- taires dans le foie des Urodèles. — M. L. Mercier à découvert dans le noyau de l'Amoeba hlattae Butschli un parasite qu'il range dans le genre Nucleophaga de Dangeard. — M. Ch. Soyer présente quelques consi- dérations théoriques sur l’ovogenèse des Insectes. Il communique également ses recherches cytologiques sur l’ovoplasmode chez les Lépidoptères. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du % Juin 1907. M. L. Bocat montre que la matière colorante bleue des huîtres de Marennes, la marennine, est une subs- tance albuminoïde distincte, non identique à la phyco- cyanine. — M.Ch. Pérez met en évidence l'amoeboisme et le pouvoir phagocytaire des sphères de granules chez les Muscidées. — MM. Coyne et Cavalié ont ob- servé une tumeur pulpaire de la dent, caractérisée par un revêtement épithélial pavimenteux stratifié. — MM. J. Sabrazès et P. Husnot ont trouvé des « masl- zellen » dans le tissu interstitiel des surrénales, aux divers âges, chez l'homme; il en existe également dans les surrénales de divers Mammifères. — M. C. Sauva- geau montre l'intérêt qu'il y aurait à entreprendre une étude systématique des sargasses, car les opinions . actuelles sur leur origine lui paraissent toutes erronées. —_ M.J. Gautrelet a observé que l'introduction, par dissociation électrolytique, de lion K dans la circula- tion de la grenouille a produit rapidement la mort du cœur. L'ion Mg est aussi toxique; les ions Na, Ba et Ca le sont encore, mais un peu moins. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du T Juin 1907. M. J. Becquerel : /nfluence des variations de tempc- racure sur les phénomènes d'absorption dans les cris- taux. Phénomènes magnéto-optiques à la température de l'air liquide. On sait que les cristaux de xénotime et de tysonite possèdent des bandes d'absorption variables sous l’action d’un champ magnétique. Les expériences entreprises dans le but de rechercher si les modifica- ‘tions des bandes dépendent de la température ont con- duit à observer un phénomène nouveau. Sous l'action d'une élévation de températuré, les bandes d'absorption des corps solides s'étalent et deviennent plus floues. Un refroidissement produit l'effet inverse et, à la tem- pérature de l'air liquide, les bandes d'absorption des cristaux contenant des terres rares (didyme, erbiné) prennent une netteté tout à fait remarquable. La plu- part des bandes deviennent beaucoup plus intenses qu'à la température ordinaire ; certaines’ d’entre elles se résolvent en composantes dont quelques-unes, dans le xénotime, sont de véritables raies d'absorption, comparables aux raies des vapeurs métalliques; enfin, un certain nombre de bandes nouvelles apparaissent. Toutes les bandes deviennent plus fines à la température de l'air liquide; mais, tandis que la plupart augmentent d'intensité, quelques-unes, au contraire, s'affaiblissent. Les variations de température permettent donc de séparer deux sortes de bandes dont les origines sont peut-être différentes. Les bandes d'émission des corps phosphorescents subissent la même influence sous 960 l'action des variations de température. Pour rendre compte par la théorie de la largeur des bandes, on a admis que, pour chaque bande, les composantes du déplacement moyen des électrons absorbants, écartés de leur position d'équilibre, sont soumises à une équa- tion de la forme : dx dŒx É xX+ a 0 + b sen 0. La variation de la largeur des bandes prouve que l'amortissement a est fonction de la température. Les mesures de l'auteur prouvent qu'ilest sensiblement pro- porlionnel à la racine carrée de la température absolue. PHÉNOMÈNES MAGNÉTO-OPTIQUES. 1° Propagation de Ja lumière parallelement au champ magnétique. Lorsque l'axe optique d'un cristal et le champ magnétique sont parallèles au faisceau lumineux, le champ magnétique sépare les bandes en deux composantes correspondant à des vibrations circulaires inverses. L'expérience a montré que, dans la limite de précision des mesures, les changements de période des électrons, sous l’action d'un champ magnétique, sont indépendants de la tem- pérature; ce résultat doit vraisemblablement être rap- proché de l’invariabilité du diamagnétisme ; 2 Propa- gation de la lumière normalement au champ. On sait que les bandes donnent, à la température ordinaire, des doublets ou des élargissements plus ou moins dis- symétriques. Les mêmes phénomènes s'observent avec beaucoup plus de netteté à la température de l'air liquide et les doublets apparaissent pour des champs magnétiques moins intenses ; 3° Polarisation rotatoire inaguélique. L'étude de la polarisation rotatoire magné- lique à diverses températures conduit à des résultats importants. Il existe, en effet, pour rendre compte de ce phénomène, deux théories (DruDe : Lehrbuch der Optük) qui donnent des résultats à peu près semblables pour la dispersion rotatoire loin des bandes, mais qui sont en opposilion complète pour la variation du pou- voir rotatoire aux environs des bandes d'absorption. D'après ja théorie des « courants moléculaires », la courbe de dispersion rotatoire doit subir des perturba- tions de sens opposés de chaque côté d'une bande. Dans la théorie déduite de « l'hypothèse de l'effet Hall », théorie principalement développée par M. W. Voigt, la polarisation rotatoire magnétique est considérée comme la conséquence de la séparation des composantes cor- respondant à des vibrations circulaires inverses et de la dispersion anomale. Aux environs d'une bande sensible à l’action du champ, les perturbations doivent être de même sens de part et d'autre et de sens opposé à l'inté- rieur le la bande. C’est cette dernière théorie que les expériences ont vérifiée. M. Henri Abraham signale que l'on pourrait trouver une explication cinétique de la loi de la racine carrée de la température absolue en admettant que la largeur des bandes d'absorption est due, non pas à un amortissement proprement dit des vibrations propres, mais à un pseudo-amortissement provenant de la limitation du nombre des vibrations régulières, par suite des chocs successifs des éléments vibrants contre les particules voisines, comme cela a lieu dans le cas des corps gazeux. La durée des vibra- tions régulières serait alors en raison inverse de la vitesse moyenne de translation, ce qui donne bien la loi de la racine carrée de la température absolue. — MM.C.-WwW. Waïdner et G.-K. Burgess : Des points de fusion du tantale et du tungstène. La fabrication récente du tungstène et du tantale en filaments pour les lampes à iucandescence procure ces métaux sous une forme commode pour la détermination de leurs points de fusion. Pour ces recherches, les auteurs se sont servis de courts filaments spécialement construits, lesquels, dans le cas du tungstène, étaient de sources, de fabri- cations et de diamètres différents. Comme pyromètre, ils ont employé l'instrument de MM. Holborn et Kurl- baum, calibré d’après la loi de Wien. Comme échelle de température, ils ont pris les points de fusion sui- vants : Zn —#19°,0, Sb—6300,5, Cu —1084°, Pd —1546° ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES et Pt—1753°. Huit échantillons de tungstène, de dia- mètre variant de 0w®,07 à 0®,26, ont donné comme point de fusion de ce métal 30800 + 20°. Son coefficient de tempéralure entre 0° et 2000° est donné par la for- mule : R—R;(1+0,0039/+0,05111). Pour le tantale, on trouve un point de fusion de 2910° + 10°, avec un coefficient de température de R—R, (1 +0,00274), entre 0° et 2000°. — M. R. Dongier : (uelques dispositils utilisés au Laboratoire de Physique (Enseignement) de la Sorbonne. M. Dongier insiste plus particulièrement sur la détermination du point cryoscopique d'une solution, sur le type d'électromètre à quadrants établi par M. Malclès, préparateur au laboratoire, sur le montage de la mobilité des ions gazeux de M. Léon -Bloch. 1° La détermination du point cryoscopique d'une solution présente quelque difficulté à cause de la sur- fusion et à cause de l'impossibilité de fixer le thermo- mètre à cette température lorsqu'on soumet le liquide à une agitation et à un refroidissement continus. On peut amener le thermomètre, placé dans l'axe du tube refroidi, à se fixer pendant longtemps au point cryos- copique, en produisant d’abord une congélation qui, au moyen de l’agitateur, répand des particules de glace dans la masse du liquide, en chauffant ensuite à la main, puis en plongeant le tube dans le mélange réfri- gérant avant que toute la glace ait disparu. On cesse l'agitation aussitôt que la marche descendante du ther- momètre subit un temps d'arrêt; comme il n'y a pas de surfusion, c'est la solidification qui commence. L'eau dissolvante se solidifie alors en colonnes verticales con- centriques au tube; mais le liquide 2mmobrle voisin du réservoir ne change pas de composition. Le thermo- mètre marque la température d'équilibre entre le solide et le liquide; il marque le point cryoscopique vrai, si la portion du liquide qui avoisine le réservoir possède la composition de la liqueur initiale. Cette technique est d’un usage facile ; elle est très rapide. 2° Les mesures électrométriques ont pris une très grande importance depuis quelques années. Le modèle d'électromètre à quadrants, que M. Malclès a établi, permet aux élèves de se rendre compte de la forme des accessoires, des procédés de réglage, etc. Les quatre secteurs sont portés par des tiges de laiton, le long desquelles ils peuvent être déplacés, et ces tiges de laiton sont elles- mêmes portées par des disques en ébonite qui servent d'isolateurs. Le disque d'ébonite inférieur repose sur un bâti en fonte avec trois vis calantes; le disque d’ébo- nite supérieur porte le tube qui sert à supporter un second tube court qu'on peut élever ou abaisser plus ou moins; ce second tube porte un bouchon en ébonite, traversé par la tige de laiton qui est destinée à suppor- ter l'aiguille en aluminium, par l'intermédiaire d’un fil d'argent de 1/200 de millimètre de diamètre. La cage de l'électromètre peut être soulevée et fixée le long du premier tube. 3° La mesure de la mobilité des ions gazeux dérive de la méthode de Zélény. SOCIETE CHIMIQUE DE FRANCE . Séance du 24 Mai 1907. M. Rosenstiehl communique le résultat de ses recherches sur lhydrolyse des sels et des éthers. Il indique que, comme il y a des éthers à hydrolyse lente et à hydrolyse rapide, il y a des sels à hydrolyse lente et à hydrolyse rapide. Il signale comme éthers à hydro- lyse rapide les dérivés du triphénylcarbinol, et à hydro- lyse lente ceux des éthers halogénés, par exemple de l'alcool éthylique; comme sels à hydrolyse lente, les sulfates de chrome où l'acide sulfurique a été considéré comme dissimulé, et à hydrolyse rapide, en procédant par extension, les chlorures alcalins. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 14 Juin 1907. M. Upson à étudié la production des arcs électriques entre des électrodes de métal et de carbone refroïdies, PME. | Là ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES dans l'air et dans l'hydrogène. Sous 110 volts, les arcs entre métaux dans H prennent la forme d'une décharge d'étincelles. Quand une des électrodes est constituée par du carbone, il se forme un vrai arc. La forme des courbes caractéristiques volt-ampère est déterminée par la substance de l’électrode négative. Avec le car- bone négatif, dans H, les courbes sont presque les mêmes pour les diverses électrodes positives ; avec le carbone positif, elle conservent la même courbure, mais varient en distance suivant la nature du négatif. — M. J. A. Fleming décrit un moyen d'obtenir des oscillations électriques continues avec lare Poulsen. Un arc électrique est formé dans une atmosphère de gaz d'éclairage entre une tige de carbone tournant lentement et une anode de cuivre refroidie, dans un champ magnétique de 600 à 1.000 unités C. G.S. L'arc est alimenté par un courant continu à 400-500 volts. Un condenseur de 0,003 microfarad de capacité, en série avec une inductance de 200.000 centimètres, est shunté à travers l'arc; l'expérience prouve l'existence d'oscillations de haute fréquence dans le circuit du condenseur. — M. R. Appleyard présente un pont de conductibilité à lecture directe pour l'essai des bar- reaux d'acier ou autres. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 6 Juin 1907. MM. F. Baker et E. C. C. Baly, par l'examen du spectre d'absorption de la pyridine et de quelques-uns de ses dérivés, ont reconnu que l'atome d’Az tend à res- treindre les mouvements du noyau, mais que cette res- triction est diminuée par l'addition d'acides ou la chlo- ruration. — M. F. Tutin, par l’action du chlorure de méthylène sur le malonate d’éthyle sodé, à obtenu : 4 le sel de Na d’un acide C*H*#05.CO*4, donnant par hydrolyse un acide CSH(CO®H)",F.1380-139° ; 20 un acide CH#06(COH), F.132°; 3° une substance insoluble, qui est hydrolysée en un acide C*H#O'(CO*H)", K.200°. — M. J. C. Cain propose pour les sels de diazonium la for- mule quinonoïde H — : AzCI] ; Éan c'est la seule qui explique pourquoi, chez les composés où l'atome en para par rapport au groupe aminé est déjà saturé, il ne peut se former de sel de diazonium. — MM. J. T. Hewitt et N. Walker ont trouvé que l'ac- tion de Br sur une solution acétique d'aminoazobenzène en présence d'acétate de Na fournit surtout de la ben- zèneazo-0-0-dibromoaniline, F.1689, et non un dibromo- aminoazobenzène comme le croyait Berju. — MM. S. Smiles et A. W. Bain ont préparé le p-sulfoxyde de phénol, qui est très différent du produit décrit sous ce nom par Schall et Uhl. — MM. S. Smiles et Th. P. Hilditch, par action du chlorure de thionyle sur le p-crésol en présence d'AICF, ont obtenu le sulfoxyde de p-crésol, K.191°; il est transformé par réduction en sulfure de p-crésol, F.101°-103. — MM. E. P. Perman et J. H. Davies ont déterminé les poids moléculaires du f-naphtol en solution dans le naphtalène solide d’après leurs tensions de vapeur. En solution diluée, le B-naphtol à le même poids moléculaire qu'à l'étal gazeux, tandis qu'il est associé en solutions plus con- centrées: — Mie I. Smedley, en condensant l'acide phénylisocrotonique avec l’aldéhyde cinnamique en présence d’anhydride acétique, a obtenu le diphényl- hexatriène C°H°.CH : CH. CH : CH.CH:CH.C‘H, F.194°. — MM. B. Flurscheim et Th. Simon ont étudié la réduc- lion des dérivés nitrés aromatiques en dérivés azoxy en solution acide : 1° La réduction a lieu suivant l'hypo- thèse de Haber, des composés nitrosés et hydroxyla- minés étant successivement formés ; 2° la formation des composés azoxy pendant la réduction est due à une con- densation desdérivésnitrosésethydroxylaminés; 3° celte condensation ne peut avoir lieu que si l’aftinité rési- 561 duelle de l’Az trivalent des composés hydroxylaminés n'est pas saturée; 4° une diminution de la vitesse de réduction favorise la condensation. — M. F. Jones à étudié l’action de S, Se et Te sur AsH* et SbH*. Ces deux derniers corps sont décomposés à la lumière solaire et à 1009, l’action allant en diminuant rapide- ment de S au Te. — M. P. C. Ray a préparé une série de nitrites doubles de Hg avec K, Na et Li. — Le même auteur, en laissant évaporer spontanément une solu- tion contenant du nitrite mercuroso-mercurique et du nitrite argento-mercurique, a obtenu une série d'hydro- xynitrates argento-mercuroso-mercuriques. — MM. A. N.Meldrum et W.E.S. Turner ont constaté que les mo- lécules de trichlorolactamide, de benzanilide et de sali- cylamide sont associées en solution benzénique, même au point d’ébullition; celles de benzamide le sont en solution benzénique, chloroformique et acétonique. Ils n'ont pas trouvé de cas d'association d'amides en solu- tion alcoolique. —M.W.H. Perkin jun. à observé que 20? réagit facilement surles ax-dicétones et, en géné- ral, sur les substances possédant une structure quino- noïde. Le benzile donne surtout de l'acide benzoïque, la phénanthrènequinone de l'acide diphénique, l'aurine de l'acide p-hydrobenzoïque et de la benzoquinone. — MM. K. J. P. Orton, W. Ch. Ewans et E. Morgan,en faisant réagir l'hydroxylamine sur la 3:5-dibromo-0- benzoquinonediazide, ont obtenu l'azoïmide, F.98°, à caractère nettement acide. — M. A. Lapworth à reconnu que la décomposition hydrolytique des oxines par les acides métalliques parait être un phénomène plus ou moins réversible. — M. W. R. Dunstan à trouvé, dans les graines de l'Hevea brasiliensis, envi- ron 50 °/, d'une huile fixe, d—0,9302, dont l'indice d'iode est égal à 128,3. Les graines, broyées avec de l'eau, fournissent un peu d'HCAz et d'acétone; elles paraissent donc renfermer un glucoside voisin de là phaséolunatine, sinon analogue. Enfin, les graines renferment un mélange d'enzymes, capables d'hydro- lyser l'huile et le glucoside présents. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION CANADIENNE Séance du 15 Mars 1907. M. J. A. de Cew étudie la fonction du procédé à la soude caustique dans la production de la cellulose aux dépens du bois. Les réactions chimiques du procédé consistent dans une combinaison entre le radical alca- lin et les portions les plus réagissantes du bois, qui. sous l'influence de la température et de la pression, se détruit en donnant des produits solubles, et laisse la cellulose sous forme de fibres isolées. SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 25 Avril 1907. M. L. Archbutt communique les résultats d'analyses de quelques huiles d'olives commerciales d'Algérie et de Tunisie, contenant des quantités relativement con- sidérables d'acide arachidique ou lignocérique. Une comparaison avec des huiles très pures des mêmes régions lui à montré que ce constituant n'est pas nor- mal, et qu'il doit être attribué à l'addition d'huile d’arachide, SECTION DU YORKSHIRE Séance du 8 Avril 4907. M. H. G. Bennett montre la nécessité de choisir une poudre de peau se rapprochant autant que pos- sible d’un type fixé d'avance pour effectuer de bonnes analyses des matières tannantes. On n’obtiendra des résultats exacts qu'en se servant d'une poudre neutre et granulée. — MM. H. R. Procter et D. M. Candlisch décrivent les méthodes qu'ils emploient pour l'analyse des liqueurs chromiques usées dans le tannage. — 562 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES M. C. H. Wright a déterminé la correction de téempé- rature applicable au poids spécifique des huiles, graisses et cires. Il estime qu'elle est la même pour tous ces corps et égale à 0,0007. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 24 Janvier 1907. M. E. Fischer fait une conférence sur /a Chimie des protéines et leurs relations avec la Biologie. Parmi les composantes de la molécule protéine, les amino- acides ont élé étudiés avec un soin tout particulier : la structure de la plupart d’entre eux a été élucidée, el leur synthèse intégrale, à partir des éléments chi- miques, à été réalisée. Or, à l'exception du glycocolle, tous les produits se trouvant dans la Nature sont opti- quement actifs, tandis que la synthèse organique ne fournit d'abord que des substances optiquement inac- tives, mais qui, grâce aux méthodes découvertes par Pasteur, peuvent être converties, après coup, dans les formes optiquement actives. Ces méthodes ayant été employées avec succès dans la plupart des amino- acides, l’auteur est convaincu que, dans un avenir prochain, la synthèse intégrale de tous ces corps sera possible, même dans leur forme optiquement active. D'autre part, il n’est guère probable qu'il en soit de mème de tousles produits de scission des protéines. Il semble, au contraire, que le mélange brut des amino- acides, produit par l’ébullition des protéines avec l'acide chlorhydrique, renferme des substances encore inconnues, dont l'isolement ne sera possible qu'au moyen de méthodes perfectionnées. La synthèse des “principales composantes de la molécule protéine ne constitue, cependant, que le premier pas, conduisant vers une connaissance parfaite de la constitution chi- mique et, par là, vers la synthèse artificielle des substances albuminoïdes. Il s’agit, en effet, de savoir de quelle manière et dans quel ordre ces éléments constitutifs entrent dans la molécule de protéine. Dans ses recherches, désormais célèbres, sur la chimie des albuminoïdes, l’auteur s’est appliqué à préparer, par une synthèse artificielle, des substances analogues aux protéines naturelles, en accouplant l’un avec l’autre différents amino-acides. C'est ainsi qu'il a obtenu, successivement, des substances ressemblant d'abord aux peptones, puis (après une synthèse pro- longée) aux protéines. Ces « polypeptides » ne se prêtent cependant point à une utilisation économique pour la production d'aliments artificiels, abstraction faite du fait, démontré par M. Pawlow, que les impres- sions visuelles, olfactives et gustatives influent, à un degré considérable, sur l'assimilation de la nourriture. Si, d'autre part, l’on réussissait à produire, par une transformation des protéines, des ferments analogues au suc pancréatique, on pourrait espérer de parvenir, un jour, à utiliser la cellulose et les substances affines pour l'alimentation du règne animal. Dans son état actuel, la synthèse des protéines ne sert, au contraire, que les fins purement scientifiques de la Biologie, en élucidant le mécanisme des processus chimiques du corps animal et végétal. Séance du 22 Février 1907. M. F. E. Schulze adresse un Mémoire sur les pou- mons des Cétacés. Il signale le développement si com- plet des squelettes cartilagineux de certains poumons de Cétacés, squelettes s'étendant jusque dans le paren- chyme respiratoire. A l’une et l’autre des surfaces latérales des systèmes d’alvéoles, on trouve un réseau respiratoire Capillaire spécial. — M. Orth présente une note de M. À. Bickel sur les expériences faites par ce dernier, en collaboration avec M. L. Pincussohn, au sujet de l'influence de la morphine et de l’opium sur les sécrétions de l'estomac et du pancréas. Tandis que la morphine, suivant les observations de Riegel, com- mence par paralyser la formation du suc pancréatique, qu'elle n'augmentera qu'ultérieurement, l’opium (qui, à côté de différentes autres substances, renferme de la morphine) produit immédiatement une augmentation de la sécrétion de ce suc. L'action de la morphine sur la sécrétion de la glande abdominale est analogue à celle qu'elle exerce sur les muqueuses de l'estomac; l'opium paralyse, au contraire, la glande du pancréas, la cessation de la sécrétion, observée après l'admi- nistration, étant définitive. — M. Waldeyer présente une Note de M. O. Kalischer sur /a fonction du lobe temporal du grand cerveau. L'auteur a eu l'intention d'examiner la théorie de M. H. Munks, suivant laquelle la perception des sons élevés, chez les chiens, a lieu à la partie antérieure de la sphère auditive, et celle des sons bas à la partie postérieure. La méthode ordinaire d'examen de l’acuité auditive des chiens avait consisté à détourner l'attention des sujets et à observer si les chiens réagiraient d'une facon quelconque à des sons. et bruits déterminés. Jugeant cette méthode insuffi- sante, l’auteur a dressé des chiens, en leur permettant de happer les morceaux de viande qu'on leur offrait, seulement sur un son déterminé, tandis que, pour tous les autres sons, ils ne devaient pas y toucher. Cette méthode constitue un excellent procédé de dressage. Les chiens se sont trouvés posséder un sens acoustique extrêmement fin, qui, chose remarquable, peut être acquis, grâce à un apprentissage de durée variable, par un individu quelconque. Ces animaux possèdent même un sens acoustique absolu, étant capables de distinguer immédiatement le son voulu, même à plu=. sieurs heures d'intervalle. Les sujets bien dressés con- servent cette capacité, même après des intervalles de plusieurs mois. Pour écarter toute hypothèse relative à un concôurs possible entre les impressions auditives . et des impressions d’un genre différent, l’auteur a fait des expériences sur plusieurs chiens temporairement aveugles, dont on avait cousu les paupières. Or, ces bêtes, ayant été dressées au préalable, se sont con- duites d'une facon absolument identique aux autres. Afin d’élucider le rôle qu'il convient d'attribuer, dans ces phénomènes, aux lobes temporaux du grand cer- veau, l'auteur a opéré des extirpations monolaté- rales et bilatérales de ces lobes. Les premières n'ont affecté en aucune façon le sens auditif des sujets. Dans. le cas d’une extirpation bilatérale, l'auteur constate, au contraire, que les sujets, tout en regagnant, après plusieurs jours, leur sensibilité, relativement aux sons significatifs de la nourriture, sont peu sensibles vis-à- vis des examens auditifs ordinaires. Les deux espèces de réactions auditives doivent, par conséquent, dé- pendre de différentes conditions; tandis que les réac= tions ordinaires n'ont lieu que grâce au concours du lobe temporal, le sens acoustique proprement dit des sujets en essai est gouverné par les centres infracorti= caux du cerveau. Il reste à savoir si les phénomènes en question sont au-dessous du seuil de la connaïs= sance. Séance du 7 Mars 1907. M. E. Warburg rend compte des expériences qu'il vient de faire, en collaboration avec M. G. Leithauser, sur l'oxydation de l'azote due à l’action de la décharge silencieuse sur l'air atmosphérique. L'ozonisation par tielle de l'oxygène atmosphérique, produite par la décharge silencieuse, s'accompagne d'une oxydatior partielle de l'azote. Dans une note antérieure, l’auteur avait déterminé la quantité totale du ga nitreux pro= duit. Dans la note présente, il étudie la nature de cet. oxyde nitreux. Suivant MM. Hautefeuille et Chappuis;, J'oxyde en question serait caractérisé par la for mule Az?0°. Il fallait cependant admettre qu'en deho de cet oxyde il pouvait s'en former d'autres, exempts de tout spectre d'absorption dans la région visibles L'auteur constate par l'analyse spectrale la présence d'un gaz Az°0°, venant de l'appareil à décharges. Il est d'avis que le gaz nitreux formé dans l'air atmosphé- rique sec par la décharge silencieuse consiste eSsen= tiellement en ce composé, tandis que l'existence du À à F2? ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES : 563 corps signalé par MM. Hautefeuille et Chappuis ne se confirme point. — M. H. Zimmermann adresse un Mémoire sur la barre droite placée sur supports élas- tiques individuels et chargée par des forces longitudi- nales. Dans une Note antérieure, l'auteur avait pré- senté les résultats de ses recherches sur la flexion d'une barre droite placée sur des supports élastiques continus et exposée à des charges individuelles d'une direction quelconque. Le travail présent est relatif à une extension de ce problème, réalisant les conditions de certains cas pratiques qui se présentent dans l'ar- chitecture et dans l’art de l'ingénieur. Il traite notam- ment du cas où les forces n'agissent point suivant l'axe, tandis que le cas des forces axiales sera traité ullé- rieurement. Les procédés de calcul trouvés par l’auteur permettent une détermination exacte des phénomènes présentés par les cordes des ponts ouverts en dessus. ALFRED (GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 25 Avril 1907. 4° Sciences puysiques. — M. J. Hann poursuit ses recherches sur la marche diurne de la température dans la zone tropicale ; il communique de nombreuses observations faites en Asie et en Australie. C’est dans la zone tropicale que la moyenne arithmétique entre les deux températures extrèmes d’une journée s'écarte le plus de la température moyenne vraie de la journée. — M. A. von Obermayer à constaté que la fréquence des orages observés dans les stations météorologiques alpines, en particulier au sommet des montagnes, pré- sente un recul très accentué du 10 au 20 juin de chaque année. — M. H. Molisch est parvenu à observer à l'œil nu le mouvement brownien des particules micros- copiques de résine ou de caoutchouc du suc laiteux de l'Æuphorbia splendens. Pour cela, on place quelques gouttes de suc entre deux lamelles de verre, qu'on re- garde perpendiculairement en lumière solaire directe. — M. K. Rziha a déterminé l'effet Pellier et la force thermo-électromotrice du couple Ni-Cu entre 20° et 800° C. ; ils subissent des variations correspondantes. — M. N. Stucker a constaté que la conductibilité élec- trique de l'or et de l'argent colloïdaux est excessi- vement faible ; leur coeflicient d'extinction et les cons- tantes de la polarisation elliptique diffèrent beaucoup de ceux du métal ordinaire. — M. R. Kremann à comparé les valeurs déduites de la formule de van Laar pour la détermination du degré de dissociation des comhinaisons qui se dissocient en fondant avec les valeurs trouvées expérimentalement ; les premières sont, en général, passablement plus élevées. — MM. R. Kremann el R. Ehrlich montrent que la contraction de volume observée dans le mélange équimoléculaire d'acide sulfurique et d'eau n'est attribuable qu'en partie à la formation d'hydrate, et que la majeure portion est le résultat du phénomène de solution lui- mème. La courbe de frottement interne des mélanges de H20 et H?S0* présente pour le mélange équimolé- culaire un maximun, qui disparait à 1309, — MM. KR. Kremann, E. Bennesch, F. Kerschbaum et A. Flooh, par l'étude des équilibres de solutions binaires entre les acides formique et acétique et l’eau, ont reconnu que ni l'un ni l’autre de ces deux acides ne forme d'hy- drate avec l'eau. — MM. R. Kremann et F. Kersch- baum ont observé que les chaleurs spéciliques du système H?SO*.H?0 varient régulièrement de 0° à 2079 et s'écartent peu de la loi d’addition. Il en résulle que, dans la chaleur de formation du mélange trouvée par Pfaundler (69 cal. à 18°), une très faible partie est altribuable à la formation d'hydrate. — MM. R. Kre- mann el K. Huttinger ont reconnu que la glycérine et le sucre de raisin n’influent guère sur la vitesse de la réaction entre le sulfate de Na et le soufre, tandis qu'ils diminuent celle de la réaction entre le sulfite de Na et l'oxygène. — MM. R. Kremann et W. Decolle déduisent de mesures de la conductibilité de NaF en solutions N/32 et N/1024, d'après la règle d'Ostwald, que l'acide fluorhydrique serait bibasique et possé- derait la formule H°F?, — M. P. Cahn-Speyer, en éthérifiant l'acide aminotéréphtalique par diverses méthodes, n’a obtenu, en dehors de l’éther neutre, qu'un des deux éthers-acides possibles, l’éther 2-ami- notéréphtalo-4-méthylique. — M. R. Wegscheider à préparé les deux éthers méthyliques acides de lacide amino{éréphtalique par réduction des éthers de l'acide nitrotéréphtalique ; ils fondent tous deux à 216°-217, mais diffèrent par leurs constantes d’aflinité. — M. A. Kailan a étudié l’éthérilication des acides pyridinemo- nocarboniques et des acides dioxybenzoïques par HCI alcoolique et déterminé la nature de la réaction. — M. A. Praetorius à étudié la saponification des éthers méthylique et éthylique de l'acide benzénosulfonique. Dans les mélanges d'alcool el d’eau, l’action saponi- fiante à lieu suivant la loi d'action dé masse. Dans la saponification alcaline, seule la partie dissociée prend part à la réaction. — M. M. Samec à étudié les pro- duits de l’action de H*SO* sur la pinacone de la diéthyl- cétone; Fhydrocarbure CIS paraît être cyclique, de même que l’oxyde C'°H*0. — M. H. Lampel, en trai- tant par l'acide nitreux la globuline du sérum de cheval, a obtenu une désamidoglobuline, donnant par hydro- lyse de l'histidine et de l'arginine, mais non de la lysine. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H. Steindachner dé- crit deux nouveaux poissons d'eau douce trouvés dans lé Parnahyba au Brésil : le Prochylodus lacustris et le Loricaria parnahyhae, ainsi qu'une nouvelle variété (var. microlepidota) du Loricaria lima, trouvée dans le Jurua. — MM. F. von Hôhnel et V. Litschauer ont procédé à une révision des Corticées d'après les exem- plaires de lHerbier royal de Berlin et de l'Herbier Barbey-Boissier de Genève. — M. F. von Hôhnel pré- sente encore la suite de ses études mycologiques et une étude sur les champignons recueillis en 1904 par l'Expédition de l'Académie au Brésil, — MM. F, Ber- werth el F. Becke communiquent respectivement la liste de leurs observations géologiques sur les ailes sud et nord du tunnel des Tauern. — M. C. Diener «à étudié la faune des « klippe » tibétains de Malla Johar (Himalaya central). Cette étude fait ressortir des diffé- rences profondes dans le développement des séries du Tibet et de l'Himalaya. Séance du 2 Mai 1907. 1° SGIENGES MATHÉMATIQUES. — M. E. Dintzl représente, à la manière d'Eisenstein, les symboles de Legendre dans la théorie des réstes quadratiques des corps de nombres quadratiques imaginaires de nombre de classe 4 au moyen de fonctions elliptiques et déduit de ces expressions les lois de réciprocité quadratiques. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. A. Meyer et E. von Schweïidler ont cherché à déterminer la constante de diminution de moitié de l'activité du radium D. De l'étude de la radiation &, on déduit une constante de 11,9 années; de celle de la radiation $, une constante de 45,7 années. La seconde parait la plus probable. — M. L. Szydlowski a éludié les mélanges frigorifiques de HCI concentré et de Na*SO* cristallisé ; celui qui donne l'effet frigorifique maximum {45,4 cal. pour 1 gr. de mélange, contient les deux corps dans le rapport 0,26 : 1 ;: il abaisse la température de + 21,2 à — 189,6. —MM. F. Emich et F. Donau proposent, pour déterminer la couleur de faibles quantités de liquides très peu colorés, de les enfermer dans des tubes capil- laires à parois épaisses qu'on examine au microscope en lumière transmise à faible grossissement; on peut ainsi reconnaitre dans un liquide la présence d'un millionième de mgr: d'un corps très colorant. — M. S. Strakoseh a étudié les échanges d'hydrocar- bonés dans la betterave à sucre. Le dextrose se forme dans le mésophylle de la surface foliaire. Le saccharose se forme dans les nervures des feuilles, d'où il émigre dans la racine ; sa formation n'a lieu qu'à la lumière. pe 564 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 3° SCIENCES NATURELLES. — M. E. Lôwi a étudié le mécanisme du détachement des feuilles chezles plantes toujours vertes ; il a lieu soit par macération des cellules avec tension simultanée des membranes, soit par solution des couches d'épaississement, soit par séparation mécanique à la suite des phénomènes de croissance des cellules de séparation. : Louis BRUNET. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 26 Avril 1907 (fin). 3° SCIENCES NATURELLES. — Ensuite M. M. H. Zwaarde- maker présente, encore au nom de M. Muskens: L'in- Iluence des nerfs sur l'action du cœur. Première partie: Génération du « pulsus alternans ». Première forme du p-. a. à intervalles égaux. Seconde forme du p. a. à intervalles égaux. Troisième forme du p. a. à grande contraction retardée.Une planche.— Ensuite M. Zwaar- demaker présente la thèse de M. V. E. Nierstrasz : Rauwolfine als hartgif (la Rauwolfine comme matière toxique pour le eœur), et celle de M. A. van Rossum : Gewaarwordingen en reflexen, opgewekt van uit de halferrkelvormige kanalen (Sensations et réflexes, prenant naissance dans les canaux semi-circulaires). — M. F.A.F. C. Went présente, pour les Mémoires de l'Académie, au nom de M. S.H.Koorders : Botanische Uutersuchungen über einige in Java vorkommende Pilze, besonders über Blätter bewohnende parasitische Arten (Recherches botaniques sur quelques champi- gnons de l'ile de Java, en particulier des espèces para- sitiques se trouvant sur des feuilles). — M. H. de Vri présente au nom de M. CI. Reid et de Mm° Fa M. Reid : The fossil flora of T'egelen-sur-Meuse, near Venloo, in the province of Limburg (La flore fossile de Tegelen- sur-Meuse, près de Venloo, dans la province de Lim- bourg). Sont nommés rapporteurs MM. G. A. F. Molen- graaff et K. Martin. Mai 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. C. Kapteyn pré- sente au nom de M. W. de Sitter : Les orbites pério- diques du type Hestia. I s’agit de quelques solutions du cas particulier suivant du problème des trois corps : « Deux points matériels S et J, de masses 1 et y, se meuvent, avec une vitesse angulaire constante 7 —1, sur des circonférences de cercles autour de leur centre Séance du 24 de gravité commun. Trouver le mouvement d'un point matériel P, de masse infiniment petite, du même plan sous l'influence des attractions de la part de S et J, d’après la loi de Newton, la distance constante S J étant considérée comme unité de longueur (problème de Darwin, Acta mathematica, t. XXI, p. 99-242) ». L'auteur s'occupe des cas particuliers où l'orbite périodique de P est une ellipse de petite excentricité, S étant un des foyers, le mouvement » s'approchant de Ja valeur 3 pour lim. = 0; il considère plusieurs cas étudiés par M. Darwin, du point de vue développé par M. Poincaré dans les tomes I et III de ses « Mé- thodes nouvelles ». 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. D. van der Waals : Contributions à la théorie des mélanges binaires. Suite (voir Rev. génér. des Sc., t. XNIII, p. 299, 383, 524). La ligne binodale. Pour l'existence réelle de la ligne binodale, il est nécessaire que les quantités p, q dy dy et ®— v — — x — soient égales à la température. Etude dv dx des « lignes potentielles », pour lesquelles la dernière de ces trois quantités est constante. RER des ex- pressions « pli principal, pli latéral », « pli longitu- dinal, pli transversal ». Pli anormal 2 pli composé. Etude détaillée de la forme de la ligne binodale ». M. H. Kamerlingh Onnes, aussi au nom de M. W. H. Keesom : Contribution à la connaissance de la Sur- face y de van der Waals. XV. Cas où l'une des deux composantes est un gaz sans attraction, à molécules admettant des dimensions. Suite (voir Rev. génér. des Se., t. XVIII, p. 300, 383). 8. Sur les températures et les pressions au pli gaz-gaz. 9. Réfutation de l'opinion de M. J. J. van Laar, quant à la question de priorité (Rev. génér. des Sce., t. XVIII, p. 524). — Ensuite, M. Kamerlingh Onnes présente, aussi au nom de M. G.-H. Fabius : Aépétition des expériences de MM. de Heen et Teichner sur létat critique. 1. Intro- duction. 2. Les expériences de M. de Heen. 3. Diffé- rences de densité après correction pour les différences de température des réservoirs. #. Exemple de différences de densité comparables à celles trouvées par M. de Heen et dues à une légère impureté de l'acide carbo- nique. 5. Corrections pour la pesanteur et pour de petites quantités de matières souillantes. Conclusion. 6. Les expériences de M. Teichner. 7. Observations. 8. Conclusions et remarques. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H. Zwaardemaker : L'absorption de l'odeur de la muscone sur les sur- laces des différentes substances. En 1906, M. H. Wal- baum découvrit la matière odorante du muse, la cétone C:‘H*0, appelée muscone. Ici, M. Zwaardemaker fait connaitre les résultats provisoires de quelques expé- riences olfactologiques sur cette matière. Une certaine quantité du mélange de muscone et d'acide myristique à 0,627°/, de muscone fut fondue en forme de cylindre olfactométrique de 15 centimètres de longueur et S millimètres de diamètre. L'exposition de ce cyliadre à un courant d'air donnant lieu à un déplacement de 100 centimètres cubes par seconde fait naître une impression encore reconnaissable de l'odeur de la muscone, un parfum fatiguant bien vite, correspondant au coefficient odorimétrique 6,7. Les expériences montrent : 4° que la muscone raréliée s'attache forte- ment aux parois de verre qu'elle touche; 2 que le frottement de ces parois de verre avec de l’ouate trans- forme l'odeur de la muscone, de manière à la faire ressembler à celle du musc; cette odeur de muse se manifestait aussi sur de l’ouate, des plumes, du papier mis dans la trajectoire du courant, mais non pas sur d’autres substances comme de la laine d’asbeste, de l'éponge de platine, le temps d'exposition étant de un quart de minute. Description de plusieurs exériences avec un cylindre olfactométrique de 10 centimètres de longueur. Absence totale d'absorption d'odeur (porce- laine poreuse, charbon, ébonite, acier, fer), absorption modérée (aluminium, argent, soufre), absorption con- sidérable (étain, cuivre, nickel, verre, plomb conte- nant de l’étain), etc. — Ensuite, M. Zwaardemaker présente la thèse de M. P. Wolterson : « Quantitatieve betrekking tusschen vagusprikkeling en hartswerking » (Rapport quantitatif entre l'excitation du vagus et l'ac- tion du cœur). — M. G. C. J. Vosmaer présente, au nom de M. J. Boeke : Sur la structure des cellules ganglionnaires dans le système nerveux central de, Branchiostoma lanceolatum. L'auteur fait connaître plusieurs formes de cellules dont il a coloré les neuro= fibrilles à l'aide de la méthode excellente de Biel- schowsky-Pollack. Une planche. — Rapport de MM. Mo- lengraaff et Martin sur l'étude de M. CI. Reid et Mu E. M. Reid : «The fossil flora of Tegelen sur Meuse, near Venloo, in the province of Limburg ». Le mémoire, illustré par 127 photographies de graines, va paraître dans les publications de l’Académie. P. H. Scnoure. Le Directeur-Gérant : Louis OLivier. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. v. 18° ANNÉE N° 44 30 JUILLET 1907 Revue générale les Sciences pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L, OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Astronomie Recherches sur les excentriciltés des co- mètes. — Les comètes viennent-elles des espaces interstellaires ou convient-il, au contraire, de les con- sidérer comme ayant toujours appartenu à notre sys- tème ? Ce problème captivant a suscité d'assez nombreuses recherches, don tles conclusions s'accordent peu : tandis que Laplace se prononce nettement en faveur d'une origine extra-solaire, d’autres savants, parmi lesquels il faut citer Faye et Schiaparelli, ont soutenu la thèse opposée, en invoquant, d'ailleurs, comme principal argument l'absence de comètes à orbites fortement hyperboliques : argument intéressant, mais non déci- sif, Dans un important Mémoire, publié il y a une dizaine d'années, M. Fabry, voulant reprendre complètement l'étude de cette question, se posa le problème suivant : Quelles doivent être les lois de la distribution des divers éléments des orbites cométaires si l'on admet que ces astres viennent des espaces interstellaires? et ces lois sont-elles bien celles-là mêmes qui se mani- festent en réalité ? Mettant à profit les travaux antérieurs de Gauss, Schiaparelli, Seeliger et Davis, l'auteur, après avoir rectilié plusieurs inexactitudes du Mémoire de Laplace, montre que la discordance des résultats dans les recherches qui ont précédé n'est qu'apparente, et provient uniquement de ce que la question y était envisagée à des points de vue différents. Il faut, dit M. Fabry, dans une telle étude, tenir compte du mouvement de translation du Soleil, et considérer principalement les orbites dont les dis- tances périhélies ne sont pas trop considérables : on trouve alors que l'hypothèse d'une origine extra-solaire implique le caractère hyperbolique, souvent même prononcé, pour toutes les orbites cométaires. Or, les conséquences sont en complet désaccord avec les observations : on devrait done pouvoir conclure, avec Fabry, que les comètes sont des astres permanents de notre système. Cependant, si l'on veut admettre qu'aucune comète REVUE GÉNÉKALE DES SCIENCES, 1907. ne provient des espaces interstellaires, il faut pouvoir répondre à une objection : parmi ces astres, il en existe une quinzaine pour lesquels il n’a pas été pos- sible de représenter convenablement toutes les positions observées à l'aide d'un arc elliptique ou même parabo- lique; l'orbite osculatrice qui correspond à la période des observations est alors nettement hyperbolique. L'excentricité dépasse trop fortement l'unité pour que cet écart puisse être attribué à l'incertitude du calcul; et, au surplus, quelques-unes de ces comètes excep- tionnelles figurent au nombre de celles qu'on à décou- vertes récemment, et qui ont été observées longuement avec toute la précision désirable. Une explication assez simple consiste à regarder ce caractère hyperbolique comme accidentel, en admettant qu'il résulte d’une action perturbatrice des grosses plañètes (en particulier de Jupiter) sur les éléments d'une orbite antérieurement elliptique. Cette hypothèse vient de se trouver confirmée dans des travaux récents de Stromgren, Fabry, Fayet, con- cernant les comètes 1890 II et 1892 IT, deux astres pour lesquels le caractère hyperbolique existait certainement à l’époque des observations; le calcul des perturbations a montré que l'orbite de chacune de ces comètes était une ellipse durant la période qui a précédé son entrée dans le domaine d'attraction des planètes. Dans ces conditions, il était désirable de voir entre- prendre une recherche générale du même genre, recherche comprenant non seulement les comètes trouvées hyperboliques, mais embrassant toutes celles dont l'orbite diffère très peu de la parabole, à supposer toutefois que cette orbite ait été déterminée avec une exactitude suffisante : il se pourrait, en effet, qu'une orbite parabolique ou même légèrement elliptique, au voisinage du passage au périhélie, ne soit qu'une orbite antérieurement hyperbolique, dont les perturbations planétaires auraient diminué plus tard lexcentricité; un tel fait constituerait, au contraire, un argument en faveur d'une origine extra-solaire. Malheureusement, pour qui connait les difficultés matérielles que l’on rencontre en Astronomie, la réali- sation d'un tel plan, par quadratures mécaniques, avec toute la rigueur nécessaire et en tenant compte de l# 566 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE # l'action de toutes les planètes, eût absorbé quasiment l'existence d'un calculateur exercé. Nous devons savoir le plus grand gré à M. Fayet d'avoir eu déjà le cou- rage d'aborder un problème restreint, se contentant d'évaluer les perturbations du premier ordre de l’excen- tricité, le seul élément intéressant pour notre objet, et limitant le calcul aux perturbations produites par Jupiter. Cette dernière restriction est légitime quand on songe au rôle prépondérant de Jupiter dans la dis- tribution du système solaire. Enfin, puisque l’excen- tricité des astres calculés est comprise entre 0,9985 et 1,0020, il ne pourrait y avoir qu'une erreur minime à considérer, dès le début, les orbites comme parabo- liques; de même, on a vu, par les travaux de Callandreau, que l’excentricité de Jupiter ne joue pas un rôle con- sidérable dans les perturbations planétaires, et parfois aussi, ici, l'auteur pourra supposer l'orbite de Jupiter rigoureusement circulaire. C'est en cette forme que le problème fut abordé par M. Fayet, de l'Observatoire de Paris, dans une thèse importante, étudiant près de 150 comètes, et calculant les tables numériques destinées à faciliter les recherches analogues qui pourraient être entreprises ultérieu- rement. Cette étude approchée a permis, comme on l’espérait, de constater que la grande majorité des astres exa- minés ne peuvent être d'origine extra-solaire. Pour le très petit nombre qui restait, le résultat de la première approximation était douteux, et un calcul plus rigoureux était nécessaire, comprenant l'action de planètes autres que Jupiter; cette recherche plus précise et plus com- plète fut faite également, et une des plus grosses dif- ficultés fut présentée par la comète 1844 III, étudiée par Bond dans le détail. La singularité des résultats obligea de reprendre tous les calculs de Bond, et de recon- naître une erreur de signe, échappée faute de vérifica- tion : alors cette comète, elle aussi, rentre dans la loi commune et l’on peut conclure que : 1° Parmi les comètes connues, il n'en existe aucune que l’on puisse invoquer comme un argument en faveur de l'hypothèse d’une origine extra-solaire ; 2 L'orbite hyperholique admise jusqu'ici comme la meilleure concernant la comète 1844 III est inexacte. L'orbite la plus probable semble être, au contraire, légèrement elliptique; mais le peu de gain réalisé en passant de la parabole à l'ellipse permet aussi &e con- clure que la parabole est bien suffisante pour repré- senter les observations. En un mot, toutes les comètes apparues jusqu'ici sont des astres permanents de notre système. Certainement un analyste pur trouverait à redire au travail de M. Fayet : quelques singularités étranges se présentent, dans les équations, qui ne sont point éclaircies. Mais, on l'a dit bien souvent, il ne faut pas être hypnotisé par l'attrait analytique, et, trop sou- vent, les recherches de Mécanique céleste sont sans aucun rapport avec la réalité, purement théoriques, d’une application inconnue ou impossible aux chiffres d'observation et leur valeur se trouve, de ce fait, hau- tement diminuée. L'auteur ne se préoccupe pas de la nature des points analytiques : il les calcule. En fait, son travail corres- pond à une lourde tâche, il évoque un astronome pos- sédant son métier et maitre, en mème temps, de l'appareil des calculs : les conséquences sont la récom- pense d'un si long et si méritoire effort, et en tant que conclusions temporaires, et parce que les nombreuses données numériques serviront de base, désormais, à toutes les recherches concernant les comètes. Cette œuvre comptera largement à l'actif des importants travaux de l'Observatoire de Paris. Elle est dédiée, notamment, à son Directeur : elle lui fait gran- dement honneur, dans la mesure des encouragements et des facilités qu'il a pu prodiguer, de la part d’initia- tive qu'il a prise pour l'élaboration de cette mise au point d’une question si délicate et si longuement con- troversée. $ 2. — Météorologie Verres colorés pour Fobservation des nuages. — L'emploi des verres colorés pour l'obser- vation des nuages n'est pas nouveau; mais l'expérien a conduit le capitaine Et. Péroux à déclarer que le choix de la couleur est très important, et cet auteur a fait, à ce sujet, une communication à la Société Astro- nomique de France. Certains observateurs emploient indifféremment des verres bleus, jaunes, rouges, dans le but d’affaiblir la lumière au seul profit des yeux: mais aucune de ces couleurs ne parait avoir été recherchée pour l'étude spéciale des nuages; le verre violet, seul, a permis à l’auteur de distinguer les plus légers cirrus et les plus légères brumes, ainsi que l'épaisseur relative des couches nuageuses qui paraissent. uniformes: distinctions que les autres couleurs et l'ob- servation à l'œil nu ne peuvent donner. Le violet auquel on s’est arrêté, placé devant un spectre lumineux (celui de l’argon, par exemple), ne laisse sensiblement passer que les ondes comprises de À — 440 à À — 400 environ: il correspond approximati- vement, comme intensité colorimétrique, à une solution de permanganate de potasse au 2/1000 sous une épais seur de 45 millimètres, mais d’une tonalité moins rose et tirant plus sur le violet, car, par transparence, sous un fort éclairage, la solution de permanganate en cuve à faces parallèles ne présente pas la mème absorption ni le même pouvoir définissant. La superposition de deux verres colorés, l'un bleu indigo clair et l'autre rose pourpre, répond assez bien à ce violet. Pour observer les nuages les plus légers, leur épais- seur relative et leur direction, le capitaine Et. Péroux emploie un tube prismatique rectangulaire, de la forme d’un petit stéréoscope à main, et dont le fond est fermé. par un de ces verres violets; en s'orientant convena- blement, la direction des nuages qui traversent le champ de cet appareil se trouve indiquée par les côtés. mêmes d'une facon suffisamment précise; la hauteur relative des couches nuageuses, leur différenciation et. les voiles de cirrus les plus ténus apparaissent nette- ment. Les verres colorés peuvent, en effet, rendre de pré- cieux services, et les indications qui précèdent sont à retenir ; mais il est à souhaiter qu'elles soient contrô- lées, qu'une entente survienne et que tous les amateurs puissent avoir des résultats plus fructueux en observant d'une facon systématique et uniforme. $ 3. — Art de l'Ingénieur : Les incendies à bord des navires. — Les incendies à bord des navires sont beaucoup plus fré- quents qu'on ne le pense en général; c'est ainsi que, d’après un Mémoire de M. V. Lewes, présenté à l'Ins= titution des Naval Architects de Londres et analysé récemment par M. G. Richard à la Société d'Encoura= gement pour l'Industrie nationale, on compterait, pen- dant les cinq premières années de ce siècle, 141 in= cendies ayant occasionné la perte d'autant de navires, d'un tonnage total de 162.000 tonneaux. Il ne s’agit ici que des désastres; les incendies d'importance moyenne,. éteints sans perte des navires, sont extrêmement nom= breux. . Les causes principales de ces incendies sont les sui= vantes : 1° feu spontané prenant dans une cargaison homogène ou mélangée; 2° admission de substances susceptibles de provoquer, en un point d'une cargaison: inoffensive en général, une élévation de température excessive, par des actions chimiques ou autres; 3° sub stances susceptibles de dégager des gaz ou des vapeurs. inflammables ou explosifs. Au premier rang des cargaisons susceptibles d'in=M flammation spontanée, il faut citer les charbons, puis les matières fibreuses légèrement humides et com= primées renfermant des traces d'huiles ou de graisses, spécialement les fibres végétales, surlout en pré d& CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 567 “sence d'huiles siccatives, très facilement oxydables. Le coton, le jute, la laine sont particulièrement dangereux “lorsqu'ils sont humides, huileux et exposés à Ja chaleur soit de tuyaux de vapeur, soit simplement des rayons solaires, et il en esl de même des tissus de ces matières. En outre, ces matières dégagent souvent des pous- sières très, inflammables, formant avec l'air des mé- anges presque explosibles par une étincelle quelconque. . Dans une cargaison mélangée, il peut se produire, pendant les gros temps, des secousses qui provoquent des fuites de différentes substances chimiques, dont le mélange est susceptible d'occasionner des incendies tout à fait imprévus. C'est ainsi qu'une bouteille de glycérine, brisée sur un paquet de permanganate de - potasse, — deux substances en elles-mêmes absolument ‘inoffensives, — provoque une déflagration immédiate - des plus intenses. Des cordages goudronnés en présence . de barriques de chlorure de chaux peuvent provoquer un incendie par l'action du chlore de ces barils sur le goudron ou la térébenthine des cordages. L'acide azotique en présence de charbon ou de térébenthine est aussi très dangereux, et l’on citerait ainsi toute une liste de corps extrêmement nombreux sans aboutir à d'autre règle que celle, aussi vague que générale, d'éviter autant que possible de loger près l’une de l'autre des substances très oxydantes et oxydables, riches en oxygène d’une part et en matières combus- _ tibles de l’autre. | Les incendies par formation et fuites de vapeurs com- »bustibles se déclarent principalement dans les car- “gaisons de pétrole plus ou moins mélangé d'essences, principalement des huiles brutes. … Les principales précautions à prendre contre ces “incendies sont : 4° la subdivision du navire en nom- + compartiments étanches et à bois ignifugés; 29 la protection des tuyaux de vapeur et des canalisa- “tions électriques; 3° une surveillance exacte et minu- - tieuse de l'arrimage des cargaisons; leur protection par “des moyens d'extinction appropriés. Mais ces pré- cautions sont très rarement applicables en grand dans a marine marchande. …— L'ignifugation des bois ne peut être efficace que si la “matière ignifugente pénètre bien au cœur des bois, ce ‘qui exige des procédés variant avec la nature et l'âge des hois, de sorte que cette imprégnation à cœur est loin d'être résolue pratiquement. En outre, il faut que les substances ignifuges ne détériorent pas les bois, “comme le sel marin, qui le rend trop hygroscopique; dautres attaquent les bois et les métaux, clous, ete., qui s'y trouvent. Les substances les plus employées Sont les chlorures et les phosphates d'ammoniaque, de Calcium, de zinc. Les bois, amenés sur chariots dans de grands autoclaves, y sont soumis au vide qui en épuise les gaz et l'humidité, puis au réactif sous pres- Sion, dont on surveille l'absorption par sa baisse dans Pautoclave; puis les bois imprégnés sont séchés à des températures ne dépassant guère 30°. , Les bois ainsi traités avec grand soin présentent, “d’après M. Lewes, une grande résistance à l'incendie, sans détérioration de leur substance, et leur emploi devrait être, d’après lui, rendu obligatoire sur tous les paquebots à voyageurs; en outre, les chantiers de construction devraient ignifuger eux-mèmes leurs bois de façon à en être bien sûrs. L'emploi de l'eau n'est pas toujours à conseiller pour l'extinction des incendies. Tel est le cas de la prise en feu d’une poche de charbon à fond de cale. L'eau lancée sur la masse de charbon de la cargaison ne peut pénétrer à la poche en feu qu'en un volume insuffisant pour l’éteindre, mais très suffisant pour sy transformer en gaz à l'eau combustible et susceptible de provoquer des explosions amenant l'incendie total du navire; on Sen tirerait mieux par un jet d'acide Carbonique liquide, extincteur et refroidisseur éner- pote pénétrant au cœur de la poche en feu; l'emploi es bonbonnes d'acide carbonique actuelles, en acier sans soudure, ne présente plus aucun danger. Mais, d’après M. Lewes, tous ces moyens ne sauraient être qu'imparfaits et, pour assurer une sécurité absolue, il faudrait que la cale, fermée à ses extrémités par des cloisons ou murailles d’eau bien étanches et pourvue d'écoutilles à joints hydrauliques, füt, après son arri- mage, remplie d'acide carbonique qu'on chasserait par un ventilateur pour le déchargement. Malheureusement, cette solution radicale et rationnelle exige des disposi- tions spéciales, coûteuses et délicates, qui en empê- cheront longtemps l'adoption par la plupart des navires de moyenne importance ou faisant de nombreuses escales, de sorte que la question discutée par M. Lewes est encore loin, comme celle mème de l'incendie des théâtres, d'être résolue d’une façon pratique et géné- rale, $ 4. — Physique Une modification du marteau électro-ma- gnétique.— L'interruption automatique, sur laquelle la construction du marteau électro-magnétique se base en général, est remplacée, dans certains cas, par une dérivation disposée sur le marteau et qui, après l'attraction de l’armature, met l'électro-aimant hors de circuit. Or, comme ces systèmes à court-circuil pré- sentent une consommation excessive de courant élec- trique, M. Ammon vient de les modilier d’une facon fort ingénieuse. Dans la figure 1, M est un électro-aimanten fer à cheval à deux enroulements bifilaires, disposés de telle facon Fig. 1. — Marteau électro-maqgnétique modifié. A, armature; B, pile; M, électro-aimant: K, T, contacts. que, la touche étant abaissée, la pile B, dans le premier stade (c'est-à-dire avant que l'armature À ne soit parfai- tement attirée), n'envôie son courant magnétisant qu'à travers l’un des enroulements, tandis que, l'attraction de l'armature une fois terminée, le second enroule- ment sera également mis en circuit, amenant le cou- rant de la pile en direction opposée au premier, de facon à désaimanter les noyaux et à leur faire relâcher l'armature. Un autre perfectionnement réside dans la disposition d'un second électro-aimant, destiné à remplacer le ressort antagoniste. Ces systèmes de marteaux se prèlent à nombre d'applications diverses, et notamment aux bobines d'in- duction. Dans ce dernier cas, on se passe d'un conden- sateur. Ce dispositif est décrit avec plus de détails par M. O. Canter dans un article récemment publié dans une revue électrique allemande. $ 5. — Electricité industrielle Les turbines à vapeur dans les usines élec- triques. — Le développement pris par les turbines à vapeur, surtout dans les usines à courant alternatif composées de grosses unités, paraitra pleinement jus- lié à qui lira les résultats G'essais des turbines de construction moderne; nous signalerons, en particulier, d'après une revue angiaise, l'£J/ectrical Engineerinq?, ceux qui viennent d’être obtenus sur un groupe Parsons ! Elektrotechnisehe Zeitschrift, n° 21, 1907. ? Electrical Engineering du 16 mai 1907, p. S26. 568 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE en service depuis plus de six mois à l'usine de New- castle-on-Tyne. A noter, d'ailleurs, l'émulation qui existe entre les crandes usines de construction de turbines, qui ont obtenu des chiffres de consommation très économiques avec les divers modèles existants, parmi lesquels Par- sons, Curtis, Brown, Westinghouse, etc. Les turbo-alternateurs de l'usine de Newcastle ont une puissance nominale de 3.500 kw.; mais leur mini- mum de consommation paraît obtenu à la puissance d'environ 5.000 kw., ainsi que le font ressortir les essais effectués sur l’un des groupes aux différentes charges suivantes : A vide et sans excitation, dans le premier essai; A vide et avec excitation, dans le deuxième essai; Aux puissances d'environ 2.000, 4.000, et 6.000 kw., dans les essais 3, #, 5 et 6; Enfin et à nouveau à 5.000 kw., dans le septième essai. Après quelques jours fut répété l'essai à 5.000 kw., prolongé cette fois pendant 3 heures (8° essai). De tous ces essais, les résultats sont donnés dans le tableau 1 suivant. On voit qu'à quelques centièmes près, ies divers celui de Powell, des plus curieux par la nature de son antiseptique, qui n'est autre que du sucre, sous forme de mélasse pour les bois grossiers et de saccharost pour les bois fins. Les bois, verts ou saisonnés, son plongés en une dissolution sucrée froide, dans ur autoclave dont on amène graduellement la tempéraæ ture à celle de l’ébullition de la dissolution; puis, aprë un temps plus ou moins long, on sort ces bois des autoclaves et on les sèche lentement dans un courant d'air chauffé graduellement. Cette eau sucrée se diffuse dans le bois bien plus profondément et vite que l'eau pure; puis, à mesure que la température de l’autoclave augmente, cette & chasse du bois l'air qui s’y trouve et aussi en vaporis l'humidité et la sève parce que son point d'ébullition est plus élevé que celui de l’eau pure. Pendant refroidissement, l'absorption de l’eau sucrée continue de sorte que le sucre finit par imprégner totalement! le bois, mais sans laisser, à l'examen microscopique trace de sucre cristallisé ou en sirop. La durée df l'opération varie, suivant la nature des bois, de quelques jours à quelques semaines. Les bois sortent de ce traitement avec une légère augmentation de densité, avec leurs veinules et même } | Tigceau |. — Résultats d'essais de turbo-alternateurs. : NUMÉROSMDESIESSAIS eee + le menelo ne se l 3 n 5 6 7 8 Durée des essais, en“heures "17/2 ae 1 1 1j2 1 1/2 1/2 1 3 Puissance moyenne, pn kw. . , asses APR (a1g2.81| 4045,14| 5901 | 6921,8 | 5164,07/5059,38 Pression de la vapeur, en kg par em? . 12,6 14,7 14,1 7 13.8 14 15.3 Degrés de surchautfe de la vapeur à la turbine En IIeOTÉS AC EN RRE ET 44 57 60 65 66 66 51 Vitesse, en tours par minute . . . . . 1.200 » » » » » » Vide à la sortie de la turbine, en mm. HEMNETOUTE ER ET 735 155 738 738 735 130 138 541 Kilogr. d'eau {otale condensée par DENT (GDDTON SEEN 1.665 2.360 14.500 36.600 | 43.400 | 30.001 | 30.000 KA OP DATA DEUTE PME RTE » 6,571 6,105 6,210 5,982 6,08 essais à 5.000 kw. donnent une consommation d'environ 6 kg. par kw.-heure. Il convient de noter que la puissance mesurée et donnée dans la 5° ligne du tableau est ceile que débite l'alternateur, et qu'il n'y est pas tenu compte de la partie que consomment les machines auxiliaires, telles que machine motrice et pompes du condenseur, ete., consommation dont il serait cependant intéressant de tenir compte. Toutes ces lectures ont été très soigneusement prises el contrôlées, et c'est parce qu’elles offrent la garantie d'une grande précision qu'il convient de les retenir, non pas comme un chiffre de consommation moyenne, inais comme une indication du maximum d'économie réalisée actuellement pour une machine de cette nature et de cette puissance. S 6. — Chimie industrielle Un nouveau procédé de conservation des bois. — [a question de la conservation des bois a déjà donné lieu à de nombreuses solutions : créosotage par immersion, vide ou pression, puis injection de toutes sortes d'antiseptiques : chlorure de zine, bichlo- rure de mercure, sulfates de cuivre, de fer, de zinc. Mais aucun de ces procédés n'a su résoudre complète- nent la question de la préservation indéfinie des bois sans les détériorer: aussi est-on encore perpétuelle- ment à la recherche de nouveaux procédés. Parmi les procédés récemment essayés, M. G. Richard a dernièrement signalé à la Société d'Encouragement les fentes du saisonnage comme cimentées par l'in prégnation sucrée, et ce, sans modifier l'aspect ni & couleur des bois, sans diminuer la facilité de leur travail à l’outil. F Des essais exécutés sur du sapin pour pavage en bois, par la municipalité de Londres, dans le quartier d& Whitehall, ont donné d'excellents résultats de résis= tance sous un trafic très lourd, d’insensibilité à Ja chaleur et à l’eau, sans dilatation, exsudation ni mau= vaise odeur. On peut, dans certains cas, compléter ce procédé en mélangeant à la dissolution sucrée des antiseptiques spéciaux contre l'attaque des insectes destructeurs des. bois. - 6 LA En pareille matière, il faut toujours se méfier uni peu des premiers résultats, et il est certain que Je procédé Powell attend encore la consécration de Wa durée; mais, tel qu'il est, il a déjà donné mieux qu de simples espérances et méritait, en SR d'être signalé à nos lecteurs. , * $ T. — Géographie et Colonisation 4 ! Les récentes explorations de FHimalaya: — L'immense chaîne de l'Himalaya, qui se déploie en arc de cercle sur une longueur de 2.200 kilomètres, eb celle du Karakorum, qui la double au Nord-Ouest sur la rive droite de l’Indus, ont été récemment parcourues, par diverses expéditions qui ont apporté une notable contribution à nos connaissances géographiques @b scientifiques sur ces régions d'un accès si difficile. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE En ce qui concerne le Karakorum, nous rappelons les explorations de Conway (1892), de M. et Mn: Bullock Workman (1900 et 1902), de MM. Eckenstein, Jacot- Guillarmod et leurs compagnons (1902)'. Reprenant leurs explorations dans le Karakorum pendant l'été de 1903, M. et Me Bullock Workman furent amenés à rectifier certaines erreurs du « Survey » de l'Inde, ‘notamment au sujet de la liaison du glacier de Hoh umba avec celui de Hispar, qui est portée sur les artes officielles et qui, en fait, n'existe pas. Ils conti- uèrent l'exploration du glacier de Chogo Lungma et ‘Sravirent trois pics qui dominent ce puissant courant de glace. … M. Workman se serait élevé à 7.152 mètres, sur les flancs d’un pic coté 7.459 mètres sur les cartes in- diennes:; Mu Workman à atteint le sommet d'un pic qui aurait 6.861 mètres *. Dans l'Himalaya proprement dit, les explorations accomplies durant ces dernières années ont porté sur la partie occidentale et la partie centrale de la chaine. Sinous commencons par la région occidentale, ce sont encore le D° Workman et Mme Fanny Bullock Workman que nous trouvons parmi les explorateurs de l'Himalaya. Les deux intrépides voyageurs ont parcouru et étudié, en 1906, le massif du Nun-Kun *, qui est situé dans la province de Suru, à l'Est du Kashmir propre- ment dit, au Sud-Ouest du Ladak et au Nord-Ouest du Zanskar; ses montagnes neigeuses, hérissées de rochers escarpés, présentent sept points culminants, qui attei- gnent des altitudes variant de 6.400 à plus de 7.000 mè- tres. Ces cimes sont flanquées au nord et à l’est de pics moins élevés, mais leurs versants abrupts opposentune barrière infranchissable ; sur les autres faces, les gla- ciers et les pentes neigeuses rendent l'accès des som- mets principaux non pas impossible, mais très difficile. Quelques touristes ont remonté la vallée et le glacier de Shafat, dans la partie nord du massif, jusqu'à 4.600 et 4.900 mètres; le D' A. Neve aurait atteint, sur ce glacier, 5.420 mètres; un voyageur hollandais se serait élevé jusqu'à 6.100 mètres. Mais M. et Me°Workman ont les premiers, à proprement parler, exploré les glaciers et fait l'ascension des cols et des sommets de cette chaine; ils avaient avec eux un guide de Courmayeur, Cyprien Savoye, et six porteurs italiens. Le glacier de Shafat ou de Nun-Kun présente une surface irrégulière, s'élevant en hautes crêtes den- telées, découpées en deux ou trois points par des tor- rents ; il est actuellement en recul. La partie du gla- cier couverte de débris morainiques s'étend sur trois kilomètres; après quoi on rencontre une surface de glace propre. On voit près de là de nombreuses tables glaciaires, dont la hauteur varie de 1 à 2 mètres. Les voyageurs rencontrèrent de vastes espaces cou- verts de Nieve penitentes, sur des pentes neigeuses dépassant 5.000 mètres; ces curieuses formations sem- blaient comme un lac hérissé de crêtes neigeuses, brillant au soleil. Me Workman pense que l'érosion éolienne joue bien un rôle considérable dans la for- mation de ces pyramides de neige, mais il lui paraît probable aussi que les radiations solaires contribuent pour une part à modeler la neige rassemblée par le vent et à en faconner les crètes. Le Dr et Mme Workman établirent leur camp à des hauteurs extraordinaires, dont les plus élevées furent 6.290 et 6.500 mètres. La chaleur était littéralement insupportable pendant le jour; après le coucher du soleil, il gelait brusque- 1 Revue générale des Sciences, 1903, page 801. ? Dr. and Mrs. Workman.in the Himalayas (The Geogra- phical Journal, t. XX, 1903, p. 541-544); FanNy Buzzock- Work- Man : Exploration des glaciers du Kara-Korum (La Géogra- phie, &.1X, 1er sem. 1904, p. 249-256); W. Hunter WoRKMAN : From Srinagar to the Sources of the Chogo Lungma Glacier (The Geographical Journal, t. XXV, 1905, p. 245-268). * Faxny Buozcock Workman: Exploration du Nun-Kun (La Géographie, 15 février 1907, p. 93-102). 569 ment et le minimum de la nuit fut — 20°C. Au-dessus de 6.000 mètres, le froid devient très difficile à suppor- ter. Le mal de montagne, au sens propre du terme, ne fut observé que sur un seul des neuf Européens. M. et Me Workman furent toujours capables d'accomplir leur tâche journalière, bien qu'éprouvant « ce qu'on peut appeler la*lassitude des montagnes ». Les cinq nuits passées à cette altitude furent des nuits blanches pour les voyageurs. Du glacier, ils gravirent l’un des plus hauts pics du massif. À 6.910 mètres, le D Workman s’arrêla pour faire de la photographie. M Workman, continuant avec le guide et un porteur, arriva au sommet, qu'elle estima avoir 7.061 mètres, en corrigeant par ses obser- vations l'altitude de 7.091 mètres donnée par F/ndian Survey. Les voyageurs explorèrent les glaciers situés au sud et à l’ouest de la chaine et firent ainsi un tour complet du massif du Nun-Kun, qui fut de 140 kilomètres, dont 65 effectués sur des glaciers et des champs de neige. A 3.660 mètres, ils trouvèrent, au-dessus de la zone des forêts, un petit village où des ètres humains vivaient sous le mème toit avec des chèvres, des poules, des marmottes. Au-dessus de 4.270 mètres, ils ne virent plus, comme animaux, qu'une espèce de perdrix, el quelques oiseaux ressemblant à des corbeaux, mais avec le bec et les pattes rouges. C’est dans une partie un peu plus centrale de l'Hima- laya, dans le Kumaon, à l’ouest du Népal, que M. T. G. Longstaff a effectué, de mai à octobre 1905, une ex- ploration au cours de laquelle il a couvert une distance d'environ 900 milles sur la carte’. Il était, lui aussi, accompagné d’un guide de Courmayeur, Alexis Bro- cherel, et de son frère Henri, comme porteur. Parti d'Almora, M. Longstaff a gagné le glacier Pan- chu; ce glacier est depuis quelque temps en recul. Des bandes de Colomba leuconota et d'Accontor nepalensis vivent sur les moraines couvertes de neige à plus de 4 500 mètres. Parvenu à la tête du glacier, le voyageur essaya de gravir l’un des pics du massif du Nanda Devi, dont le point culminant est à 7.821 mètres, mais il dut s'arrêter à 6.400 mètres environ, dans la crainte de déterminer des avalanches. Il descendit par le glacier Ponting, qui est en voie d'avancement; sa tête est à près de 3.540 mètres d'altitude. M. Longstalf trouva là un rongeur du genre Ochotona (ou Lagomys), qui est très répandu dans toutes les montagnes du Kumaon, du Népal, du Tibet et du Garhwal. Au Tibet, où il entra ensuite, M. Longstaif étudia le massif du Gurla Mandhata, le Nimo-Numgyl des Tibé- fains, dont le point culminant s'élève, d’après le « Sur- vey », à 7.731 mètres. Il passa avec.ses guides une nuit à 7.015 mètres (23.000 pieds), mais l’insomnie et le manque de vivres le firent échouer le lendemain à :50 mètres au moins du sommet, soit au-dessous de 7.300 mètres; son baromètre s'étant brisé, il ne put affirmer exactement l'altitude qu'il avait atteinte. Il constata que le glacier de Gurla est actuellement en état de recul. On rencontreune espèce de mouflon, le burrhel(Ovrs nahura), jusqu'à la limite des neiges et même plus haut. Une espèce d'Ochotona monte jusqu'à près de 5.200 mètres. Un lapin à laine {Lepus oïostolus) est commun sur les pentes plus basses du massif, où se trouvent aussi quelques petites colonies de marmottes. Dans la plaine, haute encore de plus de 4.500 mètres, vit la Gazella picticaudata. Passant dans le Garhwal, M. Longstaff alla explorer le.glacier de Kurumtoli et signala dans cette région d'importantes rectifications à apporter aux cartes. Plus à l'est, dans l'Himalaya népalais, aux confins du Sikkim, le puissant massif du Kangchinjunga, haut EEE ZZZ—Z——_——.—." —"—"——.* 1 T. G. Lowesrarr : Six months wandering in the Hima- laya (The Alpine Journal, Vol. XXIII, août 4906; p. 202-226); du même : Notes on a journey through the western Hima- laya (The Geographical Journal, février 1907, p. 201-211;. 570 de 8.585 mètres, a élé exploré en 1899 par M. Freshfield, qui s’est appliqué surtout à l’étudier scientifiquement*. En 1905, un Suisse, le Dr Jacot-Guillarmod, qui s'était signalé déjà par sa remarquable tentative d’ascension du pic K° ou Chogori, en 1902, fessaya d'atteindre le sommet du Kangchinjunga ; il était accompagné de deux autres Suisses, MM. Alexis Pache et Raymond, d'un Irlandais, Crowley, qui avait fait partie de l'expé- dition du Chogori, et d'un Italien, Rigo de Righi. C'est par la vallée du Yalung que l'expédition s’avanca. L'exploration proprement dite commença à Tséram, Freshfield n'ayant pas poussé ses investigalions dans le bassin glaciaire du Yalung. C'était donc pour la première fois que des Européens remontaient cette vallée. Mais on sait que l'expédition ne put s'élever sur les flancs du Kangchinjunga au delà de 6.500 mètres, ayant été arrètée dans sa marche par un malheureux accident qui causa la mort de M. Pache et de trois indigènes ?. Si l'expédition ne put atteindre le but final qu'elle se proposait, elle n'en a pas moins donné de très importants résultats scientifiques qui méritent d'être relatés. Parmi les plus intéressantes observations météorolo- giques, on peut retenir que le Sikkim est l’un des pays les plus humides du monde. L'expédition y subit S0 jours de pluie, presque sans interruption, ou de neige dans la haute montagne. Il résulte de cette humidité que la végétation est exubérante et toute spé- ciale, et aussi qu'on trouve dans ce pays une profusion extraordinaire de sangsues terrestres. Il est inutile de tenter des ascensions avant la fin de septembre, à cause du danger des avalanches; le mois d'octobre est seul favorable. Il y aabsence complète de vent, même à 6.500 mètres. La neige est toujours en farine; elle forme d'énormes accumulations sur les glaciers, qui sont actuellement en crue. L'Himalaya doit traverser une période de refroidissement qui n’a pas encore atteint son maximum. Le minimum de température observé a été — 120, Un important herbier a été réuni; des espèces nouvelles ont été récoltées, et c'est à 6.200 mètres que l'on a trouvé la plante phanérogame la plus élevée qui ait été rencontrée jusqu'ici, une renonculacée. Une belle collection entomologique a été faite par M. Ray- mond *. : Au point de vue géologique, il est à noter qu'il n'y a pas de calcaire dans là vallée du Yalung. Les hauts sommets de celte région n'ont pas dû être immergés depuis leur formation. On ne commence à retrouver du calcaire que dans un rayon de plus de 30 kilomètres autour du massif central. Si les glaciers sont en crue et débordent leurs moraines frontales, ils l'ont été davan- tage encore, il y a quarante à cinquante ans; les arbres et arbrisseaux qu'on rencontre sur la seconde rangée de moraines ne paraissent pas antérieurs à ce temps. L'exploration faite par le D' Jacot-Guillarmod et ses compagnons, nouvelle au point de vue géographique, | a été la première tentative d'ascension du Kangchin- Junga. L'expédilion a constaté qu'il existe une voie d'accès plus sûre que celle qu'elle a suivie. Il est acquis qu'il est inutile de compter sur les indigènes, pour monter au-dessus de 6.000 ou 6.500 mètres. On * Revue générale des sciences, 4903, p. 801. — A ajouter les travaux suivants de DoucLas W. FRESHMELD, parus depuis : Round Kangchenjunga (Londres, 1903, in-$0); The highest moutains in the world (The Geographical Journal, &. XXI, 1903, p. 294-298): The Sikhim Himalaya (The Scottish Geographical Magazine, t. XXI, 1905, p. 173-182). : = Pour les détails sur le voyage et l'ascension, voir les lettres du Dr Jacot-GuicLarmon dans La Gazette de Lau- sanne, 9% août, 9 septembre, 9, 40 et 11 novembre 4905 : et du même : Vers le Kangchinjunga (Annuaire du Club alpin Suisse, 41° année, 1906. * Au sujet des fourmis, voir ce qui a été dit dans la Fevue générale des Sciences, 15 avril 4901, p. 265. CARONIQUE ET CORRESPONDANCE sait par cette ascension, et par toutes celles qui on été tentées à de hautes altitudes, que l'homme peu! atteindre et dépasser 7.000 mètres sans éprouver de troubles mettant sa vie en danger. Le D' Jacot-Guil- larmod pense qu'on pourra attemdre un jour le toit d monde‘, mais les derniers 2.000 mètres demanderont plus d'efforts, de persévérance et d'argent que tout I reste de l'expédition. - Gustave Regelsperger. $ 8. — Enseignement La Station de recherches de Meudon. Cette Station, qui a été fondée et dirigée par Mar- celin Berthelot, vient d’être réorganisée et rattachée au Collège de France. M. Müntz, membre de l'Institut, est nommé directeur du Laboratoire de Chimie végé- tale, et M. Daniel Berthelot, professeur à l'Ecole de Pharmacie de Paris, directeur du Laboratoire de Phy= sique végétale. Personnel universitaire. — M. Haller, profes- seur à la Faculté des Sciences de Paris, est nommé membre du Comité consultatif de lEnseignement: public (Commission des Sciences). M. Moureu, agrégé près l'Ecole supérieure de Phar- macie de Paris, est nommé professeur de Pharmacie chimique à ladite Ecole. M. OŒchsner de Coninck, chargé d’un cours de Chimie. à la Faculté des Sciences de Montpellier, est nommé professeur de Chimie à ladite Faculté. M. Hutinel, professeur de Pathologie médicale à læ Faculté de Médecine de Paris, est nommé professeur. de Clinique des maladies des enfants à ladite Faculté. M. Segond, professeur d'Opérations et d'Appareils à la Faculté de Médecine de Paris, est nommé profes- seur de Clinique chirurgicale à ladite Faculté. M. Déjerine, professeur d'Histoire de la Médecine et de la Chirurgie à la Faculté de Médecine de Paris, est nommé professeur de Pathologie interne à ladite Faculté. M. Lucet, vétérinaire, lauréat de l'Académie des Sciences, est nommé assistant de la chaire de Patho- logie comparée du Muséum d'Histoire naturelle, en" remplacement de M. Phisalix, décédé. M. Drach, professeur de Mécanique rationnelle appliquée à la Faculté des Sciences de Poitiers, est nommé professeur de Calcul différentiel et intégral à ladite Faculté. À Les nouveaux agrégés des Sciences ana- tomiques et physiologiques dans les Facultés. de Médecine. — À la suite des concours qui vien- nent d'avoir lieu, sont institués agrégés près les Facultés. de Médecine suivantes : he. Paris : M. Zimmern (Physique) ; M. Nicloux (Chimie); M. Mulon (Anatomie); M. Brumpt (Histoire naturelle). Bordeaux : M. Labat (Pharmacie); M. Mandoul (His toire naturelle). | Lyon : M. Nogier (Physique); M. Mouneyrat (Chimie). Montpellier : M. Derrien (Chimie) ; M. Catanes (His= toire naturelle). Nancy : M. Dufour (Physique); M. Robert (Chimie) ;. M. Collin (Anatomie). Lille : M. Dubois (Physiologie). 1 Ce toit du monde est, on le sait, le mont Everest, @ Gaurisankar, dont l'altitude a été estimée à S.840 mètres Il est situé en dehors de l'Inde, sur la frontière entre IE Népal et le Tibet, et jusqu'ici des raisons diplomatiques ont empèché d'en tenter l'ascension. On avait eu dernièrement l'espoir que cet empêchement pourrait disparaitre et un projet d'expédition avait été étudié par la Société royale de» Géographie et l'Alpine Club de Londres. Mais le secrétaire d'Etat pour l'Inde, M. Morley, vient de faire savoir qu'il ne pouvait pas pour le moment autoriser cette entreprise. CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES 571 LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES DEUXIÈME PARTIE dsl > Nous avons précédemment’ fait l'étude des à ondes de la première phase des tremblements de - terre; nous allons maintenant aborder celle des ondes des phases subséquentes. I. — ÉTUDE DE LA SECONDE PHASE. Vers le milieu des phases préliminaires, on dis- tingue, en général, un changement d'amplitude assez peu accentué : c’est le commencement de la seconde phase. Omori indique comme vitesse superficielle de cette phase (Publications, n° 5) 7,2 km./sec.; plus tard (Publications, n° 13) 7,5 km./sec. Ces valeurs sont peu sûres, car elles ne sont pas basées sur des observations directes; en effet, dans cette dernière publication, Omori à déterminé cette vilesse entre Tokyo et l'Europe centrale en utilisant 7 tremblements de terre ; tous les temps / de Tokyo ont été calculés par sa formule : _ ha — 9 4 ù Par contre, dans le méme volume, page 133, il donne treize observations de temps d'arrivée des deux premières phases à des stations dont la dis- tance de l'origine est connue ; on en tire : NUMÉROS DISTANCE ts — \ 9.160 km. 630 secondes. DRE ee 0 9060 :— 670 = (M 9:80 ES 3. 9.710 — 545 - ñ (: 9.250 .— 749 = à ep 9.930 — 482 — . ECS 690 — = HE Lx 9.610 — 701 — DE DAS à (9 960 — 623 = D 7 ME En = à CON OPDCON 620 — CSN ASE ° { 9.550 — 655 _ Moyenne. . 9.544 km. 640 secondes. On voit que ses observations sont assez mau- vaises ; relativement à leur précision, on peut les considérer comme faites à la même distance de l'origine ; il sera donc superflu d'appliquer la mé- thode des moindres carrés; on utilisera simplement leur moyenne. Calculons le temps {, correspondant à 9.544 km. ! Voir la Revue du 15 juillet 1907, p. 531. ÉTUDE DES SECONDE ET TROISIÈME PHASES par la formule de la propagation en ondes sphé riques: secondes. Il en résulte 1.36 sec. pour /,, et pour la vitesse de la seconde phase le long de l'arc 6,997 km./sec., le long des cordes 6,364 km./sec. Dans les Publications (n° 16), Imamura a publié des données sur quatorze Llremblements de terre (Tableau 1) que nous avons étudiés en traitant la première phase. Pour douze de ces séismes, Ima- mura a déterminé la vitesse de la seconde phase; en supposant la propagation superficielle, il a trouvé une moyenne de 6,8 Re ; la somme des carrés des écarts est, dans ce cas, 25,14. Le même calcul, effectué avec l'hypothèse de la propagalion en ondes sphériques, donne un résultat moins favo- rable, ce qui est naturel, car Imamura a déterminé les vitesses données dans son tableau sous la pre- mière hypothèse. La vilesse ainsi obtenue concorde assez bien avec la détermination directe faite par le même savant entre Tokyo et Osaka”: 6,7 km./sec. Benndorf* a publié une formule donnant le Lemps en minutes pour le parcours de l'onde de la seconde phase; la distance est exprimée en mégamètres et elle est comptée sur la surface : le = 1,3 + 3,0 2— 0,075 PE. Il a déduit celte formule de cent cinquante obser- valions contenues dans le tableau II. Pour se rendre comple de la précision de cette formule, calculons la somme des carrés des écarts entre l'observation el le calcul: nous lrouverons 522,39 min’., correspondant à 1,88 minute d'er- reur moyenne, chiffre très élevé. Comparons la formule de Benndorf à l'hypothèse de la propagation à vitesse constante le long de l'arc et le long de la corde; effectuons les mêmes calculs comme dans le cas = la première phase, et nous obtiendrons : Benndorf. . » bo — ne APCE UNI E Me /SeC. 0, MVL Corde 1— 16:32 — t Te 0 — Il en résulte que la représentation de Benndorf est la moins avantageuse des trois. ! Publications, n° 18, p. 97. ? Miticilungen, n° 29. 512 CH. JORDAN -— LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES Le tableau II montre que les quatre dernières | restantes, le calcul; nous obtiendrons alors : observations au delà de 14.000 km. sont bien mau- Ru : : A Benndorf. . » lo—1,30 ZA—920812 aises : à à 1 ne £ S » RES (2 A _ vaises, en eret nie deux stations COMPICES ATC 0. . … V—1,01km/Ssecs A — 1 43 AE RAGE pour la même distance, il y a une différence Corde - : . v—Gor— 15—=0,54 YA?—117.26 TaBLEaAu IL. — Résultats des calculs d'Imamura. DISTANCE CORDES | . en NUMEROS degrés minutes minutes Tremblement de terre : d'Alaska (4 Septembre 1899). . . de Smyrne (20 Septembre 1899) . d'Alaska (23 Septembre 1899 de Ceram (29 Septembre 1899). de Java (19 Octobre 1899) . de Mexico (20 Janvier 1900). des Kuriles (26 Décembre 1900, . . . de Manille (14 Décembre 1901). . . . de Guatemala (19 Avril 1902, . du Turkestan (22 Août 1902). . . de Guam (22 Septembre 1902) . : de Guatemala (23 Septembre 1902). . de S. Formosa (21 Novembre 1902). . d'Andijan (16 Décembre 1902) . d’Altaï (28 Décembre 1902). . + CES | wo = = 1 os a en de N 19 ee = ON OU NE CUS D E © © O NS == Qt = Wow ab e C9 tt OT 4e de de 1 O SS0C2S200;: DS OOSNSOSOSOSREs © He be nn pa He he He Le De © > IN CE me 9 GO 10 HDSumO=eN-1S = = CO QD = NO ee de = = Æ> I) © I DE _ = © 19 aux QE =) TS # Go = © 0 CE s AIN. km./sec. © © ee SAS Fm de dix minutes. Ecarlons ces quatre observa- On voit que, dans ces conditions, la propagation tions et refaisons, à l'aide des cent quarante-six | le long des cordes est la meilleure; non seulement la somme des carrés des erreurs est beaucoup TagEau Il. — Observations de Benndorf plus pelite, mais, en outre, comme il s'agit des sur la seconde phase. mêmes observalions que dans le cas dela première phase, il faut remarquer la concordance entre les Hrncre corrections de {, dans les deux cas: 0,51 minute en t BENDORFF 1 CORDES DIRCRE observé A A métres pour la première, 0,54 pour la seconde phase”. Omori a encore donné une relation entre la durée de la première et de la seconde phase: En prenant pour y, la valeur que nous avons trou- vée (12 km./sec.), pour v, la valeur donnée par Omori (4,7 km./sec.), alors il en résulte r, — 6,63 km./sec., nouvel appui à la propagation le long des cordes, car, dans le cas de l'arc, cette vitesse don- nerail des résultats tout à fait défavorables. Läâska* donne aussi une relalion: {—1t, = 1414, entre la durée de la première phase et la distance en mégamètres et en minutes; la formule est véri- fiée, d’après lui, entre 500 et 14.000 km. , 5 0 5 Û x 0,7 10 3 cp 0,8 10 3 17 2 VE 2,5 2 1 21 = 3,0 1 4 ,91 F0 | 1 : des dis inférieures à 2.000 k : #,0 1 SA 66 pour des distances inférieures à 2. m., On a: 4,5 2 ,0 54 5,0 3 4 80 ER Cha 4 PS on) 5,5 2 3, ; a Le LE Vi” ‘2 es Va )y + , 1 à 84 2 95 3 ul 64 ,27 ) = =) U2 NO de QE 109 ©) = D 10 ND E 6, 1 T, 8, 8, ot © ot LD => 9 1 1 Où 1 CO O0 OO = UE me C0 NO = Où 1 CO CS © oo =NOSR=OC=SORONEOSERNeOONEEE D de be I VO I C0 I I mt = DO CO IC SROAUNONORCOSCæ= TR NN © he deb (2 O0 NC > Co 9 1 Q 19 © = SN © { Publications, n° 13, p. 75. ? Mitteilungen, n° 14. CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES 573 Cette formule est basée sur les observations du | vitesse, en considérant v, —12 km./sec. comme tableau IIL. déterminé. Nous avons : M. R. Sliatessi' a publié une nouvelle formule ne " pour la détermination de la distance épicentrique : 2 sin se (2 Sins DES u) = À. d=1V,l(t4 —t4)— 2.351; Se ; Disposons de v, pour rendre la somme des carrés La distance est exprimée en km., /, —{,ensecon- | des erreurs minimum; nous obtenons v,— 6,345 Tagceau III. -- Observations employées par Laska. LASKA CORDES ACCÉLÉRATION DISTANCE to —t OBSERVATIONS FOYE A A A A en km. n minutes : : 5 S tes en minutes en minutes en minutes en minules Leipzig (5 Juillet 1902). — 19 Avril 1902). — (28 Mars 1902). Strassburg, 1897, n° 123. . .| Turkestan. n° 90. n° 103. n° 115. ui 134. 112 \ ve à \ Japon . 196 | \aska 197 . des ; la formule est valable pour des distances : km./sec., la somme des carrés des erreurs élant supérieures à 2.000 km. Elle est basée sur les | 2,52 min.*. Exéculons le même travail sur Île observations suivantes, faites à Quarto Castello, | matériel de Läska; nous trouverons y, — 6,374 près de Firenze (tableau IV). | km./sec., avec une somme de carrés d'erreur de Exprimons la durée du premier frisson prélimi- | 2,11 min... naire par la formule suivante, en supposant la | Lestableaux précédents montrent que les sommes des carrés d'erreurs obtenus par Läska et Stiatessi 7 sont encore pluspetites,ce quis’'explique facilement, LUS (- + =) 2SiNs +... a); si l'on se rend compte que, pour ces quelques obser- vations, ils ont déterminé deux constantes arbi- utilisons les données de M. Stiatessiel déterminons | traires. Par contre, la concordance que nous avons propagation le long des cordes : Tagceau IV. — Observations utilisées par M. R. Stiatessi. STIATESSI ] ES ARC ACCÉLÉRATION DISTANCE à DATES A A A en km. PDRSCE 2 en minutes 2 en minutes en minutes 19 Avril 1902. : 23 Septembre 1902 . 1% Janvier 1903. 29 Avril 1903. % Avril 1905. 23 Février 1905. . 31 Janvier 1906. . . .142 .879 .052 .117ù .62$ .660 .b89 HR ONE— 9 9 3 2 d] 6 9 SOC oC© à l’aide de la méthode des moindres carrés la | obtenue pour les vitesses dans les deux groupes d'observations est un bon point pour notre hypo- * Bolletino della Società Meteorologica italiana, série IN, thèse, ; vol. XXV. Si nous refaisons les calculs en supposant la pro- 574 pagation le long de l'arc, nous obtenons des résul- tats moins favorables : EA*—11;41 min: DAIE=—16,22— Matériel de Stiatessi. — de Laska. re — 6,93 km./sec. Ye—#Ui — Réunissons les données de Läska et Stiatessi et déterminons la marche des ondes dans l'hypothèse des ondes accélérées ; nous obtenons alors : ; . De EEE. y— 0,026 mégam./min. EA?—6,97% es — Bee 0,76. Examinons encore le tremblement de terre de Calabre au point de vue des trois hypothèses, omet- tant les trois dernières observations données par le tableau de M. Rizzo ; on trouvera, en utilisant 44 observations : Are : Ve — 1,29 km./sec. DA —65;31Me— 41/2307; — 1:93 Corde : Vs —6,53 km./sec. ZAP— 48,360 € — 1,070 4 — 14:50 Accélération : Ye —0,0252 még./min® ZA?—46,80: €, — 1,06 4 — 4,18 Le tableau V ci-contre montre les écarts obtenus à l’aide de ces hypothèses. Résumons nos calculs dans l'hypothèse de la propagation superficielle : ve kim./sec. Es min. ñ Benndorf 1,51 1,13 146 Omori. 7,00 » 1% Imanura 6,61 1539 3 Stiatessi. 6,93 AS qi LaskKa tete ne, 7,07 1,12 6 Calabre 0.204 1,29 495 44 Relation de Omori. 6,63 » » Imamura (mesure), (EN | » » L'hypothèse de la propagation en ondes sphéri- ques nous a donné : te km./sec. €: min. ñ Benn Ari nr 6,57 0,90 146 OMOr EN ER 6,34 » 1% SHATESSA EEE 6,35 0,65 7 RAS AE ce DU 6,37 0,65 6 Calabre sta 6.53 1,07 44 Omori (relalion). . . . 6,6 » » Imamura (mesure). . . GNT » » Dans l'hypothèse de la propagation en ondes accélérées, on a eu : Y2 mégam.min.? €: min. n Stiatessi, Läska. . 0.0296 0,51 Calabre. 1,06 44 Cauchy (relation) . 0,0302 » » Il en résulte qu'on peut représenter la propaga- tion de l'onde la plus rapide de la seconde phase le plus avantageusement par des ondes sphériques à vitesse constante d'environ 6,5 km./see. La représentation de la propagation par des ondes accélérées est encore assez avantageuse. La con- cordance entre le rapport des accélérations des CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES deux premières phases et le rapport calculé par : Cauchy est remarquable. IT. — ÉTUDE DE LA TROISIÈME PHASE. La troisième phase esi la plus facile à distinguer entre toutes les autres; en effet, après les ondes de petite période des phases préliminaires, vien- TaBLEAu V. — Examen du tremblement de terre de Calabre au point de vue des diverses hypo- thèses. DISTANCE CORDES ACCÉLÉRA- en A TION méga- - A mètres | minutes | en minutes | en minutes | en minutes | NUMÉROS a Æ = it mi O0 O6 QE D dre IN 7. si à O0 ee © O0 6 I = QE Or © © QE UE DD DO RS Co > — ID CO NO — = O7.00 1 + dn © © I Fe © Ut Où de 20 ND US I ml He = YO de mn V9 DC UE 9er © Of = O2 19 O QE O Or 0 ID GO US ND RO NO NO = = + © & 19 D 02 10 —æ IN © 7 IN SO —= ID C2 QE (2 g 1e D ROUX D Cle L'ORDRE I -: SOSOSOCCOOOCnmONe = NN a + Ut 1 LHOSOSOnGlR OWNER IU NO LE N—= = 0 1 1 Or CO D CO O0 O0 DC ON O0 OI QE UE QE OÙ be be Eee ne À EN © © © = © © ND NO NO > me ds ScSe css soNweeeemmnE É © © N SOC OCAUOR nm mORD = CS SOS OOCOSS DOS ee 12 19 19 3 10 © © NO Co] 1D+oO cesec 9 19 OC = C0 =) ZL 19 © 19 © Ds NO 1 5e 11,396 nent subitement des ondes de grandes périodes, formant la troisième phase ou la première de la partie principale du sismogramme. Si l'on cherche à représenter comme précédem- ment le temps parcouru par l'onde de la troisième phase, on trouve que la formule donnant les résultats les plus conformes à la réalité corres- pond à une propagation superficielle : ; d ER CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES 57 1 © La courbe qui exprime la distance superficielle en fonction du temps /., publiée par Milne dans le Geographical Journal, est une droite, ce qui prouve que la propagation se fait parallèlement à l'écorce terrestre. Omori indique, dans les Publications, n° 13, comme vitesse de propagation superficielle, 4,7 km./sec. Imamura, dans les Publications, n°16, conclut à une vitesse de 4,5 km./sec. Si nous calculons à l'aide de cette valeur la somnre des carrés des écarts À correspondant au tableau d'Imamura, nous obtenons : TagLeau VI. — Résultats de l'hypothèse d'Imamura sur la 3° phase. 4 DISTANCE IMAMURA x NUMÉROS V3 en degrés en km:/see. | en minutes 0 ; , ; NID KID ps ne Or ww Qt Dos Su 110,0 52,3 10,0 23,0 Be ee do O7 de QE ee de ee Léo WU — Si l’on avait ulilisé les corrections des temps d'origine que nous avons calculées, ce résultat aurait été moins défavorable; ainsi, en corrigeant le tremblement n° 239 seul (Guatemala, 19 avril 1902), la somme des carrés des erreurs se réduit à 44 min. Exprimons la durée des phases préliminaires par la formule suivante : 1) 2 SM > u) ur. cette formule permet de déterminer v, si l'on con- nait la durée des phases préliminaires à des sta- tions de distance connues de l'origine du tremble- ment de terre. On a : on dispose de la vitesse r, pour rendre la somme des carrés des erreurs minimum. Dans les Publications, n° 13, Omori donne trente et une observations de cette durée à diverses dis- tances ; il les partage en deux groupes selon la dis- tance des stations au foyer, de 100 à 1.000 km. et de 2.000 à 15.000 km.; pour chaque groupe, il indique une formule donnant la distance du foyer en fonction de la durée des phases préliminaires : 100 Mitteilungen, t. XXIX, p. 19. L, représente dans cette formule le temps de trajet de certaines ondes de la phase principale, donc pas de la première onde de la phase principale comme Omori. Par contre, M. Stiatessi, dans son Mémoire déjà cité, publie une formule analogue pour des distances de 100 à 2.000 km. : d— 5,34({3 — t;) + 38 en km. et en sec.; elle est bien en accord avec la formule de Läska. Utilisons le matériel de Läska et Tagceau VIIL — Observations utilisées par Läska. pis- |/3— f,| LASKA |FORMULE TANCE ae A (2) en mé- en gam. | min. | minutes OBSERVATIONS en min. .) | Leipzig, 1902, 28 Mars. . 19 Avril 5 Juillet. | 19 Juin. Tokyo, 1898, n° 2. . 1 © CNE D = = re — 1899, n° 193. . . n0M06 — — n° 197. Strassburg, 1897, n° 90. à n° 103 n° 115. n° 134. RSA le, minutes . de Stiatessi pour déterminer la vitesse de l'onde considérée par eux, en disposant de cette vitesse pour rendre minimum la somme des carrés des écarts entre les valeurs de temps observées et cal- culées. Notre formule () donne : Läska. . . . y SHALESSLN EN E NET UN 3 —= 9, s — 844 km./sec. 815 km./sec. d M. Stialessi a déduit sa formule des observations suivantes faites à Quarto Castello : Tagceau IX. — Observations utilisées par Stiatessi. 13— 1, |STIATESSI | FORMULE DISTANCE (9) DATES en A en en km. secondes | minutes | en min. S1Mars10012-0 < 259 SiJuillet 102 00 INE 180 29 Juno re 171 Février 1904. . . 12 Axril 490% - … 183 Avril 1904 .:. . . 157 20 Janvier 4905. . . .054 195 er Juin 4905. . . . 123 Septembre 1905 . 118 s Octobre 1905. . . Novembre 1905, . 26 Novembre 1905 2 Janvier 1206. 1 12 ©2 sows=sns=cccoiu-tr SeNsSeomo--No— D 1 S Gt © D NID © © -1 D dt Qt 19 C2 Or D 10 SCO OSc Ce 6œ0e 0, 0. 0, 0 0 û 0, 0 0, û 0, 0, 0, = es co o DER UE le, minutes . CH. JORDAN — LA PROPAGATION DES ONDES SISMIQUES ©e 1 1 Le mémoire cilé de M. Rizzo contient aussi des données sur les ondes de la troisième phase du tremblement de terre de Calabre; on y trouve 57 observations du temps /.; utilisons-les pour 3? TaBceau X. — Résultats de l'emploi de la formule de M. Rizzo. DISTANCE ta A en mégamètres NUMÉROS en minutes en minutes 0,084 0,174 0,200 0,273 0,434 0,673 0,677 0,682 0,688 0,698 0,721 0,757 0,798 0.798 0,811 0,883 0,920 0,981 ,020 037 ,048 098 ,232 ,289 :347 ,393 121 ,421 ,526 ,103 ,896 TI) ,104 — 0,80 0.98 0.39 1,09 1,27 1,07 0.99 0,:1 0,04 0,78 0,10 0,82 0,80 0,50 0,35 0,45 0,49 0,64 0,03 0,10 0,26 LIS HR = DUIMmORU=MmOX Co TT CNE NS ENS CSS = 1 [722 1-1 1 EE RCE D OR CICIO CE CRC 1 ONE QC © D 19 O + IN © ID IODNIOE — de 10 19 © © 1 1) DIR RO0 QE + Vo NO t CO EE CI CES 9 N9 © & © | £e. + + + . ly minutes. . déterminer la vitesse r, à l'aide de la méthode des moindres carrés so nn 3 On lrouve : Vs — 3,98 km../sec. ; € — 2,14 minutes. La valeur de la vilesse est assez rapprochée de celle qu'on à obtenue au moyen des observations utilisées par Läska et Stiatessi. Le tableau X montre les écarts entre l'observation et le calcul. En résumé, si l’on accepte la désignation de « troisième phase », d'après Omori, pour l'onde qui inaugure la partie principale du sismogramme, alors la vitesse de cette onde sera 4,7 km./sec. La désignation « Hauptphase » de Läâska, Benn- dorf, Stiatessi, etc., correspondra alors à une onde se propageant à la vitesse de 3,8 km./sec., qu'on pourrait désigner par « quatrième phase ». Les phases suivant la troisième ont été très peu étudiées; actuellement on possède trop peu d'ob- servations pour pouvoir poursuivre ces recherches. Imamura indique dans les Publications, n° 16, comme vitesse de ces phases : Omori' a cru pouvoir démontrer que certaines phases sont dues aux ondes de la cinquième phase ayant fait le (tour du monde et reyenant à la même station. É LIL. 10NCLUSION. D'après les données d'observation actuelles, la représentation de la propagation en ondes sphé- riques à vitesse constante est la plus proche de la réalité, pour les premières ondes des phases pré- liminaires. En admettant que la première onde soit longitudinale, la seconde transversale, on en tire, pour le rapport de la dilatation longitudinale à la contraction transversale de l’intérieur de la Lerre(o—0,29%)7: De plus, on a, en un point de profondeur quel- 4 conque : — — 1,087. 10° unités G. G. S. Si nous ù acceptons l'hypothèse de Roche, qui donne la den- sité en fonction du rayon, nous avons : Le): FO) d'autre part, si l'on réussissait à exprimer le mo- dule d'élasticité en fonction de la pression et de la F5. Lot (1 0,764 température, en calculant la première dans l'hypo- thèse de Roche, on obtiendrait une relation entre la profondeur et la température. ! Publications, n° 13, p. 119. Les observations utilisées ont été obtenues à l'aide de sismographes de construction et de sen- sibilité différentes, dont les constantes à l'époque des observations sont inconnues; donc ces der- nières ne peuvent être comparées rigoureusement ; les résullats obtenus sont approximatifs. Il pour- rait se faire qu'avec des observations plus com- parables l'hypothèse de la propagation des pertur- bations en ondes accélérées, qui est actuellement moins indiquée, se trouvät être préférable. Elle donnerait, en tout cas, une explication plus com- plète du phénomène, en expliquant non seulement les premières ondes des phases, mais aussi les ondes intermédiaires, Voici un moyen expérimental actuellement appli- cable pour décider entre ces deux hypothèses : il faut déterminer les angles d'émersion des ondes successives. D'après la première hypothèse, l'angle d'émersion de la première onde sera 5 celui des ondes suivantes, en tout cas, une fonclion de », où + est la distance angulaire de l'épicentre à la D: JULES GLOVER — CULTURE PHYSIQUE DE LA VOIX station considérée. D'après la seconde hypothèse, les angles d’émersion sont indépendants de 3. Il faudrait donc mesurer onde par onde cet angle; pour cela, on déterminerait les composantes ver- ticales et horizontales des secousses à l’aide de deux pendules, dont les constantes seraient déter- minées et dont l'an serait horizontal, l'autre ver- tical, puis on calculerait ces angles. Au cours de ces recherches, il a été établi, indé- pendamment de toute hypothèse, que la Terre ne peut être constituée par une masse homogène con- tinue, mais qu'ildoit y avoir une discontinuité entre une écorce mince elle noyau intérieur; nous avons vu, de plus, que, selon toute probabilité, ce n0 yau est liquide, et que c’est lui qui transmet à distance toutes les ondes sismiques. L'étude des ondes de translation passant sur la surface du noyau per- mettra de découvrir ses propriétés. Charles Jordan. Docteur ès sciences, Directeur du Bureau hongrois des Calculs sismologiques: LES MOYENS DE CULTURE PHYSIQUE DE LA VOIX AU CONSERVATOIRE NATIONAL DE MUSIQUE ET DE DÉCLAMATION Comme médecin du Conservatoire national de Musique et de Déclamation de Paris, j'enseigne aux élèves, avec le concours des professeurs, la physio- logie appliquée de la voix, par le contrôle médi- cal continu de l’enseignement technique du chant et de la déclamation donné dans cette école de l'État. Comment doit être comprise, en vue de l’ensei- gnement, la collaboration du médecin spécialiste oto-rhino-laryngologiste du Conservatoire avec le professeur de cette école lyrique et dramatique? Il est entendu qu'un laryngologiste dont la car- rière s'oriente vers celte spécialisation dans la spé- cialité, doit être aussi parfaitement instruit que possible dans tout ce qui concerne l'enseignement du chant et de la déclamation. Le médecin du Con- servatoire, muni de cette éducation première,devient un excellent conseiller, dont l'expérience s'améliore chaque jour en vue de tout ce qui a trait aux avis à donner pour le contrôle médical du travail vocal dans l'enseignement du chant et de la déclamation. Mais je crois qu'il est antiscientifique de voir le médecin se subsliluer ici presque entièrement au professeur de chant; et c'est, bien entendu, pour un médecin se substituer au professeur que faire de l’enseignement technique du chant et non pas uni- quement de la physiologie appliquée au chant et à la déclamation. De même, d'autre part, je trouve regrettable qu'un professeur de chant, dans l'état présent de l'organi- sation de l’enseignement, se préoccupe (trop unique- ment des questions de Physiologie. Le rôle du médecin, dans cette variété d'enseignement, est tout naturellement et simplement celui de vulgari- sateur des phénomènes les plus abordables et les plus tangibles de la Physiologie appliquée à la cul- ture physique de la voix. Et j'estime, en somme, que tout enseignement moderne, pour un profes- sionnel futur de la carrière artistique, devant être avant tout concret et essentiellement pratique, il y a lieu, pour cette vulgarisation de la Physiologie, de s'aider le mieux possible de l'éducation des sens et de leur suppléance réciproque, de léducation de la vue, par exemple, lorsqu'il est possible, par la méthode expérimentale, et utile de substituer ou d'adjoindre ce sens à celui de l'audition dans l'enseignement artistique donné. Jem'expliquerai plus loin sur ce sujet intéressant, Il est presque inutile de dire que la Physiologie, ou une partie minime de la Physiologie, ne peut s'apprendre sans une connaissance assez étendue de l'Anatomie. Et l'anatomie des manuels spéciaux, D' JULES GLOVER — CULTURE PHYSIQUE DE LA VOIX 579 dans lesquels pourraient seulement s'instruire les futurs professionnels de l'art Ivrique et dramatique, est bien insuffisante pour aborder, avec quelques chances d'en être frappé, l'analyse d'une fonction physiologique quelconque. Or, on convient généra- lement qu'en faisant abstraction complète d'une certaine culture littéraire, de quelques connais- sances d'histoire, elc., le niveau d'instruction des élèves qui fréquentent le Conservatoire, quoique s'étant un peu élevé en ces dernières années, n'est, en général, qu'exceptionnellement à la hauteur d'un enseignement anatomique et physiologique, si .modeste soit-il. Je suis bien placé pour le dire sans offenser personne et avec le consentement-de tous; car aucun n'a jamais ru qu'il serait utile d'avoir des notions scientifiques pour faire de bonnes études artistiques. Aussi, les diverses tentatives d'enseignement de la physiologie de la voix, à allures certainement trop pédagogiques et trop scientifiques pour être utiles, ont abouti à des insuccès. Et ce qu'il y a de certain, c'est que des conférences faites en contre- partie et à part de l'enseignement du chant ont toujours menacé de jeter comme un discrédit sur les professeurs, risquant d’'atténuer bien vite le preslige de ceux-ci, sans pour cela aboutir à quelque chose de mieux vis-à-vis de l'élève, qui, dès lors, manque de confiance, ne sachant plus d'où vient le mal, du médecin ou du professeur. Médecins et professeurs de chant peuvent indéfi- niment faire des conférences et des livres sur le sujet qui nous occupe, avec des planches anato- miques et des explications physiologiques! Ces conférences et ces livres peuvent être utiles, à mon avis, plutôt pour des médecins spécialistes et des professeurs de chant érudits. Quant aux autres, je crains que ce ne soit guère que l'intérêt de curiosité qui les pousse à lire ou à écouter; je doute du profit qu'ils en peuvent retirer. Quand Marey fit ses belles recherches physiolo- giques de chrono-photographie sur la marche de l'homme à la Station physiologique du Bois de Bou- logne, les résultats de ses recherches ont directe- ment intéressé l'École militaire de Joinville, et les instructeurs en ont fait leur profit pour l'armée. Voilà la simple application pratique d’une question de culture physique mise scientifiquement au point. Faudra-t-il done que, pour chacune des cultures physiques qu'il va s'agir de rectifier d'après des données scientifiques, on fasse des élèves, avant 1 Pour ma part, j'ai chez l'éditeur aussi mon livre avec mes dessins, sur la culture physiologique de la voix; mais il représente une partie d'un important travail collectif : Le Dictionnaire encyclopédique du Conservatoire, dont je suis obligé d'attendre la publication pour faire connaitre inté- gralement mes recherches faites sur les élèves du Conser- vatoire. tout, de petits anatomistes el physiologistes ? Dans une école d'art comme le Conservatoire, nous verrons que, sans pour cela cependant nier complè- tement l'utilité de notions bien scientifiques, pré- sentées en s'adressant à quide droit, ce sont encore les moyens de contrôle scientifique, simples, pra- tiques, indiscutables, qu'il vaudra mieux mettre périodiquement sous les yeux des élèves et des pro- fesseurs au cours des études, pour être réellement utile, et cela sans exiger d'eux des connaissances anatomiques el physiologiques, même restreintes, et en évitant de les éloigner de leurs seules études techniques de l'art du chant et de la déclamation. Mais ces moyens de contrôle scientifique, qui nécessitent le concours du médecin du Conserva- toire constamment consulté sur les maladies de la voix et le malmenage vocal, commandent le secret professionnel et sont exclusivement du ressort du médecin de l'École, qui seul doit en confier le ré- sullat aussi bien aux élèves qu'aux professeurs. On à dit qu'à l'École des Beaux-Arts florissait l’enseignement de l'Anatomie artistique. Il y a en quelque sorte une analogie seulement entre l'ensei- gnement d'Anatomie artistique existant à l'École des Beaux-Arts et celui d'Anatomo-physiologie vo- cale que donnerait le médecin du Conservatoire. Mais il ne peut être fait entre les deux de compa- raison profonde. Dans le premier cas, il s'agit d'ana- tomie plastique de la ligne, qui s’apprend en regar- dant le modèle, et dans le deuxième cas, c'est toute une étude complexe d'anatomo-physiologie artis- tique appliquée de la voix, qui va nécessiter des con- naissances scientifiques rarement compatibles avec l'art dramatique et lyrique. De plus, si Fon réfléchit, on conviendra de la bien douteuse utilité qu'il y aurait à parfaire l'éducation artistique autrement que par l'éducation méthodique des sens, qui se sont révélés particulièrement impressionnables, exaltés et éducables chez les diverses »atures. Il y à là, en ces élèves, futurs artistes Iyriques et dramatiques, matière éducable d'un genre vraiment spécial, dont la culture ne semble pas devoir être améliorée par des connaissances scientifiques, mais, au contraire,paraîit pouvoir être simplementéclairée par des procédés d'investigalion. empruntés à la science, ce qui est différent, surtout si l’on se place au point de vue pratique. C'esten me basant sur ce raisonnement général que j'ai conçu la collabora- tion possible du médecin oto-rhino-laryngologiste du Conservatoire avec le professeur, pour lensei- gnement du chant et de la déclamation. J'ai fait, d'une part, des recherches physiologiques sur la respiration chez l'enfant et chez l'adulte, en me placant dans les conditions mêmes de la vie normale et pathologique. Les résultats ont été obtenus en utilisant l'admirable ressource des 580 rayons cathodiques, procédé simple et indiscutable, qui n'exige, de la part des élèves et des professeurs de chant, aucune connaissance spéciale d'anatomie interne, ni physiologique précise. D'autre part, je continue, au Laboratoire de Pho- nélique expérimentale du Collège de France, des recherches physiologiques sur l'analyse de la voix, l'émission, la pose de la voix, l'articulation vocale et le traitement des vices d'émission, d'accentua- tion et d'articulation, en mettant à profit encore, dans le même ordre d'idées, les données précieuses que nous offre la Phonétique expérimentale. Ce procédé d'étude et de contrôle de l'enseignement du chant et de la déclamation ne nécessite pas non plus de la part des élèves et des professeurs des connaissances analomo-physiologiques bien éten- dues, puisqu'il s'agit ici, entre autres procédés, de la lecture de graphiques facilement explicables. Ces différentes recherches ont été el sont encore faites à l'hôpital et au laboratoire, toujours sur les sujets du Conservatoire national de Musique et de Déclamation de Paris, au début, au cours et à la fin de leurs études, ainsi que plus lard dans la carrière artistique, soit dans l’enseignement, soit au théâtre. QC En ce qui concerne la respiration, j'ai étudié, au Conservatoire en particulier, la respiration vocale par l'examen radioscopique du thorax. Chacun de mes examens a été suivi de létablis- sement d'un tracé fait rapidement au calque direc- tement Le premier calque constitue la première pièce d'un dossier individuel pour les examens successifs.Ces examens, sur l'écran fluoroscopique. pratiqués sur les élèves, m'ont permis de contribuer à rendre bien des services et de chercher à établir quelques données sur la culture physiologique de la voix, suivant chaque sujet, en tenant compte des diversités anatomo-physiologiques de chaque indi- vidu, Sans vouloir attacher à ce moyen de contrôle physiologique plus d'importance qu'il n'en com- porte, nous trouvons que c'est un procédé de plus, et non des moins bons, de rendre méthodique la rééducation physiologique des voix, du moins en ce qui concerne la rééducation respiratoire, son accommodation, quise raisonne dès lors, en voyant, en regardant directement la viciation respiratoire, sans qu'ilsoit nécessaire de se perdre en pures vues de l'esprit, en interprétations complexes conven- lionnelles des faits, tant par les élèves que par les professeurs. J'insiste sur l'intérêt méconnu de cette méthode d'exploration de la respiration vocale par la radios- copie thoracique chez l'élève, devant le professeur lorsque cela est possible, Car, outre sa précision D' JULES GLOVER — CULTURE PHYSIQUE DE LA VOIX indiscutable, elle permet un contrôle irréfutable pour les deux à la fois; elle s'effectue de la facon la plus discrète, tant en ce qui concerne l'élève qu'en ce qui touche le professeur. Chaque fois, l'un s’est mieux adapté à l'autre. La confiance réciproque bénéficie de ce procédé de vérification du travail; il n°y a plus cette acrimonie et cette méfiance qui résultent forcément de tout autre moyen employé dans cette Ecole, en vue de l'amélioration de l’enseignement du chant et de la déclamation. Or, j'ai la conviction, connaissant d'une facon spéciale la mentalité du monde des artistes lyriques et dramatiques, qu'il y a lieu, pour aboutir et réaliser un enseignement utile et pos- sible, de sauvegarder le prestige du professeur vis- à-vis de l'élève et de ne pas orienter la confiance de l'élève plus vers le médecin que vers le professeur. La radioscopie thoracique constitue un moyen intéressant et précieux d'exploration physiologique de la respiration. Il m'a rendu les plus grands ser- vices dans l'exploration comparée de la respiration normale et pathologique chez l'enfant et chez l'adulte. Il fait connaître, en effet, le mode d'am- pliation thoracique dans tous les sens où ce mode doit se produire. À ce point de vue, il est différent de la spirométrie, dela pneumographie, même inter- costale, des simples mensurations périthoraciques. La spirométrie, en effet, permet bien de connaitre la quantité d'air qu'il est possible d'introduire dans les poumons par une inspiration profonde, la quan- tité d'air résiduel qui demeure dans la cavité res- piraloire à la fin d'une expiration forcée. Mais l'exploration spirométrique ne permet pas d'établir ce qui nous intéresse avant tout : aux dépens de quel diamètre thoracique, soit vertical, soit trans- versal, soil antéro-postérieur, se produit celte intro- duetion de Fair dans les poumons, autrement dit les détails du mode respiratoire. Quant aux mensu- rations péri-thoraciques, elles ne donnent aucune indication sur l'ampliation respiratoire de la cavité thoracique dans le sens vertical pour l'appréciation de la respiration diaphragmatique. Enfin, la radios- copie thoracique permet, fait très important dans le contrôle du travail vocal, de reconnaitre le mode de ménagement de l'air lors de l'expiration dans le chant. Je ne veux pas m'étendre ici sur les détails de l'exploration radioscopique du thorax dans la respiration vocale. Pour en marquer tout l'intérêt scientifique, j'exposerai seulement les idées géné- rales suivantes : Nous savons lous que ce serait une grave erreur physiologique que de confondre la respiration réflexe et inconsciente, comme celle du sommeil, par exemple, avec l'acte thoracique du chanteur; ménageant l'air qu'il a inspiré en pleine volonté Ps 270, EL VE Mie 3 07 _ D' JULES GLOVER — CULTURE PHYSIQUE DE LA VOIX 581 de son effort et qui doit sortir avec une lenteur calculée pour permettre de dire ou de chanter des phrases d’une certaine étendue. La respiration du dormeur est bulbaire, involon- taire ; celle du chanteur ou de l’orateur, de l'artiste dramatique, etc., est cérébrale. C'est une respira- tion volontaire. Et je suis tout à fait d'avis que des professeurs de chant du Conservatoire ou libres parviennent à réaliser chez les élèves le type res- piratoire qu'ils ont adopté pour eux. J'ai observé, en outre, que, sans tenir compte des aptitudes organiques et physiologiques infiniment variables des sujets, presque tous constitués d'une facon relativement différente et éduqués dès l’en- fance par atavisme au point de vue respiratoire dans un sens donné, la même méthode respiratoire est appliquée par les professeurs d'âge variable aux sujets les plus différents dans les attitudes les plus diverses, même lorsque celles-ci changent le mode d'ampliation thoracique. Et, dans le même ordre d'idées, je voyais encore ces jours-ci un artiste qui, examiné de profil devant l'écran fluo- roscopique, réalisait à volonté et sans grande diffi- culté deux modes respiratoires. Dans une première manière, à type costal supérieur, il portait le sternum en avant, et le diaphragme, avec la plus forte inspiration, ne s'abaissait qu'incomplètement, le creux épigastrique se déprimant légèrement. Dans une seconde manière, à type latéral inférieur et diaphragmatique, le sternum restait en place, mais le diaphragme, avec la plus forte inspiration, s'abaissait de plus de 4 centimètres au-dessous de la limite qu'avait atteint ce muscle avec la première manière. Dans cette seconde manière, le creux épigastrique était légèrement en saillie. Les deux manières lui avait été enseignées par des profes- seurs. La l'artiste, était celle qui le mettait « en bonne tessi- seconde manière, suivant l'expression de ture respiratoire », à son aise. Avec la première, au contraire, il gagnait à la longue de la congestion des cordes, de ia fatigue el d'autres malaises, comme la tendance à lasphyxie, visible sur l'écran à l'aspect du cœur comparativement observé dans les deux cas. Ceci n’est pas difficile à comprendre pour les initiés à ces délicates analyses de la respi- ration vocale. Seule, dans ce cas, la radioscopie thoracique à permis de se rendre compte de l’'ampliation large et facile des parties inférieures et latérales de la paroi thoracique, et surtout de l’abaissement maximum du musele diaphragme. Sans entrer dans les détails de l'exploration radios- copique du thorax, puisque par l'entrainement on peut adopter un mode respiratoire, que l'on sache qu'il est par ce moyen possible de montrer bien simplement, au début et au cours des études, à un REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. professeur et à ses élèves en même temps, comme contrôle du travail vocal, les vices ou les troubles respiratoires, s'ils existent. Il est possible de faire un choix,en vue dela technique d'enseignement du chant à suivre, entre les moyens respiratoires cons- tatés sur l'individu. Car, sur l'écran fluoroscopique, on observe très aisément dans tous leurs détails, de face ou de protil, les différents types de respiration vocale, diaphragmatique, latéral inférieur et latéro- costal, enfin costo-supérieur, associés de facon infi- niment variable, avec prédominance fréquente de l'un d'entre eux sur les autres. Dès lors, dans les cas de disproportiens anato- miques et de défaut de concordance des organes de l'appareil phonétique avec la soufflerie pulmonaire, on pourra montrer à l'intéressé, lors de l'examen radioscopique, dans une glace el sur les calques de l'image radioscopique d'une facon très précise, ce que l’on ne fait que supposer, el éviter ainsi de graves maladies de la voix. Ainsi, une puissante soufflerie pulmonaire, faisant fonctionner un appareil phonétique anatomique- ment conformé et fonctionnant physiologique- ment pour évoluer dans le registre supérieur, sera, après un examen radioscopique, très logiquement accommodée aux besoins du larynx, des anches vibrantes, des résonnateurs et de l’ébranlement général de la colonne aérienne en vibration, el vice versa, quoique, dans le cas contraire, les inconvé- nients soient moindres ou, du moins, ne se produi- sent qu'à la longue. Ainsiencore pourra être reconnue plus sagement une aptitude vocale anatomique et physiologique. Le classement et le reclassement des voix au cours des études de chant relèvera d’un moyen stienti- fique de contrôle anatomo-physiologique de plus. On s'aidera, bien entendu, parallèlement à l'examen radio-thoracique, des résultats fournis par l'explo- ration des cavités résonnantes et anches vibrantes. Nous savons que, sans pour cela attacher à l'exa- men rhino-pharyngo-laryngoscopique trop d'im- portance, ni être trop aflirmatif, il existe, à coté de la caractéristique artistique de la voix, établie sur audition, une caractéristique médicale anatomo- physiologique des voix, qui ressort de l'examen d'un spécialiste bien entrainé et exercé à te genre délicat d'exploration, nécessitant une compétence assez particulière, facile à gagner au Conservaloire. C'est fort bien de dire à un élève: les aptitudes organiques de votre instrument vocal ne se prêtent pas au rendement que votre professeur exige de vous. L'élève vous croira sur parole, mais pourra t-il toujours faire différemment de ce qu'il fait. Il ne voit pas les raisons du défaut dans le classement vocal conventionnel maintenu par son mailre, ni surtout les viciations respiratoires el vocales qui 14° 582 D: JULES GLOVER — CULTURE PHYSIQUE DE LA VOIX peuvent exister. Ce sera done mieux encore si le conseil médical peut être donné à coup plus sûr et plus démonstratif, en ce qui concerne la respiration vocale, par la radioscopie thoracique. On montrera à l'élève, au professeur, qu'avec une soufflerie trop faible pour une anche vibrante donnée, il faut s'habituer à l'agrandissement de tous les diamètres de la cage thoracique, même si la respiration diaphragmatique, si en honneur, semble parfaite. Et, vice versa, une voix habituée à se maintenir dans les tables d'harmonie supé- rieures, un ténor léger, une soprano aiguë présen- tant une eavilé respiratoire trop développée pour des cordes vocales de faibles dimensions, des ré- sonnateurs étroits, il y aura lieu de montrer les inconvénients à redouter d'un acte respiratoire trop violent. On accommodera sousles yeux larespiration au travail vocal à fournir. IT Pour tout ce qui touche à l'émission, la pose de la voix, la résonnance et le timbre, l’accentuation vocale et le traitement des troubles de l'émission de la voix, de l'articulation et de la prononciation, c'est encore par un contrôle physiologique de la culture physique de la voix parlée ou chantée, basé sur une méthode faisant uniquement appel au sens de la vue, qu'il faut avoir recours. Et il n'est pas pour cela besoin, ainsi qu'on va le voir, d'exiger des sujets des connaissances anatomiques et phy- siologique bien spéciales. La Phonétique expérimentale, tout d'abord par la méthode graphique, et ensuite par l'exploration acoustique à l’aide du tonomètre et le caleul des vibrations sur les tables acoustiques, va permettre d'établir les nuances les plus délicates, non seule- ment dans l'analyse de la parole et du chant, mais encore dans le traitement méthodique des troubles de l'émission, de l'articulation de la voix parlée et chantée. C'est en quelque sorte l'enseignement de la parole par les veux, lorsque l'oreille est partielle- insuffisante. La Phonétique permet, par exemple, d'étudier et d'analyser de très près l'arti- culation musicale de la parole: la hauteur musi- cale, l'intensité musicale, la durée musicale. -La hauteur musicale, que l’on peut aisément mesurer en Phonétique, se prête à l'accent musical, et aussi à la modulation musicale du vers, de la prose et même de la parole dans la conversation. ment Il y a là une application directe aussi à la com- position musicale, et enfin surtout à l'amélioration de l'interprétation des grandes compositions musi- cales par les artistes lyriques. L'analyse graphique du style, aussi bien en littérature musicale qu'en prose, en poésie, facilite la mise en évidence de toutes les qualités ryth= miques, l'explication de la genèse des accords et l'application variée de l'harmonie. En somme, elle montre, au point de vue qui nous occupe, la per- sonnalité de l'œuvre et de l’auteur. Un interprète imparfait, à la simple lecture des graphiques enregistrés, va pouvoir étendre ses moyens vocaux. Ainsi, une sélection plus large de bons interprètes pourra, en quelque sorte, s'éta- blir par la vue, venant chez eux suppléer à l'oreille présentant quelques caractères d'insuffisance. D'autre part, en poésie par exemple, « cette langue accentuée du vers », selon l'expression de Lamartine, qui donne du son et de la couleur à l'idée et qui vibre, peut-être à cause de cela, quelques jours de plus que la langue vulgaire dans la mé- moire des hommes, dans notre admirable poésie francaise, le vers est une succession parfaitement musicale de brèves et de longues,exactement enre- gistrables par l'expérimentation en phonétique. C'est ainsi qu'enregistrer Boileau, dit devant l'appareil, avec la précision qu'il comporte toujours, par un excellent artiste, fait vite constater le vers défectueux, bien entendu au point de vue musical et non point prosodique. C'est souvent sec, froid, dur et sans couleur. Au contraire, enregistrer les beaux rythmes, le beau style de Racine, ou encore la jolie couleur de Musset, c'est montrer l'allure toute musicale et pleine d'harmonie de ce qu'est le beau vers francais. Il faut donc ne pas être un «visuel » en écrivant, mais un « auditif ». Et c'est ainsi qu’en lisant, on peut alors voir un défaut; cela vous « saute aux oreilles », selon l’ex- pression courante, faussement appliquée d'habitude à la vue, dans le cas particulier. L'enregistrement de l'intensité musicale est chose possible pour la vue. Et l'on peut faire voir en phonétique expérimentale, malgré les difficultés, et montrer dans quelle mesure le son est appuyé. Entin, la durée musicale, la longueur des inter- valles, la conciliation des temps dans la succession rythmique des longues ou des brèves du vers, en poésie, en composition musicale, sont du domaine des phénomènes analysables par l'interprétation en Phonétique. Comme on le voit, de même que la radioscopie: thoracique pour lexploration de la respiration vocale peut rendre d'importants services, de même la Phonétique expérimentale appliquée peut aussi être utilisée pour l'analyse de la voix parlée et chantée, l'étude visuelle de l'émission, de la pose de la voix, de l'accentuation vocale, dans l’orien- lation de l'enseignement artistique lyrique et dramatique. M. TIFFENEAU — LES TRANSPOSITIONS DE STRUCTURE EN CHIMIE ORGANIQUE III En raison de ce que, d'une part, il serait sou- haitable que l'État, assumant vis-à-vis des élèves, qui parfois recoivent des bourses, toutes les charges del’enseignement artistique donné au Conservatoire, … füt renseigné comme il l'est pour les autres grandes ‘ Ecoles, chaque année à la suite d'un examen médical obligatoire de tous les élèves admis, et sût si, à côté des qualités vocales qui déterminent seules aujour- d'hui l'admission et le maintien en cours d'études, chaque élève réalise et continue de réaliser toutes les qualités physiques de santé générale et de bonnes aptitudes organiques et fonctionnelles de lappa- reil phonétique, permettant d'entreprendre et de poursuivre utilement une éducation artistique lyrique et dramatique; en raison, d'autre part, de ce qu'il ÿ à lieu d'initier chacun à des notions scien- tifiques susceptibles de faire connaitre d'une facon très élémentaire la structure et le mécanisme du fonctionnement normal et régulier de l'appareil vocal par des méthodes d'exploration empruntées à la science et permettant de surveiller comment se comportent ces organes durant l'entrainement, en cours d'études; nous émettons le vœu qu'il plaise à M. le Ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts et à M. le Sous-secrétaire d'État 583 des Beaux-Arts d'établir de fait, pour le médecin en fonctions du Conservatoire, tout désigné pour cela à cause de son contact continu avec les pro- fesseurs et les élèves, la charge d'un enseignement obligatoire des éléments d'anatomie des organes de la parole et de la physiologie appliquée de la voix en première année d'études, avec examen probatoire, sous forme de l'exposé du contrôle du travail vocal fait au début et périodiquement durant les études, par les moyens d'investigations scientifiques les plus simples et pratiques à notre disposition, Un examen physique pratiqué, comme pour les autres Ecoles, avant l'admission définitive et annuel- lement ensuite pour le maintien en cours d’études, répondrait à tous les desiderata. Car, parmi les élèves du Conservatoire, il s'en trouve qui sont atteints d'affections chroniques des voies respira- toires etde l'appareil circulatoire, ete., qui ne feront jamais de bons artistes lyriques et dramatiques. Et, en somme, une des grandes causes du malme- nage vocal est moins l'ignorance de la physiologie appliquée de la voix que l'imparfait recrutement des élèves”, D' Jules Glover, Médecin du Conservatoire National de Musique et de Déclamation de Paris. LES TRANSPOSITIONS DE STRUCTURE EN CHIMIE ORGANIQUE Une molécule chimique constitue une sorte d’édi- fice en équilibre. Toute transformation de l'édifice moléculaire comporte, au moins, deux phases prin- cipales ! : l’une, préalable, consistant dans une rup- ture de l'équilibre initial; l'autre, consécutive, ayant pour objet l'organisation définitive de la molécule vers une nouvelle position d'équilibre. Parmi les processus nombreux et variés* qui permettent à une molécule en rupture d'équilibre de s'organiser définitivement, il en est qui consis- tent essentiellement en des permutaltions effectuées exclusivement à l'intérieur de la molécule; c’est précisément à ces réactions intramoléculaires, ca- raclérisées par des mulalions de groupement d'atomes, qu'on a donné le nom de transpositions moléculaires, alors que ces muta- tions ou déplacements eux-mêmes ont recu le nom de migrations. d'atomes ou * Bien que ces deux phases paraissent se dérouler simul- tanément, il ne s'ensuit pas moins que l'une provoque et précède l'autre. 2 Lorna Meyer : Traité de Chimie, traduction Bloch et Meunier (G. Carré, éditeur), €. IL, p. 6. Tandis que les migrations d'atomes ou de grou- pements ne modifient jamais la structure du squelette carboné initial (transpositions simples), provoquent, au contraire, des modifications plus non carbonés les migrations de radicaux carbonés y ! Les idées qui ont été exposées ci-dessus ont fait l'objet d'un Mémoire, qui a été présenté, d'un commun accord avec le Dr Poyet, à l'Académie de Médecine dans sa séance du 11 juin et renvoyé à l'examen d'une Commission composée de MM. les Professeurs Gariel et Dieulafoy et de M. Ch. Périer. Au moment de mettre sous presse, nous apprenons que cette Commission a arrêté, dans la séance du 9 juillet, les termes des conclusions de son Rapport. N’envisageant le sujet qu'au point de vue tout à fait général, elle décide qu'il est inutile, sinon nuisible et susceptible de désorienter facheusement et sans résultat meilleur les élèves, d'adjoindre un enseignement pédagogique de la Physiologie à pro- prement parler à l'enseignement technique dans toutes les Ecoles de l'Etat où l’on s'occupe de la culture professionnelle de la voix. Et, considérant qu'il y a une réforme nécessaire à établir, elle s'en remet aux décisions possibles etréalisables du dernier Congrès de Laryngologie de Paris, au cours duquel, dans la séance du 15 mai 1907, fut communiqué le travail que l'on vient de lire et souhaite qu'un contrôle médical du travail vocal des élèves soit fait au début et au cours des études techniques par une personne compétente. Ayant eu connaissance des dis ussions de l’Académie, les 8 © + ou moins profondes (transposilions de structure)”, C'est précisément l'étude de: ces transpositions de structure, ou, si l’on préfère, des migrations carbonées dont elles sont la conséquence nécessaire, que j'ai entreprise ici”, non seulement en vue d'en rechercher les causes, mais surtout dans le but d'en préciser le mécanisme et de fixer certaines conditions de structure qui les favorisent. Le mécanisme des réactions migratrices ne peut être étudié fructueusement qu'à condition de con- naître les structures initiale et finale” des molé- cules qui se transposent. La détermination de la structure finale est du domaine de la Chimie expérimentale; elle est censée parfaitement connue, cette connaissance qui à rendu évidente la trans- puisque c'est précisément position. Il n'en est pas loujours de même de la structure initiale, c'est-à-dire de la structure au moment préeis qui précède la migration. Tantôt, en effet, la molécule qui se transpose à une forme stable dont on à pu, plus ou moins aisément, déterminer la structure avant la transposition. Tantôt, au con- traire, la molécule qui se transpose à pris nais- sance au cours de la réaction; elle n'a pas la même composition centésimale que la molécule dont elle est issue; de plus, elle est instable; aussi, n'est-ce que par des inductions qu'on peut le plus souvent juger de sa structure. D'une interprétation relativement simple, dans le premier cas, le mécanisme des réactions migra- trices se prête, dans le deuxième cas, à des inter- prétations multiples. Il m'a donc paru nécessaire d'envisager succes- sivement ces migrations, en les répartissant en deux groupes : 1° Migrations carbonées dans les molé- cules stables *; 2° Migrations carbonées dans les molécules instables. RE Professeurs du Conservatoire avaient remis à M. le Pro- fesseur Gariel, président de la Commission, une lettre collective dans laquelle ils offraient d'exposer leur opinion et donnaient aux deux médecins du Conservatoire toute leur confiance, basée sur les travaux de ceux-ci et leur expérience quotidienne. 1 Les expressions transpositions de structure et migrations carbonces seront, dans la suite, employées comme syno- nymes; elles s'appliquent, en effet, l'une et l'autre, aux mémes phénomènes. ? Je laisserai de côté les transpositions simples, parce que les phénomènes auxquels elles donnent lieu sont les plus divers tandis que les uns consistent en de véritables échanges (racémisation), d'autres sont dus à des migrations tantôt réversibles (phénomènes de tautomérie), tantôt non réversibles (transpositions proprements dites). 3 Par structures initiale et finale, il faut entendre ici les structures mmediatement avant et après es migrations. * Je n'envisagerai point certaines transpositions, comme celle de l'acétate d'aminophényle en acétamidophénol, qui peuvent être expliquées par de simples échanges réac- tionnels tout à fait normaux. 11 en sera de mème des fausses migrations, où la transposition est provoquée par la M. TIFFENEAU — LES TRANSPOSITIONS DE STRUCTURE EN CHIMIE ORGANIQUE I. — MIGRATIONS CARBONÉES DANS LES MOLÉCULES STABLES, La nécessité de passer à une forme plus stable, c'est-à-dire offrant plus de résistance aux agents physiques ou chimiques, provoque, chez divers composés stables, des migrations de groupements carbonés. D'une facon générale, on constate certaines ten- dances caractéristiques auxquelles on à pu ratta- cher les principales transpositions de cet ordre : les composés non saturés tendent à se transformer en saturés; l'oxygène fixé sur deux atomes de car- bone aspire à saturer ses deux valences sur un même atome; les amines secondaires ou tertiaires semblent trouver plus de stabilité à passer à l'état d'amines primaires ou secondaires, surtout en pré- sence des acides énergiques, etc. $ 1. — Transformation des composés non saturés en composés saturés. C'est généralement la chaleur qui détermine les réactions transpositrices de cet ordre. Le plus sou- vent, c'est par l'intermédiaire des atomes d'azote ou d'oxygène qu'elles trouvent à se réaliser; ces éléments peuvent, en effet, grâce à leurs valences multiples, jouer deux rôles différents suivant qu'ils servent de lien entre le carbone et un radical quelconque, ou que, par toutes leurs valences, ils s'unissent seulement à cet atome de carbone. La classique transformation des carbylamines en amines primaires est un exemple typique des mi- grations* où intervient l'atome d'azote : CA72CHF Le —“ > CH: CI:7A7- Dans les deux exemples suivants, qui semblent calqués l’un sur l'autre, bien que les composés envisagés y soient de nature très différente, c'est, au contraire, l'atome d'oxygène qui intervient pour favoriser la transposition : C'H5.C(OC#H°) : CH? — æ-Ethoxystyrolène. CSH5.CO.CH?.C@H (5) Pkénylbutanone. CSH° HC(OCHS) : Az.CH5 — H.CO.AXK (*) CH* Méthylisoformanilide. Méthylformanilide. cyclisation d'une chaine linéaire avec rupture ultérieure en un point différent, ou inversement par la rupture d'un noyau carboné suivie d'une cyclisation en une place nouvelle. 1 Ner : Ann. Chem., t. CCLXXX, p. 296. ? On peut y rattacher la mémorable synthèse de l'urée WoEnLen : Berzélius Jahresberichte (AS28), t. XII, p. 266) par transposition du cyanate d’ammonium : Az° CO : Az.AzH* —> CO - AzH° 3 -CLAISEN : Ber. d. d. Ch. Ges., . XXIX, p. 2931. + Wugecer et Jouxsox : Am. Chem. J., &. XXI, p. 185. rt M. TIFFENEAU — LES TRANSPOSITIONS DE STRUCTURE EN CHIMIE ORGANIQUE 585 Cette aptitude de l'atome d'oxygène à se fixer de préférence sur un même carbone peut suffire seule à provoquer des transposilions; nous la retrou- vons, en effet, comme unique cause efficace dans les migrations du groupe suivant. $ 2. — Transformation de l'oxygène oxydique ‘ (éther-oxyde ou oxyde d'éthylène) en oxygène carbonylique (cétones). On connait* la tendance plus ou moins marquée de l'oxygène oxydique des oxydes d'éthylène (oxy- gène à cheval) à passer, par action de la chaleur seule ou en présence d'agents catalyseurs, à l'état d'oxygène carbonylique. Cette aptitude se manifeste également chez les oxydes d'éthylène tétrasubstitués, où elle entraine la migration d'un des radicaux carbonés substi- tuants; c'est une variante de la classique transpo- sition pinacolique : . 2 CH° CH* ca N Sac —> CH'—C.CO.CH () cm X/ Nc (e) CU* Oxyde de tétraméthyléthylène. Pinacoline. C‘H5 CSHS CSH* C—C< = CSH5—C.CO.C'HS (!) CALANTANN EC U CH Oxyde de tétraphényléthylène. Benzopinacoline. La transposition benzilique* peut, dans une cer- laine mesure, être rattachée à ce groupe, soit qu'on la considère comme provoquée par une élimina- tion d'eau avec ou sans formation intermédiaire d'oxyde : OK OK LL | CSH5 — C—C—C'H5 À OK OK nl 171) | \ OK OK | fees pi CHE |! | CSH5— C—C— CH C—C:0, | | OK OK AA CHE OH OH x / Benzile potassé. Benzilate de K. | d CSH5— C—C— CH GE Î (= { Dans la transposition de l'acide phénylcarbonique ‘en acide salicylique, l'oxygène oxydique se transforme en oxygène phénolique plus stable. ? Certains oxydes dissymétriquement ou symétriquement disubstitués s'isomérisent par simple distillation (TIFFENEAU : B'Soc.Chim. (3) Mt. XXXI,"p. 41309; t. XXXIII, p. 742; C. R. Ac. Sc., t. CXL, p. 1458. KLaces : Ber. d. d. Ch. Ges., t. XXXVIII, p. 1969. HorrixG : Zd., t. XXXVIII, p. 2296) ou encore par des cristallisations répétées (Garpeur : B. Ac. Roy. Belg. (3), & XXXIV, p. 99); d'autres exigent, au con- traire, la présence des agents catalyseurs et l'action de tem- pératures plus élevées (Ipatierr : Ber: d. d. Ch. Ges., tXXXVI, p. 201$. Nee : Ann. Chem., t. CCCXXXV, p. 193. FourNEAU et TirreNeAu : C. R. Ac. Sc., t. CXL, p. 59,5; t. CXLI, p. 662). * Kkassouski : J. russ. phys. Chim., &. XXXIV, p. 537. # THoerNer et ZINCKE : Ber. d. d. Ch. Ges., t. X, p. 1475; t. XI, p. 65. BDTEBIG : Ann. Chem., t. XV, p. 25. ZiniN : Zd., t. XXXI, soit qu'on envisage cette réaction transpositrice comme le résultat d'un échange‘ entre un oxhy- dryle et un phényle : OK OK OK OK OK OK I Ia lil | CSH5— C—C— CH —+ CH — C— C— OH —+ CH —C— C:0. OI OH OH | ae 1 C'est également à une sorte d'échange entre deux substituants différents que sont-dues les transpo- sitions suivantes observées chez les amines aroma- tiques. JE C°H5 OH C‘H° $ 3. — Transformations des amines aromatiques secondaires ou tertiaires en amines primaires ou secondaires. L'exemple le plus classique des transpositions observées au cours de ces transformations consiste dans l'obtention de paratoluidine* par chauffage à 350° du chlorhydrate de méthylaniline * : CSHS.A7zH.CH?" —> "CH°.CSH"A7H?. C'est par des migrations analogues que les A7- alkylpyrrols* (tertiaires) et les dérivés Az-iodoalky- lés de la pyridine (quaternaires) se transposent en C-alkylpyrrols et C-alkylpyridines. Une curieuse application de cette remarquable réaction a conduit MM. Pictet et Crépieux* à l'ob- tention de l+-pyridylpyrrol au moyen duquel M. Pictet® a pu réaliser la synthèse totale de la nicotine naturelle. Le mécanisme de ces réactions peut se concevoir p. 329. Sur le mécanisme de cette réaction, consulter Hoocewerrr et Van Dorp : R. Tr. Ch. Pays-Bas, {. IX, p. 225: Nere: Ann. Chem., t. CCXCVIII, p. 312; ERLENMEYER : Ann. Chem., t. CCCXVI, p. 830; MonTAGnE : À. tr. ch. Pays-Bas, LEXXT ID 6e 1 On verra plus loin que cette hypothèse de l'échange entre un oxhydryle et un radical carboné ne parait pas vraisemblable dans le cas de la transposition pinacolique; c'est qu'en effet, pour cette dernière, l'échange précéderait l'action déshydratante; ici, au contraire, l'échange serait con- sécutif à l'action de l’alcali. Cette interprétation est, d'ailleurs, d'autant plus plausible que, dans les mêmes conditions, la benzophénone se transforme, par suite d'échanges analogues, en benzoate de potasse et triphénylearbinol (DELANGE : B. Soc. Chim. (3), t. XXIX, p. 1131) et la phénanthrène-quinone en acide oxyfluorène-carbonique (Baëyer : Ber. d. d. Ch. Ges., t XVII, p. 1933. Zincke et Froeucicn : Jd., t. XX, p. 289%. Zincke et Kecec : /d., t. XXI, p. 1042). 2 Hormanx :}Ber. d. d. Ch. Ges., t. V, p. 720. 3 Dans la transformation de la diméthylaniline en penta- méthylrosaniline (Hormanx : /d.,t. VI, p. 357), il y à éga- lement transposition d'une partie de cette diméthylaniline en méthylparatoluidine. “ Les Az-acétylpyrrols subissent la même transposition (Cramicran et Macnacnr : Ber. d. d. Ch. Ges., t. XVII, p. 1828). La transposition de la diacétylanilide en acétami- doacétophénone (Caarrawayx : Chem. Soc., t. LXXXV, 386) est un phénomène analogue. S Prcrer et CRépieux : Ber. d. d. Ch. Ges., &. XXVIII, p. 1904. 9 Picrer : C. R. Ac. Sc., t. CXXXVII, p. 860. 586 M. TIFFENEAU — LES TRANSPOSITIONS DE STRUCTURE EN CHIMIE ORGANIQUE assez aisément ; le groupe AzH, tendant à devenir AZI, emprunte un hydrogène aux carbones avec lesquels il est en conduclion (carbones ortho et surtout para), et la migration s'effectue d'après le schéma suivant : C— AzH— CH CH = CH ; CH = CH, NC — CH. + A7H—C< NcH = CH La transposition de la B-phénylhydroxylamine en paraamidophénol est tout à fait analogue : 1 : s ET CSA — AzHi— OH —+ AzH?— CH: — OH Il en est de même des transpositions de la phé- nylnitrosamine en p-nitrosoaniline, de la phényl- nitramine en p-nitraniline, de la phénylhydrazine en paraphénylène-diamine, etc. La classique {ransposition benzidinique! réalise un exemple plus curieux encore de ce genre de réaction, puisque la symétrie des deux groupes aminés entraine une double transposition : re EX Dore | HN = 0 AH Le AzH SN HA CH = CH : | CH—CH CH CH CH— CH AzH°—C< DOC NC — Az. Nos ca CH —CH/ On voit que, dans ces deux migrations simulta- nées, les résidus — C°H'.AzH° ont tendance à se réunir entre eux pour former la benzidine AzH. CH°.CH'.AZH*, Toutefois, chacun d'eux peut, ex- ceptionnellement, saturer son affinité disponible sur un résidu H.C'H°.AzH, dont l'hydrogène du noyau n'est pas suffisamment attiré par le groupe AzH, comme cela semble se produire pour l'hy- drogène provenant des carbones ortho*; il y a alors, dans ce cas accessoire, formation d'une petite quantité d’o-amidodiphénylamine : AzH?.C5HS.AzH.CSH® La transposition du parahydrazotoluène (semidi- nique) fournit un composé de structure analogue et pas de diorthoditoluylène-diamine. # Zanix : J. pr. Chem., t. XXXNWI, p- 93. Hormanx : Jabhres- berichte (1863), P- 424. * On peut conelure de ce fait que la conduction des divers atomes ou groupes d'atomes entre les carbones ortho du noyau aromatique est relativement pénible. On a vu d'ailleurs que, dans toutes les migrations de ce groupe, la transposi- tion a le plus souvent lieu en para. La transposition benzi- dinique en fournit un autre exemple, puisque, parmi les produits accessoires de cette réaction migratrice, on à signalé l'orthoparadiphénylène-diamine (diphénylime) et non la diortho-diphénylène-diamine (Ber. d. d. Chem. G.,t.XNII, p. 1181). IT. — MIGRATIONS CARBONÉES DANS LES MOLÉCULES INSTABLES. Le mécanisme des migrations carbonées qui se produisent chez les molécules instables est parti- culièrement difficile à saisir, puisque l'instabilité de ces molécules rend leur isolement difficile. Aussi s'explique-t-on qu'on ait pu proposer pour l'interprétation de ces réactions les solutions les plus variées : formation de noyaux carbonés (eyeli- sation) ou d'oxydes internes qui s'ouvrent ensuite en des points différents, échanges de groupements ou d'atomes précédant l'action chimique du réactif en vue de la faciliter (affinité prédisposante), ete. Aucune des solutions ainsi proposées n'est basée sur un fait décisif; elles ont, à mon sens, le grave défaut de tendre à interpréter toutes les transposi- tions par des composés intermédiaires dans lesquels les valences des éléments qui les constituent sont toutes entièrement satisfaites. J'ai pensé, au contraire, que, dans la plupart des cas, les réactions transpositrices sont des réactions brutales, provoquant, sur un ou plusieurs éléments d'une molécule, un brusque arrachement de cer- tains de leurs substituants, de facon à libérer sur ces éléments des valences qui ne trouvent ensuite à se saturer que par des permutations intramolé- culaires. | J'ai été ainsi amené à envisager les diverses sortes de perturbations que de tels arrachements sont susceptibles de provoquer; j'ai pu ainsi dis- tinguer, d'une part, les transpositions où deux valences sont libérées à la fois sur un même élé- ment, d'autre part, les transpositions où deux valences sont libérées en même temps sur deux éléments voisins ou éloignés. $ 1. — Migrations carbonées par libération de deux valences sur un même élément. Les migrations carbonées produites par la libé- ration de deux valences sur un même élément peuvent être classées en deux groupes, suivant que cette libération s'effectue sur un atome de carbone ou sur un atome d'azote. Pour chacun de ces groupes, il y aura lieu d'en- visager successivement les divers modes d'élimi- nation binaire qui provoquent cette libération de valences : élimination d'hydracide, élimination d'eau ou encore d'une molécule d'azote. 1. Deux valences libérées sur un même atome de carbone. a) Libération par élimination d'hydra-« cide. — L'élimination d'une molécule d'hydracide chez les dérivés dihalogénés des carbures styro- léniques monosubstitués détermine toujours une transposition qui a pour effet de transformer les M. TIFFENEAU — LES TRANSPOSITIONS DE STRUCTURE EN CHIMIE ORGANIQUE 587 dérivés dissymétriques en composés symétriques : — HX I CPHE(R)C:CHX > MC'HS(R) CAC MRC ENCLCHS. C'est ainsi que, sous l'action des alealis causti- ques à température élevée, le diphénylchloroëthy- lène dissymétrique se lranspose en tolane!. Il en est de même avec le méthyl-w-bromostyrolène, dont la transposition en phényallylène C'H°.C: C. CH° s'effectue non seulement sous l’action brutale des alcalis caustiques à 180-200°, mais encore à la température ordinaire sous l'action régulière du magnésium ou du sodium au sein de léther anhydre *. L'élimination de deux molécules d'hydracide chez les dérivés dihalogénés de même structure conduit à un résultat analogue : —2HX C'HS(R):CH.CHX? —> CŒHS(R):C:C —»> R.C : C.C‘'HS. C'est également ce qui, vraisemblablement, doit se passer avec les dérivés dichlorés des aldéhvdes -hydratropiques Ar.CH{CH*).CHCF, qui se trans- forment‘ en arylacétones Ar.CH°.CO.CH. Une élimination d’hydracide du même genre s'effectue avec le diphénylchloroéthane dissvmé- trique* : — HCI I (C'H°?CH.CH?CI —> (CSI) CH.CH —> CSH°.CH:CH.CH. Cette réaction est d'autant plus remarquable que le carbone voisin du CH°CI possède un hydrogène disponible, si bien que, normalement, on devrait obtenir le diphényléthylène dissymétrique (C'H°}? C: CH°. Il en est de même avec le bromure de l'alcool pinacolique (CH°)"C.CHBr.CH”° qui devrait conduire exclusivement au pseudo-butyléthylène (CH°)'C. CA: CH et qui cependant fournit en outre le tétra- méthyléthylène (GH°}C : C(CH°} (°). b) Libération par élimination d'eau (migrations rétropinacoliques). — Lorsqu'on soumet un com- posé à fonction alcool à l'action d'agents déshy- dratants capables de lui faire perdre un H°O par molécule, c'est généralement entre l'oxhydryle de la fonction alcool et l'hydrogène des carbones voi- sins que s'effectue l'élimination d’eau : —H°0 — — H°0 ROCH CCHER!: R.CH°.CHOH R. CH : CH? R.CH?.CHOH.R' Or, un tel mécanisme n’est plus possible lorsque 1 BuTTENSERG : Ann. Chem., t. CCLXXIX, p. 328, 335. 2 TIFFENEAU : C. R. Ac. Sc., t: CXXXV, p. 1348; Aup. Chim. Phys. (S),t. X; p. 1170. % Auwers : Ber. d. d. Ch. Ges., t. XXXIX, p. 3164. Herr Per. dd. /CGh-1Ges.,t. NV, p-1439° 5 CouTURIER : Ann. Chim. Phys. (6), t. XXVI, p. 461. FRigpeL et Sizva : B. Soc. Chim. (2), t. XIX, p. 146. les carbones voisins ne possèdent pas d'hydrogéne disponible ‘; dans ce cas, l’action des agents dés- hydratants énergiques semble avoir pour tout premier effet d'éliminer H°O exclusivement aux dépens de l'oxhydryle et de l'hydrogène qui cons- tituent la fonction alcool : —H°0 CHF 2CHOH:COX > CHE :C:CO?X ()!(n; HO. CH CEHS/CHOH.C— CH —> CH /C/C—CHS (mr). Ncox LL Noo:x Il y aurait ainsi libération de deux valences sur le même atome de carbone. Pour passer à une forme stable définitive, le système intermédiaire serait dès lors astreint soit à se transposer intramoléculairement (Il), soit encore, dans le cas où cette transposition n’est pas possible, à se fixer sur une molécule identique, de manière à saturer par juxtaposition les deux valences ainsi libérées (1) : CR C°H° (J) 2/CHP °C. COR > >G: CC RO?C COR CH CSHe CHS (11) C‘H5.C.C—CHS —- LOUIS | Le COX COX CH: Lorsqu'elle est possible, la transposition s'effec- tue par migration d'un des groupes carbonés tri- substituants et création subséquente d'une double liaison ; le carbone trisubstitué devient ainsi bisubs- tilué, et il y a, par conséquent, transformation en un système moins dissymétrique. En particulier, dans le cas des alcools secondaires, le retour au type symétrique est parfait. Cette transposition est donc exactement l'inverse de la transposition pina- colique, qui, comme on sait, à pour effet de trans- former les types symétriques : 7 7 R.C.C— c'est pourquoi je propose de donner à ces réactions le nom de {ranspositions rétropinacoliques”. 1 C'est ce qui se produit non seulement quand ces car- bones sont tertiaires, comme dans CH* — ou dans(RR'R"C—., mais encore lorsque ces carbones, bien que munis d'atomes d'hydrogène, sont doués de propriétés électronégatives qui les font résister aux agents déshydratants : tel le CH° de l'alcool pinacolique (CH*}C.CHOH.CH*, tel le CH? des oxy- dérivés campholytiques et campholéniques, etc. ? En réalité, c'est seulement avec les dérivés halogénés correspondants que cette élimination binaire a été observée. $ On rangera évidemment parmi ces transpositions rétro- 538 La plus typique de ces réactions nous est offerte par l'alcool pinacolique!, qui, par déshydratation par l'acide oxalique (Delacre\, fournit le tétramé- thyléthylène *. Cette réaction présente le même caractère de généralité que la transposition pinacolique, dont l'étude sera faite un peu plus loin; en effet, elle a lieu également avec l'alcool benzopinacolique, qui se transforme en tétraphényléthylène*. La déshydratation des éthers phényloxypivali- ques par P°0° (Blaise et Courtot) * donne lieu à une lransposition moléculaire analogue, avec cette par- ticularité remarquable qu'elle est due à une migra- lion du carboxyle sous la forme CO°R* : cu° CH® CES CSHS.CUOH.C—CH —> C'H.C.C—CH —> ŒHC:É & DANS | COR Le cor CO?R CH: C'est, au contraire, à une migration du méthyle qu'est due la transposition analogue observée avec l'acide oxypivalique (Blaise et Courtot) : CH“ CH CH* a CHOH.C— CH — 74 x CH.C—CU —+ CH°.CH:C EE Î Y Se CO’ COR COR C'est également parmi les transpositions rétro- pinacoliques que je propose de ranger une réaction pinacoliques, les réactions qui, sans provoquer le retour à un |ype symé un type plus symétrique : tel l'éther oxypivalique de Blaise et .Courtot (B. Soc. Chim. (3), t. XXXV, p. 589) : CH* CH°OH.C— CH NCO2X qui devient : UH3 ci.cn:C£ C € c COX L'alcool pinacolique qui se déshydrate ainsi en tétramé- thyléthylène (type symétrique) est issu de la pinacoline (type dissymétrique) et la régénère par oxydation. Certains auteurs (DELACRE : B. Soc. Chim. (3), & XXXV, p. 353, 811, 1088) ont été tentés d'en conclure que les dérivés pinaco- liques se lrouvent placés, comme les composés tautomé- riques, à une sorte de carrefour el qu'il y a lieu de dis- Uinguer pour eux des structures virtuelles ou réelles. Les exemples apportés ici montrent que la structure des dérivés pinacoliques (pinacoline, alcool et chlorure pinacolique est une et que la transposition observée chez ces composés est absolument constante chez tous les alcools et chlorures isubstitués de structure analogue. * KuwGer et Loxxes : Ber. d.d. Ch. Ges., {. XXIX, p. 2160, 2152. \VERNER et GRo8 : Id., t. XXXVII, p. 2887. * JacogsoN et PIEPENBRINK : Ber. d. d. Ch. Ges.,t. XXNII, p. 2700. Jacogson : Ann. Chem., 1. CCCIII, p. 290; Ca. Zeitung, & XVII, p. 14095. * BLarse et Courror : B. Soc. Chim. 592: 3), t. IXXXV, p. 362, * C'est le seul exemple de migration du carboxyle qui soit connu; celle migration à une certaine importance théorique, car elle ruine complètement l'hypothèse de la formation d'un noyau triméthylénique dans les transpositions rétro- pinacoliques. M. TIFFENEAU — LES TRANSPOSITIONS ‘ique parfait, réalisent toutefois le passage à | DE STRUCTURE EN CHIMIE ORGANIQUE déjà ancienne et jusqu'ici inexpliquée, qui consiste dans la transformation de l'acide triméthyllactique (CH*)C.CHOH.CO*H en diméthylacétone (CH°}CH. CO.CH”, sous l’action des acides dilués”. La transposition de l'acide triméthyllactique en acide triméthylacrylique serait analogue aux pré- cédentes : 2 (CHSŸC.CHOH.CO®H —> (CH°}C.C.CO’H Il CHEN COH C:0C 7% cr” em l'on concoit que, par hydratalionet départ de CO, il y ait formation de diméthylacétone : CH COR +H0) CHA CO*H C:C ee >CH.COH ca Nc H5/ CH: _co cH: Es ÿCH.C(OH}.CH. CH?” 2. Deux valences libérées sur un même atome d'azote. — à) Libération par migration d'hydracide. — Les migrations moléculaires qui déterminent les classiques transpositions de Beckmann et d'Hof- mann répondent, comme les précédentes, à des nécessités immédiates qui semblent causées par la brusque libération de deux éléments monovalents fixés sur un même atome d'azote. Pour interpréter la réaction de Beckmann * d'après ces conceptions, ilest nécessaire d'admettre que, sous l’action de PCF, les oximes réagissent sous la forme : R AH R” EX k en donnant, comme les oxydes d'éthylène, le dérivé dichloré (RR')CCI.AZHCI ; R.CH — CH? + PCI — POCF H R.CHCI.CH®°CI ; [9] RQ AH k Del +PC=POCF + YCCIL.AzHCI. r” No R' A celte réserve près, l'interprétation de toute la réaction apparaît d'un enchaîinement très logique. R —HCI R CCI.AzHCI — R' RA À —+ R.CCI:A7R(5). Dans ces transpositions, c'est le radical aroma- tique qui émigre de préférence: toutefois, lorsque les radicaux sont de poids moléculaires voisins ou Monatsh. Chem., \. XIIT, p. 1648. Ber. d. d. Ch. Ges., t. XX, p. 1508, 2580; 1 SCHINDLER : ? BECKMANN : t. XXVII, p. 300. 3 Ce composé chloré a été isolé (BeckmAnx : Ber. d. d. Ch. Ges., t.-XIX, p. 988): c'est lui qui, décomposé par l’eau, donne naissance à l'amide R.CO.AZHR"'. pe PS M. TIFFENEAU — LES TRANSPOSITIONS DE STRUCTURE EN CHIMIE ORGANIQUE 589 identiques, on observe des migrations de chacun des radicaux substituants”. L'interprétation de la transposition d'Hofmann, d'après les idées précédentes, ne nécessite aucune hypothèse préalable : — HBr R.CO.AzH® —> R.CO.AzHBr —> R.CO.Az: - KOU R.CO.Az: —> CO:AzR —> CO'K?+ AzH°R Et Ce mécanisme est précisément celui qu'un chi- miste américain a proposé il y a une dizaine d'années* et pour la vérification duquelil a amassé depuis cette époque de nombreux et concluants travaux *. b) Libération par élimination de W°O ou de A7. — Dans les cas où la transposition de Beckmann s'effectue par l'action des acides plus où moins concentrés, la réaction peut s'interpréter, comme précédemment, par la libération de deux valences sur un même atome d'azote. C'est alors l'élimina- tion de H°O ou de l'acide transitoirement fixés qui détermine cette libération. M. Montagne’ a montré que l'hypothèse de la for- mation intermédiaire d'un noyau azoté doit être écartée puisque, après la migration, les groupes aromatiques sont substitués par les mêmes som- mets. Néanmoins, tout récemment encore, Wallach propose celte explication pour les oximes alipha- tiques *. L'élimination Az chez R.CO:A7 provoque, comme dans la transposi- tion d'Hofmann, la formation d'isocyanales ; cetle réaction, où l’éliminalion de Az° est tout à fait Lan- gible, justifie pleinement l'interprétation donnée par Stieglitz et confirme absolument notre manière de les diazoïmides d'envisager le mécanisme général des migrations. $ 2. — Migrations carbonées par libération de deux valences sur deux éléments voisins ou éloignés. Il y a lieu d'examiner successivement ces migra- tions, d'une part, chez les composés où la substitu- tion par des radicaux alcooliques est complète el où, par conséquent, la transformation observée ne peut s'effectuer qu'à condition qu'un de ces radi- caux émigre (cas des dérivés tétrasubstitués : mi- gralions nécessaires); d'autre part, chez les compo- sés où la substitution par des radicaux alcooliques est imparfaite et où, par conséquent, la transfor- malion observée aurait pu s'effectuer autrement * LayrauD : B. Soc. Chim. (3), t. XXXV, p. 224. 2 Snigczirz : Amer. Ch. J., t. XNIII, p. 751. S Ip. : Zd., t. XXIX, p. 49. Sriecurrz et EARLE : Ju t XXX, p. 399, 412. # MonrAGnE : Rec. Tr. Ch. Pays-Bas, t. XX\, p. 5 WauLcacu : Ann. Chem., t. GCCXLVI, p. 266. Amer. Ch. 316. et sans migration (cas des dérivés mono-, di- et tri- substitués : migrations fortuites). 1. Types tétrasubstitués : migrations nécessaires. — à) Transpositions pinacoliques. — Les transposi- tions pinacoliques fournissent les exemples les plus remarquables de ces sortes de migrations. Dans toutes ces réactions, un premier oxhydryle s'élimine à l’état d'HO, tandis que l'oxygène du second oxhydryle se transforme en oxygène célo- nique : R R R R R > C(OH).C(OH) INC CAMES IR ES CICONRE R DR R Cl LR Ô | Etant donnée la structure tétrasubstituée des pinacones, on concoit que celle transformation ne puisse s'effectuer qu'à la faveur d’une migration de l'un des substituants carbonés. Aussi doit-on considérer ces migrations comme nécessilées par des raisons de structure. La transformation de la pinacone en pinacoline * (Fittig *) : CH? CH UN QC N c{0H).C(0H)< > CH —C.CO.CH* CHS CHF nn est le type de ces transpositions; on les a, pour cette raison, désignées sous le nom de pinacoliques. Ces transpositions présentent un grand caractère de généralité. On a pu les réaliser avec les pina- cones les plus diverses : pinacones aliphatiques dis- symétriques, telles quelediméthyl-3:4-hexadiol-3 :4 ou éthylméthyleétone-pinacone (Lawrinowitsch) ?, pinacones mixtes arylaliphatiques, telles que l'acé- tophénone-pinacone (Thürner et Zincke)*, pina- cones aromatiques symétriques, telles que la ben- zopinacone (Linnemann)° et ses homologues tolyl- et naphtyl-pinacones ?. De ces divers exemples, il ressort que les radicaux aromatiques émigrent de préférence aux radicaux aliphatiques; toutefois, le cas de léthylméthyl- de récemment confirmé par Braun et Kittel”, semble montrer que les radicaux méthyles émigrent plus facilement que célone-pinacone Lawrinowitsch, ! Ce que nous avons dit plus haut (p. 588) des dérivés pinacoliques en général s'applique a fortiori à la pinacoline, puisque aucun dérivé immédiat de celle-ci n'appartient au type symétrique. La pinacoline ne se trouve donc pas placée comme à une sorte de carrefour: elle possède une structure définie et stable, que démontrent surabondamment ses Syn- thèses et ses réactions. 2 Frrrié : Ann. Chem., t. CXIV, p. 56. 3 LawriNowirscH : Ann. Chem., t. CLXXXV, p. 124. ‘ Toner et Zincke : Ber. d. d. Chem. Ges., 1. X, p. 1475 5 LINNEMANN : Ann. Chem., t. CXXXIIT, p. 28. 6 Taogrner et Zincke : Ber. d. d. Ch. Ges., t. X, p. 1417 Ecss : J. prakt. Ch. (2), &. XXXV, p. 505. 7 Braun et KrrteL : Monatsh. Chem., t. XXVII, p. S03. dés 10 MÉRE ‘à dj 590 M. TIFFENEAU — LES TRANSPOSITIONS DE STRUCTURE EN CHIMIE ORGANIQUE les autres radicaux aliphatiques à poids molécu- laire plus élevé. En ce qui concerne la nécessité des transposi- tions pinacoliques, des exemples très suggestifs nous sont fournis par la fluorénone-pinacone, qui se transforme en biphénylène-phénanthrone * : CSH— CO CH: | | Goes > CH — /CH* con: N C{0H).C(OH) Cé ? - Nc C‘H*/ et par la cyclopentanone-pinacone, qui se trans- forme en tétraméthylène-1 : 1-cyclohexanone”. L'interprétation du mécanisme des réactions transpositrices dans la série pinacolique a donné lieu à de nombreuses hypothèses. Pour Erlenmeyer *, la migration du méthyle dans la pinacone s'expliquerait par la formation d'un noyau triméthylénique, qui, par fixation d'eau, s'ouvrirail en un point différent de celui où s'est effectuée la fermeture : — H°0 CE —_ C—C(OH)—CH* cm” \/ CHE CH* Nc—c(0H) CH: 74 | ( IN ch” Celte hypothèse doit être définitivement aban- donnée; en effet, elle est tout d'abord absolument inapplicable aux pinacones aromatiques, à moins d'admettre la formation d’un noyau tétraméthylé- nique; or, dans ce cas, l'attache du groupe aro- matique migrateur ne se ferait plus par le même sommet, ce qui est contraire aux observations de Montagne‘, confirmées par Acree. Je ferai observer également que, dans le cas des pinacones mixtes arylaliphatiques, la triméthyléni- sation ne pourrait déterminer que la migration d'un radical aliphatique (méthyle) : GÉHEN C'H5 — C — C(OH)— CH ÿC—C(OH)— CH — NZ CH” | CH* CH? OH HCIF CH SC.co.c , (cH:}/ alors que, en réalité, c'est toujours la migration du radical aromatique qu'on observe (Thôürner et Zincke) : ! KunGer et Loxxes : Ber. d. d. Ch. Ges.; t. XXIX, p. 2154. WERNER et GRogBe : /d., t. XXXVII, p. 2887. ? Meiser : Ber. d. d. Ch. Ges., t. XXXII, p. 2049. ? ERLENMEYER : Ber. d. d. Ch. Cres., t. XIV, p. 322 en note. Ner : Anu. Chim., t. CCCX VIII, p. 37. CoururieR : Ann. Ch. Phys. (6), t. XXVI, p. 433. KuinGer et Lonxes : Ber. d. d. Ch. Ges., t. XXIX, p. 2158. Zecixsky et Zeuikorr : Id.,t. XXXIV, p- 3249. # MoxTaGxe : lee. Tr. Chim. Pays-Bas, t. XXIV, p. 105; . XXNW, p- 319, 11 C'HS C'Hs C'H° S coH. con —+ C'H—C.C0.CH. CH: CHs st Pour certains auteurs, l'action déshydratante du réactif qui provoque la transposition serait pré- cédée d'un échange (sorte de chassé croisé), qui” aurait pour effet de rapprocher les deux oxhydryles: sur un même carbone (Lieben, Kondakoff) : CHS CH? CH 4 CHA ) CC OH —> CCE CH” | cm/| | OH 2 CH* CH OH Ce serait ainsi une sorte d'action de contact qui précéderait l’action spécifique du réactif. Je n'insisterai pas sur lout.ce qu'offre de peu vraisemblable cette hypothèse de l’affinité prédis- posante, que la Chimie minérale a abandonnée depuis si longtemps; mais je m'étonne qu'elle ait prévalu jusqu'ici, non seulement pour interpré- ter le mécanisme des transpositions dans la série pinacolique et dans la série du camphre, mais encore pour tenter d'expliquer comment certains glycols peuvent, sous l'action des agents déshydra- tants, se transformer à la fois en aldéhydes ou cétones correspondantes *. Je rappellerai également qu'on a proposé d'ex- pliquer le mécanisme des transpositions pinaco- liques par la formation intermédiaire d'oxydes d'éthylène*. Or, ces composés sont en général plus stables aux réactifs déshydratants que les glycols correspondants, et il semble bien que, dans les conditions habituelles des transpositions pina- coliques, ce soient, au contraire, les oxydes d'éthy Jène qui s’hydratent en pinacones. I m'a paru, dès lors, nécessaire de revenir, pour l'interprétation de ces phénomènes, à une formule plus simple, qui n'exprimerait rien de plus que 1 LiEBEN (Monatsch. Chem., t. XXII, p. 6€) et KoxpaKor (Chem. Centr., (1899), t. IL, p. 1120) admettent que l'action: des agents déshydratants sur le propylglycol a pour premier effet, par simple contact, de provoquer l'échange suivant : OH CH?.CHP.CH OH CH*.CHOH.CHOII oH CH$.C— CH* Son 2 KrassousxI : Loco citato. Ner : Ann. Chem., t. CCCXXXW p. 245. Acree : Amer. Ch. J., t. XXXIII, p. 180. WERTHEL MER (Monatsh. Chem., t. XXVI, p. 1533) admet pour benzopinacoline la formule oxydique : 6H5 HS CH Ce: # AN CR Ko cr parce que l'oxydation chromique donne de l'acide benzoïqu et du triphénylearbinol:; or, cette réaction confirme tout à fait la formule cétonique (CH C.CO.C°H°, ÈS M. TIFFENEAU — LES TRANSPOSITIONS DE STRUCTURE EN CHIMIE ORGANIQUE 591 l'état de la molécule‘ au moment précis de l'arra- chement de H?0 : cH* CH —%°0 CH* —"CH° XS Zé K PTE EE ETS CH | | \cH CH” | [x CH* OH OH \ la Si l'on compare cette formule destructure incom- plète avec celles qui représentent la formation et l'isomérisation des oxydes d'éthylène tétrasub- situés : (IT) CHS CH ACINIC EE /CH2 Der — dec cæ/| | \CH CH” In | \CH* CI OH \ 0 | e qe GE — cet — ch” KZ NC 0 (IV) Y) CHS en NY 74 CH, CHAT | S CH: CH$ — C.CO.CHS, ON CH EX on voit qu'il y à analogie parfaile entre la for- mule (IV) et celle que j'ai proposée pour la transpo- | silion pinacolique; il semble done qu'il y ait là une justification suffisante de cette interprétation. La formule ainsi proposée représente donc très schématiquement comment l'atome d'oxygène peut, sous des influences spéciales, s'orienter dans un sens déterminé avec migration, alors que, sous des conditions moins favorables, l'orientation de cet atome d'oxygène se produirait en sens inverse sans migration. b) Transpositions dans la série du camphre. Au groupe des transpositions de la série pinacolique (dérivés à deux carbones tétrasubstitués), on peut rattacher les transpositions des dérivés à trois carbones tétrasubstitués de la série du camphre. Les unes et les autres présentent, en effet, cette particularité que les migrations y sont rendues nécessaires par la structure létrasubstituée des carbones em jeu. Elles diffèrent cependant par la nature des composés initiaux : glycols dans la série pinacolique et alcools tertiaires du camphre. Toutefois, pour les uns comme pour les autres, il s'agit identiquement de l'élimination d'une molécule d'eau, élimination qui ne peut s'ef- fectuer qu'à la faveur de migrations moléculaires. Aussi longtemps que ces transpositions demeu- rèrent insoupconnées ou inexactement interprétées, 4 TirreNEAU : Aun. Ch. Phys. (S), t. X, p. 330. ? En réalité, dans les transpositions de la série du camphre, les composés initiaux sont toujours des dérivés non saturés: mais l’on admet généralement qu'ils fixent HO, créant ainsi une fonction aleool tertiaire, qui ne peut se déshydrater ensuite que dans un sens différent de celui de l'hydratation. dans la série | | l la question de la structure des dérivés de la série du camphre est restée obscure. Mais, depuis que, dans un remarquable travail", M. Blanc en à montré la cause réelle dans la migration d'un des groupes méthyles, cette question parait définitivement éclaircie. Toutefois, tandis que cet auteur admet encore que la migration précède la déshydratation de l'oxhydryle intermédiairement formé, j'estime, au contraire, que cette déshydratation — qui ne peut s'effectuer que dans un seul sens — précède et provoque la migration du méthyle. Le mécanisme de la transposition des dérivés campholéniques peut être interprété de la facon suivante : CIF CE AS CH°—Cf, :)CH.CH?.CO'H ( cale lc CH3 CH: / GC LH°0 OH AR X —— ne CH. CH. COH CHs CH? CHE CH5 CH NZ RE LA E QUCHE CO TAUN Ve CHE CH2 cH° | CH, NS _—+ > Ÿ c.cH.co°H ae On peut représenter de même la transformation de l’anhydride camphorique en acide isolaurono- lique (Blanc)” : | DO NT) CO CHS CH? re | y CH® CH* PAS So + AICI Y | CHE AOC CHE ON 7/0 CO AICIE ES SIM CO HCI 8 à cz! CEE (GE ee CH CH CH! = | | & û à, CH ZANÇ u —> CH—C: ü— COH > cr = COH CHE CH? CHE 5e CHE 1 BLanc : B. Soc. Chim. (3), t. XXV, p. 73. 2 BLanc: 1d, (3), t. XV, p. 1191; t. XIX, p. 533, 699. 5 © LS On voit, par ces divers exemples, que, dans la série des dérivés du camphre, l'élimination de H°0 ou de HCI ne peut s'effectuer avec les CH° voisins, mais seulement avec les carbones tertiaires, c'est- à-dire avec les carbones les plus substitués; c'est done avec l'hydrogène du carbone à que doit se pro- duire cette élimination; or, élle n’est possible qu'à la condition qu'un des méthyles placé sur le car- bone y émigre vers le carbone B; une telle migration apparait donc nettement comme nécessitée par la structure tétrasubstituée des trois atomes de car- bone intéressés par ces réactions. 2. Types mono-, di- et trisubstiluës : migrations qui ne sont pas nécessilées par des raisons de struc- ture. — Ces migrations sont incontestablement les plus curieuses et les plus troublantes, puisque les nécessités qui les provoquent n'apparaissent pas comme évidentes. Nous en trouvons un premier exemple tout à fait remarquable dans une réaction transpositrice signa- lée par Auwers”. En condensant le chloroforme avec une solution alcaline de para-crésol, cet auteur à obtenu un composé dont il à très habilement déterminé la nalure semiquinonique : + CCI => CHCE > CHE210: CHA Ci. C°H*OH Ce composé réagit par sa fonction cétonique sur les dérivés organomagnésiens pour donner les alcools tertiaires correspondants : CHCE ,CH—CH N c/ 2\ cH/ \cH— "TO CHCE ë CH — CHEN x Tu C(OH) — CH —R. CH” \CH= Cu Or, lorsqu'on fait perdre HO à ces alcools, le groupe CHCF vient émigrer non pas sur le carbone #, où l'oxhydryle éliminé était primitivement fixé, ce qui exclut l'hypothèse d'un échange précédant la déshydratation, mais bien sur le carbone 8 de Ha chaine latérale; il s'ensuit donc que l'élimination créant des valences libérées s'effectue par migration du groupe d'eau a eu lieu entre les carbones z et B. ainsi un système instable*, où la saturation CHCI" et par relour au type benzénique : CHCE, /CH—CH | COCHER CH” “CH —CH CH = CH CHCIE —> CH CC — CH CH = CH SR ! Auwers : Ber. d. d. Ch. Ges., t. XXXVI, p. t XXXVIIT, p. 1697. * Le composé instable résultant de cette déshydratation 1S61, 3902; M. TIFFENEAU — LES TRANSPOSITIONS DE STRUCTURE EN CHIMIE ORGANIQUE Les dérivés semiquinoniques d'Auwers donnent également lieu à une autre transposition du même ordre; quand on soumet le composé (1) à l’action de PCF, on obtient, après décomposition par l’eau, le parachloro-orthotoluylaldéhyde ; c'est ici le mé- thyle qui a émigré et non le groupe CHCF. Toutefois la structure quinonique des composés d'Auwers est d'une nature trop particulière pour qu'il soit possible, en ce qui concerne les transpo- sitions moléculaires, d'en tirer dès maintenant des conclusions générales. Autrementimportanteest, à ce point de vue, l'étude des transpositions phényliques qu'on observe chez divers glycols! ou halohydrines® aromatiques au cours de leur transformation en aldéhydes ou en cétones. On sait qu'en enlevant dans certaines conditions une molécule d'eau aux #-glycols, ou une molécule d'hydracide aux halohydrines correspondantes, on transforme ces composés en aldéhydes ou en cétones: CH°, — HCI CH >COH. CH?CI — ÿCH.CHO E) CI” CH: — HI CIFI.CHI,CH?OH —> CH°I.CH°.CHO (‘ Or, tandis qu'avec les composés aliphatiques ces transformations s'effectuent sans transposition mo- léculaire, il n’en est plus de même en série aroma- tique, où ces transformations s’accompagnent très souvent de migrations caractéristiques. Je suis parvenu à démontrer que toutes les trans- positions observées chez les 4-glycols et halohy- drines aromatiques sont dues aux migrations des radicaux aromatiques (phényle et homologues); je les ai, pour cette raison, désignées sous le nom de migrations phényliques* Pour que ces migrations se produisent, il est indispensable que le composé initial : glycol ou halohydrine, possède un oxhydryle au voisinage du radical aromatique migrateur et que cet oxhydryle ne soit pas éliminé au cours de la réaction. Chezles halohydrines, cette condition estfréquem- a été tout récemment isolé par M. Auwers (Ann. Chem., t. CCCLIT, p. 219-272); c'est précisément, comme je l'avais prévu, le produit de l'élimination de H°0 entre les carbones a et B; de sorte que la transposition nest due ni à un échange préalable, ni encore moins à une série de plusieurs triméthylénisations. ! Breuer et ZiNcKkE : Ann. Chem., t. CXOVNIII, p. 182. Trr- FENEAU et DorLexcourT : C. R. Ac. Se., t. CXLIIT, p. 126, 654. ? Bouçaucr : Ann. Chim. Phys. (1), t. XXV, p. 483, 514: BeuaL et TirrENEAU : C. R. Ac. Se., t. CXXXII. p. 561. Tir FENEAU : B. Soc. Chim. (3), t. XXV, p. 2176; t. XX VII, p. 291: C. R. Ac. Se., t. CXXXIV, p. 845. 8 Krassouski : J. russ. phys. Chim., t. XXXII, p. 85. B. Soc. Chim. (3), t. XXIV, p. 873. * CnaroN et Paix-SEAILLEs : C. p. 1407. 5 TIFFENEAU CHR AC MSC t. CXXXVII, p. 989. RTAC ANS CNE CXXXIV, p. 1505; PT. statement tt à dé een pie ae A à. CHE 1 me à M. TIFFENEAU — LES TRANSPOSITIONS DE STRUCTURE EN CHIMIE ORGANIQUE 593 ment réalisée, puisque l'oxhydryle y est souvent fixé! près du CHF et que les réactions transpositrices envisagées sont surtout des réactions éliminatrices d'hydracide : R.C(OH).CHI.R' R.CO.CH.R' | C'HS — HI — ds À Chez les glycols, cette condition n'est réalisée que dans le cas de l'hydrobenzoïne ou des glycols tri- substitués de formule* : R Ar.CHOH.C(OH)< NR: hit) C'H.CHOH.CHOH.CH —> CHO.CH: (CH) CHOH.C(OH)RR' —H°0 RR' | | HE co. CP CH Pour tous les autres glycols, l'élimination d'eau se produisant toujours aux dépens de l'oxhydryle voi- sin du groupe aromatique, la migration ne saurait avoir lieu. Bien plus, comme, chezles halohydrines, les réac- tions transpositrices sont provoquées, ainsi que nous venons de le dire, par le départ d'hydracide sans qu'intervienne la nature secondaire ou tertiaire de l'oxhydryle, on conçoit que ces réactions transpo- sitrices conduisent à des a/déhydes lorsque l'oxhy- dryle est secondaire : CHOH.CHI.CA* — HI > CHO.CH.CH* | | CII C‘H° et à des cétones quand l'oxhydryle est tertiaire : CH5.C(OH).CH?I —HI — CH®.CO.CH*.CSH5. | C°H° Chez les glycols, au contraire, où l'oxhydryle ter- liaire ne saurait jamais être plus résistant qu'un oxhydryle secondaire, c'est toujours au voisinage de ce dernier que se produit la migration phénylique; il en résulte que les réactions transpositrices obser- vées chez les glycols ne peuvent conduire qu'à des aldéhydes : R R — HO —> | CHOH.C(OH).C‘H CHO.C.C‘IF. | CI CS Il est incontestable qu'on se trouve ici en pré- sence d'un groupe très homogène de transpositions moléculaires, dues à des migrations exclusivement aromatiques (phényliques), alors que, dans la plu- part des autres transpositions, tous les ralicaux ! Lorsque les carbures styroléniques additionnent CIO ou JOH, l'oxhydryle se fixe en général sur le carbone voisin du CS. ? TirrENEAU : C. A. Ac. Se., t. CXLIIT, p. 684. Ann. Chim. Phys. (8); t. X, p. 312, 3:85. paraissent indistinctement susceptibles d'émigrer. Ces migrations ne sontdonc pas,comme les migra- tions pinacoliques, nécessilées par des raisons de structure; elles se produisent, cependant, d’une fa- con invariable pour des conditions de structure bien déterminées, que j'ai pu, en quelque sorte, codifier de la façon suivante : tous les a-glycols et «-halo- hydrines aromatiques qui, au cours de leur trans- formation en aldéhydes ou cétones, conservent leur oxygène oxhydrylique au voisinage du radical aromatique, donnent lieu à des phénomènes de transposition moléculaire, dus à la migration de ce radical. J'ai tenté d’esquisser le mécanisme de ces trans- positions au moyen de schémas intermédiaires, qui, non seulement expriment aux dépens de quels éléments s'est produite l'élimination d’eau ou d'hydracide, mais encore qui représentent d'une facon très suffisante comment s'effectue l'échange des affinités au cours de la réaction. Les formules suivantes rendent très exactement compte, en effet, du passage aux aldéhydes et cétones correspon- dantes : | ' Ar Ag CH C—=RRU > CH CRE "NS I | () 0 | | Ar—C(R)—CH—R — R—C—CHS pt || î [0] 0 / On voit que les schémas proposés suffisent à représenter une de ces réactions, sans permettre toutefois d'en expliquer la nécessité. Ainsi, à côté des nombreuses transpositions moléculaires que nous avons éludiées plus haut et qui sont rendues nécessaires par certaines condi- tions de structure, il en est d’autres qui échappent à toute nécessité de cet ordre, bien que les migra- tions ne s'y produisent que pour des particularités de structure bien déterminées. Toutefois, comme il n'est pas de réaction chi- mique qui n'obéisse à des nécessilés immédiates, on est conduit à conclure qu’en dehors des néces- silés de structure que nous concevons aisément, il est des nécessités dynamiques dont la conception nous échappe encore. III. — CoxcLUSIONS. Telles sont, rapidement exposées, les principales ltranspositions de structure en Chimie organique. Parce que méthodique, l'exposé sommaire qui vient d'en être fait suffira, je l'espère, à donner une idée d'ensemble de ces phénomènes; c'est spécia- 594 lement le point de vue mécanisme qui a été envi- sagé ici, et j'y ai trouvé des éléments suffisants pour procéder à un classement régulier des nom- breux faits connus, classement qui jusqu'ici n'avait pas encore été tenté. Dans un premier groupe (migrations chez les molécules stables), j'ai réuni tous les cas où la réaction transpositrice s'effectue sans aucun phé- nomène d'addition ou d'élimination, et conduit, par conséquent, à un corps de mème composilion cen- tésimale que le produit initial” ; nous avons vu que le mécanisme des transpositions de ce groupe est d'une interprétation relativement aisée, puisque la rupture d'équilibre qui précède la migration ne peut être produite qu'aux deux points intéressés par cette migration; au surplus, on ne peut songer en aucun cas à adopter pour ces réactions la for- mation de systèmes intermédiaires cycliques. Dans un second groupe (migrations chez les mo- lécules instables), j'ai rassemblé tous les cas où la réaction transpositrice est provoquée par l’élimi- nation de divers groupes binaires, tels que HO, HCI,MgCF, ou même de certains éléments, tels que Az. Cette élimination a pu être schématisée au moyen de systèmes intermédiaires offrant la même composition centésimale que le produit final. Pour la plupart des transpositions de ce groupe, on admet cependant encore aujourd'hui que c’est tout au début de la réaction qu'a lieu la migration; celle-ci consisterait en un simple échange entre le radical migrateur et le groupe éliminé ultérieure- ment et serait provoquée par une sorte d'action de contact précédant l'action spécifique du réactif (affinité prédisposante). [I m'a paru, pour le moins, inutile d'attribuer aux réactifs transpositeurs de telles actions de contact. J'ai pensé que, dans toutes les transpositions moléculaires, la migration devait être postérieure à l'action propre du réactif. A la notion de com- posés intermédiaires saturés, consécutifs à la migration, j ai donc substitué la notion de sys- tèmes intermédiaires non saturés et déterminant la migration. Toute réaction transpositrice comprendrait ainsi deux phases”: une phase de désorganisation ou de ‘ Ce produit initial étant stable dans les conditions ordi- naires de température et de pression, on a pu désigner les migrations de ce groupe : migrations chez les composés stables. ? Bien que l'une de ces phases provoque l'autre et, par conséquent, la précéde, il semble très vraisemblable, comme nous l'avons fait remarquer dès le début, que ces deux phases se déroulent simultanément, Fe ié M. TIFFENEAU — LES TRANSPOSITIONS DE STRUCTURE EN CHIMIE ORGANIQUE désaturation, provoquée par les agents chimiques ou physiques, et une phase de réorganisation, au cours de laquelle se produirait la transposition moléculaire." S'il ne paraît pas impossible de fixer le méca- nisme rationnel de la première phase, voire même de chercher, comme je l'ai fait, à schématiser la transformation par des structures intermédiaires, il m'a semblé, au contraire, tout à fait téméraire de songer, pour le moment, à figurer le mécanisme de la seconde phase, c'est-à-dire de la phase migra- trice proprement dite. Bien qu'il ne semble pas douteux que le radical migrateur ne rompe complètement sa liaison avec l'élément sur lequel il était initialement fixé, ce fait n’est toutefois pas aussi indiscutablement établi que dans les exemples suivants, où le chainon car- boné qui sert de lien est lui-même séparé de la molécule : CH 2C0*+|| CH CH. C‘H5 2C0° + || CH. C'H° Or, dans ces deux exemples, la formation d'hy- drogène libre dans l’un ou de diphényle dans l'autre n'a jamais été observée. Il en est de même de toutes les réactions trans- positrices, où le doublement du radical migrateur n’a jamais été signalé. D'ailleurs, pour interpréter ces phénomènes, il suffirait d'admettre qu'au fur et à mesuré que décroît l'affinité du radical migrateur pour son point d'at- tache initial, son affinité pour un nouveau point d'attache croit proportionnellement. On se trouverait dès lors, pour cette seconde phase, en regard d'un des problèmes les plus simples et les plus troublants de l'affinité chi- mique, mais dont l'interprétation ne saurait cepen- dant modifier en rien les conceptions que nous avons exposées ici sur les transpositions molécu- laires . M. Tiffeneau, Docteur ès sciences. ! Conférence faite au laboratoire de Chimie organique de M. le professeur Haller à la Sorbonne. - ondes mer ace cet éme bn CES URSS cond sine | | BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 595 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Simon (Max). — Uber die Entwicklung der Ele- mentar-Geometrie im XIX°" Jahrhundert (SUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA (GÉOMÉTRIE ÉLÉMENTAIRE AU XIX° SIÈCLE). — 1 vol. in-8° de viu-278 pages avec 28 fig. (Prix : 10 fr.) Teubner, éditeur. Leipzig, 1907. Ce savant ouvrage est une bibliographie analytique des principaux travaux sur la Géométrie élémentaire qu'a vus éclore le xix° siècle. En tête de chaque cha- pitre, se trouve un court résumé qui rappelle les acquisitions faites dans ce domaine spécial au cours des cent dernières années; vient ensuite la bibliographie complète du sujet. On comprend qu'une telle œuvre se prête mal à un compte rendu. Disons seulement ce qu'on y rencontre. La première partie se rapporte aux généralités phi- losophiques, historiques et méthodologiques de la Géo- métrie élémentaire. Un exemple suffira à montrer com- bien l'énumération des travaux est complète. Ainsi, dans l'alinéa relatif à l'historiographie, on trouve men- tionnés jusqu'aux mémoires japonais, entre autres ceux du professeur Fujisawa, auteur de manuels clas- siques dans l'Empire du Mikado. Le reste du volume traite des questions particulières dont l’ensemble constitue la Géométrie élémentaire actuelle. Citons parmi les plus importantes questions inventoriées : la théorie des parallèles, la quadrature du cercle, la géométrie de position, la théorie des transversales, la géométrie du triangle, la stéréométrie, la trigonométrie rectiligne et sphérique et leurs mul- tiples applications. En résumé, le livre érudit de M. Max Simon est un excellent instrument de travail, qui rendra de grands services, JAGQUES Boyer. Maillet (Edmond), Zngenieur des Ponts et Chaussées, Répétiteur à l'Ecole Polytechnique. — Introduction à la Théorie des nombres transcendants et des pro- priétés arithmétiques des fonctions. — 1 vo/. 1n-8°. (Prix :12 fr.) Gauthier- Villars. Paris, 1907. Ainsi qu'il l'indique lui-même dans sa préface, M. Maillet s'est proposé d'exposer aussi simplement que possible, soit certains résultats connus, soit des résultats nouveaux relatifs à là théorie des nombres transcendants, c'est-à-dire des nombres qui ne sont racines d'aucune équation algébrique à coefficients entiers. Son livre, très documenté, riche en résultats nouveaux dus à l’auteur, est en mème temps très sug- gestif, par les nombreux sujets de recherches qui y sont indiqués. Une bibliographie très complète termine le volume, et facilitera encore aux travailleurs l'étude de ces difficiles, questions que M. Maillet a su rendre abordables, mème à ceux qui ne possèdent que des connaissances générales de Mathématiques supé- rieures. Voici, d'après M. Maillet lui-même, une brève analyse de l'ouvrage : Chap. I : Théorie des fractions continues, consi- dérées spécialement comme moyen d'approximation. Ce sujet, autrefois classique, a disparu des programmes d'enseignement. Chap. IT : Théorème fondamental de Liouville, expri- mant une condition suffisante pour qu'un nombre N soit transcendant ; il suffit qu'il soit la limite d'une suite Li de fractions rationnelles à dénominateurs L entiers croissants à l'infini, et qui sont telles qu'à chaque nombre positif « correspond une infinité de valeurs de 2 pour lesquelles on à : ne qn Tree S 1n Chap. TT : Propriétés arithmétiques des nombres précédents, dits de Liouville; leur classement par caté- gorie de nombres fournissant, par les opérations ration- nelles élémentaires, d'autres nombres de même caté- gorie. Chap. IV : Les nombres transcendants considérés d'une infipité de manières comme racines d'une fonc- tion f{x), qui est une série ou une fraction continue à coeflicients rationnels. Chap. V : Les fonctions f{x) génératrices de nombres transcendants, c'est-à-dire telles que la valeur f(x) soit transcendante dès que x est rationnel ou algébrique. Chap. VI : Sur la classification des nombres irra- tionnels ou transcendants; moyens de reconnaitre, par la théorie des fractions continues, certaines caté- gories de nombres; reconnaître ainsi, par exemple, que le nombre e n'est pas un nombre de Liouville. Chap. VIT : Etude des fonctions décimales et con- tinues quasi-périodiques. Chap. VIIL : Quelques propriétés des racines des équations transcendantes. Chap. IX : Démonstration de la transcendance des nombres e et x: pour e, la méthode employée est celle du cours lithographié de M. Jordan à l'Ecole Polytech- nique; pour le nombre 7, c’est celle de M. Hilbert; M. Maillet en déduit l'impossibilité de la quadrature du cercle, en précisant bien ce qu'on doit entendre par là. Chap. X à XII : Extension aux séries à coefficients rationnels de plusieurs propriétés des polynômes à coefficients rationnels, par exemple au point de vue des fonctions symétriques ou de la réductibilité. Ces chapitres renferment de nombreux sujets de recherches qu'indique l’auteur. ° Enfin, quatre notes, dont une consacrée à la biblio- graphie, complètent cet important ouvrage. M. LELIEUVRE, Professeur au Lycée el à l'Ecole des Sciences de Rouen. 2° Sciences physiques Brillouin (Marcel), Professeur au Collège de Franee. — Leçons sur la Viscosité des liquides et des gaz. 1° partie : Généralités, viscosité des liquides. — 1 vol. gr. in-8 de 228 pages avec 65 figures. (Prix :9 fr.) Gauthier-Villars. Paris, 1907. M. Brillouin a réuni dans cet ouvrage la matière de deux années d'enseignement au Collège de France; ce premier ‘volume, qui vient de paraître, ne traite que des liquides, l'étude des gaz et des caractères généraux des théories moléculaires étant réservée pour le second volume. C'est l'expérience qui constitue nécessairement le point de départ de la théorie; les travaux de Coulomb ont rendu possible l'application des principes de la D yna- mique. Les grandeurs qui caractérisent la viscosité ont été distinguées de l'inertie, et l'on a pu écrire les équations du mouvement des fluides visqueux et les inté- grer pour un certain nombre de cas. Ces questions font l'objet du livre I. Le livre IL débute par la description des expériences célèbres de Poiseuille sur l'eau; l'auteur aborde ensuite celles qui ont été faites sur le mercure et sur les liquides organiques, et il en déve- 296 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX loppe les conclusions. Le dernier livre est consacré aux expériences de Hagen, Reynolds et Couette sur le passage du régime lent au régime rapide ou hydrau- lique. La viscosité des fluides est le plus simple des phéno- mènes irréversibles, et elle est par cela même très intéressante ; le savant professeur du Collège de France en a établi la théorie avec une remarquable limpidité, et les lecteurs de cette belle étude formeront avec nous le vœu de voir paraître bientôt le second volume. AIMÉ Wrrz, Doyen de la Faculté libre des Sciences de Lille, Correspondant de l'Institut. Lindet |L.), Docteur ès Sciences, Professeur à l'Ins- titut Agronomique. — Le lait, la crème, le beurre et les fromages. — 1 vol, gr. 1n-8° de 347 pages. (Prix :12 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1907. Sous ce titre, M. L. Lindet vient de publier un fort bel ouvrage qui sera bien accueilli, parce qu'il ren- ferme une quantité de documents utiles et qu'en outre il vient à l'heure opportune. Dans les nombreux traités de Laiterie existants, les auteurs se sont tout naturellement préoccupés d'abord des questions industrielles, sans insister beaucoup sur le côté théorique des questions et les analyses des produits. Il y avait là véritablement une lacune grave: un ouvrage scientifique manquait et était désiré; c'est cet ouvrage utile que nous présente aujourd'hui le savant professeur de l'Institut Agronomique. M. Lindet a réuni et exposé, dans un style clair et précis, dans un ordre bien méthodique, les études les plus récentes sur la composition du lait et des produits qui en dérivent, sur les phénomènes d'ordre microbiologique dont ces produits sont le siège et dont les effets sont si variés, et enfin les recherches modernes sur les procédés propres à découvrir des altérations ou à déceler des fraudes. Dans la Laiterie, qui est une des plus captivantes industries de fermentations, toutes les questions sont nouvelles, quelquefois même à peine posées ou vague- ment entrevues, et cependant l’on est bien d'accord pour penser que, dans cette industrie si délicate, les progrès ne peuvent être réalisés qu'en appliquant judi- cieusement les doctrines et les méthodes scientifiques. Nous trouvons pour nous satisfaire, dans le livre de M. Lindet, tous les détails sur les méthodes d'analyses du lait les plus récentes et les plus exactes, sur les fal- sifications et les altérations; puis, la matière première une fois définie et conuue, l'auteur aborde l'étude des fabrications dérivées. On lit avec beaucoup d'intérêt, je dirai presque de plaisir, les chapitres si bien traités de la maturation de la crème, des altérations et analyses du beurre en vue de la recherche des fraudes par la margarine. Ce dernier chapitre esttrès complet; il sera étudié par les chimistes de profession avec beaucoup de profit. Eulin, nous arrivons à la fromagerie, à cette indus- trie restée pendant si longtemps profondément routi- nière. Aujourd'hui, on ne fabrique plus les fromages comme on traite une plaque de blindage ou des rails d'acier, ainsi que le disait le grand maître Duclaux lorsqu'il parlait de certaines fabrications arriérées. La question de la maturation des fromages sous l'influence des micro-organismes,les modifications que subit le caillé ont fait l'objet de nombreuses études, et l’on commence à débrouiller quelque peu cette ques- tion difficile et complexe. M. Lindet expose, dans ce chapitre, l’état actuel de nos connaissances sur ce sujet dans une doctrine bien étayée de bonnes preuves solides, car elle résulte en grande partie des travaux personnels de l’auteur. Souhaitons, dans l'intérêt de notre industrie de Lai- terie française, le meilleur accueil au premier livre de Laiterie scientifique. R. LEZÉ, Ingénieur des Arts et Manufactures, Professeur à l'Ecole nationale d'Agriculture de Grignon. Bulletin scientifique et industriel de la maison Roure-Bertrand fils, de Grasse. — Hérissey et fils, éditeurs. Evreux. Intéressante tentative en vue de tenir l'industrie de la parfumerie au courant des progrès de la science et de lui permettre de profiter de tous les travaux et dé- couvertes des chimistes. {il serait à souhaiter que cet exemple fût suivi. 3° Sciences naturelles Richer (D' Paul), Membre de l'Institut et de FAca- démie de Médecine, Professeur à l'Ecole nationale des Beaux-Arts. — Nouvelle Anatomie artistique. Cours pratique et élémentaire. — 1 vol. in-8 de 177 pages, illustré de nombreuses figures. (Prix : 6 fr.) Plon, éditeur. Paris, 1907. L'enseignement de l'Anatomie aux artistes a subi, dans ces dernières années, une transformation inat- tendue, qui ne peut manquer de produire d'excellents résultats. Et non seulement peintres et sculpteurs sont appelés à en bénéficier, mais les médeëins aussi y trouveront d'utiles avantages. Il n’y a pas encore bien longtemps, l’enseignement de l’Anatomie à l'Ecole des Beaux-Arts se bornait à des notions d'ostéologie et de myologie descriptive. On exhibait aux élèves un squelette tant bien que mal ajusté, ainsi qu'un légendaire cadavre dont les muscles desséchés revêtaient les formes les plus fantaisistes. Ce spectacle macabre ne rendait guère eompte des rapports qui existent entre le cadavre et le vivant. Ce pouvait être une intéressante étude de nature morte, mais peu profitable pour des peintres ou des sculpteurs appelés à figurer surtout Ja vie. L'avènement d’une science nouvelle, qui ne date guère que de vingt ans, a permis de réformer complè- tement l'éducation anatomique des artistes. On peut l'appeler la science de la forme humaine, autrement dit la morphologie, ou mieux encore, la serence du nu. Elle est presque entièrement l'œuvre d'un artiste doublé d’un médecin, qui lui a consacré toute une vie de labeur, M. Paul Richer. Son premier ouvrage, monumental, paru en 1890, était intitulé : Anatomie artistique. Description des formes extérieures du corps humain au repos et dans les principaux mouvements. Cet ouvrage, illustré de plus de 300 figures et d’une centaine de planches des- sinées par l’auteur lui-même, ne fut cependant connu au début que d’une élite. Aussi les précieuses notions qu'il contient mirent-elles plusieurs années à se diffu- ser. Aujourd'hui, heureusement, elles sont devenues classiques. Pour répondre aux besoins de l'artiste, comme à ceux du médecin, l'Anatomie de Paul Richer établis- sait des relations « entre les portions profondes et la forme extérieure, entre les notions anatomiques et le nu ». Après avoir étudié en détail l’'Anatomie descrip- tive, l’auteur inaugurait la description des formes exté- rieures du corps humain. Il enseignait le nu vivant. Les innovations furent nombreuses. Les os, d'abord étudiés isolément, étaient considérés ensuite davs leurs rapports réciproques, et enfin on apprenait à connaître l'ossature de l'être vivant, en passant en revue la mor- phologie squelettique de chaque grande région. Dans la myologie, chaque muscle se trouvait décrit avec ses Insertions précises, sa forme, son volume; mais aussitôt après venait l'étude du muscle vivant sous la peau vivante. Enfin, les planches consacrées à la représentation du nu montraient, ou bien le corps tout entier, sous ses diverses faces, ou bien les grands segments du corps dans leurs moindres détails morphologiques, et cela, tantôt dans l'attitude conventionnelle de l'homme au repos, tantôt dans l'exécution des principaux mouve- ments. Assurément, il n'avait pas été possible de figurer ni de décrire l'infinie variété des attitudes et des gestes nine amie BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 597 que peut réaliser le corps humain; mais la connais- sance d'une série de positions et de mouvements élé- mentaires suffisait amplement pour enseigner les varia- tions physiologiques du nu. Bref, l'œuvre de M. Paul Richer mettait désormais l'artiste et le médecin en mesure d'appliquer au vivant les connaissances d’Anatomie descriptive. . Plus tard, M. Paul Richer entreprit de dresser le canon des proportions du corps humain. Un livre et une statue furent les fruits de ses observations et de ses recherches. L'un et l'autre s'adressent à la fois aux artistes et aux médecins. Enfin, nouvelle et importante addition à la connais- sance de la forme humaine vivante, la Physiologie de l’homme en mouvement eut pour but de décrire et de figurer les modifications des formes extérieures qui résultent des différents états musculaires : contraction, relâchement, distension, au cours des principaux actes de la vie de relation, la station, la marche, la course el les mouvements simples des membres. Ainsi naquirent l'Analomie et la Physiologie des formes. Depuis lors, M. Paul Richer, devenu professeur d’Ana- tomie à l'Ecole des Beaux-Arts, a pu mettre en pratique les notions fournies par la morphologie. Les jeunes artistes en ont rapidement bénéficié, Actuellement, l'enseignement de l'Anatomie à l'Ecole des Beaux-Arts comporte deux sortes de cours : des cours oraux el des cours pratiques, qui se poursuivent de façon parallèle et se complètent mutuellement. Les cours pratiques ont comme moyen d'instruction le dessin et comme but la recherche du détail anato- mique sur le modèle vivant. Icile scalpel de l'étudiant en médecine est remplacé par le crayon. Les élèves commencent par dessiner les os isolés sous leurs divers aspects. Puis, lorsqu'ils ont ainsi figuré tous les os d'une partie du corps, d'un membre par exemple, on leur présente un modèle nu, sur le- quel on leur apprend à reconnaitre comment ces os se révèlent à l’extérieur dans leur forme et dans leur situation exacte. En réalité, c'est par l'étude du mo- dèle vivant qu'ils acquièrent la connaissance du sque- lette. Et cette lecon de choses répond bien à son but, qui est la connaissance du squelette en vie. De même pour les muscles; ils sont aussi dessinés d'après le modèle : on ne demande pas à l'élève de re- présenter un muscle plus ou moins schématique, mais bien les muscles mêmes du sujet qui pose devant eux, dans leur forme réelle et vivante, avec leur accent in- dividuel, suivant telle ou telle attitude. Mais l'étude du squelette et des muscles ne saurait Suflire aux artistes. Ils ont à reproduire la forme exté- rieure du corps humain. Il faut leur enseigner le rôle plastique du tissu graisseux sous-cutané, des vaisseaux et de la peau elle-même avec ses dépendances. De là une étude très détaillée de la forme extérieure, dont les moindres particularités sont, non seulement mises en évidence, mais anatomiquement expliquées. De la sorte. l'artiste apprend à reconnaitre les con- ditions essentielles d’une bonne conformation, ce qu'Ingres appelait justement la « santé de la forme ». Dans le cours oral, préparé et facilité par ce cours pratique, le professeur peut aborder des considérations générales, présenter des vues d'ensemble nécessaires à l'intelligence du détail. Lorsqu'il s'agit d'établir des comparaisons entre les innombrables modalités de la plastique humaine, on fait appel aux projections, d’après des photographies des différents types humains, - dans leurs différentes attiludes, ou d'après les meil- leures œuvres d'art. Mais ici encore, le modèle vivant est-toujours présent Ainsi, le futur artiste a toujours sous les yeux l'image réelle de la vie qu'il est appelé à reproduire. Cest pour faciliter encore cet enseignement que M. Paul Richer vient de publier un nouvel ouvrage, qui porte le titre de Nouvelle Anatomie artistique. Il à voulu faire un « Cours pratique et élémentaire HKEVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. d'Anatomie que peintres et sculpteurs pussent utiliser commodément. On peut affirmer qu'il y a réussi. Les notions élémentaires d'Anatomie descriptive qui s'y trouvent ne prétendent pas rivaliser avec le luxe de renseignements fournis par les traités destinés aux médecins ; mais nulle part ne sont mieux exposés ni mieux figurés tous les détails de la morphologie hu- maine. Outre quelques réductions de sa grande Ana- tomie artistique, M. Paul Richer a publié des planches nouvelles, dans lesquelles à chaque dessin du sque- lette ou des muscles correspond un dessin de la forme extérieure exactement superposable. Un simple coup d'œil permet de se repérer, La transition se fait sans effort du cadavre au vivant. « Je voudrais, dit l'auteur, que, lorsque vous vous trouvez en face de la nature vivante, vous n'ayez pas devant vous une énigme plus où moins obscure, mais comme un livre ouvert, écrit en style clair, avec de beaux caractères bien lisibles et que vous puissiez aisément déchiffrer. « J'ai cherché à simplifier l'analyse anatomique et je me suis laissé surtout guider, dans l'étude des mus- cles, par leur action sur la forme extérieure. C'est ainsi que certains muscles, que j'appelle les « muscles de la forme », sont décrits avec détails, qu'ils soient superficiels ou profonds, — car l'on sait que les mus- cles profonds jouent parfois un rôle important dans la conformation du nu, — pendant que d'autres, au con- traire, quoique distincts anatomiquement, sont con- fondus dans une même description, parce qu'ils n'in- téressent pas isolément la forme. « Ce nouveau manuel est justement fait pour faci- liter cette tâche. Aussi est-il accompagné de nom- breuses figures dans lesquelles domine la préoccupa- tion constante d'établir le rapprochement entre les parties profondes et le nu, aussi bien pour le squelette que pour les muscles, reproduits plus particulièrement dans la forme même qu'ils ont sur le vivant. » Le but visé par M. Paul Richer est atteint aujour- d'hui. Il enseigne aux artistes une Anatomie vraiment vivante. Mais ce n'est pas aux artistes seulement que la con- naissance de la forme humaine est nécessaire. Elle n'est pas moins indispensable aux médecins. Et cepen- dant, telle est encore la vérité d'aujourd'hui : jamais on ne montre à un futur docteur en médecine un homme nu, normal, et de bonne santé. Dès lors, ne lui man- quera-t-il pas dans sa pratique, pour faire une obser- vation rigoureuse, de savoir discerner l'exception de la règle, de pouvoir comparer un malade avec un homme bien portant? Celui-ci, il ne l'a jamais vu. Il ne connaît que des cadavres! Lacune regrettable de l'enseignement médical, que des médecins comme Charcot, des chirurgiens comme Lannelongue, ont maintes fois signalée, ne craignant pas d’avouer franchement qu'ils s'étaient souvent lrou- vés dans l'embarras, malgré leur parfaite connaissance de l'anatomie cadavérique, en présence des difficultés de la morphologie de l'homme vivant. L'œuvre de M. Paul Richer, et en particulier sa Nou- velle anatomie artistique, comble cette lacune. En attendant, — ce qui fatalement doit arriver, — que les notions essentielles de morphologie humaine fassent partie intégrante du programme des études médicales, l'étudiant ou le praticien peuvent au moins, s'ils en ont le désir, puiser à des sources sûres les renseigne- ments sur la forme humaine vivante qu'ils eussent cherchés en vain, il n'y à pas seulement vingt années. D' HENRY MEIGE. 4 Sciences médicales Kendirdiy (D' L.). — L’'Anesthésie chirurgicale par la Stovaine. — 1 vol. in-12 de 203 pages. Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1907. Livre intéressant et instructif, par lequel le D° Ken- dirdijy fait connaître tout ce qui est relatif à ce nouvel 14%% 598 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX anesthésique, la stovaine. Livre utile et venant satis- faire la légitime curiosité du monde médical au sujet de ce médicament, qui, créé de toutes pièces par la Chimie, se trouve être doué des mêmes propriétés analgésiques que la cocaïne, le seul anesthésique local qui, jusqu'à présent, ait été considéré comme vraiment pratique. En auteur consciencieux, M. L. Kendirdjy établit d'abord nettement la constitution chimique de ce corps, ainsi que les phases successives de sa préparation. qu'ont déterminées les chimistes Billon et Fourneau, inventeurs de la stovaïne. Ces considérations ont l'avan- age de mettre en relief la connexion qui peut s’établi: entre la Chimie et la Physiologie, cette première science pouvant fournir à la seconde — comme c'est le cas ici — des indications précieuses sur les propriétés physio- ogiques d’une substance, suivant la nature et la situa- tion de ses groupements fonctionnels. Passant ensuite aux phénomènes d'ordre purement physiologique et pharmacodynamique, l’auteur expose, d'une facon fort détaillée, les modifications qui sur- viennent dans l'organisme animal à la suite de l'admi- nistration de la stovaine; pour ce, il s'appuie surtout sur les expériences de Billon, Pouchet et Chevalier. Il serait trop long de les rappeler ici, même brièvement; mais la chose importante, sur laquelle il est nécessaire d'insister, est que la stovaine, tout en ne présentant qu'une toxicité très réduite, — bien inférieure à celle de la cocaïne, — possède un pouvoir analgésique très manifeste. C'est ce que, du reste, l'étude clinique vient corroborer. Dans ce chapitre, l'auteur étudie les différentes façons d'administrer la stovaine, les solu- tions qu'il faut employer, le dosage, l'instrumentation, la qualité de l'anesthésie, puis les techniques spéciales applicables à toute une série d'interventions chirurgi- cales. Un chapitre spécial est consacré aux avantages et inconvénients de la méthode, à ses indications et contre-indications; l’auteur conclut que les avantages de la stovaine sont nettement appréciables, en raison même de sa faible toxicité, et l'emportent sur l’anes- thésie par la cocaïne, voire même par le chloroforme et l’éther : toutes les fois, dit-il, que cela est possible, il faut, dans l'intérêt du malade, recourir aux injections localisées de stovaine. La seconde partie du livre traite la question si importante de la rachi-stovainisation ou anesthésie lombaire par la stovaine, L'auteur y développe longue- ment, et avec raison d’ailleurs, tous les détails relatifs à la technique de cette méthode; il étudie l'action de la stovaine sur les racines de la moelle, les accidents qui peuvent survenir au cours de cette intervention, et conclut, en s'appuyant sur les statistiques connues ainsi que sur les siennes, que la rachi-stoyainisation est très Supérieure à la rachi-cocaïnisation, et qu'elle constitue une méthode d’anesthésie précieuse dont la place est marquée entre l'anesthésie générale et l’anes- thésie locale. En résumé, le livre du D' Kendirdjy met le public médical au courant d’une substance devenue infiniment précieuse pour le chirurgien. I] peut être lu avec autant d'intérêt par le médecin praticien que par le physiolo- giste et le pharmacologiste. D' J. MEURICE, Assistant à l'Université de Gand. 5° Sciences diverses Waxweïler (Emile), Professeur à l'Université de Bruxelles. — Esquisse d'une Sociologie. Instituts Solvay. Travaux de l'Institut de Sociologie. Notes et mémoires. Fase. 2. — 1 vol. in-& de 306 pages. (Prix : 12 fr.) Misch et Thron, éditeurs. Bruxelles, 1907. Un biologiste, qui présente et analyse un ouvrage intifulé « Esquisse de Sociologie », à besoin d'une excuse. Il la trouve dans l'Avant-propos même par lequel le Directeur de l'Institut de Sociologie de Bruxelles | a, dit-il, plus de sociologues dans un groupe de per- sonnes cultivées qu'il n'y a de sociologistes dans l'élite des hommes de science. C'est dire que la Sociologie n'avance scientifiquement pas, qu'elle s’obstine à ne pas mürir, tandis qu'elle est forcée de prendre place cependant dans «la grande mosaïque des connais- sance ». D'une part, en effet, la valeur propre de l'indi= vidu se double théoriquement et surtout pratiquement plus que jamais de sa valeur sociale. D'autre part, les sciences biologiques, qui, par la solidité de leurs con structions, ont réussi à s'imposer comme les seules sour- ces de l'explication des phénomènes humains, reven- diquent comme des leurs l’éthologie, qui est devenue une physiologie externe. Aussi l’auteur croit-il à l'avè- nement d’une science sociologique nouvelle fondée sur la Biologie. C'est l’esquisse de cette Sociologie scienti= fique et biologique qu'il présente. Elle n'est qu'un « recueil de problèmes sociologiques, accompagnés de quelques indications pour leurs solutions, en vue de les ramener à un point de vue commun ». L'ouvrage se divise en deux parties: Dans la première, intitulée Sociologie, M. Waxweïler expose le but de la Sociologie, la place qu'elle doit occuper parmi les sciences biologiques. La Sociologie est une éthologie ; elle est donc la science des rapports de l'être avec son milieu. Mais c'est une éthologie spé- ciale ; elle envisage spécialement les relations de cet être avec les êtres vivants de la même espèce, sans distinction de sexe. Sa méthode sera celle de l'éthologie et de la biologie en général : « se cramponner à l'individu agissant dans son milieu », ou, comme dit Houssay: « appréhender sensoriellement les phéno- mènes ». à Dans le deuxième chapitre de cette partie, on prend connaissance du milieu vivant et du milieu social, qui sont le champ de recherches de la Sociologie. On se rend compte de l'interdépendance végétative des êtres organisés, tant animaux que végétaux, manifestée par des phénomènes de prédatisme, de commensalisme, de parasitisme ou de simple groupement. Il y a quelque chose de plus dans le concept de société et dans la Sociologie que cette interdépendance végétative. Il y à uneinterdépendance individuelle, s’exercant en vue M d'un but commun poursuivi par des individus de même | € espèce; elle se résume dans la notion de l'affinité spé- cilique. L'affinité spécifique est « un aspect particulier de la sensibilité physique de l'être, qui le rend susceptible de répondre, dans des conditions déterminées, aux exci-" tations des autres individus de même espèce »; elle est « l'expression de la similitude spécifique d’organisa- tion ». Laissantde côté l’affinité sexuelle, quin’est qu'un cas particulier delaffinité spécifique, l'interdépendance, l’affinité interindividuelle, élargie et étendue à tous les individus de la même espèce, devient l'affinité sociale, la forme la plus complexe et la plus haute de l’affinité spécilique, l’objet des recherches de la Socio- logie. La Sociologie peut ainsi se définir: « la physio- logie des phénomènes réactionnels dus aux excitations mutuelles des individus de même espèce sans distinc-M tion de sexe ». Parce qu'elle est une science biologi= que, elle impose au sociologiste « le souci constant du point de vue, des méthodes et des procédés de travail de la Biologie ». Puisque l'essentiel est d'étudier des réactions adaptatives, que la règle soit: « se cram-= ponner à l'individu agissant dans son milieu ». Dans le chapitre HI, l'auteur réclame de la Socio-« logie, si elle veut être une science précise, une ter= minologie précise. De là un choix d'expressions î empruntées au langage courant, mais dignes de faire partie de la langue sociologique, qui sont rassemblées" à la fin du livre dans un curieux lexique sociologique On à abusé du terme « social »: par exemple, dans ES expressions courantes de « réformes sociales », € ques tion sociale », « hygiène sociale ». Les relations des ouvriers entre eux, celles des employeurs et des explique au public le but et le sens de son travail. I y | employés, sont de l'hygiène sociale, mais non la venti=« BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 999 lation des ateliers, ni l'installation de lavabos. Le mot social doit être réservé pour les actions et réactions réciproques des individus de même espèce sans dis- tinction de sexe. La Sociologie ainsi comprise se divise naturellement en Sociologie animale et Sociologie - humaine (l’auteur n'admet pas une Sociologie végétale, à Lort sans doute). Les faits de l'une sont comparables à ceux de l'autre ; mais les données de la Sociologie comparée (animale et humaine), utilisées par exemple dans les ouvrages de Houzeau et de Kropotkine, ne doivent être maniées qu'avec une grande prudence - par le sociologiste humain. On peut dire cependant que, plus que tout autre être, Fhomme est devenu, par le développement du cerveau, par le langage parlé et écrit, « l'animal qui se forme par les autres Imdi- vidus de son espèce », celui « dont l'instinct primaire unique est la tendance à pouvoir apprendre ». Chez l'homme, la sensibilité physique a évolué de telle facon que l’affinité sociale y est une nécessité spéciti- que. Le primitif (sans localisation géographique) est celui qui est resté à un stade élémentaire du dévelop- pement de cette sensibilité, de sa potentialité réaction- nelle: le civilisé est celui qui a mis cette potentialité à l'unisson de la variété des excitationsambiantes. La deuxième partie de l'ouvrage est consacrée à l'Ana- lyse sociologique. L'étude des sources de la méthode est l'objet d'un premier chapitre. Les sources auxquelles peut puiser la Sociologie sont multiples. C'est d'abord l'observation directe; mais il faudra se mélier des erreurs dues à l'égomorphisme, c’est-à-dire à « linter- prétation des phénomènes par les raisons d'être ou les mobiles qui sont familiers à l'observateur ». C'est l'ex- périmentation, sur des « tests » appropriés. L'observa- tion indirecte, par le moyen des témoignages, à défaut des vestiges dont dispose l'Embryologie ou la Paléonto- logie, est une source précieuse, si l'on s’en tient aux documents, aux «tranches de vie», insignifiante si lon s'adresse aux traités d'histoire. Les procédés statisti- ques ont le tort de n'ètrele plus souvent que des résul- tats, des précipités d'activités et de ne pas nous faire connaître ces activités elles-mêmes. À condition de tenir compte du « toutes choses égales d’ailleurs » des inathémaliciens, la méthode de concordance peut être utile. Enfin, la doctrine actuelle, celle que Lyell à inaugurée pour la Géologie, peut s'appliquer à la Socio- logie : comme c'est le cas pour l'ouvrage de Frazer, « le Rameau d’or » ; justifiée par ce principe que les mêmes causes produisent les mêmes effets, l'étude des faits actuels peut éclairer toute la Sociologie, et, par exemple, l'évolution sociale de l'Homme se retrouve dans celle de l'enfant qui en est un recommencement. Le plan d'études sociologiques de M. Waxweiler comprend : la formation sociale de l'individu, Îles aptitudes sociales, les activités sociales, les synergies sociales. Les possibilités sociales pendant l'élevage, la plas- ticité sociale de l'adolescent concourent à la formation sociale de l'individu, assurent à celui-ci toutes les caractéristiques de sa personnalité. À la suite de ce développement social, l'individu est, par rapport à d'autres, en état « synéthique » (guy, avec) ou « allé- thique » (os, autre). « L'individu qui réagit synéthi- quement avec un autre est celui qui « se retrouve », qui « se reconnaît » par quelque côté dans cet autre ». Telle est Pimportante notion de la « synéthise sociale ». Une aptitude sociale est toute réaction sociale qui ne s’extériorise pas. Chaque individu ne perçoit pas également toutes les différences de ceux qui l'entourent, ne réagit pas à l'égard des autres autant que celui qui réagit le plus, ce qui dépend du degré de développe- ment de la sensibilité physique dans le sens de l'affinité sociale; c'est là le polymorphisme social. Le reste du chapitre des aptitudes sociales traite de la discrimi- palion sociale, des jugements sociaux, des désirs sociaux, et se termine par la pathologie de l'affinité. Toutes les activités d'un individu ne sont pas sociales ; il faut, pour qu'elles méritent ce qualificatif, qu'elles déterminent chez les autres une réaction. Toutes ces activités sont classées en : conjonctives, protectrices ou nocives, compétitrices, divulgatrices, grégaires (qui se ressemble S'assemble), répétitrices, initiatrices, acquisitives, sélectives. L'expression la plus haute des faits sociaux est dans la synergie sociale (social control de Ross), qui assu- jettitles individus à une règle commune, La conformité sociale est, par exemple, l'obligation pour les nouveaux venus de se soumettre à certains usages. La céphali- sation sociale est la subordination d'une majorité à une minorité où à un seul homme. Sous la rubrique de coordination sociale, il faut ranger des faits par lesquels une troupe devient un groupement où tous les individus marchent comme un seul homme, et où se développent les mentalités de chef et de subordonné. La conscience sociale prend naissance dans un pareil groupement (conscience nalionale, conscience de classe). Le signe de la conscience sociale, c'est la réaction de l'individu à toute offense faite collective- ment au groupe. Dans le cas de la conscience nationale par exemple, les indifférents à la notion de patrie ne se comportent pas conformément à ce que les individus qui les entourent exigent pour les tolérer parmi eux; ils froissent ainsi la conscience nationale ; le chapitre se termine par la notion de l'organisation sociale. Dans un aperçu d'ensemble, l'auteur insiste sur plu- sieurs points importants. L'espèce est, dit-il; l'organi- sation sociale est ; mais la personnificalion de la société est une abstraction, et la société ne peut s'observer, s'étudier que par les individus qui la composent. La sociologie n'a pas de frontières; prenant son bien où elle se trouve, partout où il y a de la vie sociale, elle empiète nécessairement sur d'autres sciences, mais bien d’autres sciences humaines se rencontrent el se confondent partiellement sans pour cela cesser d’être. Telle est l'œuvre, considérable et puissamment origi- nale, de M. Waxweiler. Un résumé squelettique, comme celui que nous avons donné, ne peut rendre compte de l'enchainement parfait des idées, depuis le fait biolo- gique initial qui sert de point de départ, jusqu'aux phénomènes sociologiques si complexes de la coordi- nation et de la conscience sociales. Il faudrait pouvoir éclairer les notions sociologiques par les nombreux et ingénieux exemples qui les illustrent dans ce livre et justifier leur existence par l'abondante documentation que l’auteur à appelée à son aide. Les critiques que l'on peut formuler ne sont que peu de chose au regard de ces qualités maïitresses. Peut-être la Sociologie, telle que M. Waxweiler nous l'expose, est-elle un peu trop une « interpsychologie » (Tarde), et peut-être tire-t-il la couverture du côté sociologique, lorsque, par exemple, il masque sous le terme nouveau d'« idiotropisme » une personnalité sociale qu'il veut différencier de la personnalité des psychologistes. On pourra penser aussi que, dans son œuvre d'analyse, sociologique l’auteur à dépassé un peu la limite des distinctions nécessaires, et que les caté- vories d'activités sociales pourraient se ramener à un plus petit nombre. Enfin, le désir d’une terminologie précise, qui affranchisse la Sociologie du langage cou- rant, à amené un certain abus de néologismes. Ils feront moins pour la fondation de la Sociologie scientifique et positive que le précepte qui résume la méthode préconisée : se cramponner à l'individu agissant dans son milieu. Ce sera là, désormais, le mot d'ordre de tous les sociologistes, et l'ouvrage de M. Waxweiler deviendra pour la Sociologie un pro- gramme impératif. A. PRENANT, Professeur à la Faculté de Médecine de l'Université de Nancy. 600 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 2% Juin 1907. M. le Secrétaire perpétuel annonce le décès de M. Ch. Trépied, Correspondant pour la Section d’Astro- nomie, et de M. A. Crova, Correspondant pour la Section de Physique. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. F. Riesz présente ses recherches sur une espèce de Géométrie analytique des systèmes de fonctions sommables. — M. A. Korn traite l'équation fonctionnelle de M. Fredholm par les méthodes connues de la Physique mathématique. — M. M. Fréchet communique deux résultats nouveaux sur les ensembles de fonctions sommables et de carrés sommables. — MM. Rambaud et Sy présentent leurs observations des comètes e et d (1907) faites à l’équa- torial coudé de l'Observatoire d'Alger. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. M. Moulin à mis en évi- dence l'existence d’'nne émission secondaire cathodique des métaux sous l'influence des rayons x; l'ordre de grandeur de e/m pour ces rayons secondaires est de 107. — MM. H. Ollivier et P. Sève ont constaté, par l'étude du rejaillissement, une augmentation de la vitesse de chute des gouttes d'eau (diamagnétiques) formées dans un champ magnétique intense; la vitesse de chute d'une goutte d'une solution magnétique est, au contraire, diminuée, — M. H. Gaudechon à déter- miné, par trois séries de cycles, la chaleur de forma- tion de la base ammonio-mercurique à parlir de ses éléments; elle est égale à — 75,5 cal. La base est donc nettement endothermique. — MM. P. Lebeau et P. Damoiseau ont reconnu que la réaction réversible de MM. Ruff et Geisel : 108 16AZH° 77 Az'S'— 6{(AzH'}S ne se produit pas à l'état de siccité parfaite; ce n’est qu'en présence d’une trace d'eau qu'il se forme un peu de sulfure d'ammonium et de sulfure d'azote aux dépens du sulfammonium. — M. de Forcrand à pré- paré l’oxyde de lithium anhydre par dissociation du carbonate dans un courant d'H à 7S0°-S00°. La chaleur de dissolution de L®0 anhydre est de + 31,2 cal. — M. Ed. Defacqz, par l'action du siliciure de cuivre à 50 °/, de Si sur le molybdène amorphe au four élec- rique, à obtenu un siliciure de molybdène SrMo. — M. A. Recoura décrit deux nouvelles variétés du sul- fate ferrique : l'uae anhydre, jaune brun clair, obtenue par déshydratation à 175° du sulfate hydraté blanc; l'autre hydratée, jaune-brun, Fe°0*#,3S0%.3H20, obtenue par déshydratation à 100° du sulfate hydraté blane. — M. M. Guichard, par action de HI liquélié sur le chlo- rure cuivrique sec, à obtenu un mélange d'iodure cuivreux et diode libre. — M. F. Ducelliez à retiré des alliages de cobalt et d'étain, préparés par fusion des composants, une combinaison CoSn, d — 7,615. — M. A. Lancien, par action du molybdate d'ammonium sur l'azotate d'uranyle, a obtenu un précipité de molybdate d'uranyle, MoO'.Ur0*, poudre blanche, devenant jaune d'or au soleil, — M. L. Henry montre que l'hydratation de l'épichlorhydrine sous l'influence de l'acide sulfu- rique est un phénomène d'ordre général, qui se passe avec tous les oxydes éthyléniques continus renfermant le groupe : >C—C< f / 0 et fournit les glycols éthyléniques correspondants. — MM. F. Bodroux el F. Taboury ont fait réagir les éthers-sels d'acides gras æiodés sur l'iodure de phényl- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES amine-magnésium et d'o-toluidine-magnésium; on obtient les iodacylanilides et iodacyl-0-toluidides cor respondants. — MM. E. Jungfleisch et H. Leroux ont retiré de la gutta-percha léther cinnamique d'un alcool, le lupéol, dont la formule est C#’4°°0 et qui fond à 190-1920, Il se déshydrate par la chaleur en donnant un hydrocarbure, le lupéylène, F.212°. — M. Ph. Bar- bier, en traitant par NaOH un mélange équimoléculaire de lémonal et de propanal en solution hydroalcoolique, a obtenu un produit huileux qui, traité par H£SO#, fournit deux cyclolémonylidène-propénals, aldéhydes à odeur intense de violette. MM. G. Bertrand el W. Mutermiclh ont constaté que la coloration du pain bis résulte de deux actions diastasiques différentes, la première mettant en liberté un chromogène incolore ayant les caractères de la tyrosine, qui est ensuite oxydé dans la seconde. — M. A. Trillat a reconnu que la formation du dépôt de la matière colorante rouge du vin n'est pas due simplement à l'oxydation par l'oxr- gène, mais à la présence d’aldéhydes dans le vin qui la précipitent. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. L. Lapicque à vérilié, pour divers Mammifères et Oiseaux, la loi de Dubois sur le rapport entre le poids de l'encéphale et le poids du corps. — M. G. Arthaud montre que la capacité pulmonaire, chez l'homme, est exprimée par le rap- port entre le pouls et la respiration. A l’état normal, ce rapport est en moyenne voisin de 5; la fièvre a toujours pour effet de l’augmenter au-dessus de” la moyenne. — MM. J. Gautrelet et H. Gravellat ont constaté que les matières colorantes, ingérées par l'homme, sont soit inactives, soit actives, en réduisant, les échanges nutritifs et l'activité sécrétoire du rein. Elles sont éliminées soit en nature, soit sous forme de chromogène, soit sous forme de sulfo-conjugués. — M. L. Boutan a reconnu qu'il existe, chez le Gibbon à barbe blanche (//ylobates leucogenys), un type noir à favoris blanes et un type jaune doré sans favoris blanes, qui avaient été considérés jusqu'ici comme deux espèces différentes. — M. C. Viguier a recueilli sur la côte d'Algérie deux larves d'Hésonien dont le corps, bien développé, ne présentait aucune trace d'adaptation à la vie pélagique; seule, la persistance de la couronne lar= vaire leur permettait de vivre avec le plankton de haute mer. — M. Ch. Gravier a observé l'association d'un Alcyonnaire avec des algues unicellulaires; l’algue parasite l'animal dans la première partie de son évolu= üon et lui assure en grande partie son alimentation durant la seconde. — M. L. Roule montre que Ka valeur morphologique des épines du polypier des Anti= pathaires est celle de branches abortives. — M. L: Daniel, par l'emploi rationnel de la greffe et des opé- rations d'horticulture provoquant un déséquilibre de nutrition convenable, à obtenu non seulement des monstruosités dans le genre Rosier, mais encore des variétés nouvelles, modiliées dans leur forme ou leur coloris. — M. L. Dufour à constaté que, dans le genre Achillea, avant de produire ses feuilles définitives, une espèce à feuilles très divisées donne naissance à toute une série de ces organes dont la complication va croissant progressivement. — MM. H. Jumelle et H. Perrier de la Bathie ont observé que les termites de Madagascar forment, avec des débris végétaux divers finement brovés, des meules sur lesquelles se déve= loppe le mycélium blanc d'un champignon qui parait être un Oedocephalum. — M. A. Lacroix a trouvé, dans les fumerolles à haute température de la dernière éruption du Vésuve, un minéral nouveau, qu'il nomme palmiérite et dont la composition se rapproche de la F : î « agé os Lt go ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 601 — M. E.-A. Martel signale l'existence, dans le fond de la mer, de gouffres qui engloutissent de grandes quantités d’eau sa ilée, laquelle pourrait jouer un rôle dans les phénomènes du volca- nisme. formule SO'K.Na)°.SO‘Pb. Séance du 1‘" Juillet 1907. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Humbert pré- sente quelques formules nouvelles relatives aux nom- bres de classes des formes quadratiques. — M. Eug. Fabry communique ses recherches sur les courbes al- sébriques à torsion constante. — M. P. Boutroux élu- die les intégrales de l'équation différentielle y'Æ A, 3° Æ À, j°— — 0. — M. J. Boussinesq présente une théo- rie approchée de l'écoulement sur un déversoir vertical en mince paroi, sans contraction latérale et à napne noyée en dessous. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. M. Hamy : Sur un méca- nisme permettant de maintenir un train de prismes rigoureusement au minimum de déviation (voir p.603). — M. L. Bloch a constaté que l'air, après barbotage dans l’eau, est non seulement électrisé, mais ionisé ; les ions produits n'ont pas tous la même mobilité; il y a surtout des petits ions très mobiles. — M. G.-D. Hin- richs, en calculant le poids atomique absolu du chlore par sa méthode, d'après les récentes synthèses de AgCI par M. Th. W. Richards, arrive à la valeur exacte CI = 35,5, l'argent étant exactement égal à 108. — M. D. Berthelot, en appliquant la méthode des den- sités-limites aux gaz Az°0, AzO el Az°, lrouve pour poids atomique de l'azote les valeurs 13,999, 14,006 el 14,008, dont la moyenne est de 14,005. — M. J. Guin- chant à déterminé la chaleur latente de fusion de l'io- dure mercurique à 2500 (9,79 cal.) ; on en déduit pour sa constante cryoscopique la valeur 556. Les valeurs ex- périmentales se confondent pratiquement avec la va- leur théorique. — MM. A. Leduc el Labrouste mon- trent que l'argent libéré par électrolyse sous un voltage suflisant se conduit comme un métal alealin, c'est-à- dire réagit sur Peau pour donner naissance à un oxyde qui se dissout, en totalité où en partie, à l'état d'oxyde basique AgOH. — MM. C. Marie el A. Lucas propo- sent de déterminer l'acide phosphoreux en solution de carbonate de potasse par le permanganate; le précipité de bioxyde brun est dissous dans le sel de Mohr acide el on détermine l'excès de sel ferreux par le perman- sinate: — M. F. Bourion, en faisant réagir le chlore t le chlorure de soufre simultanément sur les oxydes A bienueasee Zr0, le chlorure ZrCl;avec GPO, le chlorure GICF ; avec.les terres jares, des chlorures MeCF. — M. L. Henry, en faisant réagir le méthylbro- mure de Mg sur l'oxyde d° isobutylène, a réalisé la syn- thèse de l'alcool isoamylique secondaire (CH°)}2CH.CHOI. CH, F. 1139-1140. — MM. P. Sabatier et A. Mailhe, en hydrogénant les anhydrides d'acides forméniques par un courant d'H sur le nickel réduit, ont obtenu, d'une facon générale, l'aldéhyde et l'acide correspondants. — MM. E. Jungfleisch el M. Godchot, par l'action du gly- colate d’éthyle iodé sur le monochloracétate d'éthyle, ont obtenu léther diglycolique C?H°CO?.CHE.0.CIF. CO?C?H°, Eb. 1299-1309 sous 20 mm. ; ses homologues se préparent par des réactions identiques. — MM. E.-E. Blaise et M. Maire, en faisant réagir les chlorures des acides-alcools acétylés sur les dérivés organomé- talliques mixtes du zinc, ont obtenu des cétones £- acétoxylées, dont la saponilication fournit les cétones non saturées a5-acycliques. — M. L. Barthe a préparé quelques nouveaux dérivés bromés de la pyridine : CIISAzZ.HBr; C'H°AzBr5, F.890-900 : C5H‘AzBr, F.212°. — M. G. Blanc, en faisant réagir les éthers y-bromés du type (CH*®CI.CH(CH=.COR).CH?Br sur les éthers cyanacétique, malonique et méthylmalonique, a ob- tenu des acides cyclopropane- carboniques. — MM. A Fernbach el J. Wolf ont constaté qu'avec d'orge, dans des conditions convenables de tempéra- ture et de milieu, on arrive à transformer en mallose, comme avec l'extrait de malt, les dextrines les plus l'extrait. résistantes. — C. Gerber: La présure des Cruci- fères (voir p. 103. 3° SCIENCES NATURELLES. M. Dastre présente, au nom d'une Commission nommée par l'Académie, un Rapport qui conclut ainsi: Les empreintes digitales considérées chez un même individu sont immuables depuis le plus bas âge jusqu'à la vieillesse la plus avan- cée. EHes diffèrent d'un doigt à l’autre, d'un individu à l'autre. La concordance des empreintes digitales des dix doigts, examinées dans leur forme générale el dans les six espèces de particularités qu'on y distin- eue, constitue une presque certitude d'identité ; la chance d'erreur serait au-dessous de 1 sur 6% mil- liards. La concordance des empreintes de plusieurs doigts ou même d'un seul constitue encore une pré- somptlion d'identité extrémement forte. La considéra- tion des empreintes digitales {dactyloscopie) suffit à l'établissement d'un catalogue méthodique d'identifica- tion; ce système tend € haque jour davantage à se sub- stituer à la mensuration anthropométrique. — M. L. Lortet à lrouvé, dans une tombe préhistorique égvp- tienne, un crâne de jeune femme présentant des alté- rations osseuses qi Semblent incontestablement de nature syphilitique. — MM. A. Laveran ct Thiroux ont constaté que lextrait de rate n'a pas de propriété S trypanolytiques za vitro; les trypanosomes pris dans la rate pendant la vie ou aussitôt après la mort ont le même aspect que ceux qui ont élé recueillis dans le sang de la grande circulation. Chez les animaux dé- ratés, l'évolution des trypanosomiases n’est pas sensi- blement modifiée. — M. P. Ferrier estime quil existe une époque variable de la vie où certains organismes ont besoin de perdre de la chaux. On y arrive par les limonades à acides inorganiques où organiques, les sulfates de soude ou de magnésie, ete. — M. C. Fleig a reconnu que les sérums de composition saline voi- sine de celle du sang troublent beaucoup moins que l'eau salée simple la constitution humorale de l'orga- nisme ; ils aident, au contraire, au maintien de celle- ci et réalisent d'excellents milieux nutritifs. — M. J. de Loverdo montre que, pour préserver les amandes des atteintes du Paralipsa gularis, il convient de 1 s garder en hiver dans des magasins exposés au nord € propres, et de les introduire en mars dans des cham- bres froides maintenues à une température voisine de 0°, — M. P. Mola à éludié les organes génilaux du l'ænia nigropunetata el, en particulier, l'organe para- utérin. — MM. L. Léger el E. Hesse ont découvert une nouvelle Myxosporidie parasite de la sardine, qu'ils nomment Coccomyxa Morovi. — M. R. Chudeau étudie quelques roc hes riches en alcalis qu'il à rap- portées du Sahara central. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 2? Juillet 1907 M. Bar est élu membre titulaire dans la Section d'Accouchements. — M. H. Vincent présente Îles Rapports sur les concours pour les Prix Buisson et Alva- renga, et M. Hallopeau celui sur le concours pour le Prix Ricord. — M. Em. Vidal a étudié, d'après une statistique décennale (1896-1905), ea causes de la mor- talité des enfants protégés par la loi Roussel dans le département du Var. Sur #.922 nourrissons de un jour à deux ans protégés par la loi, il y a eu 637 décès; cette mortalité est bien inférieure à celle des enfants restés sous la surveillance paternelle. Comme causes des décès, 33 °/, sont attribuables aux maladies de lencé- phi ile, 260/,aux maladies des voies digestives, 24 °/, aux maladies des voies respiratoires, 7 °/, aux maladies éruptives, #4 /, à lhérédo-syphilis, #°/, à lhémorragie, à la faiblesse congénitale, ete., et 27/4 à la septicémie, tuberculose généralisée, anasarque. — M. Meillère lit un Mémoire intitulé: Contribution apportée par les recherches chimiques à l'étude du salurnisme. — M. Rosenthal donne lecture d'un travail sur l'adap- tation à la vie aérienne (aérobisation) des microbes ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 602 anaérobies stricts. — M. le D' Couteaud présente un Mémoire sur un mélange anesthésique local à la coca- stovaine. — M. le D' Didsbury lit un travail sur le traitement de l’'onychophagie. Séance du 9 Juillet 1907. MM. Widal et Gougerot montrent que l'asepsie des pleurésies puriformes avec polynucléaires intacts chez les pneumoniques et les cardiaques entraine un pro- nostice remarquablement bénin. Ces épanchements puriformes aseptiques sont commandés par une con- gestion sous-jacente ; ils disparaissent au bout de quelques jours. — M. Em. Vidal à étudié la mortalité des enfants protégés par la loi Roussel et les causes de cette mortalité dans le canton d'Hyères (Var) de 1883 à 1905. Sur 1.143 nourrissons inscrits, il y a eu 64 décès, soit 6,04 °/, (ce pourcentage s'abaissant jusqu'à 2,8 °/, pour la commune de Carqueiranne). Les causes des décès ont été: maladies de l'encéphale, 24 décès; enté- rite, 18: maladies éruptives, 7; choléra infantile, 5: maladies des voies respiratoires, 5; athrepsie, 2; diph- térie, 4; hérédo-syphilis, 4; hernie étranglée, 1. Les enfants décédés ont été, en moyenne, placés plus tard en nourrice que les autres; la saison la plus dange- reuse à traverser pour les enfants est celle du 1°° avril au 30 septembre, qui donne 50 décès, alors que le reste de l’année n’en donne que 14 — M. H. Hallopeau signale plusieurs’ cas de troubles visuels, pouvant aller jusqu'à la cécité, consécutifs à l'administration de l'atoxyl. Il y a donc lieu d'employer ce médicament avec prudence, soit dans la syphilis, soit dans les try- panosomiases. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 22 Juin 1907. MM. H. Labbé et G. Vitry ont constaté que l'indican persiste dans l'urine pendant toute la durée du jeûne Jusqu'à la mort, et que son excrétion varie dans le même sens que l'azote total. — MM. J. Courmont et Lesieur ont observé que le bacille de Koch peut traverser la peau du cobaye, du veau et du lapin, même en appa- rence intacte; il traverse presque toujours la peau rasée ou épilée. Il peut créer des lésions cutanées locales (sortes de lupus) où produire une infection plus ou moins généralisée (du genre de la scrofule). — M. E. Guyénot à étudié l'action du pneumogastrique sur le cœur des Batraciens. — M. J. Nageotte signale l'exis- tence de formations graisseuses dans les cellules satel- lites des ganglions rachidiens greffés; elle est liée à la résorption des cellules nerveuses mortes. — Mie A. Drzewina et M. G. Bohn ont étudié l'influence du chlorure de lithium sur les embryons de ana tempo- raria déjà éclos. Dans certaines solutions, la tension osmotique intervient pour contrecarrer l’action toxique du sel. — Mi $. Frison et M. M. Nicloux ont conslaté que la substance blanche du cerveau a fixé beaucoup plus de chloroforme que la substance grise au moment de la mort par cet anesthésique. — M. P. Wintrebert montre que le manque de respiration aérienne chez les Batraciens anoures ne met pas obstacle à la métamor- phose, mais relarde son début. Le défaut d'usage des poumons n'empêche pas leur développement de s'effec- tuer au même degré que chez les tétards normaux. — M. Et. Burnet à provoqué la réaction cutanée de von Pirket sur plusieurs sujets qui ne présentaient aucun symptôme de tuberculose. — M.A. Lesage est parvenu à cultiver l’£Entamoeba, parasite de la dysenterie ami- bienne, dans l'exsudat leucocytaire de cobaye. L'amibe ainsi cultivée reproduit la maladie. — M. P. Ravaut à obtenu une anesthésie chirurgicale limitée à la région génito-périnéo-anale par l'injection intra-rachidienne de solutions concentrées de cocaïne ou de stovaïne en quantité minime. — MM. M. Loeper et P. Boveri montrent que l'excès de chaux alimentaire chez le lapin détermine une calcification artérielle intense. — M. Noica à constaté que l'excitation du même nerf, le sciatique poplité interne, produit des effets très diffé- rents suivant que son antagoniste fonctionnel, le nerf sciatique poplité externe, est sectionné ou non. — M. A. Marie a reconnu le fait suivant : que la toxine téftanique soit introduite dans la circulation générale ou bien au contact des centres nerveux, ceux-ci ne paraissent pas susceptibles de s’'accoutumer au poison; ils ne deviennent pas non plus hypersensibles. — M. J. Tur montre qu'on ne saurait attribuer les pro- cessus tératogéniques chez les Oiseaux à l’action méca- nique exercée par la coquille sur les embryons. — M. M. Letulle à pratiqué l’ophtalmo-réaction à la tuberculine sur 39 hommes et 27 femmes considérés comme nettement tuberculeux: sur ces 66 personnes, 63 ont donné une réaction positive et 3 une réaclion négative. — MM. J. P. Langlois et L. Garrelon ont observé que, chez l'animal en état de polypnée ther- mique centrale, l'hypertension artérielle accélère la polypnée, tandis que l'hypotension la diminue. — M. F. Arloing n'a pu constater une réaction cutanée précise et spécifique, sous l'influence de la tuberculine, chez les animaux tuberculeux. — M. Al. Carrel a transplanté des segments carotidiens ayant subi de graves lésions pendant leur séjour au réfrigérateur. Ces lésions ont évolué d’une manière fatale dans les cas d'hétérotransplantation, tandis qu'elles ont guéri dans les cas d’homotransplantation. — M. L. Launoy montre que le citrate de soude retarde notablement le processus de la nécrose autolytique du foie; il s'oppose à l’action accélératrice de CaCFË. — M. Lafforgue a reconnu que les cultures homogènes de B.mesentericus présentent une disparition très précoce des matières albuminoïdes et une augmentation considérable de l'alcalinité, — MM. E. Maurel et Lemosy d'Orel ont étudié l'influence de la voie d'administration sur les doses minima mortelles de bromhydrate neutre de quinine chez la grenouille, le pigeon et le lapin — M. P. Carnot signale la présence de substances hépa- topoiïétiques au cours des régénérations du foie et de son développement embryonnaire. Séance du 29 Juin 1907. M. Pariset montre qu'il est nécessaire d'employer, pour l'application des bains de lumière, des thermo- mètres à cuvette enduite de noir de fumée, les ther- momètres à cuvette polie indiquant des températures trop basses. — MM. A. Marie el M. Tiffeneau ont constaté que la papaine met en liberté la toxine téta- nique fixée par la substance nerveuse, mais elle n'a pas d'action préventive sur sa fixation. — M. O. Josué a reconnu que la calcification ne constitue pas la lésion primordiale de l’athérome artériel ; c’est un processus de défense des artères contre les altérations dégénéra- tives. M. E. Guyénot estime qu'une part des varia- tious observées dans l’action des nerfs vagues sur le cœur des Batraciens revient à l’état des cellules gan- glionnaires du cœur, plus où moins riches en réserves. — M. À. Lesage à reproduit l’amibiase chez le jeune chat, par inoculation sous la peau ou injection dans la gueule de mucuslintestinal amibien ; l'infection est générale et toujours mortelle. — M. H. Vincent montre que, dans l'infection tétanique favorisée par l'hyper- thermie, le sérum antitétanique n'est réellement .efti- cace que si son intervention précède d'au moins une heure la pénétration des spores pathogènes. M. Lafforgue altribue l'augmentation du pouvoir oxy- dant des cultures homogènes du /. mesenterieus à la présence de dérivés des matières albuminoïdes décom- posées par le bacille. — MM. J. Giaja et M. Gompel ont constaté que le suc digestif de l'écrevisse hydrolyse le lactose, le raffinose, l’amidon, le maltose el plu- sieurs glucosides; il est sans action sur le myronate de polasse. — MM. C. Fleig et M. Lisbonne ont reconnu l'existence d'une précipitine spécifique, d'une part dans le sérum d’un individu atteint de kyste hydatique, d'autre part dans celui des animaux préparés par des injections de produits hydatiques. — MM. Foix el lea... < ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 603 Mallein sont parvenus à accélérer la coloration du spirochète par le réactif de Giemsa en faisant passer un courant électrique dans la solution colorante. — MM. Brissaud et Bauer apportent de nouvelles recher- ches contraires à la théorie de l'indépendance des lobes du foie. — MM. H. Iscovesco el A. Matza mon- trent qu'un sac de collodion contenant une solution de NaCI et plongeant dans l'eau distillée crée autour de lui un milieu à concentration saline supérieure à celle du milieu qui se trouve à son intérieur ; ce phénomène est transitoire. — M. J. Renaut à constaté que, lors- qu'un vaisseau possède un périépithélium formé d'une seule assise de cellules, ces cellules sont toujours des rhagiocrines clasmatocytiformes, exerçant une double activité, glandulaire et phagocylaire, intense. — MM. A. Jousset el J. Troisier ont étudié les sérosités lac- tescentes à l’aide du Soudan HI, réactif chromatique spécifique des graisses, et ont reconnu que les fines particules émulsionnées dans ces liquides sont géné- ralement de nature grasse. — MM. Lesné el Dreyfus ont isolé d'un abeès inguinal d'allure chronique un bacille très mobile, se rapprochant des paratyphiques. — M. A. Guieysse montre que les plateaux en brosse des cellules de l'intestin moyen se colorent élective- ment par le vert lumière dans la triple coloration de Prenant, — MM. L. Fortineau et Soubrane ont observé que le Bacillus proteus ruber, isolé des eaux de la Loire, présente un polymorphisme curieux suivant l'âge, le milieu et la température. — M. F. Arloirpg. en essayant la cuti-réaction au moyen de diverses tuberculines, n'a jamais obtenu de réaction spécifique nelte chez les individus tuberculeux. — M. N. Bassin cherche à montrer qu'il n'existe pas de tétanos du cœur et que les contractions cardiaques ne sont jamais plus grandes que les pulsations simples maximales. — M. V. Pachon rappelle qu'il a prouvé que la vératrine imprime à la pulsation du cœur isolé de lapin un caractère franchement tétanique. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Scaace du 18 Juin 1907. M. C. Gerber à étudié la présure des Crucifères; elle coagule le lait boujlli plus facilement que le lait cru. Le suc du Figuier (sycochymase) se comporte vis-à-vis du lait, aux températures élevées, comme la présure des Crucifères. — Le même auteur montre, d'autre part, qu'il existe, dans le lait cru, deux actions anti- présurantes, disparaissant lune à la température de coagulation de la sérumglobuline, l’autre à la tempéra- ture de coagulation de la sérumalbumine.— M.A.Briot ù constaté que le barbotage avec CO® rend le lait, cru ou bouilli, beaucoup plus sensible à l'action du lab- ferment accompagnant la pepsine (parachymosine). On peut facilement préparer, par injection aux ani- Maux, un anticorps de la parachymosine. -— M. A. Billet à observé un cas de dysenterie nostras non bacillaire avec £Zntamoeba coli. — M.Ch. Livon établit que le rôle de l'hypophyse est un rôle chimique, dû aux produits de sa sécrétion interne, et qu'il n'a pas de rôle mécanique spécial. — M. Alezais à remarqué chez un jeune lapin un développement anormal des quatre incisives, tenant à leur non-concordance résul- tant de la position vicieuse des inférieures. SOCIETE FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 21 Juin 1907. M. de Broglie : Sur les centres neutres des qaz issus des flammes. L'auteur rappelle que M. Langevin, dans deux communications à la Société de Physique, le 19 mai et le 2 juin 1905, a signalé dans l’air atmo- sphérique la présence d'ions de faible mobilité, auxquels il a donné le nom de gros 1ons, en indiquant qu'ils pouvaient résulter de l'union d'une masse matérielle neutre et d’un ion analogue à ceux des rayons de Rôüntgen, ce qui conduirait à formuler une théorie approchée de l'équilibre auquel on doit arriver quand un gaz, renfermant un nombre M de gros centres neutres par centimètre cube, se trouve soumis à une radiation qui y maintient des nombres p et n de petits ions positifs et négatifs par centimètre cube. Si P et N sont les nombres des gros centres chargés positifs et négatifs, on doit avoir au moment de l'équilibre : A[M—(P+N)]p = BPn + aPN, A'IM—(P+N)}jn= B'Np+a!PN; a et 2, coeflicients liés à la recombinaison des gros ions entre eux, étant très petits devant Ba et B'p, sont négligeables; si, de plus, on suppose p—n, comme c’est le cas pour les ions des rayons de Rüntgen, on obtient deux équations à deux inconnues qui peuvent donner P/M et N/M en fonction des coeflicients A, A’, B, B' : on en déduit que P et N sont indépendants de pet n si ces derniers sont assez grands, et que P et N ne seront qu'une fraction assez faible de M (l'ordre de 1/10). Les gaz conducteurs pourraient donc renfermer sunultanément des centres chargés et d’autres non chargés. Pour les gaz de flamme, on trouve les résultats suivants : En dépouillant le gaz, au moyen d'un con- densateur à capacité suffisante, de tous ses ions chargés, on constate que le gaz restant contient un nombre considérable (107 au moins par centimètre cube, si chaque centre ne porte que la charge atomique) de centres jouissant des propriétés suivantes : 4° Ils sont susceptibles de se charger sous l'influence des radia- tions du radium ou des rayons de Rôntgen, en se trans- formant en centres chargés de faible mobilité ana- logues aux gros ions; 2° Ces centres sont arrêtés par un filtre en coton ordinaire et détruits par la chaleur; ils disparaissent spontanément au bout de quelque temps; 3° Le gaz qui les contient acquiert, par barbo- tage dans des solutions salines étendues, une ionisa- tion très supérieure à celle qu'il recoit quand il en est privé. Cette dernière propriété est particulièrement intéressante ; on sait, en effet, que, si l’on fait barboter de l'air dans une solution étendue ou dans l’eau presque pure, le gaz renferme, à sa sortie, des centres chargés de mobilités très variées, mais qui descendent jusqu'à la valeur de celle trouvée pour les gros ions. Le mécanisme du barbotage fournit donc des charges et des agglomérations matérielles dont l'union con- stilue des gros ions. L'expérience montre que, dans ce cas, tous les centres sont chargés. Si l'on expose alors aux radiations du radium le gaz chargé de ces ions de’ barbotage, on constate que la conductibilité tombe à une faible fraction de sa valeur, au 1/6 ou au 1/10 suivant les cas, comme si le remaniement des charges, que produit l’action du radium, replacait le gaz dans les conditions d'équilibre précédemment étudiées, où la portion chargée ne doit être qu'une partie relativement faible du nombre total des gros centres précédents. Certains liquides, comme la benzine, le toluène, ne donnent que peu ou pas d'ionisation par barbotage. On peut constater, de mème que précédemment, que les gaz sortant du barboteur contiennent alors seulement des centres neutres :.il faut pour cela qu'il y ait barbo- tage, l'air seulement chargé de la vapeur du liquide ne contenant pas de gros centres. — M. M. Hamy présente un mécanisme pour maintenir un train de prismes rigoureusement au minimum de déviation. Le fonc- tionnement de cet appareil repose sur les remarques suivantes : On considère, dans un plan, trois bielles AB, BC, CD, articulées en B et C. On cale, sur la bielle AB, une roue centrée en B, engrenant avec une seconde roue, centrée en C, calée elle-même sur la bielle CD. Les angles B et C varient de la même quantité, quand on déforme le système, si les roues sont égales (on le reconnait immédiatement en considérant le mouve- ment relatif par rapport à BC). Ces angles restent donc constamment égaux pendant le mouvement, s'ils le sont au départ. Si les deux roues sont inégales et que la roue de centre C possède 2 fois plus de dents que 604 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES la roue de centre B, l'angle G varie de «/n quand l'angle B varie de +. En particulier, les variations de l'angle C sont la moitié de celles de l'angle B, lorsque la roue, calée sur CD, possède deux fois plus de dents que la roue calée sur AB. M. Hamy, en s'appuyant sur ees considérations, montre comment, en reliant, deux à deux, par des roues d'engrenage, les plates-formes d'un train de prismes, on peut maintenir ce train au minimum de déviation, notamment dans le cas des spectroscopes autocollimateurs. — M. Victor Henri présente, au nom de M. François-Franck, une série de microphotographies en couleurs, obtenues sur les plaques autochromes de Lumière. Ainsi que le montrent les photographies projetées, on peut utiliser très avantageusement ces plaques pour la microphoto- graphie, aussi bien en lumière ordinaire qu'en lumière polarisée. Une question très importante est le temps de pose; avec un éclairage à arc de 15 à 18 ampères, ce temps de pose varie de deux à vingt-cinq secondes suivant les grossissements employés. Toutes ces pho- tographies microscopiques en couleurs ont été faites au laboratoire de M. Francois-Franck, avec le concours de M'e Chevreton. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 14 Juin 1907. M. P. Freundler expose ses essais de dédoublement en lumière polarisée circulairement. Des tentatives du même ordre ont été effectuées par M. Cotton, avec un résultat négatif; d'autre part, M. Byk, guidé par des considérations théoriques, à considéré la question comme résolue affirmativement, et il en à déduit une théorie de la genèse originelle des composés naturels actifs. M. Freundler a exposé, pendant plus de quatre cents heures, à l’action de la lumière polarisée droite, une solution d'acétal amylique racémique de l'aldé- hyde o-nitrobenzoïque dans l'alcool amylique racé- mique; dans ces conditions, une partie de l'acétal se transforme en nitrosobenzoate d'amyle, comme la montré M. Ciamician; mais le produit de transforma- tion, aussi bien que l'alcool amylique régénéré, ne possèdent ni l'un, ni l'autre, d'activité optique. Les premiers résultats de M. Freundler semblent donc infirmer les idées de M. Byk; mais de nouvelles expé- riences sont nécessaires pour conclure définitivement. — M. Crafts expose ses recherches sur la catalyse des acides sulfonés. Séance du 28 Juin 1907. M. P. Lebeau fait connaitre le résultat de recherches sur l'action du fluor sur le sélénium. Dans un appareil en cuivre ou en platine, le fluor donne avec le sélénium un tétrafluorure liquide SeF®, Ce com- posé est détruit par l'eau avec un grand dégagement de chaleur. Il fume abondamment à lair et sa vapeur est très toxique. En présence du verre, on obtient de l'hexafluorure mélangé d'une petite quantité d'oxyfluo- rure, L'hexafluorure, déjà signalé par M. Prideaux, est un gaz d’une grande stabilité, comparable à l'hexafluo- rure de soufre. Son analyse a pu être faite en le sou- mettant à l'action d’une température élevée dans des tubes de silice, ou bien encore en le décomposant par le sodammonium. — M. Binet du Jassonneix commu- nique à la Société ses recherches sur la dissolution du chrome à haute température dans le cuivre, et sur la préparation et les propriétés d'une variété très divisée de chrome en mousse. — MM. Gabriel Bertranä el W. Mutermilch ont trouvé que la coloration du pain bis résultait de deux actions diastasiques successives. La première, due à une protéase, donne de la tyrosine aux dépens des matières protéiques du gluten; la seconde, due à une tyrosinase, amène l'oxydation de la tyrosine et la production d'une substance brun noir. Les deux diastases sont contenues dans le son. Elles y sont accompagnées de plusieurs autres, parmi les- quelles de la peroxydiastase. La {yrosinase du son est ses très résistante à la chaleur. — M. A. Granger décrit un procédé d'élimination de l’hyposulfite de sodium après lixage dans les épreuves photographiques, basé sur un traitement avec une solution étendue de per manganate de potassium. On détruit ensuite le per- manganate pouvant rester dans l'épreuve par un traite-= ment à l'acide oxalique en solution étendue. — M. M. Guichard entretient la Société de ses recherches sur l'iodure cuivreux. } SOCIÈTE ROYALE DE LONDRES Séance du T Février 1907 (fn). MM. L. Hill et M. Greenwood ont étudié les phéno- mènes de décompression chez les animaux placés dans. une atmosphère d'oxygène à haute pression, et ils ont reconnu que de l'oxygène libre peut être mis en liberté dans le corps en occasionnant des embolies. L'aspira- tien d'oxygène pur, qui a été recommandée aux sca- phandriers avant la remonte pour débarrasser le corps de l'azote dissous et éviter des embolies gazeuses azo- tées, ne parait pas rationnelle. On doit lui préférer une lente décompression. Séance du 28 Février 1907 (fn). MM. W. R. Dunstan, T. A. Henry et S. J. M. Auld ont étudié les enzymes associées au glucoside cyano génétique (phaséo-lunatine) du lin, du cassava et du haricot de Lima. Ns montrent que ces trois plantes contiennent un mélange de deux enzymes glucosido- lytiques. Ce mélange a la propriété d'hydrolyser l'amygdaline et la salicine, qui sont des glucosides f, el aussi l'z-méthylglucoside et le maltose, qui sont des glucosides «. Or, la phaséolunatine est décomposée à la fois par la maltase de levure et par le mélange d’en- | | zymes des trois plantes, en donnant, dans le premier s, la forme + du dextrose, ce qui conduit à la con- sidérer comme un éther de l’x-dextrose et de l'acéto- cyanhydrine. Si l'on accepte l'hypothèse de Fischer, il en résulte que le lin, le cassava et le haricot de Lima contiennent bien au moins deux enzymes gluco- sidolytiques, l'une du type $ ou de l'émulsine, l'autre du type x où de la maltase, et que c'est cette dernière qui décompose la phaséolunatine. Séance du 18 Avril 1907. M.F.W.Twort : La fermentation des glucosides par les bactéries du groupe du bacille typhique et du coli- bacille, et l'acquisition de nouveaux pouvoirs de fer= mentation par le Bacillus dysenteriæ et d'autres micro organismes : 4° Un grand nombre de glucosiGes peuvent être fermentés par beaucoup de bactéries du groupe du bacille typhique et du coli-bacille. Les fermentations varient avec le micro-organisme mis en expérience, et les variations sont aussi marquées au dedans de chaque sous-groupe de bactéries qu'entre les sous-groupes adjacents; 2 Les pouvoirs de fermen= tation du sucre d'un organisme peuvent être artificiel lement modifiés en cultivant cet organisme pendant une succession de générations dans un milieu conte=n nant un sucre qu'au commencement de l'expérience il était incapable de fermenter. Par ce moyen, un organisme pathogène peut être altéré jusqu'à ce quil donne des réactions fermentatives caractéristiques d'un membre non pathogène de son groupe. Il est pos= sible que les organismes pathogèses du groupe typhis que-coli puissent ainsi changer leurs caractères, de facon à devenir méconnaissables lorsqu'ils se mul plient pendant quelque temps en dehors du corps, dans le sol, l'eau, ete. S'il en est ainsi, cela permet de Sen rendre.compte de la difficulté éprouvée en isolant le“ B. typhosus de ces milieux. Il semble aussi possible qu'un organisme non-pathogène puisse perdre Ses pouvoirs de fermentation et devienne pathogène, s'il trouve un milieu convenable, tel que le canal alimen= taire, et reprenne ses anciens caractères lorsqu'il est hors du corps. C’est une simple hypothèse qui n'a pas ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES été confirmée jusqu'à présent. D'après les résultats obtenus avec le groupe d'organismes Lyphique-coli, il semble tout à fait possible que d’autres organismes puissent présenter des changements identiques, et que les essais de fermentation effectués par Mervyn Gordon pour les streptocoques soient aussi inconslants si les mêmes moyens d'expérimentation sont employés. — M. C.S. Sherrington poursuit ses recherches sur Linnervation réciproque des muscles antagonistes. L'auteur en apporte de nouveaux exemples, pris sur le grand réflexe fléchisseur de la jambe. Dans ce réflexe, les extenseurs de la cheville sont arrêtés concurrem- ment à l'excitation des fléchisseurs de la cheville. Les adducteurs de la hanche sont relâchés par inhibition concurremment avec la contraction réflexe des abduc- teurs, et les rotaleurs externes de la hanche sont relàchés semblablement par inhibition concurremment avec la contraction des rotateurs internes. Séance du 2? Mai 1907. La Société procède à l'élection annuelle de 15 nou- veaux membres; sont élus : MM. F. D. Adams, H. K. Anderson, W. B. Benham, Lord Blythswood, W. H. Brag£g, F.D.Chattaway, A. M. Crossley, A. R. Cush- ny, W. Duddell, F. W. Gamble, J. E. Petavel. H. C. Pocklington, H. M. Ridley, G. E. Smith el W. H. Young M. A. Mallock déduit de ses précédentes recherches une: formule indiquant espace parcouru dans un temps donné par un projectile Se mouvant dans l'air. La dis- tance $ parcourue par le projectile dans le es l'est Uo SMEE { —e CU: restante est donnée par à + user, Dans ces for- rules, v'= 850, pieds par Te lo —= vilesse ini- tiale — v'; à est un coefficient de résistance égal à S1,3/9/, où £ est le poids par unité de volume de la substance du projectile et /la longueur équivalente du projectile. Les résultats obtenus par cette formule con- cordent remarquablement avec l'expérience, — MM. C. H. Lees et J. E. Petavel : Sur Ja variation de Ja pression développée pendant l'explosion de ja cordite en vase cles. 4° Comme la plupart des explosifs modernes employés en Balistique suivent la loi de combustion par surfaces parallèles, il semble, d'après les résultats obtenus, que leurs propriétés peuvent être définies par quatre constantes pouvant être déterminées sans difficulté par lexpérience directe; 2° Les cons- lantes » et ec fixent la pression maximum qui sera atteinte sous une densité de charge donnée quelconque. Les constantes 4, el à mesurent la vitesse de la com- bustion et déterminent le temps qui sécoule entre l'ignition de la charge et le développement de la pres- sion maximum; 3° Quand l'explosif est mis sous forme cylindrique, le temps pris par une explosion, pour la mème densité gr avimé trique, est proportionnel au dia- mètre du cylindre; 4° La vitesse de l'augmentation de la pression est plus rapide lorsqu'on atteint environ les 2/3 de la pression maximum; 5° La vitesse maximum d'élévation de la pression par seconde est égale approxi- malivement à 4,54 a, multiplié par le carré de la pres- Sion maximum en atmosphères, divisé par le diamètre de la cordite en centimetres: 6° Lorsque l'explosion s'effectue sous une densité gravimétrique élevée, le temps «effectif » de la combustion peut pratiquement ètre considéré comme égal au temps nécessaire si la combustion avait loujours lieu à sa vitesse maximum. Pour la cordite marque 1, ée temps est donné par T — 36D/P, si le diamètre D est mesuré en centimètres et la pression maximum P en atmosphères, ou T — 0,6 D/P, si les unités sont des pouces etdes tonnes par pouce carré. Au cours des recherches, l'effet réfrigé- rant des parois du récipient pendant la combustion à élé trouvé assez faible pour être négligé. — M. H. A. Miers et M! F. Isaac : La cristallisation spontanée des mélanges binaires. Expériences Sur le salol et le bétol. Les auteurs ont conclu de leurs expériences sur représentée par : la vilesce 605 certains sels qu'une solution sursaturée refroidie ne peut ètre amenée à cristalliser que par imoculation d'un cristal du corps dissous, à moins qu'une tempéra- ture parfaitement définie ne soit atteinte, à laquelle un stimulus mécanique (agitation ou friction) suflit pour produire la cristallisation. La température de cette cristallisation spontanée dépend de la concen- tration de la solution, déterminée par une courbe qu'on nomme courbe de supersolubilité. Les auteurs ont tracé la courbe complète du point de congélation, ainsi que les courbes de supersolubilité, pour des mé- langes en toutes proportions de salol et de bétol, substances qui fondent à des températures conve- nables et ne forment ni composés, ni mélanges iso- morphes. Le salol fond à 42°,5, le bétol à 92°. L'eutec- tique contient 78 °/, de salol et se solidilie à 329,5 par inoculation seulement. Le salol se solidifie spontané- ment à 33°, le bétol à 79°; les courbes de supersolubi- lité de leurs mélanges se rencontrent dans le mélange hypertectique, contenant 74 °/, de salol, et dans lequel les deux substances se solidifient ensemble spontané- ment à 15°. Les expériences montrent qu'un mélange binaire a, en général, quatre points de solidification. Ainsi, le mélange contenant 90 °/, de salol peut donner des cristaux de salol par inoculation à 38°, et par agitation à 280; des cristaux de bétol par inoculation à 17,5 el par agitation à 109,5. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 20 Juin 1907. M. A. T. Cameron et Sir W. Ramsay ont découvert que l'émanalion du radium subit un changement de volume rapide peu après son passage de l'état solide à l'état gazeux; celui-ci est suivi par un changement lent, correspondant avec la perte d'activité électrique. L'émanation obéit à la loi de Boyle ayant et après sa transformation préliminaire. De nouvelles mesures montrent que la durée de vie moyenne du radium n'est pas de 1.100 ans, mais seulement de 236. Le chan- sement de l'émanation fraiche est accompagné par une diminution de moitié de son volume, correspondant peut-être à une polymérisation; ce changement est une réaction uni-moléculaire. L ‘hélium est absorbé par les parois des vases de silice. — M. V. H. Veley à déterminé les constantes d'affinité de certains acides aminonaphtolsulfoniques par la méthode du tinto- mètre. — Mie M. A. Whiteley à constaté que l’action des chlorures de diazonium aromatiques sur les dérivés 5-alkylés de l'acide 1:3-diphénylbarbiturique fournit des dérivés azoïques, tandis que l’action des dérivés &-substitués de la phénylhydrazine sur l'acide 5:5-dibromo-1 :3-diphénylbarbiturique donne des hy- drazones. — MM. G. T. Morgan et W. O. Wootton ont préparé les sels de diazonium de la benzoyl-1 :#- naphthylènediamine, qui sont des corps très stables et tous colorés; ils se copulent avec le S-naphtol pour donner des déri azoïques. La constitution de ces diazoïiques pourrait être expliquée au moyen de la nouvelle formule proposée par Cain : CI. AZ = A7, I | = AZ11" COCHE — MM. J. T. Hewitt et H. V. Mitchell ont observé que les deux acides carboxyliques dérivés du p-nitro- benzène-a20-4-naphtol donnent des solutions alcalines bleu foncé; mais, tandis que l'acide AzO*C‘H'Az: A7. C'°H5(OH)CO*H donne des précipités bruns avec les sels des métaux lourds, Pacide AzO?C'HS(CO*H).AZ: Az. C!HS(OIT) donne des précipités bleus, ce qui provient 606 ACADÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES sans doute de la formation d’un dérivé quinonoïde où le métal'est attaché au groupe nitré : Co.0 C°H° >M. ) OURS N470.07 Az.Az: — M.F. D. Chattavay a constaté que les hydrazines R.AZH.AZ1H®, où R est un groupe cyclique, sont rapide- ment oxydées par ÉOYEFRe libre, la réaction élant accélérée par les alcalis. La réaction est représentée par l'équation R.AzH.AZH° + 0 = RH + Az° + H?0. — M. F. L. Pyman a isolé de l'écorce d'un arbre de l'Afrique occidentale, qui paraît être le Canthium qla- brifolium, un glucoside qu'il nomme calmatambine, de formule CH*0#, 240, fondant à 100° et anhydre à 1440-1450 :[x1 — — 130°,4. Il contient un groupe mé- {hoxyle et donne un dérivé octoacétylé. Il est hydro- lysé par l'émulsine en dextrose et calmatambétine, CH!0*.0,5H°0, F. 1480-1499, one optiquement inactive MM. P. C. Ray et A. C. Ganguli ont reconnu que l'acide hyponitreux, libére d'un de ses sels par un acide dilué, se décompose suivant les deux équations suivantes : 2HA70 — H°0 + A7°0 ;5HAz0 — 2H°0 H HAZO'—+ 4Az. — MM. H. O. Jones et H. A. Wootton ont constaté que le pétrole de Bornéo est con- stitué de quantités à peu près égales d'hydrocarbures homologues des séries de la paraffine, du eyclohexane et aromatique, avec 6 à 7 % de dérivés naphtalé- niques. — MM. A. Senier et P. C. Austin, en conden- sant le bi-iodure de méthylène avec la #-cumidine et l'&-naphtol, ont obtenu la 8:9:11-triméthylphéno- {Aza-CHÉ)-naphlacridine, F. 4629,5; avec le f-naphtol, il se produit la 8:9:11-triméthylphéno-(A76 — CHa)- naphtacridine, F. 137%. Par l’action des aldéhydes sur un mélange de naphtol et de naphtylamine, on obtient des dinaphtacridines des types (D) et (I) : GAZ 10 B—Arz— (1) | (I) | Ê—CH—$ — MM. W. R. Lang el T. B. Allen décrivent un appa- reil perfectionné pour la détermination rapide des sulfates et des sels de baryum. La solution contenant le sulfate de Ba précipité est refoulée par une poire à air dans un tube étroit où elle s'éclaircit; l'addition d'une goutte de réactif produit un trouble très visible tant que la réaction n’est pas terminée. — Les auteurs emploient le même appareil à la détermination du dextrose par la solution d Fehling. — MM. AI. Me Kenzie et H. Wren ont réalisé la synthèse asymé- trique de l'acide /-tartrique par trois moyens : 1° oxy- dation du fumarate de /-bornyle en solution acétique glaciale par le permanganate ; 2° oxydation du sel de K du fumarate acide de /bornyle en solution aqueuse par le permanganate; 3° oxydation du fumarate de I-menthyle. La synthèse asymétrique de l'acide d-tar- trique a été réalisée par l'oxydation du sel de K du fumarate acide de d-bornyle. — MM. N. Lees et J. H. Thorpe ont préparé des dérivés de la 2-phényl-1:3- naphtylènediamine. Le groupe aminé & étant le plus basique, c'est lui qui réagit le premier dans la salifica- tion, la diazotation et l’acétylation. Si on le protège par l'acétylation, il se forme alors des dérivés du groupe aminé &. SOCIETÉ ANGLAISE INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE LONDRES Mai 1907. M. O. Guttmann étudie quelques-uns des problèmes de l'art de l'ingénieur qui se présentent constam- ment dans les nsines chimiques, et il estime que la solution de ces problèmes contribue autant, si ce n'est plus, au développement des industries chimiques que les découvertes chimiques proprement dites. Scance du 6 Séance du 3 Juin 1907. M. W. H. Rawles présente un calorimètre simple pour les combustibles liquides volatils, spécialement adapté au pétrole. C'est une modification de l'appareil de Darling, où la plupart des causes d'erreur ont été éliminées. — MM. W. P. Dreaper et A. Wilson ont étudié l'influence de la température de teinture sur la fixation de la couleur et sa remise en solution. De la soie a été teinte par un colorant acide, le rouge d'an- thracène 3 B, à des températures variant de 18° à 90° C., puis traitée par une solution à 1 °/, de savon à 55° C. ou extraite par l'alcool à 18, 55 et 782. La quantité de colorant qui reste sur la fibre est d'autant plus élevée que la teinture à eu lieu à une plus haute température. — M.J. K. H. Inglis poursuit l'étude des pertes d'azote nitrique dans le procédé des chambres de plomb. Il arrive aux conclusions suivantes : 4° La perte d’'Az sous forme d'oxyde nitreux est très faible, et moindre que 10 °/, de la perte totale; 2° Une portion considérable d’Az est perdue sous forme de peroxyde d'azote et d'oxyde nitrique, les proportions relatives de ces de ux substances dépendant de l’'échappement de SO?; 30 Il y a une réduction possible en azote. Il est UE que les pertes à l’état d'oxyde nitrique et d'oxydes supérieurs pourraient être abaissées si les chambres étaient disposées de telle facon que les der- nières traces de SO? disparaissent juste avant que les gaz quittent la tour de Gay-Lussac. : SECTION DE NEWCASTLE Séance du 21 Mars 1907. M. À. Short présente ses recherches sur la carboni- sation de la houille à coke de Durham. L'analyse des gaz à diverses périodes de la carbonisation montre que, à mesure que la carbonisation procède, H, Az et CO augmentent, tandis que CH*et AzH5 diminuent, cette dernière jusqu'à devenir pratiquement nulle au bout de 26 h. L'azote de la houille se répartit comme suil: 43, 41 °/, daus le coke, 2,98 °/, dans le goudron, 16,99 °/, dans les liqueurs (dont 15,16 °/, comme AzH* et 1.43 °/, comme [CAz/!) et 37,12 °/, dans le gaz d'éclai- rage. Le soufre se distribue ainsi : 72,53 Û /, dans le coke, 1,45 °/, dans le goudron, 19,71 °/, dans le gaz et 6,01 °/, dans les liqueurs. SECTION DE LA NOUVELLE-ANGLETERRE Séance du 4° Mars 1907. MM. Ch. R. Sanger et J. A. Gibson ont reconnu que de petites quantités d'antimoine en solution peu- vent être réduites complètement, au point de vue pra- tique, en hydrogène antimonié, et que celui-ci, chauffé dans un tube, dépose l’antimoine sous une forme qui permet de le déterminer par comparaison avec des miroirs d'antimoine témoins. SECTION DE NEW-YORK Séance du 19 Avril 1907. M. J. Lewkowitseh crilique les vues de Merklen, d’après lesquelles le savon commercial n'est pas un produit de composition définie, mais bien un produit de composition variable. L'auteur a toujours obtenu, avec les glycérides de poids méléculaire moyen égal à 860, des savons contenant pratiquement la même quan- Lité d'eau (31 °/,), qu'il considère comme eau de cons- litution. — M, W. C. Alpers retrace l'histoire des emplois du savon en pharmacie et en médecine. — M. D. Wesson communique quelques rense ignements sur le savon de graines pe coton. L'huile brute de graines de coton, traitée par la soude caustique, fournit une masse visqueuse, connue sous le nom de soap stock et vendue commercialement comme contenant 60 d'acides gras. Bouillie avec un petit excès de NaOH et trailée par un sel, elle donne un savon à 66 ° d'acides gras, trop doux pour être employé seul, mais ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 607 ‘qui est utilisé en mélange avec d'autres savons. M. J. F. Hinckley décrit le mode de réc upéralion de la glycérine contenue dans les lessives de savon. On ajoute un sel de fer pour éliminer les acides gras infé- rieurs, puis on filtre el on concentre dans un évapora- teur; une grande partie du sel se dépose, puis on distille la glycérine avec un courant de vapeur, — M. N. J. Lane décrit un procédé de dosage de l'huile de castor dans les mélanges, les savons, basé sur sa précipitation à l’état de savon de plomb qui est insoluble dans l'éther de pétrole. — M. W. moine décrit un distributeur de savon liquide pour le lavage des mains, qui offre, au point de vue sanitaire, tous les avantages des distributeurs de savon en poudre ou en granules, sans en avoir les inconvénients. Séance du 24 Mai 1907. M. A. Bement communique l'analyse d'un certain nombre de charbons américains. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 21 Mars 1907. M. Môbius présente un Mémoire sur l'aspect esthé- tique des Reptiles et des Amphibies. Passant en revue les caractères attrayants et repoussants de plusieurs espèces de ces deux classes d'animaux, il trouve que l'allure rampante ou glissante, ainsi que l'apparition soudaine, la peau moite et froide et la venimosité de cer- laines espèces, exercent un effet repoussant qui l'em- porte sur l'effet agréable de leurs formes, couleurs et mouvements. Comme les sensations esthétiques que nous éprouvons à la vue d'un animal sont la résultante de toutes les propriétés que nous lui connaissons ou supposons, cet animal nous parait laid si les caractères désagréables impressionnent nos sens plus fortement que les propriétés agréables. Les effets-esthé tiques par- üculiers des Reptiles et des Amphibies ont poussé lima- gination humaine à attribuer à ces animaux un rôle considérable dans ses UE religieux, ses contes de fées et légendes héroïques. — M.J. H. van't Hof pré- sente un Mémoire ultérieur sur ses recherches au sujet des dépôts salins océaniques. Il y étudie la franklandite et un composé nouveau de la boro-calcite. Le seul échantillon de franklandite que l’auteur ait pu se pro- curer s’est trouvé être identique à la boro-sodio-calcite. Dans ses Lentatives infructueuses faites pour produire ce composé par voie artificielle, il a constaté la pré- sence d'un nouveau calcio-borate de sodium, dont l'existence dans la Nature n’est point impossible et qui présente un certain intérêt en raison de sa tempéra- ture de formation élevée (51°). — M. Struwe présente un Mémoire de M. L. Guthnick, attaché à l'Observa- toire de Berlin, sur l'étude photométrique des satel- lites de Jupiter. Les observations, faites avec un photo- mètre de Züllner sur le réflecteur de 14 pouces de l'Ob- servatoire de Bothkamp, constituent la suite des re- cherches photométriques antérieures du même auteur sur la variabilité de l'intensité lumineuse des satellites de Jupiter, tout en résumant tous les résultats jusqu'ici trouvés. — M. Helmert communique une Note de M. Ad. Schmidt, directeur de l'Observatoire de Magné- lisme terrestre à Potsdam, sur la détermination du potentiel général d'aimants quelconques et sur le calcul, ee sur cette détermination, de leurs effets mutuels. L'auteur y traite d'une facon tout à fait géné- rale le problème de l'effet pondéromoteur de deux aimants, en supposant l’état magné tique de lun et de l'autre défini par une série de fonctions sphériques, représentant le potentiel général de l’aimant en ques- tion. Elles se déterminent à leur tour d'une facon em- pirique par l'effet mutuel des aimants donné par l'observation. Ces constantes, combinées aux facteurs caractéristiques de la position mutuelle des aimants, permettent de calculer le potentie | de l’un des aimants relativement à l'autre, ce qui donne également moments de rotation et les forces que les amants les exercent entre eux. L'auteur trouve une expression fermée, se prêtant aux applications numériques aussi bien qu'aux recherches théoriques, du terme général de ce développement en série. Seance du 4 Avril 1907. M. A. Auwers présente un Mémoire relatif à la suite de sa réduction des anciennes observations méridiennes de Bradley. La réduction des observations d'étoiles fixes faites avec l'instrument de passage en 1743-1750 est terminée, à l'exception de quelques séries diurnes, ne contenant ni étoiles fondamentales, ni d'autres étoiles du catalogue de 1755, et pour lesquelles il s'agira par conséquent de trouver des points de raccord. A ces exceptions près, les ascensions droites apparentes, ainsi que leursréductions au commencement de l’année, sont complètes; on a également réuni pour la première moitié de la journée les valeurs correspondant à chacun des astres caltalogués, réduites à 1745,0. L'auteur a enfin formé les moyennes à insérer dans le catalogue pour le premier quart de la journée. Une comparaison avec ces moyennes lui fournit, comme erreur moyenne d'une observation d’ascension droite (moyenne déduite de 4.884 observations sur 513 astres), entre les décli- naisons — 209 et 300, la valeur de + 0,22s. Comme l'erreur moyenne d’une ascension droite, observée avec le nouvel instrument de passage de Bradley, a été trouvée égale à + 0,18s. dans la même zone, le poids d'une observation de l’ancienne série doit avoir été égal à 0,7 de celui des observations ultérieures. Pour les déclinaisons supérieures, en raison de la moindre facilité de trouver les erreurs instrumentales, ce rap- port est cependaut un peu moins favorable pour l'an- cien instrument, pour lequel l'erreur moyenne, déduite de 6.545 observations sur 772 étoiles, ne diffère pas sensiblement de + 0,21 sec. à, tandis que, dans la réduc- tion de la série ultérie ure, l'accroissement de l'erreur moyenne reste sensiblement au delà de celui de sec. à. — M. Auwers présente ensuite la seconde section du catalogue stellaire pour la zone de 6° à 10° de décli- naison australe, rédigé par le Professeur N. Herz, à Vienne. Gette seconde section renferme les lieux moyens pour 1890,0 des étoiles ne se trouvant comprises qu'une fois dans les observations de zones faites à l'Observa- toire de Kuffner, en 1888-1891, aussi bien que de cer- taines étoiles, observées à plusieurs reprises, mais qui avaient élé omises par mégarde dans la première sec- tion. Séance du A1 Avril 1907. M. H. A. Schwarz rend compte de la démonstration purement géométrique de l'existence de la configura- tion de Pascal, trouvée récemment par le Professeur Hessenberg. L'importance de cette nouvelle démons- (ration est due à son indépendance du postulatum de l’'axiome des parallèles et des considérations de conti- nuité. Il est, en effet, possible de baser sur cette démonstration une nouvelle démonstration purement géométrique du théorème fondamental de la Géométrie synthétique, en ne se servant ni de considérations de continuité, ni de la validité posée en axiome du théo- rème des parallèles. — M. Zimmermann adresse la suite de ses recherches sur les barres chargées par des forces longitudinales et supportées élastiquement en direction transversale dans certains de leurs points. Le présent Mémoire estrelatif à la barre non rectiligne, mais composée de sections droites situées dans un même plan. Séance du 25 Avril 1907. M. H. K. Vogel indique la construction d'un nouveau spectrographe. Les exigences toujours croissantes au sujet de la stabilité des spectrographes employés pour déterminer, au moyen du dé ple icement minime des raies spectrales, le mouvement astres, dans Île rayon de vision, ont engagé l’auteur à construire un appareil dont la boîte est venue de fonte avec toutes ses parties. La matière dont se compose celle-ci est un des ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES alliage nickel-aluminium, qui, en dehors d’une grande légèreté spécifique, présente l'avantage d'une rigidité considérable. La fonte si difficile de cette boite com- pliquée à pleinement réussi; l'appareil se distingue par sa stabilité remarquable, surtout par rapport aux effets de torsions. — Le même auteur présente un Mémoire de M. H. Ludendorff, observateur à l'Observatoire d'Astrophysique de Potsdam, sur l'orbite de l'étoile spectroscopique 6-Ariétis. Le nombre d'étoiles recon- nues comine systèmes d'étoiles doubles spectrosco- piques s’est accru considérablement dans ces dernières années, grâce à l’activité si intense qui règne actuelle- ment dans le domaine de la détermination des vitesses radiales. Les déterminations des orbites de ces astres sont cependant loin de se maintenir au courant de ces découvertes toujours renouvelées : les éléments des orbites n'ont été calculés avec une exactitude plus ou moins grande que pour 25 des 180 étoiles à vitesse radiale variable qu'on connaît actuellement. L'auteur détermine les éléments de l'orbite de l'étoile double mentionnée ci-dessus sur la base de 76 mesures du spectre. La durée de révolution se trouve égale à 107 jours et la valeur minima du demi-grand axe de l'orbite à environ 23.000.000 de kilomètres. L’excen- tricité, de 0,88, est la plus grande qu'on ait jamais constatée dans le cas d'une étoile double spectrosco- pique. Séance du 2? Mai 1907. M. G. Frobenius adresse une Note ultérieure sur un théorème fondamental de la Théorie des ensembles. Dans un premier Mémoire, présenté à l'Académie en 1903, il avait déduit plusieurs formes du théorème suivant : « Le nombre d'éléments d'un ensemble satis- faisant l'équation X*= A est divisable par le diviseur cominun maximum de 2 et g, g étant le nombre d'élé- ments interchangeables avec À de Pensemble en ques- tion. » Or, ce théorème peut se généraliser en rempla- cant le nombre X=R de ces éléments par la somme Ÿy(R), 7 élantun caractère quelconque de l'ensemble H. De là, on retrouve le théorème précédent, en choisis sant pour y le caractère principal, lequel est égal à l'unité pour chaque élément R. L'auteur n'a point réussi à démontrer ce théorème généralisé avec les mêmes moyens simples que dans le cas spécial antérieurement traité; il a dû recourir à certaines considérations, employées par M. Blichfeldt pour la démonstration du théorème spécial. Il est bon de remarquer que le mot caractère peut se prendre dans son acception la plus large. La proposition, étant valable pour tout caractère simple, doit, en effet, l'être aussi pour toute combi- naison linéaire y de ces caractères, dont les coefficients sont des nombres entiers positifs ou négatifs. Dans le premier cas, y est ce que l’auteur appelle un caractère composé; dans le dernier cas, un caractère dit impropre. M. Frobenius indique enfin une forme particulièrement commode du nouveau théorème. Séance du 16 Mai 1907. M. Em. Fischer présente un Mémoire sur la compo- sition chimique de la soie due à une grande araignée malgache (Nephilamadagascariensis).Cette soie, qui est produite, dans une station d'essais de Tananarive, par le Père Camboué, ressemble beaucoup à la soie ordi- naire, dont elle ne se distingue que par sa belle cou- leur orangée, l'absence de toutes matières solubles dans l’eau (colle), et la présence de l'acide glutami- nique. La grande ressemblance chimique des sécrétions d'organes présentant une différence morphologique si marquée que les glandes du ver à soie d’une part et celles d’une araignée de lautre, est un phénomène biologique hautement remarquable. — M. Orth com- munique une Note du Professeur C. Neuberg sur l'ori- gine du pétrole. En se basant sur la considération que certaines substances constitutives de l’albumine, à savoir les amino-acides, sont capables de fournir des corps de conversion optiquement actifs, l'auteur a émis l'hypothèse que les albuminoïdes de certains organismes animaux et végétaux préhistoriques constituent l'ori- gine de l'activité optique du naphte. Après avoir démontré que la putréfaction des protéines donne naissance à de grandes quantités d'acides gras d’une forte activité optique, il fait voir, par l'expérience, qu'on réalise, avec un mélange d'acide oléique absolu- ment pur el un peu d'acide d-valérique, tant par la chaleur sous pression que par la distillation. sèche générale, un produit qui, après purification, présente toutes les propriétés, y compris le pouvoir et la direc- tion de rotation, du naphte naturel. Le pouvoir de rotation de ce produit s'accroît également à point d'ébul- lition croissant des fractions; ses fractions à molécules composées donnent enfin les réactions colorées de la cholestérine, à légal des produits de distillation à point d'ébullition élevé des pétroles. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 10 Mai 1907. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. R. Girtler détermine l'énergie de rotation moyenne d’un système mécanique analogue à un gaz et applique les équations obtenues à un gaz dont les molécules sont des corps élastiques. — MM. A. Franke et M. Kohn, en faisant réagir les combinaisons organo-magnésiennes sur les alcools cétoniques, ont obtenu les glycols correspondants. C'est ainsi que CH°Mgl et l'alcool de la diacétone don- nent le 2: 4-diméthylpentane-2 : 4-diol. l 20 SCIENCES NATURELLES. — M. W. Trabert a reconnu que le fühn a une influence physiologique sur les individus à Innsbruck. Ceux-ci éprouvent un état de malaise anormal lorsqu'une dépression barométrique règne ou s'approche du lieu d'observation; ils se sen- tent bien lorsque la pression barométrique est élevée ou augmente. — M. F. Steindachner décrit une nou- velle espèce d'Arges des Hautes Andes de Cayendelet, l'Arges Theresiæ. — M. R. Sturany a déterminé un certain nombre de Gastéropodes nouveaux de l'Albanie du Nord : Campylaea zcbiana, C. dochir, C. munelana, Bualiminus (Ena) merditanus, B. zebianus, B. lati- fianus, B. winneguthi, Chondrula quadridens nicollir, Clausilia apfelbecki, C. thaumasia. Séance du 16 Mai 1907. SCIENCES PHYSIQUES. — M. O0. Hônigschmid à préparé par la méthode aluminothermique les siliciures de Mo, Tu et Ta, qui répondent à la formule générale MeSi®. — M. A. Kaïlan a étudié la déshydratation de l'alcool par la chaux vive. La valeur la plus propice du rapport K/A, où K est le nombre de kilogs de chaux et À le nombre de litres d'alcool, est de 0,55 pour l'alcool à 92 °/,; on obtient après 3 h. 1/2 d'ébullition de l'alcool à 99,5 °/, et aprés 6 heures de l'alcool à 99,90/,. — M. H. Rosinger, en condensant le glyoxal avec l’aldéhyde isobutyrique, a obtenu un corps CH#0, K, 55°, donnant par réduction un corps CUH®#0, F. 127%; on obtient, en outre, les produits de condensation de l'aldéhyde isobutyrique. — M. A. Kaïi- lan à étudié l'éthérification des acides anisique, gal- lique, cinnamique et hydrocinnamique par HI alcoolique et déterminé la nature et les constantes de la réaction. Louis BRUNET. Le Directeur-Gérant : Louis OLivier. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 18° ANNÉE N° 45 15 AOÛT 1907 Revue générale des IN CICTCES pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aüresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, publiés dans Ja Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Astronomie La parallaxe de la 61° du Cygne. — Le savant astronome américain F. L. Chase, de l'Obser- vatoire de Yale University, vient de faire un nouvel examen des mesures de parallaxe de cette célèbre étoile qui est, comme on sait, la première dont la dis- tance ait été déterminée, et de prendre lui-même de nouvelles mesures à l’héliomètre de cet Observatoire. Bergstrand, d'Upsal, a, en 1905, partagé toutes les mesures parallactiques de cette étoile en trois classes, comprenant trois périodes distinctes, c'est-à-dire de 1838 à 1853, 1853 à 1880, et 1880 à 1905. Les résultats antérieurs aux mesures de Bessel sont considérés comme dépourvus de précision. Les valeurs conclues se classent dans l'ordre suivant : äl I + A I _. a | + valeurs auxquelles nous pouvons ajouter des détermi- nations photographiques : Classe IV): . : . . x — + 0/29 à + 0/43. D'autre part, Wilsing et Davis, Kapteyn et Peters ont trouvé des valeurs différentes pour les deux com- posantes, valeurs non concordantes d’ailleurs. M. Chase a pensé qu'il était nécessaire de faire de nouvelles déterminations à l’aide de l'héliomètre de Yale Observatory. Dans ce but, il choisit deux paires d'étoiles de comparaison dont les angles de position sont, relativement à 61 Cygne, 278° et 101°, et dont les distances sont 4.690! et 5.060! avec les grandeurs 6,5 et8,4 pour la première paire, et dont les angles de position sont 2050 et 23° et les distances 5.990!" et .840" avec les grandeurs 7,5 et 8,4 pour la seconde paire. Les mesures ont été commencées au mois d'octobre 1904 et ont été au nombre de 230 séries. La discussion de ces observations a conduit l’auteur au résultat suivant : rm — + 0291 + 0005. L'examen des catalogues d'étoiles ne montre aucun REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. mouvement propre appréciable pour les étoiles de comparaison. Ce résultat confirme les déterminations héliomé- triques de Peters, ainsi que les mesures photogra- phiques, et, comme la valeur trouvée est la même pour les deux composantes, nous devons penser que les deux étoiles sont physiquement associées comme on l'admet généralement. S 2. — Art de l'Ingénieur Le sauvetage des navires par l'air com- primé. — Lorsqu'un navire à coulé, le procédé classique pour le relever consiste à passer sous sa coque des chaînes en nombre suflisant, et à fixer ces chaines à des allèges ou à un dock préalablement rempli d'eau et amené au-dessus de l'épave. En vidant le dock au moyen de pompes, on produit une force ascensionnelle qui soulève le navire; on peut remor- quer l'ensemble jusqu'à un endroit où le fond soit moins grand, et, en répétant l'opération, s'il y à lieu, un certain nombre de fois, conduire le bâtiment au bassin, ou du moins l'échouer près du rivage de manière que les scaphandriers puissent aveugler la voie d’eau. Cette méthode est sûre, mais elle à l'inconvénient d'être très lente; le passage des chaînes sous la coque présente souvent des difficultés presque insurmonta- bles; enfin, il faut disposer d'un matériel considérable, et l'opération ne peut réussir que si la mer est calme ; car la moindre houle, soulevant par moments les allèges ou le dock, produirait immanquablement la rupture des chaînes, et tout serait à recommencer. Îl est certainement préférable, lorsqu'on le peut, de recourir au procédé de l'air comprimé: envoyer dans la coque de l'air à une pression un peu supérieure à celle qui correspond à la profondeur; laisser leau couler par la brèche qui lui a livré passage, ou, au besoin, si cette brèche est à la partie supérieure, la boucher et percer un trou au fond pour la sortie de l'eau. La coque remonte toute seule dès qu'elle est suffisamment allégée, et iln’y a plus qu'à la remorquer au port pour la réparer. Bien entendu, cette manœuvre exige de multiples L5 610 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE précautions : il faut obturer soigneusement toutes les ouvertures (panneaux, sabords, etc.) par où l'air pour- rait s'échapper; il faut aussi consolider les ponts, qui ne sont pas faits pour supporter des pressions, même faibles, et qui risqueraient d'’éclater; si le navire est grand, on doit remplir d'air successivement ses divers compartiments, en agissant symétriquement de ma- nière que l’une des extrémités ne se relève pas avant l’autre. Les scaphandriers ont à faire dans la coque un travail difficile; mais l'opération est certainement possible, au moins dans certains cas, ainsi que le prouve la réussite d'une tentative faite tout récemment : le grand paquebot Bavarian, de l'Allan Line, s'étant échoué sur la côte du Canada et complètement rempli d'eau, c’est par le moyen de l'air comprimé qu'on a pu le sauver. Il y a une classe de navires pour lesquels, en cas d'accident, ce procédé serait particulièrement indiqué : ce sont les sous-marins. Leur coque, en effet, est très résistante : il n’y aurait donc aucune consolidation à faire, il suffirait que les panneaux fussent fermés, pour empêcher l'air de s'échapper. Lors des naufrages du Farfadet et du Lutin, à Bizerte, l'opinion publique s’est émue à juste titre du temps trop long qu'a nécessité le renflouement; pour le Farfadet, en par- ticulier, si l'opération avait pu être effectuée plus rapi- dement, on aurait peut-être pu sauver quelques-uns ‘des hommes de l'équipage. Mais le passage des chaînes sous la coque, à travers une vase épaisse, était extrè- mement pénible et exigeait de nombreuses journées de travail. L'emploi de l'air comprimé, si les bâtiments avaient possédé l'installation nécessaire, eût été plus expéditif. La plupart des sous-marins sont maintenant munis de la partie essentielle de cette installation : dans chaque compartiment du navire se trouve sur la coque un robinet manœuvrable de l'extérieur, et sur lequel peut se visser un tuyau par lequel arriverait l'air comprimé. Pour la sortie de l’eau, si la brèche par où elle est entrée n'y suffisait pas (où si elle était à la partie supérieure), on se servirait des prises d’eau disposées pour le remplissage des ballasts. Quant aux pompes de compression, tous les navires de guerre en possèdent pour le chargement des torpilles. On peut espérer que, si — ce qui est du reste impro- bable — un nouvel accident grave arrivait à l’un de nos sous-marins, son renflouement serait grandement facilité par ce procédé. $S 3. — Electricité industrielle Emploi de l'électricité pour ile dégel des conduites d’eau. — Il est reconnu, depuis plusieurs années, que l'électricité permet de dégeler les conduites d'eau sans danger ni inconvénient grave ; mais les résultats quantitatifs et les données économiques sur le sujet sont rares, et en général variables selon les cas, le mode d'application de la méthode, le mode de pose des conduites d’eau, leur longueur, etc. Le tableau suivant résume assez bien les éléments de cette appli- cation nouvelle de l'électricité. Ce tableau, reproduit dans le Technical Yearbook, est emprunté à un Mémoire de M. Walter M. Dann, et établi en unités anglaises, que nous avons approximativement traduites dans les colonnes 1 et 2. DURÉE DIAMÈTRE nécessaire d'application eu millimètres LONGUEUR du courant approximatif en mètres en minutes et heures INTENSITÉ 12,7 15 5 minutes 250 ampères 12,7 25 15 — 300 — 12,1 30 45 — 150 — 19 26,5 23 — 300 — 19 3 10 — 135 — 19 75 30 — 250 — 19 115 - 10 — 300 = 25,4 13,5 17 — 140 — 25,4 18 20 — 500 — DURÉE DIAMÈTRE nécessaire d'application en millimètres LONGUEUR du courant approximatif en mètres en minutes et heures INTENSITÉ 25,4 180 1h. 0 minutes 60 ampères 25,4 210 5h. 0 — 175 — 50,7 6 3 — 2.000 — 50,7 15 2h00 — 500 — 90,7 20 4 — 160 = 50,7 90 2 h. 30 — 250 = 101,6 240 3h. 0 — 300 — 152,4 120 2 h.10 — 800 —= x g. C2 $ 4. — Géologie Le Musée houiller de l'Université de Lille. — Les laboratoires de Géologie des Facultés des Sciences possèdent tous des collections plus ou moins déve- loppées, qui sont indispensables à l’enseignement. Le plus souvent aussi, dans la collection générale, les échantillons relatifs aux fossiles, aux roches et aux minéraux de la région qui avoisine le centre univer- sitaire sont naturellement plus nombreux que ceux des régions plus éloignées ; ils constituent, en effet, pour les étudiants et pour les travailleurs, une res- source précieuse : c'est là que doivent se trouver, autant que possible, tous les renseignements intéres- sant le sol et le sous-sol de la région. Ces idées ont toujours été celles qui ont présidé à l'installation de l'Institut géologique de l'Université de Lille, et la collec- tion régionale, formée par les soins de M. Gosselet,- pendant quarante années de travaux et de découvertes, occupe 4.150 tiroirs, dans une salle de 50 mètres de longueur sur 20 de largeur. Les richesses de cette collection — qui a pris avec raison le nom de Musée Gosselet — sont libéralement mises à la disposition des travailleurs et ont déjà rendu de grands services, soit par les pièces uniques qu'elle renferme (fossiles, roches, fournissant les types pour la détermination des résultats des sondages si nombreux dans la région), soit par l'abondance des fossiles de certaines parties de la région lilloise et ardennaise . Mais à Lille, ou plus exactement au sud de Lille, existe, comme l’on sait, le grand bassin houiller du nord de la France, dont l'importance industrielle et économique est la suivante : en 1906 (malgré la longue grève des mineurs en mars-avril), on a extrait 22 mil- lions 071.174 tonnes de houille, représentant, avec les sous-produits, une somme de 249 millions de francs, sur lesquels 85.000 mineurs ont touché 128 millions de francs. Il était donc naturel de songer à donner, dans la collection régionale, une place importante à la région houillère, et bien vite l’on fut amené — devant l’im- portance des faits et des matériaux recueillis — à envisager la nécessité de créer une collection spéciale, un « musée houiller, capable de montrer aux nouvelles générations la formation des gisements miniers, ainsi que la disposition des veines et des coupes des mines des deux bassins du Nord et du Pas-de-Calais? ». C'est ce Musée houiller qui a été inauguré officiellement le 5 mai 1907 par M. Bayet, directeur de l'Enseigne- ment supérieur, représentant le Ministre de l'Instruc- tion publique. Le programme d’un musée houiller pourrait se résu- mer de la façon suivante : l'exploitation de la houille fournit, en même temps que des produits indispen- sables à l’industrie, des documents scientifiques qu'il est du devoir élémentaire des Services publics de ! A côté des collections de l'Université, il existe, dans presque tous les centres universitaires, un Musée d'Histoire naturelle, où la Géologie, que nous envisageons surtout, tient en général peu de place et doit surtout être considérée à un point de vue général. Les musées éloignés du centre universitaire devraient — comme à Boulogne, par exemple — pouvoirrecueillir toutes les trouvailles géologiques, qui, sans cela, sont le plus souvent perdues pour la science. ? Discours de M. Bayet. PT ET de “odtut BRTA CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 611 conserver. Après les plans, les roches, les minéraux, les fossiles rencontrés au cours des travaux, qui, par leur étude et leur comparaison, permettent à ceux qui s’en occupent de venir en aide à l’art des mines, constituent les matériaux les plus importants à conserver, d'autant plus que le progrès de l'exploitation même fait dispa- raître pour toujours les documents extraits. En outre, pour intéresser le grand public, lui aussi, à toutes les questions relatives au bassin houiller, il est bon qu’en même temps que les produits des houillères, il y'ait des cartes, des vues photographiques des gisements, des restaurations aussi exactes que possible des temps lointains où se formaient le charbon et le bassin lui-même. De plus, un musée houiller doit renfermer aussi, avec les instruments usuels, les instruments savants : sismographes et autres, qui enregistrent les mouvements du sol; les lampes, eudiomètres, etc., Lo Em. Fig. 1. — Vue d'ensemble qui décèlent le grisou et mesurent l'importance de ses dégagements ; enfin, il faut qu'il montre aussi que l’on S'occupe de l'hygiène du mineur et de quelle façon on lutte contre l'ankylostomiase et les affections parasi- taires qui menacent l'ouvrier. L'on peut, en dernier lieu, songer à y établir une section où tout ce qui intéresse ettout ce qui a été fait pour les besoins matériels et moraux du mineur et de sa famille soit montré, pour ne pas dire révélé, au grand public. Le conservateur du Musée de Lille, M. Ch. Barrois, a su intéresser à son œuvre une foule de notabilités et de Corps constitués et obtenir, pour le Musée et pour l’enseignement qui y est attaché, des subsides qui lui ont permis de réaliser une bonne partie du programme qu'il s'était proposé. Une mention spéciale est due à la Chambre des Houillères du Nord et du Pas-de-Calais, ainsi qu'aux Conseils généraux des deux départements. Le noyau du Musée houiller est constitué par un plan sur verre au 1/10.000 du bassin du Nord et du Pas-de-Calais. Ce plan, don de la Chambre des Houil- lères et construit pour le Musée houiller, a figuré à l'Exposition internationale de Liége; il comprend 8 vitrines : 4 pour le Nord et 4 pour le Pas-de-Calais. La glace supérieure ne porte que les limites des con- cessions, le contour des bâtiments, usines, corons puits, sondages, le tracé des voies ferrées et celui des voies navigables. Les 100 coupes verticales, orientées N.-S., que l'on peut facilement lire par transparence, sont distantes les unes des autres de 1 kilomètre; on y a figuré seulement un certain nombre de veines de houille ou couches-repères (key-rocks des Anglais), au nombre de 50, choisies de facon aussi précise que possible d’après leur continuité matérielle, ou, à défaut, d'après leur épaisseur relative, leur composition, la nature du charbon et sa teneur en matières volatiles, l'épaisseur etles caractères des stampes. Ces vernes- repères ont une teinte spéciale, que l'on retrouve avec leur nom sur des coupes verticales placées sur les tru- meaux des fenêtres et qui donnent la série complète de toutes les veines et passées de charbon reconnues dans le bassin depuis les plus inférieures jusqu'aux j 1 du Musée houiller de Lille. supérieures, à l'échelle de 1/300, ainsi que les stampes stériles en rose), schistes (en bleu). Sur les coupes en verre, on à figuré le niveau du sol, la base des morts-terrains, le niveau de la mer et les lignes à 200, 400, 600, 800, 1.000 et 1.200 mètres au-dessous du niveau de la mer, ainsi que les limites géologiques — nécessairement un peu hypothétiques — du bassin. La première coupe de chaque vitrine reproduit exacte- ment la première coupe de la vitrine précédente. Un soin spécial a été donné à la recherche, à la con- servation et à la détermination de tous les fossiles ani- maux et végétaux, puisque c'est grâce à eux que l’on peut comparer et identifier les différentes veines, se rendre compte de leur âge relatif et des conditions qui ont présidé à l'établissement du mur et surtout du toit de chaque veine. Ce sera par l'étude systématique et com- parée des divers toits des veines que l’on arrivera à se mettre d'accord pour l'assimilation exacte des diffé- rentes veines exploitées dans les différentes conces- sions et dissiper l'incertitude qui règne encore à ce sujet parmi les ingénieurs. À Parmi le grand nombre de plantes déjà récoltées, 650 exemplaires étaient assez bien conservés pour être déterminés exactement. Ces échantillons se trouvent gres 612 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE exposés d’une facon toute nouvelle et fort ingénieuse dans 8 vitrines constituées par des casiers en fer, à claire-voie, où les échantillons, montés les uns au-dessus des autres, pendent verticalement dans une position stable, permettant au visiteur d'observer tous les carac- ières. Les vitrines sont disposées suivant l’ordre botanique, Savoir : Lycopodinées \ laires ; 4 Equisétinées : Calamites, Annulaires el As- terophyllites ; Fougères : Pecopteris. ( Cycadofilicinées : Mariopteris, Sphenop- PHANÉROGAMES. « teris et Alethopteris. ( Cordaïtes. Lépidodendrons et Sigil- CRYPTOGAMES VASCULAIRES. ns & Quelques échantillons sont tout à fait remarquables; étudié, couvrant 100 mètres carrés, et composé par un artiste de talent, M. E. Lebrun, d'après 1es esquisses de M. P. Bertrand, préparateur du Musée houiller. Ce tableau (fig. 3) représente une lagune sur lés bords de laquelle croissent de grands arbres : Lepidodendrons aux tiges bifurquées, Sigillaires en forme de colonnes cylindriques cannelées, Fougères arborescentes, Cor- daïtes aux larges feuilles. Au milieu des eaux dor- mantes verdies par les algues, s'élèvent des touffes de Calamites aux formes grêles et élancées, et, au premier plan, deux reconstitutions originales de Cycadofilici- nées : à droite un A/ethopteris, à gauche un Nevrop- teris. + Une aile d'insecte découverte à Liévin, quelques écailles de poissons séparées trouvées à l'Escarpelle sont actuellement les deux seuls représentants de ces deux groupes si développés dans d'autres bassins houil- lers. Par contre, d'importantes séries de mollusques, Fig. 2. citons, par exemple, les grandes pennes d’A/ethop- teris et de Sphenopteris venues d’Aniche, des Nevrop- teris de Bruay et de l'Escarpelle, des Pecopteris et des Sigillaires d’Aniche, une plaque couverte de Trigo- nocarpus de Bruay, un Codonospermum d'Aniche, une graine de Cordaïtes (Cardiocarpus) et une hampe flo- rale de Dorycordaïtes. Chaque meuble porte latéralement une aquarelle qui offre au visiteur la reconstitution d'une des plantes dont les débris sont exposés; une notice très courte donne les caractères sommaires de la famille disparue. Cet ordre botanique, qui facilite le classement et les comparaisons, n'est d'ailleurs que provisoire, et les conservateurs espèrent, lorsque le Musée aura des col- lections plus étendues, le remplacer un jour par un rangement stratigraphique où chaque veine du bassin serait représentée par ses espèces propres ou par ses plantes les plus remarquables. Dans un coin de la salle sont groupés quelques troncs d'arbres houillers : Lepidodendrons, Sigillaires aplatis par le poids des sédiments ou restes cylindriques debout avec leurs racines (fig. 2). Le fond de la salle est orné d’un décor artistique très — Les troncs d'arbres conservés au Musée houïiller de Lille. tant saumâtres que marins, trouvés dans le terrain houiller, entre les veines de houille, à Carvin, Flines- les-Raches, Aniche, l'Escarpelle, Anzin, fournissent dans la pratique des repères d’une valeur absolue et indiquent aussi que les houilles du bassin franco-belge se sont déposées au voisinage de la mer dans une région soumise aux incursions marines. Un des meubles renferme des nodules recueillis dans certaines veines : les uns sont des clayats, formés sur place par concrétion de carbonates de chaux et de fer, qui montrent parfois, sur des sections transver- sales, la structure intime des tissus organiques enclavés et merveilleusement conservés ; les autres (galets roulés ou blocs à peine arrondis) sont formés de roches étrangères (schistes, grès et phtanites marins du houiller plus ancien, quartzites et roches gneissiques et granitiques) entrainés dans le bassin houiller à différents niveaux. Tels sont les roches du poudingue marin reconnu à Nœux, Hénin-Liétard et Liévin, le banc de grès à cuérelles de Bruay avec galets roulés de houille, les blocs exotiques plus ou moins angüleux de la veine du Nord à Aniche. Une catégorie importante d'échantillons a aussi sa «F. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 615 place marquée au Musée houiller : ce sont les échantil- lons prélevés dans les sondages effectués pour la recherche de la houille. Les sondages du xvur® siècle sont tous perdus, ainsi qu'une grande partie de ceux du siècle dernier, et il est d'autant plus important de veiller à la conservation de ceux qui s'effectuent de nos jours qu'ils deviennent toujours plus profonds et plus onéreux : 100 mètres des carottes du sondage de Bois- Bernard, qui a atteintle houiller à 1.200 mètres environ, sont exposés dans des montures spéciales. C’est dans les carottes de ces sondages de Bois-Bernard, de Liévin, de Crespin, que l’on a trouvé les poissons cuirassés du vieux grès rouge, c’est-à-dire du Dévonien inférieur superposé dans ces points au terrain houiller, restes qui ont été étudiés par M. Leriche, maitre de confé- rences de Paléontologie houillère. Les autres débris organiques fournis par ces carottes, et exposés dans des vitrines spéciales, sont en voie de publication. 1. Atcrnor rene 2 Lerioooenpaon. 3 recorTenin Fig. 3. Telles sont, actuellement, les richesses du nouveau Musée houiller de l'Université de Lille. Il est unique en France et nous semble une tentative, d’ailleurs pleine de promesses, tout à fait intéressante et appelée à rendre dès maintenant et surtout dans l'avenir les plus grands services; il constituera, en effet, au point de vue du bassin houiller du Nord de la France, une mine unique de renseignements et de documents. Si l’on veut bien se rappeler aussi qu'à Lille se trouve le siège de la Société géologique du Nord, dont les publications (Annales et Mémoires) très recherchées renferment tous les renseignements pouvant intéresser la région du Nord, on ne pourra s'empêcher d'être frappé par l'activité et l'importance de l'Ecole géolo- gique du Nord de la France !, et de la vitalité qu'ont su lui imprimer son fondateur M. Gosselet et l’un de ses élèves, M. Ch. Barrois, membre de l’Institut, son suc- { MM. L. Dollo, conservateur du Musée royal d'Histoire naturelle de Bruxelles, et L. Cayeux, qui vient d’être nommé professeur de Géologie à l'Ecole nationale des Mines, — pour ne citer que ceux-là, — sont des anciens élèves de l'Institut de Géologie de Lille. cesseur à la Faculté des Sciences, et aussi de se rendre compte des services que l’Institut de Géologie de Lille a déjà rendus et sera amené à rendre à tous ceux qui s'intéressent à la région du Nord de la France. H. Douxami, Maitre de Conférences de Géologie et de Minéraloyie à la Faculté des Sciences de Lille, Président de la Société géologique du Nord. $ 5. — Enseignement et Sociétés Les Amis de l’Université de Paris. — A l'as- semblée générale de cette Société, le Rapport annuel a été lu par M. Lyon-Caen, membre de l'Institut, doyen de la Faculté de Droit. Voici quelques extraits de cet intéressant document. L'Association possède aujourd'hui un capital supé- rieur à 200.000 francs et le projet de budget; pour 1: L MU PENE — Vue de la forêt houillère reconstituée au Musée houiller de Lille. l'année prévoit un total de recettes de 20.109 francs. Comme les années précédentes, la Société contribue, dans la mesure de ses moyens, à la vie de l'Université de Paris. Elle accorde trois bourses de voyage de 600 francs chacune : 1° à M. Lasague, qui doit se rendre en Espa- gne et préparer une thèse de doctorat en droit sur le régime des livres fonciers dans les pays latins; 2° à M. Sibert, qui va à Londres et à Oxford étudier l'his- toire du «premier ministre » en Angleterre; 4° à M. Scelle, qui se destine à l'agrégation de droit public et qui continuera dans les archives anglaises ses études sur les traités relatifs à la traite des nègres. L'Association accorde une nouvelle subvention à un original groupement d'étudiants de la Faculté des Sciences, qui, depuis quelques années, se réunissent dans une salle de la Sorbonne pour y discuter, s'entre- tenir de leurs travaux, chercher la solution de pro- blèmes, Une utile création a été faite à la Faculté des Sciences par le regretté Moissan, qui avait constitué, pour les élèves de l'Institut de Chimie appliquée, un enseigne- ment de langues vivantes, allemand, anglais et spécia- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE lement espagnol. « Il avait constaté que trop souvent, dans les Etats de l'Amérique du Sud, les jeunes Fran- çais, par suite du défaut de connaissance de la langue du pays, ne peuvent obtenir les places qu'ils sollicitent dans l'industrie. » A cet enseignement, qui a une utilité nationale réelle, l'Association accorde une nouvelle subvention de 1.000 francs. Le rapporteur exprime le souhait qu'un enseignement semblable soit créé dans les Facultés de Droit et de Médecine. Une somme de 2.000 francs est mise à la disposition de M. Roger, professeur de Pathologie comparée et ex- périmentale à la Faculté de Médecine, pour l'achat d'appareils nécessaires à l'examen du fonctionnement de l'estomac et de l'intestin au moyen des rayons Rœntgen. M. Lippmann, professeur de Physique à la Faculté des Sciences, en vue de la révision des unités légales des grandeurs électriques par une Conférence interna- tionale, a entrepris la construction d’un électrodyna- momètre absolu; une somme de 2.000 francs lui est nécessaire. Une subvention de 4.000 francs permettra d'enrichir la collection de cartes topographiques à grande échelle constituée par M. Vidal de la Blache, à la Faculté des Lettres. En juin 1906, une explosion a détruit, à l'Ecole supé- rieure de Pharmacie, plusieurs appareils du labora- toire de Toxicologie; une subvention permettra de réparer le mal. M. Lyon-Caen a terminé en ces termes : «Un membre du Conseil de direction m'écrivait ré- cemment : « Nous sommes huit cents, nous devrions « être huit mille. Moyennant de modestes cotisations « individuelles de 20 francs, nous aurions un revenu < annuel considérable. » Ce seraitlà un résultat digne d'un pays démocratique comme la France où, les for- tunes éfant divisées, on ne peut compter qu'excep- tionnellement sur les énormes libéralités qui sont faites dans d'autres pays aux universités par un petit nombre de personnes très opulentes. » Ce que fait aujourd'hui cette Société permet decom- prendre les services qu'elle rendrait à l'Enseignement et à la Science, si ses revenus s’accroissaient comme le souhaite son Secrétaire général. $ 6. — Sciences diverses La situation économique de la France en 1906. — Les symptômes caractéristiques des pé- riodes de grande activité économique se sont trouvés réunis en 1906 pour témoigner d'un mouvement d'affaires considérable. Les recettes des chemins de fer présentent sur l'année précédente une plus-value importante; les divers revenus de l'Etat qui se propor- tionnent à l'étendue des transactions intérieures, — impôt sur le timbre des effets de commerce, contribu- tions indirectes, — enregistrent de notables accroisse- ments. La marche ascensionnelle des prix des matières premières, qui se dessinait ces dernières années, s'est encore accentuée; les métaux, le cuivre, en particulier, ont atteint des cotes bien rarement pratiquées jusqu'à ce Jour et qui démontrent l'intensité de la consomma- tion. En Bourse, les valeurs industrielles ont été parti- culièrement recherchées et quelques-unes — valeurs minières notamment — se sont élevées à des cours correspondant à des dividendes qui ne seront vraisem- blablement atteints que dans quelques années. a ————_—aEa—a—a—aEaEa—a—a——————————— ‘ Cf. ADMINISTRATION DES DOUANES : Recensement général du commerce de la France pour l'année 1906. — BANQUE DE FRANCE : Compte rendu des opérations pendant l'année 1906. — ADMINISTRATION DES MONNAIES ET MÉDAILLES : Rapport au ministre des Finances, 1906. Ce développement général des affaires a eu pour accompagnement naturel un resserrement monétaire qui a entraîné à l'Etranger une forte élévation du taux de l’escompte — 6 °/, en Angleterre, 7 °/, en Alle- magne. Grâce à ses fortes réserves métalliques, et, en particulier, à son stock d'or, la Banque de France a pu continuer à maintenir à 3 °/, le taux de l’escompte pendant toute l'année 1906, faisant ainsi bénéficier le commerce français d’un avantage très notablé dans la négociation de ses traites. Nos échanges avec l'étranger se sont largement déve- loppés. Le montant total des importations et des exportations s’est élevé en 1906 à 10.273 millions, en augmentation de 627 millions sur les opérations cor- respondantes de 1905, et en amélioration de 1.319 mil- lions et demi sur celles de 1903. Remarquons toutefois qu'en comparant les chiffres de cette dernière année, il ne faut pas manquer de tenir compte de la hausse des prix que nous avons signalée plus haut, et qui fait qu'une même quantité d'affaires se traduit par des sommes différentes suivant les cours adoptés, chaque année, par la Commission permanente des valeurs de douane pour transformer les quantités en valeurs. Lesimportations d'objets d'alimentation ontaugmenté de 131 millions, tandis que nos exportations dimi- nuaient de 49 millions et demi. Ce recul provient, en partie, de la place perdue par nos produits agricoles sur le marché anglais. Les entrées et sorties concer- nantles matières premières nécessaires à l’industrie se sont accrues dans la même mesure que nos ventes et achats de produits fabriqués. Parmi les marchandises dont l'expansion au dehors se fait le plus remarquer, il faut mentionner les tissus de soie et de bourre de soie, les objets de carrosserie, les automobiles. Si notre commerce extérieur augmente, il ne faut pas perdre de vue que celui de nos concurrents indus- triels suit le même mouvement, avee une progression plus forte qui fait que nous sommes toujours distancés davantage par l'Angleterre, l'Allemagne et les Etats- Unis. Nous en avons plusieurs fois exposé les causes aux lecteurs de la Revue. M. A. Picard, l'éminent Pré- sident de la Commission permanente des valeurs de douane, les analyse chaque année dans les Rapports qu'il publie à ce titre. C'est d’abord le défaut de nata- lité qui restreint inévitablement notre puissance pro- ductrice, qui nous empêche de multiplier les foyers d'influence et de propagande commerciale, en essai- mant dans le monde, et qui vient réduire l’élasticité du marché intérieur en facilitant les crises de surpro- duction. Le vaste champ d'expansion de notre domaine colonial ne pourra nous fournir une large clientèle que si nous savons y créer une exportation fructueuse en élevant à nous les habitants indigènes. La production de luxe constitue notre évidente supé- riorité sur les marchés étrangers, et les qualités qu'elle nécessite ne sont pas de celles qui s’improvisent en quelques années. Nous conservons donc ici des débou- chés assurés. Mais, d'un autre côté, le nivellement des fortunes, les variations fréquentes de la mode, la diffusion du bien-être restreignent la consommation de l’article de luxe, en développant dans une très large mesure l'écoulement de l'objet à bon marché. Il nous faut tenir compte de ces conditions nouvelles et orienter franchement dans ce sens une grande partie de notre production. 11 nous faut encore donner de la stabilité à nos tarifs douaniers, rajeunir nos méthodes de vente, ne pas chercher à imposer nos goûts, visiter davantage la clientèle et installer chez elle des comp- toirs ou des succursales. Nous ajouterons volontiers, avec M. A. Picard, que les qualités propres à notre race feront le reste. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. - “HÉSndnEREE + 0 008 ha de mc L. GUILLET — MÉTHODES D'ESSAIS MÉCANIQUES DES PRODUITS MÉTALLURGIQUES 615 LES MÉTHODES MODERNES D’ESSAIS MÉCANIQUES DES PRODUITS MÉTALLURGIQUES PREMIÈRE PARTIE : ESSAIS A LA TRACTION ET MÉTHODES POUVANT S'Y SUBSTITUER La multiplicité des produits métallurgiques, la séeurilé de plus en plus grande que recherchent toujours les constructeurs, avec parfois le maxi- mum de légèreté, la diversité des travaux souvent très pénibles auxquels on soumet la pièce finie, la variation de rendement qu'elle peut fournir suivant le traitement thermique qu'elle a subi, sont autant de facteurs qui ent conduit producteurs el con- sommateurs à essayer leurs matières premières au point de vue chimique, physique et mécanique et à créer de nouvelles méthodes permettant soit de multiplier les résultats, soit de simplifier le con- trôle, soitenfin de mettre en vue de nouvelles qua- lités du métal ou de mieux analyser les causes des défectuosités. Nous laisserons de côté les essais chimiques, qui ne présentent aucun caractère de nouveauté, si ce n’est dans le mode opéraloire même; nous signalerons toutefois l'emploi de plus en plus fré- quent des dosages électrolytiques, si rapides, si précis et si peu absorbants pour l’expérimenta- teur. Quant aux essais physiques proprement dits, résistance électrique, magnétisme, dilatation, den- sité, etc. ils ne trouvent d'applications que dans des cas particuliers et ne sortent guère du domaine du laboratoire. Il n'en est pas de même de la métallographie microscopique ; mais nous avons décrit en détails cette intéressante méthode‘. Qu'il nous suffise de répéter ici qu'on ne doit pas espérer qu'elle per mette de supprimer tous les autres essais. La métal- lographie est incontestablement une méthode de contrôle extrêmement précieuse, donnant souvent des indications qu'aucune autre méthode ne four- nit (tel, par exemple, l’état des divers constituants après traitement thermique), permettant de déter- miner, mieux que tout autre essai, des défauts locaux. Mais elle n'est point cette panacée univer- selle que veulent voir en elle certains industriels. Cela, on ne saurait le trop dire et redire. Nous nous bornerons à examiner l'évolution des 3: essais mécaniques, à décrire les plus modernes 4 L. Gurzrer : L'état actuel de la Métallographie micros- « 20 millimètres de différents types (les bar- retles modernes ne furent pas employées). Les résultats permettent de conclure que : 1° Le métal recuit est le plus fragile de tous; 2° Le recuit à la volée est préférable au recuit ordinaire ; 3° La double trempe améliore considérablement le métal, et cela d'autant plus qu'on permet à celte trempe d'agir plus efficacement (cas de l'arbre foré) ; 4 L'acier demi-dur- paraît offrir moins de ga- rantie. Examinons maintenant le cas d'un acier spécial très ulilisé en automobiles: il est dénommé acier mangano-siliceux ; employé d’abord pour les res- sorts, il sert depuis quelques années à préparer les engrenages, surtout ceux qui ne sont pas continuel- lement en prise. À ce point de vue, il doit être suf- fisamment dur pour ne pas se mâteret, d'autre part, ne pas être trop fragile; sans quoi, dans les choes, la pièce se briserait. Il a donc fallu déterminer d’une facon très pré- cise le traitement thermique le plus approprié. Des expériences ont été faites de différents côtés; voici celles qui ont été publiées par la Société Francaise de Constructions Mécaniques, et qui montrent l'emploi simultané de l'essai au choc et de l'essai à la bille. On a forgé, puis recuit, des barres à section 12X 12%, dans lesquelles ont été prises 100 éprouvettes entaillées de 10 X 107% de section. M Ces éprouvettes ont élé groupées par séries de 10, et chaque série de 10 a été simultanément trempée à des températures différentes. A cet effet, le pa- quet d'éprouvettes, disposé sur un support spécial, était plongé dans un bain de sel fondu, dont un couple électrique donnait à tout moment la tem- pérature. Le bain de sel était chauffé dans un four soufflé au moyen d'un ventilateur électrique, ce qui permettait de régler la température du bain en accélérant ou retardant la marche du ventilateur. Pour faire une opération de trempe à une lempé- rature donnée, on réglait le ventilateur de manière que la température du bain crüt lentement, et, lorsque l’on avait quelque peu dépassé la tempé- rature recherchée, on plongeait dans le bain la série d'éprouvettes, que l’on retirait après le temps d'immersion nécessaire pour réaliser l'équilibre de température, soit environ 10 minutes. L'action re- froidissante de la série d'éprouvettes est toujours la même; par contre, la vitesse d'accroissement de la température du bain sous l’action du chauf- fage n'est point susceptible d’un réglage précis. de sorte qu'il y a presque toujours un écart entre la température du bain au moment de l'immersion des éprouvettes et sa température au moment où on les relire. Cet écart n'est jamais considérable; pourtant, dans une expérience, il a atteint 40°. On a envisagé comme température de trempe la moyenne entre les températures initiale et finale du bain. Une fois les éprouveltes chauflées, on les a trempées par immersion dans l’eau froide; puis on a recons- litué de nouvelles séries de dix éprouvettes, cha- cune trempée à une température différente, on a procédé au revenu en plongeant les nouvelles séries dans les bains de sel fondu chauffés de la même manière et porlés à des températures différentes, et on les a de même trempées dans l’eau au sortir de ce bain de revenu. On a ainsi obtenu une série de cent éprouvettes différenciées par leur traitement thermique. On a mesuré leur fragilité au moyen du mouton Guillery décrit précédemment, et l’on a pratiqué, dans les L. GUILLET — MÉTHODES D'ESSAIS MÉCANIQUES DES PRODUITS MÉTALLURGIQUES 673 deux fragments de l’éprouvette rompue, une em- preinte de bille au moyen de l'appareil du mème auteur. On a donc possédé, pour chaque éprouvette ayant fait l'objet d'un traitement thermique diffé- rent, deux chiffres mesurant sa qualité, au double point de vue de la fragilité et de la ténacité. L'ensemble des opérations nécessaires pour le traitement thermique et l'essai des éprouvettes peut aisément être exécuté en une journée par deux opérateurs. Pour l'interprétation et la discussion de ces chiffres, il est plus commode de les grouper sous forme graphique non fragilité ne s'obtient que si l'on soumet la pièce cémentée à un traitement thermique défini. Dans l'étude que nous avons faite de la cémen- tation, nous avons cherché à préciser ce traitement thermique, et là encore ce sont les essais au choc sur barrettes entaillées qui nous ont donné les renseignements précis. Nous avons pu définir ainsi deux traitements ther- miques distincts que nous décrirons rapidement : 1° Cémentation lente à basse température (850°); trempe unique à 750°; 2% Cémentation rapide à température élevée (1.000°); double (fig. 5). Le La- rmpérotcrerend trempe, la pre- bleau ci-contre à a le 24 223 20 28 2829 30 » dnière à 900; la ee lee 850 |020 | 835 RE CHRSRRT À 1G Yo sonne 17500 pour abscisses1es deuxième à 190°. températures de en a) EST È Eee L Ce second traile- trempe et pour |*°|7*|7% Ÿ ïe ss fhzs fe ment avait déjà 5eS < #6 47 #5 Was 354,5 Jes 44 TAN TRS 10 ce ordonnées . alert —<5 — 2 DEA ee 0 GE indiqué par températures de M. Henry Le Chà- revenu. Chacun telier. des points qui y É : + Dans ces con- pe s q Ÿ 600 220 | 595 —+* JE + +47 : —+- 4 “ %à sont figurés cor- F dilions, on ob- respond donc à tient une àme , à : à L & 3 #0 35 35 #5133.,5 33 35 [35 ne Q : l'une des éprou roles lecelelel + —4= in Le de : +. dont la résis vettes. tance au choc est Pour les en- toujours aussi . 40 38 mA 32 [32/39 33 32/32 J ° grenages,letrai- |#0+0|#10! FT mass ame 5.5 Ds À 5 a + grande que celle tement consis- de l'acier initial tant dans la après recuit et trempe à 880? el AO le Jro {os RE 32 J2sj50 Ps £ même trempe à le revenu à 500° AUS ba f UN TE FF l'air. On peut A) = re SL AU LE #0 36 ai El 29/29 30 29 |31 ne ” donne d'’excel- |220/220/220| L PE a #47 parfaitement ob- lents résultats ; tenir 30 à 36 ki- la dureté et la JÈR DS 5 CURE 2% Jogrammètres Le ë[ Sn n œ S © © œ o o ogral : 2° résistance au $|$| ° © © o © oo ° oo sur éprouveltes k ge [31e] » 8 É se Li Ne choc sont sufti- 3 o A e o ge E 9e Frémont. santes. © ST Ê D AS D 26 Si, au con- On remarque- Fig. 5. — Tableau donnant les résultats obtenus sur acier au silicium à ressort traire, on cémen- ra toutefois com- bien de faibles changements dans le traitement apportent de va- riations dans les propriétés mécaniques de l'acier mangano-siliceux. Aussi doit-il être rangé dans la catégorie des aciers dangereux. D'autre part, l'essai au choc sur barreaux en- taillés est particulièrement intéressant pour régle- menter l'important traitement de la cémentation. On sait que ce traitement consiste à porter un acier, gé- néralement à très faible teneur en carbone (C— 0,120 à 0,250), à une température élevée en présence d'une matière susceptible de lui abandonner du carbone. Dans ces conditions, il y a formation d'une couche superficielle d'acier riche en cet élément, qui, par trempe, devient très dur, alors que l'âme peut pos- séder une certaine résistance au choc. Mais cette en faisant varier les températures de trempe et de revenu. te à 4.000° pen- dant quatre heu- res par exemple et que l'on effectue une seule trempe à 750°, l'acier possède une àme d'une grande fragilité, généralement entre O0 à G kilo- grammètres. On voit de suite l'importance que prend l'essai au choc sur barrettes entaillées dans la recherche et la définition des traitements thermiques. En terminant, faisons ressortir l'influence de la température sur la fragilité. Elle a été mise en vue dans un travail de la plus haute importance l'auteur, M. Charpy, a montré que la résistance augmente pour les aciers avec la température, atleint un maximum entre 100° et 120°, diminue ensuite pour atteindre un minimum entre 400° et 450°, et se relève enfin quand la température con- 674 tinue à augmenter et que l’on atteint le rouge. De l'ensemble des résultats obtenus, notamment d’ex- périences sur les aciers chrome-nickel, M. Charpy conclut : 1° L'emploi des aciers spéciaux au chrome et au nickel permet d'éviter à peu près complètement les inconvénients de la variation de la fragilité avec la température, y compris la fragilité à la tempé- rature du bleu; 2° L'augmentation de la fragilité aux basses tem- pératures doit être prise en lrès sérieuse considé- ration, en ce qui concerne les aciers doux, surtout lorsque ces aciers sont de pureté médiocre, car elle est parfois assez brusque et assez considérable pour pouvoir donner lieu à de graves accidents. D'autre part, dans une lettre fort intéressante qui vient d'être communiquée à la Section fran- caise des Méthodes d'essais (séance de juin), M. An- dré Le Chatelier a insisté sur la nécessité d'opérer à température définie pour avoir des résultats cons- lants, montrant qu'un faible écart de température amène des changements sensibles dans la fragi- lité. La température de 20-95 degrés devrait être adoptée. En résumé, il nous paraît indubitable que les essais au choc sur barreaux entaillés mettent en vue une nouvelle propriété du métal, la fragilité, que ne met en évidence aucune autre méthode d'essais. Constructeurs et métallurgistes sont parfaitement d'accord sur ce point. Deux difficultés se présentent : 1° Définir d’une façon précise les conditions dans lesquelles doit se faire l'essai. Les nombreuses études ont suffisamment mis en vue l'inflence des différents facteurs : dimen- sions des éprouvettes, formes et dimensions de l'entaille, appareils utilisés, pour que l'on puisse arriver rapidement à s'entendre. 2 Établir, pour les différents usages, les limites de la fragilité. C’est là que se trouve la difficulté la plus réelle, car seules des expériences pratiques permettront de définir ces limites. Une seule voie parait indiquée, celle d'expériences pratiques réi- térées. Déjà certaines limites peuvent être adoptées: nous avons indiqué 8 à 9 kilogrammètres pour les engrenages d'automobiles; pour les aciers doux, la limite de 12 kilogrammètres parait être un chiffre sur lequel on est à peu près d'accord, du moins pour un certain nombre de pièces de machines, telles que les arbres. Pour cela, comme le disait M. Charpy dans une lettre adressée à la Section française des Méthodes d'essais (séance de juin), il ne parait pas indispen- sable d'inscrire dès maintenant dans les cahiers des charges des conditions d'essai sur barreaux L. GUILLET -—— MÉTHODES D'ESSAIS MÉCANIQUES DES PRODUITS MÉTALLURGIQUES entaillés. Toutes les grandes administrations se réservent le droit, difficilement contestable, d'ail- leurs, d'effectuer, sur les produits qu’elles recoivent, des essais supplémentaires, à titre de renseigne- ment. Quant un essai a été ainsi longuement pra- tiqué, à litre facultatif, il devient très difficile au fabricant, qui l’a réalisé d’une facon à peu près cou- rante sans y être forcé, de se refuser à le voir insérer comme clause obligatoire dans de nouveaux marchés. Si, en suivant une fabrication de bandages, par exemple, on prélève, en outre des essais nor- maux, des barreaux de choc entaillés, on trouvera certainement que la grande majorilé des produits remplissent certaines conditions qui ne font défaut que dans quelques cas accidentels. Après une telle constatalion, il sera bien facile d'imposer ces con- ditions dans de nouveaux marchés, sans s'exposer à des majorations de prix excessives, et l'on provo- quera ainsi une amélioration graduelle des fabri- cations, qu'il sera facile d'accentuer par une aggra- vation également graduelle des conditions de réception. Cette méthode progressive a été appli- quée jusqu'ici pour tous les produits spéciaux, en ce qui concerne les essais de traction et autres ; rien ne s'oppose à ce qu'elle réussisse également pour les essais de fragilité. Il faut espérer que les essais se mulliplieront et permettront de trancher la question. III. — CONCLUSIONS GÉNÉRALES. Les méthodes que nous avons exposées sont toutes caractérisées par leur simplicité, leur prix de revient très faible, l’utilisation d'une minime quantité de matières. Certaines peuvent remplacer avantageusement l'essai de traction, d'un coût toujours élevé, d'une interprétation parfois difficile. L'essai au choc sur barreaux entaillés apporte des résultats nou- veaux el permet de caractériser la fragilité du métal. Toutes ces méthodes sont actuellement utili- sées : les unes, comme le cisaillage.le poinconnage, ue sont peut-être pas encore sorties du laboratoire; d’autres, au contraire, sont d'un emploi courant : ce sont l'essai de Brinell et l'essai au choc sur barreaux entaillés. Aucune n’est encore entrée dans les cahiers des charges; mais on sent fort bien, après les dis- cussions qui ont été soulevées au Congrès de Bruxelles, qu'elles ne pourront tarder d'y être admises et que, bientôt, producteurs et consom- mateurs trouveront un terrain d'entente, pour le plus grand bien de tous. Léon Guillet, Docteur ès-sciences, Ingénieur des Arts et Manufactures. 8 M.-A. LEBLOND — L'ÉTAT ACTUEL DE L'AGRICULTURE A MADAGASCAR 6 L'ÉTAT ACTUEL DE L'AGRICULTURE A MADAGASCAR À Madagascar, l'agriculture a été simultanément l'objet d'entreprises privées de colons ou de com- pagnies et aussi d'opérations financières de l'État. Sans administrer directement, l'État y dépense une notable part de son budget, impose et dirige les cultures; il s'efforce d'assurer la vente des produits et recueille une part des bénéfices sous forme d'im- pôts et contributions. L'étude de ce qui a été réalisé et de ce qu'on recherche encore à Madagascar offre donc un intérêt complexe. Pour le bien faire saisir, nous rappellerons tout d’abord quelques notions sur la valeur agronomique du pays et sur sa météo- rologie agricole, les résultats pratiques dépendant en majeure partie de l'observation scientifique des conditions naturelles. On proclame partout que « Madagascar est un pays pauvre »; c'est le mot d'ordre actuel. Le pes- simisme, qui tranche rigoureusement en France quand on envisage l'avenir agricole de la Grande Ile, s'autorise de la sentence de deux savants spé- cialistes, MM. Müntz et Rousseau, qui ont analysé à l’Institut Agronomique de Paris des échantillons .des terrains de Madagascar prélevés en 1897 : « Sur le haut plateau, disent-ils, lhumus et l'azote qui l'accompagne n'existent que dans la proportion de 0,5 °/, environ, l'acide phosphorique .de 0,3, la potasse de 0,2, la chaux de quelques mil- lièmes; en outre, la nature physique de ces terres, ‘compactes et imperméables, se prenant en pâte par la pluie, durcissant par la sécheresse, les rend dif- ficiles à travailler; elles se ravinent par les eaux flu- viales qui courent à la surface et se crevassent pen- dant la période sèche; il nous paraît done hasardeux ‘d'établir des cultures sur des terres placées dans de pareilles conditions. » Cet avis, auquel fut donnée la plus grande publicité, découragea tous ceux qui s'apprêtaient à partir pour Madagascar, voire ceux ‘qui s'y élaient déjà installés. L'arrêt n'est pourtant pas sans appel. Outre que MM. Müntz et Rousseau avaient, les premiers, fait des réserves sur l’infaillibilité d'analyses opérées à cette distance, ils ne pouvaient tenir compte de deux éléments importants, l'eau et le soleil, qui déterminent la richesse des cultures tropicales dans des terrains analogues, au Brésil, que les labora- toires déclaraient improductifs. Un savant francais ‘que le Gouvernement anglais a su fixer à l'ile Mau- rice, M. Boname, estima, à la suite d'études entre- prises sur les lieux pour les engrais, « que les élé- ments fertilisants, utiles à la végétation, ne sont pas tous ceux que le terrain contient, mais ceux qu'ab- sorbent par les racines, et aucune des méthodes employées par les chimistes n'est capable de les doser exactement‘ »; c’est donc à tort, selon lui, que l'on tenterait, sans faire d'abord de longs et patients essais, d'adopter pour les terres des contrées tro- picales les mêmes procédés de mesure qu'en Europe : 1 gramme d'azote, 1 gramme d'acide phosphorique et 1 gramme de potasse pour 1.000 de terre nor- male. Le D' Besson, administrateur en chef, qui a une longue expérience du Betsiléo et croit en son ave- nir, affirme que les échantillons soumis aux analyses des savants parisiens n'ont pas été prélevés avec le soin qui convenait : les indigènes ont eu soin de n'envoyer aux autorités que des échantillons de sols pauvres; sans doute, la chaux manque presque partout, mais toutes les plantes n'en sont pas éga- lement exigeantes; quant à l'acide phosphorique et à la potasse, le rendement des rizières indigènes et d'une sorte de tabac démontre empiriquement qu'il en existe, sur beaucoup de points, des réserves considérables. En outre, même là où le sol est le plus acide, on peut le corriger par l'épandage du fumier : dans cette seule province, sur 5 ou 6 mil- lions d'hectares, 50.000 seulement sont cultivés en rizières ; il n’est pas difficile d'y trouver des empla- cements de choix. Ce que M. Besson pose pour le Betsiléo, des officiers qui les ont étudiées le sugge- rent pour d'autres régions, telles que la vallé de l'Itomanpy, au sud, celle du Sihanaka”, et il est impossible au voyageur de ne pas constater la fer- tilité merveilleuse, non seulement côtiers, mais de certaines provinces centrales, telles que celle de Bétafo. Le géologue Gautier* attire l'attention sur le grand intérèt économique que présente l'exploitation des anciens fonds de lacs sur les hauts plateaux. La conclusion rigoureuse est qu'il n'y à point d'excuse à condamner de France l'agriculture à Madagascar, et que les enseignements de la pra- tique doivent seuls prévaloir. L'agronomie colo- niale ne fait que de naitre et les affirmations péda- des districts “ Rapport publié dans les journaux delile Maurice, en 1905. * « Notes, Reconnaissances et Explorations » de Tanana- rive, et Revue de Madagascar, de Paris. 8 GAUTIER : Madagascar, Challamel, 1902. Ouvrage extrè- mement important, où, en outre des études personnelles, sont le plus judicieusement interprétées les observations de tous les naturalistes de Madagascar : Baron, Standing, Jully, ete. 676 xogiques sont le plus souvent préconcues, erronées. domine généralement, el Ainsi s'accrédile dans les guides, manuels et pério- l'opinion qui diques de vulgarisation, est que Madagascar est divisé pour la météorologie agricole en deux sortes de régions : la côte, qui dépend du régime tropical, et le plateau central, qui est de climat tempéré; elle vient de ce qu'il fait toujours chaud sur la côte el” froid sur le plateau. Mais M. Fauchère, agent du Service d'Agriculture, expose’ que le climat du Plateau central présente deux saisons bien distinctes : l'une humide et chaude, l'autre sèche et froide (tandis que le climat tempéré se marque par une saison chaude relativement sèche et une saison froide et humide); aussi, malgré la température moyenne, faut-il regarder, contraire- ment à l'opinion générale, son climat comme fran- chement tropical. Cette considération est capitale pour la direction des opérations agricoles. En second lieu, les saisons ne sont jamais franches; presque tous les dégâts enregistrés jusqu'ici pro- venaient des petites saisons sèches qui coupent les grandes et abiment prématurément les cultures européennes déjà prospères; on ne peut obvier à cet inconvénient qu'en cultivant seulement des terrains où l’on puisse pratiquer l'irrigation. Ces notions sont celles auxquelles lon n'a pas songé à donner de publicité; ni les colons, ni les agents de l'Etat n'ont pu les utiliser, et il importe déjà de tenir grand compte de cela dans l'appréciation des résultats obtenus à Madagascar. L'emploi des procédés pratiques n'a pas été beau- coup plus judicieux que l'observation du elimat. Madagascar est la colonie où l'Etat à dépensé le plus pour l'Agriculture; de leur côté, les particu- liers y ont déjà enfoui des millions; les expérimen- talions savantes y ont été multipliées; mais l'irri- galion pour les terrains secs, le drainage pour ceux où l'excès d'humidité a tué jusqu'ici les cultures coloniales ou européennes et particulière- ment les céréales, les engrais concentrés”, lensilage, inconnu des indigènes et indispensable dans un pays où toute opération agricole doit être associée à l'élevage” et où les troupeaux déperdent de moitié dans l'hiver, ces moyens importants et simples ont été complètement inusités; ils n'ont pas été l'objet de sollicitude dans l'enseignement professionnel, par lequel l'Etat s'efforce d'adapter l'indigène à l'exploitation du sol, quoique l'éduca- ? Dans la revue locale Votes, Reconnaissances et Explo- ralions, 31 mars 1900 : article important. * Les particuliers ont fait usage d'engrais; mais ils ne les choisissaient pas assez concentrés pour diminuer les frais de transport, et ils employaient des nitrates que les pluies lavaient. * Cela a été mis en valeur dans toutes les délibérations des Comices de Madagascar. M.-A. LEBLOND — L'ÉTAT ACTUEL DE L'AGRICULTURE A MADAGASCAR tion du Malgache ne puisse précisément débuter que par ce qu'il y à de moins compliqué. Si le Service de l'Instruction n'a donc encore rien tenté, dans le Sud les officiers ont, du moins, essayé de discipliner les indigènes à nos coutumes euro- péennes; ils ont introduit la charrue; mais elle était trop perfectionnée pour le Malgache, qui s'en servait difficilement et ne savait la réparer : après le départ des Lyautey et des Gaub, toutes les char- rues ont été abandonnées; l'esprit de réformes à apporter aux procédés routiniers des indigènes s'est trouvé alors d'autant plus rigoureusement condamné par l'élément civil qui a remplacé l'élé- ment militaire dans l'Administration. Même parler de ces réformes, c'est provoquer souvent le rire dédaigneux et paresseux des colons expéditifs et fatigués; de son côté, l'administra- teur sourit de la prétention de vouloir enseigner au Hova ou au Betsiléo l'irrigation, et il est vrai qu'ils y excellent avec un art instinctif; mais ils ne la pratiquent que pour les rizières, et il importe précisément d'adapter leurs connaissances routi- nières à la création de nouvelles cultures. Le général Lyautey a heureusement indiqué la néces- sité d'attirer à Madagascar des administrateurs qui eussent déjà étudié en Indo-Chine les fécondes méthodes asiatiques d'irrigation !; les jeunes colonies ne prospèreront qu'en utilisant l'expé- rience des anciennes. II Le Gouvernement général a institué un Ser- vice d'Agriculture, dont il recrute les agents, de préférence, parmi les élèves de l'Ecole d'Agricul- ture coloniale de Nogent, qui ont recu un enseigne- ment spécial. Le directeur du Service et quel- ques-uns des inspecteurs ont même été compléter leurs études en des missions au Japon, au Brésil, à la Jamaïque, au Cap, à Java et à Sumatra. Plusieurs jardins d'essai ont été créés dans la Grande Ile. Le plus connu est celui de Nanisane, près de Tananarive, établi dans un terrain qu'on à choisi pauvre afin que les expériences pussent valoir pour l’ensemble du Plateau central qui est géné- ‘alement ingrat: il faut dire qu'elles ont donné jusqu'ici de déplorables résultats, mais qu'on peut l'imputer parfois à la direction insuffisante. On y a adjoint une Æcole pratique d'Agriculture et de Sériciculture, mais il n’y a point de laboratoire d'analyses. Les essais ont été faits assez rapide- ment, sans Connaissance pralique des cultures: ils ont été trop nombreux; le Service de l'Agriculture s'est, en somme, borné à acclimater quelques cen- * Le Sud de Madagascar. Lavauzelle, éditeur. î £ { L d + { LE * M.-A. LEBLOND — L'ÉTAT ACTUEL DE L'AGRICULTURE A MADAGASCAR 677 taines de plants utilisables à une très longue échéance : Xhaya senegalensis, Cryptomeria japo- nica, igname de Chine, opuntias, courges de l'Ohio, Fourcroya gigantea, ete. On est universellement d'accord à reconnaitre que ce Service colonial ne peut être pris comme exemple. La plupart des colons n'ont pas mieux réussi que l'Etat : anciens officiers, petits bourgeois en quête de fortune rapide, fils de famille, nobles curieux d'improviser de grandes exploitations en des pays neufs, ni les uns ni les autres n'étaient préparés à entreprendre rationnellement et encore moins pra- tiquement les cultures coloniales sur une grande échelle; c’est done très injustement qu'en France on à condamné les entreprises agricoles à Mada- gascar. Aucun voyageur impartial n'a pu parcourir ce pays sans reconnaitre que les expériences qui ont échoué n'étaient pas concluantes; les colons sérieux, établis sur le bord des rivières de la pro- vince de Tamatave, sont, au contraire, très satis- faits des résultats donnés par leurs plantations. Les rapports des inspecteurs des Eaux et Forêts établis- raisons sent assez péremploirement Îles lesquelles les compagnies ont échoué dans lin- pour dustrie du bois : coupes désordonnées, puis aban- données, agents déplorablement choisis. En résumé, service d'État, entreprise privée, presque tout a été improvisé à la légère à Madagascar; on n'a jamais eu recours à l'expérience des colonies voisines de la Réunion et de l'ile Maurice, où, depuis plus de deux cents ans, une population, de souche euro- péenne, très industrieuse, essaie de perfectionner graduellement les diverses cultures, où des travaux très sérieux ont été faits par des agronomes et des naturalistes appréciés non seulement en France, mais en Angleterre et en Allemagne, comme Bory de Saint-Vincent, Joseph Hubert, Jacob de Cor- demoy et Bordage. [TI Lorsqu'on aura su recueillir la lecon de tant de lravaux spéciaux, les ressources de l'Agriculture seront multipliées. Déjà, malgré les mauvaises conditions dans lesquelles on travaille actuellement, un bel avenir est réservé à plusieurs cultures. Il est reconnu que les cultures riches doivent être tentées seulement sur la côte par l'Européen. Le caféier y pousse à l'état sauvage et est cultivé depuis long- temps dans toute l'ile; il rapporte même sur les hauts plateaux", mais il y demande trop de soins ! On avait vu des caféiers chargés à rompre dans les fossés des villages et on en avait inféré pouvoir entre- prendre de grandes plantations; mais elles ont échoue : c'est que, dans ces fossés, ils profitaient des engrais du village et étaient à l'abri du vent. : pour être susceptible de grandes exploitations. Les espèces les meilleures sont le Bourbon et l'Arabica, qui dégagent un arome beaucoup plus fin que le Libéria; mais celui-ci seul a résisté jusqu'ici à l'Hemileia, qui à déjà ruiné les caféiers des Masca- reignes : les colons en ont montré le plus vif découragement, jusqu'à abandonner le café; cepen- dant, l'administrateur Chessé a constaté que tous les Bourbons plantés par les indigènes de Maha- noro étaient vigoureux et rendaient, parce qu'ils les recouvraient de détritus : c'est le manque de fumure et l'écroutage des terres trop profond et trop fréquent qui a causé l'insuceès des colons; les observations de certaines personnes tendent même à établir que l'Hemileia ne lue que les plants déjà délicats, mal entretenus, et qu'il n'a guère d'action sur les hauts plateaux. Par contre, le Libéria prend une grande extension entre Tamatave el Mananjary, et une enquête de la Revue des Cultures coloniales a établi que le peu de valeur de cette espèce, est dü à une préparation défectueuse : le cours en peut être relevé sur le marché européen. Il n'est pas dit enfin que, même pour le Bourbon, l'avenir ne soil pas meilleur : de curieuses tentatives de bouturage ont été faites par M. Manès à la Réunion et pour- raient avoir une grande répercussion sur la culture de celte plante, qui n'aurait plus besoin d'être taillée et pourrait être plus facilement protégée, la récolte étant en outre plus rapide. La canne à sucre est très riche dans presque toutes les régions ; surtout à la côte, l'industrie suerière, complètement ruinée depuis la conquête par les impôts excessifs, — le sucre revient à plus cher qu'en France, — retrouvera une suffisante prospérité lorsque le Gouvernement l'aura affran- chie des taxes de consommation; toutefois, il n'accordera pas l'exonération des taxes douanières que réclament les planteurs et qui leur assurerait seule le gros bénéfice pour lequel ils désirent tra- vailler! ; mais la première mesure suffira à assurer le marché malgache aux sucres indigènes”. Le plus grand avenir est promis au cacao, dont i La lettre du général Galliéni en date du 18 novembre 1904 présente les arguments du Gouvernement. On à très juste- ment répondu que celui-ci pouvait remédier à la Conven- lion de Bruxelles en donnant les primes aux productéurs : à notre sens, après un examen de la situation actuelle, cela s'impose à Madagascar, malgré la nécessité pour le Gouvernement de modérer ses dépenses. Dans un Rapport très bien fait à la Chambre d'Agriculture, M. Jénot à exprimé le regret que «les plénipotentiaires francais à la Conférence de Bruxelles n'aient pas réussi à placer les colonies francaises dans les mèmes conditions que les colonies anglaises et néerlandaises. » : On sait que la vanille a été presque abandonnée à la suite de la baisse considérable. Un Rapport judicieux de M. Desloy montre que les groupements coopératifs entre producteurs peuvent seuls remédier à la baisse, el, en effet, à la Réunion, M. Hermann a pu, par ce système, relever le cours du géranium. 618 la France importe pour 33 millions de l'étranger et pas méme un de ses colonies : il est si vigoureux dans l'ile que des pieds abandonnés sans soins pendant dix ans, aux environs d'Andévourante, ont parfaitement résisté à l'envahissement de la brousse el ont donné naissance à d'importants semis spon- lanés. Les plantations des environs de Tamatave salisfont pleinement les colons qui ont su attendre assez longtemps la récolte. Le cocotier, la plante tropicale sur laquelle le Service de l'Agriculture avait fondé ses plus géné- reuses espérances, y dépensant le gros de son actif”, après avoir élé l'objet de félicitations officielles, commence à donner de graves inquiétudes : on s'est apercu (1905) que les sables de là côte Est | sont trop pauvres en calcaire ; l'arbre dépérit vite | et achève d'être abimé par l'£Zryctes. Mais il pros- père dans les alluvions des vallées inférieures et sur la côte Ouest : ses plus grands ennemis y sont les rats, d'une propagation effroyable, qui se lapissent jusqu'au cœur des palmes, au point que des chiens ratiers sont indispensables? ; les coco- teries actuelles, dont le nettoyage exige peu de | main-d'œuvre, sont estimées assez sérieusement devoir donner 30 °/,. Le coton était autrefois cultivé par les indigènes | pour leurs tissus et l'objet de transactions locales importantes. Il y a tout avantage à reprendre, pour les exploiter avec une industrie moderne, ces plantations auxquelles les Malgaches étaient habi- tués et se remettraient avec plus de plaisir qu'à autre chose : point considérable pour eux, la cullure, contrairement aux cultures dites riches, n'exige pas une longue attente, est facile et peu couteuse”®, D'autre part, elle ne préjudicierait point à celle du riz et aurait mème l'avantage de réduire la misère qu'apportent à la population les trop fré- quentes invasions de sauterelles qui dévastent les rizières; le coton, étant respecté des acridiens, serait en quelque sorte pour les indigènes une assurance contre la famine. Il vient parfaitement dans plusieurs districts du plateau et surtout dans 1 140.000 plants ont été répartis dans 200 cocoteries à Madagascar (Sur sa culture, cf. BENscH : Revue de Mada- gascar, 40 décembre 1903, et les Bulletins de la Chambre d'Agriculture). M. Paul Hubert, qui a séjourné à Mada- gascar, à publié, dans la Bibliothèque pratique du colon H. Dunod et Pinat, éditeurs, 4907), un livre sur le cocotier qui est très complet au point de vue agricole, industriel et commercial : il contient notamment les conseils très pra- tiques d'un homme d'expérience et de bons renseignements sur les cultures intercalaires. ? Le Gouvernement a aussi introduit des hiboux et a conclu ensuite à leur inutilité. Selon M. Boname, on les a introduits dans les conditions les plus irrationnelles et ils peuvent être, au contraire, fort utiles (Bulletins de la Station | agronomique de l'ile Maurice, 1902, n° 6). tapport Herscher, 1904. Pour le colon, le prix de la cueillette est sensiblement le même qu'en Amérique. M.-A. LEBLOND — L'ÉTAT ACTUEL DE L'AGRICULTURE A MADAGASCAR tout le Nord-Ouest, où l'on à un sol admirablement adapté et un régime météorologique excellent : une saison humide et pluvieuse, correspondant à la pé- riode de croissance de la plante, et une saison fran- chement sèche. Les essais ont été très heureux: mais les colons hésitent par peur du manque de main-d'œuvre qui reste la principale question. Un spécialiste qui a écrit une étude très sérieuse, M. Georges Froment, estime qu'à cause de la rareté de la main-d'œuvre, il faut d'abord travailler à l'extension progressive de la culture indigène au lieu de risquer de grandes exploitations euro- péennes'; mais, d'un autre côté, les indigènes ne s'y mettront que si on leur assure la vente. Selon l'estimation de fonctionnaires agronomes, pourtant peu optimistes à l'ordinaire, la main- d'œuvre n'est pas un si grave problème, puisque la cueillelte ne dure qu'un mois à un mois et demi, que les Malgaches aiment les occupations inter- mittentes et surtout qu'on y peut employer les femmes et les enfants”. Il semble bien que c’est de ce côté qu'il faut hardiment se lancer. Il serait à souhaiter que l'Association cotonnière coloniale s'occupät sérieusement de la Grande Ile, et,comme il y à contre elle de fortes préventions à Madagascar, où l'on reproche à ces grandes associations pari- siennes d'être seulement des réunions d'hommes d'affaires, de banquiers, sans aucun savant, elle n'arrivera à y acquérir de l'influence que si elle accorde aux colons plusieurs représentants dans ses assemblées: elle ne risquerait rien à confier sous contrôle des essais modestes de plantation à des colons dans les régions où le métayage est le plus facile à instituer. Aux yeux d'hommes avisés, le chanvre, le raphia, la ramie et d'autres textiles sont susceptibles non seulement de plus considérables exportations, mais d'une exploitation industrielle moins routi- nière, qui en doublerait le rendement. L'aloës est une culture d'avenir, surtout pour ceux qui sau- ront en utiliser les déchets comme engrais*. En ce moment, c'est le caoutchouc qui concentre le plus l'attention européenne. L'avenir en est illi- ! L'opinion de M. Froment semble d'autant plus judi- cieuse que les agronomes recommandent de cultiver le coton en assolement avec le riz (et il est vrai aussi le tabac), qui ne donne de profif qu'aux Malgaches. Notons qu'à l'île Maurice M. Boname a dit que cette culture serait plus facile aux petits planteurs à cause de la main-d'œuvre : il est en parfaite concordance avec l'opinion de M. Froment. La pro- duction supplémentaire de l'huile de coton est un attrait pour l'indigène. 2 C'est également l'opinion de M. G. Herscher dans son excellent Rapport aux Comices agricoles en 1904. Mettons en relief qu'il conclut à l'introduction et l’acclimatement d'une variété de haute valeur plutôt que de grande pro- duction. 3 Les colons auront avantage à étudier les importants travaux de M. Boname sur le fourcroya et le sisal. | PR TL "a rimn… M.-A. LEBLOND — L'ÉTAT ACTUEL DE L'AGRICULTURE À MADAGASCAR 679 EE inité, puisque la consommation mondiale est en progrès constant : elle à passé de 39 millions de kilogs en 1896 à 65 en 1903, et Madagascar est émi- nemment un pays de caoutchouc (il y en à plus de cent espèces) ; le cours de ses produits n'a cessé de monter depuis que le Gouvernement est intervenu pour surveiller la fraude. Malheureusement, les indigènes continuent à le récolter en saignant les plantes à les tuer et en arrachant les racines. Le _ Brésil a édicté, pour protéger ses forèts d'AHeveas, des règlements sévères qu'il est indispensable d'adopter : il s'impose de limiter le nombre, des saignées annuelles, de les interdire Sur les plants jeunes et dans le voisinage des racines ou du collet. Autant de mesures qui paraitront oppressives à l'indigène et où il ne saura même se reconnaitre; il faudra en arriver à diviser les territoires à caoutchouc en lots sur lesquels la récolte ne serait autorisée que par roulement. C'est que les réserves naturelles sont déjà aux trois quarts épuisées. Dans les colonies anglaises, comme Ceylan, surtout dans les colonies allemandes, Nouvelle-Guinée, Samoa, Cameroun, Est-Africain, et même dans les Indes Néerlandaises, on s'est mis avec une véritable lièvre à multiplier les plantations artificielles de caoutchoues ; à Ceylan et à Malacea, on à fait venir en quelques années près de 5 millions d'arbres de Para: selon le Mouvement géographique de Bruxelles, l'Etat léopoldien a introduit en peu de temps 12.500.000 pieds, grâce à une action éner- gique exercée sur ses fonctionnaires el sur les Sociétés concessionnaires et à un système d'amendes draconiennes. À Madagascar, le Gouvernement n'a pu se permettre de pareilles dépenses, et d'ailleurs les particuliers qui ont fait des essais dans ce sens n'ont pas souvent réussi; mais leurs tentalives n'étaient pas toujours ralionnelles, IL n'y existe aucune Sociélé qui se soit attachée à l'entreprise comme la New Guinea C allemande; les négo- ciants du Havre et de Bordeaux pourraient donner une impulsion plus vive à l'Association caoutchou- tière coloniale, créée en 1905 pour développer la production et assurer le marché direct en France; il serait temps que, dans une vaste contrée comme Madagascar, où les variétés caoutchoutifères sont si nombreuses, encore inconnues ou mal étudiées, où l’on trouve du précieux produit jusque dans les herbes, une mission scientifique et commerciale aille travailler la question du caoutchouc aussi sérieusement que la Mission lyonnaise la fait pour la soie en Extrème-Orient; voilà pour Bordeaux une heureuse occasion de rivaliser avee Lyon”. ! Le Gouverneur général Augagneur vient de mettre un impôt de 0 fr. 40 par kilog sorti, qui aurait pour effet, selon les commerçants métropolitains, de contribuer à empêcher les indigènes de mélanger de terre les caoutchoues en for- Du moins, les forêts sont-elles encore très riches dans la plupart des provinces, sauf près de la baie d'Antongil, où la proximité de la mer à permis de les exploiter depuis longtemps, ce qui à été pratiqué avec un gaspillage sauvage, par des coupes sans méthode, parfois à blanc, On importe les bois étrangers quand on devrait en exporter dans l'Afrique du Sud, qui en est grand consommateur : les bois de Madagascar, légers, résistants et faci- lement injectables, y seraient fort recherchés, le Transvaal et le Natal faisant une dépense considé- rable de traverses‘. Dans le centre, si le thé n’a donné de bons résultats que dans les jardins, le mürier est planté sur une grande échelle par PAd- ministration et réussit. L'aloès sisal ÿ trouve un lerrain d'élection. Le coton reprend. Les céréales, telle l'orge, donnent jusqu'à quatre récoltes par an dans les provinces de l'Hasy et du Vakinankaratre. Un nombre multiple de petites cultures ne peuvent manquer d'y devenir rémunératrices : des graines oléagineuses comme larachide, qui a rendu lai- sance à certains cultivaleurs de la Réunion, et le ricin, pour lequel on est tributaire de Finde, jus- qu'aux plantes à essence, qui viennent merveilleu- sement : géranium, vétiver, roses surtout, dont la profusion et le parfum sont incomparables. Ananas, bananes, fruits tropicaux y doivent devenir Fobjet d'une industrie de conserves qui, depuis peu, rap- porte à la Réunion. Ee tabac exige les meilleures terres, mais rend avantageusement et à en réserve une clientèle obligée jusqu'ici de s'approvisionner en Algérie*. Le Plateau central est surtout la contrée des grandes prairies : particulièrement dans le Betsiléo, une humidité constante y est favorable, «et l'indigène pratique au plus haut degré l'art de l'irrigation » (Lyautey); il reste à lui apprendre la conservation des fourrages et le fauchage”, qui, en outre, empêchera les herbes de devenir ligneuses, comme elles y tendent après les incendies dont usent et abusent les Malgaches pour les renouveler. cant le traitant à un examen plus sévère, el le gaspillage des réserves. — En 1901, les caoutchoucs exportés de Ma- dagascar représentaient une valeur de 661.480 francs; en 1905, ôn en a exporté pour 4.840.926 francs et en 1906 pour‘ 1.511.332 francs. — Sur l'hazondrano, lire le travail de M. Thiry : Bulletin économique de Madagascar, 4° trimestre 1903. Sur les autres espèces, cf. L'Agriculiure à Madagascar de MM. Prudhomme et Challamel. 1 Pour le bois de santal, ef. le Moniteur officiel du Com- merce du 7 nov. 1901. 2 Le Gouvernement a planté du quinquina, qui peut aise- ment devenir d'un grand rapport. Cf. Revue de Madagascar du 10 févr. 1902. 3 Les administrateurs nous ont affirmé que les indigènes ne sauront jamais s'assouplir au fauchage, que la routine prévaudra toujours. Rien ne parait moins juste à celui qui a vécu dans d'autres colonies, où l’on a toujours commence par tenir des propos analogues sur la pare se des indigènes. Les Malgaches, particulièrement, ont su s'adapter à l'in- dustrie si délicate de la sériciculture. 680 M.-A. LEBLOND — L'ÉTAT ACTUEL DE L'AGRICULTURE A MADAGASCAR Le riz demeure la richesse du Centre, où il y à toujours, comme du temps du Colonel Lyautey, « surproduction et pas d'écoulement ». C'est là une question d'autant plus importante que l'avenir du chemin de fer, si discuté, en dépend en grande partie, et nous l'avons particulièrement étudiée dans notre voyage. Certaines provinces, telles que le Sihanaka, sont appelées à des rendements beau- coup plus considérables lorsqu'on aura pris lhabi- tude d'y repiquer la plante. Même dans celles où les esprits désenchantés estiment que tous les terrains favorables sont occupés, l'extension de l'irrigation artificielle saura aisément y en adapter d'autres. On en peut partager le pessimisme des colons aigris: le riz est la vraie et inépuisable ressource de la Grande Ile‘, non seulement parce qu'il deviendra la prinei- pale exportation, mais parce que cette précieuse el familière plante est la nourricière des Malgaches, qui l'aiment presque religieusement; considération très importante, il assure à lui seul l'alimentation, et à l'extension de sa culture se réglera le dévelop- pement de la population. Cette extension reste le grand espoir non seulement pour la plus-value éco- nomique du pays obéré, mais pour la régénération de la race indigène. C'est presque en l'envisageant seule que peut prendre assez de confiance dans l'avenir celui qui, après ces dix premières années . d'occupation, à voyagé à Madagascar, demandant aux statistiques officielles, à la critique privée, aux calculs particuliers, aux investigations dans la psy- chologie des indigènes et à l'étude de leurs ressources artistiques aussi bien que dans les rapports écono- miques, le principe de la meilleure méthode d'ex- ploitation. TV Delamain-d'œuvre dépendévidemment, en grande partie, l'agriculture à Madagascar. On à beaucoup préconisé l'immigration de coolies hindous ou chi- nois el nous estimons qu'elle peut ètre précieuse aux grandes exploitations : les excellents résultats obtenus dans les propriétés sucrières aux Masca- reignes prouvent qu'il ne faut nullement s'alarmer, comme on l'a fait, parce que cette main-d'œuvre à 1 C'est d'ailleurs la conclusion d'une série d'articles docu- iuentaires très bien faits parus dans Le Petit Courrier de Tananarive sous la signature E. T. Les mesures qu'on y juge nécessaires sont : la sélection des semences, l'amélio- ration de la préparation, la distribution des qualités suivant les sols etles climats, l'économie dans la récolte, le battage, surtout la préparation du grain brut en grain marchand, l'utilisation des déchets. eu le plus déplorable rendement sur les chantiers du chemin de fer. Les Chinois, particulièrement, doivent être recherchés parce qu'ils épousent volon- tiers des femmes malgaches et se fixeraient facile- ment dans le pays. La petite culture devra avoir recours aux autoch- tones. Contrairement aux avis répélés des colons, les seuls qui semblaient compétents pour une pareille estimation, le Malgache est capable d'un labeur agricole suiviet fructueux. Il travaille même souvent de manière à écarter toute concurrence européenne : les Francais qui ont tenté la culture rationnelle du riz n'ont pu lutter avec lui et ont dû cesser; depuis la conquête, nous lui avons appris à produire les légumes à meilleur marché que nous; et l’on peut parfaitement prévoir que les diverses petites cultures deviendront, l'une après l'autre, son monopole, à mesure qu'il s'en sera assimilé la pra- tique par limitation des Européens. Dans des études minultieuses, un colon intelligent de Fiana- rantsoa, M. de Chazal, à montré quels soins méti- culeux il faut avoir pour chaque plante et presque quelle expérience héréditaire de la nature tropicale il faut tenir pour prévoir les intempéries, connaître les insectes et parasites, savoir rapporter chaque ennui inattendu à une cause souvent invisible : l'instinct du Malgache y supplée, et seul il est assez patient et museur pour donner à chaque arbuste qui lui appartient des soins minutieux. Telles cul- tures auxquelles on renonce par l'impossibilité pour l'Européen d'en diriger une exploitalion en grand, — ainsi le café sur le Plateau central, — sont par- faitement susceptibles de S'y propager dans les villages, pour peu qu'on distribue quelques pieds de chaque arbre à chaque habitant par un système dérivé de celui des Indes Néerlandaises, mais plus libéral. Le Malgache se refusera à soigner 60 plants du même arbre, mais il s'intéresser…a à soigner 10 plants de six espèces différentes : il aime la diversité dans le travail. Il importe de considérer cette disposition d'humeur de l'indigène, s'harmo- nisant d'ailleurs à la diversité extrême d'un pays qui ne parait pauvre que parce que les ressources en sont extrêmement variées et qu'alors on les con- naît mal, et ne donnera de déception que si l'on veut le soumettre comme des régions monotones à deux ou trois grandes cultures d'importation, tandis qu'une civilisation assez ingénieuse pour amener l'indigène à s'adapter aux mille ressources natu- relles sera florissante. Marius-Ary Leblond. À { “ 4 À l è pts = ré Dot PU" ". BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 681 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 4° Sciences mathématiques Riollot (J.). — Les Carrés magiques : contribution à leur étude. — 4 vol. gr. in-8° de 119 pages avec 311 figures. (Prix : 5 fr.) Gauthier-Villars, édi- teur. Paris, 1907. Voici un livre de plus sur les carrés magiques; c'est un sujet qui passionne, à juste titre, beaucoup d'amateurs, et qui ajadis provoqué les efforts de mathé- maticiens illustres. M. Riollot s'est attaché à indiquer les principales méthodes en usage pour la construction de ces figures arithmétiques, pour lesquelles il éprouve une évidente prédilection. Il y a même ajouté (p. 33 et suiv.) des remarques ingénieuses et qui semblent nouvelles au sujet des transformations. Elles peuvent être utilisées pour la construction de carrés magiques impairs ou impairement pairs. Les buit chapitres dont se compose l'ouvrage, divisé en trois parties (Figures des nombres sur l’échiquier, Propriétés des carrés magiques; Construction des carrés magiques), sont intitulés : Considérations géneé- rales; Définitions, notations ; Classification des carrés magiques; Propriétés arithmétiques et algébriques; Propriétés géométriques; Propriétés particulières aux carrés magiques singuliers; Procédés divers de con- struction; Méthode du carre quide; Figures magiques diverses. Le livre est édité avec grand soin, et les figures sont d'une exécution irréprochable. Il nous sera permis d'exprimer un regret: c'est qu'en abordant un sujet de cette nature, l'auteur ait passé sous silence le travail le plus remarquable et sur- tout le plus scientifique publié de nos jours sur la question, celui de M. Gabriel Arnoux, dont le nom n’est même pas cité. M. Riollot ne mentionne nulle- ment non plus les recherches si remarquables de M. G. Tarry, ni celles de M. Portier; il n'indique pas le problème de la magie aux divers degrés, qui présente cependant un intérêt incontestable. Puisqu'il s'occupait de la classification et de la nota- tion, l'auteur aurait pu faire œuvre bien utile en cherchant à présenter une terminologie rationnelle à la place des surabondants vocables, souvent bizarres, au milieu desquels l'esprit se perd, et qui souvent ne sont pas employés dans le même sens : carrés diabo- liques, cabalistiques, sataniques, etc. La classe des carrés hypermagiques de M. Arnoux répondait à une notion scientifique précise; les expressions de carrés bimagiques, trimagiques, etc., proposées par M. Tarry, auraient leur raison d'être. Rien de tout cela n'est seulement noté. Il serait nécessaire de mieux se documenter quand on écrit sur des sujets de ce genre. En dépit de ces critiques, dont M. Riollot pourra faire profit dans une deuxième édition, les personnes qui s'occupent de carrés magiques liront avec plaisir son ouvrage et rendront hommage à son ingéniosité. C.-A. Laisanr, Examinateur d'admission à l'Ecole Polytechnique. Simon (M.). — Methodik der Elementaren Arith- metik in Verbindung mit algebraischer Analy- sis. — 1 vo/. de 108 pages. (Prix: 4fr.) B. G. Teubner. Leipzig, 1907. Cet opuscule, œuvre d’un praticien de l’enseignement, rappelle l'excellente « Encyklopädie der Elementar- Mathematik » de Weber; comme cette dernière, il est REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. inspiré des idées qui, depuis Weierstrass et Cantor, cherchent à rénover, dansles établissementssecondäires allemands, l’enseignement des Mathématiques et plus particulièrement de l'Arithmétique et de lAlgèbre. Il s'adresse avant tout aux professeurs et aux étudiants et établit toute l'importance d'uneinitiation rationnelle, respectueuse des données de la psychologie. Il montre ensuite que la science des nombres est une et qu'il ny a pasde cloison étancheentrel'Arithmétiqueetl'Aigèbre. Au contraire, toutes les deux doivent ètre comprises comme la préparation à la théorie des fonctions, et l'idée directrice de tout enseignement élémentaire est l'acquisition parfaite de la notion de fonction. Il y à quelques pages vigoureuses sur l'étroit formalisme de certain enseignement, sur l'art du calcul qui remplace tout raisonnement, sur la « boutique de formules » en quoi se résume l'Algèbre de certains éducateurs. Notes et Formules de l'Ingénieur et du Constructeur mécanicien, publiées par un Comité d'Ingénieurs, sous la direction de MM. Cu. ViGreux, /ugénieur des Arts et Manulactures, Cu. MizanDREe et R. P. Bouover. — 15e édition, suivie d'un Vocabulaire technique en lrançais, anglais et allemand. — 1 vol. in-16° de 2,000 pages avec 1.500 fig. Prix cartonné: 12/7. 50. E. Bernard, éditeur, 1, rue de Médicis. Paris, 1907. Cette quinzième édition — soigneusement revue el complétée par des chapitres nouveaux, relalifs en par- ticulier à l'Electrochimie, à l’épuration des eaux, à l'automobilisme, ete. — contribuera à maintenir cé ouvrage au premier rang des aide-mémoire que nous possédons en France dans le domaine de l'Art de l'in- génieur. 2° Sciences physiques Wurtz (H.).— Les Obturateurs. Achat, essai, usage. — 1 vol. in-16 de 112 pages, avec 32 figures. (Prix: 2 fr.) H. Deslorges, éditeur. Paris, 1907. L'auteur a essayé, dans ce petit livre, de donner aux amateurs des notions pratiques sur le choix et l'usage des obturateurs. Les différentes variétés sont exami- nées successivement, et les expériences très simples que l’on doit faire pour reconnaitre les qualités et les défauts de l'instrument sont décrites en détail. Le pho- tographe pourra ainsi se garder facilement de l'achat d'un mauvais outil, et mieux se servir de celui qu'il a acheté, principalement par la connaissance exacte des temps de pose qu'il emploie. Une place importante à été réservée aux obturateurs de plaque. Godchot (Marcel), Préparateur au Laboratoire de Chimie organique de l'Ecole supérieure de Phar- macie de Paris. — Contribution à l'étude des hydrures d'anthracène et de leurs dérivés. 1hese présentée à la Faculté des Sciences de Paris. — Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1907. Le travail de M. Godchot est une application, à l'an- thracène, de la belle méthode d'hydrogénation de MM. Sabatier et Senderens. Par des voies différentes, plusieurs auteurs avaient réussi à préparer un certain nombre d'hydrures d'an- thracène. En 14868, Græbe et Liebermann ont signalé le dihydrure y, obtenu par l'action de l'alcool et de l’amalga- me de sodium sur l’anthracène; plus tard, Græbe prépara l'hexahydrure C‘#H'6 et Lucas le décahydrure CH et le perhydrure C#H*, en soumettant l'anthracène à l'action de l’acide iodhydrique et du phosphore à 250. Mais c'était là une méthode pénible, ne produisant que 16** 682 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX de faibles quantités de matière, ce qui a rendu diffi- cile l'étude de ces composés. On sait que la constitution de l’anthracène est celle de deux noyaux benzéniques unis entre eux parl'inter- médiaire d'une branche éthanique. Il était curieux de voir si la méthode d'hydrogénation par le nickel don- nerait des résultats identiques à ceux qu'avait fournis le benzène. Une difficulté se présentait pour réaliser cette réaction. Pour que l’action hydrogénante soit prépon- dérante, il est nécessaire de ne pas trop élever la tem- pérature du nickel divisé, afin d'éviter l’action destruc- tive exercée par le métal sur les hydrures aromatiques. Or, l’anthracène est un corps peu volatil. Il bout vers 350°, et à cette température le nickel divisé n'a aucune action hydrogénante. M. Godchot a vaincu la difficulté. Il a chauffé le nickel vers 260°, et, profitant de la faci- lité avec laquelle se sublime l’anthracène, il l’a entraîné lentement au moyen de l'hydrogène sur le métal divisé. La réaction hydrogénante a eu lieu; il s’est formé un tétrahydrure d'anthracène. Ce dernier, plus volatil que l’anthracène, a été dirigé à son tour surun nickel porté à plus basse température (environ 200); il a fixé quatre atomes d'hydrogène et s'est changé en octohydrure. Enfin, cet octohydrure, qui se sublime vers 80, a fixé quatre et six atomes d'hydrogène en passant sur du nickel chauffé à 175-1809 et s’est transformé en un mélange de dodécahydrure et de perhydrure d'anthra- cène. L'hydrogénation complète de l’anthracène a pu être réalisée d'une manière progressive. Ce résultat a été obtenu après de nombreux efforts et quelques insuccès, qui n'ont pas découragé l’auteur de cetravail ; il montre, en outre, que la méthode d’hydrogénation de MM. Saba- teretSenderens est jusqu'à présent la seule qui permette de préparer en grande quantité les différents hydrures d'anthracène, et d'en faire l'étude complète. C’est à cette étude que s’estlivré M. Godchot dans les 2°, 3° et 6° chapitres de sa thèse. Les chapitres IV et V sont spécialement consacrés à l'étude des produits d'oxy- dation de l’octohydrure d’'anthracène. Ces produits sont de deux sortes: l’hexahydroanthrone etle dihydro- p-oxanthranol. L'hexahydroanthrone est une cétone bien caractérisée, fournissant les réactions générales des cétones : oxime, semicarbazone, phénylhydrazone, s’'unissant aux aldéhydes aromatiques pour donner des produits de déshydratation et enfin se combinant au réactif de Grignard pour former des alcools tertiaires. La préparation des différents composés issus de cette cétone constitue la seconde partie importante de la thèse. Par hydrogénation de la cétone (hexahydroan- throne) au moyen du sodium et de l'alcool, l'auteur a obtenu l'alcool secondaire correspondant, l’octohydro- anthranol, dont la déshydratation lui a fourni un hexa- hydrure d'anthracène différent de celui que Græbe et Liebermann avaient obtenu par hydrogénation de l'anthracène au moyen de l'acide iodhydrique et du phosphore à 250°. L'ensemble de toutes ces recherches constitue un travail très précis et très consciencieux, qui éclaire d’un jour nouveau la question des hydrures d’anthracène. Il montre, en outre, que la méthode d'hydrogénation de MM. Sabatier et Senderens peut s'appliquer sans diffi- culté aux corps les moins volatils. A. MAILHE, Chargé de Cours de-Chimie à la Faculté des Sciences de Toulouse. Fritseh (J.), /ngénieur-Chimiste, Lauréat de la Société d'Encouragement. — Les Huiles et Graisses d’ori- gine animale. — 1 vol. in-8 de 407 pages avec 23 figures. H. Desforges, éditeur. Paris, 1907. L'auteur traite d'abord des huiles d’origine animale : huiles de poissons, huile de pieds de bœuf, etc….., puis ensuite des graisses solides : suifs, suifs d'os, lano- line, sur lesquels il donne de multiples renseigne- ments ; il décrit les fabrications et les propriétés de ces matières grasses diverses. Une grosse partie de l'ouvrage, presque la moitié, est consacrée à l'exposé des procédés d'analyse des matières grasses : ces analyses sont, on le sait, difficiles et déli- cates et les descriptions des meilleures méthodes sont partout recherchées. M. Fritsch a eu le mérite de collectionner une foule d'informations diverses, de les coordonner et de les pré- senter au public, qui consultera avec profit tous ces documents intéressants. LEzé. 3° Sciences naturelles Nicholls (D' H. A. Alford). — Dominica. — 1 pla- guette oblongue de 32 pages avec fig. et carte. J. Anjo, éditeur. Saint-John, Antigua, 4907. Depuis quelques années, on constate, surtout en Angleterre et aux Etats-Unis, un mouvement croissant des touristes versles Antilles, dont les merveilles natu- relles sont bien faites pour attirer les voyageurs. Ce mouvement est entretenu, sinon provoqué, par une série de publications, d'origines diverses, qui ont pour but de faire connaître au grand public les sites les plus intéressants des Indes occidentales. j La brochure que le Dr Nicholls consacre à la Domi- nique — la plus grande des Antilles anglaises après la Jamaïque et la Trinité — est du nombre. Elle se dis- tingue par son caractère scientifique et les nombreux renseignements d'ordre géographique, géologique, botanique, climatique, hygiénique et agricole qu’elle fournit; une douzaine de reproductions photogra- phiques très réussies montrent les principales curio- sités naturelles et les aspects typiques de l'ile. Nous pensons qu'il y a là une indication pour nos colonies voisines de la Martinique et de la Guadeloupe, qui, par des publications autorisées de ce genre, pour- raient attirer aussi une partie du grand courant de voyageurs qui se répand maintenant sur tout notre globe. Me Alpine (D.), Government Vegetable Pathologist. — The Rusts of Australia. — 1 vol. gr.in-8° de 349 pages avec 55 planches comprenant 366 fig. (Prix 42 fr. 50). Department of Agriculture, Melbourne, 1907. Les besoins de l’agriculture, qui constitue l’une des premières sources de richesse des colonies austra- liennes, ont amené depuis longtemps la création, dans ces pays, de Services de l'Agriculture, parmi lesquels celui de l'Etat de Victoria se distingue par le zèle infa- tigable qu'il déploie dans la défense des intérêts dont il a la charge. : ra Préoccupé des difficultés que rencontraient les viti- culteurs du Victoria, il a fait traduire en anglais et répandu parmi eux les principaux ouvrages de nos compatriotes MM. Viala, Ravaz, Foex, Gayon, Roos, Mazade, etc.…., et nous ne pouvons qu'être flattés de l'estime en laquelle sont tenus les travaux des œnolo- gistes français. à Son attention s'est trouvée, d'autre part, attirée depuis longtemps sur les fléaux qui menacent la cul- ture du blé et d'autres graines ou fruits, en particulier sur les divers champignons qui produisent la maladie de la rouille. L'importance de ces parasites nous est » indiquée par le fait que, dans une mauvaise année comme celle de 1889, ils ont causé dans l’ensemble de la récolte de blé australienne une perte qui s’est chif- frée par 50 à 75.000.000 de francs. À ; Aussi le Département de l’Agriculture a-t-il demandé à l'un des savants qui lui sont attachés, M. Mc Alpine, chargé spécialement des études de Pathologie végétale, une étude aussi complète que possible sur les diverses. « rouilles » qu'on trouve sur le continent australien: L'auteur en a reconnu 161 espèces, dont il donne une description détaillée, avec la liste des plantes auxquelles elles s'attaquent; sur ce nombre, plus de la moitié (90 espèces) sont des Puccinia; ensuite, viennent les Uromyces (27), les Aecidium (15), les Uredo (13), etc. j'te si tinini M Si dû À Rd AS. 4 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX La plupart de ces espèces sont indigènes; une tren- taine seulement paraissent avoir été introduites, en particulier la plus pernicieuse d’entre elles, le Puccinia graminis, qui s'attaque au blé. M. Mc Alpine a fait une étude spéciale de cette dernière, et il arrive à la con- clusion qu'on n’en pourra diminuer les effets qu'en produisant, par des croisements judicieux et une sélec- tion soigneuse, des variétés de blé très résistantes. L'ouvrage où toutes ces observations sont consignées et illustrées de nombreuses planches, dont plusieurs, très belles, en couleur, fait grand honneur à l’auteur et au Département de l'Agriculture du Victoria. Bonnier (G.), Membre de l'Institut, Professeur à la Sorbonne. — L'Enchaînement des organismes. — 4 vol. in-8° de 359 pages, avec 576 figures dans le texte, faisant partie de la collection : Histoire naturelle de la France. (Prix : 4 fr.) Les fils d'Emile Deyrolle, éditeurs. Paris, 1907. Cette Introduction à l'Histoire naturelle, écrite pour des lecteurs sans connaissances spéciales en Biologie, renferme un exposé succinct de l'organisation et de la physiologie du corps humain, précédant la série ani- male, et un exposé symétrique de l’organisation, des fonctions et du développement de la Renoncule, pré- cédant la série végétale. Sans s’astreindre à un exposé didactique, l’auteur cherche surtout à faire ressortir les intermédiaires, nombreux plus ou moins gradués, qui établissent d'indiscutables liaisons entre les groupes d'animaux et de végétaux en apparence les plus diffé- rents, et de même, au début, entre les deux règnes animal et végétal. Non seulement il y a de nombreuses formes de transition à l'époque actuelle, mais l'histoire du globe apporte un enseignement analogue; tantôt l'évolution organique semble marcher dans une voie de progrès, par étapes plus ou moins rapides, et tantôt elle dessine une rétrogradation qui aboutit à la dis- parition de certains groupes. Le monde actuel est la résultante de ces alternatives de progression et de régression. M. Bonnier, sous une forme toujours très attachante, passe ainsi en revue les êtres vivants qui ont peuplé ou peuplent encore le globe, mais il ne parle pas de théories ; il préfère, comme il le dit, laisser la parole aux faits ; il constate cependant que tout, dans la Nature, parle d’enchaînement des organismes. L. Cuénor, Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy. 4° Sciences médicales Grasset (J.), Professeur de Clinique médicale à l'Université de Montpellier. — Demi-fous et demi- responsables.—1 vol. 1n-8° de 300 pages, de la Biblio- thèque de Philosophie contemporaine. (Prix : 5 fr.) Félix Alcan, éditeur, Paris, 1907. Tous les problèmes sociaux que suscite la folie sont encore loin d’avoir reçu une solution. Depuis plus d’un siècle cependant, la société recon- naît que les fous sont des malades; elle sait qu'elle a des droits et des devoirs envers eux. La loi reconnaît leur existence; les magistrats reconnaissent leur irres- ponsabilité. On ne punit plus ces malades; tout en se préservant de leurs méfaits, on s'efforce de pourvoir à leur assistance et à leur traitement. Mais peut-on diviser l'humanité en deux catégories distinctes : d’une part, des fous, irresponsables ; d'autre part, des individus raisonnables, jouissant de toute leur responsabilité? — Non, — et c'est ce que s'efforce de démontrer le professeur de Montpellier : entre le bloc des fous qu’on enferme et celui des raisonnables qui enferment, il y a place pour un troisième groupe: ce sont les demi-lous de M. Grasset. ' Ces demi-fous sont bien difficiles à reconnaître : ce ne sont pas des aliénés à proprement parler, et cepen- dant ce ne sont pas des hommes normaux. 683 Si le demi-fou commet un crime ou un délit, il est impossible de le considérer comme tout à fait respon- sable de son acte et de le traiter comme un criminel vulgaire. Mais, d'autre part, le demi-fou n’est pas dé- pourvu de toute responsabilité; il faut bien une sanc- tion pénale à ses crimes ou délits. La Société est donc dans la nécessité de se garantir contre ses excès, mais surtout elle a le devoir de le soigner. Elle peut lui infli- ger une punition partielle et relative, mais elle doit aussi lui prodiguer les ressources de la thérapeutique mentale. On voit apparaître ici la très grave question de la responsabilité atténuée, question en litige depuis long- temps et sur laquelle les discussions philosophiques s’exerceront longtemps encore. Pour aboutir à un ré- sultat, il importe de l’envisager au point de vue pra- tique, et particulièrement au point de vue médical. Or, d'après M. Grasset, l'opinion médicale qu'on peut se faire de la responsabilité permet d'admettre, impose même, la responsabilité atténuée, avec cette consé- quence : quand un demi-fou est devenu nuisible, la société n'a pas le droit de l’'emprisonner comme un sujet raisonnable, mais elle a le droit de le mettre hors d'état de nuire, tout en le traitant médicalement. Elle ne doit pas le détenir dans une prison, mais elle a le devoir de l’isoler dans un asile spécial. La notion de la demi-responsabilité et de la respon- sabilité atténuée doit donc être comprise scientifique- ment; son utilité s'affirme de plus en plus dans les préoccupations des criminalistes contemporains ; ceux- ci tendent à rejeter le système des pénalités tarifées pour tel ou tel acte délictueux et à subordonner le jugement à la qualité psychique de l'individu : c’est ce que l’on appelle l'individualisation de la peine. Cette individualisation est nécessaire quand il s'agit des demi-fous, et il importe que la loi n'ignore plus les demi-fous, ni les demi-responsables. En tête des ré- formes de la loi de 1838 sur les maladies psychiques, M. Grasset demande qu'on inscrive la reconnaissance par le code des demi-fous et de la demi-responsabilité. Les médecins, les juristes, les sociologues et les phi- losophes liront avec un vif intérêt le livre de M. Grasset. Il suscitera, sans doute, bien des discussions et des critiques. Car si, scientifiquement, le principe de la demi-folie, et, corollairement, de la demi-responsa- bilité, est étayé sur des faits d'observation incontes- tables, les conséquences sociales et surtout l’applica- tion pratique de ces notions psychiatriques soulèvent des difficultés de toutes sortes. Ce n'est pas une raison pour s’en désintéresser. Au contraire, chacun doit tra- vailler à l'amélioration de la vie sociale, surtout lors- qu'il s'agit d'amender le sort des malades du corps ou de l'esprit, tout en protégeant la société contre les dan- gers qu'ils peuvent lui causer. Pour sa part, M. Grasset a fait, avec un livre qui fera penser, son devoir de bon médecin et de bon citoyen. Dr Henry MEIGE. Lagrave (D' Coste de). — Hygiène alimentaire du tubereuleux. — 1 vol. in-8° de 466 pages. (Prix: 3 fr. 50.) Maloine, éditeur. Paris, 1907. Il est inutile d'insister une fois de plus sur le rôle important d’une alimentation rationnelle dans la cure de la tuberculose pulmonaire. Dans l’idée qu’un tuber- culeux qui saurait se nourrir d'une façon convenable mettra de son côté toutes les chances de guérison, M. Coste de Lagrave a écrit un livre destiné au malade lui-même, au tuberculeux. Rédigé d’une façon claire, mais gardant toujours une allure scientifique, ce livre contient une classification des aliments suivant leur facilité à être digérés et sui- vant leur effet utile, des indications relatives à la distribution des repas, à leur préparation, etc. Les détails dans lesquels entre l'auteur au sujet des ques- tions qu'il traite ne manquent pas d'intérèt et seront lus avec profit non seulement par le malade, mais aussi par le médecin. 6S1 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX À ; ei "4 2e des te à 5° Sciences diverses Loth (Gaston), Docteur ès Lettres, Directeur du Col- lège Alaoui. — La Tunisie et l'œuvre du Protec- torat français. — 1 vol. in-8° de 282 pages, avec nombreuses photogravures et graphiques.(Prix:4 fr.) Delagrave, éditeur. Paris, 1907. Sous ce titre, M. G. Loth, que les lecteurs de la Revue connaissent bien, et qui a donné ailleurs, entre autres publications, une « Histoire de la Tunisie » et une savante étude sur «le Peuplement italien en Algérie et en Tunisie », vient de faire paraître une monographie complète dela Régence.Quoique destiné à la vulgarisa- tion, l'ouvrage présente une grande valeur scientifique, car la matière en est tirée, à la fois des observations ou études de l’auteur, et des notices, des statistiques, des cartes et des plans, déjà nombreux, que publient les différents Services du Protectorat. Coïncidant avec le moment où le pays, en pleine organisation maintenant, sort déjà de l’âge purement agricole, et mettant sur- tout en valeur les résultats acquis aux divers points de vue de l'administration, du peuplement, de l'utilisation du sol, des travaux publics et de l'outillage écono- mique, ce livre apparaît comme un monument impar- tial élevé à la grandeur de l'œuvre que la France pour- suit en Tunisie depuis vingt-cinq ans: Après une description géographique justement fondée sur la répartition des pluies, l’auteur donne une vue d'ensemble historique, de laquelle il ressort que le fond de la population est resté berbère, et que la décadence de la Tunisie n’a commencé qu'avec la con- quête turque de Kheïr-Eddine (1534). II expose ensuite : les débuts de la prépondérance francaise, principa- lement depuis l'établissement des consuls, en 1577; le mécanisme du protectorat, et, parmi ses rouages les plus actifs, l'organisation du secrétariat général et des contrôles civils; le fonctionnement des finances et des douanes; enfin l’œuvre accomplie en matière d'ensei- gnement. Le tableau qu'il nous présente de la situation admi- nistrative actuelle de la Tunisie nous la fait connaître complètement et nous renseigne aussi d'une facon pré- cise sur l’état économique du pays. La Direction des Travaux publies à pris à sa charge tout ce qui con- cerne la voirie (routes de jonction avec l'Algérie, ete.), la recherche et l’utilisation des eaux, l'exploitation forestière, la prospection des métaux, l'exploitation de toutes les mines et des carrières en terres domaniales (phosphates de Gafsa), la pêche marine, la concession des travaux des ports aux Compagnies. La Direction de l'Agriculture, créée en 1890, est dotée de tous les services qui lui permettent une «enquête permanente » sur l’état et les besoins agricoles du pays; mais c’est elle aussi qui s'occupe du peuplement, en prononçant les incorporations au domaine, en procédant à l’alié- nation des terres à titres divers. 634.000 hectares, répartis en 1.760 propriétés, sont aujourd'hui aux mains des Français, contre 75.000 hectares seulement aliénés à des Italiens; et ces résultats sont bien de nature à accroître un courant d'immigration qui a déjà porté la proportion de nos compatriotes établis en Tunisie au tiers des étrangers (30 à 35.000, contre 100.000), au lieu de 1/100 en 1881. Le Service topo- graphique des Travaux publics publie une carte à 1/50.000 des terres concédées, qui doit constituer un document de premier ordre pour la géographie colo- niale de la Régence. — On peut dire que ce sont ces résultats de peuplement qui ont, au premier chef, décidé de la prospérité du pays tout entier; mais il faut tenir grand compte aussi des travaux exécutés dans les ports par les deux compagnies concessionnaires des travaux de Bizerte et de Tunis-Sousse-Sfax et par les Compa- gnies de chemins de fer. En ajoutant à la ligne à voie large Medjerdah-Tunis (Compagnie Bône-Guelma), le réseau tunisien à voie étroite, dont Sousse estactuelle- ment le principal centre, on arrive au total de 1.160 ki- y compris ceux d'intérêt local. lomètres de rails, qui ont déjà porté la vie en bien des régions‘. Ainsi se justifient, et la forte dépense de 410 millions déjà faite pour les chemins de fer, et les nouveaux emprunts qui vont permettre! de relier Sousse et Kairouan aux gisements de phosphates d’Ain- Moularès, Sousse à Sfax, et, dans le Nord, à travers les massifs de la Kroumirie, Mateur à Tabarca et à Nebeul. — Le Service Postal, organisé en 1888, a de même sensiblement contribué à l'essor économique, car il assure non seulement les transports normaux de poste à l’intérieur et vers la France, mais encore la circula- tion des colis postaux, et même celle des voyageurs entre Sousse et Sfax. Il faut savoir à M. Loth un gré particulier de nous avoir donné l'analyse détaillée des forces productives de la Régence. — A côté des phosphates, dont l'expor- tation à dépassé maintenant neuf millions de francs, et s'accroîtra encore beaucoup, quand les rails auront permis la mise en valeur des gisements de Kalaat- Senane, Kalaat-Djerda, Redeyef et Aïn-Moularès, ce M sont les mines de plomb et de zinc qui constituent la grande richesse minérale; 30 sociétés ont déjà obtenu des concessions pour ces mines, dont les plus impor- tantes sont celles du Djebel-Reças. L'exploitation du fer, qui date de 4900 en Kroumirie, est montée, depuis lors, de 171.000 à 522.000 tonnes. — Sur 500.000 hectares de futaies, les 100.000 hectares exploités et peuplés en chênes-liège et zéens se trouvent en Kroumirie (Feïdja, Ain-Draham), et dans quelques points de la Zeugitane; malgré les imperfections de l'aménagement, les recettes atteignent le double des dépenses. — La pêche côtière fournit surtout des thons, et la moitié presque du total sont capturés dans les madragues de Sidi-Daoud (golfe de Tunis). — Parmi les cultures, l’auteur insiste avec raison sur celle de la vigne, qui occupe déjà 16.000 hec- tares dans le Nord, et particulièrement sur celle de l'olivier (p. 477 et suiv.); les débris des immenses bois, en partie reconstitués, qui s'étendaient au temps de la domination romaine de Sousse et de Sfax aux montagnes de Tebessa et du Kef, et vers le Sud-Ouest jusqu'au Djerid, suffisent à classer la Tunisie comme premier pays oléicole. L'ensemble des plantations, très serrées dans le Nord, établies dans le Sud en rangées et plants M espacés, donne jusqu'à 300.000 kilogs d'huile annuel- lement; sur 9.500.000 arbres, environ 4 millions sont dans le Sahel de Sousse; mais c’est autour de Sfax que la culture et l’huilerie sont le plus perfectionnées. Des efforts très sérieux portent actuellement sur les fruits et les primeurs. L'importance du troupeau est relati- vement faible, malgré le rôle des prairies naturelles du Nord et des herbes du haut Tell et des steppes. Enfin, l'accroissement du commerce date surtout de la loi de 1890, qui a jeté les premières bases de l'union douanière avec la France : les importations sont encore les plus considérables (plus de 83 millions de francs en 4904), comme il est naturel pour un pays dont l’outil- lage économique n'est pas complet; aux exportations (77 millions de francs en 4904), les produits du sous- sol (phosphates et métaux), des pêcheries et des fo- rêts ont, depuis 1901, égalé les produits agricoles; les échanges avec la France dépassent la moitié du total. Les derniers chapitres du livre contiennent une des- cription régionale très vivante et très imagée de la Tunisie, On y voit ressortir la transformation rapide des villes et de leur banlieue, transformation qui à développement possible, sur presque toute la côte, des COTE 7 gagné jusqu'aux « perles du Sahel »; et aussi le grand | cultures de ‘primeurs et de fleurs, et des stations d'hivernage, rivales futures de la Côte d'Azur. J. MAcHaT, Docteur ès lettres, Protesseur au Lycée de Bourges, 1 L'Alsérie n'a que 2.878 kilomètres de chemins de fer, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 685 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER 95° sous 143 millimètres. — M. V. Martinand montre ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 22 Juillet 1907. 1e Sciences PHYsiQuEs. — M. G. Lippmann signale un phénomène analogue à celui de la caléfaction qui se produit quand on chauffe au-dessus de 100° une lame de verre sur laquelle on a coulé une lame de plâtre. — M. E. Bouty à déterminé la cohésion diélectrique de l'hélium pur, qui est égale à 18,3; l'addition de 1 °/, d'air la porte à 2 1/2 fois sa valeur. — M. C. Tissot à reconnu que l'intensité du courant continu qui résulte de l’action des ondes électriques sur le détecteur élec- trolylique est proportionnelle au carré de l'amplitude des oscillations dans l'antenne réceptrice. — MM. A. Cotton et H. Mouton ont retrouvé, plus ou moins marquée, la propriété de la biréfringence magnétique dans la plupart des composés liquides de la série aromatique; elle fait défaut dans ceux de la série grasse. — M. A. de Gramont à photographié les spectres complets de deux minéraux: la galène et l’argyrite. Ces spectres décèlent la présence d'Ag, Cu, Sn, Fe, Ca et Mg; dans la galène, on trouve encore Sb et Bi ; dans l’argyrite, Pb et Zn. — MM. G. Dreyer et O. Hanssen ont constaté que les albumines se coagulent sous l'action d'un éclairage intense et pro- longé; cet effet est dû avant tout aux rayons ultra- violets. La vitelline se coagule aussi à l’éclairement du radium. — M. E. Rengade a déterminé les chaleurs de formation des protoxydes alealins : Na*0 == 97,7 cal. ; K°0 = 84,8 cal. ; Rb°0 — 82,4 cal. ; Cs°0 — 91,5 cal. — MM. A. Pictet et G. Karl, en dissolvant l’anhydride azotique dans l’anhydride sulfurique en fusion et dis- tillant le produit de la réaction, ont obtenu un anhy- dride mixte, le tétra-sulfate d'azotyle O(S0*.0.S0*.0. A20?},F. 1240-1250, — M. Binet du Jassoneix à COn- staté que le bore donne avec le nickel et le cobalt, outre les composés Ni Bo et Co Bo décrits par M. Mois- san, les composés Ni*Bo et Co*Bo, NiBo* et CoBo*, ces derniers représentant la limite supérieure de la combi- naison directe des éléments. — MM. P. Lebeau et A. Novitzky, par union directe du silicium et du platine, ont obtenu un composé SiPt, cristallisé, à propriétés chimiques assez voisines de celles du Pt, mais plus oxydable. — M. F. Bourion montre que l'emploi simultané de S'CF et de HBr gazeux fournit un moyen commode de préparation des bromures fixes anhydres (ThBr‘,CrBr°,CoBr°,CeBr*, etc.) à partir de leurs oxydes. — M. Em. Vigouroux à constalé que, pour les teneurs en Sn variant de 40 à 50 °/,, les bronzes à base de nickel abandonnent, par des traite- ments appropriés, des corps de composition identique répondant à la formule N°Sn°. — MM. E. Briner et E. Durand ont étudié l’action de l'étincelle électrique sur le mélange azote-oxygène aux basses températures; il semble se former tout d'abord Az0O, qui est oxydé successivement en Az*0*, puis Az0*, — M. A. Colson a observé certaines discontinuités dans les conduc- tibilités moléculaires des sulfates chromiques dissous. — MM. L. Lindet et L. Ammann: Pouvoir rotatoire des protéines extraites des farines de céréales par l'alcool aqueux (voir p. 647). — MM. Ph. Barbier et V. Grignard, en faisant réagir CO* sur les dérivés organo-magnésiens du dichlorhydrate de dipentène, ont obtenu, entre autres, l'acide menthane-dicarbo- nique-1 : 8, sous formes cis et trans. La distillation de l’anhydride de l'acide c1s donne une cétone, la trimé- thyl-1 : 3: 3-bicyclo-1 : 7 : 8: 4-hexénone-5 : 2, Eb. 93°- que l'origine principale des dépôts de la matière colo- rante des vins rouges réside dans l'oxydation directe des polyphénols du vin par deux diastases oxydantes, dont l’une se forme dans la culture du Botrytis cine- rea. — M. W. Mestrezat à décelé la présence d'acide malique dans les moûts d'Aramon, de Carignane, de Clairette ; il disparaît en partie dans la fermentation alcoolique. — MM. A. Fernbach et J. Wolff montrent que le mécanisme de la liquéfaction diastasique des empois est soumis aux mêmes influences que celui de leur liquéfaction sous pression. — M. M. Yégounow propose l'emploi des organismes vivants comme réactifs pour certaines expériences, par exemple celles de diffusion. — M. C. Gerber a reconnu que la présure des Rubiacées est intermédiaire entre la présure des Crucifères et la présure animale. Comme la première, à haute température, elle coagule mieux le lait de vache bouilli que le lait cru ; comme la seconde, au- dessous de 40°, elle fait l'inverse. 20 SGiENCES NATURELLES. — M. C. Fleig à constaté que les injections intra-veineuses de fer insoluble, en suspension dans un sérum à minéralisation complexe, non seulement ne produisent aucun effet nocif, mais constituent un excellent moyen d'agir sur la nutrition générale et sur la nutrition spéciale du système héma- topoiétique. — MM. A. Rodet et G. Vallet ont reconnu qu'au cours de l'infection par le Trypanosoma Brucei la rate détruit activement les parasites qu'elle retient ; la phagocytose n'intervient que comme facteur secon- daire de cette destruction, qui résulte surtout d’une trypanolyse extra-cellulaire. — MM. À. Malaquin et A. Dehorne montrent que la caroncule ou organe nucal du Notopygos labiatus résulte de la fusion de deux branchies céphaliques transformées. — M. F. Vles divise les Mollusques reptateurs, au point de vue des ondes pédieuses, en deux grands groupes : 1° ceux dont les ondes se déplacent dans le même sens que l'animal (ondes directes); 2° ceux dont les ondes se déplacent en sens inverse de l'animal (ondes rétro- grades). — M. Y. Delage a constaté que la présence de l'O n'est pas nécessaire au déterminisme de la par- thénogenèse chez les Astéries ; elle est même nuisible. L'hypertonie des solutions n’est nullement nécessaire chez les Astéries ; elle peut être utile chez les Oursins. La présence d'ions divalents n’est pas non plus néces- saire. La condition essentielle de la parthénogenèse chez les Oursins consiste dans le traitement des œufs par une solution d'abord acide, puis alcaline. — M. Aug. Chevalier décrit un nouveau genre de Sapo- tacées de l'Afrique occidentale, dont une espèce, le Dumoria Heckeli, possède des graines fournissant une matière grasse comestible. — MM. Costantin et Bois ont revisé les espèces du genre Pachypodinm, arbres ou arbustes épineux, à tissus très mous, répandus à Madagascar. — M. A. Guilliermond à étudié l'origine des granulations métachromatiques des graines de Graminées et l’évolution, pendant la germination, de la partie épidermique du cotylédon, considérée comme le siège de la sécrétion des diastases agissant sur l'albumen. — MM. H. Jumelle et H. Perrier de la Bathie ont observé un nouveau champignon, trouvé dans un nid, récemment abandonné, de termites de l'espèce sylvicole, à Madagascar. Il paraît se rattacher aux Xy/laria. — M. A. Ricco a étudié l’activité de l'Etna depuis 1759; la moyenne de l'intervalle des grandes éruptions est d'environ cinq ans sept mois. Toutefois, les deux dernières éruplions ont élé séparées par un repos de quinze ans. 686 Séance du 29 Juillet 1907. M. E. C. Pickering est élu Correspondant pour la Section d'Astronomie, en remplacement de M. Rayet, décédé. 49 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. de Séguier sim- plifie la théorie de M. Schur sur les représentations linéaires homogènes des groupes finis. — M. Chazy présente ses recherches sur les équations différen- tielles du troisième ordre à points critiques fixes. — M. R. Garnier a obtenu des résultats semblables à ceux du précédent auteur en étudiant les équations différentielles du troisième ordre dont l'intégrale est uniforme. — M. J. Massau communique ses recher- ches sur la représentation des équations entières de degrés quelconques par des abaques.— M.F.Schrader a déterminé l’altitude du sommet de l’Aconcagua au moyen d'une base établie en pleine montagne par la méthode stadimétrique. La moyenne des résultats obtenus est de 6.953 mètres. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Bourget montre que la théorie de la propagation de la lumière dans un mi- lieu hétérogène permet de conclure directement à la non-existence de la polarisation, sans faire intervenir la réflexion. — M. L. Bloch rappelle qu'il a obtenu antérieurement plusieurs résultats énoncés par M. de Broglie dans l'étude de l'ionisation par barbotage. — M. D. Berthelot a constaté que, pour des pressions inférieures à 2 et même à 4 atm., la variation de pv n'est pas une fonction linéaire de la pression pour les gaz très compressibles; de plus, dans ces limites de pression, la variation de pv estfonction linéaire de la den- sité r.— M.J.Guinchant à déterminé, au moyen d'un électrocalorimètre nouveau, la chaleur latente de fusion de l’azotate d'argent; elle a été trouvée égale à,17,9 cal. — M. E. Baud montre que l'acide orthoar- sénique ne parait exister qu'en solution. Lorsque célle-ci cristallise, elle abandonne l'hydrate d'acide pyroarsénique qui, en s’effleurissant vers 15° sur l'acide sulfurique, donne l'acide pyroarsénique. — M. E. Jungñeisch a étudié l'oxydation directe du phosphore dans l'oxygène à faible pression (18 à 20 mil- limètres); il se forme de l’anhydride phosphoreux P:0*, spontanément inflammable à l'air, et un corps jaune transformable en sous-oxyde P‘0.— M.L.Guillet a étudié quatre aciers au tantale peu carburés; ils ne présentent aucune propriété spéciale. — Le même au- teur signale qu'il emploie depuis six ans la méthode préconisée par M. Chabrié pour l'obtention de tempé- ratures élevées. — M. E. Bæœdtker, en faisant réagir les dérivés organomagnésiens sur la benzylidène- menthone, a obtenu le menthoéthylphénylméthane, F.830-84°, et le menthodiphénylméthane, F. 4399-1400. — M. T. Klobb a retiré du Linaria vulgaris deux glu- cosides, la linarine et la pectolinarine, qui ne diffèrent que par de l’eau de constitution. Ils sont hydrolysés en donnant tous deux un sucre réducteur et un mé- lange de deux corps cristallisés, le phénol Jinarique et le phénol anhydrolinarique, différant également par de l’eau de constitution. — M. F. Maignon a constaté que le taux du glycogène musculaire est très variable suivant les époques de l'année; il passe par un maximum vers février et mars, et par un minimum en été, au moment des fortes chaleurs. — M. AI. Hébert a étudié la toxicité relative des sels de Cr, Al et Mg vis-à-vis des organismes et des ferments; ils se rangent dans l'ordre ci-dessus. — M. G. Bertrand classe les acides en deux groupes au point de vue de leur action sur la laccase : les uns sont doués d’une action paraly- sante considérable (H*SO*, HCI, ac. formique, acétique, benzoïque, lactique, etc.); les autres ont peu ou pas d'effet (ac. borique, CO?, citrates monoacides, phos- phates biacides). — MM. E. Kayser et H. Marchand, en accoutumant les levures aux sels de manganèse, ont obtenu des fermentations plus complètes des jus de raisins sucrés, faisant disparaître le lévulose et don- pant des vins de meilleure conservation. — M. E. Man- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ceau estime que la maladie du bleu des vins de Cham- pagne n'est pas due à une cause unique, mais provient tantôt de précipités chimiques, tantôt de l’action des microbes. — MM. Ch. Porcher et Ch. Hervieux ont étudié le chromogène urinaire faisant suite à l’admi- nistration d'acide indolcarbonique; ce n’est pas un dérivé indoxylique. Le groupe CO? de l’acide est donc très stable. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Calmette montre les grands avantages de l’ophtalmo-réaction à la tuber- culine, plus sûre que la cuti-réaction; elle permet le diagnostic précoce de la maladie, et celui de la gué- rison chez les tuberculeux. M. A. Laveran a re- connu que le trypanosome du mal de la Zousfana et de El Debat est vraisemblablement le Tr.soudanense. — MM. A. Laveran et Thiroux critiquent les conclusions de MM. Rodet et Vallet sur le rôle destructeur de la rate à l'égard des trypanosomes, rôle qu'ils n'ont pas pu constater. — MM. J. Chevalier et A. Goris ont étudié l’action pharmacodynamique de la kolatine.Son action est nulle sur la contractilité musculaire. Chez les animaux à sang chaud, l'injection intra-veineuse détermine un léger ralentissement des contractions cardiaques, une augmentation de leur énergie et une légère augmentation de la pression sanguine. — M. P. Fortin décrit quelques expériences de vision entoptique qui peuvent être réalisées facilement à l'aide de la lumière des vapeurs de mercure. — M. J. Pellegrin a étudié l'incubation buccale chez l'Arius fissus. C’est le mâle qui se charge du soin des œufs et des jeunes; le nombre des œufs couvés varie de 40 à 20; pendant toute la durée de l’incubation, le mâle est condamné à un jeûne absolu. — M. Aug. Che- valier a trouvé dans la haute Sassandra un caféier nain qu'il nomme Coffea humilis. Il croit dans les parties les plus ombreuses des forêts: son rendement est très faible. — M.J. Dareste de la Chavanne a décou- vert, dans le bassin de la Seybouse, une formation sulfo-gypseuse qui peut être considérée comme l'équi- valent de la formation sulfo-gypseuse de Licata (Sicile). — M. H. E. Sauvage a étudié les restes de Poissons trouvés dans la formation précédente. Ce sont des Cichlidés du genre Palæchromis. Séance du 5 Août 1907. M. Lacroix annonce à l'Académiele décès de M.J.F.C. Klein, correspondant pour la Section de Minéralogie. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Poincaré pré- sente un Rapport sur les travaux de la Mission géodé- sique de l'Equateur, quise sont heureusement terminés en mai 1906. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. P. Lemoult a déterminé les chaleurs de combustion (310 cal. à volume cons- tant, 311,2 cal. à pression constante) et de formation (—5,8 cal.) du phosphure d'hydrogène gazeux. — M. Em. Vigouroux rappelle qu'il a préparé, antérieu- rement à MM. Lebeau et Novitzky, le siliciure de pla- tine SiPt; celui-ci peut se former par union directe, à condition qu'il y ait excès de Si. L’AI tend à le disso- cier, Cu à lui prendre son Si. — M. P. Gaubert a reconnu que le nitrate d’urée est monoclinique; c’est par une association suivant un plan perpendiculaire à la base que l’on a des groupements à symétrie rhom- bique. Cette macle présente le fait curieux de ne pas être mise en évidence par les propriétés optiques. — MM. G. Dreyer et ©. Hanssen ont observé que les rayons ultra-violets retenus par le verre ont le pouvoir de dissoudre les hématies; après un temps d'induction plus ou moins long, elles se gonflent, perdent peu à peu leur matière colorante et tinissent par s'évanouir comme des ombres; leur décroissance peut s'exprimer par une formule monomoléculaire. — M. M. Javillier rappelle ses recherches, antérieures à celles de M. Ger- ber, sur la présure des Crucifères et sur celles d'un grand nombre de plantes (140); toutes ces présures ne sont pas identiques; de plus, elles se trouvent en solu- tion dans des sucs de composition variable. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 30 Juillet 1907. M. F. Raymond présente le Rapport sur le concours pour le Prix Herpin (de Genève). — M. F. Widal com- munique un Rapport sur un Mémoire de M.G. Rosen- thal relatif à l'adaptation à la vie aérienne (aérobisa- tion) des microbes anaérobies stricts. L'auteur a réa- lisé l'aérobisation par plusieurs procédés : culture en gamme ascendante en pression ; cultures en tubes profonds à colonne de liquide progressivement des- cendante; délanolisation et vieillissement ; cultures en tubes Liborius en gélatine. L'anaérobie ainsi traité évo- lue en trois étapes: la première, de conservation inté- grale des fonctions chimiques, biologiques et patho- gènes ; la seconde, de disparition progressive des fonctions en culture aérobie, avec possibilité de régé- nération de toutes les fonctions dans les tubes anaéro- bies: la troisième, de perte définitive de toutes les fonctions en tubes aérobies ou anaérobies. — M.S. Pozzi présente un Rapport sur un Mémoire du D' de Keating-Hart concernant l’action des courants de haute fréquence et de haute tension dans le traitement des cancers. Les observations rapportées montrent que l'étincelle de haute fréquence et de haute tension est hémostatique et antidouloureuse et paraît avoir une action modificatrice spéciale et immédiate sur le tissu cancéreux; en outre, elle est éliminatrice et rapi- dement cicatrisante. Les effets de cette étincelle ne se propagent pas au loin; aussi l'application doit-elle être précédée dans certains cas d’une exérèse chirurgicale. —_ M. le D' Picqué donne lecture d’un travail sur un cas de décortication pulmonaire. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 20 Juillet 1907. M. L. Camus a constaté que l'injection, dans le sang, de corps insolubles et de petit volume, qui ne seraient pas nocifs de par leur constitution physique, devient particulièrement dangereuse quandils sont for- tement imprégnés de fibrin-ferment. — M. N. Gréhant emploie l'eudiomètre-grisoumètre à l'analyse et au dosage des gaz combustibles. — M. L. Camus montre que l'extrait aqueux de pulpe vaccinale est coagulant in vitro et anticoagulant in vivo. — M. Ed. Retterer déduit de ses recherches sur les Singes que le fibro- cartilage externe du genou des Vertébrés supérieurs présente une forme et des connexions qui sont en rap- port avec les conditions organiques et le genre de vie de l'animal. — M. P. Godin signale deux cas de « fécon- dation retardée » chez le cobaye. — M. A. Laveran à découvert chez des Macroscinques une hémogrégarine nouvelle, qu'il décrit sous le nom d'Æ. macroseinei. — M. A. Branca a étudié la morphogenèse du diamant du poulet, qui s'effectue en cinq étapes principales : stades de l'épaississement ectodermique, de la couche granuleuse, des fibrilles épidermiques, du cône corné et de la lame cornée. — MM. Moussu et Monvoisin ont constaté que, chez les vaches tuberculeuses, il y à modification de la composition chimique du lait et diminution de la valeur nutritive, même chez celles qui n'ont pas de lésions de la mamelle. — M. Ch. Soyer communique quelques observations cytologiques rela- tives à l'ovogenèse chez les Insectes. — MM. F. Tour- neux et A. Soulié déduisent de leurs observations sur l'embryon de la taupe et de l'homme qu'il existe chez les Mammifères six arcs et six fentes bran- chiales, les deux dernières fentes pouvant n'être représentées que par leur poche endodermique. — MM. P. Verdur et L. Bruyant ont observé la pré- sence d’amibes dans le pus de deux abcès de la région malaire chez un jeune homme. — M. R. Turro montre que les agressines iujectées à l'organisme affaiblissent les défenses organiques et augmentent la virulence des bacilles injectés postérieurement. 687 — MM. B. Weill-Hallé et H. Lemaire ont cons- taté que l'injection simultanée de sérum de che- val et d'un antisérum empêche généralement la for- mation de précipitine par le premier. — M. Ch. Dhéré a étudié les spectres d'absorption ultra-violets des globulines ; ils ne permettent pas de les distinguer des albumines. — M. Ch.-A. François-Franck pré- sente des recherches sur le fonctionnement du pou- mon et des organes respiratoires externes chez le Lézard ocellé. — M. P. Wintrebert a reconnu que l'ablation de la membrane operculaire et la sortie pré- maturée des pattes antérieures ne hâtent pas le mo- ment où la métamorphose s’accomplit chez les Batra- ciens anoures. — MM. H. Labbé et G. Vitry ont observé que l'élimination de l’indican urinaire ne dif- fère pas beaucoup de la normale dans certains états pathologiques (cirrhose, entérite). — MM. A. Gilbert et M. Herscher ont constaté que, dans la colique de plomb, le volume du foie est diminué et la polycholie est accusée. — M. E. Brumpt montre que le l'rypa- nosoma inopinatum se transmet de la mère à l'em- bryon chez les Sangsues et de celui-ci à ses rejetons sans le passage par un hôte vertébré. — M. A. Sartory a observé un certain polymorphisme dans l'appareil végétatif du muguet : cellules-levures, filaments mycé- liens, chlamydospores, endoconidies, ascospores. — MM. A. Jousset et J. Troisier ont étudié les épanche- ments lactescents au point de vue cytologique. Les cel- lules endothéliales et les polynucléaires sont remplis de granulations et de gouttelettes graisseuses. — MM. L. Hallion et H. Nepper ont reconnu que la bile exerce dans le rectum un effet excito-moteur local, utilisable en thérapeutique. — M. A. Mayer a étudié au moyen de l’ultra-microscope la précipitation des col- loïdes inorganiques et organiques par les électrolytes et leur coagulation par la chaleur. — M. C. Delezenne montre que le processus de l'activation du lab pancréa- tique est sous la dépendance presque exclusive des sels de calcium, qui jouent un rôle véritablement spé- cifique. — M. C. Fleig a reconnu que la diurèse li- quide totale sous l'influence respective du lactose et du glucose est à peu près la même; par contre, le lactose s'élimine presque en totalité, tandis qu'on ne retrouve que le huitième environ du glucose. — M. Alb. Ber- thelot a observé que la phytine paraïît”constituer pour les végétaux inférieurs une source de phosphore très facilement assimilable. — MM. A. Netter et L. Riba- deau-Dumas ont constaté que la toxicité des moules de Calais, ayant produit des intoxications à forme para- lytique, a progressivement disparu, sans qu'on ait pu trouver l’origine exacte de cette toxicité. — MM. L. Garrelon et J.-P. Langlois montrent que le refroidis- sement du sang irriguant le bulbe pendant la polypnée thermique produit une accélération manifeste du rythme polypnéique; la section des pneumogastriques empêche cette accélération. — MM. P. Ancel et F. Villemin ont reconnu que la rupture de la vési- cule de de Graaf ne se fait pas au moment des règles, mais une douzaine de jours auparavant ; ce n’est donc pas le développement de cette vésicule qui est la cause de la menstruation. Séance du 27 Juillet 1907. MM. L. Camus et E. Gley ont reconnu que le suc sécrété par la prostate interne du hérisson est extrè- mement toxique pour le lapin. — M. Ch. Aubertin à observé à plusieurs reprises de l’hypertrophie car- diaque sans lésions rénales notables dans l’intoxication alcoolique expérimentale. — M. E. Gley à observé aussi de l’hypertrophie du cœur au cours d'expériences d'immunisation contre divers sérums toxiques. — M. J. Jolly a constaté une diminution progressive du dia- mètre des hématies au cours du développement. — M. L. Camus montre qu'avec de très petites quantités de vaccin on peut obtenir très facilement et très rapi- dement, par la méthode de Nicloux, l'indication de la proportion de glycérine. — M. C. Nicolle a découvert, 688 chez le Ctenodactylus gondi, un hématozoaire endo- globulaire qu'il décrit sous le nom de Piroplasma qua- drigeminum. — M. A. Guilliermond pense que les granulations métachromatiques des Graminées sont constituées d’un mélange de protéine et d'une subs- tance métachromatique voisine dela volutine., — MM. Ga- lesesco et A. Slatinéano ont examiné le sang et le liquide céphalo-rachidien dans la pellagre; le premier montre une augmentation des grands mononucléaires ; le second est toujours limpide. — M. A. Slatinéano a pratiqué la cuti-réaction sur trois lots de tuberculeux avec un résultat nul. — Mie Frison et M. M. Nicloux ont constaté que la quantité de chloroforme fixée par la substance blanche et par la substance grise du cer- veau au moment de la mort est proportionnelle à la quantité d'extrait chloroformé (graisses et autres) qu'elles contiennent. — MM. CI. Gautier et Ch. Her- vieux ont observé la présence d’indol dans le gros intestin du chien au cours du jeûne. — Mme Z, Gatin- Gruzewska, en faisant agir H?0* sur le glycogène, a obtenu une dextrine, du maltose, de l'acide gluconique et CO*. H*0* réagit également sur plusieurs polysaccha- rides. — MM. H. Bierry, V. Henri et G. Schaeffer montrent qu'en solution aqueuse dialysée très longue- ment l’amylase du suc pancréatique se comporte comme un colloïde positif; tous les autres ferments étudiés sont négatifs. — MM. P. Ancel et F. Villemin ont constaté que l’ectopie de l'ovaire chez la lapine pro- voque l'atrophie des ovocytes et des follicules de de Graaf et empêche la formation du corps jaune; mais elle n'amène pas l’ectopie de la glande interstitielle. — M. C. Fleig à reconnu que la diurèse globale des matériaux solides autres que le sucre est à peu près la même sous l'influence du lactose ou du glucose, — MM. J. Ville et W. Mestrezat montrent que les nitrites que l’on rencontre dans la salive proviennent d'une action réductrice exercée sur les nitrates salivaires par les microorganismes contenus dans la cavité buccale, — MM. E. Wertheimer et G. Battez ont constaté que l'intégrité des trois premières paires dorsales n’est pas indispensable à la production de la glycosurie par piqère du bulbe. — MM. Chiray et Demanche ont reconnu qu'on ne peut se fier aux indications fournies par le réfractomètre pour la mesure des albumines du sérum et des sérosités. — M. A. Weber a observé qu'au point de vue de l’évolution du trou ovale du sphénoïde le gibbon, le chimpanzé et le gorille ont atteint un degré de développement égal à celui des races les plus civi- lisées. — Mie Bellion a constaté une diminution des sucres chez l’escargot pendant la période d'activité. — M. J. Athanasiu montre qu'il n'y a pas diminution dans la force des muscles innervés par le nerf tibial après la section du nerf péronier. — M. Ch. Soyer con- clut à la nécessité probable du concours des cellules somatiques pour la formation des plasmodes ou ovo- cytes viables. — M.J. Lépine a appliqué l'ophtalmo- réaction à la tuberculine chez des aliénés, ce qui lui a permis de préciser le diagnostic dans des cas clinique- ment douteux. — MM. A. Putzeys et T. Stiennon ont reconnu que la cuti-réaction et l’ophtalmo-réaction à la malléine ne donnent pas des résultats assez nets et assez constants pour constituer une méthode de dia- gnostic de la morve chez le cheval. — M. F. Arloing répond aux critiques de M. Vallée sur ses expériences relatives à la cuti-réaction. — MM. G. Marinesco et J. Minea signalent la précocité des phénomènes de dégénérescence consécutifs à la greffe des ganglions sensitifs chez le chat. — M. H. Soulié a observé, dans la fièvre récurrente à réaction méningée, que le liquide céphalo-rachidien contient des spirilles beaucoup plus nombreux que dans le sang, lesquels provoquent une lymphocytose. — MM. M. Garnier et L. G. Simon ont constaté des foyers de nécrose cellulaire intense dans le foie des lapins soumis au régime carné. — MM. A. Lemierre et P. Abrami ont reconnu qu'au cours des septicémies expérimentales certains microbes éliminés par le foie déterminent des lésions importantes des ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES grosses voies biliaires. — MM. L. Hallion et H. Nepper montrent que la bile, mise au contact de la muqueuse intestinale ou introduite dans la circulation, exerce une influence excito-motrice locale sur l'intestin grêle aussi bien que sur le rectum. — M. P. Wintrebert a observé que les têtards de fana temporaria, transportés brusquement de l’eau à l’air humide, supportent aisé- ment ce changement de milieu; la métamorphose est alors nettement accélérée. — M. L. C. Maillard rap- pelle qu'il a déjà énoncé antérieurement les résultats auxquels sont arrivés récemment MM. Labbé et Vitry relativement à la sécrétion urinaire d'indoxyle. — MM. Demanche et Sartory ont isolé une nouvelle levure d'un pus de péritonite par perforation de l’esto- mac. — MM. A. Netter et L. Ribaceau-Dumas ré- sument les faits actuellement connus d'intoxication à forme paralytique après ingestion de moules. — M. Ant. Jourde à étudié l’action d'une mucédinée, le Paecilo- myces Varioti, sur les hydrates de carbone: il ne sécrète ni invertine, ni lactase, mais un enzyme ana- logue à l’amylomaltase de Laborde. — MM. M. Loeper et G. Ficai montrent que l'amylase sanguine provient en grande partie de la sécrétion externe du pancréas résorbée le long du tractus intestinal. — M. A. Com- bault a constaté que les glandes calcifères des lombrics produisent du carbonate d’ammoniaque dans le fumier, dont la base dominante est AzH*. — M. Ch. Aubertin a observé que les surrénales réagissent à l’intoxication alcoolique expérimentale chronique par une hyper- plasie corticale considérable, qui peut s'accompagner quelquefois d'hyperplasie médullaire. — MM. J. Basset et H. Carré montrent que les bacilles de Koch n'ar- rivent à franchir la muqueuse intestinale que grâce à leur virulence, après l'avoir plus ou moins gravement lésée. — M. C. Delezenne a vérifié de nouveau la spé- cificité des sels de calcium dans la formation de la trypsine pancréatique. — MM. C. Delezenne et H. Mou- ton ont observé que le suc pancréatique, préalablement soumis à l’action des sels de chaux, acquiert la pro- priété de coaguler les solutions concentrées de peptone. — M. A. Marie montre que le Bacillus paralyticans n’est pas spécifique de la paralysie générale; il ne constitue qu'un élément d'infection secondaire, très fréquent en certaines régions. — Le même auteur a étudié l'ophtalmo-réaction à la tuberculine chez les aliénés. Vu la difficulté du diagnostic, elle présente une importance évidente. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 2? Juillet 1907. MM. H. Verger et Soulé ont constaté la persistance de la sensibilité dolorifique des deux côtés après hémi- section de la moelle chez le chat. — M. L. Gentes a reconnu que, malgré quelques variations secondaires, l'hypophyse possèdeles mêmes caractères essentiels dans toute la série des Vertébrés. La glande infundibulaire, constante chez les Poissons, passe à l'état de vestige chez les Batraciens et les Reptiles et fait complètement défaut chez les Oiseaux et les Mammifères. — M. J. Kunstler expose les bases d'une théorie coloniale des organismes, qu'il nomme « principe de la concentration centripète des organismes », — MM. L. Tribondeau et G. Belley ont obtenu expérimentalement la cataracte par rœntgénisation de l'œil d'animaux nouveau-nés; les rayons X paraissent influencer directement l’épi- thélium du cristallin encore en pleine activité évolu- tive. On observe également de la microphtalmie et des modifications concomitantes de la rétine. — M. B. Auché signale l'existence d’abcès intradermiques mul- tiples à coli-bacilles chez un nouveau-né. — M. A. Le Dantec montre que l'éléphantiasis des pays chauds et celui des pays tempérés sont une seule et même maladie, véritable dermite chronique due à la pré- sence d’un cocco-diplocoque «(dermocoque). En tout temps il est possible de se procurer une culture du dermocoque en provoquant sur la région malade un ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 689 accès topique localisé à la surface d'un petit vésica- toire. — Le même auteur décrit un nouveau procédé our la culture des anaérobies dans une pipette étran- ylée. — M. Ch. Pérez cherche l'origine du tissu adi- peux imaginal ches les Muscides dans de petits amas de cellules mésenchymateuses situées sous les disques imaginaux de l'hypoderme. — M. C. Sauvageau si- gnale l'existence d’une nouvelle forme — plantules confervoides monosiphonées — dans le cycle du déve- loppement des Cutleria. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 9 Mai 1907. M. J. Henderson-Smith a étudié l'augmentation de la teneur en complément du sérum sanguin frais. Le sérum qui se sépare d'abord du sang versé peut diffé- rer de composition de celui qui s'en sépare plus tard. Avec le sang normal de lapin ou de cochon d'Inde, la quantité de complément hémolytique contenue dans le premier sérumqui se sépare est relativement faible ; elle augmente progressivement dans le sérum qui se sépare après une période de 5 à 7 heures chez le lapin, de 3 à 4 heures chez le cochon d'Inde, pour atteindre un maximum 2 à 3 fois plus grand que la quantité d'abord observée. Même après l'enlèvement du caillot, la quantité de complément peut augmenter dans le sérum qui se sépare peu après l'extraction du sang, mais cette augmentation est faible. Cette augmenta- tion d'activité du sérum n'est pas particulière aux compléments hémolytiques. Dans le sang des animaux immunisés, les compléments hémolytiques peuvent augmenter, mais ce n'est pas toujours le cas. — M. A. J. Ewart poursuit ses recherches sur l'ascension de l'eau dans les arbres. Elles montrent que l'ascension continue de l’eau est seulement possible dans le bois vivant, et que le pouvoir de conduction se perd rapi- dement après la mort, sans qu'aucune obstruction mécanique des vaisseaux puisse être rendue respon- sable de cette variation. Il faut donc conelure que les cellules vivantes dans les arbres élevés restaurent con tinuellement les conditions nécessaires à l'ascension de l’eau partout où celles-ci sont affectées par un vide excessif des vaisseaux. Une action de pompe n'est nécessaire que dans les arbres de plus de 20 à 50 mètres de hauteur, mais des colonnes d’eau suspendues ne peuvent être maintenues pendant un temps quelconque dans les vaisseaux des arbres élevés sans l’aide des cellules vivantes du bois. Séance du G Juin 1907. M. L. Becker a étudié la distribution de la lumière bleue et violette dans la couronne le 30 août 1905, d’après des photographies prises à Kalaa-es-Senan (Tunisie) pendant l’éclipse. L'intensité de la couronne décroit inversement à la 4° puissance de la distance moyenne à un cercle qui est concentrique au disque solaire et dont le diametre est environ les 3/# du dia- mètre solaire. — M. A.-A.-C. Swinton présente ses recherches sur les effets mécaniques des rayons-canal. Il à constaté que ces rayons, tombant sur une roue à ailettes de mica ou d'aluminium placée derrière la cathode perforée, lui communiquent une rotation rapide. Au moyen de deux thermo-jonctions, on recon- naît que, sous le bombardement des rayons-canal, les deux côtés d'une ailette de mica peuvent acquérir une différence de température s’élevant jusqu'à 110°C. — MM. H.-A. Wilson et G.-H. Martyn : Sur la vitesse de rotation de la décharge électrique dans les gaz à basses pressions dans un champ magnétique radral. L'appareil employé dans cette recherche est un petit tube à vide, consistant en deux tubes de verre concen- triques cémentés dans des disques d'aluminium. Les disques servent d'électrodes, et l’on fait passer la décharge entre eux à travers l’espace annulaire qui sépare les tubes de verre. On fixe un barreau de fer suivant l'axe du tube à vide, qu'on peut magnétiser de facon à produire un champ radial dans la partie située entre les tubes de verre. La décharge est produite par une grande batterie secondaire, et on mesure sa vitesse de rotation autour de l’espace annulaire. Les auteurs ont mesuré, dans l'air, l'azote et l'hydrogène, la varia- tion de la vitesse avec la force du champ magnétique, la pression du gaz et avec le courant transporté par la décharge. Ils ont trouvé que la vitesse est presque proportionnelle à la force du champ magnétique et inversement proportionnelle à la pression du gaz. La vitesse dans l'hydrogène est environ trente fois celle dans l'air ou dans l'azote. Théoriquement, la vitesse devrait être proportionnelle au produit des deux vitesses ioniques, et les résultats obtenus, réunis avec les mesures précédentes de l'effet de Hall, permettent de calculer les vitesses des ions positifs et des ions néga- tifs. On a trouvé que les ions négatifs ont des vitesses très supérieures à celles des ions positifs. — M. W.-A. Porter est parvenu à établir une équation exacte reliant la pression osmotique et la tension de vapeur d'une solution de concentration quelconque, de com- pressibilité quelconque et sous une pression hydrosta- tique quelconque. Cette équation est applicable même aux environs du point critique. L'auteur démontre que, lorsqu'une solution à une pression quelconque est en équilibre à travers une paroi semi-perméable avec le solvant pur, sa tension de vapeur est égale à la tension de vapeur du solvant, celles-ci ‘ant mesurées sous les pressions hydrostatiques auxquelles la solution et le solvant sont respectivement soumis. De plus, si deux solutions, à une pression hydrostatique quelconque, mais égale pour les deux, sont isotoniques en ce qui concerne leur tension de vapeur, elles sont aussi isoto- niques quant à leur pression osmotique et elles ont le même point de congélation. — M. F. Trouton : Sur deux modes de condensation de la vapeur d'eau sur les surfaces de verre. Ces deux modes de condensation, appelés xet 8, se distinguent en ce que, dans le premier mode, il y à beaucoup moins de matière condensée sur la surface que dans le second mode. La condensation à lieu suivant le type « quand la surface a été soigneuse- ment séchée à haute température, et suivant le type B quand la dessiccation a été effectuée aux températures ordinaires. Dans le type B, la courbe reliant la pression avec la quantité d’eau condensée est analogue à celle qu'on obtient pour la laine ou le coton; dans le type x, en partant d'une surface très sèche, la pression s'élève rapidement pour une condensation relativement mi- nime jusqu'à ce qu'elle atteigne un point critique; en- suite, pour une nouvelle condensation, elle diminue, ce qu'on peut attribuer à une transformation dans l’état f; puis, après avoir passé par un minimum, elle s'élève de nouveau jusqu'à ce qu'on arrive à l'état de satu- ration. Il y a là une analogie évidente avec la courbe de James Thomson pour la transition d’un gaz à un liquide. Séance du 13 Juin 1907. M. J. C. C. Ledingham étudie l'action inhibitrice, pour une phagocytose subséquente, produite sur un sé- rum actif normal par un sérum inactif normal à lra- vers lequel on a fait passer des bacilles. Lorsqu'un sérum normal inactif est digéré avec des bacilles tu- berculeux et finalement débarrassé de ceux-ci par la centrifugation, on trouve que le fluide qui surnage a la propriété d'empêcher dans une grande mesure l'action opsonique du sérum normal frais, non seulement vis-à- vis des bacilles tuberculeux, mais aussi vis-à-vis du Staphylococeus pyogenes aurens. L'auteur interprète ainsi le phénomène : Les ambocepteurs d’un sérum normal chauffé se combinent avec les bacilles tubercu- leux et aussi avec leurs récepteurs libres, qui de- meurent dans le fluide surnageant après le départ des bacilles. Lorsque ce fluide qui surnage, contenant la combinaison de « l'ambocepteur-récepteur libre », est ajouté à du sérum normal frais, le complément de ce dernier se fixe, et, par conséquent, en présence de ba- cilles frais, l'action opsonique est arrêtée. Les résul- 690 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tats expérimentaux obtenus confirment l'hypothèse que l’action opsonique du sérum normal dépend de la coopération d'un complément avec l'ambocepteur nor- mal. — M. M. Benson : Le Miadesmia membranacea Bertrand, nouveau Lycopode paléozoïque avec une structure analogue à celle des graines. Les organes végétatifs de ce nouveau type intéressant ont été dé- couverts par Bertrand en 1894. I] les a trouvés dans des sections d’un nodule de calcite des couches de Ganis- ter, de Hough Hill (Angleterre). L'étude d'une grande quaotité de matériaux nouveaux à conduit aux résul- tats suivants : Le Mjadesmia est excessivement petit, sa tige très tendre et sans trace de tissu squelettique, C'est le premier lycopode paléozoïque d’un caractère herbacé dont la structure est connue. Les mégasporo- phylles, identifiés par Scott en 1901, présentent un type de graine plus avancé que ceux que l'on a rencon- trés jusqu'ici chez les Cryptogames. Le mégasporange donne naissance à une seule spore à paroi fine, dont le développement et la structure ressemblent à un sac embryonnaire et qui germe 1n situ. Un intégument entoure le sporange, laissant seulement un petit orifice comme micropyle. Celui-ci est entouré par de nom- breux et longs processus de l’intégument, qui forment un appareil collecteur et incubateur pour les micro- spores. Il n'y a pas trace d’enveloppe autour du micro- sporange. La feuille carpellaire est tombée à maturité et ressemble à une graine ailée. En ne tenant pas compte des modifications structurales des mégasporo- phylles, l'affinité la plus proche du Miadesmia parmi les formes connues semble être avec les espèces non spécialisées de Selaginella, telles que les Selaginella selaginoïdes; mais les feuilles des frondes présentent une base de feuille archaïque, comparable à celle des Lepidodendreae. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 28 Juin 1907. M. J.T. Irwin exécute une série d'expériences illus- trant les divers emplois de ses oscillographes et de ses wattmètres à fil chaud. — M.9J. S. Dow décrit une forme de photomètre utilisant la loi du cosinus. Il n’est plus nécessaire de déplacer soit le photomètre, soit les sources de lumière. L'ajustement de l'éclairage des surfaces photométriques est réalisé dans le photomètre même par la rotation d’un coin de Ritchie autour de la ligne-limite des surfaces photométriques comme axe. — Me Ayrton présente quelques expériences sur la for- mation des ondulations de sable sur le bord de la mer. C’est le mouvement permanent et alternatif de la mer qui produit ces ondulations. Pour le montrer, l’auteur prend une auge de verre de six pieds de long, renfer- mant du sable nivelé, recouvert d'un pied d’eau, et la soumet à un mouvement de va-et-vient au moyen de rouleurs mus par un électromoteur. Ce mouvement fait osciller l’eau, et bientôt on aperçoit de petites crêtes sur le sable, à peu près à égale distance, qui croissent progressivement. On constate, d'autre part, que toute crête ou sillon sur du sable plan donne naissance, par suite du mouvement de l’eau, à deux autres crêtes de chaque côté, lesquelles agissent de mème jusqu’à ce que tout le sable soit ridé, par suite des vortex qui se forment dans l’eau. L'auteur montre ensuite que des ondulations de sable peuvent être produites même par de l’eau coulant dans une seule direction, pourvu que la surface de ce sable soit inclinée. La hauteur et la distance des ondulations dépendent de la violence et de la durée de l’oscillation de l’eau. On a trouvé des ondulations du sable jusqu'à une profondeur de 60 à 10 pieds sous l’eau. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 4 Juillet 1907. M. P. Haas, en acidifiant une solution aqueuse re- froidie du sel de K de la diméthyldihydrorésorcine mé- Jlangée avec du nitrite de K, a obtenu l'isonitrosodimé- thyldihydrorésorcine, qui est convertie par les oxydes d'azote en nitrodiméthyldihydrorésorcine. — M. F. Baker à examiné les spectres d'absorption des sels de carbonium; ils présentent deux types différents. — MM. T. M. Lowry et E. H. Magson ent déterminé la mutarotation du nitrocamphre dans divers solvants et en présence de diverses impuretés. En solution chlo- roformique, il est possible de retarder le changement isomérique par l'addition de petites quantités d'acide. L'addition d’éthoxyde de Na en solution alcoolique et surtout celle d’un peu de pipéridine en solution benzé- nique accélèrent considérablement la mutarotation. — MM. E. C. C. Baly et W. B. Tuck et Ml!‘ E. G. Mars- den et M. Gazdar, par l'étude des spectres d'absorp- tion, ont reconnu que les phénylhydrazones et les osa- … zones des «-dicétones en solution neutre possèdent une constitution cétonique, tandis qu'en solution alcaline les premières tendent à prendre la configuration éno- lique. — M. M. M. P. Muir, par action de H*SO0* sur le permanganate de Ba, a obtenu des solutions d'acide permanganique contenant jusqu’à 17 ‘/, d'acide. Cette solution, conservée en vase ouvert, laisse déposer des oxydes bruns de manganèse, mêlés de cristaux violet- bleu de l'acide. — M. S. Rukemann a préparé un pro- duit d'addition de la phénylhydrazine avec le dicar- boxyaconitate de méthyle, F. 1350, qui, digéré avec KOH, fournit de l’acide malonique et du phényl-pyra- zolonedicarboxylate monométhylique, F. 201°-202°. Ce- lui-ci, bouilli avec KOH, fournit le 1-phényl-5-pyrazo- lone-3-carboxylate de K. — M. H. R. Le Sueur, en chauffant à 2509-2700 l'acide ax'-dihydroxysébacique, a obtenu, avec dégagement de CO?, le dialdéhyde de l'acide subérique. — Le même auteur, en remplaçant les 2 Br de l'acide «4!-dibromoadipique par 2 OH, a ob- tenu deux acides dihydroxyadipiques isomères, F.146° et F.174. — M. A. W. Stewart a reconnu que les spectres d'absorption des deux formes actives de l'a- cide tartrique sont identiques. L’acide racémique a un plus grand pouvoir d'absorption que les deux formes actives; mais, lorsqu'on le dilue, son pouvoir absor- bant diminue graduellement, ce qui prouve qu'il est décomposé dans les deux formes actives. — MM. W. H. Perkin jun. et J.-L. Simonsen, en condensant le f-iodopropionate d'éthyle avec l’&-acétylglutarate d’é- thyle sodé, ont obtenu le +-acétylpentane-xys-tricar- boxylate d'éthyle, Eb. 217° sous 15 mm., qui est hydro- lysé par HCI en acide y-acétylpimélique. Son éther éthylique, traité par MgCHSI, est transformé en une lactone, que HBr convertit en y-bromoisopropylpimé- late d’éthyle ; celui-ci est décomposé par la pyridine avec formation de y-isopropylidènepimélate d'éthyle. Ce dernier, traité par Na, se condense en 4-isopropyli- dènecyclohexanone-2-carboxylate d'éthyle, d’où, par élimination de CO*, on arrive à la 4-isopropylidènecy- clohexanone : CH? — CH° CHS}C : CC Nco, USE K one _ cr Eb. 2199-2210, — M. J. K. H. Inglis et Mile JL. E. Knight décrivent un procédé de purification de l'é- ther acétique. L'alcool, qui est sa principale impureté, est transformé en un éther à haut point d'ébullition, par exemple en éther phosphorique, puis on procède à la distillation. — M. J. J. Fox a déterminé la solubi- lité du sulfate de plomb dans des solutions concentrées d'acétate d'ammonium. Elle augmente considérable- ment à mesure que la concentration en acétate aug- mente. Il se forme alors des cristaux de sulfate de plomb et d’ammonium Pb (AzH‘}(S0)}:. solution doit l'être à l’état d'acétate. — M. F. H. Lees, en hydrolysant le chloromorphide, a obtenu, à côté de la f-isomorphine, un nouvel isomère, qu'il nomme néoisomorphine ; elle cristallise de l'alcool en aiguilles contenant une molécule de solvant, F.278°. Par mé- thylation, elle fournit la néoisocodéine, F.181°-182e. Le plomb en Lun 'héle. sn. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES -691 SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION CANADIENNE Séance du T Février 1907. M. A. Mc Gill a étudié les méthodes d'examen de la térébenthine. La méthode de Hübl est préférable à celle de Hanus. Avec la première, on obtient un nombre de Worstall égal à 370 °/, pour une bonne térében- thine, tandis qu'avec la seconde on obtient une valeur se rapprochant de 200. Les térébenthines contenant les adultérants ordinaires donnent des nombres inférieurs à 370 (suivant Hübl) ou à 200 (suivant Hanus). La réfrac- tion spécifique de la vraie térébenthine est de 1,47 à 20° C.; les adultérants habituels l’abaissent. Séance du 16 Mai 1907. MM. R. J. Manning et W. R. Lang décrivent deux méthodes de détermination de l'acide borique et des borates dans les aliments et les produits commerciaux. . La première consiste à distiller avec l'alcool méthy- lique et à précipiter à l’état de borate de baryum, la seconde à distiller et à titrer l'acide par la potasse au dixième. SECTION DE LIVERPOOL Séance du 13 Février 1907. M. F. J. Brislee a étudié les processus de la com- bustion dans la boîte à feu des locomotives. La combus- tion la plus efficace a lieu quand le vide est relativement . faible et la vitesse élevée. En règle générale, les vides les plus élevés sont seulement obtenus par saccades, tandis que les faibles vides sont permanents. Les con- ditions pour la meilleure combustion semblent donc être un courant d'air uniforme en quantité suffisante pour rendre la vitesse de combustion suffisante pour la production de la vapeur nécessaire, conditions réali- sées dans les trains express. La perte due à la forma- tion d'oxyde de carbone est plus grande avec les trains à faible vitesse, par suite du caractère intermittent de l'arrivée d'air. SECTION DE LONDRES Séance du 3 Juin 1907. MM. W. A. Davis et C. A. Klein présentent leurs recherches sur l'analyse de la céruse. Celle de la céruse brute est très simple; mais on arrive à des résultats très divergents quand il s’agit d'analyser de la céruse qui a été broyée avec de l'huile. La princi- pui difficulté de cette analyse réside dans l’impossibi- ité d'enlever les dernières traces d'huile ou de matière grasse par extraction avec un solvant. La meilleure méthode est l'extraction répétée à l’éther, qui ne laisse que 0,3 °/, d'huile, quantité qui élève légèrement les chiffres trouvés pour CO* et H°0 présents dans la céruse. SECTION DE MANCHESTER Séance du 3 Mai 1907. M. W. Clifford a déterminé le temps de passage d'un liquide à travers divers lits de percolation. Le temps de passage dépend de la nature du lit, de la profondeur et de la quantité de liquide. L'auteur donne les chiffres obtenus pour des couches de charbon et des couches de graviers de diverses grosseurs. — MM. G. J. Fowler et P. Gaunt ont étudié l’action réciproque de solutions diluées de sels d'ammonium avec divers milieux filtrants bactériens. Quoique l'absorption de l'ammoniaque ne soit pas une condition préliminaire de la nitrification dans les filtres biolo- giques, elle peut n'être pas sans effet, surtout au com- mencement, quand le nombre des organismes est encore faible. Dans ces conditions, un excès d'ammo- niaque dans le liquide filtrant peut exercer un effet inhibiteur sur le développement des organismes. Le F, quartz est le meilleur milieu pour étudier exactement la nitrification au contact des surfaces, car son action n’est pas compliquée par des phénomènes d'absorption. SECTION DE NEW-YORK Séance du 24 Mai 1907. M. L. H. Baekeland décrit la cuve électrolytique Townsend, dans laquelle la diffusion et la recombi- naison subséquente des anions et des cathions est presque entièrement empêchée par l'enlèvement auto- matique de toute la liqueur cathodique aussitôt qu’elle se forme et en l’entourant d’un liquide chimiquement inactif et physiquement non miscible; ce liquide est le kérosène. SECTION DE LA NOUVELLE-ANGLETERRE Séance du 5 Octobre 1906. M. J. E. Teeple décrit les procédés d'extraction de l'essence de térébenthine des déchets de bois; ils repo- sent, en général, sur l’action de la vapeur surchauffée. Après traitement, le bois est employé comme combus- tible; mais il paraît possible de lui trouver d’autres usages. Séance du 17 Février 1907. M. W. Mc A. Johnson présente ses essais de trai- tement des minerais de zine dans un four électrique du type à résistance. Cette méthode présente les avan- tages suivants : 4° elle donne un produit plus pur et plus uniforme; 2° le rendement en zinc est augmenté ; 3° elle permet de traiter une plus grande variété de minerais; 4° la récupération de Pb, Ag, Cu et Au est plus effective. — M. G. L. Cabot a déterminé le pont de solidification de la gasoline. Celle de densité 0,698 à 23° C. devient solide à — 125 C.; celle de densité 0,713 à 23° C. dévient solide à — 147. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 6 Juin 1907. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. R. Daublebsky von Sterneck : Sur lé nombre de valeurs incongruentes que prend une fonction entière du 3° degré. — M. E. Kruppa : Sur le théorème de Pohlke. — M. W. Wir- tinger : Trois constructions de la surface de 2° ordre au moyen de 9 pôints donnés. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. F. M. Exner expose les bases d'une théorie des variations synoptiques de la pression atmosphérique, dans laquelle il fait inter- venir l'influence de l’apport et de la soustraction de chaleur que les continents et les mers provoquent sur les masses d'air qui les surmontent. — M. Mathias Cantor, étudiant la théorie de la méthode de Fizeau pour la détermination de la vitesse de la lumière, montre que dans cette expérience intervient de la lumière de diverses périodes. On peut transporter cette méthode dans le domaine de l'Acoustique et s’en servir pour déterminer la vitesse du son. — M. R. Wagner a déterminé, pour 4 barreaux de caoutchouc et1 barreau de laiton, les variations de température pro- duites par l'allongement; il a comparé les valeurs observées avec celles qu'on déduit de la formule de Thomson et calculé pour les diverses tensions les coefficients de dilatation linéaire et les variations de ceux-ci avec la tension. Quand le module d’élasticité est faible et sa variation thermique relativement élevée et positive, le coefficient de dilatation diminue consi- dérablement avec la tension; dans le cas contraire il varie peu.— Le même auteur a constaté qu'un bâton d'iodure d'argent soumis à un allongement s'échauffe de + 0°,00014 pour une charge de 2 kilogs et se re- froidit quand on le décharge. — M. F. Becke a étudié de beaux cristaux de whewellite {oxalate de chaux avec eau de cristallisation) trouvés à Brux. Ils appar- tiennent au système monoclinique holoédrique; Île plan des axes est perpendiculaire au plan de symétrie, 692 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES la densité est de 2,23. — M. J. Lindner a déter- miné la vitesse de la décomposition de l'acide malo- nique en CO* et acide acétique à 100° dans l'acide acé- tique glacial; c'est une réaction monomoléculaire. — MM. P. Friedlaender et V. Laske ont recherché la constitution de l'acide dibromanthranilique de Greif; c'est l'acide AzH°:COOH:Br:Br—1:2:4:6. — M. P. Friedlaender a retiré à l’état pur le pourpre antique des glandes du Wurex brandaris. I ne contient pas de S, mais de l'Az; il diffère du bleu d'indigo et du thio-indigo. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. O. Abel à étudié la morphologie des rudiments de l'os de la hanche chez les Cétacés. Ces rudiments ne sont plus liés à la colonne vertébrale, mais reposent parallèlement à elle et au dessous dans les parties molles. Ces rudiments, outre l'ischium, comprennent encore l'ilium et le pubis chez certains Cétacés (Balaena, Balaenoptera, Physeter, ete.); mais des trois éléments du bassin le pubis est le plus réduit et finit par disparaître com- plètement. — M. H. Rebel a déterminé les Lépidoptères rapportés de l'expédition dans le Sud de l'Arabie et à Sokotra. La faune du Sud de lArabie a un caractère continental, tandis que celle de Sokotra a le caractère d'une faune d'ile océanique. Séance du 13 Juin 1907. 1° SCIENCES P4ysiQuEs. — M. M. Samec a étudié l'in- tensité lumineuse à de grandes hauteurs au-dessus de la mer, d'après des ascensions de ballons-sondes. L'intensité chimique de la lumière totale ainsi que celle du rayonnement solaire direct augmente avec la hauteur; l’activité de la lumière diffuse diminue. L'in- tensité des rayons à grande longueur d'onde augmente d'abord rapidement, puis reste constante. — M. C. Bruckner à préparé par deux méthodes un sel triple de mercure, de formule : 6 (3Hg0.2S0*). 6 Hgl®. Hgl*0°. — M. J. Herzig résume ses travaux et ceux de ses élèves sur la réso et la galloflavine et sur l'acide ella- gique. — M. G. Mossler arrive à la conclusion que l'ériodictyonone retirée de l'£riodictyon glutinosum possède l'une des deux constitutions suivantes : HO NX 0H 2/7 ou "cH0/ 22° | Jo OH HO UC VE PH AaNor DIN NPA EN, fe ù ÔH 0 29 SCIENCES NATURELLES. — MM. R. KrausetR. Volk: Etudes sur l'immunité contre la variolo-vaccine. — M. M. Strigl : La structure anatomique de l'écorce du bulbe du Balanophora et son importance fonctionnelle. — M. R. Wagner a étudié au point de vue morpho- logique l’Hoffmannia robusta. I a observé des systèmes de ramifications très particuliers, ainsi que des sym- podes terminaux en pelotons, dans lesquels se forme toujours l’avant-feuille fertile. Séance du 20 Juin 1907. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. K. Hillebrand pré- sente ses recherches sur la trajectoire probable et l'origine des comètes. Il conclut que les comètes appar- tiennent en fait à notre système solaire et que, malgré leur caractère parabolique apparent, leur origine peut être placée dans des régions dont les distances sont petites relativement à l'éloignement des étoiles fixes les plus proches. 29 ScieNcEs PHYSIQUES. — M. V. von Lang présente ses expériences dans le champ alternatif électrostatique, concernent la rotation d’un disque de papier par l'ap- proche d'isolateurs et de conducteurs, et qui n’est que la résultante de la répartition électrique. — M. A. Lampa décrit un dispositif simple pour la réalisation d'un champ électrostatique tournant. — M. P. Cermak a déterminé la valeur de l'effet Peltier entre le nickel et le cuivre de 20° à 4509 C. Voici quelques valeurs obtenues par coulomb : 19° 1,92; 950 2,15 ; 2350 2,45 ; 290° 2,06 ; 3400 1,91 ; 4459 2,38 X 105 gr. cal. = = 30 SCIENCES NATURELLES. — M. J. Erdheim :Sur la découverte de corps épithéliaux dans l'ostéomalacie. — M. R. Wagner a étudié la morphologie du Peltiphyk lum peltatum, qui présente des phénomènes de recau= lescence extrêmement développés. Séance du 4 Juillet 4907. 4° SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Mache pose le bases d'une théorie des explosions. Il considère le mécanisme de propagation de l'explosion comme un processus de conductibilité calorifique qui, partant de la surface d'allumage, propage l'explosion avec la même vitesse suivant laquelle il peut amener la matière ex- plosive à sa température d’inflammation. Mais cette conductibilité présente une polarité, provenant de la nature de la substance, et qui est cause qu'elle n’a pas la même valeur dans toutes les directions. — MM. H. Mache et J. Tagger décrivent une méthode simple pour la détermination de la constante de con- ductibilité calorifique des liquides. Elle consiste à plon- ger un thermomètre à réservoir métallique rempli de la substance à étudier dans un bain d'eau plus chaud de quelques degrés. Par suite de la dilatation du réservoir, le liquide s'abaisse d’abord dans le thermomètre, puis il remonte lentement à mesure qu'il se dilate lui- même; du temps qui s'écoule jusqu'à ce qu'il ait repris son niveau primitif, on peut déduire, au moyen d'une équation, le coefficient de conductibilité calorifique du liquide. — M. R. Wagner a déterminé, au moyen d'un dispositif approprié, l'énergie du bruit produit par l'étincelle électrique. Elle est d'autant plus grande que le point de fusion du métal des électrodes est plus bas. — M. E. Mach : Le déplacement des phases par réflexion sur une plaque de Jamin. — M. C. Doelter a reconnu que les silicates commencent à être conduc-M teurs vers 500°, quoique leur résistance soit encore énorme; cette conductibilité croît rapidement avec la température. Le point de fusion constitue un point, d'inflexion dans la courbe température-conductibilité.n — M. R. Kremann, pi l'étude des courbes de fusion, a constaté que les trois crésols isomères fournissent avec l'urée des combinaisons équimoléculaires; la com- binaison p-crésol-urée n'a qu'une région d'existence extrêmement limitée. — M. A. Kaïilan a étudié l’éthé- rification des acides «- et £-naphtoïiques par HCI alcoolique. La vitesse dans l'alcool presque absolu croit moins rapidement que la concentration en HCI; dans l’alcoël plus dilué, elle croit plus rapidement. — M. M. Kohn a observé que la diacétonamine, traitée par MgCHSI, fournit principalement du 2:4-diméthyl-2= aminopentanol-4. — M. J. Mauthner, en additionnant HCI au cholestène, a obtenu deux isomères qui, par soustraction d'HCI, donnent un isomère du cholestène, ou pseudocholestène. Le dibromure de ce dernier & un pouvoir rotatoire variable dans le chloroforme. | 20 SCIENCES NATURELLES. — M. M. C. Toldt a étudié le renflement antérieur du muscle digastrique et ses variétés chez l'homme. — M. F. Siebenrock décrit une nouvelle tortue sous le nom de Pseudemydura umbriva ; elle forme un groupe spécial dans la famille des Chelydidae. — M. F. Steindachner décrit un nouvelle ‘espèce de Corydoras, le C. mnltimaculatus; qu'il a trouvée dans le Rio Preto, et une espèce de Xenocara, le X. damasceni, trouvée dans le Parnahyb Il indique également de nouvelles localités où lo trouve l'Anacyrtus prognathus et le Brachycalcinu longipinnis. — M. F. Seefried a trouvé dans le feuil lage de plusieurs plantes indigènes à ombrage les dis positifs que Haberlandt associe avec la perception dé la lumière. — M. F. Berwerth communique de now velles observations géologiques faites sur le tunnel d Tauern. Louis BRUNET. Le Directeur-Gérant : Louis Ouvier: 4 LR Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 18° ANNÉE N° 17 15 SEPTEMBRE 1907 Revue générale des SCten pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L, OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tou: Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux s les pays étrangers, ÿ compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Astronomie Les albedos des planètes supérieures. — Voici une nouvelle méthode exposée par M. I. E. Gore, dans The Observatory, pour Calculer les albedos* des planètes supérieures. La masse de la composante la lus brillante du couple « du Centaure étant égale à celle du Soleil, et leurs spectres étant de même nature, cet astronome propose de considérer cette étoile comme un astre égal à notre Soleil, et d'évaluer les albedos des planètes supérieures quand elles se trou- vent en opposition, en comparant leurs grandeurs pho- tométriques avec l'étoile « du Centaure. Dans un article antérieur, M. Gore avait remarqué que, la parallaxe de cette étoile étant de 075, et en admettant que le diamètre de la plus brillante des composantes soit égal à celui du Soleil, l'éclat apparent de notre flambeau central est 75.232.650.000 fois supé- rieur à celui de l’astre principal de « du Centaure. En tenant compte de la distance moyenne d'une pla- nète, de la quantité de lumière solaire qu'elle inter- cepte et de sa grandeur photométrique au moment de l'opposition, M. Gore a obtenu les résultats suivants pour ces cinq planètes : Mars, 0,2072; Jupiter, 0,595; Saturne, 0,6744; Uranus, 0,61; Neptune, 0,6276. 2. — Météorologie A L'Observatoire aéronautique de Linden- berge. — L'exploration, au moyen de cerfs-volants et de ballons, des couches supérieures de l'atmosphère a pris, dans ces dernières années, une importance toujours grandissante. Pour encourager les études qui se rattachent à cette branche des sciences physiques, l'Etat prussien a fait ériger, en 1905, près de Linden- berg (Brandebourg), un Observatoire aéronautique spécial, destiné à se substituer à l'Observatoire pro- visoire de Tegel. En dehors des observations courantes qui forment le programme des stations météorologiques ordinaires (déterminations de l'allure de la température de Fair 1 On est convenu d'appeler albedo la propriété de réflex on de Ja surface d'un astre: REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1901. ambiant, de l'humidité de l'atmosphère, des chutes de pluie, etc.), les savants attachés à cet Observatoire auront à déterminer surtout les températures moyennes et les vitesses du vent à des hauteurs différentes de l'atmosphère libre. Les expériences antérieures dans cette voie ont fait voir que, la chute de température étant considérablement plus lente dans les trois kilo- mètres inférieurs de l'atmosphère que dans les mon- tagnes, les températures de l'atmosphère libre sont supérieures à celles de l'air des montagnes à la même hauteur. Le programme de l'Observatoire comporte encore : Le Des recherches sur l'électricité atmosphérique, à savoir : mesures du potentiel électrique, observations de l'ionisation, de la conductivité, de la dispersion électrique, et des courants de convection verticaux qui en résultent. Comme ces facteurs ne se prètent guère à une détermination au moyen d'instruments à enregis- trement automatique, on ne saurait renoncer, pour le moment du moins, aux ascensions en ballon monté; 90 Des déterminations du rayonnement du Soleil. Ces déterminations ont sollicité, en ces dernières années, l'intérêt des savants à un degré toujours plus grand, à côté des mesures de températures; le pyrhé- liomètre à compensation construit par M. Angstrüm fournit à ces recherches une base rigoureusement scientifique ; : 30 Des déterminations du taux de poussière de l'air atmosphérique. Des observations de ce genre, com- plétant les recherches d'électricité atmosphérique, observations d’un intérêt météorologique spécial pour la théorie de la formation des nuages et des pluies, ont été exécutées pendant plusieurs ascensions récentes; 4o Des mesures de la composante verticale de la vitesse du vent. Comme la variabilité des constantes d'anémomètres constitue une difficulté spéciale s’op- osant à ce genre de recherches, les savants attachés à l'Observatoire auront à perfectionner ces instru- ments; 30. Des déterminations de la teneur en eau des nuages, et des photographies de ces derniers. Les tra- vaux de photographie occupent surtout les membres les plus jeunes du personnel de l'Obserx atoire; 6° Des déterminations topographiques d’Astronomie. 17 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Des délerminations pareilles viennent d'être faites avec beaucoup de succès lors de plusieurs ascensions récentes. L'Observatoire se compose d'une maison d'habitation réservée au directeur, de la maison du personnel scienti- fique, du bâtiment administratif, des usines, du hallaux ballons et du hangar aux cabestans. Tous ces bâtiments sontéclairés à l'électricité; l'énergie requise pour alimen- ter les 395 lampes, aussi bien que pour actionner bon nombre de machines et d'appareils, est engendrée sous 220 volts par une dynamo à courant continu commandée par un moteur à gaz de 30 chevaux, tout excédant d'énergie étant emmagasiné par une batterie d’accu- mulateurs de 120 cellules. La salle des machines comprend encore, en dehors du générateur et du puri- ficateur de gaz, une chaudière Lilienthal à tubes ser- pentins, fournissant la vapeur à une machine de 7 chevaux, et un distillateur engendrant l’eau distillée nécessaire à la batterie d'accumulateurs et pour des usages analogues. Le gaz hydrogène servant à remplir les ballons est engendré par un électrolyseur, construit par les ateliers d'OErlikon, et décomposant l’eau dans ses composan- tes. Cet appareil comporte 95 plaques en fonte pour- vues des deux côtés de demi-rainures verticales. Entre chaque deux plaques voisines, — lesquelles sont serrées fortement l’une contre l’autre par une espèce de filtre-presse, — on a disposé un diaphragme en amiante, assurant l'étanchéité des rainures, de facon que les bulles de gaz hydrogène et oxygène engendrées par le courant électrique montent vers la rainure collectrice, d'où elles s'échappent à travers les conduites disposées de part et d'autre. Une solutioa de potasse pure à 10 °/, dans l'eau distillée sert d'électrolyte ; la tension efficace est de 220 volts. L'hydrogène est emmagasiné dans un réservoir d’une capacité de 500 mètres cubes; l'oxygène s'échappe dans l'air atmosphérique. La machine réfrigératrice à acide carbonique ins- tallée dans la même salle se compose d’une pompe à compression, liquéfiant l'acide carbonique sous une pression de 70 atmosphères. Cétte pression ayant été retirée, l'acide pénèire dans un long serpentin tra- versant la réfrigératrice, et après avoir refroidi le liquide qui y est contenu à la température de -13 à -15 de- grés, retourne au compresseur, où il sera de nouveau liquéfié. On a installé plusieurs ateliers, parmi lesquels nous mentionnerons l'atelier de serrurerie, celui de mécani- que de précision (où, en dehors des travaux de répa- ration, on construit à l'occasion des appareils nouveaux) et l'atelier de menuiserie, où les cerfs-volants sont confectionnés. Les machines-outils employées dans tous ces ateliers sont actionnées par des moteurs électriques. Dans la salle d'essais sont disposées plusieurs ma- chines pneumatiques produisant des vides élevés. Pour vérifier les anémomètres faisant partie des appareils enregistreurs de Marvin, on se sert d’un ventilateur Sirocco, mû par un moteur à courant continu de 1/2 cheval, monté en bout d'arbre et tournant à la vitesse de 1.700 tours. La vitesse de sortie de l'air est réglée par des diaphragmes. Le hangar aux ballons est muni de tous côtés de portes glissantes permettant d'opérer le lancement des ballons enregistreurs du côté opposé à la direction du vent. Ce hangar renferme plusieurs ventilateurs et d’autres appareils, tels qu'un appareil pour essayer les fils d'acier et les raccords du réservoir à gaz. Le hangar aux cabestans est disposé sur une plaque tournante de chemin de fer. Ses murs latéraux sont recouverts à l’intérieur de bois et à l'extérieur de fer ondulé; l'intervalle est rempli de cendres. Le méca- nisme de rotation de ce hangar est d’une construction. fort pratique. Le programme ordinaire de l'Observatoire comporte une ascension, au moins, par jour, indépendamment des conditions de l’atmosphère; lorsque le temps est favorable, on fait jusqu’à cinq ascensions journalières pendant plusieurs jours consécutifs, surtout lors des ascensions internationales organisées une fois par mois. Les déterminations de la période diurne des températures atmosphériques sont l’objet d’une atten- tion spéciale. Alfred Gradenwitz. $ 3. — Art de l'Ingénieur Les turbines à vapeur de l'usine Moabit à Berlin. — Les remarquables avantages des turbines à vapeur, au point de vue du faible encombrement des usines, se manifestent d'une facon éclatante par l'exten- sion qu'elles ont permis d'apporter à l'usine génératrice de Moabit : cette usine était établie en vue d’une puis- sance de 38.000 chevaux et comportait déjà six unités à vapeur, machines à mouvement alternatif de bonne construction, mais relativement encombrantes : 3 de 3.000 kw., et 3 de 1.800 kw. Nos lecteurs comprendront, sans qu'il soit utile de reproduire la vue en plan de l'usine, que celle-ci com- portait d'un côté les trois grosses unités, de l’autre les trois petites, et à chaque extrémité était ménagé l’em- placement nécessaire pour une autre uuité, c'est-à-dire d'un côté pour la puissance de 3.000 kw., de l’autre pour la puissance de 1.800 kw. Entre temps, les turbines à vapeur ont fait leur ap- parition dans l'industrie, et ont permis d'utiliser beau- coup mieux l'espace réservé à chaque extrémité de l'usine. L'emplacement qu'on destinait à une machine de 1.800 kw. sera occupé par trois groupes de chacun 3.000 kw., ce qui fait que l’utilisation de cet emplace- ment a été presque sextuplée. A l’autre extrémité de l'usine seront installés deux groupes de 4.000 kw., et un de 6.000 kw., ce qui cons- titue une utilisation encore meilleure du terrain. Ces turbines sont construites par l'Al/gemeine Elek- trizitæts-Gesellschaft, et les essais de consommation effectués sur le groupe de 3.000 kw. au commencement de l’année ont établi que la consommation était de 5,80 kg. de vapeur par kw.-heure. Cette consommation ne comprend pas l'énergie due à la condensation, mais elle comprend l'excitation. Les mesures ont été faites sous une pression de vapeur de 173 livres et à la température de 309° C. La vitesse de rotation est de 1.500 tours par minute. La condensation, faite par un condenseurà surface comme pour tous les groupes de turbines, nécessite un poids d'eau à 10° C. égal à 50 fois le poids d’eau consommé. La consommation d'énergie correspondant à la marche du condensateur est de 54 kw., c'est-à-dire un peu moins de 2°/, de la puissance de la machine. Si l’on rapporte la consommation donnée ci-dessus au cheval-heure indiqué, on trouve que les turbines réalisent sur les moteurs à mouvement alternatif de 3.000 kw. de la même usine, essayés en 1904, une éco- nomie d'environ 5 °/,, pour la même température de la vapeur, voisine de 300°, et pour une pression de vapeur de 184 livres. 1 Les rapports d'essais font prévoir encore la réalisation d’une économie plus grande par l'élévation du degré de surchauffe, ce qui ne serait pas possible avec des moteurs à mouvement alternatif. $ 4. — Physique Sur l’anomalie des images dans la vision à travers une fente étroite. — M. E. Grimsehl a récemment décrit’ un phénomène remarquable qu'il vient d'observer en tracant sur une feuille de papier une croix simple, composée de deux traits noirs, l’un 1 Physikalische Zeitschrift, n° 13, 1907. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE vertical, l'autre horizontal, et en a contemplant à tra- vers une fente étroite. La croix étant distante de l'œil de 50 centimètres ou davantage, l’on n'aperçoit, en effet, que le trait perpendiculaire à la direction de la fente. En approchant la croix de l'œil, on voit ce trait perdre de plus en plus de sa netteté, tandis que le trait parallèle à la fente devient peu à peu perceptible. A la distance de 45 centimètres, les deux traits présentent une netteté à peu près égale, tandis que, pour un rap- prochement croissant, le premier trait finit par dispa- raître complètement, le trait parallèle à la fente restant seul visible. Voici l'interprétation, de ce phénomène donnée par l’auteur: Pour une distance considérable entre la croix et la fente, les rayons lumineux partant des bords des traits parallèles à la fente donnent lieu, en traversant la fente, à des phénomènes de diffraction, effaçant les limites de l'image rétinienne du trait sur les deux bords de ce dernier. Les élargissements de diffraction dus aux deux bords se superposent des deux côtés, pro- duisant un éclairage uniforme du trait, lequel cessera d'être visible sur le papier blanc. En approchant la croix de l'œil, l'on rétrécit de plus en plus la région des élargissements de diffraction, alors que l'image réti- nienne (apparente) du trait s'élargit de plus en plus. A mesure qu'on rapproche le trait de l'œil, la portion centrale de l’image rétinienne restant obscure, le trait parallèle deviendra visible. Les bords du trait vertical à la fente ne donnant pas lieu à des phénomènes de diffraction, ce trait restera nettement défini à distance plus grande. À moindre distance, en raison de l'accom- modation insuffisante de l'œil, il ne se produit aucune image rétinienne proprement dite. Cependant, un pin- ceau plan de lumière entrera dans l'œil à travers la fente à chaque point du papier blanc, d'une façon ana- logue à ce que l’on observe en regardant à travers le trou d’un carton. Or, les pinceaux lumineux partant de points situés sur le papier, sur une même ligne droite parallèle à la fente, se superposent pour la plus grande partie. Le manque de lumière correspondant à l'un de ces points, situé sur le trait noir transversal, est sans importance aucune, étant incapable de produire dans l'œil la sensation d'un point sombre, en l'absence, sur la rétine, de toute image optique proprement dite de ce point. Les manques de lumière correspondant aux points noirs situés sur le trait parallèle à la fente pro- duisent, au contraire, la sensation d'un trait noir, la portion correspondante de la rétine ne recevant aucune lumière. Le trait noir parallèle, loin d'être une image rétinienne proprement dite du trait, n’est que la somme des différents manques de lumière superposés. Un phénomène analogue s’observe évidemment en contemplant un réseau de traits noirs s’entre-croisant à angle droit ou une toile métallique. En inclinant la fente sous un angle de 45° par rapport à la direction des traits, on voit sur les points d’entre-croisement se présenter plusieurs lraits noirs courts, tandis que le nie des deux séries de traits présente un aspect ou. $ 5. — Electricité industrielle Emploi de l'arc électrique pour couper Paeier. — On coupe industriellement l'acier au moyen de l'arc électrique, et son emploi a pris un certain développement dans les travaux maritimes, notamment à San Francisco, d'où sont obtenus les renseignements suivants : | s Une intensité de courant d'environ 250 ampères sous 90 à 100 volts est fournie à des électrodes par une dynamo à courant continu de 25 kw., commandée par un moteur à pétrole de 40 chevaux. Cette tension rela- tivement élevée assure une plus grande stabilité de l'arc, et une plus grande résistance au vent. Cette dis- Position permet de couper des fers en I de 380 milli- mètres en vingt minutes environ, travail qui, à la scie, nécessiterait plusieurs heures, $ 6. — Chimie La Chimie à la Réunion annuelle de la Société helvétique des Sciences naturelles, à Fribourg (Suisse). — La Société helvétique des Sciences naturelles à tenu cette année sa 90° ses- sion à Fribourg. Cette réunion a eu un plein succès, tant par le nombre que par la qualité des communica- tions qui y ont été présentées. La Section de Chimie, en particulier, a eu la p'imeur d'importants travaux, parmi lesquels il convient de signaler les suivants : En Chimie physique, M. le Professeur L. Pelet (Lau- sanne) a rendu compte d'expériences fort intéressantes sur la fixation des matières colorantes par lessubstances minérales, expériences qui attirent à nouveau l'attention sur la théorie physique de la teinture. M. le Professeur Ph. A. Guye (Genève) a exposé les résultats de divers travaux entrepris dans son laboratoire sur la détermi- nation des courbes de points de fusion de mélanges binaires organiques; en collaboration avec M. Wro- cynski, cette méthode a servi à mettre en évidence la formation de produits d’addition précédant les réac- tions de substitution; avec M. Tsakalotos, à démontrer l'existence d'un composé, fusible en dessous de —110°, entre le nitrobenzène et l’éther éthylique ; avec M. An- tonow, à préciser certaines anomalies relatives aux pouvoirs rotatoires de corps actifs en solution dans des dissolvants indifférents. M. Æ. Briner (Genève) a déve- loppé quelques points nouveaux de la théorie des mélanges et combinaisons binaires, en s'appuyant sur les résultats de ses expériences avec M. Cardoso. M. D. Tsakalotos (Genève)a décritune nouvelle méthode expérimentale, étudiée en collaboration avec M. PA. A. Guye, en vue de déterminer avec précision l’eau de cristallisation des sels cristallisés. MM. Æ. Durand et E. Briner (Genève) ont étudié l’action de l’étincelle électrique sur les mélanges d'azote et d'oxygène aux basses températures et signalé l'augmentation du ren- dement en gaz AzO résultant de l’abaissement de tem- pérature. M. G. Baume (Genève) a déterminé de nouveau avec précision les densités des gaz SO?, (CH‘)0, CH“CI el CH* et développé un nouveau mode de calcul des poids moléculaires exacts des gaz à partir de leurs densités et de leur coefficient d'expansion. M. J. Gyr a rendu compte de nouvelles expériences sur l'éthéri- fication d’un certain nombre d'acides organiques. M. J. H. Russenberg (Genève) a résumé ses travaux sur les caractères physiques des fausses solutions, et précisé l'influence de la température sur le phénomène de floculation. En Chimie organique : M. le Professeur Amé Pictet (Genève) à communiqué les résultats d'une étude faite avec M. S. Court sur la présence de bases volatiles pyrroliques dans les plantes de tabac, carotte, poivre noir, persil et coca. M. G. Darier (Genève) a relaté une série d'expériences, exécutées avec M. J. Fainberç, sur l'emploi de l'acide sulfureux pour la préparation de quelques éthers-sels de la série grasse; les alcools aliphatiques, traités simultanément par le chlore et le gaz sulfureux, ou par le chlore et l'acide nitrique, don- nent comme produits principaux, et avec de bons rendements, les chlorures ou nitrites correspondants; ces derniers, obtenus ainsi à l’état pur, ont pu être étudiés avec soin; on a reconnu qu'ils se décomposent lentement suivant l'équation (relative au nitrite de pro- pyle) : 3C*H704z0 — CH7.0.C*H7—+ C'H°0.Az0? + 2470. M. Fred. Reverdin (Genève) a rendu compte d'une étude sur la nitration des dérivés du p-aminophénol exécutée avec la collaboration de MM. Dresel, Deletra, Bucky, Cuisinier et Dinner. M. le Professeur Fr. Fel- ter (Bale) a signalé une série d'exemples nouveaux de transformations moléculaires d'acides non saturés af et Gy. Enfin, M. Schumacher-Kopp (Lucerne) a relaté d'une facon très intéressante les applications récentes du carbure de calcium à l'éclairage en mer, tandis que M. Æd. Fisza (Berne) a présenté une nouvelle règle | à calcul pour les laboratoires de Chimie. 696 $ 7, — Biologie Le verdissement des Huitres de Marennes. — Il est peu de questions aussi faciles à résoudre que le déterminisme du verdissement des Huîtres de Marennes, parfaitement élucidé par Gaillon en 1824, puis par Bornet et Puységur en 1877, et cependant il était jusqu'ici bien difficile de se faire une opinion sur ce sujet. Les observateurs anciens avaient très bien vu que, dans les claires où l’on dépose les Huitres quelque temps avant la vente, à Marennes et dans d'autres localités, il apparaît, à certaines époques de l'année, une Diatomée, le Navicula ostrearia Bory, dont le cytoplasme renferme une matière colorante bleue; la Navicule se multiplie en telle quantité que l'eau est d'un bleu vert très foncé, même sous une faible épaisseur; les ostréiculteurs disent que les chires sont en verdeur. Les Huitres ingèrent des quan- tités de Diatomées; la matière colorante est mise en liberté dans le tube digestif du Mollusque, passe dans le sang, et va se fixer sur les branchies et les palpes labiaux, qui prennent une teinte verte (virage en milieu alcalin de la marennine bleue); la succulence de lHuître n’est, du reste, pas modifiée, mais cette colora- tion constitue une marque très demandée par les restaurateurs parisiens. Les biologistes qui ont étudié la question après Puységur et Ray Lankester, abusés par des analyses mal faites, et ne s'étant pas donné la peine d'aller voir les choses sur place, ont complè- tement méconnu la cause du verdissement; ils l'ont attribué à une composition particulière du sol, riche en sels de fer, et cette manière de voir a fini par prévaloir. M. Sauvageau‘, dans un Mémoire qui est un modèle d'érudition et d'esprit, remet les choses au point en refaisant l'expérience cruciale de Puységur : des Huîtres blanches sont placées avec de l’eau des parcs dans des cuvettes de porcelaine; dans la moitié de celles-ci, il ajoute une quantité de Navicules bleues, bien vivantes et bien propres, recueillies dans une claire en verdeur. «Vingt-quatre heures après, les Huïtres des cuvettes à Diatomées ont pris la teinte verte marchande, tandis que les Huiîtres témoins sont restées blanches; il est facile de constater que les Diatomées ont bien été ingérées, et que la coloration verte n'est pas due à un dépôt superficiel. Il paraît que, dans certains pares des Sables-d'Olonne, les Huitres brunissent par l'absorption de la Diatomée MNitzschia closterium. Maintenant que la question est résolue d’une facon définitive, la Physiologie générale peut profiter de cette expérience naturelle. Où est absorbée la marennine ? Probablement dans le foie, comme il est habituel chez les Invertébrés. Sur quels tissus précis va-t-elle se fixer après absorption ? 11 y a là quelquê chose d'intéressant à élucider: en effet, lorsqu'une substance étrangère à l'organisme, par exemple une couleur soluble, est introduite dans le sang d'un animal, cette substance est très généralement éliminée par les organes excré- teurs, qui en débarrassent les tissus; c’est, du reste, le principe de la méthode dite des injections physiolo- giques, utilisée pour mettre en évidence les cellules excrétrices; quelquefois une partie de la couleur se fixe sur des conjonctifs; c’est le cas de la garance qui, ajoutée à la nourriture, est absorbée et imprègne ensuite les os (Gaillon a déjà fait ce rapprochement entre le sort de la garance et celui de la marennine); il est curieux de constater que ces substances sont toutes deux des couleurs organiques, d'origine végé- tale. $ 8. — Enseignement Les grandes bourses de voyage de l'Uni- versité de Paris. — On sait que, depuis 1898, un ‘ Le verdissement des Huitres par la Diatomée bleue. Travaux des laboratoires, Station biologique d'Arcachon, 10: ann., 1907, p. 1-128. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE bienfaiteur de l'Université de Paris, M. Kahn, a mis à la disposition de l'Université des bourses annuelles de voyage autour du monde, d'une valeur de 15.000 francs chacune. Cette année, il a offert au Conseil de l'Université une nouvelle somme de 33.000 francs. Jusqu'ici les bourses de voyage autour du monde n'étaient accordées qu'à des membres de l'enseigne- ment secondaire public, pourvus du titre d'agrégé; désormais, elles pourront l'être à des membres de l'enseignement supérieur publie, docteurs en Droit, ès Sciences, ès Lettres, en Médecine, ou Pharmaciens supérieurs. Elles ont surtout pour objet un voyage de deux ans autour du monde; elles sont alors de 15.000 francs, plus 1.500 francs pour acquisition de livres et de souvenirs. Mais elles peuvent être limitées, dans des cas dont le Conseil de l'Université sera juge, à un voyage d’une année à l'étranger, les pays d'Europe exceptés; dans ces cas, le montant de la bourse sera fixé par le Conseil de l'Université. Suivant les intentions du donateur, « ces voyages ne doivent pas avoir pour objet l'étude de questions scien- tifiques déterminées, mais l'observation personnelle et directe des choses de l'étranger, pays, institutions et hommes ». Les candidats doivent adresser, avec leurs demandes, un projet d'itinéraire. L'Université de Paris dispose, en outre, pour les jeunes filles ou femmes, agrégées de l’enseignement secondaire, de deux bourses de voyage de 8.500 francs chacune, créées par un bienfaiteur. Le voyage doit durer au moins une année. Les titulaires doivent voyager ensemble et visiter : 4° Les principaux pays de l’Europe, notamment l'Angleterre, la Belgique et la Hollande, l'Allemagne, la Russie, la Suède et la Norvège, la Suisse, l'Italie et l'Espagne ; 20 Les Etats-Unis, en particulier New-York, Boston, Chicago, les Universités de femmes, etc. La connaissance pratique d'au moins une langue étrangère est une condition d'obtention de la bourse. Personnel universitaire. — M. Combemale, professeur de Clinique médicale à la Faculté de Méde- cine de Lille, est nommé, pour trois ans, doyen de ladite Faculté. M. Drach, professeur de Mécanique rationnelle ap- pliquée à la Faculté des Sciences de Poitiers, est nommé, sur sa demande, professeur de Calcul différentiel et in- tégral à ladite Faculté. M. Le H. Chatelier, professeur de Chimie minérale au Collège de France, est nommé professeur de Chimie à la Faculté des Sciences de Paris. M. Anthony, docteur ès sciences, est nommé chef des travaux du Laboratoire de Chirurgie expérimentale de l'Ecole pratique des Hautes-Etudes. M. Hallez, professeur de Zoologie à la Faculté des Sciences de Lille, est nommé, sur sa demande, profes- seur d'Anatomie et d'Embryologie comparée à ladite Faculté. M. Malaquin, docteur ès sciences, maitre de Confé- rences de Zoologie à la Faculté des Sciences de Lille, est nommé professeur de Zoologie générale et appli- quée à ladite Faculté. M. Clairin, docteur ès sciences, maitre de Confé- rences de Mathématiques générales à la Faculté des Sciences de Lille, est nommé professeur de Mathéma-. tiques générales à la dite Faculté. M. Le Vavasseur, maître de Conférences de Mathé- matiques à la Faculté des Sciences de Lyon, est nommé professeur de Calcul différentiel et intégral à ladite Faculté. M. Nicklès, docteur ès sciences, est nommé profes- seur de Géologie à la Faculté des Sciences de Nancy. M. Turpain, docteur ès sciences, maitre de confé- rences de Physique à la Faculté des Sciences de Poi- tiers, est nommé professeur de Physique à ladite Fa- culté. E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE 697 LA LIQUÉFACTION INDUSTRIELLE DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE L'OXYGÈNE DE L'ATMOSPHÈRE Dans un précédent arlicle', nous avons décrit avec quelques détails la machine de Linde pour la liquéfaction de l'air, laquelle est fondée, comme on le sait, sur l'abaissement de température produit par la détente de l'air sans travail extérieur sen- | sible; dans l'application de cette méthode, le savant professeur de l'École Polytechnique de Munich est arrivé à un dispositif relativement simple, dont le fonctionnement est parfait dans la pratique, pourvu que la machine marche d'une façon ininterrompue. Les caractéristiques de l’ap- pareil Linde sont : ne compression initiale de l'air à 200 almosphères et un rendement d'environ 1/2 litre d'air liquide par cheval et par heure pour des machines de moyenne puissance. Le rende- ment théorique étant environ six fois le rendement pratique, il y a place pour de nombreux perfeclion- nements. Nous nous proposons, dans la première partie de cel exposé, de compléler à grands traits l'his- toire de la liquéfaction industrielle de l'air, ébauchée dans l'article auquel le lecteur est prié de bien vouloir se reporter, et, dans la seconde partie, d'insister sur la séparation de l'air atmosphérique en ses composants oxygène el azote, par voie pure- ment physique, ce à quoi on arrive par une liqué- faction préalable de l'air suivie d'une véritable rec- tificalion du liquide obtenu. I. — LIQUÉFACTION INDUSTRIELLE DE L'AIR. Les idées qui ont conduit à la liquéfaction de l'air, à la fabrication industrielle de la glace et aux procédés de réfrigération actuellement employés sont dues au génie de Charles William Siemens; il les a clairement exposées dans un brevet anglais, vieux aujourd'hui d’un demi-siècle et qui est resté célèbre *. Ces idées sont au nombre de deux : On produit du froid, puis on l'accumule. Pour produire du froid, on prend de l'air ou un fluide élastique quelconque et on le comprime en ayant soin de le ramener, après sa compression, à la température ordinaire, à l’aide d'un, courant d'eau ou de tout autre moyen. Cela étant, on conduit le fluide comprimé dans le cylindre d’une machine motrice, où il se détend en poussant le 1 Voyez la Revue du 30 octobre 1901. 2 GC. W. SIEMENS : Improvements in refrigeraling and pro- ducing ice and in apparatus or machinery for that purpose, A. D. 1857, brevet n° 2.064. piston; cette détente avec travail extérieur permet de récupérer sous forme de travail utilisable une partie de l'énergie dépensée pendant la compres- sion du fluide; d'autre part, elle abaisse fortement (de plusieurs dizaines de degrés) la température du fluide détendu. Si considérable qu'il soit, cet abais- sement est insuffisant pour atteindre d'emblée la température critique de l'air (—140°); on obtient une réfrigération plus énergique par l'emploi d'un échangeur de températures ou appareil à contre- courant. Imaginons qu'on entoure d’un tube concentrique le tube d'amenée d'air comprimé et qu'on envoie dans ce tube, en sens inverse de l'air comprimé qui arrive à la machine, l'air détendu ét froïd qui Vi Fig. 1. — Schéma du procédé Siemens. — À, conduite de l'air comprimé à détendre: B, conduite de l'air détendu; M, échangeur de température: D, cylindre de détente: KR, robinet de soutirage de l'air liquide. s'échappe de celle-ci. Dans cette circulation in- verse, les deux gaz vont échanger leurs tempéra- tures. L'air détendu va céder son froid à l'air com- primé, qui, arrivant à la machine déjà refroidi, produira par sa détente une température un peu plus basse que celle de l'air qui l’a précédé; l'air détendu refroidira donc un peu plus l'air comprimé suivant, et ainsi de suite. Au lieu de rester station- naire, la température s'abaissera progressivement, et, si l'appareil est soigneusement protégé contre la pénétration de la chaleur extérieure, on alleindra la température de liquéfaction de l'air. À partir de ce moment, l'air se résoudra partiellement en liquide et pourra être soutiré par le robinet R (fig. 1). Constalons en passant que, dans la description d’un procédé pouvant permettre la liquéfaction de l'air et consistant dans des modifications apportées au système Windhausen pour la production du froid, Houston dit textuellement : « Il n'y a pas d'autre limite pour l’abaissement de température 698 Le "V9 7 CRT E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION .DE SON OXYGÈNE que la liquéfaction de l'azote, ou de l'oxygène, ou même de Les essais faits par Siemens pour réaliser son procédé échouèrent*. Ils furent repris en 1885 par l’'éminent industriel Solvay *. Il résume sa tentative dans les Lermes suivants * : l'air. » {À l'é poque où je m'occupais de ce problème, j'avais en vue la production industrielle des températures extrèmes et notamment la liquéfaction courante des gaz. .« Dans cette voie, fort du principe théorique... qui servait de base à mon système, je crus devoir m'im- poser comme limite les compressions pratiques cou- ramment en usage dans l’industrie et ne voulus pas dépasser 5 atmosphères de pression, ni 15 chevaux de puissance pour arriver au résultat; de même, je ne crus pas devoir employer la détente sans travail, de réalisation beaucoup plus facile, mais de rendement beaucoup moindre... « Le maximum d'abaissement de la température auquel je réussis à arriver ainsi fut de — 959, les causes de déperdition du froid produit l'emportant ensuite sur la puissance de sa production. » Quelques années après, le Professeur Linde portait le jugement suivant sur la possibilité de mettre en œuvre la détente avec travail extérieur pour abaisser fortement la température * « La réalisation de ce procédé (indiscutable en théorie) est contestable en pratique pour les raisons suivantes : « Supposons que ce procédé soit appliqué à l'air atmosphérique jusqu'à la température qui doit être atteinte pour la liquéfaction; à ce moment, on a en présence tous les corps étrangers mêlés à l'air, tels que l’eau, l'acide carbonique, etc., ainsi que tous les restes de matière lubréfiante employée à l’état solide. Dans ces conditions, le fonctionnement d'un cylindre d'ex- pansion avec ses organes de distribution devient presque impossible à réaliser. Tous ceux qui ont tra- vaillé avec ces basses températures savent combien la manipulation d’un simple robinet présente déjà de dif- ficultés. En outre, il serait très difficile, pour ne pas dite impossible, de protéger comme il convient pour ces basses températures le cylindre d'expansion et son mécanisme contre l’action de la chaleur extérieure. On ne pourra donc pas du tout Sir ces tempéra- tures avec un pareil dispositif. » . Si l’on résume les raisons qui ont fait échouer les premières tentatives de liquéfaction de l'air par l'emploi de la détente avec travail extérieur, on trouve : 4 Housrox : t. LXVII, p.410: 1874. ? A citer également les considérations d'Armengaud sur ce sujet (1872). ‘3 Voir le brevet anglais n° 13.466 du 6 novembre 1885, dans lequel, de très bonne foi, cet inventeur redécouvre la pro- duction da froid par la détente avec travail extérieur et son Journal of the Franklin Institute, accumulation par un appareil à contre-courant: mais il indique aussi que la combinaison de l'échangeur de tempé- ratures et de la compression des gaz considérée comme cause conduit à l'accumulation de la cha- à la possibilité d'obtenir ainsi des températures productrice de chaleur, leur et élevées. 4 E: Sozvay : G. 7 ; t. CXXI, p. 1141 : 1895. 280: DINDE!: Génie civil, année 1897, p. 31. 1° La congélation des divers lubréfiants em- ployés, d'où résultent des frottements progressifs, des grippements, puis, bien avant que la liquéfac- tion ait pu se produire, une immobilisation com- plète des organes de la machine dans laquelle s'opère la détente; 2° Le entrent par la chaleur extérieure. L'impossibilité de résoudre la première diffi- culté, en particulier, a conduit séparément Hampson et Linde et, après eux, Sir J. Dewar, à se passer de la détente avec travail extérieur et à se contenter de la détente sans travail extérieur sensible, « de réali- sation beaucoup plus facile, mais de rendement beaucoup moindre » (Solvay). Les lecteurs de la Revue connaissent les appareils de Sir James Dewar', Hampson* et Linde*; nous n'y revien- | drons pas. Une conséquence nécessaire du faible rendement de ces appareils, c'est la nécessité de | l'emploi d’une forte compression initiale de l'air, qui atteint 200 atmosphères. Frappé de ces inconvénients, et malgré les in- . succès de ses prédécesseurs, G. Claude attaqua à son tour le problème de la liquéfaction de l'air par | la détente avec travail extérieur combinée avec un échangeur de températures. Il fit ses essais* avec un moteur à piston et tiroir, dont le cylindre avait 1 litre de capacité; avec de l'air comprimé à 20 ou 25 atmosphères, cette machine développait, à la vitesse de 180 tours par minute et avec un coefficient d'admission de 1/5, une puissance maxima de près de 6 chevaux, absorbée par une dynamo. Le cylindre était en relation avec un échangeur de températures pesant près de 700 kilogs et comportant une surface d'échange de 7,5 mètres carrés. Partant de la tem- pérature ambiante, il fallait assurer le graissage de la machine jusqu'aux températures très basses que l'on atteint progressivement; comme c'était la prin- cipale cause des insuccès de ses devanciers, G. Claude porta tous ses efforts de ce côté. Il trouva que, de tous les liquides connus, les corps légers retirés de la distillation du pétrole, désignés sous les noms d'éfhers de pétrole ou de gazoline, qui ont une densité allant de 0,62 à 0,74, ne se solidifient pas aux températures ‘inférieures à la température critique de l'air (—140°). En parti- culier, l'éther de pétrole de densité 0,64 a la pro- priélé de ne pas se solidifier même au point d’ébullition normale de l'azote liquide (— 194). Ces éthers de pétrole sont, à la température ordi- naire, des liquides très mobiles, sans viscosité, et par suite de très mauvais lubréfiants. Au contraire, 1 Rev. gén. des Se., t. VII, p. 274; 16 mars 1896. 2 Rev. gén. des Sc., t. VII, p. 329; 15 avril 1596. 3 Rev. gén. des Sc., t. XII, p. 902; 30 octobre 1901. 4 GEORGES CLAUDE : C. R., t. CXXXI, p. 500: 10 sept. 1900- | | | | | | | E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE 699 au-dessous de —120°, et jusqu'à — 190°, ils se présentent sous la forme d'une huile visqueuse, qui devient d'autant plus consistante que la tem- pérature s'abaisse davantage, circonstance très favorable pour le graissage des machines motrices travaillant à de telles températures. Dans la pratique, l’éther de pétrole est habituel- lement mélangé à des huiles de graissage; plus la température est basse, et plus forte doit être la proportion d’éther de pétrole. De cette façon, on peut assurer la marche de la machine depuis le commencement jusqu'à la température de liquéfac- tion de l'air. Par exemple, soit de l'éther de pétrole de den- sité 0,64 et de l'huile de vaseline de densité 0,88 qui se solidifie vers — 60°. Au début de la marche, et jusqu'à ce que la température d'admission atteigne — 20°, on emploie de l'huile de vaseline pure; de — 20° à — 60°, on utilise un mélange de 50 °/, de cette huile de vaseline et de 50 ?/, d'éther de pétrole de densité 0,64. De — 60° à — 120°, on » se sert d'un mélange à 75°/, d’éther de pétrole; de —1920° à — 160°, le mélange ne contient plus que 10 °/, d'huile de vaseline contre 90 °/, d’éther de pétrole. À partir de — 160° et jusqu’à la tempéra- ture de l'air liquide, on emploie comme lubréfiant l’éther de pétrole pur. Dans l'essai de G. Claude, la température à l'échap- pement, indiquée par des couples thermo-électriques fer-constantan, s’est abaissée en une heure et demie à —140°; à partir de ce moment, {ouf graissage ayant élé supprimé, la température à l'échappe- ment s'est abaissée progressivement à —171° sans que la marche de la machine cessàl d’être ab- solument silencieuse et parfaite pendant plusieurs heures de suite. L'explication de ce fait est la suivante : l'air liquide mouille les métaux; on pouvait donc penser qu'à l'exemple de l’anhydride sulfureux il serait un lubréfiant des surfaces métalliques, et que, dès son apparition dans le cylindre, du fait de la détente, la lubréfaction serait assurée aulomati- quement. Le fonctionnement de la machine au- dessous de — 140°, en dehors de toute espèce de graissage, paraît bien démontrer que l'hypothèse de l’autoluhréfaction par l'air liquide est justifiée; loutefois, la quantité d'air liquide produite a été trop faible pour être recueillie. Dans des essais ultérieurs et avec la même mé- thode, l’auteur a réussi à obtenir de l'air liquide, les rendements ne s'étant néanmoins jamais élevés à plus de 0,2 litre par cheval et par heure. Ces faibles rendements sont attribuables à lrois causes distinctes : 4 CLAUDE : Brevet allemand n° 165.144, 2 février 1900. 1° L'air liquide n’est pas un bon lubréfiant, de sorte que son apparition dans le cylindre produit une aggravation notable des frottements, d'où dé- gagement de chaleur et détermination d’une partie de l’air liquide formé ; 2% La détente étant poussée jusqu'à la pression atmosphérique, et une parlie de l'air détendu se liquéfiant spontanément à la fin de cette détente, la température finale est forcément le point d'ébul- lition normale de l'air liquide, soit — 190°,5. La partie non liquéfiée de l'air, qui en forme plus des neuf dixièmes, quitte donc la machine à cette température très basse pour entrer dans l’échan- geur, où elle refroidit énergiquement l'air com- primé, lequel arrive à la machine de détente vers —140°. Dans ces conditions, la détente avec travail extérieur fournit des résultats médiocres à cause de l'extrême contraction de l'air ; 3° Cette même contraction a pour conséquence la nécessité d'introduire dans le cylindre de détente beaucoup plus d’air comprimé qu'il ne le faudrait (90 °/, en plus, d’après les travaux de Witkowski, en supposant une température d'admission de — 135° et une pression de 40 atmosphères). On évite ce triple inconvénient d'un seul coup par la liquéfaction de l'air sous pression. A cet effet, au lieu d'envoyer directement dans l'échangeur M l'air à —190°,5 sortant de la ma- chine, G. Claude intercale sur sa route un liquéfac- teur L, c'est-à-dire un système tubulaire alimenté d'air froid sous pression par une dérivalion du circuit d'alimentation de la machine. Sous l’action simultanée de sa propre pression et du froid ex- trème de l'air détendu qui circule autour de lui, l'air se liquéfie; mais, à cause de la pression, sa température de liquéfaction est plus élevée et elle peut atteindre — 140°, température critique de l'air, si la pression est de 40 à 50 atmosphères. En mème temps, l'air détendu venant de la machine se ré- chauffe vers — 140°, puis pénètre dans l'échangeur et ne refroidit plus l'air comprimé qui arrive que vers —100°. En relevant ainsi de —135° à —100° la tempé- rature initiale de la détente sous la pression de 40 atmosphères, on réduit de 90 °/, à 20 °/, seule- ment le supplément de dépense de l'air comprimé résultant de l'inexactitude de la loi de Mariotte, en | même temps qu'on produit un travail d'expansion plus élevé à chaque cylindrée. Dans ces conditions, le mécanisme de la liqué- faction est complètement changé. Au lieu que chaque détente s'achève par une abondante liqué- faction dans l’intérieur même du cylindre D, c'est tout au plus si elle se termine maintenant par l’ap- | parilion d'une légère buée. Tout l'acte de la liqué- : faction est reporté dans le liquéfacteur L (fig. 2). 700 E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE 1 n'y a plus à compter sur l’autolubréfaction et il faut graisser d'une manière permanente à l’éther de pétrole, ce qui est un nouvel avantage puisque l'air liquide est un médiocre iubréfiant. Le triple perfectionnement réalisé en relevant la température Fig. 2. — Liquéfaction sous pression. — M. échangeur; D. cylindre de détente; L, liquéfacteur. de détente avec travail extérieur, en réduisant à peu de chose la contraction anormale de l'air qui n'obéit plus à la loi de Mariotte, et en assurant une bonne lubréfaction à l'intérieur de la machine fait plus que tripler le rendement de la liqué- faction par simple détente, qui de 0,2 litre passe à 0,66 litre d'air liquide par cheval et par heure, ce qui est supérieur au rendement de l'appareil de Linde. On peut encore faire mieux. En effet, dans le dispositif à liquéfacteur, dès que la détente de chaque cylindrée commence, ilse produit une chute de température considérable. Il en résulte que si, grâce au relèvement de la température iniliale réalisée par la liquéfaction sous pression, le début de la détente se fait dans de bonnes conditions, la fin de celle-ci s'effectue mal à cause du trop grand abaissement de la température et de l’inexactitude de la loi de Mariotte qui en est la conséquence. On obvie à cet inconvénient en faisant la détente en deux fois. La première détente, qui s'effectue en A (fig. 3), est arrêtée un peu au-dessous de la tempé- rature critique de l'air, soit vers —160°. L'air par- tiellement détendu estalors conduit dans le premier liquéfacteur L, alimenté par une partie de l'air comprimé à 40 atmosphères du circuit d'alimenta- tion. Il en provoque la liquéfaction à —140°, en se réchauffant lui-même à cette lempérature; ainsi réchauffé, il entre dans un second cylindre B ac- "omplir dans de meilleures conditions le reste de sa détente; après quoi, il est envoyé dans un deuxième liquéfacteur L', analogue au premier, pour provoquer une deuxième liquéfaction, puis il retourne à l'échangeur M, où il circule en sens inverse de l'air comprimé entrant. les liquéfacteurs L, L' de la liquéfaction compound. Tel est le principe de la liquéfaction compound, dans laquelle les élapes de la détente pourraient être multipliées, de facon à tendre vers la détente isotherme à la température critique de l'air. Le ren- dement, évalué en air liquide, soutiré à la pression atmosphérique, de densité voisine de 1 et titrant 35 °}, d'oxygène, est de 0,85 litre par cheval et par heure. Ce qui précède montre que, si l'on réussissait à élever de nouveau la température de régime des appareils précédents, on améliorerait encore le ren- dement. 11 suffit pour cela d'utiliser la température critique de l'oxygène (— 118°), qui est plus élevée de 22 que celle de l'air, et d'alimenter avec de l'oxygène comprimé à sa pression critique (50 atm. 8) Dans ces conditions, on atteint un rendement dé 0,95 litre par cheval el par heure”. On peut encore aller plus loin, et remarquer, avec G. Claude, qu'il n’est pas nécessaire que le gaz comprimé qui alimente le ou les liquéfacteurs soit le même que celui qui se détend en produisant du travail extérieur. Des deux gaz principaux de l'air, l'oxygène étant celui dont la température cri- tique est la plus haute et l'azote celui qui, aux très basses températures, reste le plus voisin de l'état parfait à cause de sa température critique moins pt mt élevée, on obtiendra le rendement le plus élevé possible en alimentant le ou les liquéfacteurs avec de l'oxygène comprimé à sa pression critique, le 4 pe Æ Lord Fig. 3. — Liquéfaction compound. — M, échangeur; L, L!, liquéfacteurs ; R, R', robinets de soutirage de l'air liquide; A, B, cylindres de détente. . gaz qui se détend dans le ou les cylindres étant de. l'azote pur‘. | Si l’on remarque que l'oxygène et l'azote se pros duisent simultanément dans les appareils à oxygène 4 G. Cuauve : C. R., t. CXLII, p. 1333; 11 juin 4906. 2 G. Cuaune : C. R., t. CXLIII, p. 583: 22 octobre 1906. 3 Brevet francais n° 370.850 du 4 janvier 1906. £ ] E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ÉT L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE 701 qui constituent actuellement l'application capitale de la liquéfaction de l'air, et que tout le gaz em- prunté à l'appareil à oxygène pour alimenter les liquéfacteurs retourne à l'appareil après liquéfac- tion, on en conclura qu'il y à de ce chef une amé- lioration très nette du rendementsans augmentation appréciable de dépense. La détente avec travail extérieur est celle qui uti- lise le mieux l’énergie du gaz comprimé, donc celle qui, toutes choses égales, donne le plus fort abais- sement de la température du gaz. Or, on peut imaginer deux réalisations différentes de ce moyen efficace de refroidissement. L'idée la plus simple, celle de C. Siemens, de Solvay, est d'effectuer la détente dans le cylindre d'une machine dont elle met le piston en mouvement; mais on se heurte, dans la pratique, à la difficulté du graissage des surfaces froltantes aux températures äuxquelles existe l'air liquide, et il a fallu, pour vaincre cette difficulté, que G. Claude découvrit le pouvoir lubré- fiant de l'éther de pétrole aux très basses tempé- ratures. On peut aussi uliliser le jet du gaz comprimé sortant avee force par un orifice étroit pour faire marcher une turbine effectuant un travail extérieur, auquel cas l'air détendu se liquéfie partiellement; cetle idée, complétée par l'emploi d’un échangeur de températures qui utilise le froid du gaz détendu non liquéfié pour refroidir le gaz comprimé qui arrive, à été proposée pour la première fois par Lord Rayleigh‘et reprise par un ingénieur anglais, Thrupp”. On peut utiliser une forme quelconque de turbine à grande vitesse, mais il est nécessaire de maintenir l'axe, les paliers et toute autre partie frottante à une certaine distance de la chambre de détente, dans le double but d'éviter les frottements au voi- sinage de l'air froid et d'empêcher la solidification de l'huile. Le haut degré de détente nécessaire pour liquéfier l'air semble exiger une forte pression ini- liale. La figure 4 illustre l'idée de l'inventeur. L'air venant du compresseur passe dans l'échangeur D par une série de serpentins d contenus dans des espaces annulaires d° disposés de façon que le gaz comprimé et le gaz détendu cheminent partout en sens contraire, ainsi que le montrent les flèches de la figure. Le tube d'amenée de l'air comprimé se termine par un serpentin central qui conduit le gaz à la turbine E par l'intermédiaire de la sou- pape d'arrêt P. L'air liquéfié par la détente s'é- chappe tangentiellement de la turbine et coule dans le tube U qui se décharge dans le réservoir G; celui-ci, dont le couvercle est fermé, est muni au 1 Lorp RayLeïGn : Mature, t. LVIII, p. 199 (1898). 2E, C. Tarcre : Brevet anglais n° 26.761 du 19 déc. 1898. fond d'un tube de soutirage g et d’un trop-plein V. Le gaz, détendu et froid, comme celui qui s'échappe directement de la turbine E, passe dans l'échan- geur D et de là dans la chambre H; celle-ci con- lient un tube central h, qui s'ouvre à sa partie supé- rieure dans l'atmosphère et à sa partie inférieure dans la chambre H. L'air extérieur est aspiré dans le tube A pour remplacer celui qui a été liquéfié ; il est refroidi par l'air détendu qui circule autour de lui et qui condense son humidité, laquelle est évacuée au dehors par le trop-plein À. Enfin, l'air détendu et l'air récemment aspiré s'en vont par ° à l'aspiration du compresseur. L'appareil de Thrupp ne parait pas avoir été réalisé, bien que sa conceplion soit parfaitement logique. La seule chose qu'on puisse lui objecter, FÆZogpemaps d'et Fig. 4. — Liquéfaction par le procédé Thrupp. — D, échan- geur; d, serpentins échangeurs ; 4°, espaces annulaires ; P, soupape d'arrêt; E, turbine: U, tuyau de décharge du liquide ; G, réservoir de liquide; g, soutirage; V, trop- plein; h, tube d'amenée d'air: L?, évacuation de l'humi- dité de l'air; A*, aspiration au compresseur. c'est que sa détente avec liquéfaction spontanée sous la pression atmosphérique se heurte aux dé- savantages explicités page 699 et qui tiennent à ce que le gaz, trop éloigné de la loi de Mariotte, se détend mal, tout en exigeant un travail supplé- mentaire de compression aussi inulile qu'énorme; d'autre part, le mouvement très rapide de la turbine rend difficile le rassemblement du liquide, dont une partie de la force vive se transforme en chaleur; le rendement de l'appareil de Thrupp, nécessaire- ment, ne pourrait être que médiocre. Dans le même ordre d'idées, il convient de ciler un dispositif dû à Raoul Pictet! et dans lequel l'air, d'abord desséché, est comprimé à la pression cri- tique ; cela fait, il est refroidi jusqu'à sa température 1 RaouL Picrer : Brevet anglais n° 2.713 du 8 février 1901. 702 E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE crilique (de —140° à —145°) par une circulation d'éthylène liquide refroidie elle-même par une cir- culation de « liquide Pictet»‘. Dans ces conditions, l'air se liquélie sensiblement au point critique. On le laisse alors se détendre jusqu'à la pression almosphérique en dirigeant le jet d'air liquide contre les ailettes d'une turbine qui produit un travail extérieur récupérable, ce qui évite l'échauf- fement qui se produirait si les gouttelettes d'air liquide heurtaient les parois fixes d'un réservoir, comme cela arrive dans le dispositif de Thrupp. La ligure 5 représente une coupe du dispositif Pictet. Le récipient annulaire AAAA contient le liquide Pictet, dont les vapeurs, constamment aspi- rées à travers l'orifice L par le compresseur G, sont comprimées par celui-ci dans le condenseur H, où elles demeurent liquéfiées en abandonnant leur Fig. 5. — Liquéfaction par le procédé R. Pictet. — K, com- presseur à air; b, serpentin plongé dans le liquide Pictet; e, conduite d'air comprimé refroïdi; 4, serpentin noyé dans l'éthylène: C, échangeur; », tubulure de sortie de l'air liquide; E, turbine : D, D, réservoir central ; O, collecteur de liquide ; P, canal en spirale. chaleur de vaporisation à un courant d’eau ordi- paire qui circule constamment. Le liquide Pictet régénéré rentre dans le récipient A par le tube d el y remplace celui qui est évaporé en maintenant constant le niveau de ce liquide. Le second récipient annulaire BBBB contient l'éthylène liquide, dont les vapeurs sont aspirées par le compresseur I, puis comprimées dans le ser- pentin à (noyé dans le liquide Pictet), où elles se liquéfient; l'éthylène liquide rentre en B par le tube et y maintient le niveau constant. Le compresseur K comprime à 50-53 atm. l'air sec; cel air entre dans le serpentin b (noyé dans le liquide Pictet de A) et y est refroidi à —60° ou — 80°; il en sort par le tube e pour entrer dans le ? Mélange des anhydrides sulfureux et carbonique liquides, auquel l'auteur attribue des qualités toutes particulières (voir C. R., t. C, p. 328: 1885). serpentin 2h (noyé dans l'éthylène liquide de B), où il se liquéfie. L'air liquide, à la pression de 50-53 atm., entre dans le troisième espace CCCC, qui forme échangeur de tempéralures, par un triple serpentin qui aboutit à une tubulure de sortie », d'où le liquide s'échappe sous forme de jet contre les ailettes d’une turbine à axe vertical EE, placée dans un réservoir central DD: cette turbine actionne à l’extérieur une dynamo. L'air liquide tombe à la partie inférieure et est soutiré par l’orifice O, tandis que la partie de l'air évaporée dans la turbine remonte par le canal spiral P et sert à abaisser la température de l'air liquide qui descend vers la turbine pour s’y détendre. Pour être complet, il convient de citer que la détente avec travail extérieur sur turbine a donné lieu à des essais intéressants de la part de MM. Cail- letet et Leblanc. _ Avec la récente machine à air liquide de Raoul « Pictet, nous revenons à la détente avec travail exté- rieur telle que Charles Siemens l’a conçue et que G. Claude l’a réalisée le premier. L'air atmosphérique, comprimé sous une pres- sion de 60 atm., est privé de son humidité‘ par des appareils compliqués qu'une simple colonne de chlorure de calcium anhydre ou de potasse solide pourrait remplacer”. Cet air est refroidi d'abord vers — 80° par l’évaporation du liquide Pictet, qui subit un cycle fermé de transformations. A — 80° et sous la pression de 60 atm., il se rend dans le cylindre de détente d’une machine à simple effet, par l'intermédiaire d’un échangeur de tempéra- tures qui l'amène progressivement à — 190° et qui est parcouru en sens contraire par l'air froid détendu qui ne s’est pas liquéfié. L'air à — 41920, et sous pleine pression, entre dans le cylindre dont il remplit 7 à 8 °/, et se détend ensuite adiabati- quement en poussant le piston. Lorsque celui-ci est à bout de course, il démasque des orifices percés dans les parois en forme de couronne et par où s'échappe l'air liquéfié, dont le rassemblement est facilité par la disposition un peu oblique du cylindre. Il serait intéressant de savoir comment ce sys- * La dessiccation de l'air destiné à être liquéfié s'impose sous peine de voir rapidement les canalisations obstruées par des bouchons de glace; au contraire, l'acide carbonique semble être peu gènant dans un système de détente. Cepen- dant, la plus grande partie du brevet R. Pietet demandé pour perfectionnements dans les appareils destinés à la produc- tion de l'air liquide (brevet n° 324.715 du 24 septembre 1902) est consacrée aux inconvénients de l'acide carbonique de l'air. * Cet emploi de la potasse caustique, non seulement pour enlever à l'air sa vapeur d'eau, mais encore pour en éliminer l'acide carbonique, a été indiqué dès 1885 par Wroblewski (Wied. Ann., t. XXV, p. 371) et employé plus tard par Hampson (brevet anglais n° 10.165, 4895), qui a jugé bon de le revendiquer. ÆE. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE 703 tème est lubréfié, mais le brevet est muet sur ce point. La machine à air liquide Raoul Pictet, ‘omme la machine antérieure de G. Claude sans iquéfacteur, ne peuvent donner qu'un rendement air liquide inférieur à celui de la machine nde. Ce n’est, en effet, que par l'application de la liquéfaction sous pression (Claude) que la détente avec travail extérieur à fourni des résultats pra- tiques en rapport avec sa supériorité théorique sur la détente sans travail extérieur sensible (Linde). II. — EXTRACTION DE L'OXYGÈNE ET DE L'AZOTE DE L'AIR. La liquéfaction de l'air est un problème de Phy- Sique qui est intéressant par sa difficulté même, bien qu'en réalité il soit beaucoup plus aisé qu'on Si, pour les physiciens, cette question se suffit à elle-même, il n'en est plus ainsi pour les indus- triels. Les ingénieurs ne se sont acharnés après Ja liquéfaction de l'air, dont l'intérêt physique est nul pour eux, que parce qu’elle est intimement “liée à la question, vitale pour l'industrie, de l'extraction de l'oxygène de l'air à bon marché. “Nous allons, dans ce qui suit, tracer à grands traits l'histoire des idées. … L'air liquide, mélange d'oxygène et d'azote liquides, émet une vapeur qui est un mélange d'oxygène et d'azote gazeux; il appartient donc à la catégorie des mélanges doubles’. Au point de vue de la loi des phases, il est composé de deux … constituants indépendants O et Az et de deux « phases, une liquide et une gazeuse; c'est donc un système bivariant, c'est-à-dire que, si l'on se donne arbitrairement deux variables du système, celui-ci est généralement déterminé, sauf quelques cas d'ambiguité qui ne se présentent pas dans la question qui nous occupe spécialement. | Si donc on se donne la température et la pres- | sion, les propriétés de l'air liquide et de la vapeur en équilibre avec lui sont déterminées. Pour une valeur fixe de la pression, la composilion du liquide et celle de la vapeur sont fonctions de la seule température. Considérons en particulier le cas de la pression atmosphérique. Grâce aux expé- riences de Baly*, les propriétés du liquide et de la vapeur sontrésumées par la courbe ci-contre (fig. 6), dont les abscisses représentent la teneur du liquide en oxygène (on suppose le liquide vaporisé, la. te- neur en oxygène est alors le volume de l'oxygène exprimé en centièmes du volume total) et les ordon- nées la teneur en oxygène de la vapeur. " 4 P. Duneu : Thermodynamique et Chimie, p. 239. 2 Bazy : Phil. Mag., 5° série, t. XLIX, p. 517, 1900. AE En particulier, les mélanges liquides correspon- dant aux différents points de l'axe des abscisses ont chacun un point d'ébullition déterminé sous la pression atmosphérique. L'origine des coordonnées représente l'azote liquide pur, dont le point d’ébul- lition normal est — 194°. Les points d’ébullition des mélanges liquides de O et de Az s'élèvent progres- sivement depuis — 194 jusqu'à —180°,5, qui est celui de l'oxygène liquide pur. Il en serait de même sous toutes les pressions, l'air liquide apparte- nant au cas général des mélanges doubles dont les vapeurs n’ont jamais la même composition que les liquides qui les engendrent et qui sont en équilibre avec elles. La courbe de Baly résume quantitativementtoutes les propriétés de l’air liquide sous la pression atmo- sphérique que nous aurons à invoquer dans la 100 ---------- , , an o A [=] Teneur en Oxygène du gaz evapore Æ a o o ——+ ET — St 010 20 30 40 50 60 70 80 30 100 qui s'euspore Teneur en Oxygène du liquide Fig. 6. — Courbe d'évaporation de l'air liquide, d'après Baly. suite de cet article: elle permettra aussi bien de préciser la vaporisation des mélanges d'oxygène el d'azote liquides sous la pression atmosphérique que la condensation de l'air gazeux sous la même pression. Sous les autres pressions, et en particu- lier sous des pressions de quelques atmosphères, la courbe de Baly pourra être utilisée qualitative- ment; vu que sa forme demeure sensiblement la même quand la pression varie. j À une température donnée et sous une pression donnée, que l’on vaporise de l'air liquide ou que l'on comprime de l'air en présence du produit de sa liquéfaction, Le résultat final est nécessairement le même. On a, par suite, quelque peine à com- prendre comment des hommes éminents ont pu croire que, dans le phénomène de la liquéfaction de l'air, ce mélange passait à l’état liquide d'un seul bloc, sans changer de composition, alors qu’on sait, par expérience, que, lorsqu'il s’'évapore sous la pression atmosphérique, c'est surtout l'azote qui s'en va, le liquide restant s'enrichissant en oxygène. 104 E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE Mot as Ci ct CT LISE + La dissymétrie de la liquéfaction de l’air et de l’'évaporation de l’air liquide dans les mêmes con- ditions de température et de pression est absolu- ment contraire à la loi des phases, et si nous ne savions combien la vérité démontrée parait simple à ceux qui la possèdent, nous nous étonnerions qu'il ait fallu les travaux de Lesueur et Claude pour rectifier nos idées sur ce point. Ce qu'il y à de capital dans la courbe de Baly, c'est que, l'oxygène et l'azote purs mis à part, tous les mélanges liquides émettent des vapeurs moins riches qu'eux en oxygène; le phénomène s'exagère pour les liquides pauvres, lesquels émettent des vapeurs renfermant une proportion d'oxygène in- comparablement plus faible que celle du liquide. La conséquence, c'est que, lorsqu'on liquéfie l'air sous la pression atmosphérique par abaissement de tempéralure, c'est surtout l'oxygène qui passe à l'état liquide, au moins dans les premières portions. On pourrait être lenté de faire le raisonnement suivant : Prenons de l'air atmosphérique sec re- froidi par de l’air liquide et comprimons-le légère- ment à deux atmosphères, par exemple; la propor- tion de l'oxygène en volume étant environ de 1/5, la pression qu'il supporte, en vertu de la loi du mélange des gaz, est 2/5 d’atmosphère, tandis que celle de l’azote est 8/5 d'atmosphère; conclusion : l'azote, tout d'abord, va seul se liquéfer; c'est un raisonnement de cet ordre que l’on trouve à la base d'un brevet Raoul Pictet relatif à l'extraction des éléments de l'air atmosphérique’. Appliquer à la liquéfaction d'un mélange gazeux la loi de Dalton qui n'est valable que pour les gaz presque parfaits et au voisinage immédiat de la pression atmosphé- rique, c’est commettre une erreur. Etant donné de l'air liquide, proposons-nous de séparer l’un de l’autre, par voie purement physique, l'oxygène et l'azote. Cette séparation pourra n'être que partielle et aboutir à des mélanges beaucoup plus riches en oxygène que l'air atmosphérique; on a alors l'air suroxygéné. Ou bien, la séparation est totale et l'on aboutit à l'oxygène et à l'azote purs, gazeux Ou liquéfiés, Commençons par le premier problème, de beaucoup le plus simple. $ 1. — Enrichissement de l'air en oxygène. La première idée qui vient à l'esprit consiste à évaporer purement et simplement l'air liquide. On peut prévoir ce qui se passera au moyen de la courbe de Baly. Supposons que l’on opère avec un liquide ayant la composition de l'air atmosphé- rique, c’est-à-dire titrant 21 °/, d'oxygène en volume; d’après la courbe, la vapeur correspon- dante titre seulement 7 °/, d'oxygène. 1 R. Prcrer : Brevet français n° 295.002 du 6 décembre 1899. Les premières parties qui s'évaporent constitue un air trois fois moins riche en oxygène que liquide générateur; par suite, celui-ci s'enrichit @ oxygène. La vapeur émise ensuite contient uni proportion d'oxygène également plus forte, m& beaucoup moindre toutefois que celle du liquid L'enrichissement du liquide en oxygène contin donc constamment. Lorsque le liquide titre 48 2 d'oxygène, la vapeur litre 21 °/,, ce qui est la com: position de l'air atmosphérique; lorsque la teneu du liquide atteint 60 °/,, celle de la vapeur attein 30 °/. À partir du moment où le titre atteint I proportion qu'on désire, on recueille la vapeur qu élait perdue jusque-là en tant qu'oxygène. Cette manière de faire a deux gros inconvénients * elle laisse s'échapper en pure perte une parti énorme des gaz vaporisés et elle ne récupère pa le froid de l'air liquide, ou, ce qui revient au même, l'énergie qu'il faudrait dépenser pour créer ce froid. Le rendement est déplorable et le prix de revient du mètre cube d'air suroxygéné d'autant plus élevé que la teneur en oxygène est plus haute Au lieu de cela, vaporisons l'air liquide à l'aide“ d'une source de chaleur qui ne sera autre que de l'air ordinaire, légèrement comprimé, à 2 ou 3 at mosphères par exemple. Dans ces conditions, l'air va seliquéfier en dégageant sa chaleur de vapori-« sation, laquelle servira à évaporer une certaine quantité de l'air liquéfié. = Avec cetle manière de faire, il y a récupération du froid de l'air liquide. Dans ce qui précède, la récupération ne concerne que la chaleur de vaporisation de l'air liquide: elle } doit être complétée par celle de la chaleur spéci- fique de la vapeur produite. On atteindra celle dernière en faisant passer l'oxygène et l'azote vaporisés et froids dans des appareils à contre- courant parcourus en sens contraire par l'air com- primé qui arrive pour être traité. La récupération ainsi réalisée serait même totale s'il n'y avait pas toujours apport d’un peu de chaleur extérieure ; à cause de cela, la récupération ne sera que partielle et la quantité d'air condensée loujours inférieure à la quantité d'air liquide évaporée. L'appareil le plus simple, et qui se déduit direc- tement des principes que nous venons d'énoncer, pourrait consister dans le dispositif schématique suivant, que nous donnons pour fixer les idées (fig. 7). Un récipient V contient l'air liquide ‘à éva- porer; un faisceau tubulaire XY, muni d'un collec- teur de liquide C, y est immergé. Ce faisceau XY est alimenté d’air comprimé sous une pression de 3 à 4 almosphères. Cet air se liquéfie d'autant plus aisément qu'il arrive refroidi par son passage dans l'échangeur M en sens inverse des gaz vaporisés dont il retient le froid. A mesure que l'air sous ma .… E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE 705 ————— pression se liquéfie en XY et se collecte en CG, l'air liquide extérieur se vaporise en quantité corres- pondante. C'est d'abord du gaz à 7 °/, d'oxygène qui se dégage; mais, petit à petit, la teneur s'élève. Dès qu'elle est jugée suffi- sante, on recueille l'air sur- oxygéné produit jusqu'à la fin de l'évaporation. La ca- ractéristique de ce procédé est que l'air à traiter est totalement liquéfié et four- nit, par suite, un liquide à 21/6. d'oxygènes, qui, lors de sa vaporisalion ultérieure, doit parcourir, au prix d'une grande perte d’oxygène, toute la série des concen- trations avant de parvenir à la teneur désirée. On s'explique de la ma- nière suivante l'extrème éco- nomie à laquelle permettent d'atteindre les procédés d’ex- traction de l'air liquide fon- dés sur la liquéfaction. Un kilogramme d'air à la pression atmosphérique,pas- sant de l'état gazeux à + 20° à l’état liquide à — 190, doit absorber : 1° à l'état de chaleur spécilique 0,234 x 210°— 49 cal. 4; 2° la chaleur de vapori- sation, qui est d'environ 51 calories, ce qui donne un total de 100 calories environ. L'énergie frigori- fique statique de 4 kilogramme d'air est donc me- surée par ces 100 calories. Or, les imperfections de la récupération tiennent à l'imperfection des échangeurs et aux rentrées de chaleur extérieure, ces deux causes étant à peu près équivalentes dans un appareil de moyenne importance. Froppemals de Fig. 7. — Appareil schématique pour l'extraction de l'oxy- gène de l'air. — XY, tube de liquéfaction d'air; C, collecteur de liquide; R, tube de remontée d'air li- quide;V, récipient va- poriseur: M, échan- geur. 4 En réalité, tout le long d'un tube de condensation tel que XY, il faut admettre qu'il se forme des chapelets de liquide et de vapeur qui segmentent ce tube. Les premières gouttes de liquide qui se forment à la partie supérieure d'un tube XY sont constituées par de l’air à 48 °/, d'oxygène environ; dans la portion immédiatement au-dessous, l'air élant plus riche en azote donne un liquide plus pauvre en oxygène et, par suite, plus froid, en sorte que la tempéralure va en baissant de X en Y en mème temps que la teneur du liquide en oxygène. La chute des gouttelettes mêle toutes ces portions et reconstitue un air liquide de composition sensiblement identique à celle de l'air comprimé qui ali- mente le faisceau tubulaire. L'expérience montre que la température de l'air sortant d'un bon échangeur est d'environ 10° plus basse que celle de l'air entrant, d’où résulte une perte de 2 cal. 34 par kilogramme d'air; en dou- blant cette perte pour tenir compte des rentrées de chaleur, on trouve un déficit total d'environ 5 ca- lories ou de 5°/,; par suite, avec 1 kilogramme d'air liquide, on pourra traiter 19 kilogrammes d'air ‘comprimé. Parmi les procédés qui utilisent la vaporisation fractionnée de l'air liquide, nous citerons ceux de Parkinson (1892), Linde (1895), Hampson (1896), Pictet (1899). Dans le procédé de Parkinson (fig. 8), l’air est comprimé à faible pression dans un ventilateur A, puis envoyé par un tuyau dans un échangeur B, où il est refroidi par les gaz vaporisés en E. De l'échan- geur B, l'air comprimé et refroidi est amené dans le tube C, refroidi par l'air liquide de D; il s'y liquéfie et tombe en E, où il peut être vaporisé de différentes facons, par exemple au moyen d'air atmosphérique. L'air vaporisé en D, grâce à la liquéfaction concomitante en C, est aspiré en P, comprimé, puis refoulé en H, où il est refroidi par un bain de bioxyde d'azote liquide et finalement liquéfié, après quoi il retourne en D. ; Dans ce procédé, on trouve le premier exemple d'une vaporisation progressive de l'air liquide avec récupération de la chaleur spécifique des gaz vapo- risés et de la chaleur latente de l'air liquide qui D y Ë L sorte Fig. $. — Schéma de l'appareil de Parkinson. — A, venti- lateur: B, échangeur: C, tube liquéfacteur; D, récipient à air liquide; E, récipient vaporiseur; P, pompe; G, tube liquéfacteur; H, récipient à protoxyde d'azote; K, tube d'amenée d'air liquide. sert d'agent de liquéfaction. L'auteur, cependant, ne spécifie pas à cet effet de dispositif particulier tout à fait rationnel. L'appareil de Linde (fig. 9) se compose d’une machine à air liquide analogue à celle que connais- sent les lecteurs de la Revue (compresseur C, 106 E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE pompe d'alimentation P, refroidisseur à eau K, échangeur G° avec soupape de détente R', collec- teur de liquide V'). On y adjoint deux échangeurs de températures G°,G* et un récipient à air liquide V* contenant un serpentin s. De V' l'air liquide est amené, à travers la soupape R’, dans le récipient V?, où règne la pression atmosphérique; grâce à la différence de pression, une parlie de l'azote de ce liquide se vaporise. D'autre part, on fait arriver dans le ser- pentin s et à travers l'échangeur G de l'air com- primé sortant du refroidisseur K; la chaleur cédée par cet air produit une nouvelle évaporation de l'azote, le liquide restant, qui est riche en oxygène, pouvant être évacué au dehors par le robinet 2. Le gaz riche en azote, vaporisé en V*, parcourt l’échan- geur G et refroidit, avant sa sortie, l'air comprimé qui arrive en s. D'autre part, on peut obtenir un Fig. 9. — Schéma de l'appareil de Linde. — P, pompe d'alimentation; C, compresseur; K, refroidisseur à eau; G!, échangeur de la nee liquide; G?, échangeur à azote; G*, échangeur à oxygène: R, soupape de détente; Vi, récipient collecteur de liquide; V?, récipient vapori- seur; s, serpentin refroidisseur d'air comprimé. gaz riche en oxygène en faisant passer le liquide résiduel du récipient V° dans l'échangeur G; cet air suroxygéné, avant sa sortie de l'appareil, est vapo- risé et réchauffé par une dérivation d'air comprimé à haute pression. Celui-ci, ainsi que l'air ayant passé dans le serpentin s, est ramené au bout froid de l’échaugeur G! et se détend avec l’air comprimé du cireuit de la machine à air liquide. Dans ce procédé, il y à une récupération du froid plus parfaite que dans le procédé Parkinson, sans qu'on puisse dire qu'elle soit entièrement satisfai- sante; les chaleurs spécifiques des corps gazeux sont encore complètement récupérées, mais il semble difficile de distinguer dans quelle propor- tion la chaleur de vaporisation des liquides qui s'évaporent en V° et en ( est utilisée pour la liqué- faction de l'air en s et en G* ou seulement pour son refroidissement. En effet, d'après l’auteur, l'air comprimé qui coule en s et en G* avant de se détendre en R° procédé lorsque celui-ci a vu le jour. Plus tard liquide qui s’évapore doit rationnellement servir liquélier une partie correspondante sensiblemen égale de l'air comprimé et non simplement àd refroidir. Il semble donc que l’auteur ne se pas rendu compte du fonctionnement exact de son Linde semble avoir voulu corriger sa première manière de voir, | car la rédaction de son brevet améri- cain et l'addition d'un certain nom- bre de robinets au dessin qui y est adjoint parais- sent indiquer que le fonctionnement de l'appareil ne va pas sans un bon réglage adéquat des dérivations du courant gazeux qui, venant de K, peut aller en Gr, G° ou G. Dans l'appareil de Hampson (fig. 10), l'air compri- mé à 200 atmos- phères environ, est distribué par les conduits Z, Y, G entre les trois échangeurs de températures DE, KL, MN. L'échan- geur primaire DE s'ouvre au som- metparle tube FG, qui amène l'air comprimé sec et exempt d'anhy dride carbonique. Les tubes de l'échangeur DE se terminent à la partie inférieure de celui-ci par un: orifice F', commandé par un pointeau que règlent: un pignon et la tige cylindrique extérieure J. L'air comprimé, en s’échappant par F', se détend jus qu'à la pression atmosphérique et coule refroidi sur les tuyaux d’amenée de l’air comprimé en re montant au sommet de l’échangeur, d'où il sorb Fig. 10. — Schéma de l'appareil de Hampson.—F, arrivée d'air com: primé: Z, Y, G. branchements d'air comprimé; DE, KL, MN; échangeurs de température: FE! soupape de détente: J, commande de la soupape F: O, soupape de détente partielle: P, commande de O; LQ, RS, TU, récipients va= poriseurs: -WX. séparateur de li= quide et de gaz; g. niveau. ! Linoe : Brevet anglais n° 12.528 du 28 juin 4895. ? Line : Brevet américain n° 728.173 du 9 juillet 489à publié le 12 mai 1903. E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE 707 par le tube DH qui le ramène au compresseur. Le reste du dispositif est l'appareil secondaire, . qui se compose des échangeurs KL, MN, et d'une nn dt tie 0 1 fn ts série de récipients vaporiseurs, qui constituent tout ce qui est au-dessous du plan horizontal UU. KL et MN contiennent des tubes disposés comme ceux de DE et alimentés d'air comprimé par le même tuyau FZY; les tuyaux de KL et MN se réu- nissent au fond des chambres concentriques, et l'air comprimé passe de là à la soupape de réduc- tion O, dont le ressort est réglé par un pignon, com- mandé lui-même par la tige cylindrique creuse P. La soupape de réduction est réglée de facon qu'elle se referme automatiquement lorsque la pression de l'air qui l'alraversée atteint 4 atmosphères environ, pression indiquée par le manomètre central de l'appareil. Le tube qui fait suile à la soupape de réduction O est disposé en spirale à la partie inférieure de l'échangeur primaire DE; de là, il traverse le plan- cher de cet échangeur et passe dans le premier récipient vaporiseur LQ, où il constitue une série de spirales horizontales superposées. Arrivé dans le plan horizontal Q, le tube conti- nue sa route sous forme de spirales horizontales séparées les unes des autres par des cloisons dis- posées en chicanes; une fois dans le plan hori- zontal RS, le tube passe dans l’espace annulaire UT, qu'il parcourt d'abord de bas en haut, puis de haut en bas, en terminant sa course par le tube VW, lequel aboutit à un séparateur à liquide WX, dis- posé de facon à permettre au liquide, mais non à la vapeur, de sortir en X. Quand le compresseur travaille, la détente de 200 à 1 atmosphère de l'air du circuit primaire DE tendrail à abaisser la température du bas del'échan- geur DE à —190°, c'est-à-dire à la température d’ébullition de l'air sous la pression atmosphé- rique. Il n'en peut être ainsi, par suite de la pré- sence de la spirale qui fait immédiatement suite à la soupape de réduction O et qui occupe le fond de DE ; l'air qui remplit cette spirale est, en effet, à une pression voisine de 4 atmosphères, auquel cas la tempéralure de liquéfaction de l’air est rele- vée jusqu'à —180° environ. On voit donc que la détente de l’air dans l'échangeur DE a pour consé- quence un commencement de liquéfaction de l'air comprimé à 4 atmosphères, d'où résulte un déga- gement de chaleur latente et l'impossibilité de des- cendre au-dessous de la température de liquéfac- tion de l’air sous cette pression de 4 atmosphères; en particulier, l'air qui se détend en DE jusqu'à la pression atmosphérique ne pourra jamais se liqué- fier. Lorsqu'il y a liquéfaction de l'air à 4 atmos- phères, la pression diminue et la soupape O fonc- tionne jusqu'àcomplet rétablissement delapression primitive. Quand une quantité suffisante d'air liquide s’est rassemblée dans les spirales à liqué- faction, elle passe dans le séparateur à liquide WX, s'y accumule d’abord, puis s’en échappe par X en se détendant jusqu'à la pression atmosphérique. Grâce à celte réduction de pression, une partie de l'azote est vaporisée et s'échappe en K, après avoir traversé de bas en haut l'échangeur KL. Le liquide restant s'écoule au bas de l'appareil secondaire en parcourant successivement les différents pla- teaux de ses compartiments. Ce liquide, riche en oxygène, peut être soutiré directement de l'extérieur par l'intermédiaire d’un robinet porteur d'un indi- cateur de niveau 4. Quant aux vapeurs émises par le liquide en question, elles peuvent s'échapper au dehors en traversant d’abord le récipient vapori- seur UT, puis l'échangeur annulaire MN. Dans ce procédé, la récupération des chaleurs spécifiques et des chaleurs latentes est complète; en outre, la séparation des deux fractions de l'air est plus méthodique et plus satisfaisante que dans le procédé Linde. Toutefois, l'efficacité de la détente jusqu’à la pression atmosphérique du gaz du cir- cuit primaire parait contestable et, d'autre part, l'air détendu à 4 atmosphères du circuit secondaire se liquéfie dans des liquides de plus en plus chauds, ce qui est illogique et antiméthodique. Dans le procédé R. Pictet!, l'idée de l’auteur est la suivante : Dans de l'air liquide à la pression atmosphérique plonge un serpentin contenant de l'air comprimé à 10 atmosphères; cet air va se liquéfier en dégageant sa chaleur latente et en vapo- risant une partie correspondante du liquide exté- rieur. La chaleur de vaporisation de l'air intérieur se rapportant à une pression plus élevée est moin- dre que celle de l’air liquide extérieur; 17 se liqué- liera donc une quantité d'air intérieur plus grande que la quantité de liquide extérieur vaporisée. Dès lors, conclut l’auteur, si on alimente l'air liquide extérieur avec l'air liquéfié à l'intérieur du ser- pentin, il y aura bénéfice et la masse de l’air liquide extérieure ira en croissant constamment et indéfi- niment. Ce raisonnement est manifestement inexact. Lorsque l'air liquéfié sous pression à l’intérieur du serpentin en question repasse à la pression atmosphérique, il se vaporise parliellement et se refroidit, la quantité de liquide qui demeure étant sensiblement égale à celle du liquide extérieur dont elle a déterminé la vaporisation. Comme il y a, en outre, apport de chaleur extérieure dans les appa- reils les mieux isolés et imperfection dans les échanges, il s'ensuit que, dans le procédé R. Pictet, 1 R, Prorer : Brevet français n° 295.002 du 6 décembre 1899. 708 E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE la provision primitive d'air liquide extérieur, bien qu'alimentée par l'air liquide formé dans le ser- pentin, va constamment en décroissant jusqu'à com- plète disparition. Dans un brevet ultérieur’, R. Pictet fait usage, pour la vaporisation continue et progressive de l'air liquide, d'une rigole enroulée sur elle-même en forme de spirale. Dans l'air liquide qui remplit partiellement cette rigole est immergé un serpen- tin rempli d'air comprimé à 2 ou 3 atmosphères environ. Get air se liquéfie en vaporisant le liquide de la rigole et se décharge ensuite dans celle-ci comme dans le procédé précédent. Quant aux gaz vaporisés, ils sont recueillis au moyen de cloches convenablement disposées. Ce dispositif est d'une grande simplicité ; en outre, l'air y est liquéfié d'une façon méthodique, car le gaz comprimé est mis en contact successive- £Bogqemads érl Fig. 11. — Schéma du procédé Claude par liquéfaction jar- Liclle avec retour en arrière. — T, amenée d'air; F, fais- ceau liquéfacteur; V, récipient vaporiseur; CO, collecteur de liquide: R, tube “le remontée du liquide ; M, échan- geur à azote; N, échangeur à oxy gène. ment avec des liquides de plus en plus froids, et non de plus en plus chauds, comme c’élait le cas dans tous les procédés étudiés jusqu'ici. Nous terminerons l'exposé des procédés de vapo- risation fractionnée de l'air liquide par la liquéfac- tion partielle avec retour en arrière due à G.Claude. Considérons la figure 11. L'air froid sous pression, lors de son ascension dans le faisceau F, se liqué- fie progressivement. C'est d’abord du liquide à 48°/, qui se forme ; mais, à mesure que l'air monte, il s'épuise en oxygène et abandonne des liquides de plus en plus pauvres et de plus ea plus froids. Le liquide, pauvre et froid, obtenu dans les régions supérieures et moyennes de F, retombe en verlu de son poids en sens inverse des gaz ascendants. Il vient donc en contact avec un gaz progressive- ment plus riche en oxygène que celui qui lui a donné naissance. En vertu de la courbe de Baly, ! R. Picrer : Brevet français n° 322600 du 28 juin 1902. l'équilibre n'est possible que si une partie de l'ox gène gazeux se liquéfie en vaporisant une quantité correspondante de l'azote du mélange liquide. même fait se répélant sur toute la longueur du fai ceau, on obtiendra en définilive un liquide conte- nant 48°/, d'oxygène et un gaz résiduel qu s'échappe à la partie supérieure du faisceau F e qui est de l'azote ne retenant que de petites quan tités d'oxygène. Cet azote est envoyé dans l'échan= geur M en sens contraire de l'air comprimé qui arrive. Le liquide formé tombe dans le collecteur G et est amené par R dans le récipient V, où il est vaporisé. Les vapeurs riches en oxygène ainsi pro- duites parcourent l'échangeur N en sens contrair de l'air comprimé qui arrive. La supériorité de cette méthode sur celles qui précèdent est évidente, Tout d’abord, on oblient directement de l'azote pra= tiquement pur. D'autre part, l'obtention d'un liquide contenant tout l'oxygène et titrant 48°/, au lieu de 21 °/, économise la perte d'un tiers de. l'oxygène qui, dans l’évaporation fractionnée du liquide, s'échapperait à des teneurs intermédiaires entre 21 et A8°/,. $ 2. — Séparation de l'oxygène et de l'azote. La séparation de l'air en deux fractions, l'une riche en azote, l'autre en oxygène, ne répond pas d'une façon satisfaisante aux besoins actuels de l'industrie, qui exigent de l'oxygène sensiblement pur. Nous sommes donc conduits à aborder le se- cond problème posé page 704, savoir la séparation économique de l'air en azole et oxygène purs par des méthodes exclusivement physiques. On y arrive en appliquant à l'air liquide, mélange de deux corps n'ayant aucune action chimique l'un sur l’autre, les principes généraux de la rectification. Le premier chercheur qui ait poursuivi la réali- sation de ce but est le savant canadien Lesueur“ La partie de son appareil où s'effectue la rectifica: tion (fig. 12) se compose d'un certain nombre d plateaux concentrateurs 5a, 5h, 5e, formant par leur superposition une sorte de colonne; ces coms partiments sont remplis partiellement de mélang liquides d'oxygène et d'azote. Dans l'axe de la cos lonne est un serpentin liquéfacteur 21, baignank dans les liquides des différents compartiments; @ serpentin est rempli d'air sous pression, qui S liquéfie partiellement en fournissant un liquide riche en oxygène et tombe à la partie inférieure 8. Les gaz issus du concentrateur 5h sous lins fluence de la pression soulèvent la soupape à et traversent le liquide du plateau 52. En s'élevant de bas en haut à travers ce liquide, une partie d l'oxygène du gaz se liquéfie en vaporisant un 1 Lesueur : Brevet français n° 301.300 du 15 juin 1900: E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE 7109 quantité correspondante de l'azote du liquide. De même, le gaz issu du plateau 5e traverse successi- vement les liquides des plateaux 5h et 5a, où il se produit un double effet analogue. Les plateaux 5h et 5a sont donc de véritables plateaux de rectifica- tion. D'autre part, les liquides du compartiment 5a s'écoulent dans le compartiment 5h au moyen du trop-plein 534 et ceux du plateau 52 par le trop- j lein 53h. Les gaz riches en azote se dégagent à la partie supérieure de l'appareil par le conduit 31; Fna Fig. 12. — Schéma de l'appareil Lesueur. — 5a, 5b, pla- teaux rectificateurs; 5e, 6, plateaux vaporiseurs: 8, ire teur de liquide: 21, tube liquéfacteur; 31, départ d'azote; 1, départ d'oxygène: 53a, 53b, lrop-pleins; 5#4a, 54h, sou- papes; 83, soupape à flotteur:; 71, 81, 91, conduits pour la circulation des liquides. les vapeurs riches en oxygène s'échappent du récipient vaporisateur 6 par le conduit 1. D'après l’auteur, la caractéristique de ce procédé est l'enrichissement er oxygène d'un mélange liquide d'oxygène et d'azote, consistant à exposer ce liquide au contact d'un mélange gazeux plus riche en oxygène que ne l’est la vapeur qu'il émet- trait lui-même par ébullition, enrichissement qui est répété plusieurs fois. Nous signalerons encore l'appareil Thrupp (bre- vel anglais n° 18.913, 1900), dans lequel il s'effectue une rectification en ce sens que de l'air gazeux at- mosphérique, refroidi au préalable, estinsufflé dans REVUE GÉNHALE DES SCIENCES, 1907. de l’air liquide, une partie de l'oxygène du courant gazeux se liquéfiant en vaporisant une quantité correspondante d'azote liquide; finalement, le li- quide enrichi ainsi obtenu contient 48 °/, d'oxygène. Les appareils de Lesueur et Thrupp semblent n'avoir pas donnélieu à desapplications pratiques ; il en est tout autrement du procédé que nous allons dé- crire maintenant et qui est du à l'éminent professeur Linde”. L'appareil séparateur (fig. 13)secompose es- sentiellement d'une colonne de rectification r sur- montantun vaporisateur s et d'un récipient évapora- teurisolé {. L'air à séparer, faiblement comprimé par les compresseurs À et i, ramené à la température o olo oTofo]o o]o|o AE Oo oO FEORREMANS el. Fig. 13. —TSchéma de l'appareil de Linde. — h, ji, compres- seurs :1 X, 1, refroidisseurs à eau; f, g, échangeurs: m. n, amenées d'air comprimé à l'appareil séparateur: pr, colonne de rectification; s, {, récipients vaporiseurs: 0, p, tubes de remontée d'air liquide; B, sortie de l'azote: A, sortie de l'oxygène: e, a, b, e, d, machine à air liquide: g, amenée d'air liquide d'appoint. ordinaire par les refroidisseurs à eau Æ et /, et refroidi respectivement dans les échangeurs fet , arrive dans les systèmes tubulaires verticaux bai- gnés par l'oxygène liquide qui remplit les récipients set{:là,il se liquéfie totalement et lombe à la partie inférieure des récipients s et /, d'où il est déversé constamment au sommet de la colonne de rectification par les conduits o et p quise réunissent à leur partie supérieure. Le liquide, finement divisé par les billes de verre qui remplissent la colonne r, se trouve en contact avec le gaz finement divisé provenant de la vaporisation du liquide du récipient s. Il s'opère £ LiDE : Brevet allemand n° 173.620 du 26 février 1902. lg 710 E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE des échanges successifs entre l'oxygène du courant gazeux, qui se liquéfie, et l'azote du liquide, qui se vaporise. Ces échanges répétés conduisent à l'ob- tention finale d’un gaz à 7 °/, d'oxygène (vapeur du liquide à 21 °/, d'oxygène d'après la courbe de Baly), lequel s'échappe au sommet de la colonne r et est recueilli en Baprès'son passage dans l’échan- geur f. Le liquide, très riche en oxygène, qui s'écoule du bas de la colonne r dans le récipient s, y subit une vaporisation partielle; l'excès de ce liquide, au moyen d'un trop-plein, alimente le récipient /, où il se vaporise totalement en liqué- fiant le gaz comprimé venant du compresseur 1 à travers l'échangeur g; l'oxygène gazeux est re- cueilli en À ax,?s son passage dans l'échangeur g. Pour compenser les pertes deliquide du système, on envoie par q un appoint d'air liquide prove- nant d'une machine Linde indépendante, qui ne réclame aucune explication complémentaire. D'après les données de l'inventeur, un appareil capable de produire 50 mètres cubes d'oxygène par heure exigerait une dépense de 100 chevaux, d’où un ren- dement de 1/2 mètre cube d'oxygène à 95 °/; par cheval et par heure. D'après le Professeur Linde‘, il y aurait lieu de rattacher le procédé que nous venons de décrire à celui qu'il a indiqué antérieurement; la méthode de vaporisation fractionnée de 1902 serait la même que celle de 1895, l'appareil séparateur s, { étant l’analogue du récipient V° et du serpentin s. D'après les asser- tions mêmes de l'auteur, la vaporisalion du liquide dans le récipient V°est produite aux dépens de la chaleur spécifique de l'air comprimé, tandis qu'en 1902 elle s'effectue par la chaleur latente dégagée par la liquéfaction de l'air comprimé et froid. Les deux phénomènes ne sont donc pas identiques et ne peuvent être l’objet d'une assimilation com- plète. Non content d'établir un parallèle entre les m6- thodes de 1895 et de 1902, l’auteur a voulu en éta- blir un autre entre les appareils correspondants. D'après lui, le rôle du récipient V° correspondrait à celui du récipient s; or, il n’en saurait être ainsi. En effet, le liquide de V*subit une vaporisation fractionnée qui l’enrichit progressivement en oxy- gène, tandis que le liquide de s, d'après l'inventeur et le dispositif employé, doit être, en régime per- manent, de l'oxygène d'une pureté correspondante à celle de l'oxygène gazeux recueilli, soit 95 °/, par exemple. Une comparaison succincte établie entre les méthodes de rectification de Lesueur et de Linde jettera peut-être quelque lumière sur la véritable signification de l'invention qui vient d'être décrite. | 1 Lip : Brevet anglais n° 14111 du 21 juin 1902. Dans le procéde Lesueur, les gaz divisés traversent à plusieurs reprises une masse continue de liquide; dans le procédé Linde, au contraire, Le liquide rec- tificateur ruisselant de haut en bas de la colonne à billes de verre est finement divisé. Il semblerait donc que c’est ce mode particulier de contact entre le liquide et le gaz que le Professeur Linde ait eu spécialement en vue. Il est bon de remarquer, en outre, que, dans le procédé Linde, les vapeurs ascendantes à rectifier sont fournies dès le début de la rectification des gaz et traversent la colonne en totalité. Notons enfin que, dans le procédé Hampson ll pe il Emi ( [l 1 a: É = FÉerpenns de Fig. 14. — Schéma de l'appareil de la Société l'Air li quide. — À, colonne de rectification; M, récipient vapo- riseur; {!, amenée d'air comprimé; S, serpentin liquéfac- teur: T, tube de remontée de l'air liquide; R, robinet d'écoulement de l'air liquide; p, p, plateaux rectifica- teurs; C, cloison: {#, départ d'oxygène gazeux; {?, amenée d'oxygène gazeux dans la colonne: {#, tube pour l’insuf- flation d'air atmosphérique. de 1896, il s'effectue une véritable rectification. L'appareil que nous allons maintenant décrire, et qui est dû à R. J. Lévy!, utilise encore la recti- fication, mais est plus simple que ie précédent. De l'oxygène liquide pur se vaporise dans le ré- cipient M (fig. 14), en provoquant la liquéfaction totale de l’air froid et comprimé amené par le con-" duit 4‘ dans le serpentin S. Une partie de l'oxygène vaporisé est soutiré par d’: c'est le produit de la fabrication. Le reste de l'oxygène vaporisé est amené par {” à la base d'une colonne de rectification ! Brevet n° 338.842 du 3 juin 1903, demandé par la Société l'Air liquide et R.-J. Lévy. | | S { pelle À 5 “di nb Sn. k 4 \ E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE 741 A,qu'il parcourt de bas en haut, en sens inverse et _ au contact du liquide à 21 °/, formé dansS, lequel est déversé en haut de la colonne par le conduit T et le robinetR, ets'écoule continuellement de plateau p en plateau p. Par suite dela rectification quis’effectue ainsi, le liquide descendant, lorsqu'il arrive sur la | cloison C,est devenu de l'oxygène liquide et est | déversé par un trop-plein dans le compartiment M. D'autre part, les gaz qui s’échappent à la partie supérieure de l'appareil ne contiennent plus que 1.0; d'oxygène. Au cours de son ascension dans la colonne A, le gaz de rectification a exactement la composition de l'air atmosphérique là E où le liquide contient | | pression, dans la partie médiane de la colonne de Az pur 48 °/, d'oxygène. Si, à cet endroit de la co- lonne, on insuffle de l'air atmosphérique compri- mé seulement à quel- ques dixièmes d’atmo- sphère par un ventila- utilisé au même titre que celui du gaz de rec- tification; il en résulte un gaiu en oxygène qui augmente d'une facon très sensible la valeur économique du procédé. A la simplicité de ce disposilif correspond une simplicité de fonc- tionnement remarqua- ble, puisqu'il n’y a plus qu'un seul vaporiseur. La composition du li- quide contenu dans ce- Dé—/jirà 5 K°S Fig. 15. — Schéma du dis- positif de Claude. — A, 4er collecteur de liquide; C, 2e collecteur de liquide: F, 1e faisceau liquéfac- Le teur; F', 2e faisceau liqué- lui-ci est telle que les facteur; V, récipient va- vapeurs qui s'en déga- gent ont la teneur de l'oxygène désiré. La courbe de Baly montre, par exemple, que le li- quide titrera 98 °/, si le gaz désiré doit être à 95 °/, d'oxygène. Il convient de remarquer l'intérêt et l'originalité de l'insufflation d'air au cours de la rectification ; à ce point de vue, il n'est que juste de rappeler que cette idée a été indiquée en Alle- magne, d'une facon indépendante des ingénieurs francais, par Lachmann ‘. Dans les procédés qui précèdent, on ne recueille que les deux tiers de l'oxygène, et l'azote est souillé poriseur: T, départ d'oxy- gène; T', départ d'azote; R, remontée du liquide ri- che en oxygène: R', re- montée de l'azote. 1 Lacamanx : Brevet allemand n°167.931 du 6 septembre 1902, publié le 9 mars 1906. Ar teur, son oxygène sera | de 7 °/, d'oxygène. Dans la méthode que nous allons décrire et qui est due à Georges Claude, ces inconvénients sont évilés très simplement par la combinaison de la rectification avec le dispositif décrit plus haut sous le nom de liquéfaction par- tielle avec retour en arrière. L'air à traiter arrive par la partie inférieure A (fig. 15) du faisceau F immergé dans de l'oxygène liquide pur. En s’élevant dans ce faisceau, il se liqué- fie partiellement en donnant, comme nous l'avons vu page 708, un liquide contenant presque tout l'oxygène de l'air, titrant 48°/,, et un résidu gazeux qui est de l'azote pratiquement pur. Gelui-ei par- court le faisceau F’ de haut en bas ets'yliquéfie. Le liquide riche, collecté en CG, est envoyé, grâce à sa rectification qui surmonte le récipient V et com- munique avec lui; il épuise les gaz ascendants jusque vers 21 °/,. Quant à l'azote liquide collecté en C’, il.est envoyé au sommet de la colonne. Il soumet les gaz à 21 °/, de la première rectification à une reclification complémentaire qui les épuise entièrement en oxygène. L'azote, à l’état pratique- ment pur, sort de l'appareil par T'; l'oxygène, à un état de pureté analogue, sort par T, à la partie supérieure du récipient V. La simplicité du dispo- sitif précédent n'a d'égale que son efficacité. Dans la dernière partie de cet article, nous exa- minerons quelques procédés fournissant l’oxygène et l'azote purs grâce à la reliquéfaction des gaz riches en azote et à l’utilisation du pouvoir rectifi- cateur élevé des liquides très froids ainsi obtenus ; ce processus est dû à Lévy et Helbronner*. Dans le procédé de ces auteurs, l'appareil, en forme de colonne, se compose de deux parties superposées et distinctes ; la partie inférieure, dans laquelle règne une pression de 5 atmosphères en- viron, est une colonne de rectification du type décrit antérieurement; la partie supérieure, où règne la pression atmosphérique, renferme un vaporiseur de liquide B°, un collecteur Det un cer- tain nombre de plateaux de rectification à calottes 1,2% 01,4 59 Ge.16). La colonne inférieure fournit un gaz à 7°/, d'oxy- gène, qui sort de l'appareil sous pression par le tube Vet est amené par T' dans l'échangeur H', où il se refroidit. Le tube T° le mène ensuite se liqué- fier dans un serpentin immergé dans le liquide du récipient B'. Le liquide formé est amené par T° sur le plateau 5° de la colonne supérieure, qu'il parcourt de haut en bas en rectifiant les vapeurs issues de B'. Le gaz résiduel, qui a barbotté dans le liquide à 7°/, du plateau 5’, ne contient plus, en vertu de la 1 G. CLAuUDE : Brevet français n° 352.856 du 30 mars 1905. ? Lévy et HELBRONNER : Brevet francais n° 328.984 du 31 jan- vier 1903. 712 E. MATHIAS -— LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE courbe de Baly, que 2 °/, d'oxygène; après avoir refroidi dans l'échangeur H! le gaz à reliquéfier, et dans l'échangeur H° l'air liquide qu'il contient, l'azote sort de l'appareil par V'. D'après les auteurs, on peut même obtenir de ‘azote encore plus pur en reliquéfiant à nouveau gaz à 2°/, d'oxygène et en utilisant comme rec- ificateur le liquide obtenu. Le liquide du comparti- ment B', où se lrouve récupérée la majeure partie de l'oxygène du gaz à 7 °/,, est amené périodique- ment dans le collecteur D et, de là, renvoyé dans le 1@ G 00000000000À f RCLIOTOIPIOIOROONE TO hi ut Fig. 16. — Schéma de l'appareil de Lévy et Helbronner. — P, Q. arrivées d'air comprimé; A, B, récipients vapori- seurs; C, remontée de l'air liquéfié; H,, échangeur; L, dé- versement de l'air liquide; 1, 2.8, plateaux de rectifica- tion; O, sortie de l'oxygène; V, sortie du gaz riche en azote: T‘,amenée de ce gaz dans l'échangeur H,;T,, amenée de ce gaz dans le récipient vaporiseur B‘; T,, remontée du liquide riche en azote: L,, déversement de ce liquide; 41, 91, 51, plateaux rectificateurs; K‘, déversement de l'air liquide; B!, récipient vaporiseur; A’, récipient col- lecteur du liquide; X, soupape: y, robinet à flotteur; 7, robinet à 3 voies; N, déversement du liquide de A! en 5; H*, échangeur; V!, sortie de l'azote. conduit M surle plateau 5, dont le liquide a même composition que lui. Ce liquide, soustrait à la partie supérieure de la colonne, est remplacé par une quantité équivalente d'air liquide, amenée par CK dans l'échangeur H?, d'où il est déversé par K, sur le plateau 2', dont le liquide a même compo- sition que lui. L'appareil indiqué ne va pas sans quelques im- perfections; l'efficacité des échangeurs H° et H° paraît contestable ; en outre, le système X, y, z, qui permet de renvoyer le liquide de A' dans la partie inférieure de l'appareil, ne semble pas très pratique. Dans un autre procédé décrit par Lévy”, la sépa- ration s'effectue entièrement sous pression. L'air atmosphérique, comprimé et refroidi, est liquéfié dans les compartiments À, 1, 2 en vaporisant les Fig. 17. — Autre appareil de Lévy pour la production de l'oxygène et de l'azote purs. — D. E, récipients vapori- seurs:; 1, 2,10, plateaux rectificateurs; a, calottes; C, trop-pleins; K, turbine de détente: L, collecteur du li- quide; P, pompe: d, e, serpentins liquéfacteurs: H, re- montée de l'air liquide: M. sortie de l'oxygène; N, sortie de l'azote. liquides de ces comparliments; puis il est déversé sur le plateau 8 ; il parcourt ensuite la colonne de haut en bas en rectifiant progressivement les gaz vaporisés en À, 1,2. Les gaz de rectification, après avoir traversé le liquide à 21 °/, du plateau 8, ren- ferment encore 7 °/, d'oxygène; ils traversent alors | les plateaux 9 et 40, où ils se trouvent en contact | avec l'azote liquide provenant dela détente jusqu'à 1 Lévy : Brevet français n° 330.25$ du 14 mars 1903. E. MATHIAS — LA LIQUÉFACTION DE L'AIR ET L'EXTRACTION DE SON OXYGÈNE 713 la pression atmosphérique, dans le moteur K, de l'azote résiduel. La partie restée gazeuse après la détente est amenée par le conduit d dans l'échan- geur E, où elle refroidit l'azote à détendre; elle sort finalement de l'appareil par N. Le liquide de détente, collecté en L, est amené par la pompe P sur le plateau supérieur 10 de la colonne, d'où il se déverse en 9; la rectification dans ces deux pla- teaux élimine pratiquement les 7 °/, d'oxygène des gaz issus du plateau 8 (fig. 17). Remarquons que la détente fournit un supplé- ment de liquide qui compense les pertes de froid — : S z —— 60000 © / m2 x ÎLE Di——— | of —+ pl a of ET FESSTE MANS A8. Fig. 18. — Schéma du premier dispositif Linde pour la préparation de l'azote pur. — a, Compresseur: b, refroi- disseur à eau: ce, échangeur: d, serpentin liquéfacteur ; #, tube de remontée de l'air liquide: g, colonne de rectifica- tion: /, prolongement de la colonne de rectification: 7, serpentin condenseur d'azote; #, tube d'amenée du liquide du récipient e en 1; k, pompe d'aspiration; O, sortie du gaz riche en oxygène: N, sortie de l'azote. du système; cela supprime les installations de compensation qui sont nécessaires dans les autres procédés. Il nous reste à parler du procédé Linde relatif à la préparation de l'azote pur‘, procédé qui semble se rattacher directement aux précédents. Comme dans le dernier décrit, on fait passer le gaz riche en azote, provenant d'une colonne de rectification de l’air liquide, de la base au sommet d'un prolon- gement de cette colonne où ruisselle de haut en bas 1 Line : Brevet francais n° 332.811 du 5 juin 1903. de l'azote liquide ; ce dernier est produit, comme dans le brevet précédent, par la reliquéfaction par- tielle de l'azote résultant de la séparation. Linde décrit successivement deux modes opératoires. Dans le premier (fig. 18), l'air atmosphérique, comprimé en à, refroidi dans un récipient à eau b, puis dans l'échangeur ec, se liquéfie dans le ser- pentin d'en vaporisantune quantité correspondante d'un mélange liquide riche en oxygène. Le liquide ainsi formé est amené par À au sommet de la | ll e)1®@Le, LL) o|00o F | aloo [00 = +, 2 9 + o]O0o = 4 | = HE 0/00 = ex =: = 212 ojO0o = t 2 o|oo = 25 o|Oo =] Æ, ol0o [_# TN l@! 000000000000 ——+ | ] FBogge mans" del. Fig. 19. — Schéma du second dispositif Linde pour la pré- paration de l'azote pur. — a, compresseur d'air; b, refroi- disseur à eau: m, n, e, échangeurs; d, o, serpentins de liquéfaction de l'air; », p, récipients vaporiseurs: f, tube de remontée de l'air liquide: g, colonne de rectification; s, compresseur d'azote; {, refroidisseur à eau; q, Serpen- tin de liquéfaction de l'azote; u, tube de remontée de l'azote liquide: /, colonne de rectification; 0, départ de l'oxygène; N, départ de l'azote: V, amenée de l'air liquide d'appoint. colonne g, qu'il parcourt ensuite de haut en bas en rectifiant les vapeurs issues de e; celles-ci, après cette rectification, contiennent 7 °/, d'oxygène ec sont rectifiées par de l'azote liquide qui parcourt de haut en bas la colonne /et qui provient de la liqué- faction d’une partie de l'azote gazeux résultant de la séparation. Laliquéfaction de cet azote s'effectue au contact du serpentin métallique i, maintenu à basse température par la vaporisation, sous pression MAURICE GANDILLOT — LE DÉBAT SUR LA GAMME réduite, d’une partie du liquide du récipient d, avec lequel il est en communication par 2 et sur lequel on fait le vide au moyen de la pompe #. Le liquide qui se vaporise en 7 doit contenir au plus 60 °/, d'oxygène alin que sa vaporisation soit capable de donner une température assez basse pour liquéfier l'azote. L’oxygène produit titre donc 60 °/, au plus. Dans le deuxième mode opératoire (fig. 19), l'air est comprimé en a, refroidi dans le réfrigérant à eau h, puis dans les échangeurs; il se liquéfie dans les serpentins d et o des récipients e et p, en vaporisant l'oxygène liquide de ces récipients. L’air liquéfié est ensuite amené par d et f au som- met de la colonne, où il rectifie les vapeurs issues de e; le gaz de rectification issu de g contient 7°}, d'oxygène. Une partie de l'azote produit par l’appa- reil lorsqu'il est en régime est surchauffée jusqu'à la température ordinaire, recomprimée, puis refroidie et reliquéfiée dans le serpentin g; elle arrive alors par n à la partie supérieure de la colonne, où elle rectifie les gaz déjà traités par l'air liquide à 21 °/,. On ne peut s'empêcher de remarquer que l'azote qui achève la rectification est ramené de —195°à la température ambiante, recomprimé, et refroidi à nouveau avant d'être reliquéfié. Si donc ce mode opératoire permet la production simultanée d'oxy- gène et d'azote purs, il ne la réalise que d'une façon complexe et peu économique. On voit par ce qui précède que la question de la séparation de l'air en ses composants oxygène et azote, par voie purement physique, a été, dans ces dernières années, travaillée par les ingénieurs français et étrangers, avec une ardeur qui tient de l’acharnement. Il y avait donc un véritable intérêt à ce qu'elle fût portée à la connaissance des lec- teurs de la Revue générale des Sciences. E. Mathias, Protesseur de Physique à la Faculté des Sciences de Toulouse. LE DÉBAT SUR LA GAMME LES CONCEPTIONS DE PYTHAGORE ET DE DESCARTES: I. — AVANT-PROPOS. On sait que la hauteur d’un son dépend unique- ment de la rapidité avec laquelle vibre le corps qui le produit; ainsi tous les diapasons francais don- nant le /a normal (/a.) font uniformément 435 vibra- tions par seconde; et, quand on produit cette même note avec un instrument quelconque, le corps sonore (corde de piano, violon, harpe, ete., colonne d'air contenue dans une flûte, clarinette, ete.), oscille toujours à cette fréquence de 435 vibrations par seconde. La hauteur du son croit avec la rapidité des vibrations; ainsi, la, faisant 435 vibrations, son octave /a, en fait 870, sa quinte m1, en fait 652%} ;tetc… On remarquera que les fréquences de /a, et de a, (870 et 435) sont entre elles comme 2 est à 1; il en est de même pour tout couple de sons formant octave; l'octave est donc caractérisée par le rapport 2/1.Semblablement, les autres intervalles musicaux, quinte, quarte, etc., sont caractérisés respective- ment par d'autres rapports numériques, tels que 3/2, 4/3, etc. ! Cette question a déjà été abordée dans un ouvrage paru récemment sous le titre d'£ssai sur la gamme (Gauthier- Villars, 1906). Pour abréger le présent article, je me permet- trai parfois d'énoncer certains faits sans démonstration à l'appui, mais en indiquant, lorsqu'il y aura lieu, que les Jusqu'ici tous les physiciens sont absolument unanimes; mais ce bel accord cesse quand il s’agit de décider quelle est la valeur numérique de cer- tains intervalles. Quelques théoriciens pensent encore, à l’imitation de Pythagore, que les degrés de la gamme sont engendrés par une succession de quintes ascendantes ou desèendantes, combinées avec un nombre convenable d'octaves de sens con- traire. Mais la plupart des auteurs admettent actuel- . Y Î | \ lement une autre opinion, d'après laquelle les notes | de notre musique correspondent à des rapports très simples entre les nombres de vibrations de la tonique et des autres degrés, en sorte que, dans le ton de do, par exemple, pendant le temps que met la tonique do à faire une de ses vibrations, les autres notes effectueraient les nombres de vibra- Lions suivants : do (octave)— 2/1; sol = 3/2; fa — 4/3; mi—5/4;1etc. Pour faciliter le langage, je désignerai respective- ment les partisans de ces deux types de gamme parles épithètesde P ythagoricienset deCartésiens*, raisonnements rigoureux et complets peuvent être établis et ont été donnés. 1 L'auteur s'excuse d'employer ici un vocable inusité; il eût été plus conforme à la coutume de dire gamme de Pto- lémée et gamme des physiciens, et non gamme carté sienne; mais ces expressions usuelles n'eussént qu'une partie de l'idée à exprimer ici; dans le présent rendu * MAURICE GANDILLOT — LE DÉBAT SUR LA GAMME 71 Os tirées des noms de Pythagore, qui passe pour avoir - inventé la gamme par quintes, et de Descartes, qui fut sans doute, chez les modernes, le plus illustre des partisans de la gamme par rapports simples. . Je me propose, dans ce qui suit, de démontrer que la base de notre musique est cartésienne et non pythagoricienne ; à cet effet, je ferai remarquer, l'inexactitude des principales preuves théoriques ou pratiques sur lesquelles les partisans des quintes » fondent leur opinion; j'indiquerai ensuite quelques expériences à faire, en signalant les nombreuses causes d'erreur qui peuvent conduire à mal inter- préter les résultats enregistrés; enfin, j'examinerai le principe même des gammes de Pythagore et de . Descartes". II. — ERREUR DE RAISONNEMENT DE QUELQUES PYTHAGORICIENS. Parmi ces auteurs, on peut citer Elie Ritter, dont une étude sur la question a paru dans les Mémoires de l'Institut genevois, en 1861. Voici le raisonne- ment par lequel Elie Ritter croit démontrer que notre gamme est pythagoricienne : 4 D Qi _— ——— dœ mu, Q mi, Ô DDR Fig. 1. Montons, dit-il,de do, à mi par quatre quintes (figu- rées ci-dessus par quatre flèches Q); de là, redes- cendons à mi, par deux octaves (représentées par deux flèches O); l'intervalle résultant do, mi, est une tierce majeure; on lit donc sur la figure même la relation très générale : : quintes — 2 octaves — 1 tierce majeure. Cette relation est vérifiée quand on donne à la tierce majeure sa formule pythagoricienne 81/64; elle n’est plus satisfaite avec la valeur cartésienne 5/4, et Elie Ritter en conclut que notre gamme est article, en effet, on désigne par Cartésien celui qui, ne se bornant pas à constater l'identité pratique de ses notes à celles de la gamme des physiciens ou au diatonique synton de Ptolémée, interprète en outre leurs formules (ainsi que le faisait Descartes) comme étant les rapports les plus sim- ples qui se puissent obtenir par des combinaisons des fac- teurs premiers les plus simples : 2, 3 et 5 (Essai sur la gamme. 4 Pour justifier lerenvoi précédent, je ferai remarquer que la gamme cartésienne (telle qu'elle vient d'être définie) admet un principe, celuides rapports simples, tandis que la gamme des physiciens et celle de Ptolémée n’en admettent aucun: la pre- mière, parce qu'elle n’est que l'exposé des résultats obtenus expérimentalement, la seconde, parce que Ptolémée, loin de croire à l’existence d'une gamme unique et nécessaire, en in- diquait au contraire plusieurs, parmi lesquelles le diatonique Synton, que l’on désigne souvent sous le nom de gamme de Ptolémée. 0 pythagoricienne. La pétition de principe qu'il com- met ainsi est évidente : en engendrant mi, par % quintes ascendantes et mi, par 2 octaves descen- dantes, E. Ritter admet précisément d'avance le mode de génération qu'il faudrait démontrer. III. — CERCLE VICIEUX EXPÉRIMENTA, DES MÊMES AUTEURS. Elie Ritter (et plusieurs autres comme lui) corro- bore la conclusion précédente au moyen d’expé- riences exécutées avec le concours d'artistes jouant du violon ou du violoncelle. Mais ces instruments s'accordent précisément par quintes, et, eu égard à ce mode d'accord ainsi qu'à l'automalisme acquis par l'artiste avant de se produire en public, on pourrait presque dire que le violon et le violoncelle sont des instruments à sons fixes réglés sur la for- mule de Pythagore. L'expérience d'Elie Ritter réalise donc un cercle vicieux semblable à celui de son raisonnement. Si cette facon d'opérer était admis- sible, si l'on pouvait omettre de distinguer entre la valeur vraie des intervalles musicaux et la valeur approximative sous laquelle nous sommes réduits à les réaliser pratiquement, on arriverait aux con- clusions les plus contradictoires; ainsi, sur un vio- lon, la gamme serait pythagoricienne; avec le cor, elle serait conforme à la série harmonique; sur le piano, ellesemontreraittempérée ; à la voix humaine, elle apparaîtrait cartésienne, elc.; par exemple, l'intervalle entre la tonique et sa septième mineure vaudrait 16/9, ou 7/4,ou2°/5, ou 9/5, selon l'instru- ment pris pour arbitre IV. — ERREUR D'INTERPRÉTATION DE CERTAINS PYTHAGORICIENS. D'après la formule pythagoricienne, l'intervalle de do à do* serait plus grand que celui de do* à ré; au contraire, dans la gamme cartésienne, l'accident (demi-ton chromatique) est plus petit que la seconde mineure (demi-ton diatonique); cette particularité permet done de reconnaître si notre gamme est cartésienne ou pythagoricienne, mais à condition d'interpréter judicieusement le résultat expéri- mental, ce que n'ont pas faitcertains Pythagoriciens, au nombre desquels on peut eiter GC. Durutte. Comparant les deux types de demi-tons, ce auteur (Résumé élémentaire de la Technie harmo- nique, p. 26) fait observer que, quand on chante conti- nous 1 Nous commettons des fautes de raisonnement nuelles en prenant au pied de la lettre les mots que avons inventés, en nous fiant aux sons des instruments que nous avons construits, etce., bref, en imitant le statuaire de La Fontaine, tremblant devant le bloc de marbre dont il vient de faire un Jupiter 716 MAURICE GANDILLOT — LE DÉBAT SUR LA GAMME les Lrois notes do, do* et ré, le premier intervalle est plus grand que le second, ce qui tranche le débat {(croit1l) en faveur de la formule de Pytha- sore. La force de l'idée préconcue empêche Durutte de remarquer que cette expérience doit précisément conduire un Cartésien à la conclusion diamétrale- mentopposée. Car, tandis que Durutte donne (on ne sait pourquoi) aux trois sons émis les dénominations de do, do:, ré, le Cartésien, conséquent avec son principe, interprète ces sons comme étant do, réb, ré. En effet, pour do=1, le principe des rapports simples fournit do= 25/24 et ré —16/15 (Essai sur la jamme); de ces deux rapports, le second élant le plus simple, c'est comme ré, etnon comme do*, que le Cartésien interprète le son émis vers le milieu de l'intervalle do-ré : dès lors, l'accord est complet entre le résultat observé et celui que faisait prévoir la théorie cartésienne. L'expérience dont on vient de parler paraitra peu probante au lecteur qui n’oserait décider si le son émis entre do et réestun do# ou un rép; maisilluiest facile d'obtenir sans hésitation la valeur de l’acci- dent en mesurant, ainsi qu'il est dit plus loin (chap. VI, paragr. D), la grandeur de l'intervalle existantentre les troisièmes degrés des deux modes (par exemple entre do et do* dans le ton de /a, ou entre 21 et mi dans le ton de do). V. — EXPÉRIENCES DE MM. MERCADIER ET CORNU. L'un de ces savants était Pythagoricien, l’autre Cartésien. Pour se départager, ils procédèrent en- semble à ces expériences, depuis si célèbres. Celles-ci amenèrent le Pythagoricien à devenir à moitié Cartésien (pour l'harmonie); il le serait sans doute devenu tout à fait (pour la mélodie aussi) sil avait achevé de réaliser le programme projeté, et étudié les intervalles mélodiques dans la modulation; ces intervalles, en effet, apparais- sent nettement cartésiens, ainsi qu'on le verra plus loin (chap. VIP. Il est impossible de faire la critique des expé- riences Mercadier-Cornu, d’après ce qu'en rap- portent les Comptes Rendus de l'Académie des Sciences; ces Comptes Rendus, en effet, ayant dû étre rédigés très brièvement, réunissent en bloc des résultats qui ne sont pas toujours comparables ; “insi, pour l'intervalle de seconde, qui, d'après Pythagore, serait constamment égal à 9/8, et qui, en garnme cartésienne, vaut tantôt 9/8, tantôt 10/9, les Comptes Rendus donnent dans une même colonne tous les résultats obtenus, et il n’est pas possible de discerner si les valeurs telles que 1,125 ‘exactement 9/8) ou 10/9 1,115 (approximativement sont justes ou erronées, puisqu'on ignore la place que les secondes correspondantes oceu- paient dans la gamme du moment. Au surplus, il n'y aurait sans doute pas grande opportunité à étudier de très près une relation plus détaillée de ces expériences ; beaucoup d’entre elles, en effet, ont été exécutées sur des instruments à cordes, et donnent lieu, par suite, à l’objection de principe formulée plus haut (chap. II), à propos des mesures prises par Élie Ritter; en outre, il serait probablement impossible de savoir aujour- d'hui dans quelle mesure il y a été tenu compte des nombreuses causes d'erreur signalées plus loin (chap. VIIL), et dont la mise en oubli peut changer du tout au tout les conclusions tirées des résultats expérimentaux. On peut toutefois faire remarquer que certains faits, mentionnés dans les Comptes Rendus comme très probants en faveur du système de Pythagore, auraient dû, sans doute, recevoir une interpréta- tation différente; à titre d'exemple, je signalerai ici ce qui se rapporte à la tierce majeure. MM. Mercadier et Cornu disent que la valeur de la tierce majeure est 81/64 (pythagoricienne) et non 5/4 (cartésienne), car si, sur une même corde de violon dont la longueur totale est L, on fait entendre les sons correspondant aux longueurs L, 4/5 L, 2/3 L, on trouve que les deux sons extrêmes, tonique et quinte, sont seuls justes, tandis que la tierce est trop basse. Ce résultat peut tenir à la différence de fixité entre les points d'arrêt offerts à la partie vibrante par le sillet du violon, d’une part, et par le doigt de l'artiste, d'autre part. Si l’on recommence l'ex- périence en partant d'une tonique un peu plus haute, c'est-à-dire d’une longueur L' inférieure à L, le sillet n'intervient plus, et on trouve que les sons 4/5 L’ et 2/3 L' ont même degré de justesse, celle-ci pouvant d'ailleurs ne pas être complète- ment satisfaisante, car il est bien connu que les violons n'ont pas toujours des « cordes justes ». VI. — EXPÉRIENCES A FAIRE DANS LA GAMME. Malgré l'objection de principe opposée précé- demment (chap. III) aux expériences exécutées avec des instruments à cordes, on peut néanmoins, en employant ceux-ci dans des conditions conve- nablement choisies, les utiliser pour certaines dé- monstralions, telles que les suivantes : TS SR Eee ÿ «€ LA Fig. 2. a) Variabilité de la valeur de la quinte. — La figure ci-dessus représente l'une des cordes d’un SAINT UE et eme er be on mm a tte PE # — ŒT | MAURICE GANDILLOT — LE DÉBAT SUR LA GAMME 717 violon ‘, ainsi que le sillet, la touche et le chevalet de l'instrument, Sur cette corde, choisissons un point quelconque, que nous repérerons sur la touche, et, pour faciliter l'exposition, appelons-le do. Marquons ensuite, à l'oreille, les points ré et Ja, soit directement, comme seconde et sixte de do, soit indirectement, en songeant aux successions auxiliaires do-sol-ré et do-fa-la; marquons enfin un second point ZA, obtenu comme quinte de ré, et que nous distinguerons du premier /a en l'éeri- vant par des majuscules. Ceci fait, il est aisé de reconnaitre que, si nous suivons la gamme de Pythagore, où toutes les quintes valent uniformé- ment 3/2, nous trouverons que /a et ZA coïncident; mais, si nous sommes Cartésiens, nous constaterons que nous avons marqué ZA à un comma plus haut que /a. Nota. — Le premier Za étant obtenu, il est pru- dent de mesurer sa distance au chevalet et de l'effacer, de façon à ne plus en voir trace au mo- ment où l'on marque l’autre ZA : on arrive ainsi à exécuter l'expérience sans se laisser influencer par son opinion préconcue. b) Valeurs de l'accident et du demi-ton. — Sur une corde de violon, choisissons arbitrairement un premier point que nous appellerons do, et mar- quons à l'oreille les points mi, mi et fa; mesurant ER EEE RU EAN AUS VA VANNES EEE À de mibmifa Fig. 3. les distances de ces points au chevalet, nous ob- tiendrons par division les valeurs de l'accident (intervalle mib-mi) et de la seconde mineure (inter- valle mi-fa). Selon que nous aurons marqué des notes cartésiennes ou pythagoriciennes, nous trou- verons l'accident plus petit ou plus grand que la seconde; et quant à la valeur propre de l'accident (rapport des distances de mi et de mi au chevalet), elle sera beaucoup plus petite en système cartésien (25/24) qu'en système pythagoricien (2.187,2.048) : la différence est de deux commas. Nota. — Dans la gamme cartésienne de do, les bémols de mi, de la et de si valent seuls 25/24; le bémol de ré et le dièse de /a valent un comma de plus ; en général, il n'y à pas lieu, dans cette gamme, de considérer d'autres notes accidentées que les cinq précitées (Æssai sur la gamme). VII. — EXPÉRIENCES A FAIRE DANS LA MODULATION. Ces expériences sont plus probantes que les pré- cédentes, car elles permettent de mesurer, pour 1 Il va de oi que sur un violoncelle, dont les cordes sont plus longues, l'expérience serait encore plus facile. ainsi dire par répétition, les commas de la valeur desquels dépend la solution cherchée. Convenable- ment accumulés, ces commas arrivent à composer un intervalle résultant notable, très supérieur aux erreurs à craindre. Aussi l'expérience peut-elle se faire sans instruments spéciaux, et même avec un simple diapason. fEnla# 2#EnRe. ET L£ 42EnSolp. Considérons l'air précédent; il se compose d'un motif élémentaire reproduit successivement quatre fois dans les tons de /a*, ré, si, et sob, dont les toniques s'échelonnent par tierces majeures des- cendantes, et les armures par quatre accidents abaisseurs (bémols ou bécarres de dièses), en sorte que le dernier ton (sok) est synonyme du premier (faë); chacun des motifs élémentaires finit sur sa tonique (blanche) et commence par sa médiante (petite note); celle-ci se chante semblable à la tonique du ton précédent, ce qui produit la modu- lation du type indiqué (par tierces majeures des- cendantes). Donnons-nous, sur un instrument quelconque, le faë du ton initial et chantons consécutivement les quatre motifs élémentaires de l'exemple ; nous abou- tissons à un sob final qui fait (lui ou son octave) avec le faë initial un certain comma c. Cet intervalle étant petit, nous pourrions, pour obtenir un inter- valle double, continuer la série des modulations par tierces majeures descendantes, et aborder suc- cessivement les tons de mibb, dobb, Jabbr; mais, au lieu de ces tons inusités à cause de la com- plexité de leur armure, il est plus simple et rigou- reusement équivalent d'admettre fictivement qu’au lieu du 4° motif (en sob) on vient de chanter le 4* motif (en f#) et de continuer en repre- nant de nouveau les trois motif en ré, si et sob; sob, on aboutit ainsi à un second sob final, identique à ce qu'eût été le Zavrb défini plus haut, et formant avec le /x# du début un comma 2c. Si l'on recom- mence une 3°, 4°... n° fois, en se conformant à la barre de reprise de l'exemple, on aboutit à un 3°, 4°, n° sob final formant avec le fa initial un comma de valeur 3c, 4c,.., ne. Nous trouvons donc là un moyen de mesurer avec un instrument quel- conque, un piano par exemple, la grandeur du comma € : s'il faut exécuter deux reprises consé- cutives pour que le dernier sol fasse avec le fa# de 718 départ un écart d'un demi-ton, c'est que le comma € vaut moitié d'un demi-ton. Comparant la valeur observée de ce comma avec celles que les formules de Pythagore et de Descartes permettent de calculer à l'avance, il est facile d'en conclure le type de gamme auquel on s'est conformé en chantant. Le caleul montre que, pour une seule reprise de quatre motifs élémentaires, le sob final est émis, savoir : le sob cartésien à 2/5 de demi-ton au-dessus du fa* ini- tial; le sob pythagoricien à 3/13 de demi-ton au- dessous de ce même /a#! Ainsi, un Cartésien chantant l'air prolongé d'une reprise (en tout, sept motifs élémentaires) terminera sur un sob situé à 4/5 de demi-ton au-dessus du fa du début, et sonnant par suite, non comme le sob, mais comme le so/z du ton initial”. VIII. — CAUSES D'ERREUR SE RENCONTRANT DANS CES EXPÉRIENCES. Il semblerait que la Nature ait pris plaisir à accu- muler ici les embüches, comme pour dérouter le chercheuretlui faire croire, quand il sent la musique à la facon cartésienne, qu'il se conforme, au con- traire, à la gamme de Pythagore. Voici quelques- uns des pièges auxquels l'expérimentateur doit éviter de se laisser prendre. Supposons qu'il veuille élucider la question en recherchant, comme on l’a expliqué plus haut (chap. VI), si, dans le ton de do, la quinte ré-la a pour valeur 40/27 (Descartes) ou 3/2 (Pythagore). S'il opère avec un violon, cet instrument, étant accordé par quintes, lui fournira forcément un /a pythagoricien. S'il opère en observant un chanteur, il pourra trouver juste ; mais, si la mélodie choisie contient une de ces oscillations si fréquentes, dont les musiciens ne font pas état et ont l’air d'ignorer l'existence, par exemple une oscillation en ré équiarmé de do (ré mineur pseudique de l'Æssai sur la gamme), l'artiste, même Cartésien, devra chanter la quinte ré-la avec la valeur 3/2 qui lui appartient dans ce cas, et notre chercheur pourra croire que l'expérience tranche la question en faveur de Pythagore. Cette cause d'erreur étant supposée reconnue, il pourra proposer à l'artiste un autre air, exempt d'oscillations de ce genre; mais si, dans ce nouvel air, le a se présente dans MAURICE GANDILLOT — LE DÉBAT SUR LA GAMME des conditions d'intonation difficiles, l'artiste, bien que Cartésien par hypothèse, sera fort exposé à. réaliser la quinte ré-la avec la valeur pythagori- cienne 3/2, non qu'il la trouve plus belle, mais. parce qu’elle est toujours facile à pratiquer; il ne. se la proposait pas comme but, mais il l'a employée comme moyen, en sorte qu'ici encore les appa- rences sont en faveur de Pythagore. Même dans les mesures de commas par répétition (chap. VIT), on rencontre souvent des causes d’er- reurs équivalant aux précédentes : si l'on module par quatre tierces mineures successives, on est exposé à émettre, non pas ces tierces elles-mêmes, mais les quatre notes d'un accord de septième diminuée (Æssai sur la gamme, p. 306); dès lors, | l'écart final est nul, ce qui semble clore le débat en faveur de Pythagore, car le calcul montre que le comma cartésien est assez grand, tandis que le pythagoricien est presque nul. Si l'on module par six secondes majeures successives, l'accord de septième de dominante (Æssai sur la gamme, p.307), exerçant une influence perturbatrice analogue à celle qu'on vient de signaler pour l'accord de sep- tième diminuée, peut mettre encore les apparences . du côté de Pythagore. Toutes ces apparences trom- peuses, tous ces pièges dont la liste pourrait être singulièrement allongéé, expliquent sans doute pourquoi la question est restée controversée jus- qu'à ce jour. IX. — EXAMEN DU PRINCIPE MÊME DES GAMMES PAR QUINTES ET PAR RAPPORTS SIMPLES. Les physiciens n'ont pas coutume d'examiner ce point, sans doute pour ne pas empiéter sur le domaine des psychologues; il est regrettable que la question soit généralement passée sous silence, car elle est intéressante el instructive. Que se passe-t-il quand on entend un son mu- sical? Le cerveau recoit une série d'impressions élémentaires isochrones, pouvant se représenter graphiquement par une série de points équidis- Lants marqués sur un axe des temps; ainsi la sen- sation afférente au la normal de 435 vibrations par seconde sera figurée par le schéma suivant (1" ligne) la_ 4 On remarquera que le sens seul de l'écart suffit à tran- cher la question, en sorte que l'expérience peut être faite à l’aide d'un simple diapason. ? Dans l'exemple précédent, si on chante l'air une seule fois et sans reprise, l'écart obtenu entre les notes syno- nymes extrèmes (fa2 initial et solp final) est d'environ moitié d’un demi-ton. Dans l'Essai sur la gamme (p. 303 à 301), on trouve plusieurs exemples analogues. Dans l'un d'eux, la différence entre les notes synonymes extrèmes notes que confond le tempérament}, est légèrement supé- rieure à un demi-ton. si l'échelle des temps est de 1 division pour 1/435 de seconde; et le do qui forme tierce mineure avec le la précédent admettra un schéma analogue, mais présentant 6 divisions pour 5 du schéma de /a. Pouvons-nous, à simple audition, reconnaitre la valeur absolue de ces divisions du temps? Oui, au MAURICE GANDILLOT — LE DÉBAT SUR LA GAMME 719 moins à peu près, mais seulement après un entrai- nement convenable. Ainsi un ténor ayant à chanter un air approchant de la limite de sa voix, saura fort bien, le cas échéant, dire à son accompagna- - teur : « Votre piano est à 1/4 de ton au-dessus du diapason ». Mais cette évaluation n’est qu'approxi- mative, et la plupart des musiciens non profes- sionnels ne sont pas capables de la faire. Ce que tous, au contraire, percoivent fort bien, ce sont les valeurs relatives, et non les valeurs absolues; par exemple, l'audition simultanée des deux notes /a et do précédentes leur procurera la sensation bien connue de tierce mineure, et ils reconnaitront cette sensation, même si l'instrument employé est plus haut ou plus bas que le diapason normal, alors que l'écart avec ce diapason aura passé complète- ment inaperçu. Il est naturel qu'il en soit ainsi ; car, dans le cer- veau d’un musicien dont la mémoire ne s'est pas trouvée soumise à un entrainement particulier, il n’est rien qui puisse donner la notion des valeurs absolues du temps, tandis qu'au contraire les va- leurs relatives se manifestent à nous, par nos sen- sations mêmes; ainsi la tierce mineure /a-do déter- mine la sensation afférente à cette sorte de vernier au sixième (rapp: 6/5) que représentent les schémas précédents (fig. 5), et tout autre couple de notes formant le même intervalle 6/5 donnerait lieu à un vernier tout semblable (Æssai sur la gamme), susceptible par conséquent d'être confondu avec le vernier /a-do. Il est évident que, de même, des verniers au demi (rapp. 3/2), ou au tiers (rapp.4/3), ou au quart (rapp. 5/4), elc., caractériseraient respecti- vement les intervalles musicaux de quinte (rapp. 3/2), ou de quarte (rapp. 4/3), ou de tierce ma- jeure (rapp. 5/4), ete. Il y a là, dans le domaine de nos sensations élémentaires, quelque chose de tout à fait analogue à ce que nous constatons si fré- quemment dans le domaine de nos sensalions résullantes : dans un air à plusieurs voix, il est plausible de faire entendre, avec une partie com- portant 4 blanche par temps, une autre partie à 2 noires par temps (rapp. 2/1); de même, on asso- ciera des temps de 2 noires à des triolets de 3 noires (rapp. 3/2), ou des temps de 3 noires à des duolets de deux noires ou de 4 croches (rapp. 4/3); de même encore, si, à limitation des Orientaux, ‘nous arrivions à varier davantage nos rythmes, nous pourrions aussi, avec 5 croches en quintolet, accompagner 4 croches ordinaires (rapp. 5/4), etc. On voit combien est complète l'analogie avec le phénomène élémentaire des accords de deux sons : de même que, dans une harmonie, nous accou- plons très bien des groupements de 3 noires et de 2 noires, malgré leur différence de rythme, parce qu'à chaque période d'un temps nous constatons leur concordance, de même, dans un accord de quinte 3/2 tel que do-sol, nous associons facilement la vibration do—2 à la vibration s01—3, malgré leur différence de fréquence, parce qu'à chaque période d'un vernier nous constatons la concor+ dance des vibrations, ce qui nous procure cette sensation spéciale que l'expérience nous a révélé être caractéristique de la quinte : dans l’un et l’autre cas, notre intelligence paraît apprécier la connexion de deux rythmes en rapport 3/2. Parmi les accords de deux (ou plusieurs) sons, les plus simples, étant les plus faciles à reconnaître, seront sans doute les plus employés par le musicien débutant; mais, plus tard, le besoin de varier ses sensations lui fera augmenter peu à peu la gamme de sons dont il fait usage, et il arrivera ainsi à employer des intervalles de plus en plus complexes. Il n’est pas possible de rappeler ici comment cette augmentation progressive des ressources de la gamme prend fin praliquement® quand on est arrivé à réaliser un total de 42 sons (gamme chro- matique), et pourquoi, de ces douze sons, on utilise le plus habituellement certaines séries de 7 notes (gammes diatoniques), dans lesquelles quelques groupes de 3 sons (échelles constitutives ou accords fondamentaux) ont un rôle prépondérant: toutes ces questions ont été traitées dans l'ouvrage déjà cité à plusieurs reprises (Æssai sur la gamme), et on ne pourrait les résumer ici sans allonger cet article outre Considérons donc comme acquis ces différents points, d'où il résulte que la conception des rapports simples explique au moins la mélodie, et passons à un rapideexamen de l'har- monie. ; Supposons qu'un ténor chante un thème simple, tel que le dessus de l'exemple suivant, et voyons mesure. comment un baryton cherchant à l'accompagner pourra être porté à lui faire harmonie. A la vérité, le problème admet bien des solu- tions ; mais il n’en est pas moins évident que l’une des plus raturelles et instinctives sera celle qu’in- dique la figure ci-dessus, où la note du baryton, comparée à celle du ténor, réalise à elle seule la double condition : 1° de former un rapport très simple, celui de tierce (ou de sixte, renversement de la tierce”); 2 de caractériser le mode des 1 Du moins, en général. ? Aux mesures à et 7, ceci n'est vrai que pour les temps 120 échelles (accords parfaits) dans lesquelles on conçoit les harmonies successives. Ainsi, quand le ténor chante si, ré, ete., le baryton chante sol, si, ete. ; il joint so] à si, si à ré, elc., à cause du caractère spécifique et de l’extrème simplicité des rapports correspondants, 5/4, 6/5, ete. Dans la théorie de Pythagore, ces faits seraient- ils susceptibles d'une explication plausible? Il fau- drait admettre que, pour joindre so/, à si,, le bary- ton descend de 4 quintes, si, mi,, la,, ré,, Sol, puis remonte de 2 octaves sol, sol,, sol; que, pour joindre si, à ré,, il monte au contraire de3 quintes, ré,, la, mi,,-si,, et redescend ensuite de deux octaves si, si,, si. Mais quelle cause a pu amener le baryton à concevoir intuitivement et instantané- ment ces quintes de nombre et de sens variables, ainsi que leurs octaves correctives? Cette concep- tion, d’ailleurs, est contredite par les faits : les intervalles harmoniques ne sont sürement pas engendrés par des quintes. Aussi certains Pytha- goriciens abandonnent-ils le cas de l'harmonie, et se bornent-ils à prétendre que la mélodie seule est conforme à leur conception de la gamme; ainsi, dans l'exemple précédent, pour so/=1 (tonique), le si, première note du ténor, vaudrait 81/64, tandis que le si qui suit immédiatement, seconde note du baryton, vaudrait seulement 5/4. Sans insister sur ce que cette différence entre les gammes du lénor et du baryton présenterait d'un peu «singulier », voyons si la thèse pythagoricienne ainsi réduite peut s'appuyer sur des bases solides, tant théoriques qu'expérimentales. . Les Pythagoriciens donnent-ils de la conso- nance une interprétation plus plausible que celle que la considération des rythmes élémentaires permet aux Cartésiens de concevoir? Assurément non. Les Pythagoriciens engendrent-ils simple et mathématique ces groupes (échelles) de types do-mi-sol et do-mi,-sol que fournit immédiatement la conception cartésienne, et qui ont en musique un rôle si prépondérant? Non, les séries de quintes pythagoriciennes do-sol- ré-la-mi el mi,-si,-fa-do-sol séparent et dispersent ces sons que l’art associe ; ces deux séries sont entachées de notes étrangères, et dans une seule d'entre elles la note do occupe la place de base qui lui revient. de facon de sons Tandis que les Cartésiens peuvent engendrer aisé- ment et logiquement nos gammes diatoniques, en associant les groupes rationnels de trois sons (échelles) unis par les rapports les plus simples Essai sur la jamme), les Pythagoriciens donnent- MAURICE GANDILLOT — LE DÉBAT SUR LA GAMME ils de la gamme une genèse aussi plausible? Nulle- ment. La formule cartésienne fournit des séries diatoniques et une série chromatique limitées res- pectivement à sept et douze sons (comme les gammes dues à l'intuition des artistes) et s'ajustant pour ainsi dire sur le fait expérimental à la facon d'un vêtement bien coupé. Au contraire, la formule pythagoricienne fournit, non point un vêtement ajusté, mais seulement une sorte de pièce d'étoffe illimitée dans les deux sens, ne rappelant en rien la forme des faits expérimentaux, et dans laquelle le théoricien doit, de facon complètement arbi- traire, découper des segments de longueur con- venable. Tout au plus les partisans des quintes peuvent- ils invoquer en faveur de leur gamme certains prin- cipes observés en musique pythagoricienne et non en musique cartésienne. Mais ces principes, énoncés sans démonstration, sont controuvés et doivent être rejetés, soit à cause des conséquences fausses qu'ils comporteraient, soit parce qu'ils sont nette- ment contraires aux faits. Ainsi, d'après certains auteurs, la gamme pythagoricienne devrait être préférée à la cartésienne parce que ses intervalles ont des valeurs immuables, indépendantes de la place où on les mesure; mais, comme la fixité des intervalles est contredite par l'observation‘, ces mêmes auteurs, afin de corriger ce que cette pseudo- qualité pourrait avoir d'embarrassant pour l'inter- prétation des faits, admettent que chaque note peut se présenter avec des variations de hauteur ou nuances; ils n'indiquent, d'ailleurs, pas quelles doi- vent être les valeurs de ces nuances, et ne font pas comprendre en quoi ces variations arbitraires satis- font l'esprit plus complètement que les variations mathématiques résultant de la conception carté- sienne. D'autre part, au point de vue expérimental pro- prement dit, la thèse pythagoricienne parait mal défendue par les faits, car presque tous les physi- ciens obtiennent par leurs mesures des résultats cartésiens. Il existe, il est vrai, les célèbres expé- riences Mercadier-Cornu, et celles-ei, qui tendent à maintenir, au moins en mélodie, la conception : pythagoricienne de la gamme, ont sur le grand public une influence extrêmement considérable, car nous sommes généralement moins aptes à peser les raisons elles-mêmes que l'autorité de ceux qui les énoncent. Mais nous avons vu (chap. V) que le principe même de ces expériences donne lieu à de sérieuses objections; que leur exécution est expo- sée à mille chances d'erreurs (chap. VII), à l'abri desquelles les savants auteurs précités n'ont peut- 2et3; pour le temps 1, l'exception apparente résulte de ce que, en ces points, la partie du ténor présente ce que les musiciens appellent un retard. 1 Voir notamment les expériences de M. Zambiasi, signa- lées par M. Lucien Poincaré dans la Revue générale des Sciences du 30 janvier 1903. 112 à rs ei PE À de EE Se) m7 5 ten ut L'RRE GASTON TRÉLAT — SALUBRITÉ GÉNÉRALE DES TERRITOIRES HABITABLES 721 être pas toujours pu se mettre; qu'enfin, en évitant ces causes d'erreurs, on exécute, tant dans la gamme (chap. VI) que danslamodulation (chap. VID), d'autres essais conduisant à des conclusions toutes différentes de celles des expériences de MM. Mer- cadier et Cornu. Si celui de ces deux savants qui subsiste seul aujourd'hui voulait reprendre son programme in- terrompu et continuer dans la modulation ce qu'il a fait naguère pour la gamme, il achèverait sûre- ment l'œuvre commencée en ruinant la conception pythagoricienne de la mélodie, comme il a déjà ruiné celle de l'harmonie. Maurice Gandillot. LA SALUBRITÉ GÉNÉRALE DES TERRITOIRES HABITABLES Quel que soit présentement le nombre d'habi- tants, quelle que soit même leur absente apparente dans une région, on ne saurait oublier que désor- mais il ne peut plus y avoir de territoire qui n'ait pour destinée, et dans un délai assez rap- proché, d'exercer une influence sur la salubrité générale. Souvent ce ne sera point le fait direct d'installa- tions habitables; tout au moins faut-il admettre que, sous peu, il n'y aura plus guère de localité qui ne soit appelée à montrer la solidarité de son action sur la santé de groupements humains plus ou moins proches, notamment au moyen des eaux qu'on pourrait être conduit à capter pour lali- mentation de leurs membres. Le sujet que nous abordons en ce moment s'im- pose par suite de la facilité et de la rapidité de déplacement, devenues aujourd'hui les caractéristi- ques des moyens de transports disponibles; c'est done une vérité spéciale à notre époque. Et il faut savoir y regarder d'assez près, pour être en état de satisfaire aux besoins qui vont se manifester et mais, qu'il faut prévoir. L'eau, le sol, l'air interviennent comme conditions générales de la santé, dont ils peuvent être consi- dérés comme des facteurs constants. Cette santé se confond avec la salubrité de l'habitation, qu'il est du ressort des activités professionnelles d'assurer aux territoires où les sociétés s'organisent, en vue des superficies plus vastes qu'intéresseront les né- cessités de leur développement. Ce sont done là trois éléments qui sont liés à la manifestation de la vie ou des activités qu'elle’ entraine chez l'homme. Dans ces conditions, microbiologie et parasitologie ne peuvent rester étrangères aux spéculations dé- fensives contre toute nocivité anti-sanitaire : le monde microbien fait, en effet, courir aux collecti- vités des dangers se mesurant au nombre d'unités rapprochées; et ces dangers sont d'ailleurs les mêmes que ceux qu'on constate lorsqu'il s'agit de santé privée. C'est contre la menace incessante de leur propagation qu'il convient de défendre l'eau, le sol et l'air. Nous n'insisterons pas davantage sur ce sujet, que nous avons déjà abordé en détail dans un ar- ticle récemment publié ici même", Contentons-nous de rappeler que la salubrité des habitations, comme l'hygiène de l'habitat, réclament l'une et l’autre une suite d'opérations qui seraient nouvelles et demanderaient à être inaugurées sans tarder. Tout rapprochement d'êtres vivants entraine une variété d'usures. Ces usures de la vie et des activités qui s'ensuivent deviennent des causes d'insalubrité pour les centres agglomérés. Leur insalubrité se manifeste par la pathogénéité des bactéries conser- vées dans le sol, dans l’eau, ou par suite des vicia- ions atmosphériques, viciations d'autant plus appréciables qu'on se reporte à l’état constaté de l'air en pleine mer ou dans les montagnes d'une altitude quelque peu marquante — vrai critérium de pureté atmosphérique. Il y a donc lieu de rechercher les mesures par lesquelles les trois éléments en question pourraient bien demeurer aussi sains que possible et répondre aux exigences de la salubrité réclamée pour l'ha- bitation, dont ils constituent toujours l'ambiance immédiate. Les services publics devraient, en conséquence, élargir la mentalité de leur organisation — et ce serait assez simple! — afin d'étendre le champ, un peu trop strictement déterminé jusqu'ici, de leurs applications par rapport aux inquiétudes que la vie sociale peut soulever. Aucun des services ne serait interrompu; tous se poursuivraient en fixant les regards sur la santé publique. Il serait facile de désigner ici les corps profes- sionnels pouvant bien intervenir dans les nouvelles utilités réclamées. Ils sont tout indiqués pour prendre cette autorité, d'accord avec le courant intellectuel visant l'hygiène : ce seraient seulement de nouveaux chapitres à ouvrir à côté des différents services qui leur incombent déjà. ! G. TréLar : Santé publique et Paris de demain. Revue gén. des Sciences du 15 avril 1907. Il Il ne faudrait pas que cet article restât dénué de sens pratique. Il doit, au contraire, insister sur certains points concernant avant tout le caractère indemne à ménager aux localités habitées. Les lecteurs s'étonneraient sans doute que les idées émises ne fussent point suffisamment cir- conscrites pour autoriser la précision d'un sujet, auquel leur intervention active pourrait être des plus utiles. Mais, d'autre part, il n'y a pas lieu de déterminer des solutions par trop arrêtées à l'avance; elles ne seraient aucunement en place. Elles doivent tou- jours conserver assez de latitude pour réserver le caractère que les applications pourraient être con- duites à prendre en s'accordant, d'une part avec les localités, d'autre part avec les tempéraments que la variété des contrées et leurs antécédents auto- risent ou prescrivent. Ce serait donc une raison de s'en tenir à un idéal assez précis pour diriger les conceptions, à des hypothèses permettant aux solutions de gagner l'ampleur que comporte le sujet. Il est aujourd'hui reconnu que, sauf exceptions s'accusant notamment par l'influence d'agents mécaniques, physiques ou chimiques, ce sont plus particulièrement des agents animés, sous forme de microbes, qui déterminent tout danger de mort ou de maladie. Et c'est toujours dans l’eau, sur le sol et dans l'air que ces microbes séjournent; c’est done par les dits éléments que la transmission s'opère. Dans l’eau, les germes pullulent. Et, bien que le passage des eaux à travers le sol les dépouille de ces microbes, il ne faudrait pourtant pas trop se fier à la pureté des eaux profondes. Il arrive que, dans les terrains calcaires, des fissures favorisent le libre cheminement du liquide, sans permettre aueun dépôt de germes, qu'on sait être le caractère de l’action épuratrice des couches poreuses. Dans le sol, indépendamment des germes dont la végétation peut bénéficier, les microbes, qui recouvrent la superficie ou qui se trouvent répartis dans la partie supérieure des terres, sont des causes permanentes de maladies, Bien que l'air contienne d'ordinaire assez peu d'éléments infectieux, les poussières du sol, quand elles sont transportées par le vent, comprennent forcément des germes confondus avec des parti- cules inertes, qu'elles font pénétrer dans l'orga- nisme par les voies respiratoires, digestives ou par toute autre voie. L'eau, le sol et l'air font donc penser à des réser- voirs de bactéries, souvent pathogènes. Dans ces conditions, il est désirable que nos collectivités se 9 GASTON TRÉLAT — SALUBRITÉ GÉNÉRALE DES TERRITOIRES HABITABLES gardent autant que possible de confondre leurs germes malfaisants avec ces agents de la vie, qui seraient ainsi exposés à devenir l’origine perma= nente de méfaits pour la santé, si l'on n'avait pas la précaution de les garantir. Des études incessantes et infinies.s'attachent à éclairer sur l'influence des parasites et des agents, causes de maladies infectieuses. Ces travaux per- mettraient d'aboutir à une organisation plus active de défense contre la menace permanente de pro-" pagation pathogène. Il convient, en outre, de s'atta- cher à une lutte incessante contre les dangers ma- nifestes de contamination, en vue d'anéantir le péril avant que nos sociétés aient à en souffrir. Ainsi la situation, particulièrement réclamée par la santé des milieux, se résume en exigences con- sistant toutes : d’une part, à s'opposer chaque jour davantage à la contamination des trois éléments subordonnant l'habitat à leur influence; d'autre part, et dans la mesure du possible, à s'efforcer de leur rendre la santé, lorsqu'elle est compromise. Tels sont bien, semble-t-il, les caractères détermi- nants de l'idéal et des hypothèses que la science met au service de la salubrité des habitations, dont il ya lieu de préparer aujourd'hui les services tech- niquement organisés. IT Les conditions primordiales de santé sont repré- sentées, comme on vient de le voir, par la salu- brité et la pureté relatives du sol, de l’eau, de l'air. Leur alimentation en germes aboutit à une action pathogène et permanente d'insalubrité pour l'am- biance de l'homme. Mais, une fois affirmée la salubrité du milieu, il s’agit encore de ne point compromettre la situa- tion par des aménagements regrettables. Il y a urgence à procurer les bienfaits de la santé à tous les habitants en même temps qu'à la totalité de l'habitation. Cela se réaliserait par une étude volon- taire et énergique des dispositifs répondant au pro- gramme que la dite habitation doit remplir, sans jamais négliger aucune des exigences de la santé. Et le mode de construction observé, comme la nature des matériaux employés, concourraient l'un et l'autre au service objectif, grâce au caractère de leur structure plus ou moins perméable, grâce sur- tout à leur aptitude à la désinfection, dont la mise en pratique s'impose, au moindre doute surgissant dans l'esprit. Et l’on n'oubliera pas l'évacuation des usures, relativement aux dangers d'infection; elle suppo= sera les mêmes serupules que ceux d’ailleurs évo- qués dans les circonstances de ce genre. Pour les eaux d'égout, le dernier quart de siècle a montré GASTON TRÉLAT — SALUBRITÉ GÉNÉRALE DES TERRITOIRES HABITABLES 123 jusqu'à quel point la critique scientifique pouvait entrainer de progrès techniques dans les modes d'épuration en usage. Au début, sous la haute di- : rection d'ingénieurs éminents de la Ville de Paris, l'épandage de Gennevilliers, qui servit de modèle, visait exclusivement l’utilisation des engrais que les eaux usées pouvaient bien contenir; car on enten- dait judicieusement en faire profiter les sols restés jusque-là incultes de la presqu'ile. Très belle opé- ration, que l'inquiétude sanitaire fit ultérieurement confondre avec une question de santé. Je ne puis oublier l'extension en regard d'assainissement, pour en avoir été témoin à la Société de Médecine . publique, d'où l'initiative est en quelque sorte partie. Cela fut alors un honneur pour la jeune Société et pour l’activité de ses membres. Mais il convient d'ajouter que l'épuration ne saurait jamais être suffisamment contrôlée, étant donné le péril auquel exposeraient des expériences particulièrement re- grettables, lorsqu'il s'agit de santé, surtout de santé publique, ce dont témoignent d'ailleurs les écoles par où durent passer ces vingt dernières années, avant d'aboutir à l'équilibre de scrupules judicieux. En fait d'eaux d'alimentation, le problème est également délicat. Au cours de ces lignes, j'ai déjà eu l’occasion de rappeler les dangers que la boisson d'eaux de source est exposée à faire courir. Elles ont toujours l'attrait de la limpidité et de la frai- cheur de température; mais il arrive parfois que, après avoir élé irréprochables pendant un temps, elles traversent des périodes malfaisantes. Nous répélons done qu'il ne faudrait pas trop se fier à l'agrément et à l'appétence que de telles eaux sus- citent. Il y aurait même urgence à ce que toute collectivité fût toujours pourvue de moyens effectifs de filtrage et d'épuration, pour qu'on puisse, le cas échéant, rendre la santé aux eaux devenues mal- saines par contamination. Les sources présentent d'ordinaire des conditions supérieures aux rivières pour l'alimentation des êtres. Mais cela n'empêche pas qu'elles soient encore exposées à des invasions bactériennes correspondant aux saisons pluvieuses. Je me souviens d'un fait qui remonte à une dizaine d'années. Il montre bien qu'on ne saurait assez se préparer à l'assainissement général des territoires campagnards. Le cadavre d'une vache avait été oublié ou ignoré en pleine campagne de l'Espagne, dans le vallonnement d'un plateau. La constitution du sol calcaire et ses fissures firent que les eaux du ciel transportèrent les germes issus du cadavre. La contamination des eaux souter- raines s’ensuivit; et la maladie, la mort en résul- tèrent dans un groupe d'habitations, situées au bas d'une montagne de la région et qui utilisaient pour leur boisson l'eau d'une source du voisi- nage, dont la pollution fut attribuée à la cause que “ nous venons de rappeler et dont je suis resté frappé. Par les temps humides, les fissures naturelles des terrains calcaires se trouvent done utilisées au passage des eaux du ciel, leur permettant ainsi d'entrainer en profondeur, sans aucun dépôt, les microbes de la superficie du sol. Il serait done sage de se mettre en mesure de pouvoir, au besoin, filtrer les eaux de source comme les eaux de rivière, Il est bien entendu que cela ne ferait pas oublier les mesures de prévoyance sanitaire qui seraient suggérées par les desiderata de la salubrité super- ficielle. Bien que la poussière de charbon ne soit sans doute pas cause d’insalubrité manifeste pour l’at- mosphère, il est bon de noter une tendance mar- quée à faire disparaitre les fumées dans les villes. Et l'hygiène des voies publiques s'impose égale- ment au technicien, par suite des transports dont on à pu être témoin et qui aboutissent à une rapidité, à une richesse de circulations ignorées à d'autres époques. C'est en partie la conséquence des applications de l'électricité caractérisant le courant industriel de notre xx° siècle. Leur aménagement prend une complexité con- sidérable, par suite du nombre et de la diversité de parties distinctes ayant à répondre à la nouveauté et à la différence des besoins de circulation dans les centres agglomérés. En l'espèce, il y faut compter. avec la répétition et la commodité spacieuse de refuges et de trottoirs réservés aux piélons, de même qu'on ne saurait oublier la nécessité de chaussées spéciales pour différencier les directions opposées des véhicules et pour éviter les embarras contrariant la rapidité des mouvements unitaires auxquels les voies publiques sont désormais as- treintes. Cette complexité entraîne un soin tout par- ticulier dans l'étude et l'exécution des parties con- courant à la totalité d'une avenue, Il en résulte, comme toujours, des travaux comprenant des vues d'ensemble. Mais les frottements auxquels les chaussées sont exposées déterminent des usures considérables du sol et une fréquence de répara- tions dont il sera également tenu compte dans les données du problème à résoudre. La rapidité et l'abondance signalées dans la circulation des pié- tons et dans celle des véhicules à traction animale ou automatique ont, en suite de leur répétition continue, pour caractère inéluctable d’occasionner des troubles, souvent appréciables aux regards, dans la pureté de l'air. Une foule de considérations en découlent. Il serait bon de les mettre au point, en ce qui touche les espaces qui sont situés au delà des enceintes ou des périphéries actuelles des villes, parce qu'ils sont appelés à prendre place dans l'agrandissement imminent d'agglomérations trop concentrées. 124 GASTON TRÉLAT — SALUBRITÉ GÉNÉRALE DES TERRITOIRES HABITABLES Voilà pour quelques desiderata, qu'il semblerait bon d'envisager dès maintenant, si l'on ne voulait risquer de compromettre à tout jamais les solu- tions que l'avenir voir réalisées. C'est le progrès qu'on sert effectivement en prévoyant les exigences de l'avenir. Ce qui montre bien que la liberté des applications techniques ne répond jamais assez directement-aux inspiralions autori- sées par la science et qu'on ne saurait les suivre de trop près. Par un temps d'études et d'expériences infinies, la loi de progrès contemporain veut qu'il en soit ainsi, à moins qu'on ne préfère collaborer à une décadence: elle serait liée à l'absence de toute volonté, exaltée par le temps et par les visions qu'il tendrait à suggérer. entend III Voyons maintenant quelle portée pratique les moyens actuellement existants pourraient prendre, en fait d'hygiène, s'ils comprenaient toutes les applications dont ils sont capables. Les organisations publiques ou privées, ayant à s'occuper plus ou moins directement du sous-sol terrestre et des richesses qu'il détient, — en parti- culier le « Corps des Aines », — seraient préposées au maintien des eaux souterraines à l’état de pureté. La contamination hydrique, dans les gîtes intérieurs de la terre, devient un danger que les observations et l'expérience démontrent de mieux en mieux. Par la pollution des nappes souterraines, les col- lectivités agglomérées se trouvent exposées à cap- ter et à amener à grands frais, pour l’alimenta- tion de leurs membres, des eaux dont il y a sou- vent à déplorer la malfaisance. Il en résulterait la nécessité de protéger ces eaux et même de subor- donner à leur état de salubrité les travaux’ qui s'effectueraient à fleur du sol. Pour prendre un exemple, le forage des puits s'opère à l'exclusion de toute pensée d'ordre sanitaire; il est cependant de nature à propager des contaminations sous terre. Le phénomène s'expliquerait par le voisinage des causes d'infection, telles que les dépôts de fumier, les fosses d’aisances ou les puisards affectés aux détritus de la vie. Du reste, l'usage de leurs eaux est déjà redoutable comme alimentation, et l’on tendrait chaque jour à en proscrire davantage les eaux pour la boisson. Les corps nationaux, préposés aux mines et aux gisements terrestres, auraient donc à montrer une utilité nouvelle et plus étendue de leur interven- tion. Elle ferait l’objet de consultations impor- tantes pour la salubrité, telle que les connais- sances présentes voudraient la voir pratiquée. En ce qui touche les eaux à fleur de sol, c'est au Corps des Ponts et Chaussées qu'il appartiendrait d'agir. Son intervention, eu égard aux consulta- tions intéressant la santé, aurail à subordonner davantage les travaux publics, en y comprenant parfois même les travaux à la mer, si l'on voulait réaliser une protection devenue bien désirable aujourd'hui pour les eaux de la nature. Aïnsi serait-il particulièrement intéressant et sage de sau- vegarder la santé de leurs cours, partout où leur direction, conséquente des reliefs du sol, aurait entrainé ou favorisé l'agglomération d'habitants. Alors des mesures préventives contre la contami- nalion se trouveraient tout indiquées. En consé- quence, des collecteurs latéraux seraient à prévoir partout où l'utilité s'en manifesterait, suivant ce qui vient d'être dit et ce qui commence, du reste, à s'exécuter au moins dans les villes. Les liquides de la vie privée, de la vie collective ou des travaux industriels y seraient toujours écoulés. Ces liquides ne seraient jamais confondus avec les eaux de la nature sans avoir subi, au préalable, une épura- tion naturelle ou artificielle, mais toujours éprouvée scientifiquement. Pour toute collectivité spéciale, il s'ensuivrait donc une mise au point de projets élaborés pour préserver la pureté hydrique, y com- pris celle de la mer, dont le littoral se trouve parfois exposé à des pollutions regrettables pour la santé et le bien-être publics. Pareillement, les £aux et Forêts présentent une suite d'aménagements distincts en rapport avec l'influence exercée par les forêts etles chutes d'eau. Les régions montagneuses font l’objet de travaux présentant un intérêt incontestable, et les solu- tions qu'ils entrainent ne sont pas sans avoir trait à la santé. En effet, le sol de la forêt favorise les infiltrations d'eaux du ciel, concourant de la sorte à l'alimentation des nappes profondes; et l'expé- rience ne permet plus de s'en désintéresser. Mais ce n’est pas tout : il faut encore compter avec les racines d'arbres et les menues variétés de plantes qui les avoisinent. Les terres déclives du sol sont ainsi fixées, assurant la permanence superficielle des terres apparentes; sans quoi les pâturages ne cesseraient de se dégrader, de former obstruction aux rivières et de modifier ainsi leur cours. Mais, en outre, grâce à une répartition plus régulière des mouvements atmosphériques, le voisinage des forêts adoucit le climat; une salubrité se manifeste dans les agents de la santé devenus plus cléments, en conséquence de l'absorption des eaux à la surface et du calme apporté à la violence des vents. Ce sont là autant de sujets qui se trouvent reliés à la santé des territoires et par conséquent de l'habitation. L'Administration des £aux et Forêts, dont la pro- gressionsanitairenesauraitse désintéresser,est, par le fait, destinée à devenir une force et une source de documentation précieuse en fait d'hygiène générale. GASTON TRÉLAT — SALUBRITÉ G INÉRALE DES TERRITOIRES HABITABLES 725 Naturellement, ke « Génie civil » ne saurait, lui non plus, être passé sous silence. Il répond à un enchainement trop notable d'initiatives pour cela, initiatives représentant l'esprit de l'industrie mo- derne. Les applications qu'il comprend gagneraient souvent à ce qu'il fût tenu plus grand compte des exigences croissantes de l'hygiène, en vue d'une extension de la salubrité des éléments si divers qui concourent à l'ambiance de la vie et de l'ha- bitation, La mullitude d’aclivités que couvrent les mots de génie civil touche à la satisfaction directe de tous les besoins que nos sociétés peu- vent bien montrer. Un simple regard suffirait d'ailleurs pour constater les volontés inspirées par la science de l’époque. Les esprits compréhensifs seraient frappés de tout ce que la santé gagnerait à accuser une part plus déterminée de préoccupa- tions dans les problèmes que l’industrie aurait à résoudre. Les ingéniosités continues, servant de bases à toutes ses élaborations, y rencontreraient des repères nouveaux. Ce serait bien de nature à don- ner une plus grande extension aux activités indus- trielles et à socialiser davantage la portée dont la production pourrait faire preuve. EL cela se ferait toujours par un accord essentiel avec le progres, tel qu'il ressort de l'esprit contemporain. IV En résumé, la santé, ou, pour être plus précis, les conditions qui seraient de nature à généraliser celte santé, doivent intervenir dans toutes les applications techniques. Et l'autonomie — tellement réclamée dans ces derniers lemps comme une condition inéluctable de progrès au service de l'hygiène — serait dépour- vue de toute efficacité, si lon ne commençait par susciter les préoccupations techniques jusqu'à faire appel à la salubrité pour loutle solution qu'il fau- drail soumettre à une étude préalable. L'ambiance salubre ne fait qu'un avec là santé des habitants. Pensée implicitement comprise dans l'expression de santé publique, également appliquée à l’état sain des êtres et des choses. Toute activité professionnelle, qui se résume en installations ou en aménagements matériels, — fai- sant tous partie de la scène affectée à la vie et aux activités humaines el sociales, — ne devra plus jamais manquer au devoir d'envisager toutes les REVUE GÉNÉRALE DFS SCIENCES, 1907, causes Sans exceplion qui seraient déterminantes d'insalubrité. IL y prenne place au nombre des données exerçant à urgence à ce que la santé une influence prépondérante dans les applications autorisées par toute entreprise, Tel sera le courant d'activités dont il faudra faire preuve, toutes les fois qu'on sera en présence de terriloires pourvus d'une aggloméralion d'intensité quelconque ou même en l'absence de tout rassemblement appré- ciable d'habitations. Car c'est là une circonstance qui n'est plus à considérer désormais que comme essentiellement momentanée et sans lendemain. C'est donc au service de la salubrité totale des ter- riltoires qu'il convient désormais de s'attacher. Et, rapidité tellement généralisées que présentent les si nous lenons comple de l'abondance et de la locomotions de nos jours, nous verrons qu'il n'y a plus aucun point terrestre qui ne soit subor- donné à l'habitation, aux activités qu'elle couvre ou symbolise, pour ainsi parler. Comme conclusion finale, nous aboutirons aux pensées que : 1° Toute collectivité nationale ou municipale devrait pousser les différents corps professionnels qu'elle comprend, et les arts qui s'y trouvent subor- donnés, à tenir un compte rigoureux de la salubrité dans toutes les élaboralions:; 2° Aucune délibération ne se ferait plus sans entraîner une attention particulière aux éléments qui, par le fait des agents infectieux qu'ils peuvent des facteurs effectifs de détenir, représentent maladie ou d'insalubrité, c'est-à-dire de mort; 3° Des projets, scrupuleusement établis sur les données intéressant la santé, seraient mis à l’étude sans retard, d'accord avec la marche de la science. Ces projets, lenus toujours au point des progres, constilueraient une innovation des plus généreuses dans la pratique. Travail essentiel de bonne admi- nistration, il s’effectuerait toujours en vue des progrès et à l'exclusion des possibilités budgétaires. Par contre, iln'y aurait plus jamais aucune dépense qui, une fois décidée, n'engageät des travaux d’exé- cution longuement prévus et foncièrement déli- bérés, en fin de concourir aux réalisations d’en- semble répondant toutes à l'intérêt collectif. Gaston Trélat, Chef d'atelier, Directeur des études à l'École spéciale d'Architecture. To BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 4° Sciences mathématiques Lévy (Maurice), Membre de l'Institut, Inspecteur géné- ral des Ponts et Chaussées, Professeur au Collège de France et à l'Ecole Centrale des Arts et Manu- factures. — La Statique graphique et ses applica- tions aux constructions. lome 1: Principes et applications de Statique graphique pure. 3° édi- tion. —1 vol. in-8, de xx-598 pages, accompagné d'un atlas de 25 planches. (Prix : 22{r.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1907. Le grand Traité de Statique graphique de M. Mau- rice Lévy, aujourd'hui classique, peut-on dire, est trop connu pour qu'il y ait lieu, à l'occasion de sa troisième édition, qui commence à paraitre, d'en re- prendre ici l'analyse détaillée. Rappelons seulement que ce premier volume est consacré aux problèmes que la Statique permet de ré- soudre seule, sans intervention d'aucun principe débor- dant de son cadre, et disons en un mot quels sont les points sur lesquels l'auteur à introduit des améliora- tions par rapport à l'édition précédente ; ils concernent l'étude des efforts produits par le passage d'un convoi sur un pont (à laquelle sont jointes quelques nouvelles données pratiques, ainsi qu'une table numérique de M. Resal, d'un grand secours pour l'étude d’un avant- projet de pont à deux appuis), les équations fournies par la Statique pure quand il s’agit de systèmes plans élastiques (équations complétées par les travaux de M. Maurice Lévy lui-même), et la détermination des forces élastiques qui se développent dans ces sys- tèmes, un résumé des idées sur les résistances à la rupture et les lignes de Luders auxquelles ont conduit les recherches du Commandant Hartmann. D'autre part, Fauteur à introduit dans ce volume plusieurs documents officiels visant les matières dont il traite, et à l'élaboration desquels il à eu la plus large part, leur conférant ainsi l'autorité particulière qui s'attache à sa haute compétence; ce sont le règlement ministériel du 29 août 1891 concernant les calculs et épreuves des ponts métalliques, celui du 17 février 1903 concernant les calculs et épreuves des halles à voya- geurs et à marchandises des chemins de fer, les ins- tructions du 20 octobre 1906 relatives aux construc- tions en béton ou ciment armé. Après ce court exposé des nouveautés qui signalent plus particulièrement cette édition à lattention des spécialistes, il nous sera permis, pensons-nous, d'in- sister un peu sur une autre différence qu'elle offre par rapport à la précédente. En dépit de diverses tentatives antérieures d’appli- cation générale de la méthode graphique à l’art du calcul tel que le pratiquent surtout les ingénieurs (parmi lesquelles il faut retenir celle de l'ingénieur des Pontset Chaussées Cousinery, en 1839), ce n'est qu'aux environs de 4860, qu'en instituant pour les calculs de résistance, une doctrine spéciale fondée sur un emploi systématique des propriétés des polygones funicu- laires, Culmann a fait définitivement du graphique un instrument permanent de calcul entre les mains des hommes techniques. Propagée en Allemagne par Mohr, en Italie par Cre- mona, en France par M. Maurice Lévy, la nouvelle doctrine, enrichie des importantes contributions per- sonnelles qu'y apporta chacun de ces savants, pénétra successivement dans l'enseignement des diverses écoles supérieures, où elle ne tarda pas à constituer la forme classique sous laquelle, à de futurs ingénieurs, devait s'offrir le calcul graphique en général. Par une ten» dance toute naturelle, c’est donc autour d'elle que wi rent se grouper toutes les applications de la méthode graphique aux divers calculs techniques, et nous enten= dons par là non seulement celles où les nombres soumis aux calculs, après avoir été transformés en vecteurs, sont traités par le moyen d'épures plus ow moins analogues à celles de la Statique graphique mais encore celles, toutes différentes, où les relations analytiques se traduisent en tableaux cotés ou nome grammes. On sait qu'aujourd'hui ces diverses més thodes ont acquis une autonomie propre et font l'objeb d'exposés spéciaux. Il devait en résulter, pour la S tique graphique, un allègement véritable, son domaine se trouvant vidé d’une foule de notions étrangères son objet propre, quoique d'une non moins grande utilité pour les hommes techniques auxquels elle s'adresse. Cette séparation, nettement marquée depuis quels ques années, a conduit M. Maurice Léyy à limiter son, exposé à la Statique graphique proprement dite, ren voyant pour les études voisines, mais qui ne se confon= dent pas avec elle, aux traités qui leur sont spéciale= ment consacrés. C’est là la reconnaissance définitive, par une des autorités les plus hautes en ces matières; d'un ordre nouveau qui se maintiendra désormais dans la Science. MAURICE D'OCAGNE, Professeur à l'Ecele des Ponts et Chaussées Durège (I1.). — Elemente der Theorie der Funk- tionen einer komplexen veränderlichen Grôsse. — 5° édition, mise au point par M. L. Mavrer. 4 vol. in-8° de 400 pages. (Prix cartonné :12 fr. 50.) B. G. Teubner, éditeur. Leipzig, 4907. Traité, classique en Allemagne, de la théorie des fonctions d’une variable complexe, dont la 5° édition & été mise au courant des dernières recherches par M. L. Maurer. Razous (P.), Zngénieur, ancien Inspecteur du tras vail. — Les Scieries et les Machines à bois. — 4 vol. gr. in-8° de 523 pages avec 371 fig. (Prix bro- ché: 15 fr.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Parisÿ 1907. Le succès qu'a rencontré l'excellent ouvrage de M. Razous vient de nécessiter la publication d'une seconde édition. En plus des matières traitées dans la première édi= tion, et développant avec beaucoup de détails lorgant sation rationnelle des exploitations en forêt, l’installaz lion des scieries fixes, les diverses dispositions des machines-outils utilisées en charpente, menuiseries charronnage, fabrication des bois de brosses, confet tion des caisses d'emballage et des tonneaux, les applis cations de l'électricité comme éclairage et comme transport de force motrice dans les ateliers de travail du bois, les dispositions de protection des scies et des machines à lames tranchantes, la deuxième édition s'occupe, dans trois chapitres spéciaux, des régions boisées des Colonies francaises susceptibles d’ètre exploitées, de l'étude qui doit précéder une grande exploitation en forêt, et enfin de divers procédés pra tiques de conservation et de séchage des bois. L Ceux qu'intéresse l’industrie des bois trouveronb dans cet ouvrage tous les renseignements nécessaires, à l'exercice de leur profession. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 21 2° Sciences physiques Kühnen (D' F.) et Furtwängler (D' Ph.). — Bes- timmung der absoluten Grosse der Schwerkraft za Potsdam. (Verüflentlichung des Künigl. Preus- sischen geodälischen Institutes.) — # vol. in-4 de 390 pages. Stankiewicz, éditeur. Berlin, 1907. Il n'avait point été fait, depuis les déterminations classiques du Commandant (aujourd’hui Général) Def- forges, de déterminations absolues de la pesanteur d'un intérèt comparable à celles dont MM. Kühnen et Eurtwängler viennent d'exposer le détail dans un Mé- moire inspiré par l’un des maîtres de la Géodésie mo- derne, M. F. Helmert. Les auteurs ont profité de tous les progrès réalisés en Métrologie depuis une vingtaine d'années pour rendre leurs recherches aussi fructueuses et aussi précises que possible. On sait que la détermination géométrique de la distance des arêtes réciproques dans un pendule à réversion constitue l’une des principales difficultés de son emploi, et cette détermination a toujours beau- coup préoccupé ceux qui se sont consacrés à cette difficile question. C’est pourquoi les auteurs se sont servis, concurremment aux pendules réversibles à cou- teaux, de pendules munis de plans d'agate reposant tour à tour sur le mème couteau fixe, suivant une idée émise par Prony, exécutée par Baily, et appliquée pour la première fois au pendule à réversion par M. Mendenhall. Dans ce dispositif, la distance des plans est rapportée à celle de traits pratiqués sur les faces verticales des pièces d’agate, qui, appliquées ensuite lune contre l’autre, fournissent la valeur de la correction pour la distance des traits aux plans. On pourrait sans peine perfectionner encore celte mesure, en employant un procédé différent de celui de l'application directe pour la détermination de la correction dont nous venons de pence Un perfectionnement tout récent a été introduit dans la théorie du pendule par la considération de sa flexion, pour le calcul de laquelle une formule un peu com- pliquée à été donnée par M. Almansi, et une autre beaucoup plus simple et pratiquement équivalente par M. Helmert. Les auteurs, appliquant après coup cette correction au résultat du ‘général Defforges, sont conduits à dimi- nuer de 48 microns la longueur qu'il avait adoptée pour son pendule à seconde, et à réduire d'une quan- tité correspondante la valeur de GE Dans ces dernières années, les procédés de compa- raison de la valeur de g en différentes stations, au moyen de pendules légers, du système Sterneck, ou d’une constrution analogue, se sont considérablement développés, de telle sorte que les mesures absolues sont aujourd'hui reliées entre elles par un grand nombre de mesures relatives. Le transport à Potsdam de di- verses déterminations du général Defforges semble confirmer Ja correction de flexion. Même la valeur de g ainsi déduile de ses résultats est encore légère- ment supérieure à celle qu'ont trouvée MM. Kühnen et Furtwängler. Le tableau comparatif suivant met en regard les résultats trouvés pour la pesanteur à Potsdam, et sa valeur transportée de quelques stations impor tantes. On voit que les observations de Rome et de Potsdam sont absolument concordantes, tandis que les autres en divergent faiblement : LIEU de l'observation OBSERVATEURS q Madrid . Barraquer. 981,270 em.sec-—? Paris . DE Defforges. 981,282 = Kônigshberg . . ( Bessel. Güldenstein Schumacher. 981,254 — Berlin Rome. . … . Potsdam , Peters. Pisati el Pucci. JBL 2TE NN — Kühnen et Furlwängler. 981027 — En réduisant à 45° au niveau de la mer, à laide des formules de Helmert, les résultats de M. Kühnen et Furtwängler, on trouve, pour le g normal, 980,62 cm. sec—?, valeur inférieure de 0,02 cm.sec—? à celle que l'on avait admise jusqu'ici. Maïs on sait que le 4 normal possède une valeur de convention, puisque, en raison des anomalies de la pesanteur, l'attraction m'est pas la même en tous les points situés à 45° ef au niveau de la mer. Les nouvelles déterminations, les meilleures, semble- t-il, qui aient été exécutées jusqu'ici, n'entraînent donc pas encore nécessairement un changement dans la valeur conventionnelle de g. Cette question devra, cependant, être soigneusement discutée par les asso- ciations internationales compétentes. Cn.-En. GUILLAUME, Directeur-adjoint du Bureau international des Poids et Mesures. Coustet (Ernest). — L'Electricité, ses lois et ses applications mises à la portée de tous. — 2 vol. in-8° de 320 pages avec 175 fig. et de 364 pages avec 179 fig. J. Tallandier, éditeur, 8, rue Saint-dosepl, Paris, 1907. Excellent ouvrage de vulgarisation, écrit par un physicien bien au courant des dernières recherches de la science électrique, et exposant sous une forme simple, accessible à tous, ce qu'il faut connaître de ette branche de nos connaissances. Poulene (C.), Docteur ès Sciences. — Les Nou- veautés chimiques pour 1907. Nouveaux appa- reils de Laboratoires. Méthodes nouvelles de recherches appliquées à la Science et à l'Indus- trie. — 1 vol. 1u-8°, de 387 pages. (Prix : 4 fr.) J.-B. Baillière et fils, éditeurs, Paris, 1907. M. C. Poulenc présente, comme les années précé- dentes, son livre, Les Nouveautés chimiques, à Fatten- tion des chimistes scientifiques et industriels. Il décrit successivement : les appareils de Physique s'appliquant particulièrement à la Chimie (détermina- tion des densités,températures,poids moléculaires, ete.): Les appareils de manipulation chimique proprement dite, dont la disposition est de nature à faciliter les opérations longues et fastidieuses (appareils de chauf- fage, distillation, dessiccation, extraction automatique, préparation des gaz, etc.) ; Les appareils d'électricité s'appliquant plus particu- lièrement à la Chimie (appareils à électrolyse, etc.) ; Les appareils s'appliquant à l'analyse (burettes, pipettes, appareils d'absorption pour l'analyse des gaz, appareils divers pour l'analyse des substances alimen- taires); Enfin les appareils intéressant la Bactériologie. Il y à un réel mérite à discerner, parmi l'énorme quantité d'appareils, méthodes, perfectionnements plus ou moins neufs, ce qui possède une réelle valeur. M. Camille Poulenc s'est chargé de faire un triage soigneux, et son traité des Nouveautés chimiques pour 1907 est appelé au même succès que les précé- dentes éditions. G. BLanc. Docteur ès sciences. 3° Sciences naturelles Cayeux (L.), Professeur à l'Institut national agrono- nique, Pr ofesseur suppléant de Géologie à FEcole des Mines. — Structure et origine des grès du Tertiaire parisien : Etude des gîtes minéraux de la France. — 1 vol. iu-4°, de vi-131 pages, 10 plau- ches. Imprimerie nationale. Paris, 1907. Tous les géologues connaissent déjà les beaux tra- vaux de M. Cayeux sur les formations sédimentaires du Bassin parisien; aussi accueilleront:ils avec une faveur toute spéciale le nouvel ouvrage de ce savant sur les grès et les quartzites du Tertiaire parisien. C'est là un sujet qu'on pourrait supposer bien connu; il n'en 128 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX est rien dans la réalité, et le Mémoire que nous venons de lire en est la preuve. Avant d'exposer ses vues sur l’origine des grès et des quartzites, M. Cayeux nous présente un grand nombre d'exemples concrets, choisis dans les divers étages du Tertiaire. Cette partie descriptive est appuyée sur de très bonnes reproductions héliographiques de prépara- tions microscopiques ; il nous est donc facile de véri- fier tout ce qu'avance l’auteur. Je dois dire tout d'abord que ce dernier à été amené à modifier quelque peu le sens du mot quartzite. D'après lui, ce qui qualitie un quartzite, c’est non pas son origine, mais sa structure : les grains de quartz originels du sable ou du grès ont été nourris par des apports ultérieurs de silice, qui a adopté l'orientation cristallographique des grains pré- existants ; les auréoles ainsi formées se sont dévelop- pées jusqu'à se toucher toutes et se mouler les unes sur les autres. Cette définition étant admise, l'obser- vation nous amène à cette conclusion que beaucoup de roches tertiaires, généralement qualifiées de grès, sont, en réalité, des quartzites. Il y a d’ailleurs tous les passages des uns aux autres. Au surplus, la structure intime se traduira à l'œil nu et pourra être appréciée grâce à des caractères extérieurs, parmi lesquels figure en première ligne la cassure. Il est intéressant de noter que la structure aura aussi une influence sur la colo- ration et que des roches comprenant les mêmes élé- ments incolores pourront paraitre les unes blanches, les autres noirâtres, par suite de simples différences de structure. Point n'est besoin d'ajouter que ces condi- tions de structure ont une importance pratique consi- dérable. L'origine des grès el des quartzites est une question d'ordre théorique, mais néanmoins pleine d'intérêt. La présence presque constante de certains minéraux spé- ciaux prouve que les roches de la série cristallophyl- lienne ont fourni une grande partie des éléments de ces grès et quartzites; mais les roches éruptives, les silex de la craie ou même des quartzites antérieurs ont également apporté leur appoint. Ceci était déjà connu, tandis que l'étude du ciment a donné à M. Cayeux des faits tout nouveaux, dont l'un des plus remarquables est l'épigénie presque constante du ciment. Les ciments siliceux, ferrugineux et manganésifères sont toujours d'origine secondaire, car, dans tous les cas étudiés, le ciment primordial devait être calcaire. Par consé- quent, les grès et quartzites procèdent de sables cal- caires, C'est-à-dire de sables qui renfermaient des débris calcaires en telle quantité que les grains de quartz primitifs ne se touchaient pas. Or, les sables auxquels ces roches sont subordonnées ne montrent jamais leurs grains séparés par du calcaire. Auraient- ils été décalcifiés ultérieurement? M. Cayeux ne le pense pas et estime plutôt que les sables transformés en grès étaient les’ seuls sables calcaires. En somme, la formation de ces roches siliceuses n’est qu'un € particulier d’un phénomène très général : la silicili- cation des calcaires. Le processus suivant lequel se fait cette silicification est d'ailleurs loin d’être élucidé. Tout d’abord, d'où vient la silice? On a cherché son origine dans les orga- nismes siliceux. Qu'il en soit ainsi dans certains cas, on ne saurait le nier; mais ici cette source de silice est- elle adéquate à à produire ? Non, répond l'effet M. Cayeux, et certes je ne lui ferai point d'objection à ce sujet. L'Eocène et l'Oligocène marins du Bassin pa- risien ont été très pauvres en organismes siliceux ; à plus forte raison doit-il en être de même pour les for- mations lagunaires ou lacustres, telles que le calcaire de Beauce, lequel, d'après certains auteurs, aurait fourni aux sables de Fontainebleau la silice nécessaire à leur transformation partielle en grès ou quartzites. Suivant M. Cayeux, la source principale, sinon unique, de la silice doit être le sable lui-même. Certes, nous trouverons là toute la silice nécessaire. Mais comment cette silice est-elle entrée en solution? En effet, il ne s'agit pas seulement d'opale, mais aussi de calcédoine et de quartz, c'està-dire de formes d'acide silicique que nous n'avons jamais réussi à mettre en solution en nous servant des dissolvants susceptibles de jouer un rôle dans la nature. Assurément, ce n'est pas là une objection irréfragable, mais il subsiste sur ce point un fort point d'interrogation, A M. Cayeux de le faire dis- paraître. Il faut qu'il nous expiique comment cette silice cristalline a pu être mise en mouvement pour aller remplacer le calcaire et former des auréoles au- tour des grains de quartz primitifs. Ce sera là, je n’en doute pas, l’objet d'un deuxième travail qui ne sera pas moins intéressant que le premier. L. PERVINQUIÈRE, . Chargé de Conférences à la Sorbonne, Vice-Président de la Société géologique de France: Dumont (J.), Directeur de la Station agronomique, Professeur de Chimie agricole à l'Ecole nationale d'Agriculture de Grignon. — La Terre arable. — 1 vol. in-12 de 295 pages, avec fiqures, de T Encyclo- pédie de l'Agriculture et des Sciences agricoles. (Prix : 3 fr.) Charles Amat, éditeur. Paris, 1905. Nous possédions Jusqu'ici un assez grand nombre de volumes consacrés chacun à une ou plusieurs des grandes questions relatives à la terre arable; mais, depuis un certain temps, il n'était paru aucun ouvrage sur l'ensemble du sujet. S'inspirant, d'une part, des études faites par lui sous la direction du regretté Dehérain, d'autre part, de ses travaux personnels, M. Dumont, professeur de Chimie agricole à l'Ecole d'Agriculture de Grignon, a voulu combler cette lacune en rédigeant le livre que nous présentons ici. L'auteur explique les diverses évolutions qu'a subies l'étude de la terre arable; l'examen de la constitution physique du sol, pratiqué depuis les temps les plus reculés, a, dès le siècle dernier, cédé la place à la déter- mination des propriétés chimiques; bientôt s'y est jointe l'étude de l'action des ferments du sol; depuis quelques années, on tend à remettre en honneur les recherches sur la formation et la constitution physique et minéralogique de la terre. Nous pensons d'ailleurs, avec M. Dumont, que tous ces facteurs interviennent simultanément et qu'il convient de n'ajouter qu'une confiance expectante aux données officielles sur la fer- tilité des sols, le problème étant, en réalité, beaucoup plus complexe qu'il n'apparait au premier abord. Sans entrer dans le détail des différentes parties de l'ouvrage de M. Dumont, signalons-en les principaux chapitres : Formation du sol; constitution physique, minéralogique et chimique; composants minéraux et organiques; propriétés physiques, chimiques et biolo- giques ; ferments du sol : humificateurs, nitrificateurs, dénitrificateurs, fixateurs d'azote; enfin, chimie du sol, comprenant les actions désagrégeantes, dissolvantes, rétrogradantes, mobilisantes et les transformations chi- miques qui sont les conséquences de ces actions. Le volume ainsi rédigé présente une bonne classification et la lecture en est intéressante. Nous ne ferons que quelques réserves aux éloges que mérite le nouvel ouvrage, connaissant assez l’auteur pour savoir qu'il ne les prendra pas en mauvaise part. La rédaction comporte çà et là quelques tournures un peu familières et l'exposé des analyses chimiques manque parfois d'explications et de détails, ce qui peut s'expliquer sans doute par la nature du public rural auquel est destiné ce livre. L'établissement des formules physiques devra être également surveillé, car on en ren- contre quelques-unes d'inexactes ou tout au moins d'insuffisamment détaillées. Pourquoi, enfin, M. Dumont, qui a dû, pour la rédaction de son ouvrage, se livrer à une œuvre bibliographique considérable, n'a-til pas cherché à en faire profiter ses lecteurs scientifiques et n'a-t-il donné que peu ou pas d'indications, tout en citant un très grand nombre de travaux originaux? Nous espérons que cette lacune sera comblée dans les prochains ouvrages dont l'auteur nous annonce l'appa- rition dans l'Encyclopédie qu'il dirige. Nous devons, mit. PR, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX somme toute, remercier M. Dumont de nous avoir présenté d'une manière agréable un ensemble de pro- blèmes fort compliqués et encore malheureusement très obscurs. A. HéBerT. Lafont (F.), Préparateur d'Entomoloqie et de Zoologie agricole à l'Ecole nationale d'Agriculture de Mont- pellier. — L’Apiculture — 1 vol. de l'Encyclopédie scientifique des Aide-Mémoire. (Prix: 2 fr. 50.) Masson et Cÿ, éditeurs. Paris, 1907! La littérature apicole vient de s'augmenter d'un nouveau volume dû à M. Lafont, répétiteur-prépara- teur d'Entomologie et de Zoologie agricole à l'Ecole nationale d'Agriculture de Montpellier. Après une in- troduction destinée à faire ressortir l'importance de l'élevage des abeilles, et donnant quelques renseigne- ments statistiques sur cette industrie, l'auteur étudie les insectes mellifères solitaires et sociaux et fournit des renseignements sommaires sur l'anatomie et la physiologie des individus qui constituent les colonies: mères, mâles et ouvrières. Les métamorphoses de l'abeille, depuis l'œuf jusqu'à l'insecte parfait, la disposition du couvain dans les rayons, dont la structure et la disposition forment l'objet d'un paragraphe spécial, l'essaimage naturel, sont exposés avec clarté et précision. L'exploitation des ruches ne peut se faire avec profit que dans les situations qui offrent à l'activité des buti- neuses des ressources suffisantes; on lira donc avec utilité le chapitre consacré à l'examen des régions favorables à l’apiculture, chapitre qui se complète par une liste des végétaux mellifères le plus souvent visités, avec l'indication des variations de la puissance mellifère d'une même plante suivant l'heure de la journée, la température, l'humidité, le sol, le climat, altitude. Au cours de leurs pérégrinations, les ouvrières récoltent des substances diverses : nectar, qui sera transformé en miel; pollen, élément azoté de l'alimentation; pro- polis, résine employée à divers usages dans l'habitation. Deux chapitres sont consacrés à la description des ruches vulgaires ou ruches à rayons fixes et des ruches à cadres mobiles, ainsi que des instruments nécessaires à la manipulation des colonies. M. Lafont a su se borner, heureusement, à un très petit nombre de modèles re- connus comme les meilleurs, et les débutants lui sauront gré de n'avoir pas cherché à innover et à compliquer un matériel simple et excellent, consacré par lPexpé- rience. La pratique de l’apiculture est étudiée avec des détails suffisants : la création du rucher, l'achat des colonies etleur transvasement, le ramassage des essaims naturels et leur mise en ruche, la conduite des ruches vulgaires et des ruches à cadres mobiles, les méthodes de l’es- saimage artificiel en forment les principales parties. Les produits de l'exploitation sont passés ensuite en revue, depuis la récolte jusqu'à la vente, en passant par l'extraction du miel par coulage ou par le mello- extracteur centrifuge, la production du miel en sec- tions, la purification de la cire et la préparation de l'hydromel. Deux chapitres, sont en outre,consacrés aux maladies des abeilles et aux ennemis qui les attaquent, ainsi qu'aux lois intéressant l’apiculteur. En résumé, le petit livre de M. Lafont est un précis fort bien fait, dans lequel les divers points qu'il est nécessaire de connaître pour se livrer avec prolit à la culture intelligente des abeilles sont traités, sinon avec de grands détails, du moins avec un réel esprit scientifique et des développements suffisants pour às- surer le succès. Ajoutons que la Société nationale d'Agriculture de France vient de récompenser l’auteur par l'attribution d'un diplôme de médaille d'argent, sur le rapport de M. Gaston Bonnier, membre de l’Institut. R. HOommELL, Professeur départemental d'Agriculture 4° Sciences médicales Trémolières (Dr F.), Ancien Interne des Hôpitaux. — L'Entéro-colite muco-membraneuse (Æ{ude cri- tique, expérimentale et clinique). — 4 vol. Ch. Bou- langé, éditeur. Paris, 1907. Cette affection est une de celles qui ont le plus éveillé la sagacité des cliniciens. Les uns ont essayé de lui cons- tituer une véritable autonomie en la décrivant comme une maladie; les autres la considéraient comme un symptôme banal, pouvant éclore sous l'influence de causes très diverses. Le travail que vient de publier M.F. Trémolières éclaire cette question, mais il la complique en faisant intervenir un facteur nouveau dans la pathogénie : l'insuffisance thyroïdienne. Le rôle des sécrétions internes prend chaque jour une place plus importante dans la Pathologie générale, et il faut savoir gré à M. Trémolières d’avoir, non seulement émis une hypothèse ingénieuse, mais apporté un faisceau de faits qui plaident fortement en faveur de sa théorie. Il est fâcheux que l'Anatomie pathologique ne puisse pas apporter de preuves décisives. Mais lentérite muco- membraneuse amène rarement ceux qu'elle frappe à l'hôpital; elle n'est jamais mortelle. Il à été impossible de rechercher l'existence des lésions du corps thyroïde, Comme pour beaucoup d'autres problèmes du même genre, il à fallu tourner la difficulté et laborder par des voies détournées. C'est à la clinique et à l'expéri- mentation que M. FE. Trémolières à dû s'adresser. Il à constaté que le corps thyroïde des sujets atteint d'entéro- colite semble souvent anormal : tantôt il est hypertro- phié; tantôt, au contraire, la palpation la plus attentive ne permet pas de percevoir l’isthme ou l’un des lobes, etilarrive même que l'organe tout entier échappe à la recherche, D'autre part, s'inspirant des travaux d'Her- toghe sur le rapport des végétations adénoïdes, de lhypertrophie amygdalienne et des affections naso- pharyngées avec les lésions du corps thyroïde, M. Tré- molières s'est efforcé de démontrer la coexistence fré- quente de ces affections avec l'entéro-colite. La relation qui unit au corps thyroïde l’entéro-colite muco-membraneuse ne ressort pas seulement des faits cliniques elle est établie par l'expérimentation. Horsley détruisit le corps thyroïde chez les singes, et il constata que les glandes mucipares de l'intestin sécrétaient si abondamment que les selles étaient constituées par de la mucine presque pure. M. Trémolières à répété sur deux lapins l'expérience d'Horsley et il à obtenu des résultats analogues. Le lapin est d'ailleurs un animal très bien choisi pour ce genre d'expérimentation, car on sait avec quelle facilité son intestin réagit sous les influences les plus diverses. Pour déterminer le syn- drome de l’entérite muco-membraneuse, il suffit par- fois de lui faire peur, ce qui établit encore mieux le rapprochement avec l'espèce humaine, où les influen- ces nerveuses jouent un rôle si prépondérant dans la pathogénie de cette affection qu'un grand nombre de cliniciens en ont fait une des variétés de la neuras- thénie à forme intestinale. M. Trémolières termine cette intéressante étude par des considérations thérapeutiques que nous aurions désiré voir plus développées. A côté des indications qui visent les fonctions intestinales et la suppression des causes diverses d'intoxication, il recommande la désin- fection intestinale par l'action des médications antisep- tiques et évacuantes, par un régime approprié et par la transformation de la flore bactérienne de lintestin. En bon clinicien qu'ilest, il montre comment on doit s'efforcer de rendre au système nerveux son équilibre normal, et il préconise l'opothérapie thyroïdienne. C'est là un point de vue original et nouveau, mais qui demande dans l'application beaucoup de prudence. D' MAURICE SPRINGER, Ancien Chef de Laboratoire de la Faculté de Médecine de Paris 730 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 12 Août 4907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Rémoundos présente ses recherches sur les courbes intégrales des équations différentielles. — M. Matha communique les résultats des observations d'intensité de la pesan- teur effectuées à File Booth-Wandel (terre de Graham) pendant l'Expédition antarctique Charcot. La valeur de g trouvée est de 982,439 cm. 20 Sciences PHYSIQUES. — M. G. Claude décrit un dispositif qui permet d'éviter les accidents d'inflamma- tion observés pendant la manipulation des bouteilles d'oxygène comprimé, lesquels proviennent de Péléva- tion de température due à la compression très rapide du gaz contenu dans le canal du détendeur. — M. P. Villard a construit une génératrice pour la télégraphie sans fil dont a courbe de tension est analogue à celle d'une bobine de Ruhmkorff et qui donne, sans réso- nance ni régime préparatoire, des décharges de rareté convenable et mécaniquement déterminée. MM. J. de Kowalski et C. Garnier ont constaté que, chez les sulfures de calcium manganésifères, l'optimum de luminescence paraît correspondre à une dilution plus grande pour lexcitation lumineuse que pour lexcita- tion cathodique. 3° SciExcEs NATURELLES. — M. H. Kronecker estime que le cœur ne bat pas automatiquement. Il à besoin d'excitants de nature chimique qui, grâce à des chan- gements périodiques de lexeitabilité (période réfrac- taire), amènent un effet discontinu. — M. Ch. Nicolle a constaté qu'au contraire de l'injection sous-cutanée, les inoculations dermique et conjonctivale de tuber- culine ne paraissent produire aucune réaction chez les lépreux. — M. J. Boussac a étudié l’'Eocène et l'Oligocène du Hampshire (Angleterre). Dans cette région, le Eattorfien est superposé directement au Ludien. — M. A. Ricco à dressé le tableau des paroxysmes du Stromboli depuis seize ans; il y a pré- pondérance notable en été et au printemps. Plus de la moitié des paroxysmes se sont produits en coïncidence avee une plus grande action attractive luni-solaïre. Séance du 49 Aoùüt 1907. M. le Secrétaire perpétuel annonce la mort de M. H. C. Vogel, Correspondant pour la Section d'Astro- homie. 49 SGrENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Esclangon à observé la comète 4907 d au grand équatorial de l'Observatoire de Bordeaux; le noyau était très brillant et apparaissait comme une étoile de grandeur 5,5 entourée d’une nébulosité intense. — MM. A. Lebeuf et P. Chofardet présentent les résultats des observa- tions faites, pendant l'éclipse totale de Soleil du 30 août 1905, à Cistierna (Espagne). 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Jean Becquerel à étudié les variations des bandes d'absorption des eris- taux de parisite dans un champ magnétique à la tem- pérature de Fair liquide; les vibrations circulaires absorbées de même sens ne sont pas toutes déplacées du même côté sous l'action d’un champ magnétique. — M. T. Levi-Civita démontre la possibilité d'un transport d'électricité sans liaisons ni forces exté- rieures. — MM. Ed. Sarasin et Th. Tommasina montrent qu'un corps quelconque radio-activé sans charge négative où un conducteur nu radio-activé avec charge négativé ne donne qu'une seule courbe de désactivation par les dispersions des deux signes; un conducteur recouvert d’une couche isolante activée avec charge négative donne, au contraire, deux courbes au commencement, une positive et une néga= tive, qui finissent presque par se rejoindre ensuite, par suite de la pénétration des rayons £ daus la couche isolante. — M. L. Kolowrat a constaté que, pour extraire toute la quantité d'émanation contenue dans un sel de radium, il faut porter celui-ci à la fusion. Au-dessous du point de fusion, la quantité dégagée est proportionnelle à la température, avec une anomalie vers 900 — 1.000°, intervalle dans lequel il y a diminu- tion du dégagement. — Me S. Curie a déterminé de nouveau le poids atomique du radium sur un échan- tillon de chlorure plus pur; la valeur trouvée est de 226,45 pour Ag — 107,93. — M. D. Zavrieffa repris les expériences sur la dissociafion du carbonate de chaux; voici les pressions de dissociation, en mm. de Hg, à diverses températures : 1.022 à 926°, 755 à 910, 626 à 8920, 500 à 8700, 342 à 8400, 230 à 815°, 67 à 7250. — M. Em. Vigouroux montre que les alliages Ni-Sn contenant 57,65 à 66,76 °/, de Sn perdent Sn sous l'action de HCI et tendent vers le corps NFSn; ils en gagnent, au contraire, sous l'effet de HAzO® et tendent vers le corps NiSn, qu'il est facile d'isoler. — M. F. Ducelliez a isolé des alhages Co-Sn à teneur en Sn inférieure à 57 °/,, par traitement à l'acide azotique, un composé Co’Sn?; ces alliages sont des mélanges de cobalt et de Co*Sn*. — M. B. Szilard a observé que certaines substances solides, insolubles dans l’eau, ont la propriété d'agir sur une solution de KI en mettant en liberté de l'iode; la plus active de ces substances est la pechblende de Joachimsthal. — M. Em. Pozzi- Escot propose une nouvelle méthode, très sensible, pour la recherche du nickel en présence du cobalt, basée sur le fait que lé molybdate de nickel est inso- luble dans une solution aqueuse renfermant un excès suffisant de molybdate alcalin, tandis que celui de cobalt y est extrèmement soluble. — M. Louis Henry à observé que l'oxyde d’éthylène biméthylé symétrique : CH°.CH.CH.CHS Ÿ fournit avec CH*MgBr le même composé alcoolique qu'aurait fourni, dans les mêmes conditions, la cétone méthyléthylique CH5.CO.CH*.CH*, son isomère; il sem- ble donc que cet oxyde s'isomérise en présence du réactif magnésien. — MM. E. Fourneau et M. Tife- neau ont préparé les a-halohydrines dissymétriques par l’action des dérivés organomagnésiens, soit sur la chloracétone, soit sur l'éther chloracétique, soit sur leurs homologues. La potasse les transforme en oxydes d'éthylène correspondants. — M. M. Mirande à cons- taté que la rhinanthine est contenue en grande abon= dance dans les Orobanches et les Phelipaea; elle est strictement localisée dans l'appareil conducteur ligneux. 30 SciENGES NATURELLES. — M. M. Leriche à déter- miné l'âge des faluns de Pourcy (Marne) d'après la faune ichtyologique qu'on y rencontre en abondance; ils doivent être rattachés à l'Yprésien. Séance du 26 Août 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. Féjer présente ses recherches sur la racine de moindre module d'une équation algébrique. — M. P. Stroobant à calculé une éphéméride de la comète 4907 d pour sa recherche sur les clichés photographiques. — MM. H. Deslandres et A. Bernard ont étudié le spectre de la comète 1907 d photographié à Meudon; le noyau et la tête présentent ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 731 le spectre ordinaire des comètes, tandis que la queue paraît avoir un spectre spécial à bandes faibles. 20 ScieNCES PHYSIQUES. — M. Foix à reconnu que le rendement lumineux des manchons à incandescence peut être accru soit en diluant l'oxyde de cérium dans l’oxyde de thorium, soit en réduisant l'épaisseur de l’oxyde de cérium. — M. B. Szilard a observé que les sels de Th et d'Ur ont la propriété de dissoudre, non seulement les hydrates de Th et d'Ur, mais encore les ‘hydrates de terres rares et de presque tous les métaux qu'on rencontre dans la thorianite et l’uraninite ; c'est à celte propriété qu'il faudrait attribuer l’origine de ces deux minéraux. — M. L. Henry, en faisant réagir C?H* MgBr sur l'oxyde de propylène, a obtenu le méthyl- propylcarbinol normal. L'oxyde de propylène se com- porte donc, au point de vue synthétique, comme l'oxyde d'éthylène; il n'est pas isomérisé par le réactif ma- gnésien. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. R. Robinson montre que le canal appendiculaire se ferme par le concours des trois agents suivants : 4° Ja musculature de la paroi forme, au niveau de l’orifice de l'appendice, un anneau épais qui joue le rôle de sphincter ; 2° la valvule de Morgagni obture la lumière du canal rétréci par la contraction de l'anneau musculaire; 3° l'appendice peut se relever et former un angle aigu avec la paroi ccale. — M. E. L. Trouessart signale la naissance d’un jeune hippopotame à la ménagerie du Muséum de Paris. Sa mère ayant refusé de le nourrir, on est par- venu à le faire allaiter par des chèvres; il est actuelle- nent âgé de onze jours. — M. Y. Delage à constaté que tous les sels principaux de l’eau de mer, employés Séparément, peuvent déterminer la parthénogénèse des œufs d'oursins; une solution pure de saccharose donne également des développements parfois fort abondants. Enfin, l’auteur est arrivé, par l'élevage des larves par- thénogénétiques, à obtenir de vrais oursins, munis de tous les organes caractéristiques : piquants, pédicel- laires, ambulacres. — M. L. Boutan a reconnu que le refroidissement momentané de la tige du caféier par un ägent comme le chlorure d'éthyle ne parait pas présehter d'inconvénients au point de vue de la vie du caféier et suffit pour tuer les larves du Xylotrechus quadrupes dans l'intérieur du bois. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 20 Juin 1907. M. L.-N.-G. Filon décrit une vouvelle méthode pour mesurer directement la double réfraction dans le verre soumis à une tension. Lorsqu'une onde lumineuse plane passe horizontalement à travers un barreau de verre rectangulaire soumis à une flexion dans le plan vertical, elle est partagée en deux composantes polarisées hori- zontalement et verticalement. La lumière de chaque composante subit, par suite de la tension, un retard additionnel proportionnel à sa distance de l'axe neutre. Aussi l'onde frontale, à l'émergence, n'est-elle plus verticale, mais elle a subi une déviation proportionnelle au moment fléchissant appliqué; les deux composantes sont donc déviées de quantités différentes. Si la lumière est alors analysée au moyen d'un réseau, les lignes du spectre formé seront déplacées, par suite du change- ment de l'angle d'incidence; en outre, par suite des déplacement différents des deux composantes, chaque ligne parait double. L'expérience montre que cet effet est facile à mesurer et fournit une méthode nou- velle pour mesurer directement l'effet de double réfrac- tion de la tension. — M. R.-J. Strutt : Sur l'origine des gaz dégagés par les sources minérales. L'auteur a constaté, par des analyses précises, qu'il y à une grande ressemblance entre lés gaz inertes (Az, Ar, He, Ne) des sources minérales Comme celles de Bath et les gaz dégagés par le chauffage des roches ignées (granite, syénite). Les roches donnent, en outre, H, CO, CO et CH®; les deux premiers sont probablement des produits de réactions secondaires, mais les deux derniers se retrouvent dans les sources. L'auteur pense donc que l'on doit considérer la désintégration et la solution partielle des roches ordinaires par l’eau à haute tempé- rature comme l’origine des produits gazeux et solides des sources minérales. Séance du 27 Juin 1907. M. G. T. Beilby présente ses recherches sur l'état trempé et l'état doux chez les métaux ductiles. Elles ont été faites, en particulier, sur l'or, l'argent et le cuivre. Il n’a pas été possible de produire un spécimen homogène de métal entièrement à l'état trempé, car le traitement mécanique, même sévère, des échantillons les plus purs produit toujours une structure mixte pré- sentant les phases dure et douce. En ce qui concerne le traitement calorifique des métaux à l’état de trempe, les intervalles de température dans lesquels se produi- sent : 4° la recristallisation; 2° la perte de stabilité mécanique; 3° le développement d'une f.6.m. ther- mique entre des fils à l'état de trempe et à l'état doux; 4° la restauration complète de l’élasticité, sont si bien marqués et ils coincident si parfaitement les uns avec les autres, qu'il n'y à aucun doute quils n’indiquent un vrai changement d'état dans le métal trempé quand une certaine température est atleinte. La nature de ce changement, observée au microscope, consiste dans un développement de la condition cristallisée aux dépens de la condition non cristallisée. La trempe des métaux par refroidissement à partir d'une haute tem- pérature est due, dans certains cas, au développement de déformations de contraction. Ces déformations, si elles sont assez grandes, produisent le déplacement des molécules de leur orientation cristalline, formant une structure rigide. Ces observations expliquent pour- quoi les métaux ductiles, comme Ag et Cu, ne sont pas trempés par refroidissement : c'est que la recristallisa-* tion peut se produire jusqu'à 2209 pour l'or, et qué toute déformation due à la contraction disparait immé- diatement par suite de cette recristallisation. — Lord Rayleigh présente une théorie dynamique des réseaux, qui embrasse le cas où l'intervalle des lignes du réseau est de l’ordre de la longueur d'onde de la lumière incidente. — M. P. D. Innes présente ses recherches sur la vilesse des particules cathodiques émises par divers mélaux sous l'influence des rayons Roentgen. Voici les valeurs trouvées pour la vitesse des électrons émis par Pb,Ag,Zn,Pt et Au sous l'influence des rayons X : RAYONS DOUX RAYONS DURS PIOMDE C7 E00 4,7 AUS 6,3 à 8,3 X 10° Argent. . : U6:DId 2508 6,1 à 8,0 X 10° Zn. 2. (600 6200? Platines: tu ve CGArA TES SCT 6,4 à 8,1 X 10° Or... . LG à 25 X A0 2 à 8,4 K 10° La vitesse des rayons les plus rapides émis par chaque métal est complètement indépendante de lintensité des rayons primaires, mais elle augmente avec la dureté du tube. La vitesse décroit avec le poids ato- mique. Une vitesse minimum est nécessaire pour per- mettre à l’électron d'émerger, et cette vitesse minimum est à peu près la même chez les différents métaux. Le nombre d'électrons émis décroît avec l'intensité des rayons, avec le poids atomique et la densité, ef avec l'augmentation de la dureté. La théorie la plus pro- bable du phénomène est celle de la désintégration ato- mique. — Sir J. Dewar : Sur l'emploi du radiomètre pour l'observation des basses pressions dans les gaz. L'auteur a constaté que, si le gaz résiduel d'un radio- mètre de Crookes est de l'hélium, un condenseur en “harbon adapté à l'appareil est incapable, même lors- qu'il est plongé dans l'hydrogène liquide, de produire par absorption une diminution de pression suffisante pour que les aïilettes cessent de.tourner lorsqu'on con- centre sur leur face noircie le rayonnement d'un are électrique. Au contraire, si le gaz du radiomètre est de l'hydrogène, tout mouvement des ailettes est suspendu 132 par les opérations précédentes. La méthode peut s'appliquer à la recherche des produits gazeux prove- nant des transformations des matières radio-actives. — M. A. Campbell : Sur un étalon d'inductance mutuelle, L'auteur à construit un étalon d'inductance mutuelle d'une nature telle que sa valeur peut être calculée d’une facon précise d'après les dimensions, et assez grand pour donner une bonne sensitivité dans l'emploi actuel. Une valeur assez élevée (p. ex. 0,01 henry) peut être obtenue en prenant pour un des circuits associés une bobine à plusieurs couches. Les inconvénients d’une telle bobine peuvent être sur- montés de la facon suivante : Le circuit primaire est une paire de bobines à une seule couche enroulées sur un seul cylindre de marbre; leurs dimensions peuvent être déterminées d’une facon précise. Le circuit secon- daire est une bobine à plusieurs couches, co-axiale avec (et située au milieu entre) les deux bobines pri- maires, d'un rayon tel que l'inductance mutuelle est un maximum pour le changement de rayon. Tout autour de la circonférence principale de la bobine secondaire, le champ magnétique dû au courant dans les bobines primaires est nul, et presque nul sur la section de lenroulement, permettant ainsi un calcul précis. Le principe est applicable aux autres problèmes concer- nant Finductance mutuelle. SOCIÈTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE SYDNEY du 42 Juin 1907. M. H.-G. Smith résume les récents travaux qui ont été faits sur l’eucalyptus et ses constituants. — MM. W. A. Hargreaves et W.-T. Rowe décrivent un procédé de recherche du mercure dans les explosifs. Le chlorure mercurique est sublimé à basse tempéra- ture et reçu dans un appareil à absorption où il est précipité sur une cathode d’or par l'électrolyse. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de Mai et de Juin 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Millosevich transmet ses observations de la nouvelle comète 1907 b Mellish, exécutées à l’équatorial de 37 centimètres de l'Observatoire du Collège Romain. — M. L. Bianchi annonce qu'il a complété sa théorie relative aux trans- formations des surfaces applicables sur les quadriques et il en donne les théorèmes principaux. — M. L. Ber- zolari s'occupe d'une construction géométrique très simple de la configuration de Kummer, dont il montre le rôle dans la théorie des cubiques gauches. — M. R. Marcolongo s occupe de la théorie des équations inté- grales et de ses applications à la Physique mathéma- tique. — M. G. Picciati : Sur l'équation de la propa- sation de la chaleur dans un fil. — M. E. Almansi transmet la démonstration d’un théorème sur les défor- mations élastiques des solides isotropes. — M. V. Reina présente les déterminations astronomiques de latitude et d'azimut, accomplies par lui à l'ile de Ponza et au Mont Circeo en 1905. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. M. Cantone à fait des recherches sur les modifications que subit le spectre d'émission des gaz renfermés dans les tubes de Geissler, lorsqu'on porte ces derniers à une très basse tempé- rature; les gaz qui ont servi aux expériences étaient l'oxygène et l'azote. — M. G. Niccolini présente une étude sur la'variation de résistance électrique spéci- fique de quelques métaux purs et de quelques alliages avec la température; dans deux Notes, l’auteur décrit Séance ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES la méthode suivie dans ses recherches, et les résultats donnés par les expériences sur l’argent, l'aluminium, le fer, le magnésium, le nickel, l'or, le plomb, le pla- tine et le cuivre. — M. P. Doglio s'occupe de la durée de l'émission cathodique des tubes de Crookes, en remarquant qu'il s’agit d’un phénomène complexe, intimement lié avec les conditions du circuit extérieur. Dans les expériences de M. Doglio, la durée de l'émis- sion a été de 3 dix-millièmes de seconde environ. — — M.R. Nasini critique une Note de M. Franz Wald sur la déduction apparemment aprioristique de la loi des équivalents. — MM. G. Ciamician et P. Silber transmettentleur dixièmeNote surles actions chimiques de la lumière, où ils s'occupent de la décomposition, par l'effet de la lumière, des principaux composés du type acétonique. — MM. G. Koerner et Contardi ont fait l'étude de quatre dérivés binitrés de l’orthobibromo- benzène. — M. A. Mazzucchelli cherche à éclaircir quelques points encore obscurs que présente l’histoire chimique du fluorure d'aluminium. — M. V. Castel- lani donne de nouveaux détails sur ses recherches relatives à la transformation des pyrrols en dérivés du pyrazol.— M. G. Ortoleva décrit un nouveau composé que l’on obtient par l’action de l’iode sur la benzène- phénylhydrazone en solution pyridique. — MM. L. Men- dola et U. Fabris : Actions catalytiques des métaux à l'état de division sur les composés azotés. — M. G. Mas- carelli a entrepris l'étude de quelques propriétés phy- siques et chimiques du cyclohexane ou hexahydro- benzène, et s’en sert comme solvant cryoscopique. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. F. Millosevich décrit des échantillons d'hématite volcanique rencontrée dans les environs de Padria en Sardaigne; ce minéral se présente en lamelles avec des particularités intéres- santes de groupementet de germination. —M. V. Monti décrit les relations qui paraissent exister entre l’acti- vité sismique de la Suisse et celle de l'Italie. — M. A. Negri a poursuivi ses belles recherches sur la mor- phologie et sur le cycle évolutif du parasite de la rage; il est arrivé à la conclusion que les corps endocellu- laires spécifiques de l'infection rabique représentent des formes différentes d'un protozoaire qui laisse entre- voir un cycle évolutif complexe, dont la dernière phase consiste dans la formation de spores, d'une façon ana- logue à ce qui se vérifie pour d'autres protozoaires. — M. A. Ghigi fait, depuis quelques années, des obser- vations suivies sur l'hybridation chez les oiseaux; il conclut que la fécondité et la stérilité des hybrides donnent un excellent moyen de distinguer entre elles les vraies espèces. La naissance de métis féconds pro- venant du croisement de deux espèces systématiques indique que ces deux espèces sont tout au plus des variétés de la même espèce. — M. L. Petri a étudié les altérations produites par le phylloxera sur les racines de la vigne, et la résistance moindre qui résulte de ces lésions. — Dans une autre Note, M. Petri donne une nouvelle explication sur la manière dont le bacille que l’on trouve toujours avec l'œuf déposé par la mouche oléaire est transmis de la mère à la larve. — M. M. Brizi a fait des recherches microscopiques sur les altérations du maïs, dont il signale les caractéris- tiques principales; résultat très intéressant pour la prévention de la pellagre, l'examen microscopique donne un moyen sûr et facile pour déceler les avaries, mème à leur commencement, dans le maïs, qui se dérobent aux méthodes de recherche en usage jusqu'à ce moment. ErNEsrO Mancini. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Br — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. TT ve Mia | | 18° ANNÉE N° 18 30 SEPTEMBRE 1907 Revue générale des Scien pures el appliquées DirEcTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Météorologie Une « grotte soufflante » au Puy de Dôme, — A la réunion de la Société helvétique des Sciences nalurelles, qui s'est tenue à Fribourg les 29, 30 et 34 juillet 1907, M. B. Brunhes, directeur de l'Observa- vatoire du Puy de Dôme, a communiqué les résultats d'observations qu'il a poursuivies depuis deux ans, avec le concours de M. David, sur une « grotte souf- flante » au Puy de Dôme. Cette grotte existe, un peu en contrebas du sommet, sur un contrefort de la mon- tagne qui s'avance du côté sud. Elle ressemble aux « puits qui soufflent » signalés en Suisse, en ce que l'ouverture est le siège d'un courant d'air dont le sens peut varier. Mais, ici, le sens du courant d'air ne dépend nullement de la pression barométrique extérieure: il peut arriver que l'air souffle du dedans au dehors, même par des pressions extérieures très élevées, et, au contraire, que l'air souffle du dehors au dedans par des pressions extérieures très faibles. Quelquefois le cou- rant d'air de dedans au dehors est si net qu'il est directement perceptible. Mais, en général, il n'a pu être mis en évidence que par des procédés indirects, Ces procédés sont au nombre de deux. D'abord l'état d'ionisation de l'air, au voisinage de l'orifice de la grotte, est plus fort quand l'air souffle de l'intérieur, car on à affaire, en ce cas, à de l’air de cavernes forte- ment ionisé. Ensuite et surtout, /a varration diurne de la température intérieure de la grotte est un réactif très précis du sens du courant d'air. Si la variation diurne est absolument nulle à un thermomètre enre- gistreur placé à quelques mètres à peine de l'orifice d'entrée, ainsi que cela se produit durant des mois entiers, c'est qu'il souffle sur le thermomètre un air qui vient de l'intérieur, où il a pris une température uniforme, Si, au contraire, ce thermomètre indique une variation diurne plus ou moins accusée, c’est qu'il est soumis à l’action d’un courant d'air qui vient du dehors, et qui participe aux changements de tempéra- ture de l'extérieur. Or, l'on à observé, depuis le {1° janvier 1906, que, durant les mois d'hiver, la variation diurne de la tem- pérature à six mètres au-dessous de l'orifice d'entrée est rigoureusement nulle: cette température se main- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. tient à 41, lors mème que la température extérieure a atteint —16°. L'été, au contraire, on a une forte variation diurne de la température extérieure. Dans les saisons de transition, printemps et automne, le régime de variation diurne s'établit toutes les fois qu'on a une période de deux ou trois journées chaudes ; au contraire, quand il fait froid, la température intérieure reprend sa valeur rigoureusement constante. Il serait intéressant de poursuivre le déblaiement de cette grotte, sur laquelle des mesures purement phy- siques et météorologiques ont apporté déjà un rensei- gnement précieux: c'est qu'elle «tire» à la facon d'une cheminée communiquant avec l'extérieur par plusieurs orifices situés à des niveaux différents, et non à la façon d'une cavité à ouverture unique, subis- sant l'influence des variations barométriques. 2. — Art de l'Ingénieur Les derniers perfectionnements de la tor- pille automobile. — La torpille automobile Whi- tehead est un projectile d’un genre spécial, sorte de sous-marin automatique, qu porte à la fois la charge explosive destinée à éclater au choc d'un navire ennemi, la machine à air comprimé nécessaire à la propulsion, et les mécanismes (régulateur d'immersion et gyroscope) qui assurent la rectitude de la trajectoire, tant dans le plan horizontal que dans le plan vertical. Inventée en 1873, elle a été, depuis lors, l’objet de nom- breux perfectionnements, dontle tableau ci-dessous fait ressortir l'importance : An MODÈLE 1880 MODÈLE 1906 Calibre . RS ere 356mm 450mm Poids de la charge explo- sive (fulmi-coton). . . 30k 110K Portée efficace 600m 2,000 Vitesse moyenne sur les 400 premiers mètres de parcours . SR OU AO Vitesse moyenne sur 2.000 mètres de parcours . . . » Poids total 220k PTS 4.000 francs 20 nœuds 36 nœuds t/, 26 nœuds ‘/, 550k 12.00 francs. Le but de la torpille automobile étant la destruction 18 134 des coques ennemies, la première condition pour pro- duire un effet notable est d'avoir une charge impor- tante. Trente kilogs suffisaient il y a vingt-cinq ans, contre des carènes formées de simples tôles sans com- partimentage ni protection d'aucune sorte; mais l'introduction de ce nouvel engin a naturellement amené une évolution dans l'art des constructions navales : division de la coque sous-marine en d'innom- brables cellules, pour localiser les effets de l'explosion ; renforcement des tôles ; addition mème, sur les der- niers çuirassés construits, d'une véritable cuirasse intérieure destinée à protéger les organes vitaux. Aussi les 110 kilogs de la charge du modèle 1906 peuvent-ils être considérés comme à peine suffisants pour produire, sur les grands navires récents, des avaries capables de les mettre momentanément hors de combat. Il y a déjà lieu, pour correspondre à l’aug- mentation du tonnage et. à l'amélioration de la pro- tection réalisées sur les cuirassés actuellement en chantiers, d'étudier à nouveau un accroissement de la charge explosive ; on doit dès maintenant poser comme chiffre à atteindre celui de 150 kilogs. Ce progrès ne peut être obtenu que par un nouvel accroissement de calibre de la torpille, qui a déjà passé de 356 à 450 millimètres pour la même raison : car, dans une torpille automobile comme dans un navire quelconque, une qualité ne se développe qu'aux dépens des autres, et, si la charge prend plus de poids et de place, il faut, pour garder la même vitesse et la même portée, augmenter le poids et la place réservés à la machinerie. Le poids total de l’engin en sera augmenté ; il sera moins facilement maniable et coù- tera plus cher, mais ce sont là des considérations secondaires, relativement à l'importance du but qu'on se propose. Cet accroissement du calibre n’est, du reste, pas seu- lement soubaitable au point de vue de la puissance offensive de la torpille ; il l’est encore pour l'obtention d'autres perfectionnements non moins nécessaires. La vitesse de la torpille, sur les 400 premiers mètres de son parcours, a passé de 20 nœuds à 36 nœuds et demi {c’est-à-dire de 10 à 4S mètres par seconde). C'est un gain très important et la vitesse de 365 est consi- dérable par rapport à celles que peuvent atteindre les navires (cuirassés et grands croiseurs) auxquels les torpilles sont destinées. Mais elle est infime vis-à-vis de celle des projectiles aériens, pour lesquels on arrive maintenant à 1.000 mètres de vitesse initiale. Aussi doit-on, dans le lancement des torpilles, faire une cor- rection de la visée, en tenant compte de la vitesse du but et de la direction dans laquelle il marche. Cette cor- rection est même très grande si le but marche vite, et il faut pour la faire que l’on apprécie ses éléments avec assez d'exactitude. Or, la torpille, étant — mème celle des derniers modèles — une arme à courte portée, nest guère lancée que de nuit par de petits bâtiments rapides (les torpilleurs) ou de jour par les sous-marins. Les uns comme les autres sont dans des conditions assez défec- tueuses pour apprécier avec justesse la vitesse et la route de leur ennemi. Les éléments de la visée ne leur sont donc qu'imparfaitement connus, et il en résulte une incertitude du tir, d'autant plus grande que la vitesse de la torpille est plus faible. 11 y a donc le plus grand intérêt, pour augmenter les chances de toucher le but, à accroître cette vitesse dans la mesure du possible. Cest à quoi l’on s'est efforcé depuis l'invention de l'engin, et c'est ce qu'on doit rechercher encore. ; Le principe de la propulsion est resté le même depuis le premier modèle : un réservoir d'air com- primé à 75 kilogs d'abord, puis à 100 et enfin à 150 kilogs par centimètre carré, alimente, par l'inter- médiaire d'un régulateur de pression, un moteur Brotherhood à trois cylindres calés à 1202; dans lequel l'air est introduit à 20 kilogs ; le moteur fait tourner deux hélices à pas contraires. L CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Cette machine a été perfectionnée dans tous ses détails à tel point qu'on ne peut plus, actuellement, espérer en … accroître le rendement. C'est un chef-d'œuvre de mécani- que; mais il semble bien que lé principe du moteur Brotherhood a donné tout ce qu’on en pouvait attendre, et que, pour augmenter encore la vitesse des torpilles, il faille recourir à un autre principe. La solution paraît devoir se trouver dans l'adaptation … aux torpilles de la turbine, qui donne de si beaux » résultats sur les navires. C'est de ce côté qu'ont été dirigées les dernières recherches. MM. Bliss et Leavitt, deux inventeurs américains, en ont été les promoteurs. Ils ont fait adopter par la marine des Etats-Unis une torpille de 533 millimètres de diamètre, qui porte une charge explosive de près de 150 kilogs, et à laquelle la turbine à air comprimé donne une vitesse de 38 nœuds, que des perfectionnements tendant à améliorer l'utili- sation de la puissance permettront probablement de porter à 40 nœuds et peut-être au delà. C'est certaine- ment la voie de l'avenir, parce que les progrès y sont possibles et qu'on ne peut pour l'instant leur fixer de limite. 1 Un autre perfectionnement très important de la tor- pille Bliss-Leavitt — perfectionnement réalisé à peu près en mème temps par l'usine Whitehead — con- siste dans le maintien de la vitesse maxima sur toute la longueur du parcours, que permet l'approvisionne- ment d'air comprimé. Cette amélioration est particu- lièrement utile pourles torpilles qui servent à la défense des côtes ou à l'armement des grands bâtiments, et qui ne peuvent être lancées que de loin. La diminution de la vitesse étant due au refroidissement causé par la dé- tente de l'air dans le réservoir, refoidissement qui produit une baisse de pression à la machine, il suflit, pour y remédier, de faire passer l'air, au sortir du réser- voir, à travers la flamme d'une lampe à essence (du genre des lampes de soudeurs) automatiquement allu- mée par une capsule au moment de la mise en marche. Bien entendu, l'application de ce principe n'a pas été sans de très grandes difficultés; mais le résultat est maintenant acquis, et les torpilles que l’on construira désormais pourront être munies de ce nouveau système, grâce auquel elles auront encore, à la limite de leur portée, une précision suffisante. K D'autres recherches ont été entreprises dans des voies différentes : on peut citer, parexemple, latorpille Howell, dont le moteur est simplement constitué par un lourd volant mis en mouvement au moment où on lance la torpille; mais ce principe ne permet pas d'atteindre une portée suffisante. On a essayé aussi de diriger de loin la torpille automobile par le moyen d’un moteur électrique, soit en reliant la torpille à la terre par des fils conducteurs, soit en employant les ondes hertzien- nes. Ce dernier procédé pourra peut-être ètre employé plus tard, lorsqu'on aura le moyen de syntoniser com- plètement les ondes et de transmettre des quantités d'énergie suffisantes. Pour le moment, et pour long temps encore sans doute, ce n’est qu'une matière d’études. , $ 3. — Physique Un photomètre photo-éleetrique. — Un photo- mètre nouveau, basé sur des effets photo-électriques, vient d'être indiqué par MM. Elster et Geitel, qui, dès 1892, s'étaient servi, pour les travaux de photo- métrie, des effets électriques exercés par la lumière sur des boules en étain récemment amalgamées. Dans l'appareil décrit dans la présente Note, ces boules sont remplacées par des couches de métal alcalin disposées dans le vide; l'électroscope employé précédemment a fait place à un galvanomètre. Le dispositif ainsi réa= lisé est extrêmement pratique; les observations se réduisent, en effet, aux lectures de l'échelle d'une lunette. Cet appareil a été employé avec succès pour déter- miner le rayonnement du Soleil pendant l’éclipse du | 30 août 4905. Nous empruntons la description suivante, 1 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 1 Ce O8 à un Mémoire de M. Harms, publié dans un récent numéro d'un périodique de physique allemand t. Le photomètre proprement dit est représenté par la figure 1 en section longitudinale. La partie principale de cet appareil est une pile Z, contenant une couche R de rubidium hautement sensible, placée dans un vide avancé à l'hydrogène, avec une électrode annulaire Pt en platine. Gette pile est renfermée dans une boîte en métal B, étanche à la lumière; les connexions exté- rieures des électrodes sont formées par des vis À, h., isolées à l’ambre. La lumière tombe à travers un dia- FBCAIENPAST del Fig. 1. — Section longitudinale du photomètre photo-élec- trique. — Z, pile; R, couche de rubidium; Pt, électrode de platine: B, boite étanche: h,, h., vis; J, diaphragme iris: G, tube: S, écran: T, turbine envoyant de l'air par les canaux RR: D, support: A, axe vertical: H, axe hori- zontal; C, pointage; N, niveau, phragme iris J, dans le tube G, sur une plaque en verre violet, dépolie d'un côté, La lumière diffuse émise par cette dernière produit l'effet photo-électrique qu'il s'agit de mesurer. Comme la sensibilité à la lumière est modifiée dans une mesure notable par toute variation de température, les effets calorifiques perturbateurs doivent être écartés de la pile. Ce résultat est obtenu, d’abord, grâce au verre violet, qui absorbe tous les rayons d’une longueur d'onde supérieure à 500 pu, puis au moyen de l’écranS, PE ES US OA ! Physikalische Zeitschrift, n° 17, 1906. qui élimine tout rayonnement direct, et enfin par le poli brillant des parois extérieures du photomètre ou par une couche de vernis blanc recouvrant ces der- nières. Dans le cas d’une grande intensité du rayonnement solaire, ces mesures de précaution seront supplémen- tées par un courant d'air permanent, aspiré à travers la boîte contenant la pile, au moyen d'une puissante turbine T, actionnée par un mouvement d'horlogerie. Les canaux RR, à travers lesquels l'air est admis, sont enroulés en hémicycles; ils sont noircis à l'intérieur de façon à éloigner toute lumière étrangère. La tem- pérature de la pile photométrique peut être, de cette manière, maintenue constante à quelques degrés près, pendant plusieurs heures consécutives, ce qui évite toute faute appréciable due au coefficient de tempéra- ture de la sensibilité lumineuse. Afin de contrôler ce fait, on peut lire la température du compartiment intérieur B à tout moment voulu, sur un thermomètre accessible de l'extérieur. L'ensemble de l'instrument est monté sur la plaque D, supportée par des vis de réglage, de façon à pouvoir tourner autour d'un axe vertical À et d'un axe horizontal H (dans ce dernier cas, au moyen d'une vis micrométrique). Un petit dispositif de pointage € sert à diriger l'appareil vers le Soleil. Si l'image de ce der- nier, projetée par la ligne antérieure de ce dispositif, coïncide avec les fils croisés situés dans le plan focal, Fig. 2. — Disposition du circuit électrique du photomètre. æ Dis} Cir T 1 2 — Rb, électrode du rubidium; Pt, électrode de platine ; B, piles; K, commutateur; G, galvanomèlre. le photomètre pointera vers le Soleil. Le niveau N étant ajusté, une échelle attachée à 4, et glissant le long d'un vernier, indique l'angle formé entre l'axe du photomètre et l'horizon, et par là l'altitude du Soleil, à 2 degrés près. Une calotte étanche à la lumière permet de fermer entièrement le tube G; le galvano- mètre ne donne alors aucune déviation appréciable, ce qui démontre l'absence de toute lumière étrangère et de tous défauts d'isolement. La disposition du circuitest représentée par la figure 2. D est une batterie de six piles sèches, dont le pôle positif est relié à l'anneau de platine et au pôle néga- tif, à travers le commutateur K, le galvanomètre G et l’'enduit Rb de la pile. Les expériences préliminaires avaient démontré l'al- lure proportionnelle des élongations du galvanomètre et des intensités lumineuses. Les auteurs s'en étaient convaincu au moyen de la lumière du Soleil à midi (c'est alors que l'altitude reste constante pendant assez longtemps), en variant l'ouverture du diaphragme- iris, ainsi qu'à l’aide d’une lampe à arc dont on modi- fiait la distance. Comme les élongations du galvano- mètre ne variaient que d'environ 2 °/, par suite d’une variation de 5 °/, du potentiel de la batterie, les modi- fications de la force électromotrice dues aux variations de température ne pouvaient exercer aucune influence appréciable, La relation entre l'altitude du Soleil et son rayonne- ment s'est trouvée être exprimée par la formule : 1 S— Sops6, où S, est la constante solaire (en unités arbitraires), c'est-à-dire l'intensité lumineuse à l’extrème limite de l'atmosphère, 0 l'altitude du soleil, et p le coefticient de transparence de l'air (d’une valeur moyenne de 0,72). CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Les courbes des intensités lumineuses du rayonne- ment solaire, enregistrées pendant l'éclipse, font voir que cette intensité tombe à zéro dès qu'on atteint la totalité. La lumière de la couronne est donc incapable de produire aucun effet photo-électrique appréciable dans le cas du dispositif en question. En supposant que le rayonnement du Soleil, pendant l'éclipse, soit proportionnel à la portion visible de la surface de l'astre, on obtiendrait la courbe en poin- tillé de la figure 3. Les désaccords, on le voit, devien- nent tout particulièrement marqués à mesure que l'on approche de la totalité, c'est-à-dire lorsque le rayonne- ment ne part que des bords du Soleil; les valeurs obser- vées sont alors toujours trop petites. Ce phénomène pourrait s'expliquer par un accroissement de l’absorp- tion atmosphérique, dû par exemple à la précipitation de gouttelettes de brouillard produites par le refroidis- sement dont s'accompagne l’arrivée de l'obscurité. L'hypothèse d'après laquelle les portions périphériques lumineuses Inlens. 0 10 20 30 #0 50 60 70 80 temps en minutes Fig. 3 — Courbe des indications du photomètre pendant une éclipse solaire. du Soleil rayonneraient avec une intensité moindre semble cependant fournir une explication plus plau- sible de ce phénomène, d'autant plus qu'elle vient d'être confirmée dans le cas des rayons ultraviolets . Cet appareil est construit par MM. Guenther et Teget- meyer, à Brunswick. $ 4. — Electricité industrielle Emplois nouveaux du tantale — Le lantale, qui a servi à élablir une des premières lampes à incan- descence à filaments métalliques, paraît appelé à rece- voir de nouvelles applications industrielles d’une grande importance. On a reconnu, en effet, qu'il détient le record de la dureté, raie le verre et le quartz, et convient admirablement comme abrasif et matière à polir. I est plus lourd que le plomb, sa densité étant de 12,79. 11 est de couleur blanche, et de structure cristalline. Les essais qui font entrevoir de brillantes applica- tions de ce métal à l'industrie des abrasifs ont été faits par la maison Siemens et Halske, de Berlin, et sont relatés comme suit dans un Mémoire de M. James Swin- burne présenté au British Institute of Electrical Physikalische Zeitschrift, t. VI, p. 131. Engineers. En même temps que l'expérience, nous reproduisons ci-après les observations de M. James Swinburne : « Le tantale est si dur que, dans une expérience faite pour attaquer le tantale avec un foret armé d'un dia- mant, et mû à la vitesse de 5.000 tours par minute, sans aucun arrêt pendant trois jours et trois nuits, le métal n'avait perdu qu'un quart de millimètre d’épais- seur. « On a beaucoup cité cette expérience, mais sans tou tefois faire connaître l'usure du diamant utilisé, qui, peut-être, avait perdu ses propriétés abrasives durant les premières minutes de l'expérience. » D'autres caractéristiques intéressantes du tantale sont données par le Technical Year Book (p. 89), dont nous extrayons et reproduisons ci-dessous les plus intéressantes: Le point de fusion est situé entre 2.250° et 2 300° (on sait que des points de fusion si élevés sont de déter- mination difficile). La résistance croît avec la température, ce qui est un élément intéressant pour ses applications élec- triques. Aux températures ordinaires, un fil d'un milli- mètre carré de section, et d'un mètre de longueur, a une résistance de 0,165 ohm. A la température de l'incandescence, elle est de 0,850 ohm. La résistance de rupture est très élevée : à froid, 93 kilogrammes par millimètre carré, tandis que l'acier de bonne qualité, d'après Kohlrausch, offre une résistance de 70 à 80 kilogrammes par millimètre carré. A chaud, la résistance de rupture s'abaisse beau- coup. Le métal devient doux comme l’osmium, et il casse aisément après deux ou trois heures de fonc- tionnement. Le filament des lampes au tantale a un diamètre de 0 millim. 05 à 0 millim. 035. Avec le premier diamètre, la construction d'une lampe de 25 bougies pour 110 volts exige une longueur de filament de 650 milli- mètres ; le poids en est de 0,022 gr., de sorte que le kilo- gramme de tantale permet de fabriquer 45.000 lampes $ 5. — Zoologie Les Jardins zoologiques à l'étranger. — M. G. Loisel, chargé par le Ministre de l'Instruction publique d'une Mission à l'effet d'étudier les Jardins zoologiques de l'étranger, au point de vue de leur orga- nisation et de leurs installations, vient de publier un premier Rapport ‘ donnant les résultats de ses voyages en Angleterre, Irlande, Belgique et Pays-Bas; celui-ci sera complété plus tard par une étude analogue sur les établissements allemands et américains. Ce Rapport, très détaillé, illustré de belles photographies, est Inté- ressant à bien des points de vue; M. Loisel ne.compare pas ce qu'il a vu à notre Jardin des Plantes ou au Jar- din d'Acclimatation de Paris, mais les comparaisons viennent invinciblement à l'esprit du lecteur, et, sans parti pris de dénigrement, il est permis de trouver qu'elles ne tournent pas à notre avantage. Tous les Jardins zoologiques des pays sus-mentionnés, à l'excep- tion de celui de Manchester qui est une propriété par- ticulière, ont été créés par des Sociétés auxquelles ils appartiennent encore aujourd'hui; par exemple, le Jar- din de Londres, fondé en 1826 par la Zoological Society, comptant actuellement 3.702 membres actifs, qui, non contente d'entretenir ce magnifique parc, publie des | | PPT he recueils estimés, Proceedings et Transactions, etle Z00- - logical Record, bibliographie universellement connue dés zoologistes. Les ressources des Sociétés se com= posent : des cotisations fixes des membres, d'abonñe- LASER C5 LS Re SU {Rapport sur une Mission scientifique dans les jardins et établissements zoologiques publies et privés du Royaume- Uni, de la Belgique et des Pays-Bas (Nouvelles Archives des Missions scientifiques, t. XIV, 1907). bu. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 1 (ee) 1 ments annuels, d'entrées payantes aux ‘portes, de la vente des animaux vivants ou morts, de lait, d'œufs, de guides et de cartes postales, de la location des res- taurants et salles de fêtes, et enfin de dons; les recettes totales montent à des sommes considérables, plus d’un million et demi de francs pour Londres, 900.000 francs pour Anvers. Les Jardins sont administrés par un Direc- teur ou Surintendant, qui a sous ses ordres un person- nel plus ou moins nombreux, scientifique etsubalterne. Les Jardins Zoologiques de Londres, de Rotterdam, de La Haye et d'Amsterdam sont les seuls qui possèdent des aquariums; ceux de Sydenham (Crystal Palace) et de Brighton sont des établissements purement com- merciaux, Dans le Royaume-Uni, il y a aussi de nom- breux parcs, appartenant à de grands propriétaires, où l’on coaserve des animaux sauvages; les uns sont des réserves pour des espèces en voie d'extinction dans leur pays : Bœufs sauvages (Aurochs) dans le parc de Chillingham appartenant au comte de Tankerville, et dans celui de Cadzow (Ecosse) appartenant au duc d'Hamilton; Cerfs élaphes (forèts de lord Ardillann et de lord Kenmare en Irlande). Les autres ont surtout pour but d'acclimater des animaux étrangers à l’An- gleterre, comme à Woburn-Abbey, propriété du duc de Bedford, où l’on voit des Lamas, des Zèbres, des Mouflons, Tapirs, Girafes, Chevaux de Przewalski, Onagres, Hémiones, etc., ou à Tring-Park, propriété de sir Walter Rothschild, qui renferme également un Musée zoologique important et une riche bibliothèque. Enfin, M. Loisel à visité également quelques établis- sements qui servent plus spécialement à l'étude expé- rimentale de questions de Biologie générale ou appli- quée : telssontles élevages du Professeur Cossar Ewart, de l'Université d'Edimbourg, à Pennycuick et à Dud- dington; ceux du Professeur Bateson, de l'Université de Cambridge, à Grantchester ; les cultures du Profes- seur De Vries, de l'Université d'Amsterdam. Ces maîtres n'ont pas hésité à débuter dans cette voie expérimen- tale avec leurs ressources personnelles (inutile de rap- peler qu'à l'étranger les traitements des professeurs d'Université n'ont rien de commun, heureusement pour eux, avec ceux qui sont alloués en France aux professeurs des Universités de province); et ils ont été aidés ensuite par des subventions particulières ou par des Sociétés scientifiques ; aussi ont-ils pu entreprendre des recherches coûteuses, des expériences colossales, qui ont donné des résultats extrèmement intéressants; la théorie des mutations de De Vries, les belles recherches de Bateson de l'Hérédité et la Variation, les travaux d'Ewart sur la télégonie sont assez connus pour qu'il soit inutile d’insister. M. Loisel donne de très bons renseignements sur les installations, souvent luxueuses, et les méthodes d’éle- vage, en général très perfectionnées. La maison des Singes de Manchester (Bellevue Gardens) et de Rotter- dam, la maison des Lions de Dublin, l'aquarium d’eau douce ,et d’eau de mer d'Amsterdam, l'Insectarium d'Amsterdam, sont particulièrement remarquables; comme on peut s'y attendre, on à pu observer, dans de telles conditions, la reproduction d'animaux qui sont habituellement stériles dans les ménageries moins bien tenues; les Lions reproduisent facilement à Bris- tol et à Dublin, de même que le Lycaon pictus du Cap; les Hippopotames ? à Anvers et à Amsterdam, etc. Il est curieux de constater combien l'élevage à l'air libre, même pendant une partie de l'hiver, convient souvent mieux, à des animaux même tropicaux, que le confine- ment dans des salles chauflées d'une façon uniforme. En terminant son remarquable Rapport, M. Loisel émet quelques idées, sur lesquelles 1l est permis de faire des réserves, au sujet de l’utilisation scientifique des ménageries; il regrette que les Jardins Zoologiques soient si peu utilisés pour l'étude de la Zoologie géné- rale, c’est-à-dire pour des expériences suivies sur les mœurs des animaux, leurs rapports avec le milieu ambiant, leur reproduction; que les visiteurs ne recherchent que les bêtes les plus curieuses par leurs formes et leurs couleurs, ou les plus amusantes par leurs mouvements, et qu'on dépense tant d'argent pour de simples exhibitions populaires. 11 ne faut peut-être pas trop demander ni mélanger les genres; si nous avions en France un Zoo comparable à ceux de Hol- lande, d'Angleterre et d'Allemagne, un Zoo qui boucle son budget avec bénéfice, le reste ‘viendrait aisément par sureroit. $ 6. Proiet d'université à Alger. — A la suite d'une — Enseignement inspection des Ecoles supérieures d'Alger par le regretté Moissan et M. le Professeur Bouchard, qui s'étaient déclarés favorables à la création de l'Univer- sité d'Alger, le Gouverneur général de l’Algérie a re- pris le projet et l'a proposé aux Délégations financières, qui l'ont voté. Ce vote concorde avec l'avis de M. Caze- neuve, rapporteur du budget de l'Algérie, qui réclame cette création d'une Université de l'Afrique du Nord. Dans leur rapport, Moissan et M. le Professeur Bou- chard avaient proposé l'établissement d'Instituts de Sciences naturelles, d'Acclimatation botanique et z00- logique, d'Hygiène, etc., et ils avaient insisté sur les conséquences politiques et sociales de la création d’une Université, qui serait un puissant Len de cohésion entre les races diverses composant la population de notre colonie. Personnel universitaire. — M. Minguin, doc- teur ès sciences, maitre de Conférences de Chimie à la Faculté des Sciences de Nancy, est nommé pro- fesseur de Chimie à ladite Faculté. M. Bodroux, docteur ès sciences, maitre de Confé- rences de Chimie à la Faculté des Sciences de Poitiers, est nommé professeur de Chimie à ladite Faculté. M. Paraf, docteur ès sciences, maître de Conférences de Mathématiques à la Faculté des Sciences de Tou- louse, est nommé professeur de Mathématiques géné- rales à ladite Faculté. M. Prenant, professeur d'Histologie à la Faculté de Médeci ine de Nancy, est nommé professeur d'Histologie à la Faculté de Médecine de Paris. M. Bar, agrégé des Facultés de Médecine, est nommé professeur de Clinique obstétricale à la Faculté de Médecine de Paris. M. Quénu, agrégé des Facultés de Médecine, est nommé professeur d'Opérations et Appareils à la Fa- _culté de Médecine de Paris. M. Bullet, agrégé des Facultés de Médecine, est nommé professeur d'Histoire de la Médecine et de la Chirurgie à la Faculté de Médecine de Paris. M. Nicolas, professeur d'Anatomie à la Faculté de Médecine de Nancy, est nommé professeur d'Anatomie à la Faculté de Médecine de Paris. M. Collet, agrégé des Facultés de Médecine, est nommé professeur de Pathologie géné ‘rale à à la Faculté de Médecine de Lyon. M. Pic, agrégé ee Facultés de Médecine, est nommé professeur de Thérapeutique à la Faculté de Médecine de Lyon. M. Roque, agrégé des Facultés de Médecine, est nommé professeur de Pathologie interne à la Faculté de Médecine de Lyon. M. Audebert, agrégé des Facultés de mere cine, est nommé professeur de Clinique obstétricale à la Faculté de Médecine de Toulouse. A. CHANTEMESSE — SÉROTHÉRAPIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE Depuis six ans passés (avril 1901-juillet 1907), le nombre des malades soignés dans les hôpitaux de Paris pour la fièvre typhoïde a été de 5.621, sur lesquels 960 ont succombé, soit une mortalité de AFra0/ 0: Pendant ce temps, 1.000 malades ont été traités pour cette fièvre dans mon Service de typhiques du Bastion 29: 43 sont morts, soit une mortalité de 15e) PE J'utilise la même thérapeutique que la plupart de mes collègues — bains de 24 à 30 degrés — avec toutefois une exception capitale : j'ajoute à la bal- néothérapie une injection de sérum antityphoïde. D'un côté, nous trouvons 17 °/, de mortalité, et, de l'autre, 4,3 °/,;: le bénéfice des vies humaines ainsi réalisé au Bastion 29 me parait être dù, pour la plus grande part, à l'emploi du sérum anti- typhoïde. C'est pourquoi je demande la permission de parler ici de ce sérum. : Et, tout d'abord, je dois soumettre les preuves de ce que je viens d'avancer, I. — LA MORTALITÉ TYPHOÏDE DANS LES HÔPITAUX CIVILS. Cette mortalité ne peut être jugée que par la sta- tistique. Mais, pour être digne de créance et avoir une signification précise, la statistique — en ma- tière de fièvre Lyphoïde — doit être soumise à des lois très rigoureuses. Tous les médecins savent que les épidémies de dothiénentérie sont variables dans leur violence ; que certaines d'entre elles enlèvent le tiers ou la moitié des malades, et d'autres à peine 3 à 4°/, : il faut donc, pour mériter créance, qu'une statis- tique de fièvre typhoïde porte sur un grand nombre de cas et s'étende sur plusieurs mois ou, mieux, sur plusieurs années. Du bien fondé de cette aflir- mation, je ne donnerai que deux preuves, parce qu'elles sont contrôlables et suffisantes. En 1901, l'Hôpital Laënnec, à Paris (1® avril au 31 décembre), a eu 4% cas de fièvre typhoïde et une mortalité nulle; l’année suivante, le même hôpital a eu 42 cas et 41 morts. Dans mon Service du Bastion 29, j'ai vu passer plusieurs fois dans les salles une série de 400 malades qui ont tous guéri. Quelle belle statis- tique on eût publiée en la faisant aussi partielle! Cette première rigueur de nombre imposée à une statistique de fièvre typhoïde est donc indispen- sable. Il est une autre rigueur non moins néces- LA SÉROTHÉRAPIE DE LA FIÈVRE TYPHOIDE OPSONISATION ANTITYPHOIDE saire : une statistique de cette nature doit être con- trôlable, c'est-à-dire basée surl'examen des registres officiels d’un hôpital. Aujourd'hui, avec l'emploi des méthodes nou- velles d'examen et chez des malades qui séjournent des semaines dans un service, on ne se méprend pas sur le diagnostic de la fièvre typhoïde ; d'une part, on connait sans erreur le nombre des typhiques hospitalisés, et, d'autre part, le registre officiel, témoin brutal et véridique, indique le chiffre des décès. À une statistique de fièvre typhoïde, il faut ce nombre et il faut ce contrôle; libérée de l'un de ces tuteurs, la statistique de cette maladie pèche presque toujours par l’atténuation du pourcentage mortuaire. Sous l'empire de ces deux conditions rigoureuses, étudions les registres officiels des bureaux de chacun des hôpitaux d'adultes à Paris : Mortalité par Fièvre typhoïde dans les hôpitaux d'adultes du 1°° avril 1901 au 31 juillet 1907. NOMBRE NOMBRE MORTALITÉ ÉTABLISSEMENTS des cas des décès p. 100 | Hôtel-Dieu . . . . . 311 76 20,4 | Lariboisière. . . . . 671 126 18,3 Saint-Antoine. . . . 447 55 12,3 Denon MST ee 474 71 14,9 Broussais 0. 0e 124 20 16,1 BOUCICAUL ASE NE 200 28 14 Bichat . 20% 38 18 COCHON TER 355 be 1552 Maison de Santé . . 558 118 20,7 NECLELEMEREE TRES 343 62 18,6 BeB0jOn er 857 119 13,8 Faënnec. ua Vas 278 51 18,3 MS RIDE RER TE 339 76 22,4 La Charité... 2" 39% 66 16,7 5.621 960 17 p.100 Mortalité moyenne des six dernières années : 47 p.100. Les résultats de cette consultation des registres d'hôpitaux d'adultes à Paris peuvent s'exprimer ainsi : 4° La mortalité a atteint 17 °/, sur plusieurs milliers de cas et plusieurs années consécutives ; 2% Dans chaque hôpital, elle a toujours dépassé 190) Voilà des chiffres contrôlables. Sont-ils extraor- dinaires et très différents de ceux que fournissent d'autres hôpitaux qui ne dépendent pas de l'Assis- tance publique, à Paris ou en province? Aucunement. La statistique globale de la morta- lité typhoïde dans toute la ville de Paris (les enfants | compris) indique 48 °/,. 7 OS PET Tri és A. CHANTEMESSE — SÉROTHÉRAPIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE 739 La statistique de l'Hôpital de l'Institut Pasteur, qui m'a été obligeamment fournie par le D' Louis Martin, fournit 20 °/, de mortalité. La statistique de Lyon, dans ces dernières années (D' Barjon), signale 14 1/2 °/,. Encore l’auteur fait-il observer que sa statistique n'est pas rigou- reusement exacte et n’est pas fondée sur l'examen de registres officiels. Il en fut de même à Paris, quand un médecin consciencieux, le D' Merklen, crut pouvoir fixer, sur les souvenirs de ses col- lègues, le chiffre de la mortalité typhique hospita- lière à 141/2°/,: des renseignements sûrs montrent que les pertes sont plus sévères. En regard de ces chiffres, placons ceux que nous fournit l'examen du registre officiel du Bastion 29, seul hôpital d'adultes où tous les malades atteints de fièvre typhoïde contrôlée par le séro-diagnostic sont traités systématiquement par le sérum anti- typhoïde et par les bains demi-froids de 24 à 30°. De 1901 à 1907 : 1.000 premiers cas ont été traités, 43 malades ont succombé. . Mortalité moyenne des six dernières années : Ve PE Une question se pose tout d'abord : d'autres médecins ont-ils, dans des hôpitaux, utilisé ce sérum antityphoïde et quelles ont été leurs conclu- sions ? Je puis sur ce point donner trois renseigne- ments : À l'Académie de Médecine (1906), le Profes- seur Brunon (de Rouen) et le D' Josias (de Paris) ont fait connaitre les résultats qu'ils avaient obtenus dans leurs services en utilisant, pendant plusieurs années, chez des enfants atteints de fièvre typhoïde, le sérum que j'avais mis à leur disposition. Leurs communications mentionnent que, dans la période qui avait précédé et dans celle qui a suivi l'applica- tion du sérum, le même traitement a été donné aux malades. Aucune autre modification ne fut apportée que l'injection de sérum. Avant la sérothérapie, la mortalité typhique était dans leurs services de 10 à 12 °/, ; elle tomba avec le sérum à 3 ou 4 °/,. 100 cas, 200 cas, Dr Brunon . Dr Josias. . 3 morts. 8 morts. Gräce à l'initiative du directeur du Val-de-Gràce, M. le médecin-inspecteur Delorme, à celle du dirée- teur du Service de santé, M. le médecin-inspecteur Gatteau, et avec l'autorisation du ministre de la Guerre, M. Berteaux, la méthode à été appliquée à l'Hôpital militaire du Val-de-Grâce par les médecins- majors Dopter et Sacquépée. Le diagnostic de fièvre typhoïde fut contrôlé chaque fois par la culture du sang des malades. OOÉC AS LR ee eee MO LTILONIS: Dans ce même hôpital du Val-de-Grâce, le chiffre de la mortalité par la fièvre typhoïde avait été, dans les six années précédentes, de 69 décès pour 648 cas, soit une mortalité moyenne de 40,6 °/,. Le chiffre de la mortalité globale observée sur les malades du Rastion de 1904 à 1907 ne prend toute sa signification que lorsqu'on le compare aux statistiques annuelles observées dans le même hôpi- tal pendant cette période sérothérapique. Chaque année, le taux de la mortalité a oscillé autour de 4°/,. La première statistique que j'ai publiée (Con- grès du Caire, 1902) indiquait 3,7°/,; la seconde (Congrès de Médecine de Paris, 1904) donnait 4 °/,, et la troisième (février 1906) 3,7 °/,. Ce taux de mortalité hospitalière extraordinaire- ment faible, puisqu'il s'agit bien de fièvre typhoïde contrôlée par le séro-diagnostie, n'est pas nié; mais, avant d'admettre que ce résultat soit dû au sérum antityphoïde, la critique a présenté cette objection capitale : l'abaissement de la mortalité n'est-il pas attribuable à l'emploi rigoureux de la rigide méthode de Brand et non au sérum? Voici ma réponse : je n'ai jamais employé les bains froids à 20 ou 22° que Brand juge indispensables. Et quand la méthode de Brand, avec sa rigueur implacable, à été utilisée en France, dans les hôpitaux civils, par un de ses plus fervents adeptes, le D' Bouveret (de Lyon), dont personne ne discutera la compétence en matière de traitement de la fièvre typhoïde par les bains froids, elle a encore donné, sur plusieurs centaines de cas traités à l'hôpital et sur plusieurs années, 8 °/, de mortalité (fin de 1887 : 392 cas — 32 morts). II. — MODIFICATIONS DES SYMPTÔMES. Sous l'influence du sérum antityphoïde, l'évolu- tion de la fièvre typhoïde subit une modification 5 Gouttes + | Fig. 1. — Période de réaction après le sérum. quise fait sentir dans tous les cas el qui se dessine toujours dans lemêmesens. D'une manière générale, les courbes de température semblent calquées les unes sur les autres. L'évolution de la maladie est divisée très nettement en deux périodes : période de réaction, qui suit l'injection de sérum, et ensuite période de défervescence (fig. 1 à 4). Dans le premier stade, qui dure de quelques heures à 5 ou 6 jours, la fièvre ne baisse pas ou baisse peu, parfois même augmente légèrement, pendant quelques heures, sur la moyenne des jours précédents; puis, assez brusquement, la fièvre décroît, les bains deviennent A. CHANTEMESSE — SÉROTHÉRAPIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE du remède, le visage s'est profondément modifié. A la place de la päleur du début, on distingue une rougeur diffuse, parfois très marquée, qui donne une bonne mine inattendue; la stupeur a disparu ou s’est atténuée; les mains ont également rougi, particulièrement sur là face palmaire; elles ne sont plus froides, mais chaudes, et les ongles ont pris 12213 HE 5 Vourstt+ T RE S 25 CE mx BE) H EÉ are À Een RSARSES PERS ALLIÉE EN EE EEE TE ER EI lAtimentatron | EEE EEE RACE ÉFFÉEDEE RÉ OREEE feee 80 ERA Ar Fig. 2. moins nombreux et la Rdéfervescence commence, pour se dérouler d'une manière plus ou moins rapide. Les modifications de l’état général suivent celles de la température. Pendant le stade de réaction, le malade n'a pas encore la sensation de bien-être qui se fera sentir dès le début de la seconde période, Une fois celle-ci commencée, le patient peut avoir de l'hyperthermie, qui nécessite la prise de plusieurs bains par jour; mais il se sent bien, l'appétit se réveille, il urine beaucoup. A ce moment, el sou- — (Courbe avec rechute : Deux injections. — fl ypersplénomégalie après l'injection. une teinte rosée. Gette augmentation de la vascula- risation périphérique persiste jusqu'à la convales- cence, et c'est pourquoi les typhiques traités par le sérum ont un aspect qui surprend tous ceux qui les visitent. La modification imprimée à l'évolution est d'autant plus favorable et frappante que le sérum est intervenu plus près du début, au moment où les appareils de défense ont encore conservé leur vigueur et peuvent réagir avec énergie sous l'in- fluence du remède. vent plus tôt, sur- Janvier 1906 Fevrier Nous verrons plus 1 [2 5[6[7[8[9/ojul2lisfélis| Join, dans les modifi- vient un phénomène très particulier, qui cations apportées à 18 [19 |20 dE 23124/25[26[27]28 constitue peut-être le l'appareil Iymphoïde caractère objectif le £ et au sang du malade, plus apparent de la ES la raison de ce phé- fièvre typhoïde modi- SL nomène. fiée par le sérum. st Je rappelle iei que, Je veux parler d'un He depuis six ans, je n'ai changement évident es jamais perdu au Bas- dans la vaso-motri- FÊERE tion 29 un malade cité. Due traité par le sérum Tous les médecins dans les sept pre- connaissent la phy- miers jours de sa sionomie si spéciale maladie. des typhiques, où la päleur et la stupeur du visage ont valu son nom à la maladie. Dans les formes graves, ce facies est caractéristique. Malgré la température centrale très élevée, l'extrémité du nez, les mains, les pieds sont presque froids et les ongles un peu violacés. Chez les malades qui ont recu du sérum et qui ont terminé ou qui terminent leur période de réac- tion, ‘souvent quelques heures après la pénétration Fig. 3. — Forme traïnante : Deux injections. Lorsque le sérum intervient tardivement, — et ce qu'il faut entendre par tardivement, c'est bien plutôt la gravité des lésions déjà effectuées que la numération stricte du nombre de jours écoulés depuis l'apparition des premiers symptômes, — les résultats sont moins rapidement favorables. Le sérum ne peut faire disparaître vite ni les lésions des cellules ner- veuses, ni les altérations nécrosantes des tu- as. A. CHANTEMESSE — SÉROTHÉRAPIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE niques de l'intestin, quand elles sont déjà réalisées. Quelques heures après l'injection, la pression san- guine augmente ; elle s'élève jusqu'à 12 à 15 centi- mètres de mercure et cet accroissement est assez marqué et persistant pour qu'il ne soit pas utile de donner dans le cours de la maladie des toniques cardiaques. C'est à titre exceptionnel et seulement chez des malades traités ‘ 741 jours, revient à son chiffre normal; le nombre relatif des polynucléaires, qui s'était accru très passagè- rement, décroit jusqu'à la convalescence, tandis que le chiffre des mononucléaires augmente dès le lendemain de linjection, suivant une marche inverse de celle des polynucléaires neutrophiles. Les myélocytes neutrophiles, dont la présence est constante chez les ty- tardivement que nous phiques à la période avons recours, quelque- d'état, deviennent plus fois, à des injections de spartéine. D'ordinaire, la fré- quence du pouls s'a- baisse en même temps rares après l'injection et reprennent vite leur taux normal, qui est de 4/2 °/, environ. Par contre, le nombre des que la température ; rarement, sauf dans les grands mononucléaires s'accroit et suit sensi- cas de réaction intense, blement une marche pa- elle s'élève passagère- ment, mais celte élé- Fie vation ne comporte en soi aucun pronostic mauvais, probablement à cause de l'augmentation de là pression sanguine. J'ai vu guérir beaucoup de malades qui avaient eu 450 pulsations à la minute, chiffre considéré comme fatal par Liebermeister. La quantité d'urine augmente beaucoup; tandis que, dans la fièvre typhoïde ordinaire, on ne voit la polyurie apparaître qu'au moment de la convales- cence, chez les malades injectés elle se montre au bout de peu de jours, et elle atteint parfois 4 à 5 litres (fig. 5). g. 4. — Arrêt rapide de la maladie. rallèle à celle des mono- nucléaires ordinaires. Enfin, les éosinophiles, qui sont toujours absents du sang des typhiques à la période d'état, reparaissent rapidement, quelquefois dès le lendemain de l'injection. A ne s’en tenir qu à l'examen des cellules sanguines, on peut conclure que les modifications survenues dans le sang des typhiques traités par la sérothérapie reproduisent, avee un degré d'anticipation, celles que l'on observe au moment où se dessine la guérison normale. Mais, si l'on poursuit plus loin l'analyse et qu'on cherche si les propriétés du sang du malade n'ont Quand l'abumi- ne existe dans Janvier 1906 18 [19/20/21 12212312 [25/26/27 [28/29/30 [31 | 1 [2 l'urineavantl'in- Jours ÿ Pas d'Albummne! jection, elle ne tarde pas à dis- paraitre, el il est rare que les ma- lades qui vaient pas d'al- buminurie avant T op EEEEEET n'a- 1011{12/18{14/15/16/17/18119/20/21/22/23/24/25 pas été modi- Re = liées dans le sens n2lel d'un accroisse- 34135136 ment de force DRE ! dans leur pou- voir bactéricide, on constate, de la facon la plus évidente, l'exal- tation sous l'in- fluence de l'in- la prise du sérum en aient plus tard jection antity- phoïde de cette au cours de la HSero diag pos/Eberth À} je propriété anti - maladie. Les moditica- tions les plus im- portantes provoquées dans l'organisme des tvphi- ques par le sérum apparaissent dans les tissus où se fait la lutte contre les maladies infectieuses, c'est- à-dire dans le sang et dans les organes hémato- poïétiques, tissu lymphoïde et tissu myéloïde. Dans les jours qui suivent l'injection, le nombre des leucocytes sanguins augmente dans la proportion d'un quart à un tiers, puis, au bout de quelques Fig. 5. — Température, pouls, urine. microbienne. Le malade est de- venu plus apte à détruire les bacilles qui l'avaient envahi; il s'est fait dans son sang une opsonisation antityphoïde. Je reviendrai plus loin, et avec les détails néces- saires, sur ce phénomène si important, dans lequel réside, à mon avis, lecaractère essentiel de l'action du sérum antityphoïde utilisé chez mes malades. Je dois parler maintenant d'une autre constalation, étroitement reliée à celles que je viens de men- 142 A. CHANTEMESSE — SÉROTHÉRAPIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE tionner et qui est visible aussi dans le domaine hématopoïétique : l'hypertrophie de la rate déve- loppée en quelques heures après la pénétration du sérum antityphoïde (fig. 6). Il suffit de mesurer exactement — mensuration facile et précise avec le phonendoscope — les limites de la surface externe de la rate au niveau du flanc gauche pour constater une différence très marquée du volume de cet organe entre la période qui pré- cède l'injection et celle qui la suit, trente-six heures à trois jours plus tard. La limite dessinée à l'aide de l'instrument permet de constater une augmen- tation de 1 à 2 centimètres dans l'étendue du dia- 13 centimètres 48 heures après le sérum. Fig. 6. — Surface externe de la rate mesurée au phonen- doscope. mètre transversal et de 1 centimètre dans celle du diamètre vertical de l'organe. Cette hypertrophie splénique ne manque jamais. Elle est inséparable des modilications constatées dans les cellules et dans la partie liquide du sang. Je reviendrai plus loin sur son rôle en parlant de la physiologie patho- logique de la sérothérapie antityphoïde. L'action du sérum sur la courbe de la tempéra- ture se reconnait pendant environ dix à douze jours; après ce laps de temps, ou bien, la convalescence se dessinant très nettement, la courbe continue à baisser jusqu'à la guérison, et la durée de la maladie est courte; ou bien, dans les formes plus graves ou après le dixième ou douzième jour, la défervescence reste stationnaire pendant quelque temps, la température se maintenant au- dessus de la normale, comme si le malade ne jouis- sait plus de l’action du remède qui avait enrayé la plus prolongées, fièvre; puis la convalescence s'affirme, à moins que se dessine une rechute. Cette rechute, d'ordinaire, ne dure que quelques jours, surtout quand la première atteinte a été sérieuse. La convalescence est le plus souvent rapide, en particulier chez les malades traités de bonne heure;, toutefois, ceux dont la maladie a été arrêtée très vite par l'injection de sérum doivent prendre, pen- dant plusieurs semaines, des précautions réelles pour leur santé; car j'ai vu — d'une manière exceptionnelle — Ja maladie récidiver au bout de deux à trois mois, probablement par la reviviscence dans l'organisme de bacilles typhiques qui n'avaient pas été complètement détruits. Cette persistance possible des microbes d'Eberth dans le corps des typhiques parvenus à la guérison est d'ailleurs connue; On la constate principalement dans cer- taines formes d'ostéiles ou de périostites post- typhiques. A ce propos, je dois signaler l'extraor- dinaire action d'une minime injection de sérum loco dolenti. On sait que ces lésions d'ostéites et de périostites typhiques jouissent d'ordinaire d'une persistance très longue et se terminent souvent par des suppurations qui exigent une intervention chi- rurgicale. Elles se manifestent par du gonflement et des douleurs vives, surtout nocturnes. Lorsque de telles altérations apparaissent, il suffit d'injecter -au centre de la lésion, en plein dans le périoste ou l'os, une goutte de sérum antityphoïde; en quelques heures, à la condition d'intervenir dès le début, la douleur disparait, la tuméfaction s'affaisse et la guérison est si rapide, accomplie en deux ou trois jours, qu'on est surpris du résultat. La même thé- rapeutique locale agit avec autant de rapidité et d'efficacité lorsqu'il s'agit de faire dissiper une poussée d'orchite ou de mammite typhoïdique. La faible mortalité constatée chez nos mille malades indique déjà que les complications doivent être peu fréquentes. Cependant, deux méritent d'être retenues. Sur 47 cas de mort, l'hémorragie intestinale n'est inscrite que pour le chiffre 4, et cela vraisemblablement grâce à l'emploi de l'ergo- tine et du chlorure de calcium, qui favorise si puissamment la coagulation du sang ; en revanche, la perforation de l'intestin compte pour 19. La question se pose de savoir dans quelle mesure la sérothérapie protège les malades d'hôpital — venus assez lardivement — contre cet accident. Pour résoudre ce problème, il faut pouvoir s'appuyer sur une statistique longue et rigoureuse, qui envisage la fréquence de cette terrible complication chez les malades non traités par le sérum. Je n'ai pu trouver dans les registres officiels des hôpitaux de Paris le nombre des perforations de l'intestin à incriminer dans les 17°/, de mortalité signalés. J'ai recherché des renseignements dans à. Len A. CHANTEMESSE — SÉROTHÉRAPIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE 743 la littérature étrangère, en Angleterre, en Alle- magne, aux États-Unis. Voici une statistique signalant la fréquence de la perforation intestinale dans plusieurs milliers de cas: PERFORATIONS cas intestinales MMurchisson. +... 1.1, 1. 001.580 48 CORTE ERNEST 600 1% Curshmann (Leipzig) . ... . . . . 41.626 36 ( Montreal general Hospital. 932 34 Harte. { Episcopal Hospital . . . . 1.556 34 Pensylvania Hospital. . . 1.793 45 PRO, SNS OR T3 2 OT EEE 8.160 213 Ainsi, d'après les auteurs précédents, dont le nom fait autorité dans l'histoire médicale et chirur- gicale de la fièvre typhoïde, la fréquence de la perfo- ration intestinale est de 2,6 °/, des cas de dothiénen- térie. Dans ma statistique, où la mort est survenue 19 fois sur 1.000 malades, par le fait de la perfora- tion intestinale, on peut dire que le sérum à pro- tégé les malades contre ce terrible accident moins bien que contre les autres causes de mort. C'est que les altérations intestinales représentent les pre- -mières lésions en date dans la fièvre typhoïde, qu'elles sont déjà effectuées quand intervient le sérum et que celui-ci ne peut faire que ce qui est fait ne soit réalisé. Voilà pourquoi il faut injecter -de bonne heure le sérum antilyphoïde. Je n'ai jamais observé de perforation intestinale chez les malades qui ont été traités par la sérothérapie dans les sept premiers jours à partir du début de leur maladie. Cette constatation, que je ne saurais trop mettre en lumière, me paraît avoir une importance considérable. Récemment est entré dans la thérapeutique le nucléinate de soude qui, par l'hyperleucocytose qu'il fait naître, s'est montré un agent capable de provoquer dans le péritoine une résistance éner- gique contre les infections. Lorsque la perforation n'est pas trop volumineuse et le contenu de l'intestin trop diarrhéique, lorsque la plaie intestinale est placée de manière à permettre des adhérences avec les anses voisines et que, chose essentielle, le nucléi- nate de soude est injecté dès le début des douleurs abdominales, alors la séreuse péritonéale témoigne, grâce aux nombreux leucocytes qui l’ont envahie, d'une résistance à l'infection qui permet des inter- ventions chirurgicales heureuses, mème faites tar- divement, ou qui favorise et procure même une guérison spontanée, sans opération, crois l'avoir observé trois ou quatre fois. comme je IIl. — L'OPHTALMO-DIAGNOSTIC. Une des conditions principales du succès dans la sérothérapie antityphoïde est la précocité de l'injection du sérum; on ne doit pas attendre, pour utiliser ce remède, la venue parfois trop tardive du séro-diagnostic positif; toutefois l'admirable mé- thode de la séro-réaction et la culture du sang restent toujours des moyens de contrôle décisifs. Une méthode qui, d'une manière plus précoce que la précédente, donnerait des renseignements sufti- samment précis sur le diagnostic de la fièvre typhoïde et n’exigerait pas, comme celle-ci, l'inter- vention des recherches ultérieures du laboratoire, rendrait des services signalés aux médecins. Je me suis particulièrement préoccupé de la so- lution de ce problème, en raison de son intérêt pour l'intervention précoce de la sérothérapie. Récemment, von Pirquet et, peu de jours plus tard, Wolff-Eisner ont fait connaitre la grande sen- sibilité de l’'épiderme cutané et de la conjonetive des tuberculeux à l’action d'une minime dose de tubereuline et ont édifié, sur cette constatation, une méthode de diagnostic de la tuberculose, On s’est empressé dans le monde entier de contrôler et de vérifier leurs découvertes. En France, M. Cal- mette a donné une bonne technique de cette re- cherche de l’ophtalmo-réaction à la tubereuline. J'ai, de mon côté, tenté de savoir si la muqueuse oculaire des malades atteints de fièvre typhoïde témoignait, à l'égard de la toxine du bacille d'Eberth, une sensibilité spéciale qui pourrait être utilisée pour le diagnostic. Cette sensibilité existe, et l'ophtalmo-diagnostic de la fièvre typhoïde est facile à rechercher et à constater. Comme il s’agit d'un procédé de diagnostic nou- veau, je demande la permission de donner quel- ques détails au sujet de cette méthode, de son mode d'application et de ses résultats. S 1. — Préparation du test ophtalmique. Dans des bouteilles plates, sur une couche de gélose nourricière, du bacille typhique virulent est ensemencéet les flacons sont portés à l'étuve pendant dix-huit à vingtheures. Au bout de ce temps, lasur- face de la gélose est couverte d’une culture que l'on détache, après avoir ajouté 4 ou 5 centimètres cubes d'eau stérile, et l'on verse, à l’aide d'un entonnoir, dans de gros tubes, toute la masse des bacilles typhiques. Ces tubes sont chauffés au bain-marie à 60 degrés pour détruire la vitalité des microbes. On centrifuge, on décante le liquide surnageant, el on dessèche les bacilles dans le vide. On obtient ainsi une masse microbienne que l'on broie long- temps et avec soin dans un-mortier d'agate, comme on le fait pour la préparation de certaine tubercu- line. Soit, par exemple, 3 grammes de poudre de bacilles pesée sèche et broyée; on facilite le ‘ broyage en ajoutant, comme l'a recommandé Bes- redka, 1 gramme de NaCI. Dans cette poudre broyée soigneusement, pendant deux à trois heures, on verse tout d'abord, goulte par goutte, 5 à 6 centi- mètres cubes d'eau distillée stérile et on continue le broyage ; peu à peu on ajoute de l’eau, 100 gram- mes au total pour 3 grammes de poudre. Le masse liquide est alors versée dans deux ou trois gros tubes que l'on porte à 60 degrés au bain-marie pendant deux heures; les bacilles tombent au fond et le liquide surnage. On laisse deux jours le dépôt se faire, sans secousses, en chauffant tous les jours à 60 degrés pendant une demi-heure. Puis le liquide surnageant est décanté. Il est presque transparent, et, s'il contient encore des flocons, on le soumet à la centrifugation. Il doit être très fai- blement opalescent lorsqu'on le verse peu à peu dans une quantité d'alcool absolu dix fois plus grande. Au bout de peu de temps, dans l'alcool, se forment des nuages qu'on laisse se déposer pen- dant trois heures. On décante l'alcool, et le coa- gulum, qui à gagné le fond du verre, est mis à sécher rapidement dans le vide. On obtient une masse jaunâtre, que l’on broie finement dans un petit mortier d'agate. Lorsqu'on veut l'utiliser, on dissout cette poudre, qui renferme un peu de toxine adhérente à une substance donnant la réac- tion chimique de la matière albuminoïde, lente- mentet en brôvant, à la dose de 1/3 à 1/2 milli- gramme pour une goutte d'eau, soit 8 à 10 milli- grammes pour 1 centimètre cube d’eau, c'est-à-dire pour avoir la quantité nécessaire à la recherche de l'ophtalmo-diagnostie sur 20 personnes. La poudre ainsi préparée se conserve bien dans un flacon bouché. Le délayage de cette poudre jaunätre dans les gouttes d'eau doit être fait avec soin et donner un liquide opalescent, dépourvu de grumaux. Ce liquide opalescent peut être recueilli dans de petites ampoules de verre contenant deux gouttes et fourni facilement aux médecins praticiens; j'ignore s'il conserverait son activité aussi long- temps que la poudre sèche. $ 2. — Mode d'application. Résultats. A l'aide d’un compte-gouttes dosé, verser une goutte de la dilution (soit un tiers à un demi-milli- gramme de poudre dissoute) dans le cul-de-sac conjonctival inférieur, en tournant un peu la tête du patient'en dedans, pour que le liquide ne s'é- chappe pas de l'œil, mais s'écoule vers son angle interne. Au bout de deux à trois heures, la rougeur commence avec une légère sensation de chaleur; cette rougeur s'étend à-la caroncule; un peu de lar- moiement et un peu d'exsudat fibrineux apparais- sent. De six à dix heures après l'instillation, les phénomènes ont pris leur maximum de dévelop- pement. Ils rappellent ce qui se passe pour A. CHANTEMESSE — SÉROTHÉRAPIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE Le. l’ophtalmo-réaction à la tuberculine. L'intensité de la réaction dépend de deux facteurs : d'une pa les malades, sans qu'on en connaisse la raison n'ont pas tous la même sensibilité conjonctivale l'égard de la toxine typhique, et, d'autre part, dose de toxine instillée joue un rôle important. Et quantité de poudre que j'ai indiquée, étant donné ce mode de préparation de la toxine, est celle q fait réagir les personnes atteintes de fièvre typhoïde et qui ne fait pas réagir les autres. Mais chacu sait que la toxine typhique est irritante par elle même, et ce qui peut être utilisé pour le diagnostié de la dothiénentérie, ce n'est pas la mise en je d'une spécificité totale et absolue dans l'action du remède, mais une différence dans l'intensité de la réaction : à l'égard d'une dose instillée de toxines les typhiques et les convalescents de fièvre typhoïde font preuve d'une sensibilité beaucoup plus vive que les autres malades ou que les gens bien por tants. Ë Le caractère vraiment essentiel de cette méthode de l’ophtalmo-diagnostie, celui auquel j'attache le plus de prix parce que je ne l'ai jamais vu manquer chez les vrais typhiques, consiste dans la persis tance de la rougeur conjonctivale chez les malades soumis à l'épreuve. Toujours, à la dose indiquée j'ai vu chez les vrais typhiques la réaction oculaire persister longtemps sous forme de rougeur conjone tivale ou caronculaire, facile à reconnaître en abais= sant avec le doigt la paupière inférieure ou en faisant mouvoir l'œil, et cela grâce à la comp raison avec l'œæilnon traite. Le lendemain del'instils lation oculaire, souvent deux jours, parfois trois ou quatre et même six jours plus tard, l'ophtalma réaction reste constatable, puis se dissipe. J'ai vu même, à ma grande surprise, reparaitre le qua trième ou le cinquième jour la rougeur qui s'était effacée au bout de quarante-huit heures. Quant aux conséquences ultérieures, j'ai fai déjà plus de deux cents expériences, jamais constaté le moindre inconvénient. Les résultats de mes recherches sont inscrits dans les tableaux ci-après: ils se résument ainsi & Cinquante personnes atteintes ou convalescentes de maladies diverses et non typhoïdes n’ont présenté ni le séro, ni l'ophtalmo-diagnostic. Une seule ak réagi, mais la rougeur n'était plus visible le lend main de l'instillation; cette femme tuberculeuses avait eu probablement la fièvre typhoïde deux an auparavant. Soixante-dix typhiques avérés, ayant le séro: diagnostic positif, ont eu l'ophtalmo-diagnostie également positif. Mais voici le point intéressant de cette étude : J'ai vu plusieurs fois, au début ou dans le cours de la fièvre typhoide, Pophtalmo-diagnostic donner A. CHANTEMESSE — SÉROTHÉRAPIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE 7 SI © une réaction positive, tandis que le séro-diagnostic restait négatif et ne devenait positif que plusieurs jours plus tard. Les documents sont encore trop peu nombreux pour traiter ce point si important du diagnostic précoce de la fièvre {yphoïde. Pour éviter toute cause d'erreur, l'ophtalmo- diagnostic ne doit être recherché que sur des con- jonctives apparaissant saines et normales à l'œil nu, et le jugement ne doit porter que sur la compa- raison des deux yeux. La réaction doit être encore très reconnaissable au bout de vingt-quatre heures. IL est un point que soulève cette étude. Les méde- cins ont l'habitude de ne considérer comme fièvre typhoïde que la maladie dont l'évolution est clas- sique ou celle dans laquelle le sang donne la réac- lion positive. Les affections fébriles légères qui n'offrent pas la réaction sanguine sont regardées comme n'appartenant pas à l'infection éberthienne. Peut-être qu'un réactif sensible comme celui de l'ophtalmo-diagnostie nous montrera, par une méthode mise à la portée de tous les praticiens, que l'infection par le bacille typhique s'étend sur un domaine plus vaste qu'on ne suppose : Tasceau L. — Maladies ayant évolué cliniquement comme la Fièvre typhoïde. NOMBRE , OP - JGEU de jours | SÉRO-DIAGNOSTIC OPHTALMO ROUGEUR A DIAGNOSTIC persistante € o if >Sitif se : ES positif pendant jours la maladie —e | 6 à 10, . 1.1.1 11.1 1.3.3 MMA M A04010100224/104010454,10102% 28 1011 :3:3 16 à 20. . DAC AE 1215405104 222 DECO ÉREREBREEILEREEE ER BNLEE2 26 à 30... AEAPAE 15454191 4.2: 31 à 35. . 1 1 3 36 à 40. . AAA AAA 1.4.1.2,2 41 à 45. . 1.1 1.1 1.3 Total : 41 malades. À ce nombre de malades, il faut en ajouter 28 ayant aussi, en même temps, le séro-diagnostic et l'ophtalmo-diagnostie positifs. IV. — MODE DE PRÉPARATION ET ACTION PHYSIOLOGIQUE DU SÉRUM ANTITYPHOÏDE. On sait depuis longtemps qu'en injectant des bacilles typhiques vivants ou morts sous la peau ou dans les veines des petits animaux de labora- toire, on les vaccine contre une dose de virus capable de tuer les témoins; leur sérum sanguin a acquis désormais des propriétés qui confèrent aux animaux auxquels il est injecté une résistance considérable ou une immunité contre l'infec- tion par le bacille d'Eberth. Toutefois, une diffi- culté très grande a retardé beaucoup le progrès TagLeAu Il. — Maladies ayant évolué cliniquement comme la Fièvre typhoïde. OPHTALMO- DIAGNOSTIC SÉRO- DIAGNOSTIC SÉRO-DIAGNOSTIC négatif devenu positif positif 21e jour. 21e jour. 33e jour. TENUE 16e — 26e — 10e 10e 139 — se se — Hémorragie intestinale le 16e jour, séro-diagnostic positif le 17e jour. Encore négatif le 11° jour; les deux frères de cet enfant ont en ce moment la fièvre typhoïde avec séro-diagnos- te positif. 18e jour. US 14° — dans l'étude de ce sérum appliqué à la thérapeu- tique humaine. Les petits animaux de Taboratoire n'ont pas la fièvre typhoïde humaine comme ils ont si facilement la diphtérie. Si on les inocule avec une dose moyenne de virus typhique, ils gué- rissent en quelques heures; si l'on augmente la Tagceau IL — Maladies n'ayant pas évolué cliniquement comme la Fièvre typhoïde. MALADIES REMARQUES ae | ne | me Il Tuberculose. — | — 1 Bronchite. — | — 2 Appendicites. — | — 1 Hystérie. — | — 5 Erysipèles. — | — il Phlegmon. — | — 1 | Zona ophtalmique. | — | — 1 | Rétrécissemt mitral. | — | — 1 Diphtérie. — | — 1 | Embarras gastrique. | — | — il Oreillons. — | — 30 Convalescents de scarlatine. — | — 2 Convalescents de rougeole. = — 1 | Pleurésie tubercu- . leuse. — | + Cette malade a eu, il y a deux ans, une fièvre intense qui a duré trois mois avec céphalée et diarrhée. dose, ils sont sidérés non moins rapidement. Peu de chose rappelle, dans ces infections insigniliantes ou si graves des petits animaux, l'évolution clas- sique de la fièvre typhoïde humaine. Le sérum 746 A. CHANTEMESSE — SÉROTHÉRAPIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE antityphoïde n’est appliqué expérimentalement que sur des animaux ou sains, ou malades seulement depuis quelques heures. Il n'y a rien, chez l'animal soumis à l'expérience, qui se rapproche, même de loin, de ce que nous voyons chez l'homme, c'est-à- dire de cette sensibilité au poison typhique, sensi- bilité faible d'abord, quand le patient commence sa maladie, plus grande dans la suite à mesure que la maladie se déroule, et qui rappelle la sensibilité des tuberculeux à l'égard de la tubereuline. Si l'on pouvait, tout au début de sa maladie, faire détruire et solubiliser tous les bacilles typhiques contenus dans le corps d’un homme, celui-ci gué- rirait vite et supporterait très bien l'intoxication produite par la dissolution microbienne ; si l'on procédait à cette mème destruction et solubilisation des microbes typhiques chez un homme déjà forte- ment touché par la fièvre typhoïde et envahi par un très grand nombre de bacilles, je suis con- vaincu que le patient succomberait en quelques heures, submergé par ce supplément d'intoxi- cation. Cette proposition fait comprendre que, dans le traitement sérothérapique de la fièvre typhoïde, il faut agir avec prudence, puisque nous avons, non l'observation animale, mais seulement l'observa- tion humaine, pour nous guider dans cette théra- peutique. Le sérum que j'utilise a été pris sur des chevaux qui, pendant longtemps, ont reçu, tantôt dans les veines une émulsion de bacilles typhiques viru- lents, tantôt, sous la peau, de la toxine typhique soluble. J'ai fait connaitre le mode de préparation de cette toxine soluble (Congrès de Madrid, 1898) ; elle s'obtient en cultivant dans des flacons plats, dans du bouillon de rate de bœuf, au large contact de l'oxygène, des bacilles typhiques très virulents. En quarante-huit heures, la culture du microbe tapisse d'un voile la surface du bouillon et la toxine s'éla- bore au-dessous. On la recueille au bout de sept jours dans de petits flacons, on chauffe à 55° et on centrifuge. Le liquide décanté présente les pro- priétés que j'ai fait connaitre, et notamment une toxicité et une résistance à la chaleur que l’on a constatées ultérieurement dans l'endotoxine ty- phoïde. Chez le cheval, les injections doivent être espacées, car chacune amène-une forte élévation de température et l'immunisation des animaux est très lente. Ceux qui m'ont donné le meilleur sérum étaient en voie d'immunisation depuis plusieurs années, Les propriétés du sérum varient un peu, suivant le temps écoulé, au moment où l'on fait la saignée, depuis la dernière injection de bacille ou de {oxine. C'est au bout de vingt jours environ que le séru a son plus grand pouvoir préventif. J'ai fait aussi au bout de trois mois, des saignées et j'ai conserw longtemps le sérum; il en est que j'utilise encor après deux et trois ans de conservation au froïd, l'abri de la lumière et de l'oxygène. Les doses sont minimes, puisque je suis arrivé avec du sérum d'animaux vaccinés depuis plusieur années, à ninjecter que quelques gouttes, do suffisante, cependant, pour amener dans l’évolutio de la maladie et dans les symptômes les modifi cations dont j'ai parlé. L'action d'une injection dure environ dix jours ; je fais rarement une seconde injection, sauf quand la marche de la maladie devient trainante; cette seconde injection doit être en quantité moitié moindre que la première, car elle amène parfois localement une petite tuméfaction œdémateuse qui se dissipe en quelques jours. La première injection ne produit jamais cet œdème. L'injection est faite sous la peau de la face dorsale de l'avant-bras. Je dois maintenant analyser l’action du sérum antityphoïde sur l'animal sain et sur l’animal atteint d'infection ou d'intoxication typhique, 4 l'homme normal ou non typhique et sur le malade w frappé par la fièvre typhoïde. Sur le lapin sain, le sérum, injecté dans la veine : de l'oreille à une dose trente à quarante fois supé-n rieure à celle qui est utilisée chez l'homme, n amène È aucune modification apparente de la santé. Lam courbe dos régulière du poids d'un animal de 1.800 à 2.000 grammes n'est pas sensi-M blement troublée. Chez le cobaye, le sérum, injecté en plein tissu cérébral à la dose de 3 à 4 gouttes dans chaque hémisphère, n'entraine aucun accident apparent immédiat, ni consécutif. Les animaux soumis à l'infection ou à l'intoxi- cation typhique et traités par le sérum présentent des phénomènes intéressants. Tout d'abord, un premier fait est manifeste : les cobayes qui ont recu sous la peau vingt-quatre heures plus tôt deux centimètres cubes de sérum résistent à une dose de bacilles qui amène la mort des témoins. L'acte de résistance organique se dévoile avec netteté dans l'expérience suivante : Si, < Li | sous là peau de l'oreille de plusieurs lapins, les | uns neufs et les autres ayant recu depuis quelques heures deux à trois centimètres cubes de sérum, on injecte une même dose de bacilles tvphiques, on voit, au bout de cinq à six heures, que, dans l'oreille des lapins témoins, les microbes grouillent et pullulent en liberté, comme dans un bouillon de culture, tandis que, dans l'oreille des lapins qui ont recu le sérum, l'immense majorité des bacilles est englobée par les phagocytes et subit une des- A. CHANTEMESSE — SÉROTHÉRAPIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE 747 truction rapide. L'injection préventive du sérum, qui sensibilise les microbes, constitue donc un traitement antiinfectieux, car, dans le sérum antityphoïde chauflé, on trouve encore, à la facon d'une sensibilisatrice résistant à la chaleur, une proportion importante d'opsonine. Cette injection constitue aussi un traitement antitoxique, mais d'une manière secondaire et beaucoup moins rapide dans sa manifestation eli- nique. Chez l'homme, cette désintoxication antity- . phoïde se constate par la bonne conservation de l'état général pendant le cours de la maladie et - pendant la convalescence, au point que l'aspect extérieur des malades ne ressemble pas à celui des typhiques traités par les méthodes ordinaires. Expérimentalement, on constate aussi cette résistance aux effets de la toxine. Faisons pénétrer sous la peau d'un lapin neuf une quantité de toxine typhoïde soluble un peu inférieure à la dose mor- telle; nous verrons se produire en quelques heures un amaigrissement considérable, et dans le sang nous observerons la disparition d'un très grand nombre de globules blancs, surtout des polynu- eléaires. Peu à peu, l'animal se remettra et revien- dra à son poids, mais il restera touché dans sa vitalité pendant assez longtemps : le poil se mon- trera terne, il tombera par places; Paspect sera peu florissant. Si l'on pratique à un autre animal la même injection de toxine, mais après avoir pris la précaution de faire pénétrer sous la peau, deux à vingt-quatre heures auparavant, un centimètre cube de sérum, l'animal sera peu malade, maigrira peu et la destruction des leucocytes restera minime. Le sang d'un lapin traité préventivement par le sérum se comporte, sous l'effort de la toxine, comme le sang d'un lapin qui est déjà immunisé par des doses faibles et répétées de toxine. Par cette injec- tion de sérum, l'animal a acquis le pouvoir de sup- porter sans périr une dose de poison qui, en trente- six heures, provoque la mort d'un témoin. Si l’on injecte ensemble el séparément sérum et toxine, l’action de cette dernière sur le sang se fait sentir presque avec autant de violence que si l’on avait injecté la toxine seule; mais la réaction leucocytaire de défense est plus rapide et plus intense que chez les animaux qui n'ont pas recu de sérum, Les polynucléaires surtout dans le sang plus rapidement, et en plus grand nombre. Si l'injection de sérum intervient trop tard après le début de l'intoxication et que celle-ci soit forte, la réaction favorable est comme inhibée et ne se produit pas. Enfin, l'effet de l'injection de sérum dure longlemps; les animaux qui ont recu du Sérum depuis six à sept jours témoignent encore d'une puissance de résistance très grande contre reparaissent l'injection éventuelle de toxine. De ces faits découle l'indication d'injecter le sérum aussi près que pos- sible du début de l'infection. Pour bien saisir le mécanisme de l'influence sérothérapique, il faut examiner, indépendamment des propriétés acquises par le sang et le sérum, la rate el la moelle des os des animaux en expérience. La différence entre les organes des animaux traités et des témoins est si grande qu'elle se traduit, sur les coupes histologiques, même à l'œil nu. La rate et la moelle des os des lapins qui n'ont recu que la toxine présentent, au bout de quelques heures, une congestion sanguine extrêmement intense; les appareils lymphoïdes (corpuscules de la rate) et les travées du tissu médullaire témoignent d'une réac- tion légère et pénible. La rale et la moelle des os des animaux qui ont recu le sérum et la toxine sont tout autant luméfiés, mais la luméfaction n'est pas causée par une congestlion sanguine; elle est sous la dépendance d'une énorme hypertrophie du tissu lymphoïde et myéloïde. Les corpuscules spléniques sont augmentés de volume, chargés de cellules lymphatiques, que l’on trouve en grand nombre dans les cordons de Billroth. Les travées du tissu médullaire sont aussi en reviviscence ac- live; la graisse ‘est résorbée et les travées sont farcies d'un grand nombre de cellules jeunes à protoplasma généralement basophile. Nous voici parvenus au point culminant de cette étude de sérothérapie antityphoïde humaine. Jus- qu'ici nous avons pu en juger les résultats par la statistique globale et par les modifications des symptômes morbides; nous allons pénétrer dans l'étude de quelques-uns des phénomènes les plus importants de la physiologie pathologique. Les réactions provoquées sérum chez l'animal sain et chez l'animal envahi par l'injection de par le bacille typhique se manifestent-elles d’une manière très analogue chez l'homme sain et chez l'homme atteint de fièvre typhoïde? Assurément, L'hypersplénomégalie, qui s'installe en quelques heures chez l'individu traité par le sérum, est très facilement constatée à l’aide du phonendoscope et, lorsque l'occasion. se présente de faire une vérifi- cation anatomique, à l'autopsie, on retrouve dans la rate humaine les modifications signalées dans la rate des animaux : la fermeté du tissu, l'hyper- trophie des follicules lymphatiques et la diminu- tion de la congestion sanguine. Chez l'homme typhique, sous lPinfluence du sérum, comme chez l'animal, l'activité des glo- bules blancs à englober et à détruire les bacilles d'Eberth se Cette nouvelle est-elle due à une propriété acquise par les globules blancs ou à une modification des montre exaltée. puissance TAS humeurs, à un état bactéricide dans le sens très général où l’entendaient Bouchard et son école? On sait qu'en 1895, dans une expérience célèbre faite in vitro, Denys (de Louvain) et Leclef ont montré que, lorsqu'on placait en contact des glo- bules blancs normaux et des streptocoques et qu’on ajoutait au mélange du sérum d'animal neuf ou du sérum de vacciné, les résultats de l'englobement et de la phagocytose étaient très différents dans le is Avant l'injection (Convalescence 1° TETE Forme bénigne. Avant l'injection Î jour après (Convalescencel*"mois [72 heures aprés Forme grave. Fig. 7. — Courbes des index opsoniques, au cours de la lièvre typhoide trailée par la Sérothérapie. premier et dans le second cas. Pour faire détruire les microbes, le sérum de vacciné témoignait d'un pouvoir incontestable, que les uns attribuaient à la stimulation des leucocytes et les autres à l'atténua- tion des microbes. En renouvelant, en variant et en modifiant d'une manière heureuse cette expé- rience, Wright et ses élèves ont eu le mérite d'étu- dier avec Soin ce phénomène et de spécifier, sous le nom d'opsonine, cette propriété de suractiver la pha- gocytose, propriété acquise par le sérum dans les organismes immunisés ou en voie d'immunisation, Eh bien, le phénomène créé dans le corps du malade atteint de fièvre typhoïde par l'injection du A. CHANTEMESSE — SÉROTHÉRAPIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE sérum antityphoïde est un phénomène d'opsonisa- tion. Le sang de ces malades, qui, dans les formes graves, ne se défendait pas ou se défendait mal, peut désormais se défendre mieux, englober par ses leucocytes beaucoup de bacilles et les détruire, et parfois même les détruire en si grand nombre que cette désinfection à l'intérieur crée le danger d'une surcharge précipitée ét excessive de détritus microbiens dans le sang. Pour donner la preuve de ce mécanisme défensif, il suffit de dresser chaque jour, chez les malades soumis à la sérothérapie, la courbe des index opso- niques prélevés dans les diverses formes cliniques de la fièvre typhoïde. Avec la collaboration de mon interne M. Milhit, j'ai. suivi, chez un grand nombre de malades, la marche du développement des opsonines, et nos observa- tions se résument dans les deux schémas ci-contre de courbes d'index opsoniques (fig. 7). L'index opsonique, mesuré par la méthode de Wright, est le rapport entre le pouvoir (d'englober les bacilles typhiques) dont jouissent les globules blancs humains actionnés par un sérum normal humain et le pouvoir dont ces mêmes globules humains « sont revêtus quand ils recoivent l'impulsion d'un sang de typhique, soit avant, soit après l'injection » de sérum, On voit sur ces figures que la courbe des index opsoniques est un peu variable suivant qu'il s'agit de forme légère ou de forme grave de la maladie. La courbe de la forme bénigne montre que, déjà avant l'intervention du sérum thérapeutique, l'index opsonique est assez élevé: 2,10 (la normale étant aux environs de l'unité). Dès le lendemain de l'injection, l'index opsonique augmente; il atteint un point élevé le quatrième jour; la phagocytose se fait alors assez énergiquement, puis l'index baisse un peu, à mesure que le sérum injecté est éliminé, et bientôt la défervescence se dessine, tandis que le sérum du malade contient de plus en plus des opsonines. Quand la convalescence est bien franche, l'index opsonique reste encore élevé pendant le premier mois après la guérison; quand la convalescence est traïinante pour une raison quelconque (troubles digeslifs, tuberculose la- tente, etc.), l'index opsonique marque un chiffre plus faible. La courbe des index opsoniques dans les formes graves montre d'abord un index faible avant l'injec- tion; l'individu se défend médiocrement; puis, après le sérum, dans les trois à quatre jours suivants, une élévation brusque et intense du chiffre de ces index. Il se fait à ce moment une destruction intense de bacilles, destruction qui jette dans la circulation d'un malade déjà intoxiqué M par la fièvre typhoïde de nouveaux produits toxiques De Dre +. à een rnb APT ss th 0 QG A nd Tu 08 mn ON Co M on à à Si A. CHANTEMESSE — SÉROTHÉRAPIE DE LA FIÈVRE TYPHOÏDE 749 de bacilles. Devant cette surcharge de toxicité, le malade réagit par la période fébrile dite de réac- tion ; et cette notion impose la nécessité de modérer, dans les formes graves, la rapide destruction bacil- laire, et n'injecter que de très faibles doses de sérum aux malades fortement intoxiqués. Du quatrième au douzième jour après l'injection, à mesure que l'action du sérum s'élimine, on voit la courbe des index s'abaisser tout en restant, cependant, très supérieure au chiffre des opsonines constaté avant l'injection. Puis, dans ces formes graves où la maladie se prolonge un peu, on voit cette courbe des index osciller jusqu'à la conva- lescence autour d'une ligne à peu près horizontale ; mais, phénomène capital et qui explique que les malades, tout en conservant de la fièvre, se dé- fendent bien, ne sont nullement en danger et con- servent une mine relativement florissante, les index opsoniques restent toujours assez élevés; la pha- gocytose se fait bien, la résistance est organisée; enfin arrive l'ascension finale de la courbe opso- nique à l’aurore de la guérison. Les phénomènes opsoniques apparus dans le sang des malades traités par le sérum ne prennent toute leur signification que lorsqu'on compare entre elles, que l'on superpose pour ainsi dire, les modi- ficalions survenues dans le sang, dans les organes hématopoïétiques et dans les courbes thermiques. Alors les effets produits par la sérothérapie anti- typhoïde et les réactions constatées dans la physio- logie pathologique de la maladie modifiée se des- sinent avec une netteté suffisante pour qu'on puisse émettre, sur leurs rapports réciproques, une hypo- thèse fondée sur des observations expérimentales et cliniques; la voici : sous l'influence du sérum antityphoïde — sérum qui, même chauffé, contient des opsonines — il se fait dans l'organisme du malade — peut-être par un phénomène d'opothé- rapie — une excitation des appareils Iymphoïdes, myéloïdes et sanguins, appareils qui ont déjà ressenti eux-mêmes les effets de l'intoxication. L'hyperactivité provoquée dans ces organes fait naître des opsonines qui arrivent en grand nombre dans le sang; les bacilles sont happés et détruits. Dans les formes bénignes, l'impulsion donnée aux appareils fabricants d'opsonines n'est pas très con- sidérable et le sérum amène une perturbation utile, mais modérée. Dans les formes graves, la secousse provoquée par le sérum est plus violente, plus utile aussi, mais à condition d'être ménagée. La con- duite à tenir par le clinicien s'éclaire à la lecture de ces courbes des index opsoniques. Il faut craindre, en effet, de donner une perturba- tion trop forte aux malades; on risquerait d'inhi- ber la production des opsonines. Lorsque l'état s'aggrave, par exemple à la suite d'une perforation REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. intestinale, la courbe des index opsoniques descend chaque jour jusqu à l'agonie. Les observations que je viens de faire connaitre me permeltent de donner aujourd'hui l'explication de faits que j'avais signalés dans des communica- tions précédentes à propos de la sérothérapie et dont la nature n'avail pas été bien comprise. En 1901, j'avais émis cette hypothèse (Presse médi- cale) : « Il se fait, sous l'influence du médicament, une destruction rapide d'un très grand nombre de microbes, et leur multitude jette dans la circulation des substances pyrétogènes plus ou moins abon- dantes. » Il suffit de comparer la courbe des opsonines à celle des températures pour voir qu'après le sérum la période de réaction fébrile suit la période d'op- sonisation maxima et qu'elle en est la traduction légitime. Si, dans les derniers jours de la maladie etau moment de la convalescence, l'augmentation du chiffre des opsonines ne fait pas apparaitre la fièvre, c'est qu'à ce moment il n'y à plus ou que peu de bacilles à détruire. En 1902 (Congrès du Caire), je disais : « Plus le malade est malade et plus faible doit être la dose de sérum injecté. » Cette observation avait à cette époque paru étrange, étant données les idées clas- siques au sujet de la sérothérapie antidiphtérique et de l'utilité des doses massives dans les états diphtériques graves. Aujourd'hui, létude de la courbe des opsonines explique et justifie cette prudence en matière de sérothérapie antity- phoïde. Enfin, on à émis celle critique est vraiment un médicament actif dans la fièvre « Si le sérum typhoïde, pourquoi continuer à employer les bains froids qui sont si douloureux à tolérer? » A cette objection, on peut répondre : Pour faire supporter dans les formes graves la réaction pro- duite par la destruction microbienne rapide, les bains froids ou frais sont éminemment utiles; et ces bains, collaborateurs de la sérothérapie, ne pourront être supprimés que lorsqu'on possédera un sérum d'une puissance antitoxique très consi- dérable. Le sérum antityphoïde n'est done pas un médi- cament qui suffit à tout, mais c'est un médicament d'une grande puissance et dont il faut savoir se servir. Un regard jeté sur la courbe des opsonines suffit à en donner la conviction. Ce remède à un avantage exceptionnel sur tous les autres; il aide surement et énergiquement les cellules du corps à détruire les microbes de la fièvre typhoïde. Quel est l'autre matière pharmacodynamnique en qui l'on puisse de bonne foi reconnaitre un tel privilège? Grâce à ce sérum, dans divers services hospitaliers, 18 750 A. TSCHIRCH — CHIMIE PHYSIOLOGIQUE DES SÉCRÉTIONS VÉGÉTALES on à obtenu une mortalité typhoïde extraordinai- rement basse. Au Congrès du Caire, en 1902, j'avais prononcé cette phrase : « Par l'addition de sérum antity- phoïde à l'hydrothérapie, j'estime que la morta- lité par fièvre tvphoïde doit tomber à 4 ou 5 °/. » | Cinq ans se sont écoulés; le nombre des cas traités à l'hôpital est devenu beaucoup plus consi= dérable, et je n'ai rien à changer à cette proposi- tion *. D' A. Chantemesse, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. © LES BASES D'UNE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE _ DES SÉCRÉTIONS VÉGÉTALES Lorsqu'en 1888 j'entrepris l'étude des sécrétions végétales, en particulier des résines, c’étaient des considérations physiologiques qui me guidaient. J'avais établi le fait qu'il existe des plantes qui, normalement, ne contiennent ou ne forment aucune sécrétion et qui ne constituent des réservoirs sécré- teurs qu'après avoir subi des lésions. J'entrevis alors la possibilité, par des recherches chimiques comparées, d'une part sur l'écorce normale, sans sécrétion, de l'arbre, d'autre part sur la résine, de découvrir l’origine de la sécrétion. Les résultats de ces recherches ne répondirent pas à mon attente. En dehors des constituants communs, je ne trouvai chez le Styrax benzoin aucune substance caracté- ristique, et chez le Myroxylon Pereirae que de la coumarine: celle-ci présente bien des rapports directs avec les constituants du baume du Pérou, mais n'est pas un corps plus simple et ne peut être considérée comme une substance mère. Les études micro-chimiques furent donc complètement aban- données. La question devait être reprise par un autre bout : il fallait essayer, par une étude exacte des sécrétions, de parvenir à des conclusions sur leur formation. J'ai entrepris cette vaste étude, et, après quinze années de travail, je suis arrivé à quelques résultats généraux, qui peuvent être con- sidérés comme le commencement d'une chimie physiologique des sécrétions. On reconnait d'abord que les sécrétions rési- neuses — ce sont les seules dont je me sois occupé, à l'exclusion des latex — ne se laissent pas toutes réunir dans un même groupe : elles sont si variées qu'on doit les répartir d’abord dans des classes diverses el considérer celles-ci séparément. On constate ensuite qu'il existe un rapport souvent très accusé entre la composition chimique de la sécrétion, d'une part, et la famille végétale à laquelle appartient la plante qui la fournit, d'autre part. Dans beaucoup de cas, on peut tirer, de la constitution chimique d'une sécrétion, une conelu- sion sur la famille de la plante. Les sécrétions des Ombellifères, des Burséracées, des Conifères, des Convolvulacées, des Sapotacées, possèdent tant de particularités, de traits caractéristiques que, chi- miquement, on peut aussi très bien les considérer comme des familles distinctes. C'est là une règle générale. Cependant, il y a des exceptions, et ces exceptions offrent peut-être quelques indications sur la voie où il faut chercher les lois de la forma tion des résines. Les résines benzéniques, par exemple, présentent entre elles des analogies de famille, et cependant elles appartiennent à des familles végétales très différentes, souvent très éloi- gnées dans le système végétal. Ainsi, les Légumi- neuses, les Styracacées, les Balsamifluées, les Lilia- cées et les Palmiers sont aussi éloignés que pos- sible dans le système végétal, et, toutefois, leurs sécrétions offrent beaucoup de concordances. Il en est de même des caoutchouces, qui sont assez sem- blables, quoiqu'ils proviennent d'au moins six familles peu voisines : les Euphorbiacées, les Arto= carpées, les Apocynées, les Composées, les Loran- thacées et les Musacées. On ne peut donc établir une division des sécré- lions résineuses d'après les familles végétales que dans une mesure restreinte. Si nous voulons obte- nir les bases d'une chimie physiologique des sécré=. tions, nous devons en chercher les traits essentiels et communs dans la physionomie chimique des sécrétions. Et voici ce qu'on peut retirer dans cette voie de la masse des phénomènes particuliers. IT Un premier groupe est formé par les résines lan- noliques, sécrétions résineuses qui renferment les éthers des résinotannols et d'acides aromatiques appartenant aux séries de l'acide benzoïque et de l'acide cinnamique. La découverte de ceite classer de résines a apporté la preuve que beaucoup de 1 Conférence faite à la séance plénière du Congrès d'Hygiène de Berlin, le 26 Septembre 1907, A. TSCHIRCH — CHIMIE PHYSIOLOGIQUE DES SÉCRÉTIONS VÉGÉTALES 151 résines — comme les graisses — sont des éthers. Ce fut une des plus grandes surprises de ces études, pourtantsiriches en étonnements, de me rencontrer ici avec des membres du groupe des matières tan- nantes. Je ne m'attendais pas le moins du monde à cette rencontre, quoiqu'on eût plusieurs fois parlé antérieurement d'une « formation des résines aux -dépens. des matières lannantes », il est vrai sans avoir appuyé celle hypothèse d'autres faits que de l'existence de matières tannantes dans les tissus au voisinage des réservoirs de sécrétion. Mais les matières tannantes sont des constituants si fré- quents des parties des plantes, surtout de celles qui ne forment pas de résines, et elles se trouvent en particulier si abondamment dans les organes de plantes dont les sécrétions ne contiennent pas de résinotannols (Conifères), qu'on ne pouvait baser sur ces faits une théorie de la formation des résines. Les rapports réels des résines et des tannins n'ont été dévoilés que par la découverte du groupe des résinotannols dans les résines benzéniques et celles des Ombellifères. Il n'y a aucun doute que les résinotannols soient des phénols aromatiques. On peut s'y attendre d'après leur réaction avec les sels de fer, et la for- mation d'acide picrique par l’action de l'acide nitri- que sur eux le confirme. Quelques-uns, comme les tannols des Acaroïdées, se transforment même très facilement en acide picrique. La présence de ben- zène, toluène, styrol, après la distillation avec la poudre de zinc, s'accorde avec l'hypothèse précé- dente. Mais, si ce sont des phénols aromatiques, ils se trouvent en rapports étroits avec les acides aroma- tiques formant les éthers résineux (résines) que nous leur trouvons liés. Ces acides appartiennent à deux groupes : l'un est celui des acides benzoïque et salicylique, l'autre celui des acides cinnamique et oxycinnamiques (acides paracoumarique, caféi- que et férularique, umbelliférone). Pour comprendre la synthèse de ces éthers rési- neux aux dépens des phénols et des acides aroma- tiques, il ne nous reste plus qu'à supposer que, dans la cellule vivante, des noyaux aromatiques se for- ment par la fermeture dans différentes directions de chaines de carbones originellement ouvertes. ITT Il en est tout autrement des acides résinoliques (acides de la résine) et des résinols (alcools de la résine). Les acides de la résine des Conifères, — représentants typiques des acides résinoliques, — dont le nombre est déjà très grand, mais qui peuvent vraisemblablement se ramener à un petit nombre de types, ne renferment certainement pas de noyau aromatique. Chez ceux où l'on a cherché à déceler des doubles liaisons, on n’en a toujours trouvé qu'une ou deux dans la grosse molécule ; la majorité des atomes de carbone ne possède pas de liaison double, mais une liaison simple, comme chez les combinaisons aliphatiques. Cependant, il faut admettre aussi dans ces composés une chaîne fermée, et toutes leurs réactions montrent qu'ils appartiennent à la série hydroaromatique. Leur grande résistance vis-à-vis des réactifs — circons- tance qui confère aux résines qui les contiennent leur grande importance pour la pratique de l’indus- trie des vernis — les place dans ce groupe, qui forme le passage entre les composés aromatiques et aliphatiques. Ici, la fermeture de corps alipha- tiques formés originellement dans les échanges de la cellule se laisse encore plus facilement sup- poser. J'ai eu le bonheur de trouver le noyau qui est à base d’au moins quelques-uns de ces acides de la résine et de rendre assez vraisemblable leur déri- vation de celui-ci. En 1900 déjà, j'ai montré que, dans la distillation des acides de la résine des Coni- fères, il se produit du rétène, landis qu'on trouve des rétènes hydrogénés dans l'huile de résine; en même temps, j'ai indiqué que l’'hydrocarbure com- plètement hydrogéné dérivé du rétène, la fichtélite, se trouve dans de vieux dépôts de bois de sapin soumis à la décomposition, surtout aux endroits où il y avait autrefois de la résine, c'est-à-dire à la place des réservoirs sécréteurs. Plus tard, Vester- berg et Easterfield sont aussi tombés sur le rétène. Ce n’est pas ici le lieu de discuter les formules du rélène et de la fichtélite, qui ne sont pas encore complètement fixées; j'emploierai celles de Bam- berger : H°C CH° CH°CH CH! H°C < SERGE > cr HG HO / CH CH.CH* HG CHE Perhydrorétène — C18H®2 (fichtélile). CH CH CŒHC CH EEE Ce HE & ) CH Hour cn Qu CH CH Rétène — C{ISH18, Entre ces deux composés se trouve un décahy- drorétène (1), d'où l'on peut faire dériver l'acide pimarique (Il) en remplacant un atome d'H par CH et un autre par le groupe COOH (la position de ces deux groupes étant réservée). H?C CH GHCHM CHE 20 NCH-G Are (I H°C< GIE , NS NS / HG HEN /ù (CH.CH* HC CH Décahydrorétène =-CI8H*, 152 A. TSCHIRCH — CHIMIE PHYSIOLOGIQUE DES SÉCRÉTIONS VÉGÉTALES COOH:.CH CH CH CHSNCH? EN CU C4 Nan Il RC*< > Ce D CH H'CUmHUN ACHEUCHQ CHE HC C.CH* Acide pimarique — C*°H%02, Les raisons pour lesquelles je tiens cette der- nière formule, ou une analogue, pour exacte sont que, dans la réalité, on peut déceler deux doubles liaisons et que, dans le dédoublement des acides du groupe des acides pimarique et abiétique, on obtient soit du naphtalène (ou du méthylnaphta- lène), soit un terpène, mais non les deux simulta- nément,. En y admettant la présence d'un noyau terpé- nique, les résines des Conifères entrent en rapports étroits avec les terpènes qui les accompagnent si souvent, et l'on est amené à supposer pour les deux une substance-mère analogue. Ce qu'est celle-ci reste encore mystérieux, Car nous ne savons rien des rapports des terpènes avec les hydrates de carbone, par exemple. Mais ne faut-il prendre ici comme point de départ que les hydrates de car- bone, qui jouent toujours le principal rôle comme substances-mères dans les échanges de la cellule? N'y aurait-il pas d'autres constituants cellulaires aussi répandus? J'ai indiqué déjà en 190% que la phylostérine (cholestérine) est un constituant très régulier des plantes, qui ne fait probablement défaut à aucune cellule. Il serait plus exact de parler de phytosté- rines, car il en existe plusieurs, formant un groupe. J'ai aussi émis l’idée qu'elles constituent vraisem- blablement la clef pour l'explication de nombreux processus d'échange cellulaire. Lorsque nous con- naitrons leur constitution, une vive lumière jaillira sur ce qui reste encore obscur. Malheureusement, cette constitution est toujours douteuse : quelques formules montrent des rapports avec les terpènes, une autre se déduit d'un picène réduit. Mais nous ne savons rien de plus. Liebermann et Walitzky ont aussi mis en rapport les cholestérines avec les acides des résines des Conifères et les terpènes. Une preuve de l'existence de ces rapports réside dans des réactions colorées analogues : depuis dix ans, j'ai soumis tous les membres de la série des acides résineux isolés par mes élèves aux réactifs usuels de la cholestérine, Dans beaucoup de cas, comme pour l'acide abiétique, par exemple, on obtient des réactions analogues ; dans d’autres, la similitude n'est pas claire. En partant de corps relativement simples, nous pouvons parvenir au voisinage des acides de la resine des Conifères. Lawrence a préparé, par oxydation de l'acide f-isopropylglutarique, de l'acide terpénilique, et par oxydation de ce dernier de l'acide térébique, que l'on peut obtenir aussi bien à partir du pinène que par oxydation de la colophane, c'est-à-dire de l'acide abiétique. J'ai déjà rappelé que la destruction des résines et des acides résineux des Conifères fournit des membres de la série terpénique; il en est de même des amyrines, parentes des résines des Conifères, qui donnent des réactions de phytostérine très accentuées; aussi les amyrilènes (Vesterberg) doi- vent-ils être comptés parmi les terpènes. Un des résinotannols isolés par nous, le galbarésinotannol (du Galbanum), nous conduit au voisinage du pinène, car il livre, par oxydation avec l'acide nitrique, de l'acide camphorique et de l'acide cam- phoronique. . Ainsi, quoique aujourd'hui nous ne puissions encore rien dire de certain sur la constitution des acides de la résine des Conifères, il est cependant très vraisemblable qu'ils appartiennent aux com- binaisons hydroaromatiques, dérivent d'un rétène hydrogéné et sont en rapport avec les terpènes aussi bien qu'avec les phytostérines. Mais je ne puis émettre l'hypothèse qu'ils dérivent de ces der- niers. La phytostérine est elle-même un corps beau- coup trop compliqué pour constituer la substance- mère des acides résineux des Conifères, et les ter- pènes de formule C°H" n'en sont probablement pas non plus lés substances-mères, au moins de la manière supposée jusqu à présent. LMI Les alcools de la résine ou résinols présentent une parenté multiple avec les acides de la résine. Plusieurs d'entre eux offrent aussi des rapports avec les cholestérines et les terpènes. Leur étude me parait particulièrement riche en perspectives pour l'édification ultérieure d'une chimie physiolo- gique des résines. Nous constatons pour quelques- uns d'entre eux le fait intéressant qu'ils se ren- contrent dans plusieurs familles de plantes : ainsi l'amyrine chez les Burséracées et les Rutacées, des résinols de formule C®H”0* chez les Styracacées et les Balsamifluées. Comme plusieurs de ces combi-" | naisons cristallisent très bien, l'étude en a été faci=M | litée. : Un groupe de résinols se comporle, par contre,M tout autrement : ce sont les résinols de la racine dem gaïac. Nous sommes ici en présence de produits den condensation entre des substances aliphatiques (aldéhyde tiglique) et des phénols aromatiques à (gaïacol, crésol, etc.). : Cependant, on a trouvé même dans les résines des représentants de la série aliphatique : l'acide aleuritique de la laque en bâton enestun exemple; la convolvuline contient aussi, à côté de restes de sucres, des acides aliphatiques ‘acides méthyl A. TSCHIRCH — CHIMIE PHYSIOLOGIQUE DES SÉCRÉTIONS VÉGÉTALES 153 éthyl-acétique, #-méthyl-B-oxybutyrique). Récem- ment Harries a dérivé la gutlta de l'aldéhyde lévu- lique et il la considère comme un polymère du À : 5-diméthyleyclooctadiène : c'est-à-dire comme CHS.C. CH°. CH°. CH z | rule un multiple du pentadiényl-rectène CH, de la même facon que la cellulose et l’amidon sont des multi-anhydrides du sucre de raisin. Harries se re- présente de la facon suivante la formation de la gutta : le sucre (pentose) est réduit dans le reste CH, et celui-ci, à l'état naissant, se condense dans le complexe (CH). Les rapports entre les sucres et l’aldéhyde et l'acide lévuliques sont déjà connus. Ici l’on peut suivre la genèse d'un corps résineux directement à partir du sucre, qui est considéré comme la source de la plupart des constituants du contenu cellulaire. Y En résumé, les résines ne forment pas un groupe chimiquement homogène, mais se recrutent aux dépens de diverses classes de corps pour lesquelles on ne peut reconnaitre une substance-mère com- mune. On ne peut développer jusqu'à présent d'hy- pothèses plausibles sur leur formation que dans très peu de cas. S'il en est ainsi de la résine pure, on ne sait guère davantage des « substances accessoires », c'est-à-dire des substances qui accompagnent le corps résineux. On peut quelquefois les mettre en rapport avec les résines l'on trouve fré- quemment, parmi ces substances accessoires, les produits de dédoublement des éthers résineux, ainsi aussi bien des résines tannoliques que des résines résinoliques ; puis, chez les résines à éthers rési- neux aromatiques, d'autres corps de la série aro- matique (éthers, acides et aldéhydes); enfin, chez les résines de Conifères, nommées autrefois résines terpéniques, des lerpènes. La présence très régu- lière de substances amères parmi les substances accessoires était restée mystérieuse jusqu à ce que nous soyons parvenu, récemment, à dériver une substance amère d'un acide résineux non amer de la sandaraque, de telle sorte que nous devons re- connaître que ces substances sont aussi en rapport avec les corps résineux vrais. Par contre, je considère comme complètement élucidée la présence de corps gommeux à côté des résines, par exemple dans les prétendues résines gommeuses. Comme la formation de la sécrétion s'opère dans la couche résinogène, et que celle-ci est constituée par une substance gommeuse ou muqueuse, dans tous les cas où la substance rési- nogène est conservée longtemps et devient molle (Ombellifères), la résine et la gomme coulent en- semble lorsque l’on coupe l'organe (résine gom- meuse des Ombellifères); tandis que partout où la couche résinogène périt de bonne heure ou est dure (Conifères), on n'observe pas de mélange de gomme avec la résine (résine des Conifères). Cette subs- tance gommeuse dérivant de la couche résinogène contient toujours des enzymes (gommase): fait intéressant, qui indique peut-être que la transfor- mation des substances résinogènes élaborées par les cellules dans la sécrétion a lieu avec le con- cours de ferments. Car, dans la couche résinogène, nous nous trouvons au foyer de la sécrétion, au laboratoire de la production de la résine. Je ne connais, d'ailleurs, aucun ferment végétal qui ne soit associé à une substance gommeuse, On est done porté involontairement à cette conception qu'il s'agit ici de combinaisons et non de mélanges, et que les ferments végétaux sont peut-être des stades intermédiaires entre les corps albuminoïdes et les hémicelluloses. Tous donnent la réaction du pyrrol et celle du furfurol. | Il est particulièrement intéressant de voir une couche de la valeur d'une membrane fonctionner comme résinogène, car la membrane des cellules végétales a été, jusqu'à présent, plutôt méconnue dans ses fonctions, et, lorsqu'il s'agissait des fonc- tions chimiques de la cellule végétale, sacrifiée au profit du contenu cellulaire plasmatique. Il n'y à aucun doute quelesprincipaux processus d'échanges ne se passent dans le contenu cellulaire; mais que la membrane soit aussi capable de fonctions chi- miques, c'est précisément ce que montre la couche résinogène. Celle-ci ne se rencontre toutefois qu'aux endroits où se trouvent déjà les « ornements intercellulaires »; elle est donc surtout en rapport avec la substance intercellulaire, qui, comme je l'ai montré irréfutablement par de nouvelles re- cherches, intervient aussi en première ligne dans la formation du mucilage des Algues et de la pec- tine des fruits. Puisque la pectine dérive de la substance intercellulaire, je considère cette der- nière chimiquement comme une protopecline. Comme, partout où il y a une sécrétion, on trouve des membres du groupe des hémicelluloses, nous sommes de nouveau hydrates de carbone comme l'ultime source des conduits à considérer les sécrétions. Ainsi s'éclaire peu à peu l'ombre; nous voyons se découvrir quelques perspectives de la chimie physiologique des sécrétions, et par là se préciser un chapitre intéressant de la physiologie chimique de la cellule. A. Tschirch, Professeur à l'Université de Berne. LE NOMADISME ET L'ÉMIGRATION EN BASSE-BRETAGNE Des phénomènes tels que le nomadisme et l'émi- gration sont peut-être les plus propres à montrer la connexion étroite qui unit les faits de morpho- logie sociale et de géographie physique. Par leur mobilité même, le nomade et l’émigrant révèlent qu'ils dépendent du sol. C'est le sol qui les disperse et qui les chasse. L'homme voudrait s'enraciner; ses instincts sociaux et ses besoins économiques l'y poussent également; s’il ne le fait pas, c'est que la terre lui est hostile”. Il ne peut s'affranchir de la sujétion des conditions naturelles qu'à condi- tion de sortir de chez lui, et, dans le choix de son centre d'attraction, il recouvre, au moins pour une partie, l'exercice de sa liberté”; mais il n’est pas libre de quitter ou de ne pas quitter son centre de dispersion; c'est ce qui explique la régularité, la constance, la distribution géographique très nette des faits de nomadisme, d'émigralion temporaire, d'émigration définitive, qui se modifient, non par soubresauts, mais par évolution régulière, avec l’aide du temps. Dans la Basse-Bretagne, que l'on pourrait regarder Lout entière comme un centre de dispersion, ces faits sont très intéressants; ils ont beaucoup de valeur matérielle, car les déracinés temporaires et définitifs sont fort nombreux: ils ont aussi beaucoup de valeur morale, car ils cons- üituent un des éléments de transformation de la race, et un des plus actifs. I. — LE SOL ET L'HOMME. A l’ouest du méridien de Saint-Brieuc, la pres- qu'ile de Basse-Bretagne, qui est une des terres les plus peuplées de France (105 habitants au kilo- mètre carré), est aussi une des plus rebelles à l'effort humain. Elle est formée de roches anciennes, déchaussées et mises au jour par les érosions; ces roches dures se désagrègent en pier- railles infécondes, que recouvre un humus insuffi- ‘ La présente étude essaie de développer et de mettre au point un sujet que nous avons déjà esquissé dans le chap. X de notre livre sur la Basse-Bretagne (Paris, Société nou- velle de librairie et d'édition, librairie Cornély, 1907). ? Nous avons en vue uniquement les déplacements des populations encore primitives comme celles de 3asse-Bretagne. Pour les migrations des populations plus avancées, l'analyse des mobiles psychologiques et sociaux est plus complexe. * Ce qui veut dire, bien entendu, que plusieurs voies se présentent à lui; pour le choix de celle qui lui convient, il n'est pas déterminé d'une manière moins rigoureuse que pour son déracinement proprement dit; mais les mobiles moraux où économiques de cette détermination sont sou- vent individuels, et échappent, par conséquent, aux études de morphologie sociale. rurales sant et dépourvu de calcaire. Le sous-sol est cons- titué par des schistes non gréseux, des schistes. gréseux el des granites. Les premiers, qui se décomposent assez vite et uniformément sous l'influence des agents atmosphériques, se dévelop- pent àu centre de la presqu'ile dans le long et étroit bassin de Châteaulin, sorte de cuvette où se replient indéfiniment les lents cours d'eau du réseau de l'Aulne et du Blavet supérieur. Les … schistes gréseux forment les crêtes allongées de la montagne d'Arrée et de la montagne Noire, où leurs dalles redressées et tranchantes percent en tant d'endroits la brousse de la lande. Les granites font au milieu des schistes de larges boursou- flures, des « boutonnières », où des dômes arrondis dessinent sur le sol des moutonnements monotones; en outre, les deux côtes qui s'inclinent, au Nord vers la Manche, au Sud vers le golfe de Gascogne, côtes qui donnent deux exemples parfaits de péné- plaines régulièrement usées par l'érosion, sont aussi des tables de granite, découpées par d'étroites et profondes vallées où la mer remonte loin dans l'intérieur. Partout, sauf dans la presquile de Crozon et au fond des rades de Brest et de Douar- nenez, le rivage présente à l'Océan une falaise basse de granite, dissociée en une poussière d'écueils. A première vue, une pareille terre paraît impropre aux établissements humains; elle doit empêcher, semble-t-il, l'établissement d'une race nombreuse, ou, si une telle race parvient à sy développer, il faut de toute nécessité que ses enfants essaiment d'un sol qui se prête mal à les nourrir. Les prairies normandes, les riches terres de la Vilaine et de la Loire, qui se trouvent si près du pays rocailleux et marécageux de Basse-Bre- tagne, accentuent encore par le contraste la pau- vreté de la terre basse-bretonne, qu'il semble que les hommes devraient délaisser en masse. Et une étude superficielle ne pourrait expliquer le fait curieux que c'est, au contraire, cette terre si pauvre qui, tout en essaimant le plus ses enfants, est devenue la terre la plus peuplée de l'Ouest fran- cais; et non seulement c'est la plus peuplée, mais sa population eroit toujours rapidement, tandis que les autres terres, douces à l'existence humaine, restent stationnaires ou se dépeuplent. C'est que le sol de la Basse-Bretagne est plus varié et, par suite, plus hospitalier aux établisse- ments humains qu'on ne le croirait au premier abord; c'est que, par lui-même et par la mer qui le pénètre de toutes parts, il offre des ressources Li mn CAMILLE VALLAUX — LE NOMADISME que l'analyse ‘de sa structure géologique ne laisse pas soupconner; et c'est, aussi, que e sol n'est pas tout, même dans l'étude d'une population presque uniquement agricole : telle mauvaise terre verra - croître ses ressources et ses colons d'une manière € inespérée, si l'effort humain pour l'améliorer trouve des auxiliaires naturels soit dans le climat, soit dans les eaux, soit dans les amendements, soit dans l'appropriation à quelque culture spéciale. Ces auxiliaires existent en Basse-Bretagne. Mais, ils n'existent que sur la côte, sur la lisière de l'Ar-Mor; c'est l'Ar-Mor qui en profite depuis longtemps, tandis que l'intérieur, l'ancien pays des bois ou Ar-Coat, où la vie humaine dépend plus étroitement de l'âpreté du sol, commence à peine à s'affranchir de cette sujélion. Comment l'homme est-il parvenu à faire de l'Ar-Mor un logis habitable et presque confortable qu'il n'est guère tenté de quitter, tandis qu'il aban- donne volontiers l'existence par trop précaire de l'Ar-Coat ? D'abord, il a été aidé par le sol lui-même dans l'utilisation d'une grande partie de la côte. Les granites du nord de la Basse-Bretagne, entre Saint-Brieuc et Lesneven, sont recouverts d'allu- vions récentes, qui rendent le sol meuble et facile à aménager, et qui, en tamisant les eaux de ruis- sellement, font disparaitre les flaques stagnantes et les courants sauvages, si nombreux en d'autres endroits du pays. Pour qui vient de l'intérieur ou de l'extrême ouest, où la roche dure, la lande infé- conde et le marais évoquent l'image d'une nature indomptée, c'est une sensation très nette de chan- gement et d'adoucissement des conditions nalu- relles que donnent les pays de Lannion et de Tré- guier, avec leurs champs de blé, leurs collines arrondies et presque effacées, leurs rivières calmes, leurs vallées en pente douce. C'est la région privi- légiée entre toutes; c'est elle qui, vue d'abord par les voyageurs qui viennent du centre de la France et comparée par eux aux hautes landes pierreuses ou tourbeuses de l’Ar-Coat, leur a suggéré l'idée d'une côte bretonne exceptionnellement favorisée par rapport à l'intérieur, une « ceinture dorée », entourant un pays de pierres et de boue. Sans doute, cette idée, prise au pied de la lettre, n'est pas exacte, et il s'en faut que l'Ar-Mor tout entier soit une terre comparable au Trégorrois. Cependant, il y à un agent physique favorable dont les effets bienfaisants sont ressentis par tout l'Ar- Mor : c’est le climat. Il est doux et humide, avec de faibles différences, sur le littoral entier, et, si la médiocrité de l'insolation ne permet pas le déve- loppement de cultures telles que la vigne, si même les céréales n'arrivent pas toujours à maturité d'une manière satisfaisante, beaucoup de cultures 155 ET L'ÉMIGRATION EN BASSE-BRETAGNE délicates, telles que les cultures maraïchères, sont favorisées par Ja température égale, par l'arrosage régulier, par la rareté des gelées, par la longueur relative des saisons intermédiaires. Si les figuiers se trouvent en pleine terre, non seulement à Roscoff, mais sur une quantité de points de la eôte ouest, cette curiosité botanique n'est pas un fait isolé et sans portée, car c'est un des indices les plus frap- pants de la douceur et de l'égalité de température qui permettent à la Basse-Bretagne, non seulement de faire la culture maraichère en plein champ, mais de la faire avec une avance notable sur beau- coup d’autres pays de production, et d'exporter ainsi des primeurs recherchées : nous verrons que, sur un des points les plus intéressants du pays, Roscoff et Saint-Pol-de-Léon, le mouvement com- mercial dérivé du climat est devenu lui-même la cause d'une émigration temporaire curieusement organisée, qui n'a aucun rapport avec les émigra- tions issues des centres de dispersion ordinaires ?. Ce sont la mer et les vents marins qui donnent à l'Ar-Mor son climat égal et doux. C'est aussi la mer qui lui donne de quoi suppléer à la pauvreté du sol, même dans les pays d'alluvion de Lannion et de Tréguier, et, à plus forte raison, hors de ces pays, sur les granites dénudés qui baignent dans l'Iroise et dans le golfe de Gascogne. Car c’est la mer qui fournit à l'Ar-Mor l'engrais végétal et l'engrais calcaire, le goémon et le maërl. Les fucus flottants amenés au rivage, les goémons, convien-- nent à merveille aux terres légères et sablonneuses ; les coquilles calcaires de Nullipores, qui consti- tuent le maërl, s'emploient sur les terres plus lourdes à fond argilo-siliceux; l'un et l'autre en- grais alternent donc sur le sol agricole de FAr-Mor, d'après la nature même de la terre et aussi d'après les cultures dominantes. Les grandes baies à fond de sable vasard, comme la baie de Morlaix, don- Il nent le maërl; tous les rochers de la côte donnent les goémons. Aussi la part de la lande inutilisable est-elle très réduite sur tout le littoral, sauf dans la presqu'ile de Crozon; peu à peu, l'homme à pu approprier ce sol, et, comme une bonification pro- gressive produit beaucoup plus et rebute moins les efforts que le défrichement primitif, l'homme de la terre, sur l'Ar-Mor, est moins lenté de quitter son chez lui, où les ressources peuvent s'accroitre assez facilement en même temps que la population. En outre, si la terre se montre décidément trop ingrate, la mer offre un champ d'exploitation d'un revenu abondant. Il est vrai aléatoire et irrégulier; mais l'exploitation de la mer ne se borne pas à la cueillette simple de ses produits; sur l'exploitation proprement dite sont que ce revenu est 3 Voy. Ch. III : L'Émigration temporaire. 756 CAMILLE VALLAUX — LE NOMADISME ET L'ÉMIGRATION EN BASSE-BRETAGNE venus se grefler les métiers de la mer, qui, en Basse-Bretagne, sont en grande partie des métiers d'État : les marins de l'Ar-Mor, liés au service publie par l'inscription maritime et par les pen- sions de retraite, sont habitués, non seulement à une vie régulière, mais à une vie presque séden- taire, si surprenant que cela paraisse au premier abord. Ce n'est pas dans les villages de pêcheurs que l'on trouvera des centres de dispersion. Que gagnerait le marin à s'en aller? Il quitterait le certain pour l'incertain; il serait obligé d'aban- donner l'assurance de sa demi-solde de retraite et les nombreux pelits avantages que lui vaut l'ins- criplion marilime. Aussi la population maritime a beau se mulliplier et accroître jusqu'à 200, 250 et même 270 habitants la densité kilométrique de cerlaines parties du littoral : ni les marins, ni les paysans de la côte n'émigrent. Cet ensemble de faits, qui concourt à enraciner à son sol une population pourtant très dense, res- sort très nettement, el les connexions apparaissent d'une manière frappante, lorsqu'on choisit une région-type, où se trouvent réunies toutes les con- dilions nécessaires à l'amélioration de la vie hu- maine sur l'Ar-Mor, et par conséquent à la séden- tarité de ses habitants (qu'on me pardonne ce barba- risme). Considérons la plaine d’alluvion qui s'étend au nord de Lesneven, de Kerlouan à Plouescat. Là vivent plus de 200 habitants au kilomètre carré, et ils y vivent, pour la plupart, bien mieux que 50 habitants, sur la même étendue de terrain, dans certains districts de l'Ar-Coat. Les flèches en pierre ajourée sont nombreuses à l'horizon; leur nombre même montre que les communes ne sont pas très étendues, ce qui conduit à penser que l'on ne trouve pas ici, entre les centres de groupement, ces marches inculles et désertes où les landes se déroulent à l'infini. Le morcellement du sol et la variété des cultures indiquent que la terre est uti- lisée de longue date et assouplie à plusieurs sortes de productions; mais c'est le froment qui domine, presque jusqu à la lisière de mer. La côte, découpée el caillouteuse, avec ses fonds de roche, se prête bien à la pêche lillorale, et notamment à la pêche des crustacés aux casiers. Très peu de chaumières du vieux type breton, entre Lesneven et Plounéour- Trez; au contraire, les maisons, dont beaucoup sont neuves el qui presque toutes sont récentes, montrent que le pays nourrit et abrite une popu- lation qui croil vile et qui ne cherche pas à quitter son lieu d'origine. Aux bourgs et dans les villages, aux jours de marchés et de fêtes, il est facile de distinguer l'élément marin, où les hommes sont coiffés de béretls, de l'élément paysan, qui a gardé le vieux chapeau à rubans de la Bretagne; mais il est visible aussi que ni les paysans, ni les marins ne sont dans la misère, et que, si de nombreux intérieurs sont encore extrêmement malpropres et peu confortables, cette négligence est due, non au manque de ressources, mais à la persistance d'ha- bitudes anciennes chez une population dont l'ins- tinct conservateur et traditionnaliste s'étend à tout. Marins et paysans sont presque tous propriétaires ; le morcellement de la propriété a suivi les progrès de la population, et ces lopins de la terre côtière que possède chaque famille suffisent, malgré leur peu détendue, à fixer au sol la famille et ses des- cendants. Car la propriété du sol ne donne dans ce pays, au point de vue économique, qu'un appoint assez peu important aux ressources qui provien- nent des métiers maritimes et agricoles; mais, au point de vue social, elle à pour conséquence la fixation de l'homme à la terre natale; le paysan et le marin tiennent à leur fraction d'hectare ou à leur hectare unique tout autant que si cet hectare était multiplié par cinquante ou par cent. A trente ou quarante kilomètres à peine de la_ lisière surpeuplée de l'Ar-Mor, dans les hautes landes de l’Ar-Coat, la nature de la terre et le mode d'existence des hommes subissent des modifica- tions profondes. Comme nous l'avons déjà indiqué, le pays de l'Ar-Coat, à l'exception du long et étroit bassin de Châäteaulin, se compose de roches dures, à fleur de sol, qui sont, soit des crêtes gréso-schisteuses très allongées (montagne d'Arrée et montagne Noire), soit des granites ondulés assez étendus en longueur et en largeur (plateaux de Quintin-Duault, de Gué- méné-Pontivy, du Faouët, du Huelgoat). Ce sol semble avoir été tout entier, à l'état primitif, une brousse forestière, sauf les sommets de la mon- tagne d'Arrée et de la montagne Noire, qui n'étaient qu'une lande rase et qui admettent à peine, aujour- d'hui même, les plantations de pins. À l'exception de ces minces rubans stériles, le pays de l'intérieur justifiait done son nom de pays des bois (Ar-Coat). Or, ainsi que le dit Ratzel, la forêt est, comme le désert, comme la haute montagne, comme la mer polaire, un des ennemis du peuplement humain : c'est un « vide dans l'æcoumène », et aussi un centre de dispersion pour les populations de la lisière forestière. Mais voici longtemps déjà que le sol rocailleux de lAr-Coat a cessé d'être une forêt : il a été, non pas défriché, mais déboisé; à la forêt a succédé, tantôt la culture pauvre, comme le seigle et le sarrasin, lantôt la lande utilisée comme pacage ; les hommes se sont dispersés sur les gra- nites et se sont établis en groupes serrés à la base des crêtes gréso-schisteuses. Toutefois, la colonisa- tion de l'Ar-Coat présente, jusqu'à nos jours, un caractère incomplet et inachevé : les hommes qui l'habitent, et qui ne sont pas trop nombreux au ! Î Ë CAMILLE VALLAUX — LE NOMADISME ET L'ÉMIGRATION EN BASSE-BRETAGNE . point de vue absolu de la densité kilométrique, ne peuvent s'y maintenir tous. Ici done, comme sur l'Ar-Mor, il ne faut pas considérer uniquement la composition du sol : nous devons examiner - s'il n'y a pas des agents physiques et sociaux d'une nature différente, qui empêchent l'homme de l’Ar-Coat de prendre racine sur son sol, de même que d’autres agents fixent sur la lisière maritime l'homme de l'Ar-Mor. Une des conditions physiques les plus hostiles qui soient dans l'Ar-Coat, par comparaison avec l'Ar-Mor, n’est autre que le climat. La distance de la mer, bien qu'elle ne soit nulle part supérieure à 85 kilomètres à vol d'oiseau, et l'altitude plus grande, bien que le point le plus élevé n'atteigne que 391 mètres, suffisent à donner aux terres de l'Ar-Coat un climat relativement rude, que caractérisent une pluviosité plus violente et moins également répartie, les gelées en hiver et au printemps, et la neige persistante d'hiver. Toutes proportions gardées, c'est un climat « conti- nental » ou « extrême », en comparaison de la dou- ceur et de l'égalité du climat de lAr-Mor. Si les différences relevées par les instruments d'observa- tion, thermomètre, baromètre, pluviomètre, parais- sent assez faibles, il ne faut pas oublier que, pour faibles qu'elles sont, ces différences suffisent à exclure de l'Ar-Coat toutes les primeurs de lAr- Mor, et par conséquent à supprimer à l'intérieur une des sources les plus certaines de richesse qui soient sur la côte. Au reste, les météorologistes savent bien que nos modes de notation sont encore insuffisants, et que, en Basse-Bretagne en particu- lier, le petit nombre des stations météorologiques et l'inexactilude des observations faites dans cer- taines d’entre elles ne permettent guère que de soupconner l'importance des modalités elimati- ques qui agissent sur l'existence humaine. C'est un moyen assurément empirique et médiocre, que celui qui consiste à passer plusieurs saisons d'hiver et d'été dans l'Ar-Mor et dans l'Ar-Coat, pour com- parer l'un et l’autre pays; cependant, si inférieur qu'il soit, l'emploi de ce moyen laisse dans l'esprit une impression assez frappante, et ne permet guère de douter de la réalité de faits que la science météorologique parviendra, dans l'avenir, à dégager et à chiffrer avec précision. Les extrêmes du climat de lAr-Coat, rappro- chés de l’imperméabilité du sol, de la raideur des pentes, du nombre assez grand des abrupts, et par contre de la présence des cirques d'érosion à fond plat (les Zoul), indiquent à l'avance que les eaux de l’intérieur sont mal aménagées, et qu'elles sont tantôt sauvages, tantôt stagnantes, et presque tou- jours en excès. Tel est, en effet, un des grands obstacles à l'aménagement et à l’utilisation ration- 757 nelle de l'Ar-Coat : cet obstacle se traduit, sur le sol, d'une manière concrète, par l'intensité du ravinement et par l'abondance des pierrailles sur les pentes, par l'extension des landes maréca- geuses et des tourbières sur les horizons plats. En particulier, les vallées étroites et profondes et les Toul, ou cirques d'érosion d’origine, échappent à peu près à la culture régulière; vallées et Toul for- ment, non seulement des barrières de séparation entre les cantons ruraux, mais une multitude d'espaces vides pour le peuplement, des « anœæcou- mènes », dont chacun est redevenu en petit le centre de dispersion qu'était la brousse forestière originelle. L'eau, qui presque partout est l’adjuvant précieux et indispensable de la colonisation agri- cole, l'eau dont les rigoles naturelles de drainage déterminent, dans beaucoup de régions françaises, comme la Champagne et la Touraine, l'emplace- ment des groupements humains, est presque une ennemie pour le Breton de l'Ar-Coat, car elle existe très souvent en excès, parfois elle est insuf- fisante, et des régions entières, comme la partie centrale du bassin de Chäteaulin, meurent de soif, — mais rarement ou plutôt jamais elle n'est amé- nagée par la nature de manière à faciliter l'exis- tence du paysan. Tout au plus sa présence sur presque tous les points de l’Ar-Coat a-t-elle con- tribué à multiplier les petits groupements ruraux, et par conséquent à éparpiller et à isoler les uns des autres les hommes de la Basse-Bretagne inté- rieure, fait qu'il est possible de rattacher sans paradoxe à la variété et à la multiplicité des cou- rants d'émigration. L'effet de cette nature hostile se serait atténué, l'homme de l'Ar-Coat avait pu, comme celui de lAr-Mor, disposer d'une abon- sans doute, si dante réserve d'amendements naturels. Mais cette réserve n'existe pas dans l'Ar-Coat, el il est impos- sible aux paysans de l'intérieur d'utiliser les amen- dements de la côte. L'un, le goémon, n'est pas plus transportable, dans la pratique, que le fumier de ferme qu'il remplace sur l'Ar-Mor; il est donc à peu près inconnu dans l'intérieur du pays. L'autre, le maërl, ne se détériore pas au transport; mais il est très lourd etil revient fort cher de lem- ployer loin des lieux d'extraction. Ces obstacles à l'emploi des engrais marins étaient d'autant plus insurmontables que, jusqu'à une époque très récente, les cantons intérieurs de l'Ar-Coat étaient très difficilement accessibles : les grandes routes étaient mal tracées, trop accidentées et trop dures; la vicinalité n'existait qu'à l'état embryonnaire. Le paysan de l’Ar-Coat demeurait donc impuissant à améliorer sa terre rebelle. Avec les routes et les chemins de fer, les phosphates ont commencé à se répandre dans le pays; mais il faudra plusieurs à] © CAMILLE VALLAUX — LE NOMADISME ET L'ÉMIGRATION EN BASSE-BRETAGNE générations pour que la dureté de la nature primi- tive soit, sinon effacée, du moins assez atténuée pour retenir au sol une partie des ruraux qui délais- sent aujourd'hui les champs de l'Ar-Coat. Encore convient-il d'ajouter que cet effet de l'amendement progressif du sol sera probablement détruit par la substitution de l'élevage à Ja culture. L'élevage du cheval et du bœuf est plus productif et convient mieux que la culture des céréales aux terres humides de Basse-Bretagne; mais aussi il exige moins de bras, et il est à prévoir que son triomphe sera ac- compagné d'un nouvel exode plusieurs régions particulières que l’on peut re der comme des régions-types. Il faut distinguer dans les centres de dispersion, comme nous l'avons vu, les centres granitiques et les centres grés schisteux. Comme type des premiers, considérons la région comprise entre Maël-Pestivien, Sain Nicolas-du-Pélem et Kergrist-Moëlou, sur le pla- teau de Quintin-Duault, à l'extrémité sud-oues des Côtes-du-Nord, Pays relativement élevé (entre 280 et 300 mètres) : l'horizon monotone se termine de toutes parts par les moutonnements du granite, où la terre, par- fois percée par rural, commeen la roche, est ex- Normandieet trèmement mai dans les comtés agricoles de l'Angleterre. Dans l'état présent, partout où l'élevage n'u- tilise pas la lan- de, dont l'éten- due ne diminue, grâce à lui, qu'a- vec beaucoup de lenteur, l’Ar- Coat est une terre de seigle, gre sur les dô- mes, et où les eaux séjournent en petites tour- bières ou en lan- des marécageu- ses dans les creux de forme indécise, entre les boursouflu- res du sol. Les champs cultivés sont petits et clairsemés,. les Fe. “RBretagne “Mléguerec landes sont im- d'avoine et de sarrasin ; mais il menses.Les cen- n'est nulle part tres de groupe- ment sont fort une terre à blé. Il ne connaît éloignés les uns guère les autres des autres; les communes ont sources de ri- unegrandeéten- chesse propres due ; on peut aux terres de l'Ouest cest marcher des ainsi que le pom- mier cidre commence lement de nos jours à se répandre dans l'intérieur de la Basse-Bretagne. C'est encore une terre fruste, qui ne manque pas d'avenir, car la technique agricole est capable de triompher de bien d'autres difficultés que celles où se heurte l'établissement humain dans l’Ar-Coat; mais, pour le présent, l'Ar-Coat ne peut nourrir d'une manière suffisante les hommes qui y vivent en groupes assez denses; aussi les hommes en sortent-ils, soit pour un temps, soit pour toujours, et leurs centres de dis- persion coïncident avec les parties les plus infer- à seu- tiles du pays. Essayons, comme pour l’Ar-Mor, de donner à ces analyses une forme concrète en décrivant une ou Fig. 1. — Centres de dispersion en Basse-Bretagne. heures sans ren- contrer un bourg, et même sans voir une flèche à l'horizon. Rien de plus pauvre que les villages, avec leurs maisons basses et petites aux minuscules ouvertures, la malpro- preté de leurs abords, leur odeur spéciale du feu de bruyère et de tourbe, le seul combustible dans ce pays déboisé. Lorsqu'on rapproche du manque visible de ressources la multitude des enfants qui peuplent les abords des bourgs, des villages et même des maisons isolées, il est impossible de méconnaitre la nécessité de l'émigration pour les gens de cette contrée, si faibles que soient leurs besoins. Ajoutez qu'ils ne possèdent mème pas le sol où ils vivent : ils sont fermiers pour la plu- part, et fermiers de grands propriétaires fonciers AE CAMILLE VALLAUX — LE NOMADISME ET L'ÉMIGRATION EN BASSE-BRETAGNE 15 Qe Le] qui tiennent des communes entières; leur situa- tion sociale est donc aussi humble et aussi subor- donnée que leur siluation économique, et ils ne peuvent, dans l'état présent des choses, s'élever eux-mêmes en améliorant leur pays. Un peu différente en ce qui regarde l’état social, la situation des gens de la Montagne gréso-schis- _teuse, tels que ceux de Bouillard et de Pennerguès dans l’Arrée, commune du Cloitre (Finistère), n'est guère moins àâpre ni moins dure. Ici le caractère . désertique s'accentue encore; sur les crêtes pro- . prement dites, il n'y a ni cultures, ni habitations ; l'exploitation du sol cesse, aux rochers du Cragou (268 mètres), vers 170 ou 190 mètres d'altitude, et, jusqu'au sommet, il n'y a plus qu'une lande à peine utilisable pour la päture et dépourvue de chemins tracés. Les habitants se pressent en groupes assez nombreux dans les zones inférieures, à la naissance des vallées, où la pente est moins dure et le sol un peu plus meuble. Cultivateurs de seigle et de sarrasin, comme les gens des plateaux granitiques, et, comme eux, éleveurs de petites el robustes races de bœufs et de chevaux, les habi- tants de l'Arrée sont un peu plus fixés à leur sol, car ce sol, ils le possèdent eux-mêmes : depuis longtemps, toute féodalité terrienne a disparu chez eux. Mais la médiocre extensibilité des ressources directement utilisables agit en Montagne-d’'Arrée, comme sur le plateau granitique de Quintin-Duault, pour déterminer l'exode d'une partie de la popula- tion. Le défrichement s'est heurté aux crêtes trop dures, à l'absence des amendements, au manque de capitaux ; il n'avance plus guère, et la terre cul- tivée jusqu'à maintenant ne suflil pas à nourrir une population toujours croissante, dont le nombre fait que l’on constate avec surprise la présence de gros hameaux, tels que Bouillard, en pleine Mon- tagne d’Arrée, entre les marais tourbeux et les crêtes gréso-schisteuses, loin des horizons fertiles: Ainsi, le tableau des régions gréso-schisteuses et graniliques de l'Ar-Coat coïncide avec le tableau des centres de dispersion. Il n'est pas de pays où les faits sociaux s'adaptent plus exactement aux conditions naturelles. L'étude carte donne les centres suivants, où nous nous propo- sons d'analyser les différentes formes d'émigra- tion : 1° Le plateau granitique de Quintin-Duault, com- prenant, en tout ou en partie, les cantons de Quin- tin, Bourbriac, Callac, Saint-Nicolas-du-Pélem et Corlay (Côtes-du-Nord): 2 La crête gréso-schisteuse de Quénécan (can- tons de Gouarec et Mur, Côtes-du-Nord); 3° Le plateau granitique de Pontivy-Guéméné (cantons de Pontivy, Cléguérec et Guéméné, dans le Morbihan); de la nous 4 Le plateau granitique du Faouët (canton du Faouët, Morbihan); 5° La crête gréso-schisteuse de la Montagne Noire (cantons de Gourin, dans le Morbihan, de Châteauneuf, Briec et Pleyben, dans le Finistère); 6° La crête gréso-schisteuse d'Arrée et le pla- teau granitique du Huelgoat (canton du Huelgoat et partie de Pleyben, Finistère); 1° Le plateau granitique de la lande de Lanvaux (cantons de Baud, Locminé, Pluvigner et Grand- Champ, dans le Morbihan). II. — PREMIÈRE PHASE DES EXODES : LE NOMADISME. Aujourd'hui, les hommes que la faim chasse de chez eux s'en vont, le plus souvent, dans une direc- tion déterminée et adoptée après réflexion : ils partent pour le pays où il y à du travail et des res- sources, pour le pays où la facilité de la vie promet aux foules indigentes une existence meilleure. Un émigrant temporaire ou définitif, s'il ne sait pas toujours ce qu'il va faire, sait du moins où il va. Comme l'émigrant italien, hongrois ou slave, qui s’embarque pour New-York à Anvers, à Rotterdam ou au Havre, louvrier agricole breton qui prend le train à Morlaix, à Guingamp ou à Loudéac connaît sa destination. Les « errants sans but » sont deve- nus rares; tombés dans le vagabondage indivi- duel, leur sort dépend plutôt d'eux-mêmes que de l'organisation économique et sociale de leur pays; leur existence intéresse non la géographie générale et la sociologie appliquée, mais uniquement la police. Tout émigrant véritable a un but. Ce qui a donné à l'émigration ce caractère définitif, c'est le progrès des communications matérielles (routes, chemins de fer, services de paquebots); c'est aussi, et peut-être surtout, le progrès des communications intellectuelles (lettres, journaux, avis, réclames et prospectus des sociétés financières etindustrielles). Plus ces communications sont parfaites, plus les courants d'émigration tendent vers la stabilité et vers la simplicité. Mais, en Basse-Bretagne, il s'en faut que la circulation soit, dès aujourd'hui, en pos- session de tous ses moyens : ni les routes, ni les chemins de fer existants ne sont en rapport avec la densité de la population et même avec la superficie du pays. Nous avons calculé que, dans le Finistère, il n'y a que 359 mètres courants de chemins viei- naux par kilomètre carré, tandis que la moyenne de la France atteint 493 mètres ; lemême département n'a que3.100mètres decheminspour 1.000 habitants, contre 6.400 mètres par 4.000 habitants dans l'en- semble de la France’. La circulation intellectuelle est encore plus mal pourvue dans ce pays de Basse 1 C. VaLLaux : La Basse-Bretagne, chap. XI. p. 295. 760 CAMILLE VALLAUX — LE NOMADISME ET L'ÉMIGRATION EN BASSE-BRETAGNE Bretagne, pays d'illettrés qui, malgré vingt-cinq ans d'instruction primaire obligatoire, fournit au recrutement de 10 à 15 °/, de conserits tout à fait ignorants, et dont le dialecte ou plutôt les dialectes celtiques accroissent l'isolement intellectuel et mo- ral. Aussi n'est-il pas élonnant qu'à côté de l'émi- gralion moderne se maintiennent jusqu'à nos jours, sur cerlains points, des survivances d'anciensmodes d'émigration qui rendent les exodes bretons curieux à étudier entre tous : nous voulons parler des diffé- rentes formes du nomadisme. Le nomade se distingue de l'émigrant en ce que le premier ne sail pas exactement où il va; en géné- ral, au reste, il ne va pas bien loin; il tourne tou- jours dans le même cerele et semble craindre d'af- fronter des pays tout à fait nouveaux; le nomade de Basse-Brelagne ne quitte guère les régions de langue bretonne. Mais le nomade sait parfois mieux que l'émigrant ce qu'il va faire: il y a, pour cer- tains métiers, un nomadisme professionnel très nettement défini. En dehors du nomadisme pro- fessionnel, les nomades, qui n’errent évidemment pas pour leur plaisir et qui ne cherchent qu'un sol où prendre racine, peuvent présenter des cas de fixation temporaire, d'autant plus intéressants que ces fixations fournissent des points de repère cer- tains pour la localisation de faits difficiles à étu- dier. Le nomadisme, tel qu'il existe encore sur quel- ques points de la Basse-Bretagne, se divise nette- ment en deux catégories : le nomadisme irrégulier et le nomadisme professionnel. $ 1. — Nomadisme irrégulier. Les nomades irréguliers représentaient, dans l'ancienne Basse-Bretagne, l'excédent de la popula- tion purement rurale, composé de gens qui n'avaient pas un pouce de terre à eux et qui ne parvenaient pas à louer leurs services dans leur pays d'origine. Pourtant, ils n'étaient point réduits à la pure men- dicité. Is trouvaient moyen de vivre en errant de canton en canton, de paroisse en paroisse, où ils occupaient cà el là, pendant un temps plus ou moins long, des terres à peu près vacantes et sans maitre. Ces nomades ruraux s'appelaient les pen- tyer. Il serait impossible de comprendre leur exis- tence sans analyser de près les conditions phy- siques et économiques des centres de dispersion de Basse-Bretagne. Les « anœæcoumènes », soit gréso- schisteux, soit granitiques, surtout les derniers, sont des pays de grandes propriétés, de landes, de terres vaines et vagues. Ges trois modalités sociale, naturelle et juridique de la terre ont entre elles C'est landes des grandes propriétés que se trouvaient les une étroite connexion. sur les lisières en terres vaines el vaques, aujourd'hui en grande partie disparues. Ces terres étaient des zones, tou- Jours fort ingrates; qui avaient rebuté et découragé la colonisation à un tel point que personne ne s'était soucié d'acquérir ou de conserver, sur de si mauvais lambeaux de sol, des titres de propriété durables. Elles étaient tombées à la longue dans le domaine commun; ceux qui les revendiquaient plus tard n'avaient pas de titre pour justifier leurs pré- tentions. C'étaient donc des champs tout prêts pour l'activité rudimentaire et intermittente des nomades, les pentyer agriculteurs sans capitaux, sans moyens, sans outils, travailleurs primitifs nichés, euxetleurs familles, sous des huttes, et un peu semblables aux premiers free selectors qui ont défriché les dis- tricts pastoraux de l'intérieur australien, avec cette différence que les free selectors avaient des titres de concession qui leur permettaient de s'enraciner, tandis que les pentyer n'en avaient pas. Le nomadisme irrégulier s'est donc développé surtout sur les dûmes granitiques où la grande pro- priété a régné sans partage jusqu à nos jours, et, en particulier, sur les plateaux de Quintin-Duault, de Pontivy-Guéméné et de Lanvaux, dans la partie orientale de la Basse-Bretagne. Il a diminué et dis- paru en même temps queles terres vaines et vagues, qui, aujourd'hui, sont presque toutes devenues pro- priétésindividuelles, depuislaloides22-27août1792, et surtout depuis celle du 6 décembre 1850. Cepen- dant, quelques groupements ruraux, d'instinet et d'allures presque anarchiques, ont conservé les habitudes sociales et économiques des anciens pen- tyer dont ils perpétuent le souvenir. On peut étu- dier un de ces groupes, le plus curieux peut-être, à Coët-Coët, épars de la commune de Guénin, canton de Baud (Morbihan), à l'extrémité nord des crêtes granitiques de Floranges et de Lanvaux, entre le Taran et l'Evel : région-limite où s'arrète la zone de grande propriété de Baud et de Loeminé, oùs ar- rètent aussi les granites et les schistes cristallins pour faire place, dans la direction du nord, aux schistes argileux. Construites misérablement en bois, en torchis et en plaques de zine, couvertes en chaume, comme beaucoup de maisons rurales du pays de Locminé, les huttes de Coët-Coët abritent une cinquantaine de familles dont les chefs n'exercent d'une manière continue aucune profession définie. Ils cultivent quelques bouts de champ autour de leurs villages; ils sont, pour ces terres, dans l'état d'occupants sans titre. En outre, ils exercent de temps à autre des professions comme celles de charpentier et de maçon, qui leur servent de prétextes pour courir la campagne et pour trouver de nombreuses occasions de maraude. Car ils sont avant tout maraudeurs : placés depuis plusieurs générations en marge de la propriété et du travail réguliers, ils se sont habi- CAMILLE VALLAUX — LE NOMADISME ET L'ÉMIGRATION EN BASSE-BRETAGNE 1 1 [er] tués à mettre en coupe réglée les campagnes voi- sines. L'impunité leur est assurée par l'isolement : et par la passivité du paysan breton, et surtout par la défiance de celui-ci à l'égard de la police et de la gendarmerie, qu'il ne veut pas méler à ses affaires, mème quand il est durement molesté. Au reste, les maraudeurs de Coët-Coët sont assez bien organisés pour se faire craindre: ils ont des maisons de recel à Locminé et exploitent régulièrement les nom- breuses foires du pays. Ce groupe de nomades commence cependant à sortir de son ancienne anarchie : la discipline sociale a fait sa première conquête à Coët-Coët par l'établissement de l’état civil, autrefois ignoré dans sauvage du Morbihan. De nos jours, les associations de nomades comme celles de Coët-Coët sont rares en Bretagne; mais une analyse détaillée ferait connaitre qu ‘elles se trouvent toutes sur des régions-limites comme la autrefois ce coin commune de Guénin, sur les lisières vaines et vagues des pays de grande propriété. $ 2. — Nomadisme professionnel. Pour comprendre l'importance en Basse-Bretagne du nomadisme professionnel, il ne faut pas oublier le mode de répartition des habitants et la difficulté des communications dans les districts de l'inté- rieur. Non seulement les communes sonttrès vastes, mais la plus grande partie de leur population vit hors des bourgs, qui n'offrent presque aucune res- source. Notamment, quelques-uns des métiers né- cessaires même à une existence aussi simple que celle du paysan bas-breton, comme les métiers de couvreur, de charpentier et de macon, sont fort mal représentés ou ne le sont pas du tout dans les chefs-lieux de groupement, et le paysan, qui vit au reste à de grandes distances du bourg (souvent à 5, 6 et même 8 kilomètres), dans son pelit village ou dans sa ferme isolée, ne songe guère à de- mander les secours nécessaires à son existence à ce bourg qu'il n'atteint que malaisément, par des che- mins encaissés et coupés de fondrières pendant neuf mois sur douze. Aussi attend-il que les com- pagnies de travailleurs ambulants, qu'il n'aime guère, mais dont il ne peut se passer, viennent chez lui pour les besognes nécessaires. De là, ce carac- tère nomade de tant de corps de métiers bas-bre- tons : couvreurs d'ardoises de la Roche-Derrien, tailleurs en habits du Trégorrois et de la Cornouaille, carriers et macons venus des carrières de granite de l'intérieur. Il est certain que, comme le noma- disme irrégulier, mais pour des raisons différentes, le nomadisme professionnel est en voie de décliner et de disparaître : nous assistons maintenant aux dernières phases d'un état social auquel la Basse- Bretagne à dû toute la partie vraiment spontanée el originale de sa littérature celtisante, puisque celte littérature est purement orale et consiste en chan- sons colportées par les nomades. C'est le dévelop- pement de la vicinalité qui, en facilitant les rela- tions et en augmentant l'influence des villes sur la campagne bretonne, portera le coup de grâce au nomadisme professionnel. C'est ainsi que diminue en nombre, d'année en année, l'intéressante corporation des pillaouer ou chiffonniers, hommes et femmes, qui venaient autrefois en très grand nombre de leur centre de dispersion principal, le plateau granitique du Huel- goat, pays pauvre, à la population clairsemée, d'où ils essaimaient vers les terres relativement riches et bien peuplées du Léon et de la Cornouaille, Ils étaient originaires des communes de la Feuillée, de Botmeur et de Brennilis; aujourd'hui, la première de ces communes n'en donne plus aucun, et de la seconde il n’en vient guère; c'est à Brennilis, c'est- à-dire à 40 kilomètres carrés environ, que se réduit le centre de dispersion qui en comprenait autrefois 144, toute l'étendue du plateau granitique du Huel- goat. Ces « montagnards », comme on les appelait, quoique aueun ne vint de la Montagne d'Arrée pro- prement dite, sont appelés sans doute à disparaitre tout à fait, avant qu'il soit longtemps, des routes de la Bretagne occidentale. Cependant, il y a des professions où le noma- disme, appuyé sur des bases plus solides, semble devoir se perpétuer longtemps encore. Ces profes- sions sont les métiers de la forêt (fabrication de sabots et de charbon de bois), qui prennent dans la Basse-Bretagne, très peuplée et très peu boisée, une importance particulière. Si l'on excepte les plantations récentes de pins, qui n'ont d'autre but que de fournir des poteaux de mines à l'exportation pour l'Angleterre, ce qui reste de la forêt basse- bretonne est nettement localisé sur les plateaux granitiques, en particulier sur leurs bords, où les bois forment au-dessus des basses terres voisines une lisière verdoyante. Telle est la situation en couronne de la forêt de Duault, à l'ouest du plateau de Quintin-Duault, des bois du Huelgoat, à l'est du plateau du Huelgoat, des forêts de Coatloc'h et de Cascadec, Faouët, des bois de Lanvaux, Floranges, sur le bord septentrional de la crête granitique de Lanvaux. Les métiers de la forêt sont aux bords de la « boutonnière » du de Camors et de assez groupés sur ces points pour qu'il y ait des communes forestières où dominent les bûcherons, les sabotiers et les charbonniers, ou tout au moins des villages peuplés presque uniquement de fores- tiers : par exemple, les communes de Locquenvel et de Duault (Côtes-du-Nord), et de Camors (Morbihan). C'est pour la fabrication aussi bien que pour la 762 vente de leurs produits que sabotiers et charbon- niers sont contraints au nomadisme. L'exploitation d'une coupe retient les sabotiers sur le même terrain, en moyenne, pendant deux ans, au cours desquels ils vivent de la manière la plus primitive, à la facon des premiers exploitants du Far West américain, sous des huttes en branchages dont la plus grande sert d'atelier à une communauté de chefs de famille. Ces villages temporaires existent notamment à Duault, au Huelgoat, à Floranges et à Camors. Puis, certaines saisons, ceux des sabotiers qui n'ont pas de relations avec les mar- chands en gros sortent de leurs forêts pour courir les pays déboisés, comme le Léon et le Trégorrois, où ils écoulent directement leurs produits. Ce sont les conditions naturelles et économiques elles- mêmes qui leur iniposent le nomadisme; mais à leur nomadisme, différent des autres sous ce rapport, la misère n'est pas nécessairement atta- chée : car les errants des métiers forestiers, bien loin de figurer parmi les plus indigents des tra- vailleurs bretons, sont peut-être ceux qui ont la vie matérielle la plus facile et les salaires les moins en maigres. III. — DEUXIÈME PHASE : L'ÉMIGRATION TEMPORAIRE. A mesure que s'est construit le réseau des routes et des voies ferrées, aux divagations incertaines et localisées des nomades s'est substituée, dans la classe rurale, l'émigration temporaire, qu'il ne serait pas exact de prendre, au moins en Basse- Bretagne, pour un signe de complète indigence. Elle indique plutôt, semble-t-il, sinon le bien-être commencant, du moins des aspirations vers le bien- ètre qui ne peuvent se développer chez l'homme qu'à condition que le bien-être se rapproche de ses mains et de ses yeux et lui paraisse accessible. À l'exception des nomades qui constiluaient vrai- ment des classes particulières, les Bas-Bretons des anciens jours n'avaient même pas l'idée de cher- cher régulièrement hors de chez eux, pendant quelques mois, du travail payé : ils réglaient leur consommation, d'une manière exclusive, sur leur production locale, et nous savons combien cette production était étroite. Elle ne s’est guère élargie, jusqu'à maintenant, dans les districts ruraux de l'Ar-Coat; elle ne suffit plus aux hommes, qui vont chercher ailleurs l'indispensable complément de nourriture et de bien-être. Aussi les gens qui émigrent ne sont-ils pas toujours de simples ma- næuvres sans feu ni lieu : ce sont souvent de petits fermiers, de petits propriétaires même, qui laissent derrière eux pendant trois ou six mois, pour soigner leurs terres, leurs femmes et les membres adultes de leurs nombreuses familles : le gain acquis au CAMILLE VALLAUX — LE NOMADISME ET L'ÉMIGRATION EN BASSE-BRETAGNE loin sert à grossir le budget et aide à payer le fermage et les impôts. Il n'en demeure pas moins vrai que ce sont les régions les plus stériles, parmi les anciens « anœæcou= mènes » bas-bretons, qui sont témoins, chaque prin= temps, de l'exode en masses profondes des ouvriers agricoles. Au point de vue de l'émigration tem poraire rurale, toute la partie orientale de la Basse= Bretagne intérieure, entre les méridiens de Morlaix et de Saint-Brieuc, n'est qu'un grand centre de dispersion ; mais ce sont toujours les plateaux gra= nitiques et gréso-schisteux qui sont les principaux foyers, au nombre de cinq : le plateau granitique de Quintin-Duault, la crête gréso-schisteuse de Quénécan, le plateau granitique de Pontivy-Gué- méné, le plateau granitique du Faouët, et les landes micaschisteuses et granitiques de Lanvaux. Du centre de dispersion oriental, les émigrants parlent vers deux directions principales. Les uns vont à Jersey, les autres en Beauce, en Normandie et aux environs de Paris. A ces deux ordres de faits essentiels il convient d'en ajouter un troisième au titre de, lémigration temporaire : c'est l'émigration roscovite. Mais, comme nous l'avons indiqué au chapitre I de la pré- sente étude, l'exode des gens de Roscoff et de Saint- Pol de Léon, où n'existe du reste aucun centre de dispersion véritable, est guidé par des mobiles très différents et présente de tout autres caractères. Cependant, lui aussi se rattache d'une manière très élroite aux conditions physiques et économiques de la vie humaine en Basse-Brelagne : aussi ne doit-il pas nous échapper. $ 1. — Emigration à Jersey. L'émigration à Jersey a pour but essentiel l'arra- chage des pommes de terre, de fin mai à fin juillet. Quoique l'ile anglo-normande soit très peuplée et ne manque pes de main-d'œuvre, les salaires y sont assez élevés, et les propriétaires jersiais aiment mieux faire appel aux bretons, qui demandent peu et travaillent dur. C’est la seule émigration par voie de mer qui se fasse en Bretagne, et elle n'a lieu par mer que parce qu'elle est impos- sible autrement. Le fait est digne de remarque : le paysan de Basse-Bretagne, de cette presqu'ile den- telée au développement côlier si riche, le paysan de cette contrée que lon est si porté à regarder comme essentiellement maritime, non seulement ignore la mer, mais ne sort jamais de chez lui ouvriers par voie de mer, sauf dans les cas très circons- crits des émigrations jersiaise et roscovite. Les regards du Bas-Breton sont tournés presque exelu- sivement vers les terres de l'Est. La fortune, pour lui, est à l'Est; elle n'est ni sur l'Océan, ni au delà l'Océan. Les l'Ar-Mor, établis à de marins de CAMILLE VALLAUX — LE NOMADISME demeure sur la lisière littorale, stables et même casaniers, empêchent en quelque sorte les paysans de la Basse-Bretagne intérieure de communiquer avec la mer et avec les voies de circulation mari- time. Il faut remarquer que, les services de caboltage mis à part, aucune ligne de navigation importante ne se rattache aux ports de Basse-Bretagne. Les émigrants temporaires pour Jersey s'embar- : quent soit au Légué, port de Saint-Brieuc, sur les vapeurs de la ligne régulière de Saint-Hélier, soit à Tréguier sur de petits voiliers. Un certain nombre viennent, non des centres de dispersion * ordinaires, mais des riches pays du Trégorrois, du Lannionais et du Nord du Goëlo (environs de Guingamp). Cela s'explique par deux raisons : la _protubérance que fait le pays de Tréguier au nord de la Basse-Bretagne est la partie du pays la plus rapprochée de Jersey; en outre, comme nous l'avons dit, l'émigration temporaire moderne, qui a des cadres plus larges que l'ancien nomadisme, ne dépend pas entièrement de la stérilité des can- tons d'origine et de l'indigence des hommes. Aussi u'est-il pas étonnant que le ruban côtier qui va d'Etables à Plestin-les-Grèves, dans les Côtes-du- Nord, voie partir tous les ans des ouvriers agri- coles pour Jersey : c'est la seule partie de l'Ar-Mor d'où essaiment un certain nombre de ruraux. Mais ce sont toujours les centres de dispersion fixés par la nature qui fournissent la plus grande part des émigrants jersiais. Ces émigrants viennent des deux centres les plus rapprochés de Jersey el de la région intermédiaire du Trégorrois : ce sont le plateau de Quintin-Duault et la « montagne » de Quénécan. Les cantons de Bourbriac, de Callac, de Saint-Nicolas-du-Pélem, de de Mur envoient de nombreux manœuvres dans l'ile anglo- normande. On peut fixer la limite méridionale de l'émigration, au delà de laquelle on ne trouve que des partants isolés, aux environs de Silfiac, de Perret et de Cléguérec, sur les frontières du Mor- bihan et des Côtes-du-Nord. .Le travailleur agricole de Jersey rapporte d'un mois et demi de travail, environ, une somme de 150 à 200 francs. Par rapport aux taux moyens des salaires agricoles en Bretagne, qui ne sont guère que de 4 france ou 1 fr. 20 par jour pour l’ouvrier des champs non nourri, le travail de Jersey est réellement lucratif. Il n'est pas étonnant que l'émi- gration jersiaise s'étende peu à peu et fasse tache d'huile vers l'intérieur du pays. Gouarec et $ 2. — Emigration en Beauce, en Normandie et aux environs de Paris. Cette seconde émigration a des buts plus variés, et ses zones d'origine, comme ses zones d'aboutis- sement, sont plus étendues. Les travailleurs par- ET L'ÉMIGRATION EN BASSE-BRETAGNE 763 tent au printemps pour les foins et pour la moisson; ils demeurent cinq ou six mois hors &e chez eux. Ils utilisent les deux grandes voies ferrées de Basse-Bretagne, Brest à Rennes et Brest à Nantes, où les compagnies de chemin de fer les transpor- tent à prix très réduits. On signale leur présence, en grand nombre, dans les départements de l'Orne, de l'Eure, de Seine-et-Oise, du Loiret et d'Eure-et-Loir. Il est à remarquer que pour l'Eure, en particulier, les Bas-Bretons ont appris depuis assez longtemps le chemin de ce pays. Au com- mencement de vers 1840, quand l'abondance du travail lucratif dans les usines de la Seine-Inférieure dépeupla les campagnes de l'Eure, il y eut une tentative de colo- nisation rurale officielle, en Normandie, au moyen l'ère de la grande industrie, des paysans bretons. Aujourd'hui, grâce à l'emploi des machines, les Zatifurdia de l'Eure n'ont besoin d'une main d'œuvre abondante que lors des foins et de la moisson : aussi l'émigration est-elle devenue strictement temporaire. : Ce sont tous les centres de dispersion de la Basse-Bretagne orientale qui prennent part à l'exode vers la Beauce et vers la Normandie. Dans le canton de Guéméné-sur-Scorff, les partants s'élèvent presque au tiers de la population ouvrière agri- cole (environ 30 °/,). Avec des différences assez faibles, cette proportion se retrouve à peu près, du nord au sud, dans tous les cantons situés entre Guingamp et Pluvigner, tels que Bourbriac, Quintin, Saint-Nicolas-du-Pélem, Gouareec, Pontivy, Baud et Locminé. À mesure qu'on avance vers l'ouest, la proportion des partants diminue : on trouve encore de 5 à 10 °/, sur les plateaux du Huelgoat, sur les crêtes orientales de la Montagne- Noire et de la montagne d'Arrée; mais à l’extrème ouest du Finistère, l'émigration disparaît entière- ment, surtout dans le Léon, où l'on ne connail même pas les voyages d'été des ouvriers agricoles. Les ouvriers ruraux bas-bretons rapportent chez eux, à la fin d'août, une somme de 300 à 400 francs, qui représente pour beaucoup d'entre eux la moitié et même les deux annuelles. C'est la provision qui leur permet de traverser sans trop de souffrances le long et plu- vieux hiver de Basse-Bretagne. Sur des proportions beaucoup plus modestes, leur émigration rappelle celle des ouvriers italiens, qui fauchent les mois- sons de l'Argentine et reviennent tous les ans au tiers de leurs ressources pays. à $ 3. — EÉmigration roscovite. À Roscoff et à Saint-Pol-de-Léon, nous assistons à un spectacle très différent. Le Roscovile ne res- semble en rien aux pauvres diables isolés qui par- tent les mains vides, et qui vont louer leurs bras dans les fermes des pays riches : c'est un commer- 764 cant qui fait tous les ans campagne pour vendre ses produits. Sur une étendue de 4.000 hectares seulement, le district maraicher de Roscoff et de Saint-Pol produit en très grande abondance les oignons, les artichauts, les choux-fleurs, la pomme de terre, les brocolis ou choux-fleurs d'hiver. Ces produits sont tous des primeurs par rapport aux cultures maraïchères analogues de la Grande-Bre- tagne et de l'Irlande : leur avance est d'un mois ou d'un mois et demi. Aussi sont-ils vendus à de très bonnes conditions sur les marchés du Royaume- Uni; depuis que la navigation à vapeur permet un transport rapide et économique, les produits de Roscoff sont jetés en quantités croissantes sur les quais des villes anglaises, bien qu'une très grande partie des denrées sortent encore par voiliers. Les Roscovites ont pris l'habitude, non seulement d'accompagner leurs cargaisons, mais de demeurer en Angleterre pendant la période active de la vente, c'est-à-dire de la mi-juillet à la mi-décembre. Mais cette émigration n'a pas le caractère anarchique et individuel des autres exodes. Elle est organisée en compagnies commandées par des chefs; chaque compagnie comprend 20 vendeurs environ. Les partants sont au nombre total de 4.200 à peu près, ce qui fait tous les ans une soixantaine de compa- gnies, qui se dispersent pour la vente des oignons, en particulier, dans les ports du sud de l'Angleterre et du pays de Galles. Le succès de ces opérations détermine aujourd'hui les compagnies roscovites à étendre leur commerce : elles trafiquent, non seu- lement des produits de Roscoff, mais des produits similaires qu'elles trouvent sur les côtes britan- niques. Actifs, industrieux, parlant bien l'anglais pour la plupart, les vendeurs de Roscoff rapportent de leurs cinq ou six mois de campagne une somme de 600 francs environ : c'est la plus lucrative des émigrations bretonnes. Tous les vendeurs roscovites ne sont pas exclu- sivement originaires de Roscoff. Le succès et l'ex- tension du commerce des produits maraichers déterminent un nombre de plus en plus grand de gens de l’intérieur à se joindre aux compagnies d'Angleterre. Sur les 1.200 vendeurs, on n’en compte guère que 400 qui aient leur domicile à Roscoff ; les autres viennent, individuellement ou par très petits groupes, de Saint-Pol-de-Léon et des campagnes voisines; mais un nombre croissant de « Roscovites » provient aujourd'hui du centre de dispersion le plus proche, c'est-à-dire des crêtes gréso-schisteuses de l’Arrée et du plateau grani- tique du Huelgoat. Cette évolution toute récente de l'émigration roscovite la rattache dès maintenant et la rattachera de plus en plus aux cadres ordi- naires des centres de dispersion. L'émigration temporaire de Roscoff présente CAMILLE VALLAUX — LE NOMADISME ET L'ÉMIGRATION EN BASSE-BRETAGNE done avec les autres modes d'émigration une double différence qui est en même temps une double supé- riorité : les Roscovites sont bien organisés et ne pratiquent pas l'exode individuel; ils sont com- merçcants et non manœuvres. Plus nettement que toutes les autres, cette émigration ne signifie pas indigence absolue ; elle signifie méme tout le con- traire ; elle est née du jour où se sont agrandies les relations commerciales de Roscoff. Au rebours du nomadisme, elle n'est pas appelée à disparaitre dans l'avenir. Elle pourra sans doute changer de forme, comme les relations économiques elles- mêmes; mais elle ne s'éteindra totalement que si la prospérité de Roscoff s'éteint aussi. IV. — TROISIÈME PHASE : L'ÉMIGRATION DÉFINITIVE. Si l’on ne peut considérer, dans la majeure partie des cas, l'émigration temporaire comme une der- nière ressource en cas d'indigence extrême, il n'en est pas de même de l’émigration définitive des chefs de famille. Celle-ci est déterminée d'une manière impérieuse ; elle se synthétise très simple- ment, pour un pays agricole comme la Basse-Bre- tagne, dans la formule suivante : trop peu de terre, trop de bras. Même quand les émigrants bas-bre- tons sont, ou paraissent être, des ouvriers de métiers urbains, il est à peu près certain, comme nous essaierons de le montrer, que c'est en dernière analyse la terre qui les rejette. Mais ce déracinement ne s'opère pas sans effort. Quoique la terre basse- bretonne soit souvent une marätre, elle ne parait pas telle à ses enfants, même à ceux des centres de dispersion. La rigueur du déterminisme social et économique qui pousse les Bas-Bretons hors de chez eux n'exclut pas les hésitations et les combats d'ordre moral. L'étude de ces combats n'est pas de notre ressort; c'est seulement pour être complet, aulant que possible, que nous les mentionnons. Deux faits très importants, l'un d'ordre social, l'autre d'ordre psychologique, influent en sens con- traire sur l'émigration définitive en Basse-Bretagne. Le premier est la prolificité de la race, le second est l'attachement du Bas-Breton à son sol. Dans la France contemporaine, où la natalité est tombée presque partout à un taux si bas, les trois départements de l'extrême ouest, Finistère, Côtes- du-Nord et Morbihan, — le Finistère et le Morbihan surtout, — conservent un taux très supérieur à la moyenne francaise, quoiqu'il n'atteigne pas celui des régions les plus prolifiques d'Europe. Le pour- centage annuel des naissances pour 100 habitants nous parait un des meilleurs moyens d'apprécier l'abondance ou l'appauvrissement de la natalité. En nous servant de ce critérium, considérons une des dernières années, par exemple l'année 1903. En CAMILLE VALLAUX — LE NOMADISME ET L'ÉMIGRATION EN BASSE-BRETAGNE 165 1903, pour l’ensemble de la France, les naissances n'ont donné qu'une moyenne de 2,12 pour 100ha- bitants : les Côtes-du-Nord ont eu 2,75, le Morbihan 2,80, le Finistère 3,10. Il est encore plus instructif de rapprocher de ces chiffres ceux que donnent les circonscriptions administratives où se trouvent les centres de dispersion : arrondissement de Pontivy (plateaux graniliques de Guéméné-Pontivy et du Faouët, et partie de Quénécan), 3,34 ; arrondisse- ment de Guingamp (partie du plateau de Quintin- Duault), 3,09 ; arrondissement de Châteaulin (Mon- tagne d'Arrée et Montagne Noire), 3,28. Ainsi, dans la Basse-Bretagne prolifique, les taux les plus forts de prolificité coïncident avec les centres de dis- persion. Or, ces centres ne contiennent guère que 40 à 60 habilants au kilomètre carré et ne peuvent en contenir davantage ; il faut donc que le trop- plein annuel émigre. Sans doute, une grande partie des nouveau-nés est fauchée très tôt par la mort: faute de bien-être, faute de soins entendus, dans ce pays où les nour- rissons sont soumis à des pratiques vérilablement barbares, les enfants au berceau périssent en foule. Mais il en reste assez pour que la question de l'émi- gralion se pose impérieusement à l'esprit du jeune paysan des crêtes et des plateaux de « montagne », dès qu'il atteint l'âge du service militaire et souvent plus tôt. S'il essaie de se maintenir au pays, comme il arrive le plus souvent, il fonde une famille nou- velle : mais c'est alors que le manque de ressources se fait cruellement sentir, et lémigration s'impose plus que jamais. Le Bas-Breton n'accepte pas cette nécessité sans révolle et sans douleur. Peu d'hommes sont plus allachés à leur sol que ce primitif l'est à sa lande. Il ne s'agit pas ici d'un trait de caractère purement individuel, qui serait négligeable même si on lob- servail chez beaucoup de gens ; il s'agit d'une indé- niable empreinte morale ressentie par la race lout entière. L'analyse d'un tel sentiment ne rentre ni dans le cadre, ni dans la méthode de la présente élude. Il faudrait pouvoir reconstituer, à l'aide de l'histoire et en particulier de l'histoire religieuse, la lente formation de la mentalité aux hommes de Basse-Breltagne : rien n'est si complexe propre ni si obseur; nous ne l'essaierons même pas, el nous nous contenterons de prendre pour un fail acquis l'attachement à la terre des gens de ce pays. Mais cetattachement même prouve combien sont puissantes les délerminations géographiques et économiques qui chassent de chez lui l'homme de Basse-Bretagne, puisqu'elles triomphent d'un sen- timent général si fort et si bien enraciné. Nous avons déjà vu que les causes d'émigration n'agissent pas sur l'homme de mer. Ce n'est donc n chez les hommes de mer, ni dans les métiers de REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. la mer, que l'instinct sédentaire et les nécessités économiques entrent en conflit, sauf en quelques exceplions que nous verrons plus loin. Or, en dehors des marins, les souches originelles du peuple bas- breton ne sont composées que de paysans; encore y aurait-il lieu, peut-être, de considérer les marins de l’Ar-Mor comme de simples essaims de ruraux peu à peu spécialisés dans les métiers de la mer. Quelle que soit la vérilé sur ce point, ilest constant qu'en dehors de l'Ar-Mor, tout ce qui existe en Basse- Bretagne dérive d'une souche paysanne. certain nombre sont privés déjà, depuis un temps plus ou moins long, de leur portion de terre : Mais, parmi ces groupes ruraux, un événement inévitable dans une population rurale prolifique. Beaucoup de paysans, soit qu'ils proviennent de pays de grande propriété où les fermes ne peuvent être fractionnées, soit qu'ils descendent de familles où les héritages ont été réduits à une sorte de poussière cadastrale par suite du trop grand nombre de parti- cipants, ne sont retenus à la terre ni par la propriété ni par une location assurée, et l'existence d'ouvriers agricoles est trop précaire pour eux à cause des salaires extrêmement bas. C'est parmi ces déshérités de la vie rurale que se recrutaient les pentyer du temps du nomadisme; ce sont eux qui fournissent la main-d'œuvre aux arsenaux de Brestet de Lorient, aux poudreries du Moulin Blanc et du Pont de Buis, aux usines d'Hennebont; ce sont eux, enfin, qui recrutent les ouvriers des métiers urbains dans les villes et dans les bourgs de la Basse-Bretagne, et ce sont ces ouvriers qui se décident le plus aisément à l'émigration définitive. Le passage des métiers agri- coles aux métiers urbains est donc pour le paysan le premier pas du déracinement véritable; ce premier pas franchi, le second ne coûte guère. Les ouvriers qui émigrent pour loujours viennent pour la plupart des centres de dispersion déterminés par la géographie, tout comme les paysans de l'émigration temporaire; mais, comme, avant de quitter la Basse-Bretagne, ils font un stage dans les métiers urbains du pays, il est souvent malaisé de noter avec précision leur point de départ, et cette notation, du reste, ne servirait pas à grand'chose, puisque le prétendu point de départ n’est en réalité qu'un point de passage. Au rebours de ce qui se passe, en général, en malière d'émigration, il est assez facile de déterminer les zones d'arrivée et de répartition de ces émigrants hors de Basse-Bretagne. Comme les émigrants bas-bretons ne sont presque jamais des ouvriers spécialisés dans les tâches complexes qui exigent du tour de main et de l'in- telligence, ce n’est point dans les principaux foyers industriels qu'il faut les chercher, mais uniquement, soit dans les entreprises qui remuent de la terre et des pierres et ont surtout besoin de bras robustes, L8** 766 soil dans les grandes villes, où les moins habiles et les plus ignorants eux-mêmes comptent toujours trouver du travail. Ainsi la construction des voies ferrées, l'exploitation des carrières, les chantiers des ports ont employé el emploient encore une grande quantité de Bretons, en particulier dans le Nord, le Centre et l'Ouest de la France. Quelques- uns de ces ouvriers relèvent de l'émigration tempo- raire : ils reviennent au pays après avoir passé la belle saison sur les travaux lointains, comme les macons de la Creuse; c'est sous cet aspect que se présente l’émigration des terrassiers et des carriers aux environs de Carhaix et de Quimper. Mais, dans la majeure partie du pays et notamment dans les centres de dispersion, l'émigration est définitive. Quant aux colonies urbaines d'ouvriers bretons, elles existent dans plusieurs villes du centre et de l’ouest; la plus importante, en mettant Paris de côté, semble être la colonie du Havre, où les Bretons exerçant de petits métiers et de petits commerces forment des groupes très cohérents. Cette colonie comprend, par exception, un certain nombre de gens provenant des métiers de la mer. De Tréguier à l'Ile de Batz, par Perros-Guirec et Lannion, les marins de la côte vont chercher de l'emploi au Havre, soit sur les chalands de la Seine, soit sur les bateaux des grandes compagnies de navigation. Les autres Bas-Bretons, beaucoup plus nombreux, qui viennent de l’intérieur du pays, exercent loutes sortes de professions. Ils forment au Havre un groupe qui occupe deux faubourgs, le faubourg Saint-Francois et la plaine de l'Eure, où la langue bretonne est assez répandue pour qu'il ait paru nécessaire d'attacher un aumônier breton à la paroisse Saint-François. Quoiqu'il soit difficile de déterminer, pour les raisons que nous avons exposées, les principaux points ou centres d'exode des émigrants ouvriers, il y a une de ces émigrations, la plus importante peut-être, qui trace elle-même sur la carte sa zone d'origine. C'est l'émigration des ouvriers ardoisiers : exlracteurs ou mineurs, et tailleurs d’ardoises. Tous les ans, les grandes ardoisières situées hors de Basse- Bretagne, celles d'Angers en particulier, recoivent un assez grand nombre d'ouvriers bretons plus expérimentés que la plupart des manœuvres qui sortent de la presqu'ile. Car ces ouvriers viennent d'industrie ardoisière du bassin de Chäteaulin, qui coïncident avec deux centres de des centres dispersion que nous avons mentionnés : le premier est la crête gréso-schisteuse de la Montagne Noire ardoisières de Pont-Coblant, de Châteauneuf du Faou, de Saint-Goazec, deSaint-Herninet de Motreft); le second est la crête gréso-schisteuse de Quénécan ardoisières de Gouarec, de Caurel et de Mur). Les strates minces et longues de schistes ardoisiers CAMILLE VALLAUX — LE NOMADISME ET L'ÉMIGRATION EN BASSE-BRETAGNE d'âge silurien et carbonifère, qui forment en partie les pentes de la Montagne Noire et de la forêt de Quénécan, ainsi que les fonds des vallées de l'Aulne et du Blavet supérieur, se prêtent aisément à l’ex= ploitation, mais cette exploitation ne peut durer longtemps à cause de la faible épaisseur des couches ardoisières ; aussi l'extraction se déplace-t-elle sou vent, et, lorsqu'elle à épuisé, ou à peu près, un dis- trict ardoisier, les ouvriers qu'elle emplovait sont en quelque sorte contraints à l'émigration. Ainsi s'expliquent les fréquents départs d'ouvriers bas- bretons pour les ardoisières d'Angers. Cette émi- gration durera tant que les veines ardoisières de Basse-Brelagne ne seront pas définitivement épui- sées, c'est-à-dire tant que le pays pourra préparer au travail de l’ardoise des ouvriers capables d'exéer- cer ensuite leur métier ailleurs. Il n'est pas douteux que la majeure partie des émigrants qui sortent pour toujours de Basse-Bre- lagne sont des ouvriers ou plutôt des manœuvres; toutefois, comme nous l'avons dit plus haut, les métiers de la mer essaiment aussi quelque peu sur la côte nord; en outre, un certain nombre de pay- sans partent sans espoir de retour, pour chercher“ d'autres terres sous d’autres cieux. Pourtant, cette dernière forme d'émigration parait singulièrement difficile dans un pays comme la Basse-Bretagne. On ne comprend guère un émigrant agricole qui part absolument dénué de capital. Or, le capital manque aux paysans bretons, en particulier à ceux des centres de dispersion. Un rural parti dans ces con- ditions, sans autre ressource que ses bras, est voué à la misère. Et d'assez nombreux exemples d'émi- grants imprévoyants, qui trouvaient au loin une misère pire que celle qu'ils avaient laissée au logis, ont contribué à diminuer, en Basse-Bretagne, le nombre des exodes agricoles. Ainsi le plateau du Faouët et les landes voisines de Gourin et de Rou- douallec ont été, il y a vingt-cinq ans environ, les points de départ d'un assez grand nombre d'émi- grants vers la République Argentine. Ces émigrants partaient à peu près sans ressources, éblouis par le mirage des concessions de terre, et oubliant que la terre ne saurait suffire, puisqu'il faut avoir aussi de quoi l'utiliser et l'approprier. Les mauvaises nou- velles qui arrivèrent bientôt de l'Argentine décou- ragèrent ceux qui élaient {disposés à imiter les pre- miers partis. Toute tentative pour faire sortir en grandes masses les Bas-Bretons de chez eux a été vouée au même sort que ces premiers essais. On sait que sur l’Ar-Mor, au moment le plus aigu de la crise sardinière, les pêcheurs se montraient très rebelles à l’idée que certains administrateurs leur suggéraient d'émigrer pour les côtes d'Algérie et de Tunisie. Mais cela ne saurait nous surprendre, car nous connaissons l'instinct sédentaire des popula- LE | | | | ; | | CAMILLE VALLAUX — LE NOMADISME ET L'ÉMIGRATION EN BASSE-BRETAGNE tions du littoral, et nous avons expliqué pourquoi cet instinct existe. Il est plus instructif de suivre les efforts tentés, de 1902 à 1905, pour faire émigrer au Canada des Bas-Bretons ruraux, Ces tentatives ont été faites à la faveur de la crise religieuse; le - paysan croyant concevait des craintes pour le libre exercice de sa religion, et les propagandistes en profilaient pour faire miroiter à ses yeux, en même temps que les avantages économiques du Canada et du Manitoba, l'absolue « liberté religieuse » de ces pays. Malgré la puissance d'une telle considération sur la mentalité bretonne, les départs pour le Canada ont été très rares, très clairsemés, et le mouvement semble à peu près arrêté aujourd'hui. IH convient, du reste, d'ajouter que les quelques départs qui ont eu lieu ont été fournis presque exclusivement par les sept centres de dispersion où se condensent la plu- part des phénomènes de nomadisme, d'émigration temporaire et d'émigration définitive. En revanche, un autre mode d’émigralion, qui remonte déjà fort loin, s'étend et s'accroît de plus en plus : il fait tache d'huile sur le pays entier, et le nombre des partants augmente d'année en année. C'est l'émigration de la masse féminine rurale, et en particulier des servantes de ferme. Il y a une abon- dance extraordinaire de main-d'œuvre féminine dans la campagne bretonne. La statistique agricole de 1892 contient à cet égard quelques chiffres sai- sissants. Il y avait en France, à cette époque, 462.000 servantes de ferme; les trois départements bas-bretons en contenaient à eux seuls 67.000, Ainsi ce pelit pays de 20.000 kilomètres carrés (un peu plus du 1/30 du territoire) renfermait presque 1/7 des servantes de ferme (414,50 °/,). Cette surabon- dance explique et justifie l'émigration définitive des femmes hors de Basse-Bretagne, malgré l'incertitude elles hasards qu'offre pour elles une existence sociale urbaine où les trois quarts sombrent dans la misère et dans le vice. V. — CONCLUSION. Essayons de condenser en quelques mots les con- clusions positives de l'étude que nous venons de présenter au lecteur. 767 Cette étude est une monographie particulière ; mais elle peut contribuer, pour sa part, à l'établisse- ment de quelques idées générales, dont la vérifica- tion, croyons-nous, se retrouverait sur d'autres el sur de nombreux champs d'investigation. Nous présentons d'abord les principaux points qui intéressent spécialement la Basse-Bretagne, et ensuite les conclusions générales : A. Conclusions sur la Basse-Bretagne : 1° Les phénomènes de nomadisme et d'émigration sont rigoureusement soumis aux conditions nalu- relles entendues dans leur sens le plus large; 2 Le nomadismeet l'émigralion, à peu près nuls sur la côte (Ar-Mor), ont leur foyer principal dans l'intérieur du pays (Ar-Coat); 3° Dans l'Ar-Coat lui-même, on reconnait la pré- sence de 7 centres de dispersion dont les fonctions, au point de vue qui nous occupe, sont à peu près semblables, avec de légères différences. B. Conclusions générales. 1° Les phénomènes de nomadisme et d'émigralion sont régulièrement sériés el répartis dans l'espace et évoluent dans le temps, les uns n'étant qu'une transformation des autres; 2° Ces phénomènes ne signifient pas nécessaire- ment un lrès mauvais élal économique; il peut se faire, au contraire, que la diminution de l'indigence et le progrès de la circulation les provoquent; mais, dans l’ensemble, ils dénotent un manque d'équi- libre entre les forces de production et de consom- malion ; 3° À mesure que les moyens de communiealion s'améliorent, l'étude des faits de répartition et des courants d'émigration devient plus facile; ces cou- rants se tracent eux-mêmes sur la carte; la part des fantaisies individuelles, que l'ancien nomadisme faisait très large, devient très étroite; la détermina- tion géographique et sociale des faits de nomadisme el d'émigralion acquiert une rigueur vérilable, qui jusqu'ici était inconnue. Camille Vallaux, Professeur à l'École navale, Docteur ès lettres. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Petot (Albert), Professeur de Mécanique à la Faculté des Sciences de l'Université de Lille. — Etude dyna- mique des Voitures automobiles. 1°" fascicule. — 4 vol. grand in-8° de 200 pages, avec figures. Impri- merie autographique J. Schaller. Lille, 1907. L'ouvrage est la reproduction du cours fait, depuis plusieurs années, à la Faculté des Sciences de Lille, sur les voitures automobiles, par le distingué professeur. Comme le problème de la traction sur routes est très complexe, l'auteur s'est limité aux questions de Dyna- mique auxquelles on peut appliquer, dans une première approximation, les méthodes de la Mécanique ration- nelle. Il les à étudiées sur un schéma se rapprochant le plus possible de la voiture réelle. Son but à été surtout de marquer les conditions à remplir dans la construc- tion et dans la conduite d’une automobile, pour assurer la sécurité et le confortable des voyageurs, la conser- valion du mécanisme et une bonne utilisation de l'é- nergie fournie par le moteur. Le premier fascicule débute par l'étude de la résis- lance à la traction, la théorie de l’adhérence, les con- ditions à remplir pour éviter le patinage. Les pages suivantes sont consacrées à l'étude du mou- vement en ligne droite, en palier d’abord, sur une pente ensuite, et de la puissance à donner au moteur. Le chapitre IT, véritable introduction à l'étude de la stabilité, contient l'étude cinématique du différentiel (et à ce sujet donne quelques indications sur les engre- nages coniques et les mouvements gyroscopiques), son fonctionnement dynamique, ses inconvénients possibles pour la stabilité de la voiture (couple de dérapage, uti- lisation défectueuse de l’adhérence des roues motrices). Cette étude conduit l’auteur à penser qu'il est proba- blement avantageux pour la stabilité de la voiture, au moins dans le mouvement en ligne droite, de donner une grande stabilité au différentiel. En dernier lieu, sont étudiés les ressorts et les pneus, leur mode d'action simultanée sur un sol inégal (dos d'âne, ornières, caniveaux, cassis,...). Il ne faut pas exagérer le poids des roues et des ieux, mais plutôt les réduire, tout en leur donnant une masse qui suffise à les mettre dans de bonnes conditions de résis- tance. En ce qui concerne les roues élastiques, M. Petot pense que, pour avoir quelque chance de mener à bien un système, il faut demander son élasticité à des masses de caoutchouc plutôt qu'à des ressorts métalliques, tout au moins s'il s'agit de voitures légères et de grandes vitesses. Pour les poids lourds et les vitesses modérées, peut-être, ajoute-t-il, sera-t-on conduit à employer les ressorts métalliques de préférence au caoutchouc, Enfin, pour les amortisseurs, M. Petot montre les difficultés auxquelles on se heurte dans la recherche des meilleures dispositions à donner à ces appareils; il faudrait réaliser des conditions parfois opposées. La conclusion est qu'il ne faut user que très prudemment des amortisseurs. On voit par cette courte analyse combien sont impor- tantes les questions traitées par l’auteur, et quel béné- fice tireront de la lecture de cet ouvrage les construc- teurs; même pour les questions qui n'y sont pas solutionnées, ils y trouveront des notions utiles. M. Petot donne, dans le courant de son étude, quel- ques indications sur des expériences qui! permettraient de vérifier les résultats obtenus par lui et de reconnaitre Jusqu'à quel point ils sont acceptables en pratique. Si quelques-uns de nos lecteurs voulaient faire ces expé- riences, l’auteur leur donnerait volontiers tous les renseignements complémentaires dont ils pourraient avoir besoin. GÉRARD LAVERGNE, Ingénieur civil des Mines. Commission du Ciment armé. Expériences, rapports et propositions. Instructions ministérielles rela- tives à l'emploi du Béton armé. — 1 vol. 1n-%° de 480 p. et 6 pl. (Prix : 27 fr. 50.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1907. Ce volume est le résultat des travaux de la Commis- sion du Ciment armé créée par arrêté ministériel du 19 décembre 1900. Cette Commission, chargée d’étu- dier les propriétés et les emplois du ciment armé, se divisa en trois sous-commissions, présidées par MM. Ra- but, Considère et Bechmann, chargées chacune de l'examen d'une série de questions. Les principales de ces questions sont : la résistance du ciment armé à la traction et à la compression; les épreuves et essais à faire subir aux constructions; les qualités à exiger des ciments et de leurs armatures. L'étude de ces questions a exigé un très grand nombre d'expériences, relatées dans les rapports des sous-com- missions, et qui constituent des documents très pré- cieux, car l'exactitude en est garantie par la valeur et l'impartialité des auteurs; mais il est impossible d'en donner ici un compte rendu, même sommaire. Ce sont des références de tout premier ordre, indispen- sables au praticien, et qui contribueront à l’établisse- ment d’une théorie rationnelle des ouvrages en ciment. armé. Cette théorie est d'ailleurs ébauchée déjà dans le chapitre intitulé : « Données à admettre dans la pré- paration des projets ». Enfin, les résultats principaux de ce grand travail sont formulés dans la Circulaire ministérielle intitulée : «Instructions relatives à l'emploi du Béton armé » et dans son annexe du 15 mars 1906, à la fin du volume. Si considérables que soient ces travaux, ils sont loin d’épuiser la question ; la Commission elle-même con= sidère son œuvre comme provisoire, et, « Si Son exis- tence est prolongée, elle continuera ses études et ses expériences ainsi que l'étude des travaux poursuivis ailleurs, et elle prendra l'initiative des modifications du règlement qui lui paraîtront opportunes ». Les conclusions générales à tirer de ces études sont favorables à l'emploi du ciment armé. On n'aurait, d'après M. Considere (p. #42), « aucune appréhension pour la conservation et la durée des ponts et viadues en béton armé portant des voies de terre ou de fer»; mais c’est à la condition expresse de ne pas oublier que (p- 422) « le béton armé ne vaut que par la perfection de son exécution » et qu'il faut « exercer une surveil- lance sévère sur la provenance, la pureté des maté- riaux, leur dosage, celui de l'eau employée à la confec= tion du béton, son damage, son bourrage le long des armatures, le solide arrimage de celles-ci». 6G. R. 2° Sciences physiques Gorezynski (Ladislas). — Sur la marche annuelle de l'intensité du rayonnement solaire à Varsovie, et sur la théorie des appareils employés. (1/hèse pour le doctorat d'Université présentée à l Université de Montpellier.) — 1 vol. in-8° de 202 pages. Montpel= lier, Imprimerie Serre et Roumégous, 1907. Le travail de M. Gorezynski est un témoignage de l'intérêt que l’on attache, à l'étranger, aux nouveaux grades délivrés par les Universités françaises, et ausSIN de l'influence attractive exercée par les savants qui, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 769 dans nos centres provinciaux, ont su se faire un nom dans un ordre de recherches déterminé. M. Gorezynski a effectué les mesures actinométriques qui font l'objet essentiel de son travail à l'Observatoire et à la Station centrale Météorologique de Varsovie, Mais il à tenu . ensuite à venir élaborer toute la partie théorique de son travail, et procéder à la discussion et à la réduction des observations, auprès de la Faculté des Sciences de Montpellier, où Crova avait exécuté la longue série de ses travaux sur la mesure de la radiation solaire. La mesure de la « constante » solaire est un des problèmes les plus délicats de la Météorologie. On s’est mis d'accord, il y a peu d'années, — puisque c'est à la Conférence météorologique d'Innsbruck, en septembre 1905, que ce résultat a été sanctionné, — pour recom- mander, comme appareil de mesures absolues, l'emploi exclusif du pyrhéliomètre à compensation électrique d'Angstrôm. Néanmoins, comme cel appareil est encore peu répandu, il n’est pas sans intérêt de recourir à d'autres méthodes dont les résultats pourraient être rapportés à ceux que donne l'appareil de mesures absolues. ; M. Gorezynski a fait une étude spéciale de l'actino- mètre « du système Angstrom-Chwolson ». Il en a perfectionné et la théorie et le mode de caleul. Il ne sera peut-être pas superflu de rappeler le principe ac- tinométrique d'Angstrüm et la méthode des intervalles de temps égaux de Chwolson. On prend deux corps identiques, par exemple deux thermomètres à boules noircies ou à réservoirs en forme de spirales plates: l'un des deux corps est ex- posé au soleil, l'autre maintenu à l'ombre par un écran. A un moment donné, on déplace l'écran, de façon que le thermomètre qui était au soleil soit à l'ombre, et réciproquement. Soit O,, en grandeur et en signe, la différence de leurs températures à un instant donné, 6, cette différence une minute après, et 6, cette diffé- rence deux minutes plus tard : on a, pour le nombre de calories versées par minute sur un centimètre carré de surface : € 2e DS où e représente la capacité calorifique de l’un des réser- voirs de thermomètre et s sa section. On s'arrange pour que @ soit à peu près nul, c'est-à-dire que la pre- mière lecture soit faite à peu près une minute avant l'instant où les deux thermomètres marqueront la même température, l'un en montant, l’autre en des- cendant; 0, et O0, sont de signes contraires. Dans ces conditions, les termes correctifs, provenant de ce que les conditions théoriques sont inexactement remplies, s’éliminent à peu près complètement. M. Gorezynski a complété cette méthode en asso- ciant à toute observation des deux thermomètres acti- nométriques une seconde observation dans laquelle ces deux thermomètres marchent en sens inverse, et en prenant la moyenne des valeurs du rapport : données par ces deux expériences associées. Voici un exemple numérique qui fera bien com- prendre le mode opératoire: LECTURES des thermomètres RS N° 69 N° 70 DIFFÉRENCES © Direction I : 0 sec.. . 35092 33062 O,— 2030 60 — . 34090 34075 CEE 120 — . . 34000 35058 Os ——1058 vw! = 0,938 Direction II : 0 sec. . 33021 35021 0, ——2000 60 — . 33060 33094 0, —— 000% 120 — 34082 33018 O3 = +1064 w"— 0,896 ñ Peut-être trouvera-t-on cette discussion de causes d'erreurs un peu compliquée, étant donnée l'incerti- tude relative qui reste toujours attachée à cet ordre de mesures. En tous les cas, cette variété de la méthode d'Angstrom, que l’auteur préconise, n’est pas d'une application difficile, et elle paraît recommandable. Une seconde partie comprend la comparaison des pyrhéliomètres avec les actinomètres. Entre le nombre donné par l’actinomètre, employé suivant la méthode de l’auteur, et le nombre donné par le pyrhéliomètre existe un rapport qu'il appelle « coefficient de trans- mission ». Ce coefficient devrait être constant si la théorie élémentaire de l’actinomètre était rigoureuse ; il varie, en réalité, de 0,737 à 0,749 pour un des actino- mètres employés, quand la radiation varie : le coefficient une fois déterminé, l’actinomètre employé seul pourra permettre d'obtenir des mesures absolues, avec une approximation définie. M. Gorczynski a fait 7.622 mesures, réparties en 389 iournées, à Varsovie, de 4901 à 1905. Il s'est préoc- cupé d’abord de la réduction des mesures à une même hauteur du Soleil au-dessus de l'horizon, réduction nécessaire pour rendre comparables les nombres obte- nus aux diverses heures de la journée. En discutant ses propres observations, celles de MM. Angstrôm et Edelstam à Guimar, dans l'ile de Ténériffe, celles de M. Witkowski à Zakopane, en Galicie, et celles de M. Westman à Treurenberg, au Spitzherg, il est arrivé à une conclusion très intéressante. L'augmentation du nombre de calories-grammes par centimètre carré et : : NN O) par minute, avec la hauteur du soleil, la quantité DA 1 varie naturellement avec la valeur de la hauteur du soleil dont on part: AQ est, par exemple, 0,149 cal. quand on passe de 9° à 12° de hauteur du soleil; elle est 0,093 cal. quand on passe de 12° à 15°. Mais ces nom- bres ont sensiblement la même valeur aux diverses stations choisies, quelle que soit leur latitude. Par exemple, entre 20° et 25°, AQ est de 0,080 cal. au Spitz- berg, de 0,087 cal. à Varsovie, de 0,074 cal. à Ténérifte. Ces nombres, déterminés pour Varsovie, permettront en tous les cas de ramener les observations faites aux diverses heures de la journée à ce qu’elles auraient été à midi, et de réduire toutes les observations d’un même mois à la hauteur moyenne mensuelle du soleil à midi. On conçoit ainsi qu'avec des mesures suffisamment nombreuses, on arrive à déduire une valeur moyenne de la radiation pour un mois donné. Encore y a-t-il lieu de remarquer que l’auteur part toujours de ce principe que toutes les causes d'erreur ont pour effet de diminuer le nombre trouvé pour la radiation, et qu'il ne garde dans les moyennes que les nombres qui ne paraissent pas systématiquement trop faibles. Il arrive ainsi pour les valeurs moyennes annuelles de la radiation à Varsovie aux nombres suivants: S 1904. 1,052 calories. 1002 PA EAMERE UE À 0,994 — AIS PEER 0,862 _ 1904. . 0,968 — 1905. . 1,016 _ Il croit pouvoir affirmer, d'après la marche régulière de ses moyennes mensuelles, la réalité de la diminu- tion du rayonnement solaire de décembre 1902 à fé- vrier 1904, que M. Dufour, de Lausanne, a signalée le premier, et que M. Langley admet également. Dans un dernier chapitre, l’auteur insiste sur l'inté- rèt que présenterait la sommation, même approchée, des quantités de chaleur (en calories-grammes) réelle ment reçues au cours d’une saison par l'unité de sur- face du sol en un lieu donné, et l'étude du rapport de cette somme des quantités de chaleur reçues à la som- me des quantités de chaleur possibles, si le soleil eût éclairé tout le temps le sol. En faisant le calcul pour Varsovie et Montpellier, il trouve qu'à Varsovie ce rapport de la chaleur réelle à la chaleur possible 710 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX —_— 73 ———— est 48 °/,, tandis qu'à Montpellier il est 510/,. Au Spitz- berg, il ne serait que de 22 °/.. La thèse se termine par une bibliographie sommaire des travaux relatifs à la radiation solaire. BenNarD BRUNHES, Directeur de l'Observatoire du Puy-de-Dôme. Lunge(G.), Ancien Professeur de Chimie industrielle au Polytechnicum de Zurich. — Analyse chimique industrielle. Ouvrage publié avec la collaboration d'un groupe de techniciens et de spécialistes. Tome : Industries minérales. Traduction francaise de M. E. CAMPAGNE. — 1 vol. in-8° de 640 pages, avec 405 fig. (Prix broché : 22 fr. 50.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1907. Le nom du Professeur Lunge fait, depuis de longues années, autorité en matière de Chimie industrielle, et l'ouvrage qu'il a publié en allemand sous le titre : Chemisch-technische Untersuchungsmethoden à ren- contré partout un succès mérité, qui lui a permis d'ar- river aujourd'hui à sa 5° édition. C'est cette œuvre que M. E. Campagne a eu la pensée de mettre directement à la portée des chimistes français. Elle est constituée par une série de monographies, relatives chacune à une industrie spéciale. Pour cha- cure d'elles, l’auteur envisage successivement : 1° l'ana- lyse des matières premières ; 2° le contrôle de la fabri- cation ; 3° l'essai des produits fabriqués. Voici la liste des matières qui sont passées en revue dans ce premier volume : Argiles, par M. Ph. Kreiling; Produits céra- miques, par M. K. Dummler; Sels d'alumine, par M. G. Lunge; Mortiers, par M. C. Schoch; Verre, par M. E. Adam; Goudron de houille, par M. H: Kôühler; Fabri- cation du gaz, ammoniaque, par M. 0. Pfeiffer; Dérivés du cyanogène, par M. H. Freudenberg; Carbure de calcium et acétylène, par M. G. Lunge; Allumettes, par M. W. Jettel; Explosifs, par M. O. Guttmann; Couleurs minérales, par M. R. Gnehm. Toutes les questions analytiques qui se présentent au chimiste industriel sont abordées successivement dans leur ordre logique et résolues par les méthodes les plus récentes etles plus pratiques. Un pareil ouvrage a donc sa place toute indiquée dans les laboratoires industriels. LB: 3° Sciences naturelles Girard (Jules). — Les Falaises de la Manche.— 1 vol. in-4° de 194 pages, avec gravures. E. Leroux, édi- teur. Paris, 1907. La Géographie rationnelle, c’est-à-dire celle qui ob- serve et cherche à expliquer les faits, attire tous les jours de nouveaux adeptes. La vue des falaises, de la lutte continuelle de la terre et de la mer, constitue en particulier l'un des phénomènes géographiques qui suggère à tous les esprits curieux une foule de pro- blèmes; et, si ceux-ci sont résolus dans leurs grandes lignes et dans leurs traits essentiels, ils offrent encore, dans leurs détails, aux chercheurs et aux observateurs consciencieux, un vaste champ d’études. Le littoral de la Manche, depuis la Baïe de la Seine jusqu'à Calais et Dunkerque en France, et en face, au sud de l'Angleterre, est particulièrement intéressant par la variété des sites qu'il présente, et l’on comprénd qu'il ait tenté, après bien d’autres, M. J. Girard, qui nous présente dans une luxueuse brochure de 194 pages quelques-uns de ses traits caractéristiques. L'auteur a su choisir un certain nombre de photographies, dont plusieurs, pour ne pas dire le plus grand nombre, méritent de devenir clas- siques pour l'étude du mode de formation des falaises crayeuses jurassiques, des dunes, des plages de sable et de galets. Le lecteur sera certainement intéressé en apprenant comment et pourquoi les stations balnéaires du bord de la Manche ont leur raison d'être et quelles sont les causes et le mode de formation de certaines de leurs particularités. Cet ouvrage, dans lequel M. J. Girard nous décrit en premier lieu le relief du sol, les caractères de la craie et la composition géologique des falaises et nous donne des apercus intéressants sur l’ancien isthme du Pas- de-Calais et le massif du Boulonnais, est surtout ori- ginal dans sa seconde partie, intitulée l’Abrasion litto= rale. Le mouvement des vagues sur les plages, la genèse des plages et de certains bancs sous-marins, les éboulements et le rôle des fissures de la craie, enfin l’évolution des galets, des dunes et du Marquenterre, sont présentés de la façon la plus heureuse. La troi- sième partie est un résumé de l’évolution historique, de certains points de la côte française (Seine, Somme, Bresle) et de quelques-uns des ports des deux côtés de la Manche. Cet ouvrage sera accueilli, croyons-nous, avec succès par le grand public auquel il est surtout destiné. Les spécialistes, les géoiogues, par exemple, lui reproche- ront sans doute quelques inexactitudes, et les géogra- phes, en outre, auraient été, je crois, heureux de voir utilisés dans ce travail les chapitres relatifs à la côte des importants ouvrages de M. A. Demangeon sur la - Picardie et de M. R. Blanchard sur la Flandre. H. Douxa, Maitre de Conférences de Géologie à la Faculté des Sciences de Lille. Plate (A. G.). — The « Lloyd » Guide to Austra- lasia. —1 vol. in-12 de 470 pages, avec fig. et cartes. (Prix cartonné: 7 fr. 50.) Edward Stanford, éditeur, 12-14 Long Acre, Londres, 1907. Ce Guide d'Australasie a été écrit à la demande de la Compagnie de navigation allemande le Norddeut- scher Lloyd pour l'usage des nombreux touristes qui, depuis quelques années, se portent vers cette partie lointaine de notre globe. . Après une Introduction générale sur le Common- wealth australien, l’auteur passe en revue les Etats qui le composent : Australie occidentale, Australie du Sud, Victoria, Nouvelle Galles du Sud, Queensland, Tasmanie et Nouvelle-Guinée, puis les possessions allemandes du Pacifique. Il donne sur chaque contrée des renseigne- ments géographiques clairs et concis, puis il passe à la description des grandes villes et des curiosités natu- relles qui intéressent le touriste. Cet ouvrage paraît bien concu; il est exéculé d’une facon irréprochable au point de vue typographique et il mérite de prendre une place honorable dans le groupe des publications de ce genre. Chodat (R.), Docteur ès Sciences, Professeur de Bo- tanique à l'Université de Genève. — Principes de Botanique. — 1 vol. in-8° de 744 pages, avec 829 figures. J. B. Baiïllière, éditeur. Paris, 1907. Ce livre justifie pleinement son titre, car il n'est niun Traité ni un Manuel. Il s'adresse à des lecteurs ayant, comme le dit l’auteur, « une eertaine préparation scientifique » et qui se sentent attirés vers les sciences biologiques. C’est avec le plus grand plaisir que nous l'avons parcouru, car nous n'en connaissons pas de similaire, du moins en langue française. Il nous fau- drait reproduire la préface entière pour donner une idée de son contenu, et nous en conseillons la lecture attentive à tous les étudiants, car le jeune naturaliste ne saurait être averti trop tôt que, sans une culture scientifique générale suffisante, « les plus intéressants des problèmes de la Biologie moderne seront insondables pour lui ». Avec juste raison, l’auteur considère que, même en Botanique, Zoologie ou Physiologie, « les résultats des expériences doivent pouvoir être exprimés en termes précis, analogues à ceux qu'emploient phy- siciens et chimistes pour résumer leurs observations et leurs expériences ». Le simple énoncé des principales divisions du livre de M. Chodat suflira sans doute pour en exposer les grandes lignes. _ Dans la première partie, réservée à la Physiologie générale, après avoir défini ce qu'on entend par BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 174 matière vivante, l’auteur a groupé, sous le nom de « captation et transformation de lénergie », tous les phénomènes physiques et chimiques qui accompagnent les manifestations vitales chez les végétaux : inhibilion, turgescence, action de la lumière, de la chaleur, théorie de l'assimilation, composition chimique du végétal, etc. L'étude de la cellule et des tissus, avec ses trois sub- divisions: cellule, organogénie, anatomie, forme la deuxième partie de l'ouvrage et n'en occupe guère que le tiers ; elle est un peu condensée, mais on na retenu des faits acquis que ceux qui présentent une réelle importance, afin d'en montrer les rapports avec la Bio- logie végétale. Sous le titre de Physiologie spéciale sont étudices les fonctions d'élaboration, de relation et de repro- duction: elles constituent la troisième partie, la plus volumineuse comme il fallait s'y attendre. Enfin, la quatrième partie ou Phylogénie, qui com- prend une centaine de pages, traite des variations et de l'hérédité. Peu d'ouvrages classiques sont actuelle- ment au courant des idées et hypothèses récemment émises, el nul doute que ces chapitres ne soient parlicu- lièrement goûtés. Sous forme de conclusion, l'auteur a abordé le pro- blème de l’origine des espèces et de leur répartition, et il termine par un court essai de la classification des plantes. d Telles sont, esquissées à grands traits, les principales lignes de ce remarquable ouvrage, dont la présence est indispensable dans tous les laboratoires de Sciences naturelles, de Chimie et de Physique biologiques et dontla lecture montrera que «le nombre des problèmes qui attendent une solutiou est plus grand qu'on ne le pense ». Eu. PError, Protesseur à l'Ecole supérieure de Pharmacie de Paris. 4° Sciences médicales Cruchet (D.-R.), £x-Chef de Clinique de l'Université de Bordeaux.-—Traité des Torticolis spasmodiques. — 1 vol. grand in-8° de xv-386 pages, avec 120 f- gares dans ie texte. Préface de M. le Professeur Pirres. Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1907. Les chirurgiens ont minutieusement étudié les dévia- tions permanentes de la tête et du eou dues à des lésions congénilales ou acquises des tissus ostéo-fibreux ou musculaire de la région cervicale; mais les médecins ont tardé davantage à analyser les variétés de torticolis provoqués par des perturbations fonctionnelles du système nerveux. Pourtant les torticolis de ce genre méritaient vraiment de retenir l'attention. Ce sont des affections assez rares, capricieuses, qui, tout en ne présentant pas de gravité vitale, affectent néanmoins très péniblement ceux qui en sont atteints. Comme le dit judicieusement M. Pitres dans la préface du livre de M. Cruchet, rien n'est plus saisissant que la vue d’un malade atteint de cette singulière affection. Son aspect extérieur ne révèle de prime abord aucune anomalie; puis, pendant qu'on lui parle, on voit tout à coup sa tête entraînée d'un côté par la contraction brusque ou lente, clonique ou tonique, des muscles du cou. Le spasme dure de quelques secondes à une ou deux minutes, cinq minutes; après quoi la tête re- prend sa position normale, qu'elle conserve pendant quelques instants. Au bout de ce laps de temps, une nouvelle contraction spasmodique, en lous points sem- blable à la première, lui imprime un nouveau mou- vement irrésistible de rotation, et ces alternatives de repos el de mouvement involontaire se répètent régu- lièrement pendant des mois ou des années, constituant ainsi une infirmité des plus incommodes. La plupart de ceux qui en avaient observé des exemples s'étaient peu préoccupés de rechercher les analogies que cette affection, spéciale aux muscles du cou, pouvait avoir avec les manifestations neuro-mus- culaires qui se produisent dans d'autres régions du corps. Ils avaient donné à ces torticolis de nombreuses dénominations; mais, dans l'esprit de chacun, çe m'étaient là que des variantes d'appellation, plus ou moins imagées, pour une sorte de maladie autonome. Il en fut ainsi jusqu'en 1893, époque où fut publiée une magistrale lecon du Professeur Brissaud, établissant une distinction formelle et définitive entre deux ordres de mouvements convulsifs : les spasmes et les tics. En même temps, M. Brissaud isolait de l'ensemble des tor- ticolis spasmodiques une forme spéciale, le lorticolis mental. I en indiqua le traitement, que codifièrent ses élèves, MM. E. Feindel et Henry Meige. Ce dernier fit voir par la suite que le torticolis mental ne comprenait pas indistinctement tous les cas de torticolis convulsifs et que, parmi ceux-ci, il fallait établir la même différent ciation qu'entre les ties et les spasmes en général, autrement dit qu'à côté de torticolis-ties il existait des Lorticolis-spasmes. M. René Cruchet à poursuivi ces études avec une laborieuse patience. Il s’est entouré d’une documentation considérable. Qu'on en juge : il reproduit dans son récent livre, et en général in extenso, 357 observations, — à peu près la totalité de celles qui ont élé publiées dans toutes les langues; lui-même a eu la scrupuleuse conscience de traduire tous ces docu- ments, qu'ils fussent écrits en latin ou en grec, en alle- mand ou en espagnol, en italien ou en anglais. On devine dans l'avertissement de son volume qu'il éprouve un- certain regret de n'avoir pu traduire personnelle- ment quelques observations publiées en des langues moins répandues. Ayant acquis de la sorte une connaissance aussi étendue que possible de tout ce qui avait été écrit sur les torticolis spasmodiques, M. Cruchet s'est efforcé,de coordonner ces nombreux documents bibliographiques. L'ouvrage est précédé d’un excellent chapitre histo- rique qui sert d'introduction. On y apprend, depuis Rabelais jusqu'à nos jours, l’histoire du mot torticolis, et de ses applications successives. Aujourd'hui, selon M. Cruchet, on doit entendre, par torticolis spasmodiques, des réactions spasmodiques ou convulsives, d'ordre clonique, tonique, ou tonico-c1o- nique, à caractère intermitlent, siégeant au niveau (es muscles de la nuque et du cou. Mais, dans quelques cas, le mouvement rotatoire est accompagné de douleur, dans d’autres il est absolument indolent. Chez certains malades, le spasme est aussi rythmé que s'il était réglé par le jeu d'un métronome ; chez d’autres, au contraire, ilse montre à des intervalles extrémement inégaux. Parfois les contractions des muscles du cou ne se produisent que lorsque le malade est dans la station verticale, ou à l’occasion de la marche, ou pendant l'application à la lecture ou à l'écriture, ou sous l'influence de l'exécution de certains actes professionnels déterminés. Enfin, les spasmes sont fréquemment suspendus par des gestes ou des attitudes antagonistes; mais cela n'est pas absolument constant. Il y a donc différentes variétés de torticolis spasmo= diques. M. Cruchet distingue et étudie successivement : les terticolis névralgiques, les torticolis professionnels, les torticolis paralytiques, les Lorticolis spasmodiques, les torticolis rythmiques ou rythmies du cou, les ties du cou, les torticolis d'habitude et le torticolis mental. On voit par là que cette affection, dans ses différentes modalités, peut être comparée à d'autres manifestations névropathiques. Ainsi le torticolis névralgique se rat- tache aux troubles moteurs qui acéompagnent les né- vralgies en général, en particulier la névralgie faciale dite «tic douloureux de la face ». De même, les torticolis spasmodiques francs confinent aux spasmes en général ; les {ies du cou sont analogues aux ties qui se produisent dans d’autres régions du corps; les torticolis d'habitude correspondent aux autres attitudes d'habitude. Dans les torticolis profes- sionnels, on a affaire à des sujets jouissant d’une santé parfaite et ne présentant aucun mouvement anormal dans tous les actes de leur vie quotidienne, sauf dans un seul acte, toujours le même pour chacun d'eux. Nor- 112 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX maux à tous les autres points de vue, dès qu'ils veulent exécuter l'acte en question — et souvent c’est l'acte d'écrire — on voit leur cou immédiatement se tordre ou s’agiter. Quelques observations permettent aussi de concevoir un groupe des torlicolis paralytiques, analogues à la paralysie faciale périphérique. Les torticolis rythmiques ou rythmies du cou con- stituent un chapitre très intéressant, riche en obserya- tions personnelles, dans lequel l’auteur a spécialement étudié les singulières rythmies qui s'observent dans le sommeil. M. Cruchet consacre un dernier chapitre au torticolis d'habitude et au torticolis mental. En ce qui concerne le torticolis mental, Vauteur ne conteste pas la réalité de cette forme; mais il la croit moins fréquenté que ne le pense M. Brissaud. Enfin, M. Cruchet rapporte une curieuse observation de {orti- colis mental familial et mème d’un torticolis mental de voisinage, dans laquelle plusieurs membres de deux familles habitant des logements contigus furent atteints de cette affection. Ces cas, comme ceux où l’on voit quelque procédé antagoniste bizarre — tels que l'ap- proche de la pointe d’un crayon vers la joue, l'installa- tion d'un lorgnon sans verres sur le nez — supprimer instantanément la contorsion du cou, appartiennent bien au groupe du torticolis mental de Brissaud. Dans les cas où le torticolis spasmodique coexiste avec un état mental fortement atteint, M. Cruchet voit surtout une coïncidence de troubles mentaux et de troubles spasmodiques. M. Brissaud, d’ailleurs, avait déjà fait remarquer que les malades atteints de torticolis mental ne sont pas des aliénés véritables. Cet important ouvrage sera d'une précieuse res- source pour ceux qui s'intéressent à la question des tor- ticolis névropathiques. Nulle part, ils ne sauraient trouver une documentation plus riche et plus conscien- cieuse. Les faits personnels ajoutés par l’auteur prouvent qu'iln’est pas seulement un érudit, mais aussi un obser- vateur et un bon analyste. On aimerait à rencontrer dans toutes les productions médicales autant de qualités réunies. 5° Sciences diverses Binet (Alfred), Directeur du Laboratoire de Psycho- logie physiologique à la Sorbonne. — Les révéla- tions de l’écriture, d'après un contrôle scientifique. 4 vol. in-8° de vi-260 pages. (Prix : 5 fr.) Alcan, éditeur. Paris, 1907. De la forme des signes tracés par la main d'un homme, peut-on conclure à la forme de son intelli- gence et de son caractere? Peut-on deviner son âge, son sexe, les traits particuliers de sa nature intellec- tuelle et morale? La graphologie répond par l’affir- mative. M. Binet veut examiner les prétentions de la graphologie. Soit une ligne manuscrite : est-elle de la main d'un homme ou d’une femme? Si vous répondez au hasard, il y a une chance sur deux pour que vous tombiez juste. Si le graphologue ne devine la vérité qu'une fois sur deux, la graphologie n'a pas la moindre valeur. Si le graphologue est infaillible, la graphologie est une science. En fait, le graphologue dit vrai 80 fois sur 100, et se trompe 20 fois sur 400 : c’est sans doute que la graphologie, sans avoir la valeur des Mathématiques, repose sur des principes qui ne sont pas absurdes. Bien plus, sans être graphologue, un observateur attentif devine 70 fois sur 400 le sexe d’un scripteur : c’est done, conclut M. Binet, que l'écriture dépend réellement du sexe. — Mêmes conclusions en ce qui concerne l’âge. Devinons au hasard l’âge du scripteur. Un ingénieux calcul de M. Binet prouve que nous nous tromperons, en moyenne, de quinze ans et demi. Mais le graphologue ne se trompe, en moyenne, que de dix ans. C'est donc que son calcul, n’est pas une divination fortuite; c’est que l'écriture dépend de l’âge. — Peut-on aller plus loin? Peut-on, sur le vu de l'écriture, dire : ceci est. l'œuvre d’un homme intelligent, et cela d'un médiocre; ceci d'un égoïste et cela d'un philanthrope? X a l'ima- gination ardente, Y a l'esprit géométrique, et Z est capable de tous les crimes? Il faut avouer que, sur ces questions, l'enquête de M. Binet n'est pas favorable à la graphologie. Les experts les plus habiles ont commis les erreurs les plus graves, attribué à un appariteur de la Sorbonne plus d'intelligence qu'au profond philo- sophe Bergson, et refusé tout talent à Renan. Ils ont trouvé dans l'écriture de Vidal, tueur de femmes, la trace d'une « extrème sensibilité », et ce n'est pas le seul assassin qui ait trouvé grâce à leurs yeux. Pour- tant, M. Binet ne condamne pas la graphologie; il soupçonne qu'elle pourrait atteindre, même sur ces questions délicates, un aspect de la vérité. Cette conclusion est très défendable. Le postulat de Ja graphologie repose sur l’un des principes les plus sûrs de la Psychologie. Si les rapports des phénomènes psychologiques et des phénomènes physiologiques sont très étroits, l'écriture, ensemble de phénomènes phy- siologiques, ne peut pas n'être pas en relation avec la pensée. Le rythme du mouvement de nos doigts, quand nous pensons et cherchons à traduire notre pensée, ne peut pas être indépendant du rythme de notre pensée. Mais notre écriture dépend d'autres causes que des causes psychologiques. Elle dépend de causes physiques (dimension des doigts, énergie des muscles) et de causes sociales {méthodes pédagogiques, degré d'instruction, habitudes professionnelles). Aussi le graphologue qui prétend conclure de l'écriture à l'esprit, comme si celui- ci était l'unique cause de celle-là, se condamne--il à l'erreur par ce raisonnement simpliste. Il ne peutréussir dans son art qu'à la condition de prendre conscience de la complexité des problèmes et de limiter son ambi- tion. Il aurait tort, par exemple, de vouloir deviner à coup sûr le sexe d’un scripteur. Ce petit mot, le sexe, résume un ensemble variable de dispositions physio- logiques, psychologiques et sociologiques. L'écriture ne révélerait « le sexe » que si toutes les personnes du même sexe avaient les mêmes habitudes intellectuelles et morales. En gros, il en est ainsi. Mais les exceptions sont nombreuses : qu'une femme reçoive l'éducation ordinairement réservée aux hommes, et son écriture devient masculine (voir p. 18) : les graphologues s'y trompent. C'est qu'ils ont demandé à l'écriture plus qu'elle ne pouvait donner : ils lui demandent de ré- pondre d'un mot à une question très compliquée. Par quels procédés interrogent-ils l'écriture? Les uns se fient à un instinct divinatoire, les autres essaient de décrire leurs méthodes. Mais aucun n’agit en pur gra- phologue; entendez : aucun ne juge uniquement le scripteur d'après la forme des lettres qu'il a tracées. L'un se laisse impressionner par l'aspect général du texte, la dimension des marges, l'écartement des lignes; l'autre se laisse suggestionner par le sens des mots, par les qualités et les défauts du style. Tous se placent au point de vue esthétique et au point de vue logique aussi souvent qu'au point de vue graphologique. Lisez par exemple (p. 69) le tableau des signes auxquels un graphologue expérimenté discerne les caractères d'un esprit (écriture claire : clarté d'esprit; — nette : pré- cision; — ordonnée : ordre; — mots oubliés : étour- derie, etc.). Je ne sais si un seul de ces signes est « graphologique ». La graphologie a beau reposer sur un postulat valable; elle ne fera de progrès qu'à la condition d'appliquer dans ses recherches des méthodes plus rigoureuses; jusqu'à présent, elle n’est guère sortie de la divination que pour tomber dans la métaphore. Pauz LaAPpie, Professeur à la Faculté des Lettres de Bordeaux. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Casselte. 18° ANNÉE NOMAIQ 15 OCTOBRE 1907 Revue générale Hes Science pures et appliquées Direcreur : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aüresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollnnde CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Astronomie Découverte de létain dans les atmo- sphères stellaires.— En examinant quelques spec- trogrammes de « du Scorpion (Antarès) pour des déter- minations de vitesse radiale, M. Goatcher, astronome à l'Observatoire du Cap, a constaté une différence per- sistante de longueur d'onde après la réduction des mesures d'une ligne à environ À 4.525, cette raie don- nant toujours une vitesse trop lente de 6 kilomètres environ par seconde. Cette discordance fut alors exa- minée par M. Lunt, qui en vint à conclure qu'elle est due, selon toute probabilité, à la présence, insoup- connée jusqu'ici, d'une ligne d’étain dont la longueur d'onde est À 4.525,00, d’après les tables de Exner et Has- chek. Dans la région du spectre qui a été étudiée, ces derniers observateurs indiquent une seule autre ligne d'étain, et comme celle-ci, d'après les tables de Nor- man Lockyer, est une raie renforcée, ce n'est donc pas d'elle qu'il s’agit dans le spectre de « du Scorpion (type antarien). Si la conclusion de M. Lunt était confirmée, ce serait la première fois que l'existence de l’étain serait décelée dans l'atmosphère d’une étoile. $ 2. — Météorologie Les ondes électriques au service de la Mé- téorologie.— Les décharges atmosphériques, comme toutes les décharges électriques, émettent des ondes hertziennes, lesquelles peuvent servir à reconnaitre les orages éloignés. Dans un travail récemment présenté à l'Académie royale des Sciences et des Arts, à Barcelone, M. G. I. de Guillén-Garcia discute l'emploi des ondes électro- magnétiques pour l'étude Ges orages et la prévision du temps. Le fait que chaque éclair engendre des ondes élec- triques est facilement vérifié au moyen d'un récepteur radio-télégraphique quelconque : toutes les fois que l'œil aperçoit un éclair, pour faible qu'il soit, la cloche de l'appareil ou le récepteur Morse se met à fonctionner. En examinant après coup les rapports des journaux, on constate que les appareils, même d’une sensibilité mé- diocre, réagissent aux orages éloignés. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. M. Garcia a installé dans son laboratoire, à Barce- lone, un observatoire céraunologique, où les décharges atmosphériques ayant lieu aux environs de cette ville etmême à desdistancesfortconsidérables sont observées au moyen d'appareils graphiques {céraunographes) et acoustiques (céraunophones). Il a obtenu, grâce surtout à ces derniers, des résultats vraiment précieux pour la Météorologie, d'autant plus qu'une combinaison rai- sonnée des données fournies par le céraunophone avec les indications barométriques et anémométriques per- met de formuler des conclusions très sûres relative- ment au temps à prévoir. Les dispositifs graphiques, qui ne sont autres que des appareils de réception ordinaires pour télégraphie sans fil, présentent, il est vrai, un avantage sur les appareils acoustiques: c’est qu'ils renseignent à tout moment sur le commencement d'un orage éloigné ainsi que sur les éclairs isolés. L'appareil Morse donnera, en effet, dans ces cas, l'inscription caractéristique des décharges atmosphériques. D'autre part, ces dispositifs ne permet- tent point l'observation simultanée de plusieurs orages se déchargeant en même temps à des endroits diffé- rents, ce qui, par contre, se fait facilement au moyen du céraunophone, qui distingue les différentes dé- charges par les différences d'intensité des signaux cor- respondant à chacune d'elles. Le céraunophone permet ainsi de reconnaitre les décharges atmosphériques ayant lieu à plus de 1.000 kilomètres de distance, et de constater si l'orage s'approche ou s'éloigne. M. Garcia signale les avantages spéciaux qu'on retire de l'emploi concurrent des appareils graphique et pho- nétique, l'apparition d’une inscription granhique étant le signal du commencement des observations acous- tiques. Cette méthode est incontestablement préférable à l'emploi du télégraphe, vu qu’elle permet de vérilier à tout moment si des orages se déchargent à un point quelconque comprisdans un rayon d'au moins { 000 kilo- mètres, tandis que le télégraphe ne renseigne que sur certains points et celà à des époques déterminées. M. Garcia attend des avantages spéciaux pour les observations météorologiques concernant l'Europe occi- dentale, c'est-à-dire la France, l'Espagne et la Grande- Bretagne, pays qui se trouvent dans des conditions par- ticulièrement défavorables quant à la prévision du 19 temps. Toutes les dépressions passant à travers l’'Eu- rope occidentale proviennent, en effet, de l'Atlantique, c'est-à-dire de parages dont les conditions atmosphéri- ques ne peuvent jamais être vérifiées en temps voulu. Le céraunophone, combiné avec une antenne appropriée pour la réception des ondes hertziennes, parait donc appelé à remplacer les stations météorologiques qui font défaut sur l'Océan Atlantique. M. Garcia, dans ses observations céraunologiques, distingue 5 degrés d'intensité des bruits de décharges atmosphériques, à savoir : « très faible », « faible », « moyen », « fort » et « très fort ». Les signaux céraunologiques désignés sous « très forts » correspondent aux éclairs directement observés à l'œil nu, mais pour lesquels le tonnerre n’est plus perceptible (ce qui est le cas pour les décharges se pas- sant à plus de 10 kilomètres de distance); les bruits dits « forts » correspondent aux décharges atmosphé- riques dont les éclairs ne sont visibles qu'à la nuit et par réflexion (cette visibilité s'étend, en général, à la distance de 100 kilomètres). Les bruits « faibles » cor- respondent, pour la station de Barcelone, à certains orages se déchargeant en été dans l'Espagne centrale et qui sont fréquemment déterminés par un centre de dépression localisé. Les bruits d'intensité « moyenne » sont intermédiaires entre les « forts » et les « faibles »; ils correspondent aux décharges atmosphériques qui, en été, ont lieu dans les environs de Valence. Les signaux céraunophoniques désignés sous le terme de « très faibles » correspondent enfin aux décharges très éloignées et perceptibles avec très peu d'intensité. Entre ces cinq degrés d'intensité, il existe des diffé- rences si marquées que les différences d'intensité entre les décharges électriques d’un même orage n'influent guère sur elles. Or, pour déterminer les lois qui régissent les orages aux environs de l'Observatoire et à des distances con- sidérables, et pour inscrire sur une carte les aires em- brassant les orages perceptibles avec un même degré d'intensité, il faut des enregistrements soignés con- tinués pendant des années. M. Garcia a jusqu'ici enre- gistré avec un soin minutieux les orages qui ont eu lieu, pendant plusieurs mois, dans plus de 130 loca- lités; il s’est basé sur ces déterminations pour cons- truire, pour l'Espagne et les pays limitrophes, les sur- faces dites iso-céraunophoniques. Ces surfaces, loin d'être concentriques, présentent les formes les plus variées, vu les différences qui existent entre la propa- gation des ondes électriques sur terre et sur mer et l'influence exercée à cet égard par les montagnes in- termédiaires; certaines chaînes de montagne se sont même trouvées former une limite bien marquée des décharges atmosphériques perçues avec une intensité donnée. Quant aux applications pratiques de ces inscriptions céraunophoniques, on peut dire ce qui suit: Lorsqu'on n'entend rien au céraunophone, on sera sûr de ce qu'il n’y a aucune décharge atmosphérique dans un rayon donné (de 1.000 kilomètres ou davan- tage). De Barcelone, on vérifie de cette manière qu'il n'existe point d'orage de l'Atlantique en Italie et de la France septentrionale à l'Afrique septentrionale. La constance d'intensité des bruits aperçus au cérau- nophone aux différentes heures d'observation est une indication de ce que l'orage en question, se trouvant localisé dans une surface iso-céraunophonique, ne sé déplace point vers le lieu d'observation. La présence, dans le céraunophone, de bruits « très faibles », prouve qu'il n’y a qu'un orage très éloigné, qui n’atteindra pas le lieu d'observation, ou, dans tous les cas, pas avant un nombre considérable d'heures ou même plus d'une journée. Quant au temps que l'orage mettra à arriver sur les lieux, on peut également for- muler certaines conclusions assez sûres. Suivant M. An- got, directeur du Bureau central de Météorologie, les centres de dépressions atmosphériques se déplacent, en effet, avec une vitesse moyenne de 28 kilomètres CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE par heure sur l'Atlantique, et de 27 kilomètres à l'in- térieur de l'Europe. L'observation simultanée de bruits céraunophoni- ques de différentes intensités prouve qu'il se passe des décharges atmosphériques, en même temps, à des endroits différents. Cet appareil permet, en outre, de tirer des conclu= sions quant à l'intensité d'un orage se déchargeant: pendant les observations : lorsqu'on entend de temps à autre un bruit sec, l'orage se compose d’un nombre limité de décharges électriques; une succession très fréquente de bruits normaux indique, au contraire, un orage très fort. Quand le céraunophone nous renseigne sur l’exis= tence d'un orage très éloigné, et que le baromètre monte ou reste constamment en dessus de l'isobare limite, on n'a point à craindre pour le jour même l’ar- rivée de l'orage, la station d'observation étant un cen- tre de pression élevée ou se trouvant en dehors du rayon de l'orage. Lorsque les bruits, pendant des observations succes- sives, vont en augmentant d'intensité, l'orage se meut vers l'observatoire, sans qu'il doive toutefois atteindre ce dernier. Si les bruits vont en s’affaiblissant, l'orage évidemment s'éloigne. Quand l'orage se trouve en dedans d’une place de dépression comprenant l'observatoire, il est facile de déterminer le district où il est localisé. L'’antenne rota- toire de Marconi, à l'aide de laquelle on détermine la direction d'origine des ondes électriques, se montrera tout particulièrement utile à cet égard. Comme l'appareil employé par M. Garcia permet d'observer, non pas seulement les orages, mais encore les vents auxquels ces derniers donnentnaissance dans les contrées environnantes, il fournira des indications M utiles à l'agriculture aussi bien qu'à la navigation côtière. L'arrivée des cyclones étant, par exemple, facilement prévue par ce moyen, on en pourra éviter les effets si désastreux. Alfred Gradenwitz. è + fers. ds $S 3. — Electricité industrielle Un nouveau système de téléphonie sans fil. — Dans une conférence récemment faite devant la Société des Electriciens Italiens‘, M. Q. Majorana a décrit un nouveau système de téléphonie sans fil, basé sur l'emploi d’un éclateur, dans lequel l'intensité des ondes électriques rayonnées dans l'espace est modifiée suivant les vibrations sonores des paroles prononcées devant un microphone. L'éclateur tournant, dont se sert M. Majorana, se compose d'un moteur sur l'axe duquel est monté un disque en ébonite portant, en face l'un de l’autre, deux anneaux métalliques sur lesquels viennent frotter deux balais métalliques insérés dans le circuit de décharge. Deux fils d'acier, de 2 millimètres de diamètre, fixés à ces anneaux, se terminent dans un morceau d’ébonite qui les relie rigidement aux deux fils terminaux. Ces deux fils sont également parallèles entre eux; mais, « pour que la décharge parte de préférence entre eux, leur distance doit être rendue plus petite. Les deux fils « de l'éclateur sont reliés au secondaire d’un transfor- mateur statique, dans le primaire duquel on lance le | L PO nr) courant alternatif du secteur municipal. M. Majorana se sert d'un transformateur à huile capable d’absorber 10 kw. et de fournir, une différence M de potentiel maxima de 100.000 volts. Dans le cas pré- | sent, les enroulements de ce transformateur sont dis= posés de facon à donner un potentiel de 25.000 volts | seulement. Lorsqu'on insère dans le circuit secondaire une 1 capacité convenable (d'environ 0.0002 microf.) et qu'on 4 met l’éclateur en rotation, les étincelles, sous le souffle énergique de l'air, se séparent de facon à donner | environ 10.000 étincelles individuelles par seconde. M —_—_—______—_—_—————————— { L'Elettricista, p. 213-215, 1907. 43 é ‘ Ter À" CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 175 Parmi les différentes méthodes dont le savant italien s’est servi pour influencer les étincelles, il convient de mentionner la méthode des flammes manométriques et celles du fil vibrant dans un champ magnétique, des jets gazeux et des jets de mercure. La méthode qui lui a donné les meilleurs résultats est basée sur l'emploi d'un microphone hydraulique inventé par le professeur Majorana lui-même. Dans le cas de la téléphonie sans fil, il convient évi- demment d'employer des microphones se prêtant à la modification, non pas d'un courant à bas potentiel, comme dans la téléphonie ordinaire, mais de décharges à potentiel élevé, pour lesquelles l'incertitude du con- tact des grains de carbone des microphones ordinaires serait sans la moindre influence. Aussi le microphone inventé par M. Majorana est-il susceptible de supporter des différences de potentiel de plusieurs milliers de volts, tout en ne s'échauffant pas sous l’action de cou- rants intenses (de quelques ampères) Ce microphone hydraulique est basé sur les propriétés physiques bien connues des veines liquides. On sait que la fréquence des gouttes individuelles produites par la séparation d'une veine représente, dans les conditions - données, la période propre de vibration de cette der- nière. Cette période peut s'observer par voie acous- tique, en faisant frapper à la veine, dans le point où celle-ci commence à se séparer, une membrane élas- tique, qui rendra un son correspondant exactement à cette période. Si toutefois des vibrations extérieures viennent frapper la veine liquide, il se manifeste dans cette dernière des contractions périodiques à peu de distance de l'embouchure, contractions qui correspon- dent exactement à la période des vibrations exté- rieures. Aussi, la membrane rendra-t-elle les sons cor- respondant à cette période. Or, en venant heurter une surface plane perpendiculaire à sa direction, la veine produira un voile liquide d'une épaisseur variable sui- vant les vibrations de la veine. Le microphone basé sur ces phénomènes comporte, en dehors de l'embouchure ordinaire servant à concen- trer les ondes acoustiques, un petit tube en verre par- couru par de l’eau légèrement acidulée et qui se meut librement sous l’action des vibrations de la membrane. Le liquide, à son issue d'une ouverture de ce tube, après être resté limpide sur une distance donnée, vient frapper la surface plane d'un dispositif dit collecteur, comportant deux morceaux cylindriques de platine isolés l'un de l’autre par un diélectrique solide. En frappant le centre du collecteur, la veine liquide se transforme en un voile mince, mettant les deux parties du collecteur en communication électrique perma- nente. Un téléphone inséré, avec une pile, dans le cir- cuit de ces deux conducteurs, sera parcouru par un cou- rant constant, aussi longtemps que la membrane n'est pas frappée par les vibrations sonores venant du dehors, c’est-à-dire aussi longtemps que la veine liquide ne se contracte pas. Dès que les sons extérieurs viennent mettre la membrane en vibrations, lembou- chure commencera à vibrer et la veine liquide se con- tractera d'une facon variable, le voile liquide prenant des épaisseurs continuellement variables suivant les vibrations sonores. L'intensité du courant télépho- nique subira par là, en raison des variations de résis- tance du circuit, des modifications périodiques, assu- rant la reproduction des sons et mots articulés devant le microphone. Ce microphone, inséré dans le circuit engendrant les ondes électro-magnétiques et mis en communica- tion convenable avec l’éclateur tournant, servira à modifier l'intensité des étincelles d'accord avec les vibrations sonores des paroles prononcées devant le microphone. Or, ces modifications rendront les sons transmis au détecteur de la station réceptrice avec une fidélité parfaite. Les résultats obtenus avec ce dispositif ont été excellents. M. Majorana s'est également servi avec succès de l'arc voltaïique de Poulsen à atmosphère d'hydrogène, au lieu de léclateur tournant décrit ci-dessus. S 4. — Géologie - Les forages artésiens dans le Sud de l'Algérie, — Une des œuvres qui font le plus d'hon- neur à notre colonisation algérienne est celle des forages artésiens, poursuivie depuis 1856. Les résultats de la campagne d'hiver 1906-1907 ont été des plus satisfaisants. Dix ateliers y ont participé : cinq dans le territoire de Touggourt, deux dans le territoire de Ghardaïa, deux dans le territoire des oasis sahariennes et un sur la route d'El-Arich à Berguent, totalement dépourvue d'eau. Dans l'ensemble, on note une augmentation de débit de 33.780 litres d’eau jaillissante à la minute, ce qui permet une irrigation normale de plus de 800 hec- tares de palmeraies, soit 120.000 arbres, et ce qui se traduit, pour les propriétaires, par un accroissement de revenu annuel de près de 400.000 francs, non compris les bénéfices que les populations retirent des produits accessoires cultivés dans les palmeraies (céréales, plantes fourragères et maraîchères, arbres frui- tiers, etc.). La région de l'Oued-Rir, dont les excellentes dattes sont répandues sur tous nos marchés, à pour sa part bénéficié d'un accroissement de débit de 21.150 litres; celle d'Ouargla, de 4.140 litres; et celle d'El-Goléa d'un supplément de 5.700 litres. Une mention spéciale est à faire pour deux puits. Dans l’oasis de Sidi-Amrane (région de l'Oued-Rir), un forage a donné un débit jaillissant de 12.009 litres à Ja minute, le plus important des débits obtenus jusqu'à ce jour dans le monde entier par les ateliers de forage. Ce volume d'eau permet non seulement d'irriguer les anciennes palmeraies avoisinantes, mais encore de créer une oasis nouvelle de plus de 30.000 palmiers. Le commandant de Touggourt a procédé, le 4% juin dernier, à la répartition entre les indigènes des nou- veaux terrains irrigables, dont la plantation commen- cera incessamment. Dans la région de Tit, que nous occupons depuis six ans seulement, une nappe jaillissante donnant 2.460 litres à la minute, a été rencontrée à la profon- deur de 80 mètres. Ces chiffres montrent bien l'efficacité des dans le développement de l'influence française. forages $S 5. — Agronomie La production et la consommation du thé. — Le thé est une plante de la zone intertropicale humide, qui convient particulièrement aux pays de moussons. À Ceylan et au Japon, les régions les plus productives sont également les plus humides, et dans l’Assam, pays qui tient le record mondial de la plu- viosité, l'arbre atteint une hauteur de 15 mètres. D'après Boutilly, les moyennes exigées sont 1,75 pour les pluies et 24° pour la température. Les soins à donner à la plante, la continuité de la récolte, de même que les manipulations postérieures, réclament une main-d'œuvre abondante, qui fait que le thé ne convient guère qu'aux régions très peuplées, où il se prête fort bien à l’extrème morcellement du sol. Le grand pays producteur est la Chine; mais les exportations de ce pays sont en diminution constante et régulière, depuis 1886, année où elles atteignirent leur maximum. C'est que la concurrence des prove- nances de l'Inde et de Ceylan a réduit singulièrement la part du thé chinois sur le grand marché de Londres. En 1905, les importations nettes de thé en Angleterre se sont élevées à 117 millions de kilogs, sur lesquels on comptait seulement 3 millions de thé chinois, soit 2 1/2°/,t. Le thé chinois est resté cher — en particu- 1 Cf. en particulier sur la décadence du thé chinois : CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE er, du fait des taxes intérieures — et sa préparation et sa culture laissent beaucoup à désirer. Au cours de 1905, une Mission chinoise a visité les districts à thé de l'Inde et de Ceylan, mais il faudra attendre encore longtemps sans doute avant de voir employer les méthodes anglaises. La Chine a jusqu'ici conservé le marché russe, — bien qu'on ait commencé avec succès la culture du thé en Transcaucasie. Cette expor- tation continue à prendre la forme de tablettes — qui renferment la meilleure qualité — et de briques, par le fait du transport en caravanes, avant l'utilisation actuelle du chemin de fer transsibérien. Ce thé en briques est préparé en grande partie dans les usines russes de Han-Kéou. La poussière, placée dans des sacs de coton, est soumise à l'action de la vapeur et pressée fortement à la machine dans des moules de bois. Les briques sont enveloppées de feuilles d’étain et de papier, puis emballées dans des caisses dou- blées de zinc. Ce produit sert également d'instrument d'échange dans toute l'Asie centrale. Les thés japonais ont pour principal marché les Etats-Unis. Leur production est stationnaire, mais leur qualité s'est bien améliorée. Les exportations de thé de l'Inde ont progressé jusqu’en 1900; depuis, elles sont en.diminution, affectées par la concurrence de Ceylan. La production de cette île ne cesse, en effet, de progresser; l'arbre à thé y a remplacé le caféier, détruit par l’Hemileia vastatrix. La qualité du thé de Ceylan. provient en grande partie de sa préparation mécanique extrêmement soignée, et les succès qu'il remporte non seulement sur les marchés anglais, mais encore dans les autres pays européens, tiennent, en outre, à la réclame bien comprise qui lui a été faite aux expositions, en particulier à celle de Paris, en 1900. Les exportations de Java vont en majorité à Amsterdam, dont le marché prend de plus en plus d'importance. On sait que le thé est cultivé en Indo-Chine. Suivant M. Brenier, qui avait organisé à Marseille, de façon si scientifique, l'exposition des produits agricoles de cette colonie, et qui leur a consacré une excellente notice‘, cette plante doit prendre la première place dans les exportations indo-chinoises, bien que la pro- duction locale ne suffise pas aux besoins. Inexistante avant 1897, l'exportation a atteint, en 1904, 324.700 kilogs poids brut). C'est l’Annam qui a fourni jusqu'ici le plus gros appoint; mais le Tonkin, grâce aux efforts des planteurs français, commence à prendre sa part. Les analyses chimiques ont prouvé que ces thés sont com- parables aux thés de Chine, dont ils se rapprochent beaucoup plus que des thés de Ceylan. Le mode de culture, qui a déjà fait de grands progrès, pourra être encore amélioré avec le temps, quand les indigènes se seront mieux pénétrés des méthodes modernes en usage à Ceylan. L'augmentation de la consommation métropolitaine est, d’ailleurs, un symptôme encoura- geant pour le planteur. Elle n'était encore (thés de toute provenance, mais de Chine principalement) que de 614.000 kilogs en 1890 ; elle a dépassé un million de kilogs en 1904*. L'Indo-Chine n’en fournit donc encore que le tiers à peine, mais sa part est appelée à grandir. Il n'y a pas encore de marché proprement dit du thé en Indo-Chine, les prix étant fixés par des accords particuliers entre le planteur ou l'indigène et l'expor- tateur français. Avec la détaxe du demi-droit, les envois Dipowaric axp CoxsuLar Report. Trade of Foochow for the year 1905. London, Foreign Office, 1906. Le consul anglais déclare « moribond » le commerce du thé dans ce port, qui est pourtant, avec Han-Kéou, le grand marché chinois de ce produit. ! Cf. L'Indo-Chine à l'Exposition coloniale de Marseille 1906. Marseille, 1906. Edition du Journal des Colonies. * Nous ne parlons que du thé consommé. L'importation totale (commerce général) a dépassé 3 millions de kilogs en 1903. Une partie est réexportée, ce qui prouve que nous pourrions certainement jouer un rôle plus important à ce point de vue. pourront être accrus notablement; mais l'exemption totale pour cette denrée coloniale, comme pour les autres, serait probablement un stimulant puissant, et. la juste contre-partie du régime douanier auquel les colonies ont été soumises (application du tarif métro- politain). A ces avantages, il faudrait encore ajouter une publicité du genre de celle qui a fait le succès des thés de Ceylan, en profitant de nos expositions colo- niales et des expositions étrangères. Nous avons re- marqué à Marseille un produit peu connu en Europe, les fleurs de thé, dont les indigènes d'Indo-Chine font une grande consommation. Ce sont les boutons de la plante, cueillis avant qu'ils soient épanouis et préparés d'après des procédés spéciaux, bien distincts de ceux employés pour la manipulation des feuilles. L'infusion a les mèmes propriétés que celle de la feuille, avec cette différence qu'elle est beaucoup plus parfumée et plus agréable au goût. Nous avons vu que la consommation du thé tend à s'accroître en France. Ce mouvement, à peu près général en Europe, s'accompagne actuellement d'une hausse des prix; ces deux facteurs ne manqueront pas d'encourager les planteurs de thé: Pierre Clerget, Prcfesscur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon $ 6. — Biologie Enregistrement cinématographique, au moyen des rayons X, de Ia respiration. humaine. — Le cinématographe, loin d’être un objet de curiosité seulement, a été appliqué, dans ces der- nières années, à l’investigation et à l'enseignement. scientifiques. Cet ingénieux appareil permet, en effet, de décomposer et d'étudier, dans leurs différentes phases, les phénomènes de mouvements les plus com- pliqués; la reproduction, en une succession rapide, de ces phases donne ensuite l'illusion de ces mouvements mêmes, dont on peut ainsi faire la démonstration devant un auditoire. Les mouvements trop rapides pour être observés à l'œil nu, ou trop lents pour se prêter à l'observation visuelle, se reproduisent à l'aide de cet appareil, avec un ralentissement ou une accélé-. ration convenables. Les recherches de M. Marey sur le vol des insectes et les tentatives heureuses de certains botanistes pour reproduire la croissance des plantes font voir tout le parti qu'on peut tirer du cinémato- graphe. Dans un autre ordre d'idées, on a tenté d'utiliser les démonstrations biographiques pour l’enseignement de la Médecine et la vulgarisation des connaissances médicales. Le D Mac Lane Hamilton a, par exemple, reproduit les différentes allures au moyen d'une chambre cinématographique Lumière. Le D° W. Green- ough Chase, à Boston, a enregistré et reproduit, au moyen du biographe, les convulsions des épileptiques. L'importance de ces documents pour l’enseignement de la Médecine est d'autant plus grande que même une pratique de plusieurs années ne saurait embrasser l'infinie variété des cas pathologiques possibles; les phénomènes un peu rares surtout échappent en général à la démonstration directe. | Au récent Congrès de Roentgénographie, tenu à Berlin. le Dr Kühler, de Wiesbaden, a suscité l'intérêt ginéral par la reconstruction biographique qu'il a faite, ai moyen des rayons X, de la respiration normale où pathologique. Bisn que reproduits dans la chambre cinématographique, ces diagrammes roentgénologiques n'avaient point été obtenus à l’aide de cet appareil. Il n'est pas impossible, en principe, d'obtenir 40-15 radio- grammes du thorax par seconde, comme cela serait, nécessaire pour une démonstration biographique ; mais il faudrait un laboratoire spécial pour faire passer sous le sujet une pellicule de #0 centimètres de largeur et de 30 à 40 mètres de longueur, à raison de 15 intermit- tences par seconde. , Les enregistrements de la respiration, dont la figure. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 7 —1 1 ci-dessous donne un échantillon, ont, par conséquent, été obtenus en combinant différents radiogrammes réalisés avec une pose relativement longue. Leur démonstration biographique produit une impression d'autant plus réaliste que le nombre de phases fixées de la respiration a été plus grand. Dans le cas présent, on a enregistré 20 à 22 phases individuelles de chaque respiralion, et, comme chacune de celles-ci avait été projetée deux ou trois fois successivement, l'on disposait de 60 diagrammes pour chaque inspiration etexpiration. Les difficultés qui s'opposent à ce genre de travaux sont évidemment considérables, autant pour le médecin que pour le sujet. Il est, par exemple, extrêmement difficile d'obtenir un certain nombre de diagrammes d’une même personne avec une immobilité parfaite du diaphragme. Beaucoup de radiogrammes doivent être rejetés, et l'on ne peut guère en prendre plus d'un certain nombre, de peur d'endommager la peau du malade. La difficulté la plus grande réside, toutefois, dans l’impossibi- lité où l’on est de réaliser le même nombre de contrastes et de gradua- tions dans chaque pellicule indivi- duelle. Aussitôt que l'œil, pendant quel- ques secondes, s’est fait à l'aspect de ces projections, les imperfec- lions dues à ces inconvénients ces- sent d'être gênantes et l'on n'é- prouve plus aucune difficulté à les contempler. En raison des chocs imprimés au projecteur, et qui, bien que peu importants en eux-mê- mes, se font d'autant plus sentir que le grossissement est plus grand, les discontinuités caractéristiques de toute reproduction biographique ne peuvent être entièrement évitées. Le D'Kühler présentait aux mem- bres du Congrès deux séries de diagrammes obtenues en supina- tion, avec une distance focale de 75 centimètres et une pose de vingt secondes ; les rayons X étaient produits par une bobine d'induc- tion de 45 millimètres avec un inter- rupteur à contact glissant et une ampoule Hermann-Kobler à 32 volts et 4 1/2 ampères. Une de ces séries de diagrammes est relative à un cas de respiration diaphragmatique presque pure, chez un sujet dont le thorax, en raison des déformations des côtes, était presque entièrementrigide. Un phé- nomène intéressant, démontré pour la première fois par cet enregistre ment biographique, c'est l'aplatis- sement remarquable, pendant une inspiration profonde, des deux moitiés du diaphragme, qui, pendant l'expiration, présentent la voûte caracté- ristique des sujets normaux. Faisons remarquer que les radiogrammes des organes de la respiration se prennent, depuis plusieurs années déjà, dans les Instituts médicaux, avec une netteté fort satisfaisante. C'est dire que la reproduction radiogra- phique des poumons et du diaphragme, en soi, n’est nullement chose neuve. On avait même réussi à photo- graphier, au moyen des rayons Roentgen, différents stades de la respiration, tels que, par exemple, l'inspi- ration et l'expiration extrêmes, mais de préférence la première. Pour la reproduction cinématographique de la respiration, il faut cependant prendre un nombre extrêmement grand de vues individuelles, pour cha- cune desquelles les poumons, en raison de la quantité plus ou moins grande d'air qu'ils contiennent, pré- sentent une expansion différente. Or, l'on comprendra Fig. 1. — Portion d'une bande de radiogrammes du thorax, movtrant les mouvements de la respiration. les difficultés fort sérieuses que pareille tâche doit offrir pour le malade, et les diflicultés encore bien plus grandes s'opposant au médecin, chaque radiogramme devant être obtenu avec une disposition absolument identique (distance focale de l'ampoule constante et position identique du sujet et des plaques, malgré les échanges de ces dernières). La figure ci-jointe représente le thorax d'un sujet normal, vu de derrière : c'est la reproducuon d'une ortion d'une pellicule de 2 mètres de longueur. Les bandes blanches presque horizontales sont les côtes; la grande tache sombre à droite, traversée par les côtes, est le poumon droit, et la tache sombre, large en haut et pointue en bas, est le poumon gauche. La portion blanche sensiblement triangulaire dans la moitié gauche du thorax est le cœur; les plages plus claires, limitées en haut par des courbes, représentent les deux sommets du diaphragme (celui de droite est un peu plus élevé que l’autre) avec les organes abdo- minaux placés en dessous. Pendant l'inspiration et l'expiration, les reproductions biographiques font voir les expansions des poumons et les mouvements ver- ticaux alternatifs du diaphragme et du cœur. Ces enregistrements au moyen des rayons X pourraient évidemment se faire avec une facilité et une précision bien plus grandes, par la photographie directe, à l'aide d'une chambre biographique, des images projetées sur l'écran fluorescent. Au moyen de plaques épaisses en verre à plomb, on pourrait éliminer toute radiation diffuse des rayons X sur les pellicules. Mais nos pellicules et plaques photographiques sont malheureusement loin de présenter la sensibilité voulue pour la lumière fluorescente des écrans au bariocyanure de platine; aussi l'application de cette méthode est-elle encore impossible. L'invention d'un procédé de sensibilisation des pel- licules pour les radiations fluorescentes permettrait sans doute de réaliser un progrès énorme dans cette voie; dans le cas présent, on pourrait, par exemple, re- produire les pulsations du cœur en même temps que les respirations. Même à l'époque actuelle, et malgré ses imperfec- tions, la méthode biographique est cependant capable de rendre des services précieux à l’enseighement et à l'étude de la Médecine. Alfred Gradenwitz. $ 7. — Enseignement Ecole de Médecine de Marseille. — L'assem- blée des professeurs de l'Ecole de Médecine de Mar- seille vient de présenter un vœu tendant à la translor- mation de l'Ecole en Faculté de Médecine. Ce vœu est basé sur les considérants suivants : jo Le nombre des étudiants est suffisant pour justi- fier la création d'une Faculté mixte de Médecine et de Pharmacie ; 20 Lors de la transformation des Ecoles de Lyon, Bordeaux, Lille et Toulouse et du transfert de celle de Strasbourg à Nancy, ces Ecoles avaient une centaine d'élèves de moins que celle de Marseille ; 3° La Ville a fait de grands sacrifices pour son Ecole de plein exercice depuis trente-deux ans ; 4° L'importanee de la Ville de Marseille est de nature à alimenter l’enseignement dans une large mesure, surtout par ses ressources anatomiques el cliniques, hors de pair avec celles de toutes les autres villes de France, Paris excepté ; . 5 Ses relations coloniales la mettent dans une situa- tion privilégiée au point de vue de l'installation d'un enseignement colonial, comme le prouve, du reste, le fonctionnement, déjà très florissant, de l'Ecole d'appli- cation du Service de santé des troupes coloniales qui vient d'ètre créée à Marseille ; | 6 Le nombre des chaires est aussi élevé que celui des Facultés et permet aux étudiants d'y trouver un enseignement équivalent, à la dénomination près. 778 G. WARCOLLIER — LES MÉTHODES SCIENTIFIQUES DANS L'INDUSTRIE DU CIDRE LES MÉTHODES SCIENTIFIQUES DANS L'INDUSTRIE DU CIDRE Le cidre constitue la boisson journalière des populations du Nord-Ouest de la France, et, à ce titre, l'étude de sa fabrication présente le plus grand intérèt. Cet intérêt redouble si l’on songe que le cidre, resté pendant longtemps une boisson locale, tend de plus en plus à perdre ce caractère en cherchant à devenir d’une consommation plus courante en dehors des pays de production. Les premières tentatives faites pour en étendre le rayon d'action n'ont pas toujours été couronnées de succès: il ne faut pas s'en étonner, en pensant que le cidre est fabriqué en grande partie par les producteurs agriculteurs eux-mêmes, voués trop souvent à la routine et à l'empirisme, et que la cidrerie, à peine naissante, commence seulement à s'orienter vers les nouvelles méthodes scientifiques. Nous avons donc à étudier les premiers pas d’une industrie toute nouvelle, qui demande à concourir d'une facon plus efficace à notre alimentation natio- nale et qui, dès ses débuts, doit lutter contre des concurrents redoutables, le vin et la bière. Ces derniers, conduits aussi, à cause de la produc- tion plus grande, à chercher de nouveaux marchés, viennent même jusqu'en Normandie et en Bretagne disputer au cidre sa place sur des tables qu'il était autrefois seul à occuper. Dans des conditions économiques aussi difficiles, dans ce conflit d'intérêts qui met aux prises les travailleurs du sol du Nord et du Midi, et où le succès apportera avec lui la prospérité ou la gêne des régions de la vigne ou de celles du pommier, nous voudrions montrer dans quelle voie les pro- ducteurs de cidre doivent s'engager pour travailler au mieux de leurs intérêts. Jetons un rapide coup d'œil sur l'état actuel de l'industrie cidrière, afin de connaître tous les fac- teurs dont nous aurons à tenir compte dans notre étude. I. — CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES. Le cidre constitue une boisson hygiénique de premier ordre lorsqu'il est bien préparé. Malheu- reusement, à l'heure actuelle, le consommateur lui fait souvent de graves reproches : il l'accuse d'avoir une composition et un goût changeants, de manquer de fixité, d'être d’un transport et d'une conservation en fûts difficiles, enfin d’avoir un prix très variable, si bien qu'on ne peut en faire sa boisson journa- lière lorsque l'on habite en dehors des pays de production. En vérité, ces reproches sont fondés, Le cidre est encore souvent mal fabriqué, d'abord à cause du peu de soin apporté au choix des pommes, à leur degré de maturité et à leur état de conserva- tion. On travaille parfois des fruits non mûrs et des fruits presque pourris, qu'on broie et presse dans des appareils rudimentaires, dont la propreté laisse quelquefois à désirer; on n'attache pas toujours assez d'importance à la nature des eaux servant à l'épuisement des mares, et l’on croit se mettre à couvert en répétant ce faux dicton : « La. fermentation purifie tout ». Entin, on méconnait les règles les plus élémen- taires qui doivent présider à toute fermentation alcoolique; bien peu de brasseurs de cidre, par exemple, se servent äu thermomètre. Au lieu de travailler à température constante, nous voyons brasser depuis septembre jusqu'à février, par tous les temps; fermenter à toutes les températures, dans des locaux ouverts ou fermés : celliers, caves, hangars, cours. Les fûts recoivent parfois l’action du soleil pendant le jour et celle de la gelée pendant la nuit. Comment espérer réussir dans ces conditions et vouloir produire un cidre de qualité et de conservation constantes? Actuellement, le cidre ne voyage bien en général qu'à l'état doux, si bien que les expéditions de cidre à longue distance n'ont lieu que pendant les quelques mois qui suivent la fabrication et que tout mouvement s'arrète presque complètement pendant le reste de l’année. Le commerce de gros des liquides, qui possède chez lui des stocks de vin considérables, n'a pas voulu se charger d'une boisson aussi fragile, aussi périssable que le cidre: et les consommateurs qui savent l’apprécier ont dù renoncer à en faire leur boisson ordinaire, car, comme l'a dit M. Lechartier, «ils ne sont pas certains de pouvoir se le procurer pendant toutes les saisons avec toutes les qualités qu'ils sont en droit d'exiger ». Pour être recherché, le cidre doit devenir un produit commercial, c'est-à-dire être de qualité régulière, de conservation assurée, de transport facile, de prix sensiblement constant, et enfin être présenté au goût du consommateur. Nous insistons à dessein sur ce dernier point, car nous savons que, pendant longtemps, les pro- ducteurs ont voulu imposer leur goût aux amateurs de cidre et qu'ils n'ont réussi ainsi qu'à les éloigner. Les fabricants de cidre normands, bretons ou picards ont de tout temps fait le cidre à leur goût, ou plutôt ils ont fait leur goût à celui de la boisson qu'ils obtenaient dans les conditions de la pratique es "TS G. WARCOLLIER — LES MÉTHODES SCIENTIFIQUES DANS L'INDUSTRIE DU CIDRE courante et l'ont même adapté aux variations habituelles de qualité et de saveur de cette même boisson. De sorte que, dans tout l'Ouest de la France, il arrive souvent que les habitants boivent en hiver un cidre encore légèrement sucré, peu acide, chargé d'acide carbonique; au printemps, un cidre où le goût sucré à plus ou moins complètement disparu et a fait place à une saveur aigrelette recherchée; en été, un cidre tout à fait désucré, à saveur nette- ment acétique, Dans les années où la récolte des pommes est déficitaire, comme elle le sera en 1907, les populations boivent même généralement toute l'année des cidres acétiques que l'on sucre artifi- ciellement, pour en atténuer le earactère acide parfois exagéré. Ce n'est pas avec ce cidre, aux caractères Si changeants pendant le cours d'une même année, que les producteurs peuvent espérer se créer une clientèle en dehors des pays de production, et ils ont parfaitement compris qu'ils n'y arriveront qu'en présentant des cidres de qualités gustalives bien déterminées et de goûts recherchés par les diverses catégories de consommateurs. Par exemple, aux habitants des grandes villes comme Paris et aux habilués de nos plages nor- mandes et bretonnes, il faudra fournir un cidre légèrement doux, pas amer, limpide et un peu pé- tillant. Par contre, la clientèle bourgeoise de nos villes de l'Ouest préférera des cidres secs, complè- tement désucrés, légèrement amers, bouquetés, à peine chargés d'acide carbonique. Aux habitués de nos cafés, qui demandent en été des boissons rafrai- chissantes et pétillantes, il faudra présenter le bock de cidre mousseux. Pour les pays étrangers, pré- parer des cidres qui soient du goût de leurs habi- tants el savoir les leur faire parvenir en bon état de conservation. Cela établi, voyons si le producteur de cidre est placé dans des conditions économiques salisfai- santes pour fournir des boissons répondant à ces desiderata. La première des conditions nécessaires pour Y arriver facilement serait, tout d'abord, de posséder une matière première d'un prix relativement stable et de pouvoir la travailler ensuite avec tout le soin et le temps utiles. Or, la production cidrière subit annuellement des variations considérables. Pour en donner une idée, disons que la production du cidre, qui est évaluée pour la dernière période décennale à 15 millions d'hectolitres par an, a été en 1903 de 4.500.000 hectolitres, en 1904 de 36.400.000, et en 1905 de 4.000.000 d'hectolitres. Soit, pour 1903 et 1905, des récoltes huit et neuf fois plus faibles 179 que celle de 190%, qui s'éloigne elle-même considé- rablement de la moyenne annuelle, Dans aucune autre culture ou industrie francaise on ne constate des écarts aussi grands dans la pro- duction; en particulier, pour le vin, le rapport entre la produetion maximum et la production minimum ne dépasse pas deux. Les fluctuations de la récolte sont donc, pour le cidre, quatre fois plus considérables que pour le vin et ont leur répercussion immédiate sur le prix des pommes et des cidres. C'est ainsi que l’on voit les pommes valoir tantôt 20 francs, tantôt 200 francs les 1.000 kilogs. Les prix des eidres ne présentent pas heureusement de tels écarts; les cidres marchands, par exemple, oscillent entre 7 et 20 francs l'hectolitre et ne pré- sentent ainsi que des variations du simple au triple. Ces prix, relativement stables en comparaison de ceux des pommes, sont obtenus grâce à un sucrage et à un mouillage déterminés. La qualité des cidres ainsi obtenus ne peut étre constante, et il ne faut pas s'étonner si le consom- mateur se tourne volontiers vers le vin et la bière. Même dans les pays de production, où l'on est habitué aux variations diverses que nous venons de signaler, le marché aux cidres ne parvient pas, malgré le mouillage et le sucrage, à trouver la sta- bilité désirable. Pour la même raison, les cidreries, dont l'instal- lation, encore rudimentaire, aurait souvent besoin faire de nouvelles dépenses pour renouveler leur matériel. Ne tra- d'être modifiée, hésitent à vaillant pas, d'une facon régulière, la même quan- tité de fruits tous les ans et ne produisant pas, par conséquent, la même quantité de cidre, elles sont obligées quand même de supporter annuellement les mêmes frais généraux, qui sont très élevés, et perdent ainsi, une année sur deux, une partie de leurs bénétices. On s'explique ainsi en partie pourquoi l'industrie du cidre a évolué moins vite que les industries du vin et de la bière. Les capitaux ont hésité à venir à son aide, à la transformer, à lui fournir un matériel coûteux et risquant de ne pas être utilisé tous les ans. La cidrerie naissante s'est installée quand mème, relativement à peu de frais, dans des locaux souvent dépourvus de caves, qui n'étaient pas faits pour elle. Employant des procédés de fabrication plus parfaits que ceux du paysan, elle s'est cependant heurtée aux mêmes difficultés que lui, et n'a produit que les mêmes cidres, tantôt parfaits, tantôt médiocres; mais, comme l’agriculteur pro- ducteur, elle reste toujours pleine de bonne volonté pour faire mieux et espère sortir bientôt de l’état de malaise où elle se trouve actuellement. 780 G. WARCOLLIER — LES MÉTHODES SCIENTIFIQUES DANS L'INDUSTRIE DU CIDRE II. — LES MOYENS D'ACTION. Le remède à une pareille situation serait tout d'abord d'atténuer, de faire disparaitre les varia- tions extraordinaires de la production en obligeant nos pommiers à nous fournir des récoltes régu- lières et annuelles. Malheureusement, par sa nature mème, le pommier à cidre ne donne que des ré- coltes bi où triannuelles : nous ne sommes pas encore parvenus à sélectionner des variétés fertiles tous les ans, et il nous faut toujours compter avec certaines influences météorologiques contre les- quelles nous n'avons presque aucun moyen de défense. Il nous reste la ressource de faire de très grosses réserves de fruits ou de cidres dans les années d'abondance. En ne jetant ces stocks sur le marché qu'au fur et à mesure des besoins, on créerait au cidre les prix à peu près stables qu'il doit avoir. $ 1. — Conservation des fruits. Est-il possible, pratiquement, de faire des ré- serves de fruits pendant un, deux ou trois ans, c'est-à-dire pendant le temps qui s'écoule, en géné- ral, entre deux années de grosse production? On ne connait pas de procédés de conservation pouvant être appliqués pendant un temps aussi long aux fruits à l'état frais ; tout au plus peut-on en prolonger la conservation de quelques mois en les placant dans des greniers, silos, chambres fri- gorifiques. D'expériences entreprises en Angleterre par le Jodrell Laboratory à Kew, il semble résulter que l'on puisse augmenter de deux mois environ la durée de conservation des fruits commerciaux en les soumettant à un lavage au formol à 4 °/, pen- dant dix minutes. J'ai répété les mêmes essais" sur des pommes à cidre de diverses variétés et je n'ai obtenu aucun résultat; les fruits non traités se sont conservés plus longtemps que les formolés. Pour juger définitivement la valeur du procédé, il faudrait répéter les expériences dans des cidreries sur de grandes quantités de pommes. On sait très bien conserver les fruits à l'état sec. L'industrie des pommes sèches à donné des résul- tats merveilleux aux États-Unis et au Canada ; il serait donc désirable de la voir naître et se dé- velopper en France. Elle nous permettrait, notam- ment, de créer un courant d'exportation vers l’AI- lemagne, qui demande pour le moment ces fruits séchés aux États-Unis, et nous dispenserait d'im- porter chaque année en France pour plus d'un mil- lion de francs de pommes sèches à cidre. Elle ® G. WarcoLLiEr : Conservation des pommes à cidre par Femploi du formol. Société nationale d'Agriculture, 3 juil- let 1907. serait, en outre, d'un très grand secours aux eulti- vateurs, en leur permettant de faire, avec les pro= duits mêmes de leur sol, des boissons saines, hygiéniques, économiques pour leur personnel et de s'affranchir ainsi des boissons dites de fantaisie, qu'ils achètent aujourd'hui à des industriels qui réalisent de gros bénéfices. Certains cidriers voient dans la fabrication des pommes sèches le moyen d'arriver à produire à tout moment le cidre com- mercial, et demandent la modification des règle- ments existants, qui défendent aujourd'hui la vente des cidres de pommes sèches et n'autorisent que … celle des boissons au-dessous de 3° d'alcool. Pour notre pärt, nous ne pensons pas qu'il y aurait danger à apporter une pareille modification; mais nous sommes loin de considérer cette fabri- cation de cidre comme le procédé idéal. Les cidres que nous avons fabriqués avec des pommes que nous avions desséchées nous-même à l'aide d'appa- reils spéciaux sont toujours restés nettement infé- rieurs aux cidres de pommes fraiches. L'industrie des pommes sèches en France ne serait qu'une industrie temporaire, ne travaillant que tous les trois ou quatre ans, années d’abon- dance de fruits. Dès lors, serait-elle rémunératrice? Les frais d'amortissement des appareils à dessécher ne seraient-ils pas trop élevés ? Aucun essai fait sur une large échelle n’a été tenté en France; les fabri- cants de cidre qui ont étudié le problème ne le croient réalisable et économique qu'à la condition de pouvoir utiliser librement les pommes sèches dans leur fabrication. Ajoutons enfin, à titre de ren- seignement, qu'en Allemagne des expériences ont fait ressortir le prix de dessiccation à 2 fr. 50 les 100 kilogs de pommes travaillées. $ 2. — Conservation des moûts de pommes. Depuis quelque temps, on a cherché à faire des réserves de jus de pommes en le stérilisant à la sortie du pressoir. Si de tels procédés pouvaient être utilisés, on emmagasinerait le moût dans des récipients, fûts ou cuves, et on ne le mettrait en fermentation qu'au moment voulu, six mois, un an, deux ans après sa récolte; en un mot, on fabriquerait le cidre là et quand l’on voudrait. Divers moyens ont été préconisés; mais, pour l'instant, aucun n’est encore entré dans la pratique courante. Ceux qui ont été particulièment étudiés sont basés sur l'action de la chaleur, ou des anti- septiques, tels que l'acide sulfureux, le formol. M. Rosenstiehl opère par chaufles successives entre 55° et 60° à l'abri de l'air et en présence d'acide carbonique pour éviter le goût de euit. Des essais ont été faits à l'aide de son appareil, il y à plusieurs années, dans une cidrerie du pays d’Auge; mnt G. WARCOLLIER — LES MÉTHODES SCIENTIFIQUES DANS L'INDUSTRIE DU CIDRE 781 nous ne croyons pas que les résultats aient été satisfaisants, car, à notre connaissance, les expé- riences n'ont pas été continuées. Nous avons entrepris, en 190% et en 1905, des essais de stérilisation à l’aide d'un pasteurisateur continu, sans parvenir à obtenir des résultats constants et durables. Nous avons seulement mis en évidence les points suivants : la stérilisation peut être obtenue par deux chauffes à 60° ou une chauffe à 65°. Les moûts ont un goût de cuit pro- noncé, si on les soumet à une température supé- rieure à 65°. Les cidres préparés avec les moûts obtenus n'ont, au contraire, aucun goût de euit, mais possèdent une âpreté et une astringence assez marquées. Certains moûts chauffés restent indéli- niment troubles, et les cidres qu'ils donnent sont très difficiles à clarifier; les matières pectiques el albuminoïdes qu'ils renferment sont à un état physique tel qu'elles ne se coagulent plus pendant la fermentation et passent même à travers les fil- tres à pâte de cellulose sans perdre leur état col- loïdal primitif. Nous nous proposons de reprendre les expé- riences de stérilisation prochainement avec un appareil plus parfait. Nous voudrions voir s'il ne serait pas possible d'obtenir d'une facon régulière des moûts limpides et sans goût de cuit, permettant de fabriquer les eidres sans alcool qui nous sont demandés par les ligues antialcooliques, les sociétés et les restaurants de tempérance des Pays scandi- navyes. M. Perrier! a préconisé l'emploi du formol pour stériliser les moûts; il conseille de laver les fruits avec une solution de formol à 8 °/,, pendant dix minutes, de les broyer et presser ensuite avec des appareils lavés eux-mêmes à l'eau formolée à 4 JE Les moûts seraient pratiquementstériles; les cidres obtenus moüts, ensemencés des levures sélectionnées, ne renfermeraient que des traces de formol. Le procédé serait des plus écono- avec ces avec miques; il est donc à souhaiter que des essais répétés dans les cidreries viennent en établir défi- nitivement la valeur et le faire adopter. On à tenté aussi l'emploi de l'acide sulfureux pour stériliser les moûts de pommes. M. Alliot* conseille la dose de 20 grammes de métabisulfite de potasse par hectolitre, soit 410 grammes d'acide sulfureux. Des essais répétés, dont les résultats n'ont pas encore été publiés, nous ont montré que cette dose est tout à fait insuffisante; nous avons dû ajouter 1 Perrier : Bulletin de l'Association française pomolo- gique, 1903, 1904, 1905, 1906. ? Azcior et Jacqueun : La Cidrerie moderne. jusqu'à 100 grammes de métabisulfite, soit 50 gr. d'acide sulfureux, pour obtenir la stérilisation. À cette dose, nous avons alors reconnu qu'il était ensuite difficile de faire disparaitre l'acide sulfureux dans les cidres. Un barbotage d'air pen- dant quinze heures n'a produit aucun résultat, l'acide sulfureux étant resté à un état combiné très stable, Une addition d'eau oxygénée à fait baisser sensiblement le taux d'acide sulfureux; mais son emploi est tout à fait limité, car les tan- nins du cidre sont oxydés en même temps que l'acide sulfureux, et l'on a rapidement la production de goûts d'amertume et de cuit qui dénaturent la boisson. $ 3. — Conservation des cidres. Devant l'imperfection des moyens nous venons d'étudier, il nous reste à réaliser la conser- vation à longue durée du cidre lui-même. Bon nombre de praticiens et d'auteurs affirment que le jus de pommes doit fermenter rapidement pour donner un cidre de qualité, et, assimilant la fermentation du cidre à celle du vin, ils ont donné comme règles de fabrication, à quelques détails près, celles qui président en vinification. C'est ainsi qu'ils ont recommandé, dès la mise du jus de que pommes en fût, une fermentation rapide à 45°-20°, une aération des moûts, un premier soutirage lorsque l'effervescence se ralentit et que la densité est à peu près réduite de moitié. A notre avis, cette méthode ne donne, en général, que de mauvais résultats appliquée à la fermenta- tion des moûts faits avec nos pommes à cidre francaises; tout au plus peut-elle donner quelque satisfaction dans le travail des pommes aigres, que l'on ne rencontre plus qu’en très petites quantités dans nos vergers. De nombreux pour mettre en valeur ce procédé, qu'on à cherché essais ont été cependant faits ensuite à améliorer. On a lavé les pommes pour obtenir des moûts aussi peu contaminés que pos- sible, qu'on a ensemencés alors à l'aide de levures sélectionnées vigoureuses, puis on à conduit la fermentation vers 15°. Les résultats obtenus ont élé rarement satisfaisants et beaucoup de cidreries ont tout à fait abandonné cette technique. Le vice initial du procédé est d'opérer la fermen- tation du moût avant de permettre à celui-ci de se dépouiller d'une partie des matières pectiques qu'il renferme, et de subir en même lemps une véritable épuration microbienne; si bien que les cidres obtenus, fermentés trop vite, sont condamnés à rester presque toujours troubles et à n'avoir aucune durée de conservation. Ajoutons que ces cidres sont le plus souvent sans fruité, car celui-ci a disparu en fin de fermentation ; qu'ils sont ples, 182 décolorés, les tannins oxydés solubles qui donnent la couleur aux cidres normaux ayant été précipités et insolubilisés ou bien décolorés. Il était donc certain que les levures sélectionnées, employées dans de telles conditions, ne pouvaient pas améliorer sensiblement la valeur des cidres fabriqués. Pour pouvoir agir d’une manière efficace, les levures ne doivent être apportées dans le moût que lorsque celui-ci a subi le phénomène que nous appelons défécation et sur lequel nous reviendrons plus loin. Or, à notre connaissance, aucune expé- rience en grand d'emploi des levures pures n'a été faite dans ces conditions. Nous ne savons done pas aujourd'hui ce que les levures sélectionnées pourront donner en cidrerie, puisque tous les essais industriels sont à reprendre. D'ailleurs, il y a encore d’autres raisons pour réserver notre opinion. C'est que les levures pures ne peuvent donner des cidres identiques tous les ans que si on les ensemence dans des moûts de composition identique et si on les place dans des conditions de travail toujours les mêmes. Or, com- ment songer à obtenir des mouts de pommes identiques tous les ans, quand nous ne disposons ni des mêmes fruits ni des mêmes mélanges et que les conditions de maturité sont si variables chaque année? En admettant que arrivions à préparer des moûts de même acidité, de mème richesse saccharine, nous ne pouvons songer à leur donner la même richesse en tannin, matières azotées, etc., substances qui toutes ont une influence sur le développement de la levure, . méme nous sur ses sécrétions, ses diastases. Nous ne sommes pas mieux outillés pour placer la levure dans des conditions de température cons- tante pendant tout le temps de son travail. Des lors, pourquoi attendre des résultats constants des levures pures? Si nous chauffons nos moûts pour nous mettre à l'abri des ferments naturels qu'ils contiennent, nous apportons alors de plus grandes complications dans le problème, et nous ne savons en définitive, si les améliorations ou les défectuosités des cidres obtenus plus, sont dues à la levure pure employée, ou à l'action de la chaleur sur les moûts, ou à la résultante de ces deux actions. Les études des savants qui se sont occupés de l'emploi MM. Kayser, Martinand, Jacquemin, Dienert, mon- trent la voie à suivre pour des recherches nou- velles, mais sont loin d'avoir résolu le problème, des levures pures en cidrerie, comme Ajoutons enfin que les levures pures sélection- nées présentées aux fabricants de cidre sont des levures vigoureuses, terminant la fermentalion ra- pidement, et qui, par conséquent, vont à l'encontre du but à atteindre, celui de réaliser une fermenta- G. WARCOLLIER — LES MÉTHODES SCIENTIFIQUES DANS L'INDUSTRIE DU CIDRE tion très lente. Ces levures, ensemencées largement dans les mouts à l’aide de pieds de cuves, ne per- mettent même aucun soutirage convenable, et ne peuvent, par conséquent, conduire à l'obtention de cidres secs, limpides, de longue conservation. III. — Nos RECHERCHES. En observant les conditions naturelles dans les- quelles se fait le cidre chez le cultivateur, j'ai remarqué que la fabrication est d'autant mieux réussie, en général, qu'elle a lieu en hiver et qu'elle dure plus longtemps. Aussi, sans chercher à modifier totalement une pratique qui a pour elle la consécration du temps et qui a donné très sou- vent des cidres parfaits, j'ai essayé seulement de la rendre plus parfaite. C'est dans cet esprit que j'ai entrepris mes recherches, que j'ai été conduit à recommander de fermenter le cidre à la manière de la bière et non à celle du vin, et que je suis ainsi arrivé à réaliser la production d'un cidre doux de longue conservation, qui doit permettre à la cidre- rie de supporter les brusques variations de la pro- duction des fruits, et de fournir en même temps une boisson au goût du consommateur. Je vais exposer rapidement les points principaux de la fabrication du cidre qui ont retenu spéciale- ment mon attention. $ 1. — Récolte des pommes. En examinant de près les conditions dans les- quelles sont récoltées les pommes à cidre, j'ai re- connu qu'on est loin d'apporter à cette opération tous les soins désirables, et que la plupart des pommes, surtout celles à chair tendre, se trouvent meurtries. En dehors du très grave danger que présentent ces meurtrissures d’être des portes ouvertes aux champignons, causes de la pourriture des fruits, j'ai remarqué, chez les pommes blessées au moment de la récolte, que les parties meurtries constituent de véritables zones où l'amidon séjourne indéfini- ment, même quand les fruits deviennent mürs ou pourrissent. Mes observations ont été basées sur l'étude mi- croscopique de nombreuses variétés de pommes de première, deuxième et troisième saison. Il m'a paru intéressant de rechercher la cause de l'immobilisation de l'amidon dans les zones bles- sées. L'observation m'a montré, tout d'abord, que ces zones brunissent immédiatement au contact de l'air; nous savons que ce brunissement est dù à l'oxydation du tannin des cellules blessées de la pomme par une oxydase découverte et étudiée par M. Lindet. G. WARCOLLIER — LES MÉTHODES SCIENTIFIQUES DANS L'INDUSTRIE DU CIDRE 783 J'ai alors pensé que le tannin pourrait bien être la cause plus ou moins directe de la persistance de l'amidon dans les parties blessées. J'ai pu vérifier cette hypothèse‘ et montrer que le tannin, par son action sur l'amylase, empêche celte diastase de transformer l'amidon en sucres fermentescibles. En présence des quantités d’amidon perdues au mo- ment de la récolte, par la faute et la négligence des cultivateurs, on ne saurait trop leur recommander les plus grands soins dans la cueillette, le transport et la manutention des fruits de pressoir. $ 2. — Cuvage de la pulpe fraîche. On se demande depuis longtemps, en cidrerie, si l'on doit presser la pulpe de pommes immédiate- ment après son broyage, ou la laisser cuver au préalable pendant douze heures? Presque tous ceux qui ont étudié la question estiment que l'exposition de la pulpe à l'air, e'est- à-dire le cuvage avec pelletage, doit être rejetée; on observe, en effet, que, dans ces circonstances, le tannin du moût s'oxyde rapidement, se fixe en s'insolubilisant sur le mare, et se trouve perdu. Dans certains de mes essais, j'ai constaté la dispa- rition totale du tannin dans les moûts. J'ai observé, en outre, d’autres faits intéressants”*. De la pulpe de pommes, broyée et laissée quelque temps à l'air, par conséquent colorée, est capable, lorsqu'on la met ensuite à l'abri de l'air, de se dé- colorer, de devenir tout à fait incolore. Il y a là un phénomène de réduction, une action diastasique très nette, agissant sur le tannin oxydé coloré pour le transformer en tannin incolore. De sorte que, si l'on fait cuver de la pulpe à l'abri de l'air, on a Lous les avantages que le cuvage peut réaliser sans craindre la moindre perte en tannin, substance que les cidres ne renferment jamais trop pour bien se conserver. En ce qui concerne l'utilité du cuvage lui-même, il n’est pas permis d'être trop affirmatif; mais J'ai déterminé des cas de fabrication où le cuvage donne d'excellents résultats et est, par conséquent, à con- seiller; j'en dirai quelques mots en parlant de la défécation des moûts. $ 3. — Défécation des moûts de pommes. Examinons du jus de pommes placé à sa sortie du pressoir dans un tonneau et abandonné dans une cave depuis plusieurs jours. Nous verrons, si les circonstances sont favorables, se former à la surface du liquide une écume brune, un chapeau couleur de pain d'épice ; en méme temps, nous constaterons qu'il s'est produit dans toute la 1 WaARCOLLIER : Comptes rendus, 21 août 1905. 2 G. WanrcCoLLiER : Congrès pomologique, Vitré, 1904, masse du liquide un commencement de fermenta- tion; que des bulles d'acide carbonique viennent crever dans le chapeau en produisant un petit sif- flement caractéristique, et enfin, point extrème- ment important, que le liquide tout entier est devenu limpide. Il y à eu défécation du moût. Une partie de la pectine qu'il renfermait s'est coagulée sous l’action de la pectase contenue aussi dans le moût et est venue former le chapeau, en produisant en même temps un collage du liquide. Nous saisissons immédiatement l'importance de l'épuration physico-chimique du moût produite par les phénomènes dont nous venons de parler. En effet, cette épuration en amène une autre, une épu- ration microbienne, qui laisse le jus non seulement limpide, de belle couleur, mais qui le prive de la presque totalité des germes étrangers et ferments de maladies. J'ai fait une étude’ assez complète de tous ces phénomènes et cherché à préciser les conditions nécessaires à leur réalisation. Pour obtenir l'épuration physico-chimique du moût, il faut : 1° provoquer une défécation du moût sortant du pressoir en coagulant une partie des matières pectiques qu'il renferme; 2° produire la rétraction du coagulum ; 3° déterminer, par un commencement de fermentation lente, la formation d'un chapeau brun et d'un dépôt de lies. On obtient ainsi un liquide déféqué, elair, dé- barrassé de la presque totalité des impuretés, fer- ments de maladies et substances étrangères appor- tées par les fruits, prêt à fermenter dans d’excel- lentes conditions. Avant d'aller plus loin, il est nécessaire de pré- ciser la théorie, cependant encore un peu indécise, de la défécation spontanée ou provoquée des mouts. La fermentation pectique se produit par l’action de la pectase sur la pectine du moût (Frémy). Le composé insoluble qui se forme est un pectate de chaux; l’action dépend des proportions relatives de pectase, de sels de chaux et d'acides libres en pré- sence, les acides étant des paralysants (Bertrand et Mallèvre)*. L'addition de phosphate bicalcique au moût de pommes favorise la coagulation des ma- tières pectiques (Louïse) *. J'ai observé, de mon côté, que : 1°les tannins du moût de pommes sont des paralysants de la coagu- lation ; 2 les sels d'alumine à certaines doses ont une action favorisante égale à celle des sels de 1 WarcozLier : Congrès de Pomologie, Laval, 1906. > Fréuy : Anp. de Phys. et Chimie, 3° série, t. XXIV, 1548, LE 1. y * er 8 Beurranp et MaLLÈvRE : Comptes rendus, {. CXIX et CXX, et Bull. Socicté chimique, 1894. 4 Louise : Société nationale u'Agriculture, moi 1901. 184 chaux; 3° dans les composés pectiques insolubles coagulés, la proportion de chaux qui s'y trouve n'est jamais constante; par conséquent, on ne peut pas considérer ce phénomène comme une réaction définie, aboutissant à la formation d'un pectate de chaux ; 4° en dehors des sels de chaux étudiés par les auteurs précédents, d'autres composés calciques provoquent la coagulation des matières pectiques dans des conditions parfaites, le sucrate ou saccha- rate de chaux en particulier; 5° il est dangereux d'employer pour la coagulation des matières pec- liques des doses trop fortes de défécants, ceux-ci pouvant alors dénaturer le cidre, y provoquer même l'apparition de gouts amers, terreux, ou de goûts dits « framboisés », dus à des fermentations parti- culières que nous étudions en ce moment ; 6° en pratique, on ne peut pas laisser, après traitement, dans les moûts déféqués, plus de 300 à 400 milli- grammes de chaux ou d’alumine en solution, sans s exposer aux accidents que je viens de signaler. J'ai reconnu, en outre, que : 1° pour chaque variété de fruits, il existe un degré de maturité où la coagulation des matières pectiques s'effectue d'une façon plus rapide et plus parfaite; 2 ce degré de maturité varie chaque année suivant les conditions climatériques, l'exposition, la végétation de l'arbre, la nature du ol, etc., en un mot, suivant les propriétés physiologiques et la composition chi- mique du moût; 3° il est toujours plus facile, en général, d'obtenir la coagulation des matières pec- tiques des moûts préparés en travaillant un mé- lange de diverses variétés que celle des moûts pro- venant d'une variété unique; 4° dans une exploita- Uon agricole donnée, on peut arriver par tâtonne- ments à composer des mélanges de variétés venues dans des conditions connues d'exposition, de sol, brassées à époque convenable, où la coagulation des matières pectiques s'effectue facilement sans addition de sels défécants (chaux, alumine); 5° la cidrerie industrielle qui travaille des fruits « tout venant » de diverses provenances et maturités ne peut guère obtenir la défécation des moüts sans l'emploi de défécants à doses convenables. En ce qui concerne l'influence du cuvage sur la défécation, j'ai reconnu que le cuvage permet de laisser en contact le jus avec le marc qui est très riche en pectase. En même temps qu'il se produit une dissolution des matières pectiques dans le jus, il y a enrichissement de ce jus en pectase et meil- leures conditions de coagulation. Le cuvage conviendra aux variétés acides, où la coagulation est difficile à réaliser; par contre, il sera à rejeter pour les variétés très riches en tan- nin, substance empêchant la coagulation. Le cuvage ne conviendra pas non plus aux fruits où les matières pectiques sont voisines de l'état de G. WARCOLLIER — LES MÉTHODES SCIENTIFIQUES DANS L'INDUSTRIE DU CIDRE coagulation, pour les moüts visqueux, gras, en un mot pour les variétés de troisième saison conser- vées au grenier pendant de longs mois. Ceci dit, voici la méthode de défécation indus- trielle que je préconise : Les pommes à cidre, achetées dans les diverses régions de production, seront conservées saines, puis mélangées, lavées et brassées au moment où elles auront acquis leur plus grande richesse en sucre et où leur parfum sera le plus déve- loppé. Le moût sortant du pressoir sera additionné de 1 à 3 grammes d'acide sulfureux par hectolitre pour empêcher l'oxydation trop rapide des tannins à l'air, pour conserver ultérieurement au moût sa couleur normale et prévenir le noircissement. On provoquera alors la coagulation d’une partie des matières pectiques du moût, en ayant soin d'empêcher pendant ce travail tout mouvement vio- lent du liquide et toute fermentation rapide déga- geant de nombreuses bulles d'acide carbonique. Pour cela, le moût sera amené à une température suffisamment basse, voisine de 4° à 6°, obtenue naturellement ou artificiellement ; ou bien, si ceci est impossible à réaliser, sera additionné de doses d'acide sulfureux permettant d'obtenir un retard sensible de la fermentation. L'acide sulfureux sera introduit de préférence à l'état gazeux, ou bien alors sous forme de métabi- sulfite de potasse. Son action n'est pas aussi sûre, aussi régulière que celle des basses températures et peut dénaturer momentanément la couleur, le goût et les qualités hygiéniques des boissons ob- tenues. Si la défécation du mout ne s'opère pas alors normalement, on ajoutera une substance défécante. Nous donnons la préférence au sucrate de chaux, en veillant à ce que la dose totale dans le moût ne dépasse pas 300 à 400 milligrammes par litre. L'emploi du phosphate bicalcique n’est pas à con- seiller ici, où tous nos efforts concourent à appau- vrir le moûten acide phosphorique et azote. La coagulation des matières pectiques, leur ré- traction, la formation d'un chapeau brun due à la fermentation commencante qui suit, sont des phé- nomènes ne devant pas demander plus de huit à dix jours pour se produire. Le moût limpide obtenu est alors soutiré « entre deux lies »; si, à ce moment, son acidité est inférieure à 4 gr. à (exprimée en acide sulfuri- que), on s'en rapprochera par addition d'acide tartrique. A ce moment, le moût est prèt à fermenter; nous le placerons alors dans des conditions telles que la fermentation ne soit pas poussée jusqu'au bout, afin que Je cidre reste doux. $ 4. — Production d'un cidre doux. Plusieurs moyens ontété préconisés pour arriver à ce résultat. Celui qui vient immédiatement à l'esprit, c'est de fermenter avec des levures incapables de détruire tout le sucre du milieu. M. Kayser a isolé des levures à cidre sans sucrase, qui ne peuvent, par conséquent, agir sur le saccharose contenu norma- lement dans les moûts. Un moût ensemencé uni- quement avec ces races de levures donnerait un cidre d'autant plus doux qu'il contiendrait à l'ori- gine plus de saccharose. Pour résoudre le problème, il faudrait d'abord priver les moûts des levures à sucrase et, pour cela, les stériliser, ce qui n'a pu être réalisé indus- tiellement, comme nous l'avons dit ; il faudrait faire aussi une étude complète des levures sans sucrase, parmi lesquelles il faudrait, probablement, éliminer les levures apiculées, qui ont un trop faible pouvoir fermentatif et qui produisent sou- vent des bouquets peu agréables. En admettant mème que l’on parvienne à stérili- ser le moût sans le dénaturer et qu'on ait une bonne levure sans sucrase, on ne serait pas encore sûr d'avoir résolu le problème; car il semble dé- montré qu'en faisant varier la nourriture d'une levure ne renfermant pas de sucrase, on puisse, au bout d’un certain temps, arriver à provoquer chez cette levure l’apparition de cette diastase et lui faire fermenter le saccharose, M. levures de cidre, que certaines levures, seules ou en mélange, laissent du sucre non fermenté dans les cidres obtenus, et il a conclu qu'il y avait des Kayser a montré, dans son étude sur les « levures à cidre doux ». M. Alliot a préconisé aussi l'emploi d'une levure isolée de mélasse de canne, levure à faible atlénuation. L'industrie n’a rien pu lirer jusqu'à présent de ces données. Il y a bien de petites différences dans les atténualions, suivant que l'on emploie telle ou telle levure; mais ces différences sont insignifiantes et jamais constantes. On peut dire qu'en pra- tique l’atténuation est réglée simplement par la composition chimique du moût, et varie par consé- quent avec la provenance des pommes, la nature du jus, sa richesse en azote, en acide phosphori- que, etc. J'ai isolé de cidres naturellement restés sucrés des levures que l’on pouvait appeler « levures à cidre doux »; placées dans certains moûts, ces levures ont donné des cidres restant sucrés ; mais, toutes les fois que je les ai mises dans un milieu qui leur convenait, elles ont toujours poussé la fer- mentation jusqu'au boutet détruit tout le sucre. On pourrait obtenir un cidre se conservant doux en le pasteurisant. Lorsque le cidre aurait une densité convenable, 1.025, 1.020, 1.010, c'est-à- dire renfermerait sensiblement 50, 40, 20 grammes de sucre par litre, on le fixerait, en quelque sorte, à cet état. Malheureusement, la pasteurisation du cidre n'est pas plus résolue que celle des moûts, et nous sommes toujours à la recherche d'un procédé res- pectant la composition chimique du cidre, sa teneur en acide carbonique dissous, son goût, son fruité, sa couleur, sa limpidité, et ne faisant appa- raitre aucun goût de cuit. J'ai cherché à résoudre la question d'une autre facon”. J'ai reconnu qu'on pouvait arrêter à un: moment donné la fermentation d'un cidre en affa- mant la levure, en la privant de nourriture, en supprimant, par exemple, les matières azolées assi- milables du milieu. Pour cela, j'ai opéré les premiers temps de la fermentation au contact de l'air, en aérant le moût, et en favorisant ainsi le développement de la levure, qui, dans ces conditions, au lieu de donner de l'alcool, bourgeonne, se multiplie activement et augmente de poids dans de grandes proportions. Si tout l'azote du moût est transformé en glo- bules de levure, on n’a plus qu'à soutirer avec pré- caution, à enlever le dépôt de levures, pour priver d'un seul coup le milieu d'azote et le rendre non fermentescible. Le moût de pommes est naturellement pauvre en azole ; il n'en renferme, en moyenne, que 400 milli- erammes par litre. Or, la levure sèche contient de 9 à 10°/, d'azote; pour épuiser d'azote un moûl qui en renferme 100 milligrammes par litre, il suf- fira d'y produire un gramme de levure, ee qui est réalisable en pratique. Nos essais de laboratoire nous ont permis, en soutirant et filtrant les moûts ainsi traités, d'obte- nir des cidres restant doux. En opérant en grand, le procédé présente quel- ques difficultés; on risque, en aérant insuffisam- ment, d'obtenir une fermentation alcoolique trop rapide, et, comme le sont généralement ceux de Normandie, il avec des moûts peu riches en acidité arrive que les tannins s'oxydent trop rapidement à l'air sous l'action de l’oxydase et que l’on obtient parfois des cidres ayant une tendance à se plom- ber et à noircir. Le nouveau procédé de fabrication que je préco- nise aujourd'hui est basé aussi sur la facon dont la levure se comporte selon qu'elle est placée à l'air 1 G. WarcoLLier : Bulletin. Association française pomo- logique, 11° fascicule, 1904. 786 G. WARCOLLIER — LES MÉTHODES SCIENTIFIQUES DANS L'INDUSTRIE DU CIDRE ou à l'abri de l'air. L'expérience de Denys Cochin nous à appris que la levure ne peut vivre indéfini- ment sans air, et que, si l'on fait une suite de cul- tures de levure à l'abri de l'air, au bout de quatre cultures, cinq au maximum, la levure est incapable de faire fermenter le milieu. Pasteur, dans des expériences restées classiques, nous à montré qu'en faisant fermenter un Jiquide complètement à l'abri de l'air et avec des traces de levure, on peut rendre la fermentation intermina- ble, c'est-à-dire avoir, après fermentation, un milieu encore sucré. Plus récemment, M. Mazé a montré, en précisant davantage, que la vie de la levure à l'abri de l'air est limilée parce que la zymase, diastase qui dédouble le sucre en alcool et acide carbonique, disparait peu à peu pendant la vie à l'abri de l'air de la levure. Lazymase, disparaissant, laisse intacte une quan- té plus ou moins grande de sucre non transformé et permet d'obtenir, par conséquent, un liquide encore sucré; si bien qu'on peut avoir à volonté un moût plus ou moins fermenté, suivant qu'on règle la quantité de levure initiale et la multiplication de celle-ci par l'accès plus ou moins ménagé de l'air. Partant de ces données, j'ai pensé que le meilleur moyen d'obtenir un cidre doux était de préparer un moût de pommes stérile, bien déféqué, de l'ense- mencer avec une quantité limitée de levure et de le placer à l'abri de l'air pendant toute la durée de la fermentation. Dans ces conditions, la fermentation devait s'ar- rèter d'elle-même avant la disparition complète du sucre. En soutirant ensuite le cidre à l'abri de l'air, il semblait possible, a priori, d'obtenir un cidre doux qui garderait indéfiniment les caractères et les qualités organolepliques que la fermentation lui aurait donnés. Mes essais vérifièrent complètement mes déduc- tions. En partant de moûts bien déféqués obtenus par les procédés habituels de fabrication, j'ai réussi à préparer des cidres se conservant doux en faisant des soutirages successifs à l'abri de l'air, de facon à opérer la fermentation avec des traces de levure et en vie anaérobie. Les mêmes moûts, fermentés par les procédés ordinaires, ont donné des cidres qui sont devenus secs au bout de trois mois. Comme conclusion, voici la méthode que je con- seille de suivre en industrie, pour arriver aux mêmes résultats : Après la défécation du moût obtenue comme je l'ai indiqué plus haut, soutirer le liquide limpide à l'abri de l'air et l'introduire dans une cuve à fer- mentation de forme particulière (fig. 4). Le récipient cylindrique est terminé à la partie inférieure en forme conique portant une ouverture. munie d'un robinet R. Il est fermé entièrement à la partie supérieure, mais communique ävec l'exté-= rieur par trois ou quatre ouvertures ; l'une, portant un tube à robinet a, peut être mise en communica-, tion avec un appareil à acide carbonique; une autre est fermée par un barboteur à eau 2 portant un robinet ç; la troisième porte un tube avec rebi- net d. Enfin, l'appareil peut être muni d'un indica- teur de pression /, si on le construit pour pou- voir supporter une pression déterminée d'acide carbo- nique. La partie cylindrique de la cuve peut être munie de glaces ou de regards g per- mettant de juger de l'état de limpidité du liquide et d'un fourreau à thermo- mètre { pour prendre la température. L'appareil sera construit soit en ciment revêtu de verre, soit en bois recou- vert de vernis ou en métal émaillé; les parties métal- liques seront étamées à l'étain fin ; il sera soutenu par une charpente spéciale permettant de faire les sou- tirages avec facilité. Afin que la fermentation soit très lente, le moût se- ra, avant son entrée dans la cuve conique, refroidi à 2° ou 3°, et la cuve elle- même sera maintenue dans une cave froide à 4° ou 5°. Le moût introduit dans la cuve est peu riche en levure, car la plus grande partie est restée englobée dans le chapeau et les lies ; la fermentation va done s'opérer lentement, grâce à la température basse de la cave. On voit se produire bientôt dans la masse des précipitations de matières minérales, pectiques, tanniques, albuminoïdes; il se forme ainsi des dépôts qui emportent avec eux une partie des levures du milieu et qui viennent tomber dans la partie conique inférieure du vase. On ouvre alors le robinet R ; on évacue à la fois les matières précipitées et les levures, en ayant Fig. 1.— Cuve à fermen- M tation pour le cidre. — a, tubulure et robinet pour entrée de l'acide carbonique pendant le soutirage: b,bondehy- draulique ; e, robinet de | la bonde; d, tube avec robinet; f, indicateur de pression; g, glaces; th, fourreau à thermo- mètre ; R,robinet d'éva- cuation des lies et de la levure; T, robinet de « lirage du cidre limpide. G. WARCOLLIER — LES MÉTHODES SCIENTIFIQUES DANS L'INDUSTRIE DU CIDRE 787 soin, pendant ce soutirage, d'empêcher toute rentrée d'air par le barboteur à eau h, et cela en faisant passer un courant d'acide carbonique dans l'appareil à l’aide de la tubulure supérieure à, l'excès de gaz dégagé sortant par le barboteur D. Les mêmes phénomènes de collage et de pré- cipitation se reproduisant au bout d'un temps plus ou moins long, on recommencera les mêmes opé- rations de soutirage; si bien qu'à la fin on sera parvenu à enlever presque toute la levure du milieu et que celle qu'on y laissera, ayant pris naissance et ayant vécu constamment à l'abri de l'air, ne renfermera plus de zymase, sera incapable de transformer le sucre en alcool et acide carbo- nique et laissera le cidre doux, résultat auquel nous voulions arriver. En terminant, je me permets de faire remarquer qu'avec le dispositif indiqué on obtient un cidre limpide, doux, très parfumé, ayant gardé tout son bouquet de fruit, saturé de gaz carbonique, qui peut être livré en fûts ou mis immédiatement en bouteilles, ou que l’on peut conserver en cave aussi longtemps qu'on le désire. Le cidre n'a pas de goût de lie, pas de goûts amers apportés parfois par les levures en fin de fermentation, lorsque les globules s'autophagient ; il ne noircit pas, puisqu'il n'y à pas eu contact du moût avec l'air, que les soutirages ont été faits à l'abri de l'air et que le liquide est toujours resté dans l'atmosphère réductrice de la fermentation. Pour mettre en valeur la méthode que je pré- conise et pour en lirer tout ce qu'elle peut donner, il faudrait que des expériences fussent faites en grand, et je n'ai malheureusement pas les moyens de les entreprendre. Mais j'ose espérer que ces études retiendront l'attention des industriels et que certains d'entre eux n'hésiteront pas à se lancer dans la voie qui leur est ouverte. Il est à souhaiter que la cidrerie ait bientôt sa cave de fermentation basse comme la brasserie, et qu'elle puisse diriger à volonté sa fabrication. La méthode dont nous parlons permet aussi de produire des cidres en bouteilles. En opérant la mise en bouteilles à l'abri de lair d'un cidre de densité 1.025 et très limpide, c'est-à- dire ne renfermant que des traces de levure, et en emplissant complètement les bouteilles, sans laisser de chambre à air, Je suis parvenu à obtenir un cidre parfait, très mousseux. Toutes les bouteilles, couchées dès leur remplis- sage, ont sensiblement la même pression d'acide carbonique, peuvent être ouvertes sans danger de projection du liquide et ne présentent entre elles aucune différence à la dégustation, ce qui n'arrive pas quand la mise en bouteilles est faite d'après les procédés habituels, c'est-à-dire en présence de l'air, avec beaucoup de levure, et en laissant chambre à air entre le liquide et le bouchon. Dans le cas où l’on voudrait mettre en bouteilles des cidres presque secs, j'ai reconnu ! que, lors du sucrage de ces cidres pour les amener à renfermer la dose de sucre nécessaire à la mousse et à l'obten- tion du goût sucré, il était tout à fait inutile d'in- vertir le saccharose employé en le chauffant à 100° en présence de 10 °/, d'acide tartrique. La sucrase apportée par la levure est largement suffisante une pour produire l'inversion. IV. — CoNCLUSIONS. Ce qui se dégage de l'étude générale que nous venons de faire, c'est la nécessilé pour la cidrerie d'adapter ses méthodes de fabrication aux cidres à produire et de ne plus se contenter des procédés empiriques et rouliniers avec lesquels elle à vécu jusqu'ici. S'il est difficile de lui demander de modifier radi- calement son outillage, ce qui immobiliserait des capitaux considérables, il est permis d'espérer que les nouvelles usines qui se créeront n'hési- teront pas à s'installer convenablement; nous sommes persuadé qu'elles pourront alors arriver à une régularité de fabrication et à une constance de qualité, qui n'ont jamais été obtenues jusqu à ce jour. Ceci nous amène enfin à dire que la fabrication du cidre à la ferme disparaîtra dans un avenir plus ou moins prochain et qu'elle sera remplacée, soit par la cidrerie industrielle, soit par les cidreries coopératives de producteurs. Au prix de tous ces efforts et de ces transforma- tions, nous arriverons à produire enfin le cidre de longue conservation qui pourra lutter avantageuse- ment en France le vin et la bière et être exporté au loin avec profit. avec G. Warcollier, Ingénieur agronome, Directeur de la Station pomologique de Caen. 1 WARCOLLIER : Comples rendus, 6 mai 1907. 788 G. DE LAMARCODIE — ADDUCTION A PARIS DES FORCES MOTRICES DU RHONE LE PROJET D'ADDUCTION A PARIS DES FORCES MOTRICES DU RHONE Nous avons vu, dans un article précédent”, com- bien l'utilisation des forces hydrauliques avait fait de progrès en France pendant ces dernières années. Paris est jusqu'ici resté en arrière de ce mouve- ment et emprunte encore à la vapeur seule la puissance nécessaire à la production de l'énergie électrique dont il a besoin ; mais cet état d'infério- rité semble devoir bientôt prendre fin, et la ques- ion d'un transport de force hydraulique jusqu'à la capitale entre maintenant dans la voie d'une réali- sation, sinon immédiate, du moins certaine pour un avenir plus ou moins proche. I C'est le 3 novembre 1902 que trois ingénieurs bien connus, MM. Blondel, Harlé et Mähl, deman- dèrent à M. le Ministre des Travaux publics deux concessions : la concession d'une force motrice hydraulique à créer sur le Rhône par lutilisation presque totale de la pente disponible entre la fron- | tière suisse et Seyssel, et, d'autre part, la conces- sion d'une canalisation électrique pour le transport de l'énergie hydraulique depuis la chute jusqu’à Paris. Le dossier complet de l'avant-projet était remis au Ministère le 26 avril suivant. Au mois de mars 1905, et, une seconde fois, le 97 mars 1906, les auteurs du projet remirent à M. le Préfet de la Seine un Mémoire présenté par M. Harlé et exposant leur mode d'utilisation de l'énergie du Rhône pour la distribution de force et de lumière dans la Ville de Paris. A la suite de modifications au projet primitif, ayant fait l'objet d'une nouvelle demande de concession de chute d'eau en date du 41 juillet 1906, ils adressèrent, le 30 janvier 1907, un Mémoire complémentaire. La première question qui se posait en face d'un projet aussi vaste était la suivante : était-il pos- sible de faire pratiquement un transport de force à une aussi grande distance, atteignant 450 kilo- mètres environ ? Ce qui, il y a quelques années encore, eût paru une utopie, doit être classé maintenant dans la catégorie des faits possibles. En 1891, des essais de transmission à grande distance furent exécutés sur un parcours de 175 kilomètres entre Lauffer et Francfort au moyen de courants triphasés sous la tension de 30.000 volts. Ces expériences se fai- saient à une époque où l'on n'avait encore étudié { G. pe LamarcontE : Les usines hydro-éléctriques en France. Zev. gén. des Sciences du 30 août 1907. que de facon très imparfaite les modes de construc- tion de lignes et les appareils utilisables sous ces hautes tensions; de plus, la puissance transportée" était insuffisante pour justifier les dépenses d'une pareille entreprise. Malgré ces défectuosités, qui ne pouvaient que conduire à des résultats peu en- courageants au point de vue du rendement écono- mique, on put dès lors se rendre compte que le problème de la transmission à longue distance de l'électricité à haute tension aurait sa solution pra- tique, dès qu'on. se trouverait en présence d'une puissance suffisante pour motiver un tel transport de force et d'un matériel suffisamment perfectionné pour obtenir un rendement satisfaisant. Les essais et les recherches continuèrent : l'esprit d'initiative alla de l'avant, et, .dès 4897, nous voyons, aux Etats-Unis, se réaliser des transports à des distances de 100 à 150 kilomètres en cou- rants triphasés sous des tensions de 20.000 à 30.000 volts. Bientôt des ingénieurs audacieux, tels que Stanley et Perrine, s'enhardirent à em- ployer des tensions allant jusqu'à 60.000 volts et au delà, et ce fut bientôt l’origine de transports de force à des distances dépassant beaucoup celles réalisées jusqu'alors. À Guanajuato, nous voyons effectuer un transport de 6.000 chevaux à 150 ki- lomètres sous la tension de 60.000 volts, et, à Spokano, l'énergie est transportée sous la même tension dans un rayon de 180 kilomètres. Enfin, la Compagnie Stanley construit, pour le compte de la Société Bay-Counties, une ligne d’une longueur de 160 milles, de Colgate à Oakland, construite en double sur son parcours pour alimenter indépen- damment Oakland et San Francisco, de sorte que, la distance entre ces deux villes étant de 70 milles environ, on arrive entre ces deux points extrèmes, à une longueur de 222 milles ou 358 kilomètres : la tension, qui, au début, était de 40.000 volts, a été portée à 60.000 volts, et, malgré la hardiesse de construction de la ligne, qui, notamment à Car- quinez, traverse en une seule portée un détroit de 1.400 mètres de largeur, le transport d'énergie s'effectue avec une régularité parfaite. En France même, ne voyons-nous pas se réaliser, entre autres transports de force, celui de la Pom- blière à Lyon, permettant à 6.300 chevaux de force de parcourir 180 kilomètres sous une tension de 57.000 volts, et celui de la Brillanne à Marseille, distribuant 46.000 chevaux à 30.000 volts sur un réseau d'une longueur de 150 kilomètres? D'autres projets vont bientôt être réalisés qui dépassent encore la hardiesse de ceux exécutés jus- G. DE LAMARCODIE — ADDUCTION À PARIS DES FORCES MOTRICES DU RHONE 189 qu'à ce jour. C'est ainsi que la ville de Stockholm va eftectuer un transport de 60.000 chevaux à 600 kilo- mètres et qu'un syndicat minier de Johannesburg vient d'élaborer un projet ayant pour but d'amener du Zambèze au Transvaal l'énergie de Victoria- Falls, ce qui représente un parcours de 1.200 kilo- mètres. De même, ainsi que nous l'avons dit anté- rieurement, une société francaise, la Société des forces motrices d'Orlu, à projeté un transport el une distribution d'énergie dans tout le sud-ouest dejla France, sur un parcours de 400 kilomètres environ, pour une puissance totale atteignant pour la traction; 3° les tramways, omnibus, liacres et automobiles électriques; 4° les lignes de péné- tration des grands réseaux de chenrins de fer. Examinons successivement, avec les auteurs du projet, quelle serait la consommation d'énergie consommée par ces différents services. 1° Le Métropolitain, une fois son réseau com- plété, devrait, d'après un (ravail trs documenté de M. Saint-Martin sur « les futures usines centrales consommation totale 100.000.000 k. w. h. 2° Quant à l'éclairage et à la force motrice, si électriques », avoir une (CE PNEU Fig. 24.000 chevaux. On voit donc, comme l’a fort bien dit M. Harlé, « qu'il ne parait plus utopique, à l'heure actuelle, de chercher une mine de houille blanche dans un rayon de 500 kilomètres de Paris, pour amener l'énergie jusqu à la capitale ». Il Ce premier principe posé, il fallait se rendre compte si l'importance de la puissance à utiliser était en rapport avec celle des travaux à exécuter pour produire, transporter el distribuer cette puis- sance. Or, les services susceptibles d'employer l'énergieélectrique à Paris et de se développer par le fait même de l'abaissement du prix de cette énergie comprennent : 1° le Métropolitain; 2 l'éclairage et la force motrice, non compris la force utilisée REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. 1. — Usine de Colgate, fournissant l'énergie électrique à San Francisco. l’on considère tout d'abord l'énergie distribuée dans ce but par les secteurs électriques, on constate que la vente s'élève actuellement à 30.000.000 ,de ki- lowatts-heure, ce qui nécessite, à la sortie des usines primaires, un débit de 45.000.000 de kilowatts- heure. D'après M. Lauriol, ingénieur en chef des Services généraux d'éclairage de la Ville de Paris, il faut compter qu'après l'organisation du nouveau régime la réduction du prix de l'énergie et les nouveaux travaux de canalisation imposés par le cahier des charges feront doubler cette vente et que la production s'élèvera à environ 60.000.000 k.w. h. D'autre part, il résulte d'une statistique officielle du Ministère du Commerce, datant de 1899, qu à cette époque la force des machines à vapeur dans Paris était de 80.366 chevaux, non compris les stations centrales d'électricité et de traction. Une 192 790 autre statistique, établie par l/ndustrie minérale pour l’année 1902, indique, pour le département de la Seine, une puissance de près de 196.000 che- vaux, non compris les chemins de fer et tramways, les automobiles et les bateaux. D'après cette même revue, la consommation totale de combustibles minéraux dans le département de la Seine aurait été de 4.228.000 tonnes en 1902 : la consommation des usines à gaz étant de 4.200.000 tonnes, il reste plus de 3.000.000 de tonnes pour les besoins do- mestiques et les usines de force motrice. Il est à remarquer que la force des moteurs à gaz el à pétrole n'entre pas en jeu dans ces statistiques, et qu'avec les progrès de l'industrie le nombre de chevaux utilisés suit assurément, depuis 1902, une’ marche croissante. En se basant sur ces différents éléments d'appréciation, en supposant pour les moteurs à vapeur une durée moyenne de fonction- nement de dix heures par jour, en défalquant les Jours de chômage et en ne comptant que sur une charge moyenne des deux tiers dela puissance totale, MM. Blondel, Harlé et Mähl ont fait des calculs qu'on ne peut taxer d'exagération et qui évaluent la force motrice correspondante à. . . 300.000.000 k. w. h. 3° Tramways, omnibus et voitures électriques. On estime, avec M. Saint-Martin, que la consom- mation d'énergie électrique par les tramways pari- siens ne saurait être inférieure à 50.000.000 de kilowatts-heure. D'autre part, en supposant seule- ment 7.500 voitures électriques, publiques ou pri- vées, faisant en moyenne dix courses de 4 kilo- mètres par jour, et dépensant chacune un demi- kilowatt-heure par kilomètre, on arrive, pour la dépense annuelle, au même chiffre de 50.000.000 de kilowatts-heure. On en déduit, pour l'ensemble des tramways, omnibus et voitures électriques, une dépense totale de RC 100 000000 4 Les auteurs du projet envisagent ensuite l'uti- lisation de l'énergie électrique sur les voies de pénétration des Compagnies de chemins de fer dans un rayon de 50 kilomètres aux abords de Paris, zone où la circulation est très intense. Se ba- sant sur une circulation quotidienne de 2.400 trains de voyageurs d'un parcoursmoyen de %5 kilomètres, et sur un transport de 10 millions de tonnes de marchandises en petite vitesse comportant un poids mort de 458 °/,, ainsi qu'il résulte des statistiques du Ministère des Travaux publics, MM. Blondel, Harlé et Mähl ont pu établir par divers caleuls que la consommalion d'énergie électrique nécessitée par ce trafic serait de. . . . . 425.000.000 k. w. h. D'où une consommation générale de 685.000.000 de kilowatlts-heure, soit, en chiffres ronds, 700 mil- lions de kilowatts-heure. Évidemment, cette utilisation d'énergie étendue G. DE LAMARCODIE — ADDUCTION A PARIS DES FORCES MOTRICES DU RHONE | à la banlieue n'acquerra pas, dès le début, son entier développement; mais, même en ne complant tout d'abord que sur une puissance utilisée de 70.000 ki= lowatts et sur une fourniture minima de 200 mil= lions de kilowatts-heure s'accroissant progressi= vement d'année en année, l'entreprise correspondl à des besoins assez vastes pour tenter des esprits à la fois éclairés et audacieux. III Dans les Mémoires présentés à M. le Préfet de læ Seine, M. Harlé expose en premier lieu les motifs qui ont fait choisir le cours du Haut-Rhône comme la source d'énergie la plus rationnelle pour un transport à Paris. Dans un rayon de 500 kilomètres autour de Læ capitale, on ne rencontre comme pays à neiges éternelles que les Alpes de la Savoie et de la Haute- Savoie et le massif du Grésivaudan ; mais plusieurs raisons doivent empêcher d'emprunter l'énergie aux cours d'eau venant de ces montagnes. Tout d’abord, le régime de ces cours d'eau est trop tor- rentiel pour être favorable à l'établissement de grandes usines. D'autre part, aucun groupe de chutes n'ayant une puissance suffisante pour ali- menter à lui seul une distribution aussi impor-s tante, il faudrait réunir en série sur la ligne de transport un grand nombre d'usines, ce qui serait d'une exécution à la fois compliquée et onéreuse. D'ailleurs, une grande partie de ces chutes est uti- lisée par les industries locales, et il semble ra- tionnel de les réserver à l'alimentation en énergie des régions industrielles environnantes, telles que les départements du Rhône, de la Loire et de la Haute-Loire, qui ne disposent guère que de chutes d'eau intermittentes, non entretenues par des neiges éternelles. Si, au contraire, on envisage le cours même du Rhône à son entrée sur le territoire francais, on voit qu'il constitue une source puissante d'énergie qui se recommande par deux conditions absolument exceptionnelles : 4° l'importance du débit, qui, à l'étiage, ne descend guère au-dessous de 130 mètres cubes à la seconde; 2° la rapidité de la pente, qui. sur une longueur de 22 kilom. 1/2, comprise entre la frontière suisse et la passerelle de Génissiat, en aval de Bellegarde, dépasse 65 mètres. On peut M recueillir ainsi, sur ce même parcours, UNE puIs=M sance brute d'au moins 80.000 chevaux à l'étiage, qui est environ le double pendant 300 jours de l'année et est presque décuplée pendant les grandes, crues, qui portent le débit jusqu'à 1.250 mètres cubes à la seconde. l D'autre part, les utilisations locales font défaut, la région lyonnaise étant suffisamment pourvue LE dti G. DE LAMARCODIE — ADDUCTION A PARIS DES FORCES MOTRICES DU RHONE 791 par les chutes d'eau des Alpes déjà aménagées. La rivière l'Ain et les autres chutes de la même région, après avoir satisfait aux exigences des industries environnantes, présentent encore un fort excédent de forces disponibles. C'est ainsi qu'après trente ans d'existence la Société de Bellegarde, Utulaire d'une concession de 10.000 chevaux de puissance, » pa pu en utiliser sur place qu'une partie. Le transport à Paris de l'énergie du Haut - Rhône pourra done servir les intérêts de la Capitale et de Sa banlieue sans nuire aux intérêts locaux. M. Harlé a exposé en détail, dans ses Mémoires, les travaux que comporterait l'exécution du projet. La solution la plus récente à pour point de départ l'installation d'un barrage de grande hauteur à la sortie de la partie la plus étroite des gorges du Rhône. Les points qui ont paru les plus pro- pices pour l'édification de ce grand barrage se trouvent au voisinage de la station de Génis- siat(Ain), soiten amont du village dit de la Dent, soit en amont du village de Monthoux, commune de Saint-Ger- main-sur-Rhône (Hau- te-Savoie). La cote d'eau qu'il est permis la fron- tière suisse est d'envi- | 33922 50) elle est = Fig. 2. — Le Rhône, d'atteindre à ron voisine de 262%,50 dans la gorge de Génis- siat : d’où une différence de niveau de 70 mètres. L'utilisation du lac du Bourget comme réservoir compensaleur permettrait de rendre insensibles les variations du régime du Rhône provoquées par les variations diurnes du fonctionnement de l'usine. Les auteurs du projet avaient tout d'abord prévu l'emploi, pour le transport à Paris, de courant continu série, système Thury à 120.000 volts, tension susceptible d'être dépassée et portée à 150.000 ou 160.000 volts. Mais la loi du 45 juin 1906 sur la distribution d'énergie électrique, ayant rendu possible la pose sur les propriétés privées des supports plus encombrants nécessités par les courants alternatifs, à fait disparaître en partie le motif principal qui avait obligé à employer le courant continu, seul compatible avec une occu- pation des voies publiques par des canalisations à très haute tension. Les demandeurs en conces- sion se réservent donc, dans leur dernier Mémoire, l'emploi éventuel de courants alternatifs tripha- sés : ils ont pu établir qu'avec une tension de 120,000 volts il sera possible, avec deux lignes vu du ravin de la Dent. de parcours légèrement différents, de transporter à Paris les 70.000 kilowatts prévus pour lPutili- sation dans la Capitale. On pourrait n'avoir à l'usine qu'une tension de 10 à 20.000 volts, qui serait portée à 420.000 volts par des transformateurs élévateurs, el supprimer à Paris toute usine et réception à machines tour- nantes : un simple poste de transformateurs abais- seurs réduirait la tension à 40.000 ou 15.000 volts pour la canalisation primaire dans Paris. La loi du 17 juin 4906 permettrait de réduire ce parcours à 400 kilomètres environ. Des pylones à grandes mailles et en fers profilés, espacés de 100 mètres, supporteraient les cäbles. Ces pylones, dans le cas de transmission par courants alter- natifs, seraient installés en tLolalité sur les pro- priétés privées : dans le cas de courants continus, ils seraient moins en- combrants et pour- raient emprunter en partie les voies publi- ques. La perte en ligne ne dépasserail pas 19 1/2°0/,, et l'on a pu établir par des calculs très larges, et en n'at- tribuant aux turbines qu'un rendement très bas de 75°/,, que l'éner- gie disponible à Paris de 70.000 kilo- watts pendant la pé- serait riode des basses eaux, qui ne dure pas plus de deux mois par an. La transmission permettrait d'assurer une consom- malion régulière annuelle d'au moins 500 mil- lions de kilowatts-heure pendant les dix mois d'eaux moyennes, sans compter la production des deux mois d'étiage et l'excédent très important qu'on peut obtenir pendant dix mois de l'année, en faisant travailler des machines en surcharge ou en installant de nouvelles unités. Une partie de l'énergie pourrait être distribuée en cours de route aux régions traversées. Ces dis- tributions seraient faites pour parer aux insufli- sances des chutes d'eau dans les pays de plaines pendant leur étiage qui a lieu en été : or, cette sai- son correspondant aux excédents du Rhône, dont l'étiage a lieu au contraire en hiver, ces fournitures faites pendant le parcours n'auraient pas pour effet de troubler le régime de distribution à Paris : « Nous pourrions même, dit M. Harlé dans un de ses rapports, envisager comme une solution ration- nelle cette combinaison de notre énergie avec celle d'autres chutes d'eau des régions voisines ». 702 17. IV Les deux lignes, qui amèneraient le courant à Paris, aboutiraient à une usine réceptrice, située le long des berges de la Seine, par exemple à Ivry et à Charenton. Les sous-stations de transformation serviraient à abaisser la tension du courant. Le grand intérêt du projet, ainsi que l'exposent les auteurs, réside dans la possibilité d'alimenter, à très bas prix, toutes les grandes entreprises de dis- G. DE LAMARCODIE — ADDUCTION À PARIS DES FORCES MOTRICES DU RHONE lieu d'envisager, en présence de cette faculté nou- velle, non seulement le cas d'une fourniture en bloc, mais aussi l'hypothèse d'une distribution à haute tension à tous les abonnés consommant une force motrice de 25 chevaux et au delà, au moyen d'un réseau spécial avec tension primaire à 12.000 volts, par exemple, pour les grosses usines, et secondaire à 2.000 volts pour les plus petits consommateurs, distribution à établir dans tous les quartiers où se (el x} L \ ü SE SF % nr £ rl \ MARNE ! le : présentent des groupes de consommateurs de ce Jovi Prienne ( Zort d NPA PELLE RES BESANCON \ | Pocrbor-Larez) \A ° Fig. tribution d'énergie, de construction mécanique, de transporten commun et tous les ateliers importants. Il ne s'agit pas pour eux de concurrencer les conces- sionnaires d'éclairage et de force motrice, succes- seurs des secteurs actuels, dans la distribution du courant à basse tension, mais de fournir de l’éner- gie le plus directement possible aux gros consom- mateurs par l'intermédiaire d'une canalisation appartenant à la Ville de Paris ou à ses concession- naires, ou d'une canalisation spéciale, puisque la loi du 17 juin 1906 permet de rendre toute entreprise de distribution d'énergie indépendante de la con- cession de l'éclairage électrique à Paris. Il y à donc Ynerd, 3. — Itinéraire des lignes AS 24 DOUBS , | “Salérs SANNECY SN l'Zerres électriques de Monthoux à Paris. genre. Le même réseau fournirait l'énergie aux stations transformatrices ou principales de toutes les entreprises qui en feraient la demande. | Dans quelques quartiers spéciaux, faubourg Saint-Antoine, faubourg Saint-Martin, ete., les petits ateliers familiaux sont nombreux. Favoriser et développer ces ateliers à une portée sociale qui n'a pas échappé aux auteurs du projet : « Dans ces quartiers, dit M. Harlé, nous installerons un réseau secondaire spécial pour la distribution de la petite force motrice à la tension de 500 volts : le réseau sera bien moins onéreux qu'un réseau de 110 volts et les frais d'amortissement et d'entretien qu'il G. DE LAMARCODIE — ADDUCTION À PARIS DES FORCES MOTRICES DU RHONE 1 [de] 3 entraînera ne se traduiront pour les consommateurs que par une faible augmentation du prix de vente de l'énergie, bien inférieur à ceux qu'on pratique actuellement. » Le moteur à gaz, trop cher et trop encombrant, ne résout pas, en effet,comme le moteur électrique, la solution de la puissance motrice à domicile. L'introduction du petit moteur électrique de 1/8 de cheval à 1 cheval a, depuis quelques années, transformé complètement les ateliers des canuts à Lyon et ceux des rubaniers de Saint- Etienne et de la région. Ce qui a été fait dans la région lyonnaise pourrait être fait à Paris, si le prix de revient de l'énergie électrique était suffisam- ment abaissé. v Dans l'exposé financier qui termine le Mémoire du 30 janvier dernier, le prix de revient du kilo- watt-heure est établi pour diverses durées de fonc- tionnement annuel et en répartissant les frais sur un minimum de 200 millions de kilowatts-heure, d'une part, dans le cas d'une production hydro- électrique, et, d'autre part, dans le cas d'une pro- duction aussi économique que possible par la vapeur. M. Harlé arrive ainsi aux chiffres suivants : PRIX DE REVIENT hydro-électrique PRIX DE REVIENT par la vapeur DURÉE DE FONCTIONNEMENT de chaque kilowatt installé centimes centimes 1.000 heures. 10,8 6,9 = 9,8 6.0 A Ci co 8,7 4,5 — METRE 7,6 3,7 5 — 7,0 3,1 2.800 — 6,1 2,8 3.000 — : 6,6 2,6 6.000 — chien Er) 1.6 On voit que, quelle que soit la durée du fonction- nement du kilowalt, l'économie serait d'environ 4 centimes par kilowatt-heure. Il a été calculé, de plus, qu'à la fin de la période d'amortissement le prix de revient du kilowatt- heure pourrait varier entre { centime et 0 cent. 5. En admettant des canalisations spéciales pour la distribution directe de la force motrice et en se basant toujours sur un minimum de 200 millions de kilowatts-heure vendus aux abonnés, M. Harlé évalue le prix du cheval-heure à 0,048 environ pour un abonné consommant 3.000 kilowatts-heure par an et à O fr. 03 pour un abonné en consommant 6.000. VI Le projet d'adduction à Paris des forces hydrau- liques du Rhône à subi le sort de toutes les idées nouvelles et hardies; il a eu ses détracteurs et ses sceptiques, et à soulevé des objections. On a objecté, notamment, l'insécurité qui résul- terait d'accidents survenant aux lignes aériennes. Les auteurs du projet font d'abord remarquer que, aussi bien dans le cas du courant continu que dans celui du courant alternatif, ils emploieraient non pas une ligne unique, mais deux lignes, chacune de ces lignes suffisant à assurer le trans- port de l'énergie presque complète en portant de 12 1/2 °/, à 25 °f, la perte en ligne. Resterait le cas où les deux lignes à la fois serai nt interrom- pues par des accidents; mais, outre que celle pro- babilité est très faible, il est à remarquer que MM. Blondel, Harlé et Mähl, pour parer à loutes les éventualités, prévoient la création d'une ou plusieurs usines auxiliaires à vapeur, pouvant à l'occasion remédier aux interruptions et aux insuf- fisances de l'énergie hydro-électrique. Quant à la durée des travaux, qu'on s'est plu à exagérer, il semble bien établi que cette durée ne doit pas dépasser trois ans. Sans nier les difficultés d'exécution d'un aussi vaste projet, des exemples antérieurs montrent qu'il est réalisable; et alors doit-on hésiter à pour- suivre cette réalisation en présence des avantages inappréciables qui en résulteraient pour la popu- lation parisienne? L'abaissement du prix de l'énergie par la pro- duetion hydro-électrique permettrait à tous les ser- vices publics de la capitale, chemins de fer, métro- politain, tramways, éclairage, de réduire les tarifs imposés au public; l'industrie nationale y gagne- rait et se trouverait dans de meilleures conditions pour lutter contre la concurrence étrangère. Dans les industries utilisant le travail à domicile, l'emploi du petit moteur électrique permettrait non seulement d'abaisser le prix de revient, mais encore d'employer les femmes, les vieillards et les enfants à de qui, seraient au-dessus de leurs forces. Le développe- ment de l'atelier familial, en augmentant le bien- menus {travaux sans cela, être de l’ouvrier et en l'attachant à son foyer, aurait une haute portée morale. L'ouvrier parisien bénéficiant des avantages qu'a retirés le canut lyonnais de la réduction du prix de l'énergie élec- trique, ce serait une réforme ayant les plus heu- reuses conséquences dans l'ordre économique et social. La substitution de l'éclairage électrique à léclai- rage au gaz ou au pétrole serait du plus grand intérêt au point de vue de l'hygiène et de la pro- preté. À ce double point de vue, que de précieux avantages ne trouverait-on pas à la diminution du nombre des usines à vapeur dans la capitale! Comme le fait remarquer à juste titre M. Harlé, la présence de plus en plus abondante des fumées produites par ces usines a modifié d'une facon très 1 [Je] td D' HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE fâcheuse le climat de Paris, devenu de plus en plus brumeux. L'action bactéricide du soleil est, par ce fait, considérablement atténuée. En même temps, la pureté de l'atmosphère est viciée dans des pro- portions dont on ne se fait pas, en général, une idée assez précise. Pour se rendre compte des impuretés que déversent journellement les cheminées d'usines de Paris de sa banlieue, il suffit de faire remarquer que ces usines, y compris les usines à gaz, consomment par an 1 million 1/2 de tonnes de charbon, dont la combustion exige 22 milliards de mètres cubes d'air respirable, soit plus de 60 millions de mètres cubes d'air par jour : une production de plus de 15 millions de kilogs d'anhydride carbonique, tandis que la respiration des habitants n’en produit que 3 millions environ, soit le 1/5. Ces considérations, développées par M. Harlé dans son Rapport, ne sont pas des moins importantes, et l'on conçoit combien l'hygiène publique gagnerait à cette disparition, sinon com- plète, du moins partielle, des fumées d'usines, qui contaminent journellement l'atmosphère pari- sienne. el d'où VII En résumé, on voit que le projet d'adduction à Paris des forces du Rhône est loin d'être une utopie, mais que sa réalisation s'impose. Paris y gagnera au point de vue économique, au point de vue du bien-être et au point de vue social. La capitale ne doit pas rester en arrière du mouvement qui a pris naissance sur le versant des Alpes, et qui entraîne peu à peu tout le pays vers le progrès par l'utilisa- tion des forces hydrauliques. Non seulement en France, mais aussi à l'étranger, de nombreux projets sont à l'étude pour l'alimenta- tion en énergie électrique des centres importants de consommation à des distances qui n'ont pas encore été abordées jusqu'à ce jour. Il importe que le transport à Paris des forces du Rhône soit mis bientôt à exécution; car, ainsi que conclut M. Harlé dans son Rapport du 2 avril 4906 : « Il serait dommage qu'un tel projet, concu en France quelques années avant qu'on erût à la possibilité de pareilles entreprises, fût négligé ou retardé davantage et qu'on laissät à d'autres, à l'étranger, le mérite de nous montrer la voie de la réalisation. » G. de Lamarcodie, Ancien élève de l'Ecole Polytechnique, Professeur à l'Ecole d'Electricité et de Mécanique industrielles. REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE I. — ANESTHÉSIE. La question des anesthésiques, que nous avons abordée dans notre dernière revue, est toujours à l'étude. La stovaiïne continue à être préconisée comme anesthésique local par un certain nombre de chi- rurgiens, en particulier par Reclus, qui affirme qu'on peut hardiment atteindre les doses énormes de 20 à 30 centigrammes d'analgésique, ce qui, en solution à 1/2 °/,, donne 40 à 60 c. c. de liquide, sans s'exposer au moindre inconvénient. La scopolamine-morphine a toujours ses par- üsans; il ne semble pas cependant que leur nombre ait augmenté; quelques-uns même de ceux qui l'employaient au début, Pierre Delbet entre autres, déclarent aujourd'hui ne plus vouloir y recourir, à cause des accidents qu'ils croient devoir lui attribuer. La valeur de cet anesthésique n'est donc pas encore établie d'une manière définitive. $ 1. — Accidents tardifs de la chloroformisation. Si les accidents immédiats de l'anesthésie sont aujourd'hui bien connus, il n'en est pas de même des accidents tardifs. Ceux-ci viennent de faire l'objet d'un travail de Tuffier, Mauté et Auburtin, qui ont réuni une cinquantaine de cas de morts tardives attribuées à l'intoxication chloroformique. L'anesthésie, même normale, entraine à sa suite une série de modifications dans l'organisme. La présence dans l'urine de l'albumine, de l'urobiline, la diminution du taux de l’urée, l'augmentation de l'acide urique, la disparition des sulfoconjugués font penser immédiatement à des modifications du métabolisme, en particulier à des troubles dans le fonctionnement des reins et du foie. Ces modifications temporaires ne semblent pas avoir une bien grande importance et passent ina- percues si on ne les recherche pas. Il n’en est pas de même de ce que l’on a décrit récemment sous le nom d'intoxication chloroformique. Dans celle-ci, les accidents débutent dix à vingt- quatre heures après la narcose. Le plus souvent, le réveil est normal, la nuit a été bonne, quand brus- quement, le lendemain, apparaissent les accidents. Au premier plan sont les phénomènes nerveux : délire calme, subcontinu, entrecoupé de périodes de conscience, ou plus souvent excitation, cris, Con- PE D' HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE vulsions. Le pouls est fréquent : 120 à 160; la res- piration, irrégulière, rapide, haletante, présente le plus souvent, au moins pendant les dernières vingt-quatre heures, le rythme de Cheyne-Stokes. Les vomissements, d'abord bilieux, deviennent mare de café; l'ictère apparaît dans la moitié des cas; les urines, peu abondantes, sont pauvres en urée; elles contiennent de l'albumine, des cylindres, des pigments biliaires, de l'urobiline, de l'acétone et des matières extractives. Le plus souvent, les symptômes aboutissent au coma, et la mort survient en un temps variable de trois à cinq Jours. La pathogénie de ces accidents est encore mal établie: les lésions constatées à l'autopsie et les symptômes observés pendant la vie tendent à faire croire qu'une hépaltite suraiguë, due à l'action du chloroforme, est la cause principale des accidents. L'ictère grave peut, du reste, être la conséquence de l'ingestion directe de chloroforme, comme le prouve une observation d'empoisonnement publiée par Marfan. Il serait done important d'empêcher un contact trop prolongé du chloroforme avec les éléments des tissus. Dans ce but, Schleich a conseillé un mélange anesthésique composé de deux parties de chlorure d'éthyle, quatre parties de chloroforme el douze parties d'éther sulfurique. Ce mélange présente ceci de particulier qu'il bout à 38°, ce qui fait que la tension de ses vapeurs est la même que celle de l'air intra-pulmonaire; que, par conséquent, il ne gène pas l'hématose et qu'il peut s'éliminer facile- ment par la surface pulmonaire. $ 2, — Le sommeil électrique. Sous le nom de sommeil électrique, S. Leduc (de Nantes) a décrit un état analogue au sommeil chlo- roformique, élat dans lequel le sujet reste couché, sans aucun mouvement volontaire, sans aucune réaction de défense, même aux excilations les plus douloureuses; seuls persistent quelques mouve- ments réflexes et les mouvements du cœur et de la respiration; cet état, produit par l'action sur le cerveau d'un certain courant électrique, peut être maintenu pendant des heures consécutives et cesse instantanément avec la cessation du courant. Le courant employé est un courant intermittent, de basse tension et de direction constante, c'est-à- dire un courant qui passe pendant un certain temps, cesse, puis recommence à passer de nouveau, et ainsi de suite à des intervalles parfaitement réguliers. M. Leduc a adopté le chiffre de 100 interruptions par seconde, chaque passage de courant ne durant qu'un millième de seconde. L'électrode en rapport avec le pôle négatif est appliquée sur la région frontale, l'électrode positive sur la partie posté- rieure du dos. L'appareil disposé, on élève graduel- lement le potentiel et l'intensité. Après une courte période d’agitation survient l'inhibition, le sommeil. Il suffit, pour inhiber la respiration, de dépasser notablement le voltage avec lequel on obtient le sommeil électrique. Jusqu'ici le sommeil électrique à été surtout étudié sur l'animal. M. Ledue s'y est toutefois soumis lui-mème à deux reprises, mais l'expérience n'a pas été complète, linhibition n'ayant pas été absolue. Y a-t-il là une voie ouverte pour l'anes- thésie? Nous n'osons actuellement répondre à la question, la complexité des appareils nécessaires devant, même si le procédé est bon, en empêcher la vulgarisation. Il y à là toutefois des données in- téressantes, sur lesquelles nous avons pensé qu'il était bon d'attirer l'attention. II. — RaApioGRAPHIE. RADIOSCOPIE. RADIOTHÉRAPIE. L'emploi des rayons X est devenu de plus en plus fréquent. Ce n'est plus seulement à la détermi- nation des fractures et à la recherche de quelques corps étrangers qu'on les utilise. On n'en est plus, comme autrefois, à faire simplement des radio- graphies; on recourt de plus en plus souvent à l'examen direct avec l'écran, à la radioscopie; enfin, on utilise les rayons X comme moyen théra- peutique, cherchant à agir non seulement sur les surfaces, mais à exercer des actions cellulaires dans la profondeur même des tissus. Il ne s'agit plus simplement de faire quelques clichés photogra- phiques; il s’agit de toute une méthode d’investi- gation et de toute une méthode thérapeutique. Aussi comprend-on que, simultanément, en France, à l'Académie de Médecine, à la suite d'un Rapport de Chauffard, en Allemagne, à la suite d'un Rapport de Bade au Il° Congrès allemand de Radiologie, on ait émis le vœu que l'application des rayons X soit réservée aux seuls médecins pourvus d'un diplôme leur donnant le droit de pratique. Actuellement, l'emploi des rayons X constitue une industrie libre: des intérêts divers se trouvent en jeu, entraînant à leur suite des polémiques, dans lesquelles nous n’avons pas à entrer ici. Ce qui est certain, c'est que, contrairement à ce que l'on pensait au début, l'emploi des rayons de Rôntgen ne constitue pas une Manœuvre simple, sans dangers, comparable à celle de la prise d'une photographie ordinaire. Les radio-dermites con- sécutives à leur application sont aujourd'hui bien décrites; on parle moins des brûlures graves; nous en avons cependant vu plusieurs exemples et nous avons malheureusement pu constater combien elles sont rebelles aux traitements habituels et 196 D' HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE combien longues elles étaient à se modifier. Riehl (de Vienne) à, de plus, attiré l'attention sur le déve- loppement d'épithéliomas et de sarcomes au niveau de lupus cicatrisés par l'application de rayons X. Cette apparilion de néoplasmes secondaires s'expli- querait d'autant plus facilement, fait observer Nobl, qu'on assiste souvent, à la suite de séances même très courtes de rüntgénisation, à l'apparition d'un complexus symplomatique qui reproduit très exac- tement les caractères du xeroderma pigmentosum (hyperpigmentation, atrophie dermique, formations angiomateuses, etc.). Or, on sait que cette affection cutanée constitue un terrain favorable au dévelop- pement du cancer. Il n'est pas jusqu'à l'action fâcheuse des rayons X sur les yeux, sur les glandes génitales qui ne soit établie aujourd'hui. Aussi les médecins qui S'adonnent spécialement à la pratique des rayons X ont-ils soin actuellement de se protéger avec des lunettes spéciales, de petits tabliers de plomb, des poudres imperméables, etc. S |. — Radiographie. Nous n'avons que peu de choses à ajouter à ce que nous avons dit de la radiographie dans nos précédentes revues. Pour rendre les épreuves photographiques d’ar- ticulations plus nettes, on à conseillé d'injecter avant radiographie de l'oxygène dans l'articulation ; malheureusement, Jacobsohn, Holzknecht ont vu la mort subite survenir quelques secondes après l'in- Jection, par suite peut-être d'embolies gazeuses. La méthode ne devrait cependant pas être rejetée, au dire d'Hoffa, qui recommande seulement de ne pas employer pour l'injection une pression excédant une demi-atmosphère. L'injection de collargol dans la vessie, l’uretère et le bassinet à permis à plusieurs chirurgiens d’avoir la photographie exacte de ces cavités. Nous- même avons utilisé les mélanges à base de bismuth pour étudier certaines lésions sténosantes ou fistu- leuses du gros intestin, et avons été très satisfait de ce mode d'exploration. ÿ 2. — Radioscopie. La radioscopie, qui permet de voir sur un écran au platino-cyanure de baryum la silhouette des par- lies interposées entre l'écran et l'ampoule suivant Jeur plus ou moins grand degré de transparence aux rayons, rend des services incomparables. Nous ne parlerons pas ici du diagnostic des affections pulmonaires, qui intéresse surtout le médecin. Au point de vue chirurgical, la radioscopie permet l'examen des membres dans une série de positions différentes, la détermination d'épanchements intra- thoraciques, etc. Elle met à même de faire des constatations impos- sibles avec la radiographie. Avec elle, on peut suivre la migration d'une capsule de bismuth qu'on fait avaler, voir comment elle chemine et constater ainsi l'existence d'un rétrécissement æsophagien. Seule, elle met le chirurgien à même de distinguer un bissac stomacal causé par une cicatrice de celui de cause purement musculaire, ce dernier dispa- raissant immédiatement dès qu'on comprime la partie inférieure de l'estomac, de manière à faire remonter son contenu; le rétrécissement purement fonctionnel se laisse ainsi élargir par l’arrivée du liquide, alors que le fibreux inextensible ne subit aucune modification. $ 3. — Radiothérapie. à Lorsque l'on commença à utiliser les rayons X dans un but d'exploration, on ne se doutait pas qu'ils modifiaient les tissus vivants. Peu de temps après, on constata des signes de réaction cutanée, depuis la chute des poils jusqu’à la mortification en masse de la peau et des tissus sous-cutanés, ce qui conduisit Schiff et Freund à utiliser, dans un but thérapeutique, l'action dépilante de ces rayons. Des expériences, faites sur les animaux par Sträter en Allemagne, par Kienbück en Autriche. par Oudin en France, montrèrent que les rayons X sont partiellement absorbés par les tissus vivants et qu'ils agissent, comme sur la plaque photogra- phique, là où ils sont absorbés et dans la mesure de leur absorption. Scholtz établit que leur action est élective et qu'ils amènent beaucoup plusrapidement la destruction de certaines cellules que celle d'autres cellules. Les recherches expérimentales d'Albert Schonberg, d'Halbestaedter, de Hei- neke, etc., conduisent à cette conclusion que, dans les cellules les plus sensibles, il faut ranger les cellules des glandes génitales, testicules et ovaires, et les cellules blanches des organes héma- topoiétiques; les rayons X peuvent les détruire après avoir traversé les téguments sans les léser. On pouvait, dès lors, conclure qu'on était en possession d'un agent thérapeutique énergique. Médicalement, l'emploi de ces rayons restait cepen- dant difficile, parce qu'on ne savait pasexactement la quantité de rayons absorbés par la peau. Holzknecht, en montrant que les sels colorables par les rayons cathodiques le sont également par les rayons de Rüntgen, partit de là pour construire un instrument de mesure, formé d'une série de godets colorables destinés à être placés sur les régions lraitées et d'une échelle graduée de colora- ration, qui sert d'étalon pour évaluer, d'après la teinte acquise par le réactif, la quantité de rayons absorbés par la peau. A partir de ce moment, on possédait, avec l'agent, D: HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE 197 le moyen de le mesurer; la radiothérapie entra fran- chement dans le domaine médical. Sabouraud luti- lisa dans le traitement de la teigne tondante, puis les dermatologistes dans tousles cas où l'indication est de décaper le tégument (acnés rebelles, eczémas chroniques, psoriasis, prurits localisés, etc.). Bientôt l'efficacité de la radiothérapie dans le trai- tement de la tuberculose verruqueuse de la peau, son action sur certaines adénopathies tuberculeuses, sur les épithéliomas de la peau, étaient établies. Comme le fait très justement observer Béclère, qui, en France, est certainement le médecin ayant le mieux étudié ces questions, les éléments cellu- laires épithéliomateux sont tués à des doses qui laissent intacts les éléments cellulaires de lépiderme sain du voisinage. Aussi la radiothérapie guérit- elle les épithéliomas cutanés avec une perfection esthétique que n'’atteint aucune autre médication. Si l'on en croit Béclère, la radiothérapie est efficace contre les récidives cutanées de cancer du sein et contre les ulcérations, dont elle amène le plus souvent la cicatrisation. Dans les néoplasmes du sein inopérables, elle améliore l’état général et prolonge la vie en allégeant les souffrances. Excep- tionnellement, on a vu des sarcomes, mème pro- fonds, de l'abdomen ou du médiastin, disparaitre sous l’action des rayons X. Enfin, depuis les observations déjà anciennes de Senn (de Chicago), il est établi que la radiothérapie est le traitement de choix de la leucémie, qu'elle agit favorablement sur le sang, sur la rate, sur les adénopathies, sur les troubles fonctionnels et sur l'état général des malades. On voit, en particulier; des rates énormes de leucémiques fondre littérale- ment sous l’action des rayons de Rôntgen. Souvent, la qu'on a eu de véritables guérisons. maladie récidive : il n'en est pas moins vrai Ce que nous venons de dire montre quelle exten- sion à prise, dans ces dernières années, la radio- thérapie et quel champ se trouve encore ouvert à de nouveaux travaux. Il semble actuellement établi que les rayons de Rüntgen sont un agent de des- truction élective des divers éléments cellulaires sains et pathologiques, qu'au point de vue théra- peutique il faut compter, au nombre des cellules les plus sensibles à leur action, les cellules épider- miques, saines ou malades, les cellules blanches du sang et des organes hématopoiétiques, surtout à l'état tuberculeuses, enfin la plupart des cellules néopla- siques (Béclère). morbide, les cellules géantes des lésions III. — L'HYPERÉMIE EN CHIRURGIE. Les avantages de lhyperémie comme moyen thérapeutique sont connus depuis longtemps. Le cataplasme d'autrefois, les grands bains locaux, les applications de sable chaud, de compresses humides chaudes, l'emploi de douches chaudes. ete., sont autant de moyens qui empruntent la plus grande partie de leur action à l'hyperémie qu'ils déterminent. Un chirurgien allemand, Bier, s’est fait lapôtre du traitement par l'hyperémie dans une série d'affections. Ses communications, celles de ses élèves, Klapp et Schmieden, ont si bien vulgarisé ce mode de traitement quil est de méthode de nombreuses actuellement connu sous le nom Bier. Dans la méthode de Bier, l'Ayperémie est obtenue de trois manières : 4° Avec une bande de caoutchouc, mince, large de 6 centimètres environ, qu'on applique assez loin de la lésion et qui fait cinq à sept fois le tour membre. La striction doit être légère, amener gonflement avec teinte rosée, chaleur légère et peu d'œdème, mais pas de teinte violacée, du un un encore moins de teinte livide. L'application de la bande ne doit déterminer aucune douleur; bien plus, s'il d'une affection inflammatoire aiguë douloureuse, elle doit être rapidement suivie d’une sédation de la douleur causée par la maladie. La durée d'application de la bande est variable, mais ne doit jamais dépasser vingt à vingt-deux s'agit heures ; 20 Avec des appareils d'aspiration : ventouses de verre de diverses formes, pourvues de poires en caoutchouc ou de pompes aspiratrices. La ventouse doit produire une hyperémie sans douleur et d'une teinte rouge bleuté. Ces ventouses sont laissées en place cinq minutes, puis replacées après un repos de trois minutes. La durée du traitement Journa- lier est de trois quarts d'heure. Il doit y avoir impression de chaleur, 'mais sans douleur, ni engourdissement ; 3° Avec des boites à formes, pourvues d'une ouverture permettant la air chaud de diverses circulation de l'air. Le chauffage est assuré par une lampe facile à régler, la température ne doit pas dépasser 120°. La séance dure de trois quarts d'heure à une heure et n'a lieu qu'une fois par jour. La stase veineuse obtenue par l'application de la bande élastique à été appliquée par Bier au traitement des tuberculoses locales, en particulier des arthrites tuberculeuses, des affections inflamn- matoires sans pus collecté, de certaines névralgies. Lorsqu'il y a du pus collecté, dans les suppurations des gaines de la main, ete., au lieu de faire de grandes incisions combinées à un drainage large, Bier se contente de petites incisions, puis établit Pour les abcès du sein, les une stase faible. D' HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE furonceles, les anthrax, les panaris, on peut com- biner de petites incisions à l'application de ven- touses, qui, en même temps qu'elles déterminent une hyperémie passive, aspirent les liquides sep- tiques à l'extérieur. Les boites à air chaud con- viennent particulièrement aux arthrites rhumatis- males. On à cherché à expliquer l'action favorable de la stase sanguine dans les infections de différentes manières. Baumgarten et Heyde, qui ont fait une série d'expériences pour élucider cette question, admettent une action bactéricide du liquide trans- sudé, une dilution des toxines dans le liquide qui infiltre le membre hyperémié, une modification des tissus créant un milieu de culture moins favo- rable à la pullulation des microbes, ete. Tout cela est possible, mais ne nous semble pas démontré; actuellement encore, le mode d'action de l'hype- rémie veineuse reste obscur. IV.— CHIRURGIE DES VAISSEAUX SANGUINS. Deux discussions, l'une au Congrès international des Sciences médicales à Lisbonne, l'autre au Con- grès francais de Chirurgie, montrent les progrès accomplis dans cette partie de la chirurgie depuis cinquante On est loin aujourdhui des craintes que l'on avait à cette époque dès qu'il s'agissait de faire une opération intéressant des gros troncs vasculaires, en particulier des troncs veineux. ans. S 1. — Anastomoses vasculaires. La question des anastomoses vasculaires a été particulièrement étudiée en Amérique par Carrel et Guthrie(deChicago),en Allemagne parStich,Makkas, Dovman et Capelle à Breslau. Ces expérimentateurs ont pratiqué sur l'animal des anastomoses termino- terminales, termino-latérales, latéro-latérales, soit artério-artérielles, soitveino-veineuses, soit artério- veineuses. Ils ont transplanté des, segments de lissus veineux à la place de troncs artériels résé- qués, une veine jugulaire à la place de la caro- tide, etc. Toujours les vaisseaux et les anasto- moses sont restés perméables; mais, pour arriver à ces résultats, il faut une asepsie absolue et un rétablissement exact de la continuité de l'éndothé- lium. A la suite de ces expériences, Carrel et Guthrie émettent l'hypothèse qu'on pourra peut-être chez l'homme rétablir la cireulatiôn dans des cas d'écra- sement, de résection pour anévrisme, en interpo- sant aux deux bouts de l'artère réséquée un segment de tronc veineux. Aucun fait clinique n'est encore venu confirmer ces expériences, ce qui s'explique par ce fait qu'en dehors mème des difficultés de la technique, les conditions observées en clinique, dilacération des tissus, sclérose des veines, athérome artériel, ete, seront autant d'obstacles à ces interventions. $ 2. — Plaies des gros troncs veineux. D'une manière générale, la ligature brusque des gros troncs veineux, considérée comme fatalement mortelle autrefois, est sans inconvénients si l'on excepte le tronc de la veine porte et celui des veines mésaraïques. Pour la veine cave inférieure, la liga- ture, telle que nous l'avons faite avec succès, est sans inconvénients si elle porte au-dessous de la- bouchement des veines rénales, comme l'ont mon- tré les expériences de nos élèves Gosset et Lecène. On ne connait pas encore de cas de ligature de la veine cave supérieure; mais Goldmann, Heineke, Bardenheuer ont lié avec succès le tronc brachio- céphalique; quant aux ligatures des veines jugu- laires, sous-clavières et fémorales, leur nombre ne se compte plus. On comprend, dans ces conditions, que la liga- ture complète des veines, au-dessus et au dessous de la déchirure, constitue le traitement de choix. La ligature partielle convient aux toutes petites déchirures et aux arrachements d'une collatérale à son embouchure ; nous l'avons plusieurs fois prati- quée sur la veine porte et toujours avec succès. Pour les déchirures plus étendues, siégeant sur une veine dont l'oblitération brusque et complète est dangereuse, veine porte, veine cave au-dessus des veines rénales, il faut recourir à la suture laté- | { rale. Jacobsthal en a réuni un certain nombre: d'observations : 7 sur la sous-clavière, 6 sur l’axil- laire, 10 sur la jugulaire, 4 sur l'iliaque externe, 23 sur la fémorale, 2 sur la poplitée. Le sinus laté- ral a été de même refermé à l’aide d'une suture par Schwartz. Les résultats ont, en général, été excel- lents. La réunion circulaire des deux bouts veineux, exécutée avec succès sur la fémorale par Kümmel, Krause, Payr, ne semble point appelée à de grandes applications. Ces sutures veineuses, latérales ou circulaires, ont été généralement faites en surjet à points perfo- rants, rapprochés, chargeant les deux lèvres de la paroi veineuse à 2 millimètres environ de la plaie, serrés doucement, arrêtant le fil tous les deux ou trois points. Une aiguille ronde, petite, et de la soie fine constituent le matériel nécessaire. Après avoir exercé pendant quelques instants une compression modérée avee un gros tampon pour arrêter le sang qui sourd le long des fils, il est bon, dit Lejars, de réunir en un second plan les tissus fibro-conjonc- tifs périvasculaires, les débris de la gaine tangen- tielle, par-dessus la veine suturée. D' HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE 199 $3.— Traitement des thrombo-phlébites septiques. L'action chirurgicale dans les thrombo-phlébites septiques à pour but d'empêcher la migration de caillots emboliques, cause d'accidents brusques cardio-pulmonaires ou septiques, point de départ d’abcès métastatiques pyohémiques, et de traiter localement le foyer d'infection vasculaire initial. Les premières indications sont remplies par l'ap- plication de ligature entre le segment veineux en- flammé et le cerveau. Malheureusement, en prati- que, il est difficile de savoir exactement où s'arrête la thrombose et, comme le fait observer Lejars, des recherches un peu étendues ne vont pas sans pres- sions, sans brassements exercés sur le vaisseau malade et exposant à la fragmentation du caillot. Aussi ces ligatures, excellentes pour les veines de moyen calibre et superficielles, sont graves pour les grosses veines profondément situées. L'action directe sur le foyer veineux infecté à été particulièrement pratiquée dans les thromboses septiques du sinus latéral consécutives à une infec- tion d’origine otitique, où l'on à combiné à la liga- ture de la jugulaire interne l'ouverture et la désin- fection du sinus. Dans ces derniers temps, on à fait des tentatives analogues pour des phlébites du petit bassin d'origine puerpérale (Bumm). $S 4. — Traitement des varices. Les varices ont toujours constitué une affection rebelle à la thérapeutique et réellement pénible lorsqu'elle s'accompagne du développement d'ul- cères. De nombreuses tentatives opéraloires ont déjà été faites; nous mentionnerons en particulier celles de Trendelenburg, qui faisait des ligatures ou des résections partielles de la saphène. L'année qui vient de s'écouler à vu paraitre plusieurs Mémoires sur celte question. Terrier et Alglave conseillent, dans les cas de grosses varices de la saphène interne, de faire svs- tématiquement la résection totale, simple ou dou- ble, des troncs variqueux et de la plus grande partie à leurs branches originelles; on mettrait ainsi les malades à l'abri cère. des récidives de l'ul- Giordano et Monzardo conseillent, au contraire, de s'adresser aux troncs profonds et de commen- cer, à l'exemple de Parona, par la ligature de la veine poplitée. Lorsqu'il y à en même temps que des varices profondes des dilatations de la saphène, il faut combiner à cette ligature l'extirpation ou la ligature des saphènes variqueuses. Comme on le voit, si les tentatives opératoires se multiplient, les procédés employés diffèrent, et l’on reste encore dans le doute sur le meilleur trai- tement à conseiller. V. — TRAITEMENT DES ÉTATS HÉMORRAGIPARES. Depuis que les montré l’action des sels de chaux sur la coagulation, les médecins, à la suite de Wright, de Carnot, l'ont utilisée dans le traitement des états hémorragipares. Quelques chirurgiens en préconisent même l'em- ploi à titre préventif, avant certaines opérations, chez des malades prédisposés aux suintements sanguins. Cest ainsi que Mayo Robson conseille de faire prendre du chlorure de calcium aux malades ictériques qui doivent subir une opération, que Chaput, Monod, Quénu ont utilisé les injec- tions préventives de chlorure de calcium chez les hémophiles qui doivent subir une intervention chi- rurgicale. P. Emile-Weil, mettant à profit celte autre con- physiologistes ont statation physiologique que beaucoup de sangs incoagulables retrouvent in vitro leur coagulabilité par adjonction de sérum sanguin frais, vient d'ap- pliquer cette donnée au traitement de l'hémophilie. Un certain nombre d'observations, réunies par Auguste Broca, ont montré qu'une injection de 10 à 20 c.c. de sérum frais injecté dans les veines, de 20 à 30 c.c. injectés dans le tissu cellulaire sous- cutané, suffisent pour arrêter des hémorragies. Les sérums d'homme, de lapin, de cheval, de bœuf se sont montrés efficaces, à la condition qu'on les emploie frais. Le sérum bovin ne doit toutefois pas être employé, parce qu'il expose à des accidents, passagers il est vrai, mais bruyants (réaction ther- mique, frissons, cyanose, vomissements, céphalée, rachialgie). En pratique, si l'on n’a pas le temps d'attendre vingt-quatre heures et de pratiquer une saignée aseptique à la carotide d’un lapin, on peut recourir au sérum antidiphtéritique, dont l'Institut Pasteur met tous les mois des provisions fraiches dans le commerce; mais, le sérum simple contenant en lui-même tous les ferments coagulants nécessaires à l'hémostase, il est préférable de ne pas utiliser de sérums antitoxiques. VI. — TérTaANos. Il y à quelques années, nous avons déjà eu l'oc- casion, dans une de nos revues, de parler de là sérothérapie du tétanos. D'une longue discussion ayant eu lieu à la Société de Chirurgie cette année, il semble résulter que la sérothérapie curative du tétanos n'a aucune valeur. C'est du moins ce qu'ont affirmé la plupart des orateurs, en parti culier Rieffel, qui lui dénie toute action, même dans le tétanos à marche lente. Le meilleur traite- ment serait le vieux traitement par l'isolement et le chloral à hautes doses. 800 D' HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE Les injections de sérum antitétanique, faites p'éventivement à toute cette catégorie de blessés qu'on à dénommés blessés de rue, auraient, au contraire, une action réelle à la condition qu'elles fussent faites de bonne heure et renouvelées. Thiéry à bien affirmé que, d'après les statistiques de morbidité et de mortalité de la Ville de Paris, les cas de létanos ne sont pas moins fréquents depuis la découverte et l'emploi du sérum antité- tanique qu'ils ne l’étaient dans les années précé- dentes:; que, d'autre part, en ce qui le concerne personnellement, il n'a jamais vu de tétanos sur- venir dans les différents services qu'il à eus à diriger, bien qu'il n'ait jamais employé la sérothé- rapie antilélanique préventive. Mais ses assertions méritent peut-être d'être revisées; les résultats obtenus en médecine vétérinaire sont tellement nets, tellement évidents que, comme l'a noté Cham- pionnière, il est impossible de conserver le moindre doute sur l'efficacité des injections préventives. Les cas de tétanos relatés au cours de la discus- sion ont, du reste, été observés le plus souvent à l'occasion de petites plaies négligées : une simple piqüre d'aiguille au doigt (Routier), une écorchure insigniliante de la face (Dupraz), ete. C'est parce qu'il est impossible de s'astreindre à faire une injection de sérum antitétanique à propos de toutes les lésions traumatiques, même les plus minimes, qu'on continuera à observer des cas de tétanos. L'injection préventive de sérum reste indiquée pour toutes les plaies contuses, souillées par des détritus du sol, ces plaies étant celles qui, autrefois, étaient le plus souvent suivies d'accidents tétaniques. VII. — TRAITEMENT DES FRACTURES. Depuis quelques années, le traitement des frac- tures à fait un peu partout l'objet de travaux nom- breux. La vulgarisation des procédés radiogra- phiques, en permettant de reconnaitre de petites lésions osseuses insoupconnées jusqu'alors et en montrant l'imperfection fréquente des résultats morphologiques obtenus, a conduit les chirurgiens à reprendre l'étude des fractures, que l'on pouvait croire terminée. Cette étude à acquis un regain d'actualité d'autant plus grand que les nouvelles lois sur les accidents du travail ont obligé à pré- ciser plus qu'on ne le faisait auparavant l'état des parties, de manière à permettre aux tribunaux de iixer en connaissance de cause le taux des indem- nités à attribuer. A cet égard, nous devons dire que, si la radiographie à rendu de grands services, elle à peut-être eu quelquefois des inconvénients. Quelques chirurgiens se sont attachés, par des procédés de réduction sanglante, à obtenir une reclitude plus parfaite des leviers osseux, ce qui n'a pas élé, croyons-nous, sans quelques inconvé- nients, au point de vue de l'état des fonctions du membre, et même, dans des cas heureusement exceptionnels, de la vie des malades. Si nous ajoutons que, trop souvent aujourd'hui, l’accidenté du travail, à l'instigation d'un agent d'affaire véreux ou même quelquefois, nous avons la tris- tesse de le dire, sous l'influence d'un médecin marron, néglige le traitement consécutif, de manière à entretenir son infirmité et à obtenir une indem- nité plus grande, on comprendra tout ce que le problème du traitement des fractures comporte actuellement de difficultés. Pratiquement, le but doit être de rendre au membre fracturé ses fonctions dans le plus court délai et aussi complètement que possible. C'est là, à notre avis, le point fondamental; peu importe qu'il y ait ou non une légère difformité osseuse, diffor- mité qui souvent même n'apparait pas à l'examen direct, mais n'est constatée que sur une épreuve radiographique. Pour le malade, si nous exceptons quelques fractures occupant des parties découvertes chez des femmes soucieuses de leur esthétique, l'intérêt principal est de retrouver, sans difformité apparente trop visible, l'intégrité des fonctions du membre fracturé. $ 1. — Fractures.du fémur. À part quelques cas de fractures transversales, sans déplacement de l'os, où un manchon pé- riostique intact maintient exactement dans leurs rapports les fragments, le simple appareil à attelles est aujourd'hui regardé comme insuffisant pour le traitement des fractures du corps du fémur. Par suite de la erampe réflexe des muscles, déterminée par la douleur osseuse, le fragment inférieur remonte pendant que le supérieur, sous l'action des pelvi-trochantériens et du psoas, se dévie en* abduetion et en flexion, et cela d'autant plus que la lésion occupe un siège plus élevé. Aussi comprend-on que quelques chirurgiens, en particulier à l'étranger, aient eu l’idée de mettre l'os à nu, de le suturer, de le boulonner ou de l'en- cheviller, Il semble qu'on peut arriver plus simple- ment à obtenir de bons résultats en recourant à l'extension continue, que Bardenheuer vient de préconiser au dernier Congrès de la Société alle- mande de Chirurgie et qui est réalisée depuis des années par la plus grande partie des chirurgiens parisiens, à l'aide d'un appareil excellent, dont la vulgarisation n'est pas encore aussi grande qu'elle devrait l'être, appareil d'Hennequin. $ 2. — Fractures de la clavicule. Pour éviter lés déformations habituelles après la consolidation des fractures de la clavicule, quel- PVR er 771 ; D' HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE 801 ques chirurgiens n'ont pas craint de préconiser la suture osseuse. Couteaud vient récemment d'éta- blir qu'on pouvait, sans faire de suture, obtenir des consolidations en rectitude parfaite si l'on placait le malade dans une position déterminée. Il suffit de coucher le blessé sur le bord du lit, l'épaule en porte-à-faux, le membre supérieur pendant verti- calement. Au bout de deux à trois jours, le dépla- cement est réduit; on peut laisser l’avant-bras en contre-bas du lit, cette position suffisant pour assurer automaliquement la juxtaposition des frag- ments. Ce procédé a l'inconvénient d'obliger le blessé à garder le lit pendant quinze à vingt jours, dans une position pénible, tout au moins les premiers jours, et de déterminer un œdème notable du membre. On pourra cependant y recourir chez des femmes qui tiennent à guérir avec un minimum de défor- mation. 3. — Fractures et luxations du carpe. na Après certains traumatismes du poignet, le re- tour fonctionnel est parfois insuffisant. Ces mau- vais résultats peuvent tenir, comme le fait observer Segond, à ce qu'on néglige aujourd'hui un peu trop la réduction des fractures de l'extrémité infé- rieure du radius, se contentant de les traiter par le massage; ils tiennent cerlainement aussi quel- quefois à la présence de lésions du carpe, un peu laissées dans l'ombre jusqu'à ces derniers temps. Signalées et décrites par l'École de Lyon, ces lé- sions traumaliques du carpe ont, depuis dix-huit mois, fait l'objet d'une série de communications à. la Société de Chirurgie; elles ont été, en particu- lier, bien étudiées par Pierre Delbet. A un premier degré, le grand os se luxe en arrière et monte sur le dos du semi-lunaire. Celui-ci se place en flexion, mais sans perdre ses connexions normales avee le radius. Il y à un dos de fourchette manifeste; la tête du grand os fait saillie en arrière et semble manifestement luxée. Dans un second degré, le semi-lunaire, pressé par le grand os, exécute un mouvement de rotation autour du ligament radio-semi-lunaire comme au- tour d'une charnière, de telle sorte que sa face concave regarde directement en avant. La tête du grand os vient alors occuper en partie la place du semi-lunaire el ne fait plus qu'une saillie insigni- fiante ou nulle en arrière. La rotation du semi-lunaire peut aller encore plus loin, être de 180°, de telle sorte que la face concave de l'os regarde en haut. Dans ce cas encore, le déplacement du grand os peut passer inapercu. Dans son déplacement, le grand os peut entrainer le scaphoïde, qui se fracture par arrachement au niveau de son col, une moitié restant attenante au semi-lunaire. Ces luxalions, avec ou sans fracture, succèdent à une chute sur la paume de la main comme les frac- tures de l'extrémité inférieure du radius et, comme elles, peuvent s'accompagner d'une déformation en dos de fourchette. Mais la tuméfaction est plus bas; les apophyses styloïdes, radiale et cubitale, ont conservé leurs rapports; le carpe est à la fois rac- courci et épaissi; souvent le poignet est fixé, comme cloué, dit Segond, la main étant en exten- sion sur l'avant-bras, les doigts légèrement fléchis. Le traitement consiste dans la résection du semi- lunaire et, s'il y à fracture du scaphoïde, de la portion contiguë de cet os, par une incision sur le bord interne du tendon du grand palmaire. Excep- lionnellement, on pourrait, dit Demoulin, obtenir la réduction sans intervention sanglante. VIII. — TUBE DIGESTIF. $S {. — Pharyngectomies. Depuis Verneuil et ses élèves, l'ablation des can- cers du pharynx élait à peu près abandonnée en France. Les statistiques publiées plus récemment à l'étranger par Krônlein, par Czerny, n'étaient, du reste, guère encourageantes. La mortalité immé- diate était considérable, les résultats éloignés mau- vais. L'opération élait cependant logique; le cancer du pharynx est un cancer qui se propage de proche en proche et qui se généralise peu; on pouvait donc se demander si les résultats ne finiraient pas par s'améliorer. Un important Mémoire de Vallas (de Lyon), contenant 19 observations personnelles de pharyngectomies, à ramené la question à la tribune de la Société de Chirurgie. Les résultats sont aujourd'hui très supérieurs à ce qu'ils étaient autrefois, tant au point de vue immédiat qu'au point de vue éloigné. Aussi, dans le Rapport que nous avons présenté sur cette question, avons-nous conelu qu'il y avait lieu de recourir à l'intervention, malgré les risques auxquels elle expose. L'ablation semble pas devoir être conseillée; l'incision oro- par les voies naturelles ne nous jugale de Jaeger (section horizontale de la joue, de la commissure labiale au bord du masséter) et l'incision coudée jugale inférieure de Maunoury- Verneuil (incision descendant de la commissure au bord du maxillaire pour se recourber le long de celui-ci) donnent certainement plus de jour, mais ont l'inconvénient de ne pas permettre une ablation complète des ganglions. Avant tout, il est nécessaire de se donner du jour; pour les tumeurs du pharynx inférieur, il nous semble que la pharyngotomie sous-hyoïdienne S02 D' HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE de Malgaigne, la sus-hvoïdienne de Jeremisch, l'os- téotomie médiane de l'hyoïde, même combinée à l'hémirésection de cet os (Vallas, Paul Delbet), doivent céder le pas à la pharyngotomie latérale sus ou sous-hyoïdienne de Krünlein. Pour les {umeurs de loro-pharynx, l'incision sous-angulo-maxillaire (Jaboulay) suffit quelque- fois; mais, le plus souvent, il est nécessaire d'agir sur le maxillaire inférieur. Aux sections, combi- nées à des déplacements osseux temporaires, que préconise en général l'École allemande, Vallas pré- fère la résection définitive de l'angle et de la plus grande partie de la branche montante. C'est le procédé qui nous semble le meilleur. Avec lui, on aborde la tumeur par la limite extrême de ses pro- longements ganglionnaires; on la contourne à sa périphérie, la séparant, dès le début, de ses con- nexions avec les gros troncs vasculaires du cou. On enlève, en bloc, la tumeur, les ganglions et les territoires Iymphatiques intermédiaires. Si l'on ajoute que, les incisions étant exclusive- ment cervicales, la face et le contour orbiculaire se trouvent respectés, ce qui assure le fonctionnement de la bouche et des lèvres, et permet secondaire- ment une réparation plus esthétique, on com- prendra que ce procédé mérite d'être employé doré- navant. $ 2. — Rétrécissement de l œsophage. Dans notre dernière revue, nous avons eu loc- casion de parler des avantages que les chirurgiens allemands retirent de l'œsophagoscopie pour l'ex- traction des corps étrangers. L'importance de l'œsophagoscopie semble continuer à croître. À plu- sieurs reprises, nous avons eu l'occasion de cons- tater l'utilité qu'elle présente comme mode d'ex- ploration. Gràäce à elle, ?œæsophagotomie interne à acquis un regain d'actualité; Guisez à bien montré que, sous le contrôle de l'æsophagoscope, on pou- vait faire de petits débridements multiples de ré- trécissements et, en combinant ces scarifications à des séances de dilatation, arriver à rendre à l'œso- phage sa perméabilité. La gastrostomie ayant donné à quelques chirur- giens des résultats médiocres, qui, croyons-nous, tenaient surtout à des défauts de technique, nous avons vu apparaître de nouvelles opérations desti- nées à remplacer celles qu'on pratiquait jusqu'ier. Tavel(de Berne), pour éviter la fixation de l'estomac à la paroi abdominale et assurer une continence parfaite de l'orifice, exclut complètement une anse d'intestin qu'il implante d'une part sur l'estomac, d'autre part à la peau. Opérant d'une manière analogue, mais excluant une portion d'intestin plus longue, Roux {de Lau- sanne) à cherché à constituer, à l’aide d’une anse d'intestin passant sous la peau au-devant du ster- num, un nouvel æsophage. Dans un premier temps, il implante sur la face antérieure de l'estomac une anse grêle réséquée et, après l'avoir insinuée sous la peau, la fixe à la peau de la région cervicale. Dans un second temps, il se proposait, une fois la vilalité de l'intestin transplanté bien assurée, de l’anastomoser à l’æsophage cervical. Lorsqu'il a publié son observation, il restait encore à exécuter ce second temps, labouchement du néo-conduit dans l'æsophage cervical. Ces tentatives, intéressantes au point de vue expérimental, ne sont peut-être pas destinées à un grand avenir, parce qu'elles sont difficiles et un peu » longues à exécuter, ce qui est important à considé- rer, étant donnée la faiblesse habituelle des malades justiciables de la gastrostomie. $ 3. — Maladies de l’appendice. L'inutilité de certaines appendicectomies, que nous mentionnions ici même il v a deux ans, a été depuis cette époque mise en lumière par de reten- tissantes communications du Professeur Dieulafoy, qui, avec plus d'autorité que nous, a bien montré que quantité de gens, simplement atteints de tvphlo-colite muco-membraneuse ou sableuse, sont indüment opérés d'appendicite qu'ils n'ont pas. L'attention est un peu trop attirée aujourd'hui sur l'appendicite, que certains croient, peut-être à tort, beaucoup plus fréquente qu'aatrefois. C'est ce que tend à établir une intéressante statistique publiée par notre maître Lannelongue. De 1885 à 1889, période où l’on ne portait pas le diagnostic appendieite, à l'hôpital Trousseau, il est entré 470 enfants atteints de péritonite aiguë; de 1895 à 1899, une fois l'appendicite connue, il ÿ a eu 443 appendicites diagnostiquées et 166 péritonites aiguës. Le nombre des appendicites aurait done, en apparence, augmenté; mais ce n'est là proba- blement qu'une apparence, résultant de ce que la maladie est mieux connue et séparée d'un bon nombre d'affections d'autres organes. Une statis- tique d'un médecin militaire allemand l'établit : EX 1874 Ex 1886 Ex 1901 Appendicites. + . . .,. 156 319 918 Maladies du foie. . . . 85 63 57 Abcès du ventre. 1.072 802 379 Péritonites , « 123 136 62 1.436 1.320 1.416 Pour ces trois années, on le voit, les totaux de ces maladies similaires sont sensiblement égaux. La question du moment opportun pour inter- venir dans l'appendicite reste toujours à l'étude. Il y à quelques années, on demandait une réponse à l'examen du sang. Aujourd'hui, le Professeur Lan- Le D: HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE 803 nelongue croit pouvoir la trouvéer dans la recherche du coefficient urotoxique, qui, dans les formes graves, s'éleverait à un chiffre trois et quatre fois supérieur au chiffre normal. En pratique, nous croyons qu'on n'arriverà à réduire considérablement la mortalité que si, dans toutes les formes d'appen- dicites aiguës nettement diagnostiquées, on enlève l'appendice dans les trente-six premières heures. Un Mémoire, présenté par MM. Jeanbrau et An- glade à la Société de Chirurgie, à été le point de départ d'une discussion sur les rapports existant entre les traumatismes et l'appendicite. Des faits apportés il résulte, comme l'a dit Picqué dans son Rapport, que l'accident ne crée pas l'appendicite, et que la crise survenue après un traumatisme nest que le réveil d'une appendicite préexistante. Le traumatisme, chez un appendiculaire avéré ou latent, réveille ou aggrave l'appendicite : il ne la produit pas. C'est à une conclusion analogue qu'est arrivé tout récemment un chirurgien américain, Deaver, qui insiste, de plus, sur ce fait qu'un trau- malisme agissant sur la fosse iliaque droite peut simplement déchirer le péritoine pariélal sous- jacent et simuler une poussée aiguë d'appendicite, au point que la cœliotomie seule est à mème d'élu- eider le diagnostic. Contrairement à Popinion courante, qui veut que le cancer primitif de l'appendice soit une maladie rare, j'ai, à propos de deux faits étudiés par mon assistant, M. Lecène, montré que cette maladie est beaucoup plus fréquente qu'on ne le croit. Géné- ralement confondue avec l'appendicite, elle ne peut le plus souvent en être distinguée que par l'examen histologique, d'autant qu'elle se développe quelque- fois sur la cicatrice d'une ancienne appendicite. IX. — ORGANES GÉNITAUX. $ 1. — Rétrécissement de l’urètre. Le traitement des rétrécissements traumatiques de l'urètre n'est, en général, pas très satisfaisant, les récidives observées après les traitements habi- tuels étant fréquentes et rapides. Von Hacker, qui à fréquemment appliqué la mobilisation de Furètre à la cure de l'hypos- padias, conseille d'y recourir après les résections de l’urètre pour rétrécissement. On peut, après ces résections, disséquer et mobiliser l’urètre spongieux et le rapprocher ainsi de la région membraneuse. Le point capital est d'éviter toute tension des par- ties mobilisées, puis amenées au contact. Pasteau et Iselin, sous l'inspiration du Profes- seur Guyon, craignant l'infiltration cicatricielle de la région opératoire, établissent, au contraire, après l'urétrectomie, un abouchement périnéal; on assiste alors à la formation d'une large fistule dont les parois sont formées de tissus souples. Secondaire ment, une urétroplastie à doubles lambeaux taillés dans ces tissus souples permet de fermer facile- ment la fistule. On éviterait ainsi presque à coup sûr les récidives. $ 2. — Ectopie testiculaire. Le traitement de l'ectopie testiculaire a fait l'objet d'importants Rapports de Souligoux et de Villard au dernier Congrès francais de Chirurgie. L'opéra- tion comprend deux temps : 1° L'abaissement du testicule; 2° sa fixation. L'abaissement est le temps le plus difficile, en raison des obstacles qui s'opposent à la Hbération du cordon. Le plus important est l'adhérence du conduit péritonéo-vaginal aux éléments du cordon, La séreuse accolée au faisceau vasculaire et au canal déférent empêche leur élongation et leur dé- plissement, de la même manière qu'une doublure froncant une étoffe, écrit Forgues. Aussi est-il né- cessaire d'exciser méthodiquement ce canal ou, S'il est oblitéré, le cordon fibreux qui le remplace, de bas en haut, remontant jusqu'à la graisse sous- péritonéale; après sa section au périloine, on peut constater une brusque détente. Pour fixer le testicule descendu, on a suturé la glande au serotum, à l'angle de la cloison, au tes- ticule opposé, à un orifice fait au travers de la cloison, etc. On a suturé le cordon aux piliers in- guinaux, aux adducteurs, etc. Tout cela ne semble avoir, d'après les travaux récents, qu'une Impor- tance relative. Une libération et une descente bien complètes, combinées à une réfection du canal sui- vant le procédé de Bassini pour la cure radicale des hernies, assurent le maintien de la guérison. D' Henri Hartmann, Professeur agrègé de la Faculté de Médecine de Paris, Chirurgien des Hôpitaux, BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 4° Sciences mathématiques Vessiot (E.). Professeur à la Faculté des Sciences de Lyon. — Leçons de Géométrie supérieure, pro- fessées en 1905-1906, rédigées par M. ANZEMBERGER. (Prix : 42 fr.) Hermann, éditeur, Paris; Delaroche et Schneider, éditeurs, Lyon, 1907. Ces lecons ont été rédigées pour répondre au pro- gramme spécial d'Analyse de l'agrégation de Mathéma- tiques en 1906; elles sont une excellente préparation à l'étude des travaux originaux de Géométrie supérieure, et ne supposent au lecteur que des connaissances géné- rales sur les sujets traités. Aussi M. Vessiot commence- t-il par reprendre les points essentiels de la théorie des courbes gauches et des surfaces développables; puis, abordant l'étude des surfaces en général, il insiste particulièrement sur les deux formes quadra- tiques différentielles fondamentales de Gauss, qui défi- nissent toute surface en coordonnées curvilignes, et montre leur rôle dans l'étude des lignes tracées sur la surface. L'auteur, ayant principalement en vue l'étude des systèmes de droites, considère ensuite les surfaces réglées, puis les congruences et les complexes de droites, et plus spécialement les congruences de normales, ce qui l'amène à la eyclide de Dupin, dont il fait ressortir les analogies avec les surfaces doublement réglées, en conformité avec la correspondance de Lie entre les droites et les sphères : à cette correspondance se rat- tache la notion de bande d'une surface, formée sur la surface par une simple infinité d'éléments de contact. Puis vient l'étude des congruences de droites, consi- dérées comme joignant les points correspondants de deux surfaces. M. Vessiot développe spécialement, avec toutes ses conséquences, le cas où les développables de la congruence découpent sur les surfaces deux réseaux conjugués. Les complexes de droites sont ensuite étudiés, notamment au point de vue de leurs relations avec l'équation aux dérivées partielles du premier ordre; le complexe linéaire, avec ses applications géométriques et mécaniques, fait l’objet d'un chapitre spécial. Les derniers chapitres sont consacrés aux transfor- mations de contact, avec la détermination de celles de ces transformations qui conservent les asymptotiques ou les lignes de courbure, puis aux systèmes triples orthogonaux (équations de M. Darboux, exemples), et enfin aux congruences de sphères et de cercles : notons l'application au théorème de Malus sur la réflexion ou la réfraction d'une congruence de normales, l'étude du système triple de Ribaucour et celle des systèmes cycliques. Cet ouvrage, à la fois concis et très riche, se distingue autant par la simplicité et le naturel des méthodes que par une heureuse composition qui a permis à l’au- teur de relier entre eux et de rassembler en peu de pages un grand nombre de faits importants : en l'écri- vant, l'éminent professeur de la Faculté de Lyon a rendu à l'enseignement et à la science un signalé ser- vice. M. LELIEUVRE, Professeur au Lycée et à l'Ecole des Sciences de Rouen. Fricker (M.).— Rivetage.— 1 vol. de l'Encyclopédie scientifique des Aide-mémoire. (Prix : 2 fr. 50.) Gauthier-Villars, éditeur. Paris, 1907. Dans un des derniers opuscules des Aide-Mémoire, M. Fricker, ingénieur civil des Constructions navales, étudie l'importante question du rivetage. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX La première partie de ce petit ouvrage est consa- crée aux rivets et aux assemblages; la seconde, à l’exé- cution du rivetage. | L'auteur passe successivement en revue la forme des rivets, les proportions des têtes et rivures, le diamètre des rivets et la nature du métal des rivets. On peut regretter le peu de développement que conne l’auteur à ce dernier point; il conclut par la règle suivante : « On rive, d’une façon générale, les matériaux d’un métal avec des rivets de même métal; l'assemblage est ainsi plus homogène que si tôles et | rivets étaient de matériaux différents. » On ne conçoit | pas bien l'importance de cette uniformité de la matière; il parait, au contraire, que la tendance actuelle est d'utiliser des rivets en aciers spéciaux, offrant plus de sécurité que les aciers ordinaires, et cela même dans le cas où la tôle est en acier ordinaire. L'étude et le calcul des assemblages rivés, leurs applications font l'objet du deuxième titre de la première partie. Dans la seconde partie, M. Fricker examine la fabri- cation des rivets, la préparalion des matériaux et la mise en place des rivets; peut-être n'insiste-t-il pas | suffisamment sur les méthodes de chauffage, notam- ment sur les fours à gaz et à résistance électrique qui sont fréquemment employés. Enfin, il étudie avec quelques détails le rivetage à la | mainet le rivetage mécanique, ainsi que le dérivetage. | Ileût été intéressant d'avoir sur ce sujet des données sur les essais qui ont été faits récemment dans la Marine francaise sur le dérivetage au moyen de l'oxy- gène. Cette méthode, qui consiste, comme l’on sait, à projeter de l'oxygène sur une surface chauffée, parait donner des résultats très remarquables. Le petit volume que présente M. Fricker est appelé à rendre des services dans les ateliers de construction; il serait intéressant de le voir compléter rapidement par un résumé des beaux travaux que M. Frémont à publiés récemment. L. GUILLET, Docteur ès sciences, Ingénieur des Arts et Manufactures. 2° Sciences physiques Séligmann-Lui, Zngénieur en Chef des Mines, — Bases d'une théorie mécanique de l’Electricite. — { vol. in-8° de 208 pages, avec 41 figures. (Prix: 3 fr.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1907. Ces bases d’une théorie mécanique de l'Electricité sont, d'une part, quelques propriétés fondamentales, considérées comme connues par l'expérience, d'autre part, un certain nombre d'hypothèses. Les propriétés expérimentales sont les suivantes : 4° La grandeur d'une charge électrique peut être définie par les forces qui s'exercent entre les corps électrisés, sans qu'il soit nécessaire de faire une hypo- thèse sur la nature même de l'électricité: les charges sont des quantités susceptibles de signe et s'ajoutent algébriquement ; 2 La somme algébrique des charges reste constante dans un système isolé; 3° Ilexiste descorpsconducteurs et des corps isolants. Les uns et les autres seraient constitués par des par- | ticules séparées, portant sur leurs deux faces des | charges égales, mais de signe contraire. Il s'agit, en supposant la matière constituée par des points matériels en mouvement permanent, de trouver la forme de la fonction des paramètres mécaniques | susceptible de représenter l'électricité. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX — Ces paramètres sont les masses des points matériels, leurs coordonnées, les forces qui s’exercent entre eux et les dérivées de ces coordonnées et de ces forces. Pour y parvenir, M. Seligmann-Lui s'appuie sur un postulat qu'il a énoncé et employé déjà dans un Mé- moire précédent: « 1l est impossible de transformer de l'énergie cinétique en énergie potentielle en faisant passer un système d'un état d'équilibre à un autre ». A l’aide de ce postulat, il démontre que l'énergie élec- trique est purement potentielle. Si l'on admet que l'équilibreélectrique correspond au minimum d'énergie, on arrive à des formules qui concerdent avec les for- mules déduites de l'expérience, ce qui justifie l'hypo- thèse. Mais il résulte de là que l'état neutre, étant caracté- risé par un minimum absolu de l'énergie, devait tendre toujours à se rétablir; il faut donc expliquer liso- lement. L'auteur suppose que les points matériels sont groupés par atomes, formés par des systèmes de points très voisins, animés d’un mouvement successif le long d'une trajectoire fermée, et que la transmission d'énergie entre deux atomes exige que les trajectoires se touchent. Les corps seraient d'autant plus conduc- teurs que ces contacts seraient plus fréquents. En apparence, cette hypothèse est en contradiction avec l’une des premières: on à supposé constante, non pas l'énergie du diélectrique, mais la charge. Cela tient à ce que l'énergie potentielle, définie par le théo- rème de Claudius ou par le potentiel, n’est la même que si le système est complètement fermé, c’est-à-dire soustrait à toute action extérieure. L'énergie électrodynamique est aussi purement po- tentielle; elle doit être une fonction homogène du second degré des intensités de courant. On déduit de cette hypothèse les lois fondamentales de l'Electro- dynamique et de l'Induction. Il n'est pas nécessaire de faire appel aux propriétés particulières de l'électricité pour expliquer la propa- gation des oscillations électriques dans les diélec- triques. Ce n’est qu'un cas particulier de la propagation d'une perturbation provoquée en un point dans un système où l'on n’admet que des forces centrales. M.Séligmann-Lui pense que l'identification complète des ondes électriques et des ondes lumineuses est bien hasardée. Mais ses arguments ne me paraissent pas très convaincants. « Les rayons lumineux sont essen- tiellement rectilignes, avec la petite correction de la diffraction. Les ondes électriques se propagent le long d'un fil sinueux ». : La « petite» correction de la diffraction peut devenir assez grande pour masquer complètement la propaga- tion rectiligne, comme dans les milieux troubles. Un milieu est-il trouble ou non? C'est affaire de longueur d'onde et de constitution du milieu. « L'action lumineuse sur un corps opaque ne produit habituellement que de la chaleur ou des effets chi- miques. Il n'y a rien d’analogue aux effets d'induction, qui font d'un résonateur électrique une source nou- velle d’étincelles. » Cette affirmation est trop absolue. Les expériences de Rubens sur la réflexion des ondes caloriques de grande longueur d'onde sur des systèmes de résona- teurs orientés, montrent que ces ondes se comportent comme les ondes électriques; il est donc très probable que les ondes lumineuses feraient de mème. Intéressante en elle-même, la tentative de M. Sélig- mann-Lui met une fois de plus en évidence les diffi- cultés que rencontrent les théories « mécaniques » de l'électricité. Elles ne sont mécaniques que par leurs procédés de calcul, mais ne peuvent s'affranchir de certaines hypo- thèses spécifiques, irréductibles aux principes de la Mécanique. Pour ma part, j'ai plus d'espoir dans l'avenir des théories qui, suivant le chemin inverse, se proposent de ramener les phénomènes mécaniques aux phénomènes électromagnétiques, prenant comme élé- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. 805 ment, non pas le point « matériel», mais le point « électrique ». Mancez LAMOTTE, Professeur adjoint de Physique à l'Université de Clermont-Ferrand. Fribourg (Ch.), Chimiste à la Société des Sucreries et Raffineries d'Egypte. — L'Analyse chimique en sucrerie et raffinerie de cannes et de betteraves, avec une préface de M. H. PezLer. — À vol. in-8° de 390 pages et 51 figures. (Prix : 12 fr. 50.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1907. Quand on écrit un livre, ce n'est pas tout d'y mettre ce que l'on sait; il faut également se préoccuper de ceux auxquels on s'adresse, se demander sans cesse Ce qu'ils ne savent pas et ce qu'ils espèrent trouver dans ce livre. Le professeur, placé devant un auditoire attentif, est en communication avec lui; il lit sur les visages s'il intéresse et s'il est compris. L'auteur n’a pas cette res- source, et il lui faut souvent oublier ce qu'il écrit pour se mettre à la place de son lecteur. C'est ce qu'a fait M. Fribourg, l’auteur de l'excellent livre que la Direction de la Æevue nous à demandé d'analyser. A qui s'adresse-t-il? Aux chimistes de sucreries et de raffineries, c’est-à-dire à des hommes d'origine et de capacité très différentes. Voici, par exemple, deux prototypes opposés : l’un sort d’une de nos grandes Ecoles, Ecole centrale, Institut national agronomique, Ecole municipale de Physique et de Chimie, Institut de Chimie appliquée, etc...; on lui a appris beaucoup de choses: il est chimiste, mais il n'est pas chimiste de sucrerie; on ne lui a pas appris à doser le sucre dans les divers produits de la sucrerie, à déterminer les coefficients de pureté et les coefficients salins, à contrôler la richesse du gaz du four à chaux, à estimer Ja valeur d'un calcaire ou d'un noir animal. L'autre est un enfant que l'on prend dans le village même de la sucrerie, et auquel, quand son intelligence le permet, on confie peu à peu les analyses courantes de contrôle; le chimiste qui le dirige n’a pas toujours le temps de faire son éducation, et il faut à cet apprenti un livre qui lui fasse comprendre la raison de ce qu'il exécute machinalement et précise la marche de ses opérations. Il est difficile, dès lors, de parler le même langage à ces deux chimistes, si différents l'un de l'autre. Lisez le livre de M. Fribourg avec cette double préoccupation et vous verrez qu'il les satisfait tous les deux: tous deux puiseront les renseignements relatifs à la prise de la densité et au dosage de la matière sèche, au dosage polarimétrique du sucre dans les betteraves, les cossettes épuisées, les eaux de conden- sation, les jus, les sirops etles masses cuites, les sucres bruts, les tourteaux d'écume, etc., au dosage du sucre réducteur, des cendres et de la chaux, à la colorimétrie, à la vérification des instruments de mesure, balances, ballons, pipettes, etc.., à l'analyse du calcaire, des combustibles, de l’albumine, du noir animal, des bleus d'outremer, et des engrais qne le fabricant de sucre contrôle souvent pour le cultivateur. Le livre est écrit par un jeune savant, qui, nanti d'une forte éducation chimique, est devenu un praticien habile et consciencieux. Il sera lu avec profit par tous ceux qui sont chargés, à quelque titre que ce soit, d'exercer le contrôle chimique des sucreries de bette- raves et de cannes, et des raffineries de sucre. L. LiNDET, Docteur ès sciences, Profe#eur à l'Institut national agronomique. 3° Sciences naturelles Fritel (P. H.), Attaché au Muséum national d'Histoire naturelle. — Géologie. (Histoire naturelle de la France, 28° partie). — 1 vol. in-16, de 391 pages, 29 planches, Â8 cartes en noir et une Carte geolo- gique de la France en couleurs. (Prix : 6 fr.) Les fils d'Emile Deyrolle, éditeurs. Paris, 1907. M. Fritel est déjà connu par les deux ouvrages, con- sacrés l’un à la Paléontologie animale, l'autre à la {19** S06 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Paléontologie végétale, qui ont paru dans la collection Deyrolle, Le volume qu'il nous donne aujourd'hui vient heureusement compléter cet ensemble. Peut-être eût- il été préférable de l'intituler Géologie de la France, car ce n'est point un traité de Géologie (il y en a déjà plusieurs et d'excellents), mais bien plutôt une descrip- tion géologique de la France. j A peine une cinquantaine de pages sont-elles consa- crées aux phénomènes géologiques et à la nomencla- ture, et Lout de suite l’auteur aborde la description régio- nale. Toutes les grandes unités de notre sol sont ainsi passées en revue. Dans chaque cas, M. Fritel indique la succession des couches, l'endroit où l'on peut les observer, les roches éruptives qui les traversent, les fossiles qu'on y rencontre. Il ne se borne pas à men- tionner ceux-ci, mais figure la plupart de ceux qui n'avaient pu trouver place dans les deux ouvrages anté- rieurs ; l'introduction nous apprend que 1.400 espèces se trouvent ainsi figurées. Chaque chapitre est, en outre, accompagné d'une petite carte, tandis qu’une carte générale de la France est placée à la fin du vo- lume. Les divisions straligraphiques sont celles du Traité de M. de Lapparent. D'un format maniable et d'un prix abordable, cet ouvrage est appelé à rendre service aux collectionneurs, aux amateurs ef même à ceux qui font de la géologie une étude spéciale, car il leur donnera, sous une forme condensée, une foule de renseignements qu'il leur faudrait chercher dans de nombreux mémoires ou traités. L. PERVINQUIÈRE, Chargé de Conférences à la Sorbonne, ‘ Vice-Président de la Société géologique de France. Ferguson (John), Vice-président de la Section de Ceylan de la Société royale asiatique: — Ceylon in 1903-1905. — 1 vol. in-8° de 160-cLxxxvI pages avec fig. A. M. et J. Ferguson, éditeurs. Colombo, 1907. Ce volume, qui en est à sa 6° édition depuis l'année 4883, constitue un excellent guide illustré de la colonie anglaise de Ceylan. Après un historique consacré à l'œuvre de l’Angle- terre à Ceylan, l'auteur s'étend longuement sur les richesses agricoles de ile et leur mise en valeur pro- gressive. Il décrit, d'autre part, les beautés naturelles de l’île susceptibles d'attirer les touristes. Un appen- dice donne de nombreux renseignements statistiques. Henry (E.), Professeur à l'Ecole nationale des Eaux et Forëts. — Préservation des bois contre la pour- riture par le sol, les champignons et les insectes. Recherches sur la valeur comparative de divers antiseptiques. — 1 vol. in-8° de 96 pages avec 10 planches en phototypie. (Prix : 4 fr.) Berger- Levrault et Ci, éditeurs. Paris, Nancy, 1907. L'ignorance des techniciens, en ce qui concerne Phistoire naturelle du bois, a compromis la cause de cette substance éminemment utile. Le bois, substance organisée, est de structure particulièrement complexe et délicate; comme toute substance ayant eu la vie, elle peut héberger, à son tour, de nombreux organismes qui vivront à ses dépens et, en l'altérant. lui feront perdre ses meilleures propriétés. Dès lors, pourquoi s'étonner qu'il soit nécessaire de lui faire subir un traitement spécial pour en assurer la conservation? On le fait bien déjà pour le fer, qu'il faut proté- ger par des enduits divers! Des guides manquaient aux praticiens pour leur montrer la voie et leur éviter les tätonnemeuts du début. En ce qui con- cerne les altérations des bois et leur traitement, nous trouvons peu de choses dans notre littérature, où ce sont d’ailleurs bien souvent les assertions des pre- miers auteurs qui sont indéfiniment reproduites sans vérification personnelle. De nombreuses recherches et de beaux travaux d'ensemble ont été, au contraire, publiés en Allemagne et en Autriche notamment, C'est seulement récemment, en France, que l’on com- mence à se mettre au courant; rappelons, à ce sujet, les publications de M. E. Henry, et, si l’on veut nous le permettre, notre volumineux ouvrage « le Bois », où, dans un chapitre étendu, nous abordons l'examen de l'ensemble de la question. Mais l'étude de ce vaste sujet est loin d'être épuisée et nous espérons Jui consacrer bientôt un livre spécial, mettant la question au courant des nombreux travaux récents et la présen= tant sous ses deux faces | également intéressantes: théorique et pratique. M. E. Henry, dans l'ouvrage qu'il publie aujourd'hui, joint au mérite d'avoir fait un utile travail de vulgari= sation celui, plus rare encore, d'avoir produit une œuvre originale, fruit d'expériences poursuivies pen- dant plusieurs années. Il a eu avant tout pour but de montrer que les plus humbles propriétaires peuvent, sans grands frais, sans installation coûteuse, préserver pendant fort longtemps de la pourriture tous les bois qu'ils emploient, fussent-ils placés dans les pires conditions, et qu'ils ont un intérét pécuniaire évident à user des antiseptiques qu'il préconise à cet effet. Avec beaucoup de netteté et de précision, il s'efforce de convaincre chacun de cette vérité, et particu- lièrement les architectes, entrepreneurs, propriétaires de maisons, constructeurs de hangars, employeurs d’échalas, pieux, lattes, ciôtures, etc., en un mot tous ceux qui emploient le bois. M. E. Henry, professeur à l'Ecole forestière, s'est fait le champion autorisé du bois, quelque peu menacé, dans certains de ses débou= chés, par la concurrence du fer, et souvent méconnu aujourd'hui. Pourquoi? A cause des accidents qui se produisent souvent actuellement et qu'il est {trop facile d'expliquer. On construit trop vite, on ne laisse pas au. bois le temps de sécher, on ne le dépouille pas de la sève, nourriture excellente, bouillon de culture, pourrions-nous dire, de tous les organismes et micro- organismes de l’altération. L’entrepôt prolongé sous hangar, le flottage, sont des précautions que l'on néglige à notre époque de précipitation. Il y a, à cela, je le sais, des raisons économiques; mais bien sou- vent des procès ruineux, et de déplorables accidents, viennent absorber, et bien au delà, les économies réalisées. Enfin, quand se décidera-t-on à protéger le bois contre les organismes par des antiseptiques, comme on protège le fer contre la rouille par les enduits ? Et pour cela il ne faudrait pas croire qu'il soit nécessaire de recourir aux installations coûteuses des grandes usines, des compagnies de chemins de fer et des riches propriétaires, qui emploient, à cet eflet, des appareils à injection par le vide et la pression méca- nique. Non, et M. Henry indique comment, avec un matériel très simple, le premier ouvrier venu pourra procéder au badigeonnage ou à l'immersion des bois de construction par exemple, sur l'ordre de larchi- tecte ou de l'entrepreneur. C’est là une habitude à prendre, et M. Henry nous confiait que, grâce à son insistance, elle commençait à s'introduire à Nancy. M. Henry, dans le présent travail, décrit les prinei- pales altérations des bois dues aux insectes et aux champignons; mais il se propose avant tout pour but de rechercher, parmi les produits antiseptiques que le commerce met à notre disposition, quels sont ceux qui permettront de préserver les bois le plus eflicacement et le plus facilement. , ; Ses expériences ont porté sur des bois de sapin, pin; chène, hêtre, peuplier, débités en cubes ou en ron= delles, immergés vingt-quatre heures dans un bain de l'antiseptique essayé et conservés ensuite, pendant plusieurs années, dans des sortes de pourrissoirs, Soit à l'air libre, soit à l'abri. Le premier cas répond, par exemple, à des bois enfouis dans le sol, le second En des bois enfermés dans les maisons, où l’on sait qu'ils ont notamment à redouter l'invasion du dangereux Merulius. Dans le premier cas, le lysol, l'antinonnine, l'acide fluorhydrique, n’ont eu aucune action préser- vatrice; des échantillons qui ont été en contact avec les produits mentionnés sont aussi décomposés, sinon plus, que les témoins. ‘ vite FF ! 4 a A M TU der 10 | POCGRE BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 807 Au contraire, le chêne, le pin d’Alep, le hêtre, le peuplier, traités, soit par le carbolineum Avenarius, soit par le carbolineum marque du Lion, soit par le goudron, soit par le microsol, sont tous &:ssi intacts qu'ils Pétaient au début de l'expérience. Dans le second cas, les résultats ont été absolument favorables pour les cinq espèces de bois immergés vingt-quatre heures, soit dans le carbolineum Avena- rius, soit dans le carbolineum marque du Lion, soit dans le goudron, soit dans le microsol. Le goudron est le moins sûr de ces produits, car, à la moindre solu- tion de continuité, la place est livrée à l'ennemi. Les effets de l'antinonnine et de lacide fluorhydrique varient suivant que l'on a affaire à du bois soumis à latmosphère humide et chaude des galeries de mines ou librement exposé aux intempéries. Dans ce der- nier cas, les effets sont nuls: ils sont, au contraire, favorables lorsque les bois sont à l'abri. Ce sont incontestablement les carbolineums et le microsol qui sont sortis vainqueurs du concours institué par l’auteur. Sans pouvoir établir de supré- matie absolue, il montre que, suivant les cas, l'un peut être préféré à l'autre; c'est ainsi qu'il signale que le microsol semble présenter, pour l'emploi dans l'intérieur des habitations, de sérieux avantages sur les carbolineums, qui doivent être réservés pour les bois en plein air. 10 planches en phototypie reproduisent les bois mis en expérience et permettent de se rendre compte, par soi-même, de la mesure suivant laquelle s'est faite la préservation, contre l'altération, par les divers anti- sepliques. En somme, M. E. Henry a fait une œuvre aussi inté- réssante au point de vue théorique qu'utile au point de yue pratique, et dont la diffusion rendra un signalé service à toutes les personnes qui utilisent le bois. J. BLAUVERIE, Chargé de Cours de Botanique appliquée à l'Université de Lyon. Cligny (A.). — Annales de la Station aquicole de Boulogne-sur-Mer (Pêches et Biologie marine), publiées sous les auspices du ministère de lAgrieul- ture par À. Cucny, directeur. Nouvelle série. Vo- lume 1. Société typographique, Boulogne-sur-Mer. Depuis dix ans ans, ce périodique avait cessé de paraître et on ne pouvait que le regretter. M. Canu avait donné une impulsion considérable aux études concer- nant la pèche à Boulogne. Les résultats qu'il à obtenus sont tels qu'il a rénové complètement le mode de pêche et d'armement dans ce port. M. Cligny,son successeur, a repris la mise en œuvre scientifique des nombreux matériaux que l’on peut récolter dans notre plus impor- tant port de pêche, et l’on ne peut que se réjouir de la réapparition des Annales de Boulogne. Dans cette nouvelle série, M. Cligny aborde des sujets variés. Tout d'abord, une série d'observations sur des espèces rares de poissons des côtés d'Espagne et du Por- tugal que les chalutiers à vapeur ramènent à Boulogne. Puis il y à une étude sur les races de harengs. De mensurations nombreuses et précises, il résulte que les harengs d'automne de la mer du Nord et de la Manche sont de même race, et que les bancs exploités dans ces mers sont identiques et continus. Mais les harengs pêchés à l’ouest de la Manche seraient diffé- rents, et se rapprocheraient d'une autre race que M. Cli- gny appelle race de l'Océan. L'auteur à abordé la question de la migration des maquereaux, apportant un fait intéressant d'une cap- ture exceptionnelle de maquereaux en Manche dans l'hiver 1901 par un chalutier de Boulogne. Depuis, cette pêche se continue. I semble donc que les maquereaux de la Manche se retirent en hiver dans quelques points de cette mer, et que les grandes migrations de cette espèce ne sont qu'un mythe. Signalons encore une étude sur la croissance de la plie, etla traduction d’une instruction norvégienne pour le traitement et la transformation des produits de la pêche. À. Brior, Chef des Travaux de Zooloæie à la Faculté des Sciences d’Aix-Marscille. 4° Sciences médicales Frenkel (D: IL.-S.), de Heiden, Lauréat de l'Académie de Médecine. — L’Ataxie tabétique, ses origines, son traitement par la rééducation des mouve- ments. Traduit de l'allemand par le D' Van Bierviter (de Bruxelles). Préface de M. le professeur Raymonn. — 1 vol. grand in-8 de 328 pages avec 432 figures. (Prix: 8 fr.) Félix Alcan, éditeur. Paris, 1907. Ce livre est le résultat d'une longue observation des tabétiques. Il se divise en deux parties. Dans la première partie, générale, sont passés en revue l'historique du traitement par l'exercice, les formes de lPataxie tahé- tique, les causes et les éléments de cette ataxie sur laquelle on peut avoir prise grâce à la rééducation des mouvements. Ainsi que l’a fait remarquer le Professeur Raymond dans la préface du livre, l’ataxie est un syndrome, une résultante de l’action combinée de nombreux facteurs : anesthésie, perte des actions réflexes, diminution du tonus musculaire, désassociation des associalions motrices, el aussi inhibition psychique. Suivant la prédominance d'action dés uns et des autres, les caractères de l'ataxie changent sans qu'il soit possible &’établir un parallélisme rigoureux entre l'incoordination et l'intensité des différents facteurs qui contribuent à la produire. Il importe de bien rechercher les anesthésies et les hypotonies des alaxiques, et, dans chaque cas, de déterminer {rès exactement leur valeur. M. Frenkel a contribué à établir leur importance; on lira avec inté- rèt les pages consacrées dans son livre à la recherche et à la constatation de l'hypotonie, à la recherche et à l'évaluation des anesthésies tabétiques. Le deuxième chapitre est la partie technique du livre; il a surtout pour but de fournir au médecin des données pratiques qu'il puisse utiliser lui-même, On trouve là, exposés avec toute la minutie que le sujet comporte, les détails indispensables pour la connais- sance exacte de la méthode de rééducation motrice. Tous les exercices indistinctement ne doivent pas êlre conseillés. On ne saurait trop insister sur ce fait que les mouvements rééducateurs doivent être déterminés pour chaque malade d'après les troubles qui lui sont propres el la pathogénie de ces troubles : anésthésies, hypotouie, stasobasophobie. Il importe surtout que ces mouvements ne soient pas antiphysiologiques, inutiles ou paradoxaux. Dans ce choix, le sens clinique — le simple bon sens — indiquera au médecin les exer- cices uliles à chaque cas particulier. La méthode de rééducation motrice à surtout pour but de permettre à des infirmes de pouvoir tenir encore leur place dans la société. Elle ne vise pas seulement à apprendre aux malades la parfaite exécution des mouvements simples, mais elle doit leur permettre de faire la synthèse'des actes musculaires complexes de la vie de relation : moditi- cations de l'attitude, marche, etc. Tout médecin, pourvu qu'il soit observateur et patient, peut mettre en pratique ces notions géné- rales et obtenir des résultats satisfaisants. S'il est vrai que la rééducation motrice ne parvient pas à guérir le tabes, du moins permet-elle à nombre d'ataxiques de reconquérir plus de maitrise dans leurs actes coutu- miers. De HENRY Meice. Caleb (C.-C.), Professor of Physiology and Botany, Medical College. Lahore. — Eyesight in schools (LA Vision pans LES EcoLes). — 1 vol. iu-12 de 79 pages. Rai Sah1h M. Gulab Singh and Sons. Lahore, 1907. Le directeur de l’Instruction publique du Punjab, frappé par l'augmentation du nombre des myopes et 808 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX des degrés de myopie parmi les élèves des écoles publiques, invita l'auteur à adresser aux instituteurs un livre contenant les notions élémentaires de l'hygiène oculaire en tant qu'elles s'appliquent à l'école. De cette invitation prit naissance le petit livre objet de cette analyse. Un examen sommaire de l'anatomie et de la dioptrique oculaires est suivi par l'exposé élémentaire des vices de réfraction. Dans l'exposé de l'influence que la myopie exerce sur le développement physique et mental, l’auteur suit Brudenell Carter et Oliver lguidés eux-mêmes par la maxime: nihil in intellectu quod non fuit prius in sensu. Son exposé est clair et simple, et le livre nous semble atteindre entièrement le but que son auteur s'est proposé: permettre aux instituteurs du Punjab de reconnaitre les vices de réfraction de leurs élèves et de prendre les mesures nécessaires pour com- battre l’envahissement croissant de la myopie qui suivit de près l'introduction dans le Punjab du système sco- laire anglais. L'hygiène scolaire générale et la péda- gogie sont exposées en quelques phrases excellentes parmi lesquelles nous citons la suivante : « La forme la plus détestable de l'éducation est celle que donnent aux enfants les instituteurs dont la seule préoccupation est la connaissance parfaite des traités classiques adop- tés et la facilité de passer les examens ». Cette maxime mérite de dépasser les frontières du Punjab. D' SULZER, Médecin de la Fondation ophtalmologique Ad. de Rothschild. Hartmann (Henri), Professeur agrégé à la Faculté de Médecine, Chirurgien de l'Hôpital Lariboisière. — Travaux de Chirurgie anatomo-clinique. 7roi- sième série : Chirurgie de l'Intestin (avec la colla- boration de MM. P. LecÈNE et J. Oinczyc, Prosec- teurs à la Faculté). — 1 vol. in-4 de 453 pages, avec 153 figures. (Prix: 16 fr.) Georges Steinheiïl, éditeur. Paris, 1907. Cette troisième série de travaux que publie M. H. Hartmann est conçue suivant les idées direc- trices qui ont présidé aux deux premières séries. M. Hartmann s'est donné pour principe de toujours éclairer la clinique par les données de l’Anatomie pathologique et de l'Anatomie normale, de manière à établir les indications thérapeutiques sur une base rationnelle et solide. Le livre actuel renferme une bonne étude de M. Hart- mann sur les anastomoses intestinales et qastro-intes- üinales et sur l'exclusion de l'intestin, un travail de M. Lecène sur Je sarcome de l'intestin grêle (jéjuno- 11600); mais ce qui fait son principal intérêt, c'est l'excellente el très complète étude que font MM. Okin- czye et Hartmann de l'anatomie chirurgicale du côlon et du cancer du côlon. Signalons d’une façon particu- lière les pages où M. Okinezyc approfondit l'étude cli- nique des tumeurs du gros intestin et montre tout ce que le diagnostic est en droit d'attendre des procédés nouveaux d'investigation: proctoscopie, sigmoïdoscopie, radiographie. Dr P. Desrosses. 5° Sciences diverses ae (Jean-Paul), — Physiologie et Psychologie de l’Attention. —1 vol. in-8 de x1-223 pages. (Prix : 3 fr. 55.) Alcan, éditeur, Paris, 1907. M. Nayrac a voulu condenser, dans une monogra- phie complète, les nombreux travaux publiés sur l'at- tention depuis le livre de Ribot. A cet égard, l'ouvrage ne sera pas inutile. Mais on ne peut pas dire qu'il renou- velle le sujet. La partie la plus intéressante est, semble-t-il, la pre- mière, qui traite de la physiologie de l'attention. No- tons des expériences précises sur le nombre des glo- bules rouges avant et après une série d'actes attentifs; une assez bonne discussion destinée à prouver l'origine centrale de l'attention; des remarques justes sur les oscillations de l'attention et leur utilité. Mais le pro- blème général que cette première partie veut résoudre n’est pas nettement posé. Il s’agit de donner une expli- cation physiologique de l'attention. M. Nayrac expose la théorie « motrice » de Ribot, la théorie « sensorielle » de Bastian et Marillier, la théorie « de simplification » de James et Richet : et il choisit cette dernière. Elle n'exclut pourtant pas les deux autres, car elle n’est pas destinée à répondre aux mêmes questions. Ribot et Marillier se demandaient quel est l'antécédent régulier du phénomène d'attention ; James et Richet, quel est le genre dont il est une espèce. M. Nayrac paraît con- fondre les deux problèmes; il croit donner une expli- cation physiologique de l'attention quand, renonçant à découvrir ses conditions spécifiques, il l’a assimilée au plus général des phénomènes physiologiques, à leffort un Le chapitre consacré à la psychologie de l'attention ne contient pas, comme le précédent, d'expériences personnelles. 11 n’est pas complet : l'auteur ne cite que deux ou trois définitions psychologiques de l'attention, et ce ne sont pas les plus intéressantes; il ne parait pas connaître, par exemple, la curieuse théorie de l’at- tention (— attente) que Groos a proposée dans son livre sur les Jeux des animaux. Enfin, ce chapitre n'est ni très clair nitrès cohérent. D'une part, on nous dit (p- 81) que le libre arbitre n'existe que « dans le cerveau de quelques gens épris d’idéalisme transeendental » (quel sens donne-t-on à ce dernier terme ?); de l’autre, on déclare que l'attention « n’est pas absolument dé- terminée », on cherche « une moyenne » entre déter- minisme et liberté et l’on place l'altention plus près du second terme que du premier (p. 112) }. D'une part, on refuse à l'attention — sans preuve expérimentale — le pouvoir d'augmenter l'intensité des sensations, et d'autre part on lui attribue celui de « créer » des associations d'idées, des souvenirs; ainsi elle ne pour- rait accroître d’un degré la conscience d’un état donné, mais elle pourrait le tirer du néant! Toute cette psy- chologie est inconsistante. L'étude pathologique manque de précision. L'auteur ne décrit pas les troubles particuliers de l'attention, mais, l'attention étant altérée dans toutes les maladies mentales, il les énumère toutes. 11 se borne à les classer d’après la gravité des troubles d'attention qu'elles présentent. Il a le tort de dire que cette clas- sification nous fait assister à la « dissolution » de l'at- tention et qu'on en peut suivre les « étapes » à travers les catégories qu'il distingue. Nulle part, dans son livre, on ne suit un malade depuis le moment où les troubles apparaissent jusqu'à la disparition totale du pouvoir d'attention. L'auteur nous présente des «espèces » dis- tinctes ; il n'a pas le droit d'en tirer des conclusions relatives à | « évolution » et à la « dissolution » de l'attention. L'ouvrage se termine par un chapitre sur la « réédu- cation et l'éducation » de l'attention. Ce chapitre n'ap- prendra rien à quiconque est au courant des méthodes de la psychothérapie contemporaine. En revanche, on pourra regretter que M. Nayrac, avant de prendre à partie la pédagogie moderne, n'ait pas fait plus direc- tement connaissance avec elle : a-t-on le droit, quand on vient d'écrire un chapitre sur les rapports de lat tention sensorielle et de l'attention intellectuelle, de déclarer que « l'enseignement par l'aspect » est nui- sible au développement de l'attention? et n'est-ce pas commettre un singulier contre-sens que de voir dans cette méthode une méthode passive ? PauLz LapPiE, Professeur à la Faculté des Lettres de Bordeaux. LA ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 809 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du ? Septembre 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Jouguet démontre que, dans une masse d’air indéfinie au sein de laquelle détonent successivement deux cartouches du même explosif de grosseur différente, les points où les pres- sions sont les mêmes sont à des distances qui sont entre elles dans le rapport des racines cubiques des charges. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — Mme S. Curie a vérifié que la radio-activité induite se comporte comme une subs- tance pesante qui tombe vers le bas dans les vases qui la contiennent. La présence de vapeur d'eau est nécessaire pour la production du phénomène; l'inten- sité du phénomène semble dépendre de la concentration de l’'émanation. — M. B. Szilard montre que, contrai- rement aux résultats annoncés par M. Lancien, le molybdate d'uranyle ne présente rien de particulier au point de vue de la radio-activité; celle-ci est en rapport avec sa teneur en uranium.— MM. Ed. Sarasin et Th. Tommasina communiquent des courbes qui illustrent le phénomène de dédoublement de la courbe de désactivation produit par l'interposition d'écrans en toile métallique sur le trajet du rayonnement secon- daire de radio-activité induite. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Al. de Poehl montre que la thérapeutique qui combine les effets de la spermine avec ceux de la sérothérapie et des métaux colloïdes, en provoquant le rehaussement de l'alcales- cence du sang et relevant la charge électronégative des leucocytes, assure le mieux la désintoxication et l’immunisation. — M. J. Chatin à observé des phéno- mènes de caryolyse dans les glandes nidoriennes de la Genette du Sénégal. — MM. H. Jumelle et H. Perrier de la Bathie ont constaté la présence da Cyperus tuberosus sur les rochers des rivières aurifères de Madagascar. Cette plante retiendrait l'or flottant dans le réseau de ses rhizomes et racines et contribuerait aussi indirectement à la formation des conglomérats ferrugineux aurifères. — M. L.-C. Tassart à remarqué que tous les gites pétrolifères qui se trouvent dans des terrains relativement récents sont situés dans les zones à séisme maximum ou dans leur voisinage immédiat; c'est, au contraire, rarement le cas pour les gisements pétrolifères des terrains anciens. Séance du 9 Septembre 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Jouguet démontre qu'aux très grandes vitesses la résistance de l'air est proportionnelle au carré de la vitesse. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. F. Ducelliez à étudié les alliages de cobalt et d'élain contenant de 57 à 66 °/, d'étain; il en a retiré Co*Sn* par traitement à HCI, et CoSn en faisant agir HAZO*. — M. L. Henry, par action de l’äcide hypochloreux sur le diméthyl-éthylène symé- trique, a oblenu la monochlorhydrine butylénique bisecondaire, CH*.CHCI.CHOH.CH, Eb. 138°-139°. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. E.-L. Trouessart annonce que le jeune hippopotame de la ménagerie du Muséum est mort à 21 jours d’une myocardite ulcéreuse avec perforation de la paroi ventriculaire, provenant d'une infection par les blessures que sa mère lui avait faites. — M. R. Anthony esl parvenu à faire pondre eu captivité des Turbots et, après éclo- sion des œufs, à pousser l'élevage des jeunes larves Jusqu'après la période critique. — M. M. Mirande à reconnu que les Phanérogames parasites sans chloro- phylle, ou à fonction chlorophyllienne à peu près nulle, ne puisent pas de nitrates au sein de leurs plantes hospitalières; chez les hémiparasites verts, l'absorption des nitrates peut s'effectuer ou être nulle. — M. H. Ricôme a observé que, chez le Bupleurum, l'exposition au soleil favorise la première ramification de l’'ombelle et la rend surabondaute; elle est à peu près sans action sur la ramification de l’ombellule. — M. A. Lacroix à reconnu que le piton du Griounot (Cantal) n'est pas un dôme de consolidation superficielle; le trachyte phonolitique qui le constitue a été mis en place à la facon d'une roche intrusive au milieu de roches plus anciennes, puis il a été décapé par l'érosion. — M. Couyat a étudié le gisement de célestite du Mokattam (Le Caire). Il a observé plusieurs formes différentes de ce minéral, qui sont en rapport avec les conditions de gisement. Les cristaux renferment de nombreuses inclusions. — M. E.-A. Martel a exploré les eaux souterraines, abîimes et canons du pays basque. Séance du 16 Septembre 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Nodon déduit de ses observations à l'Observatoire du Pic du Midi que le Soleil induit une charge électrique positive, d'autant plus élevée que les couches de l'atmosphère traversées par les radiations solaires sont plus sèches. La pleine Lune produit une induction électrique posi- tive analogue à celle du Soleil. — MM. Louis et Jacques Bréguet el Ch. Richet décrivent, sous le nom de gyro- plaue, un appareil d'aviation dont les plans sustenta- teurs, au lieu d’être immobiles, sont animés d’un mou- vement de giration, ce qui permet à l'appareil d’avoir à la fois élévation, sustentation, progression et équi- libre. Cet appareil, du poids de 540 kilogs, a pu se sou- lever et se maintenir dans l'air. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. P. Breteau ct H. Le- roux décrivent une méthode pour le dosage rapide du carbone et de l'hydrogène dans les substances orga- niques, qui combir:+ +: avantages des procédés Morse et Taylor, Carrasco et Plancher, et Dennstedt. — M. C. Gerber à reconnu qu'il existe dans le sue du mûrier de Chine une substance activante sans laquelle la diastase coagulante de ce suc est incapable de déter- miner la prise en masse du lait. Cette substance est notablement affaiblie par chauffage à 100° pendant une demi-heure. 39 SCIENCES NATURELLES. — MM. J. Bergonié, André Broca et G. Ferrié déduisent de leurs recherches, effectuées avec un solénoïde réalisant des fréquences de 400.000 à 410.000 par seconde sous une intensité eflicace de 15 à 20 ampères, que les courants de haute fréquence n'ont aucune action sur la pression arté- rielle. M. A. d’Arsonval fait observer que cette con- clusion est en contradiction avec celles d'autres expérimentateurs. Peut-être les résullats obtenus ici tiennent-ils à la trop grande puissance des appareils employés. — M. P. Vigier à étudié la structure des terminaisons photoréceptrices dans les yeux composés des Muscides. Séance du 23 Septembre 1907. 19 SCIENGFS MATHÉMATIQUES. — M. H. Chrétien à étu- dié photographiquement le spectre de la comète 1907 d. Le spectre propre de la queue se compose de trois groupes de radiations dont les longueurs d'onde moyennes sont : #01,6; 426,7; 452,2. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. L. Guillet déduit de ses études sur les fontes spéciales que les éléments qui entrent en solution dans le fer (Ni, Al, Si) favorisent la S10 formation du graphite, tandis que les éléments qui forment avec la cémentite un carbure double (Mn, Cr) sy opposent. M. L. Henry a reconnu que l'isomé- risalion des éthers haloïdes s’accomplit d'autant plus facilement, quand elle est possible, que l'hydrogène est plus rare au voisinage du chaïnon éther haloïde ou dans le chaîinon lui-même. NATURELLES. — MM. G. Marinesco et J. Minea out constaté que la compression modérée des ganglions sensitifs donne lieu à des arborisations périglomérulaires et à des plexus péricellulaires; au contraire, lécrasement de ces ganglions altère plus ou moins profondément la morphologie de la cellule et paralyse la capacité neuroformative du neurone. — M. Y. Delage est parvenu à réaliser la parthénogénèse des œufs d'Oursins et, d’Astéries dans des solutions presque complètement privées d'oxygène; la parthéno- génèse ne serait donc pas due à une catalyse d’oxy- gène, comme l’a soutenu Loeb. — M. E. Bouvier a observé cel été une extension considérable de la ma- ladie du rouge, qu'il avait signalée l’année dernière sur les sapins du haut Jura. La maladie paraît être due à un champignon radicicole. Si elle s'étend, il faudra substituer progressivement au sapin l’épicéa, qui n'est pas attaqué. — M. L. Martin a étudié les troubles de la mémoire du rythme des marées chez les Convoluta BRoscolfensis placées dans des conditions diverses. — M. J. B. Martin à reconnu qu'avant l'arrivée des glaces de l’époque wurmienne l'Ain avait creusé son lit plus bas qu'il ne lest actuellement. Le lehm ne semble pas être uniquement une formation intergla- claire, même dans la vallée du Rhône, car il se trouve en abondance en relation avec les moraines de l’époque wurmienne. 39 SCIENCES Séance du 30 Septembre 1907. 1° Sciences PHYSIQUES. — MM. Gaïffe et Gunther pré- sentent un transformateur à fuites magnétiques et à résonance secondaire pour la télégraphie sans fil, dans lequel aucune des brusques variations du régime secondaire provoquées par l'éclatement des étincelles ne peut réagir sur le primaire du transformateur. — MM. G. Dreyer et O. Hanssen ont reconnu que la lumière affaiblit Les enzymes, les toxines et les anti- corps, cet affaiblissement étant dû avant tout aux rayons ultra-violets retenus par le verre. La cyclamine et la saponine se dédoublent en sucre sous l’action d’un éclairage fort. — M. $S. Dombrowski a isolé la matière colorante jaune des urines où urochrome; sa compo- sition moyenne est : G 43,09 0/,; H 5,14; Az 11,15; S 5,09; 0 35,53. Elle contient un groupe pyrrolique. La chaleur et HCI la dédoublent avec formation d'un pigment noir. — M. C. Gerber et M! $S. Ledebt ont observé que NaCl à faible dose accélère la coagulation du lait par les présures végétales. A forte dose, il retarde la coagulation du lait cru. 29 SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Laveran et A. Thiroux estiment que l'emploi préventif de l'acide arsénieux contre les frypanosomiases, recommandé par Loeffler et Rühs, ne doit pas être conseillé, son action étant nulle ou trop faible. — M. A. Massaglia a constaté que les trypanosomes recueillis dans la rate se présentent avec les mêmes caractères que ceux qui proviennent d’autres viscères; que la virulence des trypanosomes ne disparaît pas plus vite dans la rate des animaux morts de trypanosomiase que dans le sang de ces animaux; que l'extrait de rate ne détruit pas, in vitro, les trypanosomes; que, chez le chien dératé, l'évolution du surra est la même que chez le chien normal. — M. L. Dufour a rencontré chez les Chicoracées des cotylédons de deux formes : 1° ovales; allongés et très étroits. Gette différence est assez importante pour établir une division dans Ja famille. — M. M. Mirande montre que le pistil des Lauracées est formé, non par un unique carpelle clos, mais par plusieurs carpelles ouverts et généralement par trois, un postérieur et deux latéro-antérieurs. 20 très ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Seul, le premier se continue en style et en stigmate; les deux autres avortent. C ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 1° Octobre 1907. MM. P. Coyne et B. Auché ont préparé un sérum antidysentérique polyvalent, obtenu simultanément avec des bacilles du type Shiga et des bacilles du type Flexner. Employé en injection sous-cutanée chez des enfants atteints de dysenterie bacillaire, ce sérum à produit dans tous les cas une guérison rapide; il constitue donc un véritable agent spécilique. — M. Grimbert lit un mémoire sur la thérapeutique jugée par les chiffres. — M. Piot-Bey donne lecture d'un travail intitulé : Recherches et observations au cours de deux grandes épizooties de peste bovine en Egypte. ? SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 26 Juillet 1907. MM. Sauton et A. Trillat mettent en évidence la présence, non encore signalée, d’aldéhydes dans les fromages : ce sont des produits de fermentation du lactose sous l'influence des levures. Les doses d'al- déhydes les plus fortes sont celles des fromages les plus amers; mais la présence d'aldéhyde seule ne cou fère pas le goût d'amertume. On peut reproduire cette saveur en additionnant les laits normaux d'aldéhyde et d'ammoniaque ou en y provoquant la formation de ces corps par un ensemencement approprié (une levure de lactose et un ferment ammoniacal). La for mation d'une résine aldéhydique semble donc être la cause de l’amertume des laits et des fromages. — M. P. Lebeau a cherché à séparer les produits gazeux résultant de l’action de HCI sur le siliciure de magné-" sium. Outre SiH, il a isolé un composé gazeux liqué-" fiable à — 7°, répondant à la formule SH, mais diffé-" rant par ses propriétés physiques du siliciure de même formule décrit par MM. Moissan et Smiles. Ces diffé- rences s'expliquent par la présence d'un composé liquide à point d’ébullition beaucoup plus élevé, que l’auteur a isolé aussi (Eb. 60°). Ce composé, qui s'en- flamme au contact de l'air en donnant lieu à une forte « détonation, parait communiquer cette propriété au silico-éthane. — M. R. Locquin a appliqué aux clichés. photographiques la méthode d'élimination de lhypo-n sulfite indiquée par M. Granger. Ce procédé, qui à l'inconvénient de laisser dans la gélatine un précipité très fin que n'éliminent pas les lavages ultérieurs, ne présente pas d'avantage sensible sur les méthodes antérieurement utilisées. — M. J. Bougault a obtenu, - par l’action de l'acide hypoiodeux sur la plupart des acides éthyléniques à liaisons £y et à, des lactones iodées qui peuvent servir à la séparation de ces acides de leurs isomères. ; SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 13 Juin 1907 (fin). M'° J. Sollas a reconnu que la détermination des constantes physiques de la chitine constitue une bonne méthode pour identifier ce corps. La densité de lan chitine de diverses sources se rapproche de 4,398, nombre qui représente la densité de la chitine pré- cipitée de sa solution dans un acide fort. L'indice de réfraction varie entre les limites 1,550 et 1,557. Les soies du Lombrie, la peau pupale du Pieris et d’autres Lépidoptères, la radula des Mollusques et la coque de la Sepia, débarrassées de la matière minérale et des substances organiques aisément solubles, ont des den- sités et des indices de réfraction qui se trouvent entre les mêmes limites que la chitine d'origines diverses. — MM. D. A. Welsh et H. G. Chapman ont étudié certains phénomènes d'inactivation et d'inluibition pré- sentés par les antisérums de précipiune. L'inactivation S \ * = ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES et l'inhibition sont des phénomènes séparables, le pre- nier apparaissant sans le dernier dans l'antisérum “d'œuf de poule chauffé à 72° C., ou exposé à une longue dessiccation, le dernier ne devenant appré- “ciable qu'après un chauffage à 75° G. L'inhibition et la solution du précipité par l'antisérum chauffé sont des phénomènes spécifiques inséparables. La capacité “spécifique de dissoudre le précipité, acquise par lanti- “sérum chauffé, est probablement une partie essentielle du mécanisme de l'inhibition spécifique. Certains phé- nomènes des réactions de précipitine, comprenant la précipitation, linactivation, Finhibition et la solution “(les précipités, paraissent être incompatibles avec “l'hypothèse communément acceptée de la théorie d'Ehrlich sur les substances qui prennent part aux “réactions de précipitine. — M. E: W. Macbride pré- “sente ses recherches sur quelques points du dévelop- “pement de l'Opiothrix fragilis. Séance du 21 Juin 1907 (suite). M. A. Mallock étudie la nature du mouvement d'un projectile lancé dans l'air quand la gravité agit sur lui aussi bien que la résistance de l'air. Il arrive à repré- senter ce mouvement par la formule : SECTE 1—c—a), où a=[s= 0 —)] dr a Ë ORNE 2R: — M. G. F. C. Searle cherche à déterminer la force nécessaire pour arrêter une sphère électrisée en mou- vement. I arrive à la conclusion que cette force est donnée par la formule : nd W! . ee 1h où u est la vitesse initiale, W' l'énergie et P' le moment de la sphère. Il s'ensuit que la force K requise pour arrèler une sphère de rayon a avec une charge superficielle uniforme Q est égale à : = Q® fr v—u° y +u F — ( — log se JE 2Ka°\u 2'u? V—ü où y est la vitesse de la lumière. — M. C. A. Parsons présente ses recherches sur le carbone aux hautes températures el pressions. L'auteur à reconnu que les cristaux doux de graphite sont la forme stable du car- bone résultant d'un chauffage aux températures très élevées. Aux hautes températures et pressions, le gra- phite a une tendance à diffuser vers les régions plus froides. Du fer fortement chargé de carbone et chaufté sous une pression de 30 à 50 tonnes à été refroidi à diverses vitesses; l'analyse n'a montré aucun résidu ou tout au plus une faible trace de résidu cristallin. L'auteur conclut que la pression mécanique n'est pas la cause de la formation du diamant dans le fer rapi- dement refroidi. — MM. E. P. Catheart et J. B. Leathes ont étudié la relation entre l'élimination dacide urique et la production de chaleur dans le corps. Ils constatent que l'un des facteurs les plus influents de la production d'acide urique dans le corps et de son apparition dans l'urine est la réaction du corps à la perte de chaleur; une bonne partie de l'acide urique endogène est l'expression chimique de l'intensité de “cette réaction. Cette réaction suppose une forme d'activité distincte des mouvements volontaires des muscles du squelette, car ces mouvements volontaires ont, au contraire, l'effet de diminuer l'élimination de l'acide urique. — M. C. E. Walker poursuit ses recherches sur l'évolution des leucocytes. Al voit l'ori- gine des granules des leucocytes dans la rupture d'un lilament qu'il à rencontré dans plusieurs des cellules de la moelle des os. Il a observé, d'autre part, chez l'Axolotl, que les leucocytes envoient des protrusions de leur noyau, qui, après avoir atteint la périphérie du cytoplasme, rejoignent celles de la cellule voisine. Des bandes de chromatine se forment le long de ces protrusions entre les deux noyaux; puis la chroma- tine d’un des deux noyaux commence à disparaitre, tandis que la membrane nucléaire s’affaisse el dispa- raît. La cellule se résorbe et l’autre reste, pourvue d'une sorte de protubérance en forme de corne. SOCIÈTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE BIRMINGHAM Séance du 14 Mars 1907. M. H. L. Heathcote présente ses recherches sur /a passivation et l'activation du fer. I montre quil y à une connexion intime entre les phénomènes obtenus quand des liquides sont employés pour passiver ou activer le fer, d'une part, el ceux qu'on observe avec l'emploi des courants, d'autre part: il en résulle que le phénomène de la passivation est toujours électro- lytique : lorsqu'on n’emploie pas de courant externe, un courant local est engendré d'une partie à l'autre de la surface. L'auteur explique ensuite comment se produit le phénomène de la passivation. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 31 Mai 1907. M. G. M. Berndt présente une Note relative à l'r0- fluence des champs magnétiques sur la résistance des électrolytes. Les déterminations antérieures faites par M. Neesen sur des solutions de chlorure de fer, dans des champs magnétiques relativement faibles, ont donné le résultat suivant : le tube étant disposé per- pendiculairement aux lignes de force, le chap n'exerce pas d'influence dans le cas où il y à diminu- tion de la résistance, en direction parallèle. Ces expé- riences, ainsi que celles de M. Bagard, sont cependant loin d'être concluantes, les résistances ayant été déter- minées avec du courant continu, sans qu'on ail pris soin de maintenir la température constante, ce qui, comme on le sait, est d'une importance capitale dans le cas des électrolytes. L'auteur place donc le vase à résistance dans un petit tube de Cavendish renfermant de l'éther bouillant, ce qui lui permet de maintenir la température suffisamment constante, pendantdes inter- valles courts, pour réaliser une précision de 1/250 ou de 14/2500 v/, dans l'ajustement du pont de Wheatstone. M. Berndt se sert dans ses mesures de courants alter- natifs et d'un téléphone très sensible. Le champ était donné par un électro-aimant en fer à cheval à pièces polaires carrées; le vase renfermant l'éleclrolyte était placé perpendiculairement au flux de force. L'auteur constate que l'influence du champ magnétique est infé- rieure à 1/250 °/,, et dans le cas du bismuth à 41/25 Ce résultat négatif s'explique par l'hypo- thèse que l'influence des champs magnétiques sur la résistance est due aux conversions moléculaires. L'au- teur se propose de continuer ses recherches avec des vases à résistance placés axialement. — Le mêmeauteur indique la construction d'un galvanomètre à fil ehaulie très sensible, se prêtant aux mesures de courants à haute fréquence; cet instrument est évidemment indé- pendant de la période du courant. Dans un tube de verre à section elliptique, on scelle deux lils de platine d'environ un 1/2 millimètre de diamètre, auxquels le fil à chauffer (de 16 centimètres de longueur) sera soudé. Le poids de charge du fil consiste en deux petits cylindres en cuivre reliés par un fil de cuivre de 1/2 mil- limètre de diamètre. Le cylindre supérieur, qui est percé, se déplace à faible frottement le long du fil à chauffer: l'inférieur, qui contient une fente, porte un disque d'aluminium ou de cuivre d'à peu près 1/2 mil- limètre d'épaisseur sur 10 milhmètres de côté, Ce disque se projette entre les pôles, distants de 2 millimètres, d'un petit aimant en fer à cheval permanent, attaché à une plaque de laiton. Deux raccords, dont l'un com- munique avec la machine pneumatique el l'autre avec un tube plus large renfermant laimant, sont soudés o /0- 812 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES perpendieulairement au tube à section elliptique. On observe la déviation du fil chauffé au point d'attache du cylindre supérieur. Cet instrument, dont la cons- truction a été confiée à la maison Siemens et Halske, se prête également à l'indication automatique des vides, en observant les déviations à courant constant. — M. W. Felgentraeger a imaginé une méthode simple pour déterminer les défauts périodiques des vis micro- métriques. Les défauts des vis de micromètre se com- posent, comme on le sait, de défauts « progressifs » et « périodiques ». Tant qu'on se borne à un nombre réduit de tours, ces derniers seuls importent. Ceci est vrai surtout dans le cas des micromètres entrant dans la construction des oculaires de lunettes et microscopes. Le procédé indiqué par Bessel pour déterminer les défauts périodiques consiste à mesurer à plusieurs reprises un intervalle donné au moyen de la vis micrométrique, en déplaçant cet intervalle, entre chaque deux déterminations, d'une partie aliquote d’un tour de vis. La méthode, plus simple et plus commode, indiquée par l'auteur est basée sur la mesure d’une échelle aux divisions convenables, dontles défauts sont suffisamment connus. L'on pointe sur une vis, mue à travers le repaire, un microscope auxiliaire à micro- mètre oculaire et l’on détermine au moyen de la vis la distance des différentes divisions de l'échelle oculaire. Cette opération permet de ne point toucher au reste de l'appareil; d'autre part, la rotation de la vis se fait dans un sens toujours le mème. Séance du 28 Juin 1907. M. F. C. Blake vient d'étudier l'influence exercée sur la résistance du bismuth et du nickel par la tem- pérature el une aimantation transversale. Le Mémoire qu'il présente à la Société se propose essentiellement de déterminer la résistance, comme fonction des deux variables : température etintensité du champ, dans une région aussi étendue que possible (—200° à +200°), pour l’aimantation transversale du bismuth diamagné- tique et du nickel ferromagnétique. Ces recherches quantitatives paraissent indispensables pour véritier et développer les théories électroniques, qui, dans ces derniers temps, se sont attaquées à des problèmes connexes. L'auteur se sert d'un dispositif indiqué par MM.du Boiset Wills, combiné à un grand électro-aimant annulaire ; les variations de température, réduites au moyen de disques en corne ou en carton, ont été déterminées à l’aide d'une spirale bifilaire en platine. Les intensités des champs ont été mesurées, suivant une méthode bien connue, avec une petite bobine- étalon et un galvanomètre balistique. Dans le cas du bismuth électrolytique, les isothermes, qui sont du type bien connu, finissent par s'élever à faible cour- bure avec le champ; au sein de l'air liquide, la résis- tance s’est trouvée être à peu près le centuple de la valeur correspondant, à température égale, à un champ nul. Les courbes iso-pédiques montrent, en général, l'allure décrite par M. Henderson; la courbe ordinaire des résistances concorde assez bien, en dehors du champ magnétique, avec celles d’autres expérimenta- teurs. Il semble que, dans les champs de faible inten- sité, il se produise des maxima, à des températures inférieures à celles de l'air liquide. Les courbes d’ai- mantation du nickel pur sont d’abord du type bien connu, s'approchant d'une droite passant à travers l’origine des coordonnnées et d'une asymptote paral- lèle à l'axe des abscisses. L'auteur constate une réduc- tion absolue maxima de la résistance, qui augmente pour des températures croissantes; c'est-à-dire que l'allure du nickel est inverse de celle du bismuth. — M. R. Pohl présente une remarque relative à Ja for- ination des bulles gazeuses dans les parois des tubes à décharge ehauflés, I y à quelque temps, M. Campbell Swinton présentait à la Société Royale de Londres um Mémoire relatif à l'occlusion de résidus gazeux dans les parois des tubes à vide : de vieux tubes à vide qui, après avoir servi en 1898 à différents emplois & après avoir été abandonnés à l'air libre, furent chauffés dans une flamme, montra'ent sous le microscope d'in nombrables bulles gazeuses. M. Swinton en tirait conclusion que les particules gazeuses auraient été lancées dans le corps du verre jusqu'à la profondeur de Owm,12. M. Swinton constatait, de plus, que ces bulles renfermaient de l'hydrogène électrolytique, le= quel serait {toujours présent dans les tubes à vide. Une expérience faite avec de l'hélium lui montrait, enfin que, dans la formation des bulles et dans l’occlusion du gaz, il ne s’agit point d'influences chimiques, le gaz étant forcé à l’intérieur du verre par une action pure= ment mécanique. Or, l’auteur, en opposition à la ma= nière de voir de M. Swinton, maintient que la formation des bulles gazeuses dans les parois des tubes à dé- charges chauffés, est liée à la présence d'aluminium pulvérisé par projection. En enlevant les dernières traces du métal au moyen d'une substance caustique, on fait, en effet, disparaitre ce phénomène, tandis qu'on le provoque artificiellement en appliquant sur le verre de l’écume d'aluminium. Quant au contenu des: bulles, on ne saurait rien affirmer de précis d'après les expériences basées sur l'écrasement du verre rempli de bulles, l'hydrogène étant dégagé par un verre quelconque, alors que la présence de l'hélium ne se constate dans le gaz dégagé que simultanément avec la présence de l'aluminium. — M. E. Goldstein présente unenotesur lesconnecteurs de tubes à décharge. L'auteur décrit un dispositif très simple de connecteur automa- tique, sur lequel est basée la construction de son bane à décharge. —M. H. Diesselhorst adresse un Mémoire sur l'analyse des oscillations électriques au moyen de l'oseillographe à effluves. L'auteur à été en mesure de décomposer avec une netteté suffisante une oscillation. de 4% mètres de longueur, c'est-à-dire de 68.000 pé- riodes par seconde, au moyen d'un miroir concave d'environ 10 centimètres de diamètre et 15 centimètres de foyer, tournant à la vitesse de 11# tours par se- conde. Dans le cas d'une oscillation relativement lente, — 11.000 périodes par seconde, — enregistrée avec une vitesse identique du miroir (chaque période correspondant sur la plaque photographique à une. longueur de 27 millimètres), l’auteur constate une allure parfaitement régulière et approximativement sinusoïdale de la courbe dans jes limites d'une période. IL est intéressant de remarquer la différence entre les décharges de bouteilles directes, graduellement amor- ties dans un éclateur, et les oscillations que celles-ci induisent dans les circuits accordés, dont l'amplitude, d'accord avec la théorie, s'accroît d'abord lentement, pour ensuite décroitre petit à petit. L'influence de l'amortissement s'observe sans peine. Dans le cas d'un. accouplement très fort, il se produit, suivant la théorie de M. Bjerknes, deux oscillations pouvant donner lieu à dessuspensions; l'énergie oscillant entre les deux cir- cuits produit, en effet, un accroissement et une décrois- sance périodiques de l'amplitude dans chacun de ces derniers. Les maxima d'amplitude dans le cireuit primaire correspondent à un minimum du circuit se condaire, et inversement. Les enregistrements photo- graphiques de ces phénomènes, obtenus par l’auteur, sont assez intenses pour se prêter à la projection de-n vant un auditoire nombreux. : 4 ALFRED GRADENWITZ. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 18° ANNÉE N° 20 30 OCTOBRE 1907 Revue générale Dés Scienc pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Astronomie Cadran solaire portatif. — Autrefois, les ca- drans solaires étaient fort répandus, ainsi qu'en té- moignent les nombreuses traces de gnomons que l'on rencontre encore sur les murs de la plupart des anciens châteaux et des vieilles églises. Aujourd'hui, il ne vient à l'idée de personne de consulter un cadran solaire our régler sa montre et la mettre à l'heure du chemin de fer, et l'on ne regarde plus ces appareils que comme de simples motifs d'ornementation. La raison de cette défaveur est que jadis, en effet, l'heure universellement adoptée était l'heure vraie, celle que marquent immédiatement les cadrans solaires, tandis que l'heure moyenne adoptée actuellement dif- fère de l'heure vraie d'une quantité variable, chaque jour, et que l’on appelle l'équation du temps. Cependant, il y avait lieu de se demander si l’on ne pourrait pas recourir encore au Soleil, avec un cadran solaire por- tatif et universel, car on est obligé, du moins, de recon- naître à cet instrument une précision, et surtout une régularité d'informations, supérieures à celles d’une montre ordinaire : c'est ce qu'a fait le vicomte d'Au- relle-Montmorin!, qui a su réaliser un appareil simple, élégant et précis. L'appareil se compose essentiellement d'un cadran équatorial, auquel on donne chaque jour un petit dépla- cement angulaire destiné à corriger l'heure vraie, marquée naturellement par ce cadran, à la fois de l'équation du temps et de la longitude locale : on exé- cute ainsi, d'une facon mécanique et sans calcul, la double correction nécessaire pour passer de l'heure vraie à l'heure légale. Nous n’entrerons pas ici dans de plus amples détails de construction; mais cet instru- ment, simple et facile à transporter partout, fournit une solution pratique du problème, et donne une approxi- mation {rès satisfaisante. $ 2. — Météorologie Proiet d'organisation d'un réseau météo- rologique mondial. — Le Comité météorologique { Bull. de la Société astronomique de France, 1907, p. 361. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. international, dans la réunion qu'il à tenue au milieu de septembre, à Paris, à discuté une proposition de M. L. Teisserenc de Bort, relative à l’organisation d'un réseau météorologique télégraphique, composé d’un petit nombre de stations réparties aussi uniformément que possible dans les diverses régions du globe, de façon à pouvoir suivre quotidiennement les variations des éléments météorologiques et plus particulièrement celles de la chaleur solaire qui arrive au sol. L'auteur de la proposition, après avoir montré les avantages que l’on pourrait attendre d'une organisation qui mettrait sous nos yeux, chaque jour, les principales données de la Physique du globe observées dans les ré- gions équatoriales, tempérées et voisines des pôles, a indiqué les moyens pratiques qui permettraient d'ar- river à ce résultat en limitant les efforts au strict néces- saire, Puisqu'il s'agit seulement de phénomènes tout à fait généraux, il suffit de réunir les observations d’un nombre de stations très limité, pourvu que le choix en soit judicieusement fait. De plus, on pourrait se con- tenter d'avoir chaque jour les données de l'avant-veille. Cette faculté permet de restreindre beaucoup les dé- penses. Autant que possible, il est nécessaire que les stations soient réparties régulièrement en longitude et en lati- tude. É Dans la région équatoriale, il serait probablement suffisant d'avoir quatre ou cinqstations, par exemple une à Singapoore ou à Batavia, une au Congo sur la côte, une à Quito et une dans les îles de l'Australie. Les régions voisines des tropiques pourraient être repré- sentées, au Nord, par une station dans l'Inde, unestation saharienne, une station au Mexique et une station dans l'océan Pacifique. Dans l'hémisphère Sud, une station en Australie, une au Cap, une dans la République Ar- gentine et, si possible, une dans le Pacifique. Les régions tempérées seraient représentées, dans notre hémisphère, par une station sibérienne, une ou deux stations européennes à ajouter à celle que nous avons, deux stations américaines, une station dans le Pacifique et une fau Japon. Dans l'hémisphère Sud, les points d'observation sont évidemment fort rares; pour le moment, on pourrait se contenter d'une station au cap Horn ou dans la Terre-de-Feu, d’une station au sud 20 814 de la Nouvelle-Zélande et d'une station dans l’une des iles, telles que Kerguelen, qui, un jour ou l’autre, seront occupées d'une manière permanente pour la pêche. Les régions polaires proprement dites seraient repré- sentées par des stations groënlandaises, une station dans l'Amérique du Nord vers le 140° degré de longi- tude, une station dans la Sibérie du Nord vers le Pôle de froid. Enfin, il y aurait un intérêt tout particulier à installer une station météorologique au Spitzberg. La présence de nombreuses mines de charbon qui commencent à être régulièrement exploitées rend très facile le chauf- fage de la station pendant la mauvaise saison. La dis- tance entre le Spitzhberg et la côte de la péninsule scandinave permet la communication par télégraphe sans fil. Dans l'hémisphère Sud, on peut espérer voir établir aussi quelques stations scientifiques, mais les moyens de transmission des observations manquent encore. Chacune de ces stations enverrait quotidiennement la dépèche météorologique au pays dont elle ressort ou à l’un des centres météorologiques européens. Ce dernier communiquerait par lettres les résultats des observations aux autres Instituts de Météorologie d'Eu- rope. Les frais qu'entraine le fonctionnement dence réseau seraient ainsi limités. Les éléments météorologiques les plus importants à observer et à transmettre paraissent être l'intensité de la radiation solaire observée à diverses hauteurs fixes au-dessus de l'horizon, la pression barométrique et la température, la nébulosité, la direction des courants supérieurs, la direction de l'intensité du vent, la pluie et peut-être les éléments magnétiques, s'il est possible de résumer suffisamment l'état magnétique dans une dépêche. Îl y a sans doute des difficultés matérielles assez importantes pour l'organisation de ce réseau, dont plusieurs stations, d’ailleurs, n'existent pas encore. La proposition a néanmoins reçu un très chaleureux accueil de la part du Comité international. On a fait remarquer, à ce propos, que c'était le premier pas vers l'étude d'ensemble des phénomènes du globe qui s'im- posera à nous tôt ou tard. Le Comité a nommé une Commission spéciale, qui sera présidée par M. Teisserenc de Bort et qui aura pour mission de préparer la réalisation de cette pro- position. $ 3. — Physique La quatrième Conférence internationale des Poids et Mesures. — La Convention interna tionale du Mètre, signée à Paris le 20 mai 1875, et qui est la charte de fondation du Bureau international des Poids et Mesures, institue en même temps une Confé- rence générale, qui est l'émanation directe des Gou- vernements signataires de la Convention, pour toutes les questions relatives au Service international des Poids et Mesures. Comme telle, la Conférence, qui se réunit tous les six ans, constitue l'autorité supérieure du Bureau international. Elle élit en cette qualité le Comité permanent chargé de la surveillance du Bureau international, reçoit son rapport de gestion, définit les droits et devoirs des Etats signataires à l'égard de la Convention, et s'oc- cupe de toutes les questions relatives au perfectionne- ment du système métrique et à son expansion. La Conférence s'est réunie jusqu'ici trois fois seule- ment, en 1889, 1895 et 1904. Elle a tenu cette année sa quatrième session, sous la présidence de M. Henri Becquerel, vice-président de l’Académie des Sciences, remplaçant le président, M. Chauveau. La séance d’ou- verture, qui a eu lieu le 15 octobre, a été présidée par M. Pichon, Ministre des Affaires Etrangères. À cette occasion, de remarquables discours ont été prononcés par MM. Pichon, Fœærster, président du Comité, H. Becquerel et Lardy, ministre de Suisse. Chacune des conférences a marqué une étape dans CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE le progrès du système métrique. Celle de 1889 a sanc- tionné les nouveaux prototypes métriques et réalisé ainsi l'unification mondiale du système; elle a adopté également l'échelle normale des températures, fournie par la variation de pression de l'hydrogène, et préparé ainsi une importante simplification de toute la ther- mométrie. La Conférence de 1895 a sanctionné une deuxième série de prototypes, destinés à des Etats dont les demandes étaient arrivées tardivement; elle a pris con= naissance de la détermination du rapport du Yard au Mètre, et de celle des longueurs d'onde fondamentales qui constituent le témoin précis des étalons de lon. ueur. En 1901, la Conférence eut à s'occuper d’une pre- mière vérification des kilogrammes nationaux, de l'étude des subdivisions du Mètre, de la masse du déci- mètre cube d'eau et de l'unification des pas de vis, du numérotage des filés et de la division décimale du cercle; enfin, elle prit connaissance des premiers tra= vaux du Bureau relatifs à la mesure des bases géodé- siques. La Conférence qui vient de se clore a été exception- nellement intéressante. Dans l'ordre technique, elle a pris connaissance de l'achèvement des travaux relatifs à la masse du décimètre cube d’eau et à une nouvelle détermination des longueurs d'onde fonda- mentales; elle a constaté les progrès considérables réalisés dans la mesure des bases géodésiques, à laquelle les travaux du Bureau international ont donné unessorinespéré. Sur ces diverses questions, MM. Benoit et Guillaume ont présenté à la Conférence des Rap-. ports très documentés sur lesquels nous reviendrons. Dans l'ordre administratif, elles s’est occupée de la question de l'accession des Colonies à la Convention du Mètre, rendue très actuelle par l'entrée du Canada, représenté pour la première fois à la Conférence; elle a pris connaissance des lois nouvelles et de la sta- tistique métrique, et discuté l’unification métrique du carat, les cotes des filetages, la mesure des forces, etc. Parmi les lois ou décrets promulgués depuis la dernière Conférence, on peut mentionner en premier lieu celle du Danemark, resté jusqu'ici étranger au système métrique, et qui vient de l’adopter au titre facultatif, en prévoyant, après un laps de temps de trois ans, l'usage obligatoire; les décrets imposant l'emploi du système métrique dans tout le service hospitalier des Etats- Unis et dans tous les services médicaux de l'Armée russe : le décret instituant la vérification des unités métriques dans le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande: la loi de la Nouvelle-Zélande autorisant le Gouverneur à déclarer obligatoire le système métrique; la statistique japonaise montrant que les séries de poids métriques vérifiées par les bureaux sont douze fois plus abondantes que celles de l'ancien système japonais, etc. Ce programme, joint au nombre considérable de cer- lificats issus du Bureau international de la Conférence, témoigne à la fois du travail intense du Bureau et de la rapide expansion du système métrique, dont il est chargé de conserver les étalons, et qu'il a la mission de perfectionner sans cesse. $ 4. — Électricité industrielle Analyse des pertes éprouvées dans la conversion de l'énergie calorique du char- bon en électricité. — Le Technical Year Book de 1907 reproduit l'intéressant tableau qui suit, dû à l'ingénieur américain Henry G. Stott, d'après le Mé- moire présenté à l'American Institute of Electrical Engineers. Il est relatif au rendement obtenu dans la transformation de l'énergie calorifique du charbon M en électricité par l'intermédiaire de la machine à vapeur. 4 Nous avons indiqué les pertes en pour cent, les rap= è portant à la valeur 100 prise pour énergie du charbon. # CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE ÉNERGIE ÉNERGIE récupérée perdue % % . Energie calorifique d'une livre de — — charbon . . . : 100,0 » 2. Energie calorifique perdue dans les cendres. . . s » 2,4 3. Energie perdue dans la cheminée . » 22,1 4. Energie perdue par rayonnement des chaudières et par les fuites . » S,0 5. Energie récupérée par le réchauffeur d’eau d'alimentation ÉDOT G 20 3,1 » 6. Energie RÉCUPÈRE par l'économi- SOU Re ë sl 6,8 » Energie perdue par rayonnement : 7. © Dans les tuyauteries. . - - » 0,2 $. Dans les pompes de cire ulation. » 1,6 9, pe les pompes d'alimentation. » 1,4 «10. Dans les fuites et purges . . . . » 151 Energie perdue : 14. Dans les auxiliaires. . . . . . . » 0,4 12. Par réchauffage des machines. . » 0,2 43. Par pertes de frottement des HUGUES es ET » 0,8 1%. Par pertes élec tiques. GA © » 0,3 15. Par perte de rayonnement ‘dans lestrmachines Ve MAEN. NUS » 0,2 16. Rejetée au condenseur : . . . « » 60,1 17. Dans les auxiliaires étrangers au service même des machines. . » 0,2 109,9 99,6 Energie résultante : 100 + 9,9 — 99,6 — 10,5, soit un peu plus de 10 %. Telle est l'énergie distribuée sous forme de courant électrique aux barres omnibus d’une installation élec- trique à vapeur. Le même principe d° analyse que celui qui vient d'être appliqué à la machine à vapeur peut l'être au moteur à gaz pauvre, avec les résultats suivants : Energie perdue : 1. Dans le gazogène et les auxiliaires . . 20,0 % 2. Dans l'eau de refroidissement. . , . 19,0 3. Dans les gaz d'échappement. . . . . . 30,0 4. Par le frottement des machines, . . . 6,5 5. Dans les dynamos. . Cici-bi oo 0,5 Motaltdes pertes mu 16,0 % Energie converlie en énergie électrique : 100 — 76 = 24 %. $ 5. — Physiologie La survie des têtes de poissons. — De récentes recherches physiologiques ont fait voir que l'extinction de la vie est un processus non pas instantané, mais gra- duel, qui affecte les uns après les autres les différents organes du corps et qui peut même être retardé par voie arlificielle, en rendant à certains organes une vie temporaire, même dans le cas où, en apparence, la mort est déjà survenue. Les poissons ayant une vitalité particulièrement tenace, il était intéressant d'étudier ces phénomènes sur celte classe d'animaux. M. A. Kouliabko, professeur à l'Université de Tomsk, en Sibérie, vient de commu- niquer, au récent Congrès de Physiologie de He idelberg, les résultats de ses investigations au sujet de la survie des tètes de poissons. A l'occasion de ses recherches antérieures sur la résurrection du cœur, M. Kouliabko avait examiné les phénomènes présentés par les cœurs de poisson isolés, en particulier par les cœurs de lamproie. En raison, cependant, de la cessation rapide de l'activité des cœurs isolés dans lesquels on ne maintient pas de ES artificielle (ce qui, dans des organes si exigus, est peu près impossible), l’auteur a eu l'idée de RE aer ses expériences sur la portion antérieure du poisson sans en détacher le cœur. Une circulation artificielle, suivant la voie analo- mique normale du sang, a été établie dans la tête et le thorax du poisson au moyen de la solution nutritive de Ringer-Locke, saturée d'oxygène. 815 Pour introduire la canule, M. Kouliabko s'est servi des ouvertures des veines cardinales ou hépatiques dans la section transversale du corps; dans certains cas, il a introduit sa pointe immédiatement dans l'auricule du cœur. Ce procédé est d'une simplicité remarquable et bien plus grande que la méthode de circulation artificielle dans le cas des grenouilles. Dans les têtes de poissons préparées par M.Kouliabko, le cœur, avec tous ses compartiments el vaisseaux, est parfaitement dégagé, de même que le foie et les veines hépatiques conduisant vers le cœur. On peut même ouvrir le crâne de ces têtes, afin de dégager le cerveau et d'irriter ou d’extirper les différentes parties de ce dernier. Les deux tronçons du poisson exécutent de vifs mou- vements convulsifs diminuant, peu à peu, pour cesser tout à fait au bout de deux à trois minutes après la section de l'animal. Sur la portion antérieure, les mou- vements respiratoires dyspnéiques de la cage branchiale persistent encore plus longtemps, mais bientôt cessent aussi. Le cœur continue, en général, à battre, quoique faiblement. Les phénomènes décrits ci-après se pro- duisent cependant même dans le cas où l’activité spon- tanée du cœur aurait cessé tout à fait, Aussitôt que la circulation artificielle a été établie dans la tête du poisson, tous les organes du troncon antérieur se remettent à fonctionner d’une facon sen- siblement normale, bien que le poisson soit placé non pas dans l’eau, son milieu habituel, mais dans Pair et bien que ses vaisseaux soient parcourus par un sérum artificiel remplaçant le sang. Cette activité artificielle peut être maintenue pendant des heures et ne cesse que graduellement : l'activité des centres nerveux disparaît la première, tandis que celle du cœur persiste quelquefois pendant des Journées. Des leviers enregistreurs, attachés au ventricule et à l'opercule branchial respectivement, tracent sur du papier enfumé les courbes caractéristiques de la revi- vilication produite par cette méthode. Si, après avoir rétabli, par la circulation artificielle, des mouvements respiratoires parfaitement réguliers, on interrompt l'arrivée des A on voit apparaitre de nouveau les mouvements respiratoires dyspnéiques et les con- vulsions, ainsi que le ralentissement et l'irrégularité des pulsations cardiaques. Ces phénomènes sont repré- sentés d’une facon très frappante par les courbes obte- nues par M. Kouliabko. Dans le cas d'une interruption prolongée de la circulation, on obtient quelquefois d'intéressantes courbes respiratoires ressemblant aux courbes cardiaques de Luciani, où chaque groupe de mouvements respiratoires correspond à un bref inter- valle de l'activité du cœur. L'acide carbonique produit une vive respiration temporaire, suivie par l'arrêt com- plet de celte dernière. La réaction rapide des centres nerveux vis-à-vis de l'arrêt de la circulation, ainsi que le peu de durée de l'intervalle après lequel la restitution peutencore réus- sir, font voir que, pre l'organisation relativement primitive des poissons, leur système nerveux central ne saurait se passer d'un apport continuel d'oxygène et de l'élimination des produits du métabolisme. Les différentes parties du cerveau, et d’une façon générale tous les centres nerveux, RIéenIent de grandes inéga- lités quant à leur vitalité et à la possibilité d'être res- taurés par la circulation artificielle; les centres corti- caux perdent cette propriété beaucoup plus rapidement que ceux de la moelle. Les représentants des divers ordres de poissons présentent, non seulement une vita- lité différente, mais aussi un ordre différent quant au processus de la mort des divers centres lors de l'arrêt de la circulation. Les symptômes dyspnéiques, assez vifs, font voir que le centre respiratoire des poissons est susceptib ile d'être excité immédiatement par la composition du milieu ambiant, ce qui contredit l'hypothèse suivant laquelle ce centre aurait une fonction purement réflexe. De ces expériences, M. Kouliabko tire la conclusion S16 que les conditions anatomiques des poissons sont par= culièrement favorables à l'établissement de la circula- tion artificielle, laquelle nous permet d'exécuter sur ces animaux, ou sur leurs têtes isolées, de nombreuses expériences physiologiques sans plonger le poisson dans l’eau, son milieu vital naturel. $ 6. — Géographie et Colonisation L'expédition du D' Stein dans l'Asie Cen- trale. — Le D' M. A. Stein poursuit avec succès sa mission officielle d'exploration archéologique et géo- graphique dans l'Asie Centrale. De Keriya, où il se trouvait en octobre 1906, il s'avanca de 1.290 milles vers l’est et atteignit la région du Lob-Nor, d’où il a écrit des lettres qui donnent d'intéressants détails sur les résultats de ses recherches. Le Dr Stein fit d'abord des fouilles dans le désert du Nord de Niva, à un endroit où il avait découvert en 4901 les restes d’une colonie abandonnée dans la seconde moitié du me siècle. Il fouilla une trentaine d'habitations et mit ainsi à jour un grand nombre d'outils, d'ustensiles et d'objets .de ménage. Les nom- breuses reliques de l'art mdustriel de l'époque et des ouvrages d'architecture en bois attestent clairement combien l’art gréco-bouddhique avait été prédominant dans la région de l'Indus. L’explorateur a trouvé en abondance des documents écrits sur des tablettes de bois, en écriture « kharoshthi », particulière à l’ex- trème nord-ouest de l'Inde, et dans un dialecte hindou primitif mélangé de sanscrit. Ces documents consistent en lettres officielles et privées, actes, comptes, etc. Des sceaux en argile, dont les figures sont d'un style tout à fait gréco-romain, ont été rencontrés à côté de sceaux chinois, ce qui témoigne de l'échange qui se faisait jadis entre les civilisations de l'Occident et de l'Extrême-Orient. La traversée du désert entre la rivière Niya et Char- chan à permis au D' Stein de résoudre un problème relatif à l'ancienneté de cette localité. La colonie remonte certainement à la fin du me siècle, comme le démontrent des tablettes de bois écrites en kharoshthi. Un pèlerin bouddhiste chinois avait trouvé l’oasis occupée, en 519, par une centaine de familles seule- ment. Hsuan-tsang, le grand pèlerin chinois, qui passa par là environ cent vingt-cinq ans plus tard, y vit les murs d'une ancienne ville abandonnée et inhabitée. Puis, aprèsle rétablissement de lomnipotence chinoise, Charchan fut de nouveau mentionnée comme une localité importante. La description que Marco Polo donne de la province de Charchan, reconnue exacte sur beaucoup d'autres points, fait mention de villes et de villages nombreux. Toutefois, vers la fin du xs siècle, toute culture avait disparu. La ville fut plus tard occupée de nouveau par les Chinois, qui y établirent, il y a environ quatre-vingts ans, une petite station pénitentiaire; depuis ce temps, l’oasis a repris une importance croissante. Cet exemple montre par quelles péripéties ont passé, à des époques diverses, ces colonies isolées, sises le long de la lisière méridio- nale du désert du Turkestan. Le Dr Stein partit pour le Lob-Nor, le 6 décembre, avec une forte équipe d'ouvriers et des vivres pour un mois. Il suivit, mais en sens inverse, l'ilinéraire par- couru, en 1900, par le D' Sven Hedin. L'aspect phy- sique de la région traversée s'était sensiblement modifié. Les grandes lagunes que formaient les eaux du Tarim dans la direction du nord s'étaient presque totalement desséchées. L'eau des rares marécages qui s'étaient maintenus dans la dépression était mainte- nant tellement saturée de sel que, malgré le froid excessif, elle ne s'était pas congelée. Dans le désert, à des endroits dénudés par le vent, on trouva des silex travaillés et d’autres ustensiles de l'âge de la pierre, ainsi que des fragments de poterie grossière. Ces vestiges de l’ancienne occupation humaine étaient nombreux le long de la route, bien CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE que tout le terrain fût une partie du lit d’un ancien lac. Lés premiers vestiges des temps historiques, consistant en monnaies chinoises des premiers siècles de notre ère, furent trouvés à dix milles au sud de ce site. Le 17 décembre, le Dr Stein établit son camp au pied des ruines d'une stupa. Des fouilles très fruc- tueuses furent pratiquées pendant onze jours dans les divers groupes de ruines. Le vent avait causé de grands ravages parmi les habitations construites en bois et en plâtre, mais beaucoup d’entre elles devaient leur conservation au sable qui les avait recouvertes. Le D' Stein a trouvé, à une centaine de pieds de profon- deur, un nombre assez considérable de documents écrits sur bois et sur papier, la plupart en chinois, mais beaucoup aussi en kharoshthi. Il en résulte que le même idiome hindou primitif était usité dans la région de Niva et dans celle du Lob-Nor, aussi bien dans les affaires administratives que dans les relations privées. Si l’on considère la grande distance qui sépare le Lob-Nor de Khotan, cette extension uniforme d'un même idiome hindou jusqu'à la partie orientale extrême du bassin du Tarim est importante à noter. Il en est de même de la concordance entre les procédés et les formes de construction, de la ressemblance des ornements architecturaux en bois et des objets d’art industriel dans les deux zones. On peut en déduire avec une évidence suffisante, malgré l'absence de documents chinois datés, que les ruines du Lob-Nor ont été abandonnées vers la même époque, c'est-à-dire environ à la fin du m° siècle. Ayant terminé, le 29 décembre, l'exploration des ruines, le D" Stein renvoya une partie de son personnel à Abdal avec les pièces archéologiques qu'il avait recueillies et il se mit en route, avec quelques hommes seulement, dans la direction du Sud-Ouest, à travers la partie inexplorée du désert. Il atteignit sain et sauf le Tarim, après sept jours d’une marche que rendait plus difficile qu'à l'aller la hauteur croissante des coliines de sable apporté par le vent. Après avoir levé le plan de quelques régions archéo- logiques intéressantes le long du Tarim inférieur et de la rivière de Charchan, le D' Stein reprit ses fouilles à Miran. Il y trouva des restes de sanctuaires boud- dhistes qui avaient dù être déjà ruinés quatre ou cinq siècles avant l'occupation tibétaine. Dans l’un d'eux, on découvrit d'énormes reliefs en stuc qui présentaient. une analogie frappante avec l'architecture gréco-boud- dhique des premiers siècles de notre ère. L'influence de l'art classique se révèle surtout dans de belles fresques qui représentent des scènes de la légende bouddhique. Elles offrent tellement les caractères de l'art occidental que l'on s’attendrait plutôt à les ren- contrer sur les murs d'une villa romaine que dans des sanctuaires bouddhistes, aux confins de la Chine. Les inscriptions en kharoshthi peintes sur le côté des fresques, ainsi que des pièces de soie portant des légendes dans la même écriture, indiquent le in siècle comme l'époque approximative à laquelle ces sanc- tuaires furent abandonnés. Les fouilles et les autres travaux furent faits dans des conditions rendues très pénibles par un froid intense et par la fréquence d’un vent glacial venu des montagnes. i Gustave Regelsperger. $ 7. — Enseignement Un Congrès d’Étudiants à Bordeaux. — Un Congrès d'Etudiants vient de se tenir à l'Exposition maritime de Bordeaux. Les Congressistes ont adopté plusieurs vœux, parmi lesquels : la réduction du nombre des Facultés de province, qui devraient ètre spéciali- sées:; la création d'Agrégations déterminées; la trans— formation de l'Ecole Normale en Institut pédagogique autonome et obligatoire pour tous les futurs agrégés; la suppression des Rhétoriques supérieures; l'extension des droits attachés au Certificat de Physique expéri- mentale. 1 £ ‘ A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE 817 DE LA PRESSE À BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE, ESQUISSE DE L’HISTOIRE TECHNIQUE ET SOCIALE DE L'IMPRIMERIE. PREMIÈRE PARTIE : LES PRESSES A IMPRIMER Il n'est pas un sujet dont la littérature soit fournie, vaste et documentée à l'égal de la typo- graphie. Qu'on envisage cette invention au point de vue historique ou qu'on la considère au point de vue technique, on trouve une énorme quantité d'ouvrages, d'articles, de traités qui en étudient le développement, les transformations, le perfection- nement. Il n'est pas jusqu'au point de vue écono- mique qui, bien qu'ayant tenté plus récemment les auteurs, ne réunisse aujourd'hui même, sur ce sujet, de très importants et très complets travaux. Le choix d'un tel sujet, si vaste et d’ailleurs par certains côtés si connu, comme objet de cette étude, semblera peut-être, dès l'abord, ou bien audacieux ou quelque peu puéril, élant donné qu'aucune raison ne semble me désigner plus particulière- ment pour le traiter. Et cependant je n'ai pas cru inutile de consacrer quelques pages à l'apercu général des transforma- tions de cette invention qui séduisit tellement, à son origine, ceux-là mêmes que son développement devait renverser, que le pouvoir royal ne voulut pas considérer l'imprimerie comme un métier quel- conque et accorda aux premiers typographes les plus hauts privilèges et les plus grandes marques d'estime. Il n'est pas, en effet, je le crois, parmi toutes les inventions qu'enfanta le génie humain, une seule autre qui soit plus puissante, plus admi- rable et, en même temps, plus révolutionnaire. A ce litre, j'ai pensé qu'un coup d'œil rapide jeté sur son évolution pouvait présenter assez d'intérêt pour retenir un instant l'attention. En traçant à très grands traits l’esquisse des perfectionnements qui, partant de la simple presse à bras du génial Gutenberg, aboutissent aux déconcertants auto- mates que sont les linotypes, les monotypes, les rototypes et les électrotypographes, je m'arréterai à considérer l'influence tant économique que so- ciale de ces incessants progrès. I. — HISTORIQUE. C'est vers 1450 que Hans Gensfleisch, dit Guten- berg !, imagina à Mayence la typographie, c'est-à- ‘ Gutenberg, inventeur de l'imprimerie, né et mort à Mayence (1397-1468). dire l'art de reproduire les écrits, à un grand nombre d'exemplaires, au moyen de caractères mobiles, gravés en relief et assemblés. C’est sur- tout dans l'emploi du caractère mobile que réside toute l'importance et la fécondité de l'invention de Gutenberg. La presse qu'il utilisa était déjà em- ployée en xylographie, dans cet art de la gravure sur bois, dont l'origine remonte en Europe au 1° siècle, et en Chine au vi, et dont l'inventeur est resté inconnu. Son nom eût mérité d'être placé à côté de celui de Gutenberg et des deux premiers typographes, Fust et Schæffer, qui, de concert avec Gutenberg, perfectionnèrent son invention, Il semble qu'il n'y ait, en effet, qu'un pas de la xylographie à la typographie. Des caractères fixes étant sculptés sur une planchette en bois, il suffit évidemment de les découper pour obtenir des carac- tères mobiles. Et, cependant, ce pas attendit plu- sieurs siècles. C'est l'éclair de génie, l'histoire, tou- jours neuve, de l'œuf de Colomb, qui se répète à chaque important progrès de l'esprit humain. Gu- tenberg songea à cette séparation des types et, par là, transforma l’art xylographique, qui n’était qu'un faible progrès sur le manuscrit, en cette merveilleuse typographie dont Siéyès disait « qu'elle est une faculté nouvelle ajoutée aux plus belles facultés de l'homme. Par elle, la pensée de l'homme de génie se porte à la fois dans tous les lieux; elle frappe, pour ainsi dire, l'oreille de l'espèce humaine tout entière ‘ ». Aussi Luther, considérant l'époque où cette invention apparut, l’appelle-t-il « la se- conde délivrance de l'homme », et Chénier put-il écrire que « par elle l'esprit humain rompit les fers qui l'avaient enlacé jusqu'alors et, s'élancant dans la carrière, sema sa route de prodiges ». Et, en effet, malgré ses persécuteurs, — et bien que, demeurée libre à peine un siècle et demi, elle subit sous l'Ancien Régime l’étiolante influence de la corporation et, par là, l'étroite réglementation royale, qui brisa pour un temps son magnifique essor, — l'imprimerie, par la proclamation de la liberté, présenta dès 1789 un prodigieux développe- ment, Bien plus, on peut dire que ce puissant levier de ! Srévès : Rapport à l'Assemblée nationale. S18 A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE l'intelligence humaine, — sans contredit la première des inventions modernes, — fut l'artisan même de la liberté et que, par lui, la civilisation se trouve pour toujours à l'abri des entreprises de l'obscu- rantisme. é Dans son immortel chapitre de Notre-Dame de Paris : «Ceci tuera cela», Hugo considère l'inven- tion de l'imprimerie comme le plus grand événe- ment de l'histoire. « C'est la révolution-mère », écrit- il, dans son style métaphorique. « Devant la presse lumineuse de Gutenberg, c'est la chaire et le ma- nuscrit, la parole parlée et la parole écrite, s’alar- mant de la parole imprimée; quelque chose de pareil à la stupeur d'un passereau qui verrait l'ange Légion ouvrir ses six millions d'ailes. » « Sous la forme imprimerie, la pensée est plus impérissable que jamais; elle est volatile, insaisis- sable, indestructible. Elle se mêle à l'air. » IT. — LE TRAVAIL TYPOGRAPHIQUE. Le travail du typographe comprend trois fonc- tions : 1° la composition, qui consiste à juxtaposer des caractères formant le texte à imprimer; 2° la Justification, où répartition d'espaces convenable- ment choisis entre les mots pour obtenir des lignes de longueurs égales; 3° enfin la distribution, qui consiste à replacer les caractères qui ont servi dans les compartiments de la casse. Le compositeur, debout aujourd'hui, assis du temps de Gutenberg, devant sa casse, assemble, en les saisissant par la tête, par l'œil, les lettres dans le composteur. Il les dispose de manière à ce que le corps de la lettre présente toujours du même côté les entailles ou crans dont chaque corps est marqué. Quand la ligne est à peu près remplie, ce qu'indique la dimension donnée à la partie du composteur qui recoit les types (ou justification), on répartit, au moyen d'espaces ou cadrals en nombre convenable, les blancs qui se trouvent entre chaque mot, de manière à ce que les lettres, pressées les unes sur les autres, se maintiennent dans le composteur sans ballottement. Quand le composteur est rempli d'un certain nombre de lignes, on en déverse avec soin le contenu sur la galée, planche à rebords, placée obliquement sur la partie droite du haut de casse. Lorsqu'un cer- tain nombre de lignes ou paquet est composé, on le lie au moyen d'une ficelle, puis on recommence un deuxième paquet. à Un spécialiste, dit metteur en pages, assemble les paquets que composent un certain nombre de paquetiers ; il y dispose les titres, met les folios, leur donne une longueur convenable correspon- dant à une page d'impression. La mise en pages de la feuille étant terminée, les pages sont placées sur un marbre, dans un ordre tel que la feuille de papier, pliée après impression, reproduise les pages dans leur ordre numérique. Les garnitures ou blancs sont ménagés en tête et sur les côtés de ces pages, puis deux cadres en fer, dits chässis, cir- conscrivent chacun la: moitié de la feuille qu'on appelle forme. Des biseaux de bois, fixés entre les pages et les châssis au moyen de coins, assujet- üissent le tout et permettent d'enlever les châssis avec les pages et de les porter à la presse. Au début de l'imprimerie, on ne connaissait pas l'interligne, la composition était compacte, presque sans alinéas, le litre courant contigu à la, page. Il n'y avait pas, d'ailleurs, de metteur en pages; d'une facon générale, la lumière faisait défaut. La presse de Gutenberg, assez semblable à un pressoir, se composait de deux montants en bois parallèles, reliés entre eux par deux sommiers et flanquant une table en bois. Une vis, également en bois, manœuvrée au moyen d’un long manche en bois, faisait descendre en tournant un plateau qui venait faire pression contre la table immobile où l'on avait disposé la forme, Malgré son incommodité évidente, la difficulté de placer la forme convenablement, de disposer le vxelin bien à sa place, d'assurer la mise en marche, c'est cet appareil qui servit aux impressions jus- qu'en 1789, ne subissant à peine, durant tout l'An- cien Régime, que quelques légères transformations de détails. Ce sont ces presses imparfaites qui pro- duisirent de véritables chefs-d'œuvre : les Bibles à quarante-deux lignes et à trente-six lignes de Gu- tenberg, les ouvrages imprimés par les Aldes !, les Froben ? (éditeur d'Érasme), les Josse Bade*, les Estienne *, les Marnef *, les Dolet*, les Plantin”’, 1 Aldes, famille d'imprimeurs italiens. établis à Venise, comprend 4 imprimeurs depuis Théobalde Manuce, dit l'An cien (1449-1515), qui fit graver le premier les caractères dits italiques, jusqu'à Alde Manuce, dit le Jeune (1547-1597). 2 Froben (Jean), célèbre imprimeur, né à Hermelbourg en 1460, mort à Bâle en 1527. Trois de ses descendants ou alliés furent également imprimeurs jusqu'en 1645. , 3 Bade, famille d'imprimeurs dont le chef, Jodocus Badius (1462-1537), s'établit à Lyon, puis à Paris. Il eut pour gendre Robert Estienne. Son fils Conrad (1510-156$) lui succéda et accrut encore la renommée de ses impressions. 4 Estienne, célèbre famille d'imprimeurs parisiens d'ori- gine noble. Compte plus de 10 imprimeurs célèbres, depuis Henri Estienne (1470-1521) jusqu'à Antoine Estienne (1594 1674). F4 a ‘ 5 Enguilbert de Marnef, libraire parisien, fit imprimer des livres par les imprimeurs Bouyer et Bouchet, établis à Poi- tiers, et qui y imprimèrent de 1491 à 1500 dans l'atelier de Saint-Hilaire, abbaye royale où fut établie la première presse poitevine, vraisemblablement dans la demeure de Bertrand de Brossa, chanoine de Saint-Hilaire. 4% e. 6 Dolet (Etienne), savant et imprimeur francais établi à Lvon: né à Orléans en 1509, brûlé vif à Paris en 1546. ‘7 Plantin (Christophe), imprimeur français établi à Anvers, né à Montlouis près de Tours en 1514, mort à Anvers en 1589. A. TURPAIN — DE LA PRESSE À BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE 819 les Elzévir', les Barbou?, les Cramoisy”, les Vitré ‘, et enfin le premier des Didot*. En examinant de près la marque de Judocus Badius (fig. 1), appelé communément Josse Bade, laquelle repré- sente une presse, on peut se convaincre qu'à cette époque, en- tre 1495 et 1537, une sensible amélioration estapportée à la presse de Gutenberg. La ta- ble sur laquelle repose la forme est mobile. A l'aide d'une corde, d'une roue et d'une manivelle, on la fait glisser horizonta- lement en avant. La disposition du vélin sur la forme est rendue plus aisée. Un peu plus tard, en 1550, Danner, impri- meur à Nuremberg, remplace la vis en bois par Sprehi Biccfanu N = Nù Fig. 1. — Marque de Judocus Badius (Josse Bade), mon- trant l'état de la presse à imprimer entre 1495 et 1537. Fig. 2. — La presse en 1783 (d'après une figure de l'Encyclopédie). une vis de cuivre, La table mobile, dénommée 1 Elzévir ou Elzévier, célèbre famille d'imprimeurs établis à Leyde. Le premier, Louis (1540-1617), eut cinq fils qui furent également imprimeurs. Cetle famille ne compte pas moins de 15 éditeurs célèbres. Une branche de la famille s'établit à Amsterdam (1654), d'autres à La Haye et à Utrecht. Le dernier Elzévir fut Daniel (1626-1680). ? Barbou, imprimeurs francais établis à Lyon (Jean Barbou, 1539), puis 3 Limoges et ensuite à Paris (Joseph Barbou, 1704; Gérard Barbou, 1754-1189). % Cramoisy (Sébastien), premier directeur de l'Imprime- rie royale établie au Louvre par Louis XIII en 1640; né à Paris en 1585, mort en 1669. 4 Vitré ou Vitray (Antoine), directeur royale, né vers 1600, mort en 1674. 5 Didot (Francois), né et mort à Paris (1679-1759). de l'Imprimerie marbre, se trouve munie de deux accessoires fort utiles, le tympan et la frisquette (fig. 3). Le tym- pan cadre de mêmes dimensions que le mar- : bre, sert à recevoir la feuille de velin; il se replie sur la forme, fa- cilitant ainsi considé- rablement la tenue de la marge. La frisquette main- tient le vélin sur le tympan. Des fenêtres convenablement dé- coupées n'ylaissentou- vert que ce qui doit figurer sur la feuille. Dereette façon, le pa- Fig. 3. — Perfectionnement de la table mobile ou marbre. pier n'est mis en Con- - À - Adjonction du tympan et de tact avec la forme la frisquette. D'après un qu'aux seuls endroits dessin de J. Ammon (1564). où se trouvent les ca- ractères. La feuille n'est plus noircie et tachée par tout ce que les balles, aujourd'hui le rouleau. Fig. 4. — Presse de Stanhope (1807). atteignent. En même temps, la presse se trouve agrandie. Le marbre peut tirer d'un seul coup de presse les grands in-folio. A l'époque de Gutenberg et des premiers impri- meurs, une presse produisait 300 feuilles par jour au maximum, par un travail très pénible, parfois dangereux pour les pressiers, d'environ quatorze heures par jour. Soit 20 feuilles à l'heure. En 1572, l'invention de la glissière, l'usage du tympan et de la frisquette, portent le rendement de la presse à 3.500 feuilles par jour. Les com- pagnons fournissent alors quinze à seize heures de {travail par jour. 820 A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE Le rendement avait donc décuplé; il était de 200 feuilles à l'heure. En 1789, la production courante était encore de 250 feuilles à l'heure. Aucun progrès sensible n'avait été fait durant deux siècles (fig. 2). Le physicien Nicholson‘ eut, le premier, l'idée, en 1790, crer les carac- tères au moyen d'un rouleau. Il se servit égale- ment d'un lindre pour im- primer la forme et même pour la recevoir, bien qu'il avait entrevules prin- cipes qui de- vaient être mis en pratique dans les plus perfec- tionnées de nos presses actuel- les. Les idées et les plans de Ni- cholson furent d'en- (QE si réalisés avec succès par Kænig* et par son élève Bauer en 1814. La première de leurs machines fut fabriquée à Londres, aux frais de Bensley et de Taylor, le ‘premier, imprimeur, le second, éditeur du Times. Elle fournissait 1.200 feuilles à l'heure. Le chimiste Gannal*, celui-là même qui imagina le premier système d'embaumement par injection ainsi que les cheminées à courant d'air, substitua en 1817, au cuir gar- nissant les rouleaux en creux,une matière élastique constituée de colle à la gélatine Fig. 5. — Presse en blanc perfectionnée d'Alauzet, munie d'un abat-feuille. — Cette machine, dans laquelle la touche est assurée par 4 gros rouleaux encreurs, permet le tirage des chromotypographies. à un coup, inventée par François Ambroise Didot*, le marbre et la platine sont en fonte; c'est elle qui servit à Pierre Didot* pour ses magnifiques édi- tions du Louvre. La presse de Stanhope* (fig. 4), qui apparait en France en 1818, mais dont l'emploi en Angleterre remonte à 1807, est toute en fer. La presse de Cly- mer, dite encore américaine ou colombienne, également toute en métal, pré- sente sur celle de Stanhope l'a- vantage de per- mettré le tirage de plus grands formats. Ces premières machines, dans certaines des- 2e = quelles la vis de — Gutenberg a même disparu, impriment les feuilles unique- ment d'un côté; ce sont les machines dites en blanc (fig. 5, 6 et 7). A côté d'elles vient se placer la machine du miner- viste (fig. 8 et 9), la presse à pédale, appelée encore manuelle, qui permet à un seul ouvrier de com- poser, puis d'imprimer les petits ouvrages de ville dits bilboquets (cartes de visite, adresses, faire- parts, petites affiches, etc.) La manœuvre d'une simple pédale produit l'encrage de la forme, puis l'impression du pa- pier, et le ramène sous les doigts de l'ouvrier qui rem- place la feuille im- et de mélasse, ce qui permettait un en- crage plus régulier et mieux assuré. En même temps primée par une feuille blanche. On imagina bien- tôt d'associer deux semblables machines que le rouleau rem- en blanc en une seule, place les balles, la presse,dont toutes les partiesétaient en bois comme dans le modèle de Brichet, dit presse hol- landaise de 1800, se transforme. Dans la presse Nicholson (Willams), physicien et chimiste anglais, né et mort à Londres (1753-1815). ? Kænig (Frédéric), mécanicien allemand, né à Eisleben Saxe) en 1715, mort à Oberzill (Bavière) en 1883. * Gannal (Jean-Nicolas), chimiste français, né à Sarrelouis en 1791, mort à Paris en 1832. Fig. 6. — Presse en blanc Marinoni, avec encrage plat, permettant les impressions de grand luxe et les tirages en chromotypographie. de manière à pro- duire l'impression de la feuille au recto, puis au verso, sans qu'elle quitte la machine; ce 1 Francois Ambroise Didot, célèbre imprimeur et libraire parisien, appelé quelquefois le réformateur de la typographie, né et mort à Paris (1720-1804). 2 Pierre Didot, imprimeur et libraire parisien, fils aîné du précédent, né et mort à Paris (1761-1853). 3 Charles Stanhope, homme d'Etat et savant anglais, né | et mort à Londres (1753-1816). A. TURPAIN — DE LA PRESSE À BRAS A LA LINOTYPE ET À L'ÉLECTROTYPOGRAPHE 821 sont les machines à retiration ou à labeurs. In- | Imaginées tout d'abord par Philippe Taylor, ventées par Rousselet, elles furent perfectionnées par Normand. Nelson eut l'idée, pour empêcher Fig. 7. en 1822, ainsi que par Joly, simple conducteur de machines qui breveta en France le mouvement de — Presse en blanc The Miehle à double révolution et à quatre rouleaux. — Double réception et margeurs automatiques. Son prix atteint 80.000 francs. le maculage, de disposer une feuille blanche, dite feuille de décharge, sur le recto pendant l'impres- sion du verso. La presse à retiration a été perfec- tionnée récemment M. Alauzet et par Marinoni, qui lui ont adjoint un receveur encore par Fig. S. Minerve” ou machine du Minerviste. — Elle fournit 1.400 exemplaires de 23 X 33 cm. à l'heure. Poids : 500 kgs. Encombrement : 1,40 X 1 m. Coût : 1.000 francs. — Presse à pédale ‘ La mécanique constitué de lames de bois formant raquette, qui abat la feuille sur la table à rece- VOIr. Puis vinrent les presses à réaction (lig. 10). réaction en 1834, furent mises au point en 1848 par Marinoni et par Gaveau. Elles ces presses rouleaux La Nationale” à 4 encreurs. — Elle imprime de 25 X 33 cm. à 28 X 31 CM. Fig. 9. — Presse à pédale impriment la feuille simultanément des deux côtés. On les construit à 2, 3 ou 4 cylindres, 822 A. TURPAIN — DE LA PRESSE À BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE La presse à retiralion donne de 800 à 1.000 exemplaires à l'heure. Les presses à réaction à deux cylindres impri- ment de 3.000 à 3.500 exemplaires à l'heure; celles à trois cylindres, de 4.000 à 4.500, et celles à quatre, de 4.000 à Un rouleau de papier continu (dont l'inven- tion, due à Robert‘, remonte à 1798 et fut réalisée par Didot de Saint-Léger*), qui actuellement ne mesure pas moins de 4.300 mètres, permet le tirage sans arrêt de 40.000 journaux de grand format. Le compte des feuil- 7.000. les, qui s'accumulent dernier modèle { conduc- Ce nécessite : A teur, 4 margeurs, 4 re- ceveurs, À enleveur et | 1e 1 compteur, en tout, 11 ouvriers. Les dèles courants ne me- InO- surent pas moins de 5250 2m,20 de largeur et pè- de longueur, par cinq, se fait grâce à ce que, lorsque vingt paquets de cinqfeuilles se sont accumulés, un petit recul de la ta- blette de réception sé- pare le cent formé du cent suivant. Le dis- tributeur peut directement fournir les sent 5.000 kilogs. Ces perfectionne- ments successifs des journaux tout comptés Fig. 10. — Presse à réaction à Le marbre porte le recto et le verso de la feuille et passe en aux vendeurs. En une heure, 20.000 4 cylindres et,2 encriers. — donc machines à imprimer furent provoqués par totalité en pression sous chacun des 4 cylindres. La feuille se retourne sur un cylindre en bois, dit registre, et repasse sous les mêmes cylindres tournant en sens inverse. Les feuilles blanches sont disposées sur 4 tables de marge qui journaux grand for- mat ou 40.000 jour- l'insuffisante rapidité du tirage et stimulés encore par les exigences croissantes du journal. Ils ne parvinrent cependant pas à suffire aux be- soins des journaux à grand tirage. C'est pour accroître à nouveau la vitesse de l'impression que Marinoni! imagina en 1866 la presse rotative, dans laquelle la forme cesse d’être plane et devient cy- lindrique. Le rendement de ces mécanismes fut tel que les hom- mes ne pouvaient suffire à fournir le papier à la ma- chine d'une facon continue; on y re- média par la créa- tion de la presse rolalive à papier continu. Le premier type de presse rotative Marinoni, celui dit à mar'qeurs, COnS- truit avec Six Cy- lindres, permet d'imprimer 36:000 petits journaux à l'heure, mais nécessite 6 margeurs. Le second type de rotative, celui à papier continu fig. 11et12), dispense de margeurs, de receveurs. Il n'estméme plus utile d'opérer le trempage du papier. ! Marinoni (Hippolyte), constructeur mécanicien français, né à Paris en 1823, mort en 1903. nécessitent 4 margeurs. . — Presse rotative Marinoni à papier continu. naux petit format sont ainsi tirés, cou- pés et comptés automatiquement. III. — LA STÉRÉOTYPIE. Malgré la rapidité de l'impression que réalisent ces machines, elles seraient encore impuissantes à desservir un journal à grand tirage. Pour satis- faire à l'impres- sion et à l'envoi du nombre colos- sal d'exemplaires que produisent certainsjournaux, il est indispensa- ble de mettre en œuvre plusieurs de ces machines simultanément. On se trouverait alors obligé de faire composer les formes en plu- sieurs exemplai- res si l'on ne s'é- tait préoccupé de- puis déjà longtemps, dès le xvin' siècle, de repro- duire la composition en caractères mobiles à plu- sieurs exemplaires. ! Robert (Nicolas-Louis), inventeur, né à Paris en 1761, mort à Dreux en 1828. ? Didot de Saint-Léger (1767-1829) fit construire la première machine pour la fabrication du papier sans fin. A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE 823 La stéréotypie résoud ce problème, poursuivi autrefois dans le but de conserver la composition d'œuvres importantes en vue de réimpressions futures. On avait, en effet, préconisé, dès 1714, la soudure à la base de l'ensemble des caractères réu- nis en forme, ce qui obviait au dérangement des types, mais les immobilisait. Ce fut toutefois le procédé employé par Didot en 1795 pour conserver la composition des tables de logarithmes publiées alors. Cependant, ce procédé immobilisait un coû- teux matériel et ne pouvait, par suite, pas être généralisé. Pour stéréotyper une forme, on constitue un moule de plâtre, d'argile ou de terre grasse mêlée au plâtre, portant l'empreinte de la composition à conserver ou à répéter. On coule ensuite un alliage de plomb, d'antimoine et de régule” dans le moule ainsi obtenu. C'est ainsi que Ged en 1730, Valleyre en 1735, Michel Funck- ter d'Erfurten 1740, Hoffmann en 1783, essayèrent d'obte- nir des planches s0- lides. Carey,imprimeur à Toul, remplaca en 1787 le plâtre em- ployé jusqu'alors Le flan est constitué par une série de feuilles de papier pelure entre lesquelles ‘est étendue une mince couche d'une bouillie épaisse faite de blanc d'Espagne, d'alun, de colle de pâte additionnée de colle forte. Cette pâte doit être préparée vingt-quatre heures à l'avance et ne peut se conserver plus de trois jours. Le mouleur dispose le flan sur la com- position, sur la forme préalablement nettoyée. Au moyen d'une brosse spéciale aux poils durs etserrés, il fait pénétrer le flan dans l'œil des caractères de la forme ; il renforce en dernier lieu le flan en le recouvrant d'une dernière couche de pâte et d'une feuille de papier fort. De cette facon, le flan atteint une épaisseur qui permet de le manier sans risque de déformation lorsqu'il sera sec. La forme, recou- verte du flan, est mise sous le plateau d'une presse et chauffée le temps nécessaire au séchage de l’em- preinte, Au sortir de la presse, on sé- pare le flan, qui, devenu empreinte, détache de la il ne reste se forme ; plus qu'à couler sur l'empreinte, dispo- sée dans un moule, le mélange conve- nable de plomb, an- timoine et régule. On obtient ainsi au- < + Ë FRITES Re : ; » pour faire les mou- e tant de clichés qu'il les par du plomb, est nécessaire. Ces : : Fig. 12. — Presse rotative Marinoni à papier continu et à 2 bobines, : PE ARS sur lequel, au mo- pour journaux de 4, 6 et 8 pages, imprimant sur un seul cylindre de clichés ont une ment même où, par clichés pour chacune des bobines. — Une disposition spéciale permet forme plane ou ev- refroidissement, il passe de l'état li- quide à l’état solide, on imprime en creux les pages composées en caractères mobiles. C'est le procédé qui fut appliqué de 1790 à 1796 par Gengembre, Salkmann, Heron, Gatteaux et Didot au clichage des assignats, pour l'impression desquels Grassal construisit une machine spéciale et eut l'idée de réunir en une seule matrice les diverses parties de la planche. Gatteaux, en 4797, et plus tard Didot et Stanhope perfectionnèrent la stéréotypie, mais le procédé le plus ingénieux, aujourd'hui complètement géné- ralisé, est celui employé en 1840 par Lotlin, de Laval”, pour dessiner et stéréotyper des relations de voyages dans les pays méditerranéens. Ce pro- cédé, désigné par son inventeur sous le nom de lottinoplastique, constitue ce qu'on nomme commu- nément aujourd'hui moulage à la brosse et au flan. Re EL + 1 Alliage d'antimoine et d'étain. # Lottin de Laval (Victor), littérateur et voyageur francais, né à Orbec (Calvados) en 1810. d'imprimer un journal à 4 pages avec 2 vitesse de 24.000 à l'heure. clichés de chaque page à la : À à TARDE lindrique suivant le genre de presses auxquelles ils sont ensuite destinés. Ce procédé de clichage présente l'avantage de ne pas user les caractères, en même temps qu'il réalise sur le procédé au plâtre une économie de 25 ° Toutefois, le procédé au plâtre, beaucoup plus fin, est encore utilisé parfois pour les très petits carac- tères ou encore pour la venue des ornements el figures. En Angleterre, on emploie pour le elichage au flan une pâte faite de gomme et autres substances gélatineuses, qui présente sur la pâte francaise l'avantage de pouvoir être préparée à l'avance, car elle peut se conserver fort longtemps. Enfin, depuis quelques années, un procédé de clichage galvanique tend à se généraliser. Il con- siste à appliquer, à l'obtention d'un cliché en cuivre d'une forme, le procédé électrotypique qui à permis de vulgariser si complètement l'image et qui, en répandant le livre à figures dans le texte, à puis- samment aidé à la diffusion de l'instruction. Nous 824 A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE nous contenterons de rappeler ici que ce procédé consiste à placer comme électrode négative, dans une cuve à sulfate de cuivre traversée par un cou- rant, le moule de la forme à reproduire, dont la sur- face a été rendue conductrice par un léger enduit de plombagine. Les clichés inutilisables ou usagés peuvent servir d'électrode positive soluble, ce qui permet d'en récupérer la matière. Ce procédé a presque complètement remplacé le procédé au plâtre et, quoique d'un prix plus élevé, il remplace avantageusement le clichage au plomb, qui ne per- met pas, par suite de l'écrasement du métal, de faire de nombreux tirages sans remplacer les cli- chés. C'est ce procédé qui est dénommé électrotypie et dont le cliché est appelé généralement un ga vano. IV. — LA VIE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE DE L'ATELIER TYPOGRAPHIQUE AVANT LA RÉVOLUTION. Tous ces perfectionnements successifs, substitu- tion des machines aux presses à bras, réalisation de machines à grand rendement, accroissement énorme du rendement par la stéréotypie, n'allèrent pas sans troubler quelque peu la vie économique et sociale de l'atelier typographique. Deux grandes catégories d'ouvriers se partagent la confection du livre ou du journal, les typographes et les impri- meurs, « les singes et les ours », suivant l'argot du métier. Ce sont surtout les imprimeurs, les pres- siers de l'ancien régime, que la machine a tout d’abord peu à peu chassés de l'atelier. Ici encore la science a délivré le malheureux « écureuil » * de son dur, pénible et parfois dangereux labeur; mais, comme toujours, la machine, en enlevant brutale- ment son gagne-pain à l'ouvrier, lui à fait payer en misère momentanée la facilité dans le travail qu'elle réservait à ses successeurs. Envisageons rapidement les transformations économiques, les bouleversements de l'atelier que le mécanisme détermina en typographie. Un fait général, trop peu souvent signalé, domine l'histoire des transformations de toute industrie. C'est toujours le savant qui, en apprenant à l'ingé- nieur quelle nouvelle énergie naturelle vient d'être découverte, étudiée et captée, transforme l'usine et l'atelier. C'est au laboratoire que l'homme pra- tique puise l'idée féconde qui lui permet ses ingé- nieux perfectionnements. C'est le paisible cher- cheur, souvent timide et modeste, qui, desa retraite, inspire et guide les transformations économiques les plus complètes et résout les plus difficiles pro- blèmes sociaux. Plus on pénètre l'histoire des diverses industries, la genèse des inventions suc- | cessives, plus le savant apparaît comme le plus puissant et le plus redoutable des révolutionnaires. Bien plus que l’orateur le plus fougueux et que le politique le plus profond, il dirige la lutte écono- mique. Il met en concurrence les intérêts du travail et ceux du capital, affamant souvent ce dernier par les constantes transformations d'outillage que ses découvertes provoquent alors qu'il simplifie Le tra- vail. Celui-ci, sans aucun des soucis d'amortisse- ment qui croissent avec le progrès pour son rival, lutte dès lors à armes plus égales avec le capital qui, jusqu'alors, l’asservissait. Telle découverte faite aujourd'hui au laboratoire révolutionnera l'in- dustrie de demain. C'est, parmi mille exemples, celui de Faraday, qui, en découvrant l'induction, permet l'invention de la dynamo. Non seulement le prodigieux essor industriel développé par la machine à vapeur se trouve plus que décuplé, mais l'énergie des chutes d'eau caplées est canalisée ; les industries se multiplient et se déplacent: les tramways et les métropolitains naissent, l'alumi- nium prend place en face du fer sur le marché métallurgique ; l'acétylène devient un mode éco- nomique et commode d'éclairage : l'usine à gaz est rendue transportable; les torrents tumultueux des Alpes animent pendant le jour toutes les industries è des vallées et, le soir venu, éclairent à profusion les cités. Les premiers imprimeurs et leurs aides effec-… tuaient successivement les opérations diverses de l'imprimerie. Ils fondaient leurs caractères, COm- posaient et corrigeaient les formes, imprimaient enfin. L'imprimerie était alors un art véritable plus qu'une industrie. Les premiers imprimeurs furent de grands érudits, savants dans plusieurs langues, qui, grâce à leur érudition, firent connaitre et publièrent une foule de chefs-d'œuvre. Dès qu'elle prit du développement, l'imprimerie s'industrialisa. L'atelier typographique se distingue nettement dès le xvr° siècle des autres ateliers d’'ar- tisans de l'ancien régime; la division du travail y apparait, et, bien qu'en germe seulement, les prin- cipes de nos usines actuelles S'y reconnaissent : utilisation des machines, groupement d'un nom- breux personnel, spécialisation de l'ouvrier (fon- deur de caractères; compositeurs divisés eux- mêmes en tableautiers et dominotiers, ouvriers en conscience pour les ouvrages difficiles et compli- qués, ouvriers à la tâche pour le travail courant; correcteurs, pressiers). Les premiers imprimeurs concurent l'immense tâche qui leur incombait en véritables apôtres. Ils doivent être considérés comme des bienfaiteurs de l'humanité pour avoir réalisé pleinement, quelques années à peine après son invention, l'idée géniale ‘ Nom donné autrefois au pressier en argot typographique. | de Gutenberg. Les institutions qui bientôt après A. TURPAIN — DE LA PRESSE À BRAS A LA LINOTYPE ET À L'ÉLECTROTYPOGRAPHE 8925 régissent l'imprimerie, la réglementation du pou- voir royal comme la réglementation corporative, entravèrent ses progrès. Comprenant que l'éclat des lettres était lié à l'essor de l'imprimerie, les rois protégèrent parfois son développement. Toutefois, le régime préventif dont la royauté conserva toujours le maintien à l'égard de l'imprimerie, la sévérité extrême des peines prononcées, restreignirent ses progrès. Les vexations et les injustices de la censure royale, qui placa sur le bûcher le libraire Moreau, brülé à Troyes en 1546, l'imprimeur Dolet, brûlé à Paris en 1566, et tant d'autres; à qui échappa par la fuite Robert Estienne lui-même, qui eut sans cela subi le sort de Dolet après la mort de Francois I", son protecteur, pour la publication d'une Bible latine d'après la version de saint Gérôme avec les variantes d'après les textes hébreux, travail colossal qui lui avait coûté dix ans d'études; toute cette insécurité ruina l'esprit d'indépendance et d'ini- tiative, si indispensable à l'industrie que nous étudions. L'action de la forme corporative fut, sous l’an- cien régime, tout aussi nuisible au développement de l'imprimerie. Lorsque l'imprimerie apparait en 1500, elle n’est tout d'abord pas regardée comme un « métier méchanique » ; mais quand, en 1618, les imprimeurs se forment en communauté, la période tutélaire et protectrice des corporations à déjà disparu. La communauté des imprimeurs de Paris de 1618 n'eut pour but, sinon avéré, du moins réel, que de restreindre la concurrence et d'assurer à ses membres un monopole. Pour combattre la hausse des salaires, pendant deux siècles les maitres poussent à la formation de nombreux lesquels se trouvent, par suite, sans protection, abandonnés aux vexations des compagnons. Plus tard, en 1723, la Chambre syndicale prend parti pour la limitation du nombre des apprentis; c'est qu'ayant alors obtenu la limi- tation de ses propres membres par les règlements de 4686 et de 1723, elle veut faire le vide autour du métier pour en mieux tirer bénéfice. Les compagnons, toujours dominés par la com- munauté apprentis, des maitres imprimeurs, poursuivis d'ailleurs par le pouvoir royal, ne formèrent jamais sous l'ancien régime une corporation influente. Il est vrai de dire que la communauté des maitres n'abusa pas outre mesure de son pouvoir. Elle en usa toutefois largement. Si le typographe recoit, avant la Révolution, un salaire qui est environ le double de celui des ouvriers des autres métiers, — ce que légitimait d’ailleurs, alors, son instruction et sa situation d'ouvrier d'art, — par contre, il ne travaille pas moins de 13 à 16 heures par jour et se plaint des chômages que l'Eglise, la morte-saison, | la concurrence des excessifs. D'ailleurs, les nombreuses grèves et coalitions qui éclatèrent entre 1539 et 1572, ainsi qu'en 1653, montrent que, sous l’ancien régime, l’ouvrier tyÿpo- graphe était loin d'être content de son sort. Si quel- ques rares fois le roi donne raison sur quelque point aux compagnons, la plupart du temps il apaise les conflits en mettant au service des maitres le poids écrasant de son autorité. Ce furent évidemment les maitres qui, sous l'an- cien régime, retirèrent le plus de profits de l'orga- nisation corporative, et par la limitation de la con- currence et par le monopole qu'ils obtinrent. Et cependant, le métier lui-même se ressent des ins- titutions étiolantes d'alors, et les doléances qu'on trouve dans un Mémoire adressé au roi à la fin du ouvriers étrangers rendent xvu‘ siècle montrent que les maitres-imprimeurs eux-mêmes considèrent « l'imprimerie comme là plus pauvre des professions qu'il y ait au monde » et prétendent « qu'elle est réduite à une très labc- rieuse misère » et qu « n'y a pas à Paris deux imprimeurs qui aient 10.000 livres de biens ». V. — L'IMPRIMERIE AU XIX° SIÈCLE. Avec la Révolution, le journal, prohibé durant trois siècles, prend possession de l'imprimerie et, pendant quelques années, l'accapare entièrement. Contrairement à ce qu'ont avancé quelques auteurs, bien que de regrettables excès aient été commis alors par la voie de la presse, la liberté qu'acquit l'imprimerie ne produisit pas la ruine de la pro- fession. Bien au contraire, jamais le travail n'avait été plus abondant ni plus lucratif. Sans doute, des impressions laides el grossières, exécutées avec un matériel de rebut, furent en grand nombre, pen- dant la Révolution. Cela est dû au développement considérable que prit tout d'un coup l'imprimerie. La fonte des caractères ne put suivre, tout d’abord, cel essor prodigieux; mais quelques années suf- firent à parfaire le matériel. Quoi qu'on ait dit, cel essor ne fit perdre aux ouvriers et aux maitres ni le goût, ni lascience de l'arttypographique. N'est-ce pas de 4797 à 1800 que Firmin-Didot grava ses caractères célèbres, et que son frère Pierre publia ses éditions in-folio de Virgile, d'Horace et de Ra- cine, regardées, à juste litre, comme des chefs- d'œuvre de la typographie ? De 1789 à 1791, les ouvriers, profitant de la forme d'association alors tolérée, le Club, continuèrent et cherchèrent à développer publiquement l'œuvre de solidarité entreprise secrètement depuis trois siècles. Ainsi, pendant trois siècles, l’ancien régime avait cherché à isoler l'ouvrier en face du maitre, et à peine la liberté lui est-elle concédée qu'il s'empresse 826 A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE de se grouper au grand jour. En 1791, la loi Cha- pelier vint encore prescrire aux gens de métier de discuter leurs intérêts professionnels individuelle- ment avec leur maitre, ne tolérant de ce chef aucune entente entre eux. Cette loi fut l'objet de nombreuses réclamations de la part des ouvriers typographes, réclamations qui se brisèrent contre les tendances individualistes des représentants des assemblées. Durant tout le xIx° siècle, les ouvriers lutteront pour conquérir les droits que leur concéda d'une manière éphémère la Révolution de 1789. Société de secours mutuels, Société de résistance et Fédé- ration de toutes les associations d'ouvriers des imprimeries de France, tel est le programme qu'au cours de ce siècle les ouvriers chercheront à réaliser à la faveur de quelques libertés conquises. Ce qui caractérise l’ouvrier typographe, en effet, c'est son amour du progrès et des idées nouvelles. Plus instruit en général que les autres ouvriers, il acquiert, par la pratique même de son art, des connaissances nouvelles et s'instruit par son tra- vail même. Cependant, le niveau intellectuel des ouvriers typographes a montré une tendance à s'abaisser depuis une trentaine d'années. La spécia- lisation un peu trop outrée de certaines besognes typographiques, l'esprit de lucre de certains indus- triels, formant des apprentis recrutés au hasard, sachant juste bourrer des lignes hâtivement, sont sans doute la cause de cette légère dénivellation que les récents progrès de la typographie vont, d’ailleurs, se charger d’enrayer. Sous l'Ancien Régime, ce sont les ouvriers typo- graphes qui, les premiers, formulent nettement, au cours de grèves célèbres, leurs justes revendica- tions. La Révolution ouvre à peine l'ère de liberté que, les premiers, ils essaient l'œuvre syndicale, œuvre éphémère tout d'abord, parce que en avance sur les idées d'alors et qu'ils mettront près d'un siècle à faire aboutir. Les premiers journaux trai- tant exclusivement de questions ouvrières: la Rucbe populaire, V'Atelier, ont pour rédacteurs et promoteurs des ouvriers compositeurs. Ce furent encore les typographes qui, les premiers en France, concurent le projet des commissions mixtes de patrons et d'ouvriers et le mirent en pratique pour juger les différends entre le Capital et le Travail. Sur les 18.000 compositeurs environ employés en France en 1902, on trouve 11.000 syndiqués, dont 10.429 sont affiliés à la Fédération francaise des travailleurs du livre. De leur côté, les maîtres imprimeurs, auxquels le marasme de l'imprimerie donna, durant les premières années du xix° siècle, de nombreux sujets de plaintes, songèrent à s'associer pour mieux défendre leurs intérêts. L'insécurité, l'état de guerre qui signalent les premières années du xIx° siècle ne furent guère propices aux productions intellectuelles. Avec la Restauration, l'industrie du livre se relève quelque peu ; mais, de 1830 à 1848, elle décline de nouveau, malgré l'introduction des machines à imprimer. Libraire et éditeur, ces grands clients de l'impri- meur, ont alors leurs magasins pleins de livres par suite de la surproduction qui coïncide avec la Res- tauration. De plus, ils exigent, en se basant sur les perfectionnements mécaniques apportés à la presse, des réductions sur les travaux d'imprimerie. Ces réductions des étofles (c'est ainsi qu'on nomme les majorations faites par l'imprimeur au total de ses achats de papier et de ses prix de main-d'œuvre), exigées par l'éditeur qui stimulait la concurrence en mettant en sous-enchère les travaux très peu nombreux qu'il avait, ne contribuèrent pas peu à la gène des imprimeurs. Beaucoup de maitres-imprimeurs fractionnèrent leurs brevets en permettant à des succursalistes, dont ils signaient d'ailleurs les impressions, de se servir de leur matériel. Les maitres-imprimeurs cherchaient en vain à attirer l'attention des Pouvoirs sur les abus des succursales. Ils fondèrent même à Paris, en 1839, une Association qui, en mai 1890, prit le nom de. Chambre syndicale. Au congrès de Lyon, en 1894, un projet d'Union des imprieurs de France fut élaboré. Cette union, destinée, lors de sa fondation, à grouper les différents syndicats d'imprimeurs, s'est modifiée pour devenir un simple syndicat national. Cela permet à cette association de jouir de la personnalité accordée aux syndicats par la loi de 1884. Ces diverses formes de groupements des maitres- imprimeurs ne réussirent pas à réunir un grand nombre d'adhérents. De 1839 à 1872, le nombre des adhérents à l'Association oscille de 45 à 55 sur le millier d'imprimeurs brevetés existant tant en 1840 qu'en 1870, époque où la liberté de l'impri- merie est établie. Il est vrai de faire remarquer que l'Association ne comprenait, sous le régime du brevet, que les imprimeurs de Paris. L'Union syndicale des maitres-imprimeurs comp- tail : ENMSS I RINERR LE PRAIERE 430 adhérents. LOST Er RE 605 — 1900 rm A CL 652 — TOOL ERNEST 642 — En 1903, à peine 700 sur 4.000 imprimeurs-typo- graphes. Ainsi donc c'est à peine si 17 °/, des maitres intéressés ont adhéré à l'Union. Par ail- leurs, on ne compte, en France, qu'une vingtaine de syndicats locaux. A quoi tient ce peu d'empressement à se syndiquer t à E. KAYSER — LES LEVURES SÉLECTIONNÉES 827 parmi les maitres ? À la concurrence évidemment, à la défiance mutuelle de patrons qui, pour pouvoir plus aisément obtenir des travaux à faire, pré- fèrent rester libres et prêtent la main à l'avilis- sement des prix, souvent au détriment de leurs propres intérêts. Placés entre les ouvriers, qui cherchent à dé- fendre de légitimes salaires, et les éditeurs, qui leur font diminuer de plus en plus le montant des étoffes, les maîtres-imprimeurs se trouvent sou- vent dans une situation très difficile. Aiguillonnés par la concurrence, par le désir du gain, par l'obli- gation de ne pas laisser de coûteuses machines inactives, les imprimeurs acceptent des travaux ou souscrivent des adjudications à des prix par trop peu rémunérateurs. Ils cherchent ensuite à éviter la perte en réduisant les salaires de leurs ouvriers, en introduisant la femme à l'atelier, où encore en confiant à l'apprenti le travail de l'ouvrier : toutes mesures qui avilissent les salaires. Le système des adjudications fait ainsi deux victimes : le maitre consciencieux et l'ouvrier qu'il force à chômer. En 1896, à Grenoble, une solution fut donnée à ce problème. Le Syndicat patronal accepta l'adjudi- cation avee un rabais de 21 °/, et répartit lui-même le travail entre ses membres. Un tarif établi entre maîtres et ouvriers garantissait le salaire. Un sem- blable accord sauvegarde les intérêts des contri- buables, des industriels et des salariés ; il demande, pour être généralisé, l'étroite entente des maitres et des ouvriers. C'est l'application d'une mesure depuis longtemps déjà réclamée par les syndicats d'ouvriers typographes, mais toujours repoussée par l'autorité comme portant atteinte à la liberté du travail, savoir : que le cahier des charges oblige l'adjudicataire à observer les conditions normales du travail dans la région comme salaire et comme temps. Nous venons de voir la presse mécanique chasser brusquement l'imprimeur de l'atelier. On pouvait penser que là se limiterait l’action du mécanisme dans l’industrie typographique. S'il est, en effet, une suite d'actes manuels qui, tant par la diversité de leur succession que par la constante intelligence qu'ils réclament, devaient être à l'abri de la con- currence mécanique, il semble que ce soient ceux qu'accomplit le typographe composant la ligne, la justifiant ensuite, puis enfin en distribuant plus tard les caractères dans chacune des nombreuses casses d'où il les a précédemment extraits. Et cependant ici encore la machine est venue con- currencer l'homme, et aujourd'hui elle le dépasse, provoquant une nouvelle amélioration des condi- tions du travail, mais en même temps une crise nouvelle, par suite du grand nombre de bras qu'elle: menace de rendre brusquement inactifs. Nous exposerons, dans un second article, à la suite de quels perfectionnements successifs la ma- chine à composer a été amenée au degré de perfec- tionnement qu'elle présente actuellement. Nous indiquerons ensuite quelles conséquences d'ordre économique entraîne son introduction de plus en plus générale dans l'atelier. A. Turpain, Professeur de Physique à l'Université de Poitiers. LES LEVURES SÉLECTIONNÉES La transformation du sucre en alcool et en acide carbonique constitue, dans ses parties essentielles, le phénomène de la fermentation alcoolique; elle est l'œuvre de l'action vitale des ferments alcoo- liques proprement dits, c'est-à-dire des levures. Ce sont les recherches de Cagniard-Latour, Schwann et Kützing qui nous ont appris l'intervention d'un être vivant, auquel ils ont donné le nom de Saccha- romyces vini, Saccharomyces cerevisiae. Pasteur nous a montré la relation intime qui existe entre la vie de la levure et la production d'alcool. Hansen, par ses méthodes précises et élé- gantes, a pu différencier et purifier d'une facon sûre les ferments alcooliques; enfin, Buchner à découvert la cause véritable de la transformation du sucre en alcool, la zymase alcoolique. Quelle que soit la manière d'interpréter ce phénomène, il est bien établi que le ferment alcoolique joue un rôle aussi important que la sécrétion diastasique. Depuis longtemps, on a cherché à tirer prolit, dans la pratique, des propriétés remarquables de ces micro-0rganismes, Pasteur, ensemencant une levure de vin dans un moût d'orge, avait obtenu une boisson d'un carac- tère vineux spécial. Et il ajoutait : « C'est une preuve que le vin ordinaire, son goût, ses qualités, dépendent certainement, pour une grande part, de la nature spécifique des levures, qui se déve- loppent pendant la fermentation de la vendange. On doit penser que, si l’on soumettait un même moût de raisin à l’action de levures distinctes, on en retirerait des vins de diverses natures. » Cette constatation importante de Pasteur nécessilait de nouvelles recherches pratiques. 828 Hansen, s'occupant plus spécialement des levures de brasserie, nous fit voir que toutes les levures employées dans cette industrie ne se comportent pas de la même facon, qu'il y en a qui donnent des bières de bonne qualité et de bonne conser- vation, que d'autres peuvent donner des bières malades. Nous savons aujourd'hui qu'il en est de même des levures de vin et que, dans une même lie de | vin, il peut y avoir des levures sauvages, des levures distinguées, des levures de maladie. Le problème de l'emploi des levures sélectionnées en vinification est beaucoup plus délicat qu'en | brasserie ou en distillerie; le moût de raisin n’est, | en général, pas stérilisé, et l'on sait que la fermen- tation vineuse se fait dans les conditions les plus variables d'une année à l’autre, d'un vignoble à l'autre, d'une région à l’autre. On concoit ainsi facilement qu'on peut en obtenir lantôt des résul- tats nettement positifs, tantôt des résultats tout à fait négatifs; c'est ce que la grande pratique à maintes fois démontré. Pour avoir le plus de chances possible, il importe done, avant tout, d'employer ces levures sélection- | nées judicieusement, de connaître, par des expé- | riences préliminaires de laboratoire, leurs carac- tères et leurs propriétés : c'est ce que nous nous proposons de rappeler à grands traits. Lorsqu'on examine au microscope, avec un gros- sissement de 500, une partie de moût en fermenta- Fig. 1. — Levure haute de fermentation (Gr. 500). tion, on voit de petits corps plus ou moins ronds ou elliptiques; ce sont des globules de levures, consti- tués par un protoplasma, un noyau et entourés d'une membrane. E. KAYSER — LES LEVURES SÉLECTIONNÉES Ce protoplasma, de composition complexe, est plus ou moins mou, plus ou moins dur selon l'âge du globule; les dimensions de ces globules varient entre 1 à 10 millièmes de millimètre de longueur Fig. 2. — Levure basse de fermentation (Gr. 500). sur 1/2 à 3 ou 4 millièmes de largeur. Ils se repro- duisent par bourgeonnement ou par spores, et, selon que les globules-filles restent plus ou moins attachés au globule-mère, on a la levure haute ou la levure basse (fig. 1 et 2). La reproduction se fait quelquefois très rapide- ment; ainsi Pasteur à vu doubler un globule de levure en deux heures, dans des conditions favo- rables d'alimentation; cette multiplication se. ralentit lorsque l'alcool s'accumule. Une très faible quantité de levure peut donc servir à mettre en. fermentation une très grande quantité de moüt sucré. L'observation a montré, en outre, qu'il existe diverses races de levures: ce sont celles qui ont été utilisées depuis longtemps par l'homme, qui sont devenues levures de culture, par opposition aux levures sauvages. Ces levures se différencient non seulement mor- phologiquement (forme, dimensions), mais encore physiologiquement; c'est-à-dire qu'elles se dis- tinguent par la quantité et la qualité des produits, la rapidité de la fermentation, les sucres attaqués, le dépôt formé, etc. Les caractères morphologiques seuls ne peuvent pas servir à caractériser leslevures, car on remarque souvent des changements de formes considérables entre les divers globules de la même origine, de la même race, comme c'est le cas pour les S. pasto- rianus et apiculatus (fig. 3 et 4). Toutefois, le savant se servant souvent d'une même Jevure arrive à la reconnaître, par simple E. KAYSER — LES LEVURES SÉLECTIONNÉES L examen de divers champs microscopiques, à un certain ensemble de caractères difficiles à préciser autrement. Les levures de vin sont, en général, elliptiques, d’autres fois rondes, plus ou moins allongées; parmi celles qui affectent une même forme, il y en a de plus ou moins actives, résistant à des températures plus ou moins élevées, à des acidités fortes, à des doses d'alcool variées. Ces levures se trouvent à la surface de tous les fruits, surtout aux endroits altérés par les insectes, les guëpes, et l’on peut dire que, dans les années à - guêpes, leur nombre est beaucoup plus élevé, parce que leur multiplication a été favorisée par la sor- tie du jus sucré sous la piqure de l'insecte; c'est pour cette raison que la fermentation, si la tempé- rature est favorable, se fait, dans ces années, très rapidement. Ces ferments paraissent surtout au moment de la maturité, et il ge suffit pas, comme Hansen l'a montré, que de la levure soit apportée par accident sur des fruits encore verts pour qu'elle se déve- loppe; souvent elle périt par simple effet solaire. Il ne suffit pas non plus qu'une levure d'une bonne variété de raisin soit ensemencée sur un raisin de médiocre qualité pour faire acquérir au vin les qualités du bon raisin; les propriétés inhé- rentes au ferment et la composition du moût sucré sont autant de facteurs qui ont leur importance. Ainsi on ne peut pas parler de levures de Pinot; mais on peut dire qu'il existe des levures de Bour- gogne, du Bordelais, du Rhin, de Champagne, et la Fig. 3. — Saccharomyces Pastorianus (Gr. 500). région d'origine semble avoir une influencé bien plus grande que le cépage lui-même. - On sait aussi que ces levures, végétaux indépen- dants, vivent dans le sol aux dépens des matières REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1901. 829 hydrocarbonées, glycogène accumulé; elles l'usent avec parcimonie pendant les moments de disette ; mais, à l'approche de l'été, lorsque les conditions d'existence sont plus favorables, elles deviennent «Ca °° Fig. 4. — A. Saccharomyces apiculatus (Gr. 500). — B. Germination du même (Gr. 150). plus vigoureuses et sont alors transportées par les insectes et par le vent sur les divers fruits. Ce sont évidemment les sols de vignobles qui en sont le plus pourvus; dans cet ordre d'idées, Muller-Thurgau a constaté que les terrains laissés en friche en deviennent de plus en plus pauvres, et finalement on n'y trouve plus de globules vivants. Il devient ainsi compréhensible que, par suite de cet hivernage dans le sol, les ferments les plus résistants aux conditions extérieures s'acclimatent avec le temps dans une même région; c'est ce qui justifie l'expression employée plus haut : levures de Champagne, de Bourgogne, etc. C'est ce qui permet encore d'expliquer comment, dans des terrains nou- vellement plantés en vigne, on à à constater des fermentations anormales dues à un mélange de diverses races de levures. Disons-le tout de suite : voilà un cas où l'application de levures pures, isolées de bonneslies, de levures sélectionnées, peut rendre de réels services. Il en est encore de même lorsque des pluies abondantes, au moment des vendanges, ont enlevé les levures à la surface des raisins. La réussite de l'application des levures sélec- tionnées dépend, avant tout, du choix judicieux de la race, mais aussi de son application à l’état vigoureux, préalablement rajeuni, riche, par consé- quent, en glycogène. Il importe, en outre, de l’em- ployer au moment opportun, ni trop tôt, ni trop tard, et en suffisante quantité. Cette levure a, en effet, à soutenir la concurrence vitale non seulement avec les bonnes levures indi- gènes, mais encore avec les moisissures, les bac- 20* 830 E. KAYSER — LES LEVURES SÉLECTIONNÉES téries diverses, les levures mycodermiques et les levures apiculées, dont la reproduction ultra rapide pendant les premières vingt-quatre heures gène beaucoup par ses produits (acide formique) le fonc- tionnement normal des levures sélectionnées. Tous ces ennemis disputent à la levure ses aliments et sont souvent des destructeurs d'alcool, de glycé- rine, d'acides, de principes à bouquet; il faut donc qu'elle soit apte à prendre vite possession du terrain. Les effets de cet ensemencement de levures sélec- tionnées dépendent, en outre, de la composition du moût, qui varie avec le sol, le climat, la situa- tion du vignoble, le cépage, l'état et le mode de culture, les engrais employés, les conditions atmosphériques de l’année (humidité, sécheresse, froid), l'époque et l'état de maturité, le mode de pressurage et d'égouttage, l'acidité, la tempéra- Lure, etc. Ces divers facteurs influent, en effet, sur la teneur en sucres, principes pectiques, azotés, minéraux, en un mot sur les aliments de la levure. Il en résulte que la levure employée pourra, selon sa sécrétion zymasique, donner plus ou moins d'alcool, donner, selon les conditions de nutrition, plus ou moins de glycérine, d'acides volatils, de principes à bouquet. De plus, selon sa vigueur, son état de rajeunissement, elle produira plus ou moins rapidement l'alcool, qui constitue pour elle le meilleur moyen de défense contre ses concur- rents. Ainsi, certaines levures supportent 6 à 7°/, d'alcool, d'autres 40 à 45 °/,, et il suffit, avec ces dernières, souvent d'une simple agitation de la lie avec le vin pour transformer les dernières traces de sucre en alcool, On s'explique facilement que, dans les fermentations normales des moûts riches en sucre, ce soient justement ces levures éner- giques qui jouent le principal rôle pour les qua- lités du vin obtenu, tandis que, dans les moûts pauvres, des levures à faible pouvoir alcoogène peuvent déjà jouer un certain rôle. Les effets constatés avec une même levure et le même cépage, dans diverses années, ne sont pas toujours les mèmes parce que la composition du moût est trop variable; tantôt telle race de levure prédominera dans le moût en fermentation, tantôt telle autre, mais il n'existe aucun rapport entre le cépage et la levure; il n'existe pas de levure s'adaptant à tous les cas. Des faits positifs se présenteront donc toujours à côté des résultats négatifs dans cet emploi des levures sélectionnées, et c'est à réduire ces der- niers au minimum que devra s'appliquer le viti- culteur, en se servant de levures bien connues, bien étudiées, et en se rappelant que les levures de grand eéru sont, en général, plus exigeantes au point de vue de la composition du milieu. IT L'application des levures sélectionnées dans pratique nécessite leur rajeunissement préalabl dans 50 à 60 litres de moût porté à 60°, refroidi ensemencé ensuite avec la levure; c'est ce quo appelle faire un pied de cuve, qui pourra être uti lisé pour la mise en fermentation de la vendan dans la proportion de 0,5 à 1 °/, lorsqu'il s'agit d moûts pauvres et de 4,5 à 2 °/, pour les moû riches en sucre. Selon les conditions de l'année, il est bo d’asperger les raisins déjà dans la vigne même mais, en général, on additionne le pied de cuve & fouloir, afin d'effectuer un mélange intime au fur @ à mesure qu'on remplit le foudre; lorsqu'il s'agi de vin blane, on s'arrange pour avoir une bonn fermentation avec une faible quantité de moùl qu'on ensemence et qu'on alimente ensuite ave du moût frais. Un examen microscopique de la levure achetée est à conseiller; il portera sur la présence d’autres micro-organismes ou encore de levures mortes; qu'on peut aisément colorer au violet de méthyle, qui n'a que peu d'effet sur les cellules vivantes. … L'addition de levures sélectionnées peut mainte= nant s'effectuer soit à la vendange fraiche, soit au moût stérilisé. On a essayé les deux méthodes avec succès. La stérilisation possible des moûts de brasserie, de distillerie, avait rendu le problème facile à ces deux industries. Comme elles travaillent pendant une plus grande partie de l'année, comme elles ont besoin de levures à des époques pour ainsi, dire régulières, les industriels peuvent faire cer- tains frais que le viticulteur ne peut guère se per mettre, surtout avec les prix actuels des vins. Pour lui, le pied de cuve est le moyen le plus éco nomique, car une faible quantité de levure mul tipliée peut servir pour la fermentation de toute la. cave. Il y à également intérêt à employer dans chaque région viticole des levures tirées de levures-lies de la même région; ces levures indigènes seront sur= tout utiles là où les vins sont mis en bouteilles à l'état jeune; de préférence, en emploiera pour les moûts rouges des levures provenant de lies rouges et pour les moûts blancs des levures isolées de lies de vins blancs. Voyons maintenant deux exemples de la pra- tique. - ; Première expérience. — De la vendange dem Petit-Bouschet et Carignan à été répartie entre trois demi-muids, à raison de 350 litres de ven- dange par tonneau; deux tonneaux ont élé ense= mencés avec deux levures de vin rouge d'Algérie; CES E. KAYSER — LES LEVURES SÉLECTIONNÉES 831 préalablement rajeunies dans une quinzaine de litres de moût porté quelques minutes à 60°, et ramené ensuite à 30°. Quantités par litre. ALCOOL ACIDITÉ TOTALE VINS EXTRAIT en volume en ac. tartr. RÉMOIN NS -... .- 19,1 97,0 8,15 3 N°2 - 2457 112,0 6,55 NOPS PE RE ue 20,2 109,0 6,96 La fermentation a été très régulière dans les tonneaux 2 et 3, très tumultueuse dans le tonneau témoin ; la température s'est maintenue pendant plusieurs jours entre 36 et 37°. Signalons la plus forte teneur en alcool des vins ensemencés ; les vins n° 2et3 ont été reconnus de beaucoup supé- rieurs par les dégustateurs ; l'amélioration est allée en s'accentuant, à tel point qu'on les estimait de 30 à 32 francs l'hectolitre et le témoin 15 à 18 francs. Deuxième expérience. — Elle a été faite avec du moût d'Aramon, rendu incolore en le laissant séjourner pendant deux heures dans les demi- muids. Après ce temps, une addition légère de bisulfite de chaux en solution, à raison de 1 gramme par hectolitre, servait à arrêter les effets de l'oxyda- tion, tout en favorisant le débourbage. Après quelques heures de repos, le moût était chauffé au pasteurisateur Egrot-Houdard et sor- tait à 65° ; il était réparti entre des demi-muids. L'ensemencement a eu lieu sous la forme de pied de cuve. Quantités par litre. ACIDITÉ ALCOOL ACIDITÉ VOLATILE en SUCRE totale en LEVURE EXTRAIT volume restant en ac. tartr. ac. acét. 4 (Rhin. . 16,200 89 0,703 5,341 0,573 2 (Champagne). 16,250 85 0,642 5,607 0,863 3 (Champagne). 14,400 87 0,642 6,060 0,537 4(Bourgogne). 15,100 82 0,642 5,450 0,576 5 (Sauternes). . 15,700 86 0,865 5,842 0,691 6(témoin). . . 15,350 59 0,681 5,559 0,558 Nous constatons d'abord des différences d'alcool, d'acidités; mais elles sont peu sensibles, à une exception près. Si l'analyse chimique peut révéler des compositions presque identiques, les dégusta- teurs signalèrent des différences appréciables, car chaque levure apporte avec elle quelque chose de particulier, de spécifique, difficile à définir. Voici, en effet, l'opinion et le classement de ces derniers : Vin n° 1, absolument remarquable, très droit, très bon, bien supérieur à tous les autres ; vient ensuite le vin n° 2, le suivant de très près comme qualité; le vin n° 3 a été reconnu bouqueté, fin de fruit, très droit; les n°* 4 et 5 sont bons et fins ; le témoin a été classé bien inférieur à tous les autres, Ajoutons, toutefois, que la clarification des vins obtenus par moût chauffé est souvent plus lente et que les transformations ultérieures du vin occasionnées par d'autres micro-organismes sont complètement arrêtées. L'emploi des levures sélectionnées a comme prin- cipales conséquences de donner lieu à des fermenta- tions rapides, régulières, plus complètes, produi- sant des vins francs de goût, de meilleure conser- vation. La levure peut également avoir une influence sur le développement des principes à bouquet, autres produits de dénutrilion ; tantôt elle est indirecte, lorsqu'elle empêche celle des mauvais ferments; tantôt elle est directe, lorsqu'elle contri- bue, par sa présence, à la production de ces principes aux dépens de certains éléments du moût sucré ; mais l'expérience a démontré qu'il n'existe pas de rapport direct entre le pouvoir diastasique de la levure et leur formation, pas plus qu'il n'en existe aucun entre la quantité de zymase alcoolique et le poids de levure. Certaines levures semblent être douées plus spécialement de cette faculté ; c'est ce qui nous permet d'expliquer comment des levures de Bourgogne, ensemencées dans un moût du Midi, peuvent produire des vins à goût étranger; bien souvent aussi, ces propriétés du ferment sont com- | plètement éclipsées par les principes à bouquet du cépage, comme c'est le cas pour le raisin muscat. Comme les fermentations avec ensemencement de levures se font, en général, plus rapidement, il convient d'effectuer les soutirages également plus tôt; cela a une très grande importance au point de vue de l'époque où le vin acquiert sa valeur marchande. Les levures sélectionnées rendent encore des services pour la prise de mousse des vins de Cham- pagne ; ici, il faudra se servir de levures spéciales, se déposant rapidement, résistant à une certaine teneur alcoolique et supportant une pression assez forte d'acide carbonique ; cette prise dépend de la race de levure et varie pour une même levure dans différents vins suivant les conditions du cuvage (Manceau). Elles sont enfin employées utilement pour trans- former le sucre de vins mal fermentés. Mais il importe de bien se pénétrer de cette idée que la levure seule ne suffit pas pour faire du bon vin; la composition du moût est aussi à considérer, et un mout d'Aramon ensemencé avec une levure de Meursault ne donnera jamais du Meursault ; de même, un moût mildiousé ne pourra pas être transformé, comme l’a démontré M. Man- ceau, directeur de la Station œnologique d'Epernay, par l'emploi d'une levure de premier cru, en un vin tout à fait sain ; cela est impossible, 832 E. KAYSER — LES LEVURES SÉLECTIONNÉES I ne faut pas non plus espérer obtenir de l'alcool éthylique pur ; de récentes expériences, faites en collaboration avec M. A. Demolon, nous ont fait voir que toutes ces levures sélectionnées peuvent donner naissance à des alcools supérieurs, qui se forment aux dépens des principes amidés du jus de raisin ou de ceux qu'on ajoute aux milieux artifi- -ciels pendant la fermentation principale. III Malgré tous les soins, malgré toutes les précau- tions, notamment de propreté, l'emploi de ces levures sélectionnées peut donner lieu à des résul- {ats non seulement négatifs, mais même mauvais ; il peut se présenter des fermentations incomplètes, voire même anormales, d'où mauvais rendements d'alcool pour le distillateur, d'où vins de conser- vation difficile pour le viticulteur. Aussi a-t-on songé depuis longtemps aux moyens appropriés pour augmenter le pouvoir ferment, la sécrétion diastasique des levures employées : c'est le cas de l’action du froid, de l'addition de fluorures aux moûts en fermentation (Effront) ; c'est encore celui de l'addition de sels de manganèse, comme des expériences personnelles, faites en collaboration avec M. H. Marchand, nous l'ont montré. On sait depuis longtemps, pour ne citer que les travaux de Dumas, Richet, Krüger, que certaines substances métalliques, même à faible dose, ont une action favorisante sur les êtres vivants et que leur influence mortelle sur ces mêmes êtres est, en général, précédée d'une période d'excitation qui, chez la levure, se traduit soit par une plus forte multiplication, soit par une plus abondante sécré- tion diastasique. Bien souvent, l'expérience le montre, il n'existe aucun rapport entre la dose optima et la dose mor- telle des corps excitants ; cette dose optima varie avec la nature du protoplasma microbien, la com- position du moût et les conditions de l'expé- rience. Les sels de manganèse jouissent à un très haut degré de ce pouvoir stimulant, et ce métal, dont Fimportance a été longtemps considérée comme secondaire, jouit, au contraire, comme nous l'ont appris les travaux de G. Bertrand sur la laccase, à un très haut degré, de qualités favorables pour les cellules vivantes. Lorsqu'on ensemence un moût sucré, additionné ou non d'un sel de manganèse à la dose de 4 °, on remarque que la fermentation se déclare sensi- blement au méme moment dans les deux ballons ; mais, si l'on augmente cette dose jusqu'à 5 à 6 °/6, la fermentation commence d'autant plus tardivement que la quantité de selemployée est plus forte; bien- tôt on la voit s'accélérer et se terminer à peu près au mème moment; la levure acquiert une grande tendance à l'agglutination. Il est très probable que le sel de manganèse ajouté au moût sucré, se combine partiellement avec la matière albuminoïde de celui-ci; il em résulte une précipitation ou un état colloïdal très favorable à l'oxydation, laissant au manganèse toutes ses propriétés oxydantes; une autre partie se combine à la levure, dont elle influence surtoub les sécrétions diastasiques. Ensemencons de l'eau de touraillons suerée à 24,48 °/, de saccharose avec une levure de win puis additionnons les ballons A et B respectivement de 1 gramme et 1 gr. 5 de sulfate de manganèse par litre. Le tableau suivant nous renseigne sur les prin cipales transformations produites, le tout rapporté au litre : TÉMOIN A B Sucre restant . . 16 gr 24,85 23,20 Alcool en volume . 81,0 101,8 113,0 Poids de levure . 2,100 2,195 2,010 Glycérine... 8,40 9,19 11,11 Acidité volatile en aci- de acétique . . . . 0,773 0,937 1,171 Lorsqu'on établit le rapport alcool en poids su levure = on trouve 30,4 (témoin), 37,2 (ballon A), 44,9 (ballon B) : l'activité diastasique augmente don avec la dose de manganèse. On constate qu'il existe des variantes d’une levure à l’autre, la dose favori- sante, la dose optima de sel n'étant pas toujours la même. Mais les différents sels de manganèse pro= duisent des effets analogues. Cette addition de sels de manganèse ne peut guère être appliquée qu'avec les moûts de distillerie ; aussi nous sommes-nous demandé si l'accoutumance au sels de manganèse ne conférait pas aux levures di nouvelles propriétés, comme Effront l'a constaté pour les fluorures. | L'expérience est venue confirmer ces prévisions; de la levure ensemencée dans des moûts sucrés additionnés de sulfate de manganèse, pendant plu sieurs générations, en portant la dose du sel ajouté progressivement de 1 à. 5 grammes par litre, tout en renforcant la richesse saccharine jusqu'à 28 °/., acquiert de nouvelles propriétés, qu'elle peut con= server pendant plusieurs générations. L'influence porte tantôt à la fois sur la multiplication de la levure et de ses diastases, tantôt elle se fait surtout sentir sur la levure-ferment seule. Ces levures peu= vent alors trouver emploi en vinification, brasserie, cidrerie, fabrication des hydromels, etc. | Voici d'abord des résultats obtenus dans un milieu purement minéral; les levures habituées aux L M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE 833 sels de manganèse sont toujours désignées par « bis ». d SUCRE ALCOOL ACIDITÉ À restant en volume volatile L Levure 16. . . 95,8 50,5 0,87 61,9 — 16 bis. 61,1 69,0 0,61 71,0 _ ESS UC 5425 1,70 65,0 — HAMDIS- 0020 ;4 90,0 1,21 82,0 RAC 0 84,8 56,6 1,68 61,0 — 153 bis. Bar | 98,0 5,00 18.0 La disparition de sucre a été très forte pour cer- taines levures accoutumées au manganèse; c'est affaire de dose et de race de levure. Dans le jus de raisins, les différences sont égale- ment sensibles; on trouve une plus forte production d'alcool, en regard d'une diminution de glycérine pour les levurestraitées. Uu jus de raisin avec 206 gr. de sucre par litre a fourni les résultats suivants : SUCRE ALCOOL GLYCÉ- ACIDITÉ restant en volume RINE volatile Levure 16. . 61er 12,0 7,083 0,618 — 16 bis. 41,0 81,0 6,211 0,518 — 14153. 36,5 84,5 9,611 1,008 — 153 bis. 19,0 95,0 6,916 0,698 Cette disparition plus grande du sucre peut mème se faire sentir dans un sens déterminé qui intéresse le viticulteur. Les vins mal fermentés sont en géné- ral lévogyres ; ils contiennent du lévulose, sucre plus difficile à transformer en alcool que le glucose. Différents essais faits dans cet ordre d'idées ont montré que les levures accoutumées au manganèse et au lévulose peuvent amener une plus forte décom- position de ce sucre, et des levures ainsi entrainées pourront rendre les plus grands services dans la fermentation des vins naturels restés sucrés. Des observations analogues peuvent être faites en ce qui concerne l'accoutumance des levures aux hautes températures, qui aura son importance pour les fermentations dans les pays chauds. Le manganèse est donc un excitant très énergique pour les ferments alcooliques, et les levures qui passent leur vie dans le sol y trouvent sans doute, de temps à autre du moins, ce stimulant, ne serait- ce qu'à l'état infinitésimal, qu'elles recherchent peut-être en vain dans nos milieux artificiels de laboratoire, où elles dégénèrent quelquefois rapide ment. Cette accoutumance aux sels de manganèse per- mettra au distillateur d'obtenir de bons rendements en alcool; elle assurera au viticulteur la décompo- sition plus complète du sucre de raisins et, comme conséquence, donnera des vins de meilleure con- servation et de plus grande valeur marchande. E. Kayser, Docteur ès sciences, Directeur du Laboratoire de Fermentation à l'Institut national agronomique. REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE Cette revue s'inspire des mêmes idées directrices que les précédentes. Nous y accordons, comme toujours, une place prépondérante à la Zoologie expérimentale et à la Biologie générale. [. — ZOOLOGIE GÉNÉRALE. ne 1. — La Variation. L'intérêt puissant et la faveur justifiée de la théo- rie des mutations ne doivent pas faire considérer ce processus comme le seul par lequel l'évolution a été réalisée. Plusieurs travaux récents plaident précisément en faveur du lamarckisme. Plate‘ appelle l'attention sur l'intérêt qu'offrirait une étude approfondie des Cerion (Pulmonés) des îles Bahamas, qu'il a eu lui-même l'occasion d'ob- server. Alors que les autres Pulmonés de ces iles sont stables, les Cerion y montrent une variabilité énorme. On les trouve par colonies dans le voi- 4 Verhdl. deutsch. zool, Gesells,, 1906, sinage de la mer; chacune de ces colonies à des caractères homogènes, mais diffère de celles des localités voisines; les grandes îles renferment tou- jours plusieurs formes locales ayant une série de caractères communs; les individus sub-fossiles ressemblent à ceux qu'on trouve actuellement au même endroit ou en diffèrent totalement. Plate ne pense pas qu'on puisse expliquer les faits par la sélection, mais plutôt par une action des facteurs physiques (climat, différence d'humidité entre les localités) sur un type dont le plasma germinatif est actuellement dans un état de grande instabilité. Il y a là un fait parallèle aux variations classiques des Achatinelles aux îles Hawaï, dont Borgerdink" vient précisément de publier une révision syslé- matique. Un Chrysomélien du genre Leptinotarsa à été l'objet d'une étude approfondie de Tower * aux mul- tiples points de vue de sa distribution géographique, DE EE 0 0, LEP 1 Zoologica, 1906. ? Carnegie Institut, Public. n° 48, 1906, 320 pe. 834 M. CAULLERY er F. de ses variations de toute nature, de ses mœurs et instincts, etc; des cultures méthodiques ont per- mis d'examiner la valeur des races, l'apparition de caractères nouveaux. C'est le type d’une catégorie de recherches qu'il y aurait intérêt à voir exécuter sur de nombreuses formes; nous devons nous borner ici aux conclusions générales de l’auteur. Tower considère que la sélection (pour le cas étudié) est un « facteur de stabilité, éliminant les formes extrêmes et limitant la population repro- ductrice aux individus les plus voisins du type moyen des races » ; les espèces se forment, suivant lui, non par la fixation de variations individuelles de grande amplitude (mutations), mais par l’accu- mulation de petites variations; la distribution géo- graphique révèle des faits frappants « de transfor- mation rapide en réponse directe à des stimuli du milieu environnant ». Les mutations sont « comme des variations prophétiques, indiquant ce que seront les futures espèces dans l’évolution de la race ». Ce sont, on le voit, des idées nettement lamarckiennes. Davenport‘ a été amené à des con- clusions du même ordre par l'étude des Pecten, vivants et fossiles, et des Melospiza. Nous rapprocherons des études précédentes des travaux expérimentaux relatifs aussi à la variation, mais procédant d'une méthode différente. Houssay * a cherché à mesurer l'influence immédiate d'un facteur déterminé sur l'ensemble de l'organisme d'un animal donné, à travers une série de géné- rations. C'est, dit-il, chercher à poser les équations différentielles du problème de l'évolution. L'animal choisi a été la poule, qui à été soumise à un régime carnivore absolu. L'expérience à porté sur 6 géné- rations carnivores successives et n'a pu être pous- sée plus loin parce qu'elle à entrainé la stérilité et, par suite, l'extinction de la lignée; elle est néanmoins, pour le moment, la plus prolongée qui ait été faite sur le sujet et envisage une multiplicité de faits considérables, soit morphologiques, soit physiologiques. Ce qui s'en dégage, d'après l'au- teur, c’est qu'une modification aussi intense du régime amène une exagération des phénomènes permanents d'auto-intoxication; la stérilité en est d'ailleurs un résultat partiel. L'effet anatomique n'est pas toujours immédiat, et l'un des résultats les plus nets est de mettre ce point en évidence; ainsi le foie et le rein ont commencé par subir un accroissement pendant les premières générations (par excès d'activité de résistance à l'intoxication), pour décroitre ensuite. L'intestin et le cœcum se sont réduits également; le gésier s'est rapproché de la structure qu'on lui trouve chez les Rapaces. ‘ Journ. of Exp. Zool., t. II, 1905. ? Arch. Zool. Exp., 3° sér., t. V1, 1907, MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE La ponte, d’abord augmentée et accélérée, a baissé ensuite, et les œufs, subissant eux-mêmes l'intoxi- cation, ont donné de moins en moins de succès à l'incubation. À l'instigation de W. Roux", et d'abord pour étudier l'adaptation fonctionnelle des muscles de l'estomac, Schepelmann * a exécuté des expériences analogues aux précédentes sur des Oies qu'il a soumises à divers régimes ; 3 ses constatations à l'ensemble des organes, mais sans les faire porter sur des générations sueces- sives. Ses résultats s'accordent bien avec ceux de Houssay, sauf cependant pour le tube digestif, où, notamment sous l'influence du régime carné, l'intestin et les cæcums se sont allongés au lieu de se raccourcir. La stérilité est aussi intervenue, mais par troubles immédiats chez les mâles. Citons enfin les intéressantes recherches ana- logues, mais limitées à l'intestin, faites par Babak *. Cet auteur a pris pour sujet un animal omnivore, le tétard de grenouille, et a varié beaucoup la nour- riture. Ses résultats, trop longs à résumer ici, con- cordent avec la donnée classique (Cf. notamment les travaux de Yung sur les tétards) de l’allonge- ment de l'intestin par le régime herbivore et de M son raccourcissement par le régime carnivore. Les diverses séries d'expériences précédentes nous amènent naturellement à signaler ici l’activité du Laboratoire de Biologie expérimentale installé depuis quelques années à Vienne, au Prater, (Biologische Versuchsanstalt)*. Nous avons déjà, les années précédentes, fait allusion aux intéres- dans la spermatogénèse santes recherches de Przibram sur l’hétérochélie et . la régénération chez les Crustacés *. Mentionnons rapidement aujourd'hui ses expériences sur l’éle- vage, les changements de coloration et la régé- nération des Mantes”; lement ce résultat singulier que le changement de couleur et le développement de la couleur verte ne seraient pas sous la dépendance, au moins immé- il a étendu aussi. ; La L.- # Le jh er nous en extrayons seu- diate, de la lumière, ni de l'alimentation par des « plantes vertes, ni de la couleur du milieu ambiant. Faisant vivre des Pagures sans coquille”, il a vu leur abdomen durcir, se pigmenter et prendre une structure nettement annelée. Dans le même labo- ratoire, Kammerer a réalisé depuis quelques années de très curieuses expériences sur les Amphibiens ; par des variations expérimentales dans le degré de { Arch. fur Entwickl.-Mech.,t. XXI, 1906. % Jbid., t. XXI, 1906, et t. XXIII, 1907. # Jbid., t. XXI, 1906. 4 Les travaux sont publiés dans les Archiv für Entwickl.- Mech., passim. 5 Cf. Revue annuelle de Zoologie, 1906, p. 88. 6 Arch. fur Entwiekl.-Mech. vt XXII, 1906, et XXII, 1907. 7 Ibid., t. XXII], 1907." LES # M. CAULLERY £r F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE la viviparité ou dans l'humidité du milieu, il à interchangé les caractères de Salamandra maculosa et de S. atra*. Opérant sur des A/ytes et des Hyla, qui, dans deux familles distinctes de Batraciens Anoures, représentent des adaptations parallèles indépendantes et convergentes à une vie plus exelu- Sivement terrestre, il a pu largement modifier la structure des larves et surtoutaccélérer ou retarder énormément le développement et la métamor- phose, en faisant varier les conditions d'humidité, de lumière et de température”. On voit nettement l'action puissante de ces facteurs extérieurs el lamarckiens *. Remarquons que ces divers travaux sont une véritable mise en œuvre expérimentale . de la poecilogonie de Giard. $ 2. — L'Hérédité. A. Lois de Mendel et mutations. — Dans notre première revue de Zoologie, en 1903, nous avons marqué, des premiers en France, la place qu'étaient appelés à prendre le principe des Mutations et le Mendélisme. Dans nos revues suivantes, nous n'y sommes revenus qu'incidemment. Entre temps, Cuénot exposait, ici même, les données principales des lois de Mendel. Il nous faut aujourd'hui dire un mot des nombreux faits expérimentaux accu- mulés depuis quatre ans, en nous bornant toutefois au domaine zoologique. En France, Cuénot*, en Angleterre, Bateson, miss Saunders, Punnett et Hurst°, en Amérique, Daven- port’, Castle, Allen et Forbes’, miss Me Cracken*, au Japon, Toyama”, pour ne citer que les principaux expérimentateurs, ont consacré au mendélisme des Mémoires bourrés de résultats établissant sa grande importance pour l'hérédité. Sans nous appesantir sur les faits purement confirmatifs, il nous parait intéressant de relever les singularités mises en évidence et importantes à considérer pour la Bio- logie générale". — { Arch. für Entw.-Mech., t. XVII, 1904. 2 Jbid., t. XXI, 1906. 3 Le même auteur vient encore de publier (Ibid. t. XXI, 1907) d'intéressantes observations et expériences sur l'hy- bridation chez les Poissons d'eau douce (notamment le Perca fluviatilis avec l'Acerina cernua). 4 Arch. Zool. Expérim., 4 sér., t. Il, Il et VI, 1904-1907, N et R. (animaux d'expériences : souris). 5 Reports Il et Ul to the Evolution Comm. of the Roy. Soc., 1905 et 1906 (poules). — Hursr: Proc. Boy. Soc., t. LXXVII (chevaux). ; 8 Carnegie Institution, n° 52, 1906 (poules). 7 CASTLE et ALLEN: Proc. Amer. Acad. of Arts a. Sc. 4. XXXVIIL, 1903 (albinisme). — ALLEN : Ibid., t. XL, 1904 (souris). — CASTLE : Carnegie Instit., n° 23, 1905 (lapins et cobayes). — Casrce et Forges : 1bid., n° 49, 1906 (cobayes). S Journ. Experim Zool., t. IH, III, 1V, 1905-1907 (Coléo- ptères Chrysomélides). ° Biol. Centralbl., t. XXNI, 1906 (vers à soie). Voir aussi Couraëne (in /evue de 1904). 0 Voir l'intéressant petit livre de Punxert: Mendelism, 2e édit., févr. 1907, Macmillan. 835 ———_—_—_—_—_————— Les expériences ont d'abord montré que lenombre de caractères soumis aux lois de Mendel est beau- coup plus considérable que les zoologistes ne l'avaient eru d'abord. Et des savants, comme Davenport, qui avouent avoir entrepris leurs expé- riences dans un sentiment défavorable au mendé- lisme, ont été convaincus par les faits de sa grande généralité. Ainsi, chez les poules étudiées par Davenport, une vingtaine de caractères contre deux ou trois seulement présentent l'hérédité mendélienne. Evi- demment, pour un certain nombre, la dominance ou la récessivité sont incomplètes, et l'hérédité est plus complexe que ne l'indique la loi de Mendel. Dans les croisements entre hybrides, le rapport des individus à caractère dominant aux récessifs est de 3 : 1 dans les cas typiques. Chez les Coléo- ptères étudiés par miss Mc Cracken, on le voit aug- menter de génération en génération ; ainsi, dans une espèce, il passe de 1,2 (1" génération) à 16 (6° géné- sation): à la 7°, le caractère récessif est devenu complètement latent. Les caractères dominants sont-ils toujours ances- traux par rapport aux récessifs correspondants? L'exemple des souris grises peut faire songer qu'il en est ainsi, Mais il ne convient nullement de géné- raliser. Ainsi, pour les cobayes, Castle a montré que, des trois paires de caractères mendéliens (alterna- tifs) relatifs au pelage, deux des récessifs (albinisme et poil long) sont d'origine relativement récente; mais le troisième caractère récessif (poil lisse opposé à poil broussailleux) est indubitablement ancestral. De même, le caractère «crête simple » de la poule ancestrale est récessif par rapport aux crêtes composées, « en pois » où «en rose » par exemple. Davenport remarque que, Sur dix-neuf paires de caractères mendéliens des poules, neuf an- ciens et dix nouveaux sont dominants. Même chez les souris, la démonstration, faite par Cuénot, de la dominance du jaune sur le gris (= jaune + noir + brun) nous parait être aussi une exception à la question posée. Me Cracken remarque que ses Chrysomélides passent par deux livrées successives; or, le carac- ère dominant est toujours celui de la première, Ces cas de Me Cracken rentreraient dans les précé- dents, si l'on admet le parallélisme de l’ontogénie et de la phylogénie. L'albinisme est généralement récessif par rapport à la pigmentation; les expériences de Cuénot et d'Allen l'ont établi d'une facon incontestable chez les souris: cela est vrai pour le cobaye, le lapin, très probablement l'homme, les poissons, les plantes, La poule, d'après Bateson et Saunders, Davenport, ferait, dans un grand nombre de cas tout au moins, exception à la règle. 836 M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE L'atavisme recoit, des règles de Mendel, une explicalion facile. Un croisement de souris albinos et de souris noires donne parfois des souris grises. Or, Cuénot a bien établi que, parmi les albinos, il y en avait de formules héréditaires différentes, par exemple qui possédaient, en puissance, le carac- tère gris masqué parce que associé au caractère absence de chromogène; la souris noire contient le caractère noir associé au caractère chromogène. La combinaison se fait entre caractères domi- nants (gris, — chromogène), et la descendance est grise. De même, des fécondations entre pois à fleurs blanches peuvent donner des fleurs rouges. Pour avoir du rouge, il faut qu'un caractère chromogène soit associé à un caractère rouge. Or, supposons que les deux blanes aient l’un le déterminant chromogène associé au caractère absence de pigment; l'autre le caractère pigment rouge associé à l'absence de chro- mogène; le croisement donnera des rouges, puisque les caractères chromogène et pigment rouge, domi- nants tous deux, se trouveront ensemble. Quand le caractère ancestral est récessif, il appa- rait une génération plus tard. Prenons les poules à crête en « pois » et à crête en « rose »; leur croise- ment donne des crêtes en « noix »; les deux carac- tères s'ajoutent, tous les deux étant également dominants. Ces poules à crêtes en «noix », croisées entre elles, donnent, conformément aux prévisions mendéliennes dans le cas de dihybridisme (formes différant par deux caractères) : neuf « noix », trois « pois », trois « roses » et une crête simple, qui est la crête ancestrale, d'où sont dérivés les « pois » et les « roses ». Nous avons déjà, en 1903, bien distingué deux | lois de Mendel et insisté sur ce que la deuxième, celle de pureté des gamètes, est plus générale que la loi de dominance. En voici un exemple bien net et, en même temps, la clef de singularités jusque-là inexplicables. Les poules bleues andalouses ne sont pas des races pures. Elles résultent du croisement de poules blanches et noires (en fait leur « bleu » est une forme diluée du noir); ici ni dominance, ni récessivité, mais mélange de caractères (bZending). Mais les gamètes sont purs, car les bleus croisés entre eux donnent, conformément aux prévisions, deux bleus, un noir et un blane. Le fait paradoxal, maintenant clairement expliqué, était donc le sui- vant : une poule blanche et une noire donnaient uniquement des bleues; les bleues, croisées entre elles, ne donnaient que moitié de bleues. De même, l'hérédité du caractère des cobayes, présentant quatre doigts aux pattes postérieures, est intermédiaire entre le mélange et l'alternance mendélienne (Castle et Forbes). Dans ses études sur l'hérédité de la pigmentation rapport avec les lois de Mendel, Correns à montré des souris, Cuénot a montré la dominance du jaune sur les autres pigments et même sur le mélange de pigments qu'est le gris. Il a cherché, en appliquant correctement les règles du mendélisme, à obtenir des races pures (l'obtention mathématique de ces races est une des applications pratiques du mendé lisme) en rapport avec ces divers pigments. Or, il na jamais pu y parvenir pour le jaune (les jaunes croisés entre eux, ou avec des gris et des noirs, ne donnent jamais uniquement des jaunes) ; cela revient à dire que les gamètes de valeur jaune ne peuvenk pas se combiner entre eux‘. Cuénot rapproche le fait des cas où l’autofécondation n’est pas possible Darwin en a donné de nombreux exemples chezle plantes. Chez les Tuniciers, on sait que l'autofécon= dation n'est guère possible chez le Ciona (Castle, Morgan), alors qu'elle réussit aussi bien que la fécondation croisée chez le Molqula”. Enfin, plus en qu'on n'a jamais la proportion voulue de races pures de maïs à grains ridés (caractère récessif); l'affinité des gamètes représentatifs est faible. Dans le cas de Cuénot, ce sont les gamètes domi= nants qui n'ont pas d'affinité l'un pour l'autre. Nous retrouverons ces faits dans l'interprétation du dimorphisme sexuel des spermatozoïdes. Les particularités indécomposables, tombant. facilement sous nos sens et qui s’héritent d'une facon séparée et indépendante (alternative), sont ce» qu'on appelle les caractères élémentaires ou carac- tères-unités (taxies de Coutagne). Or, les mutations sont, pour la plupart, de l’ordre de ces caractères- unités. Etant indivisibles, ils’ doivent avoir apparu brusquement, à peu près sous leur forme actuelle. Davenport a donc raison de dire que « l'existence incontestable des caractères-unités est une preuve de la théorie des mutations ». Le Mendélisme explique pour le mieux comment les [espèces nouvelles, apparues par mutation, se conservent dans la Nature. Elles sont d'emblée fixées, c'est-à-dire que leurs caractères nouveaux sont héréditaires; mais, en contact avec l'espèce souche, elles ne peuvent se conserver qu'en raison de la pureté des gamètes (où le nouveau caractère est représenté). Me Cracken, dans son dernier Mémoire, en donne un exemple intéressant relatif à l'apparition d'une variété complètement noire d'un de ses Coléoptères; il se comporte comme récessif mendélien dans ses croisements avec les Jar où um Ta IT MERE REESSS 1 Moncan (Biol. Centralb., t. XXVI, 1907) interprète les faits différemment; dans les gamètes, le jaune ne serait pas toujours dominant, mais alternativement dominant et latent. 11 n'y aurait pas besoin de faire intervenir une fécon- dation élective. 2 A ce propos, voir in Zool. Anz., t. XXXI, 4906, le Mémoire de SekerA sur l'importance de la fécondation croi= sée chez les Rhabdocèles. M. CAULLERY Er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE 837 deux autres variétés de l'espèce, et le caractère nouveau se montre stable. Le Mendélisme est done venu heureusement en aide à la doctrine des mutations. Et il est intéres- sant d'enregistrer les dernières lignes du travail de Davenport sur l'hérédité des poules : « Beaucoup, sinon la plupart, des caractères des poules ont ap- paru soudainement, et l'on ne peut guère échapper à la conclusion que, là, l'évolution s'est faite large- ment, quoique non exclusivement, par mutation. » Le même savant, en citant l'année précédente® des cas très nets d'évolution lente, était d'avis qu'il ne fallait exagérer ni dans un sens ni dans l’autre. Nous avons insisté dans notre dernière revue sur l'appoint sérieux qu'apportent à la loi mendélienne de pureté des gamètes les recherches eytologiques récentes, en particulier sur l'individualité des chro- mosomes. Nous n'y revenons cette année que pour citer quelques travaux confirmatifs, en premier lieu celui de miss Stevens” sur les cellules germi- natives des Aphides. Dans chacune des vingt-quatre espèces étudiées, chaque chromosome (aprés réduc- tion de 2 n à n) offre des particularités caractéris- tiques. Chez deux Coléoptères du genre Coptocyela, Nowlin* a remarqué, en étudiant la spermatogénèse, la forme variée des chromosomes : un possède la forme d'une couronne, deux d'une croix, plusieurs la forme d'E, et finalement il y a la paire d'idiochro- mosomes égaux (v. infra). On peut rattacher aux faits précédents ceux de Murray*, qui a étudié les mitoses des cellules somatiques de ZLepidosiren paradoxa; les chromosomes y sont schématiques et on ynote des différences de grandeur nettes el constantes (v. infra la question des. hétérochro- mosomes)”. 1 Journ. of Exper. Zool., t. Il, 1905. 2 Journ. of Exper. Zool., t. Il, 1905. — Carnegie Institut., Publ. n° 51, mai 1906. 3 Journ. of Exper. Zool., t. IT, 1906. 4 Anal. Anz., t. XXIX, 1906. , 5 LA QUESTION DE L'INDIVIDUALITÉ DES CHROMOSOMES. — Comme on le voit, tous ces travaux sont dominés par la notion de la permanence et de l'individualité des chromosomes; cha- cun de ceux-ci est considéré comme représentant matériel- lement une partie des propriétés de l'espèce. Nous avons longuement analysé le mouvement de faits et d'idées sur cette importante question dans la revue de 1906 (p. 39-40), ainsi que les conclusions qui en découlent pour la réduc- tion chromatique, lors des divisions maturatives des élé- ments sexuels, et la loi de Mendel (v. p. 41-42). Malgré la faveur dont jouissent actuellement ces théories et le nombre des faits qui semblent s'accumuler à leur appui, il faut cependant garder à leur égard une expectative prudente et nous croyons devoir y insister ici. On ne peut pas suivre réellement les chromosontes à la période de repos du noyau. Ce n'est que par des raisons indirectes qu'on peut supposer la continuité de leur individualité d'une division à l'autre, et, dans ces conditions, il est facile de se laisser suggestionner et d'interpréter de facon tendancieuse, en accordant une valeur trob positive à des particularités légères de structure. Dans un très remarquable Mémoire paru pendant l'impression de cette revue (Arch. f. mikr. En somme, le mouvement de ces dernières années autour des lois de Mendel à donné un regain de faveur aux hypothèses particulaires sur l'hérédité. A tort, pense Herbst', qui est partisan d'une con- ception chimique de l'espèce (CF. Le Dantec, Driesch). Le plasma germinatif n'est pas, suivant lui, un agré- gat de parcelles correspondant à des parties dis- tinctes de l'organisme; l'œuf fécondé renferme toutes les propriétés futures de l'individu, non pas, dit-il, à l'état extensif, mais à l'état intensif; toutes sont contenues dans une portion, si petite qu'elle soit, de l'œuf et non pas individualisées dans l’es- Anat., t. LXX), F. Meves, à qui l'on doit plusieurs des pro- grès récents les plus positifs et les plus importants de la cytologie, et en particulier de la spermatogénèse, livre à une critique lumineuse et serrée les théories et les faits émis dans ce domaine, au cours des dix dernières années, et il conclut au rejet, comme inexactes, de plusieurs des notions sur lesquelles se basent les spéculations les plus en vogue. Il montre ainsi qu'aucune des divisions trans- versales de chromosomes, lors des cinèses de maturation (type de division que Weismann considérait comme néces- saire pour permettre la réduction chromatique qualitative, indispensable a priori), n'est actuellement prouvée el, per- sonnellement, se basant sur l'observation cytologique, il en rejette la réalité; de même, les nombreux faits de copula- tion de chromosomes, tant invoqués, lui paraissent douteux ; les figures de synapsis, si en faveur également, ne sont pour lui qu'une apparence due à l’action défectueuse des réactifs. On ne les trouve pas là où la fixation est vraiment bonne. Sa conception de la réduction chromatique est iden- tique à celle que nous exposions (revue de 1906, p. #1). C'est une réduction de masse, effectuée par la succession immé- diate des deux divisions de maturation : la réduction numé- rique des chromosomes, au début de la première, n'a qu'une importance secondaire, les chromosomes n'ayant pas, suivant lui, d'individualité, mais n'ayant d'existence propre que par la disposition géométrique des forces qui interviennent lors des divisions nucléaires; cette disposition, au moment des cinèses de maturation, est simplement telle que, pour des raisons inconnues, le réseau chromatique est décomposé en » fragments au lieu de 2 n. La question de la réduction chromatique, dit Meves (J.c., p.465), n'a été com- pliquée que par l'introduction de la notion de l'individua- lité permanente des chromosomes. « L'allure de la chroma- tine dans les divisions maturatives des cellules sexuelles n'est qu'un argument entre autres plaidant contre la valeur générale de cette hypothèse. » Meves reconnait cependant la valeur logique de l'idée de Weismann relativement à la nécessité d'une réduction chromatique qualitative, lors de la maturation des cellules sexuelles; mais, suivant lui, cette nécessité n'entraine ni la notion de l'individualité des chromosomes, ni l'existence de divisions transversales, qu'il regarde comme contraires à l'observation des faits; la structure même des chromosomes, leur raccourcissement, leur épaississement et leur structure en tétrades au début de la maturation, leurs deux divisions /ongitudinales qui suivent, assurent cette réduction. Les grains chromatiques juxtaposés dans les quatre éléments d'une tétrade ne sont pas identiques, et comme, entre les deux divisions, il n'y à pas d'accroissement de ces grains, les divisions longitudi- nales elles-mêmes effectuent une séparation qualitative; la seconde doit être considérée comme sélective des propriétés héréditaires (Ærbhungleich Roux, Reductionstheilung Weis- mann). Cette discussion nous paraît une des plus claires qui aient été écrites, et, comme elle repose sur une Con- naissance des faits et une habileté technique éprouvées, nous avons cru devoir nous y appesantir ici. Note ajoutée à la correction des épreuves.) 4 Arch. f. Entwick.-Mech., t. XXI, 1906. 838 M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE pace. Pour ce qui concerne la pureté des gamètes, par exemple, on peut imaginer que la combinaison chimique caractéristique de l'espèce est dissociée dans les cellules sexuelles et qu’elle se reconstitué dans l'œuf fécondé. On aura ainsi la possibilité d'interpréter les divers résultats constatés. 2, Prédominance générale de l'hérédité pater- nelle ou maternelle. — Au point de vue expérimen- tal, Herbst cherche à fixer le déterminisme en vertu duquel le produit ressemble plus ou moins à l'un ou l’autre de ses progéniteurs. Pour Weismann, c'est le résultat d'une lutte entre déterminants homo- logues. Mais Herbst admet a priori que les facteurs extérieurs peuvent avoir leur part, et par là que le problème est accessible à l'expérience. Il a cherché tout d'abord à vérifier des résultats annoncés par Vernon, qui, en 1898, avait cru constater que des hybrides d'Oursins (Strongylocentrotus ', Sphæ- rechinus ®) ont une plus grande tendance à repro- duire le type maternel en été qu'en hiver, ce qui pourrait indiquer une action de la température. Or, Herbst, par des expériences bien conduites, montre qu'il n'en est rien. La chaleur modifie, en réalité, les caractères de toutes les larves Pluteus, en particu- lier de leur squelette ; à 27°, on obtient des Pluteus hybrides, ayant un certain nombre de caractères de Sphærechinus; mais on obtient des variations parallèles sur des Pluteus ordinaires de Strongylo- centroltus. Godlewski'et Kupelwieser®, réalisant après Loeb des croisements entre espèces très éloignées (v. nos revues de 1904 et 1906), ont réussi à obtenir la pré- dominance du type maternel. Herbst lui-même est arrivé à un résultat semblable en opérant avec les mêmes Oursins que précédemment, et en super- posant à la fécondation naturelle les méthodes de la parthénogénèse expérimentale, En alcalinisant légèrement l'eau de mer, God- lewski a réussi à féconder des œufs d'Oursins variés par du sperme de Comatule. Il a étudié les phéno- mènes morphologiques de la fécondation et il a vu le spermatozoïde d'Antedon se comporter, dans l'œuf d'Oursin, comme un spermatozoïde d'Oursin: formation d'asters autour des centrioles ; union des pronuclei $'et ®, de telle sorte que les deux chro- matines ne sont plus distinguables, ete. Les noyaux un volume nette- ment intermédiaire entre ceux des larves d'Oursin des divers stades larvaires ont et d'Autedon, ce qui prouve que la chromatine paternelle ne dégénère pas au cours du développe- ment. Le fait capital est que Godlewski à obtenu 4 Arch. f. Entwick.=Mech., t. XX, 1906. ? Biol. Ceutralbl., t. XXVI, 1906. 3 Arch. f. Entwick.-Mech., t. XXII, 1906. ainsi des Pluteus, c'est-à-dire une larve du type malernel pur. Kupelwieser a réussi à féconder des œufs d'Our- sin (Strongylocentrotus) par du sperme de moules ; il est parvenu à des gastrulas du type maternel] ; mais il n'a pas suivi aussi bien que Godlewski ies phénomènes nucléaires. Herbst a traité les œufs de Sphærechinus (avant de les féconder par le sperme de Strorgylocentro- tus) par le réactif de Loeb (v. revue de 1906 et infra) pour la production artificielle de la membrane de fécondation (acide gras); mais il l'a laissé agir un temps insuffisant pour la formation de cette mem brane, Il à ainsi obtenu des Pluleus où les carac- tères maternels étaientnettement accentués et même des larves entièrement du type maternel. Herbst considère qu'il y a là une voie expérimen- tale pour atteindre le déterminisme de la rupture d'équilibre entre les deux tendances héréditaires paternelle et maternelle. Wilson, en faisant une analyse précise des modifications de l'œuf au début du développement parthénogénétique (déterminé dans le cas présent par l'acide gras), à constaté un accroissement dans la taille du noyau; peut-être y a-t-il un rapport quantitatif entre la masse de sub- stances nucléaires de l’ovule et le degré où se manifestent les caractères maternels. $ 3. — Le sexe (hérédité, détermination, etc.), 1. Détermination du sexe. — La loi de Mendel parait devoir être étendue également, dans une certaine limite, à la détermination du sexe. Nous avons résumé, en 1903 (v. p. 611), les idées de Castle à ce sujet. Pour ce savant, les gamètes mûrs ont chacun un sexe, désormais invariable, et qui s'est déterminé lors des divisions maturatives; il y a des spermatozoïdes mâles et des spermato- zoïdes femelles, aussi bien que des ovules, et sont seules fécondes les conjugaisons entre ovules et spermatozoïdes de sexes différents. Quant à la dé- termination du sexe du produit, elle suit la loi de Mendel. L'ensemble imposant de travaux relatifs à la spermatogénèse des Insectes à apporté une base positive à cette manière de voir. On y observe des hétérochromosomrs, ainsi nommés parce qu'ils se différencient des autres par leur rôle, en partieu- lier au moment des divisions de maturation; en général, ils diffèrent également par la forme et la grosseur. On trouvera dans le récent travail de Gutherz' un résumé de nos connaissances à cet égard. Sans entrer dans les détails, il y à deux catégories principales de cas : celui où le mâle ren- ferme un seul hétérochromosome (le nombre des EE ZE —— 1 Arch. f. wikr. Anat., t. LXIX, 1907. | $ 2 : $ à { ? M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE 839 chromosomes est alors impair et inférieur d'une unité à celui des femelles), et celui où le mâle à deux hétérochromosomes inégaux entre eux, géné- ralement appelés idiochromosomes (il y à alors égalité de chromosomes chez le mâle et la femelle, mais le petit idiochromosome du mäle est repré- senté par un chromosome normal chez la femelle). A la première catégorie, appartiennent la PBlatta germanica, d'après Wassilief" (?), la Forfcula auri- cularia, d'après Zweiger?, la Locusta viridissima, - d'après Otte*, divers Arachnides : la Zycosa, d'après Montgomery ‘, l'Agalena, d'après Watase”, l'Epeira, d'après Berry, divers Hémiptères, d'après Wil- son’, pour nous borner aux travaux les plus ré- cents. L'existence de deux idiochromosomes à été reconnue chez d'autres Hémiptères par Wilson, chez le Tenebrio molitor par miss Stevens, chez deux autres Coléoptères (g. Coptocycla) par Now- lin°, Dans tous ces eas, il y a production, en nombre égal, de deux catégories de spermatozoïdes, les uns ayant mêmes chromosomes que les œufs, les autres ayant ou bien un chromosome en moins, ou bien le même nombre, mais parmi eux un petit chromo- some aberrant, L'observation microscopique a montré que les premiers sont producteurs de femelles, les autres producteurs de mâles. Or, dans le même embran- chement des Arthropodes, on connait des cas où les œufs sont visiblement distinguables, par leur taille, en producteurs de mäles et producteurs de femelles”. On est done amené à généraliser cette notion du sexe chez les gamètes, alors même que nous sommes incapables de saisir quelque différence au microscope. Par exemple : le cas de l'hémiptère Nezara, étudié par Wilson, et qui a deux idiochro- mosomes égaux, et, par conséquent, un seul type de spermatozoïdes, est relié par une telle série de formes aux précédents qu'on ne peut guère douter que, là aussi, les gamètes mâles ont individuel- lement l'un ou l’autre sexe. Cette notion du sexe des produits génitaux, si on cherche à la mettre d'accord avec la ségrégation mendélienne, transmission et dominance des carac- EE Ï — — ——]———— aa LUI 4 Arch.f. mikr. Anat., t. LXX, 1907. 3 Zool. Anz., t. XXX, 1906; Jenaisch. Zeitschr., t. XL, 07. 2 7001. Anz.,t. XXX, 1906. 5 Proc, Acad. Nat. Sc. lhiladelphia, 1905. 5 Biolog. Bull., t. VII, 1905. 5 Jbid., t. XI, 1906. 7 Journ. of Exper. Zool., t. 11, 1905, et €. JIT, 1906. Carnegie Institut., Publ. n° 36, 1905. ° Journ. of Exper. Zool., t. II, 1906. # Voir, en particulier, le nouveau travail de MorGan (Biol. Bull., t. X, 1906) pour le Phylloxera. MOoNTGOMERY (B101. Bull., &. XII, 1907) parle du dimorphisme probable des œufs d'une araignée. tères sexuels comme le veut Castle, a pour corol- laire nécessaire qu'il n‘y a fécondation qu'entre pro- duits sexués contenant des déterminants de sexes différents : œuf Q et sperm. $'; œuf j'et sperm. 9. Il y aurait donc fécondation élective, et Wilson ne voit aucune impossibilité à l'admettre, puisqu'un phénomène analogue a été reconnu par Cuénot pour les souris jaunes (v. supra). Ce n'est pas le sexe qui est déterminé par la fécondation, mais la féconda- tion qui est déterminée par le sexe. Dans les cas reconnus de dimorphisme des spermatozoïdes, on peut dire que les hétérochromosomes sont les dé- terminants du sexe; ce seraient des gonochromo- somes, et Wilson explique clairement, d'accord avec les faits, comment ces éléments obéiraient aux lois de Mendel. Mais il reconnait qu'une autre hypothèse est pos- sible : la différence dans les chromosomes ne serait que l'expression d'une différence physiologique ou fonctionnelle, plus générale, dans les spermato- zoïdes ; et il n’est pas besoin d'admettre dans ce cas une fécondation élective, puisque la différence por- terait seulement sur les produits mâles. Ces faits sur le rôle du noyau dans la production du sexe peuvent s'accorder avec ceux où c'est le protoplasma qui fait la détermination ou bien ceux où le sexe est déterminé indépendamment de la fécondation. Dans tous les cas, conclut Wilson, il est certain qu'il existe une corrélation constante et précise entre les chromosomes et les caractères sexuels; il y a là, indubitablement, une base concrète pour une interprétation de la production des sexes et de la transmission des caractères sexuels par le méca- nisme de la ségrégation mendélienne. R. Hertwig‘ a consacré au problème de la sexua- lité et du déterminisme du sexe tout un ensemble de recherches expérimentales exécutées par lui ou, sous sa direction, par ses élèves. Ces recherches procèdent d'un tout autre esprit. Elles se rattachent aux idées qu'il a émises sur les rapports néces- saires entre la masse du noyau et celle du proto- plasma *; l'hypertrophie de l’un des deux éléments aux dépens de Fautre amène des lransforma- lions (rejet de chromidies, multiplication cellu- laire, ete.), destinées à rétablir l'équilibre. Les re- cherches d'Hertwig sur les Protozoaires lui ont montré que des facteurs externes, tels que la famine, les changements de température, l'activité fonc- tionnelle ininterrompue, pouvaient provoquer cette rupture d'équilibre, et que les phénomènes de sexualité intervenaient souvent alors comme un mécanisme régulateur pour le rétablir. Or, les gamètes des Métazoaires sont précisément des cel- ne LE PE 1 Verhdl. deutsch. Zool. Gesells., 1905 et 1906. 2 Cf. Revue annuelle de Zoologie, 190%, p. 596. 840 M. CAULLERY Er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE lules où l'hypertrophie de l'un des éléments est manifeste : celle du noyau pour le spermatozoïde, du cytoplasme pour l'œuf; d'où l’idée que l’on pour- rait agir sur les phénomènes de sexualité chez eux par les mêmes facteurs que chez les Protozoaires. Trois séries de recherches ont été entreprises principalement dans ce but : Hertwig a cherché à influer sur le déterminisme du sexe chez les gre- nouilles, de diverses facons, surtout en fécondant des œufs soit incomplètement mürs, soit ayant dépassé la maturité. Ce dernier cas rentre évidem- ment dans les conditions des expériences de Loeb et de Herbst, où un commencement de parthéno- génèse expérimentale précède la fécondation. Les résullats des deux séries d'expériences ne sont pas des plus nets. Hertwig croit cependant pouvoir en conclure qu'il y à augmentation du nombre des mâles”. Von Malsen * a opéré sur le Dinophilus apatris, où, comme Korschelt l'a montré, il y a deux catégories d'œufs, les uns, petits, produisant des mâles, les autres, gros, produisant des femelles. Le sexe est donc fixé dès l'état d'œuf. L'ovogénèse, étudiée par von Malsen, montre que les ovules définitifs ont absorbé pendant leur croissance un certain nombre de cellules-sœurs, plus considérable dans le cas des œufs femelles. L'auteur a établi des cultures de Dinophilus à diverses températures, et le résultat a été qu'à température élevée (26°) on obtient une proportion notablement plus forte d'œufs mâles; les femelles fournissent des pontes se succédant plus rapidement et plus petites. Il interprète en admettant que l'accélération de l'activité sexuelle est plus considérable que l'augmentation de la nutrition; en raison de cette nutrition insuffisante, l'ovogénèse se fait surtout sur le type mâle. L'ac- tion de la température serait done indirecte. D'ail- leurs, la famine à température normale a donné les mêmes résultats que l'élévation de température avec nutrition normale, La troisième série d'expériences, relative à un cas tout différent, à été faite par Issakovitch? sur des Daphnies. Ces Cladocères se reproduisent le plus habituellement par parthénogénèse, et Weis- mann avait cru montrer qu'il y avait un cycle régu- lier, composé d'un certain nombre de générations succédait assez régulièrement une génération bisexuée. Les expé- parthénogénétiques, auxquelles ! En tout cas, ces expériences l'ont conduit à des consta- tations intéressantes sur l'évolution de la glande sexuelle des Batraciens, confirmant certains résultats obtenus autre- fois par Pflüger, et d'après lesquels beaucoup de tétards seraient hermaphrodites, pour devenir finalement mâles. Il y aurait lieu de répéter en divers points ces observations, sur lesquelles nous attirons l'attention. ? Arch. {für mikr. Anat., t. LXIX, 1906. 3 Arch. {ür mikr. Anat., t. LXIX, 1906. riences d'Issakovitch montrent, au contraire, qu'il n'en serait pas ainsi et que (comme des expériences faites il y a quelques années en France par de Kerhervé l'avaient déjà indiqué) on obtiendrait à volonté d'abord les mâles, puis les femelles à œufs fécondables, en abaissant la température !, Ici en- core, done, celle-ci interviendrait et, d'après Issa- kovitch, l'intermédiaire de la modifiant les conditions de l'ovogénèse. Ces deux cas sont dominés, en somme, par les conditions particulières, analogues, de l'ovogénèse. En regard de ces expériences, il n'est pas sans intérêt de mettre celles de Punnett * sur l'Aydatina. Ce Rotifère a déjà servi aux expériences bien connues de Maupas et de Nussbaum. Le premier de ces auteurs avait conclu qu'une température élevée provoquait la formation des mâles; le second, que c'était la nutrition qui était le facteur déter- par minant, Contrairement à l'un et à l’autre, Punnett déclare le déterminisme du sexe chez l'Hydalina indépendant des facteurs externes et lié seulement à des causes internes. Ni la température, ni la nourriture n'auraient d'influence. 2. Parthénogénèse naturelle. — Les cas reconnus de parthénogénèse chez les Insectes sont de plusen plus nombreux ; Ssilantjew® vient encore d'en signaler un nouveau cas chez un Coléoptère, l'Otio- rhynchus turca. Gordon *, après Henneguy, en tente une classification qui montre la complexité des phénomènes observés. Nous ne dirons ici qu'un mot des modifications qui se présentent, chez les œufs d'Insectes non fécondés, lors de la maturation et du développe- ment. Excepté chez l'Aphis et quelques cas excep- tionnels, il y a trois globules polaires (le premier s'est divisé en deux) qui ne sont pas expulsés. Nous avons, dans une revue précédente, fait con- naître l'assertion de Petrunkewitch sur le rôle fécondant du deuxième globule polaire, qui s'uni- rait, chez les œufs non fécondés d'abeilles, avec la moitié du premier pour donner le tissu d'où sort ensuite le testicule. Castle regarde les œufs d'abeille à maturité comme mâles (non fécondés, ils donnent des mâles) ; le deuxième globule polaire serait femelle, et il suppose que tous les sperma- tozoïdes dérivés de lui sont femelles aussi (en fécondant les œufs, ils donnent des femelles); il 1 Les conclusions d'Issakovitch sont attaquées, dans une note parue pendant l'impression (Zoo!. Anzeiger,t. XXXII), par Strohl. Cet auteur a réétudié la succession naturelle des générations sexuée et asexuée chez un autre Cladocère, le Polyphemus pediculus. Il maintient la notion de cycles de Weismann et l'indépendance de ceux-ci par rapport aux facteurs externes tels que la température. 3 Proc. Roy. Soc., t. LXXVIIT, 1906. 3 Zool. Anz., t. XXIX, déc. 1905. » Mem. a. Proc. Manchester Lit. a. Phil. Soc., 1906. nutrition en tbe hoc Éd RÉ CS Sd Or de Pt No 6 $ adress Re . “ 4 M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE 841 est d'ailleurs plausible que les déterminants de l’autre sexe, apportés par le premier globule po- Jaire, soient expulsés avec le pseudo-globule polaire décrit par Meves' dans la spermatogénèse (voir notre revue de 1904) et que Mark et Copeland’, Doncaster* ont retrouvé. Doncaster ‘ a cherché à vérifier, chez les Ten- thrèdes, les faits avancés par Petrunkewitch; il à bien vu les trois globules polaires et à observé, chez les œufs qui donneront des mâles, une fusion plus ou moins complète de deux d’entre eux; le noyau double de Petrunkewitch existe bien, mais finalement tout dégénère, sans former, par consé- quent, un organe el que les testicules. Au point de vue des chromosomes, chez les Abeilles, il y a toujours réduction quantitative el qualitative; chez les Tenthrèdes, les œufs parthé- nogénétiques ne la présentent pas. Il en est de même chez les Aphides (miss Stevens), où il n'y à d'ailleurs qu'un globule polaire, En revanche, il y a réduction typique, pour les œufs qui seront fécondés et pour les spermatocytes, aussi bien chez les Tenthrèdes (Nematus) que chez les Aphides. 3. Les caractères sexuels secondaires. — A la question de la sexualité proprement dite, se rattache celle des caractères sexuels secondaires. Giard a, le premier, saisi les rapports étroits qui existent entre ceux-ci et l'état des glandes génitales; il a mis en évidence la généralité de la perturbation que la castration parasitaire apporte dans ces caractères. G. Smith”, à propos de la Sacculine qui vit sur le Crabe /nachus scorpio, à fait de ces phénomènes une étude approfondie qui confirme pleinement les vues de Giard, et F. À. Potts' est arrivé à des résul- tats absolument parallèles pour les Pagures (Æ£upa- qurus meticulosus) parasités par des Peltogaster. Quel est le mécanisme de cette dépendance mu- 1 Le Mémoire détaillé de Meves sur les divisions matura- tives des spermatocytes chez l'abeille a paru pendant l'im- pression de cette Revue (Arch. f. mikr. Auat., t. LXX); de nombreuses et belles figures, offrant la précision cytologique habituelle à l'auteur, montrent toutes les phases du pro- cessus. On se rappelle que la première division expulse du spermatocyte une masse cytoplasmique non nucléée (cor- respondant au premier globule polaire), la seconde un corps nucléé représentant le second globule polaire. Meves inter- prète ces faits de la facon suivante : l'œuf non fécondé de l'abeille, d'où est sorti le mâle, quoique parthénogénétique, a expulsé deux globules polaires: ses tissus sont donc des cellules à chromatine réduite; la réduction est, par consé- quent, déjà effectuée lors de la spermatogénèse: elle n'a plus à se produire: de là, dans les deux divisions matura- tives, l'avortement de l’une des divisions nucléaires (la pre- mière); celle qui reste ne présente pas de réduction chro- matique. ? Proc. Amer. Acad., t. XLIII, 1906. 3 Anat.:Anz:,t. XXIX, 1905. 4 Quart. Journ. Micr. Sc., t. LI, 1907. 5 Fauna und Flora des Golfes von Neapel. Monog.29, 1906. 5 Quart. Journ. Micr. Sc., t. L, 1906. tuelle? Bouin et Ancel, pour les Vertébrés, voient dans la glande interstitielle du testicule un organe ayant une autonomie réelle et agissant directe- ment les sexuels M. Nussbaum ‘ a fait à cet égard de très intéres- santes expériences sur la grenouille (22. fusca). Les caractères sexuels secondaires du mäle (tubercule du pouce, hypertrophie musculaire de l'avant-bras) s'exagèrent périodiquement lors du rut, Nussbaum a montré que la castration totale du mäle suppri- me leur retour, mais non la castration uni-latérale. D'autre part, il introduit, sous la peau du dos d'un individu châtré, un fragment de testicule privé de toute connexion nerveuse ou vaseulaire; ce frag- ment est résorbé progressivement, mais sa présence détermine la réapparition des caractères sexuels secondaires. D'où il faut conclure que ceux-ci sont bien sous la dépendance d'une sécrétion particu- lière du testicule. L'auteur croit prouver que cett action a lieu par l'intermédiaire du système ner- sur caractères secondaires. veux; Pflüger*, d'ailleurs, ne considère pas ses arguments à cet égard comme valables, mais, au point de vue qui nous occupe, c'est là une question secondaire. $ 4. — Parthénogénèse expérimentale. Théorie chimique de la fécondation. Au cours de nos revues des années précédentes, nous avons indiqué les progrès successifs de la par- thénogénèse expérimentale et, dans la dernière”, nous avons particulièrement insisté sur la méthode perfectionnée de Loeb pour imiter aussi parfaite- ment que possible l'action du spermatozoïde. Dans cette méthode, on agit en deux temps au lieu d'un. Cette dissociation a permis à Loeb, dans une suite de travaux *, de scruter de plus près les phénomènes, de facon à en dégager une théorie chimique de la fécondation. Pour Loeb, l'effet essentiel de la fécondation, naturelle ou artificielle, est une mise en œuvre des oxydations dans l'œuf. Les enzymes nécessaires y existent déjà et ce n'est pas le spermatozoïde qui les introduit; ou bien leur action est empêchée par des anticorps que la fécondation annihile ou expulse (sécrétion au moment de la formation de la membrane), ou bien ils sont à l'état de proen- zymes. Ces oxydations paraissent nécessaires pour la synthèse des composés nucléiques à partir des 1 Sitzungsber. Niederrb. Gesellsch., 190% et 1906, et Ergebn. Anat. und Entwick. gesch., t. XV, 1906. ? Pfluger's Archiv, t. CXVI, 1907. 3 Rev. gén. des Sc., 1906, p. 44. 4 Biochem. Zeitschr., t.1, p.183, ett. Il, p. 35 et81, 1906; — Univ. of Calif. Public. Pysiol.,t. I, p.141, 1905, ett. IL, p. 1, 33, 39, 49, 1906; — PAüger's Archiv, L. CXIIT, 1906, et t. CXVIII, p. 30 et 181, 1907; — Proc. Soc. for Exp. Biol. a. Med., t. IV, 1907. 842 M. CAULLERY Er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE constituants protoplasmiques (l'accroissement de la masse nucléaire, par rapport au cytoplasma, est, en effet, une des caractéristiques précoces et essen- tielles du développement de l'œuf); la formation de nucléines doit être une synthèse par oxydation. Loeb a vu que la formation de la membrane (provo- quée par l’action d'un acide gras monobasique; 1 temps) est suivie de processus d'oxydalion, car quand FO est remplacé par l'H, ou bien quand son action est entravée par le KCAz, il ne se produit aucun début de développement. L'action de l’eau de mer hypertonique (2° temps) a pour effet de régler ces processus d'oxydation, qui amèneraient rapide- ment la mort de l’œuf entouré d'une membrane, par production de substances toxiques. Dans ce deuxième temps encore, il n'y a action qu'autant que l'eau de mer contient de FO libre. L'œuf fécondé est évidemment un strict aérobie?, Revenant en arrière, Loeb montre que, dans l’ancienne méthode de parthénogénèse artificielle, par simple élévation de la pression osmotique, il y a aussi formation (peu nette à la vérité) d'une membrane et superposition de deux actions, d'abord celle d'une faible élévation de la pression osmo- tique, et en plus d'une certaine concentration des ions hydroxyles. Partant des faits acquis relatifs au rôle de l'O dans la mitose en général et à sa concomitance avec une modification de l'activité respiratoire, Mathews”® analyse, de son côté, les phénomènes consécutifs à la maturation et au début du déve- loppement de l'œuf d’'Asterias, et pense qu'une oxy- dase s'échappe du noyau au moment de la matura- tion; il s'attache à montrer que la production des asters, qui n'a lieu qu'en vie aérobie, dépend de trois facteurs : une centriole (probablement subs- tance énergiquement réductrice), une oxydase et de l'O libre, D’après Mathews, il est probable * Un des phénomènes les plus précoces est la formation d'asters. Par une analyse très délicate, en superposant la parthénogénèse artificielle et la fécondation par le sperme, Lors (Arch. f. Entw.-Mech., t. XXIII, 1907) montre que cette formation est secondaire aux processus chimiques. ? Durant l'impression de cette revue, DELAGE, dans des Notes successives (C. R. Acad. Sciences, 22 juillet, 26 août, 23 septembre), apporte une série d'interprétations et de faits nouveaux. Sans entrer, pour le moment, dans le détail complexe de ses résultats, notons d'abord qu'il met en doute (contra Loeb) le rôle de l'oxygène comme facteur détermi- nant de la parthénogénèse chez les Echinodermes. D'autre part, il a obtenu des résultats excellents par des solutions isotoniques à l'eau de mer; on peut réussir avec une solu- tion pure de sucre sans adjonction d'électrolyte. Il a enfin établi avec précision un procédé qui donne des résultats réguliers et excellents, par l'action de solutions convenables d'acides et d'alcalis, — en particulier de tannin et d'ammo- niaque, — les premiers agissant comme coagulants, les seconds comme dissolvants des colloïdes protoplasmiques. Delage possède actuellement plusieurs Oursins d'origine parthénogénétique ayant achevé leur métamorphose. 5 Amer. Journ. of Physiol., t. XVIII, 4907. que les méthodes de parthénogénèse artificielle agissent indirectement en produisant, peut-être aux dépens du noyau, une centriole dans le cyto- plasme. De là une base pour les différences électro- statiques en potentiel que divers auteurs invoquent pour expliquer la figure astrale. Les moyens de production de la membrane autour de l'œuf sont à l’ordre du jour, La méthode de Loeb a été vérifiée de divers côtés. Lefevre! l'a mème généralisée, puisqu'il obtient le développe- ment des œufs de Thalassema melita en employant non seulement des acides organiques, mais encore des acides inorganiques dilués (HCI,CO*,AzO‘H, SO‘H”°). Dans ce cas, point même n'est besoin de recourir au deuxième temps; pourtant les résultats de Lefevre sont certainement les plus satisfaisants qui aient été obtenus jusqu'ici avec les Annélides*?, Dans ses expériences d'hybridation, dont nous parlons d'autre part, Kupelwieser* a montré qu'en employant du sperme de moule (ou d'échinoderme) à une certaine concentration, qu'il soit vivant, tué par la chaleur ou même filtré après la mort, on obtient la production d'une membrane autour des œufs de Strongylocentrotus et qu'elle jouit des mêmes propriétés que celle obtenue avec les acides gras. Loeb*, de son côté, a obtenu un résultat très inattendu en découvrant dans le sang de certains Géphyriens (Dendrostoma et Sipunculus) une sub- stance capable de produire une membrane; elle est probablement de nature albuminoïde (l'ébullition la détruit) et elle agit à une dilution supérieure à 1.000. Il nous faut encore mentionner divers travaux relatifs à la superposition de la fécondation natu- relle et de l’action des substances amenant la par- thénogénèse expérimentale. B. Moore, Roaf et Whitley®, dans le but de trouver des analogies avec les anomalies cellulaires cancéreuses, ont fait agir de petites quantités d'alcalis ou de sels alea- lins (tels que phosphate disodique), dans les milieux où se développent des œufs fécondés d'£chinus; la croissance et la division cellulaire sont accélé- rées, avec tendance marquée à l'irrégularité dans la forme et les dimensions des cellules résultantes, à la formation de cellules plurinucléées, rappelant certaines des formes décrites dans les tumeurs malignes. Tennent et miss Hogue® ont fait une compa- ‘ Journ. Exper. Zool., t. IV, 1901. ? Voir en particulier l'intéressant travail de Scorr : Journ, Exper. Zool., t. III, 1906. 3 Biol. Centralbl., t. XXVI, 1906. # Univ. of Calif. Public., Physiol., t. I, p. 57, 1907, et Pfluüger’s Archiv, t. CXVIII, p. 36. 5 Proc. Roy. Soc.,t. LXXVII B. 5 Journ. Exp. Zool., t. III, 1906. 4 ’ LE: M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE 843 raison soignée des premiers stades de l'évolution des œufs d'Asterias Forbesii, traités soit unique- ment par la méthode à l'acide carbonique de Delage, soit par cette méthode suivie d'une fécon- dation par spermatozoïdes. Dans un cas comme dans l’autre, le nombre des chromosomes du pre- mier fuseau de segmentation reste le même; mais ils diffèrent notablement : dans le premier cas, ils sont univalents: dans le second, ils sont bivalents (il y a conjugaison ou synapsis des chromosomes de l'œuf et. de ceux du spermatozoïde). Enfin, à condition de faire intervenir la fécondation au moment propice, il n'y à pas de différence dans les asters des deux catégories d'œufs. $ 5. — Géographie Zoologique. — Faunes. Une masse imposante de documents zoogéogra- phiques est constituée par les publications actuelle- ment en cours des nombreuses expéditions mari- times. Un volume du 7ravailleur et du Talisman* a paru récemment, ainsi que divers Notes et Mémoires sur les campagnes du Prince de Monaco et plusieurs fascicules de la Siboga-Expeditie. Les volumes de la Deutsche Tiefsee-Expedition (Val- divia) se succèdent rapidement et se distinguent par le luxe des planches, la variété des points de vue auxquels les matériaux sont étudiés; ce n'est plus exclusivement une publication faunique. C'est le monde bathypélagique surtout qui y est riche- ment représenté et particulièrement fertile en formes nouvelles. Parmi les groupes récemment publiés, signalons les Ostracodes (G. W. Müller), qui tenaient si peu de place dans les expéditions antérieures, les Ptéropodes (Meisenheimer) et sur- tout les Poissons (Brauer). De ces derniers, la partie systématique seule à paru, accompagnée de planches magnifiques; sur 60 genres et 151 espèces bathypélagiques, 14 genres et 51 espèces sont nouvelles. Une véritable floraison de documents sur les régions antarctiques s'épanouit à la suite des diverses expéditions de dernières années. L'ainée de toutes, la Belgica, a déjà donné lieu à de nombreux Mémoires. De l'Expédition Charcot, avec le Français, grâce à laquelle notre pays est représenté dans ce mouvement, ont paru déjà une série de fascicules ?; les collections renferment une très forte proportion d'espèces nouvelles inté- ressantes et les zoologistes ne peuvent que souhaiter voir se réaliser le projet du D' Charcot de diriger une nouvelle expédition dans l'Antarctique. Un gros volume de documents zoologiques à paru sur les collections de la. Discovery (National Antarctic ces 4 Paris, 1907, Masson. ? Masson, 1907. Expedition, 1901-1904); plusieurs fascicules de celles du Gauss (Deutsche Süd-Polar Expedition) ont également vu le jour; l'expédition écossaise (Scotia) et l'expédition suédoise ont communiqué déjà diverses Notes. Le problème de la bipolarité recevra de toutes ces publications une lumière con- sidérable. Il y est d'ailleurs discuté presque par- tout. Un document d'un ordre tout spécial et particu- lièrement intéressant est fourni par le Mémoire que Lo Bianco‘ a consacré aux effets de l'éruption du Vésuve (avril 1906) sur la faune du golfe de Naples. La connaissance approfondie que lui donne de cette faune, de ses localisations, etc., uné exploration quotidienne depuis trente ans, la continuité journalière de celte exploration pendant et après l'éruption, lui ont permis la récolte de faits nombreux et très suggestifs. L'éruption à agi sur les animaux marins par l'effet mécanique de la pluie de cendres prolongée. Ces cendres ont été longtemps en suspension et ont formé aussi une couche épaisse sur le fond. La plus brutale des conséquences à été l'anéantissement du plankton, dont la réconstitution a été très lente; une perturba- tion profonde à été constatée dans les mœurs des animaux plus vigoureux; beaucoup de formes, nocturnes furent un instant diurnes; beaucoup de celles qui vivent enfoncées dans la vase ou le sable sortirent de leurs retraites; beaucoup d'espèces, enfin, subirent des pertes considérables en individus; tels les Hydraires, les Ascidies, les Oursins, dont on ne pêchait plus dans un grand rayon que des cadavres, ete. C'est la première fois qu'un phénomène d'une pareille ampleur a été nous scientifiquement étudié dans ses détails. Il y aurait beaucoup à glaner dans les recherches sur les faunes terrestres; combien nos connais- sances sont encore lacunaires se vérifie à chaque instant, Une exploration à Sumatra d'un natu- raliste, G. Schneider*, n'a pas fourni moins de 25 espèces de Mammifères qui n'avaient pas encore été signalées dans cette île, sur un total d'une centaine qui y étaient connues. Le livre de Schillings (Mit Blitzlicht und Büchse), dont le succès a été si vif, n'est pas seulement un récit de chasses, mais la biologie des pour un document considérable sur Mammifères, d'autant plus précieux que, beaucoup d'espèces, l'heure de l'extinction n'est peut-être pas très éloignée. Parmi les milieux constituant un aspect nette- ment individualisé de la nature, les cavités souter- raines (grottes, cavernes, etc.), sont un des mieux délimités. Il a été déjà publié sur elles de nom- ON D RER AR RSR + © OU { Mitth. Zool. Stat. Neapel, t. XVII, 1906, ? Zool, Jdahrb., Syst., t. XXIII, 1906, M. CAULLERY ET K. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE breux mémoires et même des livres d'ensemble; au sujet des faits constatés, beaucoup d'’affirmations d'ordre général ont été émises qui, parfois, sont contradictoires. Il est donc évident qu'une étude méthodique et critique, appuyée sur des explora- tions et des documents considérables, peut fournir des résultats excellents. C'est ce qu'a entrepris, depuis plusieurs années, Racovitza, en s'aidant de collaborateurs pour l'étude des matériaux, et il en commence aujourd'hui’ la publication; lui-même examine, au seuil de cette série de Mémoires, le problème sous ses divers aspects, soumettant à la critique les faits et toutes les théories générales ou partielles émises. IT. — ZOooLOGIE SPÉCIALE. Un grand nombre de mémoires sur des groupes particuliers renferment des faits intéressants pour l'Anatomie comparée, l'Embryogénie ou la Biologie. Nous nous bornerons à signaler ceux qui offrent un intérêt général. $ 1. — Protozoaires. Comme toujours, les travaux sur les Protozoaires tiennent une place importante. Nous signalerons d'abord le Mémoire de Nirenstein * sur la digestion des Infusoires, qui, confirmant dans ses grandes lignes une courte Note antérieure de Metalnikoff, paraît bien résoudre une certaine contradiction entre les résultats observés 1n vivo etin vitro. La vacuole qui entoure les particules nutritives a une réaction acide (due à un acide minéral libre), notée par les divers observateurs, dans une première pé- riode, pendant laquelle la proie est simplement tuée ; elle est suivie d'une réaction alcaline qui correspond à la sécrétion d'une diastase et à la digestion des aliments. Or, les diastases extraites des Amibes {Mouton), des Infusoires (Mesnil et Mouton), tout récemment encore des Myxomycètes (Pinoy”), éga- lement des Actinies, sont voisines des trypsines et agissent surtout bien en milieu neutre ou légère- ment alcalin; elles réalisent 27 vitro le deuxième temps d'action. La question, soulevée par Schaudinn, d'une rela- lion entre Hématozoaires endoglobulaires et Hé- moflagellés, celle, connexe, de l'évolution des Hémo- flagellés chez les Invertébrés, continuent à être à l'ordre du jour. Les travaux de Minchin, Gray et Tulloch#, de Novy, Mc Neal et Torrey” ne sont nullement en faveur de ces idées: ils concordent Arch. Zool. Expér., (sér. 4), t. VI, 1907. Zeitschr. f. allg. Physiol., t. N, 1905. Thèse Fac. Sc. Paris et Ann. Inst. Pasteur, t. XXI, 1907. Proc. Roy. Soc., t. LXXVIIT, B, 1906. Joura. of inf. Diseases, t. II et LV, 1906, 1907. - © &w » en montrant que les Insectes suceurs de sang ont, dans leur tube digestif, des Flagellés qui, sans doute, leur sont propres et n'ont aucune relation avec les Trypanosomes du sang. En tout cas; leur présence constitue une cause d'erreur dont il faut tenir grand compte dans la recherche de l'évolu- tion des formes du sang chez l'Invertébré. Pourtant, à côté des cas au moins douteux, il y en à d'autres où l'existence d'un développement chez l'Invertébré n'est pas contestée : par exemple, les Trypanosomes et Trypanoplasmes des Poissons, chez les Hirudinées, d'après les observations de Keysselitz® et surtout les expériences de Brumpt*; sans doute aussi le Piroplasma (ou Leishmania) donovani, qui se développe chez la Punaise de l'Inde, d'après Patton‘: Brumpt* vient même de signaler des cas d'infection héréditaire chez l'Invertébré (ex. : Trypanosoma inopinatum de la Rana esculenta et Aelobdella algira). Ed. et Ét. Sergent, dans leur récent Mémoire sur les Hématozoaires d'Oiseaux", n’ont pas apporté de faits nouveaux en faveur de la thèse de Schau- dinn; mais ils ont démontré expérimentalement le rôle d’un Hippoboscide du Pigeon (ZLynchia maura) comme second hôte de l’'Ææmoproteus columbeæ. Pourtant, passé le stade ookinète, on ne retrouve plus le parasite chez l'insecte; peut-être y existe- t-il à un état extrèémement petit, capable de tra- verser certaines bougies filtrantes. Ce rôle d'un Hippoboscide a été confirmé, au Brésil, par Ara- gào"; il a, de plus, découvert que la multiplication schizogonique de l'hématozoaire, jusqu'ici vaine- ment cherchée, se fait dans le poumon du pigeon. En regard de tous les cas où le passage d'un hôte à l’autre se fait grâce à la piqüre du Vertébré par l'Invertébré, suivant le type classique de l'héma- tozoaire du paludisme, il faut maintenant placer celui de certaines Grégarines, que Léger et Duboseq® ont prouvé expérimentalement être digénétiques, les Aggregata; elles accomplissent leur évolution schizogonique dans le cœlome des Crustacés, puis passent dans le tube digestif d’un Céphalopode, grand consommateur de Crustacés, en mème temps que leur hôte, et c'est là que se fait l'évolution sexuée, sporogonique; celle-ci n'est autre chose que les prétendues Coccidies des Céphalopodes: Moroff* avait montré, d'autre part, quelles doivent être rattachées aux Grégarines. 4 Arch. f. Protistenk., t. VII, 1906. ? C.R. Soc. Biologie, t. LX et LXI, 1906. 3 Se. Mem. bv Off. of the Med. and San. Departm. Gov. of India, n° 21, 1907. # C. R. Soc. Biologie, t. LXIN, 1907. 5 Ann. Inst. Pasteur, t. XXI, 1907. $ Brazil medico, 1907. 7 C. R. Acad. Sc., t. CXLII; C. R. Soc. Biol., t. LX, 1906. 8 C. R. Acad. Sc., t. CXLII, 4906. M CAULLERY £r F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE 845 7 = = = Jusqu'à ces dernières années, on ne connaissait rien de certain au sujet des processus sexuels dans une des deux sous-classes de Sporozoaires, celle des Endosporés ou Néosporidies. Nous‘ avons fait connaitre une copulation presque isoga- mique précédant la formation des spores chez les Actinomyxidies et, depuis, Mercier, dans des Notes préliminaires ?, a annoncé des faits analogues pour les Myxo- et les Microsporidies. Schrôder *, chez une Myxosporidie, n'a vu d'acte sexuel, propre- ment dit (karyogamique), qu'à la fin de la matura- tion de la spore : il y a union des deux noyaux de son germe amiboïde, et cette constatation est d'ac- cord avec quelques observations anciennes. Mais il est permis de supposer que, avant toute sporula- tion, il y a union de plasmodes ou au moins échange de noyaux, car Schrüder a remarqué un dimor- phisme nucléaire dans les plasmodes et il à vu, au début de chaque pansporoblaste, deux noyaux de taille différente. Nous ne signalerons notre groupe des Haplospo- ridies ‘, dans les Sporozoaires, qu'en raison du nombre toujours croissant de formes qu'il englobe, parmi lesquelles il convient de citer un parasite humain, le Rhinosporidium kynealyi de Minchin et Fantham ”. Chatton* et Dogiel” ont découvert, indépendam- ment l’un de l'autre, une série de faits très curieux sur le cycle des Péridiniens pélagiques ; entre autres, le parasitisme inattendu de certains d’entre eux, soit dans des œufs de Copépodes pélagiques, soit dans le tube digestif de ces Copépodes ou sur des Appendiculaires. . Le cycle évolutif d'un certain nombre de Proto- zoaires a été complété ou précisé, par exemple celui des Opalines”, dont il paraît fixer d'une facon décisive la position systématique. Les kystes ex- pulsés par les Grenouilles adultes sont absorbés par les tétards, et il en sort des individus ciliés qui se divisent pour donner de petits éléments allongés, en massue, uninucléés, avec des cils longs et assez rares; ils ont lous les caractères des Flagellés; ils se conjuguent deux à deux. Les Opalines étaient de ces quelques formes pour lesquelles on peut hésiter, au point de vue de leur place taxonomique, entre les Flagellés et les Ciliés. Les termes de passage entre Rhizopodes et Flagellés Arch. f. Protistenk., t. VI, 1905. C. R. Soc. Biologie, t. LX et LXI, 1906. Verh. Naturhist.-mediz. Ver. Heidelberg, t. VI, 1907, Arch. Zoo. Expér, 4e série, t. IV, 1905. Quart. Journ. of Micr. Se., t. IL, 1905. BEATIE : Journ. Path. a. Bakt., 1906. $ C. R. Acad. Se., t. CXLIII et CXLIV, 1906 et 1907. ? Mith. Zool. Stat. Neapel, t. XVII, 1906. # NerESHEIMER : Sitzungsber. (res. [. Morph. u. Physiol. München, 1906; Arch. £ Protistenk., Suppl. I, 1907. g æ © 1» * REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. sont, au contraire, nombreux. Citons à ce propos le travail de Robertson ‘ sur le Pseudospora volvocis, dont le cycle évolutif comprend des formes flagel- lées, amiboïdes, radiées. L'idée de Doflein de di- viser les Protozaires en deux groupes, dont l'un comprend uniquement les Infusoires ciliés, appa- rait de plus en plus exacte. $ 2. — Métazoaires. 1. Cœlentérés. — I parait bien que doivent ren- trer définitivement dans ce groupe deux formes considérées jusqu'ici comme des Mésozoaires el qui avaient particulièrement attiré l'attention, le 7ri- choplax et le Treptoplax. Les observations de Krum- bach *, qui, d’ailleurs, ont déjà été résumées dans cette Revue (1907, p. 389), semblent bien prouver que le Trichoplax est un état appartenant au cycle évolutif d'une Méduse du genre Æleutheria, prove- nant d'un Hydraire du genre Clavatella. Le Trepto- plax appartiendrait à un type voisin. Restent à pré- ciser lesconditions dans lesquelles se produisent ces formes asexuées et si elles peuvent faire retour au type polype ou méduse. Les Méduses ont encore fait l'objet d'un intéres- sant travail. Il s'agit des Cunina qui, à certaines phases, sont parasites d’autres Méduses, telles que les Carmarina. Leur cycle évolutif, compliqué en- core de polymorphisme, a donné lieu à de nom- breuses discussions et est encore insuffisamment connu. Stschelkanowsew ? vient de faire une étude approfondie de celui de la Cunina proboscidea. Metchnikoff avait décrit autrefois, sous le nom de sporogonie, un processus aberrant de formation de jeunes individus à l’intérieur de cette Méduse. D'après Stschelkanowsew, il s’agit là du développe- ment, hors de l'ovaire, dans les tissus de la mère, d'un ovule fécondé par un spermatozoïde qui res- semble à une cellule migratrice*. La génération ainsi produite reste à l'état de Méduses rudimen- taires, simples sacs bourrés de produits génitaux et tout différents de la Cunina qui leur à donné nais- sance, D'autre part, l’auteur a pu vérifier, par des observations précises, que, comme l'avait supposé Metchnikoff, les Cunina proboscidea, sous leur forme parfaite, proviennent des bourgeons des formes parasites que lon trouve dans le manu- brium des Carmarina hastata. I reste encore à suivre le premier développement de ces formes parasitaires. Il est très vraisemblable que ce sont ! Quart. Journ. Micr. SC..t. IL, 2905: 2 Zool. Anz., t. XXXI, 1907. 3 Mitth. Zool. Stat. Neapel, t. XVII, 1906. s M. Mereunixore (communication verbale) n'admet pas cette interprétation, et s’en tient à celle qu'il a donnée. Il a vu, d'une facon formelle, ce processus de reproduction chez des Cunina d, ce qui est incompalible avec l'opinion de Stschelkanowsew. 202 846 M. CAULLERY £er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE les larves produites par les Méduses rudimentaires qui viennent infecter la Carmarine. Le cycle des Cunina proboscidea se compose done de deux gé- néralions dimorphes alternant régulièrement. 2, Plathelminthes. — Enregistrons les résultats du travail de Keeble et Gamble' sur les cellules vertes de Convoluta roseoffensis. Ce sont, suivant eux, des algues de la famille des Chlamydomona- dinæ, pourvues à l'état libre de quatre flagelles (genre Carteria), et qu'ils ont pu isoler. Les jeunes Convoluta naissent incolores et les auteurs ont pu réaliser la synthèse de l'association avec l'algue. Chez l'adulte, les cellules vertes auraient un noyau dégénéréet ne pourraient plus vivrehors del'animal; l'association serait d'abord une symbiose, puis un parasitisme de l'animal aux dépens du végétal. Nous avons signalé? un travail de Reuss sur le développement des germes dans les sporocystes d'un Trématode (Distomum duplicatum) ; le point de départ des rédies ou des cercaires, serait d’après ce travail, une cellule unique ayant la valeur d'un ovule et émettant des globules polaires. Deux Mémoires contradictoires traitent la même question cette année. Dans l'un, Rossbach* étudie des spo- rocystes vivant dans les Paludines et les Limnées ; il n'a pu rien retrouver qui corresponde aux glo- bules polaires décrits par Reuss. Dans l’autre, Tennent' a suivi le cycle évolutif d’un sporocyste de l'huitre (Bucephalus haimeanus); il à établi expéri- mentalement que l'adulte estle Gasterostomum gra- cilescens qui vit dans certains poissons (Zophius piscatorius, Tylosomus marinus); quant au déve- loppement des cercaires dans le sporocyste, il aurait pour point de départ une cellule pariétale qui émeltrait d'abord des globules polaires, confor- mément à la description de Reuss. Parmi les formes curieuses des Plathelminthes, il ya lieu de mentionner l'extension de nos connais- sances sur les Némertiens pélagiques. Plusieurs espèces ont été récollées dans les campagnes du Prince de Monaco’; une autre à été décrite par Cravens et Heath°. Le groupe des Temnocéphales (parasites externes sur les Crustacés) n'avait été rencontré que dans l'hémisphère austral. Mrazek” viendrait d'en trouver un représentant au Monténégro sur l’Atyaephyra Desmareti; il est intéressant de noter que ce Crus- tacé appartient à un groupe vivant surtout sous les tropiques. Quart. Journ. Micr. Science, t. LI, 1907. Revue ann. de Zool., 190%, p. 605. Zeïitsch. {ur wiss. Zool., 1. LXXXIV, 1906. Quart. Journ. Micr. Science, 1. IL, 1906. Voir Joueix : Bull, Mus. Océan. Monaco, Zool. Jahr., Anat., t. XXII, 1906. Sizungsber., bôühm. Gesells. Wiss., a > © © à 1906. e 1907, 3. Nématodes. — Nous avons insisté à deu reprises sur l'intérêt de la découverte (Looss) di la pénétration cutanée des larves d'Ankylostomes Venant après celle de l'inoculation par les Mou tiques des Filaires à embryons sanguicoles, ell pouvait faire supposer que la Filaire de Médine, dont le second hôte est un Cyclops, pénétrait aus par la peau. Il n’en est rien, d'après les observatio de Leiper‘; il a reconnu qu'une solution d'acidi comparable à celle du suc gastrique amène l'éelo= sion des larves, arrivées à leur développement chez le Cyclops; elles se mettent à nager très activez ment. L'infection d'un singe a été réalisée par la voie buccale. 4. Annélides. — Les types que l’on groupe sou- vent, d'une facon peut-être très artificielle, sous le norn d’Archiannélides(Dinophilus, Protodrilus, Po- lygordius, Saccocirrus) ont donné lieu, ces derniers mois, à toute une floraison de recherches. Pieran- toni” a réussi à obtenir, de l'œuf jusqu'à la larve éclose, le développement des Protodrilus et Saceo- cirrus,el cela a permis d'écarter des résultats para- doxaux qui résultaient, pour le premier de ces genres, de travaux antérieurs de Repiachoff. L'ovo- génèse du Saccocirrus a été étudiée par Hempel- mann*, et par van Gaver et Stéphan *. Ces auteurs, indépendamment les uns des autres, ont constaté que des spermatozoïdes, cheminant à travers les tissus de la femelle, pénètrent dans les ovules, avant la maturité de ceux-ci, à des stades de très jeunes ovocytes, disent mème van Gaver et Stéphan, et il y a là, en tout cas, un curieux phénomène dont les détails sont encore à fixer. Ces derniers auteurs pensent, en effet, que ces spermatozoïdes sont ulté- rieurement résorbés, et cela s'accorderait avec les observations de Pierantoni. Le volumineux Mémoire de Salensky” porte sur l'anatomie et le développe- ment des diverses formes”, et reprend à peu près toutes les questions pendantes. Nous en extrairons seulement quelques faits relatifs à la forme larvaire du Polygordius. Salensky a, en effet, observé à Sébastopol des larves intermédiaires entre la forme classique, décrite par Hatschek, et la curieuse forme (Endolarve — larve de Loven) étudiée récemment par Woltereck”; ces diverses formes larvaires appar- tiennent à des espèces dont la distinction même est douteuse, et leur diversité est un fait de pœcilogonie extrêmement intéressant. Salensky est amené, par 1 V. British med. Journ., 1907. ? Mitth. Zool. Stat. Neapel, t. XVIL et XVIII, 1906. 3 Zool. Anz., t. XXXI, 1906. 4 C. R. Soc. Biol., t. LXI, 1906, et t. EXIT, 4907. Mém. Acad. Saint-Petersb. (série S.), t. XIX, 1907. V. également pour l'anatomie dn Polygordius : HEMPEL- MANN, Zeitsch. für wiss. Zool., 1. LXXXIV, 1906. 7 Cf. Rev. ann. de Zool., 1903, p. 618: 1906, p. 89. € M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOULOGIE 847 ses constatations, à donner une interprétation plus simple des processus décrits par Woltereck, et à nier en particulier ce que Woltereck à appelé la cœnoplasie. Comme conclusion générale de son Mémoire, Salensky ne considère comme méritant le nom d'Archiannélides que les genres Protodrilus et Polygordius. Le Saccocirrus se rattache évidem- ment bien plus directement aux Chétopodes et le Dinophilus serait pour lui une forme de régression. Cr. Shearer‘ a étudié les néphridies de ce dernier type et y a trouvé les solénocytes de Goodrich. La bonne étude d'ensemble que Fage* à publiée sur les néphridies des Polychètes est une conlir- mation et une extension des résultats de Good- rich : la néphridie close à solénocytes (Phyllodo- ciens, Nephtydiens, Glycériens) apparait comme le type primitif; secondairement, elle s'ouvre dans le cœlome par un néphrostome étroit (Syllidiens, Hésioniens, Lycoridiens); ailleurs, enfin, elle se continue avee un pavillon génital qu'il y à lieu de regarder comme une partie morphologiquement distincte. Nous aurions à signaler bien d'autres travaux sur les Annélides : nous nous bornerons à mentionner la revision, très complète et bien illustrée, des Clymé- niens par Arwidsson*, la monographie anatomique détaillée de Liwanow sur l'Acanthohdella*, ce genre d'Hirudinées réétudié dans ces dernières années déjà par Kovalevsky, et surtout celle qu'Eisig* a consacrée à une Annélide parasite, l’Zchthyotomus sanquinarius; c'est une curieuse Polychète qui se fixe par des crochets buccaux, en forme de ciseaux articulés, aux nageoires des Anguillidés marins et surtout du Hyrus vulgaris; le ver se nourrit du sang du Poisson qui, comme chez les autres ani- maux sanguicoles, est rendu incoagulable; c'est probablement de formes voisines des Syllidiens que dérive l’Zchthyotomus : le Mémoire d'Eisig, monographie anatomique minutieuse et riche en documents de tous genres, est en même temps une contribution importante à la connaissance morphologique des Annélides en général. Enfin, nous signalerons une série de faits curieux sur la reproduction sexuée de lypes qu'on ne con- naissait guère encore qu'à l'état asexué. C'est d'abord le Ctenodrilus, qui jusqu'ici n'avait jamais montré trace de produits génilaux et que Monti- cellif a rencontré à Naples, hermaphrodite et vivi- pare, modifié d’ailleurs par un accroissement de la ciliation extérieure en une sorte de forme épitoque. | J. A. Nelson‘ a, de même, observé des individus | sexués d'Aelosoma, et Mrazek* a longuement étudié la sexualité des Lumbriculus dont les organes géni- taux n'avaient été vus qu'exceptionnellement; c'est au printemps et en été que les organes sexuels se développent. L'auteur a trouvé 200 individus sexués sur 50.000 environ :et, cequiest remarquable, c'est l'extrème variabilité qu'offre l'appareil génital, tant dans sa position que dans le nombre de ses parties. 5. Bryozoaires, Phoronis, ete. — Divers Mé- moires parus sur les Bryozoaires n'apportent pas d'éléments très nouveaux, mais précisent ou con- firment des données antérieures. Telle est l'étude très détaillée et magnifiquement illustrée que Kupelwieser* a faite du Cyphonautes, la larve du Membranipora; on y trouve une description ana- tomique très complète et une comparaison très nette de cette larve avec la trochophore, d'accord avec les idées généralement admises aujourd'hui; de même, le travail de Rômer‘ sur le bourgeonnement, la dégénérescence et la régénération chez les Ecto- -proctes, en particulier chez les A/cyonidium, con- firme d'une facon générale les notions actuelles. Seeliger” a fait une étude comparée des larves déjà connues d'A/eyonidium (Ectoprocte) et de Pedicel- lina (Endoprocte); nous en indiquerons la conclu- sion, qui tend à réunir les deux groupes et à réagir contre la tendance, prédominante dans ces der- nières années, à les considérer comme tout à fait indépendants. Nous avons, à plusieurs reprises, signalé les excel- lentes recherches de Sélys-Lonchamps sur les Pho- ronis. Il vient de publier une monographie de cet animal, mise au point complète de toutes nos con- naissances sur l'anatomie, le développement, les formes larvaires (Actinotrocha) et la systématique (des larves et des adultes); la compétence de l'auteur et l'étendue de son travail font de cette mono- graphie un document fondamental et indispensable pour les nombreuses questions de morphologie auxquelles la considération du Phoronis est néces- saire, Nous avons déjà dit” quelles étaient les idées de l'auteur sur les affinités de ce type : elles ne se sont pas modifiées; le Phoronis lui apparaît comme apparenté à la fois aux Sipuneulides et aux Bryo- zoaires Ectoproctes. Get ensemble, au point de vue phylogénique, se rattacherait vraisemblablement aux Annélides. Il écarte, par contre, les affinités invoquées par divers auteurs avec les Entérop- 4 Quart. Journ. Micr. Se., t. L, 1906. 2 Ann. Sc. Nat., Zool. (sér. 9), t. IL, 1906, et Thèse Fac. Sc. Paris. Zool. Jahrb., System., L. XXV, 1906. Zool. Jahrb. Anat., &. XXII, 1906. Fauna und Flora des Golfes von Neapel, Monog. 28, 1906. Congr. Nat. ital., Milano, 1906. o œ à © 1 Ohio Naturalist, t. VI, 1906. 2 Zool. dahrb. Anat., t. XXIIL, 1907. # Zoologica, 1906. 4 Zeiitsch. fur wiss. Zool., t. LXXXIV, 1906. 5 Zeitsch. fur wiss. Zool., t. LXXXIV, 1906. 6 Jauna und Flora des Golfes von Neapel, Mon. 30, 1907. 7 Cf. Revue ann. de Zoologie, 1906, p. 93. 848 M. CAULLERY Er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE neustes ainsi qu'avec le Æhabdopleura et le Cepha- lodisceus. D'importants travaux élant en cours de publica- tion sur ces derniers animaux, nous renvoyons à une revue ultérieure l'examen des faits récents signalés à leur égard. Nous nous bornons à mentionner le Mémoire de Ridewood" sur les deux espèces (C. ni- grescens et C. hoydsoni) rapportées de l'Antarctique par la Discovery; elles offrent dans les mêmes colonies des individus hermaphrodites, des mäles et des femelles parfaitement semblables entre eux. 6. Arthropodes. — La révision que Bouvier a entreprise du groupe des Péripates* montre quelle extension nos connaissances ont recue et recevront encore, vraisemblablement, par l'exploration des régions tropicales et australes : il est des plus inté- ressants, au point de vue de la morphologie géné- rale, de suivre les séries de formes d’un type très homogène, comme le Péripate, dans les diverses régions, indépendantes les unes des autres, où on le trouve actuellement et où il a évolué. C'est un des sujets les plus favorables à une reconstitution phy- logénique, en même temps qu'un des types du règne animal les plus intéressants en eux-mêmes; la monographie de Bouvier, appuyée sur l'étude directe des matériaux des principaux Musées et alliant une précision minutieuse à des vues géné- rales, sera un document fondamental pour le groupe des Onychophores. Un grand travail d'ensemble a été consacré par G. Smith”* aux Crustacés Rhizocéphales, ces para- sites si dégradés des Crustacés supérieurs. Il fait connaitre quelques types nouveaux ou très mal étudiés jusqu'ici; mais ses efforts ont principale- ment porté à compléter la connaissance du déve- loppement dela Sacculine, Malheureusement, il n'a pu saisir le moment même où le parasite pénètre dans son hôte (stade Xenérogonide de Delage); mais il a pu trouver un certain nombre de stades pré- coces de la Sacculine interne, et ses recherches mettent hors de contestation que la Sacculine passe par un état où elle n'est plus qu'un tube épithélial sans aucune différenciation d'organe ni même de tissus, et que l'on peut bien comparer pour la structure à la paroi d'un jeune sporocyste de Tré- matode. À cet état, elle émigre à travers la cavité viscérale du Crabe, de son point d'entrée vers l'in- testin et le long de celui-ci jusqu'au point constant où elle fait saillie au dehors, à la face ventrale de l'abdomen. Pendant ces migrations, on assiste au développement graduel du système de racines et à ? National Antarctic Expedition, t. I, 1907. ? Ann. Sci. Nat., Zool., (sér. 9), t. 11, 4905, et t. V, 1907. * Fauna und Flora des Golfes von Neapel, Monog. 29, 1906, la différenciation, vers une des extrémités, du c'est-à-dire du groupe d'organes qui nucleus, forment la Sacculine externe. Les Peltogaster suivent une évolution interne” analogue, dont un stade avait déjà été rencontréilya une dizaine d'années par Schimkevitch. Cette régres- sion totale des organes d'un Crustacé aussi diffé- rencié que la larve libre Cypris, et sa reconstitu- tion de novo, sur une masse de tissus ndifférenciés, restent un fait morphologique tout à fait isolé chez les Arthropodes. Il serait des plus intéressants de suivre des types deRhizocéphales, oi ces processus doivent être moins différenciés. On ne peut se défen- dre de comparer la production de la Saicculine exter- ne à une blastogénèse, comme celle qui fournit le premier blastozoïde d'une colonie de Bryozoaires. + ont lg he Mol L'analogie serait peut-être d'autant plus justifiée \ que certains leltogaster (P. socialis), rares d’ail- leurs, se présentent toujours sur leur hôte à l'état grégaire et proviennent vraisemblablement d'un bourgeonnement multiple sur le stade interne, ainsi que le suggère Smith. Le genre TL ylacoplethus, décrit par Coutière, offrirait peut-être des faits du même ordre. La rareté habituelle des Rhizocé- phales, autres que la Sacculine et les Peltogaster solitaires, est l'obstacle qui se dresse contre la solu- tion de ces problèmes si intéressants; il faudrait trouver les stations, existant certainement, où ces divers types se rencontreraient en abondance, comme la Sacculina neglecta sur l'Inachus scorpio à Naples. Nous avons mentionné, dans une autre partie de la revue, l'étude très pénétrante que Smith a faite de l'influence de la Sacculine sur les organes génitaux et les caractères sexuels secondaires de son hôte. Margaret Robinson‘ a étudié en détail le déve- loppement du Nebalia et est amenée, comme anté- rieurement Metchnikoff et Claus, à la rapprocher des Malacostracés, en particulier des Mysidæ. Parmi les travaux sur les Insectes, nous enre- gistrerons un Mémoire soigné de Friederich® sur la formation des feuillets chez les Coléoptères; nous y relèverons seulement une confirmation générale des résultats obtenus il y à quelques années par Lécaillon; en particulier, il a vérifié le fait signalé par cet auteur et par Heymons relati- vement à l'origine de l'intestin moyen; celui-ci est formé, non pas par l'endoderme, qui n’a d'autre rôle que la digestion du vitellus, mais par des ébauches provenant des parties initiale et termi- nale du tube digestif, lesquelles sont ectodermiques. Ce fait, qui à paru très surprenant quand il a été 4 Quart. Journ. Micr. Sc., t. L, 1906. 2 Abh. K, Leopold. Carol. Akad., t. LXXXV, 1906. M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE annoncé, peut être considéré comme acquis dans un certain nombre de cas. Marechal!, dont on se rappelle le beau travail sur la polyembryonie des Hyménoptères parasites, vient d'en publier un autre, non moins intéressant, sur le développement de types du même groupe, les Plal ygaster. Les larves de ces animaux, parasites d'autres Insectes tels que les Cécidomyes, ont une forme tout à fait aberrante, décrite autrefois par Ganin et rappelant par son faciès un Copépode. En étudiant plusicurs espèces du groupe, Marchal a constaté que cette forme larvaire n'est pas géné- rale, qu'elle se rencontre dans les cas où lamnios se rompt de bonne heure, tandis que, quand il per- siste tard et joue un rôle nutrilif (trophamnios), on à immédiatement une larve vermiforme du type normal. La larve eyclopoïde est done une compli- cation surajoutée, un fait d'hypermélamorphose, une adaptation fonctionnelle, nécessitée par la vie libre précoce du Platyqaster (à l'intérieur de son hôte). Ainsi se trouve interprétée et rattachée aux autres types celle larve qui avait paru surprenante el avait niques aventureuses. Le travail de Marchal, exécuté donné lieu à des spéculations phylogé- avec l'élégance et le soin habituels à l'auteur, four- nit, en outre, une foule de renseignements précis el intéressants sur les mœurs des //Jalygaster, les conditions de leur ponte dans les Insectes qu'ils parasitent et les localisations qui en résultent pour l'endroit où se développe l'œuf; les débuts de ce développement, la segmentation, la formation de l'amnios et des feuillets ont été suivis en détail; comme chez les Æncyrtus, les noyaux des cellules destinées à former l'amnios se distinguent de très bonne heure; l’endoderme primitif est tout à fait rudimentaire, fait corrélauf de la rareté du vitellus que cet endoderme a pour rôle de résorber dans ces groupes d'Insectes; le tube digestif définitif se forme chez les espèces à larves cyclopoïdes par une invagination dorsale ectodermique, que Marchal rapproche de l'organe dorsal des embryons d’In- sectes et de Crustacés; les processus sont modifiés dans les espèces qui n'ont pas de larve cyclopoïde : tels sont quelques-uns des nombreux faits inté- ressants que renferme ce Mémoire. 7. Tuniciers. — Les Tuniciers ont fait récem- ment l'objet de plusieurs travaux méritant d'être mentionnés ici brièvement. C'est d'abord l'intéres- sante étude de Julin sur l'Archiascidia neapolitana”; puis un Mémoire de Korotneff sur l’embryologie du Pyrosome*, où cet auteur a repris l'étude du début du développement de l'œuf (segmentation 1 Arch. Zool. Expér. (sér. 4), t. V, 1906. ? Mitth. Zool. Stat. Neapel, t. XVI, 1904. 3 Jbid.,t. XVII, 1906. 849 partielle discoïdale), de la formation des feuillets et de lébauche des organes du premier individu (eyathozoïde); il montre que les cellules follicu- laires de l'œuf n'ont aucune part à la formation de l'embryon, contrairement aux idées émises par Salensky, mais servent de malériaux nutritifs aux blastomères; il réfute également un certain nombre d'interprétations (formation du cœlome, ébauche de notocorde) auxquelles ce dernier auteur avait élé conduit par l'étude de matériaux dans un état de conservation insuffisant. Le Mémoire de G. Neu- mann' sur le Zoliolum, fondé en partie sur les matériaux de l'expédition de la Faldivia, constitue un progrès notable de nos connaissances sur cette forme si intéressante. Dans le développement de l'oozoïde, Neumann a eu entre les mains des stades qui avaient manqué à Uljanin, et cela lui a permis de faire disparaitre un résultat tout à fait paradoxal auquel ce dernier avait été conduit, par une erreur d'orientation de l'embryon; Neumann a éludié aussi le stolon prolifère et, relativement à sa com- position, pu rectifier cerlaines conclusions d'Ul- janin pour revenir à celles de Grobben; son travail renferme, enfin, de nombreux documents sur la migration des bourgeons, leur répartition sur le prolongement dorsal de l'oozoïde et leur différen- ciation polymorphe; disons seulement ici qu'en ce qui regarde le cyele évolutif, il confirme complè- tement Uljanin. Signalons, parmiles publications de Ritter, celle* sur l'Octacnemus, ce Tunicier abyssal, rapproché des Salpes par les naturalistes du Challenger el qui n'avaitété retrouvé qu'une fois depuis (Metcalf). Les matériaux étudiés par Ritter proviennent des dragages de lAlhatros dans les fonds du Paci- fique; ils lui ont fourni d'importantes données nouvelles sur l’organisation de Flanimal (cavité branchiale, etce.), d'où résultent des affinités avec les Ascidies plutôt qu'avec les Salpes. Nous mentionnerons enfin le fait singulier signalé récemment par Kellner* d'embryons d'Appendieu- laires (?) fixés sur la queue d’un Oikopleura et qui se développeraient comme des parasites. 8. lertébrés. — Nous ne pouvons avoir la pré- tention d'inventorier ici la colossale liltérature rela- tive à ce groupe. Signalons donc seulement quelques travaux ou résultats. D'abord, la très belle monographie que Bashford Dean* vient de publier sur les Chimères et leur développement. Il à pu faire sur les côtes de Cali- fornie, d'abondantes récoltes d'œufs de ces Pois- ! Ergebn. der deustch. Tiefsee-Expedition, 1905. ? Bull. Mus. Compar. Zool. Harv. Coll., t. XLVI, 1906. 5 Zool. Anz., t. XXXI, 1907. # Carnegie Instit., Publ. n° 32, 1906, 850 M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE sons, si rares jusqu ici, et retracer une histoire com- | plète de leur évolution, de la fécondation jusqu'à l'adulte, accompagnée de magnifiques figures; ce Mémoire, où entrent en considération, en outre, n0s connaissances actuelles sur la paléontologie du groupe, conclut que les Chimères sont des types moins primitifs queles autres Sélaciens, et qui sont dérivés vraisemblablement des Gestraciontes paléo- zoïques. Sur le développement des Sélaciens, à paru aussi une nouvelle et longue étude de Dohrn’, la vingt-cinquième, consacrée à l'histoire du nerf pathé- tique. L'objectif véritable de ces recherches est, en réalité, le problème de la morphologie générale de la tète des Vertébrés. Nous ne retiendrons ici que deux points particulièrement intéressants: d'abord que le nerf pathétique, purement moteur, procède d'une ébauche renfermant une partie ganglion- naire et, par suite, dérive phylogénétiquement d'un ou plusieurs nerfs mixtes. Cette constatation est importante parce qu'elle montre bien l'énorme dif- ficulté qu'offre l'interprétation phylogénique des faits actuellement fournis par l'anatomie ou même le développement. En second lieu, cette étude amène Dohrn, jusqu'ici partisan des théories de Hensen sur l'origine des nerfs aux dépens de chaînes de cellules, à se rallier aux idees de His, Külliker, etc., en harmonie avec la théorie du neurone. En ce qui concerne le squelette céphalique, l'ap- plication de la méthode au bleu de méthylène imaginée par van Wijhe* a permis à cet auteur de distinguer dans la région occipitale lébauche de vertèbres cartilagineuses distinctes, qui avaient été vainement cherchées jusqu'ici et dont l'individualité est d'ailleurs extrêmement fugitive. Le rein a été l'objet de plusieurs travaux impor- tants, notamment celui de Borcea” sur les Sélaciens et celui de Guitel sur les Gobiésocides*; ce dernier montre d'une facon précise l'importance du pro- néphros et sa persistance à l’état fonctionnel, même chez l'adulte, dans les neuf espèces étüdiées. Le mécanisme de l'histolyse des tissus larvaires dans la métamorphose des Batraciens (et aussi des s C. R. Assoc. Anatom., 1907. Arch. Zool. Expér., (sér. 4), t. IV, 1906. 4 8 Jhbid., t. IV, 1906. # Arch. Zool. Expér., (sér. 4), t: V;, 1906. Muscides) a été réétudié par Mercier‘ à l’aide d'une méthode ingénieuse pour déceler les phagocytes, qui consiste à leur faire absorber préalablement des grains de carmin. Il conclut à une phagoeytose leucocytaire précoce. L'étude des Mammifères présente encore de nom. breux problèmes à résoudre, même parmi les ques- tions qui, au premier abord, devraient sembler élucidées depuis longtemps; les discussions qui se sont produites à propos de l'existence ou de l'absence de la cavité pleurale chez les Eléphants* en sont la preuve. Parmi les découvertes récentes de la paléonto- logie des Mammifères, les plus intéressantes sont peut-être celles qu'a fournies l'Egypte, relativement aux Cétacés; diverses formes, notamment un type de l'Eocène Moyen, le Protocetus alavus*, ont une dentition se rapprochant nettement de celle desCréo- dontes. C'est donc dans ce groupe qu'il faut cher- cher la souche des types de Mammifères marins actuellement si modifiés. Cela nous amène, pour terminer, à appeler l’at- tention sur les travaux qui utilisent les connais- sances approfondies, que nous avons de l'anatomie comparée des Vertébrés, à l'étude méthodique de leurs adaptations à des genres de vie spéciaux, sur les déductions que l'anatomie permet de tirer relativement à l'éthologie présumée d'un groupe. A cet égard, les travaux de Dollo* sont parmi les plus ingénieux. Nous nous contenterons de signaler ici le Mémoire qu'il a publié sur les Poissons rap- portés par la Belgica de l'Antarctique, et une Note où, tirant parti d'une étude minutieuse faite récem- ment par Bôünninghaus”* sur l'appareil auditif des Cétacés et son adaptation à la plongée, Dollo re- trouve des dispositions absolument parallèles chez les Ichthyosaures, ce qui peut faire présumer chez ces animaux une adaptation analogue. F. Mesnil, Chef de Laboratoire à l'Institut Pasteur. M. Caullery, Professeur adjoint à la Faculté des Sciences de Paris. 4 Mith. Zool. Stat. Neapel, t. XVIII, 1907. * C. R. Acad. Sc., 1907, passim. 3 Cf. ABeL : Verhdl. deustch. Zool. Gesells., 4905. 4 Bull. Soc. Belge Géologie ; Bull. sci. France et Belg., etc., passim. 5 Zool. dahrb., Anat., t. XX, 1904, 7} BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Andoyer (H.), Professeur à la Faculté des Sciences de Paris. — Cours d'Astronomie. Première partie: Astronomie théorique. — 1 vol. grand in-8 de 221 pages autographiées avec figures. (Prix : 9 fr.) A. Hermann, éditeur. Paris, 1907. L'Astronomie n'est pas une science nouvelle ; aussi est-elle très riche en traités plus ou moins complets. Les étudiants et les professionnels peuvent se satisfaire avec les ouvrages de MM. Baillaud, Brunnow, Caspary, Faye, Gruey, etc., pour ne citer que les plus classiques, écrits ou traduits en français. Un nouveau livre sur la matière doit donc se justifier par l'autorité de l’auteur ou un plan d'exposition inédit. C’est assurément sous ce double patronage que l'éditeur A. Hermann pré- sente le Cours d’Astronomie professé à la Sorbonne par M. Andoyer. En 221 pages autographiées, partagées en XV cha- pitres très substantiels, le lecteur peut s'assimiler les méthodes fondamentales de l’Astronomie et ses * principaux résultats. Pas de répétitions, des renvois aux formules générales, et l’auteur parvient ainsi à condenser et exposer très clairement son sujet. La Trigonométrie sphérique sert naturellement d'in- troduction. Elle est appuyée sur des définitions très générales, auxquelles correspondent ensuite les rela- tions usuelles et classiques. Aussi brièvement que possible, quelques exemples numériques précisent la signification des formules différentielles. Si le lecteur souligne, dès les premières pages, la simplicité du style et l'accumulation des idéès, il sera bien préparé aux chapitres qui suivent. « L'objet principal du Cours est l'étude des mouve- ments célestes apparents... » Or, que faut-il essentiel- lement posséder dans l'étude d'un mouvement ? Ce sont les coordonnées et l’origine même de celles-ci. Par conséquent l’auteur, va successivement exposer ces questions fondamentales sous les titres : La Terre; Coordonnées astronomiques, Temps ; Changements de coordonnées ; Mouvement diurne. Toutes les formules utiles sont groupées avec un art et une concision qui retiennent l'attention. La suite du Cours n’en sera plus qu'une application continue. C'est ainsi que la Paral- laxe; l'Aberration; la Précession et la Nulation, pré- cédées de Notions de Mécanique céleste, se gravent dans l'esprit de l'étudiant comme corollaire métho- dique des changements de coordonnées. Les Positions apparentes des Astres suivent naturellement. L'étude particulière des mouvements du Soleil et la mesure du temps ; les mouvements géocentriques des Planètes ; le mouvement de la Lune et des satellites, viennent compléter l'exposé des phénomènes princi- paux que le Système solaire offre à l'œil de l’observa- teur et soumet à la sagacité des plus illustres philo- sophes et géomètres. Deux chapitres peuvent se classer en dehors. L'un est personnel à l’auteur, Réfractions astronomiques, et l'autre, Eclipses, expose la théorie classique des pas- sages d'’astres les uns devant les autres, d'où les Eclipses — Soleil et Lune; Occultations — Etoiles et Lune —; Passage de Mercure, de Vénus sur le Soleil; l'avant- dernier phénomène présente un caractère actuel puis- qu'il se reproduira en novembre prochain. La théorie des réfractions astronomiques pourrait rester dans le domaine de la Physique et fournir seu- lement à l’astronome les relations indispensables pour la réduction des observations. En fait, beaucoup de ET INDEX praticiens utilisent les tables usuelles sans discuter leurs bases, ni les théories de Laplace, Bessel, etc. A la suite des beaux travaux de M. Radau, M. Andoyer a donné une théorie élémentaire de la Réfraction, Exposée d’abord dans le Bulletin Astronomique, elle a pris la forme du Cours dans le chapitre VI, d'où l’ensei- gnement en tirera le meilleur profit. A l'unité de coordination si remarquable de ce Cours, doivent s'ajouter pour le jeune astronome les exemples numériques qui fixent le sens parfois imprécis des formules et guident sûrement le débutant. L'auteur, assurément trop modeste, n'a pas voulu accorder une telle ampleur à son ouvrage ; peut-être ne faut-il pas trop le regretter. Toute œuvre digne de ce nom croît et se développe par approximations successives. Il est juste qu'un astronome qui applique journellement cette méthode de travail prèche d'exemple et apporte le Traité après le Cours. A celui-ci revient le mérite de donner rapidement une vue d'ensemble de lAstro- nomie ; c'est la première étape du chercheur. La seconde se fera avec le Traité que nous souhaitonset que nous avons le droit d'attendre. A. LEBEUF, Directeur de l'Observatoire de Besançon Pollachi (Capitaine P.), Détaché à PEtat-Major de l'Armée, Service géoyraphique. — Les Echelles métriques des Cartes géographiques, topogra- phiques et marines, et Règle graduée suppri- mant les calculs de ces échelles. — 1 brochure de 32 pages. Chapelot et Cie, éditeurs. Paris, 1907. Les cartes et fragments de cartes (géographiques, topographiques et marines) ne donnent pas toujours l'échelle métrique à laquelle ils ont été établis; pour déterminer ces échelles, il faut les calculer d’après les longueurs graphiques de la projection ou d’après une longueur donnée. La règle graduée supplée à tous ces calculs et donne à simple lecture l'échelle métrique. Cette règle a été construite de telle facon que les graduations donnent, d'un côté, la longueur graphique d'un arc de 4° en latitude correspondant aux échelles métriques supérieures à 1/200.000, et, de l'autre côté, la longueur graphique de 10" en latitude correspondant aux échelles métriques comprises du 41/40.000 au 1/300.000. Les longueurs graphiques ont été calculées d’après la longueur réelle d'un arc de 1° en latitude, à hauteur du parallèle moyen de 45°. 2° Sciences physiques Stokes (Sir G. G.). — Memoir and Scientific Corres- pondence, selected and arranged by Josepa Laror, Secrétaire de la Société Royale de Londres. — 2 vol. in-8° de 476 et 508 pages avec planches. (Prix: 30 fr.) University Press, Cambridge, 1907. Après la mort de Stokes, on retrouva dans ses papiers une série de notes inédites sur divers sujets de Philo- sophie naturelle, ainsi qu'une correspondance très étendue qu'il avait reçue de la plupart des savants de son époque. Les amis et les élèves de l'illustre physi- cien anglais ont eu la pieuse pensée de publier un choix de ces documents; ils ont chargé de ce travail M. Joseph Larmer, qui s’en est acquitté avec beaucoup de soin et de compétence. Les deux volumes qu'il présente aujour- d'hui au public contribueront à préciser l'influence que Stokes a exercée sur le développement de la Phy- sique dans la seconde moitié du xix° siècle; l’esquisse 852 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX de sa vie, qui ouvre le tome premier, montrera, d'autre part, que Ile était la haute personnalité morale du savant anglais. 1°41B: Cambon (Victor), Zugenieur des Arts et Manufac- tures, ex-labricant de Colles et de Gélatines. — Fabrication des Colles animales. — 1 vo/. in-8° de 216 pages,- avec 50 figures. (Prix : 6 fr.) Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1907. Il est toujours agréable de lire un ouvrage écrit par un auteur très compétent dans la matière qu'il traite; mais la satisfaction est encore plus complète lorsque l'horizon s'élargit au delà du sujet particulier, de ma- nière à permettre au lecteur de mettre à profit des observations et des conseils d'ordre général. M. Cambon a décrit dans son livre les procédés et les appareils modernes qui sont utilisés pour la fabrication des colles animales. Son expérience spéciale lui permet d'appeler l'attention des intéressés sur un grand nombre de détails dont il signale l'importance pratique, non sans humour quel quefois. Et quoique, suivant l'usage en pareil cas, il n'ait pas révélé absolument tout ce qu'il sait, ceux qui cherchent à se documenter sur cette fabrication auront grand intérêt à consulter ce qu'il a publié, soit sur les différentes phases du travail avec leurs méthodes de contrôle, soit sur l’organisation générale de l'établissement". Mais ce qu'il y a, je crois, de plus intéressant dans son livre, c’est l'Zutroduection avec la Conclusion. M. Cambon a voyagé et travaillé en Allemagne. Il en a profité pour étudier les tendances de ce peuple ct pour observer, non seulement comment nos voisins fabriquent la € olle, mais aussi quelle est la Situation générale de leur industrie. Dans sa Conclusion, il compare l'esprit de cette industrie et les conditions dans lesquelles elle se développe avec l'esprit qui règne trop souvent dans la nôtre et avec les conditions qui lui sont faites; faut-il ajouter que cette comparaison n'est pas à notre avan- tage? En quelques pages d'une limpidité parfaite et d'une exactitude irréfutable, l'auteur expose ces choses, sur lesquelles on n'insistera jamais trop et que tout Français instruit devrait connaître et méditer. Quand, dans notre pays, on permet par hasard à la vérité de sortir de son puits, on à généralement soin de la draper de manière à la rendre méconnaissable. M. Cambon a le courage de laisser paraître la déesse dans toute sa vigoureuse nudité; ceux qui aiment sin- cèrement leur pays lui sauront gré de sa franchise, et ceux qui connaissent l'étranger partageront tout à fait sa manière de voir. Il est seulement regrettable que le titre trop spécial du livre ne soil pas fait pour engager beaucoup de personnes à le lire, car bien d’autres que des fabricants de colles pourraient y puiser des ensei- gnements précieux et y trouver un guide et un stimu- lant pour le plus grand avantage de leurs propres affaires et des affaires de la France en pEnEL . ARTH, Directeur de l'Institut Fes de Nancy. 3° Sciences naturelles Mabheu (J.), Préparateur à l'Ecole supérieure de Pharmacie de Paris. — Contribution à l'étude de la Flore souterraine de France. — 1 vol. in-8° de 189 pages avec pl. Extr. des Ann. des Se. nat., Bot., t. III. 9e sér. Masson, éditeur. Paris, 1907. Si, comme le dit M. Maheu lui-même, son travail n'a pas « la prétention de donner une connaissance parfaite de la flore souterraine », il en donne néan- moins une très large idée et se distingue. notamment, par l'abondance des fails, étudiés avec ordre, méthode, et un esprit philosophique tout à l'éloge de l'auteur. 1 M.Cambon me permettra de lui signaler quelques lapsus qui se sont glissés dans les formules chimiques des pages 139 et 140, et qui seront à corriger dans les prochaines édi- tions que je souhaite au volume, Une foule de points des plus intéressants y sont abordés, Sinon approfondis et tranchés d’une manière définitive; quantité d'observations des plus judicieuses ont recu des confirmations expérimentales. Au point de vue de la connaissance de la flore sou- terraine, le travail de M. Maheu constitue un docu- ment des plus importants; c'est par là un catalogue raisonné considérable, mais l’auteur a su introduire le plus d'intérêt dans les principales questions résolues par lui d'une manière définitive, et qui touchent : 1° A l’origine de la flore souterraine : 2° Aux modifications subies par les végétaux sous l'influence des changements de milieux ; 3° Aux variations morphologiques et aux actions des facteurs cavernicoles sur les organes de la reproduction Ann chez les Champignons). L'auteur à fait preuve d'un véritable sens critique en résistant au courant qui entraîne certains botanistes, au sujet des distinctions spécifiques nouvelles. Par suite des variations imposées aux formes par le milieu, M. Maheu à élé obligé de leur donner des noms nou- veaux; mais, à l'exemple d'Huxley, il ne se trompe pas sur la vértible nature spécifique des formes, n’ou- bliant pas « qu'il s'agit simplement dans leur dénomi- nation de termes el de Sy mboles ». Dans le chapitre consacré à l'Historique, l'auteur constate que les travaux sont surtout nombreux en ce qui concerne les Champignons, et que rares sont ceux qui s'adressent aux Muscinées et aux Phanérogames. Vient ensuite une liste très détaillée des cavités, groltes, avens, mines et carrières explorées, la plupart en France, quelques-unes en Allemagne, en Italie et en Belgique. Dans la deuxième partie, l’auteur débute par des considérations générales sur la flore souterraine, dont «les modifications morphologiques et anatomiques sont en rapport avec les variations de milieu. L'obseurité partielle ou continuelle, la température basse ou va- riable, sont, ainsi que la pauvreté du substratum en matières nutritives, les principaux facteurs biologiques auxquels on peut attribuer le polymorphisme, notam- ment l'allération dans les facultés de reproduction ». L'auteur passe ensuite en revue les différents embran- chements du règne végétal. On trouve, parmi les plantes vasculaires (Phanéro- games et Cryptogames vasculaires), qui ne descendent Jamais très bas, sinon des espèces ou variétés nouvelles, tout au moins des variations morphologiques et his- tologiques importantes. Les déformations morpholo- giques sont en rapport avec la diminution dans l’éclai- rement et l'état hygrométrique de l'air. Les plantes ont une tendance marquée à l'allongement, qui se fait sentir surtout sur les pélioles et les tiges; les feuilles s'espacent sur la tige, les nervures s ‘élargissent ; ilya une réduction du système pileux; enfin, la denture va jusqu'à s’oblitérer complètement, L'auteur attribue les causes de ces modifications : 1° à la réduction de l'intensité lumineuse (les varia- tions histologiques étant en rapport avec la largeur et la profondeur du gouffre); 2 à l'état hygrométrique de l'air; 3° à la tempér rature ambiante. Les Hépatiques et les Mousses préfèrent le substratum gypseux, alors que les Lichens affectionnent plus volontiers, au contraire, le carbonate de chaUS L'auteur étudie avec be: aucoup de détails, dans les différentes régions, la dispersion géographique des Muscinées cavernicoles, puis passe en revue les varia- tions morphologiques, et en donne de nombreuses figures schématiques. Enfin, grâce à ses recherches expérimentales, il étudie Ja part qui revient à chaque facteur biologique : obscurité, température, humidité, et conclut que l'influence des deux facteurs obscurité et humidité est intimement liée dans les cavernes. Les gouffres ne semblent pas convenir au dévelop- pement des Algues, et l'auteur touche à la question secondaire, mais très intéressante, de la contamina- tion des eaux d'infiltration par les bactéries. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 853 Enfin, un très long chapitre est réservé aux Cham- pignons, qui abondent surtout dans les galeries de mines, où les bois de soutènement, plus ou moins altérés, leur offrent un substratum convenable, et dans les cavernes naturelles, quand celles-ci renferment des végétaux en voie de décomposition. L'auteur constate que les Champignons sont plutôt calcicoles que silicicoles et préfèrent le carbonate au sulfate de chaux. Après avoir donné la liste des Champignons rencon- trés dans les différentes localités, l'auteur résume les variations polymorphiques qui attaquent l'espèce non seulement dans sa forme, mais dans sa fonction de reproduction. Ces variations sont: l'allongement du stipe, l’atténua- tion de la couleur (surtout dans les espèces jaunes et rouges), la déformation de l'hyménophore, la dispari- tion de la faculté sporifère, la production de coni- dies. « Pour la plupart des classes considérées, l'individu persiste pendant un certain temps à l'endroit où il s'est développé; il peut s'y multiplier par voie végéta- tive, conservant les modifications qu'il à acquises. Mais l'hérédité n'étant pas possible (exception qui semble cependant exister pour quelques rares Cham- pignons), la fixation des caractères acquis n'est pas durable. L'individu disparu peut être remplacé par d’autres, de même espèce; provenant de germes exté- rieurs, mais ceux-ci ont à recommencer toute la gamme des variations. » Enfin, l’auteur termine par cette conclusion intéres- sante en ce qui concerne le polymorphisme observé : « Il résulte, dit-il, que l'obscurité continuelle, la tem- pérature basse et variable, mais surtout l’état hygro- métrique de l'air sont, ainsi que la pauvreté du subs- tratum en matière nutritive, les principaux facteurs biologiques auxquels on peut attribuer les polymor- phismes. » Le travail de M. Maheu est complété par un grand nombre de figures schématiques et en relief; 11 est regrettable que la couleur ne soit pas venue les rendre encore plus réelles. Enfin, une bibliographie très soignée termine cet ouvrage que tout le monde lira avec facilité, intérêt et fruit. L. LAURENT, Docteur ès sciences, Chargé d'un Cours libre de Paléobotanique à la Faculté des Sciences de Marseille. Woodworth (C. W.). — The wing veins of Insects. — Une monographie de 152 pages avec 101 figures dans le texte (University of California publications, Technical Bulletins. College of Agriculture, Agricul- tural experiment Station, vol. I, n° 1). The Univer- sity Press, Berkeley, California, U. S. A., 1907. Le présent travail est un essai en vue d'établir une théorie générale de la nervation de l'aile des Insectes, qui joue un rôle si important dans la détermination des espèces; M. Woodworth pense qu'il n’y à pas lieu d'établir une stricte homologie entre les nervures des différentes classes d’'Insectes, car il y a eu des modifi- cations sans nombre dans le trajet et les connexions des nervures; il n’est donc pas utile de rechercher une nomenclature uniforme; quelques termes pourront être communs sans inconvénients, mais chaque groupe doit avoir sa nomenclature propre. Les nervures sont dues à un épaississement de la cuticule suivant certaines lignes, renfermant une cavité cylindrique communiquant avec la cavité du corps, et où peuvent passer du sang, des trachées, des nerfs, etc.; ces épaississements, qui ont un rôle méca- nique évident, peuvent s’aplatir ou même disparaitre dans les régions où ils ne sont plus utiles; leur utilité fonctionnelle est la raison importante de leur exis- tence (?). L'auteur accepte la théorie bien connue de (Ge- genbaur, qui pense que les ailes sont des branchies trachéennes modifiées; une étape intermédiaire entre la branchie et l'aile fonctionnelle pourrait être cons- tituée par les lamelles protectrices de branchies tra- chéennes, telles qu’elles existent chez quelques larves d'Ephémères, notamment le /ti1hogena; ces lamelles, qui sont animées de mouvements vibratoires, ont une ner- vation rudimentaire, et rappellent tout à fait des ailes en voie de développement L. Cuénor, Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy. 4° Sciences médicales Bourget (Louis), Professeur de Clinique médicale à l'Université de Lausanne. — Les maladies de l'estomac et leur traitement. — 1 vol. 1-8 de 300 pages, avec 12 planches et 14 fiqures dans le texte. (Prix : 5 fr.) J.-B. Baillière et fiis, éditeurs. Paris, 1907. Dans ce volume, M. Bourget a réuni les lecons eli- niques faites à l'Université de Lausanne sur le mode d'examen et le mode de traitement des gastropathes. C'est bien là un livre de clinique et de pratique. L'auteur rejette systématiquement les classifications hybrides des affections de l'estomac basées à la fois sur la symptomatologie, l'anatomie pathologique et la physiologie; il montre combien ces classilications sont fausses et correspondent peu à la réalité clinique. M. Bourget expose d'une façon très simple les pro- cédés d'examen clinique et chimique de l'estomac; laissant de côté les méthodes compliquées qui n’abou- tissent pas à un résultat pratique, il indique seulement celles dont il se sert journellement et dont on peut attendre une conclusion utile au diagnostic. On trou- vera là de bonnes leçons de séméiotique, avec Ja inanière de diriger l'interrogatoire, de faire l'examen de l'abdomen, de déterminer la situation, la forme et les dimensions de l'estomac, d'apprécier, par l'analyse du suc gastrique après repas d’épreuve, la sécrétion stomacale. L'examen doit aboutir à reconnaître non point une maladie de l'estomac, mais la déviation fonctionnelle de la physiologie gastrique; car l'examen mène à une thérapeutique, et celle-ci ne vise point la maladie elle- même, mais le trouble physiologique. Au premier rang des moyens thérapeutiques, Pauteur place la psychothérapie el montre comment on arrive à la mettre en œuvre par le raisonnement et lPauto- suggestion. Pour tous les gastropathes sans lésions de l'estomac, qui constituent la majorité, cette méthode de traitement est indispensable ; elle est mème la seule eflicace, les autres médications n'agissant guère que par suggestion. : Viennent ensuite l'hydrothérapie, l'électrothérapie, les médications acides et alcalines, les médications par les ferments digestifs, les narcotiques, le lavage de l'estomac, dont l'auteur restreint l'emploi et qu'il préfère souvent remplacer par cerlaines manœuvres qu'il désigne sous le nom d’autolavages. M. Bourget donne un développement considérable à la question des régimes alimentaires qui constituent la base de la thérapeutique des gastropathies : il montre comment utiliser les notions modernes sur la valeur énergétique et la digestibilité des aliments, et insiste sur la nécessité d’une bonne préparation culinaire. Enfin, M. Bourget étudie séparément, au point de vue étiologique, symptomatique, thérapeutique : les ptoses et malpositions de l'estomac, les gastrites, les processus ulcératifs, les tumeurs, les troubles gastri- ques dans les différentes maladies. Ces questions sont traitées avec le même esprit clinique et pratique qui fait du livre de M. Bourget un traité peut-être sans grandes envolées, un peu terre à lerre, mais à coup sûr sincère et utile au praticien. M. LABBé Médecin des Hôpitaux, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 7 Octobre 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. M. Riesz généralise un théorème de M. Schwarz, qu'il exprime ainsi : Toute fonction continue eile-même et admettant une dérivée seconde continue et une dérivée quatrième généralisée partout nulle est un polynome de troisième degré. — M.J. Bosler a observé et photographié le spectre de la comète Daniel 1907 d. Les clichés révèlent le spectre ordinaire des hydrocarbures avec un maximum d'intensité vers À 469, puis deux bandes du cyanogène et quelques radiations étrangères. — M. P. Helbronner donne quelques détails sur l'exécution d'une chaine géodésique de précision dans les Alpes de Savoie. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. M. Hamy montre que, dans les spectroscopes à miroir, on obtient un champ d'images aussi plan et aussi étendu que possible en disposant le centre N de la face de sortie du dernier prisme du train, entre le miroir et le milieu F du rayon de ce miroir passant par N, à une distance de F égale à 0,154 de la longueur focale. — M. H. Pécheux a étudié l'influence de la présence de métaux étran- gers dans le nickel sur sa thermo-électricité. Les courbes des forces électromotrices des couples nickel impur-cuivre ne sont pas parallèles; la température de transformation moléculaire du nickel varie avec l'impureté.— M.M.Tiffeneau montre que les migrations phényliques chez les iodhydrines aromatiques s’effec- tuent eu deux phases : l'une, provoquée par l'élimina- tion de HI, a pour effet la migration du groupe aro- matique avec création d'une double liaison; l’autre consiste simplement dans l’isomérisation de l'alcool vinylique intermédiairement formé. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. M. Caullery montre que les Epicarides, dès les premières heures de leur éclosion, recherchent les Copépodes pour y passer à l'état de Micronisciens. Ceux-ci ne sont donc bien, comme l'a dit Sars, que les phases larvaires des divers Epicarides, comprises entre le stade épicaridien et le stade cryptoniscien. — M. E.-L. Trouessart a constaté la présence de Sarcoplides détriticoles (Tyroglyphinés) dans les os longs de l'aile d'oiseaux de Colombie: ils y avaient pénétré du vivant des oiseaux, probablement par les bronches etles sacs aériens.— M. Edg. Hérouard a observé l'existence de statoblastes chez le scyphis- tome; ils paraissent destinés à assurer la conservation de la forme larvaire.— M. A. Guépin montre la néces- sité de faire des cultures pour la recherche du gono- coque dans la plupart des affections uro-génitales, la bactérioscopie étant souvent insuffisante. — M. R. Vi- guier décrit quelques nouvelles plantes fossiles du tra- tersin de Sézanne. Séance du 14 Octobre 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Buhl présente ses recherches sur la sommabilité des séries de Lau- rent et généralise le théorème de sommabilité de Césaro. — M. Et. Delassus éludie les invariants des systèmes différentiels et montre que le nombre des formes canoniques distinctes d’un mème système diffé- rentiel est toujours limité. — M. T. Boggio démontre un nouveau théorème sur les équations intégrales. — M. G. Bigourdan signale le passage de Mercure devant le Soleil qui aura lieu le 44 novembre prochain et indi- que les observations auxquelles se prêtera ce passage. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Meunier étend la ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES méthode dont il s'est servi pour analyser les mélanges d’éther et d'air à l'analyse des mélanges d'air et de gaz ou vapeurs inflammables quelconques. — M.N.Gréhant montre que, dans le dosage des mélanges de formène et d'air contenant 5 à 1 °/, du premier, avec l’eudio- mètre-grisoumètre, il faut faire passer 200 à 400 fois le courant dans la spirale de platine afin que la combus- tion soit complète. — M. A. Brochet a étudié les réac- tions de la cuve de nickelage. Le dépôt de nickel demande la neutralité du bain; la présence de sels alcalins est nécessaire pour obtenir un bon dépôt. — MM. M. Tiffeneau et Daufresne ont préparé un alcool vinylique, le méthylanisyléthénol, par l'action succes- sive de l’acétate de potassium sec en solution alcoo- lique, puis de la potasse alcoolique, sur le dibromure d’estragol. Il fond à 79°. 39 SCIENCES NATUREI LES. — M. Ch. Henry a tiré des recherches de Künig et Brodhun sur la photométrie une nouvelle loi psychophysique. La proportionnalité de l'énergie du courant électrique du nerf à l'énergie excitatrice extérieure est vérifiée; mais l'énergie de réaction musculaire (réflexe), après avoir grandi dans le même sens que la sensation, passe par un maximum et décroit.— M. BP. Vigier montre que, chez les Muscides, chaque ommatidie reçoit, non pas une impression lumineuse diffuse, mais sept impressions distinctes, correspondant à sept points voisins situés dans l’aire centrale d'une petite image renversée. — M. J. Tribot a constaté, chez l’avoine, un maximum du poids total de la plante qui a lieu vers le soixante-quatorzième jour, la çourbe du poids ayant la forme indiquée par Quételet pour la variation du poids de l'homme. Le. maximum de poids coïncide avec le maximum de taille. — MM. Dubard et Eberhardt décrivent un nouvel arbre à caoutchouc trouvé au Tonkin; il rentre dans le genre Bleekrodea, tribu des Fatouées, famille des Moracées; on n’en connaît que deux autres espèces, l’une à Bornéo, l’autre à Madagascar. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 8 Octobre 1907. MM. A. Poncet et R. Leriche montrent, par de nombreux cas, que les déformations ostéo-articulaires essentielles de la croissance : scoliose, genu valgum, pied plat douloureux, coxa vara, etc., sont souvent d’origine tuberculeuse. — MM. Wickham et Degrais communiquent un travail sur le traitement des nævi vasculaires (taches de vin) par le radium. — M. G. Pa- tein lit une étude concernant l'influence de la réaction du plasma sanguin sur la formation de la fibrine. — M. J. Gourdon présente un travail sur une nouvelle classification des scolioses des adolescents. Séance du 15 Octobre 1907. M. le Président annonce le décès de M. A. Doyon, associé national. M. E. Boinet montre qu'il n'y a pas d'antagonisme vrai entre la tuberculose pulmonaire et le cancer des divers organes. La coexistence de ces deux affections n’est pas exceptionnelle, car il a trouvé onze fois de la tuberculose pulmonaire dans trente-cinq autopsies du cancer de l'estomac, de l'æsophage et du pancréas. Les descendants des cancéreux sont prédisposés à la tuber- culose pulmonaire. — Le même auteur signale un nou- veau signe de l’anévrisme de la crosse de l'aorte, caractérisé par l’abaissement, l'inféro-traction et l'im- mobilisation du larynx en bas, ainsi que par la dévia- tion et la torsion à gauche de cet organe. — M. H. UT - d'autre part, J + ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 855 Vincent estime que, dans certains cas de tétanos post- opératoire inexpliqués, on peut incriminer l'emploi de catgut ou de soie mal stérilisés, qui auraient apporté dans la plaie des bacilles tétanigènes. Il montre, que le sang extravasé (sous forme de caillot ou d'hématome) peut, en l’abritant dans son réseau fibrineux, favoriser la tune du bacille du tétanos. Pour le traitement préventif du tétanos survenu dans ces conditions, il faut réitérer au moins deux ou trois fois, à huit ou dix jours d'intervalle, les injections de sérum antitétanique. — MM. V. Cornil et Brossard ont enlevé à un homme adulte de dix- neuf ans un tératome des bourses renfermant un utérus et une trompe situés entre les deux testicules dans la tunique vaginale. — M. Coutière donne lec- ture d’un travail sur les prétendues glandes venimeuses des Murédinées. — M. Léger présente une étude sur le touraillon d'orge et son alcaloïde, l’hordénine, et leur emploi en thérapeutique. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 12 Octobre 1907. M. O. Josué rappelle que les injections intra-vei- neuses d’adrénaline déterminent de l’hypertrophie car- diaque en même temps que l’athérome aortique. — M. G. Meillère a observé que l'inosite se rencontre plus fréquemment dans les tissus végétaux à croissance rapide; elle constitue un élément normal du paren- chyme végétatif des organes foliacés des végétaux supérieurs. — MM. A. Desgrez et G. Saggio ont con- staté que, si la toxicité de l'acétone est faible, celle de l'acide diacétique est double, et celle de l'acide G5-oxy- butyrique triple. L'administration répétée des composés acétoniques provoque une diminution de volume des urines, un amaigrissement marqué, un appauvrissement de l'organisme en éléments minéraux. — MM. P. Le Noir et J. Camus ont recherché le bacille de Koch dans l'air des salles occupées par des tuberculeux à l'hôpital Saint-Antoine et ne l'ont pas trouvé. — M. A. Marie à vu qu'en passant par le cerveau du chien, le virus de Ja rage des rues, loin de s’affaiblir, semblait fixer sa virulence plus rapidement qu'à la suite de pas- sages dans l’encéphale des rongeurs. — M. A. Besredka développe une théorie de l’anaphylaxie dans le sérum de cheval. — MM. A. Calmette, M. Breton et G. Petit ont constaté que l’ophtalmo-réaction à la tuberculine apparaît lorsque l'organisme est sensibilisé par des doses faibles de poison, mais qu'elle ne se produit plus lorsque l'organisme en est saturé. La réaction conjonc- tivale se réveille, chez les sujets sains ou tuberculeux, sous l'influence d’une injection sous-cutanée de tuber- culine. — M. E. Marchoux conclut, de ses expériences, à l'unité d'origine de toutes Les septicémies à spirilles, au moins chez les oiseaux. la reviviscence de la cuti- et de l’oculo-réaction à la tuberculine quand, après une première réaction, on pratique une injection sous-cutanée de tuberculine, celle-ci suivie d’une réaction thermique. — MM. J. Lé- pine et R. Charpenel ont essayé l’ophtalmo-réaction à la tuberculine chez des malades alteints de démence précoce; la tuberculose, décelée par cette nouvelle méthode, paraît être très fréquente. — M. Jungano a isolé, dans un cas d'affection rénale d’origine sanguine, un anaérobie strict qu'il nomme /7. Albarrani. — M. F. Dévé, en faisant ingérer à un écureuil vingt anneaux murs de ténia échinoc oque, a constaté à l’autopsie, soixante-sept jours après, la présence de trente-trois kystes hydatiques disséminés dans les deux poumons. — MM. F. Dévé et M. Guerbet rapportent un cas de suppuralion gazeuse spontanée d’un kyste hydatique du foie; on y a trouvé exclusivement des germes anaérobies. — M. M. Neveu-Lemaire signale un nouveau cas de parasitisme accidentel d’un Myria- pode (Scutigera coleoptrata) dans le tube digestif de l'homme ; l'animal avait provoqué de la diarrhée et fut rendu dans l'une des selles. — MM. G. Guillain, — M. J. Lemaire signale” L. Boidin et N. Fiessinger ont constaté que le sérum d'un malade convalescent d'œdème charbonneux de la face possédait une action préventive très nette pour le lapin ; il renfermait un ambocepteur spécilique et mani- festait un pouvoir phagocytaire net. — M. G. Froin présente une théorie du mécanisme régulateur des leucocytoses intra- el extra-vasculaires. — MM. O. Crouzon et J. Soubies montrent que le froid et l'humidité de l'air interviennent, pour une large part, dans la production de l'hyperglobulie des aéronautes. — M. Laignel-Lavastine à reconnu que le tuberculeux eu début relativement apyrétique (dont la température centrale ne dépasse pas 38°) présente une diminution de sa capacité chlorurée. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 20 Juin 1907 (fin). M. A. Fowler présente ses recherches sur le spectre cannele de loxyde de titane. Il montre que les canne- lures du spectre du titane, qui se retrouvent dans le spectre des étoiles antariennes, sont produites par un composé du titane avec l'oxygène et non par la vapeur du métal lui-même. Il en résulte que la source de l'absorption cannelée, dans les étoiles antariennes, est à une température assez basse pour permettre la for- mation d'un composé chimique ; d'autre part, la présence de l'oxygène dans ces étoiles est ainsi démontrée. L'auteur donne, en terminant, une table revisée et étendue des longueurs d'onde des têtes des cannelures du spectre du titane. — MM. E.-H. Armstrong, J.-V. Eyre, A.-V. Hussey et W.-P. Paddison : Ætude des processus opératifs dans les solutions. I. Le déplace- ment des chlorures de leurs solutions par lacool et par HCI. Les auteurs ont choisi l'alcool et HCI comme précipitants des chlorures, parce que l’un est un non- électrolyte et un faible déhydrant, l’autre un électro- lyte et un déhydrant moyen. L'alcool est moins actif que HCI dans la précipitation des chlorures, mais son influence est de même nature. — M. R. Whymper : Id. II. L'action sucrolastique de l'acide nitrique et l'in- fluence des nitrates. L'auteur a reconnu que, dans l'hydrolyse du sucre de cannes par l'acide nitrique en présence de nitrates, ces derniers sont presque com- plètement hydratés en solution. — MM. H.-E. Arm- strong et J.-A. Watson : /d. IV. L’Jydrolyse de l'acc- tate de méthyle en présence de sels. L'hydrolyse par HCI en présence de KCI est accélérée; en présence de chlorures hydratés, elle est, en moyenne, la même. — MM. H.-E. Armstrong el R.-J. Caldwell : MIN en discrimination des hydrates en solution. Les auteurs tirent des expériences précédentes des preuves en faveur de l'existence de diverses sortes d'hydrates en solution, dont ils cherchent à donner une idée de la constitution. Séance du 27 Juin 1907 (suite). MM. P. T. Herring et S. Simpson : La pression de la secrétion biliaire et le mécanisme de l'absorption de la bile dans lobstruction du conduit biliaire. Les auteurs ont constaté que la pression maximum atteinte par la bile dans l’obstruction du canal biliaire commun excède considérablement les chiffres donnés par Hei- denhain. Chez le chien, le chat et le singe, la pression maximum moyenne a été de 300 millimètres de bile; la pression maximum a été de 373 millimètres. Quand le canal biliaire est obstrué, la bile sort du foie par les lymphatiques; chez le chat, on peut la irouver dans le conduit thoracique une heure après l’obstruc- tion. La bile, obstruée dans son cours, entre dans les canaux plasmaliques intra-cellulaires des cellules hépa- tiques et passe de là, par lé cours naturel de la lymphe, dans les canaux lymphatiques des espaces portes. Le mécanisme de l'absorption a donc lieu dans les cellules hépatiques. Les canaux plasmatiques intra-cellulaires constituent un système intermédiaire entre les vais- seaux sanguins et les lymphatiques du foie, ce qui 856 vient à l'appui de la théorie vitale de la formation de la lymphe. — M. Ch. Bolton poursuit ses études sur le sérum gastrotoxique. Le sérum employé à été pré- paré en injectant des cellules stomacales de cobaye au lapin, le sérum sanguin du lapin développant des pro- priétés toxiques pour les tissus du cobaye. Ce sérum contient, non seulement une précipitine pour les pro- téides des cellules stomacales, mais encore des préci- pitines distinctes pour d'autres protéides du corps. Il n'y a pas}d'agglutinine pour les granules des cellules stomacales, l'agglutination observée étant provoquée par les précipitines. L'injection répétée de sérum gas- trotoxique n'a pas produit d'ulcération gastrique chro- nique, mais il s'est développé une immunité contre ce sérum. L'immunité n’est pas seulement active, mais le sérum de l'animal immunisé est capable de conférer limmunité passive à d'autres animaux. La nécrose de la membrane muqueuse de l'estomac résultant de l'in- jection de sérum gastrotoxique n'est pas causée direc- tement par le sérum, mais par l’action du suc gastrique. Les cellules sont altérées fonctionnellement par le sérum, qui les rend ainsi sensibles à l'action du suc gastrique : le processus est donc une auto-digestion. L'hyperacidité du suc gastrique augmente la tendance à l’auto-digestion. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 29 Juin 1907. 10 SGENGES MATHÉMATIQUES. — M. E. F. van de Sande Bakhuyzen présente au nom de M. W. de Sitter : Quel- ques remarques sur la théorie des satellites de Jupiter. Aperçu sommaire de recherches qui paraîtront bientôt dans le n° 17 des Publications du Laboratoire astrono- mique de Groningue. 1. Théorie de la libration. 2. Les équations du centre. 3. Détermination de la libration à l’aide des observations. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — J. D. van der Waals : Con- tribution à la théorie des mélanges binaires. V. Suite (voir Rev. génér. des Se., t. XNIIL, p. 564). Jusqu'à pré- sent l'auteur a supposé, dans la détermination de la ligne binodale, que la seeonde composante, dont la quantité b surpasse celle de la première composante, correspond à une température critique plus basse, de manière que (Tx), < (Tx),. Dans le cas contraire, quel- ques nouvelles complications se présentent; elles forment l'objet de cette étude. — M. H. Kamerling Onnes présente : 4° En son nom et au nom de M. C. Braak : /sothermes de gaz biatomiques et de leurs mélanges binaires. Suite (voir ÆRev. génér. des Se., t. XVIII, p. 128). 14. Aperçu des expériences. 15#hRe marques sur les manomètres et les piézomètres. 16. Deuxième groupe de valeurs de pv4; — ?° en son nom et au nom de M. J. Clay : La mesure de tempéra- tures très basses. XIV. Suite (voir Rev. génér. des Se., t. XVIII, p. 176). Calibration de quelques thermometres à résistance de platine. 1. Introduction. 2. Détails de la comparaison et des fils examinés. 3. Invariabilité des thermomètres à résistance pour lestempératures basses. 4. Résultats; — 3°en son nom etau nom de M. J. Clay : Sur la variation de la résistance des métaux à des températures très basses et l'influence de petites quan- tités d'autres substances mélangées aux métaux. 1. Introduction. 2. Or. 3. Mercure. 4. Argent. 5. Bis- muth. 6. Plomb. — M. H. A. Lorentz présente au nom de M. J. J.van Laar : Sur les dernières remarques de MM. H. Kamerlingh Onnes et W. H. Keesom. Com- parez : Rev. génér. des Se., t. XVII, p.564. —M.P.van Romburgh : Sur la décomposition du tétraformiate de penta-érythrite par échauffement. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 39 SGtENCES NATURELLES. — M. A. Wichman : Sur des veines mélalliques dans la province de Limbourg. — H. J. Hamburger présente en son nom et au nom de M. E. Hekma : La phagocytose. 1. L'influence de divers milieux sur la faculté phagocytaire des cor- pusecules blancs du sang peut être déterminée exacte- ment par l'évaluation du rapport pour cent du nombre des cellules capables d’assimiler des particules de charbon à la température du corps. 2. L'addition d'eau au milieu naturel des phagocytes, c'est-à-dire à leur propre sérum, est très nuisible à la faculté phago- cytaire. Mème une décroissance de la concentration osmotique, qui se présente journellement chez l'indi- vidu normal, cause une décroissance assez considé- rable de cette faculté. 3. En remettant dans leur propre sérum les cellules abimées par l'addition de l’eau, on régénère la faculté phagocytaire, soit totalement, soit en partie. 4. Les phénomènes observés sur les phagocytes s'accordent avec ceux qu'on à observés autrefois sur les corpuscules rouges du sang. 5. L'accrois- sement de la concentration osmotique nuit aussi à la phagocytose, même plus qu'une décroissance de même ordre. 6. En remettant les cellules, traitées avec NaCI, dans leur sérum, la faculté phagocytaire se rétablit. 71. Aussitôt que, grâce à l'activité des reins, le sérum sanguin à réobtenu la concentration osmotique nor- male, la faculté phagocytaire s'est régénérée totale- ment, même 24 heures après l’action du sérum aniso- tonique. 8. En solution de NaCl à 0,9 °/c, la faculté phagocytaire est presque aussi grande que dans le sérum normal. 9. L'abaissement de cette faculté, causé par l'anisotonie du sérum, doit être attribué en premier lieu à une modification de la teneur en eau des cellules. 10. A côté de cette modification de la teneur en eau, vient en second lieu la variation chimique, causée par l'échange de substances entre la cellule et l’entou- rage, etc. — M. F. A. F. C. Went présente au nom de M. J. van Beusekom : Sur l'influence des irritations dues à des blessures sur la formation des bourgeons adventices dans les feuilles de Gnetum Gnemon L. — M. W. Einthoven présente, en son nom et au nom de MM. J. H. Wieringa et E. P. Snyders : Un troisième son du cœur. — M. K. Martin présente au nom de M. P. Tesch : Considérations sur le diluvium sableux de Sta- ring. —M. H. Zwaardemaker : L'adsorption de lodeur de la muscone sur les surfaces des diflérentes sub- stances. Suite (voir Rev. génér. des Se.,t. XVI, p.564). — M. G. À. F. Molengraaf présente au nom de M. A. L. wW.E. van der Veen : Sur la forme cristalline du dia- mant. Communication provisoire. D'après l'auteur, le diamant cristallise dans la section holoédrique du système régulier ; la structure octaédrique qui lui est propre fait trouver une explication rationnelle de toutes les formes quasi-hémiédriques décrites par MM. Groth, Sadebeck, Martin, etc. — M. Went présente encore, au nom de M. S. H. Koorders : « Botanische Untersu- chungen über einige in Java vorkommende Pilze, besonders über Blätter bewohnende, parasitisch auftre- tende Arten, Abschnitt II-V » (Recherches botaniques sur quelques champignons de l'île de Java, en particu- lier ceux qui vivent parasitiquement sur des feuilles, chapitre II-V). — M. W. Einthoven : Onderzoekingen gedaan in het Physiologisch Laboratorium te Leiden » (Recherches faites au Laboratoire physiologique de Leyde). série 2, tome VI. P. H. SoouTe. EEE —————————_—_—_—_—_—_—_———————_—_—_—_—_—_—_—_——— Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 18° ANNÉE 15 NOVEMBRE 1907 Revue générale des Ncienc pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous kes pays étrangers, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux y compris la Suède, la Norvège et la Hollande CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Astronomie Les erreurs dans les mesures à l'estime. — M. Grossmann a voulu reprendre l'étude des erreurs d'appréciation, sous la forme de ce qu'il est aujour- d'hui d'usage d'appeler équation décimale, c'est-à-dire, par exemple, l'estimation des dixièmes d'un petit intervalle sur le tambour d'une vis micrométrique : avec les longues séries de lectures des micromètres d'un cercle méridien, des bandes d'un chronographe ou des niveaux, il forme les tableaux! qui indiquent la fréquence relative des divers dixièmes et constate des écarts qui — la chose n’a rien d'inattendu — sont parfois très considérables. Pour élucider ce problème complexe, l’auteur dégage les conclusions de son tra- vail. D'abord, l'équation décimale est, selon lui, un phénomène d'origine essentiellement psychologique : psychologique ? peut-être ; bien qu'il nous päaraisse assez physiologique, la structure de l'œil intervenant certainement, mais aussi, et surtout, la fatigue de l'observateur. Au reste, la discussion nous parait sté- rile, sur ce point, pour les bénéfices pratiques de lAstronomie, et nous n'y insisterons pas à présent. En second lieu, l'auteur se préoccupe des conditions à remplir pour augmenter la précision des mesures, et, ici encore, nous ne rencontrons guère que des conseils généralement admis et de première nécessité : perception nette et complète en fixant l'objet, estima- tion faite en promenant l'œil d'un bout à l'autre de l'intervalle, simplification des opérations que com- porte la mesure pour permettre à l'observateur de gar- der son sang-froid. L'équation décimale a été signalée par J. Hartmann dès 1858, puis par Peirce, et elle fut l'objet d'impor- tantes et intéressantes recherches, ces temps derniers, avec Gonnessiat, Boquet, Stræle, Boccardi... Mais, jusqu'à présent, on s'est préoccupé d'en étudier les propriétés plutôt que d'indiquer les moyens propres à y remédier simplement. Et, avec la précision crois- saute des mesures, le danger devient assez grave : l'opération la plus simple est ainsi faussée par des causes difficiles à discerner; puis, en définitive, toutes | les mesures que nous effectuons ne sont-elles pas faites à vue d'œil, ne sont-elles pas sujettes à une influence individuelle, à des erreurs physiologiques? Cependant, jusqu'à présent, on réservait cette erreur pour les cas d'appréciation nette : estime du dixième d'une division, estime de la division, en deux parties égales, de la distance de deux fils par un objet faible- mené &umineux ; or, voici que la bissection mème d’une imagé brillante avec un fil fin comporte, suivant P. Salet', une équation personnelle très importante. Et, ce qui est plus grave, la discussion des résultats si complets de Boquet montre à l’auteur que cette nou- velle équation personnelle de bissection est de nature à modilier toutes les données reçues à propos de la flexion des instruments méridiens : ce travail a donc une très grande et très légitime importance. La précision croissante des mesures doit entrainer la connaissance très précise des corrections instrumen- | tales: il n’en était pas ainsi pour le problème de la flexion, qui se prêtait à des critiques multiples, et qui semble actuellement entrer ainsi dans une phase nou- velle par l'intermédiaire des équations personnelles. Mais ces équations, elles-mêmes, laissent à désirer; il est souhaitable que des astronomes consciencieux se vouent entièrement à ces recherches ingrates; il faut, en effet, parvenir à la détermination érès rapide des équations, opération que chaque observateur devrait répéter constamment pour ses propres réductions, et l'on ne tardera pas à s'apercevoir que ces corrections ne sont pas rigoureusement constantes, qu’elles dé- pendent de l’état de l'observateur, de sa fatigue et du temps d'observation. à Les équations personnelles sont assez importantes : il faut les rendre praticables. $ 2. — Électricité industrielle Les progrès du chauffage électrique aux Etats-Unis. — D’après l'Æ£lectrical World, le chaut- fage électrique, qui, en France, constitue une rareté, à des applications de plus en plus nombreuses en Amé- rique, et de puissantes sociétés ont réussi à répandre 1 Astronomische Nachrichten, n° 4066. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1901. 1 Bulletin Astronomique, juillet 1907. 858 cet emploi de l'électricité chez leurs abonnés. C’est ainsi que, grâce à la Mobile Electric C°, l'usage des fers à repasser électriques se généralise, non seulement dans les blanchisseries, mais aussi chez les particuliers. Dans les blanchisseries, la Compagnie, pour vulga- riser cet usage, a commencé par assumer tous les frais d'achats des fers et d'installation et autorisa ses clients à faire l'essai pendant deux mois au prix de 15 centimes le kilowatt-heure. Non seulement la régularité de la température permettait de faire un travail plus soigné ; mais, le chauffage des fers au gaz coùtant environ trois fois plus cher que le chauffage électrique, ce qui per- mettait d'amortir rapidement les frais d'installation et de réduire ensuite considérablement la dépense, le nouveau mode de chauffage était aussitôt apprécié et adopté. Le même procédé de vulgarisation employé chez les particuliers, avec une période d'essai réduite à un mois, a donné de tels résultats que le rapport entre le nombre de fers acceptés et le nombre de ceux à l'essai était de 80 °/, et que, d'août 1906 à avril 1907, 640 fers à repasser furent acceptés et payés. Actuelle- ment, il n'est pas une seule ménagère qui n'aspire à avoir son fer électrique. Une autre Compagnie, la New-York Edison Co, arrive à faire placer 25 chauffe-plats électriques par mois chez ses clients, et, dans les maisons modernes, les installations de ces appareils sont maintenant tou- jours prévues par les architectes. L'usage des séchoirs électriques pour le linge se répand également de plus en plus. A New-York, plusieurs restaurants ne font leurs gril- lades qu'électriquement, et l’on cite une importe manu- facture de cette ville qui prépare chaque jour sur des fourneaux électriques les repas de ses 2.000 ouvriers ou employés, Dans une autre ville des Etats-Unis, Grinnel, dont la population est de 5.000 habitants, les installa- tions de cuisines par l'électricité ont fait des progrès très rapides et l'on y compte actuellement 235 chauffe- plats électriques. Le mème progrès se manifeste dans presque toutes les villes importantes d'Amérique. La soudure électrique tend également à se répandre de plus en plus dans les établissements industriels. L'économie de temps est considérable et la constance de la température du fer à souder rend l'opération très facile. On a pu se rendre compte que, pour la soudure des bandes de fer utilisées dans l’industrie des malles et articles de voyage, il suffit d'une puissance de 1,16 kilowatt et d’un courant de 25 à 35 ampères pour faire 480 soudures à l'heure. L'industrie de la reliure utilise aussi très avantageu- sement le chauffage électrique : on y gagne en régularité et en propreté. La chaleur obtenue par des radiateurs, et dont les rhéostats permettent de régler l'intensité, donne aux presses les températures voulues. Une application très spéciale du chauffage électrique consiste à dégeler sur place, pendant l'hiver, les con- duites d’eau. Les excellents résultats obtenus en Amérique devraient attirer chez nous l'attention sur ces nom- breuses applications de l'électricité. 11 faut espérer que l'exemple des Etats-Unis sera suivi, dès que l’abaisse- ment du prix du kilowatt-heure permettra d’avoir le chauffage électrique dans des conditions économiques. $ 3. — Physiologie La rétraction du caillot sanguin et les hématoblastes. — Lorsqu'on a recueilli dans une éprouvette le sang qui s'écoule d'un vaisseau et qu'on l’abandonne au repos, ce sang ne tarde pas à coaguler: on voit se former, le long des parois du vase et à la surface du liquide, une fine pellicule qui enveloppe la masse sanguine comme d'un sac; puis cette masse se transforme en une gelée cohérente constituant un bloc unique, qui prend naturellement la forme du vase qui le contient. A cette phase de coagulation succède la phase de CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE rétraction. Bientôt la surface du caillot se creuse en cupule et s'humidifie légèrement; peu à peu, quelques gouttes de liquide forment une mince couche inter- posée entre la paroi du vase et le caillot, et la rétrac- tion faisant des progrès plus ou moins rapides, mais incessants, le caillot se détache de la paroi inférieure du vase et se raccourcit en même temps qu'il revient sur lui-même. La séparation du sérum achevée, le caillot revêt une forme cylindrique ; son extrémité supérieure, creusée en cupule, est plus large et adhère aux bords du récipient par une sorte de collerette con- tinue ou interrompue; son extrémité inférieure est arrondie et flotte dans le sérum qui l'enveloppe de toutes parts. Quelle est la cause de cette rétraction du caillot ? Est-elle due, comme on l’a soutenu tout d'abord, à l'élasticité de la fibrine ? Assurément non, car, si le caillot du sang total se rétracte dans les conditions ci-dessus décrites, le caïllot de liquides fibrineux ne contenant pas d'éléments figurés (plasma centrifugé, liquides de transsudats, solutions de fibrinogène, etc.) ne se rétracte pas. M. Hayem s'est efforcé de démontrer que, parmi les éléments figurés du sang, ce sont les hématoblastes qui . jouent le rôle actif dans le phénomène de rétraction du caillot. A cet effet, il fait remarquer que les caillots des liquides dépourvus d'hématoblastes (lymphe, sérosités pathologiques) ne sont pas sensiblement rétractiles. Il insiste surtout sur les modifications de la rétractilité du caillot et les modifications correspondantes du nombre des hématoblastes dans divers cas pathologiques ; en général, dans le purpura hémorragique, dans l’anémie pernicieuse protopathique, dans les états cachectiques très avancés et dans certains états infectieux, le caillot ne se rétracte pas du tout; en général, dans ces mêmes cas pathologiques (sauf toutefois dans les états infec- tieux), il y a diminution considérable du nombre des hématoblastes. Cette exception à la règle dans les états infectieux constituait toutefois une objection grave à l'hypothèse de Hayem ; la solution définitive de la question deman- dait de nouvelles expériences. Elles viennent d'être faites par MM. L. Le Sourd et Ph. Pagniez et publiées dans le Journal de Physiologie et de Pathologie géné- rale, MM. Le Sourd et Pagniez commencent par préparer des hématoblastes purs, c’est-à-dire non mélangés d'hématies ou de leucocytes. A cet effet, ils recoivent du sang sortant des vaisseaux dans un égal volume d'une solution aqueuse de chlorure de sodium à 8 °/% et d'oxalate de soude à 4°/,,, de facon à empêcher sa coagulation; ils le soumettent à une centrifugation de quelques minutes pour sédimenter les globules rouges, et décantent avec une pipette le plasma très trouble et légèrement rosé qui les surmonte. Ils introduisent ce liquide dans un tube terminé par une effilure longue et étroite, et centrifugent vigoureusement pendant plu- sieurs heures. Ils trouvent alors dans cette effilure un culot stratifié, dont la couche la plus superficielle, abso- lument blanche, se compose d'hématoblastes purs sans aucun autre élément. On sait que le plasma oxalaté, additionné d'une quantité convenable de chlorure de calcium, coagule ; on sait que le liquide d'hydrocèle, additionné de fibrin- ferment, coagule. Or, les caillots obtenus dans ces deux cas sont et restent indéfiniment irrétractiles. Mais si, à ces-liquides, on ajoute préalablement des hémato- blastes purs, obtenus comme nous l'avons dit, la ré- traction se produit. La rétractilité du caillot varie, d’ailleurs, proportionnellement à la quantité d'héma- toblastes ajoutée, et, pour une quantité convenable, elle est assez considérable pour que le caillot devienne presque filiforme. Par contre, les autres éléments figurés du sang 1 T. IX, n° 4, p. 579-592, juillet 1907. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 859 n’exercent aucune action sur la rétraction de la fibrine. Ajoute-t-on aux liqueurs fibrinogénées, avant leur coa- gulation, des globules rouges (le dépôt de globules rouges au fond de l’éprouvette de la centrifugeuse ne contient pas un seul hématoblaste), le caillot est irré- tractile. Il est difficile d'obtenir des leucocytes purs, c'est-à-dire non mélangés d'hématoblastes; les centri- fugations les plus énergiques et les plus prolongées ne parviennentqu'à diminuer, asseznotablement d'ailleurs, la proportion des hématoblastes mélangés aux leuco- cytes; — ajoute-t-on aux liqueurs fibrinogénées ces leucocytes, aussi pauvres que possible en hémato- blastes, la rétraction du caillot est extrêmement faible. D'ailleurs, les leucocytes de la lymphe sont inaptes à provoquer la rétraction de son caillot. C'est donc bien aux hématoblastes et aux seuls hématoblastes qu'est due la rétraction du caillot sanguin dans ces expériences. Comment agissent ces hématoblastes? On ne saurait le dire exactement; mais on peut établir que ce n’est pas par simple action de présence, car ils perdent leur propriété par le chauffage à 5805, sans paraitre avoir été altérés morphologiquement. La rétraction du caillot peut disparaître, comme nous l’avons rappelé ci-dessus, au cours d’élats mor- bides variés. MM ie Sourd et Pagniez sont parvenus à réaliser une condition expérimentale dans laquelle la rétraction ne se produit plus malgré la présence des hématoblastes. Ils préparent, suivant les règles clas- siques de l'obtention des sérums cytotoxiques, un sérum cytotoxique pour les hématoblastes (injection réitérée d'hématoblastes purs de lapins dans l’orga- nisme de cobayes, et prise du sérum de ces cobayes). Ce sérum, ajouté aux hématoblastes du lapin, leur fait perdre la propriété de faire rétracter le caillot du plasma oxalaté ou le caillot du liquide d’hydrocèle. Ce sérum, ajouté au sang à sa sortie du vaisseau, empêche la rétraction de son caillot. Ce sérum, injecté dans l'organisme d’un animal vivant, fait perdre au caillot de son sang toute rétractilité, Ces faits intéressants montrent que, pour manifester leur action rétractive sur le caillot sanguin, les héma- toblastes doivent avoir conservé leur intégrité physio- logique; ils rendent compte de l'absence de rétractilité du caillot dans les affections infectieuses, malgré la présence de nombreux hématoblastes. | Il appartient aux cliniciens de tirer de ces très inté- ressantes expériences les conclusions pratiques qu'elles peuvent contenir au point de vue du diagnostic et du pronostic. $ 4. — Hygiène publique L'usage de l’opium en Indo-Chine, — Le Gouvernement, voulant restreindre l'usage de l’opium dans nos possessions d'Extrême-Orient, a invité le Gou- verneur général de l'Indo-Chine à examiner cette ques- tion. Celui-ci pense que l'interdiction de l’opium, * pure et simple, sans transition, présenterait de sérieux inconvénients, en raison du mécontentement qu'on provoquerait chez les indigènes en leur supprimant brutalement la possibilité de satisfaire leur passion. Il ajoute que, pratiquement, cette prohibition serait irréalisable tant que la Chine n'aurait pas supprimé complètement la culture du pavot. Enfin, il fait observer que, même si l'interdiction absolue etimmédiate était possible, on devrait y surseoir jusqu'au moment où l’on aurait créé des ressources destinées à compenser la disparition des recettes que procure le monopole de ce produit, et qui atteignent sept millions de piastres, soit environ le quart des ressources du budget. Par contre, le Gouverneur général s'est déclaré nette- ment partisan de la restriction progressive de l'usage de l’opium, en augmentant son prix dans une propor- tion variant avec les régions, suivant qu'elles sont plus ou moins éloignées des centres de production chinoise. Dès le 19 juin dernier, un arrèté a été pris dans ce sens. En outre, le Gouverneur général a interdit l'ouverture de toute fumerie d’opium sur le territoire de lIndo- Chine. D'autre part, le Ministre des Colonies, estimant que la France ne pouvait permettre à ses fonctionnaires de donner l'exemple de la plus funeste des habitudes à ceux auxquels ils sont chargés d'enseigner notre civili- sation, a prescrit à l'Administration locale d'interdire formellement l'usage de l'opium à tous les fonction- naires et agents de tous rangs et de tous services. Il a spécifié que ceux qui ne tiendraient pas compte de cette interdiction seraient privés de tout avancement jusqu'à complet amendement. Des mesures analogues seront prises à l'égard des fonctionnaires indigènes. $ 5. — Enseignement L'Institut Électro-technique de lUniver- sité de Grenoble. — Le président de la Chambre de Commerce de Grenoble, M. Brenier, vient de faire don, à l'Université de cette ville, d'un vaste domaine d’une valeur de 600.000 francs pour y installer, dans des conditions convenables, l'Institut Electro -techni- que, auquel ne peuvent plus suffire, malgré des agrandis- sements successifs, les locaux de la Faculté des Sciences. L'exiguité de ces locaux ne permettait pas, en effet, à la Faculté de réaliser divers projets d'ordre scientifique ou industriel dont elle poursuit l'étude depuis quelque temps. Le don de M. Brenier va lui permettre de faire de l'Institut un établissement modèle pour les recher- ches et les applications industrielles. Aux termes de l'acte de donation, le nouvel Institut devra grouper sous une même direction les divers en- seignements techniques nécessaires à la formation du personnel des différentes industries régionales ou fran- caises et constituer « une véritable Ecole polytechnique des forces industrielles ». Le Conseil de l'Université a décidé que le nouvel Institut Electro-technique porterait, malgré le désir du donateur, le nom d’/nstitut Brenier. Au Congrès des Médecins praticiens. — La Faculté de Médecine de Paris a récemment nommé à deux de ses chaires des professeurs choisis dans une Faculté de province, et devant se consacrer à la science et à l’enseignement d’une manière exclusive. La Com- mission permanente du Congrès des Praticiens a voté. à cette occasion, l'ordre du jour suivant, qui à été adressé à tous les doyens des Facultés et aux Direc- teurs des Ecoles de Médecine : Considérant que le recrutement des professeurs des sciences fondamentales dans un corps uniquement enseignant et l'échange des professeurs entre les di- verses Facultés de Médecine de France constituent deux des desiderata acceptés par le Congrès des praticiens, faisant abstraction de toute question de personne, félicite le Conseil de la Faculté de Médecine de Paris d'avoir choisi comme professeurs d'Anatomie et d'His- tologie des maîtres s'engageant à se'consacrer à leur enseignement en dehors de toute clientèle; Regrette l'opposition faite par le Conseil supérieur de l’Instruction publique à cette réforme unanimement réclamée par le corps médical, dont la compétence en pareille matière ne saurait être méconnue. 860 C'! P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE PREMIÈRE PARTIE : ORGANISATION GÉNÉRALE I. — CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES. En principe, toute habitation doit être concue et réalisée de manière à assurer à ses occupants les conditions moyennes les plus favorables à la conservation et à la commodité de leur existence. Le premier de ces desiderata, qui relève exclu- sivement du domaine: de l'hygiéniste, et qui nous paraît aujourd'hui à juste titre si important, n'a cependant commencé à être pris en sérieuse consi- dération que dans le cours des cinquante dernières années. Ce fait, joint au rôle prépondérant que l'hygiène joue de plus en plus dans les conceptions de l'architecte moderne, s'explique d'ailleurs aisé- ment, si l'on considère son étroite liaison avec le développement de la Microbiologie, qui n'a pris naissance qu'avec Pasteur et son Ecole. Dans les régions tempérées, cette intervention de l'hygiène a pour but la réalisation des condi- tions essentielles suivantes : 1° Les pièces habitées doivent être exposées de manière à recevoir le soleil pendant la plus grande partie possible de la journée. D'autre part, et étant donnée la faible luminosité du ciel des régions pré- citées, on devra s'efforcer de donner à ces pièces l'éclairement maximum compatible avec lorgani- sation de la construction ; 2° Les locaux doivent fournir à chacun des occu- pants un cube d'air minimum, dont le renou- vellement doit être assuré, soit naturellement, soit mécaniquement, dans une proportion telle que chaque individu puisse disposer d'au moins 300 mètres cubes par vingt-quatre heures; 3° Les conditions de pureté de l'air respirable exigeant la suppression des poussières et des gaz étrangers à sa composition normale, on devra se mettre, autant que possible, à l'abri des causes pro- ductrices et réceptrices des premières; de plus, les moyens de chauffage et d'éclairage devront être tels qu'ils ne déversent dans les locaux ni acide carbonique, ni, à plus forte raison, de l'oxyde de carbone. Notons, en passant, qu'en ce qui concerne l'éclai- rage, la lampe à incandescence fournit seule une solution du problème posé, et que c'est le mode d'éclairage donnant, à lumière égale, le dégage- ment minimum de chaleur ; #° L'eau potable doit être distribuée largement ; 5° L'évacuation au loin des matières usées de toute nature doit être assurée par des canaux ou des récipients sans communication directe avec l'extérieur; 6° La lempérature moyenne du mois le plus chaud étant, en France, voisine de 21° (mois de juil- let; Bordeaux-Lyon), et cette température moyenne maxima coïncidanten général avec un degré hygro- métrique assez faible, il en résulte que l'habitation doit surtout être agencée en vue de l'hiver, les moyens de chauffage étant tels qu'ils permettent de réaliser, à l'intérieur des locaux, une tempéra- ture comprise entre 48° et 20°. Relativement aux questions de commodité, il est évident qu'elles sont variables suivant les indi- vidus et les circonstances ; elles ne rentreront pas dans le cadre de cette étude. _—_— IT. — PRINCIPAUX FACTEURS DE LA MORBIDITÉ TROPICALE. Transplanté dans les régions tropicales basses, l'Européen n'a plus à souffrir du froid; mais il doit, par contre, subir, outre l'action des autres facteurs généraux d'insalubrité propres à son pays d'origine, celle d'autres causes morbides inhérentes à son nouvel habitat. Les principales de celles-ci sont : 4° L'action du soleil; 2 L'attaque des moustiques et des mouches; 3° L'action de la température et de l'humidité de l'atmosphère ambiante. Examinons ces divers points : $ 1. — Action du soleil. Les effets meurtriers du soleil sont connus depuis l'arrivée des Européens dans les régions tropicales. Bien que variables suivant ces pays, on peut cepen- dant dire que la gravité des effets observés esl généralement en étroite liaison : a) Avec l'élévation de la température; b) Avec la grandeur de la tension de la vapeur d'eau atmosphérique ; e) Avec la différence de potentiel entre le sol et l'atmosphère. Chacune de ces causes est, d'ailleurs, le plus sou- vent, fonction des deux autres. Mais, comme nous le disions plus haut, on doit néamoins constater que certains pays tropicaux, ayant même température moyenne, se différencient cependant nettement les uns des autres au point de vue qui nous occupe. C'est ainsi que, dans certai- C! P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE 861 nes îles polynésiennes à température moyenne voi- sine de 27° centigrades (îles Marquises par exemple), les accidents solaires sont très rares, alors qu'ils sont très fréquents en Cochinchine, où l'on à la -même température moyenne annuelle. Le premier de ces deux pays est malheureusement une excep- tion, et l'on admettra comme règle la nocivité des rayons solaires dans les pays tropicaux. $ 2. — Attaques des insectes. Bien que, de tout temps, les moustiques aient été considérés comme un fléau des pays chauds, en raison du désagrément de leurs piqüres et de la privation de repos qu'elles entraînent, l'importance du rôle joué par eux et divers autres insectes dans la Pathologie tropicale constitue néanmoins une acquisition scientifique toute récente. A l'heure actuelle, grâce aux travaux de Laveran, de Ross, de Patrick Manson, etc., on n'ignore plus la rela- tion de causalité étroite qui existe entre la pré- sence de familles déterminées d'insectes dans une colonie tropicale et certaines endémies de celle-ci. C'est ainsi que la lièvre paludéenne à pour agent spécial (sinon unique) de transmission les mous- tiques du genre Anopheles et que la fièvre jaune est propagée par des Culicides du genre S/egom}ya. Tout dernièrement encore, on à mis en évidence le rôle capital joué par certaines variétés de mou- ches dans la propagation de la maladie du sommeil et d'autres maladies à trypanosomes (Surra, Na- gana, etc.). Enfin, nul n'ignore que la puce est l'agent le plus actif de la contamination pesteuse. L'insalubrité d'un pays tropical apparaissant ainsi comme étroitement liée à la présence de cer- laines variétés d'insectes, on concoit dès lors l'in- térêt qui s'attache à la détermination de celles-ci et à l'étude des moyens propres soit à détruire les espèces nuisibles, soit à se mettre à l'abri de leurs piqûres. Étant donné le but que nous poursuivons, nous ne retiendrons de cet exposé que le fait du rôle joué par les moustiques et certaines mouches dans l'étiologie des maladies précédentes. $ 3. — Action de la température et de l'humidité du milieu ambiant. D'une manière générale, les climats tropicaux des régions basses sont caractérisés par une tem- pérature moyenne au moins égale à 24 C. et par une inégale répartition des pluies le long de l’année. Cette répartition est, en effet, telle que, pendant une partie de l’année, dile saison sèche, le nombre des jours de pluie est absolument insi- gnifiant, tandis que l’autre partie de l’année, dite saison des pluies ou « hivernage », en compte la presque totalité. Cette règle n'est d'ailleurs pas absolue ; ainsi, tandis qu'il pleut presque tous les jours dans la région forestière du Haut-Congo, il n'y à pour ainsi dire pas de pluies dans les régions tropicales s'étendant au Nord du Sénégal et d'une ligne allant de Tombouctou au Darfour. La répartition de ces saisons au cours de l'année est, comme on le sait, en étroite relation avec le mouvement du soleil sur l'écliptique, la saison des pluies commencant généralement quelque temps après le premier passage du soleil au zénith du lieu, pour finir quelques semaines après son pas- sage dans l’autre hémisphère. Dans la saison des pluies, la tension de la vapeur d'eau est voisine de la tension maxima corresporn- dant à la saturation de l'air ambiant, et cette éléva- tion du degré hygrométrique s'accompagne d'écarts nycthéméraux de température ne dépassant pas quelques degrés. La saison sèche est, au contraire, marquée par une diminution de l'hygrométricité de l'air et par des écarts nycthéméraux qui sont généralement d'autant plus grands que la tension de la vapeur d'eau est moindre. Les maxima absolus de température s'observent, en saison sèche, au moment du passage du soleil au zénith, et les minima ont également lieu, dans cette même saison, aux environs du solstice d'hiver. Ajoutons à cette description qu’en toute saison l'amplitude des variations de hauteur du baromètre est pour ainsi dire négligeable. $ 4. — Influence de ces facteurs sur l'organisme de l’'Européen. Bien que l'étude de l'influence de ces facteurs météorologiques sur l'organisme humain ne rentre pas dans le cadre de cette étude, nous en donne- rons cependant un court aperçu, en nous référant expressément aux autorités qui ont traité de cette matière. Examinant, au point de vue qui nous occupe, l'influence de la chaleur, Beaunis, cité par Treille, s'exprime ainsi qu'il suit : « Quand l'air est dilaté par la chaleur, nous ins- pirons un air plus raréfié, autrement dit : la quantité d'oxygène que nous inspirons est moindre. Chaque inspiration fait entrer dans les poumons environ 1/2 litre d'air et 0,104 litre d'oxygène (ramené à 0° et 760%). À +-40°, ce demi-litre ne contient plus que 0,0915 litre d'oxygène. En effet, le coefficient de la dilatation de l'air est 0,00367 litre, et 100 vo- lumes d'air à 0° occupent 114 volumes à + 40° C. Aussi, quand la température s'élève d'une facon notable, sommes-nous obligés, pour compenser cette dilatation de l'air inspiré et retrouver la quan- tité d'oxygène nécessaire, d'augmenter le nombre et la profondeur des inspirations. » 862 C' P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE La haute tension de la vapeur d’eau vient encore souvent aggraver cet effet (tension maxima à + 30° : 31w® 55), en mème temps qu’elle perturbe le phé- nomène des échanges gazeux qui s'effectuent dans les vésicules pulmonaires. Lorsque l'air inspiré est saturé et que sa température devient égale à celle du corps humain, l'élimination de la vapeur d’eau ne peut plus, en effet, s'effectuer. Si l'air est sec, le corps, malgré les réactions exothermiques dont il est le siège, peut encore conserver sa température normale de 37°5, grâce au phénomène d'évaporation de la sueur à la surface de la peau, qui peut com- penser l'apport extérieur de calorique ; mais, si l'air est saturé d'humidité, aucune soustraction de cha- leur ne pouvant plus avoir lieu, l'équilibre est rompu et la température du corps s'élève; ce phé- nomène, fréquemment observable dans la mer Rouge, constitue la cause principale du coup de chaleur. Même aux températures inférieures à 375, il résulte de ce que nous venons de dire que l’action combinée de la chaleur et de la vapeur d’eau, caractéristique des climats tropicaux, est défavo- rable à l'Européen. Treille‘ voit, dans cette action, la cause princi- pale de l’anémie tropicale. Le milieu tropical ambiant réagit, d'ailleurs, sur les autres fonctions de l'individu, en particulier sur celles de la sécrétion, qu'il s'agisse de la peau, des reins ou du foie. Ces constatations faites, nous allons aborder maintenant l’étude des conditions d'hygiène aux- quelles doit satisfaire l'habitation coloniale ration- nelle, c'est-à-dire organisée de manière à annuler ou, tout au moins, pallier l’action des divers facteurs pathologiques dont nous venons de constater l’exis- tence. IIT. — ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE. $ 1. — Choix de l'emplacement et préparation du terrain. L'emplacement de l'habitation sera, en général, déterminé par une série de considérations impé- rieuses, le plus souvent étrangères à l'hygiène, telles que la nécessité où l'on se trouvera de placer la maison à construire près où dans un centre habité et sur un terrain déterminé, assujetti le plus sou- vent à des servitudes administratives d’alignement ou autres. A cet égard, il serait à souhaiter que nos adminis- trations coloniales pussent toujours s'inspirer des réflexions judicieuses émises par Treille?, au sujet de la fondation de nos établissements d'outre-mer, au cours du dernier siècle : 4 De l'acclimatation des Européens dans les pays chauds. ? Hygiène coloniale, page 124. Carré, éditeur. « Étant donnée l'influence prépondérante que le logement exerce sur la santé de l'Européen dans les pays chauds, l'autorité avait pour devoir, non pas seulement de tracer un plan de rues, mais de régler, au nom de la salubrité publique, le dispo- sitif même des constructions à y faire, tant pu- bliques que privées. À une époque où rien n'existait encore, il eût été facile de s’astreindre à un plan minimum, capable à la fois de sauvegarder l'in- térêt pécuniaire du propriétaire et l'intérêt de l'association urbaine qui allait se fonder et se développer progressivement. « Il est certain que c'eüt été un devoir pour les Gouvernements européens d'obliger leurs natio- naux, construisant en pays tropical, à observer rigoureusement des règles d'hygiène, au lieu de les laisser bâtir, selon leurs caprices ou leurs intérêts, des logements appelés, par leurs dispo- sitions, à être non seulement nuisibles à leurs occupants, mais encore dangereux pour la com- munauté. » On ne saurait certes mieux dire, mais il faut ajouter qu'à l'heure actuelle certaines de nos colo- nies semblent entrer résolument dans la voie indi- quée par l’ancien et éminent Inspecteur général du Service de Santé colonial ; c'est ainsi que, désireux de procurer des logements sains et confortables à la population européenne de Dakar, le Gouverneur général de l'Afrique Occidentale Francaise a décidé d'accorder des garanties d'intérêt (se montant au total de 50 °/, du capital engagé) à celles de ces maisons à construire dont les plans seraient approuvés par le Service des Travaux Publics de la Colonie. Autant que possible, on recherchera un empla- cement ventilé, sur un terrain perméable et suffi- samment éloigné de toute eau stagnante (500 à 600 mètres au moins) ou de creux de terrains remplis de matières organiques en voie de décom- position, ou même encore d'habitations en pail- lote; ces dispositions s'expliquent par le fait que, dans une atmosphère calme, le moustique s'éloigne rarement de plus de 3 à 400 mètres de ses lieux de ponte. Toutefois, on ne perdra pas de vue que ces insectes peuvent être transportés par le vent à des distances notablement plus considérables. Dans les derniers règlements édictés par le Gou- vernement de l'Afrique Occidentale Francaise, relativement au déplacement de la ville indigène de Dakar, aussi bien que dans ceux du Gouverne- ment du Soudan égyptien ayant trait à la ville de Khartoum, la prescription relative à la séparation de la ville indigène et de la ville européenne a été rigoureusement observée ; en Indo-Chine, les arrêtés locaux ont proscrit les constructions en paillote dans les centres européens. C* P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE Les plateaux, surtout au bord de la mer ou à l'aplomb d’une grande vallée, satisferont en général à ces conditions, dont la stricte observation entrai- nera le plus souvent la rareté des moustiques aux abords de l'habitation. En cette matière, il n'ya cependant rien d'absolu ; ainsi on à cru pendant longtemps que le fait de s'installer sur des hauteurs, dominant les plaines environnantes de quelques centaines de mètres, mettait par cela même l'habitation à l'abri de l'in- vasion des moustiques. Il y a là une erreur dont l'expérience a fait justice depuis longtemps déjà. Aux altitudes précitées, on observe, il est vrai, un abaissement marqué du minimum de la tempé- rature nocturne par rapport à celui qu’on observe dans la plaine voisine, et ce fait peut sans doute avoir une grande importance au point de vue de l'hygiène générale ou de la mise hors d'atteinte des épidémies de fièvre jaune, puisque le Sfegom ya fasciata, qui est le moustique propagateur de celle- ci, ne peut plus subsister lorsque la température tombe au-dessous de 22°° pendant une période de plusieurs jours. Par contre, les hauteurs en ques- tion étant, en hivernage, le plus souvent situées dans la couche nuageuse, seront généralement beaucoup plus humides que les plaines en contre- bas et, de ce fait, le paludisme pourra y être plus marqué que dans ces dernières. Si, de plus, la différence d'altitude est insuffisante pour créer un abaissement du minimum nocturne rendant impos- sible la vie du Stegomya, les hauteurs précitées pourront être, à tous égards, beaucoup plus mal- saines que la plaine. Pour se préserver complètement des endémies tropicales précédentes, il faut done se placer à une altitude telle que le minimum de la température nocturne y rende impossible l'existence des mous- tiques propagateurs de ces endémies. La confir- mation de ces vues se trouve dans les observations faites récemment dans la région du Lang Bian (Annam méridional), où le Gouvernement général de l’Indo-Chine se propose d'établir un sanatorium. Etant données les difficultés d'accès du plateau de Dalat, situé à environ 1.600 mètres d'altitude, on avait pensé pouvoir s'établir sur le plateau de Da- Nhim (900 mètres), d'altitude intermédiaire entre ce dernier et la plaine et d'accès plus aisé. [L'en- quête médicale effectuée dans la région montra que le paludisme sévissait avec beaucoup plus d'inten- sité sur le plateau de Da-Nhim que dans la plaine, mais que la région de Dalat en était indemne, aussi bien probablement à cause de sa faible température 4 Marcaoux, Simon et SALIMBENI : La Fièvre Jaune. Rap- port de la Mission Francaise. Annales de l’Institut Pasteur, novembre 1903. 363 moyenne nocturne, qu'en raison de la violence des vents qui y règnent presque toute l’année. Dans le même ordre d'idées, on doit signaler | qu'un sanatorium installé jadis en Cochinchine, sur les hauteurs boisées avoisinant Baria, s'était égale- ment montré beaucoup plus insalubre que les plaines environnantes. Une plaine non maréca- geuse peut done être, au point de vue de l'hygiène, beaucoup plus favorable à la fondation d'un établis- sement colonial qu'un plateau qui la surplombe, et, si l’on tient compte, en outre, des difficultés d'accès inhérentes à ce dernier emplacement et des diverses sujétions quil entraine généralement. (service d’eau, etc.), on sera souvent conduit à préférer la plaine au plateau d'altitude relative médiocre. Il va d'ailleurs sans dire que le défaut des installa- tions d'altitude médiocre, à l'humidité excessive, persiste lorsqu'on s'élève; ainsi, à Dar- jeeling (2.700 mètres d'altitude) et dans les autres sanatoria de l'Himalaya, cette humidité engendre même une affection intestinale spéciale (la « hills diarrhea » des médecins anglais). Lorsqu'il ne sera pas possible de trouver un emplacement réalisant ces divers desiderata, on devra s'efforcer de remédier aux défauts de l'em- placement choisi par des mesures appropriées à ceux-ci: drainage du terrain, desséchement des mares, nivellement et débroussaillement. Contrai- rement à l'opinion professée il y a quelques années par beaucoup d'hygiénistes coloniaux, il ne nous savoir paraît pas prouvé que la nature du sous-sol exerce une influence immédiate sur la salubrité des habi- tations qu'il supporte ; il est, au contraire, pro- bable que le sous-sol n'exerce d'action à cet égard que par les phénomènes qu'il détermine à la sur- face, en raison de sa perméabilité plus ou moins grande. $ 2. — Orientation de l'habitation. En principe, l'habitation coloniale devra avoir son grand axe orienté Est-Ouest, car, avec cette disposition, les murs de facade seront soustraits à l'action directe des rayons solaires, si l'on a eu soin de les protéger par de simples vérandas d'une largeur suffisante. Les vents régnants étant le plus souvent irrégu- liers par suite de l'influence exercée sur leur régime par l'alternance des saisons (sauf sur le littoral où règnent généralement des brises solaires), on ne se guidera, pour le choix de l'orientation, que sur le cours du soleil, $ 3. — Nature de la construction. Si l’on veut donner à l'habitation projetée une durée convenable, il est évident que l'emploi du bois est à proscrire d'une facon absolue, en raison s61 de sa rapide destruction, sous les tropiques, par les termites et la pourriture. En outre, par suite de la succession des saisons sèches aux hivernages, et vice-versa, les planches se disjoignent et les fissures ainsi produites donnent libre accès à un parasitisme exubérant. On sait d'ailleurs, d’après des travaux récents de Koch’, que la fièvre récurrente, dont lagent causal est le spirille découvert par Obermeier en 1868, à pour principal vecteur une sorte de punaise, l'Ornithorus Larigni, insecte lignivore qui vit dans les planchers des habitations. Il convient donc d’avoir recours à la maconnerie de briques ou de moellons, ou encore au ciment armé, lorsque les circonstances locales le permet- tront (prix de revient du ciment suffisamment bas et possibilité de se procurer la qualité de main- d'œuvre nécessaire). Pour la même raison, on proscrira en général l'usage des planchers en bois (à moins d’avoir recours à des bois extrèmement durs), pour leur substituer des aires en carreaux céramiques ou même en mosaïque, cette dernière plus coûteuse, mais ayant par contre l'avantage de supprimer les Joints existant entre les carreaux, joints qui, avec le temps, finissent par se creuser et par devenir des nids à poussière. En ce qui concerne l'épaisseur à donner aux murs, les auteurs qui ont traité la matière s'ac- cordent généralement pour donner aux murs une grande épaisseur; ainsi, d'après Treille?, « une épaisseur de 50 centimètres, surtout si le mur est bâti en matériaux ordinaires et homogènes, est absolument insuffisante ». Nous croyons, quant à nous, qu'il n'y à rien d'absolu à cet égard, et que, pour l'organisation des maisons coloniales du type actuel”, il convient de se régler sur des considérations étroitement liées au régimethermométrique du lieu où l'on bâtit. Si le climat est caractérisé par des écarts nycthé- méraux très considérables (> 25°) et par une atmo- sphère sèche (cas des régions désertiques), on aura tout avantage à employer des murs d'une grande épaisseur, car, avec ce dispositif, la température réalisée à l'intérieur des locaux sera à peu près constante el voisine de la température moyenne du jour; si celle-ci n’est pas excessive, le repos de nuit de l'habitant européen sera assuré dans de bonnes conditions, en même temps qu'il sera sous- trait à l’action déprimante des grandes chaleurs de l'après-midi. 1 J.-P. Lax6Lois : Revue annuelle d'Hygiène. Rev. yén. des Sc. du 30 septembre 1906. ? Hygiène coloniale, p. 138. 3 C'est-à-dire non munies de dispositifs assurant le refroi- dissement des locaux. C' P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE Mais il n’en sera pas en général ainsi, car l'im- mense majorité des climats tropicaux, surtout pen- dant l'hivernage, est, au contraire, caractérisée par la faiblesse des écarts nycthéméraux, en même temps que par une température moyenne élevée et une atmosphère humide. Or, sous de tels climats, on souffre bien moins de la chaleur de la journée que de celle de la nuit. En d'autres termes, 11 importe beaucoup plus d'abaisser les minima noc- turnes que d'abaisser les maxima diurnes. Or, avec des murs épais jouant le rôle de volants de chaleur, c'est précisément ce dernier fait qui se pro- duira, et, pour diminuer de 3° le maximum diurne, on arrivera à augmenter d'autant le minimum noc- turne, déjà peut-être trop élevé pour permettre un repos franchement réparateur. Quiconque a habité des climats tropicaux humides. (Cochinchine, Congo, Guyane) sait, en effet, l’ex- trême importance qu'exerce, aux environs de 29°, une variation thermométrique de 1° ou 2 sur le sommeil de l'Européen. D’après ce qui précède, la solution la plus avan- tageuse consisterait donc à enclore les chambres à coucher par des murs minces et les locaux habités. pendant le jour par des murs épais. Une telle solu- tion ne sera, en général, pas acceptable au point de vue pratique, et, dans ce cas, il conviendra de donner résolument la préférence aux constructions. légères pour la raison indiquée plus haut. Une autre solution satisfaisante consistera à cons- tituer les parois des locaux par une double paroi mince avec couche d'air intermédiaire. Une telle habitation, à la condition d'être fermée pendant le jour et largement ouverte pendant la nuit, aura des maxima diurnes et des minima nocturnes relative- ment bas. A la vérité, il existe certains climats, tels que celui du Soudan, qui participent à la fois du climat désertique et du climat tropical type envisagé pré- cédemment, tandis que d'autres, comme le Tonkin, jouissent d'une saison relativement froide et humide. Lorsqu'il en sera ainsi, le constructeur dévra évidemment tenir compte de la longueur relative des diverses saisons et de l'allure de cha- cune d'elles. Voici, par exemple, trois courbes hebdomadaires pouvant servir à caractériser, au point de vue ther- mométrique, les trois saisons types de l’année, à Kayes, dans le Haut-Sénégal (fig. 1). Si l'on observe, en outre, que la saison sèche dure quatre mois, la saison chaude trois mois et l'hivernage cinq mois, il ressort immédiatement, 4 On trouve, dans les colonies anglaises, un certain nombre d'habitations ainsi construites. Les parois sont générale- ment constituées par une dalle de ciment armé avec arma- ture en métal Déployé. C' P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE 865 C4 de l'ensemble de ces données du climat, que l'em- ploi de murs épais, à Kayes, aura pour effet de maintenir à l’intérieur des locaux une température moyenne : 4° de 26° (air sec), en saison fraiche; 2% de 35°5, en saison sèche chaude (air sec); 3° de 30°, en saison des pluies (air très humide). Une mai- son de ce type sera done à peu près inhabitable, la nuit, pendant plusieurs mois de l’année, alors que des locaux pouvant, au contraire, se mettre rapidement en équilibre de température avec l'exé- térieur, permettront un repos de nuit à peu près satisfaisant pendant huit à neuf mois de l’année. La solution du problème posé est done, en défini- Janvier 1906 dispositif de construction réalise le but visé, à savoir : la diminution des maxima, il est indispen- sable que l'on supprime, autant que possible, toute communication avec l'extérieur pendant les heures chaudes de la journée Cette nécessité implique, par suite, pour les locaux d'habitation, des dimensions telles que le rayon- nement et la respiration des individus qui y vivent ne modifient pas sensiblement la température et la pureté de l'atmosphère des pièces habitées. Si l'on adopte le système des murs d'épaisseur faible ou moyenne, on peut, au contraire, réduire le volume des locaux à condition d'assurer large- février Ë Este ST HSE EN AT TT 7 . He 70 17 72 Août 1906 AT CRT | 8 SS=ZtSS HS SSS: 2 DRE Frs sssrse tn Fig. tive, une question d'espèce, qui doit être étudiée en tenant compte de tous les facteurs météorolo- giques du elimat sous lequel on construit. Il est d'ailleurs évident que, si l’on se proposait de maintenir à l'intérieur des habitations une tem- pérature moyenne journalière du lieu, il faudrait au contraire, tout comme dans les pays froids et pour le même motif, avoir systématiquement recours à des murs de grande épaisseur. Nous reviendrons sur ce sujet un peu plus loin. Pour les mêmes raisons que celles qui viennent d'être données plus haut, les greniers ou faux gre- niers devront toujours être largement ventilés et les toits pourvus de lanterneaux, que l'on grillagera pour se prémunir contre l'invasion des chauves- souris. Si la maison a des murs épais, pour que ce 1. — Courbes de la température à Kayes (Haut-Sénégal) à trois époques différentes de l’année. ment le renouvellement de l'air, Car nous avons vu quel rôle physiologique important joue, dans les pays à température élevée, la présence de la vapeur d’eau dans l'atmosphère. Plus on est près du point de saturation correspondant à la température am- biante, plus il importe de renouveler l'air des locaux habités. Dans le système des locaux hermétiquement elos et à murs épais, on devra compter sur 100 mètres cubes par personne. Dans l'autre hypothèse, on pourra se contenter de chiffres bien moindres et réduire le cube minimum à 30 ou 40 mètres cubes, en supposant assuré le renouvellement de l'air du local. $ 4. — Eclairement des locaux. Les pièces de la maison coloniale devront être largement éclairées, mais en tenant compte de 866 C' P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE cette condition fondamentale que l'éclairement ne devra être obtenu, ni par les rayons solaires directs, ni par ceux qui sont directement réfléchis sur les nuées. La luminosité excessive du ciel des tropiques, pendant les heures chaudes du jour, en effet, non seulement est pénible pour la vue, mais peut encore provoquer des phénomènes d'insolation, ainsi que semble le prouver l'examen des accidents analogues produits par l'are électrique, dont on connait la richesse en rayons ultra-violets. L'éclairage de jour des pièces sera donc consti- tué par de la lumière diffuse, distribuée de telle sorte que l'habitant de la maison ne puisse y avoir la vision du ciel dans les moments où le soleil est haut sur l'horizon. | Pour l'éclairage de nuit, on donnera toujours la préférence à la lampe électrique à incandescence, qui chauffe relativement peu et ne déverse aucun produit gazeux dans l'atmosphère. S5. — Distribution de l’eau potable. La pureté de l’eau destinée aux usages domes- tiques importe au moins autant dans les pays tro- picaux que dans les pays tempérés, car, alors que, dans ces derniers, l'eau impure (au point de vue bactériologique) ne propage guère que la fièvre typhoïde, dans beaucoup de colonies, et principa- lement dans celles d'Extrème-Orient, elle est, en outre, le véhicule principal de la dysenterie infec- tieuse d’origine amibienne et du choléra. On aura donc recours à la filtration et surtout à la stérilisation, ce dernier procédé constituant toujours la méthode de choix à employer, en rai- son de la possibilité d'infection des filtres. Le choix du procédé de stérilisation à employer sera dicté au constructeur par des considérations relatives au nombre d'individus à alimenter en eau potable et au prix de revient sur place des divers procédés de stérilisation (chaleur, ozone, procédés chimiques), dans le détail desquels nous n'entre- rons pas ici. $ 6. — Salles de bains et évacuation des matières usées. Plus encore que dans les pays tempérés et pour des raisons évidentes, l'hydrothérapie est d'un usage impérieux sous les tropiques. On évitera cependant de placer les baignoires ou les appareils à douches dans l'habitation ou dans les locaux contigus à celle-ci. 11 convient, en effet, d'éviter avec soin la production de vapeur d'eau dans les pièces habi- tées, pour les raisons qui ont été données plus haut concernant son rôle nuisible. On installera, par suite, les bains et douches dans des locaux distincts de l'habitation proprement dite, mais en facile communication avec celle-ci par des pas- sages de plein pied largement aérés, à l'abri du soleil et de la pluie. Le plus souvent, il y aura tout avantage à grouper dans un même bâtiment les pièces affectées à cet usage, avec les cabinets d’ai- sances. Pour des raisons analogues, la cuisine sera reje- tée en dehors de l'habitation proprement dite: elle en sera placée à proximité et reliée à elle par des galeries organisées comme il vient d'être dit plus haut. L'évacuation des matières usées aura lieu par les procédés en usage dans les pays tempérés. Sous aucun prétexte, les ordures ménagères ne devront être conservées dans des récipients ouverts. Le tout à l'égout constituera toujours le procédé de choix à employer pour l'organisation des cabi- nets d'aisances. Il sera complété, dans le cas où il n'y aurait pas de collecteur, par l'installation de fosses septiques et de puits bactériens destinés à recevoir le liquide résiduel. $ 7. — Suppression des poussières. Afin d'éviter les joints des aires carrelées ou des planchers, nous avons constitué le sol des locaux par des aires en mosaïque. Pour des raisons analogues, les parois des murs intérieurs pourront être revêtues de larges carreaux vernissés, le joint vertical n'ayant pas, au point de vue de la poussière, les inconvénients du joint horizontal. On pourra également constituer les parois des murs par des enduits en plâtre ou en ciment et les peindre avec du ripolin ou toute autre peinture lavable. Le local ainsi constitué pourra être lavé pério- diquement à grande eau; pour faciliter l'évacua- tion de celle-ci, autant que pour empêcher la péné- tration des pluies d'orages, il conviendra de placer l'aire des vérandas à un niveau légèrement infé- rieur à celui de l’aire des pièces d'habitation pro- prement dites. Dans un deuxième article, nous examinerons les moyens de se préserver des atteintes des fac- teurs pathologiques propres aux pays tropicaux. C' P. Bourgoin, Chef d'Escadron d'Artillerie coloniale. 0 2 2 … ST ‘ A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS À LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE 867 DE LA PRESSE À BRAS A-LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE. ESQUISSE DE L'HISTOIRE TECHNIQUE ET SOCIALE DE L'IMPRIMERIE. DEUXIÈME PARTIE : LES MACHINES A COMPOSER Dans un premier article‘, nous avons retracé l'histoire de l'imprimerie depuis la découverte de - Gutenberg jusqu'au moment où la presse méca- - nique vint chasser brusquement l'imprimeur de l'atelier ; mais là ne s'est pas arrêtée l'influence du mécanisme dans l'industrie typographique. Nous al- lons voir maintenant commentlamachines'estintro- duite jusque dans les opérations de la composition. I. — LES MACIINES À COMPOSER. Dès 4776, on songea à accroître le rendement de l'ouvrier compositeur en adjoignant aux types de la casse des assemblages de lettres de répétition fré- quente, tels que net, tion, aient, eur. L'emploi de ces logotypes compliqua outre me- sure la casse et, au lieu d'accroître la rapidité de composition, la diminua en rendant les erreurs plus nombreuses et en augmentant la durée de la recherche du caractère. On chercha alors à réaliser mécaniquement les diverses opérations de la composition. Rappelons ces opérations : Une fois les caractères constituant une ligne choisis et rangés, le compositeur Jjustilie la ligne composée en répartissant entre les mots l'espace libre de manière à donner à la ligne la lon- gueur exacte qu'elle doit avoir. Plus tard, le même ouvrier devra distribuer dans la casse les caractères qui ont servi à l'impression. La première idée de machine à composer parait devoir être rapportée à l'Anglais Church (1822). Les premiers dispositifs, imités de celui qu'ima- gina Ballanche en 1833, consistaient à munir la casse d'un clavier dont la manœuvre des touches libérait le caractère correspondant, qui venait se ranger dans le composteur. La seule opération du choix des caractères était rendue mécanique. La justification et la distribution restaient manuelles. Un autre procédé, imaginé peu après, consistait à laisser les deux mains du compositeur libres de puiser simultanément dans la casse. Les caractères, ainsi trouvés plus rapidement, sont jetés dans un entonnoir, d'où ils sont dirigés et rangés automati- quement dans le composteur. 1 Voir la Revue générale des Sciences du 30 octobre 1907, t. XVIII, p. 817. Ces deux procédés économisent, en définitive, le temps mis au choix du caractère et à son arrange- ment dans le composteur, mais laissent aussi longues que par le procédé manuel justification et distribution. Le dispositif à clavier fut nmité et perfectionné successivement par Gobert (1839), par de Kliéger (4840), par Youg et Delcambre, qui exposèrent en 4844 une machine qui, adoptée un moment dans Fig. 1. — Machine à composer et à distribuer Lagerman (4885). — Par la manœuvre de doigtiers, le compositeur assemble les caractères choisis qui se trouvent disposés en colonnes successives. En même temps, un ouvrier distributeur peut, par une manœuvre de doigtiers ana- logue, répartir dans leurs colonnes respectives les carac- tères d'une forme ayant servi. La justification de la ligne est automatique, le mécanisme réduisant, par la substitution de 1/4 de cadratin au 4/3 de cadratin, Ja longueur des lignes qui dépassent la justification. les ateliers parisiens, fut rapidement délaissée, vu ses inconvénients. Depuis, de très nombreuses machines à composer, de plus en plus perfectionnées, ont été imaginées. 868 A. TURPAIN — DE LA PRESSE À BRAS À LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE Chacune d'elles marque le plus souvent un progrès sur la précédente et cherche à éviter l'inconvénient, à prévenir la critique que l'usage à fait formuler relativement à sa devancière. De cette manière et par ses progrès successifs, la machine à composer est devenue presque parfaite, et l'on ne voit guère quelle critique on pourrait faire au dernier modèle présenté : l'électrotypographe, qui, mis au point en 1902, perfectionné encore lout récemment (1907) et adjoint au é/étypographe, est susceptible de fonctionner sans reproches sérieux et dont l'usage ne peut que se généraliser. Son introduc- tion dans la typographie en révolutionne une fois encore l'économie et est de nature à accroitre, dans des proportions presque infinies, le rendement l —7 D HT (_K Fig. 2. — Machine à justifier Desjardins, — La machine compte automatiquement les espaces de la ligne à jus- tifier, évalue le vide restant au bout de la ligne, divise enfin l'intervalle total de blanc par le nombre d'espaces. | La machine intercale alors une combinaison d'espaces égale au résultat trouvé entre chaque mot, et la ligne se trouve dès lors exactement justifiée. typographique, de telle manière qu'on peut, à son aide, répondre sans crainte à une demande de pro- duction d'impressions faites dans des conditions de rapidité et de nombre même imprévues. Avant d'en présenter le dispositif et pour le mieux comprendre, — ne pouvant ici faire la des- cription détaillée de l'appareil, — nous passerons en revue les précédentes machines à composer en ne retenant que les plus caractéristiques, au sujet desquels nous fournirons quelques renseignements. $ 1. — Première classe de machines à composer : Machines effectuant la composition à l'aide de caractères mobiles. Les premiers types de machines à composer : les machines Kasteinbeim, Thorne, Simplex, Lager- man (1885), Paige, Desjardins (1898), Calendoli (1900), etc, forment la classe des machines effec- tuant la composition à l'aide de caractères mobiles, qu'elles distribuent ensuite, souvent au moyen de mécanismes indépendants de ceux de composition. La grande majorité de ces machines composent en libérant, par le jeu d'un clavier, les caractères répartis dans les canaux d'un magasin. Peu d’entre elles justifient la ligne. 1. Machine Lagerman. — La machine Lagerman TZ Fig. 4. — Machine à composer Calendoli. — Des types dont les pieds ont une forme particulière sont répartis dans 90 magasins. Ils y sont enfilés dans des rails à champignon. Un dactylographe libère, par la manœuvre des touches d'un clavier, les types successifs conve- nables, qui, guidés le long d'un cylindre incliné, s'assem- blent par leur propre poids. Un ouvrier recharge par derrière les magasins à mesure qu'ils se vident. La machine compose à la vitesse dactylographique, mais ne justifie pas. (fig. 1), de dispositif assez simple, recourt, tant pour distribuer que pour composer, à l'intermédiaire de doigtiers au lieu d'un clavier. La justification de la ligne est automatique. Les espaces entre les mots, répartis également à la valeur de deux fois 1/3 de cadratin, donnent soit une ligne justifiée, soit une ligne trop longue. Le mécanisme de justi- fication a pour objet de placer alors 1/4 de cadratin à la place de 1/3 de cadratin; la ligne se raccoureit A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE 869 ainsi de 4/12 de cadratin. L'opération se répète jus- qu'à justification complète. 9, Machine Desjardins. — La machine Desjar- ins‘ (fig. 2) est une machine à jus- tifier qu'on associe en Amérique à des machines à composer. Les lignes d'une galée sont levées successivement par la machine, qui compte les espaces entre les mots, lesquels, à cet effet, ont été composés au moyen de petites bandes de cuivre dépassant le niveau de la composition. Un autre organe de la machine fâte pour ainsi dire le vide restant au bout de la ligne, J'ajoute à la longueur totale de blanc représentée par les espaces comptées et divise le tout par ce nombre d'es- paces. Par la combinaison de trois formats d'espaces (17, 24 et 31 milliè- mes de pouce) qu'elle détient en ré- serve, la machine forme et intercale entre les mots Fig. , k. porte-types, constitués par des rails à champi- gnons sur lesquels sont enfilés les types. Un ou- — La Typograph, machine à composer la ligne clichée. l'espace qu'elle à ainsi calculée. S'il y à un reste à la division, une disposition ingénieuse de la machine le réserve et le réalise à la dernière espace de la ligne. Le fonctionne- ment du méca- nisme calcula- teur demande moins d'une se- conde. 3. Machine Calendoli. — Nous n'achève- rons pas cetle exposition ra- pide des pre- miers types de machines à composer sans dire un mot de la machine Ca- lendoli (fig. 3), qui n'est à vrai dire qu'une composeuse. La machine Calen- F doli compose à et la vitesse d'un Rie dactylographe , c'est-à-dire 13.000 caractères à l'heure. Les types, 5. — La Monoline, machine de forme particulière, sortent de 90 magasins 1 Desjardins, constructeur américain de Hartford (Con- mecticut). Une seconde classe de à composer la ligne clichée. | 1. Première catégorie ligne. — Dans une première catégorie, nous range- rons les machines qui fournissent les lignes stéréo- | vrier, placé derrière la machine, recharge les maga- sins à mesure qu'ils se vident. Un cylindre incliné, muni derails suivantses génératrices, recoit chaque type que le dactylo- graphe libère par la manœuvre des touches d'un clavier. Les types se trouvent ainsi rangés dans une galée par leur propre poids. La machine ne justifie ni ne dis- tribue. Il faut donc lui associer une équipe de justificateurs et de distribu- teurs ou de fondeurs de caractères. Mais la rapidité de composition laisse une grande marge pour la justifica- lion et la distribution manuelle. On peut, d'ailleurs, associer à une ma- chine Calendoli une machine Desjar- dins du type déjà décrit. $ 2. — Seconde classe de Machines à composer Machines à fondre. machines à composer marque un progrès intéressant sur la première en ce qu'elles sup- priment com- plètement la distribution des caractères. Ce sont les ma- chines à fon- dre. Elles ré- poudent ainsi à la critique, faite à leurs devan- cières,denéces- siter des carac- Lères Spéciaux, munis de crans particuliers cran Lager- œillel Calendoli, mann , par exemple), per- mettant la sai- sie des caractè- res par Îles or- de Ja machine. ganes Elles doivent être réparties en deux catégories bien distinctes. Machines à fondre le 870 A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE | typées, les lignes clichées. Les touches du clavier composent la ligne en matrices de cuivre. La justi- fication est oblenue au moyen de bandes de cuivre en forme de biseaux, qui s'enfoncent ensemble entre les mots en les espacant jusqu'à ce que la longueur de justification soit atteinte. Un jet de plomb liquide, projeté avec force sur ces matrices for- mant le fond d'un moule, fournit la ligne clichée. DISTRIBUTEUX MAGASIN 0€ MATRICES POMPE enfin la Linotype (1886) de Mergenthaler, la plus ancienne et l’une des plus connues en France d machines à composer la ligne (fig. 6 à 10). Il ne faudrait pas croire que tout organe distri buteur soit supprimé dans ces machines à fondre Les matrices de cuivre doivent, en effet, revenir dans leur logement, après avoir servi au celicha de la ligne. A cet effet, elles sont saisies par un POMPE | MOULE No. 1 ra Jouet cu, À za =. \ 6 TN lt À ET LIGNE MATRICE BAOUE DE MOULE CREUSET- MOULE No. 2 à 72 A ERULEUR Gaz 4 Fig. & L ROUE DE MOULE $ = Fig. 6 7 BRAS POUR Ê b = ei L'ASSEMBLAGE : (< A R QIL DES LIGNES | / Lé EJECTEUR POUR FORCER LA LIGNE HORS DU MOULE LIGNES GALEE RECEVEUR PRÊTES POUR SERVICE Fig. 7. Fig. 9. Fig. 6 à 9, — Machine à fondre la ligne la Linotype. Fig. 6. — Schéma du fonctionnement de la machine. — Les types, situés dans le magasin A, et libérés par les touches du clavier D, tombent dans le composteur G, par l'intermédiaire des canaux E et de la courroie d'entrainement EF. Des espaces I, libérées matrices K, amenée à pes la barre J, assurent la justification par leur enfoncement plus ou moins grand. La ligne de a roue de moulage M, recoit le jet de plomb extrait du pot de fusion par le jeu d'une pompe. Lorsque la ligne est fondue, Ja file de matrices R remonte vers le distributeur T, où, grâce aux crans différenciés que F … porte chaque matrice, leur distribution est assurée dans les cases respectives du magasin A. Fig. 7. — Matrices. — À gauche, matrice à une seule lettre; a, empreinte en creux du type à fondre; b, série de crans M assurant ultérieurement la distribution. — A droite, matrice à deux lettres. Fig. 8. — Détails de l'opération du moulage a'une ligne. Fig. 9. — Demoulage d'une ligne. — Un levier éjecteur repousse la ligne fondue à côté des lignes précédentes sur une galée. On retrouve ici le système de stéréotype imaginé, | barre de distribution fixe en forme de V, dont les dès 1801, par Herhan, appliqué à une seule ligne | branches portent gravés toute une série de vides M de caractères. Dans cette première catégorie de | dans lesquels viennent s'engager des dents cor- M machines viennent se ranger la Typograph (fig. 4) 1 de Rogers, la Monoline (fig. 5) de Scudder, et respondantes, ménagées sur l'un des flanes de chaque matrice. La disposition des dents varie A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS A LA LINOTYPE ET À L'ÉLECTROTYPOGRAPHE 871 avec chaque lettre; la distribution des vides varie également le long de la barre de distribution placée au-dessus de la série des compartiments du magasin. Les choses sont ainsi disposées que, lorsque la matrice se trouve poussée le long de la barre de distribution et amenée au-dessus de son logement, elle n’est plus retenue à ladite barre par aucune échancrure et tombe alors dans sa case. On retrouve là quelque chose d’analogue au dispositif chercheur qui, dans l'appareil télégraphique de Baudot, fait imprimer la lettre émise, au moyen d'une combinaison de cinq leviers, au moment ) da TEE Fig. 10. — Vue d'ensembie de la Linotype. même où la roue des types portant cette lettre la présente suivant la verticale. Ce n'est pas l'unique parenté que nous trouverons entre les machines à composer et les dispositifs mécaniques des télé- graphes multiples. Peu d'inventions se mutuellement plus pénétrées que celle des télé- graphes rapides et celle des machines à typogra- phier. La force motrice nécessaire pour actionner une linotype est moindre qu'un demi-cheval. La vitesse de composition est normalement de 5.000 tères à l'heure et peut atteindre, avec des opéra- teurs exercés, 6 à 7.000 à l'heure. La vitesse de composition de la Monoline serait de plus de 8.000 à l'heure, d’après les catalogues; d’après les impri- meurs, cette vitesse serait excessive, sont carac- Un seul opérateur manœuvre la machine. Un surveillant suffirait à nettoyer, contrôler et entre- tenir 5 ou 6 machines. Par contre, les corrections nécessitent la réfection complète de la ligne; l'opé- rateur éprouve une fatigue cérébrale incomparable- ment plus grande que celle ressentie par le com- positeur à la véritable surmenage, ayant, en effet, l'attention toujours en éveil; non seulement il doit lire le manuscrit cinq ou six fois plus vile qu'un compo- siteur, mais surveiller encore clavier et fourneau à fondre; il travaille, enfin, dans une atmosphère casse. Il se trouve soumis à un Fig. 11. — Machine à composer la ligne fondue La Rototype. — Le transport des matrices libérées par la manœuvre du clavier s'opère au moyen d'une grande roue qui éprouve des rotations successives de 90° toujours dans le même sens. Les matrices sont ainsi portées du clavier à l'organe de justification (0° à 900), de la justificalion à la fonte (900 à 1800), de la fonte au distributeur (1800 à 2700). On trouve ainsi au même instant autour de la roue, lorsque la machine est en marche : une ligne de matrices qui se compose (0°), une ligne de matrices qui se justifie (900), une ligne de matrices qui sert à la fonte (1800), une lÈne de matrices qui se distribue (2700). surchauffée par le creuset de plomb fondu dont est munie la machine. Aussi le Secrétariat typogra- phique international estimait-il, dans son Rapport de 1894, peut-être avec un peu d'exagération, mais non sans raison, qu'un opérateur-linotypiste serait usé à l’âge de trente ans; il semble que cette limite doit être reculée à trente-cinq ou quarante ans, ce qui est encore très grave. En dehors de l'inconvénient que présente ce A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS A 872 premier type de machines à fondre : réfection de la ligne entière pour la moindre correction, il en | présente un autre, Les imprimeurs se plaignent que les monolines, les lypographes, les linotypes ne frappent pas assez froidement leurs matrices, formées de parois trop minces, pour fournir un œil suffisant et une impression bien nette. De plus, les lignes clichées, souvent peuvent s'écraser dans la mise en forme. La Rototype (fig. 11), imaginée tout récemment par un Autrichien, M. Schimmel, fournit également une ligne fondue d'un seul bloc. Une grande roue porte quatre collecteurs transporteurs, placés à 90° les uns des autres. L'un des collecteurs I, celui qui est placé à une des extrémités du diamètre hori- zontal de la grande roue dans la position de départ, recoit la rangée de matrices formant une ligne. Ilest transporté au bas du diamètre de la grande roue où la justification s'opère, pendant que le deuxième col- lecteur IT recoit à son tour une rangée de matrices. La justification ne laisse pas d'être ingénieuse Les lignes sont composées avec des espaces élas- tiques; elles sont toujours un peu plus longues que la justification. En resserrant la ligne à la longueur exacte de justification, chaque espace se trouve complètement diminuée par suite de son élasticité. Un nouveau mouvement d'un quart de tour de la roue amène la ligne justifiée au pot à fondre; en même temps que le collecteur I recoit la fonte, le collecteur IT est justifié, le collecteur IT recoit la série des matrices formant une troisième ligne. Enfin, un dernier quart de tour amène les matrices de la première ligne composées, préalablement débarrassées de la ligne fondue, au haut du dia- mètre vertical, où elles se distribuent dans le ma- gasin, d'où elles seront utilisées à une composition ultérieure. Le même jeu de rotation successive par quart*de tour se continue, si bien que, lorsque la machine est en marche, pendant qu'une ligne se compose, la précédente se justifie, la pénultième est fondue et les matrices de l'antépénultième se distribuent. Un des avantages de la Rototype est que le pot à fondre est aussi éloigné que possible de l'opéra- teur. creuses, La distribution des matrices est simplifiée par l'emploi de disques analogues aux noix de l'électro- typographé, mais portant gravés dix caractères au lieu de trois. On associe ainsi, sur le pourtour du même disque, des matrices de lettres de même épaisseur, majuscules larges, G, M, W, … minus- cules étroites, 1, 1, {, ! ..., minuscules de moyenne épaisseur, d, €, 6, .… Tous les disques de même épaisseur et garnis des mêmes lettres prennent place dans un même compartiment du magasin. La machine les en libère en les enfilant autour d'un LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE axe sur lequel elles ne se trouvent fixées que lorsque la lettre demandée est venue se placer dans la ver= ticale. La Rototype peut composer 6.000 lettres à l'heure et ne nécessite que la puissance d'un huitième d cheval. Le dernier modèle de rototype, celui auquel s'ar rêtent les constructeurs actuels, MM. Béha, Hinzelim et Bergeret, de Nancy, et qui doit être livré en dé= cembre 1907, ne comporte plus de roue à propre ment parler, mais trois bras avec seulement trois porte-matrices. Ces porte-matrices sont à char= nières, ce qui rend la correction plus facile et plus simple. Le clavier de ce dernier modèle comporte 100 tou- ches. Il y à 400 matrices romains et 400 matrices italiques. L'œil du caractère est plus profond que celui de la linotype. Enfin, la machine, qui pèse 450 kilogs environ, n'occupe qu'un emplacement restreint : longueur, 1",40; largeur, 0%,85; hau- teur, 12,50. 2 2. Seconde catégorie : Machines à fondre le caractère. — C'est pour échapper aux critiques faites aux machines à fondre la ligne, en général, que la seconde catégorie de machines à fondre a été imaginée. Ces machines composent en carat- tères mobiles fondus à mesure et assemblés en lignes justifiées au moyen d'espaces fondues à mesure d'après des dimensions calculées d'avance. C'est le travail même du cor1positeur à la casse que la machine effectue, en n'omettant aucune des opérations successives, mais en accroissant dans des proportions énormes la rapidité de composi- tion. Comme toujours, ces machines, dont certains types réalisent la plus grande perfection, appli- quent le principe si fécond de la division du tra- vail. Deux appareils absolument distincts sont associés : 1° une machine à composer à clavier, qui n'est autre qu'une machine à écrire perforant à mesure une bande de composition, laquelle est transmise à la machine à fondre; 2 une machine à fondre, qui recoit les indications de la machine à composer, fond les caractères successifs, ainsi que les espaces, et les assemble en lignes justifiées. Le principe de ces machines fut concu en 1872 par l'Américain Westcott. On ne peut s'empêcher de rapprocher le principe de cette mise en relation de deux machines, au moyen d’une bande convena- blement perforée, de celui utilisé dans le télégraphe automatique de Wheatstone*, imaginé par ce phy- sicien en 1859. Les deux premiers types de cette catégorie sont ; 3 à | : è mé ue tn Tr * Wheatstone, physicien anglais, né à Gloucester en 1802, mort en 1875. A. TURPAIN — DE LA PRESSE À BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE 873 la Graphotype de Goodson, et la Monotype de Lanston (fig. 12). LaGraphotype emploie, pour résoudre le problème tel que nous venons de le poser, plus de 650 contacts à mercure et 60 électro-aimants. Ce sont là des causes d'insécurité dans le fonctionnement. De plus, l'opérateur dactylographe doit, à la fin de chaque ligne, procéder à une lecture de deux nombres sur des tables ou des cadrans, puis choisir d'après ces lectures, dans un ordre déterminé, un certain nombre de touches spéciales qui comman- dent les perforations de justification. Le bloc porte- malrice, qui pèse 3 kilogs, effectue 20.000 mouve- ments à l'heure, suivis d’arrêts brusques qui sont une cause d'ébranlement et d'usure. La Monotype est basée sur le même principe. Un dactylogra- phe compose à la machine à écrire une ban- de perforée; la composition s'imprime en caractères clairs comme à la machine à écrire, ce qui permet un con- trôle de la com- position. La justification né- a cessile, Comme dans la Grapho- type, une lec- ture et le choix d'un levier; la vitesse de composition ne peut done atteindre celle de la dactylographie ordimaire. La bande perforée est entrainée entre une série de trous disposés suivant la ligne des perforations et une rainure par où arrive un jet d'air comprimé. Ce jet d'air se distribue dans les seuls trous que les perforations de la bande laissent ouverts. C'est ainsi que l'air comprimé est utilisé à actionner un méca- nisme qui fait avancer la matrice correspondant au caractère demandé et la place sous le creuset con- tenant la matière maintenue en fusion par un bec de gaz. Une goutte s'écoule alors pour former le ea- ractère qui, refroidi presque immédiatement après, est déposé dans une gouttière où s’alignentles carac- tères formant la ligne. Les corrections sont ici fa- ciles, puisque les caractères sont séparés. Toutefois, ici encore, le fonctionnement est rendu délicat par l'application qui est faite de l'air comprimé. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. Fig. 12. — Machine à fondre le caractère la Monotype. — Un dactylographe compose, au moyen de la machine à écrire (a k tue une sorte de stéréotype. Celte bande perforée, passant dans la machine à fondre (b), détermine la fusion des caractères et des espaces successifs et leur arrangement en lignes justifiées. Le mécanisme de la machine à fondre est actionné par un jet d'air comprimé passant par les perforations de la bande. IT. — L'ÉLECTROTYPOGRAPHE. L'électrotypographe, imaginé par les inventeurs hongrois. MM. Meray et Rozar, présente sur ses devanciers une supériorité incontestable. La justi- fication est rendue absolument automatique. Le dactylographe, sans faire aucune lecture, manœuvre à la fin de chaque ligne un seul levier ; on peut donc atteindre, pour la composition, la vitesse même du dactylographe, soit 15.000 lettres à l'heure. S $S 1. —- Machine à composer. 1. Description générale du fonctionnement. — La machine à composer (fig. 43) comprend une machine à écrire Williams qui, fournissant une copie dela com- position, en permet le con- trôle et consti- lue ainsi une épreuve avant la fonte. A cette machine sont accouplées une perforatrice el une calculatri- ce. La perfora- trice agit sur une bande de papier qui re- coit une ran- gée de perfora- lions. Huit sé- De J ries de perfora- , une bande perforée qui consti- s Uons peuvent s'étager sui- vant la largeur de la bande (fig. 14); nous les désignerons par les chiffres : 1, 2, 3, 4, 5, 0, 6 et 7. Les perforations 0 sont faites d'une facon constante et servent à l'en- trainement de la bande. Les combinaisons des perforations 1, 2, 3, 4 et 5 correspondent, à la manière des combinaisons des cinq leviers du manipulateur du télégraphe de Baudot, à la série des lettres minuscules. À ces combinaisons de per- forations se trouve-t-elle jointe la perforation 7, la lettre est alors majuscule. Si c'est la perforation 6 qui est jointe à l’une des combinaisons 1, 2, 3, 4 et 5, on obtient un signe de ponctuation. Ainsi, les perforations 3 et 4 correspondent à la lettre minus- cule D; les perforations 3, 4 et 7 correspondent à la lettre majuscule B; les mêmes perforations 3, 4, associées à 6, indiquent le point d'exclamation (!). En même temps que la bande se perfore, l'appa- pareil calculateur enregistre l'épaisseur du caractère 218 874 A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE correspondant tel qu'il sera fondu ultérieurement, épaisseur exprimée en dixièmes de millimètre. Entre les mots, le calculateur estime les espaces à la valeur normale de 15/10 de millimètre. Ces épaisseurs sont totalisées à mesure que la ligne s'écrit. A la fin de la ligne, par la seule manœuvre de la touche de justification abaissée par le dactylographe, l'appa- reil : 4° calcule la différence entre le total des épais- seurs et la longueur imposée à la ligne; 2 divise cette différence par le nombre des espaces; 3° ins- crit sur la bande, sous la forme d'une perforation particulière, la correction qui en résulte pour chaque Di Fig. 13. — Machine à écrire et à perforer de l'Electrotypo- graphe. — En même temps que l’opérateur obtient un épreuve avant la fonte du manuscrit par l'abaissement des touches d'une machine à écrire Wuenne) ces touches agissent sur un perforateur qui prépare une bande perforée qui servira de cliché et conduira la machine à fondre. Un calculateur enregistre simultanément l'épaisseur des ca- ractères qui seront fondus et divise la longueur totale de la ligne par le nombre d'espaces. La manœuvre machinale d'une seule touche de justification, actionnée à la fin de la ligne, inscrit trois perforations qui indiquent la largeur exacte de l'espace à fondre pour cette ligne. (Cliché de l'£clairage électrique.) espace. Ces corrections peuvent d'ailleurs corres- pondre soit à une augmentation de la valeur nor- male de l’espacement 15/10 de millimètre, soit à une diminution de cet espacement. Trois perfora- tions successives se produisent par la seule et unique manœuvre de la touche de justification : les deux premières consacrées à la manœuvre de justifica- tion, la troisième indicatrice de la fin de la ligne, | Le résultat du calcul de justification, inscrit sur la bande, indique de combien de dixièmes de milli- mètre en plus ou en moins il faut corriger la valeur normale d'espace (15/10%%) pour obtenir la ligne justifiée. Lorsqu'on passe d'un caractère à un autre, du romain à l'italique par exemple, il suffit de changer dans l'appareil compteur un cylindre spécial qui se déplace aisément, mais il n'y a rien à changer à l'appareil de justification. 2. Théorie de la justification. — L'opérateur est averti par un timbre lorsqu'il ne reste plus que 5 millimètres de ligne à remplir; il peut, d’ailleurs, dépasser de 5 millimètres la longueur de la ligne prescrite. Il a donc une latitude de 10 millimètres et peut terminer sur la fin d'un mot ou d'une syl- labe. Soient: / la longueur de la ligne prescrite ; À la longueur atteinte par le totaliseur au moment (e) [a] O0 0 D O00 Le] (e] 12345067 De DsDeD3D2D: D Fig. 14. — Bande perforée réglant la marche de la machine à fondre de l'Electrotypograph:. — La perforation 0 est continue et sert à l'entrainement de la bande. Les perforations 1, 2, 3, 4, 5, combinées à la manière des 5 touches du manipulateur du télégraphe Baudot, indiquent la série des lettres minuscules. Les mêmes perforations, associées à la perforation 7, indiquent la même lettre majuscule : associées à la perfo- ration 6, elles indiquent un chiffre ou un signe de ponc- luation. : D,, perforation concernant la dernière lettre (première à gauche) d'une ligne qui est ainsi achevée. D,, perforation commandant l'embrayage du mouvement de transport de la ligne achevée vers la galée. D,, perforation commandant la correction supplémen- taire à faire subir à un certain nombre (ici trois) d'espaces de la ligne. : D,, perforation commandant la correction constante à faire subir à toutes les espaces de la ligne. D,, D, et D,, perforations opérées par la manœuvre ma- chinale de la seule touche de justification. D,, perforation concernant la première lettre de la nou- velle ligne, dont les espaces viennent d'être fixées par les | manœæuvres de justification. où l'opérateur termine la ligne, longueur compre- nant les espaces normales, c'est-à-dire évaluées à 15/10 de millimètre ; n le nombre d'espaces de la ligne. La différence entre la longueur de la ligne jus- tifiée et la longueur de la ligne terminée est 2; cette différence peut être positive ou négative, 1— 2 Evaluons —+#gq; supposons tout d'abord que cette division donne un quotient q entier sans reste. Chaque espace de la ligne doit être aug- mentée (+) ou diminuée (—) de g suivant le signe A. TURPAIN — DE LA PRESSE À BRAS A LA LINOTYPE ET À L'ÉLECTROTYPOGRAPHE 873 de g. Ces calculs sont effectués automatiquement | par la machine, et c'est la valeur de g qui se trouve indiquée en perforations sur la bande par la ma- nœuvre du levier de justification. 1— Supposons que la division fournisse un reste y, ce qui a lieu généralement, car la machine ne permet pas de calculer les espaces avec une approximation supérieure au 1/10 de millimètre. Dans ce cas général, outre la correction gqui affecte | chaque-espace de la ligne, les y premières espaces recoivent une correction supplémentaire de 1/10 de | millimètre, ce qui épuise reste y. le 3. Epreuve avant la fonte. — La copie té- moin, fournie par la machine à écrire fonc- la ordi- tionnant à manière naire, véritable ï 11 épreuve avant Vis la fonte, met tion avant mé- per- la correc- me que la fonte des caractères l NT & soitopérée. Les corrections qui entrainentle remaniement d'une ou plu- sieurs lignes sont faites en à la fin de chaque ligne sans aucune lecture préa- lable. Une touche est adjointe pour les trous de transports 0 seuls dans la bande; une autre large touche pour les espaces variables, etenfin 4 touches |? cadratin, etc. pour les espaces fixes : cadratin, 1, $ 2. — Machine à fondre. La bande perforée, extraite de la machine à com- poser, est transportée sur la machine à fondre tout à fait indépendantes.On peut composer à loisir des bandes (fig. 15). Ces deux machines sont perforées et ne les traduire en caractères fondus que suivant les Cette indépendance besoins. n'est pas un des moindresavan- lages des ma- chines fondant le caractère mo- bile, en par- liculier de l'É- lectrotypogra — phe, type par- fait de cette itégorie de machines. Elle permet, en ef- |, de ne tirer qu'un nombre | il A nité d’'exem- plaires d'un ou- vrage,et, ayant | innservé les |’ | indes perfo- le s qui corres- - LL MA (NL pondent à sa Fig. 15. — Vue d'ensemble de la machine à fondre le caractère de l'Electrot\- ) mposIUON , découpantdans pographe.— La bande perforée, engagée dans la machine à fondre, la traverse de faire un nou- la bande la par- tie défectueuse et en y substituant une partie de bande nouvelle et corrigée; on évite ainsi d'avoir à recommencer la fonte de la partie à corriger. Les petites correc- tions, qui n'entrainent que le changement d'un ou deux caractères, sont opérées sur la composition fondue, au moyen de la pince ordinaire du typo- graphe. 4. Touches du clavier. — Dans le dernier modèle de l'Électrotypographe (modèle 1907), le clavier de la machine à composer comporte en tout 97 touches, dont 90 touches permettent, au moyen d'un levier commutateur, d'écrire 180 caractères. Une touche est réservée à la justification ; sa manœuvre est pure- en sens inverse des perforalions successives. (Cliché de l'Eclairage électrique. ment machinale, l'opérateur n'ayant qu'à l'abaisser 1 lirage en usant passer à nouveau les bandes perforées da machine à fondre, qui fournira ainsi autant ( r6S SUCCES- sifs qu'on désire : cela sans nécess e nouvelle Com )0Sition de l'ouvrage, )aS | l'inutili- te] l ictères, ni sation d'un stock considérable même de clichés. Ainsi se trouve résolu, par u édé encore plus économique que le clichag: sléréotypage, un des desiderata de la librairi seule typo- graphie puissamment riche, la hie des orphelins de Halle en Saxe, él ue avant avant l'inventi fournir des livres à des prix bi la Révolution, hage, à S à Ceux ilion en de- de ses concurrents, conservant magasin et tirant au fur et des 876 A. TURPAIN — DE LA PRESSE À BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE mandes. Mais au prix de quel capital immobi- lisé ! La bande perforée de l'Électrotypographe de MM. Méray et Rozar passe sur la machine à fondre en sens inverse de sa confection. Les lignes sont ainsi fondues lettre par lettre en sens inverse de droite à gauche. De cette manière, la machine con- nail,avant de commencer une ligne, la valeur exacte des espaces qu'elle doit fournir. C'est là un des avantages, et non des moindres, de la division du travail de composition réali- sée par la machine, Le métal fondu est injecté dans un moule dont une ex- trémité est fermée par une matrice creuse où se forme l'œil du caractère. Un cha- riot mobile contient 29 noix, Dane Sup a sur les facettes desquelles Fig. 16. — Noix porte- à ë matrice de l'Electro- sont gravées les matrices. ÉYPOGTaphe. .—" à, FT e CR N se res one Mletire Chaque noix comprend trois facettes à 45° l'une des autres (fig. 16). La faceltte médiane porte une minuscule, celle de gauche la mème lettre majuscule, celle de droite le signe correspondant. Le choix de la noix se fait suivant la combinaison réalisée par la bande perforée, par un mode ana- logue à celui du combinateur et des chercheurs du télégraphe de Baudot. Les espaces qui sépa- rent les mots sont fondues comme les caractères ; le moule est alors fermé par une noix sans matrice. L'épaisseur des espaces est déterminée par le liroir du moule dont le talon vient buter contre l'appareil de justification. Cet appareil comprend 4 disques montés sur le même axe, formant un ensemble qui se dilate ou se contracte, suivant le résultat du caleul de la justification. Quand une ligne est achevée, elle est poussée automatique- ment dans une galée, et la machine cesse alors de fondre pendant trois tours, qui sont employés à donner à l'appareil de justification la dimension correspondant aux espaces à fournir à la ligne qui minuscule: b, matrice de Ja mème lettre majuscule; €, d'un signe de ponctuation ou d'un chiffre. (Cliché de l'Eclairage électrique.) va être composée, dimension indiquée par les per- forations D., D, (fig. 14), qui, à la fin des lignes, sont réservées à la justification; la perforation 6 signifie soustraction, la perforation 7, addition; la première rangée D, (fig. 14) indique, par le rang de son unique perforation, le nombre des pre- mières espaces de la ligne qui devront recevoir un supplément de correction de 1/10 de millimètre ; la seconde rangée D, (fig. 14) indique, en addi- tionnant les rangs de ses perforations de 1 à 5 eten attribuant à la cinquième la valeur 10, le nombre de dixièmes de millimètre qui constitue la correction positive ou négative que doivent supporter toutes les espaces de la ligne. Prenons l'exemple de la bande de la figure 14. Les perforations 6 indiquent soustraction ; les per- forations 7, addition. Nous trouvons: D., perforations 3 et 6. Cela indique qu'il faut retrancher (perforation 6) 1/10 de millimètre de chacune des trois (perfora- tion 3) premières espaces de la ligne. D,, perforations 1, 2, 5 et 7. Cela indique qu'il faut ajouter (perforation 7), à chacune des espaces de la ligne d'épaisseur nor- male, 45/10 de millimètre, un nombre de dixièmes de millimètre marqué par 4 + 2+ 10 ‘la 5° perfora- tion ayant la valeur 10), soit 13/10 de millimètre. Ainsi, pour cette ligne, les trois premières espaces seront fondues à l'épaisseur de 15 +13 —1 ou 27/10 de millimètre, et toutes les autres à l'épaisseur de 45 + 13 soit 28/10 de millimètre. La bande perforée A (fig. 17) est entraînée par um pignon denté qui engrène avec les perforations 0. La machine marche à raison de 90 tours à la minute ; la bande avance d'une division par chaque tour et chaque tour correspond à un caractère fondu. Le mouvement d'avancement est très rapide : il dure à peine 1/15 de seconde; puis la bande demeure immobile pendant 9/15 de seconde, chaque tour s’effectuant en 10/45 ou 2/3 de seconde. Pen- dant cette immobilisation de la bande, 7 leviers tels que Z (fig. 17) s'appuient sur le papier, et ceux qui trouvent des perforations, en descendant un peu plus bas que les autres, déterminent des con- tacts qui fer- ment des cir- cuits électri- ques-._A" cet effet, le dont est le levier Z sou- lèvele piston X, qui fait fléchir un ressort B talon muni jusqu'au con- tact de B avec Fig. 17. — Appareil lecteur. — En- trainement de la bande perforée. C Production des contacts entre BC au passage des perforations dans lesquelles s'enfonce l'extrémité du levier Z. L'Électroty- pographe est, en effet, à com- mande électrique ; de là son nom; mais ses inven- teurs n'emploient que des dispositifs électriques très simples, des électro-aimants de faible puissance nécessitant un courant de faible tension. A l'en- contre de la Graphotype de M. Goodson, la machine à perforer de l'Électrotypographe n'emploie pas l'électricité. Toutes les fonctions y sont purement mécaniques, sans air comprimé, ni courants élec- A. TURPAIN — DE LA PRESSE À BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE 877 triques ; la raison en est dans le manque de sécurité des contacts établis par le jeu d’un dactylographe sur un clavier, qui produit des efforts de pression très variables au cours d'un travail rapide. Au con- traire, dans leur machine à fondre, les inventeurs de l'Électrotypographe font un emploi très judicieux du courant électrique ; là, en effet, les organes mus mécaniquement peuvent assurer les contacts en toute sécurité. À l'encontre de la Graphotype, l'Électrotypographe n'emploieque15électro-aimants d'égale puissance (au lieu de 60) et de 100w de résis- tance: sous une tension de 40 volts, il n'absorbe done que O4. Il n'y à jamais qu'un seul électro- aimant en action à la fois dans la machine, et sa durée d'excilation est en moyenne de 1/20 de seconde. Tout ce dispositif électrique, étudié et exécuté avec le plus grand soin, fonctionne d'une manière très sûre. Dans les plus récentes machines, un seul électro-aimant provoque l'arrêt automa- tique de la machine dans le cas où se produiraient certaines avaries ou des troubles de fonctionne- ment provenant de la négligence de l'ouvrier. C'est ainsi que la machine s'arrête quand la bande per- forée est à la fin. De cette manière, la machine à fondre est automatique, au point qu'un seul ouvrier peut facilement surveiller deux machines. $ 3. — Description de quelques organes particuliers. A défaut d'une description détaillée des divers organes de l'Électrotypographe, description qui dépasserait le cadre de cette étude, nous indique- rons rapidement comment certaines fonctions de la machine à fondre sont assurées. La figure 18 donne le schéma général de cette machine à fondre. En A est l'appareil lecteur qui, à l’aide des Fig. 18. — Schéma général de la machine à fondre de l'Electrotypographe. — A, appareil lecteur: B, appareil combinateur: E, chariot porte-matrices; C, tige déclanchant la noix porte-matrices demandée; G, noix appliquée contre le moule J; K, creuset contenant le plomb en fusion. leviers précédemment figurés (p. 816 et fig. 17), dé- chiffre là bande et en traduit les perforations en assurant, au moyen de contacts entre B et C (voir fig. 17), la fermeture de courants électriques dans des électro-aimants. Ces courants agissent sur 5 électros d'un appareil combinateur B (fig. 18), qui a pour mis- sion de déclancher un organe D à un certain point de la course du chariot E. Ce déclanchement se produit au moyen de la tige C. C'est ce chariot E qui contient les 29 noix porte-matrices. A chaque course du chariot, le jeu de D provoque la sortie d’une noix G, qui se trouve appliquée par le support H contre le moule J, où elle recoit le jet de plomb en fusion provenant du creuset K chauffé au gaz. Au retour du chariot, la noix y reprend sa place. Le caractère fondu est démoulé, poussé entre des couteaux de façonnage disposés en L, puis tombe dans le composteur M. A la fin de chaque ligne, le contenu Fig. 19. — Appareil combinateur. — Chacune des cinq perforations 1, 2, 3, 4, 5, passant dans l'appareil lecteur (fig. 17), actionne un électro-aimant qui libère un levier, lequel est pris dans la jante d'un disque C et repousse un chercheur B. Les cinq chercheurs 1, 2, 3, 4, 5 passent ainsi en partie de leur voie de repos F sur la voie de tra- vail [| Aux seules perforations 2 et # pratiquées ainsi sur la bande, correspond donc le rejet des chercheurs 2 et 4 sur la voie de travail, les chercheurs 1, 3 et 5 res- tant sur la voie de repos. Le disque mobile, sur le pour- tour duquel sont pratiquées les voies de travail et de repos, porte des rainures H, qui sur voie de repos ne per- mettent jamais le bascul des cinq chercheurs, que leurs têtes rendent solidaires d’un ressort G qui les sollicite dans le sens de la flèche. Lorsque des chercheurs sont engagés sur voie de travail, une combinaison de rai- nures K permet le bascul de l’ensemble; le levier L repousse dès lors la matrice qui se trouve devant lui et qui est celle de la lettre correspondant aux perfora- tions 2 et #. du composteur est automatiquement transporté sur une galée N. 4. Appareil combinateur. — Le combinateur est en tout point identique à celui de l'appareil traducteur du télégraphe Baudot. Les cinq contacts correspondant aux cinq perforations 1, 2, 3, 4 et 5 ferment le circuit de cinq électro-aimants situés côte à côte. Chaque électro-aimant, lorsqu'il est actionné, libère un levier aiguilleur B (fig. 49), qui, pris par la jante C d’un disque D, chasse vers la gauche un levier chercheur E. Ces chercheurs E, au nombre de cinq, sont vus de côté en 1, 2, 3, & et 5; leurs pieds s'appuient sur le bord d'un disque F, bord qui est appelé voie de repos. Lorsqu'un chercheur est poussé par un levier aiguil- leur, son pied passe de la voie de repos F dans la voie de travail I. Malgré cela, grâce à la forme de leurs têtes, qui toutes s'appuient les unes sur les autres, les leviers chercheurs restent tous solidaires les uns des autres. Bien qu'au-dessous des pieds des chercheurs, sur la jante de la roue F qui constitue la voie de repos, se trouvent des rainures, les pieds des chercheurs n°y peuvent tomber tant qu'ils restent tous sur la voie de repos, la jante F ne présentant nulle part cinq rainures consécutives. Par contre, si un ou plusieurs cher- cheurs passent sur la voie de travail, il se présentera, au cours de la rotation des disques F et I, une combi- naison de rainures telle que K, qui permettra à tous les pieds des chercheurs de tomber ensemble. La pièce G qui appuie sur les têtes des chercheurs pourra dès lors 878 A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS À LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE se déplacer et entrainer avec elle le levier L. Le levier L pousse celle des matrices qui se trouve alors devant lui; c'est justement la matrice de la lettre cor- respondant aux perforations pratiquées, aux perfora- tions 2 et #, par suite aux chercheurs 2 et 4 dans i’exemple de la figure 19. On trouve ainsi, sur les jantes des disques F et 1, 31 combinaisons de rainures éta- gées sur un arc de 105°. À la fin de chaque tour des disques, une came repousse les chercheurs et les replace tous sur la voie de repos; les aiguilleurs sont, d'autre part, ramenés à l’accrochage, aussitôt après avoir agi sur les chercheurs, par le profil même du canal C pratiqué dans la jante du disque D. 2. Chariot porte-matrices. — Sur Je chariot mobile E (fig. 18) se trouve une crémaillère B (fig. 20), comprenant 31 divisions non équidistantes. Ces divi- sions ont été élablies de manière que leur passage sous l'organe A est- synchrone du passage des 31 com- binaisons de rainures des disques F et 1 du combina- teur (voir fig. 19) sous les pieds des chercheurs. Le levier L de la figure 19 a justement pour effet de produire le déclanchement de la pièce A (vue de face dans la partie (4) de la figure 20). Le doigt de cette pièce pénètre dans la crémaillère B, ce qui refoule la tige C (fig. 20) et relève le cliquet Z. Le bras D peut, dès lors, porter une des noix E en avant dans la por- tion tigurée en F en ligne ponctuée. Pendant la suite de la course du chariot, la noix E, qui s’est placée sur le mandrin carré F, est appuyée par ce mandrin contre le moule G, dont elle forme le fond et dans lequel arrive le métal liquide provenant du bec H du creuset. Après la fonte du caractère, le mandrin carré se replace en F, le bras D reprend la noix au retour du chariot, où il rentre lui-même grâce à une courbe qui agit sur son talon I. La durée du contact de la noix et du moule n'excède pas 1/30 de seconde. Chaque noix comprend, ainsi que nous l'avons indiqué, trois matrices : la médiane relative à une lettre minuscule, les deux autres, placées à 45° de part et d'autre, se rapportant à la même lettre majuscule ou à un signe de ponctuation ou chiffre. La présentation d'une des deux matrices situées à 45° de la matrice médiane de chaque noix se produit si, au groupe de Fig. 20. — Choix d'une matrice; impression du caractère, — La crémaillière B (a), solidaire du chariot porte- matrices qui se déplace perpendiculairement au plan dela figure, présente 31 divisions non équidistantes qui se pré- sentent sous le doigt A, synchroniquement avec les 31 combinaisons de rainures des disques combinateurs (fig. 19). L'appareil combinateur agit sur le doigt A qui, par la pièce C, lève Z; D porte alors la matrice E, qui se trouve sur son passage, en F. Elle y est saisie par le man- drin carré F, qui la porte contre le moule G. Un jet de liquide provenant du creuset H fond le caractère. La matrice revient en K, puis en E au moment du retour du chariot mobile, sur lequel elle reprend sa place. perforations 1, 2, 3, 4, 5, se trouve associée l'une des deux perforations 6 ou 7. Alors, grâce à deux électro- aimants spéciaux, le mandrin carré F se trouve, pen- dant sa translation vers le moule, animé d’une rotation de 45° dans un sens ou dans l’autre. 3. Justification : détermination de la largeur de l'espace à fondre. — La cavité S (fig. 21), en forme de parallélipipède, dans laquelle se fond le caractère, est limitée en haut et en bas par des blocs fixes, en arrière par un tiroir à mouvement vertical qui sert ultérieure- ment à recueillir le caractère et à le porter entre une série de couteaux qui rompent la masselotte, le frai- sent et le rognent. En avant, la cavité S est limitée par un tiroir horizontal que termine une pièce E que l’on change pour chaque force de corps. Un organe, cons- titué par quatre pièces M, N, O, P et par une cale qui Z _ Fig. 21. — Justification; détermination de la largeur à donner à l'espace S à fondre. — Les disques M, N, à gra- dins de saillies égales à 1/10 de mm., règlent le supplé- ment positif ou négatif à donner à un nombre variable - d'espaces, nombre marqué par l'une des deux perforations de justification. Les disques O, P, à rampes hélicoïdales, règlent la variation positive ou négative à faire subir à toutesles espaces à partir de l'espace normale (15/10 de mm.) suivant les indications de la deuxième perforation de justification. s’efface lorsqu'on doit fondre des lettres et non des espaces, sert à limiter l'épaisseur des espaces d’une ligne donnée. Les quatre pièces M, N, O, P, peuvent s'écarter ou se rétrécir, et, par suite, limitant la posi- tion de la vis V qui appuie contre leur ensemble, règlent l’épaisseur de l'espace. Leur épaisseur se trouve réglée par des mouvements de rotation qui s’exécutent avant le commencement de la fusion des caractères de chaque ligne, cela de la manière sui- vante : Les disques M et N, en contact par des cou- ronnes entaillées de gradins de saiilies égales à 4 et à 2 dixièmes de millimètre, sont placés de manière qu'une rotation quelconque de M rétrécit l'épaisseur de l’ensemble de 1/10 de millimètre, alors qu’une rota- tion quelconque de N le dilate d'autant. Les disques O et P sont en contact par deux rampes hélicoïdales dont le pas est calculé de façon à ce que la rotation de 4 à 20/20 de circonférence, arcs limités par des ro- chets, correspond à des variations d'épaisseur de l’en- semble de 1 à 20/10 de millimètre. La rotation de O pro- voque des dilatations, celle de P des rétrécissements. Si les disques ne sont animés d'aucun mouvement avant le commencement de la fusion d’une ligne, leur épaisseur est telle que la butée de la vis V correspond à une épaisseur normale de l’espace fondu en S. Suivant les perforations de justification, dont un exemple correspondant à la bande de la figure 14 a été analysé plus haut (voir page 876), les trois premières espaces doivent être fondues à l'épaisseur de 27/10 de millimètre et toutes les autres à l'épaisseur de 28/10 de millimètre. La perforation 3 (voir fig. 44, D,, perfora- tions 3 et 6) amorce un circuit qui agit sur le disque M et, le faisant tourner, rétrécit par suite l'épaisseur de l'ensemble des disques M, N, O, P de 1/10 de milli- mètre. Ce circuit arme, d'autre part, par trois fois un cliquet solidaire du disque M, lequel cliquet échappe une dent chaque fois qu'une espace est fondue, si bien qu'après trois espaces fondues l’ensemble des disques M et N reviendra à son épaisseur primitive; la cor- rection de soustraction de 1/10 de millimètre ne por- tera donc bien que sur trois espaces. Les perforations 4 l A. TURPAIN — DE LA PRESSE À BRAS A LA 1,2, 5 et7 (voir fig. 14, D,) indiquent qu'il faut ajouter à toutes les espaces normales 1 + 2 + 10 — 13 dixièmes de millimètre; ces perforations amorcent un circuit qui, agissant 13 fois sur les cliquets qui font tourner le disque O, provoque une rotation de 13/20 de cir- conférence, soit une dilatation de l'épaisseur de l'ensemble des disques O et P de 13/10 de millimètre. A la fin de la ligne, un levier désarme le cliquet de O, et l'ensemble des disques se retrouve à l'épaisseur normale, prêt à enregistrer les indications des perfo- rations de justification de la ligne suivante. — Electrotypographe, moaèle perfectionné de écrire comprend un disque gradué avec des lignes justifiées demandée. La machine à fondre permet LINOTYPE ET À L'ÉLECTROTYPOGRAPHE 879 suivis dès cette époque d'un succès si complet, d'importants perfectionnements ont été apportés à l'appareil tant par la maison Schuckert et C°, acqué- reur des premiers brevets pour l'Allemagne, que par le Comptoir international des brevets d'inven- tion, dont le directeur, M. Wehrlin, avait acquis les premiers brevets Rozar, Sous l'impulsion de ces deux Sociétés, l'Électrotypographe vient de | D : BRON ENT E| 1907, construit par la maison Schuckert et Cie. — La machine à aiguille, qu'il suffit de fixer à l'endroit convenable pour obtenir la longueur la lecture des lignes et leur composition dans le sens même de leur perforation (a); les deux machines peuvent ainsi être reliées. Avec les 90 touches du clavier de la machine à écrire, grâce à un levier commutateur et à ce que les noix de la machine à fondre comportent six caractères au lieu de trois, on peut com- poser 180 signes différents et produire de la composition fraclionnée en deux ou trois écritures variées intercalées. £ 4. — Perfectionnements et résultats de l’Électrotypographe. Depuis les essais faits au journal Le Temps avec l'Electrotypographe modèle 1902, et qui furent | | | 1 sortir enfin de la période des essais. Une série de machines construites à Nuremberg, tant pour des imprimeurs allemands que pour des imprimeurs américains, viennent d'être livrées. Ces nouveaux types comportent de très nombreux $80 A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE et très importants perfectionnements sur le modèle de 1902; nous signalerons en particulier les sui- vants : mécanisme permettant la fonte d'espaces hautes ou basses à volonté; fusion des caractères à œil débordant tel que le V en italique ; construction simplifiée du mécanisme de justification dans la machine à fondre, simplification comportant l’em- ploi d'un seul électro-aimant au lieu de huit; accroissement de la largeur de la galée permettant la réalisation de lignes de 40 cicéros (180 “/") de longueur; dispositif pour l'alimentation automa- tique du bain de métal fondu; perfectionnement La figure 22 représente le type perfectionné de l'Électrotypographe (modèle1907), tel que la « Elek- trizitaets-Aktiengesellschaft », successeur de la maison Schuckert et Ci, le construit. On y voit en a une longueur de bande correspondant à une ligne engagée dans la machine à fondre, ce qui permet la réunion des deux machines, la composi- tion pouvant commencer par la première lettre perforée. | L'Électrotypographe réalise, sur les machines à composer antérieurement connues, les nombreux avantages suivants : TasLeau |. — Tableau comparatif des machines à composer. NOMBRE MATRICES LONGUEUR RUES disponibles | maxima de touches x des machines en de la ligne du clavier magasin en cicéros Compositeur à la casse. 1re classe. Machine Lagerman . Machine Calendoli . 2e classe, 1'° catégorie. | Monoline. Linotype . 1 600 DYPOSTADE EE TETE 700 IROLOUYDE ERIC 800 100 romain. 40) italique) 2e catégorie. | Monotype : | Machine à composer. » Machine à fondre . . 295 Electrotypographe : Machine à composer. » Machine à fondre . 180 matr. en 30 noix. LIMITE des corps fondus VITESSE EN LETTRES à l'heure DÉPENSE PUISSANCE de gaz nécessaire [par jour de 10 heures en m. cubes on ne d'après les opérateurs d'après les en H. P. inventeurs 1.000 à 1.500 7.500 fr. 16.320 fr. (Standard) 18.650 fr. (Dilemagas. 8.500 fr. 9.000 fr. (caractère mixte, rom. et italique). 3.750 fr. 15.000 fr. 7.000 à 10.000 7.000 à 10.000 12.000 à 15.000 2.500 fr. 16.500 fr. Eos. 18.750 fr.} apporté à la machine à composer, rendue facilement accessible dans toutes ses parties et dont la bande perforée porte l'impression des caractères au-des- sous des perforations; enfin, composition commen- cant par la première lettre écrite, d'où possibilité de réunir les deux machines. Ce dernier perfectionnement est appréciable pour la composition des journaux. Une perte de ternps considérable est évitée : il n’est plus néces- saire, en effet, d’avoir fondu toutes les lignes d'un article pour mettre en pages. La machine à fondre altend simplement qu'une ligne soit perforée, la bande s'engage dès lors dans la machine à fondre, ls perforations de justification étant d'abord dé- chiffrégs pour le réglage des espaces, puis la ligne est fondue, lettre par lettre, dans le sens même de sa production. 1° Les caractères mobiles facilitent les correc- tions indiquées par la lecture de la feuille de con- trôle de la machine à composer; 2 Les matrices possèdent un œil profond et fournissent, par suite, une impression plus nette ; le petit nombre des matrices en permet, de plus, le remplacement à peu de frais. Desessais approfondis ont démontré que cette machine produit de la com- position en corps 5 avec la même netteté que les plus gros caractères; 3° La division de l'appareil en deux machines en rend l'apprentissage plus aisé et permet d'en géné- raliser l'usage, même aux petites imprimeries, qui pourront se borner à acquérir la machine à com- poser, d’ailleurs peu coûteuse. Les bandes perforées seront alors envoyées dans des fabriques de com- position possédant des machines à fondre. La bande L à A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE 881 perforée remplace ainsi un véritable cliché, peu encombrant, n'immobilisant aucun capital et pou- vant repasser, paraît-il, jusqu'à 100 fois sur la machine à fondre. Pendant la morte-saison, et lorsqu'elle demeure inactive, la machine à fondre peut être employée à fabriquer des caractères pour la vente. Mais il y à plus encore : au moyen d'un dispo- sitif analogue à celui du télégraphe Baudot, la maison Schuckert et Ci est arrivée à réaliser un appareil, le télétypographe, qui permet de trans- mettre télégraphiquement la bande perforée de l'électrotypographe. Une bande unique, composée à la machine à écrire, peut donc être reproduite à distance et fournir ainsi par télégraphe une bande identique qui, disposée sur une machine à fondre, donne immédiatement le texte composé et justifié, prêt à être mis sous presse. Ainsi un article de journal, expédié de Paris sous cette forme, peut être reproduit, prêt à être imprimé, dans différentes villes, à Bordeaux, à Lyon, à Mar- seille, ete... C'est la possibilité, pour les grands journaux, d'avoir des éditions de province sans majoration de frais et sans retards; c'est une pro- fonde modification, par suite, dans les procédés actuels du journalisme. Enfin, tant par la réalisation d’une justification mathématique et vraiment parfaite que par la pos- sibilité de la correction, l'Électrotypographe se pré- sente comme apte à être utilisé à la confection de toutes sortes de travaux soignés. Lorsqu'on veut composer en caractères différents des caractères courants, en italique par exemple, il suffit de changer dans l'appareil compteur un cylindre spé- cial qui se déplace très aisément, mais il n'y à rien à changer dans l'appareil de justification. Le tableau I réunit un certain nombre de rensei- gnements concernant les divers types de machines à composer. Il permet ainsi de les comparer tant au point de vue de l'économie qu’elles procurent que de la rapidité qu'elles réalisent. III. — EVOLUTION DE L'IMPRIMERIE SOUS L'INFLUENCE DES MACHINES À COMPOSER. L'invention de la machine à composer et les perfectionnements qui l'ont peu à peu rendue pra- tique n'ont pas été sans porter un trouble profond dans les conditions du travail chez les typographes. Tout d'abord, l'ouvrier vit sans craintes les efforts inventifs faits pour le remplacer par la machine. Son travail consiste, en effet, en une telle associa- tion de mouvements complexes, en même temps que d'intelligence soutenue, qu'il ne pouvait vrai- semblablement pas croire à la possibilité de son remplacement par un mécanisme. Et de fait, durant plus de cinquante ans, les nombreux dispositifs imaginés semblaient démon- trer cette impossibilité par leur insuccès pratique. Mais voici que des machines nouvelles, d'emploi aujourd'hui consacré par une pratique de plusieurs années, s'implantent de plus en plus nombreuses à l'atelier. C'est la linotype, dont l'invention remonte déjà à 1886; c'est l'Électrotypographe, qui vient prouver que non seulement pour la composition courante d'un journal, mais encore pour la compo- sition soignée, pour le travail dit en conscience, le typographe trouvera de plus en plus sa place occupée définitivement à l'atelier par la machine. Et les quelques chiffres suivants montrent avec quelle rapidité et quelle brutalité se produit cette invasion de la machine. C’est surtout en Amérique, pays des journaux à 40 et 16 pages de grand format, que la machine à composer à pris un rapide essor. Avant son intro- duction, un journal comme Le Herald occupait 495 ouvriers, alors qu'à la même époque un journal francais comme Le Temps n'employait que 25 ou- vriers. Accroissement du nombre de machines à composer. ÉTATS- ALLE- ANGLE- UNIS MAGNE TERRE FRANCE PARIS 1894 . . . . 1 . 450 » » » » 18987. 10, » » 51 » » ASIN » » 124 » » 100 » » » S# 50 LADA EEE 4.975 2.000 389 » » 19027 » » » » 182 Répartition des types de machines employés à Paris en 1902 : Calendoli, 1; Thorne, 5; Linotype, 178. Nombre d'opérateurs à Paris : 245, hommes et 65 femmes. Pareille invasion de l'imprimerie par le machi- nisme s'était déjà produite en 1830, lors de l'inven- tion de la presse mécanique. À cette époque même, l'introduction des machines à Paris fut l’occasion de troubles graves suivis de grèves.Le 30 juillet 1830, dont 180 l'imprimerie royale et trois imprimeries privées furent envahies et les machines brisées. Une ordon- nance, rapportée d'ailleurs le 2 septembre suivant, intervint même, suspendant l'usage des presses mécaniques à l'Imprimerie royale. Les 2 et 3 sep- tembre, les ouvriers pressiers de l'imprimerie royale quittent le travail ; leurs camarades des ate- liers privés utilisant la presse mécanique les suivent et ils entraînent à la grève quelques jours après, par solidarité, les compositeurs. Bientôt 2.000 grévistes sont réunis à la barrière du Maine. Une suspension du rétablissement des machines imprudemment opéré à l'Imprimerie royale permit d'entrer en négociations et la Commission de la grève fit adop- 882 A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS À LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE ter des mesures qui marquèrent la reprise du tra- vail. Un des articles de ces arrangements intervenus entre palrons et ouvriers fut l'occasion de pour- suite en correctionnelle des membres de la dite Commission pour délit de coalition. Nous sommes, en effet, en 1830, et le tête à tête forcé entre l’ouvrier et ses employeurs est la seule règle admise pour le débat du contrat de travail. Tous les témoins signa- lèrent devant les juges l'esprit pacifique dont étaient animés les grévistes, qui demandèrent eux-mêmes des grenadiers pour maintenir l'ordre à leurs réu- nions, auxquelles assistèrent d'ailleurs un colonel el un général de la Garde nationale. Aussi l'avocat du Roi n'osa requérir sévèrement et les juges acquit- tèrent les prévenus. Nous avons vu que les presses mécaniques s'im- plantèrent peu à peu. À lImprimerie royale, elles fonctionnèrent sans susciter de troubles, le Gouver- nement ayant commandé un assez grand nombre de travaux pour n'amener aucune réduction du per- sonnel. Les pressiers refusèrent longtemps de se servir des nouvelles machines; ils furent peu à peu supplantés par les conducteurs qui, aujourd'hui, les ont complètement remplacés. Bien que la situation se présente à l'heure actuelle pour les {Ypographes dans des conditions analogues à celles qu'instaura en 1830 le machinisme à l'égard des imprimeurs, les compositeurs demeurent calmes devant leur redoutable concurrent. Loin de vouloir s'opposer au progrès, ils cherchent à atté- nuer, Sinon à prévenir, les misères qu'il va occa- sionner, montrant par là qu'ils savent comprendre l'amélioration graduelle des conditions d'existence de la société, qui s'achète cependant au prix de poi- gnantes misères, en faisant perdre leur travail, sans compensation, à des ouvriers dont l'âge ne leur per- met souvent plus de changer de métier. C'est par l'association, par la force syndicaliste, que les ouvriers du livre cherchent à se prémunir contre la répercussion des progrès du machinisme. En même temps que le machinisme raréfie de plus en plus la main-d'œuvre à l'atelier typogra- phique, l'introduction, de plus en plus nombreuse, des femmes dans cette industrie rend l'avenir de l’ouvrier compositeur plus incertain et plus pré- caire. Cette invasion parallèle de l'atelier par la machine et par la femme ressort nettement des nombres suivants: À Paris, en 1854, on comptait de 2 à 3 femmes pour 100 ouvriers; en 1902, on en compte de 22 à 23 pour 400 ouvriers. En France, actuellement, sur environ 17.000 com- positeurs, il n’y a pas moins de 2.000 compositrices, soit près de 12°/,. Nous voyons par le tableau pré- cédent que déjà la machine à composer utilise dans notre pays 65 2b/02)0. À quoi tient cet envahissement de plus en plus marqué de la typographie par la femme? Evidem- ment à la concurrence acharnée que se font entre eux les maitres imprimeurs, concurrence qu'exa- gère encore le système des adjudications et que la liberté de l'imprimerie n'a fait qu'accroitre depuis 1870. Pour compenser les pertes consenties afin d'obtenir la commande, le maître imprimeur se rejette sur le salaire, qu'il diminue. Devant la résis- tance organisée de l’ouvrier à l'avilissement du salaire, il songe alors à employer la main-d'œuvre féminine. Et, cependant, le consommateur, l'acheteur du livre n’a pas sensiblement profité de la baisse dans le prix de la production, déterminée par cette con- currence de plus en plus grande. Qui donc tire profit de cet état de choses, puisqu'en somme le patron imprimeur très souvent végète et que l'ou- vrier voit la main-d'œuvre se raréfier par la machine ou s’avilir par l'emploi de la femme? C'est l'éditeur, qui représente dans cette indus- trie la force du capital puissamment organisé. Et cela au point que, placé entre l’ouvrier typographe, qui constitue une des classes de prolétaires les plus intelligemment organisés sous la forme syn- dicaliste, et l'éditeur, qui concentre de plus en plus en un petit nombre de mains le capital, le patron imprimeur, qui n'a pas su se défendre par la force d'une puissante union corporative, se raréfie de plus en plus, comme le fait, d'ailleurs, dans tout l'ordre social actuel cette classe tampon, prise de plus en plus entre les deux forces antagonistes de nos sociétés modernes : le Capital et le Travail. Et le développement du machinisme, en rendant la production plus économique, en rendant aussi plus dispendieuse la constitution d'un atelier d’im- primerie’, ne fait qu'accroitre cet exode forcé des maitres imprimeurs vers le prolétariat. Des exemples nombreux tirés des faits prouvent cet acheminement graduel, cette concentration de plus en plus manifeste des moyens de production. Quelques grandes maisons d'édition ont depuis longtemps déjà établi des fonderies de caractères ; l’une d’elles fabrique même le papier qui lui est nécessaire. Enfin, de vastes imprimeries s'orga- nisent et se développent de plus en plus. Contre celte concentration des moyens de pro- femmes sur 245 opérateurs, soit ‘ Les types de machines vraiment pratiques et économi- ques, comme l'Électrotypographe, sont d'un prix élevé et ne développent d'une manière intensive et complète leur puis- sance de travail que réunies en grand nombre, desservant par exemple de nombreux journaux de province ou assurant la réédition télégraphique des grands quotidiens d’une capi- tale, toutes organisations qui ne sont abordables que par les seuls gros capitaux. A. TURPAIN — DE LA PRESSE A BRAS A LA LINOTYPE ET A L'ÉLECTROTYPOGRAPHE 8383 duction, qui doit leur être si funeste, les maitres imprimeurs, au lieu de se grouper, ne se rendant pas compte que le système individualiste a vécu, - semblent avoir pour seule préoccupation le main- tien de leur liberté. C’est au nom de la liberté de leur profession, contre laquelle ils protestaient d'ailleurs avant 1870, qu'ils repoussent toute mesure de surveillance de leur industrie. Ils se plaignent de la concurrence qui ruine leur industrie, et qui n'est cependant que le résultat du jeu même de cette liberté au nom de laquelle ils s'opposent à toute loi protégeant le travail et les ouvriers. Ainsi l'esprit d'association n'a pas pénétré parmi les maîtres imprimeurs. Malgré les quelques syndicats locaux qu'ils ont fondés, malgré même leur Union nationale, l'action de tout leur groupementse trouve paralysée par suite des tendances individualistes de ses membres, tendances uniquement basées sur les satisfactions de l'intérêt personnel. Ils se trouvent ainsi pris entre deux puissantes organisations, les syndicats ouvriers, groupés d'ailleurs en une Fédé- ration nationale des travailleurs du Livre, et la puis- sance capitaliste, représentée par les grandséditeurs,. C'est ainsi, par exemple, que, pour se défendre contre la menace si sérieuse de la machine, les tra- vailleurs du Livre ont organisé, en s'imposant sou- vent de durs sacrifices, des caisses de chômage. L'ouvrier dépossédé de son travail, talonné par le besoin, ne peut que céder aux exigences patronales. En créant la caisse de chômage, la Fédération des travailleurs du Livre à prémuni le chômeur contre des défaillances possibles et d'ailleurs excusables. Moins qu'un appät pour de nouveaux adhérents, cette institution, qui à naturellement entrainé la création parallèle d'une caisse de secours pour la maladie, est un moyen de maintenir les conditions du travail. Plus encore que toute autre corporation, celle des typographes montre qu'aujourd'hui louvrier aban- donne l’humble et timide contenance de naguère. Il prend conscience de ses intérêts et a la légitime fierté de sa classe. IL comprend que l'évolution sociale, déterminée fatalement par le développe- ment industriel, lui permet de nouveaux espoirs. Fort et dénué d'envie, quoi qu'on en dise, parce que débarrassé du vice individualiste, le prolétariat s'achemine sûrement vers des conquêtes inéluc- tables : vers plus de justice, vers plus de bien-être, vers plus de véritable égalité. Sa vie laborieuse et désintéressée lui donne les aspirations généreuses qui sont la vraie sagesse et qui le prémunissent contre ce ver rongeur des sociétés passées et de notre société actuelle : le seul désir du gain, l'hyp- nose du gain, l'unique désir d'acquérir toujours plus, sans même bien souvent se réserver le loisir d'utiliser le gain ou d'en jouir. La comparaison des quelques nombres suivants fait ressortir la précarité du groupement patronal en face de la force du groupement ouvrier. Nous avons vu qu'en 1903 à peine 700 maîtres imprimeurs sur 4.000 avaient adhéré à l'Union, soit done environ 47 °/, (17,5 2/0). Sur environ 48.000 ouvriers employés dans les im- primeries francaises, on trouve, en 1903, 11.300 syn- diqués, dont 10.429 affiliés à la Fédération française des travailleurs du Livre, soit près de 63 °/, syndi- qués et près de 57 °/, fédérés. C'est qu'en effet les ouvriers typographes ont les premiers compris la vérité de cette assertion de Marx : L'émancipation des travailleurs ne peut être l'œuvre que des travailleurs eux-mêmes. S'ils récla- ment parfois l'intervention de l'État pour assurer les conditions d'hygiène du travail, ils ne comptent, avec raison, que sur eux-mêmes pour défendre leurs intérêts corporatifs. Et c'est ainsi qu'après s'être fortement groupés en syndicats locaux, ils se sont unis en une puissante Fédération nationale et ont déjà jeté les bases d'une association faisant appel à la solidarité universelle dont le germe se trouve dans le Secrétariat typographique international. C'est ainsi que, malgré les conditions actuelles, très défavorables à l'aboutissement de leurs revendi- cations, bien que, ainsi que nous l'avons montré, le machinisme les menace de la facon la plus dange- reuse, bien que la concurrence de la femme à l'atelier soit de plus en plus âpre, ils ont pu, il y a près d'un an. obtenir la limitation de leur journée de travail à 9 heures, donnant par là à la classe ouvrière un exemple de ce que peut un groupement de volontés intelligentes, poursuivant par des voies pacifiques la défense de justes revendications. IV. — CONCLUSIONS. Cette rapide esquisse de l'histoire économique de l'imprimerie nous montre d'une manière frappante que l'extension du machinisme, en produisant comme toujours l'absorption de la petite industrie par la grande, compromet de plus en plus les con- ditions du travail. Ce fait général dure depuis plus d'un siècle et donne.un démenti éclatant à léco- nomie politique orthodoxe, qui prétendait que la libre concurrence réglerait la production au mieux des intérêts de tous. Le machinisme devait, disait- on, faire cesser l'exploitation de l'homme par l'homme; or, c'est lui qui a créé le prolétariat moderne. « Nous sommes les fils du cheval-vapeur », s'écriait récemment Jules Guesde au cours d’un important congrès; montrant, par une image très belle en mème temps que très juste, que le déve- loppement industriel est l'origine et la cause du mouvement social actuel. S84 Les travailleurs manuels ont-ils au moins vu s’al- léger leur labeur quotidien? Nullement, ainsi que le constate l'individualiste Stuart Mill lui-même’. Si la durée du travail a peut-être été, quelques rares fois, diminuée, l'intensité du labeur s'est accrue. Et l’'économiste anglais est forcé de reconnaître que « toutes les difficultés opposées au commu- nisme ne pèsent dans la balance qu'un grain de poussière, si l'on met dans l’autre plateau toutes les souffrances et les injustices qui attristent si cruellement la société actuelle ». Le but des machines n'est point de diminuer la fatigue du travailleur, comme le fait remarquer très justement Karl Marx, mais bien de diminuer le prix des marchandises. « Le moyen de travail, ajoute Marx, arrache à l'ouvrier les moyens d’exis- tence. » Mais alors ce serait donc seulement un beau rêve, un but inaccessible et chimérique que poursuivent ces savants géniaux qui, comme Papin, comme Faraday, comme Curie, découvrent et captent de nouvelles énergies naturelles, ces inventeurs ingé- nieux qui, comme Watt et comme Gramme, rendent industriel et pratique l'emploi de la vapeur et de l'électricité? Les efforts de cette élite seraient donc J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE infructueux, et, loin de procurer plus de bien-être et plus de loisir à l'humanité, toutes ces merveil= leuses découvertes n'aboutiraient fatalement qu'à asservir plus nombreux et plus misérables 1 ouvriers à une tâche ingrate? Ou bien faut-il ranger à l'avis de ceux qui estiment que cette con centration de plus en plus rapide, et d’ailleurs iné vitable, des moyens de production en un peti nombre de mains amènera fatalement un renverse ment de la société actuelle, qui, basée sur un indivi= dualisme sans contrepoids, ne peut améliorer l'or= ganisation industrielle dont elle souffre? Il paraît vraisemblable que, tant que l'individu ne restera conscient et jaloux que des seuls droits que lui con fère la propriété, et qu'il ne se pénétrera pas des devoirs que lui imposent envers la collectivité son savoir, son talent, son intelligence ou sa richesse, — toutes choses d'héritage à quelque titre d'ailleurs, — de plus en plus le malaise social s'accroitra, de plus en plus s'accentuera l'antagonisme entre les représentants graduellement raréfiés du Capital et le monde toujours en croissance du Travail. ra à Î è i Cr Albert Turpain, Professeur à la Faculté des Sciences de l'Université de Poitiers. REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE Pendant un certain nombre d'années, une revue annuelle de Géologie a été publiée dans ce re- cueil par M. Émile Haug, alors professeur-adjoint à la Faculté des Sciences de l'Université de Paris. Nommé professeur titulaire en 1904, et chargé de la chaire qu'ont occupée avec tant d'éclat Alexandre Brongniart, Constant Prévot, Edmond Hébert et Munier-Chalmas, M. Haug n’a plus trouvé les loisirs nécessaires à la rédaction de ce travail, et le direc- teur de la Æevue générale des Sciences à bien voulu nous désigner pour le remplacer. Bien que ne possédant ni l'esprit synthétique, ni la vaste érudition de l'éminent professeur de la Sorbonne, nous avons cru devoir répondre à l'invi- tation qui nous à été faite; nous tâcherons de ne pas trop faire regretter notre prédécesseur. Comme lui, nous ne résumerons que les études d'une cer- taine importance, ou celles qui marquent, pour ainsi dire, une étape dansle progrès de nos connais- sances. Nous nous efforcerons de les exposer avec le plus de clarté et de précision possibles, afin d'être compris, non seulement par les géologues, mais * Sruart Mizz: Principes d'économie politique, traduction Dussard et Courcelle-Seneuil, t. 11, p. 358. encore par ceux de nos lecteurs s'occupant de questions scientifiques d'un autre ordre. I. —— LES RÉCENTS PROGRÈS DES ÉTUDES SUR LES PHÉNOMÈNES VOLCANIQUES. Les études relatives aux phénomènes volcaniques ont fait, en ces dernières années, de remarquables progrès. Ceux-ci sont dus à M. Lacroix, pro- fesseur de Minérälogie au Muséum d'Histoire naturelle de Paris, qui a publié, en 1904, un magnifique ouvrage sur la Montagne Pelée et ses éruptions". En juillet 1907, le même auteur à livré à la publicité un Mémoire non moins inté- ressant, intitulé : Étude minéralogique des produits silicatés de l’éruption du Vésuve (avril 1906); consé- quences à en tirer à un point de vue général”. Bien que la plupart des faits nouveaux signalés par le savant professeur soient connus des lecteurs de cette /?evue, il nous à semblé utile d'y revenir, 1 A. Lacroix : La Montagne Pelée et ses éruptions. 1 vol. in-4°, de 662 pages, avec 238 fig. dans le texte et 30 planches en héliogravure. Paris, Masson et Cie, 1904. 2 Ce Mémoire constitue la première partie du t. IX (4° s.) des Nouvelles Archives du Museum (p.1 à 172, pl. I à X). - J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 885 afin d'en déduire quelques conclusions sur le vol- canisme en général, et sur les problèmes géologiques que ces études sont susceptibles d'éclairer. Ainsi que l'a fait remarquer judicieusement M. Boule, les observations faites à la Montagne Pelée « se- ront particulièrement utiles aux géologues francais ; car elles montrent dans son fonctionnement un volcan ressemblant, à beaucoup d'égards, à certains de nos volcans éteints” ». Les deux faits capitaux et caractéristiques des éruptions de la Montagne Pelée ont été la formation d'un dôme de roche acide, et les zuées ardentes, phénomène ayant détruit la ville de Saint-Pierre, l'un des plus impressionnants, nous dit le profes- seur du Muséum, auxquels il soit donné à l'homme d'assister. Le mécanisme de la formation de ce dôme a pu être suivi de près”. Le magma fondu, en arrivant au jour par une fissure dans l’ancien cra- tère (caldeira), y a formé un amas, qui fut rapide- ment entouré par une carapace solide et ainsi pro- tégé contre le refroidissement. Sous l'influence de la contraction et de la poussée interne, celte cara- pace se fissura, et par ses fentes sortirent de nou- velles quantités de matière fondue. « Ainsi s'accrul en hauteur et en largeur, conclut M. Lacroix, un amas rocheux continu, hérissé d'aspérités, limité par des parois abruptes qui se dressent au milieu de alimenté émiettement superficiel. » L'action des poussées talus d'éboulis, par un incessant internes, localisée ensuite en des points limités, donna lieu à l'extrusionde masses rocheuses solides, produisant une aiguille qui atteignit plusieurs cen- taines de mètres de hauteur. La production du dôme de la Montagne Pelée permet de comprendre la formation des dûmes trachytiques de l'Auvergne, où, d'après M. Michel- Lévy®, certains massifs de la chaine des Puys montrent deux parties différentes : une partie péri- phérique, pouvant être formée par des amas de blocs brisés et recimentés, et une partie centrale représentant le culot éruptif. Les pics aigus des phonolites, formant les points culminants du Mézene ou du Mégal, peuvent être considérés comme produits d'une facon analogue à celle de l'aiguille de la Montagne Pelée. Ils n'ont certainement jamais été noyés dans des roches préexistantes, et de tout temps ont dominé les champs de basalte environnants”. Pendant le séjour de M. Lacroix à la Martinique, le dôme lui est resté inaccessible. Il a pu cependant 1 M. Bouce : La Montagne Pelée etles volcans d'Auvergne. La Géographie. Bull. de la Soc. de Géographie, du 15 jan- vier 1905. 2 Voir, pour plus de détails sur l'édification du dôme, le nu- méro de la Æevue générale des Sciences du 15 avril 1905. 8 Bull. Soc. géol. France, 3° s.. t. XNIII, p. 719. # M. Boue : Loc. cit. | | établir un lien de cause à effet entre les phénomènes se produisant dans ce dôme et quelques particula- rités minéralogiques des roches le constituant. Celles-ci sont des andésites à hypersthène, pro- duites sous trois variétés différentes, dont, suivant le cas, la pâte est constituée uniquement par du verre (obsidiennique ou ponceux) ne contenant que quelques cristallites, ou renfermant des microlites feldspathiques, avec ou sans cristaux de quartz. Le savant minéralogiste avait formulé quelques hypothèses sur la structure intime du dôme. Après son refroidissement, avait-il écrit, « il sera con- stitué par un culot d'andésite à pâte quartzifère, plus ou moins microgrenue, entouré d'une enve- loppe d'andésite non quartzifère avec prédominance du type microlitique riche en trydimite. Gette enveloppe sera traversée par des veines d'andésite plus ou moins vitreuse, produites par la consolida- tion des apports que nous avons observés si sou- vent grâce à leur incandescence” ». L'étude de matériaux recueillis récemment par M. Guinoiseau”, qui dirige l'Observatoire du Morne des Cadets, a permis la vérification des hypothèses : Les roches de la base, appartenant à la carapace primi- émises et fourni les conclusions suivantes tive, ne contiennent pas de quartz, tandis que l’an- désite des rochers du sommet, riches en tridymite, appartient au type quartzifère. Quant au décapage du culot central, il s'est bien produit suivant les prévisions de M. Lacroix; mais il s'est effectué avec une intensité et une rapidité qu'on était loin de supposer. Il a été intéressant de constater que la cristallisa- tion d'une roche à pâle riche en quartz peut se produire, sinon à l'air libre, du moins à une faible distance de celui-ci. Cette production du quartz — observée pour la première fois au cours d’une érup- tion volcanique — à été un phénomène continu, s'accentuant de l'extérieur à l'intérieur. La cristal- lisation du quartz dans un magma éruptif n'exige done pas une grande profondeur ; les conditions de pression nécessaires à la vapeur d'eau, pour jouer son rôle de minéralisateur, peuvent se réaliser près de la surface. Un autre trait caractéristique de l’éruption, avons- nous dit, a été la production de nuées ardentes (nuées péléennes), qui ont été l'agent destructeur. On peut les considérer comme le résultat d'une explosion, déterminant une rupture dans les parois solides du dôme et l'entrainement d'une quantité de matériaux brisés ou concassés, non pas toujours dans la direction verticale, mais, le plus souvent, DEL D Re LE LL 0 4 ESF MR Essen 1 La Montagne Pelée et ses éruptions, 190%, p. 155. 2 A. Lacroix : Sur la constitution minéralogique du dôme récent de la Montagne Pelée (CG. AR. A.S., t. CXIV, p. 169, 2$ janvier 1907). 886 J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE sur les pentes de la montagne. « Elles sont consti- tuées, dit M. Lacroix, par un mélange intime, une sorte d'émulsion de matériaux solides en suspen- sion dans de la vapeur d'eau et dans des gaz portés les uns et les autres à une haute température. » Sur des surfaces limitées ont été accumulés de nombreux matériaux solides. Leur refroidissement a déterminé des phénomènes secondaires variés, ayant une grande importance théorique. C'est ainsi qu'ont pris naissance des fumerolles sans racines, fournissant la preuve que les produits volatils des émanations volcaniques, dans certains cas, ont fait partie du magma lui-même.— Enfin, les conditions climatériques spéciales des pays tropicaux, agissant sur des amas épais de cendres meubles, ont occa- sionné l’évolution rapide des phénomènes d'érosion qui, dans nos régions à climat tempéré, sont à l'œuvre depuis un grand nombre d'années, et, par suite, ne peuvent être élucidés que dans un petit nombre de leurs stades successifs. L'éruption du Vésuve d'avril 1906 a également été observée avec soin par M. Lacroix. Il s'est pro- posé, nous dit-il, « d'étudier non seulement toutes les manifeslalions volcaniques dépendant de la Physique terrestre, mais encore la Minéralogie de l'éruption dans ses détails les plus minimes, en cherchant, dans la mesure du possible, à rattacher ceux-ci à quelques-uns des phénomènes observés ». Une question importante qu'il s'est donné pour mission de développer — et sur laquelle il a été le premier à faire la lumière — est celle concernant les phénomènes mélamorphiques qu'ontsubis, sous l'influence d'agents minéralisateurs, un grand nom- bre de blocs rejetés par les explosions. Les résultats obtenus éclairent d'un jour nouveau le mécanisme de la production de certaines roches profondes. La lave de l'éruplion récente‘ est constituée par une leucittéphrite (= leucotéphrite des pétrogra- phes français), dans laquelle on ne distingue à l'œil au qu'un pelit nombre de phénocristaux de leucite, d'augite, et, de loin en loin, de biotite. Cette lave a été étudiée à deux points de vue: 1° recherche des variations possibles de composi- tion chimique au cours de l'éruption ; 2° étude des variations de la cristallisation de la lave au cours de l'éruption. Sur le premier point, les analyses montrent une constance dans la composition du magma du commencement à la fin du paroxysme. Sur le second, les conclusions à tirer au sujet de la 1 Voir, pour tout ce qui concerne l'éruption de 1906 (épan- chements de laves, phénomènes explosifs, avalanches sèches, phénomènes électriques, fumerolles, torrents boueux, mofettes), les articles de M. Lacroix publiés dans les numéros de la Revue gén. des Sciences du 30 octobre et du 15 novembre 1906. ; cristallisation de la leucite sont les suivantes : L cristaux visibles à l'œil nu sont d'origine intras tellurique, et, vraisemblablement, de cristallisatio peu profonde; par contre, la phase microlithiqu commence à peine dans la cheminée ; elle se pr duit au cours de l'épanchement et d’une facon trè brusque. Les Zapilli projetés sur Ottajano ont, pour le plu grand nombre, une composition minéralogiqu assez différente de celle de la lave récente. Ils ont été arrachés à la Somma. — Ce que 1 explosions vulcaniennes‘ ont apporté au jour, nou dit M. Lacroix, ce n'est pas simplement l'inventaire des matériaux constituant le cône, c'est celui du massif volcanique tout entier ; ils fournissent la preuve qu'elles en ont entamé le socle. Les cendres sont de nature diverse. Celles qui sont grossières et ont saupoudré Naples étaient noiratres. et constituées par du magma neuf. A partir du paroxysme duS8 avril, les poussières fines résultaient de la trituration de produits variés pro- venant de l'évidement de la caldeira récente. Parmi les blocs rejetés par les explosions, un grand nombre avaient subi des modifications plus où moins profondes, différentes de celles produites par une refusion partielle, modifications se mani- festant extérieurement par l'existence de beaux minéraux drusiques, et dues à des minéralisateurs (agents pneumatolytiques). Des phénomènes de cet ordre ont pu résulter de l’action, sur la roche con- solidée, de fumerolles restées en relation avec la profondeur. Ces actions pneumatolytiques ont pu s'exercer, non seulement sur le magma neuf, mais sur des roches de nature quelconque et y déterminer des phénomènes de contact exomorphes. M. Lacroix a longuement étudié les modifications rentrant dans cette catégorie ; il a passé en revue des phénomènes du même ordre constatés dans des laves anciennes, afin d'arriver à l'intelligence des documents récents. Développer ici toutes les considérations émises par le savant professeur du Muséum nous entrai- nerait un peu loin; il nous suffira de citer les prin- cipales conclusions découlant de ses études : Le massif Somma-Vésuve, nous dit-il, est loin de l'uni- formité que lui a attribuée, dans un travail récent, M. Washington‘. L'ensemble des matériaux du volcan comprend non seulement des leucittéphrites basiques, mais encore des roches sans leucite, des trachytes micacés, des trachytes phonoliliques, de véritables phonolites, des monzonites, des micro- — 1 M. Mercalli appelle explosions vulcaniennes celles ne lançant que des matériaux déjà consolidés. Revue gén. des Sce., loc. cit. { ? The Roman comagmatic region, 1906. J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 887 syénites sodalitiques à idocrase, des phonolites leucitiques, des sommaïtes, des microsyénites, des sanidites à leucite, des leucittéphrites différen- tes des types basiques, et enfin des leucitites provenant de la transformation de quelques-unes des roches précédentes. Ces roches sont caractérisées par leur richesse en potasse, généralement prédominante sur la soude ; elles sont dopotassiques ou sodipotassiques, à l'ex- ception de la phonolite et de la sanidite qui sont dosodiques. Des roches de couleur claire s'observent à la . Somma et présentent un air de famille commun caractérisé par la constance des feldspathoïdes. Des leucittéphrites basiques s’y observent également, offrant une grande ressemblance minéralogique avec celles du Vésuve. On à de nombreuses preuves de l'instabilité de la leucite en présence des émanations du magma, et M. Lacroix a décrit toute une série de types variés de pseudomorphoses de ce minéral. Celui-ci se forme avec la plus grande facilité par voie de fusion purement ignée dans un magma en voie d'épan- chement; mais il semble qu'il ne puisse cristalliser en grande profondeur, là où les minéralisateurs agissent sous pression. Dans de pareilles conditions, le magma ne laisse cristalliser que certaines asso- ciations minérales, particulièrement celles de l'or- those, de l'olivine et de la biotite, constituant des roches spéciales, les sommaites. C'est en 1893 que le professeur du Muséum rencontrait dans les tufs de la Somma des enclaves de monzoniles à olivine et qu'il émettait l'hypothèse qu'elles constituent les formes de profondeur des leucittéphrites qui les accompagnent,Ces premières vues furentconfirmées par l'analyse de ces roches, qu'il appela sommaites. Elles constituent un type pétrographique’ spécial, dans lequel la teneur de la leucite est variable et liée à celle de l’olivine. Ces roches n'ont pas été rencontrées en place; leur abondance ne permet pas d'admettre qu'elles proviennent de quelque gisement isolé, mais indique qu'elles ont été arra- chées en profondeur. En résumé, la considération des matériaux cons- tituant le massif du Vésuve-Somma montre que ce massif à une composilion chimique et minéralo- gique complexe, mais que toutes ces roches offrent entre elles une étroite parenté. Ce sont les maté- riaux rejetés par les grandes explosions qui nous apportent quelques lumières sur la composition pétrographique des racines profondes. Le massif de la Somma, s'il était décapé et débarrassé de ses roches superficielles, ressemblerait à celui du Mon- tana central. Les observations que nous venons d'exposer et les généralisations auxquelles elles ont donné lieu ont un intérêt de premier ordre; elles font honneur à la Science francaise, dont M. A. Lacroix est un des plus illustres représentants. IT. — DÉCOUVERTE DE LA HOUILLE EN MEURTHE-ET-MOSELLE. Le 19 mars 1905, à la suite de sondages effectués par la Société des Hauts-fourneaux et Fonderies de Pont-à-Mousson, une couche de houille de 70 cen- limètres d'épaisseur était découverte sur le ter- riloire de cette ville. Cette découverte fut com- muniquée à l’Académie des Sciences de Paris, le 27 mars de la même année, par M. C. Cavallier, directeur de cette Société". Elle avait été prévue grâce aux études géologiques effectuées soit par M. Nicklès, soit par MM. Marcel Bertrand et Ber- geron. Le premier de ces auteurs avait indiqué, comme région la plus favorable, celle où fut ins- tallé plus tard le sondage d'Eply; quant aux deux derniers, leurs recherches les avaient amenés à conclure que la ligne d'épaisseur minimum des morts terrains passe probablement à Cheminot- Lesménils, et que le terrain houiller affecte en Lorraine la forme de dômes. Comme complément à la Note de M. Cavallier, M. Nicklès” donnait à l'Académie quelques détails sur deux sondages effectués à Eply et à Lesménils par « les Sociétés lorraines de Charbonnages réu- nies ». Le sondage d'Eply avait atteint le terrain houiller à la profondeur de 659 mètres, celui de Lesménils l'avait rencontré à 776 mètres, et celui de Pont-à-Mousson avait trouvé du Houiller rubéfié à 789 mètres, du Houiller de facies normal à 805 mè- tres et une couche de houille à 819 mètres, Les caractères lithologiques des échantillons récoltés rappellent ceux du Westphalien de Sarrebrück. Dans la même séance de l'Académie, M. B. Zeiller* fournissait quelques données sur les plantes houil- lères recueillies dans ces sondages, plantes carac- térisant une flore westphalienne. Au nombre des espèces rencontrées, d'eux d'entreelles, le Zonchoÿ- teris Defrancei et le Cingularia typica, attestent qu'on à bien affaire à un prolongement du bassin houiller de la Sarre. Le 3 juillet de la même année, M. Nicklès‘ annon- cait encore la découverte d'une couche de houille de 2%,65 à Abaucourt, près Nomeny. Le toit de la 1 C. CavaLLiIER : Sur la découverte de la houille en Meur- the-et-Moselle (C. R. Ac. Sc, t. CXL, p. 837). ? R. NickLës : Sur les recherches de houille en Meurthe- et-Moselle. Zd., p. 896. $ R. Zeirer : Sur les plantes houillères des sondages d'Eply, Lesménils et Pont-à-Mousson (C. A. Ac. Sc., t. CXL, . 837). E #R. NicxLës : Sur la découverte de la houille à Abau- court (Meurthe-et-Moselle). C. R. A. S., &, CXLII, 66. 888 J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE couche, disait-il, est à 896 mètres de profondeur, au-dessous de l’orifice du sondage. M. Zeiller ajou- tait qu'on avait affaire dans cette localité à des espèces stéphaniennes. Toutes ces données ont élé confirmées par les recherches récentes de ce dernier savant, qui, le 97 mai 1907, présentait à l'Académie une nouvelle Note’. Dans celle-ci, il annonçait avoir étudié 10.000 échantillons, parmi lesquels il avait reconnu 145 espèces, dont quelques-unes nouvelles. Les sondages d'où proviennent ces espèces sont au nombre de 9 : Pont-à-Mousson, Eply, Lesménils, Atton, Dombasle, Jezainville, Bois-Greney, Martin- court, Abaucourt,. Les couches traversées à Abaucourt, ainsi qu'il l'avait déjà dit, se révèlent comme appartenant au Stéphanien, landis que les huit autres sondages se classent dans le Westphalien, mais à des niveaux différents. Les sondages de Dombasle, Bois-Greney et Jezain- ville appartiennent à la zone des « Flambants supé- rieurs », le sondage de Dombasle paraissant être des trois celui qui correspond au niveau le plus élevé. Celui de Jezainville semble avoir traversé des couches un peu plus anciennes que celui de Bois- Greney. Le sondage de Martincourtse rapproche des trois précédents et, plus spécialement, peut être paral- lélisé aux couches de Jezainville. La partie supérieure du sondage de Lesménils semble devoir être rangée dans l'étage des « Flam- bants inférieurs », tandis que la partie inférieure serait au-dessous des limites de cet étage. Quant aux trois sondages de Pont-à-Mousson, Atton et Eply, ils appartiendraient à l'étage des « Charbons gras ». Ces attributions confirment celles de MM. R. Nicklès et I. Joly” qui, dans une Note précédente, avaient avancé que leurs études les avaient amenés à considérer les couches houillères d'Eply comme plus anciennes que celles d'Atton et de Pont-à- Mousson, que celles de Lesménils étaient plus récentes que ces dernières el plus anciennes que celles de Dombasle. Ces auteurs ont pu établir l'exis- tence de dûmes dans les terrains secondaires de la Lorraine francaise et l'existence de failles orientées du Nord-Est au Sud-Ouest. la surélévalion des terrains primaires, el par suite du Houiller, hypothèse formulée, dès 1901, par le regretté Marcel Bertrand et qui recoit ainsi une Ils en avaient conclu à éclatante confirmation. 1 R. ZeiLcer : Sur la flore el les niveaux relatifs des son- dages houillers de Meurthe-et-Moselle (C. A. Ac. des Se., t. CXLIV, p. 1137, 1907). ? R. Nicecës et H. Jozx: Sur la tectonique du nord de Meurthe-et-Moselle (C. R+ Ac. Se., t. CXIV, p. 586, 11 mars 1907). I IT. — PARTIE MOYENNE DES TERRAINS CRÉTALÉ DANS. LES ALPES FRANÇAISES ET LES RÉGIONS VOISINES. Les publications de MM. Léenhard sur le Ven- toux, W. Kilian sur la montagne de Lure, Hau sur les chaînes subalpines entre Gap et Digne, Pâ- quier sur le Diois etles Baronnies, ont fait connaître la stratigraphie du Crétacé inférieur du Sud-Est de la France. Les recherches de M. G. Fallot ont eu pour objet celle du Crétacé supérieur. La parti moyenne de cette mème formation avait été négligée, et sa division en zones paléontologiques restait & établir. C'est cette lacune que vient de combler une Monographie publiée par M. Ch. Jacob, de l'Uni versité de Grenoble, sous le titre d'£tudes paléon- tologiques et stratigraphiques sur la partie moyenne des terrains crétacés dans les Alpes françaises et les régions voisines". La première partie de ce Mémoire est consacrée à des listes paléontologiques des divers gisements et à une étude phylogénique des Ammonites du Cré-= tacé moyen. De cetteétude se dégagent quelques conclusions d'un vif intérêt, ayant trait, les unes* aux formes lisses (Phylloceras, Lytoceras, Desmo- ceras), les autres aux formes ornées (Hoplites, Schlænbachia, Acanthoceras, etc.). Pour les pre- mières, il convient de noter leur peu de valeur stra- tigraphique et leur persistance dans l'ensemble des Alpes françaises et suisses. Le Crétacé moyen du Sud-Est fournit un intermédiaire précieux entre la faune du Néocomien de la même région et celle du Crétacé supérieur de la Province pacifique. Quant aux formes ornées, elles constituent des ensembles fauniques permettant de caractériser les divers horizons. Celles du Crétacé moyen semblent dériver d'un type Parahoplites néocomien, à rechercher au voisinage du Parahoplites angulicostatus d'Orb. La deuxième partie est consacrée à la révision : de la stratigraphie détaillée du Mésocrétacé, dans le“ Sud-Est de la France et les régions voisines. Chaque chapitre à trait à une partie spéciale des Alpes. Dans chacun d'eux sont exposées quelques données tectoniques, puis un certain nombre de coupes per- mettant de synchroniser les divers horizons. Un appendice est consacré à l'étude micrographique de quelques roches provenant des niveaux étudiés: L'ouvrage se termine par un résumé stratigra= phique, dont il nous semble utile d'exposer les principaux résultats. L'Aptien inférieur (sous-étage bedoulien) forme la limite inférieure des terrains étudiés par M. Ch. Jacob. Au-dessus d'eux, l'Aptien supérieur (sous= Era RAP 1 Annales de l'Université de t. XIX, 1907, p. 221-534. Grenoble, 2e trim. _& J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 889 étage gargasien) peut, d'après notre confrère, se subdiviser en deux niveaux : 1° sous-zone à Oppelia … nisus et Hoplites furcaltus; 2 sous-zone à Douvil- “leiceras subnodocostatum, D. Buxtorf et Belem- - nites semicanaliculatus. Ces deux niveaux ont la - même extension. Dans la partie profonde du géo- synclinal dauphinois, — appelée fosse vocontienne par M. Pâquier, — qui s'étend sur l'emplacement des hautes vallées de la Tinée, du Var, du Verdon, des environs de Digne, de Sisteron, du Buis, de Nyons, de Rosans et de Veynes, le Gargasien n'est constitué que par des marnes à fossiles pyrileux. Sur la bordure, les deux niveaux se différencient nettement : la base en est marneuse, le plus sou- vent transgressive sur le substratum, tandis que le . niveau supérieur est à l’état de marnes sableuses et glauconieuses. Au nord du Diois, ce sous-étage est représenté par les couches de Saint-Martin-en- Vercors, du Rimay, du Ravix et d'Autrans. Des mouvements orogéniques se sont produits entre le Gargasien et une zone qui luiest supérieure, le niveau de Clansayes (zone à Douvilleiceras nodo- costatum et D. Bigouretti). Dans la fosse vocon- tienne, les fossiles du niveau de Clansayes se ren- contrent aux environs de Vese (Drôme) et d'Eygalais (Basses-Alpes), sous forme de moules où d'em- preintes à la surface des bancs marneux. Sur les hauts fonds des montagnes du Vercors et de la Chartreuse se sont déposés, à cette époque, des calcaires quartzeux à Entroques et Bryozoaires, qui ont été appelés par Ch. Lory Calcaires lumachelles et qui se suivent jusqu au nord de Chambéry (Révil et Savin). Dans la fosse vocontienne, la zone succédant à celle de Clansayes (zone à Zoplites lardelurcatüs) est représentée par des marnes schisteuses fossili- fères sous forme d'empreintes au Dresq, près de Saint-Julien-en-Bôchaine (Hautes-Alpes) et d'Arnayon (Drôme). Cette zone marque un mouve- ment positif des eaux marines dans les régions méridionales du géosynelinal. Sur les hauts-pla- teaux du Vercors et de la Chartreuse, un cordon discontinu grèso-phosphaté témoigne d'une oceu- pation nérilique. A la zone à oplites tardefurcatus succède celle à Hoplites dentatus, à la limite de laquelle se pro- duisent de nouveaux mouvements. Elle a laissé des témoins sous forme de grès roux glauconieux à fossiles phosphatés, à la Balme-de-Rencurel et à Fontaine. Par contre, elle est moins nette en Savoie et en Suisse. Les deux sous-zones suivantes, ou sous-zones à Mortoniceras Hugardianum et sous-zone à Worto- niceras inflatum, se distinguent surtout par leur faune. La faune de la première existe à la Perte- du-Rhône et dans les régions voisines, tandis que près REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 19017, celle de la seconde se trouve dans tout le géosyn- clinal dauphinois et à Sainte-Croix dans le Jura. On n'a aucun indice d'occupation marine des mon- tagnes de la Chartreuse, à cette époque. Il semble qu'elles devaient être émergées. Quant aux Alpes de Savoie, il y règne un facies foncé riche en glau- conie. De nouveaux mouvements orogéniques se consta- tent avant la zone suivante à Acanthoceras roto- magense. La partie profonde du géosynelinal s’est déplacée et s'étend en écharpe à travers le Sud- Est. Les formes fossiles méditerranéennes ont dis- paru du géosynelinal, et la faune à Ammonites ornées du type parisien commence à se montrer pour se continuer dans les étages suivants. Au Nord, la région du Vercors (La Fauge) a conservé un témoin gréseux de la zone à Schloen- bachia varians, succédant à celle à Acanthoceras rotomagense. On en perd la trace dans les Alpes de Savoie, pour la retrouver en Suisse dans la région de Morcles (Pas de Cheville), où elle forme la base du crélacé supérieur (Seewerkalk). A quelles zones, se demande M. Jacob, correspond l'étage albien? C'est par le niveau de Clansayes, répond-il, que nous le ferons commencer, tandis que la sous-zone à Douvilleiceras subnodocostatum et 1). Buxtorli terminera le Gargasien. Quant à la partie supérieure de l'Albien, elle correspondra à la zone à Mortoniceras inflatum, tandis que celle à Acanthoceras rotomagense sera placée dans le Cé- nomanien. Faisons remarquer, en terminant, que cette faune de Clansayes à une extension beaucoup plus grande qu'on ne le soupconnait. MM. W. Ki- lan et L, Gentil Pont retrouvée en Afrique avec les mêmes caractères et au même niveau ‘. IV. — LES ÉPOQUES GLACIAIRES DANS LA CHAINE DES ALPES. MM. Penck et Brückner ont commencé en 1901 la publicalion d'une importante élude consacrée aux « Alpes à l'époque glaciaire? », étude qui a paru par livraisons successives el n'est pas encore complètement terminée. Ces deux auteurs, avec la collaboration d'un jeune savant prématurément enlevé à la science, Léon Dupasquier*, ont été les premiers à mettre en évidence la liaison des terrasses d’alluvions avec les moraines des anciens 4 W. Kizran et L. GEenriz: Découverte de deux horizons du Crétacé au Maroc (C. R. A. 8., t. CXLII, p. 603, 5 mai 1906.) ? A. Pexcx et En. Brückner : Die Alpen in Eïiszeitalter, Lief. 1, 1, LI, IV, V, VI, VIT und VIIL. Tauchnitz, éditeur, Leipzig. 1901-1905. % A. Pexck, En. Brückner, L. Dupasquier: Le système gla- ciaire des Alpes. Bull. Soc. Sc. nat, Neufchatel, {. XXI, avril 1897. 21** 890 J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE glaciers. Les cailloutis (Schotter) constituant ces alluvions — qu'ils appellent dépôts fluvio-qla- ciaires — ont été formés par des cours d'eau qu'alimentaient des glaciers, dont les moraines occupaient la région frontale. En effet, les terrasses alluviales aboutissent à l’amont à un rempart mo- rainique, au delà duquel une dépression, appelée dépression centrale où cuvette terminale (Zun- genbecken), marque l'emplacement d'un glacier au- jourd'hui disparu. Les cailloutis se répartissent en deux séries dis- tinctes : les plus anciens occupent des plateaux sur lesquels ils s'étendent en nappes ou lambeaux de nappes, tandis que les plus récents sont localisés dans les vallées actuelles, formant à diverses hau- teurs des terrasses très nettes. Les cailloutis de nappes ou Deckenschotter sont au nombre de deux : le Deckenschotter supérieur ou des hautsplateaux et le Deckenschotter inférieur ou des bas plateaux. Quant aux cailloutis des terrasses, ils se subdivisent aussi en alluvions des hautes terrasses (Hochterrassenschotter) et alluvions des basses terrasses (Miederterrassenschotter). Chacun de ces systèmes est, en quelque sorte, emboîïté dans le précédent, dont il est séparé par les traces d'une période de ereusement des vallées. Il correspond à une phase distincte d'extension glaciaire, à une glaciation pendant laquelle les glaciers ont sta- tionné en des points que nous indiquent la dépres- sion centrale, les moraines abandonnées par eux, et les couches d'alluvions qui leur sont subordon- nées. Quatre glaciations successives ont élé ainsi reconnues : la plus ancienne a été appelée Glacia- tion de Günz, du nom d'un affluent du Rhin, entre Ulm et Augsbourg. Elle correspond au Decken- schotter supérieur. La deuxième a été appelée Gla- cialion de Mindel, — du nom d'un affluent arrivant au Rhin, en aval de Gunz, — correspondant au Deckenschotter inférieur. La troisième, dite GJa- cialion de liiss, du nom d'un affluent de l'Isar, est en relation avec les hautes terrasses. Enfin, la plus récente, dite Glaciation de Wurm, en relation avec les basses terrasses, est désignée d'après une rivière de ce nom située dans la plaine de Munich. Cette dernière correspond à ce qui a été appelé autrefois moraines internes, tandis que celle de Riss correspond aux moraines exlernes. De plus, chaque glaciation a comporté des oscil- lations de moindre amplitude, que MM. Penck et Brückner ont reconstituées pour la plus récente des quatre, et qu'ils ont appelées «stade de Bühl », « stade de Gschnitz » et « stade de Daun ». Entre le stade de Bühl et le Wurm se place l'oscillation d'Achen. Les divers phénomènes semblent s'être présentés d'une facon analogue dans les Alpes autrichiennes et bavaroises, en Suisse, ainsi que dans les Alpes francaises et italiennes. Dans tous les massifs, las glaciation de Wurm ne s'est pas étendue aussi loin que celle de Riss, qui est celle ayant présenté la plus grande extension. Quant à la glaciation de Günz, elle aurait eu la même extension que celle de Wurm. Notons ici que le Deckenschotter a une grande. extension en avant des Alpes, et qu'il repose sur une pénéplaine de dénudation. À l'époque prégla- ciaire, les Alpes devaient avoir un relief moins accusé qu'actuellement, avec des vallées moins pro- fondes et des crètes moins élevées. Les formations glaciaires du versant nord des Alpes orientales, dans les bassins de l'Iller, de la Lech, de l'Inn, de la Salzach et de l'Enns, ont été magistralement décrites par M. Penck. Il a retrouvé dans les deux premiers bassins les systèmes de dépôts fluvio-glaciaires énumérés ci-dessus, avec cette exception que le Deckenschotter supérieur ne parait plus exister dans la région de Munich. Dans le bassin de l'Inn, les troncons principaux des vallées ont subi, depuis les temps préglaciaires, un « surcreusement » considérable. Ce travail d'af- fouillement aurait dépendu de l'épaisseur de la glace; il serait la cause de la disposition étagée des vallées latérales, relativement aux vallées prin- « cipales. Le versant septentrional des Alpes occidentales a été étudié avec soin par M. Brückner. Une remarque intéressante faite par cet auteur est que la présence du Jura, en avant de la plaine suisse, a empêché les glaciers de s'écouler normalement vers l'avant-pays et les a obligés à se confondre en partie. D'après ce géologue, le long du Rhin, en aval de Schaffhouse, on a quatre niveaux d’alluvions bien reconnaissables et disposés de la facon suivante : Basses-terrasses à 30 mètres au-dessus du fleuve, Hautes-terrasses à 20 mètres au-dessus des précédentes, puis les deux niveaux du Deckenschotter, dont le plus ancien est à 120 mètres au-dessus de la rivière. Le Decken- schotter ancien parait avoir subi des dislocations tectoniques, tandis que le Deckenschotter récent couronne les crêtes depuis la région de SchafFhouse et Eglisau jusqu'au lac de Constance. Autour de la dépression de ce lac et dans l'intérieur des moraines de Wurm se développe un second système de mo- raines frontales, formant comme un cirque lobé. De Brüg à Bâle, se retrouvent également les quatre sys- tèmes d’alluvions, les écarts verticaux qui les sé- parent diminuant de l'amont vers l'aval. Faisons remarquer que le degré de décomposition des maté- riaux dépend de l'ancienneté, etqu'à ce point de vue il y a un contraste frappant entre le Deckenschott inférieur et la Haute-Terrasse. Dans le bassin de Genève, les alluvions présentent bu LE J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 891 un développement remarquable. Elles ont été dé- posées pendant les oscillations de la dernière gla- ciation. Près de Thonon (Haute-Savoie), elles -S'adossent à un conglomérat plus ancien : celui de -la Dranse. Presque uniquement formé d'éléments d'origine chablaisienne, ce conglomérat — dont les bancs inférieurs présentent une stralification en delta — appartient à la période interglaciaire Riss- Wurm. Pour M. Brückner, les lacs de Genève, Neuchâtel, Bienne, Morat, doivent être considérés comme de véritables bassins glaciaires, creusés dans la molasse avant la fin de la glaciation wurmienne. Toutefois, pour le lac de Genève, ce fait n'exclurait pas l'exis- tence d'un lac avant le wurmien, lac dont l'existence parait prouvée par le conglomérat de la Dranse cité ci-dessus. En aval de Genève, les glaces de la vallée du Rhône formaient avec celles de l'Arve et de l'Isère un ensemble qui à été étudié par M. Penck,et quil oppose, sous le nom de « glacier rhodanien », Çau glacier helvétique ! ». Son régime est complexe, car il recevait des Alpes un véritable réseau de glaciers tributaires. Toutes les vallées alpines delphino- savoisiennes ont été envahies, et les glaces s'éten- daient depuis Martigny, dans le Valais, jusqu'au coude de l'Isère, près de Grenoble. D'autre part, les pays préalpins furent comblés-par des alluvions qui, dans les environs de Lyon, peuvent s'éludier dans trois régions naturelles : Balmes viennoises, Dombes, Plateau lyonnais. Les alluvions du Bas- Dauphiné (terrasses de Villeurbanne) sont du niveau des Basses-Terrasses, tandis que celles des collines de Feyzin, Saint-Priest, Décines et Jons appartiennent aux Hautes-Terrasses. Au Decken- schotter se rapportent, dans les Dombes, les allu- vions des Plateaux, tandis que les cailloutis de quartzites du Plateau lyonnais sont du Pliocène supérieur. Dans cette région, la ligne de moraines frontales de la glaciation rissienne (moraines externes) se suit par Vinay sur l'Isère, Beaurepaire, Vienne, Lyon et Bourg, tandis que celle de la glaciation wurmienne (moraines internes) se développe par Vinay, Loi de Paladru, Saint-Quentin, Jons et Ambérieu. Une constatation importante a été faite par M. Penck : c'est la présence du /æss sur les moraines de Riss et son absence sur celles de Wurm. Les dernières livraisons — qui ne le cèdent pas en intérêt aux précédentes — sont consacrées aux ! Le chapitre où est étudié par M. Penck la partie fran- çaise du glacier du Rhône et le glacier de l'Isère a été tra- duit par M. Louis Schaudel, receveur principal des douanes à Chambéry. Cette lraduelion à paru à la fois dans le Bull. d'hist. nat. de la Savoie, les Annales de l'Université de Grenoble et le Bull. de la Sociélé de Statistique de l'Isère. formations glaciaires des Alpés méridionales, ainsi qu'aux dépôts morainiques des bassins du P6, du Tessin, de la vallée de l'Adda et des environs de Lugano. L'analyse de ces publications dépasserait les limites de cet article; nous nous contenterons de renvoyer nos confrères au Mémoire original. Le travail que nous venons de résumer est une œuvre de tout premier ordre. Il place les auteurs au premier rang des glaciairistes. La réalité d'une série de glaciations séparées par des phases interglaciaires ne peut plus être contestée au- jourd'hui. Toutefois, on est en droit de se demander, avec M. Kilian', si le role attribué aux eaux cou- rantes dans le creusement des vallées n’a pas été un peu méconnu. Des phénomènes se sont certai- nement produits de l'aval vers l'amont, occasionnés par les oscillations du niveau de base, oscillations récemment mises en évidence par les beaux travaux de M. de Lamothe. Le creusement peut n'être pas dû à la même cause que le remblaiement : le pre- mier pouvant, dans de nombreux cas, être occa- sionné par les oscillations du niveau de la mer, le second étant produit par des apports d'origine gla- ciaire. Il y a donc à tenir compte de divers facteurs, dont la part exacte ne sera pas toujours facile à établir. V. — TECTONIQUE DU MASSIF DU SIMPLON. La tectonique du massif du Simplon a pu être élucidée récemment, grâce au percement du tunnel. M. Hans Schardt*, professeur à l'Académie de Neu- châtel, qui a suivi les travaux, est arrivé à en pré- ciser les données, lesquelles se sont trouvées assez différentes de ce qui avait été prévu par divers auteurs. Par contre, elles apportent une confirma- lion éclatante aux vues nouvelles qui se sont fait jour, en ces dernières années, relativement à lori- gine des Alpes et que nous avons exposées aux lec- teurs de cette Aevue. Le massif, envisagé comme le type d'un massif en dôme, est en réalité formé de plis couchés de gneiss, ayant leur charnière anticlinale enfoncée dans des terrains plus récents. Ces terrains con- sistent en schistes calcaires, en schistes micacés gris, souvent grenatifères, d'âge jurassique (schistes lustrés), ainsi qu'en calcaires dolomitiques, gypses, anhydrites, quartzites appartenant au Trias. Sur le flanc sud-est du Monte-Léone, les calcaires dessinent un lacet ayant l'aspect d’un anticlinal, avec charnière tournée vers le Sud. L'intérieur en est 1! W. Kicran: L'érosion glaciaire et la formation des ter- rasses. La Géographie, 15 novembre 1906. ? H. Sonanpr: Note sur le profil géologique et la tecto- nique du massif du Simplon. Zclogæ geol. Helv., vol VII, p. 173-200, 1906. 892 J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE occupé par des schistes calcaires, des micaschistes grenatifères et des schistes verts. La branche inférieure de ce long pli couché repose sur des gneiss, et la branche supérieure en est également surmontée. Ce n'est donc pas un anticlinal, mais un synclinal. Cette répétition de bancs calcaires associés à des schistes également calcaires, au milieu de masses gneissiques, permet de conclure que l’on a affaire à des synclinaux séparant des anticlinaux culbutés de gneiss, ayant leur charnière anticlinale enfoncée vers le Nord. Le massif ne comprend pas moins de cinq anticlinaux de gneiss, en superposition. Le profil établi par M. Schardt, suivant l'axe du tunnel, lui a permis de reconnaitre les zones sui- vantes : 4° Schistes lustrés formant une série de replis très aigus, indiqués par des intercalations tria- siques ; 2° Trias consistant en roches dolomitiques et gypsifères avec intercalations de roches micacées, de teinte grise, et d'une roche gneissique paraissant être un grès mélamorphique ; 3° Gneiss de la Ganter ; 4 Calcaires dolomitiques avec schistes calcaires grenus, et calcaires plaquetés gris. (Cette zone forme le noyau du synclinal du Monte-Léone ; elle n'a, au niveau du tunnel, qu'une épaisseur insigni- fiante) ; 5° Schistes cristallins et gneiss schisteux com- posant la zone du Wasenhorn et du socle du Monte- Léone. Dans cette zone existent des pointements de couches jurassiques ou triasiques, sous-jacentes à la masse gneissique. (C'est là un argument puis- sant, servant à démontrer la superposition des gneiss du Monte-Léone à des sédiments secon- daires) ; 6° Bande calcaire du Lago d'Avino (il faut noter qu'à partir de ce point, le profil au niveau du tunnel traverse des terrains différents de ceux de la surface) ; T° Gneiïss et schistes cristallins du Lago d'Avino ; 8° Calcaires et micaschistes calcarifères de l’arête de Vallé; 9° Gneiss de Vallé (les zones 7 et 9 n'ont pas racine en profondeur) ; 10° Calcaires et schistes calcaires de Vallé-Ciam- porino ; 11° Gneiss à galets qui pourraient être assimilés aux gneiss schisteux du Monte-Léone, intermé- diaires entre les gneiss schisteux et les gneiss massifs. Cette zone forme un dôme surbaissé, et pourrait être un bombement de gneiss appartenant au fond normal non disloqué du bassin des schistes lustrés ; 12° Schistes lustrés ; 19? Calcaires dolomitiques ; A 13° Gneiss d'Antigorio (signalons encore ici u# petit repli synclinal faisant surgir au milieu dus tunnel les calcaires dolomitiques". 4 Ces entassements de plis expliquent pourquoi toutes les roches sont excessivement disloquées” repliées, laminées et froissées. En outre de Ja difficulté de les classer, certains replis n'existant qu'en profondeur et ne se manifestant pas à l'exté= rieur, on comprendra facilement la difficulté du problème dont les géologues cherchaient la solu- tion. Sous une immense coupole se cachaient des zones plissées qui, échappant à l'observation di- recte, ne pouvaient laisser place qu'à des inter- prétations hypothétiques. VI. — STRUCTURE GÉOLOGIQUE DE LA CHAÎNE DU SENTIS. Le travail géologique le plus important paru en Suisse, en ces dernières années, est, sans contredit, la monographie du massif du Sentis, publiée par M. le Professeur Albert Heim, avec la collaboration de trois de ses élèves : MI Marie Jerosch, MM. Ernest Blumer et Arnold Heim'. Cette monographie est accompagnée d'une carte, au 1/25.000, d'un atlas de profils, d'esquisses et de photographies. Au point de vue tectonique, le massif — carac- térisé par le déjettement de tous ses plis vers-le Nord — est formé par six anticlinaux naissant les uns après les autres, par bifurcations successives, de l'Ouest à l'Est, de deux plis initiaux. Ces anti- clinaux tendent à s'écarter progressivement les uns des autres, dans la direction de l'Est. De nom- breuses fractures, étudiées par M! Jerosch, cou- pent le massif soit longitudinalement, soit trans- versalement, constituant des failles à rejet vertical ou bien des décrochements horizontaux. C'est ainsi que le premier anticlinal qui, de la Thür au Schwen- dibach, forme le front de la chaine, se signale par une faille longitudinale meltant en contact l'Urgo- nien et l'Hauterivien du flanc méridional avec le Crétacé supérieur du synclinal suivant. Le troi- sième anticlinal, le plus considérable de la chaîne, est coupé à l'Est du Fählense par une grande frac- ture (Saxerlücke-Schwendi), suivant laquelle le plongement oriental du pli est repoussé, vers le Nord, d'environ 4 kilomètre. Le cinquième anti- clinal est également coupé par cette même fracture, ce qui marque à la fois pour ce pli‘ une diminution brusque d'altitude et un déplacement de son pro= longement oriental vers le Nord. La partie occidentale du Sentis a été décrite par 1 As. Her, MaRiE Jeroscu, ERx. BLUMER and Anx. HEIN: Das Santisgebirge. Matériaux pour la carte géologique Suisse, 2e s., liv. XVI. CT 2 J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE M. Arnold Heim; c'est là que s'observe le rétrécis- sement du faisceau de plis crélacés et leur fusion en deux anticlinaux déjetés. Le même auteur s'est occupé également des relations existant entre les massifs du Sentis, du Goggein, du Gulmen, de Stock et des Churfisten. D'après lui, ces massifs, aujourd'hui séparés, ont fait primitivement partie d'un seul ensemble tectonique. On sait, d'autre part, que la série crélacée de la partie supérieure des Churfisten chevauche sur une série normale de formations crélacées el tertiaires, série se ralla- chant à la nappe glaronnaise qui, elle-même, est en recouvrement sur le Flysch. Cela étant, l’en- semble tectonique en question doit être considéré comme une nouvelle nappe qui est superposée à cette nappe glaronnaise. Quant à la division en plu- sieurs massifs aujourd'hui isolés, elle s'explique par des phénomènes d'étirement et de laminage. La troisième partie de la monographie, due à M. E. Blumer, est consacrée spécialement à l'étude de l'extrémité orientale du sixième anticlinal. Elle commence avec la description d'une fracture, qui détermine une coupure très nelle de la voûte du Hoher Kasten. Dans le prolongement de cet anti- clinal, vers l'Est, s'élèvent les plis du Vorarlberg, et dans la vallée du Rhin quelques pointements rocheux facilitant le raccord entre les deux régions. C'est à un ensellement de cet anticlinal et de son prolongement, la nappe du Kapf, que correspond la vallée du Rhin. L'affaissement local des assises crétacées s'explique par des fractures. Les conclusions développées par le Professeur Albert Heim établissent que le faisceau des plis du Sentis n'est pas autochtone. 77 fait partie d'une vaste nappe chevauchant sur le Flysch. L'ensemble des dislocations du massif se ramène à une gigan- tesque poussée dirigée Sud-Nord. Les décroche- ments horizontaux sont le fait d'inégalités dans la poussée ou dans la résistance, tandis que les failles, qui n'affectent jamais le soubassement de Flyesh et de Molasse sont dues à des affaissements locaux de la masse chevauchante, dans des dépressions creusées dans des assises Lertiaires par une érosion préalable. VII. — (GÉOLOGIE DES PYRÉNÉES FRANCAISES. M. Léon Carez, ancien président de la Société géologique de France, qui étudie les Pyrénées fran- caises depuis plus de vingt ans, a commencé, en 1903, la publication d'une série de volumes", — qu'il appelle trop modestement des fascicules, — et 4 L. Carez : La Géologie des Pyrénées françaises. Mémoi res pour servir à l'explication de la Carte géologique dé- taillée de la France, fase. 1, 1903; fasc. IT, 1904; fase, IL, 1905 ; fase. IV, 1906. Paris, Imprimerie Nationale. 803 qui ont pour objet la Géologie de la grande chaine méridionale. Le premier est consacré aux feuilles de Bayonne, Saint-Jean-Pied-de-Port, Orthez, Mau- léon et Urdos; le second, aux feuilles de Tarbes et de Luz; le troisième à celles de Bagnères-de-Luchon et Saint-Gaudens; le quatrième aux feuilles de l'Hospitallet, Foix et Pamiers. Deux volumes, non encore publiés, auront pour objet les feuilles de Prades, Quillan, Carcassonne, Céret, Perpignan et Narbonne. Chaque volume comprend un certain nombre de chapitres traitant des divers étages des terrains sédimentaires, des roches éruptives et des miné- raux, des matériaux uliles et enfin de la structure. Dans chacun de ces chapitres est donné un résumé de tous les travaux connus, l'exposé des recherches personnelles de l’auteur et une liste des localités citées. Nous avouerons que le plan suivi ne nous à pas pleinement satisfait. Il eut été préférable, semble- til, au lieu de limites cartographiques absolument artificielles, de décrire la chaîne d'après des régions naturelles pouvant ètre distinguées. Le travail aurait gagné en clarté, etle lecteur se serait orienté plus facilement. Quoi qu'il en soit de cette question de forme, ne pouvant suivre le savant collabora- teur de la carte dans ses exposés historiques et stratigraphiques, nous nous contenterons d'indi- quer les traits principaux de la structure des divers massifs, dans l’ordre où ils ont été décrits. La partie occidentale des Pyrénées, étudiée dans le tome I, peut être divisée en deux régions: l'une, la plus septentrionale, est composée de plaines ou de collines peu élevées, ne dépassant qu'exception- nellement l'altitude de 500 mètres, tandis l'autre est une zone franchement montagneuse, que où l’on trouve de nombreux pics supérieurs à 2.000 mètres. La terrain plus ancien que le Trias ; le Jurassique n'y première ne présente aucun est que peu développé. Par contre, le Crétacé et le Tertiaire y occupent de grandes surfaces. L'allure des couches est assez régulière; on constate l'exis- tence de 5 anticlinaux et de 5 synelinaux, suivant plus ou moins fidèlement la direction générale de la chaine. La région méridionale se signale par des terrains appartenant aux divers systèmes du groupe primaire, au Trias, au Jurassique et au Crétacé in- férieur. On y observe même du Crétacé supérieur jusque dans la partie la plus élevée du massif, de Roncevaux aux Eaux-Chaudes. Cette présence du Crétacé sur les hauts sommets est expliquée par M. Carez par un immense charriage venu du Sud: le versant méridional des Pyrénées aurait été poussé sur la partie centrale ; il serait parvenu, par une sorte de plan incliné, jusqu'aux plus hauts som- 894 J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE mets. Get accident se serait fait sentir sur une lon- gueur de plus de 200 kilomètres. On doit signaler l'existence de trois massifs gra- nitiques: celui de la Haya, celui de Louhossa-Has- parren et celui qui s'étend des Eaux-Chaudes au Pie du Midi d'Ossau. Le premier a fait l'objet d'une étude intéressante de M. Termier'. D'après l’émi- nent pétrographe, l'amas granitique, qui a une douzaine de kilomètres de longueur, est encaissé par des lerrains d'âge ordovicien el sa mise en place serait antérieure au Trias. La roche à une assez grande ressemblance avec la protogine du Mont-Blanc. Toutefois, elle est plus siliceuse que la roche alpine, elle renferme un peu plus de magnésie et sa teneur en chaux est plus variable. M. Termier croit, comme M. Stuart-Menteath, qu'il y a une relation génétique entre les granites du Labourg et celui de la Haya. C'est, dit-il, « un laccolite d'avant-garde, relié par une cheminée, que nous ne verrons malheureusement jamais, à une zone sous-jacente située à la base du Silurien, ou au- dessous de cette base, et affectée du même meéla- morphisme régional queles terrains du Labourd » ?. La bande de terrains décrits dans le tome IT, et qui occupe les feuilles de Tarbes et de Luz, au point de vue géologique, peut être divisée en un certain nombre de zones : 4° zone miocène; 2 zone composée d'Eocène, de Crétacé et de Jurassique ; 3° zone formée de terrains primaires; 4°zone cons- tituée par du Crétacé supérieur. La caractéristique des terrains de ces diverses zones est leur manque de continuité. Les études de M. Bresson‘ pour la région primaire ont mis ce fait bien en évidence. Une constatation analogue a été faite, par M. Ca- rez, pour les plis du Secondaire et du Tertiaire qui sont dissymétriques : le flanc méridional des syr- clinaux est le plus souvent renversé vers le Nord, tandis que le flan: septentrional présente une in- clinaison beaucoup moins forte. Quant aux plis de la région primaire, leur déversement est variable. Il existe trois groupes de lambeaux de recouvre- ment: environs de Gavarnie, Eaux-Bonnes et Pic Bazès, Bagnères-de-Bigorre. IIS seraient dus à un grand charriage qui les aurait amenés du versant espagnol. Pour MM. Bresson et Seunes, ils seraient simplement produits par des transgressions. Le tomelIIl est consacré aux feuilles de Bagnères- de-Luchon et de Saint-Gaudens, où l'on peutétablir 4 P. TermierR : Le Granite de La Haya ou des Trois- Couronnes (Pays Basque). Bull. Soc. géol. de France, 4 s., t. VII, p. 40, 4907. 2 P. TermiEr: Loc. cit. 3 Bresson : Etudes sur les formations anciennes des Hautes et Basses-Pyrénées (Haute Chaine). Bull. Serv. de la Carte, n° 93, 1. XIV, 1903. -imaire ; les divisions géologiques suivantes : 1° zone plio= cène et miocène, 2° zone des Petites Pyrénées, com- posée de Trias, de Crétacé supérieur et d'Eocène; 3° zone composée presque exclusivement de Céno- manien, avec quelques affleurements de divers terrains primaires et de Crétacé inférieur; 4 zone de Crétacé inférieur et de Jurassique; 5° zone pri- 6° zone discontinue de calcaires secon- daires; 7° deuxième zone primaire. Les zones tec- toniques à et 7 ont été étudiées par M. Léon Ber- trand”. D'après ce savant, cette dernière serait dis- posée en éventail et formée par une série de plis parallèles déversés vers le Sud, dans la partie espa- gnole, et poussés vers le Nord, dans la partie fran- caise. La zone 5 se fait remarquer par ses carac- tères de discontinuité. Les particularités signalées s'expliquent par des phénomène de charriage. Une 1 nappe serait venue du Sud. Elle serait séparée de 4 sa racine, qui devrait être cherchée dans la région centrale (7). D'autre part, la zone 6 ne serait tecto- niquement que la couverture de cette dernière, couverture ayant subi des laminages d'une grande intensité. 4 Sur les feuilles Hospitallet, Foix et Pamiers ont été reconnues les divisions géologiques suivantes : 1° zone miocène et éocène lacustre; 2 zone des » Petites-Pyrénées ; 2° zone cénomanienne avec quel- ! ques rares affleurements primaires ou triasiques ; M 1° zone secondaire formée de Trias, Jurassique et. M de Crétacé inférieur; 5° zone primaire et grani- tique ; 6° zone secondaire discontinue; 7° zone gra- ÿ nitique et primaire; 8° zone secondaire exclusive- M ment formée de Jurassique et de Crétacé inférieur ; 9° zone primaire et granitique. La région considérée est formée d'une série de compartiments distincts et indépendants — ne pré- sentant une certaine continuité que vers l'axe de la M chaine — séparés par de grandes cassures et che- vauchant fréquemment les uns sur les autres, presque toujours dans la direction du Nord. Les chevauchements des environs de Tarascon ont fait avancer les couches sur une distance assez grande pour mériter le nom de charriage. Dans les environs de Surba, la vallée est occupée par des schistes albiens, sur lesquels reposent soit des schistes primaires verdätres avec minerai de fer, soit du Trias, soit la dolomie jurassique, soit le calcaire aptien. Ces superpositions anormales, ajoute M. Carez, sont bien certaines et ne peuvent s'expliquer par des anticlinaux aigus avec étire- ment. Il y aurait du Nord au Sud trois nappes à partir des schistes cristallins. “ L. Berrraxp : Note sommaire sur la structure des régions de terrains primaires de la feuille de Bagnères-de- Luchon. Paris, Imprimerie nationale, 1905. J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 895 Des couches charriées ont encore été signalées sur le versant nord des Pyrénées, entre la vallée de l'Ariège et le Roussillon, par M. Léon Bertrand”, Le bord nord de la zone plissée, d’après cet auteur, est marqué par un chevauchement frontal qui se suit de Saint-Paul-de-Jarrat jusqu'à Padern, avec une direction Ouest-Est; des terrains secondaires, du Trias à l’Albien, y ont été poussés sur du Crétacé supérieur et du Nummulilique. Sur cette nappe inférieure en vient une seconde, formée des mêmes couches, mais où les calcaires sont fréquemment marmorisés. Enfin, des lambeaux d'une nappe supérieure se montrent sur la précédente, entre l'Aube et le Rébenty, marqués par des paquets pri- maires reposant sur les couches supérieures de la seconde nappe. Ces charriages seraient un phénomène n'ayant affecté que la couverture secondaire, et seulement la partie supérieure des terrains primaires de la zone axiale. Les paquets primaires qui se rencontrent à la base des nappes ont été entrainés passivement et n'ont joué aucun rôle dans le charriage. D'après le même géologue, les plis intéressant les terrains primaires du bord septentrional de la zone centrale sont le résultat de mouvements antéper- miens, et le tracé des plis hercyniens n'aurait pas été modifié lorsque se sont produits les charriages tertiaires vers le Nord*. Quant aux plis situés au sud de la région axiale, ils sont poussés au Sud et conduisent à une structure isoclinale, avec plonge- ment des couches vers le Nord. Ces plis passent souvent à des plis failles, suivant le type de la structure imbriquée. Les accidents de celle région méridionale sont des chevauchements imbriqués et nettement enra- cinés dans la zone primaire. Le bord de celle-ci chevauche sur sa bordure secondaire et tertiaire, elle-même affectée de plis déversés au Sud. De plus, M. Léon Bertrand croit pouvoir admettre que les accidents tertiaires n'ont pas rendu recon- naissable l'allure des plis anciens, et que « le tracé en plan des plis actuellement observables dans la zone primaire centrale nous donne une image assez approchée du tracé primitif des plis hercyniens ». NIIT. — PHÉNOMÈNES DE CHARRIAGE EN ESPAGNE, DANS LA ZONE SUBBÉTIQUE. Les phénomènes de recouvrement constatés dans les Alpes et les Pyrénées francaises ont été égale- 1 Léon BerrRANo: Sur les charriages du versant nord des Pyrénées, entre la vallée de l'Ariège et le Roussillon. (C. R. A. S., t. CXLIII, p. 1265, 31 décembre 1906). ? Léon Berrranp: Sur l'allure des plis anciens dans les Pyrénées centrales et orientales. (C. R. A. $.,[t. XLIV, p. 289, 4 février 1907). ment reconnus dans les montagnes espagnoles. En 1904, M. René Nicklès présentait, à la Société géolo- gique de France, une Note dans laquelle il émettait l'hypothèse que des charriages devaient exister dans les chaines de l'Almaden et de la Magina”. Cette hypothèse a été partiellement vérifiée à la suite de recherches effectuées par M. Robert Dou- villé et communiquées à l'Académie des Sciences de Paris *. Plus récemment, le même auteur a déve- loppé sa manière de voir dans une monographie publiée sous le titre de Æsquisse géologique des Préalpes subbétiques* (partie centrale)", dont nous indiquerons les conclusions les plus importantes. Sous le nom de « zone subbétique », Marcel Bertrand et M. W. Kilian * ont désigné la bande de terrains secondaires comprise entre la Mesela — massif central de la péninsule ibérique — et Ja Sierra Nevada. « Cette zone aurait joué, par rapport à la zone bétique (Sierra Nevada), le même rôle que les Préalpes par rapport aux Alpes suisses ». L'avant-pays espagnol (Vorland) correspond à la Meseta. Dans la zone subbétique, on serait en présence d'une nappe venue du Sud, qui aurait été formée à l'origine par tous les terrains s'étant déposés dans la région (Jurassique, Crétacé, Eocène). Le Juras- sique forme un gigantesque anticlinal couché et charrié vers le Nord. Dans ce déplacement, le flanc renversé du pli se serait étiré pour la plus grande partie. Ses couches les plus récentes appartiennent à la partie supérieure de l’Albien (Vraconien), et ne dépassent pas le Jurassique supérieur. Par contre, il se serait produit un décollement du flanc normal: les couches postérieures au Vraconien auraient con- tinué leur marche en avant et dépasseraient la tête anticlinale du noyau jurassique. La partie supé- rieure de la nappe jurassique à eu son autonomie après le décollement. On peut la désigner sous le nom de nappe supérieure, le reste des terrains charriés constituant la nappe inférieure. Cette dernière consiste en un anticlinal couché, qui se suit depuis Martos jusqu à la route de Vilches à Almeria. Cet anticlinal a été divisé en trois chainons isolés par l'érosion : 1° Grana-Jabaleux ; 3° San Cristobal; 3° Almaden. L'ensemble de la Grana et du Jabaleux constitue le premier segment de l’anticlinal charrié formant 1 R. NicxLës: Sur l'existence des phénomènes de char- riage en Espagne, dans la zone subbétique. Bull. Soc. geol. de France, 4° s., t. IV, p. 224, mars 1904. ? R. Douviccé: Sur les Préalpes subbétiques au sud du Guadalquivir. (C. R. Acad. S., 21 novembre 1904). 3 In: Sur les Préalpes subbétiques aux environs de Jaen (C. R. Acad. S., 3 juillet 1905). 4 In. Paris, Imprimerie H. Bouillant, 1906. 5 M. Berrranp et W. Kicran: Etudes sur les terrains secon- daires et tertiaires dans les provinces de Grenade et de Ma- laga (Mission d'Andalousie). 896 J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE la nappe inférieure. Il comprend toute la série Jurassique qui, dans cette zone, est peu développée comme épaisseur. Dans le ravin qui descend de Penablanquilla vers le village de Jamilena, le Juras- sique est renversé et le noyau du pli possède son développement complet. Une coupe relevée au Nord-Est de Morlos, du Sud ‘au Nord, montre des terrains de plus en plus récents : 4° Néocomien; 2% Aptien; 3° Vraconien: 4 Miocène. Ce dernier plonge nettement sous les assises crétacées. Quant au flanc supérieur de l'anticlinal, il présente en succession normale le Barrèmien et l'Aptien inférieur. À son extrémité orientale, la chaîne prend le nom de Jabalcux. Elle offre une constitution géologique analogue à celle de la Grana ; son flanc septen- trional est également bordé par le Miocène. Le San Cristobal est formé, comme le Jabaleux, par un ensemble monoclinal plongeant vers le Sud. A l'Est et à l'Ouest existent des inflexions d'axe, occasionnant des plongements périphériques, qui lui donnent ainsi l'aspect d'un dôme, Sa constitu- lion géologique est simple. À l'Ouest du « Cortijo » de Fontanarès, on observe le contact du noyau Jurassique du pli couché et du Miocène. En montant ensuite au sommet du San Cristobal, on voit les couches jurassiques plonger vers le Sud. Celles-ci sont Surmontées parle Néocomien, puis par l'Aptien à Orbitolines. Enfin, l’ensemble du massif butte contre la chaîne en place de los Grazales. La chaîne de l'Almaden est le témoin le plus important de la nappe inférieure. L'anticlinal y est également très net, mais le noyau jurassique seul a été conservé, Le flanc renversé (Crétacé et partielle- ment Jurassique) à été étiré. Quant au Crétacé du flanc normal, il est peu développé. La chaine forme dans son ensemble un pli monoelinal, à inclinaison sud. Arrivons à la nappe supérieure. Elle est généra- lement formée par les calcaires massifs du Crétacé supérieur, ainsi-que par les calcaires gréseux el marneux du Crétacé moyen, le décollement qui a séparé les deux nappes s'étant produit, le généralement, Vraconien. D'après M. Douvillé, cette nappe supérieure « est repré- plus à la base du sentée par une série de lambeaux de recouvrement ou klippes, presque exclusivement formés par les couches supérieures du Crétacé, et généralement situés entre le front nord de la nappe inférieure et le Bas-Pays ». Le massif de la Peña et du Cerro de Jaen est le témoin le plus complet de la nappe supérieure; il est entouré par une ceinture ininter- rompue de Miocène. Deux coupes, relevées du Nord au Sud, font comprendre facilement la structure du massif charrié de Jaen. L'une, prise à l'Ouest, et passant par le sommet 1240, offre la succession suivante c)calcaires massifs oolithiques du Crétacé supérieur: b) calcaires gréseux et noduleux du Crétacé moyen a) calcaires gris-jaune de l'Aptien. f Une deuxième coupe, passant à l'Est du massif par les sommets 980 et 820, permet d'observer le niveaux sui c) calcaires oolithiques du Sén nien; D) calcaires du Crétacé moyen séparés des premiers par une faille; a) Vraconien (rive droit du ravin), Aptien (rive gauche). Le massif est partout coupé en biseau par le sub= stratum, les miroirs de faille abondant sur les bords, ce qui semble indiquer des mouvements orogéniques importants. j Une autre coupe intéressante est celle de la Ser: zuela de Pegalajar, où l’on a de haut en bas : 5. Crétacé supérieur; 4. Crétacé moyen; 3. Trias; 2.Miocène;1.Trias. Les assises 5, 4,3 sont charriées. Un massif formant un tout homogène est celui de « Mozon blanco » ; il est entièrement entouré par le Miocène, el ses couches les plus élevées appar- tiennent au Sénonien. Le facies du Jurassique, dans les massifs charriés et dans les massifs en place, est différent; dans les preriers, la formation secondaire est représentée par des calcaires foncés peu puissants, sans fos- tandis que, dans les seconds, il consiste en calcaires clairs, ayant une certaine épaisseur, et relativement fossilifères. Entre la région que nous venons d'étudier et la vill: de Grenade, le Jurassique appartient au facies clair. L'autre facies paraît, au contraire, bien déve- loppé plus au Sud. « Il semblerait done assez pro- bable, conclut M. R. Douvillé, que les racines des nappes se trouvent au sud de Grenade, ou, au plus, à sa latitude. Des relevés géologiques de détail, basés sur une topographie précise, permettront seuls de résoudre la question. » rants : siles, IX. — GÉOLOGIE DU NORD DE MADAGASCAR. La plupart des données géologiques sur Madagas- car — à part Celles fournies par un missionnaire anglais, le Révérend Baron’ — étaient basées sur. des documents recueillis par des explorateurs non géologues. Elles étaient forcément incomplètes et nat à être mises au point. C'est à cet état de choses que vient de remédier, pour le Nord de l'ile, un Mémoire publié en 1906 par M. Paul Lemoine, de l'Université de Paris?. Chargé d'une Baron : Notes on the geology of Madagascar, with an appendix on the fossils by Newton. Quart. Journ., t. XIV, 1889, p. 305-331. 1n : Geological notes of a journey in Madagascar. Journ., t. LI, 1895, p.57-72. ? P. LeMOINE : Etudes géologiques dans le Nord de Mada- sascar, Paris. Librairie scientifique Hermann, 1906. ‘at L Quart. J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE mission scientifique par le ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts, ce géologue à étudié la partie septentrionale de Madagascar pendant les années 1902 et 1903. Il à pu établir la succession des terrains qui s'y rencontrent, avec assez de détails pour dresser, du territoire parcouru, des cartes géologiques au 1/200.000 et au 1/500.000. Il nous à paru intéressant d'exposer les résultats principaux des recherches de notre confrère, les- quelles, nous dit-il, seront complétées par des mé- moires spéciaux consacrés à la Paléontologie. Nous décrirons les divers terrains dans leur ordre d'ancienneté, et en nous dirigeant du Sud vers le Nord. Des affleurements de roches anciennes en place s'observent en amont du confluent de la Loky avec la rivière d'Ambararala. Ce sont tantôt des granites et pegmatites, tantôt des schistes à glaucophane. Un fait importantest à noter: c'est le développement de schistes verdätres surmontant les granites ou les gneiss. Ces schistes représenteraient du Primaire métamorphique. Les grès liasiques présentent un certain dévelop- pement dans la basse vallée de la Loky. Ils ne ren- ferment aucun fossile. S'ils sont rapportés au Lias, c'est, d'une part, parce qu'ils sont sous-jacents aux couches fossilifères du Jurassique supérieur et, de l’autre, parce qu'ils présentent d'étroites relations stratigraphiques avec les argiles liasiques de Nosy Bê. Dans la partie septentrionale de cette île, un peu au sud de Kola, M. Lemoine a recueilli le Posi- donomya alpina Gras et le Leda Doris d'Orb. Une autre région où se trouvent des schistes et calcaires fossilifères de ce niveau est celle de Jangoa, près d’Ambodimadiro, où M. Villiaume a récolté des fossiles, parmi lesquels MM. H. Douvillé et R. Zeiller ont reconnu : Ammonites cf serpentinus Rein.; Spiriferina; Zeilleria Sarthencis; Pholado- mya cf Voltzi et Ph. ovulum; Pleuromia, ete. — Cette région est caractérisée par l'alternance de grès el de schistes, avec accidents ligniteux. Des fossiles du même äâge ont été trouvés par le capitaine Colcanap dans le cercle de Maevetanana: Harpoceras (Hildoceras) cf. erassilicaltum PDumor- tier; Bouleiceras nitescens Thev.*; Spirilerina. Le Jurassique inférieur est surtout constitué par des calcaires. Au-dessus des grès de la montagne d'Analamalandy (rive gauche de la Loky) viennent des calcaires renfermant des Rhynchonelles. Ils alternent d'abord avec des grès; arrivent ensuite de nouvelles assises calcaires, encore avec Rhyncho- 4 J. Corcanar : Sur la géologie du cercle de Maevetanana. Bull. Soc. géol. France, 4 s., t. NI, p. 164, 1906. ? A. THÉvENIN : Sur un genre d'Ammonites du Lias de Madagascar. Bull. Soc. géol. Fr. 4e s., t. VI, p. 171, 1906. 897 nelles, puis des lumachelles, des calcaires compacts et des calcaires à Polypiers. Une coupe très complète S'observe sur le chemin traversant la chaine de l’'Andrafiamena, où les cal- caires sont encore superposés aux grès. Dans le voisinage d'Ambery existent des alternances de marnes avec calcaires marneux renfermant : Rhyn- chonella concinna, R. obsolcta, R. indica, Tere- bratula (Waldheimia) n. sp., T. circumdata. À la partie tout à fait supérieure, se trouvent des bancs à radioles d'oursins qui ont été rapportés au Cida- ris meandrina Ag. du Bathonien*. Le Jurassique supérieur n'avait jamais été signalé dans le Nord de Madagascar. Les études de M. Le- moine et les récoltes du capitaine Colcanap l'ont fait Maro- mandia. Deux niveaux ont pu être distingués : l'un est le Callovien, caractérisé par des Reineckeia, du groupe /?. anceps, des Macrocephalites, des Peris- phinctes ; l'autre est le Séquanien-Kimeridgien, daté par des Aspidoceras du groupe de l'A. acanthicum, des Perisphinctes du groupe du P. Plicatilis. I faut noter ici qu'au milieu de ces formations jurassiques connaître à Andranosamontana et à s'intercalent des roches éruptives de la famille des syénites. Elles ont fait l'objet d'études magistrales dues à M. Lacroix?; d'après M. Lemoine, elles seraient d'âge post-liasique et peut-être post-kimé- ridgien. Le Crétacé inférieur est bien développé sur la droite du Rodo, où il est représenté par des marnes à Duvalia, Hoplites, Holcostephanus. rive D'autres gisements existent encore sur le bord occidental du massif d'Ambreet sur la côte du port Radama”. Le Crétacé moyen de Diégo-Suarez permet de niveau inférieur bien développé au Mont-Raynaud, où ontété trouvés de très beaux fossiles : Phylloceras Velledæ, Pu- zosia, Anisoceras et diverses variétés de Schlænba- chia inflata; un niveau supérieur à petits fossiles pyriteux caractérisé par l'Acanthoceras subvicinale, et rappelant la faune de l'Algérie et de la Tunisie*. distinguer deux niveaux : un 1 Postérieurement à la publication de son travail, M. le- moine à pu établir qu'on connaît à Madagascar trois facies bien distincts du Jurassique inférieur : 10 facies des envi- rons de Diégo-Suarez à Térébratules, Echinides, Polypiers; 20 facies laguno-marin d'Andranosamontana; 3° facies à Céphalopodes de Causses (P. Lenoine: Les variations de facies dans les terrains sédimentaire de Madagascar. Bull. Soc. géol. Fr, 4, t. NII, p. 30, 1907). ? A. Lacroix : Minéralogie. Madagascar au xx° Siècle. Paris, Rudeval, 1902, p. 65, 107. In. : Matériaux pour la Minéralogie de Madagascar. Vou- velles Archives du Muséum (IX), t. V, 1903, p. 171-254. * Le capitaine Colcanap a signalé dans le cercle de Mae- vetanana la présence de fossiles berriasiens dans un magni- fique état de conservation. * J1 y aurait, dit M. Lemoine, « une différence de facies assez notable entre la région de Diégo-Suarez, où la sédi- début du 898 L'Emschérien s'observe au ravin de la Pierre (montagne des Francais), où existent des argiles contenant, dans des concrétions, une faune caracté- ristique : Lytoceras multiplexum, Pachydiseus rotalinus, etc. Dans le massif de Windsor-Castle, ces marnes sont remplacées par des grès renfer- mant une faune différente, mais de même âge. L'Aturien est constitué par des marnes blanches ou rouges, déterminant un escarpement très mar- qué dans la topographie. Ces marnes se signalent par la présence de débris de test d'/noceramus. Dans le massif de Windor-Castle, les Térébratules sont abondantes, à ce niveau, et les Echinides peu nombreux, tandis que, dans la montagne des Fran- cais, ce sont les Oursins qui sont nombreux et les Brachiopodes rares. Nous devons ajouter que l'Atu- rien est nettement transgressif, et que c’est le seul terme de la série sédimentaire qui, à l'heure actuelle, soit connu sur la côte orientale. C'est M. Boule qui, le premier, a démontré que, sur cette côte, existent des dépôts fossilifères d'âge néo- crétacique. Le Nummulitique consiste en calcaires durs et résistants à l'érosion. Dans la montagne des Fran- cais, ce sont des massifs escarpés, isolés par des gorges profondes, tandis que, dans Windor-Castle, ce sont desmassifs plus petits restés en relief. D’autres petits massifs isolés sont disséminés dans la baie de Diégo-Suarez. Ils peuvent être considérés comme des éboulis anciens descendus sur place, par suite de l'éboulement de leur substratum argilo-sableux. L'Aquitanien, que M. Lemoine a été le premier à signaler dans le Bobaomby, est bien caractérisé par des fossiles. Nettement transgressive, cette forma- tion consiste en calcaires alternant avec des tufs basaltiques. Elle repose en discordance sur les sédiments antérieurs. Des phénomènes d'âge récent s'observent dans le Nord et l'Ouest de Madagascar. Ce sont des récifs coralliens soulevés, très développés sur la côte orientale du territoire de Diégo-Suarez, à la baie de Rigny et dans tout le Bobaomby. Ils se suivent sur la côte occidentale, mais s'immergent, peu à peu, en allant du Nord au Sud. En outre, des traces d'un mouvement positif existent sur le littoral, mouvement qui a déterminé l'envahissement des parties basses. Enfin, des phé- mentation paraît avoir été assez profonde (abondance de Phylloceras et Lytoceras), et le reste de Madagascar, où elle semble l'avoir été moins ». B. S. G.F. (4), t. VIL, p. 36. # M. Bouce : Note sur de nouveaux fossiles secondaires de Madagascar, Bull. Mus., t. V, 1899. J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE —__—__—_—_—_—_—_—_—_—__a—aEZaEaE a nomènes de capture, produits aux dépens d'un régime hydrographique ancien, s'observent sur le pourtour de la baie de Diégo-Suarez. C'est à des éruptions récentes qu'est dû l'énorme « Massif d'Ambre », constituant l’ossature du terri- toire de Diégo-Suarez. Des cratères-laes s'y ren- contrent; ils sont localisés approximativement sur l'axe nord-sud du massif. La plus grande partie des roches éruptives con- siste en basaltes et en limburgites ; toutefois, des coulées de roches un peu différentes s'y intercalent, des féphrites, par exemple. Les roches les plus curieuses sont des phonolites et des tingaïles, qui se“ voient en plusieurs points sur le pourtour du massif. Un chapitre du travail de M. Lemoine est con- sacré à la Tectonique. La structure des terrains sédimentaire est simple : les couches, le plus souvent horizontales, ne sont affectées que d'une faible inclinaison, dans no direction donnée. La succession n'est interrompue que par des failles. | La dislocation maîtresse est la faille de la côte orientale, s'étendant de Fort-Dauphin au cap Maroala. Elle fait probablement partie, avec la ligne des Mal- dives, Laquedives et Chagos, du système de cassures le long desquelles s'est effondré, par comparti- ments, le continent australo-indo-malgache. Quant aux accidents affectant la côte occidentale, ils paraissent être d'une nature spéciale, différente de celle des failles de l’autre côté. Ils pourraient être interprétés, d'après notre confrère", en admet- tant, à une époque récente, l'élévation en masse du massif central de Madagascar; ils ressembleraient " aux phénomènes indiqués par M. Haug sur le bord est du massif central de la France, entre La Voulte et Aubenas”. Le Mémoire de M. Lemoine se termine par quelques considérations sur l'histoire géologique de ; l'océan Indien. Ces considérations comportent une large part d'hypothèse; nous ne les discuterons pas dans cette revue, destinée plus spécialement à faire connaitre « les solutions envisagées comme définitivement } acquises. l q J. Révil, Président de la Société d'Histoire naturelle de Savoie, “ P. Lemonxe : Observations à la note du capitaine Colea- nap. Bull. Soc. géol. France, 4 s.,t. VI, p. 170, 1906. 3 E. Hauc : C. R. Ac. Sc., 5 nov. 1906. BIBLIOGRAPHIE dE. ANALYSES ET INDEX 4° Sciences mathématiques De Larminat (E.. — Topographie pratique de reconnaissance et d'exploration, suivie de No- tions élémentaires pratiques de Géodésie et d'As- tronomie de campagne (2° édition). — 1 vol. in-8° de 390 pages avec 149 figures et un atlas. (Prix :10 fr.) Lavauzelle, éditeur. Paris, 1907. M. de Larminat fait paraître une seconde édition de la Topographie pratique, dont la première édition, couronnée par l'Académie des Sciences, à été accueil- lie avec la plus grande faveur par les géographes et les explorateurs et a obtenu un succès considérable. Tout en gardant à ce nouveau volume la même dis- position générale qu'à la première édition, l'auteur a remanié certains chapitres et en a ajouté un certain nombre de nouveaux. Quelques points, comme le cha- pitre des erreurs, ont été développés et précisés; la compensation graphique des triangulations a été trai- tée en détail; enfin, les tableaux de calcul, les mo- dèles d'itinéraire, etc., ont été renvoyés dans un atlas annexe, ce qui permet au lecteur de les consulter avec la plus grande facilité. La première partie de l'ouvrage est consacrée à l'étude des formes du terrain, que M. de Larminat considère, avec juste raison, comme la base de la topo- graphie rationnelle. L'auteur, dont la compétence en cette matière est bien connue des spécialistes, expose la question avec la plus grande clarté et termine par des conseils très judici-ux sur la méthode à suivre dans le dessin des formes du terrain et sur la facon d'éviter les fautes les plus fréquentes dans les débuts. La seconde partie traite des procédés et des méthodes de la topographie de reconnaissance. l'éta- blissement du canevas de la planimétrie, en se ser- vant de la boussole pour la mesure des azimuts et du pas pour la mesure des longueurs, puis l'établissement du canevas de nivellement au baromètre, sont exposés avec tous les détails nécessaires pour rendre facile l'exécution d'un lever d'itinéraire ou d'un lever expédié. Dans la troisième partie, l'auteur aborde l'étude des triangulations précises avec emploi d'un petit théodo- lite, celle de la mesure des bases au moyen de règles, de fils ou de rubans, puis enfin l'étude de la détermi- nation des positions astronomiques. Ces problèmes, d'un ordre déjà un peu élevé, qui effraient souvent ceux des explorateurs dont l'instruction mathématique n'est pas très étendue, sont traités à un point de vue exclu- Sivement pratique et exposés d'une facon élémentaire et parfaitement claire. En résumé, il semble que cette seconde édition devra avoir au moins le même succès que la première, et l'on ne saurait trop recommander l'ouvrage de M. de Larminat, non seulement à tous les explorateurs, mais à tous ceux qui s'occupent de Géodésie ou de Topographie. R. BourGEo!s, Chef de la Section de Géodésie au Service géographique de l'Armée. Claudel(].).— Formules, Tables et Renseignements usuels. PARTIE PRATIQUE DE L'AIDE-MÉMOIRE DES INGÉ- NIEURS ET ARCHITECTES. 11° édition entièrement refondue sous la direction de M. G. Dariès, /ngénieur de la Ville de Paris. — 2 vol. in-8° de 2.300 pages avec plus de 1.000 fig. (Prix : brochés, 30 fr.; reliés, 34 fr.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1907. Les Formules et Tables de Claudel sont bien connues des techniciens. La première édition date de 1846, et RS OS us (LIBRARY)Z > elle a été suivie de neuf autres en l’espace de soixante ans; l’auteur étant mort dans l'intervalle, la dernière fut mise au point par Barré. La dixième édition étant épuisée, et Barré ayant disparu à son tour, c’est M. Dariès qui a été chargé de préparer une onzième édition. Il en a profité pour refondre complètement l'ouvrage, en l’augmentant considérablement par des chapitres relatifs aux questions nouvelles : électricité, turbines, automobiles, etc. Les Formules et Tables conservent néanmoins la concision et la clarté qui ont fait leur succès, et la nouvelle édition parait devoir fournir, comme ses devancières, une longue et brillante carrière. 2° Sciences physiques Bourgeois(Léon),Répétiteur à l'Ecole Polytechnique, Assistant au Muséum.— Sur quelques Instruments d’Optique d'un usage courant dans les Labora- toires. — 1 broch. p. in-4° de 36 pages. Hachette et Cie, éditeurs. Paris, 1907. En 1873, le regretté Georges Salet faisait paraître, dans le Dictionnaire de Chimie pure et appliquée de Ad. Wurtz, un important article qui, sous le titre : Lumière (Applications), donnait « quelques détails sur l'usage des instruments d'Optique qui peuvent ètre utiles aux chimistes ». M. Bourgeois s'est proposé, dans un article publié tout dernièrement sous le même titre dans le deuxième Supplément au Dictionnaire de Chimie [6, 247-262}, de mettre au courant des récents progrès de la science et de compléter en quelques points l’article de Salet. Matignon (Camille), Professeur suppléant au Collège de France, Maitre de Conférences à la Sorbonne. — L'Electrométallurgie des fontes, fers et aciers. — 1 vol. in-8 de 96 pages, avec 31 figures. (Prix: 4 fr. 50.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1907. Il est, je crois, peu de questions qui préoccupent plus les industriels que l'électrométallurgie; durant ces toutes dernières années, l’électrosidérurgie a pris une importance considérable. Aussi doit-on être recon- naissant aux techniciens des renseignements qu'ils veulent bien rassembler sur ces sujets si intéressants. La question à fait de tels progrès qu'en quelques mois le livre que présente M. Matignon — et qui est, en somme, un résumé du Rapport de la Mission canadienne envoyée, il y a quelques années, en Europe, pour étu- dier l'Electrosidérurgie, et de quelques documents qui étaiént présentés à l'Exposition de Liége — n’est plus entièrement au point. On y trouvera néanmoins, et sous une forme con- densée, des renseignements sur les procédés Héroult, Keller, Stassano, Kjellin, Schneider, Girod et Gin. Ce petit ouvrage se termine par quelques données sur la fabrication de la fonte au four électrique et sur les applications du four électrique à la métallurgie du cuivre, du nickel et du zinc, toutes questions à l’ordre du jour et sur lesquelles on sera heureux de trouver des indications précises. L. GUILLET, Docteur ès sciences, Ingénieur des Arts et Manufactures. Balland (A.), Ancien Pharmacien principal au Labo- ratoire des Expertises du Comité de l'Intendance.— Les Aliments (chimie, analyse, expertise, valeur alimentaire). — 2 vol. de 430 et 505 pages. J.-B. Baillière et fils, éditeurs. Paris, 1907. A notre époque où les questions d’alimentation sont à l’ordre du jour, le traité de M. Balland sera précieux 900 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX aux travailleurs. Ce n’est point un ouvrage de théories, ni de vulgarisation, mais un ensemble de documents précieux sur la composition chimique des substances alimentaires les plus usuelles et les plus rares. L'au- teur, qui s’est fait connaître par ses nombreux travaux de Chimie alimentaire, a réuni ses analyses person- nelles et les a confrontées avec celles des autres chi- mistes. Il a fait là un travail comparable, par son impor- tance, à ceux de Kænig et de Atwater. Le premier volume est entièrement consacré aux céréales ; le second comprend les légumes, les fruits, les condiments, les viandes, les laitages, les conserves, les boissons, les fourrages, et se termine par quelques éclaircies sur la distribution du phosphore et du soufre dans les aliments. Les médecins qui s'occupent de questions d’alimen- tation, les fonctionnaires chargés du ravitaillement des armées, les experts spécialisés dans les industries de la meunerie, de la boulangerie, de l’épicerie, des conser- ves et des fourrages, trouveront dans le livre de M. Bal- land des documents précis qu'ils pourront utiliser en toute confiance. Ce traité est un véritable « dictionnaire d'alimentation ». MarceL LABBÉ, Médecin des hôpitaux, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. 3° Sciences naturelles Dienert (Fr.), Docteur ès sciences, Chef du Service de surveillance des Sources de la Ville de Paris. — Hydrologie agricole. — 1 vol. de 450 pages, aver figures, de l'Encyclopédie agricole. (Prix : 5 fr.) J. B. Baïillière et fils, éditeurs. Paris, 1907. L'ouvrage de M. Dienert peut compter sur un bon accueil, parce qu'il vient bien à son heure. Il s'adresse à tous ceux que la question si importante des eaux intéresse, à un titre quelconque, tels les architectes, hygiénistes, chimistes et agronomes. Les progrès réalisés dans cet ordre d'idées pendant les dix dernières années sont considérables ; le lecteur s'en convaincra en parcourant ce petit traité, au style précis et sobre, dont les documents statistiques sont tirés des meilleurs auteurs, dont toutes les infor- mations sont contrôlées, souvent par l'auteur lui- même et jusque dans les détails, dont l'exposition claire le met à la portée de tous. Bien que l’auteur ait intitulé l'ouvrage « Hydrologie agricole », parce que l'Agriculture est de toutes les branches de l’activité humaine celle qui a le plus besoin d’eau, et que, de ce chef, le livre a l'apparence d'un traité général, c’est un traité bien spécial, écrit par un spécialiste qui, depuis de longues années, a étudié l’origine et la qualité des eaux captées par la Ville de Paris. Ajoutons d'ailleurs que plusieurs chapitres nous donnent des aperçus bien nouveaux. L'auteur commence par l'étude de l'origine et de la circulation des eaux souterraines, et, dans ce but,. met la spéléologie souvent à contribution. Nous recueillons ici le fruit de sept années de tra- vail approfondi, consacrées à l'étude de cette circula- tion souterraine des eaux; nous apprenons à connaître l'application de la fluorescéine, du sel marin, de la levure de bière à la détermination d'un périmètre d'alimentation. L'auteur a dégagé de cette étude quelques lois, et il nous montre ainsi très judicieu- sement qu'une science ne peut progresser qu'en s'appuyant, avec circonspection il est vrai, sur quel- ques lois fondamentales que les expériences doivent vérifier ou modifier par la suite. L'examen de la qualité des eaux montre combien l'application, à l'étude des eaux potables, de la méthode de la conductibilité électrique, introduite par l’auteur en 1902, a été féconde en résultats, notamment dans le cas où les analyses chimiques, bactériologiques, les connaissances géologiques, étaient impuissantes à fournir des résultats satisfaisants. superficielles ou souterraines et décrit, en particu- lier, le forage des puits à la dynamite, méthode réel lement précieuse dans maintes circonstances. ' Le livre se termine par les procédés de stérilisation des eaux potables et l'évacuation des eaux usées. Le texte est illustré par de nombreuses gravures réunies en tableaux instructifs; ajoutons qu’une bonne bibliographie aurait été fort appréciée: c’est une petite lacune. Le sujet traité est donc très vaste; le petit volume est appelé à rendre de très réels services, non seu- lement à ceux qui travaillent dans les laboratoires, mais encore aux praticiens, et il pourra être consulté avec grand fruit par tous ceux que la question si capi- tale des eaux potables préoccupe à n'importe quel L E. Kayser, degré. à Directeur du Laboraloire de fermentation - à l'Institut national agronomique. Grandeau (L.), /nspecteur général des Stations agro- nomiques, Rapporteur genéral de l'Agriculture à l'Exposition de 1900. — L'Agriculture et les Insti- tutions agricoles du monde au commencement du xx' siècle. 7. III et 1V. — Imprimerie nationale. Paris, 1907. C'est la suite de l'ouvrage dont les tomes I et II ont été présentés ici antérieurement. Dans le tome II, nous trouvons ce qui est relatif aux OEuvres agricoles en France. L'exposé, rédigé ailleurs, par M. Dabat, sur les Enseignements agricoles créés ou subventionnés par le Ministère de l'Agriculture, a servi de base à un exposé plus succinct. Nous nous permettrons de signaler qu'il existe ici des lacunes en ce qui concerne l’enseigne- ment agricole privé, ou même en matière d'enseigne- ment agricole ressortissant à plusieurs départements d'Etat : il v a en France des Instituts agricoles, des Ecoles d'industries agricoles ou techniques, des cours agricoles d'Université analogues à ceux qui sont signalés dans les Universités étrangères. Quand les nations - nouvellement outillées, comme le Japon, veulent amé- liorer leurs services d'enseignement agricole, chacun sait où se trouvent les modèles suivis : ce sont les ensei- gnements agricoles et les Laboratoires de recherches des Universités ou annexes d'Universités, comme ceux d'Allemagne, des Etats-Unis ou de France, qui sont. imités. D'autre part, telle Ecole libre d'agriculture de France, ayant une réputation connue très loin à l'étranger, méritait peut-être une petite mention, puisqu'on n'a pas ménagé les pages aux petits labo- ratoires d'analyses agricoles de cantons ou de sous- préfectures (pages 37-57), qui reçoivent parfois 300 francs de subvention du Département de l'Agriculture, et qui sont sans intérêt aucun au point de vue mondial. L'exposé relatif à l'Agriculture aux colonies fran- çaises fait, avec raison, état de récentes publications, « quelques-unes postérieures à 1900. Cet exposé donne la première vue d'ensemble sur les races animales de nos colonies. Beaucoup de cultures sont traitées un peu brièvement, mais le cadre de l'ouvrage ne com- portait peut-être pas un plus grand développement. L'auteur ne semble pas très optimiste en matière de Forèts coloniales et revient à plusieurs reprises sur leur pauvreté en matériel vendable. C'est là peut-être une opinion discutable : les Services Forestiers colo- niaux font de belles recettes annuelles et méritent déjà beaucoup par les résultats acquis, notamment en Indo-Chine et dans l'Afrique du Nora. Le tome IV comprend d'abord l’étude de l’agriculture américaine. Rien n’est plus suggestif que d'approfondir un peu le développement de l’industrie agricole aux Etats-Unis et au Canada, l’organisation du commerce extérieur des denrées agricoles, le grand développe- ment de certaines institutions agronomiques avec leurs statistiques et leurs publications diverses. On trouvera dans l'ouvrage de M. Grandeau une esquisse et un aperçu de l'organisation savante du Ministère de dut ÿ L'auteur s'occupe enfin de la captation des eaux | l'Agriculture de Washington, un des merveilleux ou- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX tils de la richesse économique de l’Union Américaine. * Le Chili, le Mexique, et surtout la République Argen- tine, pays de colonisation latine, doivent retenir aussi l'attention par leur évolution progressive accentuée. En ce qui concerne le Brésil, la question du café, pré- cisément parce que bien connue, est sobrement imdi- “quée. Une place plus large est donnée à l'étude, plus nouvelle, du caoutchouc. L'auteur consacre ensuite la seconde moitié de son livre à l'exposé de deux questions capitales pour l'agri- culture mondiale : la production des engrais minéraux et l'alimentation de l'homme et du bétail. Cette der- nière partie est ainsi l'occasion d’un exposé sur la technologie et les industries agricoles. C’est avec raison que cette documentation figure dans un tel ouvrage : à notre époque, en effet, les questions économiques relatives au lait, aux diverses boissons, au sucre et aux féculents sont de premier ordre pour la prospérité des classes rurales ; elles sont aussi de premier ordre au point de vue du commerce international. EDmonD (AIN, Directeur des Etudes agronomiques et coloniales à l'Université de Nancy. 4 Sciences médicales Morax (D: V.), Ophtalmologiste de l'Hôpital Larihoi- sière. — Précis d'Ophtalmologie.— 1 vol. in-8 de xx- 640 pages avec 339 figures et 3 planches en couleurs. (Prix: 42 fr.) Masson et Cie, editeurs. Paris, 1907. L'auteur a su donner à ce précis, orné de figures pour la plupart inédites, une tournure originale et per- sonnelle. La disposition des matières est telle que le néophyte peut aborder le livre sans préparation; il est introduit systématiquement, méthodiquement et gra- duellement dans le bel art de l'Ophtalmologie. Le premier chapitre du Précis expose la marche de l'examen clinique et la technique opératoire (désin- fection de l'opérateur, du champ opératoire, stérilisa- tion des instruments, des liquides et objets de panse- ment, pansements). L'on sait que c’est le premier cha- pitre d’un livre qui est le mieux gravé dans l'esprit du lecteur; aussi jugeons-nous excellent de le fami- liariser dès le début avec la facon de faire qui se répè- tera à chaque examen, à chaque intervention. Par un exposé concis et clair, l'auteur entre en ma- tière en traitant de la région sourcilière, de la région palpébrale, de l'appareil lacrymal, de la conjonctive, de la cornée, de la sclérotique, de l'iris, du corps ciliaire, du cristallin, de l'ophtalmoscope et de l'examen fonc- tionnel, du corps vitré, du nerf éptique, de l'appareil nerveux intra-cranien, de la vision, de l'appareil neu- romoteur, de l'orbite, en autant de chapitres. Partout il dégage les traits essentiels et réalise ainsi le prodige d’être complet dans un cadre fort restreint, tout en réservant une grande place aux figures. Les interventions opératoires, en particulier les petites, telles que l’incision ou le cathétérisme des voies lacrymales, par exemple, sont exposées avec soin et illustrées par des figures claires. L'étiologie des con- jonctivites et leur répartition géographique sont trai- tées avec une compétence particulière. Rien n’est supposé connu; tout est exposé avec soin et mis ainsi à la portée du débutant. Nous recommandons le livre de Morax à tous. Au praticien général, il permettra de faire correctement ce qui est de son ressort; à ceux qui se destinent à l'oph- talmologie, il donnera la première base de leurs notions spéciales ; à l'étudiant, il enseignera les données né- cessaires pour passer les examens. Les notions qu'il donne sont avant tout des notions utiles et pratiques. L'exposé en est si clair qu'il est impossible de ne pas les comprendre à première lec- ture et que celle-ci n’exige aucun effort. L'ordonnance du livre est telle que tout renseigne- ment peut être trouvé facilement. Débarrassées de toute description routinière, les questions sont partout 901 mises à jour et au point, et toutes les parties du livre sont également soigées. D' E. SULZER, Médecin de la Fondation ophtalmologique Ad. de Rothschild. 5° Sciences diverses Ray Lankester (E.), 1. A. D., Honorary fellow of Exeter College, Oxford, Correspondent ofthe Institute of France. — The Kingdom of Man. — 1 vol. in-8° de 491 pages et 56 figures dans le texte(Prix:#4 fr. 40). A. Constable and Co., editeurs. Londres, 1907. Ce volume est formé par la réunion de trois adresses ou articles, qui n'ont entre eux qu'un lien assez arti- ficiel. Dansle Fils insurgé de la Nature, M.RayLankes- ter retrace à grands traits la formation des espèces par la sélection des plus aptes, évolution dont le dernier degré a été l'apparition de l'Homme, issu d'un Simien avec un cerveau éducable cinq ou six fois plus gros que celui d'aucun Singe actuel, doué de connaissances, de volonté, de raison et de conscience; cette puissance nouvelle fait servir la Nature à son idéal de bien-être au lieu d’obéir passivement à ses lois. Mais il est pos- sible que cette situation de rebelle vis-à-vis de la méthode de la Nature ne soit pas sans inconvénients futurs; si l'Homme arrive à lutter efficacement contre toutes les maladies, sa multiplication, déjà très rapide, prendra de telles proportions qu'il lui faudra envisager des restrictions au droit de multiplier, ou chercher des sources nouvelles d'énergie. A ce propos, M. Ray Lankes- ter, fellow honoraire d'Oxford, attaque vivement les tendances conservatives et trop exclusivement litté- raires des Universités anglaises, et spécialement d'Ox- ford, où le grec, le latin et l'histoire continuent à être la base de l'enseignement que reçoivent les futurs con- ducteurs de la communauté; il faudrait donner une part plus grande aux sciences de la Nature. Le second essai traite des progrès des sciences pen- dant les vingt-cinq dernières années : gaz inertes de Rayleigh et Ramsay, rayons X, radio-activité el radium, télégraphe sans fil, carte du ciel, progrès ininterrompus en Géologie, Botanique, Zoologie, découvertes capitales en Pathologie, depuis les antitoxines jusqu'au Spiro- chæte pallida de Schaudinn. Et, en face de ce superbe sommaire, il regrette vivement qu'il n'y ait pas, en Angleterre du moins, un progrès correspondant de l'influence de la science dans la vie de la communauté, et que si peu d'encouragements et d'aide soient apportés aux savants, ce qu'il attribue à l'éducation purement littéraire des ministres et secrétaires d'Etat, et à l’in- différence injustifiée du publie, si intéressé cependant aux progrès de la connaissance scientifique. La troisième partie : « Les revanches de la Nature : la maladie du sommeil» est une histoire dés maladies à Trypanosomes; c'est un exemple des désharmonies provoquées par l'Homme sans s'en douter, en résistant à la règle antique de la sélection et de la survivance du plus apte, en dérangeant, par ses migrations, ses in{ro- ductions d'animaux et de plantes dans des régions nouvelles, l'équilibre lentement établi dans la Nature. La science seule peut permettre à l'Homme de maîtriser les parasites microscopiques qui luttent contre lui; M. Ray Lankester, de nouveau, réclame des Pouvoirs publics une organisation rationnelle de la recherche et l'aide matérielle indispensable. L. CuÉNoT, Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy, Nansouty (Max de). — Actualités scientifiques, 3e année. — Avol. in-12, de 361 pages. (Prix: 3 fr. 50.) Schleicher frères, éditeurs. Paris, 1907. Le grand public accueille avec un intérêt toujours croissant les belles études de vulgarisation que lui donne M. de Nansouty, sous le titre. « Actualités scientifiques ». Un succès, auquel nous sommes heu- reux d'applaudir, a désormais consacré cettte intéres= sante tentative. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 21 Octobre 1907. M. le Président annonce à l’Académie le décès de M. M. Lœwy, membre de la Section d’Astronomie, et de M. G..-A. Zeuner, correspondant pour la Section de Mécanique. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES.— M. G. Humbert dé- montre quelques formules relalives aux minima des classes de formes quadratiques, binaires et positives. — M. E. Goursat présente ses recherches sur les équa- tions intégrales. — M. P. Boutroux communique les résultats qu'il a obtenus dans l'étude des intégrales de l'équation différentielle : y! + A,y°+ A,7—=0.—M.G. Bigourdan poursuit l'exposé des observations aux- quelles se prêtera le prochain passage de Mercure devant le Soleil et rappelle les apparences physiques variées qui se sont montrées dans le passé. — M. B. Baïllaud signale l'achèvement de l'installation, au sommet du Pic du Midi, d'un grand instrument astro- nomique, analogue à l'instrument photographique inter- national. — M. J. Guillaume présente ses observations de la comète Mellish (1907 e), faites à l'équatorial coudé de l'Observatoire de Lyon. — M. Borrelly transmet ses observations de la même comète, faites à l'Observatoire de Marseille. — M. G. Costanzi montre que les maxima (absolus) des anomalies négatives de la pesan- teur ne se vérifient point le long des axes des chaînes de montagnes, mais suivent une ligne parallèle à l’axe mème ‘et opposée à la plus grande dépression voisine. De même, les maxima des anomalies positives ne se trouvent pas sur les dépressions, mais se déplacent dans le sens des anomalies positives. 20 ScreNces PHYSIQUES. — M. H. Pellat explique la complexité des raies spectrales, non par l'existence d'une masse de corpuscules variés à l'intérieur de l'atome, mais par la variation de la masse de ceux-ci due à l’empiètement des champs magnétiques créés dans leur mouvement par deux ou plusieurs corpus- cules. — M. C. Matignon a préparé le carbure d'alu- minium CSAÏ : 1° en chauffant au four Perrot un mé- lange intime des deux composants; 2° par l'ignition en un point d'un mélange de C avec un excès d'Al; 3° par l'action des chlorures de carbone sur Al. — M. Z. Tchou- gaeff, à propos d'une note récente de M. Pozzi-Escot, rappelle qu'il a indiqué, il y a deux ans, une méthode sensible pour la recherche du nickel en présence du cobalt, et basée sur l'emploi de la diméthylglyoxime en présence d'AZH*. — M. G. Blanc, en faisant réagir CHI sur l'acide 1:1-diméthylbutane-1 : 4: 4-ricarbo- nique, et chauffant l'acide formé, a obtenu l'acide axè-tri- méthyladipique, F.113°-114°. L'anhydride de ce dernier, distillé lentement, se cyclise en une cétone qui, chautrée avec CH*Mgl, donne un alcool tertiaire; celui-ci, dis- tillé à son tour, perd de l’eau et fournit le campholène. — M. C. Gerber a constaté que la présence de fluorure de sodium accélère la coagulation du lait par les pré- sures végétales. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. P. Salmon montre que l’anilarsinate de soude, par ses propriétés curatives dans les lésions syphilitiques, par sa toxicité réduite et l'absence d'accidents graves d’intolérance, par l'absence de réactions locales et de douleur au point d'injection, présente de grands avantages pour le traitement de la syphilis. — M. A. Massaglia estime que les crises try- panolytiques sont dues à la formation d'anticorps dans le sang des cobayes infectés de trypanosomes; les para- sites, en petit nombre, qui échappent à la destruction sont ceux qui donnent lieu aux rechutes. — MM. A Giard et C. Cépède montrent que la ponte de Je morue dans le Pas-de-Calais, le sud de la mer du Non et la Baltique a lieu en hiver et que le maximum s produit vers le milieu de février. La date du maximu semble devenir plus tardive à mesure que l'action de courants dérivés du Gulf-Stream devient moins sen: sible. — M. H.: Hubert donne un aperçu de la géologi du Dahomey d'après ses observations dans la colonies il a reconnu trois séries de dépôts : des roches schis= teuses anciennes, des grès continentaux non fossilifères et des calcaires fossilifères. Séance du 28 Octobre 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. Boutroux pré- sente ses recherches sur les points critiques trans- cendants et sur les fonctions inverses des fonctions entières. — M. P. Chofardet adresse ses observations de la comète 1907 e (Mellish) faites à l'équatorial coudé de l'Observatoire de Besancon. La comète, de 9° gran- deur, a l'aspect d'une condensation diffuse, de forme circulaire, sans noyau bien distinct. — MM. Sy et Vil- latte communiquent leurs observations de la même comète, faites à l'Observatoire d'Alger. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M.-H. Guilleminot décrit un nouveau quantitomètre pour rayons X, basé sur la mesure de la fluorescence produite sur une plage de platinocyanure de baryum et sa comparaison avec une plage voisine éclairée par une source constante de radium. — M. G. D. Hinrichs décrit une méthode nouvelle de détermination des poids atomiques de pré- cision simultanément pour tous les éléments présents dans une seule réaction chimique. Il arrive à la con- clusion que la doctrine de Stas sur l’incommensu- rabilité des poids atomiques est erronée et que tous les poids atomiques peuvent être représentés par des nombres exacts. — M. V. Auger a obtenu, par réduction d'une solution chlorhydrique d'anhydride arsénieux avec l'acide hypophosphoreux en présence « d'alcool très concentré, un produit rouge-brun, solu- ble dans les alcalis en donnant une solution colloïdale d'arsenic, renfermant un peu de phosphore. — M. A. Duboin a préparé quelques nouveaux sels dou- bles, tels que l’iodomercurate de fer Fel*.2Hgl°.6H°0, et les oxyiodures Hg0.2A11°.3 Hgl°.15 H°0 et 2AIP%.5 Agl. 2Ag0.13H°0. — M. de Forcrand a déterminé la cha- leur de formation des oxydes de lithium à partir des éléments : Li*0 ——+ 143,32 cal.; Li0H=—+ 117,3 cal.; Li0?=—+ 152,65 cal. — M. F. Bordas a constaté que les diverses variétés de corindon naturel (saphir, topaze) changent de couleur sous l’action des rayons du ra- dium ; la variation de couleur va du rouge au violet, au bleu, au vert et au jaune. Ces expériences montre- raient que les colorations de ces pierres précieuses ne sont pas dues chacune à un oxyde métallique spécial. — M. G. Chesneau a étudié les causes d'erreur dans le dosage du phosphore des fontes, fers et aciers. Il recommande l'emploi d'un grand excès de réactif molybdique, le lavage du phosphomolybdate à l’eau pure plutôt qu'à l'eau faiblement azotique, l'emploi d'une température très modérée. — M. P. Gaubert a observé que la cholestérine, chauffée avec l'acide gly- colique ou avec la glycérine, fournit deux composés qui présentent les phénomènes des cristaux liquides. : — M. F. Maignon a reconnu que les muscles possè- dent une amylase, agent de la transformation du gly- cogène en glucose. Cette transformation, qui s'effectue d’une facon incessante à l’état normal, est exagérée sous certaines influences, et particulièrement lors de ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 903 lécrasement des tissus, qui favorise la mise en contact de l’'amylase et du glycogène. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. J. Lignières a observé que les scarifications ne sont pas indispensables à la manifestation de la réaction locale de la peau à la tuberculine; on peut la faire apparaître par simple friction et dépôt de tuberculine pure. — MM. E. Pril- “lieux et Maublanc montrent que la maladie du rouge du Sapin pectiné, signalée dans le Jura, est bien con- “nue; elle est due à un champignon parasite, le Fusi- -coccum abietinum (Phoma abietina). Les ravages sont moins importants qu'on ne l'a dit; on y remédiera en mélangeant davantage le hêtre au sapin dans les ré- gions basses, et en faisant prédominer l’épicéa sur Je sapin dans les régions hautes. — M. E. Henry à éga- lement étudié la maladie du rouge du sapin et reconnu qu'elle est due au Phomia abietina. Tout en dimi- nuant la vitalité de l'arbre, elle ne le fait jamais périr, et il est à espérer que, comme en d’autres régions, la maladie disparaîtra naturellement. — M. Letalle a étu- dié la transparence et la couleur de l’eau de mer dans la Manche. La transparence est plus grande en été qu'en hiver et augmente à mesure que l’on s'éloigne des côtes; elle s'accroît aussi avec la température. L'eau tire davantage sur le bleu à mesure que sa tem- pérature s'élève. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 22 Octobre 1907. M. le Président annonce le décès de M. A. Sevestre, membre de l'Académie. . M. A. Chauffard présente le Rapport sur le concours pour le Prix Louis. — M. E. Vidal examine le fonc- tionnement de la loi Roussel depuis sa promulgation et estime que, si elle n’a pas justifié entièrement les éspérances qu'elle avait fait concevoir, la faute en revient surtout aux hommes qui ont été chargés de l'appliquer. Il serait nécessaire, en particulier, que les Comités départementaux prennent plus d'importance etsoient chargés de la direction générale du service de protection des enfants du premier âge. — M.Ch.Mou- reu présente de nouvelles recherches sur les dégage- ments gazeux des sources thermales. — MM. Gaube et Tribot donnent lecture d’un travail intitulé : La naph- taline est un poison du globule sanguin. Séance du 29 Octobre 1907. M. F. Widal présente le Rapport sur le concours pour le prix de l’Académie. — M. Marage lit un Mé- moire sur l'audition de la phonation chez les sourds- muets. — M.le D' Rémy donne lecture d'un travail sur le rôle des extenseurs et des fléchisseurs dans la pré- hension manuelle. — M. F. Henneguy communique ses recherches sur l'origine des cellules sexuelles et leur répartition primitive chez l'embryon de certains Vertébrés. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 19 Octobre 1907. M. A. Giard décrit, sous le nom d'Anisarthrus Pelseneeri, un Bopyrien parasite nouveau trouvé sur l'Athanas nitescens Leach. — MM. A. Calmette, M. Breton et G. Petit ont observé que la tuberculine introduite chez les cobayes, soit à doses faibles uniques, soit à doses faibles répétées et espacées dans le péri- toine ou sous la peau, accroît très manifestement le pouvoir phagocytaire des leucocytes vis-à-vis du bacille de Koch. Par contre, l'injection unique ou répétée de fortes doses de tuberculine le réduit. — M. M. Nathan montre que, dans certaines conditions, la cellule de Kupffer, qui représente en réalité une individualisation du plasmode capillaire intra-hépatique, est susceptible d’un retour vers la forme syncytiale, — M. E. Sacqué- pée a étudié une épidémie d'intoxications survenues après l'ingestion de lard salé ; les recherches bactério- logiques montrèrent la présence constante de l’enté- rocoque. — M. J. Lemaire présente quelques obser- vations sur la cuti-réaction à la tuberculine. M. J. Lépine signale les variations et les anomalies de l’ophtalmo-réaction chez les aliénés. Elle peut se trouver en défaut, soit par suite de la réduction des réactions de l’organisme, soit à cause d’une insuffisance des processus vaso-moteurs et trophiques.—M. F. Dévé montre que l’action des sucs digestifs sur les œufs du tænia échinocoque n’est nullement indispensable pour mettre en liberté l'embryon hexacanthe.— M.R.Dubois décrit les métamorphoses du Distome parasite des Mytilus perliers. — MM. G. Meillère et A. Pettit ont constaté que l'élimination fécale et l'élimination rénale du plomb chez des animaux auxquels on a injecté du nitrate de plomb sont un peu plus marquées chez les sujets atteints de néphrite que chez les sujets sains, tout en restant faibles dans les deux cas. — M. E. Cou- vreur et Me M. Bellion ont observé l’absence totale de sucre dans le sang de l’escargot. — M. P. Marchal présente ses recherches biologiques sur le Chermes pini. — M. O. Josué montre que l’artério-sclérose est le résultat de la mise en œuvre de moyens défensifs destinés à sauvegarder l'intégrité des conduits artériels et leur aptitude fonctionnelle ; mais ces moyens sont imparfaits puisqu'ils deviennent eux-mêmes le point de départ d’altérations, puisque les modifications hyper- plasiques s’accompagnent de lésions dégénératives. — M. J. Cantacuzène a constaté l'apparition de précipi- tines dans le sang à la suite de l’inoculation de sérum normal par la voie stomacale. — MM. F. Widal, P. Abrami et M. Brulé distinguent dans les ictères hémolytiques deux sortes d'hémolyse : une par fra- gilité globulaire, l’autre par action plasmatique. — MM. G. Guillain, L. Boidin et N. Fiessinger ont étudié les propriétés des humeurs de lapin immunisé avec le sérum d'un malade guéri du charbon. — M. C. Fleig a reconnu que le sérum glucosé nécessite, pour une même élimination moléculaire de matériaux d'élaboration, pour un même lavage du sang en quel- que sorte, un travail rénal total beaucoup moindre que celui qu'exige le sérum chloruré ordinaire; on aura donc souvent intérêt à le substituer à ce dernier. Séance du 26 Octobre 1907. M. E. Gelié a observé que le nombre des sons vocaux qui sont émis, le cavum fermé, est assez restreint; la vigueur de l'émission paraît être la condition de cette fermeture (voyelles pures, consonnes explosives). La cavité buccale peut, à elle seule, donner naissance aux sons voyelles, — MM. H. Labbé et G. Vitry montrent que, dans une digestion pancréatique aseptique, la dé- gradation albuminoïde passe par un stade tel qu'il y a mise en liberté de complexes éthérifiés par l'acide sul- furique, soit des sulfo-conjugués tels que ceux qui sont dosés dans les éliminations urinaires. — M. P. Cornet estime que l’obstruction tubaire, la cavité close n’est pas la loi pathogénique de l'otite aiguë; l'infection de l'oreille moyenne est, au contraire, liée à la perméabi- lité de la trompe d'Eustache. — M. C. Fleig a constaté que la plupart des liquides organiques (transsudats et exsudats) peuvent jouer le rôle de liquides nutritifs arti- ficiels pour les organes isolés. — MM. J. Lépine et V. S. Popoff ont observé, chez les aliénés ayant reçu des injections de nucléinate de soude, une réaction vio- lente de leurs organes hématopoïétiques. — M. L. Bour- dier a retiré des fleurs de la verveine un glucoside cris- tallisé, lévogyre, la verbénaline. Il fond à 181°,5 et réduit la liqueur de Fehling. — M. P. Marchal pré- sente ses recherches sur les Chermes du groupe du Ch. piceae Ratz. — MM. J. Bordet et O. Gengou mon- trent que leur microbe de la coqueluche est identique à celui de A. et H. Soulima, mais il est très différent de celui de Jochmann et Krause. — M! L. Kalabou- koff et M. E. F. Terroine ont reconnu que l'addition 904 de lécithine au suc pancréalique n'active jamais son action dédoublante sur la monobutyrine et très peu son action sur l'huile. Le pouvoir activant de la bile sur la lipase pancréatique doit être entièrement rap- porté aux sels biliaires. — M.L. Nègre a mis en évi- dence, dans la sarcosporidiose de la souris, l'existence d’un stade intestinal résistant du parasite, déchargé à l'extérieur avec les excréments et propageant la mala- die. — M. E. Fauré-Frémiet a découvert un nouvel Imfusoire hypotriche, qu'il décrit sous le nom d'Ancys- tropodium Maupasi. — M. Ch. Dopter a constaté que le vaccin préparé par les bacilles dysentériques sensi- bilisés est infiniment moins toxique que l’inoculation de bacilles seuls; il confère l’immunité en général au bout de quatre jours. Pendant que l'animal prépare son immunisation, il n’est pas plus sensible que les témoins à l'épreuve mortelle. — M. A. Marie a recher- ché si la cellule cérébrale pouvait être immunisée, par injection répétée, contre le chlorhydrate de morphine. Ce n’est pas le cas, mais la cellule cérébrale ne pré- sente pas davantage d'hypersensibilité. — MM. P. No- bécourt et Ch. Mantoux ont étudié la cuti et l'ophtal- mo-réaction dans la tuberculose expérimentale du lapin. La première a été constamment négative; la seconde s'est montrée fort inconstante. — M. J. de Meyer montre que le pouvoir glycolytique du sang intervient dans une très large mesure dans la régula- tion de l'équilibre glycémique et qu'un trouble dans la fonction glycolytique provoque nettement l'appari- tion des deux symptômes les plus pathognomoniques du diabète. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 27 Juin 1907 (suite). MM. T. Turner et D. M. Levy ont étudié le recuit du cuivre en rapport avec sa dilatation. Is ont employé une forme spéciale d’extensomètre, en connexion avec un pyromètre de Le Chatelier, pour tracer les varia- tions de longueur des barreaux métalliques pendant le processus du recuit, et ils ont ainsi obtenu des courbes continues reliant la dilatation à la température. Le cuivre recuit a donné une ligne parfaitement droite, de même, d’ailleurs, que le cuivre étiré et le fer forgé. Il apparaît donc que la transformation de l'état dur, élastique, du cuivre travaillé en métal doux n’est pas accompagnée d'une variation de longueur. Comme les changements allotropiques d’un élément produisent des altérations de volume marquées, on doit conclure que les variations causées par le travail mécanique ou par le recuit des métaux ouvrés produisent seulement un réarrangement interne des molécules métalliques, mais sont d'un ordre différent des changements phy- siques et chimiques regardés comme allotropiques. — M. F. W. Aston décrit uz nouvel espace sombre catho- dique, proche de la cathode et intérieur à l’espace sombre de Crookes, qu'il a découvert dans l'hélium et l'hydrogène. La longueur, qui varie de 0,2 à 4 milli- mètre, est presque indépendante de la pression, mais varie comme l'inverse de la racine carrée de la densité du courant. La chute de potentiel à travers le nouvel espace sombre est constante pour le même gaz 30 volts pour He et 15 pour H. L'auteur montre que ce nouvel espace sombre doit être considéré comme la distance à travers laquelle les électrons tombent pour atteindre l'énergie suffisante pour ioniser le gaz par collision avec ses molécules. Communications faites pendant les vacances. M. W. G. Duffield: L'effet de la pression sur le spectre de lare. 1. Fer. L'auteur décrit d'abord le réseau du spectroscope employé à l'examen du spectre, puis le’‘cylindre: à pression dans lequel l'arc est formé entre des pôles métalliques opposés à une fenêtre de verre par laquelle on observe. Voici les résultats obte- nus avec le fer: A. Elargissement: 1° Quand la pression ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES augmente, toutes les lignes deviennent plus larges. 2° Le montant de l'élargissement varie avec les diffé- rentes lignes, les unes devenant des bandes à haute pression, les autres restant assez définies. 3° L'élargis- sementpeut être symétrique ou non symétrique; dansle dernier cas, il est plus grand du côté du rouge. B. Déplace- ment: 1°Sous pression, la partie la plus intense de chaque ligne est déplacée de la position qu'elle occupe à la pression ordinaire. 2 Les lignes renversées aussi bien que les lignes brillantes sont déplacées. 3° Quand la pression augmente, le déplacement se fait du côté rouge du spectre. 4# Le déplacement est réel et n’est pas dû à l'élargissement non symétrique. 59 Les déplacements sont différents pour les différentes lignes. 6° Les lignes du fer peuvent être groupées en séries suivant la valeur de leur déplacement. 7° On peut ainsi distinguer trois groupes, dont les déplacements sont dans les rapports 1:2:4. 8 La relation entre la pression et le déplace- ment est, en général, linéaire. C. lenversement : 1° Quand la pression augmente, les lignes renversées deviennent d’abord plus nombreuses et plus larges. 2° La tendance des lignes à se renverser atteint un maximum vers 20 à 25 atmosphères, puis une nouvelle augmentation de pression réduit leur nombre et leur largeur. 4° Il y a deux types de renversement: symé- trique et non symétrique. 4° Chez les lignes renversées non, symétriquement, la portion renversée ne corres- pond pas, en général, à la partie la plus intense de la ligne d'émission, mais en général à son côté le plus réfrangible. D. Zntensité: 1° L'intensité de la lumière émise par l'arc au fer à haute pression est beaucoup plus forte qu'à la pression atmosphérique normale. 2° La pression produit des variations dans l'intensité relative des lignes. — M. T. H. Havelock: La disper- sion de la double réfraction et ses rapports avec la structure cristalline. L'auteur se demande jusqu’à quel point il est possible de considérer la double réfraction, produite artificiellement ou observée dans les cristaux naturels, comme due simplement à une distribution éolotropique de particules similaires. La théorie ordi- naire de la double réfraction naturelle ou artificielle la fait dépendre de la molécule individuelle. L'auteur cherche à l'expliquer par un réarrangement des molé- cules dans l’espace et développe la théorie des pro- priétés optiques d’un assemblage homogène de parti- : cules isotropes. Si le milieu se comporte comme un cristal uniaxe, la double réfraction, égale à la différence des deux principaux indices, est proportionnelle à (2,%-1)/n,, où », est l'indice de réfraction d’un milieu composé des mèmes particules, avec la même densité, mais arrangées dans l'ordre cubique simple. On en tire une loi de la dispersion de la double réfraction, pourvu que la dispersion de l'indice moyen », soit connue. Les résultats obtenus pour la dispersion de la double réfrac- tion produite dans CS? par un champ électrique con- cordent avec ceux qu'on déduit de la formule. L'auteur passe à la double réfraction dans les cristaux naturels et donne une explication de la dispersion anomale. — MM.H.G. Plimmer et J. D. Thomson présentent leurs recherches sur le traitement expérimental de la try- panosomiase chez les rats. Les cultures de trypano- somes employées étaient celles du surra et du nagana; une trentaine de médicaments ont été expérimentés, -entre autres des composés de la quinoline et des com- posés arsenicaux. Parmi ces derniers, c'est l’atoxyle qui a, de beaucoup, l'action la plus favorable fait d'abord disparaître entièrement les trypanosômes du sang; mais Ceux-ci réapparaissent et la mort s'ensuit au bout de quelque temps. Après des injections répétées d’'atoxyle, il se forme dans le sang une race de trypa- nosomes complètement résistants à l’atoxyle. Le Directeur-Gérant : Louis Oxivier. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. css hate y 2 18° ANNÉE 19 19 30 NOVEMBRE 1907 Revue générale CR Ve pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aüresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Astronomie L'observation des surfaces planétaires. — L'observation des surfaces planétaires est, dès l'abord, une des recherches les plus souriantes de l'Astronomie, et, parmi les professionnels, c'est à qui donnera les preuves de la meilleure définition, du pouvoir sépa- rateur le plus grand ; en même temps, se trouvent soulevées les questions les plus captivantes au point de vue philosophique sur la structure intime et les con- ditions des mondes voisins— touchant une vie analogue à la vie terrestre. Aussi est-ce à Mars, surtout, que l'on s’est adressé pour avoir des renseignements précis, comme étant le plus près de nous : malheureusement, après les découvertes les plus sensationnelles sur les canaux, leurs dédoublements, ete., l'opinion s’est un peu ressaisie en constatant, chez tant d'observateurs excellents, des désaccords flagrants. Quelle part doit-on véritablement retenir de tous ces travaux? Doit-on prendre pour cerlaines les observations, si précises, de Lowell? ou faut-il,au contraire,avec d’éminents auteurs, les traiter — à la forme courtoise près — de fantasma- gories ? Peu d'astronomes ont, autant que Denning, accumulé des documents sur les taches, axes de rotation, durée de rotation, particulièrement en ce qui regarde Mer- cure et Vénus; mais les incertitudes graves laissées en suspens, les divergences inexplicables, sont encore nombreuses. Cet auteur vient de conseiller ! aux ama- teurs l'examen physique de la surface des planètes; mais, lorsqu'il déclare considérer cette étude comme plusabor- dable, immédiatement, avec de faibles ressources, que celle de l'Astronomie de position, on reste assez étonné d’une conclusion aussi optimiste. Cependant, la longue expérience de cet astronome distingué est matière à réflexion, et les conseils qu'il donne, concernant le choix d'un instrument et la manière de s'en servir, doivent être pris en considé- ration ; mais le doute nous reprend, à nouveau, quand il vient nous dire que la présence d’un léger voile de brume, que le voisinage d'un centre industriel, la proxi- 2 The Observatory, t. XXIX. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. mité d'habitations, ne constituent pas des conditions défavorables. Sans doute, nous admettrons volontiers que la puis- sance d'une lunette n’est pas un facteur capital, et que l'aptitude spéciale de l'observateur et son entrainement y peuvent suppléer; mais, à nos yeux, les observations individuelles sont impuissantes et manquent d'autorité pour trancher un aussi grave débat. Le problème doit être abordé d'un tout autre côté, et il faut, bien au contraire, s’efforcer d'éliminer l'influence de notre atmosphère, influence perturbatrice de premier ordre : la Société Astronomique de France a tenté, à cet égard, une expérience très originale sur Jupiter, en faisant dessiner le disque de la planète, à la même heure, à partir des points les plus variés; un astronome de Paris, M. J. Mascart, qui s'est efforcé, dans une longue suite d'articles, de dégager les résultats de cette coopération, s'est trouvé en présence des dessins les plus disparates, qu'il s'agissait d’amalgamer. Nous aurons donc l’occasion de revenir sur cette question; mais, dès à présent, il faut être très scep- tique sur les observations particulières el restreindre nos ambitions sur la connaissance des détails pré- cis à la surface des planètes voisines. Et, s'il faut donner un conseil aux astronomes ama- teurs, c'est plutôt de les pousser vers des observations si- multanées, comme celles de Jupiter auxquelles 11 vient d'être fait allusion; à moins que, à la suite des beaux travaux de l'Observatoire de Lyon, avec les conseils si pratiques de M. Luizet, ils ne veuillent se consacrer à l'étude si passionnante des étoiles variables. Là encore, comme le montre Félix de Roy en des articles! que nous ne pouvons analyser faute de place, ils peuvent rendre de précieux services et accumuler d'importants documents. $S 2. — Art de l'Ingénieur La question des fumées à Paris. — Le Rap- port sur les opérations du Service d'inspection des établissements classés pendant l'année 1906, que 1 Sur l'observation des étoiles variables (Bulletin de la Société belge d'Astronomie, 1907). 12 12 906 M. Paul Adam vient de présenter au Préfet de Police, renferme d'intéressants renseignements sur cette importante question : Dans le cours de l’année, sur 847 plaintes diverses reçues par le Service d'inspection, 2#1, soit 28,45 °/o, étaient relatives aux fumées dégagées par les établisse- ments publics ou privés, et 122 étaient reconnues fondées. Sur ce nombre, 76 se rapportaient aux éta- blissements non classés et 46 seulement aux établisse- ments classés. Cette différence tient, évidemment, à ce que lesétablissements classés sont régulièrementsur- veillés, tandis que les autres, ne l’élant pas, ne sont pas habitués, comme les premiers, à se plier à une réglementation administrative. Toutefois, il est à espérer, dit M. Paul Adam, que les établissements non classés vont venir à résipiscence maintenant que les deux arguments qu'ils cherchaient à faire valoir vont leur échapper, c'est-à-dire l'exemple donné par les édifices publics et la prétendue dépense excessive nécessaire pour obtenir une bonne fumivo- rité. En effet, quoique certaines administrations publiques aient bien tardé à pratiquer la fumivorité, elles ont fini par suivre le progrès et, chez elles, des améliora- tions ont été obtenues. Quant à la dépense, les travaux de la Commission d'études sur les fumées nommée par le Préfet de la Seine ont apporté une lumière complète sur ce point. Pour attemdre le but qui lui avait été indiqué, la Commission a examiné plus de 200 propositions et visité 23 installations des meilleurs appareils qui lui ont été soumis, dont elle a ensuite discuté les principes, le mode d'exécution et les résultats. Puis elle a fait un choix des procédés et appareils dignes d'être expéri- mentés. L'Administration lui ayant donné la faculté d'utiliser les générateurs de l'usine élévatoire munici- pale du quai d’Austerlitz pour y installer successive- vement les appareils à essayer, la Commission entrepril alors une série d'expériences dont les résultats sont fort intéressants. Elle a communiqué au Préfet de la Seine un tableau des résultats obtenus par deux sysièmes, reposant l'un et l'autre sur l'envoi, au-dessus du combustible, d’un supplément d'air, à l'aide de jets de vapeur empruntés au générateur. Par ce moyen, on arrive à supprimer jusqu'à 58 °/ de l'intensité des fumées les plus noires, .— c'est-à-dire à éviter complètement la production de fumées noires, épaisses et prolongées, — et à supprimer 68 °/, de la masse totale des fumées. Ces résultats sont obtenus sans augmentation de dépense; les chefs d'industrie n’ont donc plus aucune raison de ne pas employer la fumivorité. Ajoutons que, dans l'industrie, pour éviter les fumées, et aussi par économie, on tend aujourd'hui à remplacer les générateurs de vapeur par des moteurs à gaz pauvre. Mais alors de nouveaux incon- vénients se produisent : bruit, trépidations, odeurs; car on n'a pas encore, pour construire et diriger ces appareils, l'expérience que plus d'un siècle a fait acquérir dans l'emploi des machines à vapeur. Si donc il faut espérer voir baisser le nombre de plaintes contre les fumées, cette amélioration sera compensée par une augmentation du nombre des plaintes contre le bruit : c'est ce que montre, en effet, la statistique de 1906. De même,le nombre de plaintes contre les pous- sières s'élève d'année en année, parce qu'en brülant les fumées les foyers soufflés donnent des poussières que les moyens connus permettent difficilement de retenir. Un inconvénient est remplacé par un autre, moindre évidemment, et qu'on n'est pas encore bien habitué à corriger. De 1899 à 1906, le nombre de plaintes fondées contre les poussières s’est élevé de 11 à 24. C’est par des dispositifs en chicanes, en changeant brusquement la vitesse des gaz par des variations de section des carneaux, ou en ayant recours à Ja force centrifuge, qu'on peut remédier au mal. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 3. — Physique La transmission, au moyen des ondes éle tro-magnétiques, des écritures, dessins @ photographies.— Les ondes hertziennes, dont l'en ploi d’abord ne sortait guère du laboratoire, ont été appliquées, dans ces dernières années, aux usagés scientifiques et techniques les plus variés. Il est vrai que la télégraphie sans fil reste toujours leur domaine par excellence ; mais la radio-téléphonie, à côté d'elle, peut d'ores et déjà réclamer une certaine attention: D'autre part, M. Branly, en France, et M. Torres de Quevedo, en Espagne, ont imaginé d'ingénieux dispo sitifs pour la commande à distance des machines et direction des bateaux et ballons. La dernière venue parmi ces applications des ondes électro-magnétiques est la transmission à distance des écritures et dessins: La transmission télégraphique des photographies; écritures et dessins sollicite actuellement l'attention des savants de plusieurs pays. A côté du procédé du Professeur Korn, bien connu en France, d’autres méthodes, promettant des résultats analogues, ont vw le jour dans ces derniers mois, et un avenir prochains nous réserve sans doute bien des surprises à cet égard Le procédé décrit ci-après permet de transmettre à distance des documents graphiques quelconques, saus l'intermédiaire d'un fil télégraphique; il vient d'être présenté, par l'inventeur, M. J. G. de Guillén-Garcia; à l'Académie Royale des Sciences et Arts de Barcelone: De mème que dans la transmission au moyen de la télégraphie ordinaire, il convient de distinguer, dans la transmission radio-télégraphique des documents graphiques, le cas des dessins ou écritures de celui des photographies. Il est vrai que, dans d'un et l'autre cas,, on se sert de deux stations radio-télégraphiques d'un système quelconque, où l'appareil de transmission, à la station de départ, et l'appareil Morse, à la station d'arrivée, sont remplacés par des cylindres de dimen-« sions identiques, tournant d'un mouvement synchrone sous l'action d'une minuterie ou d’un moteur. A la surface de chacun de ces deux cylindres est appliqué un style se déplaçant d'un mouvement rectiligne, de facon à y former des lignes hélicoïdales d'un pas et d'un diamètre identiques. Le style et le cylindre de l'appareil de transmission sont insérés dans le circuit d'une pile comprenant un relais, pour ouvrir ou fermer le courant d'un transfor= mateur ou autre appareil émettant des ondes électro- magnétiques. Le style de l'appareil récepteur, qui remplace celui de l'appareil Morse d'une station d'arrivée radio-télé= graphique quelconque, trace également des lignes noires ou colorées, d'une longueur variable suivant Ja durée d'émission des ondes. La figure 1 est une vue schématique d’une station de départ de télégraphie sans fil, pourvue du dispositif de transmission des dessins et écritures. La figure 3 est une vue schématique analogue du dispositif servant à la transmission des photographies. La figure 2 repré= sente une station d'arrivée disposée pour recevoir les dessins, écritures ou photographies. A la station de départ (fig. 1 et 3), on a disposé un cylindre tournant d, animé d'un mouvement de rota= tion, en contact avec le style e inséré dans le circuit # d’une source d'électricité p qui contient le relais g. A la station d'arrivée (fig. 2), on a disposé, d'une facon analogue, un cylindre d'en contact avec le style e. Ce cylindre tourne d'un mouvement synchrone au cylindre de la station de départ. | Le relais g (fig. 1 et 3), inséré entre le style e et l'interrupteur de la bobine ou du transformateur h, est disposé de façon à fermer le circuit pendant le passage du courant électrique à travers le style, don- nant lieu à la production d'une étincelle et à l'émission d'ondes hertziennes. Or, si l’on dispose à la surface du cylindre de la figure 4 un dessin produit au moyen d'une encre isola- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE trice, le relais, pendant le déplacement du style e à la surface métallique du cylindre d, ne transmettra pas de courant à la bobine (ou au transformateur) D; aussi “il n'y aura, dans 0, pas de passage d'étincelles pouvant - produire des ondes hertziennes. Lorsque, au contraire, “le style est appliqué sur le dessin, qui est non-conduc- teur, le courant ne traversera plus le style, et le relais, “fermant le circuit de la bobine b, donnera lieu à la “production d'étincelles et à l'émission d'ondes électro- magnétiques. ; AR ; Si Je cylindre d', à la station d'arrivée, est entourée “de papier humecté d'une solution chimique, — de ferro-cyenure de potassium ou de nitrate d'ammonium “par exemple, — le style pointu e', toutes les fois qu'il est parcouru par le courant de la pile p', sous l’action “des ondes hertziennes émanant de l’antenne A, est - appliqué sur le papier, où il tracera une ligne d'une longueur correspondant à la durée d'émission des ondes, c'est-à-dire à la durée de l'ouverture (effectuée par le relais g de la station de départ) du circuit ren- fermant le transformateur. Comme les styles des deux LA Bogqtmane der 907 Pour reproduire le dessin à transmettre au cylindre d' sur échelle réduite ou agrandie, il suflit de remplacer le cylindre de réception par un autre plus grand ou plus petit, pourvu que les deux cylindres exécutent des nombres de tours rigoureusement égaux. Pour la transmission des photographies, l'on se sert d'une station de réception identique, tandis que la station de départ doit être modifiée suivant la figure 3. Le cylindre (ou le disque métallique) d est pourvu d'un relief photographique 2, positif ou négatif, en géla- tine au bichromate ou en toute autre substance ana- logue, Le style e est attaché à l'extrémité du levier double t, exécutant, pendant la rotation du cylindre d, un mouvement de va-et-vient vertical suivant les élé- vations ou les dépressions de la surface du cylindre, ou plutôt du relief photographique y disposé. L'axe de rotation uw de ce double levier est relié à l’une des bornes d'une pile p. Au bout postérieur du levier est attaché un rouleau r, servant à produire le contact entre le levier £ et les touches métalliques isolées a, a, &, a, etlestouches non métalliques x, x!. Toutes A o =) mm À A 1) K iH— £ Boggéman del Fig. 1. Fig. 2, Fig. 3 Fig. 1 à 3. — Appareils pour la transmission et la réception, au moyen des ondes électromagnétiques, des écritures? dessins et photographies. — d, d', cylindres transmetteur et récepteur ; e, e', styles transmetteur et récepteur? p, pile: g, relais: A, antenne; 0, éclateur: b, transformateur; b, relief en gélatine: £, levier double; u, axe de rotation? a, a', a, af, touches métalliques ; stations exécutent des déplacements équivalents et de même longueur, les lignes tracées par le style e' seront identiques à celles produites par le style e dans son mouvement à travers le dessin. Comme, d'autre part, les deux styles e et e!' décrivent sur leurs cylindres respectifs des spirales exactement équivalentes, d'un pas inférieur à 1/2 mm., le dessin du cylindre d sera rendu avec une fidélité parfaite sur le papier entourant Je cylindre d'. Les cylindres d et d' peuvent être remplacés par des disques métalliques stationnaires ou tournants. Le mouvement des styles e et e! peut être disposé aussi de facon à décrire des trajectoires parallèles sur les disques correspondants. D'autre part, l'on peut se servir de deux appareils synchroniques où les styles décrivent des spirales analogues à celles des disques de gramophone, ou enfin d'appareils quelconques «doués de mouvements synchrones, de facon à rendre partiellement ou intégralement par le style e! les dessins disposés sur le cylindre du disque d. Il est bon de tracer les dessins à transmettre sur une feuille métallique (étain, aluminium, etc.), et d'appliquer cette dernière sur le cylindre. Le style e! à effet chi- mique peut être remplacé par un style ou rouleau mécanique, s'abaissant au passage du courant pour tracer des lignes de longueur variable. x, x!, touches non métalliques: ce, c‘, c”,.c', disques; D, terre. ces touches de contact sont disposées suivant la trajec- toire du rouleau r. Chacune des touches métalliques isolées a, a, a?, a est reliée par un fil conducteur à l’un des disques €, ec‘, c°,c*, montés sur un mème arbre en ébonite ou toute autre matière isolante, qui tourne d'un mouvement uniforme. L'un de ces disques € a le bord lisse, tandis que le bord des autres est pourvu d’endentures ou de projections, égales entre elles pour un disque donné, mais variables d’un disque à l’autre. Tous ces disques sont en contact avec un cylindre métallique communiquant à travers un fil avec la pile p. Suivant qu'on se sert d'un relief positif où négatif, les portions blanches correspondent à une dépression ou à une surélévation du relief, Au passage de la pointe du style, le rouleau r (le levier atteignant ses positions extrèmes) sera amené au contact des touches x ou x, empêchant le courant de passer et de produire à la station d'arrivée des tracés graphiques. Suivant que la pointe e s'abaisse ou se relève, le rou- leau r attaché à l'extrémité postérieure { s'abaisse ou se relève également, de façon que le courant traversant le relais parcourt l’un ou l’autre des disques €, c!, e?, €, réduisant où augmentant par là l'intensité du cou- rant et, par conséquent, l'émission d'ondes hertziennes selon le profil du bord des disques. Le style de la station de réception, à larrivée des 908 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE ondes hertziennes, trace, au moyen du disque à bord lisse e, des lignes pleines correspondant aux portions noires du dessin, tandis que les disques c', c?, «* donnent lieu à la production de lignes non continues corres- pondant aux diverses nuances du dessin. Le mécanisme effectuant la rotation et le déplace- ment des cylindres à été supprimé dans nos illustra- tions schématiques. Le dispositif décrit ci-dessus rendra des services surtout aux revues illustrées, qui, comme on de sait, se piquent de reproduire aussitôt que possible les évé- nements de quelque importance. Le service de sûreté profitera également de cet appareil, qui pe met de transmettre le signalement de criminels simultanément en toutes directions et même sur mer. En temps de guerre, il pourra servir à assurer les communications entre les places assiégées et les détachements postés au dehors. | se montrera utile aussi pour bien des emplois commerciaux et techniques, surtout pour la transmission des signatures. Alfred Gradenwitz. 4. — Chimie P74 Sur la synthèse de Fanhydride nitreux. — Suivant un procédé indiqué il y a quelques années par M. Helbig, on produit l'anhydride nitreux aux dépens de l'oxygène et de l'azote de l'air liquide, en y faisant passer une série d'étincelles constituant un véritable are voltaique alternatif. Comme ce composé est solide à la température d’ébullition de l'air, il se sépare du liquide sous la forme de flocons verdâtres. L'appareil employé dans ce procédé comporte un vase cylindrique de Dewar, dont le double fond est traversé par une électrode de platine qui y est soudée. Ce vase renferme un ballon allongé, dont le fond est £salement traversé par une électrode de platine suscep- tible d'être amenée au contact de la première. Après avoir introduit l'air liquide dans ce ballon, on fait passer l'arc voltaïque entre l’électrode soudée à son fond et une électrode mobile entrant verticalement à travers son col. Or, en raison de l'inévitable inhomogénéité du verre entourant les électrodes et des différences de dilata- tion entre ce dernier et le platine, il arrive assez sou- vent que les vases de Dewar et les ballons qui y sont renfermés se fendent, bien que M. Helbig se serve d'un dispositif auxiliaire lui permettant de. refroidir les réservoirs avec une lenteur extrême avant de procéder aux expériences. M. O. Scarpa!, au cours d'un travail plus étendu, vient d'avoir l’occasion de répéter les expériences de M. Helbig, en éliminant les inconvénients inhérents à cette méthode, tout en simplifiant le dispositif et en le modifiant de facon à permettre le traitement simultané d'une quantité considérable d'air liquide. M. Scarpa se sert d'un vase de Dewär sphérique ou cylindrique, auquel il applique un bouchon de liège à trois perforations, dont l'une sert à la décharge des vapeurs, tandis que les deux autres sont traversées à frottement dur par deux tubes de verre descendant jusqu'au fond du vase et portant les deux électrodes. Ces dernières sont constituées par des barres de cuivre d'environ 5 millimètres d'épaisseur, auxquelles sont soudés, suivant l'axe, deux fils de platine gros et courts. L'un de ces fils est rectiligne ; l’autre est plié de facon à croiser le premier à angle droit. Les barres de cuivre sont réunies en dehors du vase aux deux pôles d'un transformateur. Celle qui porte le fil de platine replié est également repliée à angle droit; la portion horizontale est insérée dans un tube de verre fermé à son extrémité de facon à pouvoir ètre facile- ment manœuvré. Une bobine de Ruhmkorff, capable de donner dans les conditions ordinaires des étincelles d'environ 45 centimètres, sert de transformateur ; le primaire 1 L'Elettricista, n° 19, 1907. courant est traversé par le (450 volts, 42 périodes), ajusté, au moyen d’un rhéostal alternatif municipal à l'intensité d'environ 7 ampères. Dans ces condi tions, la différence de potentiel entre les électrodes pendant l'expérience reste inférieure à 2.000 volts, la distance explosive étant d'environ 2 millimètres. Après avoir rempli le vase d'air liquide aux 4/5 d son volume, on met le bouchon portant les électrodes en place et l’on établit et ajuste le courant traversant le primaire du transformateur. Au moyen d’un levier, on met ensuite les deux électrodes en court-circuit, après quoi on les sépare à la distance de quelqu millimètres. A travers cet intervalle, on établit ainsi um arc fort brillant, accompagné d'une vive ébullition de l'air et de la formation rapide d'anhydride nitreux. Pour déterminer les réactions qui conduisent à cette synthèse de l’anhydride nitreux, il faut, en première ligne, distinguer entre celles qui sont possibles dans la région de l'arc voltaique et les réacéions possible dans la région de l'air liquide. Or, dans la région de l'arc électrique, la température est excessivemen élevée et certainement supérieure à 1.800°; les élec trodes de platine fondent, en effet, quelquefois à leurs extrémités et un fil de platine mince, introduit dan: l'intervalle, fond instantanément. Comme, dans cette région, l'oxygène et l’azote se trouvent en présence à l'état gazeux, la réaction Az° + O0? — 2470, c'est-à-dire la réaction initiale de l'expérience de Cavendish et des fours de Birkeland, doit se produire entre eux. Cette réaction est toujours limitée, et, sil était possible d'atteindre l'équilibre dans la région de l’are, la forma- tion partielle de bioxyde d'azote devrait correspondre aussi quantitativement aux expériences et aux calcul de Nernst, suivant lesquels l'équilibre entre les trois gaz, oxygène, azote et bioxyde d'azote, est établi quand on à: à 1.5000 abs. 0,10 °/4 AzO, par volume. à 2,000 — 0,61 °/o AzO, — à 2.5000 — 1,19 °/o AzO, = à 3.0000 — 3,51 °/6 AzO, — Les gaz s'échappent avec une extrème rapidité de læ région de l'arc voltaique pour entrer dans celle de l'air liquide, où l’on constate l'apparition immédiate de flocons d'anhydride nitreux. Comme, dans la pre- mière région, en raison de la température élevée, toute hypothèse relative à une oxydation ultérieure da bioxyde d'azote (le plus endothermique de tous les oxydes d'azote) semble devoir être exclue, il s’agit de déterminer si c'est vraiment dans la région de l'air liquide que l'oxydation ultérieure du bioxyde d'azote se produit, et en vertu de quelles réactions. L'auteur se base sur les résultats des expériences de MM. Francesconi et Sciacca‘, expériences qu'il vient de refaire en partie, et dont voici les résultats : 1° AzO et O, à l'état liquide tous les deux, ou l’un liquide et l'autre gazeux, donnent exclusivement Az'0*; 20 AzO et O, à l'état gazeux tous les deux, donnent l'anhydride nitreux seulement aux températures infé= rieures à — 110°; 3° L'anhydride hyponitreux peut être Az°05 sous l'action de AzO seulement en de —150°; 4 L'anhydride nitreux subit l'action de l'oxygène en se transformant en anhydride hyponitreux seulement aux températures supérieures à — 100°. Comme, d'autre part, dans les expériences de Helbig, il ne se produit pas la moindre trace d'anhydrides hyponitreux solide, l'on peut affirmer que l'oxydation de l’oxyde Az0, conduisant à la formation d’anhydride nitreux, a lieu dans la région de l'air liquide. La synthèse de l'anhydride nitreux suivant læ méthode de Helbig se produit, par conséquent, en deux stades : dans le premier, une petite partie de LT e eh nf | ERNEST 1 Gazzetta Chimica italiana, t. XXXEV, 1904. réduit en dessus. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 909 l'oxygène et de l'azote provenant de l’évaporation de - l'air liquide se combinent pour former l’oxyde A70; dans le second, qui se passe dans l'air bouillant, cet oxyde subit une oxydation ultérieure, formant l'anhy- dride voulu. $ 5. — Biologie La restauration des momies.— 117 a quelques années, le Professeur Harris H. Wilder, de Northamp- ton, occupé à préparer des squelettes d’'embryons sui- vant la méthode de Schultze, fit l'intéressante obser- vation que ces objets, rétrécis par leur séjour dans l'alcool, regagnaient leurs dimensions et formes nor- males aussitôt qu'on les placait dans une solution à 3 °/4 de potasse caustique. L'expérimentateur américain en vint à supposer que cette solution devait exercer des effets analogues sur les tissus animaux privés d’eau par un séchage à l'air; une expérience faite sur un corps de grenouille desséché lui démontra la justesse de ses conclusions. Ce premier succès l’encouragea à appli- quer cette mème méthode à larestitution des cadavres humains momifiés : le procédé suivant lui a donné des résultants vraiment surprenants. L'objet est placé immédiatement dans un réservoir contenant une solution à 1-3 °/, de potasse caustique, sous la surface de laquelle on le maintient jusqu'à ce qu'il soit parfaitement mouillé. Le tissu momifié, qui d’abord flotte à la surface du liquide, ne tarde pas à s'imbiber de ce dernier et à s’enfoncer graduellement. Il convient d'observer très soigneusement l’objet pen- dant son séjour dans le liquide, pour l'en retirer aus- sitôt qu'il montre le moindre signe de décomposition. Une désagrégation partielle ne saurait ètre évitée dans les endroits putréfiés avant l'achèvement du séchage. La durée de cette opération varie entre douze et qua- rante-huit heures. Après l'avoir retiré de la solution de potasse, on place le tissu pendant quelque temps dans l'eau, où il continuera le plus souvent à se gonfler; aussi faut-il user d'une extrême précaution pendant ce stade du procédé. Pour éviter un gonflement excessif {conduisant à la désagrégation des tissus), M. Wilder conseille de plonger l'objet, une fois le traitement assez avancé, dans une solution à 3‘/, de formaline, laquelle exercera un effet fixateur, s'opposant à toute altération ultérieure; aussi convient-il de l'y laisser en vue d’une préservation permanente. M. Wilder à d'abord réussi à restaurer d'une façon très satisfaisante — et mème à en rétablir avec une certaine approximation la couleur de la peau — une momie péruvienne du musée Peabody. Tous les tissus ont repris leur consistance naturelle, de façon à se prêter parfaitement à l'examen microscopique. Sous la peau, l'expérimentateur à constaté la présence, en grand nombre, de cellules de graisse, dont la forme un peu aplatie lui à démontré l'insuflisance relative de la restauration, les parties correspondantes de lindi- vidu vivant devant avoir été un peu plus fortement gonflées. Des tètes d'enfants de la tribu indienne des « Cliff- dwellers », séchées au soleil sans application de baume, ont été également traitées avec succès. Les différentes parties du visage, méconnaissables et presque entière ment effacées avant le traitement, ont réapparu avec une netteté presque aussi grande que dans l'individu vivant. M. Wilder a même pu constater que le cuir chevelu de l’un de ces enfants avait été couvert d'un eczéma. Les momies de plusieurs individus adultes, apparte- nant à cette mème tribu indienne, ont été restaurées avec un succès égal, tandis que les cadavres embaumés suivant le procédé péruvien se sont trouvés être con- servés seulement à la surface, les parties profondes ‘étant complètement décomposées. M. Wilder en tire la conclusion que le séchage au soleil ou même à l'air des montagnes est préférable à l'embaumement péruvien. D'autre part, M. Wilder espère réaliser des résultats mème supérieurs par la restauration des momies égyp- tiennes qui, comme on le sait.sontles mieux conservées; aussi pourra-t-on probablementreconstituer, dans toute leur réalité, les traits des Pharaons les plus anciens. L'importance scientifique de cette méthode réside évidemment dans la possibilité qu’elle donne de sou- mettre les tissus momiliés à un examen anatomique rigoureux. $ 6. — Géographie et colonisation L’Exposition agricole de Palime (Togo). — Les Allemands ont donné une vive impulsion à l’agri- culture dans leur colonie du Togo et ils se sont parti- culièrement attachés à y développer la production du coton. Les rapports annuels publiés par le Gouverne- ment en font foi'; mais, cette année, les résultats ob- tenus ont été rendus plus tangibles encore, grâce à l'Exposition agricole organisée par le comte Zech, gou- verneur du Togo, à Palime, terminus actuel du chemin de fer de pénétration, à 115 kilomètres de la côte. Cette exposition a été ouverte du 27 janvier, jour où fut inaugurée la ligne nouvelle, au 31 janvier. L'impor- tance en a été réelle, comme on peut s’en convaincre notamment à la lecture du compte rendu qu'en à donné le Dr S. Soskin*, et elle ne peut manquer d’avoir des suites heureuses pour le dévelopement économique du Togo. L'exposition de Palime avait réuni 3.500 exposants, venus de tous les districts de la colonie. Elle a été visitée par 15.000 indigènes à peu près, habitant soit les environs de Palime, soit aussi des districts voisins, et par 200 Européens. La superficie couverte par l'Exposition était de 4 hec- tares. Les produits étaient répartis entre onze groupes. Un coup d'œil rapide sur ces divers groupes donnera une idée de l'état agricole du Togo. Le premier, qui comprenait les textiles, devait au coton une importance particulière. Il y a eu, pour ce produit, 426 exposants indigènes, appartenant princi- palement aux districts de Misahôhe, Atakpamé et So- kode; mais ceux de Lome, Anecho, Kete-Kratschi et Mangou, quoique produisant moins de coton, étaient aussi représentés. A côté du coton brut et des graines, on pouvait voir aussi les appareils primitifs à filer et à tisser employés par les indigènes, ainsi que les diffé- rentes machines introduites dans la colonie pour la manipulation de ce produit: égreneuses à main et à moteur, presses de diverses dimensions, etc. Une mention particulière doit être faite des exposi- tions du Comité économique colontal* et de la Societe allemande du Togo. Le premier avait réuni dans une galerie spéciale tout ce qui a trait à la production du coton au Togo: échantillons, végétaux, livres, etc. L'Ecole cotonnière créée par ce Comité à Nouatché, et qui à été transformée en Ecole agricole indigène, avait exposé les résultats des travaux des élèves. La Société allemande du Togo à accompagné son exposition de coton et de tissus de coton de tableaux montrant les résultats que l’on obtient, pour cette culture, en fumant la terre: 1 are de terrain non fumé donne 1.160 grammes de coton et 4 are fumé en donne 3.450 grammes. Parmi les autres textiles, on rencontrait le kapok 1 Jahresbericht über die Entwikelung der deutschen Schutzgebiete in Afrika und der Süudsee im Jahre 1905-1906. — On y voit que l'exportation du coton à quadruplé, au Togo, depuis trois ans: de 32.000 kilogs en 1903, elle passe à 108.000 en 1904 et à 134.000 en 1905. ? Dr S. Soskn: Die Ausstellung zu Palime (Der Tropen- pflanzer, mars 1907, p. 156-161). 3 Ce Comité a fait de grands efforts pour développer la culture du coton dans les colonies allemandes. Voir à ce sujet : Morrrz Scuawz : Der gegenwärtige Stand der Baum- wollkultur in den deutschen Kolonien (Zeitschrift für Kolo- nialpolitik, Kolonialrecht und Kolonialwirtschaft, heraus- geseben von der Deutschen Kolonialgesellschaft,août 1907, p. 665). 910 sauvage, qui se trouve dans les diverses parties de la colonie; le sisal, principalement celui de la plantation de Kpeme, qui était très beau et qui permettait de croire à l'avenir de cette plante fibreuse dans le pays ; puis la sansevière, la fibre d’ananas, le Ficus rokko, le Pandanus, l'Hibiscus cannabicus, enfin le louffa, venant surtout de Kete-Kratschi. Dans le groupe Il, celui des céréales, c'était le maïs qui tenait la principale place, car il tend à devenir le principal aliment du pays. Les régions côtières de Lome et d’Anecho présentaient les plus beaux exemplaires ; il y avait de beaux mais de Mangou, Kete-Kratschi et Misahôühe. Le maïs prend rang, comme valeur de pro- duction, après les produits du palmier à l'huile. L'expor- tation se chiffre, aux deux ports de Lome et d’Anecho, par 8 à 10.000 tonnes environ. Au mais, il faut ajouter comme céréales le sorgho, le riz, dont on a pu voir de très beaux spécimens, le mil. Le troisième groupe, oignons, bulbes et tubercules, présentait des ignames, des taros, du manioc, des patates. Le groupe suivant, qui comprenait le palmier à huile, pouvait être regardé comme le plus important. Le D' Soskin insiste sur l'intérêt qu'il y aurait pour la colonie à développer cette culture, qu'on a eu tort de négliger. On pouvait voir exposés, à côté des produits du palmier, huile et noix, les machines servant à les préparer. Parmi les oléagineux, il faut citer encore l’arachide, qui s'adapte bien aux sols sablonneux du Togo; la noix de coco, qu'on a commencé à cultiver depuis une quin- zaine d'années à Kpeme ; puis le karité, le Moringa oleifera, le ricin, le sésame, etc. Les denrées usuelles, café et cacao, formaient, avec le tabac et les plantes médicinales, une section spé- ciale; dans une autre étaient les légumes et produits de jardinage. Le caoutchouc de culture constituait une section. Il y à au Togo deux plantations européennes, celles de Kpeme et de Kete-Kratschi. Le caoutchouc de Fieus et de Castilloa venait d'Atakpamé: de Misahôhe on avait aussi envoyé, du caoutchouc d'Hevea, . La section des fruits contenait des espèces nom- breuses et variées, sur lesquelles nous n’insistons pas. Dans le groupe du bétail et des produits animaux, il faut citer les beaux attelages de bœufs de l'Ecole agri- cole de Nouatché. Dans le groupe X, le Kolonial Wirt- schaftliche Komitee avait exposé les machines et usten- siles agricoles, ainsi que les appareils de transport qu'il a introduits dans la colonie. Enfin, dans un dernier groupe, venaient un certain nombre de produits divers de la colonie : bois utiles, bambous, résines, rotang, matières tannantes et colo- rantes, plantes décoratives. Le succès de l'Exposition de Palime a fait décider qu'une exposition à la fois agricole et industrielle aura lieu à Lome, en 1910. Gustave Regelsperger. $ 7. — Sciences diverses La prévision des crises économiques. — L'introduction de la notion de rythme ou de cycle dans l'étude des phénomènes économiques n’est pas moins féconde que dans celle des phénomènes physiques. La loi empirique de Bruckner a son pendant dans les observations intéressantes de M. Juglar, continuées par M. Jacques Siegfried et récemment publiées. Sans doute, aussi longtemps que la production des richesses reste exclusivement ou principalement agricole et rurale, ilne saurait être question d'une périodicité régulière des cri- ses. Rien de plus irrégulier que la succession alternante des bonnes et des mauvaises récoltes. Mais l'avènement . CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE de la grande industrie a rendu les variations delarichesse publique et du crédit en grande partie indépendantes des péripéties de l’agriculture; et les a subordonnées aux fluctuations des capitaux sur le marché des valeurs, aux mouvements des produits sur les marchés de la con= sommation. L'examen de la prospérité de tous les pays de civili- sation européenne révèle, depuis plus d’un demi-siècle au moins, une périodicité assez régulière et de plus en plus marquée. Chaque période consiste en une phase d'espoir grandissant, de hauts prix, d'entreprises aven- tureuses, à laquelle succède, à travers une courte crise, une phase inverse de découragement, de bas prix, de stagnation des affaires. Puis un nouveau cycle recom= mence. Dans cette petile évolution économique com plète, G. Tarde distinguait les trois moments successifs. de la répétition (toute prospérité est une reproduction multipliante de richesses), de l'opposition (dont la crise est une des formes) et de l'adaptation (la liquidation n'est que le moyen de s'adapter peu à peu aux nou- velles conditions du marché). Nous venons de voir rapidement comment la crise se prépare; elle éclate lorsque les prix sont très élevés, tandis que la reprise des affaires se manifeste lorsqu'ils sont tombés très bas. L'observation peut ainsi se pra- tiquer en consultant les cours d’une grande quantité de produits, en en calculant, par exemple, la moyenne annuelle, en en notant les maxima et les minima, de facon à obtenir ce que les statisticiens appellent des « index numbers, qui sont « en proportion directe et constante de la période de prospérité ou de dépression à laquelle ils correspondent ». Les cours des valeurs dem Bourse donneraient lieu à des constatations analogues à celles qu'indiquent les cours des marchandises, avec cette différence que les mouvements seraient beaucoup « plus accentués par le fait de l'intervention d’un facteur humain très influent: la spéculation. 1 L'observation peut encore se faire, d'une seconde manière. La hausse des prix n’est que la résultante« d'un phénomène dont la cause doit être cherchée dans le développement des transactions. Celles-ci se tradui- sent, à leur tour, en effets de commerce qui vont accroître le portefeuille des banques, en même temps que ces établissements les échangeront contre du M numéraire et des billets. La crise arrivera ainsi au M moment où l'écart entre le portefeuille commercial et « l’encaisse sera le plus considérable, et la reprise coïn- cidera avec le portefeuille le plus réduit et l’encaisse la plus forte. Ces deux variations, comme les variations de prix, peuvent se représenter par les méthodes gra- phiques. C'est ainsi que les diagrammes, établis par M. J. Siegfried, d'après les bilans de la Banque de France, montrent que, depuis soixante ans, il s’est régulièrement écoulé neuf années entre chaque crise, de même qu'entre chaque reprise d'affaires. Les plus récentes crises se sont produites en 1882, 1891, 1900; nous devrions donc attendre la prochaine pour 1909. Dès lors, cette question se pose : Pourquoi les industriels et commerçants n'empêcheraient-ils pas l'arrivée de ce terme fatal en tempérant l'excès de leur confiance, en modérant l'ampleur de leurs transac- tions? Dans tous les cas, nous pouvons dire, avec G. Tarde, que les crises ne sauraient être longtemps périodiques sans être généralement prévues, ni être prévues sans être prévenues, c'est-à-dire sans cesser d'être périodiques. Ainsi se vérifie, jusque dans le monde économique, le principe psychologique, mis en lumière par Guyau, que, en prenant conscience d'une habitude ou d'un instinct, en le formulant, nous échappons à sa loi. Pierre Clerget, Professeur à l'École supérieure de Commerce de Lyon. . P. PAINLEVÉ — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE 911 UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE (RESTITUTION D'APRÈS UN MANUSCRIT RÉCEMMENT DÉCOUVERT) INTRODUCTION Les nouveaux textes d'Archimède identifiés par M. Heiberg présentent, au point de Vue historique, un intérêt considérable. S'ils ne transforment pas notre conception de l'œuvre d'Archimède, ils la complètent, ils la précisent; ils montrent qu'Archi- mède s'était avancé dans les voies de la science moderne plus loin encore qu'on ne le supposait; ils aceroissent, s’il est possible, notre admiration pour son merveilleux génie. Le savant mathématicien Zeuthen, dont l'Histoire des Mathématiques a une réputation universelle, vient de publier une traduction alle- mande de ces pages miraculeusement ressuscitées, en les accompagnant d’un commentaire pénétrant et minutieux. M. Théodore Reinach, dont l’éru- dition et la curiosité ne connaissent pas de limites, poursuivait, de son côté, une traduction francaise du mème texte fgrec, qu'il a réussi à faire aussi précise que possible, en même temps que facile à lire par l'emploi de la terminologie moderne. Dans cette traduction, les lacunes des démonstrations résultant des lacunes du manuscrit sont soigneu- sement rétablies. Les savants ne peuvent que se réjouir du double effort de M. Zeuthen et de M. Reinach, qui leur ouvre tout grands les secrets du nouveau manuscrit. Je voudrais indiquer ici aussi brièvement que possible les conséquences qui me semblent résulter de sa lecture. On sait qu'Archimède est regardé à juste titre comme le père dela méthode d'exhaustion, méthode dont on peut dire qu'elle est le caleul intégral à l'état naissant. Le principe de la méthode est le pour mesurer une grandeur nouvelle danois, M. suivant (une aire curviligne, par exemple), on montre qu'elle est comprise entre deux grandeurs analo- gues qu'on sait mesurer (deux aires rectilignes, par exemple), dont la différence peut être rendue aussi petite qu'on veut; la limite commune de ces deux grandeurs est la mesure cherchée. C'est par cette méthode qu'Archimède à calculé l'aire de la para- bole, c'est-à-dire, d'une facon précise, l'aire com- prise entre une parabole, son axe et deux perpen- diculaires quelconques à cet axe; il obtint cette aire comme la limite d'une somme de surfaces rectangulaires de plus en plus nombreuses et de plus en plus minces. La sommation qu'il à dû | accomplir serait représentée aujourd'hui par le b { xAU te a Archimède a donc effectué — et avec une rigueur parfaite — la première intégration. Il est vrai que le principe de la méthode d'exhaus- tion se trouvait déjà, au moins partiellement, dans Eudoxe, prédécesseur d'Euclide et d'Archimède, à qui est due la mesure du volume de la pyramide. On sait que le calcul élémentaire de ce volume repose sur le lemme qui exprime l'égalité des volumes de deux pyramides qui ont la même hauteur et des bases équivalentes. Or, pour démontrer ce lemme, Eudoxe comprend le volume d'une pyramide entre les volumes de deux sommes de prismes, volumes dont la différence tend vers zéro. Si Eudoxe avait déduit de là directement le volume de la pyramide en sommant les volumes de prismes de plus en symbole : e plus nombreux et de plus en plus minces inscrits dans la pyramide, c’est lui qui eût fait la première intégration, el précisément la même intégration : flrax dont dépend l'aire de la parabole. Mais il s'est borné à employer sa méthode à la comparaison de deux volumes encore inconnus, sans en tirer la valeur ue commune de ces volumes. C'est done Archimède qui, le premier dans l'his- toire de la science, a effectué une intégration. Sa méthode, il l'a exposée sous une forme irréprocha- ble, non pas seulement à propos de l'aire de la para bole, mais dans son Traité sur les Paraboloïdes et les Ellipsoïdes : c'est dans ce dernier Traité qu'il lui a donné sa forme la plus générale, et il l'a appli- quée à des intégrations qui seraient représentées aujourd'hui par les symboles : D = xdx, // XX a a Dans son Traité sur les Centres de gravité des figures planes, il a même effectué l'intégration : D Ua xSdXx, a mais à l’aide de procédés tout spéciaux. Le nouveau 912 P. PAINLEVÉ — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE Traité n'apporte pas d'intégrations nouvelles, mais il expose des procédés entièrement différents et très intuitifs pour résoudre des problèmes variés et apercevoir des théorèmes où interviennent les trois intégralions précédentes. La méthode d'exhaustion est au fond de ces procédés, mais ce qui en fait la fécondité, ce qui permet (à l’aide de trois quadra- tures distinctes seulement) de traiter une multitude de questions, c'est une notion toute moderne et qui apparait là pour la première fois dans l'œuvre d'Archimède : la notion de moment d'une force par repport à une droite ou à un plan. Celle notion qu'Archimède emploie constamment sans lui donner de nom, c'est l'équilibre du levier qui la lui a suggérée, et c'est sous sa forme méca- nique qu'il l'introduit dans tous ses raisonnements. Traduite en langage moderne, sa méthode consiste à comparer deux volumes qu'on regarde comme des solides homogènes, et à montrer que les poids de leurs éléments ont mème moment résultant par rapport à une certaine droite. Comme un des volu- mes a été choisi de facon que ce moment résultant füt connu pour lui, il est connu également pour l'autre : d’où une propriété géométrique de ce der- nier volume, Parmi les théorèmes qu'Archimède met ainsi en évidence, il en est auxquels il attache une impor- tance particulière, et cela pour des raisons dont un Hermite eût admiré la finesse. Les propositions qu'il a publiées jusque-là sur les volumes ronds n'expriment jamais que l'égalité de deux tels vo- lumes. Par exemple, le volume d'une sphère est égal au volume d'un cylindre ayant pour base un grand cercle de la sphère et pour hauteur les 3/4 du rayon; mais on ne sait pas, avec la règle et le compas, construire un cube de même volume qu'une sphère de rayon donné, et il est démontré aujourd'hui que la chose est impossible. Or, dans sa lettre à Eratos- thène, Archimède forme deux exemples de volumes ronds équivalents à un cube où à un prisme, qui se construisent très aisément d'après les dimen- sions du volume rond. L'intérêt qu'Archimède attache à de telles propositions témoigne d'un sens vraiment prophétique des problèmes de l’Algèbre moderne. Un fait bien remarquable, c'est qu'Archimède considère sa nouvelle méthode comme une méthode d'invention, mais non comme une démonstration”. Il serait intéressant de comprendre exactement pourquoi. Comme dans toutes les applications du procédé d'exhaustion, Archimède décompose les volumes ‘ J] admet seulement qu'elle peut contribuer à faciliter une démonstration rigoureuse, parce qu'il est plus facile de démontrer un théorème déjà énoncé que d'en faire à la fois la découverte et la démonstration. étudiés en tranches de plus en plus nombreuses et de plus en plus minces. Mais il ne prend pas k peine de donner au procédé sa forme irréprochable en fait, il découpe le volume, à l'aide de plans parallèles équidistants et de plus en plus rapprochés! mais il assimile immédiatement les tranches très done qu'il est encore incapable de traduire rigow reusement son procédé d'exhaustion? Non p car les nouveaux textes sont sûrement postérie d'exhaustion est exposée d'une facon magistrale. S'il emploie un langage incorrect et abrégé, c'est d'abord pour rendre plus intuitif son procédé d'invention et ne pas l'embarrasser de détails de rigueur; cest ensuite qu'il juge cette rigueur inu tile, parce qu'elle ne suffirait pas à rendre impec cable une méthode où des considérations méea niques se mêlent à la Géométrie. Ce souci de dégager ses démonstrations de toute considération mécanique apparait déjà dans som Traité sur la quadrature de la parabole, où il ne se sa üsfait que d'une démonstration strictement mathé matique. Serait-ce purisme de géomètre? La chose est peu vraisemblable d'un esprit aussi philoso= phique. Serait-ce un sacrifice aux préjugés contem: porains? Dans ce cas, il déclarerait que sa méthode est rigoureuse, mais qu'il donnera d’autres démon strations pour éviter toute controverse. L'explica tion qui me parait la plus plausible est celle que suggère M. Zeuthen : les propriétés des centres de gravité sur lesquelles il s'appuie, Archimède nen connaissait encore que des démonstrations imparfaites, et c'est plus tard seulement quil a publié celles qui figurent dans son Traité bien connu. ‘ Quoi qu'il en soit, un fait incontestable, c'est qu'à l'époque où il écrivait à Eratosthène, Archimède pos= sédait dans toute sa perfection la méthode d'exhaus= tion. La négligence avec laquelle il l'expose ici ne saurait donc être invoquée comme la preuve qu'il était bien loin d'entrevoir les principes du vrai sr À À ne un [= œ (18 ©: s < [ae] [er] = = Pa = qe) ®, = © a = e 5 = 2 =] = [el] = ES st ®: rs = s © un Le = me = Q ©: +5 [9°] > memmtmene des concepts géométro-mécaniques modernes, et sans être obligé de se garder, par tout un appareil de rigueur, contre les erreurs possibles. Les pages qui suivent ne peuvent que fortifier le sentiment de quiconque à lu les œuvres classiques d'Archi mède : c'est un accident historique qui a interposé 18 siècles entre Archimède et Galilée. Paul Painleve, de l'Académie des Sciences, À Professeur à la Sorbonne et à l'École Polytechnique +)" TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE 913 NOTICE PRÉLIMINAIRE Le Traité nouveau d'Archimède dont je publie ei-après la traduction a été rendu à la lumière dans des circonstances assez remarquables. Un paléographe grec, Papadopoulos Kerameus, auteur d'un volumineux el savant catalogue des manuscrits du Patriarcat grec de Jérusalem, y signalait, en 1899, sous le n° 355 (L. IV, p. 329), un manuscrit sur parchemin, palimpseste, provenant du monastère de Saint-Savas (Palestine), L'écriture Ja plus récente, du xrr siècle, est celle d'un recueil de prières byzantin sans intérêt; l'écriture plus ancienne, disposée transversalement, apparaissait par endroits très distincte, ayant été non grattée par le nouveau seribe, mais simplement épongée; elle accuse une main du x° siècle. M. Papado- poulos Kerameus reconnut qu'il s'agissait d’un ouvrage mathématique, accompagné de figures, et il en reproduisit quelques phrases à titre. d'échan- tillon. Ces citations tombèrent sous les yeux d'un professeur allemand, H. Schæne, qui, à son tour, les fit voir à M. Heiberg, professeur à l'Université de Copenhague, éditeur d'Archimède et d'Apollonius et le savant d'Europe le plus compétent en ces matières. M. Heiberg identifia aussitôt les extraits cités par Papadopoulos avec autant de passages connus d'Archimède. Sa curiosité éveillée, il de- manda communication du palimpseste, qui, entre temps, avait élé transporté à Constantinople dans un prieuré du Phanar (le mélochion du cloitre du Saint-Sépulcre de Jérusalem) dépendant du Patriar- cat œcuménique. Celle communication lui fut refusée. Le savant danois ne se découragea pas. Comme Ja montagne n'allait pas à Mahomet, Mahomet alla à la montagne. Pendant l'été de 1906, M. Heiberg fit le voyage de Constantinople et put étudier à loisir le précieux document. Il y reconnut avec joie les restes d'un manuscrit d'Archimède, plus complet qu'aucun de ceux qu’on possédait jusqu à présent. Quoique fort mutilé, ce manuscrit renferme encore, en effet 4° des parties considérables de plusieurs Traités déjà connus du grand géomètre (De la sphère et du cylindre, Des hélices, Mesure du cercle, Les équilibres); 2 la plus grande partie du texte grec (inédit) du Traité des Corps flottants, dont on n'avait qu'une traduction latine refaite sur l'arabe, datant du Moyen-Age; 3° les premiers chapitres d'un Traité complètement inédit, le Stomachion, c'est-à-dire «le Taquin ». sorte de jeu de patience géométrique; 4 le texte, également inédit et aux trois quarts complet, du Traité de la méthode (Evoèyé ou | MENETS Esoôos , connu seulement par une Notice de Sui- 1 das” et trois brèves citations dans les Méfriques d'Héron, ouvrage qui, lui-même, n'a été publié qu'en 1903, précisément par H. Schæne. M. Heiberg se propose d'utiliser complètement tous ces matériaux pour la nouvelle édition de son Archimède, qu'il a en préparation. En attendant, et pour satisfaire l'impatience des savants, il a publié dans l’Æ/ermes, en partie d'après ses copies, en partie d'après des photographies, le texte grec de l°'Egosos ou Traité de la méthode. Tous ceux qui, comme moi, ont eu le privilège de jeter les yeux sur ces photographies, apprécieront le mérite peu commun de la publication du savant danois. Non seulement il à fallu déchiffrer à la loupe, lettre par lettre, un texte souvent peu lisible, reconstituer des figures à demi-effacées, mais M. Heiberg a dû, tout d'abord, rétablir l'ordre profondément troublé des feuillets, qui, lors de la seconde utilisation du par- chemin, ont été pliés en deux — pour les ramener de l'in-folio au format in-4° — et disposés dans une succession arbitraire. Ajoutons que M. Heiberg, dans des notes concises, a rectifié un grand nombre de bourdes manifestes du copiste et indiqué som- mairement dans quel ordre d'idées on pouvait combler les lacunes fréquentes et considérables du texte. Enfin, dans une Introduction érudite, il a fait ressortir le haut intérêt historique et scienti- fique du nouveau Traité et marqué sa place chro- nologique dans l'œuvre et dans la pensée d'Archi- mède *. If m'a semblé qu'une découverte de cette impor- tance ne devait pas rester l'apanage exclusif des savants qui joignent la connaissance du grec à celle des Mathématiques. Après avoir, dans une commu- nication à l'Académie des Inscriptions et Belles- Lettres, essayé à mon tour de dégager les enseigne- ments qui découlent du nouveau Traité pour Fhis- toire de la Géométrie antique, j'en ai entrepris une traduction intégrale, que je place aujourd'hui sous les yeux du public francais, grâce au libéral accueil du directeur de cette Æevue. Cette traduction était presque terminée lorsqu'un géomètre danois bien connu, H. G. Zeuthen, — l'historien des sections coniques dans l'Antiquité, a fait paraitre, dans la ! Elle nous apprend que ce Traité avait été par un certain Théodose. ? Le Traité de la méthode est sûrement postérieur à la Quadrature de la parabole. Je suis porté à croire qu'il est également postérieur aux traités Des Conoïdes et Sphère et Cylindre. commenté 914 TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE Bibliotheca Mathematica de Teubner (27 juin 1907), une traduction du même document, suivie d'un commentaire très intéressant. Quoique cette publicatiion soit plus accessible aux mathé- maliciens que l'édition grecque originale, je n'ai pas cru devoir pour cela renoncer à mon entreprise. allemande D'abord parce que tous les savants français-qui s'in- téressent à l'histoire des Mathématiques ne savent pas l'allemand; ensuite parce que M. Zeuthen s'est contenté de traduire littéralement ce qui subsiste du texte original, landis que je me suis efforcé d'en combler, au moins pour le sens, toutes les lacunes, grandes ou petites. J'ai profité, à cet effet, des publications mêmes de MM. Heiberg et Zeuthen, et des conseils de quelques amis mathématiciens, parmi lesquels je me plais à citer tout particuliè- - rement M. Roger Prévost, capitaine d'artillerie. Je laisse à de plus compétents le soin d'apprécier quel accroissement la découverte de M. Heiberg apporte à notre connaissance de l'histoire de la Géométrie antique et du génie d'Archimède. Je leur laisse aussi la tâche particulièrement délicate de caractériser la valeur de cette « méthode » dont Archimède est si fier, et qu'il n'a pas cru devoir garder pour lui. Il me suffira de faire remarquer, après MM. Zeuthen ét Painlevé, que cette méthode consiste essentiellement: 1°à déterminer ce que nous appelons aujourd’hui le « moment » statique d’un corps (par rapport à un plan fixe ou une droite fixe) par la subdivision de ce corps au moyen d'un nombre infini de plans parallèles ; 2 à tirer ensuite de l'équation d'équilibre la connaissance du volume (ou de la surface) ou la détermination du centre de gravité’. Sans doute, ni le nom ni la notion mème du «moment» ne se rencontrentsous la plume d’Ar- chimède; mais il est facile de voir que le corps dont il s'agit de déterminer le volume est toujours * Pour mieux préciser, Archimède coupe le volume con- sidéré en tranches par des plans parallèles, et compare une section quelconque à la section faite par le même plan dans un autre corps déterminé, de volume connu. Il cherche ensuite à déterminer sur une droite deux segments contigus proportionnels à ces deux sections : alors, il con- sidère cette relation comme l'équation d'équilibre, par rapport à un point, des deux volumes élémentaires (corps étudié et corps de comparaison) suspendus aux extrémités de la droite. Si le bras de levier correspondant au volume étudié est constant, cette équation d'équilibre donne le volume cherché. Si, au contraire, le volume étudié est connu, et que ce soit le bras de levier correspondant aux éléments du corps de comparaison qui soit constant, l'équation d'équilibre donne la détermination du centre de gravité du corps étudié. le quotient du moment du corps auxiliaire par une constante. Remarquons encore que des plans paral- lèles divisent un corps en un nombre infini de volumes élémentaires de hauteur infiniment petite. Ces volumes élémentaires, Archimède les assimile crüment à des plans (comme ailleurs il assimile des surfaces élémentaires à des droites), et, d'une rela- tion d'équilibre entre deux sections planes homo- logues de figures de même hauteur, placées d'une facon convenable, il conclut à l'équilibre des volumes de ces figures elles-mêmes, considérées comme la somme de ces sections. Archimède a conscience du peu de rigueur de ce procédé, et c'est pourquoi, dès qu'il a découvert une relation par cette méthode, il s'attache à la démontrer par une méthode d'exhaustion rigou- reuse, où les volumes élémentaires sont traités comme tels et le corps considéré comme la limite commune d'une série de solides élémentaires ins- crits et circonscrits, dont la différence peut être ré- duite autant qu'on veut. Mais en réalité, comme le dit M. Heiberg, « la méthode d'Archimède est identique avec le ealcul intégral » ou, plus exacte- ment, constitue une méthode d'intégration. Cette proposition a été contestée, parce qu'on s’estattaché à la forme du raisonnement plutôt qu'au fond; mais nous croyons que, plus on approfondira la question, plus on se convaincra que cette assimilation est exacte et qu'Archimède a été, sans le savoir et sans que ceux-ci s'en doutassent, le véritable précurseur de Leibniz et de Newton. En ce qui concerne le concept du « moment mécanique », le rapport est encore moins douteux. En effet, la «méthode méca- nique», considérations infinitésimales à part, est déjà employée dans la Quadrature de la parabole, Traité connu et étudié dès la Renaissance : sur ce point, entre la théorie d'Archimède et la Mécanique moderne, il y à donc eu non pas rencontre fortuite, mais influence directe et filiation incontestable. Théodore Reinach. Nota. — La traduction ci-après serre le texte du plus près possible ; toutefois, je me suis permis de remplacer en général le raisonnement en langage ordinaire sur les proportions par la notation algébrique actuelle, qui parle plus vite aux yeux et à l'esprit des lecteurs mathé- maticiens. Les figures (sauf 1, 5, 41, 12, 16 et les der- nières depuis 18) sont celles de Heiberg, c'est-à-dire d'Archimède. Les crochets [ ] signalent les parties perdues que j'ai restituées par conjecture; les paren- thèses ( ), les mots que j'ai ajoutés cà et là pour plus de clarté. TH. REINACH — UN TRAITÉE DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE 915 DES THÉORÈMES MÉCANIQUES oc DE LA MÉTHODE TRAITÉ D'ARCHIMÉDE, DÉDIÉ A ÉRATOSTHÈNE (PRÉAMBULE). Archimède à Eratosthène", salut, Je l'ai envoyé précédemment les énoncés de quelques-uns des théorèmes que j'avais découverts, et dont je l'invitais * à trouver les démonstrations, que je ne te donnais pas pour le moment. Voici quels étaient ces énoncés * : 4° Si, dans un prisme droit à bases carrées, on inscrit un cylindre — ayant les bases inscrites dans celles du prisme et la surface latérale tangente à ses faces latérales — et qu'on mène un plan par le centre d'une des bases etun côté du carré opposé, ce plan détachera du cylindre un segment, limité par le plan sécant, le plan de base et une portion de la surface cylindrique, dont le volume sera le sixième de celui du prisme entier ; 2° Siloninscrit dans un cube un premier cylindre, ayant les bases inscrites dans deux faces opposées du cube et la surface latérale tangente aux quatre autres faces; puis un second cylindre, ayant les bases inscrites dans deux autres faces opposées et la surface latérale tangente aux quatre restantes; le volume formé par l'intersection des deux surfaces cylindriques et commun aux deux cylindres vaudra les deux tiers du cube entier. On voit que ces théorèmes sont d'une toute autre espèce que ceux que je l'avais précédemment com- muniqués *, Dans ceux-là, en effet, je comparais, au 1 Ératosthène de Cyrène (environ 275-495 av. J.-C.), célèbre polygraphe — grammairien, géographe, chronologiste, mathématicien, philosophe, poète didactique — prit le pre- mier le titre de « philologue » et fut sunommé « Bêta » (deuxième lettre de l'alphabet grec), parce quil était le second dans toutes les branches spéciales de la connais- sance. Il fut longtemps administrateur de la Bibliothèque d'Alexandrie. ? gavevos edcioxev, expression singulière. J'adopte l'inter- prétation de Zeuthen. * Les énoncés de ces deux théorèmes sont cités en abrégé par Héron, Métriques (éd. Schône), p. 130. * Le texte dit « à bases rectangulaires » (rapa)n)6yoauuos a presque constamment le sens de rectangle chez Archi- mède); mais la suite prouve qu'il s'agit bien de carrés. Au lieu de prisme, nous dirions parallélipipède (plus correcte- ment : parallélépipède), mais ce terme, déjà employé par Euclide, n’est pas usité par Archimède. 5 Archimède dit : « les côtés » (n)euzai). 5 C'est-à-dire les théorèmes sur les volumes des conoïdes (paraboloïdes) et sphéroïdes (ellipsoïdes). Archimède avait également communiqué ces théorèmes (ou du moins ceux sur les paraboloïdes) à l'astronome alexandrin Conon:; après la mort de celui-ci, il en envoya les démonstrations à Dosithéos, élève de Conon, dans le Traité (conservé) Iepi xwvos dv xal cpatpoettswv. point de vue du volume, des figures d’ellipsoïdes ou de paraboloïdes" de révolution et des segments de figures de ce genre à des cônes et à des cylindres; mais jamais je ne trouvai qu'une figure pareille füt équivalente à un solide délimité par des plans *. Au contraire, dans le cas actuel, j'ai trouvé que chacun des deux volumes considérés — compris entre deux plans et des surfaces cylindriques — est équivalent à un solide compris entre des plans. J'ai rédigé dans le présent livre et je t'envoie les démonstrations de ces deux théorèmes. Mais te voyant, comme j'ai coutume de le dire, savant zélé, philosophe distingué et grand admirateur des [recherches mathématiques‘}, j'ai cru devoir y consigner également et te communiquer les parti- cularités d'une certaine méthode dont, une fois maitre, tu pourras prendre thème pour découvrir, par le moyen de la Mécanique, certaines vérités mathématiques”. Je me persuade, d'ailleurs, que cette méthode n'est pas moins utile pour la démons- tration même des théorèmes. Souvent, en effet, J'ai découvert par la Mécanique des propositions que J'ai ensuite démontrées par la Géométrie — la méthode en question ne constiluant pas une dé- monstration véritable. Car il est plus facile, une fois que par cette méthode on a acquis une cer- taine connaissance des questions, d'en imaginer ensuite la démonstration, que si l'on recherchait celle-ci sans aucune notion préalable. Par la même raison, les théorèmes dont Eudoxe”* a le premier ! Je substitue, pour plus de clarté, le mot ellipsoïde (de révolution) à celui de « sphéroïde » employé par Archimède, et de mème paraboloïde (de révolution) à « conoïde ». I] faut dire toutefois que les termes d'Archimède sont plus expressifs que les nôtres : le corps formé par la rotation d'une ellipse ressemble à une sphère, et de là le nom sphéroïde; de même le corps engendré par la rotation d'une parahole ressemble à un cône. ? Ce que nous appelons un polyèdre (terme inconnu des anciens). 5 Ici un mot illisible. M. Heiberg m'écrit que les restes des caractères ne permettent pas de suppléer le mot pofnuastv (les mathématiques): On remarquera le ton légèrement pro- tecteur dont Archimède (né en 287) s'adresse à Eratosthène, son cadet d'une douzaine d'années. # Voilà bien la définition de la méthode exposée ou plutôt exemplifiée dans le présent traité. La considération des infiniment petits et leur sommation ne sont qu'un des procédés de cette méthode. 5 Eudoxe de Cnide, célèbre astronome et géomètre (408- 355 av. J.-C.), élève d’Archytas et de Platon. Nous savions déjà par Archimède (1, 4; 11, 296, Heiberg) qu'Eudoxe avait le premier scientifiquement établi les théorèmes en ques- tion, en se fondant sur le postulat (aussi employé par Euclide et Archimède, Sphère et cylindre, init.) que toute 916 découvert la démonstration, — à savoir que le cône est le tiers du cylindre, la pyramide le tiers du prisme qui ont mème base et même hauteur, — il fauten rapporter une bonne part de mérite à Démo- crie”, qui le premier à énoncé, sans démonstra- on, les propositions relatives à ces figures. En ce qui concerne aussi ces théorèmes”, que je publie aujourd'hui, j'en ai fait la découverte d'abord [par la méthode mécanique. Aussi crois-je) devoir nécessairement l'exposer celte méthode, et cela pour deux raisons : d'abord, puisque j'y ai fait allu- Sion ailleurs”, je ne voudrais pas être accusé par quelques-uns d'avoir parlé en l'air; ensuite, je suis convaincu que cette publication ne servira pas médiocrement notre science. Car, assurément, des savants actuels ou futurs, par le moyen de cette méthode que je vais exposer, seront mis à même de découvrir d'autres théorèmes que je n'ai pas encore rencontrés sur mon chemin. Je l'exposerai donc, en premier lieu, la première proposition que j'ai découverte par la Mécanique : « Tout segment de parabole* vaut une fois et un üers le triangle ayant même base et même hau- teur », ensuite toutes les autres propositions décou- vertes par la même méthode. A la fin du livre j'ins- crirai les [démonstrations] géométriques..….”. (LEMMES °). I. Si l'on [retranche une grandeur 4 d'une autre grandeur À n'ayant pas le même centre de gravité, grandeur donnée peut être multipliée un nombre suffisant de fois pour dépasser une autre grandeur donnée. Démocrite d'Abdère (450-370 °?), le célèbre philosophe, qui se vantait de son habileté dans les constructions géo- métriques. Nous savions par un texte de Plutarque (Con- tre les stoïciens, 39) que Démocrite s'était occupé des sec- tions d'un cône parallèles à sa base, mais nous ignorions absolument — et Archimède, dans son Traité Sphère el cylindre, probablement antérieur à notre livre, parait avoir ignoré lui-même — qu'il eût énoncé les deux théorèmes J'Eudoxe. * Le texte dit : « ce théorème », peut-être, comme me le fait observer M. R. Prévost, parce que le second théorème n'est, au fond, qu'un corollaire du premier. # Notamment dans le traité Quadrature de la parabole, dédié à Dosithée, où il est dit (IE, 294, Heiberg) : « Je t'envoie un théorème inédit de Géométrie, que j'ai découvert d'abord par la Mécanique, ensuite démontré géométriquement. » La démonstration qui suit est mi-partie mécanique (n05 6-16), mi-partie géométrique. * Archimède dit toujours, au lieu de « parabole » (terme introduit un peu plus tard par Apollonius de Perge), « une section de cône rectangulaire », c'est-à-dire la section pro- duite, par un plan perpendiculaire à une génératrice, dans un cône dont l'angle au sommet vaut un droit. * La phrase étant incomplète, on ne sait pas si Archimède s’'engageait à donner à la fin du livre les démonstrations géo- métriques de toutes les propositions (telle est l'interpréta- tion de Zeuthen), ou seulement des deux principales. Il semble probable qu'il faut y ajouter en tout cas celle du théorème [er (voir la fin de ce théorème). * Les propositions qui suivent, données sans autre expli- cation, sont presque toutes des théorèmes de Mécanique TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE le centre de gravité de la grandeur restante h sera situé sur la droite qui joint les deux autres centres, prolongée dans le sens du centre de A; et l'on obtiendra la distance du centre de Lau centre de A! en prenant une longueur qui soit par rapport à la distance des centres de A et de 4, comme le poids de a est au poids de L". II. Si les centres de gravité d'un nombre quel- conque de grandeurs sont situés sur une même droite, le centre de gravité du système total sera également situé sur cette droite”. IT. Toute droite a pour centre de gravité le point qui la divise en deux parties égales”. IV. Tout triangle a pour centre de gravité le point de rencontre de ses médianes"*. V. Tout parallélogramme a pour centre de gra- vité le point de rencontre de ses diagonales”. VI. Le cerçle a pour centre de gravité son centre de figure. VII. Tout cylindre a pour centre de gravité le point milieu de son axe. VIII. Tout cône a pour centre de gravité [un point situé sur la droite menée du sommet au centre de la base et qui la divise en deux segments dont celui qui part du sommet est] triple [de l’autre. élémentaire; plusieurs sont démontrées dans le Traité d'Archi- mède qui nous est parvenu sous le titre « Equilibres des plans ou centres de gravité des plans, livre L » (‘Entré isosporint h ÉvTpù Baoüvy irréôwv, à’), (ans l'édition de Heiberg, Il, 142 suiv. Nous le citerons ainsi : « Centres de gra- vité, [ ». Cet ouvrage (mais non le livre II du même Traité) est sûrement antérieur au présent Traité. Il est possible qu'il faille l'identifier avec l'ouvrage cité ailleurs (Quadr. parab. 6) sous le titre de Mrys:2% ou sous celui de Exotysia Tav urzavzmy (ainsi cité dans le texte nouvellement découvert des Corps flottants). 1 Ce théorème (Centres de gravité, I, S = IN, 161 Heib.)est une conséquence nécessaire du principe fondamental (ibid., 1, 6-7) que. lorsque deux grandeurs se composent en une grandeur totale, les trois centres de gra- vité sont sur une même droite, que le centre de la gran- deur composée divise en segments inverse- ment proportionnels aux poids des composantes. Dès lors (fig. 1), si de la grandeur AB (centre V) on retranche la gran- deur AA (centre E), le centre Z de la grandeur restante AB est placé de telle sorte qu'on ait : ZT __ poids AA TE poids ABY Fig. 1. 2 Cf. Centres de gravité, 1,5 et corollaires (IT, 149 et suiv. Heiberg). 3 Centres de gravité, 1, 4 (IT, 146). “ Mot à mot : « le point où se rencontrent les droites, menées des sommets du triangle au milieu des côtés oppo- sés. » Centres de gravité, 1, 14 (Il, 483). La démonstration 1,13) repose sur la décomposition du triangle en une somme de rectangles. 5 Centres de gravité, 1, 10 (IT, 164). $ Nous ne possédons pas de démonstration par Archimède de cette proposition. Il est probable qu'elle s'établissait : TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE 917 [Les propositions! ci-dessus [ont été précédemment démontrées; [on y joindra la suivante dont la dé- monstration est facile} : s IX. {Etant données deux séries de grandeurs AAA,A.... BB,B,B... en mème nombreet telles que le rapport de deux grandeurs de même rang soil l { È = ; 1 = È i tout )U Ï arti ( stan = CNONONI l'E SN 0 (8 artie «des consta B B B. ou ) 1 2 grandeurs À sont dans des rapports quelconques avec des grandeurs CCC... et si les grandeurs B de rang correspondant sont respectivement dans les mêmes rapports avec d'autres grandeurs DD, D..., la somme des grandeurs À sera à la somme des grandeurs C considérées, comme la somme des grandeurs B à celle des dantes” : grandeurs D correspon- SA _SB Some (TuÉoORÈME [°)°. Elant donne* un segment de parabole ABT (fig. 2), si par le milieu À de la corde on mène" le dia- 1 en déterminant le centre de gravité d'une pyramide triangulaire ; 2° en passant de là à une pyramide polygo- nale: 3° en considérant le cône comme la limite vers laquelle tend une pyramide inscrite quand on augmente indéfini- ment le nombre des côtés. { Ce lemme est la proposition initiale du Traité dit Des conoïdes et sphéroïdes (1, 290, Heib.). C__D C _A : : CA Puisque pop 0e de même Dane m, D CSA AR etc., on a évidemment : SD sh? d'où SC — SD: Notre lemme peut être appliqué (et l'était sans doute dans le lexte intégral des derniers théorèmes) pour passer de la constatation de l'équilibre des sections AA,A3.. CCC, déterminées par des plans équidistants dans un volume V et dans un volume auxiliaire W, à l'équilibre de ces volumes eux-mêmes. Considérons, en effet, les sections À comme les bases de prisines élémentaires BB,B,.. dont la somme enveloppe le volume V; et de mème les sections C comme les bases de prismes élémentaires DD,D,... dont la somme enveloppe le volume W. Si m est l'équidistance (c'est-à- dire la hauteur des prismes}, on a évidemment : BAT AS Ambre AT L ve SATA = = = ete. ; CH =: DOI AD IC EM ENRCERT ER Reste à passer des corps enveloppants (£B, ED) aux volumes V, W eux-mèmes : c'est ce que fait Archimede en s'appuyant sur le postulat d'Eudoxe cité plus haut, p. 915, note 5. [Le contenu de la note qu'on vient de lire m'a été suggéré par M. R. Prévost.] ? L'énoncé de ce théorème est cité par Héron, Métriques (éd. Schœæne), p. 80.17 et 84,11. Sa démonstration complète fait l'objet du Traité (antérieur au nôtre) intitulé Quadrature de la parabole (H, 294 suiv.). Archimède y distingue (prop. 14 et 45) suivant que le diamètre est perpendiculaire ou non à la base du segment, mais la solution est la même dans les deux cas. : % M. à m. : « soit un segment ABT compris entre une droite AT et (une partie d’) une section de cône orthogonal ABT... » * Archimède dit : « une droite parallèle au diamètre », entendant par diamètre l'axe de la parabole. Aïlleurs, il appelle diamètre d'un segment curviligne la droite qui divise mètre AE qui coupe l'arc en B et qu'on joigne BA, BF, Za surface du segment ABT vaut les 4/3 du triangle ABT. Menons AZ parallèle au diamètre, et la langente VZ à la courbe. Prolongeons FB jusqu'à sa ren- contre K avec AZ, et, au delà, d'une longueur in Z KO — KT. Imaginons que F6 soit un levier’! ayant pour point fixe son milieu K. Soit enfin MZ une parallèle quelconque à AE. Puisque lZ est une tangente à la parabole et TA une corde conjuguée“ (du diamètre BA), on à EB = BA, car ceci est démontré dans les Æléments”. On a, dès lors, — à cause des parallèles ZA, ME, EAU =MNN= 7K—'KA D'autre part, on a : car ceci à été démontré dans un lemme. en deux parties égales toutes les cordes parallèles à la base du segment (Conoïdes, 3: 1, 302, Heib.). J'ai cru plus clair d'adopter ici cette terminologie, conforme à l'usage moderne. On sait, d'ailleurs, que Lous les diamètres de la parabole sont parallèles à l'axe (Rouceé et ComBeROUSSE : Géométrie elémen-- taire, n° 1051). 1‘ Archimède dit : un fléau (de balance). ? Le grec dit ai retayué.ws (sous-entendu xarnyuévn). Le sens de ce terme est bien marqué par des passages comme 11, 230, Heïb. 3 C'est-à-dire dans les ouvrages élémentaires sur les sections coniques comme celui d'Aristée l'Ancien, cité par Pappus (Canror : Vorlesungen über Geschichte der Mathe- matik, 1, 232) et revu par Euclide. Cet ouvrage est perdu, mais notre théorème (énoncé Quadr. parab. 2) est démontré par Apollonius : Coniques, 1, 35 (p. 105, Heib.). # O partage ME comme Z partage AT. Cette proposition s'établit facilement en s'appuyant sur la propriété de la parabole rapportée à une tangente et au diamètre con- jugué = — constante. Prenons F pour origine et pour axes des coordonnés la tangente TE et la parallèle au dia- mètre menée par F. AZ OM AZ TZ: APN ZA OU (= — Or e (ONE ON TION 8 pa pe TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE 918 y TK PAU - segment parabolique BAT. Donc au total le triang Comme == = —> on peut donc écrire aussi : D a Éc I à Ne Done Die rue NE KN ZAT,, restant en place, fera équilibre au segment KNINEUX et, puisqu'on a pris KO = TK : , s_ K6. ME!) LE KNWEUË avec © pour milieu Transportons 20 en TH, De c'est-à-dire pour centre de gravité [ Lemme I]. même N sera le centre de gravité de la droite MZ restée en place. Comme K est le point fixe du levier, on voit que, à cause de l'égalité (2), les droites TH (— 20) et ME 5e feront équilibre par rapport à ce point fixe, puisque les distances de leurs centres à ce point sont inversement propor- tionnelles à leurs longueurs (c'est-à-dire à leurs poids). K sera donc le centre de gravité de leurs poids composés. Il en sera de mème pour toutes les parallèles menées au diamètre à l'intérieur du triangle ZAT la parallèle, restant en place, fera équilibre à sa portion comprise dans le segment, supposée trans- portée en ©, et le centre de gravité du couple sera toujours le point K. La somme des parallèles en question, c'est l'aire du triangle FAZ; la somme de leurs portions sem- blables à OZ, interceptées par le segment, c’est le EM NZ OM IM : il vient (3) Fi divisons membre à membre (1) et (2) TA — -—, c'est-à-dire : O partage ME comme Z partageAT. En particulier, A étant milieu de la corde AT, le sommet B du diamètre conjugué sera le milieu de AE (démonstration de la proposition EB — BA, plus simple que celle d'Apol- lonius). [Démonstration communiquée par R. Prévost.] Archimède, dans la Quadrature de la parabole ($ 4 et 5), APS MNATAÈME obtient cette relation ( TS long. Il écrit le rapport du carré des ordonnées aux abscisses en les rapportant à la tangente en B et au diamètre con- jugué. Soit Oxp la parallèle à la base du segment : te) par un calcul un peu plus NE I BA Br AT = 5° en remplac ant px Par Be ? et Es Pa BE DAT SEL AIO VEN IDSEENT IPN BNP -Pnee ENaET BN-E Be — No° PLR à BTMMESNAT EN NE il Remplacons de nouveau pN PU y! No par Xi 2 AT NE 2 2NE vient : Ex = No 0 © 518 — NE —N0 c'est-à-dire AT ME FETE 1 Jusqu'ici la marche de la démonstration concorde à peu près avec celle de la première démonstration (méca- nique) donnée dans le Traité de la Quadrature de la parabole. LEE de ce point, elles divergent. Dans ce dernier Ttraité $ 6-17), Archimède décompose le segment, par des paral- lèles équidistantes et un faisceau de droites tirées de F, en deux séries de trapèzes, l'une enveloppée, l'autre envelop- pante. et il montre (en s'appuyant sur des lemmes méca- niques) : 4° que le triangle ZAT est plus grand que trois fois une de ces séries et plus pelit que trois fois l'autre ; 2° que la différence entre ces deux séries peul être plus petite que toute valeur donnée. entier transporté en ©, et le centre de see de leur système sera K. Prenons sur FK le point X tel que FK=3 KX : Ce point (étant au tiers de la médiane FK et par conséquent au point de rencontre des 3 médianes) sera le centre de gravité du triangle AZ, comme cela à été démontré dans les Zquilibres'. Comme le triangle fait équilibre par rapport à K au seg- ment, lransporté au centre © (les distances de leurs centres de gravité au point fixe sont inverse- ment proportionnelles à leurs aires) : tr. AZT segm. ABT GS ERIC UE D'autre part, le triangle FAZ est quadruple du triangle ABT à cause de ZK — KA, AA — AT'; donc finalement : (?) 4 = segm. ABT ABT Ce qui précède ne constitue pas une démonstra- tion (complète) * mais suffit à donner à la conclusion une apparence de vérité. Voilà pourquoi, voyant d'une part que le théorème n'était pas (complète- ment) démontré, supposant d'autre part la conelu- sion exacte, j'ai trouvé une démonstration géomé- trique que j'ai publiée précédemment et que j'ajouterai plus bas en appendice* (?) (TuHÉORÈME Il). Toute sphère est quadruple du cône qui a une ‘ Centres de gravilé, I, 14 et 15 (p. 186, 3); suprà lemme IV. ? Suivent clair... » # Ce qui chitfonne le rigorisme d'Archimède, à mon avis, c'est : 1° l’intrusion de la Mécanique dans une question purement géométrique: 20 le procédé abréviatif qui consiste à considérer une aire curviligne comme une somme de droites « pesantes » et à conclure de l'équilibre, deux à deux, des portions de parallèles interceptées dans le segment et le triangle ZAT, à l'équilibre des aires du triangle et du segment. On voit que, sur ce point, je ne suis pas entièrement d'accord avec M. Painlevé. 4 Archimède parait n'avoir en vue ici (et ceci confirme l'opinion exprimée dans la note précédente) que la démons- tration purement géométrique qui forme la deuxième partie de la Quadrature !$ 18-24). Elle repose sur le théorème que le diamètre mené du milieu de la base au sommet du seg- ment vaut les 4/3 de la parallèle au diamètre menée du quart de la base à l'arc. On démontre alors facilement que le segment peut se décomposer en une série de triangles de plus en plus petits, ayant tous leurs sommets sur l'arc, et dont la somme a pour expres ssion (1 étant le triangle initial, qui a mème base et mème sommet que le segment) : { aie ANNE AA 4 1+-+ ( + ([-]) ..., série dont la somme est 3° # 4 les mots incompréhensibles : « Ceci sera 5 Toéouey, lecon douteuse de Heïberg. Rien ne prouve que la démonstration en question figurät réellement à la queue de notre traité. bus mins dinde 4 TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMEDE 919 base égale à un grand cercle’ et une hauteur égale au rayon de la sphère; 2 Le cylindre ayant une base égale à un grand cerele et une hauteur égale à un diamètre de la sphère équivaut aux 3/2 du volume de celle-ci. Soit ABFA (fig. 3) un grand cercle de la sphère, AT, BA deux diamètres perpendiculaires ; par BA on mène un grand cercle de plan perpendiculaire à ABTA et on prend ce cercle pour base d'un cône ayant son sommet en À. Prolongeons maintenant la jusqu'à sa rencontre avec le plan mené par F paral- lèlement à sa base : l'intersection sera un cercle de diamètre EZ, perpendiculaire à AT. Sur ce cercle, avec l'axe AF, construisons le cylindre EAHZ. Enfin nappe du cône () A œ A y H | Z la Ml- {N | | | | | | | | É 72 prolongeons AF d'une longueur AO — AT et consi- dérons F@ comme un levier ayant pour milieu fixe A. Menons une parallèle quelconque MN à BA, qui coupe le cercle ABTA en Z, O, le diamètre AF en E, les droites AE, AZ en IT, P. Si, par cette droite MN, on mène un plan perpendiculaire à AF, il coupera le grand cylindre suivant le cercle MN, la sphère suivant le cercle ÆO, le grand cône AEZ suivant le cercle IP. On à (par identité) : DASCAS = MENCEIT; Mais puisque LA = ME et AE — SIT. (dans le triangle rectangle AZT) on à : AE — TA X AL. Done aussi: ME X SI = AZ | D'autre part, on à (toujours par identité) : TA MY IDOTN 1 Archimède dit : « Le plus grand cercle de la sphère ». Remplacant l'A par son égal A@et multipliant les deux termes du second membre par ME, on à : AN) ME D __ MS AS MSIE ou, en substituant la valeur de ME X EI trouvée / ci-dessus : A6. ME MN AS EP LS 20° NP (Les aires des cercles étant proportionnelles aux carrés de leurs rayons ou diamètres, cette égalité peut s'écrire :) cercle MN AO cercle UE + cercle IP AE° Done, si l'on suspend au centre de gravité @ les deux cercles 0, HP déterminés par le plan paral- lèle dans la sphère et le cône, ils feront équilibre, par rapport au point fixe A, au cercle MN déter- miné dans le grand cylindre et resté en place (puisque les aires pesantes sont inversement pro- portionnelles aux distances des centres de gravité au point fixe). On démontrerait de même que, pour toute autre parallèle à EZ menée à l'intérieur du rectangle AZ, et par laquelle on mène un plan perpendiculaire à AT, le cercle déterminé dans le cylindre équi- libre, par rapport au point A, les cercles déterminés dans le cône AEZ et dans la sphère, supposés transportés au centre de gravité commun ©. La somme des cercles déterminés représente les volumes respectifs du cylindre, du cône AEZ et de la sphère qu'ils remplissent entièrement. Done le cylindre, resté en place, équilibre, par rapport à À, les deux autres solides transportés au centre de gravité commun @. Le cylindre à pour centre de gravité K (milieu de l'axe et centre de la sphère); la relation d'équilibre donne : cylindre AZ __ AO RE —— — — cône AEZ + sphère AK En d'autres termes : cylindre AZ — 2 (cûne AEZ + sphère). Mais le cylindre AZ vaut trois fois le cône AEZ, donc : 3 cônes AEZ — 2 cônes AEZ + 2 sphères. ou : cône AEZ — 2 sphères K. Comme le cône AEZ a rayon et hauteur doubles de ceux du cône ABA, il vaut 8 fois ce dernier cône; on peut donc écrire : 8 cônes ABA — 2 sphères K, c'est-à-dire : , sphère K = 4 cônes ABA. 920 Menons maintenant dans le rectangle AZ les parallèles DBX, WAQ à AT et considérons les cylindres DWYOX, PWYAB. Le cylindre DO vaut 2 fois le cylindre DA, et ce dernier cylindre vaut 3 fois le cône ABA, comme on l'a vu dans les Ælé6- ments". Donc: cylindre dQ — 6 cônes ABA. Rapprochant cette égalité de la précédente, il vient : cylindre dQ 6 cônes ABA 2 C, a. Ld; sphère K 4 cones ABA 2 Remarque. [De] ce théorème, par lequel on a établi que toute sphère vaut 4 fois le cône qui a pour base un grand cerele et pour hauteur un rayon de la sphère, [m'est venue] l'idée que la surface d'une sphère vaut quatre grands cercles. C'est en effet une hypothèse vraisemblable que, de même que tout cercle équivaut à un triangle ayant poux base la circonférence et pour hauteur le rayon, ainsi toute sphère équivaut (en volume) à un cône ayant pour base la surface de la sphère et pour hauteur le rayon *. (TaéorÈME [)*. * 1° Le cyhndre ayant une base égale au plus grand cercle d'un ellipsoïde de révolution" et une hauteur égale à laxe de ce solide vaut les 8/2 de lellip- soide. 2 Quand on coupe un ellipsoïde par un plan passant par son centre et perpendiculaire à son axe, le demi-ellipsoide ainsi déterminé est double du cône ayant même base et même axe. Soit l'ellipsoide K (fig. 4) coupé par un plan passant son axe suivant l'ellipse® ABFA, les dia- 1‘ Eccuine, XII, 10. 2 Soit S la surface, V le volume de la sphère, R le rayon, C un grand cercle, notre théorème peut s'écrire : R 1) N=4:XC.—. 3 D'après l'hypothèse, V =S X 3° Substituant dans (1), il vient : R R SX—-—4XC.+, DC 3 EX C 3 c'est-à-dire S = 4C. Il faut ajouter que le texte est incertain et qu'on pour- rait traduire inversement : « L'idée de ce (héorème... est née de ce que la surface d'une sphère vaut 4 grands cercles », En effet, dans le Traité De la Sphère et du cylindre I, Archimède commence par établir longuement que l'aire de la sphère vaut 4 grands cereles ($ 33 — TI, p. 137, Heib.), et de là il déduit !$ 3% le théorème que le volume de la sphère vaut 4 fois le cône ABA, Pourtant Heiberg croit et je crois avec lui que la pensée d'Archimède a bien suivi l'ordre indi- qué au texte. * Cf. De conoïd., prop. 29-30. * Archimède dit : « un sphéroïde ». * Archimède dit : « une section de cône acutangle ». TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÉDE mètres AT, BA, le centre K; soit encore le grand cercle de diamètre BA perpendiculaire à AT. Considérons le cône ayant pour base le cercle BA, pour sommet À, et prolongeons la surface latérale jusqu'à son intersection, suivant le cercle EZ, avec le plan mené par F parallèlement à la base; cons- truisons aussi le cylindre ayant pour base le cercle EZ, pour axe AT; enfin prolongeons AT d'une longueur égale AO! et considérons OF comme un levier ayant À pour milieu fixe. Dans le rectangle AZ, menons à EZ une parallèle quelconque MN, et par MN un plan perpendiculaire à l'axe AT. Ce plan coupera le cylindre suivant un (2) cercle de diamètre MN, l'ellipsoïde suivant un cerele de diamètre Z0, le cône suivant un cercle de dia- mètre HP. On a : (1) RE NT=sST donc aussi : AS 19 En NMxon Je dis maintenant que ME X SI — SIT + XE En effet, on a : ASXOTMARNET 3 » KB° (3) S=- car l'un et l'autre rapport égale celui du grand axe au paramètre". ro tôs mhayias rod; Tnv ôpiav. La rayix (d'une ellipse} est le grand axe (ou diamètre par excellence). L'épñia ou paramètre est une longueur dont la mesure est déterminée par Apollonius, Coniques, 1, 13. Etant donnée une ellipse dans un cône (fig. 5), il mène, par le sommet, A du cône une parallèle au grand axe EA de l’ellipse jusqu'à sa rencontre K Ê 0 TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE 921 Dès lors (puisque AK = KT) : ASSET. AK A2, _ TE intervertissant : RU ASS TI Mais (à cause de Sr IN AE SITE ASE SIT-UIM Donc : SITE ©ILIIM c'est-à-dire : ER Ajoutant de part et d'autre XIE, il vient : >= + SN — SIT + SM — EN (ON + NM) — EU X MS, comme nous l’avions annoncé. Remplacons maintenant, dans l'égalité (2), ME X XII par sa valeur; il vient : AB MS rcle MN NS = +3 — cercle OZ + cercle HIP° En d'autres termes, par rapport au point fixe À, le cercle MN, restant en place, équilibrera la somme des cercles OZ et IIP suspendus au centre de gra- vité commun ©, car les distances des centres de avec un diamètre BF de la base du cône. Il prend ensuite la "perpendiculaire EO à EA telle que : EO sera le paramètre (06:6ta). Apollonius démontre (1, 21; p. 75, Heib.) que, pour un point £ quelconque de l'ellipse, ‘on à : ED 3 paramètre AE XE[ grand axe Heiberg croit que les mots soulignés au texte ont été inter- polés où du moins substitués à une phrase autrement rédi- gée, parce que les termes 0p8ix et maayiz sont de la création d'Apollonius. L'égalité (3) peut d'ailleurs être démontrée assez simple- ment en considérant l’ellipse comme la projection orthogo- (théorème de Stevin). Soient 24, 2b ! deux ordonnées quelconques cercle l'ellipse, y, y d'un les axes de correspondantes du cercle et de l'ellipse. On à évidemment nale DNS dans le cercle : y*— AZ. et, comme y'=y 7 il vient : ASSET 4° y HE (AT-2T) = d'où — constante. On peut aussi déduire cette relation de l'équation de l'ellipse ete ARR TRUE sus rapportée à ses axes = + = 1, d'où a x) (a— x a? — x° 9 — (ARTE) an — = = — constante. ga b* REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. gravité au point fixe sont inversement proportion- nelles aux poids considérés. Semblablement, pour toute parallèle à EZ menée à l'intérieur du rectangle AZ et par laquelle on mène un plan perpendiculaire à AP, le cercle inter- cepté dans le grand cylindre, restant en place, équi- librera par rapport à A les deux cercles interceptés dans l’ellipsoïde et dans le cône, transférés en @, comme centre de gravité commun, Remplissons complètement ces trois corps de cercles semblables, Au total, le cylindre restant en place équilibrera l’ellipsoïde et le cône AEZ trans- portés en ©. Le cylindre à pour centre de gravité K, on doit donc avoir : eA cylindre AZ AK ellipsoide + cône AËZ° Mais OA —92AK, donc : cylindre AZ — 2 fois (ellipsoide + cône AEZ), Mais le cylindre AZ vaut trois fois le cône AEZ qui a même base et même hauteur; donc : 3 cônes AEZ — 2 ellipsoides + 2 cônes AEZ. ou cône AEZ — 2 ellipsoides. Le cône AEZ vaut huit fois le cône ABA dont le rayon de base et l'axe sont moilié des siens, donc enfin : ellipsoide — 4 cônes ABA el : ellipsoïde — 2 cônes ABA. Menons maintenant dans le rectangle AZ les parallèles XD, QW à l'axe par les points B, À et con- sidérons le cylindre DYOX. Il est évidemment double du cylindre DWAB, qui à base égale et axe moitié moindre; ce dernier vaut trois fois le cône ABA, donc : cylindre FAB — 6 cônes ABA, et comme le cône vaut le quart de l'ellipsoïde : cylindre PFAB — $ + ou = ellipsoide. GC. q.f.d. (THÉORÈME IV)’. Tout segment d'un paraboloïde de révolution”, déterminé par un plan perpendiculaire à laxe, vaut les *], du cône ayant même base et même axe. Soit un paraboloïde coupé par un plan passant par son axe, qui détermine la parabole BAT (fig. 6). Coupons le paraboloïde par un second plan, per- 1 Ce théorème est démontré géométriquement dans le Traité Des conoïdes ete., prop. 21 (1, 386, Heib.) par la méthode dite d'exhaustion. 2 Archimède dit : « d'un conoiïde orthogonal ». La para bole elle-même est dite « section d’un cône orthogonal » 22% TH. REINACH — UN TRAITÉ DE pendiculaire à l'axe. Soient BF l'intersection des deux plans, AA l'axe du segment, que nous prolon- geons d’une longueur AO = AA, et considérons A comme un levier dont le milieu fixe est A. La base du segment est le cercle BF, perpendicu- laire à AA. Imaginons un cône ayant pour base ce cerele et pour sommet le point À, et un cylindre ayant pour base ce même cercle et pour axe AA. Dans le rectangle EZTB, menons une parallèle quel- conque MN à BF, et par MN un plan perpendicu- laire à AA, qui coupera le cylindre suivant le cerele @ | (l er | ( | | | [l 1 l E _'A Z M N B A r Fig. 6. MN, et Le segment de paraboloïde suivant le cercle =\0} BAT étant un arc de parabole, AA l'axe parabole, ZË, BA des ordonnées!, on a°: de la NAMIBIE AË (1) Mais cette dernière expression représente aussi le rapport du cercle MN au cercle Z0. On a donc : cercle MN OA AS cercle 0° (3) Par conséquent le cercle MN, déterminé dans le cylindre, équilibre par rapport au point A le cercle Z0 déterminé dans le paraboloïde, suspendu au # M. à m. « des droites tirées ordonnément », tetzyuévwc ravnyusvat. Ailleurs (11, 231, Heib.), Archimède explique ce terme ainsi: « cordes parallèles à la tangente au sommet de la courbe ». , 2 « Le carré de l'ordonnée est proportionnel à l'abscisse ». C'est l'équation fondamentale de la parabole, qui se démontre par les moyens élémentaires (cf. Roucré : Géométrie, n° 1025). Elle figurait dans les Eléments des sections coniques d'Aristée et d'Euclide, auxquels Archimède, dans la Quadrature de la parabole, prop. 3 (1, 300, Heib.), renvoie pour la démonstration. GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE centre de gravité @ : car ‘le cercle MN a pour centre de gravité son centre Ë, le cercle 0 transporté« pour centre de gravité @, et les distances des dew centres au point fixe À sont inversement propor tionnelles aux cercles correspondants. | On démontrera de même, pour toute parallèle menée à BT dans le rectangle BFZE, par laquelle on mène un plan perpendiculaire à AA, que cerele déterminé dans le cylindre, restant en place équilibrera le cercle déterminé dans le paraboloïde transporté au point © du levier comme centre de gravité. Remplissons de cercles pareils le cylindre et le segment de paraboloïde. Au total, le cylindre, res tant en place, équilibrera, par rapport au point A le segment de paraboloïde transporté en @ comme centre de gravité. Dès lors, les distances de leurs centres de gravité au point A devront être inverse ment proportionnelles à leurs volumes, ou, puisque le cylindre a pour centre de gravité le milieu K de son axe : AO cylindre 7.\ D, () AK segim. parab. Mais AK estla moitié de AO, le cylindre vaut done 2 fois le segment de paraboloïde. Et, comme le cylindre vaut 3 fois le cône ABT qui a même base et même axe, on voit finalement que le segment vaut les 3/2 du cône. (THÉORÈME V)’. Tout segment de paraboloïde de révolution, déters miné par un plan perpendiculaire à Taxe, a son centre de gravité situé sur la droite qui forme Taxe du segment, en un point tel que sa distance au som met soit double de sa distance à la base. Soit un segment de paraboloïde déterminé pa un plan perpendiculaire à l'axe (fig. 7). Coupons-les par un autre plan passant par l'axe, qui détermine la parabole BAT. Soit BT l'intersection des deux plans, AA l'axe du segment et de la courbe. Prolongeons AA d'une longueur égale AO, consis dérons A@ comme un levier dont le milieu fixe est À, et inscrivons dans le segment de paraboloïde un cône ABT. Enfin menons à l'intérieur de là parabole une parallèle quelconque £0 à BF, qui coupera la parabole en Æ, O, et les arètes du cône en II, P. Û 1 Au lieu de ai éort (Heiberg, p. 264, 25), il faut lire 0 corriger éoTi y42. 2 Dans-le texte grec, nouvellement découvert, du Traité des Corps flottants (passage correspondant à IF, 377, Heib.), ce théorème est mentionné comme démontré ëv rats ’Ioopgoniaes Comme il n'en est pas question dans le Traité qui nous est parvenu sous ce titre, Heïberg croit qu'il s'agit du Traité (perdu) rest Euy@v. ; TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE 9923 Dans la parabole, ZX, BA sont des perpendicu- laires à l'axe. On à donc : AA Ô TO D'autre part (à cause des triangles semblables), on à : AA BA ASIE BA° @) BAS Par conséquent, en combinant (1) et (2) : x ES BAIL d'où résulte que : ES? BAINS EX est donc moyen proportionnel entre BA et (©) Fig. 1. ne Pc LS, et l'on à (en divisant les deux membres par IE dE BA IS > A AA OÀ ais nous avons vu (2)que = = — ——, donc: HERQNE STE ASSURE en EDS Menons par 20 un plan perpendiculaire à AA : il coupera le segment de paraboloïde suivant le cercle EO, le cône suivant le cercle HP. Le rapport == est aussi celui du cercle £O au SITE cercle IP. On à donc : OA _ cercle 20 A cercle IIP° Ainsi le cercle Æ0 restant en place équilibrera, par rapport au point A, le cercle ITP transporté au point @, car ils ont pour centres de gravité les points et©, dont les distances au point fixe À sont inversement proportionnelles aux surfaces des cercles considérés. On démontrera de même que, pour toute autre parallèle à BF menée dans la parabole, et par laquelle on mène un plan perpendiculaire à AA, le cercle déterminé dans le segment de paraboloïde, restant en place, équilibrera, par rapport au point A, le cercle déterminé dans le cône, transporté au centre de gravité ©. Remplissons de cercles pareils le segment et le cône. Au total, la somme des cercles du segment, c'est-à-dire le segment, restant en place, équili- brera, par rapport au point À, la somme des cercles du cône, c'est-à-dire le cône, transporté au point @ du levier comme centre de gravité. Le centre de gravité du système total est À, le centre de gravité du cône transporté est ©; dès lors (lemme I) le centre de gravité de la différence, c'est-à-dire du segment de paraboloïde, sera situé sur la droite AO prolongée dans la direction de À, en un point K tel que AO AK segment cône Mais on sait (Théorème IV) que le segment vaut les : oh 3/2 du cône; donc aussi AO — ; AK, et par consé- quent le centre de gravité du segment de parabo- loïde est bien situé en un point de l'axe tel que sa distance au sommet soit double de sa distance à la base. (THÉoRÈME VI). Tout hémisphère a pour centre de gravité un point situé sur son axe et dont les distances au sommet et à la base sont dans le rapport de 5 à 3. Soit une sphère et un plan passant par son centre qui la coupe suivant le cercle ABFA (fig.8). Tracons dans le cercle deux diamètres rectangulaires AT, BA. Par BA menons un plan perpendiculaire à AT, et considérons le cône ayant pour base le cercle de diamètre BA (dans un plan perpendiculaire à AT), pour sommet À, pour côtés AB, AA. Prolongeons AT d'une longueur A9 = AT et considérons OF comme un levier ayant pour milieu fixe A. Dans le demi-cercle BAA menons une parallèle quelconque 20 à BA. Elle coupera la circonférence du demi-cercle en Æ, O, le cône en II, P, l'axe AF en E. Par £O faisons passer un plan perpendicu- laire à AT. Il coupera l'hémisphère suivant le cercle 0, le cône suivant le cercle IP. On a : | AT.AE AE (1) AE = oi ( TS AE AE Mais AZ AE +ESZ’, AE — EI. Substituant, il vient : AT EN +E= cercle IP + cercle 20 2) a QUE En cercle IP ; TH. REINACH — UN et, comme AT — AO, AO _ cercle 20 + cercle MP AE cercle JIP À Les cercles 20 et IIP ont pour centre de gravité E. Si donc on suppose ces deux cercles en place, et le cercle HP seul transporté en @ comme centre de gravité, les distances AO, AE des centres au point fixe étant inversement proportionnelles aux sur- faces représentées, il en résulte que les deux cercles feront équilibre, par rapport au point À, au cercle IP transporté en ©. [Le même raisonnement s'appliquant à toutes les Q] à Fig. 8. autres positions de la parallèle, en additionnant tous les cercles pareils, on voit que le cône et l'hémisphère restant en place équilibreront, par rapport au point À, le cône seul transporté en @. Considérons maintenant, suspendu en ©, un cy- lindre MN équivalent au cône ABA et divisons-le par un plan horizontal en deux cylindres partiels dont l'un M équilibre le cône par rapport à À : alors l'autre cylindre partiel N équilibrera l'hémisphère. Soit maintenant sur AH le point ® tel que AD — 3H : ® sera le centre de gravité du cône (lemme l AXCSN TS VII). Je prends sur AH le point X tel que SH 3 HER AINSI RER ; ou, ce qui revient au même, ==: je dis que X est le centre de gravité de l'hémisphère. En effet, puisque le cylindre M (centre de gra- TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE vité ©) équilibre par rapport à A le cône AB (centre de gravité D), on a: 3 cyl M _ œA 44H 3 cone ABA OA 24H S Comme : vol. cône ABA — vol. cyl. MN, on a : cyl. M 3 d'où cyl. M ni cyl. MN _8 cyI. MN S’ cyL MN—cyLM 5° cyl IN 5e ou encore : cône ABA es LS sers SRE (1) cn =» c'est-à-dire = 5x D'autre part, on a (Théorème Il) : (2) hémisphère 2410 + 1 cône ABA Multipliant membre à membre (1) et (2), il vient : hémisphère __ AO cylindre N° AX° Mais le cylindre N à pour centre de gravité @: il équilibre d'ailleurs — on l’a vu plus haut — l'hé- misphère par rapport au point À : donc nécessai- rement X est le centre de gravité de l'hémisphère :.] (THÉORÈME VI. Tout segment de sphère (à une base) est au cône [de même base el de même hauteur comme le rayon de la sphère plus la hauteur du segment : taire sont à cette dernière hauteur seule * 1 J'ai suivi, pour suppléer cette démonstration, l’analogie du théorème VIII et les indications de la figure; mais on pourrait arriver au même résultat par une méthode plus rationnelle, sans supposer le problème résolu. Puisque hémisph. + cône (en place) équilibrent par rapport à A le cône (en ©), le centre de gravité Q du système « hémisph. + cône » doit satisfaire à l'égalité : hémisph. + cône A6, cône TAN | et, comme hémisph.—2 cônes, il en résulte AO —34AQ: le point Q est donc au tiers du diamètre (ou aux 2/3 durayon)à partir de A. Le centre de gravité du cône (lemme V Il)est en pb, aux 3/4 de AH. Donc le centre de gravité de l'hémisphère 1 seul — différence du: système et du cône — est (d'après lemme I), sur æQ prolongé dans le sens de Q, en un point X tel que: XQ cône 1 O9 hémisph. 2? en d'autres termes, à une distance de Q moitié moindre (et de sens contraire) que celle de D. Calculons AX. On a Qd 3 = AD—A0 TAN —TAH— AH; donc XO— AH et AX — A9 —xo © AH — 2 AH 5 AH —Ÿ AH. C.afd $ ? Enoncé restitué 7 après % Traité phée et cylindre, II, 2 (1, p. 19%, Heiïb.), où Archimède donne une démonstration {ou plutôt une vérification) géométrique assez simple. Si l'on appelle R le rayon de la sphère, à la hauteur du segment, À! celle du segment supplémentaire, l'énoncé TH. REINACH — UN TRAITÉ DE [Coupons ‘ la sphère (fig. 9) par un plan passant par le centre qui détermine le grand cerele AATA' et coupe le segment donné suivant l'arc AAAA'B. Tracons le diamètre AT passant par le sommet du segment et qui coupe la base AB en H; menons le diamètre perpendiculaire AA'. Tirons AA, AA’ et prolongeons-les jusqu'à leurs rencontres E, Z avec AB prolongée et W,Q avec la tangente en F. Imagi- nons enfin les cônes ayant pour sommet À, pour . bases respectives les cercles de diamètre AB, EZ,WO, et le cylindre ayant pour base le cerele W@ et pour - axe AT’, cylindre que le plan de base du segment coupe selon le cercle FY. Enfin prolongeons AF d'une longueur A9 — AT, et soit FO un levier ayant pour milieu fixe A]. A l'intérieur du rectangle TY, je mène une paral- (0) N F É Ne La re) lèle quelconque MN à AB et fais passer par MN un plan perpendiculaire à AF. II coupe le cylindre sui- vant le cercle de diamètre MN, le segment sphé- rique suivant le cercle Æ0, le cône AEZ suivant le cercle HP. On démontrera, comme précédemment, que le cercle MN restant en place équilibrera par rapport au point À la somme des cercles ZO, IIP trans- portés en @ comme centre de gravité”. (Il en sera de même pour toute autre position de la parallèle MN et de son plan sécant.) Si donc l'on remplit entièrement le cylindre TY, le cône AEZ et le segment AAB de cercles pareils, d'Archimède donne pour valeur du segment sphérique 4 R+ _h à N — LOS AT?, A 2 Comme ee — het que R + = 3R — h, on voit que cette É es À ÉUTS h valeur revient à l'expression connue : V— &h° (r —:). 1 Tout ce commencement est perdu. Je l'ai restitué d'après les indications de la figure et la marche ultérieure de la démonstration. 2 Cette démonstration a déjà été faite au théorème IT, où la construction est identique. GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE 925 au total, TY restant en place équilibrera par rap- port au point À la somme du cône AEZ et du segment AAB transportés en ©. Prenons maintenant sur AF le point X tel que AX — XH, et le point ® tel que Abd—3dH. Le point X étant le milieu de l'axe AH est le centre de gravité du cylindre TY ; de même (lemme VIIT), à ® est le centre de gravité du cône AEZ. La relation d'équilibre trouvée peut s'écrire : u) cyl. TY SOMME) cône AEZ + segm. AAB XA’ [c'est-à-dire : cyL. TY 2R : 4R cône AËZ + seg. AAB à 2 Mais cyl. TY_4R?, eyl. EZ 0 h°? donc : cyl TY _12R* cône AEZ BR? Or, cône AEZ _ D? _ b, cône AAB hu ph’ donc : CYR cône AAB hh!'° Substituant dans (1) ces valeurs de cône AEZ et cylindre TY en fonction de cône AAB, il vient : À 12R° cône AAB TE se Î TU) cône AABT + segm. 2 d'où : RS ER En RER) D PAR YaRS, Sr ARR En) er au ee F donc segm. __h/f3R 1 RH ht ] cône '\h PE (TaéorÈME VII) *. {Tout segment sphérique plus grand qu'un hémi- sphère (?) a son centre de gravité situé sur son axe en un point tel que sa distance au sommet est à sa distance à la base comme la hauteur du segment plus quatre fois la hauteur du segment supplémen- taire est à la hauteur plus deux fois la hauteur du segment supplémentaire : XA __ HA + ur | XH HA+24f| 1 Pour la fin de la démonstration, j'ai suivi la restitution de Zeuthen, en introduisant les notations R, h, h". ? Enoncé et figure restitués d'après Heiberg. 11 résulte de l'énoncé de IX que, dans le théorème VIIL il, ne s'agissait que d'une varièté particulière de segments. Cette précision paraissait nécessaire à Archimède pour établir sa figure, mais la démonstration est la même, quelle que soit la dimension du segment. Il va sans dire que l'énoncé pour- rait aussi être restitué ainsi: tout segment « plus petit qu'un. hémisphère ». Cf. Sphère et Cylindre, I, 42 et 43. 926 [Soit BAA (fig. 10) un segment sphérique, plus grand que l'hémisphère. Je prends sur sa hauteur + XA__AH+AHT , AH le point X tel que XH ANS que X est le centre de gravité du segment.] Prolongeons AT de AG — AT, et, dans l'autre sens, de l'E égal au rayon de la sphère, et consi- dérons F@ comme un levier ayant pour milieu fixe A. Dans le plan de base du segment, de H comme centre, tracons un cercle avec un rayon égal à AH. Imaginons le cône qui a ce cercle pour base, À pour sommet, AE, AZ pour génératrices. Enfin, menons une parallèle quelconque KA à EZ je dis qui coupe la circonférence en K, A, les génératrices du cône en P,0, la hauteur en II. On a d’abord‘: 2 — 2 Mais AK — AIT + INK, AIN — T0 — puisque cercle KA + cercle PO cercle PO , et, comme AF — AQ : AO _ cercle KA + cercle PO (3) AT cercle PO ‘ Car,dans le triangle rectangle ART, on a AK —AIT.AT. Divisant les deux membres par A’, il vient bien (1). TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE Si donc on suppose le cercle PO déterminé dans le cône par le plan parallèle à la base du segment, transporté en G comme centre de gravité, puisque KA, PO ont pour centre de gravité I, le cercletrans= porté fera équilibre par rapport au point A à la somme des deux cercles KA, PO — déterminés dans le segment et dans le cône — laissés en place. Il en sera de même pour tous les cercles de même genre déterminés parles plans parallèles à la base du segment : toujours le cercle déterminé dans le cône AEZ, transporté en 6, équilibrera par rap- port à À ce même cercle et le cercle déterminé dans le segment sphérique, laissés en place. Au total done, le segment et le cône, laissés en place, équili=M breront par rapport à A le cône transporté en CE comme centre de gravité. Considérons maintenant un cylindre MN équi-M valant au cône AEZ et prenons sur AH le point tel que AH — 4H : D sera, comme on l'a vu (lemme VIII), le centre de gravité du cône AEZ. Cou- pons le cylindre par un plan perpendiculaire à ses génératrices, qui le divise en deux cylindres tels que l'un d'eux M fasse équilibre au cône AEZ. Puis- que le cylindre total équivaut au cône AEZ, qui, en ©, équilibre le cône et le segment en place, si le cylindre partiel M équilibre le cône AEZ, | le reste, c'est-à-dire le cylindre partiel N, équili- brera le segment. On a vu (Théorème VII) que : segm. BAA ZI (4) —— — — cône BAA AT° D'autre part : cône BAA _ cercle BA BH : cône AEZ cercle EZ HE HA° HA (Comparant (4) et (5) il vient :) 6 segm:BAA 2H (6) cône AËZ HA° Nous avons par construction : AX HA+3SIT se XH__ 2H + HA XH Hap2nr , ou inversement AX T LHTCEHS Si l'on combine ces deux expressions (en addi- tionnant aux numérateurs de la seconde ceux de la première), il vient : AX + XH _ (HA + 4HT) + (2HT + HA) VERS HA 4HT : c'est-à-dire : AH 6HT + 2HA (1) AX HA +4HL ° Mais on a évidemment : 6UT -+ 2HA — 4H=;: 4HT + HA — 41%. (‘) 1 En effet, si l'on emploie les notations abrégées R (rayon TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE Par conséquent : Tp AH _HE HE _rD HA AX (8) FX = p@7 OU encore = HE En portant cette valeur de = AI dans l'équation (6), on a : (9 segm. BAA UE (9) cône AEZ XA Le cylindre M équilibre par rapport à A le æône EAZ. Ce cylindre a pour centre de gravité ©, le cône a pour centre D. On doit donc avoir : jo) coueFEAZ _@4_TA ou M __AD eyL M DA Ad’ cyL.MN TA’ (d'où en soustrayant les numérateurs des déno- minateurs) : eyl M__ A (PE) I. N° 19 {ou en ajoutant les dénominateurs aux numéra- teurs) : cyl. MN _ AT cyLUIN o TD’ ou encore, puisque le cylindre MN équivaut au cône EAZ : cône EAZ TA OA (12) a —— cyl. N ID [d° Combinant (12) et (9), il vient : 13) segm. BAA TD.A0 __ AO (43) CyYL N XA.I®" XA' Mais on à vu que le segment équilibre par rap- port à A le cylindre N : le cylindre ayant centre de gravité @, cette égalité ne peut être vraie que si X est le centre de gravité du segment. Ce q-f.d. :. pour de la sphère) et h (hauteur du segment), on a d'abord : GHE + 2AH — 6(2R — h) + 2h —12R —4h; or, HE— HT + TE = (2R — h) + R—3R — b, c'est-à-dire le quart de NESDIEASIon ci-dessus. De même : 4HT + HA A —b)+4kh=SR—3h; 3h h) Or, TD— TH + GH—2R—h+T IR, c'est-à-dire en- core le quart de l'expression ci-dessus. 1 La démonstration d'Archimède est assez pénible et offre, de plus, l'inconvénient de supposer la relation LL = HA +4HT : : + HA ZHT découverte onnesaitcomment et d'en fournir sim- plement la vérification. Il semble qu'Archimède aurait pu établir directement cette relation de la manière suivante (j'emploie, pour abréger, les notations AE — AH, HT — A'et je note tout de suite que, puisque L'—2R — h, ! on aR=— £ à 2 On a vu, dans la première partie de la démonstration, que: (segm. ABA + cône AEZ) restant en place équilibrent (par rapport à A) cône AEZ au c.g.0. Appelons Q@ le c.g. du sys- (TuéorÈME IX). Tout segment sphérique a son centre de gravité sur son axe en un point tel que sa distance au sommet soi! à sa distance à la base, comme la hau- teur du segment plus quatre fois la hauteur du segment supplémentaire est à la hauteur du seg- ment plus deux fois la hauteur du segment supple- mentaire. Ce théorème se démontre de la même manière que le précédent”. RE tème (segm. ABA + cône AEZ). Cette relation d'équilibre implique l'égalité : nt QA 2 cône AEZ 1 OA cône AEZ + segm. ABA° Calculons segm. ABA en fonction du cône AEZ. On a vu (Th. VII) que : segm. ABA R+h! Z cône ABA h! Mais (3) cône ABA HA hh' mi ; Con AZ NH 7 US TE d'où > segm. ABA R+h' *1 cône AËZ Remplacant segm. ABA par cette valeur dans (1), il vient : 5 QA cône h h DEEE RE A RC 2R cône (1+ 5) h+R+h 3R d'où 2h 6) QA re Ainsi le c.g. Q du système (segm. ABA + cône AEZ) est situé aux 2/3 de AH à partir de A. Le cône seul (lemme VIII) a son c.g. en. ® aux 3/4 de AH à partir de A. Si donc on appelle X le c. g. cherché du segment seul, on a (d’après lemme 1): - XQ cône APE RP VU Odb seem.ABA R+w h+3h° 3 2 Comme Q®p — Ab — AQ — zh Ed, il vient donc : 3 5 L° (8 XQ — ———; (8) © 12 (R + h!)’ 2h h° h h AR AO Q— — — ———_— ——"—"—|"2— "|; a Pen) | ml h L? h h —0Q => = |ps eee? XH— OX on n) Ames et par conséquent : AX SRE SRI DE U2 RUE 4h'+h XH 4R+4h+h 6h+3h 2 ET ce qui est l'expression cherchée, 1 Dont il n'est que la généralisation. Dans les traités de Mécanique modernes, la position du centre de gravité du segment sphérique est ordinairement déter minée par sa dis- tance au centre de la sphère, à l’aide de l'intégration. On 3(2R—h} GR Il est facile de voir l'équi- trouve l’expression D— de LC] 928 C' P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE (THÉORÈME X) ‘. Tout segment d'hyperboloide de révolution ?, déterminé par un plan perpendiculaire à l'axe, est Fig. 11. au cône de même base et de même hauteur comme une ligne égale à l'axe du segment plus trois fois la distance du sommet au sommet du cône circons- cril' est à une ligne égale à Taxe du segment plus deux fois cette distance (fig. 11) : segm. TBA BE +3PT cône TBA BE +2BT On démontrera de même beaucoup d'autres pro— positions *, que je laisse de côté, maintenant que la méthode est bien mise en lumière par les exemples précédents, pour aborder la démonstration des deux théorèmes énoncés au début de ce Traité. Dans un prochain numéro, nous terminerons la publication de la traduction du Traité d'Archi- mède. TR L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE DEUXIÈME PARTIE : PRÉSERVATION DES ATTEINTES DES FACTEURS PATHOLOGIQUES Dans un premier article”, nous avons traité de l'organisation générale de la maison coloniale. Nous allons maintenant aborder l'étude des dispo- siufs particuliers à l'habitation coloniale, e'est-à- dire l'étude des procédés pouvant permettre à celui qui l'occupe d'annuler, dans la mesure du possible, l’action des trois grands facteurs patho- logiques dont nous avons précédemment constaté l'existence et envisagé le mode d'action. valence des deux expressions. Le théorème d'Archimède peut s'écrire : AX h+%(2R—h) 8R—3h HANOVRE OI PRE=R)MREAN d'où, en additionnant chaque dénominateur au numérateur : n _A2R—4h —© = —— ; 4R—h)={(12R—4h)h—AX! — TR = pr 0 GR —D)=(12R — 4h) h— AX(12R— 4) R(12R—4h)—h(4R— h)_ h(8R—3h). 12R— 4h m'ASR—4h 0" h(8R—3h) 12R— 4h 12R?— kDR—SHR +3h3 12R?—122R +3h° et AX== donc la distance XE (c’est-à-dire D) = R — 12R— 4h 12R—4h S(4R°—4%4DR + Dh?) 3(2R—h}? DRE Te CRETE Corde ! Énoncé restitué d'après Conoïdes et Sphéroïdes, prop. 25 (1, #6, Heiberg) : le sens général résulte des mots +%: Fp0- ZEUEVN: T0: 10Y GÉovz, Où l'on reconnait la ligne appelée dans ce traité & roteodca t@ G£ow (I, 278). Les restes étant trop longs pour un simple énoncé, Heïberg croit qu'il était ensuite question du centre de gravité d'un segment d'hy- perboloïde. * Archimède aurait dit : « de conoïde obtusangle ». CN y »} tev. gén. des Sciences du 45 nov. 1907, t. XVIII, p. 860. PROPRES AUX PAYS TROPICAUX Dans le cours de cette étude, nous examinerons successivement les remèdes palliatifs qui peuvent être opposés à chacun d'eux. I. — PRÉSERVATION DU SOLEIL. Le rayonnement solaire a, sous les tropiques, une très grande puissance et, dans la saison chaude, un thermomètre exposé au soleil, dans les. environs de midi, peut accuser des températures supérieures de plus de 30° à la température de l'air. Pour éviter l'échauffement excessif des murs. de lhabitation, aussi bien que pour empêcher l'accès des rayons lumineux directs dans l'intérieur de l'habitation, il importe donc de soustraire les murs extérieurs de celle-ci au rayonnement so- laire; la véranda répond à cet objet (fig. 1 et 2). Elle consiste, en principe, en une galerie entou- rant à chaque étage la maison sur ses quatre faces, et d'une largeur minimum comprise entre 2 et 3 mètres. La protection des murs à la partie supé- rieure de l'édifice peut être obtenue, soit par le prolongement du toit du corps de logis, soit par- un toit indépendant; mais, dans les deux cas, un plafond doit protéger la galerie contre le rayonne- ment de la toiture. ——_—_—__—_Â_Â_a_aZÂZaZEZEZEZEEEE ‘ C'est ce qu'Archimède appelle : la droite ajoutée à l'axe. * Par exemple, celles qui concernent le volume et le centre de gravité d’un segment d'ellipsoïde, etc. Plusieurs de ces propositions sont démontrées dans le Traité des Conoïdes. de mt À À 2. … féminin C' P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE 929 “ Avec la largeur que nous lui avons donnée plus L haut, une véranda de 3%,50 de hauteur, à l'aplomb de sa partie extérieure, empèchera l'accès du s0- - Jeil pendant le milieu de la journée; mais il n'en sera plus de même à son lever et à son coucher, . et, si l'on veut qu'elle atteigne complètement son but, il est nécessaire de la fermer. Ce mode de fermeture devra, d'ailleurs, être tel que la véranda puisse être largement ouverte au moment où, le soleil ayant disparu, le refroidissement de l’'atmo- sphère commence à s'opérer. Dans les pays où règnent des brises fortes et régulières, on constituera cette fermeture avec des persiennages mobiles; partout ailleurs, on pourra gement vers l'extérieur de l'aire des vérandas, en faisant supporter celles-ci par une légère charpente métallique. Dans les pays à faibles écarts nycthéméraux, les | habitations à vérandas fermées par des murs épais. en maconnerie présenteront donc, portés à leur maxima, tous les inconvénients que nous avons reconnus aux habitations à murs épais, mais pro- | légées par des vérandas largement ouvertes, car, tandis que les massifs en maconnerie de ces der- nières ne seront portés qu'à une température | maxima au plus égale à celle du jour, les murs | De 4 à | extérieurs des premières, ayant subi toute la | journée le rayonnement solaire direct, seront à Fig. 1. avoir recours à des rideaux en toile à voile sulfa- tisée. La fermeture des vérandas par des murs épais et percés d'étroiles ouvertures constitue un non- sens évident, puisque l’on rapporte ainsi à l’exté- rieur la masse principale de l'édifice que l'on se proposait précisément de soustraire à l'action du soleil. L'habitation coloniale ainsi agencée ne se- rait, en somme, qu'une habitation ordinaire dont les pièces s'ouvriraient sur une galerie circulaire. Chaude la nuit, une telle maison serait à peu près obscure dans la journée. Dans le même ordre d'idées, l'usage des terrasses supérieures nous parait également condamnable, à moins de ménager en dessous d'elles une gaine aérée; mais, dans ces conditions, on augmentera beaucoup le prix de revient de l'édifice, et il sera généralement moins coûteux, si l’on tient à avoir une terrasse, de constituer celle-ci par le prolon- — fype d'halitation à vérandas à peu près ouvertes..(Caserne d'infanterie à Saïqgon.) une température très supérieure à la précédente. Une telle construction est donc vicieuse au premier chef, quelle que soit la nature du climat tropical considéré. Nous avons vu précédemment les précautions qu'il convenait de prendre pour l’éclairement des locaux. Étant donnée la nécessité où l'on se trouve de concilier un éclairage suffisant avec la fermeture des vérandas et avec la condition d'éviter la vision directe des nuées, le seul procédé qui puisse être adopté consiste dans l'ouverture de baies dans les. vérandas et au niveau du sol de ces dernières. Ce résultat sera parfaitement obtenu par l'em- ploi de persiennages mobiles ou par le relèvement plus ou moins grand des stores dont nous avons parlé plus haut. Cette préservation de l'action du soleil pourra être utilement complétée par l'ombrage de grands 930 C' P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE arbres, d'essences judicieusement choisies. Toute- fois, cette efficace, elle présente cependant les inconvénients suivants : a) Engorgement des chèneaux et des tuyaux de descente par les branchages et les feuilles mortes; D) Présence d'insectes divers; dus aux chutes de branches. La présence d'arbres exigera donc une surveil- lance constante des toitures. si mesure est ce) Bris de tuiles II. — PRÉSERVATION DES MOUSTIQUES. Pour se préserver des moustiques, il convient Fig. 2. — Type d'habitation à vérandas largement ouvertes. tout d'abord de choisir l'emplacement de la maison en se conformant, autant que possible, aux règles édictées dans la 1" partie ($ Emplacement de la maison). L'observalion de ces prescriptions ne suffira cependant pas, le plus souvent, à mettre l'habitation à l'abri de l'atteinte des moustiques. Pour desideratum, il convient de fermer ouvertures extérieures de la maison, même les vérandas, par des grillages mé- talliques (laiton, fil de fer galvanisé ou étamé), dont la maille aura de 1 millimètre à 2 côté au maximum (fig. 3 le cas, pourront doubler les ferme- tures ordinaires, portes ou fenêtres. Dans le cas elles devront être constituées par des réaliser ce toutes les millimètres de . Cesgrillages, fixes ou mo- biles suivant des portes, tambours grillagés à fermeture automatique. Il sera également nécessaire de grillager les galeries reliant le corps de logis principal aux dépendances directes de ce dernier de bains, water- closets), Dans ces conditions, il sera possible de vivre entièrement à l'abri des atteintes des moustiques pendant les heures de nuit et de dormir en suppri- mant les moustiquaires et en laissant les portes ouvertes, pratique dont le danger avait été percu par les vieux coloniaux bien longtemps avant la | découverte du rôle joué par les Anophèles. L'adop- | tion de ces mesures ne devra pas empêcher d'éviter salles (Quartier d'artillerie de Saïgon.) avee soin la production des mares et des flaques d'eau ou d'amas de matières organiques dans le voisinage, même assez éloigné, de l'habitation; lorsque cette production ne pourra être évitée, on devra pétroler les mares à raison de 10 centimètres cubes par mètre carré et par vingt-quatre heures. Ces mesures, jointes à la fermeture grillagée des réservoirs d'eau et des bouches d’égout, suffiront, si elles sont appliquées avec soin, à diminuer, dans une très large proportion, le nombre des moustiques dans le voisinage de l'habitation, ces insectes ne s'éloignant pas beaucoup de leur ha- bitat ordinaire. Les résultats obtenus à la Havane, en Corse, à Ismaïla et à Rio-de-Janeiro montrent | qu'il est possible de lutter victorieusement contre C' P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE 931 des endémies telles que le paludisme et la fièvre jaune, à la condition de ne pas se départir de l'ob- servation stricte des préceptes d'hygiène posés plus haut”. : Dans le même ordre d'idées, on doit signaler que les moustiques fréquentent plutôt le rez-de- . chaussée que les étages, en raison de la difficulté qu'ils éprouvent à voler en hauteur; si l’on tient compte, en outre, du fait que la ventilation de ceux- ei est meilleure que celle du rez-de-chaussée, on n'hésitera pas à mettre les pièces d'habitation pro- raison du ralentissement des attaques de ce dernier occasionné par la diminution de la température, lorsque celle-ci tombe au-dessous de 22° = IIT, — PRÉSERVATION DES EFFETS DU CLIMAT. Nous avons vu que le climat tropical type est, en général, caractérisé par une “moyenne de tem- pérature et par un degré hygrométrique élevés, en même temps que par de faibles écarts nycthémé- raux. Pour permettre à l'Européen habitant ces Fig. 3. — Type ae construction grillagce pour Ja prement dites à l'étage, à l'exclusion du rez-de- chaussée, qui sera réservé aux pièces habitées seulement pendant la journée (bureaux, maga- sins, etc.). Le refroidissement des locaux, dont nous allons aborder maintenant l'étude, peut d’ailleurs, dans certains cas, constituer une solution partielle du problème de la défense contre les moustiques, en 4 L'efficacité de la protection totale des locaux ressort nettement d'une communication récente faite à l'Académie de Médecine par M. Kermorgant, Inspecteur général du Service de Santé colonial, au sujet d'installations de ce genre réalisées dans les gares de la ligne Dakar-Saint-Louis : « À Saint-Louis, en 1902-1903, avant la protection des habi- tations par les toiles métalliques, on avait relevé : 139 jour- nées d'hôpital et 4% journées d'incapacité de travail pour 10 agents malades de cette station. En 1904-1905, depuis la protection contre les moustiques. Gare de Iulisque. régions de vivre dans les conditions les plus favo- rables au maintien de son existence, il faudrait done réaliser, à l’intérieur des habitations, une atmosphère sèche et à température moyenne aussi voisine que possible de celle de l’été de son pays d'origine. Or, à cet effet, il est bien évident qu'une mai- son, même organisée comme il vient d'être dit protection mécanique, le nombre des journées d'hôpital s'est abaissé à 13, et l'on n’a constaté que 13 jours d'inca- pacité de travail pour 2 agents malades. Les mêmes pro- portions existent pour les autres gares. Des résultats ana- logues ont été obtenus en Corse. » (Voir le Bulletin de la Ligue Corse contre le paludisme.) A Panama, l'installation de logements grillagés pour les quelque dix mille Euro- péens employés sur les chantiers du canal, à immédiate- réduit de 50 0/,, le taux de mortalité de cette population. 932 C' P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE + plus haut, ne permettra aucunement d'atteindre ce résultat. Il importe, cependant, d'autant plus de l'obtenir que l’action du climat tropical sur l'organisme de l'Européen constitue souvent le facteur patholo- gique le plus actif qui agisse sur lui, soit directe- ment par la production d'une anémie plus ou moins profonde, soit indirectement par une modification du terrain physiologique de l'individu, le rendant plus apte à contracter les endémies morbides. Il faut done chercher les moyens pratiques : 1° De dessécher l'air ; 2° De le refroidir. $ 1. — Dessiccation de l'air. Pour dessécher l'air, on peut, a priori, avoir recours à des procédés chimiques ou à des pro- cédés physiques. 1. Procédés chimiques. — Les premiers, em- ployés dans les laboratoires, consistent à faire passer l'air ambiant sur des substances avides d'eau, qui sont généralement l'acide sulfurique monohydraté ou le chlorure de calcium. Bien que ces substances puissent être régénérées par un chauffage à température peu élevée, les procédés chimiques n'ont pas reçu d'application industrielle el servent uniquement à la dessiccation des maga- sins à poudre, dont l'atmosphère est rarement renouvelée; nous ne les citerons donc que pour mémoire. 2. Procédés physiques. — Les procédés phy- siques, basés sur le refroidissement, sont actuel- lement employés sur une vaste échelle pour la dessiceation de l'air insufflé dans les hauts-four- neaux. Supposons le milieu ambiant constitué par de l'air saturé à 30°; dans ces conditions, la tension de la vapeur d'eau sera de 31,55 mm. Si l'on abaisse la température de la masse d'air à O, la tension maxima correspondante de la vapeur d’eau n'étant plus que de 4,60 mm., il en résultera que la quan- tité de vapeur d'eau contenue dans un mètre cube d'air ayant subi cette réfrigération, et ramené à la température de 30°, sera réduite dans la propor- 460 . tion 5 soit à 1/7 environ. 21,99 J Ce procédé de dessiccation par refroidissement, employé pour la première fois par Gayley en Amé- rique, tend actuellement à être remplacé par le procédé Steinhard, dont le principe a été exposé dans la Aevue générale des Sciences du 30 juillet; rappelons ici ses grandes lignes : au lieu de des- sécher l'air avant sa compression, on le comprime d'abord et on le fait ensuite passer sur un refroi- disseur analogue à un condenseur à surface. Le bénéfice de cette disposition est le suivant : consi- dérons de l'air saturé à 30° C. ; la quantité d'eau contenue dans un mètre cube de cet air (supposé à la pression de 760 mm.) est de 30,2 gr. Effectuons une compression isothermique de cet air, de facon à réduire son volume de moitié ; nous condense= rons 30,2 gr. de vapeur d'eau, réduisant ainsi de moitié la quantité de cette dernière contenue dans l'air insufflé dans le haut-fourneau. Quoi qu'il en soit de ces procédés, leur étude se confond avec celle des moyens à employer pour la réfrigération et nous allons maintenant aborder. que $ 2. — Refroidissement des locaux. > Afin de raisonner sur un cas bien déterminé, et pour pouvoir tirer de nos conclusions des résultats numériques précis, nous supposerons, dans tout ce qui va suivre, que l'atmosphère ambiante est saturée de vapeur d'eau, à la température de + 30° C. et à la pression normale de 760 mm. Remarquons tout de suite que le refroidissement à 0° d’une masse d'air prise dans ces conditions constitue, a priori, une opération beaucoup plus. désavantageuse soit au point de vue thermique, soit au point de vue mécanique, que le refroidisse- ment d'une même masse d'air sec opéré dans les. mêmes limites de température et de pression. Ce fait, qui s'explique aisément par la grandeur des chaleurs latentes de volatilisation et de fusion de l’eau comparées à la chaleur spécifique de l'air sous pression constante, est nettement mis en évi- dence par les chiffres suivants : Soustraclion de chaleur à opérer pour ramener de 30° à Ge. (l'eau restant liquide). 1. m.c. d'air sec. a-#- I-JD2IGHIORIES: 1. im. c. d'air saturé. 52 Compression qu'il est nécessaire de réaliser pour que l'air, après sa détente, soit à la température de @. ANTISeC- RE ee EE AUSSALITÉ EC Ce CCE 1,43 atmosphère. 1,89 _ Le problème à résoudre étant ainsi précisé, on peut, a priori, avoir recours à différents procédés pour le refroidissement de l'atmosphère des habi- tations ; mais, quels que soient ceux qu'on emploie, il va de soi que la maison organisée pour être refroidie devra toujours être construite avec des murs épais et des vérandas. Le mur épais s’im- pose, en effet, ici pour les mêmes raisons que dans les pays froids, puisqu'il faut réduire au minimum les échanges de chaleur entre l'intérieur et l'extérieur des locaux, le sens seul de ces échanges se trouvant inversé. L'usage de la véranda s'impose aussi avec évidence et pour les mêmes raisons que précédemment. L'habitation refroidie aura donc extérieurement. PRET C' P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE 933 Je même aspect que l'habitation du type actuel; elle n’en différera que par la fermeture constante des ouvertures qu'elle présente. IV. — PROCÉDÉS FRIGORIFIQUES. Pour refroidir l'atmosphère des locaux, on peut recourir à deux sortes de dispositifs : l’un consis- tera à faire circuler l'air des pièces de l'habitation au contact d'un corps froid, tandis que, dans l'autre, on produira de l'air froid par la détente LI Bus ESS IIS; PDG RE LR ess 7 NE OI 228 HET ARE 2777, À RSS L'écagemads dent. . Fig. 4. — Pofle à froid Douane. — 10, réservoir à glace; 11, coffre du réservoir; 12, ‘entrée de l'air à réfrigérer: 13, coffre inférieur ; 14, ventilateur; 15, pompe centrifuge: 16, dynamo; 17, radiateur: 18, sortie de l'air réfrigéré; 19, 20 et 21, tuyaux de circulation de l'eau de fusion: 22, distributeur. adiabatique d'une masse d'air à la température extérieure et préalablement comprimée. $ 1. — Refroidissement par contact. Ce dispositif se subdivise lui-même en deux classes, suivant que le froid est produit à distance ou sur place. Dans le premier cas, on aura recours à une masse de glace où à un serpentin parcouru par un fluide maintenu à basse température par une machine frigorifique. 1. Poële à glace. — Le poële à glace, dont l'usage est déjà quelque peu répandu en Amérique, est le type des appareils de la première catégorie. Voici la description sommaire d'un de ces derniers appa- reils (fig. 4) : Il consiste essentiellementen un réservoir vertical (10), que l’on peut charger de glace par le haut en enlevant le tampon de fermeture du coffre (14) qui entoure l'appareil. Entre ce réseevoir et le coffre (11) se trouve une région où l'air peut circuler pour se réfrigérer au contact des parois du réservoir; l'air arrive par l’ou- verture (12), qui est mise en communication avec la partie haute du local à réfrigérer. Le réservoir (10) et son coffre (11) sont placés sur un coffre (13), contenant un ventilateur (1#), une petite pompe centrifuge (15) et une dynamo (16), cette der- nière donnantle mouvementauventilateuretàlapompe. Sous l'impulsion du ventilateur (14), l'air aspiré par l'ouverture (12) sort du coffre (11) par l’orifice (23); cet air est ensuite refoulé à travers un radiateur (17), qui est parcouru par l’eau de fusion de la glace, de telle sorte que l'air, déjà en partie refroidi par son contact avec la paroi du récipient à glace (10), achève de se réfrigérer par son passage sur le radiateur (17). La circulation de l’eau dans le radiateur se fait au moyen de la jonction de ce dernier avec le dessous du récipient à glace (10) par l'intermédiaire du tuyau (19) ; l'autre extrémité du radiateur est reliée par le tuyau (20) à l'aspiration de la petite pompe centrifuge (15), qui remonte cette eau de fusion par le tuyau (21). Cette eau se répand ensuite par le distributeur (22) sur la glace du récipient (10). L'air réfrigéré sort enfin par l'ouverture (18) qui communique avec la partie basse du local. La contenance du récipient à glace du modèle ci-dessus étant de 60 dm. e., soit 50 kilogs de glace environ, il résulte que l'appareil pourra ramener à 0° environ 178 m. €. d'air (saturé à 30°). Pratique pour de petits locaux isolés, l'appareil précédent ne saurait, cependant, être employé au refroidissement de vastes ou de nombreux locaux, en raison des sujétions de toutes sortes entraînées par le transport et la conservation de la glace et des pertes résultant de la fusion de celle-ci. Supposons, pour fixer les idées, qu'il s'agisse de refroidir et de dessécher l'atmosphère d’une salle d'hôpital de 180 m. c., habitée par 5 personnes, et que la glace soit au prix de 0 fr. 05 le kilog. En sup- posant que l'on renouvelle l'atmosphère de la salle à raison de 300 m. €. par personne et par vingt- quatre heures, l'installation en question coûterait environ #fr. 50 par jour et par personne, en tenant compte de l'énergie mécanique absorbée par le fonctionnement du poële (> chevaux-heures : par jour, soit 0 fr. 30, en décomptant le cheval-heure à 0 fr.06et ayant égard au rendement de la dynamo). D'autre part, le nombre de frigories libérées par le relèvement de la température du récipient de 0 à + 250 serait d'environ 26.000, quantité suffisante pour maintenir une différence de température de 5° entre l’extérieur et le local, en supposant les murs de ce dernier convenablement organisés. 2. Circulation de l'air autour d'un serpentin par- couru par un fluide à basse température. — Ce 934 C' P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE procédé est celui qui est actuellement employé par l'industrie pour le refroidissement des locaux ser- vant à la conservation des viandes ou à diverses opérations nécessitant l'obtention de basses tempé- ratures (telles que, par exemple, le démoulage du chocolat). Dans une grande installation de ce genre, et en décomptant le prix du cheval-heure à 0 fr. 06, on trouve que le prix de revient des 26.000 frigories employées dans l'exemple cité plus haut serait d'environ 2 fr. 35!, soit O0 fr. 47 par personne et par jour. Ce procédé apparait donc, au premier abord, comme relativement peu coûteux, dans les hypothèses où nous nous sommes placé et qui sont réalisables dans beaucoup de nos colonies, notam- ment en Indo-Chine et à Dakar; de ce fait, il est actuellement employé aux IE nis dans un cer- tain nombre de villes. Compresseur grandes La Revuea d'ail- leurs déjà attiré l'attention de ses lecteurs sur ce point”. Ilne sem- ble toutefois pas que le froid ainsi Condenseur donc, à priori, les organes essentiels suivants : 4° Un moteur actionnant un compresseur d'air; 2° Une conduite reliant le compresseur à l’appa- reik de détente; 3° L'appareil de détente, au sortir duquel l'air froid se répandra dans les locaux à refroidir. Il convient, toutefois, de remarquer qu'une ins- tallation réduite à ces seuls organes aurait un fonc- tionnement des plus decnars par la raison que la neige provenant de la condensation de la vapeur d'eau contenue dans laie obstruerait rapidement les orifices du tiroir du moteur qui constitue l'appa- reil de détente. Avec les moteurs à air comprimé employés dans l’industrie, on se met à l'abri de cette cause de non fonctionnement en réchauffant la boîte du tiroir à l'aide d'une source de chaleur (becs de gaz, pétrole, etc.). Dans le ças présent, comme il ne faut pas son- ger à l'emploi d'un tel procédé, = il sera donc né- cessaire de con- denser la vapeur d'eau contenue dans l'air avant l’admission de Local s refroidir J Moteur détendeur distribué serve au rafraichisse- ment de locaux habités, et il est vraisemblable qu'il est surtout Echangeur Liquefscteur À celui-ci dans le ù cylindre ou la à turbine. Il sem- 2 ble qu'il soit aisé d'y parvenir ain- si qu'il suit : Air froid ETES employé u la ré- Fig. 5. — Schéma d'une installation de réfrigération par l'emploi de l'air as FouDs frigération de comprimé. mé à n atmosphè- chambres desti- nées à la conservation de matières alimentaires. Or, nous verrons plus loin la différence capitale qui existe entre la solution de ces deux problèmes, tout au moins dans les conditions précises que nous avons envisagées. $ 2. — Emploi de l’air comprimé. L'air comprimé, sous une pression relativement peu élevée, peut produire, par détente adiabatique, un abaissement considérable de sa propre tempé- rature, en même temps qu'un certain travail méca- nique. Schématiquement, une installation du genre de celle que nous avons en vue comprendrait 1 Ce chiffre a été obtenu en supposant : 1° une consom- mation de 1 kilog de charbon par cheval-heure: 20 un ren- dement de S00 frigories utilisables par kilog de charbon; 30 que le prix de revient du cheval-heure (frais généraux et amortissements compris) est double de la dépense de com- bustible; 4° que la dépense pour l'énergie de ventilation est la mème que celle ci-dessus calculée. 2 Voir le auméro du 45 juin 1906 : Distribution du froid à domicile. res, traverse à la sortie du compresseur un serpentin entouré par une masse d'eau à la température ambiante 6. Dans ces conditions, la tension maxima de la vapeur d'eau qu'il contient étant celle qui correspond à la température 8, il en résulte que l'air comprimé ne gardera qu'une fraction 1/2 de la vapeur d'eau qu'il contenait primitivement. C'est l'application du procédé Steinhardt, décrit plus haut. On se débarrassera enfin de cette dernière fraction résiduelle 4/2 de la vapeur d'eau originelle, en faisant circuler l'air sortant de l'appareil de détente autour de la conduite d'amenée au moteur; dans ce dernier dispositif, on reconnait le principe des échangeurs employés dans les appareils pour la liquéfaction des gaz. L'installation définitive serait donc schématiquement ainsi qu'il suit (fig. 5) En employant pour moteur récepteur une turbine ou un moteur rotatif, dont la marche silencieuse n'exige pour ainsi dire aucune surveillance en raison de l'extrême simplicité du mécanisme, ül organisée | C' P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE 935 parait possible d'envisager l'emploi d'une telle installation dans une maison. Il reste à considérer les avantages et les inconvé- nients de ce système par rapport à ceux qui utilisent la circulation d'un fluide incongelable ou d'un gaz liquéfié sous pression, dont la détente se produirait dans un appareil placé dans le local à refroidir. Au point de vue économique, l'emploi de l'air comprimé pour la production du froid est aujour- d'hui presque totalement abandonné en raison de son faible rendement économique. Alors, en eflet, que le rendement d'une bonne machine frigorifique à air {non pourvue de refroi- disseur à air) n’atteint guère que 350 à 400 calories par cheval-heure indiqué, les machines à gaz liqué- fiable fournissent aisément, dans les mêmes condi- tions, des rendements de 1.800 frigories. Mais on ne doit pas perdre de vue que ces chiffres supposent que la température de l'eau de circulation est voisine de 40°. Si cette température s'élève, la disproportion existant entre les rendements de ces deux genres de machines diminue très rapidement, ainsi qu'il est aisé de s'en rendre compte par les considéra- tions suivantes : En ce qui concerne les machines frigorifiques à air, il est clair que le travail moteur est, toutes choses égales d'ailleurs, à peu près indépendant de la température de l'air extérieur. D'autre part, la puissance frigorifique d'une masse d'air soumise à une détente déterminée varie également fort peu. Soit, en effet : ÿ—1,41 le rapport des chaleurs spécifiques sous pression et volume constants (T, P), (Ts, Po) la température absolue et la pression d'une masse d'air assujettie à une détente adiaba- tique ; on à la relation : : VI EN er IUT ? d'où | P EN EU Die En supposant constante, dans l'intervalle de température considéré, la chaleur spécifique de l'air sous pression constante, la puissance frigori- fique est proportionnelle à : pi T—T, ou à nl 1} 1e ù P Effectuons les calculs en supposan be 2eten o donnant à T, les valeurs successives (273 Æ 10°) et (273 H 30°) ; on trouve qu'à la température To = 2830 (t— 100), Q— 510,6, et qu'à To — 3030 (4— 300), Q = 56e, Ainsi la température ambiante variant de + 40° à + 30°, T —T, ne varie que de 4°4, et cette varia- tion est de signe tel que le rendement frigorifique augmente légèrement avec la température exté- rieure, Comme il n'a pas été tenu compte des résis- tances passives qui, dans l'espèce, sont considé- rables, nous nous bornerons à admettre que le rendement n'a pas changé. Examinons maintenant l'influence du change- ment de température sur le rendement de la machine à gaz liquéfiable. La température de l'eau de circulation augmen- tant de 10° à 30°, la tension de vapeur de l'agent frigorifique employé augmente également, Ainsi, pour l'ammoniaque, elle passe de 6,07 kilogs à 11,62 kilogs par centimètre carré. C'est-à-dire qu'elle double presque. Il en est sensiblement de mème pour les autres corps frigorifiques employés. Comme conséquence, le travail du compresseur augmente dans une proportion du même ordre. En tenant compte des résistances passives et de la variation positive de la quantité de chaleur totale du gaz liquélié, on admet dans la pratique qu'à la variation de température considérée correspond une diminution du rendement au moins égale à 60 °/,*. Admettons ce dernier chiffre ; il en résulte qu'à la température de 30°, le rapport du rende- Be DORE ; ment des deuxengins n'estplus quede 59’ Soil envi- ron 0,51. La différence entre les rendements appa- rait donc encore comme notable. En réalité, et pour le but que nous avons en vue, il n'en est rien, pour la raison suivante : Dans le procédé de refroi- dissement basé sur l'emploi de la détente de l'air comprimé, l'air envoyé dans les locaux pour les refroidir et les ventiler est sec, tandis que, dans le procédé basé sur l'emploi d'un fluide frigorifique, l'air insufflé dans l'habitation est pris à l'extérieur etse trouve, par conséquent, chargé de vapeur d’eau. Il en résulte qu'au passage de l'air humide sur le frigorifère, cet appareil doit lui céder, outre les fri- gories qu'exige le refroidissement des locaux, celles qui sont nécessaires pour le refroidissement et le changement d'état de la vapeur d'eau contenue dans l'air; or, il est bien évident que cette sous- traction de chaleur constitue un déchet. Ainsi, dans l'hypothèse où nous nous sommes placé (air saturé à + 30°), la quantité de frigories ainsi inutilisée est très loin d'être négligeable. Supposons, en effet, que le fluide circulant dans le frigorifère soit à — 12° et que le refroidissement du local soit obtenu en y envoyant un volume d'air égal au volume minimum exigé pour la vie de ses habitants, c'est-à-dire 300 mètres cubes par jour ‘ Ce chiffre est un minimum absolu. 936 et par personne ‘: la quantité de chaleur soustraite par le passage de la vapeur d'eau de + 30° à — 12° sera de 21 calories par mètre cube d'air extérieur, alors que le refroidissement de l'air sec contenu dans le mètre cube en question nexigera que 12 calories. Il résulte done de ces chiffres que, sur 43 calories fournies par le frigorifère, 12 seulement seront utilisées directement; l'emploi de l'air comprimé apparaît, par suite, ici comme plus économique que celui d'un fluide incongelable circulant dans un frigorifère, ou d'un gaz liquéfié sous pression dont la détente se produirait dans un appareil placé à l'intérieur du local à refroidir. Il convient toutefois de ne pas perdre de vue que nous avons admis pour valeur du rendement de notre installation 350 frigories par cheval-heure indiqué. Or, ce chiffre suppose l'utilisation du travail de détente de l'air comprimé. Dans les machines frigorifiques à air, le déten- deur et le compresseur sont, en effet, groupés sur le même bâti et le travail moteur de la détente vient en atténuation du travail résistant absorbé par la compression. Ici, il ne saurait en être de même, puisque l'installation du détendeur se trouve à proximité du local à refroidir. Afin de récupérer l'énergie produite par cette machine, la seule solu- tion consiste donc à lui accoupler une dynamo et à relier le groupe électrogène ainsi constitué à la canalisation d'une distribution d'énergie. Ainsi, dans une installation du genre de celle que nous avons en vue, la distribution du froid à domicile serait forcément connexe d'une distribu- tion d'énergie électrique. La distribution du froid à domicile à l'aide de l'air comprimé nous semble, d'ailleurs, offrir encore d'autres avantages sur les systèmes dont il à été parlé plus haut. Tout d'abord, l'installation de l'usine centrale est extrèmement simple, puisqu'elle se réduit, en outre de l'appareil moteur, à un simple compresseur complété par le condenseur d'humidité à circulation d’eau. De plus, la conduite est unique au lieu d'être double ou même triple, comme le cas se présente dans certaines installations américaines utilisant la détente directe de l’ammoniaque*. Enfin, le fluide qui circule dans la conduite étant à la température 4 Ce chiffre se justifie aisément ainsi qu'il suit: Admettons que la teneur de l'atmosphère du lieu en acide carbonique soit de 0,000%. On sait que la teneur maxima de ce gaz ne saurait dépasser 0,002 sans amener des troubles physiolo- giques. D'autre part, et d'après les expériences de Barral, un homme produit en une heure 60 gr. de vapeur d'eau et 20 d'acide carbonique, A la teneur limite de 0,002 pour ce dernier gaz, correspondra donc un volume de 300 m.c. d'air, en tenant compte de l'acide carbonique qui était primiti- vement contenu dans l'air de l'atmosphère. Voir à ce sujet la Revue de Mécanique, mars 1906. C' P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE extérieure, les pertes par conductibilité sont sup- à primées ipso faclo, et l'on n'a pas à se préoccuper de l'isolement calorifique de la conduite. Cette même circonstance simplifie encore le mon- tage des conduites, qui, dans le cas d'un fluide refroidi, peuvent être assujetties à de très grandes variations de température selon que l'installation est au repos ou en fonctionnement. A la vérité, cet inconvénient est évité par l'em- ploi de l’ammoniac liquéfié; mais, dans ce cas, les tuyaux peuvent subir des pressions extrémement élevées aux hautes températures (> 12 kilogs). A ces divers avantages de l'air comprimé, il convient encore d'ajouter celui qui résulte du fait que l'ins- tallation à l'air comprimé n’exige pas de ventilateur, dont l'emploi est nécessaire dans l’autre solution pour l'appel de l'air extérieur et sa circulation à travers le frigorifère. Ainsi donc, et dans le cas où nous nous sommes placé, la supériorité de l'air comprimé semble acquise sans conteste. V. — CALCUL DU REFROIDISSEMENT D'UN LOCAL PAR L'AIR COMPRIMÉ. Proposons-nous maintenant, à titre d'exemple, de préciser les conditions économiques dans les- quelles pourrait s'effectuer le refroidissement d'un local de 240 m. c. de capacité, constitué par 3 pièces de 52,10 x 4,50 X 3,50, habitées chacune par une personne. Nous admettrons, en outre, que, l'atmos- phère étant toujours supposée saturée à — 30°, les parois du local sont constituées de telle façon que le flux calorique qui les traverse est de 1 calorie par mètre carré, par heure et par degré de la différence de température existant entre l'intérieur du local et l'extérieur”. En admettant qu'on envoie quotidiennement, dans le local en question, un cube d'air de 600 m. €. par personne, le cube d'air total fourni par vingt-quatre heures sera de 1.800 m.c. En supposant encore que la pression @e l'air à son admission dans le moteur soit de 2 kilogs par centi- mètre carré, etqu'il ait été refroidi à 30° à sa sortie du compresseur, il en résulte que cet air, primitive- ment saturé à la pression atmosphérique, perdra par condensation la moitié de la vapeur d'eau qu'il contenait d'abord. Après la détente supposée adia- { On a pris le chiffre relativement élevé de 1 calorie pour tenir compte de l'ouverture des portes. La présence des habitants équivaut, d'ailleurs, à une production d'environ 90 calories par heure. On trouvera dans l'ouvrage de Marons : Production et utilisation du froid, au chapitre : Coefficients de transmis- sion de la chaleur par quelques isolants composés (p. 216), les valeurs des coefficients relatifs à quelques murailles. L'un d'eux atteint la valeur très faible 0,14. C' P. BOURGOIN — L'ORGANISATION DE LA MAISON COLONIALE MODERNE 937 - batique, le calcul montre que la température finale de l'air au sortir du moteur est de — 185. D'autre part, le poids d'air fourni par minute au moteur est de 1 kg. 616. La chaleur spécifique de l'air sous pression constante etant de 0,238, il en résulte que l'absorption de chaleur qui s'opère dans le moteur pendant le même temps estde 1,616 X 48,5 _X 0,238 calories, ce qui correspond, en vertu du principe de la conservation de l'énergie, à un travail - mécanique de 7.938 kilogramètres ou à une puis- sance de 1 cheval 80 environ. Pour tenir compte des résistances passives, nous admettrons qu'à cette puissance nominale corres- pond une puissance indiquée moitié moindre, soit 0 cheval 900. En prenant, comme on le fait habituellement": 0,80 pour le rendement dynamique du compresseur, 0,95 pour celui de la canalisation, 0,45 pour celui de la réceptrice supposée utiliser la détente com- plète de l'air qu'elle utilise, on trouve un rendement global de 0,3%, soit 1/3 environ; la réceptrice ayant une puissance de 0 cheval 900, la puissance corres- pondante du compresseur serait donc, d'après ce procédé, de 0,900 X 3 — 2 chevaux 700 environ. Admettons maintenant : 1° que cette puissance soil fournie par un moteur à gaz pauvre de grande puissance consommant O0 kilog 700 de charbon maigre par cheval-heure effectif et que le prix de ce combustible soit de 45 franes la tonne; 2° que les dépenses afférentes aux frais généraux et à lamor- üissement de l'installation représentent une somme double de la dépense de combustible. Dans ces conditions, la dépense afférente à la fourniture journalière des 1.800 mètres cubes d'air refroidi sera de 6 fr. 12. Il convient toutefois de défalquer de cette somme la valeur de l'énergie électrique récupérée par l'in- termédiaire de la réceptrice et de la batterie d'accu- mulateurs, valeur que nos calculs nous permettent d'estimer à 2 fr. 80 par jour. En défalquant cette somme de la dépense jour- nalière afférente à la fourniture d'air comprimé, on voitque le prix de revient réel du refroidissement du local en question sera de : 6,12 — 2,80 —3 fr. 32, soit 4 fr. 10 par personne par jour. Etant données les bases très larges admises dans le cours de notre calcul, ces chiffres constituent évidemment un maximum ; on peut donc conclure de ce qui précède à la possibilité économique et pratique du refroi- dissement des locaux. Supposons que notre local ait ses trois pièces contigües par leur plancher ou par leur plafond avec un local également refroidi. La surface totale de réchauffement sera de 200 mètres carrés envi- ! Gouizzx : Air comprimé (Encyclopédie des Aide-Mémoire). REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. ron. Les murs étant supposés constitués comme il a été dit, le calcul montre que l'abaissement de température obtenu est d'environ 6°. VI. — ConCLUSION. Ainsi, d’après les données numériques que nous venons d'obtenir et qui nous paraissent constituer une base sérieuse de discussion, il apparait pos- sible de réaliser pratiquement, dans la plupart de nos colonies, une habitation coloniale dans laquelle l'habitant sera mis à l'abri de l’action déprimante de la température et de l'humidité du climat. Dans les régions chaudes et humides, ce qui est le cas de la majeure partie des régions tropicales, il y aura, en général avantage, à avoir recours au pro- cédé que nous venons d'exposer. Dans les régions chaudes et sèches, comme le Soudan seplentrional, on pourrait donner la préférence aux machines à gaz liquéfiables. Le prix de revient relativement peu élevé du refroidissement des locaux d'habitation obtenu dans les conditions données plus haut peut paraitre sur- prenant; mais il s'explique facilement par le fait que l'abaissement de température à réaliser sera en général très inférieur à la différence de température qu'il est nécessaire de maintenir l'hiver dans nos climats entre l'intérieur et l'extérieur des maisons pour obtenir un chauffage suffisant. En ce qui concerne l'emploi de l'air comprimé, il n'est pas inutile de signaler qu'une installation semblable à celle dont nous venons d'étudier les grandes lignes fonctionne à Paris, dans le sous-sol de la Bourse du Commerce, par les soins de la Com- pagnie Parisienne de l'Air comprimé. L'air comprimé, fourni par une usine centrale éloignée, actionne un moteur à air, qui charge une batterie d'aceumulateurs; Fénergieélectrique emma gasinée est utilisée pour l'éclairage des locaux de la Bourse, tandis que l'air froid provenant de l'échap- pement des moteurs est envoyé dans les locaux du sous-sol, loués à des commercants qui y conservent des denrées alimentaires, sujettes à s'avarier ra- pidement sous Faction de la chaleur (poissons, viandes, etc.). Pratiques et possibles au point de vue technique, le refroidissement et la dessiccation de l'air des lo- caux sont encore réalisables au point de vue écono- mique, en ayant recours à une installation d’ensem- ble suffisamment vaste. Il faut donc espérer que l'on verra, un jour ou l’autre, tenterune application qui nous parait de nature à changer complètement les conditions physiques de l'habitat de l'Européen dans les pays tropicaux. C' P. Bourgoin, Chef d’escadron d'Artillerie coloniale. 92** 2 938 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 4° Sciences mathématiques Eginitis (Démétrius), Directeur de l'Observatoire d'Athènes. — Annales de l'Observatoire national d'Athènes — Tome 1V.— 1 vol. in-4° de 580 pages. Imprimerie royale, Athènes, 1907. Le tome IV, que vient de distribuer l'Observatoire d'Athènes, continue la série inaugurée par son distingué directeur, M. D. Eginitis, en 1898. Le plan d'exposition reste le même que celui des volumes I et IT, analysés dans cette Æevue en 1900! ; la première partie, sous le titre Mémoires, met en œuvre les observations détaillées avec soin dans la deuxième partie. Bien que l'Observatoire soit pourvu d'instruments astronomiques, ses Annales restent consacrées à la Météorologie et à la Physique terrestre. Le volume actuel débute par un important Mémoire sur les é/6- ments du magnétisme terrestre à Athènes pendant les années 1900-1903. Un historique très complet rappelle le nom du « grand bienfaiteur de l'Observatoire, feu André Syngros », les travaux de réorganisation, dus à l'énergie du directeur et au concours dévoué de la Marine grecque, et les premiers observateurs Abbadie, de Bernadières, Hartl, ete. Les méthodes employées et suivies sont celles du Bureau Central Météorologique de France; les instru- ments, appareils à lecture directe et enregistreurs, construits à Paris, ont été vérifiés par M. Moureaux, l’'éminent apôtre des études magnétiques en France. Une suite de tableaux bien disposés groupe les moyennes de 1900 à 1903 pour la déclinaison, l'incli- naison, la composante horizontale, etc., ainsi que la répartition des perturbations mensuelles et horaires. De même que la plupart des anciennes stations ma- gnétiques, l'Observatoire d'Athènes n'échappe pas à l'influence du voisinage des courants industriels et des nouvelles lignes de locomotion. Depuis septembre 1904, les appareils enregistrent avec régularité l’arrivée et le départ des trains de la station du Thésée à Athènes. L'étude des étoiles filantes, — si fructueuse, en Angleterre, avec M. Denning, malgré des conditions plu- tôt défavorables, — s'impose sous le ciel si lumineux de la Grèce. M. D. Eginitis l’a heureusement compris et un nouveau Mémoire vient s'ajouter à ceux qu'il a déjà publiés aux tomes IT et IT. Sur ce sujet si plein d’im- prévu, aucune recherche importante ne pourra se faire désormais sans consulter les Annales de l'Observatoire d'Athènes. La Sismologie est la science du jour; elle accapare l'attention, même en France, où cependant ses effets sont peu sensibles. La Grèce, avec son sol instable, offre une série de stations presque aussi intéressantes que celles de ltalie du Sud. Dans l’£tude sur les séismes survenus pendant les années 4900-1903, M. D. Eginitis classe et groupe les phénomènes observés directement et observés par des sismographes italiens du système de M. Agamemnone. Ces appareils sont installés à Athènes, Calamata, Chalcis, Zante et Egion. Le premier fonctionne depuis Juin 1899, le dernier n'a été établi qu'en 1903. L'historique et l'organisation du Service géodyna- mique ont été rapportés au tome II. Signalons ce résultat, déjà obtenu dans les statistiques antérieures, « qu'il n’y à pas de liaison sensible entre les phases de la Lune et les tremblements de terre; les paroxysmes ANT ievue générale des Sciences, |, XI, p. 4107. séismiques ont lieu tantôt aux syzygies et tantôt aux quadratures lunaires ». Au contraire, il semblerait que les séismes sont plus nombreux à l'aphélie qu'au périhélie de l’orbite terrestre : 529 dans le premier cas, contre 307 dans le second. Là encore, M. D. Eginitis retrouve la confirmation d'idées qu'il a émises dans la discussion de la série 1893-1898. Le fonctionnement régulier des Services magnétique et sismique a permis de relever une particularité très intéressante le 8 mai 1902, jour de la catastrophe de la Martinique. Une perturbation magnétique très sen- sible fut observée simultanément à Athènes et à Paris pendant l’éruption de la Martinique. Au contraire, le sismographe, système Agamemnone, n'a montré pen- dant le même temps absolument aucune agitation, tandis qu'il a donné jusqu'ici des traces très nettes d’un grand nombre de tremblements de terre très faibles, alors que les courbes magnétiques ne mon- traient pas la moindre agitation. « Il en résulte donc, vu aussi la simultanéité du phé- nomène à Paris et à Athènes, que cette perturbation doit être de nature magnétique ou électrique. » Un Mémoire étendu de M. Basile Eginitis : « Recherche sur les étincelles électriques », et une Note du même auteur «Sur le phénomène de suspension » complètent la première partie. Les observations magnétiques, météorologiques et sismiques d'Athènes et des stations qui y sont ratta- chées composent la seconde. Ce volume de près de 600 pages est le fruit d'un tra- vail considérable et fait le plus grand honneur à l’ac- tivité scientifique de l'Observatoire d'Athènes et de son zélé directeur, M. D. Eginitis. Tous les amis de la Science lui seront reconnaissants d’avoir créé une Station de physique terrestre qui rivalise heureusement avec les plus appréciées. A. LEBEUF, Directeur de l'Observatoire de Besançon. 2° Sciences physiques Von Rohr (M.).— Die Theorie der optischen Instru- menten. I. Die Bilderzeugung in optischen Ins- trumenten vom Standpunkte der geometrischen Optik. (THÉORIE DES INSTRUMENTS D'OPTIQUE. |. For- MATION DES IMAGES DANS LES INSTRUMENTS D'OPTIQUE AU POINT DE VUE DE L'OPTIQUE GÉOMÉTRIQUE), par leS Colla- borateurs scientifiques de l'Etablissement Carl Zeiss. — 1 vol. in-8° de 587 pages, avec 133 figures. (Prix: 22 fr. 50.) Springer, Berlin. Les dernières années du xix° siècle ont été signalées par des progrès considérables dans la construction des instruments d'Optique. De nombreux physiciens et géomètres ont contribué à édifier l'Optique géomé- trique sous sa forme actuelle. Sans méconnaître leur mérite, on peut dire que la plus grande part, dans cette œuvre, surtout dans la réalisation pratique, revient au professeur Abbe. Professeur à l'Université d'Iéna, véri- table fondateur de l'Etablissement Carl Zeiss, Abbe est l'auteur d’un grand nombre de travaux dont la valeur scientifique ne le cède en rien à la valeur technique. Cependant ces travaux sont moins connus, en dehors des milieux directement intéressés, qu'on ne pourrait le croire d’après leur importance.Savantaussi modeste que distingué, étranger à toute idée de réclame, Abbe n'avait jamais songé à les rassembler, et beaucoup n'avaient vu le jour que dans des publications peu répandues. Sur d'autres mème, on ne possédait que des notes recueillies par les auditeurs de ses cours. En 1893, un collaborateur d'Abbe, le D' Czapski, avait | x BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX “écrit, d'accord avec lui, un résumé de ses théories dans “le Handhuch der Physik de Winkelmann. Depuis lors, Abbe lui-même et les jeunes physiciens “qu'il avait groupés autour de lui dans l'Etablissement “Carl Zeiss ont ajouté beaucoup à l'œuvre primitive. “Une nouvelle édition du livre de Czapski fut récemment | publiée par les soins du D' Eppenstein, mais les limites “imposées à l'auteur ne lui permirent pas de donner à “son exposition tout le développement qu'elle compor- “tait. Avec l'approbation d’Abbe, on décida de faire un ouvrage d'ensemble, en confiant à chacun des collabo- “ rateurs la rédaction des parties du sujet qui lui étaient - le plus familières. Le traité y a perdu un peu d'unité didactique; mais, “dans l'espèce, ce défaut est de minime importance ; ce n'est pas un livre d'enseignement et il s'adresse à des - lecteurs déjà familiarisés avec les théories classiques, Le volume I comprend dix chapitres. «Le chapitre I (Siedentopf) établit la légitimité de . Optique géométrique. Les lois de la propagation de la lumière peuvent se … déduire de la théorie des ondulations par voie de con- séquences purement mathématiques, mais il est loisible aussi de considérer comme des faits expérimentaux: 4° La propagation rectiligne de la lumière ; 2 L'indépendance des différentes parties d'un fais- ceau lumineux ; 3° La réflexion régulière ; 4° La réfraction régulière. Ces lois ont une signification purement géométrique. La validité de la première est,en toute rigueur, limitée par les phénomènes de diffraction. Mais cette restriction n’en diminue guère l'importance pratique. L'expérience prouve, en effet, que, sous la plupart des rapports, un faisceau de section linie se comporte comme s'il était constitué par des rayons rectilignes se propageant indépendamment l'un de l’autre. | Cette propagation obéit à un certain nombre de théorèmes généraux, entre autres au théorème de Malus. D’après ce dernier, un faisceau de rayons jouit de toutes les propriétés que possèdent les normales à une surface dont la courbure est continue. En particulier, si l’on imagine un plan mené par un rayon à quelconque, ce plan coupe la surface orthogo- nale suivant une courbe. Si l’on fait tourner le plan autour du rayon, cette courbe présentera généralement en son point d'intersection avec a une courbure va- riable avec l’azimut. Il existe deux courbes (sections principales) pour lesquelles la courbure est maximum ou minimum, et ces deux sections sont rectangulaires. Les normales voisines de à sont des rayons voisins de a, qui, en général, ne le rencontrent pas. Seules, celles dont le pied est sur une courbe principale se coupent au centre de courbure. . Si l'on appelle foyer le point de concours des rayons infiniment voisins, on voit qu'il existera sur chaque rayon deux foyers principaux représentés par les centres de courbure des sections principales de la sur- face orthogonale menées par ce rayon. Dans le cas particulier où la courbure de la surface en son point d'intersection avec le rayon est constante, et dans ce cas seulement, tous les rayons infiniment voisins con- courent en un même point. . Les rayons dont les pieds se trouvent sur une même ligne de courbure de la surface se coupent l'un l'autre successivement en des points différents. Le lieu des points d'intersection de deux rayons infiniment voi- sins, ou, par définition, l'enveloppe de ces rayons, est la caustique. L'ensemble des caustiques correspondant aux différentes lignes de courbure constitue la surface caustique. Comme il existe, en général, sur chaque surface, deux familles de lignes de courbure, il existe aussi deux surfaces caustiques ou focales, et tout rayon est une tangente commune à ces deux surfaces. co. ee “Ru à Le chapitre I (Kôünig et von Rohr) est consacré aux formules de calcul, dans le cas des systèmes centrés. 939 Le procédé suivi est un procédé d’approximation successive qui rappelle les procédés du calcul astro nomique. Un faisceau est défini par son rayon principal : c'est celui qui passe par le centre de gravité du faisceau considéré comme un corps solide. La marche de ce rayon est calculée par rapport à l'axe du système et ensuite celle des autres rayons du faisceau rapportée à ce rayon principal par les méthodes de variation. Des formules générales permettent de déterminer les caractéristiques d’un rayon‘après la réfraction à travers la (7 + 1°) surface, quand on connaît ces carac- téristiques au sortir de la n° surface. Chapitre IT (Wandersleb). Théorie géométrique de la-représentation optique daprès Abbe. Cette étude est fondée sur les propriétés purement géométriques des représentations conformes, sans avoir égard en quoi que ce soit à la réalisation phy- sique. On suppose simplement qu'un faisceau homo- centrique dans l’un des espaces correspond à un fais- ceau homocentrique dans l’autre espace. Les formules générales qui expriment les coordon- nées d'un point du premier espace en fonction des coordonnées du point correspondant dans le second espace, se réduisent à des formes très simples par un choix convenable des plans coordonnés. La représentation est directe ou inverse suivant que l'image d’un système droit d'axes trirectangulaires est un système droit ou gauche. Cette théorie des représentations conformes conduit à la définition des mêmes points cardinaux que la théorie de Gauss. Chapitre IV (Culmann). Réalisation de la représen- tation optique : propriétés fondamentales des lentilles et systèmes de lentilles. On considère d’abord des faisceaux très déliés, quasi-normaux : des formules dues à Seidel établissent une relation entre deux rayons voisins de l'axe qui traversent un même système. Si le faisceau est oblique et qu'il y ait une seule surface réfringente, un faisceau astigmatique peut ètre considéré de deux manières comme un faisceau plan, dans le plan d'incidence où dans le plan perpendicu- laire. Les lois de la représentation conforme sont applicables, quand l'incidence est oblique, à deux bandes infiniment étroites situées dans ces plans (sec- tions principales). | En général, il est impossible de passer directement des formules établies pour une surface unique aux formules convenant à un nombre quelconque de sur- faces, parce que les sections principales dans la région- image de la p° surface ne coïncident pas avec les sec- tions principales de la région-objet de la (p=PA6): La théorie devient très compliquée : aussi se borne- t-on au cas où le système est centré et où l'axe du faisceau rencontre celui du système. Chapitre V (Künig et von Rohr). Théorie de l’aber- ration sphérique. | La théorie de Gauss suppose que les puissances de l'angle d'ordre supérieur au premier sont négligeables. Si l’on tient compte des termes suivants dans les déve- loppements des coordonnées qui définissent le rayon, ces termes représentent l'aberration et le degré le plus faible de ces termes est l'ordre de l’aberration. On distingue cinq sortes d’aberration : , jo La courbure du champ : les rayons issus de points situés dans un plan perpendiculaire à l'axe se coupent en des points qui ne sont pas dans un même plan parallèle au premier ; 2 La distorsion l'agrandissement (rapport d'un segment perpendiculaire à l'axe à son image) varie avec l'inclinaison des rayons; 3 L'astigmatisme : l'image d'une surface de révo- lution autour de l'axe du système se compose de deux surfaces de révolution, l'une formée par les faisceaux tangentiels (situés dans un méridien), l'autre formée par les faisceaux équatoriaux (situés dans un plan perpendiculaire à un méridien); 4 L'aberration en queue de comète : l'aberration longitudinale dépend de la première puissance de l'ouverlure et change par conséquent de signe en mème temps que cette dernière : l'ensemble des rayons se resserre sur l’un des côtés du rayon prin- cipal, d’où il résuite dans le plan méridien une dissy- métrie ; 5° L'aberration en gouttière : les rayons du faisceau situés dans un plan perpendiculaire au méridien ne coupent plus l'axe au même point quand l'ouverture devient notable. L'étude analytique de ces aberrations est poussée jusqu'à l’aberration du troisième ordre. Chapitre VI (Künig). Théorie de l'aberration chro- malique. La différence de réfrangibilité des radiations pro- voque une aberration chromatique longitudinale et une transversale. Le système étant supposé achroma- tisé pour deux couleurs, on cherche l’aberration corres- pondant à une troisième couleur. On appelle : dispersion fondamentale l'excès de l'indice de la deuxième couleur fondamentale sur celui de la première; dispersion partielle, l'excès de l'indice de la troisième sur celui de la première; dispersion relative, le rapport 0 de ces deux quantités : pou- voir dispersif pour les deux couleurs fondamentales : 1 _n(n, — n,) : _ AA A Ë. de a per me la première etla troisième c’est 3 Si 0,, 0,04 désignent les valeurs de 0 pour les diffé- rents éléments du système, il faut, pour faire dispa- raître l’aberration chromatique des trois couleurs, que : 0, —0,— ... — (04. Sinon, il faut employer au moins trois lentilles de distance focale convenable ou, si les lentilles sont en nombre quelconque, il faut que : B, —A 6, —A 5x — A Va Ve vk B, A et B étant des constantes arbitraires. On peut représenter par un diagramme les propriétés des diverses sortes de verre employées en optique, en prenant pour coordonnées : nn — 1 CT) Er Qu | DF—Dc Dr — NC (les indices D, F... correspondent aux raies de Frauen- hofer). Les points représentatifs se groupent en deux séries, lune comprenant surtout les verres silicatés, l'autre les flints borosilicatés. Pour une même valeur de v, ces derniers présentent une valeur de 0 moindre que celle des verres silicatés. Avec une exactitude de même ordre que celle des mesures (jusqu'à la cinquième décimale), on peut cal- culer 4 par les formules linéaires : filicates. . . . . che 1,674 — 0,0018 y Boro-silicates . . . . ... 1,6 — 6— 1,667 — 0,0018 v Remarquons, en passant, que, de deux verres, le plus réfringent n’est pas forcément le plus dispersif, comme on le croyait autrefois. Chapitre VII (Künig). Calcul des systèmes optiques fondé sur la théorie des aberrations. Il s'agit de réaliser des systèmes dans lesquels les aberrations sont supprimées. Ayant calculé l'expres- sion de ces aberrations, il suffit, en théorie, d’égaler à zéro ces expressions et de résoudre les équations ainsi obtenues. Mais cette résolution n’est possible, sans com- plication exagérée, que pour les systèmes relativement simples. Dans les systèmes à éléments accolés, on arrive à supprimer deux des aberrations par un choix conve- nable des rayons de courbure et de la position du dia- phragme. Si les éléments sont séparés, on peut sup- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX primer deux aberrations, et même davantage dan certains cas, par une variation des rayons de courbur laissant la convergence constante, ou encore en faisal varier l'écartement des lentilles. En pratique, pour simplifier les calculs, on part sou vent d'un système type calculé pour des conditions di construction et d'emploi peu différentes de celles d système désiré, et on cherche à réaliser les correction nécessaires par de légères modifications des rayons d courbure. Chapitre VIII (Lüwe).Prismes et systèmes de prismes Lorsqu'un faisceau traverse un prisme, il existe su chaque rayon principal un seul point pour lequel 1] faisceau réfracté est homocentrique. Le lieu de tous le points qui donnent dans le prisme une image bomo centrique formée par des faisceaux infiniment minces, dont les rayons principaux sont dans la section prin- cipale et inclinés d’une manière quelconque sur la face d'entrée, est un plan passant par l’arête. La longueur apparente d’une fente perpendiculaire à la section principale n’est pas altérée : mais la largeur apparente est, en général, modifiée. L'image d'un objet plan parallèle à l'arête n’est pass en général inclinée sur le rayon principal du mêmes angle que l’objet, sauf dans les conditions du mininum de déviation. Cette rotation est, dans le cas général, différente pour les deux lignes focales. L'un des modes d'utilisation le plus important des prismes est la production des spectres. La pureté d'un, spectre ne peut être absolue à cause de la diffraction :M elle est d'autant plus grande que le nombre des lon- gueurs d'onde dont l'image empiète de part et d'autre sur l’image d'une longueur d'onde donnée est plus elit. : Helmholtz exprime le degré du spectre par le rapport: largeur du spectre entre ), et ?, largeur de l'image de la fente pour 2 — = Qu +22) € La valeur de ce quotient est calculable par les règles de l'Optique géométrique; mais elle dépend de la lar- geur de la fente et, par suite, n’est pas caractéristique du prisme. Une telle caractéristique est donnée par le pouvoir définissant par une fente infiniment étroite (Lord Rayleigh). Chapitre IX (von Rohr}. Diaphragmes dans les sys" tèmes optiques. La plupart des instruments d'optique sont destinés à fournir sur un plan (écran ou rétine) une image d'objets dont les différents points sont à des distances différentes. Ces conditions ne sont donc pas celles de. la représentation optique proprement dite, telle qu'elle a été étudiée dans les chapitres précédents. En supposant le système corrigé des aberrations,, seuls les points situés dans le plan conjugué de l'écran donneront sur cet écran une image ponctuelle. Pour les autres, on observera la section par le plan de l'écran du cône de rayons issu du point-objet; et ils seront représentés sur l'écran par leur projection en perspective. L'image sera encore nette et l'étendue de, ces traces (cercles de diffusion) ne dépasse pas certaines limites. Les diaphragmes jouent un grand rôle dans le phénomène : d'où le titre du chapitre. Que la vision soit objective, c'est-à-dire qu'on observe l'image pro- jetée sur un écran, ou subjective, c'est-à-dire que l'æil recoive directement les rayons au sortir du système, l'œil doit être considéré comme partie intégrante de celui-ci et intervient par ses propriétés particulières. Chapitre X (von Rohr). Transmission du rayonnement à travers les systèmes optiques. Ce chapitre est consacré à la photométrie et à l'étude de la clarté dans les systèmes optiques. Le résumé que nous venons de donner, quoique long déjà, ne peut fournir qu'une idée imparfaite de f . l'ouvrage Re BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 941 ————————————— et de la quantité des matériaux qui y sont mis en œuvre. Cest actuellement, sans doute, l'exposé le plus complet de l'Optique géométrique et de ces théories remarquables qui, par une marche absolument rationnelle, ont conduit à la construction des appareils si parfaits que sont aujourd’hui les lunettes, les micros- copes et les objectifs photographiques. MarcEL LAMOTTE, Professeur adjoint à l'Université de Clermont-Ferrand. 3° Sciences naturelles Settimi (D' Luigi), Chimiste au Laboratoire central des Octrois de Tome. — Caoutchouc e Gutta- percha. — 4 vol. petit In-18 cart. de xvi-253 pages, avec 14 figures. (Prix : 3 fr.) Collection des manuels Hoepli, Milan, 1907. Tous ceux qui auront besoin d'un renseignement quelconque sur le caoutchouc et la gutta consulteront avec grand profit le petit livre de M. Settimi; ils y trou- veront, condensés et exposés avec clarté et précision, une foule de renseignements fort difficiles à se procurer ailleurs. Ce petit manuel est divisé en deux parties princi- pales complètement séparées; la plus importante est consacrée au caoutchouc, l'autre traite exclusivement de la gutta-percha. Toutes deux sont conçues suivant le même plan. Pour le premier de ces produits, l'historique, l'origine botanique et les procédés de récolte des caoutchoucs des diverses origines sont étudiés, ainsi que les pro- priétés physiques et chimiques et la vulcanisation. L'auteur passe ensuite en revue les manipulations commerciales que subit le produit, depuis sa coagula- tion jusqu'à son conditionnement en fils, tissus, laines, pneumatiques, courroies de transmission, ete.; d'excel- lentes figures schématiques font comprendre le fonc- tionnement des appareils employés à ces fabrications. Des pages intéressantes sont consacrées à l'étude des nombreuses substances que l'on incorpore au caout- chouc, ainsi qu'aux produits commerciaux dans lesquels entre le caoutchouc à titre de constituant (caoutchoucs factices, succédanés du caoutchouc). Viennent ensuite l'étude des huiles diverses et autres produits liquides que l'on mêle au caoutchouc et à ses solutions, avec quelques mots sur les divers solvants et un tableau comparé de la solubilité des caoutchoucs dans les diverses menstrues; l'étude des corps employés pour la coloration du produit manufacture ; l'exposé rapide de divers procédés industriels ayant pour base l'emploi du caoutchouc (imperméabilisation des étoftes, désodorisation du caoutchouc, conservation, application sur les métaux, action des métaux sur le caoutchouc). Cette monographie se termine par un substantiel résumé des méthodes d'analyse du produit brut et mauufacturé. À la fin du livre, sous le titre « Considé- rations générales sur l'industrie du caoutchouc et de la gutta-percha », l'auteur à rassemblé une série de docu- ments commerciaux intéressant en particulier l'Halie, ainsi que des tableaux synoptiques concernant l'impor- tation et l'exportation dans ce pays. F. GUÉGUEN, Docteur ès Scienc Professeur agrégé, Chargé de Cours à l'Ecole supérieure de Pharmacie de Paris. Lamarek (J. B.). — Discours d'ouverture (an VIIT, an X, an XI et 1806). — 1 vol. de 157 pages avec 3 portrauts. (Prix : 6 fr.) Réimpression 1n Bull. scientif. France et Belgique, t. XL, et à part. Paris, 3, rue d'Ulm,M907. Les quatre discours que M. A. Giard vient de réim- primer ont été prononcés par Lamarck au Muséum, à l'ouverture de son cours sur les Animaux sans verté- bres. Les deux premiers sont placés en tête, l'un du Système des Animaux sans vertèbres, l'autre des Re- cherches sur l'organisation des corps vivants. Les deux derniers, imprimés à part, étaient plus que rares. M. M. Landrieu qui, depuis plusieurs années, à fait les recherches les plus approfondies sur tout ce qui touche à la vie et à l'œuvre de Lamarek, ne connaît de celui de l'an XI que l'exemplaire possédé par la Bibliothèque du Muséum; il en a vu deux de celui de 1806, l’un dans la bibliothèque Alphonse Milne-Edwards et qui paraîl perdu, l'autre qui appartient à M. Giard. L'utilité de cette réimpression n'était donc pas discutable. Les discours en eux-mêmes offrent un intérêt histo- rique indéniable. On y trouve, en effet, les ébauches successives des principes qui, dans la doctrine la- marckienne, dominent l'Evolution et dont l'expression définitive a été la Philosophie Zoologique publiée en 1809. Dans les derniers, la pensée de Lamarck est arrivée souvent à une forme qu'il n’a plus modifiée. Les Discours d'ouverture ne sont pasles seules parties de l'œuvre de Lamarek qui soient devenues rares. La Philosophie Zoologique, malgré la réédition qu'en à faite de Martins, n'est pas facile à trouver, etbién d’autres ouvrages importants sont très peu accessibles. Si l'on songe à la place que les idées de Lamarck tiennent dans la Biologie contemporaine, n'est-il pas évident qu'une édition de son œuvre, sinon complète, du moins largement conçue, serait à désirer? Espérons donc que l'initiative prise par M Giard sera, comme il le dit dans la très intéressante préface qu'il a placée en tête des Discours, la première pierre de ce monument, le plus digne assurément de la mémoire de l'illustre penseur. M. CAULLERY, Professeur adjoint à la Sorbonne. 4° Sciences médicales Héricourt (D: J.) — L'Hygiène moderne. — 1 vol. de 311 pages de la Bibliothèque de Philosophie Scientilique. (Prix : 3 fr. 50.) Flammarion, éditeur. Paris, 1907. Le livre de M. Héricourt nous sort certainement de la banalité et du « déjà vu » des ouvrages similaires. La nature des questions qui s'y trouvent abordées, la facon personnelle dont celles-ci sont traitées, lui assurent une place à part. Au lieu de faire un livre didactique et populaire, M. Héricourt a eu la bonne idée de se limiter à un petit nombre de questions particulièrement impor- tantes ou particulièrement intéressantes de l'hygiène moderne, mises à l’ordre du jour sous une forme ou une autre. Malgré la diversité et la multiplicité de ces questions, l’auteur a su Îles rattacher les unes aux autres en considérant successivement, dans des chapitres distincts, d'abord l'hygiène de l'individu en lui-même, puis l'hygiène de l'individu pris dans sa maison, dans la rue et dans la collectivité. C'est à l'individu lui-même que se rapportent les chapitres que M. Héricourt consacre aux tempéraments et aux prédispositions, à larthritisme, aux candidats à la tuberculose, à l'alimentation, au vètement, à la coif- fure, à la vie sexuelle. La maison de demain, la vie domestique et les logis infectieux constituent la matière de trois chapitres traitant de l'hygiène de l'individu dans son habitation. Enfin une série de chapitres sur l’habi- tation collective, les voitures publiques et les théâtres, la rue, le surmenage et les vacances, le péril syphi- litique, la lutte contre la tuberculose, ete., nous montrent ce qu'est et ce que devrait être l'hygiène de l'individu dans la collectivité. En publiant ce livre, — et j'ai dit qu'il ne ressemble pas à ce quise publie sur cesujet, — M. Héricourt a voulu attirer l'attention sur les principaux dangers auxquels est exposée la santé de l'individu et faire connaître le moyen de les éviter. Pour employer l'expression même de l’auteur, le lecteur trouvera, dans ces « mélanges » pour défendre sa santé, les conseils essentiels et les suggestions indispensables. D: R. Rouue. de) = 19 ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADEMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 4 Novembre 1907. La Section de Minéralogie présente la liste suivante de candidats à la place laissée vacante par la nomina- tion de M. A. de Lapparent comme secrétaire perpétuel : 1° M. F. Wallerant ; 2° MM. M. Boule, E. Haug, L.de Launay et P. Termier; 3° M. J. Bergeron. 49 SGIENCES MATHÉMATIQUES. — MM. G. Bagnera et M. de Franchis recherchent tous les groupes d'ordre fini formés par des transformations d'une surface hyperelliptique en elle-même.— M.C.Popovici présente quelques résultats nouveaux relatifs aux fonctions adjointes de M. Bubl. — M. E. Goursat complète ses recherches sur les propriétés des équations intégrales. _— M.J. Guillaume présente ses observations du Soleil faites à l'Observatoire de Lyon pendant le deuxième trimestre de 1907. Les groupes de taches et leur sur- face totale ont fortement diminué; les facules ont peu varié. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. L. Bloch a calculé par la formule de Drude, et en se servant des valeurs expéri- mentales de ce dernier, le parcours moyen etle nombre des électrons dans l'unité de volume des métaux. Le parcours moyen oscille entre 1,5.10—5 et 0,7.10- *; le nombre des électrons varie de 0,8 à 27 X 10%. — M. A. Dufour a observé que, dans la vapeur de brome sou- mise à un accroissement de pression, toutes les raies du spectre d'absorption deviennent floues. Certaines raies conservent la même longueur d'onde; d’autres présentent une augmentation de longueur d'onde, — M. M. Luizet signale une observation d'éclair en cha- pelet, faite le 20 août dernier au Sappey, près de Gre- noble, à la fin d’un orage. — M. G. Urbain, par cris- tallisation fractionnée du nitrate d’ytterbium, a obtenu des fractions de poids atomiques variables de 169,9 à 173,8. Il attribue ce fait à la présence de deux élé- ments dans l'ytterbium, le néo-ytterbium et le luté- lium; ce dernier à été caractérisé par son spectre d'étincelles. — M. K. Krassousky rappelle que la chlorhydrine butylénique bisecondaire, décrite récem- ment par M. L. Henry, à déjà été préparée par lui en 1902 par addition d'acide hypochloreux au butylène. —MM.R. Lépineet Boulud recommandent la détermi- nation du sucre dans le plasma sanguin pour savoir la quantité qui va aux tissus. Le sucre du sang peut être de 60 à 90 °/, du sucre du sérum. 39 SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Laveran et A. Thi- roux ont constaté que le traitement mixte des trypa- nosomiases par l'atoxyl et les sels de mercure, préco- nisé par Moore, Nierenstein et Todd, donne des résullats supérieurs au traitement par l'atoxyl seul. Toutefois, l'association du trisulfure d’arsenic à l'atoxyl est encore préférable. — MM. Y. Delage et P. de Beauchamp ont étudié l'action des différents phénols comme agents de parthénogénèse; elle n’est nullement proportionnelle à leur activité pour l'oxygène. — MM. L. Léger et O. Duboscq ont constaté que les Gré- garines intestinales des Crabes sont des Angiosporées et doivent former un genre nouveau qu'ils nomment Franzelia. — M. L. Daniel conclut de ses expériences que le millerandage, c'est-à-dire la production de raisins murs sans pépins, est provoquée par une surali- mentation, une pléthore aqueuse, au moment où le grain noué se développe avec une grande activité. — M. A. Guilliermond à reconnu que les grains d’aleu- rone des Graminées offrent des caractères analogues à ceux du lupin; ils s'en distinguent par leur moindre richesse en protéine, et le moins grand nombre et la ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES plus forte dimension des globoïdes. — M. P. Bertrand présente une classification des Zygoptéridées fondée sur les caractères de leurs traces foliaires. — M. H. Hubert a observé, dans la chaîne de Fita (Dahomey), un massif de granite alcalin extrêmement localisé et fort éloigné des autres massifs analogues connus en Afrique. — M. L. Duparce signale de nouveaux cas d'ouralitisation du pyroxène qui confirment sa théorie du phénomène, dû à l’action d’un bain relativement acide et de nature feldspathique. — M. R. Legendre a constaté que, dans les mares supralittorales à Har- pactieus, il y a augmentation de densité et appauvris- sement en oxygène pendant les périodes de morte-eau. Séance du 11 Novembre 1907. M. F. Wallerant est élu Membre titulaire dans la Section de Minéralogie. — M. E. Heckel est élu Cor- respondant pour la Section d'Economie rurale. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Edm. Maillet pré- sente la suite de ses recherches sur les fractions con- tinues algébriques. — M. A. Myller fait l'étude des solutions périodiques de l'équation Au—ja(x, y, 2) IDE 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Becquerel arrive à la conclusion que le nombre des électrons absorbants, contribuant à produire une même bande d'absorption dans un cristal, peut varier du simple au triple entre la température ordinaire et la température de l'air liquide. — M. A. Guébhard propose, dans le procédé de photographie en couleurs de MM. Lumière, de réa- liser le renversement de l’image par l’action du plein jour, au travers de l'écran trichrome, au cours du pre- mier développement. — M. F. Bordas à constaté que l’action du bromure de radium sur la coloration des pierres précieuses peut être fortement accélérée en pla- cant les corps en contact. La coloration n’est pas due à une oxydation, car elle se produit encore à —200°. — M. D. Berthelot, reprenant des expériences commen- cées par son père, a observé qu'un quartz incolore et une fluorine blanche n'ont pas été colorés par le radium au bout d'une année, Un cristal de fluorine blanche, laissé au milieu d’une solution de manganèse, puis soumis à l’action du radium, s’est légèrement coloré en rose, probablement par suite du bombarde- ment moléculaire. — M. J. Duclaux a reconnu que, dans une solution colloïdale hydrochloroferrique, la partie hydrolysée du sel ferrique n'intervient pas dans la catalyse. La propriété catalytique est une propriété de l'ion, — M.F. Meyer, en faisant réagir Na*O® et BaO® sur l'or précipité, a obtenu les aurates de sodium et de baryum (AuO*}Na* et (AuO*}#Ba. Ils sont décom- posés en solution par la chaleur et la lumière avec formation d'oxyde aureux Au*0 ; ils sont décomposés par H°SO* avec formation d'acide aurique Au*0*.3H°0. — M. M. Guichard, en iodurant les éléments dans des tubes scellés où l’on a fait le vide, a obtenu facilement Fel®, Nil, Silt. — M. V. Auger a constaté que l’As amorphe, préparé en précipitant une solution chlorhy- drique d'As0% par SnCl* ou un hypophosphite, jouit d’une grande activité et réagit sur les dérivés alkylha- logénés pour former des composés organiques de l’ar- senic. — M. M. Tiffeneau, en soumettant le styro- lène à l'action de I en présence de HgO, a obtenu, en présence d'éther, l'iodhydrine du phénylglycol C°H°. CHOH.CHT, en présence d'alcool, en outre, l'éther C°H®. CHOR.CH?I. — M. R. Fosse a préparé une série de dérivés du xanthydrol avec l’urée, la thio-urée, l'uré- thane' et diverses amides. La dixanthylurée fond à 250°- 2580 en se décomposant. — MM. Ch. Moureu et A. Va- | L | | f | a ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 943 - Jeur, par méthylation de la spartéine, ont obtenu la ie D méthylspartéine, puis avec CH*T son diiodométhylate, que l’action de AgOH convertit en dihydrate de tétra- méthylspartéinium; ce dernier, par distillation frac- tionnée, fournit le méthylhémispartéilène C'°H°°47, Eb. 160°-161° sous 16 millimètres. — M. R. Lezé pro- pose de doser la matière grasse dans le lait écrémé en écrémant de nouveau, à 40° environ, le lait déjà éerémé, additionné préalablement de 20 centimètres cubes d'un mélange de 150 centimètres cubes Azd° et 20 grammes NaOH. — M. C. Gerber propose une nou- velle méthode de détermination du pouvoir accéléra- teur des sels neutres de potassium et de sodium sur la coagulation du lait par les présures végétales. Elle con- siste à faire agir une présure végélale sur du lait auquel on à ajouté des quantités moléculairement équivalentes des divers sels à étudier et des doses croissantes d’oxa- late de sodium. 30 SCIENCES NATURELLES. — MM. Lannelongue, Achard et Gaillard ont étudié chez le cobaye l'influence des régimes alimentaires gras, hydrocarboné et azoté sur la marche de la tuberculose expérimentale. Le régime fortement azoté présente une supériorité incontestable. — MM. H. Guillemard et A. Moog ont reconnu que, loin d'activer la déshydratation de l'organisme, le climat des grandes altitudes ne peut que la restreindre. — M. Marage décrit trois exercices simples destinés à augmenter le volume de la cage thoracique et, par là, le volume d'air utilisable pour la voix. — MM. A. Broca _et Polack ont mis en évidence les deux faits suivants : Lorsqu'un signal de couleur douteuse est mieux vu en vision directe (centrale) qu'en vision indirecte (péri- phérique), il est rouge; si c'est le contraire qui se pro- duit, il est bleu ou incolore. —M. G. Carrière a étudié expérimentalement les médications excito-motrices de l'estomac à l'aide de la fluoroscopie, après l'adminis- stration d'un repas d'épreuve comportant 30 grammes de bismuth. Les agents physiques les plus actifs sont : le massage trois heures après le repas, le courant de Watteville, le courant faradique; les agents chimiques actifs sont : la strychnine et la poudre de noix vomique, l'ipéca, Pergot de seigle. — M. L. Léger décrit un nou- veau myxomycèle endoparasile des Insectes, qu'il nomme Sporomyxa scauri. —M. L. Mercier a observé que les cellules des insectes infestés par le Bacillus Cuenoti se comportent de deux façons : ou bien elles meurent rapidement, où bien elles perdent leurs carac- tères différentiels et font retour au type embryonnaire. — M. H. Guilleminot a étudié l’action des rayons X et du radium sur la cellule végétale. Elle est caractérisée par un retard de croissance pour des doses de 3000 (radium) et 15.000 M (rayons X) et par la mort pour des doses de 10.000 Y (radium).— MM. A. Lacroix el A. de Schulten ont trouvé un nouveau minéral dans les scories plombeuses du Laurium ayant subi l’action de l'eau de mer. C'est un chloro-arséniate de plomb, Pb‘{AsO‘}:.3PbCP, que les auteurs nomment georgia- désite. I cristallise dans le système orthorhombique ; D=—7,1; dureté — 3,5. — M. Deprat à étudié les pro- duits du volcan de Monte Ferru (Sardaigne). Dans une première phase, il a émis des trachytes de deux types, puis des phonoliles; dans une seconde, il a épanché des basaltes de trois types différents. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 5 Novembre 1907. M. Nélaton présente un (ravail sur un nouveau traitement de l'affection désignée sous le nom de hanche à ressort. Séance du 12 Novembre 1907. M. Blache présente le Rapport de la Commission permanente de l'Hygiène de l'enfance sur les Mémoires et travaux qui lui ont été envoyés en 1906-1907. — M. Pamard étudie le fonctionnement de la loi Rous- sel dans le département du Vaucluse depuis trente ans. Ce fonctionnement a été absorbé par l’'Adminis- tration, qui empêche toute initiative ou action person- nelles, pour le plus grand dommage de l'enfance. Ce qu'il faudrait changer, c’est non la loi, mais ses condi- tions d'application. — M. C. Delezenne lit un travail relatif à l’action comparée de l’entérokinase et des sels de chaux sur le suc pancréatique inactif. — M. Das- tre communique une étude relative à l'influence du chlorure de sodium sur la digestion gastrique. — M. E. Retterer lit un travail intitulé: Contribution à l'étude expérimentale des cellules géantes. — M. M. Hallion présente ses recherches sur les relations fonctionnelles par l'intermédiaire des sécrétions internes. — M. P. Langlois lit un travail sur la polypnée thermique cen- trale. PEUEE SOCIETE DE BIOLOGIE Séance du 2 Novembre 1907. M. G. Patein a observé que les sels de chaux ne produisent pas la coagulation du plasma oxalaté lorsque la réaction de celui-ci est acide; si l’action de l’acide acétique dure depuis quelques heures, ils ne produisent pas la coagulation lorsqu'on rend de nouveau la liqueur alcaline. — M. H. Vincent, dans 156 cas de rhuma- tisme aigu, fébrile, a relevé 86 fois une tuméfaction du corps thyroïde, avec sensibilité très vive de l'organe. D'autre part, le rhumatisme aigu fébrile peut être le point de départ du goître exophtalmique. — M. M. Ni- cloux décrit quelques perfectionnements au procédé de dosage de petites quantités de chloroforme dans le sang et les tissus, en vue d’en augmenter la sensibilité. — M. J. Cantacuzène a reconnu que les leucocytes sont les éléments formateurs des précipitines; les organes formateurs des précipitines sont les organes lymphoïdes, surtout la rate. La production d'anti- corps est la plus abondante quand l’antigène est injecté sous la peau. — M. P. Guéniot a observé que le placenta humain constitue un milieu humain naturel utilisable à la culture des microbes pathogènes. — MM. L. Alquier et H. Theunveny décrivent les acci- dents nerveux (contractures et mouvements convulsifs) consécutifs aux ablations totales ou partielles de l’ap- pareil thyro-parathyroïdien chez le chien. — M. Ch. Aubertin à constaté que les infections et intoxications chroniques expérimentales peuvent produire del'hyper- trophie du ventricule gauche, probablement par l’inter- médiaire des lésions rénales, et coincidant avec une hy- perplasie surrénale. —M. M. Mirande à observé que les algues du genre Zygnema, placées dans des flaques dont l’eau s'évapore, présentent une inteuse gélification des membranes cellulaires externes. Le mucilage pro- duit, qui contient une notable quantité de glucose, est très apprécié par les abeilles. — M. C. Fleig areconnu que l'injection d'urotropine produit d'abord une légère vaso-dilatation du rein; mais, au bout de cinq à vingt minutes, le rein entre en vaso-constriction et s’y main- tient, par suite de la décomposition progressive de l'urotropine en aldéhyde formique. — M. P. Wintrebert a constalé que l'apparition des membres antérieurs ne représente pas, chez les larves de grenouille en inani- tion, le début de la métamorphose: le premier phéno- mène est la régression précoce du tube digestif. — MM. A. Gilbert et A. Lippmann ont étudié les calculs biliaires au point de vue bactériologique et y ont trouvé, dans 82 °/, des cas, des microorganismes anaé- robies au centre. — MM. G. Guillain et A. Gy ont réalisé chez les animaux une intoxication par la fumée de tabac analogue à la véritable intoxication humaine, en les plaçant dans une couveuse artificielle où l'on faisait brûler des cigarettes. — MM. Piquand et L. Dreyfus ont observé que la toxicité immédiate intrapé- ritonéale des mélanges de stovacocaine chez le cobaye est un peu inférieure à la moyenne calculée théorique- ment. — MM. A. Beauvy et J.-L. Chirié concluent de leurs expériences à l'existence d’un anticorps placen- taire dans Je sang du fœtus et à son absence dans le sang maternel. 944 Séance du 9 Novembre 1907. MM. H. Labbé et G. Vitry ont constaté qu'un gramme d'albumine d'œuf sèche met en liberté par hydrolyse 4,6 milligramme d'acide sulfurique; ils désignent celte quantité sous le nom d'indice de sulfo-conjugaison. — M. A. Giard signale la présence, sur les côtes du Bou- lonnais, de deux Trématodes margaritigènes : le Gya- nophallus somateriæ Levinsen, qui vit chez les Pélé- cypodes, et le G. bursieola Odhner, qui vit chez les Mstilus. — MM. L. Morel et H. Nepper montrent que la parotidite post-opératoire rentre dans le groupe des parotidites canaliculaires banales; la diminution de la sécrétion parotidienne favorise l'extension à la paro- tide du microbisme buccal, normal ou exalté. — M. E. Sacquépée, par l'étude des sensibilisatrices, arrive à classer en deux groupes les bacilles dits sal- monelloses : 1° bacilles carnés Gärtner, Morseele et Bruxelles : 2° bacilles carnés Aertrycke, Posen, Dus- seldorf, Sirault, bacilles du choléra des pores, de la psittacose et paratyphique B.— M. H. Rossello montre que l'éosinophilie hydatique a une valeur diagnostique dans certains cas douteux et surtout une valeur pro- nostique : si elle persiste après enlèvement d'un kyste, c’est qu'il en existe probablement un autre. — M. H. Piéron a observé trois étapes dans l’amputation spon- tanée (autotomie) : une fragilité générale du membre, une fragilité localisée, enfin une fragilité spécialisée ; dans ce dernier cas, il y a une grande résistance à la traction et une très faible résistance à la torsion locale. — MM. G. Péju et H. Rajat ont produit des variations polymorphiques du bacille de Koch par sa culture dans des milieux salins. — M. J.Cantacuzène, après injec- tion d'aleurone chez des lapins dans le péritoine, a vu apparaître dans les organes lymphoides des anticorps précipitants pour le sérum de cheval, chèvre, cobaye, chien. —M. A. Marie a constaté que la glycérine, l'alcool à 950, l'acide phénique à 5 °/,, la soude à 1°}, HCI à 1 °/, détruisent plus ou moins rapidement la virulence d’une émulsion de cerveau rabique. — M. L. Lapicque déduit de ses recherches que le rapport du poids encépha- lique au poids du corps est le même chez l'homme et la femme; il doit en être de même pour les deux sexes chez les animaux. — MM. C. Fleig et de Visme ont étudié l'effet, sur la pression sanguine, de l'injection d'un liquide où l’on à fait barboter de la fumée de tabac ; il y a une forte chute de pression initiale, suivie d'une hausse intense, puis d'une diminution au-dessous de la normale. — MM. J. Camus et Ph. Pagniez ont observé de grandes analogies entre les lésions de lin- fection tuberculeuse par voie sanguine et celles qui sont déterminées dans le poumon par les injections intraveineuses d'acides gras : il se forme dans les deux cas des granulations vasculaires avec cellules géantes au centre. — M. P. Wintrebert poursuitses recherches sur le déterminisme de la métamorphose chez les Batraciens anoures. — MM. A. Rodet el Lagriffoul ont constaté que le sérum antityphique possède des propriétés bactéricides variables, dues probablement à la présence de fixateurs de qualités diverses. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 5 Novembre 1907. M. Ch. Pérez décrit un organisme nouveau, parasite de la peau des Tritons, qu'il nomme Dermocystis pusula. — M. J. Gautrelet a constalé que le mercure etle cuivre introduits par électrolyse sont éminemment toxiques pour la fibre cardiaque; l'argent est indiffé- rent, mais intoxique le système nerveux; le fer est toxique pour le myocarde et le système nerveux. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 18 Avril 1907 (fin). MM. G. A. Buckmaster et J. A. Gardner présentent leurs recherches sur la vitesse d'absorption du chloro- forme par le sang durant l'anesthésie. La teneur en ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Et ———_—_————"— — ———]————"—"—"—"—" "—"—". ]" "| chloroforme du sang, pendant les premiers stades de l'anesthésie, s'élève avec une grande rapidité jusqu'à une valeur qui approche d'un maximum. Pendant cette période, le chloroforme paraît affecter particulièrement les centres respiratoires : le souffle devient plus court et peut cesser pendant quelques minutes ; il faut alors pratiquer la respiration artificielle pour empêcher l'animal de mourir; les auteurs n’ont pas noté d'arrêt du cœur à ce stade. Si l'animal traverse naturellement cette période ou est ranimé par la respiration artifi- cielle, en continuant à administrer l’anesthésique, la quantité de chloroforme dans le sang s'élève rapide= ment vers une valeur maximum, et une période d'équilibre se produit. Durant cette période, qui varie avec les individus et les conditions d'expérience, l'animal peut mourir à tout instant si la proportion de chloroforme du sang augmente légèrement ; la mort se produit toujours par arrêt de la respiration suivi d'asphyxie. — Les mêmes auteurs ont étudié la fonction des corpuscules rouges dans lanesthésie chlorofor= mique. Is ont constaté que le pourcentage du chloro- forme dans le sang ne varie pas proportionnellement aux différences de volume du sang en circulation. Ce résultat tend à confirmer l'hypothèse que le transport de l'anesthésique de la surface des poumons ou à celle-ci est une fonction des corpuscules rouges. Communications reçues pendant les vacances (suite). MM. G. A. Buckmaster et J. A. Gardner ont déterminé la vitesse d'élimination du chlorolorme du sang après l'anesthésie. La vitesse d'élimination parait dépendre de l'état physiologique de lanimal. En général, elle est d'abord assez rapide. puis devient plus lente. Les vitesses initiales d'élimination sont beaucoup moindres que les vitesses initiales d’absorp= tion du chloroforme; il en résulte qu'en totalité l'élimination est beaucoup plus lente que l'absorption. , Chez le chat, la teneur en chloroforme du sang arté- rie] est réduite de moitié en 15 à 20 minutes et de 3/4 en 30 minutes ; ces durées sont réduites si l'on ventile énergiquementle poumon par la respiration artificielle. Les auleurs ne confirment pas les observations de Tissot, d'après lesquelles, au cours de l'élimination, la quantité de chloroforme dans le sang veineux excède toujours celle du sang artériel. — M.J. O. W. Barratt présente des recherches sur l'implantation de l'épithé- lium à l’état de prolifération active. Durant les 7 à 14 premiers jours qui suivent l'implantation de l'épi- thélium à l’état de prolifération active de l'oreille du lapin sous la peau d’un animal de même espèce, la milose parait procéder sans diminution dans les portions de la couche épineuse qui ont échappé à la nécrose. Par contre, les cellules épineuses mortes, implantées sous la peau, produisent une action chimiotactique puissante, déterminant d'abord l'apparition de cellules polynucléaires, puis celle de grands mononucléaires et de cellules géantes ; avant ces dernières, la couche épineuse morte disparait lentement. Mème les cellules épineuses vivantes, proliférant activement sous l’in- fluence du rouge R injecté avant l'implantation, induisent chimiotactiquement, par leur métabolisme accru, l'apparition de nombreuses cellules, la plupart mononucléées, dans le chorion sous-jacent. On n'a observé aucune métaplasie de l’épithélium en état de prolifération active à la suite de l'implantation. Les lames épidermiques cornées et les tiges des poils restent intactes, se comportant comme des corps inertes. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 25 Octobre 1907. M. A. Fleming propose l'emploi d'oscillateurs magné- tiques (fermés) comme radiateurs dans la télégraphie sans fil, à la place d'oscillateurs électriques ouverts, Le calcul lui montre que l'énergie radiée par les premiers est exprimée par la formule W=#4 X 10#S*aN*, où à M TUE CSI) SOS NT | . ét ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 945 est la valeur du courant dans l'oscillateur et N la fré- quence, tandis que celle des seconds est donnée par l'expression : W—8i X 107 */#aN°. La radiation varie done dans le premier cas comme la quatrième puis- sance de la fréquence, dans le second comme le carré. L'auteur a fait des expériences avec des bobines plates de diverses dimensions employées comme oscillateurs magnétiques; on décelait l'effet induit dans un circuit placé à 45 à 75 mètres. La loi de variation de l'effet inductif avec la distance est intermédiaire entre l'in- verse du cube et l'inverse du carré. — M. A. Campbell étudie l'emploi des inductances mutuelles variables dans la télégraphie sans fil. On obtient une forme con- venable d'inductance mutuelle variable en combinant une partie continuellement variable et une série d'éche- Jons. La première consiste en deux bobines parallèles égales, avec une troisième bobine se mouvant parallèle- ment à leurs plans autour d’un axe excentrique aux bobines fixes. Les échelons sont obtenus au moyen d'une autre bobine fixe en fil détordu, chaque toron donnant unesubdivision égale. Une induciance mutuelle variable de ce genre à de nombreuses applications. Séance du 8 Novembre 1907. M. L. F. Richardson: Sur une méthode graphique à main levée de détermination des surfaces de flux et équipotentielles. L'auteur montre que, lorsqu'une exactitude à 4-3 v/, près est suffisante, des solutions de l'équation : PV , SV, SV — = —\ |) PCA DE Z peuvent être obtenues en dessinant des équipoten- tielles et des sections de surfaces de flux et en les corrigeant à main levée jusqu'à ce que les inégalités qu'elles présentent prennent la forme appropriée en chaque point de champ. La méthode ne peut être appli- quée que dans certains types de symétrie, où V est constant le long de chaque ligne d'une certaine famille de lignes. — M. J. Morrow : Sur la vibration ® Jatérale des barreaux supportés en deux points avec une extrémité surplombante. Quand un barreau sup- porté par une extrémité et un autre point sur sa lon- gueur vibre sous sa propre masse seulement, l'expres- sion qui donne la fréquence est très complexe. Si on prend différentes valeurs pour le rapport de la partie qui surplombe à la partie située entre les supports, l'expression se réduit à la forme ordinaire avec un coefficient dépendant de ce rapport. L'auteur indique ce coefficient pour six rapports compris entre 0 et l'unité. Les résultats montrent que la formule de Chree est très exacte dans les cas où la longueur qui sur- plombe est moindre que la moitié de la longueur entre supports. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Communications reçues pendant les vacances. M'e M. A. Whiteley, par condensation du chlorure de benzophénone avec l'acide 1 :3-diphénylbarbitu- rique, a préparé l'acide 1 : 3-diphényl-5-diphénylmé- thylène-barbiturique, F. 264. — M. A. W. Titherley, en condensant la salicylamide avec la benzaldéhyde en présence d’acétate de soude anhydre, à obtenu la benzylidènesalicylamide et la phénylbenzométoxazone isomère. La dernière, par action de la pyridine et d'un alcali, fournit un autre isomère de la première. Les deux benzylidènesalicylamides sont probablement des isomères syn et anti. — MM. J. C. Irvine et J. Weir ont appliqué la méthode de réduction de Baeyer à la benzoïine et à plusieurs de ses dérivés; dans tous les cas, le produit final est le stilbène; inter- médiairement, il se forme de la déoxybenzoïine. — MM. M. O. Forster et H. E. Fierz, par l'action de l'hydroxylamine sur lo-aminophénol diazoté, ont ob tenu l'o-hydroxyphénylazo-imide HO.C°H*.A7*, détonant à 4400-4500. — MM. T. P. Hilditch et S. Smiles ont constaté que la formation de bases sulfonium par lac- tion du disulfure d'éthyle sur les iodures alkyliques est très accélérée quand elle a lieu en présence d'iodure mercurique. — M. A. E. Dunstan et M''° L. Cleaverley ont préparé le benzoflavol (2: 8-dihydroxy-5-phényl- 3: 7-diméthylacridine) aux dépens de la benzoflavine. — MM. À. E. Dunstan et T. P. Hilditch ont étudié l'action du brome sur la 5-phénylacridine et ses dé- rivés halogénés. — MM. A. E. Dunstan, F. B.T. Thole et J.S. Hunt ont déterminé la viscosité des solutions de pyridine, « et G-picoline et 2: 6-lutidine. En solu- tion aqueuse, les courbes présentent des maxima, qui sont attribués à l'addition des éléments de l’eau à l'atome d'Az. — M. E. B. R. Prideaux à déterminé les coefficients d'expansion de P et de PCF et calculé les valeurs de leurs volumes spécifiques à leur point d'ébullition, d’où l'on déduit le volume atomique du phosphore dans les deux cas. — M. A. Colefax à étudié l'action du sulfite de K sur le tétrathionate en solution aqueuse. En proportions équimoléculaires, il y à for- mation partielle de thiosulfate et de trithionate; quand la proportion des deux corps est K?S0*:2K°5*0", la réaction est complète et il se forme même du penta- thionate. — M. O. C. M. Davis à éludié l'adsorption de l’iode en solution par diverses variétés de carbone ; l'effet de la température est peu marqué, mais celui du temps l'est beaucoup : très rapide d'abord, l'adsorp- tion procède ensuite très lentement, après qu'un équi- libre superficiel a été atteint. — M. J. W. Mc Bain exprime le résultat de ses recherches sur l’adsorption par la formule suivante : x a— xX\l» = fellr—$ : m1 v où x est la quantité de substance adsorbée, à la quan- + â— X tité totale de cette substance, — &@ sa concentra- = tion dans la phase fluide, m le poids de la substance adsorbante et B, a, p, des constantes. — MM. G. T. Morgan et J. M. Hird ont préparé des sels de diazo- nium colorés dérivés de la benzènesulfonylbenzidine et de l’'as-benzènesulfonylméthylbenzidine. — M. G.T. Morgan et Mi: F. M. G. Micklethwait ont combiné les paradiazo-imides avec les amines aromatiques et ont obtenu des composés aminoazoïques. La combinai- son a lieu, dans quelques cas, par mélange intime à l'état sec. — MM. J. Holmes et P. G. Sageman ont constaté que le volume des mélanges d'acide sulfurique dilué avec des solutions aqueuses de sulfates inorga- niques neutres est toujours plusgrand que la somme des volumes initiaux. Ce phénomène serait dù à des forces physiques inhérentes aux molécules. — MM. W. W. Reed et K. J. P. Orton ont étudié le déplacement du brome dans la chloruration des bromoanilines. — MM. R. Meldola et J. G. Hay ont constaté que Îles deux dinitroanisidines AZH® : AzO? : AzO* : OCH' —1: 2: L:6 et AzO:: AzH° : AzO?: OCH‘—2:3:4:6 se com- portent normalement par diazotation, sans perdre ni groupe nitré ni groupe méthoxy. — MM. K. J. P: Orton et W. W. Reed ont étudié le remplacement de l'halogène par l'hydroxyle dans les chlorobromodiazo- benzènes. Ce remplacement n'est pas restreint aux atomes d'halogène en ortho, par rapport au groupe diazoïque ; il peut se faire en para, avec formation d'une p-quinonediazide. Le déplacement parait être indépendant de la nature de l'halogène. — MM. E. G. Hillet A. P.Sirkar ont retiré des fleurs du Nyctanthes Arbortristis une matière colorante jaune, donnant par traitement à HCI concentré une substance cristal- lisée rouge C?*H#0*, que les auteurs nomment 7yctan- thine : elle donne un dérivé monoacétylé. — M. B. D. Steele a étudié la vitesse et le mécanisme de la réac- tion entre l'iode et l’acide hypophosphoreux; la vitesse est indépendante de la concentration de liode au- dessus d’une certaine limite ; la réaction est monomo- léculaire et accélérée catalytiquement par les ions H. 946 — MM. H. Marshall et Al. T. Cameron ont déterminé les conditions d'équilibre de solutions aqueuses con- tenant des succinates acides de K à diverses tempéra- tures. Le sel superacide KH*(C*H*0“}*.n'est pas un com- posé moléculaire, mais l'ion H*C*H*O* existe en solution. — MM. A. Friedl, Ch. Weizmann et M. Wyler ont préparé les fluorescéines résultant de la condensation du résorcinol avec les acides 4-hydroxyphtalique, 4-méthoxyphtalique et hémipinique. — MM. W. H. Bentley, H. D. Gardner et Ch. Weizmann ont con- densé l'acide phtalique avec les crésols en présence d'acide borique où d’AICF et obtenu des dérivés de l'acide benzoylbenzoïque, qui sont condensés, à leur tour, par l'acide sulfurique en hydroxyméthylanthra- quinones. — MM. W. H. Bentley, A. Friedl et Ch. Weizmann, en condensant les acides nitrophta- liques avec l'a-naphtol, ont obtenu des acides nitrohy- droxynaphtoylbenzoïques, qui sont réduits en acides aminés, lesquels, condensés par HPS0, fournissent des aminohydroxynaphtacènequinones. On obtient une condensation analogue avec lacide hémipinique. — MM. E. F. J. Atkinson et J. F. Thorpe ont constaté que les trois B-imino-4-cyano-y-tolylbutyrates d'éthyle isomères, traités à froid par HSO® concentré, donnent les méthyl-1:3-naphtylènediamine-2-carboxylates d'é- thyle correspondants, qui, par élimination de CO*, fournissent les méthylnaphtylènediamines correspon- dantes. — M. Al. T. Cameron et Sir W. Ramsay : Action chimique de l'émanation du radium sur les solutions contenant du cuivre (voir p.651). — MM. A.G. Perkin et W. P. Bloxam ont obtenu l'indican CH? O°Az.3H°0 cristallisé d'un mélange de benzène et d’al- cool en prismes anhydres, F.176°-178°. Par hydrolyse avec les acides dilués en présence d'isatine, il donne quantitativement l'indirubine. Par digestion avec les acides dilués bouillants en l'absence d'air, il se forme une trace d'indol, du dextrose et une substance brune amorphe, le brun d'indoxyle. — M. H. Muller a trouvé le quercitol dans les feuilles de Chzmaerops humilis; à l’état sec, elles en contiennent 1,35 °/,. — Le même auteur a retiré des feuilles de Cocos nucifera et de Cocos plumosa, ainsi que du lait de la noix de coco, la cocosite, isomère de linosite. — Le même auteur à traité lhexa-acétate d'inosite par une solution saturée de HBr dans l'acide acétique glacial et a obtenu le penta- acétate de monobromo-inosite et deux tétracétates de dibromo-inosite isomères; traités par la poudre de Zn, le premier perd Br et une molécule d'acide acétique, le second donne du phénol et de l'acide acétique. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE LA NOUVELLE-ANGLETERRE Séance du 1° Mars 1907. MM. Ch. R. Sanger et O. F. Black décrivent un procédé commode et exact de détermination quantila- tive de larsenic par la méthode de Gutzeit. Cette méthode repose sur la réduction de la substance arse- nicale par Zn et un acide el sur la coloration d'un papier sensibilisé au chlorure de mercure ou au nitrate d'argent par AsIF formé. Il est difficile, dans le procédé original, de différencier les teintes formées sur ces papiers, parce que l’action du réactif se porte en partie à la surface et en partie à l'intérieur des fibres du papier. Celte difficulté disparait presque entièrement si l'on fait agir AsH° non pas contre une surface, mais le long de cette surface. Les auteurs proposent donc de faire circuler le gaz sur une longue bande de papier imprégné au chlorure de mercure, disposée le long d'un tube, et de comparer la longueur de la partie colorée ainsi obtenue avec celle d’une série de bandes préparées avec des quantités connues d’ar- senic. Ils ont obtenu ainsi des résultats exacts el com- parables. — Les mêmes auteurs ont appliqué le procédé ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES " LU, Dis. précédent à la détermination de l’arsenic dans l'urine de personnes supposées victimes d'empoisonnement" arsenical chronique. Par leur méthode, ils ont pu reconnaître jusqu'à 0,00008 mgr. d’As*0* dans l'urine. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 11 Juillet 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. K. Carda : Contri- bution à la théorie du problème de Pfaff. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. F. Ehrenhaft met en évidence l'existence dans les gaz d'un phénomène ana- logue au mouvement moléculaire brownien dans les liquides. Des particules de l'ordre de grandeur de la trajectoire libre moyenne des molécules gazeuses et d’autres plus grosses tombent suivant une ligne en zigzag; la vitesse de chute est plus grande que la varia- tion de place exigée par le mouvement moléculaire. — M. E. Abel a étudié la réaction entre H?0? et les thio- sulfates en solution acide : elle est bimoléculaire, avec une constante 4 égale à 1,53; les ions H l’influencent catalytiquement sans en changer l’ordre; les ions H agissent aussi catalytiquement. — M. V.-F. Hess a déterminé la constante de dédoublement de l'acti- nium A; sur trois préparations, le temps au bout duquel l’activité de AcA est réduite de moitié a été trouvé, en moyenne, de 36 minutes. — M. O. Hônig- schmid montre que le procédé de Kuhne (réduction. aluminothermique de combinaisons oxygénées du bore en présence de S) ne fournit pas du tout du bore cristallisé, mais du corindon eristallisé, du bore amorphe et un borure d'Al cristallisé. — M. A. Kaïlan a étudié l’éthérification des acides nitrocinnamiques par HCI alcoolique. La vitesse d’éthérification dans l'alcool pauvre en eau est proportionnelle à la concen- tration de HCI pour les acides o et m, et croît plus vite que cette concentration pour l'acide p. — Le même auteur a également étudié l’éthéritication des acides (p}- mandélique et benzoylformique par HCI alcoolique. La vitesse d’éthérification du premier dans l'alcool pauvre ou riche en eau est proportionnelle à la concentration de HCI, celle du second croît plus rapidement que cette concentration. — MM. M. Kohn et A. Schmidt, par l'action de HBr sur l'acide oxypivalique, ont obtenu l'acide bromotriméthylacétique, que l'action de AzH* transforme en acide aminotriméthylacétique. — MM. H. Schrôtter et J. Flooh, par action de la phénylhy- drazine sur les éthers de l'acide salicylique en pré- sence de pipéridine, ont préparé la phénylhydrazone de l'acide salicylique. — M. G. Goldschmiedt à con- staté que les bases aliphatiques, bouillies avec HI, éliminent aussi un iodure d’alkyle quand un complexe atomique est lié à l'Az avec un carbone tertiaire. — Le mème auteur a déterminé le produit accessoire qui se forme, à côté de l'acide benzoïque, dans la saponifica- tion par les alcalis du benzonitrile du goudron de houille ; il est constitué en majeure partie par du benzoate de 1:3:4-xylénol. — M. H. Meyer, par l’ac- tion de l’aniline sur l'acide o-benzoylbenzoïque, à obtenu un pseudo-anilide, F.221°, et un anhydride, F.195°, Le premier s'obtient également dans l’action de l'aniline sur le chlorure de l'acide benzoylbenzoïque, qui donne, en outre, l'anilide vrai, F.195°. Le pseudo- anilide, traité par le sulfate de diméthyle, donne un éther, F.132, qu'un traitement prudent avec l'acide acétique dilué transforme en éther vrai de l'acide o-benzoylbenzoïque, F.52°. — M. Zd.-H. Skraup, pour- suivant ses recherches sur les produits d'hydrolyse de la caséine, montre que l'acide caséinique doit être représenté par la formule C®H*4A7°0*. Des fractions éthérées. il a retiré des bases ayant la composition de la butyl et de la pentylamine, et dérivant probablement de la valline et de la leucine. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. L. von Portheim a observé que les plantules de Phaseolus vulgaris aux- quelles on a enlevé une partie des cotylédons pré- sentent une accélération de croissance par rapport aux | , ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES © & 1 plantules normales. Les tiges s’'allongent beaucoup jusqu'à ce que les réserves restées dans les cotylédons soient épuisées; les plantes ressemblent alors aux plantes étiolées. — M. C. Rechinger présente les pre- - miers résultats botaniques et zoologiques d’une Mission scientifique aux iles Samoa et Salomon et à l'archipel de la Nouvelle-Guinée. — M. E. Kittl a étudié les for- mations triasiques du nord-est de la Dobrogea. — . M. F. Cornu montre que la gyrolithe n’est pas une apophyllite, normale ou décomposée, mais un minéral propre, cristallisant dans le système trigonal; sa den- . sité est 2,39-2,4, son indice de réfraction 1,54. Sa com- position répond à la formule 6S10*.4#Ca0.5(H,K,Na 0. Séance du 10 Octobre 1907. 1° SIENCES PHYSIQUES. — M. M.-Z. Jovitschitsch : Sur les produits de condensation dé l'éthylène et de l’acé- tylène sous l'influence de la décharge électrique obscure. -— M. H. Meyer fait observer que le produit décrit par Schritter et Klooh sous le nom de phényl- hydrazone de l'acide salicylique est en réalité le phé- nylhydrazide de cet acide, déjà préparé par lui. 20 SCIENCES NATURELLES. M. F. Steindachner décrit une nouvelle espèce d’Hemidactylus d'Abys- sinie, l'A. erlangeri, qui se distingue des 7. squamu- latus et tropidolepis par le mode hétérogène de dispo- sition des écailles de la queue et le plus grand nombre “de lamelles paires sur le côté inférieur de l’orteil et des doigts. — M. L. Gius à constaté que la submersion - n'exerce, chez les plantules étiolées de Vicia sativa, . aucune influence sur l’époque du commencement de la réaction héliotropique. Au contraire, la submersion produit un ralentissement de la réaction héliotropique des plantuies normales de Vicia sativa. — M. G. Beck von Managetta : Etudes sur la végétation des Alpes orientales. 1. La répartition des flores méditerranéenne, illyrique et alpine de l’Europe moyenne dans la vallée de l'Isongo. — M. J. Jahn : Sur l’âge quaternaire des éruptions basaltiques dans les fonds de la Moravie et de la Silésie. — M. R. Lucerna communique ses recherches de géologie glaciaire dans les Alpes de Liptau. 11 y a trouvé trois sortes de cailloutis reposant sur l'Eocène : le Deckenschotter alpin, les cailloutis des hautes et des basses terrasses. Les moraines ter- minales de la dernière glaciation ont été trouvées dans toutes les vallées. Séance du 24 Octobre 1907. 40 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. Hanni présente un essai d'interprétation cinématique des équations de Maxwell en faisant usage du principe de réciprocité de la Géométrie. — MM. A. Basch ei A. Léon recher- chent quelles sont les formes de corps de rotation du genre des disques dans lesquels les tensions provoquées par les forces centrifuges créent en tous les points du corps le même danger de rupture et indiquent les solutions trouvées en se basant sur les diverses théories de la résistance. 20 SGIENCES PHYSIQUES. — M. A. Defant a étudié les rapports entre la pression et la température de lair avec des gradients de température variables avec la hauteur. La formule de Poisson ne peut servir que dans les cas où l’on observe une répartition adiabatique de la température avec la hauteur. La nouvelle formule préconisée par l’auteur ressemble à celle de Poisson, mais renferme, en outre, un membre sous forme d’une puissance de e. — M. R. Kremann a observé que la réaction entre la triacétine et l'alcool éthylique est accélérée catalytiquement par les ions OH en solution alcoolique; la constante d'équilibre est de 12,7 à 25°. — M.F. von Hemmelmayr à poursuivi l'étude des dérivés de l'onocérine. L'acide onocérique perd H°0 sous l'action de l’anhydride acétique; traité par Br, il en absorbe rapidement deux atomes, puis lentement un troisième. L'oxydation de l’onocérine par le perman- ganate en solution acétique donne à froid la dioxyono- cétone, à chaud un acide C#H°#O. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. V. Pietschmann décrit deux nouveaux Sélaciens du Japon : le Centrophorus Steindachneri, voisin du C. foliaceus, et V Etmopterus frontimaculatus. — M. R. Wagner à étudié la mor- phologie de quelques espèces d'Amorpha et a constaté des faits surprenants, inconnus chez les autres plantes. Une concaulescence régressive donne naissance à des complications qui se manifestent par l'apparition de bourgeons adventices, de telle sorte que les rapports de position paraissent irréguliers et que les bourgeons de feuilles, les fleurs et les tiges de fleurs se présentent en suites confuses. ù Séance du 31 Octobre 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. de Ball présente une théorie de la rotation de la Terre, basée sur l’hy- pothèse que la Terre est un ellipsoïde de rotation aplati solide, formé de couches ellipsoïdales homogènes, et que les moments d'inertie de la Terre par rapport à tous les axes situés dans l'équateur et passant par son centre sont égaux. — M. F. Hasenôhr1 dévéloppe, sur la base des théorèmes thermodynamiques et de la con- ception de la grandeur de mouvement électro-magné- tique, une théorie de la thermo-dynamique d'un corps mobile donné, qui conduit, entre autres, à l'hypothèse de contraction de Fitzgerald et Lorentz. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. F. Heckel montre que la séparation difficile de la leucine et de la valline libres peut être améliorée par la cristallisation de leurs chlorhydrates. La leucine, oxydée par le perman- ganate, donne en partie de l’acide valérique de fermen- tation, en partie de l'acide normal. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H. Elsler : Le nectaire extra-floral et les papilles de la partie inférieure de la feuille du Diospyros discolor. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 28 Septembre 1907. 1° SCIENCES MAIHÉHATIQUES. — M. D. J. Korteweg pré- sente au nom de M. J. A. Barrau : L'extension de la con- figuration de Kummer aux espaces dè2? —1À dimensions. ah cd ba © de de caractères, par T, et T, les schémas “ie etre 3 = de : Si l’on représente par S, et S, les schémas signes, les combinaisons pp donnent les deux schémas : Fn abcd +++ + bade t + — + — cdab + + — — dcha + — — + En combinantsuccessivement chacune des quatre lignes de quatre caractères avec chacune des quatre lignes de quatre signes, on obtient seize quadruples de quan- tités algébriques qui représentent les coordonnées de points des seize sommets d’une configuration Cf(16,) de Kummer, ou, si l’on veut, les coordonnées tangentielles des seize faces d’une Cf{16,). L'auteur étend ce théo- rème connu, d’abord à l’espace à sept dimensions, de la manière suivante. Si l'on représente par U, et V, les schémas de caractères et de signes de quatre lignes que nous venons de composer, que U, et V, indiquent des systèmes analogues, dont U, contient les caractères d, 6, f, g et V, se déduit de V, par l'inversion des . : : 2 1] ] signes, la combinaison analogue des schémas Lie put Me à huit lignes mène à 64 octuples de quantités et coordonnées de points des 64 sommets d’une configu- ration Cf(64,,) de l’espace :,, ou comme les coordonnées tangentielles des 64 espaces :, d'une Cf(64,,). Comme les seize sommets de la configuration de Kummer se décomposent en quatre quadruples de sommets, les 948 sommets de quatre tétraèdres situés deux à deux en position de Môbius, les 64 sommets de la nouvelle CI(64,,) se décomposent dans les huit octuples de sommets de huit simplexes doués entre eux, deux à deux, de la propriété analogue. Extension à l’espace te. — M. P. H. Schoute présente au nom de M. L. Godeaux, de Morlanwelz (près de Mons) : Le théorème dé Grassmann dans l'espace à n dimensions. Le théo- rème de Grassmann : « le lieu d’un :, tel que les &, qui le joignent à trois e, fixes rencontrent trois e, lixes en trois :, d'un même «, est une variété V°, » de la Plani- métrie, dont la Stéréométrie connaît deux généralisa- tions différentes, est généralisé pour l'espace « par l'auteur, de la manière suivante : « Le lieu d'un &, tel que les &,+#+1 qui le joignent à k espaces &,, fixes Es © rencontrent Æ s, fixes en À &+s;+p-n+1 d'un même E SO; +s) +k@—n+?—1) U=172;71%);Restiune variété VESTE Da Application au système quadruplement infini des droites de l'espace &,. 20 Sciences PHYSIQUES. — M. J. D. van der Waals : Contribution à la théorie des mélanges binaires. NI. La ligne de plissement. La ligne de plissement est le lieu des points de plissement, des points où le mélange se trouve dans l’état de pli. Si les points de la surface de saturation sont déterminés par les coordonnées T, p, x, la ligne de plissement située sur cette surface est déterminée par ses projections p= fil), p= (x), x—f{T); si la surface est donnée en RTE ONE v—{{T), v—/(x), x=/{T). Ces équations sont liées par une relation p—g(x, v, TL). En éliminant T, on pourrait se servir de K(p, v, x)—0, etc. La forme la plus connue de la ligne de plissement est celle où le point origine coïncide avec le point critique de la pre- mière composante, le point terminal avec celui de la seconde composante. L'auteur s'occupe ici des pro- priétés des points singuliers de la courbe en question, en premier lieu des points doubles, dont il y à deux espèces bien différentes. En effet, un point double peut être le point d'apparition ou de coincidence de deux points de plissement homogènes, ou de deux points de plissement hétérogènes; cependant, les cri- tères mathématiques sont les mèmes. Températures maximum et minimum à la ligne de plissement. Autres points remarquables. Pression à trois phases; point terminal de cette pression à la ligne de plissement. Formes de la courbe en projection (p, T). — M. H. Ka- merlingh Onnes présente, en son nom et au nom de M. W. EH. Keesom: Contribution à la connaissance de la surface de van der Waals. XVI. Le coulage à fond de la phase gazeuse dans la phase fluide chez les mélanges binaires, dans le cas où les molécules de l’une des composantes n’exercent qu'une attraction faible. 1. Introduction. 2. La marche des phénomènes baro- tropiques. 3. Conditions sous lesquelles ces phéno- mènes se présentent.— Ensuite M. Kamerlingh Onnes présente, en son nom et au nom de M. J. Clay Ltemarques sur la dilatation du platine à des tempéra- tures basses. Dans la formule quadratique : al be n= (+5 + 1) et la formule cubique : de Scheel, AD CILE = 114 5 + qui t nn) ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de Benoit, les résultats sont : A— 8411107) af APTE b— 351 K Onnes et Clay (1905) de — 1830 à +160 contre a — 861,5 b=— 310 Scheel (1906); \ a!— 815,3 / à de — 1830 à + 800 4 b'— 31,6 $& Onnes et Clay (1905) Las \ contre (UE 874,9 de —1900 à + 4000 4b'— 31,41 & Benoit (1906). Cc'——6,9% \ 3° SEncEs NATURELLES. — M. H. Zwaardemaker : Sur les affinités des odeurs. La grande masse des odeurs et parfums qui se présentent dans la technique comme dans la nature se divise, d’après les opinions récentes, en neuf classes tiques, o. fragrantes, 0. de musc, 0. d'oignons, 0. em- pyreumatiques, 0. de capryle, 0. narcotiques, 0. nau- séeuses. L'auteur a choisi un représentant de chaque classe, se caractérisant par un caractère chimique bien déterminé et par la propriété de se prêter d'une manière assez simple à des recherches olfactométriques. En faisant le mélange de ces neuf substances deux à deux dans l’olfactomètre à double entrée, on obtient 36 combinaisons différentes; au lieu de mener à des mélanges d'odeurs, on remarque dans plusieurs cas que les deux odeurs se sont anéanties, ou bien qu'il y a « concours », c'est-à-dire qu'on aperçoit les deux composantes l’une après l’autre, alternativement. Mais aussi, dans ce dernier cas, les impressions sont irès faibles. Comme unité, l’auteur se sert de l’olfactie, la quantité minimale qui peut être reconnue par un organe normal. Ainsi l’auteur put étudier d'abord, pour . . . 1 chacune des 36 combinaisons, le quotient L des nombres d'unités pet q des deux substances donnant lieu à un mélange inodore ou « concourant ». Ensuite, il repré- sente, pour chaque combinaison, les deux composantes par des vecteurs égaux faisant entre eux un angle dont le cosinus est égal à £ (ou 1 pour p>q) et il ajoute quelques considérations sur des triples de vecteurs et des quadruples de vecteurs. — M. H. J. Hamburger Sur une méthode d'extraction des enzymes et des pro-enzymes de l'estomac et des intestins et la détermination de leur distribution. 1. Introduction principe de la méthode. 2. Les appareils. 3. Quelques expériences. Distribution de la pepsine sur les membranes muqueuses de l'estomac. Distribution du pepsinogène. Influence du temps de contact. Distribution du ferment de présure. Distribu- tion de l’entérokinase dans les intestins. Distribution de l'érepsine. Conclusions. — M. H. G. van de Sande Bakhuyzen : Notice nécrologique sur W. Koster, 1834-1907, depuis 1866 membre de l'Académie, de 1862 jusqu'à 1876 professeur d’Anatomie et de Pathologie à Utrecht. P. H. SCHOUTE. ——_——_————…——_—_————.——.——………—…———— IIY;Y;YF-F-F--QFN”N]NDNDNOO_—O——O—OT——————————………………… Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 0. éthériques, 0. aroma- 18° ANNÉE N° 23 15 DÉCEMBRE 1907 Revue générale des NCICICES pures el appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions scientifiques Les Médailles de la Société Royale de Londres. — Dans sa séance anniversaire annuelle du 30 novembre, la Société Royale de Londres à pro- cédé ainsi qu'il suit à la remise de ses médailles : Médaille Copley : Prof. A. A. Michelson, de Chicago, pour ses travaux sur l'Optique ; _ Médailles Royales : M. E. W. Hobson, recherches mathématiques, et M. R. H. Traquair, pour ses découvertes relatives aux poissons fossiles; Médaille Davy : M. E. W. Morley, pour ses travaux physico-chimiques, en particulier sa détermination des poids atomiques relatifs de l'oxygène et de Fhydrogène ; Médaille Bachanan : M. W. H. Power, pour les ser- vices qu'il a rendus à la science sanitaire ; ; Médaille Hughes : M. E. I. Griffiths, pour ses contri- butions aux mesures physiques exactes ; Médaille Sylvester : Prof. W. Wirtüinger, de Vienne, pour ses contributions à la théorie générale des fonc- tions. pour ses Elections à la Société Royals des Sciences d'Upsal. — La Société Royale des Sciences d'Upsal, une des plus anciennes académies des pays du Nord, fondée en 1710, vient de procéder à l'élection de deux membres étrangers dans la Section Physico-Mathéma- tique. Ont été élus: M. George E. Hale et M. Léon Teis- serenc de Bort. M. G. Llale est le directeur et l'organisateur du Solar Observatory que la Carnegie Institution, de Washing- ton à fondé depuis deux ans sur le mont Wilson en Californie, dans une région dont le climat, rappelant celui du Sahara algérien, est très favorable aux recher- ches d'Astronomie physique. Les travaux du célèbre astronome américain ont porté surtout sur la Physique solaire et stellaire et sur la Spectroscopie en général. La plupart ont été exécutés au Yerkes Observatory, qu'il a dirigé jusqu'en 1905; ils lui ont valu les médailles Janssen, Rumford et Draper. M. Léon Teisserenc de Bort, directeur de l'Observa- toire de Trappes, a été le collaborateur de M. Mascart dès la fondation du Bureau Central Météorologique en 1878. Il s'est fait connaître d'abord en trouvant la REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. | loi dite des isonomales, qui relie la répartition moyenne de la pression barométrique à celle de la température sur le Globe. Il à introduit en Météorologie la notion des « centres d'action », d'un usage général aujour- d'hui, et a publié un grand nombre de Mémoires sur la Physique du Globe. Depuis douze ans, il s’est consacré plus particulière - ment à l'étude de l'atmosphère libre et de la circulation générale atmosphérique. Ses sondages aériens par ballons-sondes, exécutés tant à Trappes qu'en diverses régions du Globe, lui ont permis de prouver l'existence d'une partie de l'atmosphère dite « zone isotherme », où la température cesse de décroîitre quand on s'élève. Il a montré que, par cela même, on est assuré qu'il n'y à pas de courants à composante verticale notable dans cette zone et qu'ainsi elle nous indique la limite supérieure atteinte par les cyclones et anticyclones, ces phénomènes étant caractérisés par une variation de température voisine de l'état adiabatique, causée par les mouvements verticaux de l'air dans ces tourbillons. Les autres savants français faisant partie de la Classe Physico-Mathématique sont, par ordre de nomination: M. Poincaré, élu en 1885; M. Mascart (1886); M. Pi- card (1898); M. Darboux (1900); M. Painlevé (1903); M. Lippmann (1906). $ 2. — Nécrologie Maurice Læœwy.— Après Tisserand, Callandreau, Prosper et Paul Henry, tous les quatre enlevés à la science par une mort subite, le directeur de l'Observa- toire de Paris vient, à son tour, de disparaître brusque- ment, au moment où l’on s'y attendait le moins. Cette fin soudaine d'un homme dont le nom a brillé d’un vif éclat dans l'Astronomie française sera profondément ressentie dans tous les pays civilisés. Maurice Læwy est né à Vienne (Autriche), le 15 avril 1833. Il fit ses études à l'Ecole Polytechnique, puis à l'Observatoire de cette ville, et y acquit ses premières connaissances astronomiques. S'étant fait remarquer calculs d'éphémérides, des déterminations observations équatoriales, il attira 1860), qui lui proposa d'entrer par des d'orbites et des l'attention de Le Verrier à l'Observatoire de Paris. 23 950 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Ne pouvant suivre la carrière astronomique en Autriche, à cause de l'intolérance religieuse qui régnait alors dans ce pays, Læwy accepta l'offre de Le Verrier et vint prendre en France une part active aux services de l'Observatoire. Il ne tarda pas à se faire natura'iser Français et se livra tout entier, dans sa nouvelle patrie, au culte de la science qu'il préférait. En 1873, Læwy a succédé à Delaunay à l'Académie des Sciences. Son œuvre comprenait, à cette époque, en dehors des observations courantes, la détermination des longi- tudes de Vienne, de Berlin, de Marseille et d'Alger, par rapport à Paris, et des recherches sur le calcul des orbites. Il avait également eu l'idée de l'équatorial coudé, qui supprime le déplacement de l'observateur au moyen de deux réflexions; mais il ne put la réaliser qu'en 1882, grâce à la libéralité de Raphaël Bis- chofsheim. C'est surtout à dater de l'époque de son entrée à l'Académie que les travaux de Lœæwyÿ ont acquis un caractère d'originalité tout à fait remarquable. Appelé à s'occuper de questions relatives aux mesures de pré- cision, à l'Observatoire, il s’attacha à perfectionner les méthodes d'observation, qui étaient restées station- naires depuis Bessel, et leur fit faire des progrès qui seront difficilement dépassés. Il étudia notamment les déformations des lunettes méridiennes, provoquées par la rigidité insuffisante des matériaux de construction. Il imagina, dans ce but, un dispositif optique, extrèmement insénieux, fournissant simultanément, dans le plan du micromètre de ces lunettes, des images de l'objectif et du micromètre lui-même. Il résolut complètement, en comparant les positions de ces images, Le problème si complexe de la mesure de la flexion astronomique à toutes les hauteurs, problème d'une importance capitale pour l'Astronomie de position. On lui doit également des méthodes fondées sur l'observation des circumpolaires à une grande distance du méridien, pour la détermination des coordonnées absolues des étoiles, méthodes qui ont révolutionné les anciens moyens de mesure et permettent d'obtenir les positions de ces astres, avec un degré d’exactitude que l'on ne pouvait espérer atteindre autrefois qu'au prix des plus patients elforts. La recherche directe de la constante de l’aberration, par des moyens ne nécessitant pas la connaissance des autres constantes astronomiques, est un des pro- blèmes dont Læwy est venu à bout de la façon la plus remarquable, en|mesurant, à six mois d'intervalle, la variation de la distance angulaire de deux étoiles rendues visibles, dans une même lunette, par des réflexions sur un double miroir, d'angle constant. Le même dispositif se prête à l'étude expérimentale de la réfraction astronomique à toutes les hauteurs, étude qu'il était impossible d'aborder auparavant, sans recourir à des considérations théoriques assez incer- taines. Læwy a consacré de longues années à la photographie de la Lune, et ses recherches sur cet astre, en commun avec M. P. Puiseux, ont été des plus fécondes. Grâce à des efforts ininterrompus pour améliorer sans cesse les résultats obtenus, grâce aussi à un moyen d'entrai- nement particulier de la plaque sensible et aux qualités exceptionnelles de stabilité du grand équatorial coudé, les cartes magnifiques, produites au foyer de ce bel ins- trument, ont acquis un degré de perfection tel que la surface visible de notre satellite est aujourd'hui mieux connue dans son ensemble que celle du Globe même où nous vivons. La discussion des épreuves a conduit à des résultats pleins d'intérêt sur la formation de son écorce et tout particulièrement des cratères. Par ses méthodes, Læwy a complètement transformé les moyens d'action de l'Astronomie de haute précision. Le couronnement de son œuvre, dans cet ordre d'idées, a été la découverte d’un nouveau mode opératoire pour déterminer les erreurs de division d’un cercle gradué, .réfléchissait sans cesse aux moyens de tourner l’obstacl dans des conditions de sécurité inconnues auparavani et avec une somme d'efforts réduite au minimum. Il venait de signer le dernier bon à tirer du Mémoire qu'il a écrit sur ce sujet, lorsque la mort est venue } surprendre. Ce grand astronome rencontra souvent des difficultés dans le cours de ses recherches; mais il n’était pas homme à jamais se rebuter. D'une extrême ténacité, il qui l’arrêtait et ne s’avouait jamais vaincu. Il possédait. la grande force de n’entreprendre qu'un seul travail à la fois et de concentrer ses facultés intellectuelles sw une idée unique, laissant de côté toutes les préoccupa: tions qui auraient pu l’en distraire. Membre du Bureau des Longitudes depuis 1872, e spécialement chargé de diriger la rédaction de la Con- zaissance des Temps et de l'Annuaire, pour la partie astronomique, Læwy fit subir de grandes améliorations à ces recueils, qu'il laisse aujourd'hui universellement, appréciés. Directeur de l'Observatoire de Paris depuis 1896, après la mort de Tisserand, il s’attacha à développer l'initiative du personnel placé sous ses ordres, et favo= risa les recherches originales des astronomes. Il donnait lui-mème l'exemple de l’assiduité aux observations, se dépensant aux heures avancées de la nuit, sans songer au repos. Il a imprimé une impulsion vigoureuse à tous. les services de l'Observatoire. C'est grâce à son initiative ef à son autorité univer- sellement respectée qu'une entente internationale s'établit, entre tous les astronomes, au sujet de l'obser- vation de la planète Eros, dans le but d'obtenir une nouvelle valeur très précise de la parallaxe solaire. IL prit en main la direction de l’entreprise et assuma le fardeau de la rédaction des nombreuses circulaires qu'il fallut répandre dans les deux hémisphères, pour assurer la coordination des efforts et l'unification de méthodes de réduction des mesures. Foncièrement bon et bienveillant avec chacun, esprit juste et clairvoyant, homme d’une bonhomie exquise, Læœwy laisse après lui, dans l'Etablissement auquel il n'a cessé de faire honneur, le souvenir d'un caractère élevé et d'une vie entièrement consacrée au développe= ment de l’Astronomie. Maurice Hamy, Astronome titulaire à l'Observatoire de Paris? $ 3. — Astronomie La variabilité des petites planètes. — Parmi les nombreux problèmes soulevés par l'exa- men des petites planètes, il en est un sur lequel nous n'avons que des données très incertaines : c’est celui den leur variabilité. Le fait que ces astres minuscules changent très vite d'éclat, dans certains cas, parait maintenant hors de doute. On peut citer la planète Iris, par exemple, qui varierait d'un quart de grandeur en quatre heures; d’après le D' Clemens, ou en six heures, d'après Wen= dell ; Economia, dont l'éclat augmente ou diminue de 4/10° de grandeur en 9 j. 1267. Tout le monde connaît les variations d'Eros, qui, au début de la découverte, ont tant intrigué les astronomes. Quelle que soit l'explication qu'on en donne, on se trouve en présence d’un fait bien constaté. Il faudrait, pour résoudre le problème, des documents à l'abri de toute cause d'erreur, et jusqu'à ce moment nous devons avouer qu'il était difficile d'éliminer l'équation person= nelle ou même les variations d'ordre atmosphérique. Aussi les astronomes apprécieront-ils la méthode imaginée par M. Joel Metcaff. Celui-ci photographie une petite planète en faisant deux expositions d'égale durée sur la même plaque ; la chambre noire est guidée de façon que les images de l'astéroide soient rondes; tandis que les images des étoiles voisines se montrent sous forme de traits. Si les deux ordres de traînées stellaires sont exactement semblables sur tout le parcours, on a la certitude que la marche de l'horloge CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 951 -et les conditions atmosphériques n'ont pas varié au -cours de l'opération. Dès lors, si les deux images de d'astéroïde n'ont pas le même éclat, on a la preuve d'une variation. M. Metcalf a tenté l'expérience sur la petite planète 4906 WE. Une plaque a été exposée le 6 novembre 1906 . pendant une durée de soixante et onze minutes en deux fois, l'intervalle des deux poses étant d'une minute ‘environ. On à pu ainsi constater pendant toute la durée une variation considérable réelle. La méthode est d'ail- . leurs susceptible de perfectionnements, mais on peut dire que, dès maintenant, elle pourra rendre de réels services au point de vue de la documentation. Le passage de Mereure sur le Soleil du 14 novembre 1907. — Nous avons recu de M. J.-J. Landerer, astronome à Valence (Espagne), la commu- nication suivante : « À Valence, par un temps superbe, j'ai observé le dernier passage de Mercure devant le Soleil, ayant pu remarquer que la planète se détachait -comme un disque parfaitement rond, plus noir que les moyaux des taches qui existent actuellement, « Je crois intéressant de signaler qu'aucune trace -d'atmosphère autour de la planète n’a pu être perçue, les champs de granulation photosphérique qu'elle envahissait n'ayant pas subi la moindre déformation apparente, comme il serait arrivé pour des rayons tra- versant un milieu transparent. Pour en avoir une com- plète certitude, j'ai employé des verres noirs de tons et d'intensités différents. « Aucun point brillant n'a été observé en dedans du disque, et pas de ligament noir à l’approche des con- tacts intérieurs. J.-J. Landerer. » 8 4. La télégraphie sans fil sur les navires de commerce. — Pour la première fois, une installation radio-télégraphique française à été inaugurée sur un navire n'appartenant pas à notre marine de guerre. et c’est au paquebot-yacht //e-de-France, parti le 10 sep- tembre dernier de Marseille pour effectuer la croisière en Grèce de la Revue générale des Sciences, que revient l'honneur de cette innovation. La Compagnie transatlan- tique à bien à bord de ses navires des installations de -ce genre; mais, comme elle utilise exclusivement des appareils Marconi, défense lui à été faite par la Com- pagnie Marconi de communiquer avec d'autres appa- reils que les siens. Zle-de-France est donc le premier navire de commerce francais communiquant, par la télégraphie sans fil, avec les postes côtiers de l'Admi- nistration des Postes et Télégraphes. Ce paquebot a pu, dès le 10 septembre, en rade de Marseille, recevoir des dépêches venant de la tour Eiffel -et du poste de la Marine française établi à Agde, et, dans la nuit du 40 au 11, communiquer avec la station -de Porquerolles appartenant aux Postes et Télégraphes. Cette installation, du système Octave Rochefort, fonctionne maintenant d'une facon régulière à bord d’Lle-de-France et permet d'échanger des dépèches avec des stations radio-télégraphiques de tous les systèmes. Les longueurs des ondes émises sont de 300 mètres : la réception se fait, soit au son, soit sur bandes écrites en caractères Morse. L'antenne, en forme de T,se com- pose d'une grille horizontale tendue entre les deux mâts et qui est reliée à la cabine de l'opérateur par autant de fils qu'il y a de barreaux, fils se réunissant à. la sortie de l'antenne du toit. Il a été reconnu que là réception au son était plus sensible, le télégraphiste entendant dans un récepteur téléphonique les sons émis par l'expédition des points et des traits de la dépèche en signes de l'alphabet Morse. Ces installations radio-télégraphiques ne tarderont certainement pas à se multiplier à bord des navires de commerce français, d'autant plus que, de son côté, TAdministration des Postes et Télégraphes a projetéet — Électricité industrielle a même commencé à installer de nouveaux postes de télégraphie sans fil en France et aux Colonies. C'est là une innovation dont on ne peut que suivre avec intérêt les résultats. $S 5. — Agronomie Applications de l'électricité à la culture. — L'Electricien rend compte d'expériences très intéres- santes faites en Angleterre par M. Newman sur le traitement des plantes par l'électricité. ‘Cette question avait déjà été étudiée au xvure siècle par Noblet, qui avait cherché le moyen d'utiliser les courants électriques pour développer la végétation, M. Newman, reprenant celte idée, à fait à Bitton, près de Bristol, à Gloucester et à Bevington Hall, près d'Eversham, une série d'essais, dont les résultats sont un premier pas fait dans le domaine des applications pratiques. C’est en 1904 que les premières expériences furent faites à Bitton au moyen d'une machine Wims- hurst actionnée par un moteur à pétrole, l'un des pôles étant en communication avec la terre et l’autre avec des fils conducteurs placés à 0%,40 au-dessus des plantes soumises à l'essai. Ces conducteurs portaient, de distance en distance, d'autres fils se terminant en pointes dirigées vers le sol et d'où s’échappait cons- tamment le fluide électrique, de facon à influencer les plantes placées à leur portée. Les expériences durèrent 108 jours, la machine marchant plus de neuf heures par jour : pendant deux mois, elle marcha principale- ment la nuit. Des plantations de contrôle, non soumises à l’in- fluence de l'électricité étaient placées dans des con- ditions identiques à celles des plantations expéri- mentées : la surface totale de ces deux catégories de plantations était d'environ 100 mètres carrés. Par la comparaison des récoltes, on put se rendre compte que le traitement électrique augmentait le rendement de la plupart des cultures dans des proportions très notables : pour les fraisiers, cette augmentation atteignait jusqu'à 80 °/,. Pour certaines plantes, telles que les haricots, il y avait une légère diminution de rendement, mais la récolte pouvait se faire plus tôt. A Gloucester, en employant des tensions plus élevées eten plaçant les pointes à 12,50 au-dessus des plantes, M. Newman put faire d'autres constatations non moins intéressantes. Il a pu notamment établir que, soumises à l'influence de l'électricité, les betteraves présentaient une augmentation de rendement de 43 °/, : leur pro- portion de sucre était portée à 8,8 °,, alors que, dans les betteraves non électrisées, elle n'était que de 7,7°/,. Certains autres légumes ont donné jusqu'à 50 °/, d'aug- mentation. Comme ces premières expériences ne portaient que sur des étendues de terrain relativement restreintes, M. Newman a voulu les appliquer sur une plus grande échelle, et, pour cela, il les a renouvelées, à Bevington Hall, sur un champ de 16 hectares ensemencé en blé anglais et en blé du Canada. L'augmentation de rende- ment du premier a été de 290/, et celle du second de 39°/,. De plus, l'électrisation à paru exercer une bonne iafluence sur la qualité de la farine, et, pour cela, le prix de vente des blés électrisés à été supérieur de 7 1/2°/, à celui des blés non éléctrisés. Ces essais ont été faits avec le courant à haute tension fourni par une bobine d'induction. Des poteaux, distants de 70 mètres et disposés par rangées espacées de 100 mètres, supportaient les fils conducteurs, main- tenus à une hauteur de 4%,55 par des isolateurs. Des fils minces en fer galvanisé, distants les uns des autres de 12 mètres, reliaient entre eux les fils conducteurs de deux rangées différentes et servaient à l'écoulement de l'électricité. Cette influence du fluide électrique sur les plantes a été également expérimentée en France. Un électricien de Troyes, M. Knap, qui a fait édifier récemment une maison électrique, où tout est mûù par l'électricité et 952 qui attire chaque jour un grand nombre de curieux, à installé devant cette maison une puissante lampe à arc envoyant des rayons lumineux intenses dans un jardin potager attenant à son habitation. On a pu constater que les plantes soumises à l'action de ce soleil électri- que avaient une végétation beaucoup plus vigoureuse que celles qui étaient soustraites à cette action. La théorie de ces faits n'est pas des mieux définies, et, d'autre part, il ne semble pas que, maintenant, les accroissements de rendement compensent suffisamment les frais d'installation. Néanmoins, les faits sont démontrés, et c'est un résultat assez intéressant pour que l'attention se soit portée vers les expériences de M. Newman et les autres expériences analogues. $S 6. — Sciences médicales Robert Koch etla maladie du sommeil. — Le Professeur Robert Koch, que le Gouvernement Alle- mand avait chargé, en avril 1906, d'aller en Afrique étudier la maladie du sommeil, vient de rentrer en Allemagne *. Malgré ses soixante-trois ans, le célèbre professeur avait accepté cette Mission, et, en compagnie de sa femme et de son assistant, il se rendit à Umani, où un séjour de quelques semaines fut consacré aux études théoriques préliminaires sur la maladie du sommeil. Cette dernière, encore désignée sous le nom de léthargie africaine, à cause de l’un de ses caractères les plus saillants, présente une aire de distribution assez bien délimitée. Elle paraît être, en effet, l'apa- nage des régions tropicales de l'Afrique. Comme la malaria et la fièvre Jaune, la léthargie africaine est une maladie endémo-épidemique, c'est-à-dire particu- lière à certaines régions et sévissant sur un grand nombre d'individus à la fois. Elle éclate parfois d’une facon soudaine dans des localités qu'elle paraissait avoir abandonnées, et y décime en peu de temps la population. Ses ravages sont tels que, devant ce fléau, les indigènes fuient et abandonnent leurs villages. : On sait que la maladie du sommeil est due, comme les autres affections infectieuses et transmissibles, à la présence d'un parasite ou germe, évoluant sur un térrain spécial, l'organisme humain. Du conflit du geñme et du terrain résultent des troubles morbides que se traduisent par des symptômes oaractéris- tiques ?. La maladie du sommeil rentre dans le cadre des « maladies à trypanosomes », espèce de long bacille à volute membraneuse, se développant dans le sang et le liquide céphalo-rachidien. On sait quelles autres affections redoutables engendrent ces parasites. Le trypanosome de l'homme est inoculé par la piqûre d'une mouche, proche parente de la tsétsé du Nagana Glossina palpxlis), delà grandeur de nos mouches ordinaires, facile à reconnaître, car, lorsqu'elle se repose, elle croise les ailes; elle vit sur des buissons d’où elle ne s'éloigne guère. Selon M. Koch, le sang des crocodiles constitue la principale nourriture de la mouche, qui sucerait le liquide entre les plaques. Il y à une relation constante entre la présence des crocodiles et l'existence de la maladie du sommeil, Comme il est impossible d'exter- miner la mouche elle-mème, il faut s'efforcer de faire disparaitre les crocodiles et de détruire les buissons et les souterrains où ils se tapissent. M. Koch a essayé d'empoisonner ces animaux avec de la viande préparée, mais 1] à eu beaucoup de peine à empêcher les indi- gènes de manger leurs cadavres. La maladie du sommeil fut introduite dans l'Ou- ganda par les Soudanais d'Emin Pacha, il y a six ans; depuis, environ 200.000 individus en sont morts Le Professeur Koch, avant appris que des symptômes 1 Strasshurger Post, 5 novembre 1907. ? I. MaxoouL: Science au xx°siècle, 1903, 4904. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE de la redoutable maladie avaient été constatés à la Station allemande de Muansa (Lac Victoria), S'y ren- dit, mais il put se convaincre que la nouvelle était inexacte. Les îles Sésé, possession anglaise au nord du la Victoria, sont le siège principal de la maladie du som- meil. Sur la plus grande de ces iles, Robert Koch éla= blit son campement en deux stations. La première, composée du D' Kudicke, médecin militaire des troupes coloniales, et du D' Beck, con- seiller ministériel, fut casée chez les Pères blancs et s'occupa du soin des malades. La seconde était formée par Robert Koch, son assis- tant le Professeur Kleine et le sergent-major Sacher, chargé des listes et de l'alimentation des malades et des bêtes servant aux expériences. Robert Koch et ses compagnons campèrent pendant plus d’un an sous des tentes, par-dessus lesquelles on avait encore construit un toit en herbages, destiné à les protéger contre les intempéries et surtout contre les pluies torrentielles qui tombent pour ainsi dire sans discontinuer. Entre les tentes d’habitalion, on en dressa deux autres pour les travaux microscopiques, une pour les autres travaux scientifiques, une pour la photographie ; on construisit, en outre, une baraque en herbages, où se firent les pansements; on entoura le tout d'une clôture. La matinée était employée aux soins des malades, aux ponctions et préparations, tandis que les travaux microscopiques absorbaient l'après-midi. La présence et les bienfaits de Koch fureut bientôt connus aux alentours du campement; aussi plus de 2.000 malades vinrent-ils implorer les secours du savant. — Un fait frappa Koch: Beaucoup de ces indi- gènes venaient du district allemand de Bukoba, et cependant aucun indice de la maladie du sommeil n'y avait été relevé. Etonné de ce fait, Koch s'y rendit et trouva environ 400 malades ; ces derniers, ayant émi- gré sur territoire anglais pour y gagner de l’argent, y avaient été contaminés et revenaient malades. Il estun fait non moins curieux: c'est que tous les indi- gènes — sans exception — s'occupant de la récolte du caoutchouc sont infailliblement infectés. Aussi le Sultan des îles Sésé,a-t-il interdit ce genre de travail à ses sujets. C'est dans le département allemand de Schirati que la présence de la mouche redoutable paraît le plus à craindre; elle menace très sérieusement les districts d'Ouganda et du Muansa, ainsi que la populeuse île d'Ukerewe avec ses 40.000 âmes. Robert Koch obtint des résullals merveilleux en injectant aux malades de l'atoxyl, mélange d'acide arsénieux et d'aniline. Ce trailement est reconnu comme étant le plus efficace, carilfaitdisparaitrerapi- dement les trypanosomes, ces parasites des corpus- cules sanguins. 11 y a lieu de croire que les indigènes traités de la sorte seront désormais complètement à l'abri de la maladie du sommeil: mais, même en €as de rechute, l'atoxyl sera, jusqu'à nouveau progrès, le seul remède sérieux. Pour combattre efficacement et ralionnellement la maladie du sommeil, il faut tâcher de reconnaitre au plus tôt les malades et de les isoler. Dans certaines contrées, il sera nécessaire d'isoler des populations entières. L. et F. Blumstein. S 7. — Géographie et colonisation La question d'Abyssinie et le chemin de fer de Diibouti. — Malgré les nombreuses descriptions dont elle a été l'objet, l'Abyssinie est encore fort mal connue. Son climat est à peu près agréable et sain, principalement aux altitudes élevées où la vie s'est concentrée. Le sol est fertile, et, par la combinason d'une latitude sensiblement équatoriale et d'un relief très accentué, les plantes les plus variées de la zone tropicale et de la zone tempérée se superposent Jus- ; 4 É | = * TT LD LES CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 953 qu'à la région des pâturages, qui dépasse 4.000 mètres. Les richesses minières sont à peine soupçonnées : on sait seulement qu'il y à de l'or et du fer; l'industrie indigène n'a pas dépassé un état très rudimentaire. Il n'y à point d'art abyssin. En l'absence de statistiques commerciales, on évalue l'importation à 8 millions et demi de francs: elle est faite surtout de cotonnades américaines. L'exportation, d'une valeur sensiblement égale, se compose de peaux de chèvres, de café, de cire, d'ivoire, de civette et d'or. Ainsi, l'Abyssinie est bien, au plein sens du mot, un pays neuf. On comprend dès lors que les convoitises quil éveille naturellement aient pu donner naissance à des intrigues diplomatiques et à des manœuvres de la part de groupes financiers. La « question » d'Abys- sinie a été soulevée à propos du chemin de fer de Djibouti‘. La voie qui doit relier ce port à Addis- Abeba a été concédée, en 1894, à M. Ilg, ingénieur suisse, conseiller de Mélénick, et à un de nos compa- triotes, M. Chefneux, qui en ont fait une entreprise française, que notre Gouvernement subventionne. Les premiers travaux furent entrepris en 1897. Depuis dé- cembre 4902, le chemin de fer est terminé sur une longueur de 310 kilomètres; il a traversé la bande désertique et s’avance sur le premier plateau abyssin jusqu'à Diré-Daoua, à 55 kilomètres de Harrar, et à mi-chemin entre la côte et Addis-Abeba. Sans doute, et dans l’état actuel de la ligne, il reste encore pour atteindre la capitale une vingtaine de jours pour les voyageurs, un mois et plus pour les marchandises; mais, étant donné que l'Abyssinie n'a pas accès à la mer, qu'elle ne dispose d'aucune voie navigable, et que tout jusqu'ici se transporte à dos de mulet ou de chameau, le chemin de fer de Djibouti représente la première voie facile ouverte au commerce extérieur éthiopien. C’est dire le rôle qu'est appelée à jouer, de ce chef, la magnifique escale que nous possédons sur la route d'Extrème-Orient. Djibouti est un port admirablement abrité, qui a sur Aden la supériorité de posséder de leau douce en abondance. Quelques chiffres montreront l'heureuse influence du chemin de fer sur son développement. De 1901 à 1906, le mouvement commercial de Djibouti est passé de 13 millions et demi à 34 millions, soit en six années une augmentation de 265 °/,. Dans le même espace de temps, le tonnage du port a monté de 360.000 tonnes à 600.000 tonnes, et les recettes doua- nières sesont élevées de 120.539 francs à 441.976 francs. Les tentatives d'« internationalisation » de la ligne, auxquelles nous faisions allusion plus haut, n’ont heu- reusement pas abouti. Un arrangement, signé à Londres le 13 décembre 1906 par la France, l'Italie et l'Angle- terre, garantit l'indépendance de l'Ethiopie et consacre au chemin de fer de Djibouti à Addis-Abeba son carac- tère d'entreprise française. L'Angleterre et l'Italie se réservent le droit d'établir des lignes semblables dans leurs zones respectives d'influence; leurs nationaux jouiront, en outre, pour les questions de commerce et de transit, du même traitement que les négociants francais, à la fois sur le chemin de fer et dans le port terminus. Cette liberté commerciale est d'ailleurs une des conditions nécessaires à la prospérité de la ligne et au développement de Djibouti. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. $ 8. — Enseignement Le nouveau doyen de la Faculté de Méde- eine de Paris. — Les professeurs et agrégés de la Faculté de Médecine de Paris se sont réunis le 21 no- 4 Cf. Lieutenant-colonel Péroz: Le chemin de fer éthio- pien et le port de Djibouti, avec { carte. Bulletin du Comité de l'Afrique française, mars et avril 1907. vembre pour désigner un successeur à M. Dehbove, dont le décanat prend fin le 15 décembre. M. Landouzy, membre de l'Académie de Médecine, professeur de Clinique médicale, à été présenté en première ligne par 57 voix sur 63 votants. M. le Profes- seur Pouchet a été présenté en seconde ligne par le même nombre de voix. , Né à Reims en 1845, M. Landouzy fut nommé médecin des Hôpitaux en 4879, Agrégé en 1880 et Pro- fesseur de Thérapeutique en 1893. Personnel universitaire. — M. Jules Gautier, Inspecteur général de linstruction publique, est nommé Directeur de l'Enseignement secondaire, en remplacement de M. Rabier, nommé Conseiller d'Etat. M. Payot, Recteur de l’Académie de Chambéry, est nommé Recteur de l'Académie d'Aix. M. Cauteret, Inspecteur d'Académie à Marseille, est nommé Recteur de l'Académie de Chambéry. M. Camichel, Docteur ès Sciences, Maître de Confé- rences de Physique à la Faculté des Sciences de Tou- louse, est nommé Professeur de Physique industrielle à ladite Faculté (Fondation de la Ville de Toulouse). La Bibliothèque Carnegie à Edimbourg. — On sait que M. Carnegie, le célèbre industriel américain, s'étant demandé quel était le plus beau cadeau à faire à un peuple, avait donné à la ville d'Edimbourg, en 1886, 12.500.000 francs pour construire une bibliothèque à l'usage de tous. Depuis, l'expérience ayant donné de bons résultats, M. Carnegie a multiplié les fondations de « librairies », estimant, à juste titre, que ces institutions sont des plus efficaces pour combattre l'alcoolisme engendré souvent par les stations au cabaret, seul endroit où le pauvre puisse se réfugier à ses moments de loisir. La Bibliothèque d'Edimbourg est composée de deux étages. Le tout est confortable, sans luxe, mais avec toute la netteté du goût anglais : escaliers bitumés, murs recouverts de faïence, parquet des salles recou- vert de linoleum épais qui étouffe le bruit des pas; et tout se lave. Le bois des meubles est lisse. A l'entrée, pas un gardien, nulle consigne; sur le fronton, ou lit : « Public et libre »; pas de vestiaire obligatoire. Seul un tourniquet enregistre le nombre des entrées. La Bibliothèque est divisée en deux parties : de lecture et la salle de prêts. La salle de lecture comprend deux sections : les revues et journaux (400 revues, 32 journaux, dont un, le Scotsman, en sept exemplaires, des indicateurs de chemins de feret de bateaux, des prospectus, des plans, des guides, ete.), et les livres. Dans cette section, pas de romans; mais des ouvrages de Géographie, d'Histoire, de Voyages, de Sociologie. La salle de prèts est au-dessus. Le catalogue, qui coûte 60 centimes, a 600 pages et contient 52.310 numé- ros. On prète 345.670 volumes par an. Tous ces volumes sont en bon état: dès qu'ils se salissent ou se détlério- rent, on les remplace. Cette bibliothèque est ouverte de 9 heures du matin à 10 heures du soir, sauf le dimanche. Enfin, une section particulière — la /teference Li- brary — contient plus de 60.000 volumes que l'on con- sulte seulement; un catalogue sur fiches est à la dispo- sition du public. Cette organisation se complète par une bibliothèque de prèts à domicile, qui comprend une bibliothèque centrale et cinq succursales, avec un tolal de 101.000 yo- lumes. L'entretien et l'achat deslivres coûtent annuellement 500.000 francs. Avec de telles ressources, on concoit aisément que les résultats obtenus aient été satisfaisants. la salle TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D’ARCHIMEDE (RESTITUTION D'APRÈS UN MANUSCRIT RÉCEMMENT DÉCOUVERT) TEXTE DU TRAITÉ (Suite et fin.) (THÉORÈME XI-XIV). Si, dans un prisme droit à bases carrées, on inscrit un cylindre ayant ses bases inscrites dans les carrés opposés el sa surface latérale tangente aux plans des 4 faces latérales du prisme, un plan passant par le centre du cercle de base et Pun des côtés du carré opposé délachera du cylindre un volume* qui sera le sixième du volume total. Nous allons d'abord établir cette proposition par la méthode susdite [XI, XIT, XIII}, puis procéder à la démonstration géométrique proprement dite [XIV]. (XI). Soit donc un cylindre inscrit dans un prisme à bases carrées. Coupons le prisme par un plan passant par son axe et perpendiculaire au plan T2B ‘fig. 12) qui a détaché le sabot de cylindre. Ce plan coupera le prisme circonscrit (fig. 13) suivant le rectangle AB et le plan sécant suivant la droite Br. Soit FA l'axe commun du prisme et du cylindre, EZ une droite qui lui soit perpendiculaire en son milieu (@); par EZ menons un plan (horizontal) perpendiculaire à VA. Sa section dans le prisme sera un carré MN (fig.1%),et dans le cylindre un cercle ZOTIP, tangent aux côtés du carré aux points &, O, II, P. Le plan sécant et le plan horizontal mené par EZ se coupent suivant la droite KA, que le diamètre HOZ al 4 Voir la première partie du Traité, avec l'introduction de M. P. Painlevé et la Notice préliminaire de M. Th. Rei- nach, dans la Revue du 30 novembre 1907, t. XVIL, p. 911 et suivantes. * Ce «sabot» ou «onglet» a pour faces : 19 une portion de la surface cylindrique: 2° un demi-cercle; 39 une demi- ellipse (intersection d'un cylindre par un plan oblique). coupe en son milieu. Dans le demi-cercle OIEP, menons une droite quelconque ZT perpendiculaire à ce diamètre et à une distance TX de Il; par Fig. 13. cette droite, faisons passer un plan (vertical) per— $ pendiculaire au diamètre IIZ et prolongeons-le de M part et d'autre du plan (horizontal) £ZOIP. Ce plam | ! P N (Q] A — qui à pour base le demi-cercle OIP et pour hauteur l'axe du prisme — une section en forme de rectangle dont un côté (horizontal) = XT, et l’au- tre côté (vertical) = l'axe du cylindre; % dans le sabot de cylindre, un autre rectangle dont un côté (horizontal) = ZT, l’autre (vertical) = NY, NY + M 0 Fig. 14. (vertical) déterminera : 1° dans le demi-cylindre- étant une parallèle à BQ, menée dans le rec- | « TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE 955 tangle AB (fig. 43), à une distance IE (de BQ) égale à XIE Puisque ET est un rectangle et NI, @F des paral- lèles coupées par EO, BF, on à : re _or _ 98 CDN RENNES Or, le rectangle déterminé dans le demi-cylindre est au rectangle déterminé dans le sabot comme QB est à YN : car leurs deux autres côtés sont égaux à ET. On à donc : rect. du 1/2 cyl._ QB EO O@E rect. du sabot YN OIMOX Supposons donc le rectangle du sabot suspendu en dessous du plan OZTIP. Chacun de ces plans pro+ duira : 4° dans le demi-cylindre qui a une base égale à OIP et une hauteur égale à l'axe une section en forme de rectangle, dont un côté égale KE (ou TZ) et l'autre égale l'axe; 2° dans le prisme triangulaire QHM une autre section rectangulaire, dont un côté égale AX (ou Y®) et l'autre égale l'axe. [Considérons la paire de rectangles égaux AX, Yd du prisme, d'une part, et les rectangles eorres- pondants XK, ZT du demi-cylindre, d'autre part. Tous ces rectangles ayant même hauteur, leurs aires H P N Æ, ce point étant son centre de gravité, et IE un levier dont le milieu fixe est @. Le rectangle du demi-cylindre ayant (lemme V) pour centre de gra- v YS da) co #o € S 66e a LIBRARM vité X, l'égalité susdite signifie que les distances des deux centres au point fixe sont inversement pro- portionnelles aux aires des rectangles, et par con- séquent que les deux rectangles s'équilibrent par rapport à ©. On démontrerait de même, pour toute autre position de la perpendiculaire à H@ menée dans le demi-cerele OLP et par laquelle on mène un plan perpendiculaire à HO, prolongé dans les deux sens, que le rectangle déterminé dans le demi-cylin- dre, restant en place, équilibrera par rapport à 0 le rectangle déterminé dans le sabot, transporté au centre de gravité Z. Au total, la somme des rectan- gles du demi-cylindre — c'est-à-dire /e demi-c ylin- dre restant en place — équilibrera par rapport à @ la somme des rectangles du sabot, c'est-à-dire e sabot lui-même, transporté en =. (XI). Considérons maintenant séparément (fig. 15) le carré MHNY perpendiculaire à l'axe, [le cercle EOILP, les diamètres rectangulaires PO, AIT. Tirons) OM, OI et, par ces droites, menons des plans (ver- ticaux) perpendiculaires au plan du demi-cerele OIP et prolongeons-les au-dessus et au-dessous de ce plan. Nous formerons ainsi un prisme triangu- laire ayant pour base un triangle égal à @MI, et une hauteur égale à l'axe du cylindre : ce prisme est (évidemment) le quart du prisme total circons- crit au cylindre. Dans le carré MN, tirons deux droites KA, TY, équidistantes de IE (et parallèles à ce diamètre) : elles coupent la demi-circonférence OIP aux points K, T, le diamètre OP en 5,7, les obliques OH, OM en X, ®. Par ces droites, menons des plans perpen- diculaires à OP et prolongeons-les au-dessus et au- 4 Le texte dit AE. li] nn — égales deux à deux — sont proportionnelles à leurs seconds côtés. On à done : rect. SK + rect. ZT _2rect. EK _ DL rect. AX + rect. Yb 2rect. AX AX° Les rectangles XK, ZT ont respectivement leurs centres de gravité au point de rencontre de leurs diagonales (lemme V)et par conséquent aux milieux des droites XK, ZT. Le centre de gravité de leur système sera done situé sur la droite qui joint ces milieux (lemme Il) et, par raison de symétrie, au milieu de cette droite, c'est-à-dire à sa rencontre 8 avec El. Semblablement le centre de gravité du système des rectangles AX, Y® sera situé à la rencontre & de &II avec la droite qui joint les milieux de AX, Y®. Le triangle rectangle HAX, semblable à H£6, étant isocèle, on a AX—HA=ÈXP. On a donc successivement : rect. ZK +rect. ZT SK SK _ 2ZP.50 _ 30 rect. AX Hrect. Y® SP XP.SK EP.EK n K SAXHXE Or1/2XK —80 ; 1/2AX + XE— «0. Si donc on con+ sidère EI comme un levier dont @ est le milieu fixe, les systèmes (EK + ZT), (AX + Y) se font équilibre par rapport à ©. Il en est de même pour toutes les 956 autres positions des parallèles conjuguées AK, YT. Done, au total, la somme des rectangles interceptés dans le prisme HOM — c'est-à-dire le prisme HOM — équilibrera par rapport à @ la somme des rec- tangles du demi-cylindre — c'est-à-dire le demi- cylindre OHP. On a vu plus haut que le demi-cylindre équilibre, par rapportau même point fixe, le sabot transporté en & : il en résulte, par symétrie, que le sabot trans- porté en If équilibrera le prisme HOM restant en place. Le prisme peut être considéré comme la somme des triangles égaux à HOM empilés sur une hauteur BQ. Chacun de ces triangles à son centre de gravité au point de rencontre de ses mé- dianes (lemme IV), c'est-à-dire aux deux tiers de la médiane partant du sommet situé sur l'axe. Tous ces centres de gravité sont d'ailleurs évidemment en ligne droite; dès lors, le centre de gravité du prisme lui-même est sur cette droite (lemme IT) et, par raison de symétrie, au milieu de cette droite, c'est-à-dire aux 2/3, en y, de la médiane du triangle HOM intercepté par le plan‘ équidistant des bases. L'équilibre du sabot et du prisme triangulaire par rapport à @ exige done qu'on ait : sabot 0 prisme HOM HO 2 3° et comme le prisme H@M est le quart du prisme total, il vient bien : sabot 2 l . prisme AB 12 6° Ca a. (XIII Deuxième démonstration.) Soit un prisme droit à bases carrées, ABFA une de ses bases (fig. 16), un cylindre inscrit dans ce EN N' 1 prisme, ayant pour base le cercle K tangent en E,Z, H,9 aux 4 côtés du carré ABFA. Par le centre K de 4 J'ai été obligé d'introduire cette démonstration som- maire de la position du centre de gravité d'un prisme, ce TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE ce cercle et le côté (T'A') de la base opposée du prisme qui correspond à FA, je mène un plan. Il détache du prisme total un prisme partiel qui en est le quart et qui est compris entre trois rec- tangles (HEA'T', HEAT, TAT'A") et deux triangles B (rectangles) opposés (EAA', HFF'). Dans le demi- cercle EZH, inserivons un segment de parabole, ayant pour base HE et pour axe KZ (fig .17). Dans le rectangle AH, menons une parallèle quelconque MN à KZ : elle coupera la circonférence du demi-cerele en &, la parabole en A. On a évidemment : (1) MN.AN = NZ, et par conséquent : @) = Par MN menons un plan (vertical) perpendicu- laire à EH (fig. 16). Il interceptera : 1° dans le prisme partiel, un triangle rectangle (MNN'), ayant pour côtés de l'angle droit MN et une perpendicu- laire (NN') à l'A en N dans le plan FA (AT), et l'hypoténuse dans le plan sécant; 2 dans le sabot cylindrique, détaché par le plan sécant, pareille- ment un triangle rectangle (MZZ"), ayant pour côtés de l'angle droit ME et une perpendiculaire (Z£”) au plan KN menée le long de la surface du cylindre, [et l'hypoténuse dans le plan sécant. théorème ne figurant pas dans les ouvrages conservés d'Ar chimède. 11 est possible qu'il fût exposé dans un ouvrage perdu auquel l'auteur se contentait de renvoyer ici. Il est possible aussi qu'au lieu du centre de gravité du prisme, Archimède ait déterminé celui du demi-cylindre. 1 La première proposition est démontrée dans Apollonius, Coniques, 1, 11, et l'était probablement dans les ouvrages élémentaires sur les coniques connus d'Archimède. On en HK? __HK?. HK MN.AN NZ:° MN _HK® (ou MN? A a OR te déduit aussitôt en remplacant par . Notonsd'ailleurs AN AS? que l'égalité (2) résulte immédiatement de l'équation de la ; HK® ZK = MN : parabole (Quad. parab. 3) A ZS AN: TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE 957 Les triangles MNN', M££’ étant semblables, on à : A (3) ee . tr'MEE' ME Mais ME — MH.ME — (HK — MK) (HK + MK) — HK°— MK’. Donc : tre MNN' = HE tr. MEZ' HR — MK . Or l'égalité (2) donne : MN HK° MN—NA HK'— Mk?’ donc : xs tr. MNN"' MN MN (!) (4) Tr NE — é DMINEAN NTA c'est-à-dire: le triangle intercepté dans le prisme par- tiel est au triangle intercepté dans le sabot comme la parallèle MN menée dans le rectangle HAE est à la partie de celte parallèle comprise entre EH et la parabole. Cette relation élant vraie pour n'im- porte quelle position de la parallèle, au total} la somme des triangles du prisme partiel est à la somme des triangles du sabot comme la somme des parallèles MN est à la somme de leurs sections comprises entre HE et la courbe. La première somme n'est autre que le prisme partiel, [la seconde le sabot}, la troisième le rectangle HPAE, la quatrième le segment parabolique HZE, done : ATAE EZH prisme partiel rect. sabot (5) segin. [Le rectangle HAE vaut deux fois le triangle HZE; le segment parabolique HZE vaut les 4/3 de ce triangle] car ceci à élé montré précédemment”; donc : prisme partiel 2 3 sabot 1/3 2" Si donc le sabot vaut 2, le prisme partiel vaut 3, et le prisme lotal qui en est le quadruple vaut 12: donc le sabot est bien le 6° du prisme. G.q.f.d. (XIV Justilication rigoureuse de la démonstration précédente). Soit un prisme droit à bases carrées, ABFA une de ses bases” [un cylindre EZHO inserit dans le 1 On obtiendrait plus vite cette relation en partant de l'équation de la parabole y? = Rx, d'où : RO Re RE MEUR DOME R— y R—x tr. MNN! … MN R? R MN ME Ne LR} R—x MA Dès lors, on a 2 Théorème I. On peut aussi traduire (en lisant èv vois mpireçov xcedouevors) « dans un ouvrage précédent », à savoir dans Quadr. parab., Il, p. 251 et suiv. “ Les mots qui suivent (s'ils sont bien déchiffrés) signifie- prisme. Un plan mené par le centre K du cerele de base EZH et un des côtés (T'A’) de la base opposée du prisme coupe le cercle de base suivant le dia- mètre EH (parallèle à A’[')...) Il détache du prisme total un prisme partiel (HFT'EAA") et du cylindre total un sabot cylindrique : il s'agit de montrer que ce sabot vaut le sixième du prisme total. 1° Je vais montrer d'abord qu'on peut inserire dans le sabot cylindrique et lui circonserire deux solides composés chacun d'une série de prismes qui ont même hauteur et pour bases des triangles semblables, solides tels qu'on peut ramener leur différence à être plus petite que loute grandeur donnée. [Divisons (fig. 18) le diamètre HE en un nombre quelconque de égales; parties par chacun des points de division, me- nons des parallèles MN, MIN, -.. à KZ et par ces droites des plans per- pendiculaires au plan de base K. Ces plans divi- sent le prisme partiel HDIMEAA' en une série de prismes élémentaires ayant même hauteur — MM, et pour bases des triangles rectangles égaux — MNN (voir fig. 16). Ils déterminent Fig. 18. aussi dans le sabot une série de sections en in de triangles rectangles inégaux M&&',M,E,E,. : … Considérons deux sections voisines el soil ME, ME. Projetons & sur MN, en & et =, sur MN en £, et formons dans les plans verticaux les triangles M£/—MEE", Mi, — MEestle prisme élémentaire déterminé par les deux triangles égaux MEZ'M5f/, est évidemment contenu tout entier dans la section du sabot qui à pour base le trapèze curviligne MEZ,M,. Au con- traire, le prisme élémentaire déterminé par les triangles égaux ME'MEE", tout cette mème section. En opérant de même pour la contient entière section suivante, on formera de méme un prisme élémentaire MZ," ME un prisme outoire M,UL'M, ainsi de suite. Si l'on compare deux séries ainsi inscrit dans le sabot et — =/ . circonscrit eb formées, on verra que chaque prisme élémentaire de la série circonscrite a pour équivalent un prisme de la série inscrite MÈM,E, équivaut au prisme inscrit M=, Mi, ainsi le prisme circonserit de la raient : « Comme le prisme est au prisme, ainsi le cercle EZH est. », ce qui n'offre point de sens. Il serait exact, mais sans intérêt, de dire que le prisme est au carré qui lui sert de base comme le cylindre est au cercle EZH. 958 TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE section suivante. Seul le dernier prisme circon- serit MN,ZK n'a pas d'équivalent dans la série inscrite. La différence des deux séries se réduit donc à ce seul prisme deux fois répété (dans chacun des deux quarts de cercle). Or, ce prisme peut être rendu aussi petit que l’on veut en multi- pliant le nombre des divisions du diamètre HE et des plans verticaux ?; donc aussi la différence des deux séries de prismes élémentaires, c'est-à-dire des deux volumes considérés, peut être rendue plus petite que toute grandeur donnée. À plus forte raison peut-on rendre plus petite que toute gran- deur donnée la différence de chacun de ces volumes et du sabot qui est compris entre eux. 2° Je vais montrer de même (fig. 19) que si l'on trace l'arc de para- bole HZE inscrit dans le demi-cercle HZE, on peut inscrire et circonscrire au seg- ment parabolique HZE deux séries de rectangles élémentai- ‘res (correspondant aux prismes élémen- taires des volumes du sabot) dont la diffé- rence peut devenir plus petite que toute grandeur donnée. Chacun des plans sécants verticaux de tout à l'heure détermine dans le segment parabolique une trace MA,M,A,, ete. Ces traces sont équidis- tantes et de grandeur croissante depuis H jusqu'à Z. Si done nous projetons À en À}, sur M,N,, À, en À, sur MN... et de même A, en À’ sur MN, A, en \, sur M,N,..., nous formons deux séries de rectangles : l’une enveloppante HA,AM, MY AM,, … l'autre enve- loppée MAM,, MAA2,M...., et chaque rectangle de la série enveloppante équivaut au rectangle enve- loppé de la section suivante (H},AM—MAM,). Seul, le dernier rectangle enveloppant MNZK reste sans équivalent. La différence des deux séries se réduit donc à ce rectangle élémentaire (deux fois répété), et comme, si le nombre des divisions du diamètre est suffisamment grand, on peut rendre ce rectangle aussi petit qu'on veut, la différence des deux séries elle-même (et à fortiori la différence de chacune d'elles à l'aire du segment parabolique qu'elles comprennent entre elles) peut être rendue plus petite que toute grandeur donnée. Fig. 19. 3 Le prisme partiel est au solide inserit (ou cir- 1 Cf. EucLe, Élem., X, 1. # Cf. De Conoïidibus, 19 (I, 377, Heiberg). conscrit) au sabot cylindrique comme le rectangle HTAE est à la somme des rectangles élémentaires inscrits (ou circonscrits) au segment parabolique. Considérons d’abord le solide circonscrit (fig. 19). À chacun des prismes élémentaires déterminés dans le prisme partiel par deux plans sécants con- sécutifs correspond un prisme élémentaire du solide circonscrit. Comparons deux de ces prismes. élémentaires correspondants HN, HZ. Ayant même hauteur, ils sont proportionnels à leurs bases, c'est- à-dire aux triangles rectangles MNN', M=Z". Or, on à vu (n° XIII) que : tr. MNN'_ MN. ü. ME= MA’ done aussi : élément du prisme MN _ rect. HN (1) élément du solide circonsert MA rect. HA’ et aussi : @ È éléments du prisme (ou prisme partiel) Y éléments du sol. circ. (ou solide circonscrit) __ £ rect. HN (ou rect. HAE) È rect. HA (cf. lemme IX). Pour le solide inscrit, la démonstration serait la même, puisque les triangles et les rectangles sont les mèmes deux à deux dans les deux séries. Tou- tefois, il faut observer que, tandis qu'à chaque élément du prisme partiel correspond un élément prismatique du solide circonscrit, en ce qui con- cerne le solide inscrit le premier élément de chaque demi-cercle (prisme HN) n’a pas de correspondant dans le solide, et de même-pour les rectangles. On … devra donc écrire en toute rigueur : (3 —2) él. prisme (© —2) rect. HN > él. solide inscrit ÿ rect. M} (3) Mais comme : él. prisme rect. HN él. solide inserit rect. M,” on ne change pas l'exactitude de l'égalité (3) en ajoutant au numérateur du premier membre deux éléments prismatiques et à celui du second deux rectangles HN, et l’on retombe alors sur l'éga- lité (2). Ces préliminaires posés, supposons d'abord que le sabot soit plus grand que 1/6 du prisme total, c'est-à-dire que le prisme partiel soit moindre que 3/2 du sabot. Si petite que soit la différence, il en résulterait que le prisme partiel est aussi moindre que 3/2 du solide inscrit dans le sabot, car la dif- férence de ce solide au sabot peut être rendue plus petite que toute grandeur donnée. Or] le prisme partiel est à ce solide inscrit (3°) comme le rec- tangle HPAE est à la somme des rectangles élémen- n TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE — - faires inscrits dans le segment parabolique. Si donc . J'hypothèse était vraie, on aurait : { * rect. HTAE 3 > rect. MAXM, 2 Mais on à vu (Théorème 1) que le rectangle HTAE vaut exactement les 3/2 du segment de parabole, lequel enveloppe la somme des rectangles MAM, : _il est donc impossible que ce rectangle vaille moins que les 3/2 de cette somme; [l'hypothèse est donc fausse et le sabot ne saurait être plus grand que . 1/6 du prisme total. Supposons maintenant que le sabot soit plus petit que 1/6 du prisme total, c'est-à-dire que le _ prisme partiel soit plus grand que 3/2 du sabot. Si petite que soit la différence, on montrerait de même qu'il en résulte que le prisme partiel est aussi plus grand que 3/2 du solide enveloppant le sabot. | Mais le prisme partiel est à ce solide enveloppant (3°) comme le rectangle HAE est à la somme des rec- tangles élémentaires circonserits au segment para- bolique. On aurait donc : rect. HTAE 3 Ÿ rect. H9AMT 2° Or (Théorème I), le rectangle vaut exactement les 3/2 du segment parabolique, qui est plus petit que la somme des rectangles enveloppants; il ne saurait donc valoir plus que les 3/2 de cette somme : [donc l'hypothèse est fausse. Puisque le sabot ne saurait être ni plus grand ni plus petit que le sixième du prisme total, il vaut done exactement le sixième de ce prisme. C.q.f.d.]. a [Si l'on inscrit dans un cube deux cylindres ayant chacun ses bases inscrites dans deux faces 0ppo- sées du cube et sa surface latérale tangente aux uatre autres faces, le volume formé par l'inter- 1 section des deux cylindres équivaut aux deux tiers du cube. Première démonstration (mécanique). Supposons (fig. 20) que nos deux cylindres aient des axes horizontaux. Menons un plan vertical perpendiculaire à l'un de ces axes (4) et passant par le centre K du eube, et que ce soit le plan de la figure. Il coupera le cylindre (x) selon le cercle 4 La démonstration de ce théorème (dont l'énoncé a été donné dans le préambule) a péri en entier. Je l'ai restituée d'après l’analogie des démonstrations précédentes et en m'inspirant des observations de Zeuthen, op. cit., p. 356, suiv. Mais, comme il s'agissait ici d'un morceau entière- ment perdu, j'ai cru pouvoir me réduire à l'essentiel, sans chercher à reproduire le détail des raisonnements et des calculs, toujours un peu longs, d’Archimède, ABFA, le cube et le cylindre (8) selon le carré dYQX. Prolongeons AB, AA jusqu'à leurs intersections E, Z avec XQ et complétons le rectangle EZHA : ce sera une section verticale d'un prisme rectangu- laire, qui a même hauteur que le cube et pour base un carré de côté double. Le triangle AEZ est la section verticale d'une pyramide à base carrée, ayant même base et même hauteur que ce prisme. Prolongeons AT de A@ — AT et considérons TO comme un levier ayant À pour milieu fixe. Menons un plan horizontal MN : il coupe les deux cylindres selon deux rectangles égaux, qui ont eux-mêmes pour partie commune un carré de côté £0 qui coupe le cercle ABFA selon la corde £0. Ce même (0] A p A y H 7 M Q N B A E X LoJ Z Fig. 20. plan coupe le prisme selon un carré de côté MN, la pyramide selon un carré de côté IFP. On a (cf. le théorème Il) : A6 _Ar _ME _ M AS ADS TND NITe Mais : MS:SII(-—TA.AS—A= —E) + AS)—EN + SIT, donc : ESS MN carré MN AS ES + 20 +np carré EO + carré IP” c'est-à-dire que le carré MN, restant en place, équi- libre par rapport à A les carrés £O, IP transportés en © comme centre de gravité. Cette proposition reste vraie pour n'importe quelle position du plan MN et, par conséquent, pour les sommes des trois espèces de carrés interceptés par chacun de ces plans. Done, en totalisant, le prisme (somme des carrés MN) restant en place équilibre la pyra- mide (somme des carrés IP) et le volume commun aux deux cylindres (somme des carrés £0) trans- portés en @ comme centre de gravité commun. Le 960 TH. REINACH — UN TRAITÉ DE GÉOMÉTRIE INÉDIT D'ARCHIMÈDE prisme ayant évidemment pour centre de gravité K, on doit done avoir : prisme __ OA pyramide + volume commun KA La pyramide vaut 1,3 du prisme, done : 2 prismes prisme — - l 3 + 2 vol. comm., d'où : ie vol. comm.— g prisme ; et comme le prisme vaut quatre fois le cube : 2 vol. comm. — à cube. C.q.f.d. Deuxième démonstration (géométrique). Soit, comme précédemment, une section verticale. Menons (fig. 21) le triangle DKVW : ce sera la section ES A la À P B A ro) x Fig. 21 verticale d'une pyramide ayant son sommet en K et pour base un des carrés du cube. Un plan hori- zontal AP coupera le cube selon un carré de côté AP, la pyramide selon un carré de côté NO, le volume commun selon un carré de côté MIT. On à : SO ST = Qu KA —)ZP"; et, comme #K—#N, on a: C'est-à-dire : carré (NO) + carré (MII) — carré (AP). Cette égalité étant vraie pour n'importe quelle position de la parallèle AP, on a, en sommant : È carrés NO + E carrés MI — © carrés AP, c'est-à-dire : 2 pyramides DK + volume commun — cube DFXQ!. ! Le passage de l'égalité des surfaces des sections à l'éga- lité des volumes est évidemment sans rigueur, mais inspiré —————— 0 Et comme la pyramide est le 6° du cube : 2 2 volume comm.= cube — 6 cube — 3 cube. C.q.f.d. Remarque. Considérons toujours les deux cylindres horizon- taux (fig. 22 et 23). On a vu (1° démonstration) . Fi 22 qu'une série de plans horizontaux les coupent selon deux rectangles qui ont pour partie commune un carré. Ces carrés vont en croissant depuis le pointN (fig. 22) — auquel se réduit l'intersection des génératrices dans le plan AT — jusqu'au carré 225 correspondant à la section médiane, puis en dimi- nuant de nouveau jusqu'au point N', centre de la base EZHO. Le solide commun‘ est formé par la Fig. 23. superposition de tous ces carrés. Les sommets de tous ces carrés, c'est-à-dire les arètes du solide. commun, sont (fig. 22) dans les plans BA@Z et ATHE. Ces deux plans décomposent le solide com- de raisonnements analogues d’Archimède. 11 serait, d'ail- leurs, facile de donner au raisonnement plus de précision en décomposant la pyramide et le solide en deux séries de prismes carrés inscrits et circonscrits, dont leurs volumes: sont les limites respectives (cf. la troisième démonstration du théorème précédent). Ù {I a la forme dite en architecture « voüte d'arêtes » ou « voûte de cloitre ». PAUL JACCARD — LA DISTRIBUTION DE LA FLORE DANS LA ZONE ALPINE 961 mun en quatre portions de cylindre. Si nous les , coupons par les deux plans verticaux médians du cube, #3yà, xuv, chacune de ces portions de cylindre se décompose en deux sabots ou onglets, pareils à ceux du théorème XI, égaux et adossés deux à deux par leur base : tel est, par exemple nNN'A (fig. 23), {où l'on peut remarquer que NaN' est une demi- ellipse inclinée à 45° sur le plan NAN’). Chacun de ces sabots, en vertu du théorème XI, est égal au 1/6 d'un parallélépipède ayant même base que le cube et demi-hauteur, c'est-à-dire moitié du cube. Chaque sabot vaut done 1/12 du cube, et comme le solide se décompose symétriquement en huit sabots pareils, le volume total représente les 8/12, c'est- à-dire les 2/3 du cube.! NOTE ADDITIONNELLE Les volumes calculés dans les {théorèmes XI-XV ont été étudiés, indépendamment d'Archimède et même — préten- dait-il— à l'encontre d'Archimède, parle comte Léopold Hugo, neveu du poète, dans une série de brochures (1867-1875) que résume l'ouvrage récent de E. Fourrey, Curiosités qéomc- triques (Vuibert et Nony, 1907), p.319 et suiv. Voici un aperçu de la méthode suivie, 19 Volume du sabot (Hugo dit : onglet) cylindrique. Considérons d'abord un cas spécial (fig. 24 c'est l'onglet de rayon R, dont la hauteur CD serait égale à la circonférence 2xR. Un plan perpendiculaire à AB déter- mine le triangle rectangle GEF, semblable à DOC. On a donc LE — per 2=r, d'où GF—2xEFl. Par conséquent, l'aire EF | OC du triangle GEF(EF X 1/2 GE) — -EL, c'est-à-dire le cercle de rayon EF. Si l'on divise par une série de plans analo- gues l'onglet en volumes élémentaires, assimilables à des prismes de base EFG, E'F'G!, OCD, etc., la relation cei-des- sus permet de remplacer chacun de ces prismes par un cylindre ayant même hauteur que le prisme el pour rayons de base les segments EF, E'F', OC, etc. La somme de ces cylindres élémentaires est une sphère de rayon R: donc aussi le volume V de l'onglet — 4/3 x R°. — Soit maintenantun onglet quelconque r, de rayon R et de hauteur h. Compa- rons-le à l'onglet V de mème base et de hauteur 2x R. Les triangles de section ayant même base sont entre eux comme leurs hauteurs: il en est de même des volumes élémentaires et, par suite, des onglets. Donc r— V _. — 2/3 R°A [il est facile de voir que cette expression équivaut bien à celle d'Archimède, puisque le prisme à base carrée du théorème XI-XIV à pour côté de base 2R et pour hauteur h, donc pour volume 4R°4, c'est-à-dire 6 fois l'onglet]. 2° Volume du solide 1ormé par la pénétration de 2 cylindres cireu- laires dont les bases sont inscriles dans les faces opposées d'un cube. Ce solide est appelé par Hugo équidomorde à base — ou plutôt à section médiane — carrée; il construit de mème, en envisageant, au lieu d'un cube, un prisme triangulaire, pentagonal, ete., des équidomoïdes réguliers à « base » triangulaire, pentagonale, ete. — R étant le rayon du cerele de base, 24 l'arête du cube, l'équidomoïde à base carrée, composé de 8 onglets ayant R pourrayon de base et h pour hauteur, a pour volume 8 X 2/3 R°4 ou, puisque R — b, = 4%, Le cube ayant pour volume (24) — 8/5, l'équidomoide Fig. 24. vaut bien les deux tiers du cube. On démontre facilement que, si B est la base [section médiane], H la hauteur de tout équidomoide régulier, son volume à pour expression 2/3 BH. Théodore Reinach. LA DISTRIBUTION DE LA FLORE DANS LA ZONE ALPINE Les nombreuses herborisalions effectuées jus- qu'ici dans les Alpes ne nous renseignent que très imparfaitement sur la distribution locale de la flore -alpine. L'attention s'est surtout portée sur les plantes rares, dont les moindres localités sont mentionnées, tandis que les espèces vulgaires sont souvent né- gligées. Au point de vue des facteurs qui règlent la distribution florale, ces dernières sont pourtant les plus importantes; les espèces rares de la flore alpine, celles qui apparaissent dans quelques sta- tions isolées, parfois même dans une seule, sont le plus souvent soit des espèces à distribution géné- rale très sporadique, soil des espèces endémiques ou des «reliques glaciaires ». Toutes présentent un très grand intérêt au point de vue de l'histoire des flores: leur présence dans les stations qu'elles occupent actuellement s'explique non seulement par les conditions æœcologiques qu'elles y ren- contrent, mais encore par l’action de causes his- toriques et tout spécialement par les conditions d'immigration post-glaciaire. En est-il de même pour les espèces vulgaires qui constituent le fond de la végétation des Alpes? Afin de répondre à celle question, j'ai envisagé, dans un territoire alpin d'une certaine étendue, diverses subdivisions naturelles présentant entre elles, à côté de nombreuses analogies dans leurs conditions œæcologiques (c'est-à-dire dépendantes du sol et du elimat}, un petit nombre de différences caractéristiques; j'ai cherché ensuite à déterminer, par comparaison, l'influence de ces analogies et de ces différences sur la composition florale. Mes recherches ont porté principalement sur trois districts également distants l'un de l’autre de 50 kilomètres environ à vol d'oiseau. Ce sont : 1° Le haut bassin de la Sallanche eb du Trient; 962 PAUL JACCARD — LA DISTRIBUTION DE LA FLORE DANS LA ZONE ALPINE 2% Le massif du Wildhorn; les zones subalpine et inférieure auxquelles ils con- 3° Le haut bassin des Dranses. finent. Au point de vue topographique, ces trois terri- Une trentaine environ sont des espèces assez toires présentent de grandes analogies : tous trois | communes dans les Alpes du bassin du Rhône comprennent de hauts sommets couverts de gla- | valaisan, mais qui font parfois défaut sur d'asse ciers; tous trois, sauf le versant nord du Wildhorn, | grandes étendues, sans qu'il soit possible d'expli- s'ouvrent sur la vallée du Rhône. Enfin, grâce à | quer leur absence dans l'un ou l'autre des districts leur proximité, leurs conditions météorologiques | que nous comparons par leurs conditions æcolo- générales paraissent très semblables. giques particulières. Au point de vue pétrographique, par contre, ils En définitive, sur les 660 espèces du territoire. sont nettement dissemblables : le massif du | W.-T.-D., il n'y en a guère qu'une quarantaine de Wildhorn est essentiellement calcaire; le bassin du | vraiment rares ou qui soient strictement localisées, Trient comprend du gneiss et des calcaires; quant | d’une part dans les Alpes cristallines (Alpes pen- au bassin des Dranses, il présente un substratum des | nines et massif du Mont-Blanc), d'autre part dans plus variés, où affleurent les schistes de Casana, | les Alpes calcaires (portion occidentale de la chaîne les schistes houillers, le gneiss d'Antigorio, la pro- | bernoise). togine du Mont-Blanc, des schistes calcifères tria- Il semble done que la plus grande partie d'entre elles (plus des 9 dixièmes) pourrait, à la rigueur, se rencontrer simultanément sur les trois districts du siques, etc. Chacun de ces trois districts se subdivise en val- Tasceau 1. — Coefficients de communauté. NOMBRI NOMBRE PROPORTION ESPÈCES CROISSANT SUR LES DISTRICTS des ESPÈCES COMMUNES AUX DISTRICTS des centésimale espèces espèces d'espèces communes —__—— ——— Trient-Dranses réunis. . . . . . . . 645 TrientieLiDIADSES ES 390 60 070 | Wildhorn-Trient réunis . . . . . . . 525 Waldhorn etiErnent eee 295 56 9/0 Wildhorn-Dranses réunis . . . . . 617 Wildborn'et Dranses "1" 00: 327 50 0/0 lons parallèles, constituant autant de sous-districts | territoire sus-mentionné. Or, comme le montre le comparables. tableau ci-joint, il est bien loin d'en être ainsi: En faisant le relevé complet de toutes les espèces Chacun de nos districts W, T et D possède donc, végétales rencontrées dans les zones alpine et nivale | en dehors du nombre des espèces rares men-" de chacun des trois territoires Wildhorn, Trient | tionnées plus haut, un nombre considérable d'autres et Dranses, j'obtins les chiffres approximatifs sui- | espèces qui font défaut sur l'un des deux autres. vants : Le rapport du nombre des espèces communes à , . deux districts (T et D par exemple) au nombre tot 4. Wildhorn (W) . . . . 350 espèces environ. : 4 i pe P'GnE se b x al Dr en DS O0 or des espèces récoltées sur les deux districts réunis 3. Dranses (D). . . . . . 600 — | (T+D), c'est-à-dire leur coefficient de commu- 4. W.-T.-D. réunis. . . : 660 — naute”, oscille, pour les trois termes de comparaison Sur les 600 espèces qui composent la flore du Ci-dessus, entre 50 et 60 °/, (Tableau 1). bassin des Dranses, une soixantaine environ n'ont Malgré leur proximité et l'analogie de leurs pas été rencontrées jusqu'ici dans les deux autres Conditions œcologiques, nos trois districts pos- districtsT et W; sur les 470 espèces du haut bassin Sèdent donc une composition florale très dissem- du Trient, une soixantaine également font défaut blable, et l'étude comparative de leurs florules nous sur Det sur T; enfin, une trentaine d'espèces notées montre qu'un grand nombre d'espèces communes, dans le massif du Wildhorn manquent à Tet à D. répandues dans toute la chaine des Alpes centrales, Dans chaque cas, la moitié au moins des espèces font en réalité défaut sur de grandes étendues, bien notées sur l'un seulement de nos trois districts, et qu'en apparence les conditions capables d'assurer qui manquent aux deux autres, sont des plantes leur existence soient partout réalisées. subalpines ou silvatiques communes, dont la pré- A l'intérieur de leur aire de dispersion, les sence dans l’un des trois districts, à l'exclusion des deux autres, s'explique surtout par leur configu- ‘ Calculé pour 100 espèces : ; 2 : De . Nombre des espèces communes ralion topographique particulière et par la conti- Le D0 — Coeffici Nombre lolal des espèces LC Cocos auité plus ou moins grande qu'ils possèdent avec de communauté. PAUL JACCARD — LA DISTRIBUTION DE LA FLORE DANS LA ZONE ALPINE 963 espèces les plus communes posséderaient-elles, comme les espèces rares, une distribution disecon- tinue ? Pour chercher à résoudre cette question, je fis porter la comparaison non plus sur la totalité des ‘espèces des districts W, T et D, mais seulement sur les espèces constituant un seul type de formation. Je choisis pour cela la prairie alpine au-dessus de 1.900 mètres, en m'adressant autant que possible à des localités d'égale superficie et comparables au point de vue de Fa déclivité, de l'humidité et de l'état d'avancement de la flore. Voici la liste de ces localités, avec l'indication de leur exposition, de la nature de leur substratum et du nombre des espèces récoltées sur chacune d'elles. Leur superficie (3-4 hectares en moyenne), leur déclivité (20-30°) et leur altitude (comprise ‘entre 1.900 et 2.400 mètres) ne diffèrent que dans une faible mesure. Nedes localités NOMBRE d'espèces 4. Plan la chaud (Val Ferret), sur schistes triasi- ques calcifères. Exposition Ouest . . . . . . AO 2. La Peulaz |Val Ferret), sur schistes LHSIQRES calcifères. Exposition Est. . . . . 5 107 3. Col l'erret (Versant sud), sur jurassique nue rieur avec affleurement de cHénpes. RE tion Sud-Ouest . . . . . : -. 1106 4. Alpes de Tsessetaz (Combe de La, Entre mont), sur dolomie. Exposition Est. . . . . . 99 5. Alpage des Vingt-Huit (Bagnes), sur s histes calcifères triasiques et sur schistes de Casana. Exposition Ouest. . . . . ETS 140 ‘6. Barberine (Trient), sur « calcaire jurassique infé- rieur. Exposition Sud-Ouest. . . . . . 11% 7. Luisin (Emaney), sur gneis Exposition Ouest. 173 8. Gagnerie (Salanfe), sur calcaire jurassique su- DÉTIENTAEXPOSIONOUESLE PR NUE OUT Ifligen (Wildhorn), sur calcaire crétacique et nummulitique. Exposition Sud-Est. LAS EE) 40. Xuh-Dungel (Wildhorn), sur calcaire crétacique et nummulitique. Exposition Nord-Est. . . . 150 L=] Au point de vue de leur richesse florale, on peut partager ces dix localités en deux groupes :5 d’entre elles possèdent de 100 à 114 espèces environ; les 5 autres en ont de 140 à 173. Ilest facile de voir néanmoins que les coefficients de communauté des prairies comparées ne dépen- dent pas du nombre de leurs Les localités du 243, et 6) comparées une à une, possèdent les C. €." vants {en chiffres ronds): espèces. premier groupe (n° 1, 1 4 sui- 12 —535 0/0 293 —9360/0 3:4— 39 0/6.) 1:3— 40 2:4— 26 SE 0 2 | moyenne : 1:4 — 40 2:6— 30 4 CE TE 0 —21 \ 5:30 0% 1: 8—926 0 8: 9— 31 0 DES — 38 TONI) 8:10 — 38 / moyenne : 5: 9 — 36 1:10 = 34 9:10 — 42 \ 32,401 DEA0— 22 “ 4 G. c. par abréviation pour Coeflicient de communauté. Enfin, le C.c. moyen, obtenu en comparant entre elles une à une les localités 1 à 10 (ce qui donne 45 rapports différents), est également de 32°/, (exac- tement 31,5 °/,) Le C. c..le plus bas est de 21 °/, entre n° 1 (avec 101 espèces) et n° 7 (avec 173); les plus éle- vés s’observent entre : n° 4 (99 espèces) et n° 9 (147 espèces), C. e.—39°/,; entre n° 1 (191 espèces) et n° 4 (99 espèces), G: ce: — 40 °/,,ret entre n°9 (447 espèces) et n° 10 (150 espèces), C. c. — 42 °/.. Mais, si la valeur des C. c. ne dépend pas de la richesse florale (20ombre des espèces) des localités comparées, elle est, par contre, en relation avee les caractères œcologiques de ces localités, bien qu'on ne puisse observer toutefois aucune proportionna- lité rigoureuse entre le degré de leurs analogies ou de leurs dissemblances œcologiques et la valeur des C. €. IT En comparant entre elles, comme nous venons de le faire, nos dix localités une à une, on constate donc qu'en moyenne à peine un tiers seulement (32 °/) des espèces récollées sur deux localités réunies ecroissent à la fois sur l’une et l’autre de ces localités. En face de cette constance relative des coeffi- cients de communauté, on pourrait croire à l’exis- tence d'un groupe d'espèces ubiquistes se répétant dans chaque localité et constituant un noyau per- manent de communauté. Or, ce n’est pas ce qui à lieu : sur 370 espèces récoltées sur nos 10 localités réunies, 108, soit presque un tiers, n'ont élé notées que sur une seule localité, et 73, soit 1/5 environ, sur deux localités seulement. Il n'y à que 10 es- pèces sur 100 qui soient communes à 4 localités, 3 à 4 à 2 à 8 localités. Trois espèces seulement, le Gentiana excisa, l'Homogyne alpina et le Nigritella augustifolia (soit pas même à 6 localités et 1 1 sur 100!) ont été récoltées sur chacune des dix localités. Et pourtant, quel est le naturaliste qui n'ait rem- porté de la haute montagne l'impression que la majorité des espèces des prairies et des pelouses alpines se retrouve partout! Il faut une observation attentive, complétée par une statistique minulieuse, pour se convaincre que la prairie alpine possède une composition florale infiniment variée, el malgré l'uniformité physionomique qu'elles pré- sentent, sont en réalité couvertes par des associa- tions végétales très différentes. C'est qu'en dehors des variations œcologiques apparentes, telles que celles du degré d'humidité, de la déclivité, de l'exposition, de la nature phy- sique et chimique du sol, variations qui se trahissen que ses diverses stations, 964 PAUL JACCARD — LA DISTRIBUTION DE LA FLORE DANS LA ZONE ALPINE dans le tapis végétal par un nombre relativement faible de formations (prairies, pelouses, rochers, éboulis, sagnes, etc.), il en existe de beaucoup plus faibles, partant plus difficiles à apprécier, qui, dans une station en apparence uniforme, créent une infinie diversité. Le substratum, en particulier, mème le plus homogène au point de vue géolo- gique, peut présenter dans sa composilion chi- mique, dans sa structure, dans sa compacité et dans les propriétés thermiques et hygroscopiques qui en découlent, des différences nombreuses qui retentissent sur la composition florale. À cet égard, rien n'est plus instructif que la flore des sommets du Jura méridional, dont la zone cul- minante, entièrement formée de calcaires Kimmé- ridjiens et Séquaniens avec quelques affleurements d'Argovien, possède une remarquable uniformité pétrographique. Tous ses sommets, compris entre 1.6071et1.723 mètres, ont une altitude presque égale; ils sont tous situés sur la lisière méridionale du Jura et présentent, vis-à-vis des conditions topo- graphiques environnantes, la plus grande analogie, spécialement en ce qui concerne la direction, l'in- tensilé et la fréquence des vents. Partout, ce sont les mêmes croupes gazonnées, les mêmes escarpements de calcaire blane, la méme sécheresse accentuée par les mêmes vents. Aussi, à part quelques types alpins et méditerra- néens dispersés de place en place, la flore des som- mets du Jura est-elle, pour le floriste, d'une déses- pérante uniformité. El cependant, malgré cette extraordinaire uniformilé apparente, deux loca- lités, d’une superficie approximative d’un hectare chacune et distantes de 2 à 10 kilomètres, ne pos- sèdent en commun que 40 à 50 °/, des espèces ré- collées sur les deux réunies. Les résultats qu'on obtient en comparant non plus des localités de 1 à 2 hectares de superficie, distantes de quelques kilomètres, mais des localités contiquës de 1 mètre carre de surface, appartenant à une seule et même prairie, sont encore beaucoup plus surprenants. Dans une prairie subalpine siluée à 1.200 mètres d'altitude dans la vallée des Ormonts Alpes vaudoises), où je fis le relevé floristique de »2 carrés d'un mètre de côté (chaque mètre carré ayant en moyenne 25 à 30 espèces), je pus constater que la proportion des espèces communes à deux inèêtres Carrés contigus oscillait le plus souvent entre 60 et 75 °/,, c'est-à-dire que, sur deux carrés contigus À et B d'un mêtre de côté, peuplés par 38 espèces, 27 seulement, soit66°/,, sont communes à A et à B. La conclusion dominante qui se dégage des faits que nous venons d'exposer, c'est la diversité infinie de la flore alpine et des associations qui la consti- tuent, diversité telle qu'on ne trouverait probable- ment pas, dans toute la chaine des Alpes, deux mètres carrés possédant exactement la même coms position florale. Cette diversité qui, au premier abord, semble parfaitement désordonnée, comporte cependan: certains éléments d'ordonnance. C'est ce qu'il ims porte maintenant d'établir. III Parmi les espèces qui concourent à la formation du tapis végétal, les unes sont fréquentes, les autres le sont moins, d'autres enfin le sont très peu. On exprime en général ces divers degrés de fréquence par les quatre termes suivants : r'ar'es, assez rares, aSSeZ Communes et communes. Ces dénominations, telles qu'on les applique en général dans les flores, possèdent une valeur en partie subjective, qui dépend du degré d'explora- tion des contrées auxquelles elles s'appliquent ainsi que du jugement des floristes. Il est toutefois possible de leur donner une valeur purement objective. En subdivisant un ter- ritoire donné en quatre portions égales et compa- rables, on appellera espèces rares celles qui se trouvent sur une portion seulement, assez rares celles qu'on note sur deux portions, assez commu- nes celles qui se rencontrent sur trois portions, et communes celles qui croissent simultanément sur les quatre portions de notre territoire. En partant du même principe, on peut déter- miner tous les degrés de fréquence que l'on désire en augmentant, d'une facon correspondante, le nombre des subdivisions du territoire envisagé. C'est ce que nous avons fait pour les 370 espèces récoltées sur les 40 prairies alpines mentionnées plus haut, ainsi que pour les 240 espèces notées sur 12 localités de la prairie-pâturage dans la zone culminante du Jura méridional. Pour les premières, nous obtenons les degrés de fréquence suivants exprimés en °/, : Espèces notées sur 1 localité. . . . . 929 OA Du = 2 20 — = 3 = 12 — _ ie de = = 5 — HF — — on = 3 _ — 5 à = 006 Fu F SN es FE — ÉD so 4,5 — — 10 "— 0,9 Le graphique de la figure 4 nous montre l'allure de la courbe correspondant à ces chiffres ligne ponctuée B). En groupant nos dix localités suivant quatre degrés de fréquence seulement, on obtient les chiffres ci-dessous, qui se traduisent graphi- quement par une ligne presque droite, dans l- Ps TT PAUL JACCARD — LA DISTRIBUTION ——_— | —- — —(—(—(— —— — —Î(—(—(—(—.—(ç(ç—(—(———.—.—. _ quelle disparaissent les irrégularités du premier tracé (ligne pleine B"). La ligne B' (en traits) cor- _respond à cinq degrés de fréquence. Espèces notées sur { et 2 localités, soit esp. rares. 49 0/o Espèces notées sur 3, 4 et 5 localités, soit esp. assez rares. Re le 1 CCE ch 39 Espèces notées sur 6, 7 et 8 localités, soit esp. assez communes HOMO OT INInI EE LE NU ce 16 Espèces notées sur 9 et 10 localités, soit esp. com- munes : Coco + 5% Le graphique de la figure 2 exprime les divers degrés de fréquence : À, de 240 espèces du Jura mé- ridional ; B, de 370 espèces du territoire W.-T.-D.; C, de 178 espèces des Alpes Graies. Il montre clai- rement que, d'une facon générale dans la zone ns 6 DE LA FLORE DANS LA ZONE ALPINE 9 grande échelle, la relation que nous venons de mettre en lumière üre une valeur toute particulière du fait qu'elle apparait même dans la distribution d'un petit nombre d'espèces. Pour les 92 espèces de la prairie des Ormonts, déjà mentionnée, on obtient, en effet, les chiffres suivants : espèces rares : 60°/,; assez rares, el assez communes °/,; communes 10" 0/0; Ice "qui confirme ce que nous disions plus haut et nous permet de conclure, d'une toute rale : 1° que, dans la prairie alpine, les espèces rares sont les plus nombreuses" et les espèces communes les moins nombreuses; 2 que /a dé- croissance qu'on observe entre le nombre des 92 23 °/0; facon géne- S4 54 578 48 v 0 à 9 de ÿ4 Qe $ 6 36 v 36 © > Li = Q Ÿ 30 > 30 v Ê ë è 2 22 E 24 È à y Ÿ è 1 ù 18 d = i Ë & ë ; 12 È Me Ÿ d À & ÿ H & h y RÈ & N D 3 D È 6 ÿ Ÿ ÿ À “ à & v Ÿ à © Ÿ K È L (e) 2 Æ 6 8 10 2 & 6 8 10 12 14 16 18 Nombre des localites Nombre des localites Fig. 1. — Graphique montrant le degré Fig, 2. — Graphique montrant la proportion relative des de fréquence de 370 espèces de la espèces très rares (rr), rares (r), assez rares (ar), assez pratrie alpine. — B, B!' et B", courbes communes (ac), communes (ec) et très communes {ec : correspondant à 10, 5 et 4 degrés de fréquence. alpine, le nombre des espèces rares est de beau- coup le plus élevé et celui des espèces communes le moins élevé. Eu examinant les graphiques ci-joints (ainsi que d'autres que nous ometlons de reproduire iei pour ne pas allonger), il est impossible de ne pas être frappé par la ressemblance qu'ils présentent avec les courbes de variation organiques (courbes gal- toniennes, courbes binômiales). Cette ressemblance serait, sans doute, plus accen- tuée encore si le nombre des espèces envisagées el A) sur 240 espèces du Jura méridional: B) sur 370 espèces du territoire W.-T.-D.: C) sur 178 espèces des Alpes Graiïes (zone alpine sup.) espèces rares et celui des espèces communes s'effectue suivant une loi mathématique du même ordre que celle qui exprime les divers degrés de fréquence des varialions organiques. Il est presque superflu de faire remarquer que, si le nombre des espèces rares dépasse celui des espèces communes, il n'en est pas de même du nombre des individus, el qu'en réalité ce sont /es individus appartenant aux espèces communes qui sont les plus nombreux. Les éléments me man- quent encore pour établir la proportion relative celui de leurs localités étaient plus grands, et Fon peut supposer qu'alors la courbe exprimant les divers degrés de fréquence des espèces associées correspondrait à une demi-courbe galtonienne. En attendant qu'elle se vérifie sur une plus KEVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1901. des individus suivant le degré de fréquence des espèces auxquelles ils appartiennent, autrement ct, 4 Je dis nombreuses et non pas fréquentes: j'insisle sur ce point pour éviter toute équivoque. 12 966 PAUL JACCARD — LA DISTRIBUTION DE LA FLORE DANS LA ZONE ALPINE pour déterminer la fréquence individuelle par rap- port à la fréquence spécifique. Ilest cependant possible d'entrevoir que la courbe exprimant la fréquence individuelle suit une marche inverse de celle qui traduit les divers degrés de fréquence spécilique. En résumé, si nous envisageons l'espèce la plus commune d'une station donnée comme étant la mieux adaplée aux conditions œcologiques de cette station et comme en étant pour ainsi dire l’expres- sion floristique moyenne, c'est-à-dire celle que réa- lise le plus grand nombre d'individus, nous voyons qu'autour de ce type moyen, à fréquence indivi- duelle maximum, les autres se distribuent en nombre décroissant suivant leur degré décroissant d'adaptation. Sur chaque portion restreinte de la prairie alpine, la distribution locale des espèces résulte donc non seulement de la combinaison — essen- tiellement variable d’un point à un autre — des facteurs œcologiques capables de favoriser ou d’en- traver l’extension des espèces concurrentes, mais encore d'un facteur d'ordonnance mathématique, se traduisant par la relation constante existant entre les divers degrés de fréquence des espèces et des individus associés. Nous allons voir que ce facteur d'ordonnance n’est pas le seul. IV En déterminant pour les districts Dranses, Trient, Wildhorn, ainsi que pour des territoires plus éten- dus ou plus restreints, le rapport du nombre des genres au nombre des espèces qui entrent dans la composition de leur flore, on constate que ce rap- port, que j'appelle le coefficient générique, varie dans d'assez larges limites. C'est ce qui ressort avec évidence du tableau suivant : COEFFICIENT NOMBRE NOMBRE genérique des des calculé pour espèces genres 100espèces Flore de la Suisse. . . . .. 2.453 659 21 — du Valais = 5,720 . 1.850 592 31 — du Territoire W.-T.-D. . 661 221 33 — du haut bassin du Trient. 470 211 45 — de 10 prairies alpines . 310 210 57 — de 12 prairies du Jura . 240 141 60 Flore de 9 localités d'une prai- PTE OEMONS 1 92 73 79 Flore de 1 prairie du Jura . . 106 90 s5 J'ai montré autre part, en m'appuyant sur un nombre assez considérable d'exemples, que, d'une facon générale, le coefficient générique est d'autant A En particulier, dans deux des Mémoires dont les titres sont indiqués en note à la fin de cet article. moins élevé que les conditions æcologiques des ter- riloires comparés sont plus variées. C'est ce qui ressort très nettement du tableau ci dessus, dont les différents termes sont groupés pa ordre de diversité œcologique décroissante. Les facteurs qui influent le plus sur la valeur du coefficient générique sont surtout, ainsi que je l'ai montré dans l'un des Mémoires mentionnés plus haut, l'étendue, la complexité topographique et pétrographique, le degré d'isolement, enfin la lati- tude et l'altitude. Je ne relèverai ici que ce qui concerne l'altitude, dont l'influence est particulièrement sensible dans la composition de la flore alpine. Les chiffres sui- vants, déduits des documents réunis par O. Heer dans son ouvrage Die nivale Flora der Schweiz, sont, à cet égard, des plus démonstratifs. Ils nous montrent que, dans les huit étages de 500! établis par Heer dans la zone nivale des Alpes suisses et superposés à partir de 8.000", soit 2.600 mètres, le coefficient générique va sans cesse en augmentant : COFFFICIENT ÉTAGES NOMBRE NOMBRE générique (altitude croissant des des calculé pour- de I-VIII) espèces genres 100 espèces. I 338 139 41,4 ESP 221 411 49 L- IDE 153 18 51 É IN Ë 122 68 55,4 Î \ 47 29 62 3 NT EUS 22 16 73 $ VII 14 11 80 . MIT SES : 8 6 87,5 È Pour la zone correspondante des Alpes Graies, le C. g. est de 53°/, entre 2.600 et 3.200 mètreset de 69 °/, entre 3.200 et 3.500 mètres. Nous en concluons que, d'une facon générale, dans la zone alpine, la valeur du coefficient géné rique croit avec l'altitude, autrement dit, lorsqu'on s'élève, le nombre des genres diminue moins rapi- dement que le nombre des espèces. Ce phénomène, loin d'être le résultat d'une influence spécifique de l'altitude, n’est, en réalité, qu'une des manifestations de la loi générale que nous exprimions plus haut, concernant la relation | | : À tmaidis, du coefficient générique avec la diversité des condi- tions œæcologiques. On constate, en effet, au fur et à mesure qu'une M station, telle que la prairie alpine par exemple, | s'uniformise, qu'elles'appauvritplusrapidementen espèces qu'en genres ; lorsque l’uniformité æcolo- | gique est maximum, les espèces associées appar- tiennent presque toutes à des genres différents. Or, dans la zone alpine supérieure, l'augmenta- tion de l'altitude, grâce à son influence sur la dis- tribution de la lumière, de la chaleur et de l'humi- dité, agit comme cause d'uniformité, ce qui se Là PAUL JACCARD — LA DISTRIBUTION DE LA FLORE DANS LA ZONE ALPINE 967 traduit par l’uniformité physionomique de la flore des hauteurs. Seules les espèces ayant une adaptation étroite vec ce milieu réussissent à s'y maintenir. Entre plusieurs espèces d'un même genre, celles-là seu- “Jement qui possèdent l'adaptation la plus complète - persistent, à l'exclusion des autres, si bien qu'en - définitive la plupart des genres ne sont plus repré- sentés que par une seule espèce. Ceci nous amène à conclure que le genre est non - seulement une unité tlaxinomique plus ou moins ar bi- traire, mais une entité biologique dont la valeur s'affirme dans la distribution des espèces végétales soumises à une concurrence intensive. M Cette même conclusion s'applique également, quoique d'une facon moins absolue, aux grandes subdivisions, classes ou ordres, des végétaux. Elle se vérilie en tout cas pour les grandes sub- divisions des Dialypétales et des Gamopétales, dont les coefficients génériques varient d'une façon parallèle et sont, le plus souvent, à peu près iden- tiques au coefficient générique de la flore totale, C'est ce qui ressort du tableau suivant : COEFFICIENTS GÉNÉRIQUES POUR RER NN 15 2. Prairie 3. Prairie Territoire du Jura des Ormonts W.-T.-D. (12 localités) (9 localités) 661 esp. 240 esp. 92 esp. Dialypélales . . 33 0/0 63 0/o 76 °/o Gamopétales. 33,6 63 74 Flore totale . 33,4 61 19 Dans le premier territoire, où l'on envisage 661 espèces, la concordance des coefficients géné- riques est surprenante; dans le second et le troi- sième, elle est encore très remarquable, et le fait qu'elle se manifeste sur un aussi petit nombre d'espèces (240 et mème 92!) nous permet de l’envi- sager comme l'expression d'une véritable oi élé- mentaire de distribution. L'examen des flores de territoires étendus (Suisse, France et Allemagne, par exemple) montre, d’ail- leurs, que cette concordance est tout à fait géné- rale : COEFFICIENTS GÉNÉRIQUES POUR EE 4. l'Allemagne 5. la Suisse 6. la France 2.500 esp.1 2.490 esp.1 1.250 esp.1 Dialypétales . . . . 28,3 0/o 19 9/0 Gamopétales. . . . 28 19 Flore totale . 28 19,7 La concordance que nous venons de signaler, dans 1 Chiffres approximatifs. des territoires d'étendue et de richesse florale très différentes, entre les coefficients génériques des Dia- lypétales et des Gamopétales et le coefficient géné- rique total, semble indiquer que Les végétaux de ces deux classes ont un pouvoir d'adaptation sensi- blement équivalent, puisque, dans la concurrence qui s'établit entre elles pour la conquête du terrain, leurs divers genres présentent une diversité spéci- lique semblable. Ceci étant, n'est-il pas légitime d'admettre que, dans la lutte qui s'établit entre eux, les individus sont, non seulement les représentants de telle ou telle espèce plus ou moins bien adaptée, mais encore les champions de groupes biologiques plus élevés, genres, ordres et classes, auxquels ils assurent une proportion déterminée dans la distri- bution totale? Nel En résumé, l'analyse que nous venons de faire nous permet de considérer la distribution des végétaux dans la zone alpine comme résultant de l'action combinée de trois ordres de facteurs : 4° les facteurs œcologiques (nature du sol et du climat); 2° les facteurs biologiques, exprimés par le degré d'adaptation des espèces à leur station et mieux encore par le pouvoir d'adaptation, lequel est très inégal suivant les espèces ; 3° les facteurs sociolo- giques, créés par la concurrence qui s'établit entre les espèces associées. L'action des deux premiers facteurs a pour con- séquence, dans chaque station, l'élimination d'un certain nombre d'espèces (sélection éliminatoire). Le troisième facteur détermine la distribution locale des espèces non éliminées (sélection distri- butive). Cette dernière sélection étant à la fois numé- rique et taxinomique, il y a lieu de distinguer : 4° Une sélection numérique, déterminant le nombre des individus et celui des espèces associées ; 2° Une sélection spécifique, déterminant la nature des espèces associées, c'est-à-dire leur distribution suivant les genres, ordres et classes auxquelles elles appartiennent. Paul Jaccard, Professeur à l'École Polytechnique fédérale, Zurich. 1 Pour ne pas allonger, je laisse de côté ce qui concerne les autres grandes subdivisions du règne végétal, renvoyant les lecteurs que ces questions pourraient intéresser aux divers Mémoires où je les ai exposées avec plus de détails, entre autres : « Distribution florale dans une portion des Alpes et du Jura »; « Distribution de la flore alpine dans le bassin des Dranses, etc. », et « Lois de distribution florale dans la zone alpine ». Bulletin de la Soc. vaud. Sciences naturelles, volumes XXXVI et XXXVII, Lausanne, 1901 et 1902. 968 E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE dé mt REVUE ANNUELLE D’ANATOMIE I. — LES GLANDES A SÉCRÉTION INTERNE. $ 1. — Les surrénales. Nous avons déjà eu à deux reprises (en 1902 et en 1903) l'occasion de parler des surrénales dans ces mais leur étude reste à l'ordre du jour, et de nombreux travaux sont venus enrichir la bibliographie. Nous avons vu qu'on avait tendance à recon- naître, dans ces formations, deux organes distinets, emboités l'un dans l'autre, représentés l'un par la substance médullaire, l'autre par la substance cor- ticale, et que, chez certains animaux, en effet, ces deux substances sont simplement accolées (Rep- tiles), ou même forment des organes complètement séparés (Sélaciens). Les dénominations employées revues annuelles; sont done mauvaises dès qu'on sort du groupe des Mammifères. Avec Kohn, nous désignerons de pré- férence la moelle (et les organes analogues) sous le nom de {issu chromafline, pour rappeler sa réac- tion caractéristique par les sels de chrome (colora- tion en brun), ou sous celui d'adrénalinogène, parce qu'il est hors de doute aujourd'hui qu'elle est la source principale, sinon unique, de l'adrénaline. Pour la substance corticale, nous emploierons vo- lontiers le mot lipogène (ou lécithinogène), puisque son caractère essentiel esf de se charger d'une graisse spéciale (lécithine). 1. Théorie uniciste et théorie dualiste. — Nous devons tout d'abord dire que deux auteurs récents ne veulent pas admettre le dualisme dont nous venons de parler, Alors qu'il semble bien prouvé, par les travaux de Soulié par exemple, que les deux substances ont chacune son origine embryonnaire spéciale (la corticale de l'épithélium péritonéal, la médullaire des ganglions sympathiques), Miner- vini' admet, au contraire, une origine unique. Toute la surrénale dériverait en bloc du pronéphros. Ce bourgeon épithélial unique se différencierait secon- dairement en deux substances, toutes deux essen- tiellement glandulaires et à sécrétion interne, mais la médullairé resterait moins avancée dans son évolution épithéliale. On trouverait toujours des cellules de transition entre les deux. Fuhrmann*, d'autre part, divise bien la surrénale en deux parties, qui seraient à séparer absolument chez l'adulte parce qu'il n'existe pas de formes de 1 MINERVINI Journal de l'Analomie et de la Physiol., t. XL, 1904, p. 449. ? FourMaxn : Archiv für 1204-1905, p. 522. mik. Analomie, & LXXVII, L passage entre leurs éléments; pourtant, dans la plus interne, il range non seulement la moelle, mais la couche interne de l'écorce, c'est-à-dire la zone réliculée et une partie de la faseiculée (au-dessous : de la spongieuse de Guieysse). Les cellules médul- laires ne seraient que des éléments de cette couche interne de l'écorce parvenus à un autre stade” fonctionnel. L'auteur est donc contre l'autonomie de la moelle; il cherche, d'autre part, à dissocier le groupe des organes chromaffines ou paraganglions de Kohn, en niant l'identité de la cellule médullaire avec celle de la glande carotidienne. Ces deux travaux ‘ ne nous paraissent pas devoir ruiner la théorie dualiste. Fuhrmann n'aborde pas même les raisons embryologiques, qui sont ici pour- tant d'un intérêt capital. Minervini, d'autre part, n'arrive à ses conclusions que par exclusion, et n’a pu examiner qu'un nombre de stades très insuf- fisant. Son travail, il est vrai, s'étend à toute la série des Vertébrés, mais il embrasse plutôt trop de matières : i ses séries sont nombreuses, mais incom- plètes. Il n'y a pas lieu de s'étonner de trouver parfois des cellules médullaires en pleine écorce chez les Mammifères, puisque ce mélange est normal en d'autres groupes. A l'appui de la conception dualiste viennent, au contraire, toutes les recherches (rès intéressantes de Giacomini ? sur les Vertébrés inférieurs. Sur la lamproie marine, cet auteur a montré que le sys- tème surrénal est constitué par deux séries de petits organes ou plutôt de groupes cellulaires (corps épithéliaux). Les uns, reconnaissables à leur“ réaction chromafline, sont constitués par de petites « plaques de cellules épithéliales en palissade, éparses tout le long des veines cardinales et de leurs pre- mières ramifications (veines pariélales), et com- prises dans la paroi même de ces veines, presque au contact du sang, dont elles ne sont séparées que par l'endothélium. Elles sont donc dans les meil- leures conditions pour livrer une sécrétion interne. On les retrouve encore: en arrière le long de la veine cardinale, en avant le long des veines jugu- laires. Elles ont donc avant tout des rapports étroils avec le système veineux; elles eñn ont conservé ‘ Roud déjà (Lausanne, 1902) ne trouvait chez la souris qu'une seule ébauche indifférente, et des transitions entre les deux sortes de cellules jusque chez l'adulte. ? GIACOMINI Monitore zoolog. ilaliano, 1902 (Petro- myzontes). — Monitore zoolog. italiano, 1902 (Téléostéens). — Accad. dell. Scienze di Bologna, 1905 (Amiurus). — Accad. dei Lincei, 1906 (Dipnéens). — Monitore zool., 41904 (Ganoïdes). — Enfin : Sopra la fine strutt. dell. caps. surr degli Anfibii, Siena, 1902 E. LAGUESSE — REVUE Li ANNUELLE D'ANATOMIE 969 pourtant avec. les cellules sympathiques, qui se- raient ici rares et éparses. L'autre série d'organes “est constituée par des amas épithéliaux de caractè- res assez différents, contenant non plus des grains chromaffines, mais de la graisse, et répondant, par conséquent, à la substance ou tissu lipogène -(cortical). De ces amas, les uns sont encore dans les parois veineuses, mais s'étendent moins loin en avant; les avec ces vaisseaux des rapports moins étroits et parsèment le tissu adipeux périaortique. Voilà bien les deux sortes d'organes admis par la théorie dualiste, reconnaissables à leurs réactions respectives, quelquefois au contact les uns des autres, le plus souvent séparés. Or, cette disposition typique, comparable à la disposition connue depuis longtemps chez les Séla- ciens et récemment étudiée en détail par Grynfellt, Giacomini la retrouve, plus ou moins marquée, chez tous les Vertébrés inférieurs. Chez les Poissons osseux d'abord (Téléostéens), où l'on n'avait pu jusqu'ici le mettre en évidence, l'auteur italien nous montre le tissu chromafline inclus aussi dans la paroi des veines cardinales, mais à peu près uniquement dans leur portion craniale, le long de la masse lymphoïde du rein". Sur l'Amiurus catus, ces plaques occupent presque tout le pourtour du vaisseau. Quant au tissu lipo- gène (cortical), Diamare, Swale Vincent avaient montré, depuis longtemps déjà, qu'il est représenté par les corpuseules de Stannius, qu'on trouve à la surface du rein ou dans son épaisseur. Chez les Ganoïdes (Esturgeon), mêmes disposi- tions : comme chezles Téléostéens, les rapports sont plus étroits avec les veines qu'avec le sympathique. Chez les Dipnéens (Protoptère), les organes chro- maffines (corps suprarénaux) sont disposés par paires segmentaires le long des mêmes veines; les organes lipogènes n'ont pas encore été vus. Enfin, chez les Amphibiens Urodèles, les deux sortes d'organes ont des rapports analogues avec les veines, bien que les amas chromaffines, con- stitués ici d'un épithélium en palissade de toute netteté, situé immédiatement au-dessous de l’endo- thélium, restent mieux liés aux ganglions sympa thiques, dont ils sont vraisemblablement issus, ici comme ailleurs. Grynfellt* a confirmé ces faits. Chez les Anoures, les deux auteurs montrent que les cellules des deux tissus tendent à se mêler dans les cordons, qui constituent de chaque côté du corps une surrénale d'aspect unique plus ramassée, loin de laquelle on trouve pourtant des nids épithéliaux épars dans les ganglions, comme il en persiste chez les Vertébrés supérieurs. autres ont 1 Srdinko a retrouvé la même disposition (Lophobranches). Archiv für mik. Anat., 1905. 2 GrynreLLt : Journal de J'Anat., 190%, p. 180. Ces données semblent bien prouver qu'au cours du développement phylogénétique les glandes sur- rénales, d'abord dispersées en deux séries longitu- dinales d'organes, et en rapport surtout avec les grosses veines !, secondairement avec le système nerveux sympathique, se sont peu à peu simplifiées, rapprochées, pénétrées, ramassées sur elles-mêmes, pour contracter des rapports accessoires avec le rein, tout en laissant en arrière une partie de leur tissu le long des ganglions, où on le retrouve jusque chez les Oiseaux et les Mammifères. Ce sont là des faits qui s'accordent assez bien avec ceux du développement ontogénétique (voir Revue de 1903), et tout à fait en faveur du dualisme de l'organe, qu'ils expliquent. Notons pourtant qu'une association fonctionnelle de plus en plus étroite règne partout entre les deux tissus. Passons maintenant aux particularités de chacun d'entre eux. 2. Substance médullaire, chromaffine ou adréna- linogène. — Si la parenté des cellules chromaffines avec le système nerveux sympathique s'affirme surtout par le développement, on en trouve des traces jusque chez l'adulte. C'est ce que montre notamment de nouveau Kose*, chez les Oiseaux. Il trouve dans les ganglions ces éléments épars ou par petits groupes entre les cellules nerveuses. Parfois, on rencontre des amas de cellules à petits noyaux; il les considère comme représentant un état embryonnaire du sympathique, où l'on peut trouver la transition entre la cellule ganglionnaire et les différentes variétés de cellules chromaffines par lui décrites. Ciaccio” fait des constatations ana- logues chez les Reptiles et les Oiseaux jusque chez l'adulte, il y aurait formation d'éléments nerveux aux dépens de cellules embryonnaires capables d'évoluer tout aussi bien en tissu chro- maffine. Mais. une fois celte évolution accomplie, la nature épithéliale et sécrétrice de ce tissu est de toute évidence, et il n'y a pas lieu de le considérer (ainsi que fit Kohn dans ses premiers travaux) comme formé par une variété particulière de cel- lules nerveuses. Tous les autres auteurs récents s'accordent, d'ailleurs, sur ce dernier point : Dia- mare’, Da Costa”, Giacomini, Grynfellt y insistent particulièrement. Grynfellt tient ces éléments pour « absolument indépendants » du tissu sympathique chez l'adulte (Amphibiens). 1 Aug. Pettit avait déja insisté sur la persistance de ce rapport dans toute la série des Vertébrés. 2 Kose : Archiv für mik. Anat., t. LXIX, 1906-1907. 8 Craccro : Arch. ital. de Biologie, t. XLUI, 1905, p. 17. 8 Dramare : Archivio di Anatomia, t. 1, 1903, et Anatom. Anzeiger, t. XXVI, 1905. 5 DA Cosra : Glandulas suprarenaes, Thèse, Lisbonne, 1905. 970 E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE Les caractères des cellules chromaffines ont été étudiés plus à fond. Giacomini, puis Grynfellt et Ciaceio* ont montré, presque en même temps, que le brunissement caractéristique produit par les sels de chrome porte sur les innombrables petits grains qu'elles contiennent, et que Grynfellt appelle, pour cette raison : grains chromaffines. Diamare a sou- tenu, au contraire, que la réaction brune était diffuse dans tout le corps cellulaire; mais Ciaccio a pu attribuer cette erreur à un séjour trop prolongé dans le liquide de Muller, qui fixe insuffisamment. Un séjour plus court, l'addition de formol, loca- lisent nettement la coloration sur les grains. Ceux-ci ont d'autres réactions caractéristiques. Giacomini (1902), puis Ciaccio, Mulon *, ont réussi à les teindre en vert ou violet cuivre par le per- chlorure de fer, c'est-à-dire à leur appliquer la réaction de Vulpian, employée depuis longtemps pour déceler à l'œil nu la substance médullaire. Ciaccio l'appelle réaction sidéraffine et lui attribue une importance particulière. On peut la provoquer encore plusieurs jours après la mort, tandis que la réaction chromaffine ne s'obtient que dans les pre- mières heures. Les grains qu'on trouve dans les vaisseaux ne donnent que la première. L'auteur italien croit donc à deux sortes de grains différents, à deux substances différentes, mais dérivant pro- bablement l'une de l’autre, la chromaffine ou adré- nalinogène étant la première en date, la seconde élant probablement l'adrénaline elle-même, La plupart des autres auteurs croient pouvoir égale- ment considérer les grains chromañffines comme représentant l’adrénaline ou un préstade de cette substance, isolée comme on le sait par Takamine en 1901, et dont la propriété capitale est d'amener le ralentissement du cœur et l'élévation de la pression sanguine (Oliver et Schæfer, ete.). Le suhstratum histo-physiologique de cette fonction, déjà localisée dans la médullaire par Swale Vincent, Moore, Lan- glois,etc.,semble doncnettement établi aujourd'hui. Ajoutons à ces réactions des grains celle qui a été découverte par Mulon : exposés aux vapeurs d'acide osmique, dans une coupe fraiche faite par congé- lation, ils deviennent d'abord roses, puis bruns, puis noirs. Or, une solution d'adrénaline in vitro donne exactement la même réaction. C'est une nou- velle preuve, des plus nettes, en faveur du rôle adrénalinogène des cellules médullaires. Laignel- Lavastine? colore aussi les grains en brun noir par 1 Craccro : Archives italiennes de Biologie, t. XLIILI, 4905, p. 11. — Archivio di Anatomia, 1906. ? Muon : C. R. de la Soc. de Biol., 1902 à 1907. — C. R. de l'Assce. des Anat., Liége, 1903; Toulouse, 1904; Genève, 1905. — Bibliographie anat., t. XIV et XV, 1905. — Æxpose de Titres, Paris, Steinheil, 1907. * LalGNeL-LAvVAasnNE : Bull. Soc. anat. de Paris, 1906. — C. R. Soc. Biologie, avril 1905. l'imprégnalion argentique de Cajal. Quand ils ont perdu leur chromaffinité, ils peuvent encore, d'ails leurs, être souvent fixés et colorés par l'éosiné (Grynfellt) ou la fuchsine (Marassini). Ici, comme ailleurs, on a cherché à préciser le mécanisme de la sécrétion. Tout d'abord quelques- uns rapportent au noyau la phase initiale d'élabo- ration. Rabl, Vincent avaient déjà signalé, chez les Oiseaux, l'existence d'un «matériel nucléaire», que Diamare retrouve chez les Reptiles. Marassini‘, qui ne croit pas au rôle du noyau dans la sub- stance corticale, croit pouvoir affirmer qu'ici, dans la médullaire, il prend « une part active et directe à l'élaboration »; les grains spécifiques, d'abord sim- plement fuchsinophiles, s'y formeraient et seraient « de là « reversés » dans le cytoplasma. Mais Bonna= mour* se montre, avec raison, beaucoup plus ré- servé, et dit simplement (en parlant d'ailleurs des deux substances) que les variations de chromaticité et de richesse en chromatine des noyaux semblent indiquer leur participation au travail élaborateur. Dans la cellule médullaire du hérisson, il met en évidence une sorte de paranucleus, qui serait plutôt, pour Lydia Félicine, une sphère attractive avec diplosome. De ce côté donc, rien de bien certain. Les varia- tions qu'on trouve dans le nombre des granulations spécifiques, et dans leur teinte après coloration (Grynfellt, Bonnamour, Kose, etc.), semblent in- diquer différents stades de la sécrétion. En ce qui concerne la phase d'excrétion, nous savons une chose certaine, C'est que, dans les capil- laires et les veines de la substance médullaire, on peut assez facilement mettre en relief l'existence d'« un produit granuleux » irrégulier (Félicine), qui semble être le produit de sécrétion lui-même ou tout au moins s'y rattacher. Gottschau, Pfaun- dler, W. Carlier, Manasse l'avaient déjà signalé depuis assez longtemps. Lydia Félicine*, Diamare, Ciaccio, Da Costa le retrouvent. Diamare s'attache particulièrement à le décrire sous forme d'amas granuleux, groupés souvent en dendrites irrégu- lières. Ciaccio voit ces granulations « en chapelet ou éparses », et fait remarquer qu'elles ofirent la réaction de Vulpian, mais non plus la réaction chromaffine : elles représenteraient pour lui l’adré- naline à l’état achevé. Enfin, chez certains animaux au moins, ces gra- nules arriveraient souvent dans le sang par une voie indirecte. C'est ainsi que Lydia Félicine décrit, chez le lapin, la substance médullaire comme econ- 4 Marassini : Archiv. italiennes de Biologie, t. XLIV, 4906, p- 13. ? Bonxxamour : 3 LyprA FÉLICINE 1904. Etude histologique, Thèse, Lyon, 1905. : Archiv für mikr. Anatomie, t. LXUI, E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE 9 1 = stituée de travées ou cordons cylindriques creux. La lacune centrale serait à contour irrégulier, dé- chiqueté; elle enverrait, entre les cellules, des diverticules et même de véritables canalicules intercellulaires. De place en place, une veinule capillaire viendrait s'ouvrir dans la lacune et repré- senterait sa voie d’'excrétion, Manasse avait déjà signalé pareilles lacunes, qu'il considérait comme des vaisseaux sans paroi. Carlier les avait retrouvées à l'état exceptionnel. Ce qui, d'après L. Félicine, aurait empêché de les voir, c'est qu'elles ne sont bien nettes que chez le lapin, bien plus effacées chez le rat, le cobaye, peu ou point développées chez les autres animaux examinés. Kose admet, chez les Oiseaux, des lacunes et des fentes intercel- lulaires venant jusqu'aux vaisseaux; Ciaccio croit simplement voir des canalicules. Bonnamour à observé chez un hérisson la transformation de quelques cordons en de véritables cavités pseudo- aciniques très larges, kystiformes, où quelques-uns des éléments subissaient une véritable fonte holo- crine. Il faut rapprocher ces faits de ceux décrits antérieurement par Pettit chez l’anguille,et d'autres, et admettre que, si le plus souvent les cellules chro- maffines sécrètent directement dans le vaisseau voi- sin, elles ont tendance assez fréquente à se grouper en des sortes de cordons creux ou vésicules clo- ses, où la sécrétion s'accumule pour passer de là dans les vaisseaux. 3. Substance corticale ou lipogène. — Nous avons vu que la substance chromaffine est certai- nement la source principale de l'adrénaline. La substance corticale ou lipogène en produit-elle aussi? Il semble que non, si l'on s'en rapporte, par exemple, aux expériences deSwale Vincent, d'autant plus coneluantes qu'elles ont été faites sur les Séla- ciens, où les deux tissus sont relégués dans des organes séparés, el où l'extrait des chromaffines seul agit sur la pression sanguine. Pourtant, il n'est pas impossible qu'une longue association fonctionnelle aitamené, au cours de la phylogénèse, une modification de la substance corticale, devenue capable de sécréter, elle aussi, de l’adrénaline, ou de commencer l'élaboration d'un produit qu'achè- verait la moelle. C'est ce que tendraient à faire croire les expériences récentes d'Abelous, Soulié.et Tonjean. Ils ont pu retirer de la corticale un produit ayant même réaction colorante et mème effet phy- siologique que l'adrénaline. (Déjà Hultgren et An- derson ne trouvaient qu'une différence quantitative entre les extraits médullaires et corticaux.) Mais il faut se rappeler qu'il est presque impossible de séparer complètement les deux substances de la surrénale l'une de l’autre chez les Mammifères, et que souvent la corticale contient ou des ilots isolés ou des prolongements du tissu chromaffine Si le rôle adrénalinogène est douteux, il en est un autre que les physiologistes s'accordent générale- ment à attribuer à la surrénale et particulièrement au tissu lipogène : c’est le rôle antitoxique, mis en évidence dès 1891 par Abelous et Langlois. Ils ont même pu (avec Oppenheim) constater cette action antitoxique 12 vitro sur certains alcaloïdes. Voyons dans quelle mesure les recherches histo-physiolo- giques récentes viennent à l'appui de ces données. Tous les auteurs semblent d'accord aujourd'hui sur ce point, que la fonction capitale de la sub- stance corticale ou lipogène est l'élaboration d’un premier produit, qui est une graisse et probable- ment une graisse spéciale. La présence de cette graisse est caractéristique dans toute la série des Vertébrés (Giacomini, Da Costa, etc…..); elle se retrouve aussi, en plus ou moins grande quantité, dans toute l'épaisseur de la corticale des Mammifères (Ciaccio, Diamare, Da Costa, Mulon, Bonnamour). D'où l'épithète que nous proposons d'accoler ou de substituer, selon les cas, à celle de corticale. L'importance de la graisse n'avait point tout d'abord apparu avec le même relief. Guieysse, par exemple, avait fait jouer un rôle capital à sa couche des spongiocytes, cel- lules très alvéolisées, mais dont il croyait les alvéoles remplies par des vacuoles liquides. Ber- nard et Bigard’ ont prouvé qu'une partie au moins de ces alvéoles, Mulon que toutes ces alvéoles, sont en réalité remplies de graisse. Si la majeure partie avait échappé à lobservation, c'est qu'elle est très labile (Bernard et Bigard), c'est-à-dire qu'après fixation par l'acide osmique (et coloration en bistre seulement et non en noir: Mulon), elle se dissout avec la plus grande facilité dans le xylène, le baume du Canada, etc.…., pendant les manipula- tions ordinaires. Il y aurait même, pour Bonna- mour, une troisième variété de graisse, celle qui se colore par l'hématoxyline cuprique de Weigert. Ces variétés ne sont probablement que les divers stades que traverse un même produit. La graisse la plus labile, qui semble représenter le stade ultime (Bernard et Bigard), offre un intérêt tout particulier. Dès 1893, Alexander avait montré, par l'analyse chimique, que la surrénale est l'organe le plus riche en lécithine après le cerveau. Or, la graisse dont il s’agit ici présente certains carac- tères essentiels des lécithines. Elle est riche en phosphore (Bernard et Bigard); elle ne se colore point par l'acide osmique (Hultgren et Anderson, 1899), ou plutôt elle se colore en bistre (Mulon) et secondairement seulement en noir, après pas- 1 Bernarp et Bicanp : C. R. Soc. anatomique, Paris, 4902. — C. R. Soc. de Biol., 1902, et avec Lassé : C. R. Soc. de Biol., 1903. — Voyez encore : Presse médicale, 1905, p. 697. 972 E. LAGUESSE — REVUE sage par l'alcool; elle reste facilement soluble el décolorable (Bernard et Bigard, Mulon, etc...). Elle se teint par l'hématoxyline cuprique de Weï- sert (Bonnamour)'. Une partie de ses gouttelettes (dans les spongiocytes surtout) sont biréfrin- gentes, montrent une croix de polarisation, et sont solubles dans l'alcool et l'éther chaud, réactions caractéristiques, d'après Dastre, de la lécithine de l'œuf (Mulon). Par tous ces caractères, elle $e révèle donc comme une lécithine ou un mélange riche en lécithine. Aussi Mulon n'hésite-t-il pas à donner à la couche des spongiocyles (partie la plus alvéolisée de la fasciculée) le nom de couche léci- thinogène. Fuhrmann, Bonnamour, Grynfellt, Babès* acceptent plus ou moins celte manière de voir. Or, les lipoïdes, en général, possèdent un grand pouvoir de dissolution (Overton); d'autre part, les lécithines ont des propriétés atténuantes vis-à-vis des toxines (Kemper et Schepilewski notamment); enfin, peut-être forment-elles des lécithalbumines (Mulon), corps antitoxiques par excellence. L'on voit d'ici les conséquences que l'on va pouvoir en tirer en faveur du rôle antitoxique de la substance corlicale. Un autre produit de cette substance est le pig- ment. Il est généralement localisé à la couche la plus interne, relativement mince, ou zone réticu- lée. Certains auteurs lui attribuent un rôle consi- dérable (Mulon), mais le plus grand nombre ne lui laissent qu'une importance secondaire (Diamare, Da Costa, Bernard et Bigard, Bonnamour, Maras- sini...), se basant sur ce fait que sa présence est inconstante, D'après Bernard et Bigard, et surtout d'après Diamare, il n'existerait pas normalement chez l'homme : on ne l'y trouverait que dans les élats sénile ou pathologiques. Il vaut mieux, nous dire, Bonnamour, quil peut souvent manquer, et que sa variabilité est très grande. Pour Marassini, Guieysse, Carnot, il ne serait pas d'origine autochtone ; formé en différents points de l'organisme, il viendrait seulement s'ac- cumuler ici. La plupart des auteurs (Mulon, Bon- uamour, Diamare...) croient plus ou moins ferme- nent, au contraire, qu'il se développe sur place. Pour Diamare, il se formerait ici comme en tous les autres organes, avec une certaine prédilection semble-t-il, avec seulement, et sans être l'expression d'aucun méta- bolisme spécifique. Mais comment expliquer alors l'énorme quantité de pigment que nous verrons se développer expérimentalement en certains cas? D'après Ciaccio, une partie seulement de ce qu'on a pris pour tel serait du vrai pigment. Mulon l'a analysé de plus près chez le cobaye, où il est assez certaines cellules dont le abondant. Il y trouve # Wlassak a montré que c'est un caractère des lécithines. 2 Bass : C. /2. Acad, des Sc., Paris, 1907. ANNUELLE D'ANATOMIE corps tout entier, refoulant le noyau vers la sur- face, est transformé en un amas pigmentaire. Mais, dans cet amas, il met en évidence : 1° des goutte- lettes de graisse; 2° du pigment ferrique de couleur bistre ou ocre, reconnaissable à ses réactions chi- miques; 3° une substance lipochrome (pigment associé à de la graisse), colorant en jaune soit des masses amorphes, soit des grains sphériques réfrin- gents. Dans certains cas, chez des individus âgés ou à la suite de plusieurs grossesses, il a trouvé des cristaux aciculaires de pigment qui lui parais- sent représenter une charge maxima de la cellule. Pour Mulon, Diamare, Bonnamour, il existe une certaine parenté entre la graisse et le pigment; pour Mulon, la production de ce dernier est intime- ment liée à la destruction des toxines. Divers auteurs ont encore décrit d'autres produits de sécrétion. Ce sont, par exemple, les granulations oxyphiles ou fuchsinophiles de Ciaccio, les granules sidérophiles de Diamare; antérieurement Hultgren et Anderson avaient déjà cru voir des sortes de grains de zymogène dans la réticulée. Mais, de l'aveu même des auteurs, ces formations sont incons- tantes quand on passe d'une espèce animale à une autre. Diamare semble avoir établi qu'elles n'ont qu'une importance tout à fait secondaire. Pourtant Ciaccio, Mulon font dériver le pigment de granules plus petits, sidérophiles’ (granulalions pigmen- taires primordiales de Mulon). Pour Tiberti, la gout- telette graisseuse dérive aussi d’un grain élémen- taire analogue. Pour Tiberti?, Amato’, Mulon, le noyau travaillerait plus ou moins directement à l'élaboration de ces grains. Dans la couche réticulée, Guieysse avait fait jouer le rôle d’ergastoplasme, c'est-à-dire de pro- toplasme spécialement différencié en vue de ces élaborations diverses, à des formations sidéro- piles, c'est-à-dire colorables par l'hématoxyline au fer, parfois très irrégulières. Ciaceio, Da Costa, Bernard et Bigard retrouvent ces formations, qu ils décrivent un peu différemment, et leur attribuent un rôle analogue; les autres auteurs les passent sous silence, ou ne les voient que sous la forme de simples granulations plus ou moins rares. Pour Mulon, Bardier et Bonne”, Delamare”, Bonnamour, ce seraient des produits artificiels, dus aux réactifs fixateurs. Bonnamour admet pourtant, à côté des formations irrégulières qui varient considérable- ment avec le mode de fixation, un ergastoplasme filamenteux moins abondant, ou des corps ovalaires (paranuelei).. Mulon semble, d'ailleurs, rejeter en 1 Marassini admet la transformation inverse du pigment en granules fuchsinophiles. 2 Tiserri : Beitrage zur pathol. Anat., t. XXXVI, 1904. 3 Amaro : Archivio di Anat. pathol., {. I], 1906. 4 Banpier et BonxE : Journ. de l'Anat. et de la Pbhys., 5 DeLanaRE : In Anatomie de Poirier et Charpy. 1903. % » # E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE 973 bloc toutes les descriptions d'ergastoplasme et de paranuclei données jusqu'ici dans les glandes, ce qui est aller un peu vite en besogne. Telles sont les notions morphologiques actuelles. Deux mots maintenant sur quelques expériences qui mettent en relief le rôle possible des diverses couches et de leurs produits. En ce qui concerne la graisse, elles peuvent se résumer ainsi: Au cours de la gestation (Guieysse, et tous les auteurs plus récents : sur le cobaye surtout), après le surmenage musculaire (Bernard et Bigard, 1902, l Bardier et Bonne, 1903 : cobaye), à la suite de l'äblation de l’un des reins (par diminulion dans l'élimination des matériaux de régression : Maras- sini), à la suite d'injection de produits toxiques (Tiberti) ou d'autres intoxications expérimentales (par l'arsenic, le mercure : Bernard et Bigard), toutes les fois, en un mot, que les produits toxiques augmentent dans l'organisme, on à pu constater une hyperproduction parallèle considérable de la graisse, vacuolisant surtout la couche des spon- giocyles, qui s'accroit aux dépens des voisines. Bernard et Bigard ont montré, en certains cas au moins, que celle augmentation porte surtout sur la graisse labile, c'est-à-dire sur la lécithine. Ils donnent le nom d'hyperépinéphrie, à la suractivité fonctionnelle de la glande en cas d'intoxication ; elle est suivie d'hypoépinéphrie, avec disparition de l'état spongieux, quand cetle intoxication devient profonde. Dans toutes ces expériences, les moditi- cations de la substance médullaire sont ou nulles, ou très peu importantes. Le pigment subit aussi des variations. D'après Guieysse, Ciaccio, Bonnamour, Mulon, Minervini, il devient très abondant, chez le cobaye surtout, dans l'hyperfonctionnement lié à la gestation ‘. L'âge avancé (Pilliet, Diamare, Delamare, Mulon, etc..), les intoxications chroniques (Delamare, Mulon), ont la même action. La castration bilatérale, d'après Marassini, produit une augmentation encore plus marquée, extraordinaire : les cellules en sont bour- rées. Dans l’hyperfonction, d'une facon générale, dit Ciaccio, la couche interne (zone réticulée et zone à formations sidérophiles) atteint la moitié de l’épais- seur de la corticale, alors que normalement elle ne dépasse pas le quart (cobaye). On sait, d'autre part, que, depuis longtemps, on à vu un rapport entre la fonction pigmentaire des surrénales et les troubles de pigmentalion que l'on observe après l'ablation de l’une de toutes les deux (Nothnagel, Tizzoni, Boinet, etc...), ou ceux que l'on retrouve dans la maladie bronzée d'Addison, correspondant généralement à une lésion de ces organes. des surrénales ou D'après Marassini seul, il diminuerail, au contraire, à cer- taines périodes de la gestation tout au moins. En rapprochant les faits anatomiques, anatomo- pathologiques et expérimentaux, plusieurs auteurs ont essayé de se faire une idée d'ensemble du fonc- tionnement de la surrénalé corticale, et, à cet égard, nous pouvons envisager trois théories principales : a) Guieysse, nous l'avons vu antérieurement, à été surtout frappé par la superposition d'un certain nombre de couches, caractérisées chacune par des réactions particulières, et il a conclu que, très pro- bablement, chacune de ces couches devait élaborer une sécrélion particulière, de nature encore peu connue, qu'elle verserait dans le sang. Marassini, qui compte des zones moins nombreuses, admet encore que chacune d'elles à des fonctions dis- tinctes, liées pourtant à des processus de caractère très général. b) Un certain nombre d'auteurs ont cherché, au contraire, à relier entre elles plusieurs zones ou même toutes les zones dans une évolution commune, dont ils croyaient voir les symptômes indéniables. C'est ainsi que, depuis longtemps, Gottschau (1883), se basant surtout sur la présence de divisions cel- lulaires dans la zone la plus externe (glomérulée;, en à fait une sorte de couche germinative. Lydia Félicine, Da Costa, Fuhrmann, Mulon... ont vérifié la présence de caryocinèses dans cette zone ou à son voisinage immédiat. Fuhrmann, Da Costa, Mulou y ont également constaté la présence d'ami- toses, bien plus nombreuses même (surtout pour Mulon). Ces auteurs tendent done à admettre une évolution de dehors en dedans, mais généralement être jusqu'au centre. sans très affirmatifs, ou sans poursuivre Au contraire, Mulon n'a pas hésité à aller jusqu'au bout dans cette voie, et à donner une théorie d'en- semble, peut-être un peu hardie à l'heure actuelle, en tous cas fort séduisante. D'après lui, la glomé- rulaire mérite bien le nom de couche germinative. Tous les éléments de la corticale en proviennent, et subissent une différenciation progressive, qui y fait apparaitre la graisse, puis le pigment, à mesure qu'ils s’enfoncent plus profondément, Finalement les cellules, complètement bourrées de pigment, tomberaient dans les vaisseaux, où on les retrou- verait en train une véritable fonte holocrine (zone consomptive ou desquamative cen- trale). Ce serait donc une évolution épithéliale très de subir nette et très régulière. La graisse, ou, plus exacte- ment, la lécithine produite, aurait dans la fonction antitoxique un rôle capital, mais un peu indirect, qui serait lié à la production du pigment, el voici comment. Les apparences ergastoplasmiques des cellules dites à corps sidérophiles (qui font la tran- sition entre la fasciculée et la réticulée) seraient dues à la présence d'un protoplasme particulière- | se E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE ment fluide, impossible à fixer sans fissures et qui serait imprégné d'un corps gras sidérophile, c'est- à-dire, dans le cas particulier, d'un acide gras. Il proviendrait d'une résorption de la lécithine à ce niveau, el, en s'y combinant avec les albuminoïdes du protoplasme, formerait des lécithalbumines, corps antitoxiques par excellence. Le dernier terme de cette évolution serait le pigment. Il résulterait précisément de l'action neutralisante des lécithal- bumines sur les toxines. La zone pigmentaire représenterait un organe excréteur, véritable rein d'accumulation analogue à celui de certains Inver- tébrés. Les granulations pigmentaires, lors de la destruction de la cellule, devenues vraisemblable- ment inoffensives, tomberaient dans le sang pour être ou éliminées, où employées à de nouveaux usages (1907). Il y a, dans cette théorie, comme nous l'avons déjà dit, une large part faite aux hypo- thèses (et l'auteur lui-même n'a pas toujours com- pris de la même facon l'action du pigment notam- ment), mais elle a l'avantage de présenter une conception d'ensemble, à la place des notions un peu disparates que nous possédions jusqu'ici. c) Enfin, en admettant le rôle élaborateur de la corticale, certains auteurs ne se croient-pas obligés d'admettre une véritable sécrétion, c'est-à-dire d'admettre l'excrétion dans le sang des produits ainsi formés, excrétion qu'ils n'ont pu constater. IIS trouvent, au contraire, de sérieuses raisons contre cette manière de voir. Ce sont Lydia Féli- cine (1904), Bonnamour (1905), Marassini (1906). Lydia Félicine fait remarquer que les vaisseaux de l'écorce sont presque exclusivement des artérioles et des capillaires artériels, des vaisseaux d'apport par conséquent, et non des vaisseaux de drainage. Injectant de l'encre de Chine dans le sang, elle la voit se répandre avec la plus grande facilité dans des fentes intercellulaires. Le plasma sanguin peut donc, lui aussi, se répandre facilement entre tous les éléments et y charrier les substances toxiques qu'il contient. Un endothélium incomplet facili- terait l'absorption. L'auteur rappelle le pouvoir d'absorption et d'accumulation attribué par Over- ton aux substances lipoïdes. Il suffit done d'ad- mettre que les produits toxiques du sang sont très solubles dans les vacuoles graisseuses des spon- giocytes, pour expliquer la neutralisation de ces produits toxiques par l'écorce des surrénales, et, par suile, son rôle antitoxique. Bonnamour pro- pose une explication tout à fait analogue, basée sur les recherches d'Overton et de Gurwitsch, et considère les vacuoles graisseuses comme des or- ganes permanents de la cellule, accumulant les pro- duits toxiques pour les transformer et les détruire sur place. (Pour Marassini, les choses se passeraient différemment : les matériaux toxiques seraient amenés sous la forme de pigment, qui s'amasserait dans l'écorce; là, il serait neutralisé par transfor- mation en granules graisseux, qui seraient alors rejetés dans le sang.) Comme on le voit, il n'y a pas opposition irré- ductible entre la dernière hypothèse, qui considère la substance corticale ou lipogène comme un organe absorbant, « un organe de réception » (Félicine), et celle qui la considère comme un organe sécréteur. L'élaboration par la corticale d'une graisse plus ou moins chargée de lécithine reste un fait acquis et sur lequel tous ces auteurs semblent à peu près d'accord. D'autre part, l'accumulation des maté- riaux nocifs par la cellule ne semble pas indéfinie, s'ils y sont transformés, neutralisés, et finalement rejetés dans le sang. Lydia Félicine elle-même admet qu'ils y peuvent diffuser. Bonnamour ne s'explique pas sur ce point. Mulon, d'autre part, admet implicitement l'absorption par la cellule. Les divergences actuelles montrent que la question n'est pas encore suffisamment étudiée en ce qui concerne le mode d'action sur les toxiques, mais cette action elle-même est indéniable. Elle est évi- demment localisée dans la substance corticale lipo- gène; elle est plus ou moins intimement liée à la présence de la lécithine, et probablement aussi du pigment. Nous avons vu que, pour certains physiologistes, la substance corticale formerait, en outre, une cer- taine quantité d'adrénaline. Pour l'expliquer, Mulon a admis que la colorabilité des cellules dites à corps sidérophiles pouvait tenir à la présence d'adrénaline unie à un corps gras, que peut-être aussi l’adrénaline de la médullaire dérive d’une préadrénaline formée par la corticale. C’est là un rôle beaucoup plus douteux, et provisoirement nous persistons à croire (avec Ciaccio ‘) qu'on peut expliquer la présence d'une certaine quantité | d'adrénaline dans la corticale par l'inclusion, maintes fois constatée, d'un peu de substance mé- dullaire [ou même, dans certains cas, par diffusion ou reflux du sang]. $ 2. — La glande interstitielle du testicule. Une autre glande à sécrétion interne, qu'on soupconnait, mais dont on n'avait pas la démons- tration nette, vient d'être mise en pleine lumière par Bouin ét Ancel* : c'est la glande interstitielle du testicule. Depuis longtemps, on connaissait les cellules interstitielles, d'aspect épithélial, qui, dans cet * Craccro : C. R. Soc. Biol., 1906. ? Bou et ANCeL : Archives de Zool. expérim. et gén., 1903, vol. I, p. 437; et 1905, vol. IL, p. 391. — Journ. de Phys. et de Palh. gén., 1904, p. 1012 et 1039. — C. R. Acad. des Se. et Soc. de Biol. E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE 975 organe, forment des cordons plus ou moins larges, plus ou moins nombreux, entre les tubes sémini- fères. Tourneux (1879) les avait particulièrement étudiées et rapprochées de celles de l'ovaire. De nombreux auteurs avaient précisé leurs caractères. Bouin et Ancel, en utilisant particulièrement le pore et le cheval (deux sujets de choix, vu l'abon- dance et le volume de ces éléments), ont d'abord fort heureusement complété nos notions sur ce point. Ils se sont particulièrement attachés à mon- trer que ce sont des cellules nettement sécrétantes, possédant, autour des deux centrioles (diplosome), une sorte de sphère ou plutôt d'idiozome qui aurait ici les propriétés élaboratrices de l'ergasto- plasme et non un rôle cinétique, et, à la périphérie, une zone externe plus ou moins épaisse, largement vacuolisée et remplie de produits de sécrétion. Ces produits s'accumulent, sont expulsés, se reforment, selon un cycle sécrétoire très net. Ils ne peuvent guère être excrétés que dans les vaisseaux san- guins, autour desquels les cellules s'ordonnent de préférence. L'ensemble de ces cellules constitue donc une véritable glande à sécrétion interne, à laquelle les auteurs n'hésitent pas à donner le nom de glande interstitielle du testicule *. Lenhossek (1897), Plato (1897), et la plupart des auteurs récents, avaient déjà fait des cellules interstitielles des éléments nourriciers chargés d'élaborer des substances utiles ou indispensables au fonclionnement des lignées séminales (rôle qu'admettent, d’ailleurs, Bouin et Ancel). Reinke, d'autre part (1896), avait émis assez timidement l'hypothèse que leur sécrétion pouvait avoir cer- tains rapports avec l'excitation sexuelle. Regaud, Loisel, Mosselmann et Rubay tendäient également à y voir un agent de la sécrétion interne mise en évidence par Brown-Séquard. Bouin et Ancel ont fait faire à la question un pas décisif, en démon- trant que la glande interstitielle agit, et agit seule, sur l'ensemble de l'organisme, en tenant particu- lièrement «sous sa dépendance l'ardeur génitale et le déterminisme des caractères sexuels secon- daires ». Ce rôle était attribué par Brown-Séquard au testicule tout entier. Voici, en deux mots, les principales observations et expériences sur lesquelles s'appuient Bouin et Ancel: 1° Les cellules séminales n'ont aucune action sur l'ensemble de l'organisme. L'intégrité des caractères sexuels secondaires et de l'instinct génésique est associée à l'intégrité de la glande interstitielle et du syncytium nourricier des tubes 1 Chez le cheval, les auteurs ont découvert un fait curieux. Il existe trois générations successives (fœtale, jeune, adulte) de cellules interstitielles différentes, dont la troisième sur- tout provient très nettement d'éléments lymphoides et conjonctifs. séminifères. En effet, la grande majorité des sujets cryptorchides, chez lesquels ces deux éléments seuls sont bien développés, sont inféconds, mais possèdent tous les attributs de la virilité : la cas- tration fait disparaitre chez eux l'instinct géné- sique et atténue les caractères sexuels. D'autre part, la résection d'une portion du canal déférent chez les animaux entiers les met, au double point de vue morphologique et physiologique, dans la même siluation que les cryptorchides ; 2 Le syn- cytium nourricier peut être mis hors de cause. En effet, chez les animaux castrés d'un côté, privés de leur canal excréteur de l'autre, le testicule restant offre, au bout de six à dix mois, une hyper- trophie compensatrice considérable de sa glande interstitielle : le syncytium ne change pas d'aspect; dans certain cas (au bout de douze mois), il est en dégénérescence très marquée. D'autre part, chez certains porcs cryptorchides unilatéraux (castrés de l’autre côté dans le jeune âge), Les tubes sémini- fères sont restés à l’état embryonnaire; la glande interstitielle seule s'est bien développée, et assure l'apparition des caractères sexuels secondaires. D'après les deux auteurs, elle agirait même vrai- semblablement sur les caractères sexuels pri- maires, c'est-à-dire déterminerait le sexe des cellules génitales chez l'embryon, car elle se diffé- rencie, et par conséquent caractérise le testicule, avant qu'il soit possible de le distinguer d'un ovaire par d'autres caractères. II. — LE SQUELETTE. $ 1. — Les variations des os de la face. Après avoir publié un livre sur les Variations du système musculaire, puis sur celles des Os du cräne, Le Double, le professeur de l'Ecole de Méde- cine de Tours, nous donne aujourd'hui un 7raité des variations des os de la face chez l'homme, et de leur signification au point de vue de l'Anthro- pologie zoologique”. Ce traité est très développé, comme les précédents, et l’auteur y étudie avec le plus grand soin les variations de chaque os. Un certain nombre n'avaient pas encore été signalées : telle la disparition complète de la portion orbi- taire de l'os unguis (ou lacrymal), la constitution entièrement unguéale de la partie supérieure du canal nasal, ete... Mais l'auteur ne se borne pas à ce travail long et ingrat : il s'efforce d'en tirer des idées générales. Il démontre que ces anomalies ne sont pas, comme on l’a cru, des Zasi naluræ; il fournit, au contraire, « une explication plausible de la plupart de ces malformations ». Il essaie de les 1 Paris, Vigot frères, 1906. — Le Traité des variations des os du crâne est de 1903, celui des Variations des museles de 1897. 976 E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D’ANATOMIE classer : les unes sont dues à l'ossification plus ou moins étendue d'une aponévrose ou d'un ligament (exemple : le trou sphéno-palatin double) ; d'autres sont la conséquence de l’entrave qu'apportent [ou cessent d'apporter), à l'accroissement de l'os avec lequel ils sont en contact, les vaisseaux, nerfs, ten- dons, glandes. par impression (exemple : absence de la fossette de la glande sous-maxillaire) ; d’autres à un relard ou à une insuffisance d'ossificalion, d'où modification dans la forme, les dimensions, la fusion des centres d'ossification (exemple : ‘os malaire tripartite); d'autres, enfin, sont l'effet d'une dystrophie physiologique ou pathologique (exemple : unguis Semi-membraneux fenêtré). En outre, Le Double s'efforce de faire rentrer tous ces cas dans la classification générale des variations qu'il a donnée dans ses précédents traités Alors que, pour certains auteurs, elles sont toutes ataviques, Le Double en distingue de trois sortes : les variations anatomiques, réversives, alaviques, théromorphiques où d'héritage, qui reproduisent une disposition ancestrale, léguée par une espèce ou une race inférieure (celles des os de la face rentrent pour la plupart dans cette classe); — les variations monstruosilés, dont la genèse nous échappe encore (ainsi l'absence du lacrymal, du malaire, de la portion horizontale du palatin, l'enroulement en dehors et le cloisonnement du cornet maxillo-turbinal, l'inversion des dents, elç.); — enfin les variations progressives où par adapta- lion à une nouvelle fonction (celles-ci surtout dans le domaine musculaire), qui, à l'inverse des pre- mières, éloignent l'homme des animaux, telles la fusion des intermaxillaires et des prémaxillaires, le raccourcissement des os propres du nez, etc. Le Double étend actuellement à tous les organes cette classification créée par lui pour les museles. Une conception d'ensemble domine tout cet ouvrage, comme d'ailleurs les précédents. Contre une opinion soutenue un jour par Virchow, l’auteur montre, une fois de plus, que les os « se comportent comme des organes à peu près passifs, faconnés par le fonctionnement spécial des organes plus actifs en rapport avec eux et dont le développe- ment est plus précoce ». En étudiant la boite cra- nienne, il avait insisté sur ce fait qu'elle est en réalité modelée par le cerveau d'abord, par les muscles ensuite. En étudiant la face osseuse, il s'élève contre l'idée de Cuvier, soutenant que sa grandeur relative est en rapport avec le dévelop- pement des organes des sens [ce qui est pourtant loin d'être complétement faux chez les animaux|, et surtout contre celle [bien moins soutenable et déjà souvent combattue} de Magitot, prétendant que la saillie de la mâchoire inférieure, ou progna- thisme, est la cause du plus grand développement des dents. Au contraire, dit Le Double, le dévelop- pement ontogénétique des dents précède celui de la mächoire, les alvéoles se moulent sur elle; les muscles s'adaptent aux mächoires comme celles-ci aux dents, el varient de puissance respective et de direction suivant la forme et l'usage de celles-ci, c'est-à-dire selon le régime alimentaire”. Le degré de prognathisme des Primates est en rapport avec le mode de mastication, le genre de vie, les moyens d'attaque et de défense de chacun d'eux. « Les Basques orthognathes se distinguent par la peti- tesse de leurs dents; les Australiens, les Néo-Calé- doniens, si prognathes, ont des dents relativement énormes, et plus voisines, en réalité, de celles de certains Simiens que de celles des Européens modernes. » En résumé, il y a corrélation intime entre la plupart des variations des os faciaux et les fonctions de mastication. $ 2. — Les Vertèbres occipitales cartilagineuses. On admet qu'au point de vue phylogénétique le squelette cranien provient, pour la partie posté- rieure tout au moins, de vertèbres qui se sont modifiées et soudées entre elles (théorie vertébrale du crâne). Mais, dans le développement ontogé- nétique, ce n'est guère qu'au moment de l’ossifica- lion qu'on à trouvé des faits en faveur de cette conception. Pourtant, les vertèbres osseuses sont précédées partout de vertèbres cartilagineuses; comment se fait-il qu'on n'en ait pas rencontré ici, notamment chez l'embryon de poule, objet d'étude depuis si longtemps classique? En avant du domaine occipital,les protovertèbres,ou plutôtles myotomes, subissent de bonne heure la dislocation et des chan- gements profonds: au niveau de l'organe auditif,im- mobilisé, ils disparaissent ; en avant,ils se déplacent pour faire partie de la sphère oculaire; enfin, tout en arrière, dans le domaine occipital, où l'on devrait ‘trouver des vertèbres, toute segmentation disparait, et il semble ne se former qu'une masse cartilagi- neuse unique : le cartilage parachordal. Or, Van Wijhe et son assistant Sonies* montrent aujour- d'hui, par la méthode au bleu de méthylène, que des vertèbres cartilagineuses se forment bien réelle- ment tout d'abord en ce point; mais elles n'ont qu'une durée très courte de quelques heures, ce qui leur a permis d'échapper jusqu'à ce jour à l'attention des observateurs. Ces vertèbres sont au ‘ Ce sont là des faits déjà en majeure partie connus, mais qu'il n'était pas indifférent de suivre dans le détail des variations faciales. La cause exacte de beaucoup de ces variations reste, d'ailleurs, très discutée et très discutable. 2 Van Wuue et Sontes : Acad. des Sc. d'Amsterdam, 26 avril 1907. — Van Wuue : C. R. de l'Assoc. des Anat., Lille, 1907. — Sonies : Petrus Camper, t. AV, 1907. Ce dernier travail, très développé, envisage le développement complet du crâne cartilagineux des oiseaux, étudié par la méthode au bleu de méthylène. E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE , nombre de deux, et se montrent dans le courant du sixième jour (poulet), en même temps que les deux premières vertèbres cartilagineuses cervi- cales. Mais, avant que la troisième cervicale n'ait apparu, les deux occipitales se sont déjà soudées entre elles et confondues à une masse plus anté- rieure, correspondant à la partie à myotomes dégé- nérés (région auditive), pour former avec elle une seule pièce : le cartilage parachordal. Si minime qu'il paraisse, ce petit fait apporte un gros appoint à la théorie vertébrale du crâne. III. — LE SYSTÈME NERVEUX. $ 1. — Livres nouveaux. Nous avons à signaler deux livres nouveaux, qui résument l'ensemble de nos connaissances sur le Système nerveux : l'un est dû à Ch. Debierre’, l'autre est la quatrième édition, très remaniée, du Traité de Van Gehuchten. Le premier se borne à l'étude du névraxe. Il se distingue tout d'abord des livres similaires par ses planches. Bon empruntent leurs figures à d'anciens atlas, ou ne donnent que des images un peu grossières, sché- nombre de livres d'Anatomie matisées. Nous nous trouvons, au contraire, ici, en face d'un.auteur qui possède une très belle collec- tion de cerveaux, durecis par des méthodes spé- ciales, de facon à conserver le plus nettement pos- sible et même à différence substances blanche et grise. Nous devons lui être reconnaissants d'avoir fait profiter tout le monde accentuer la des de cette collection. L'auteur écrit surtout pour les médecins ; pour arriver à son but, il fait donc appel à l'Histologie, à l'Embryologie, à l'Anatomie com- parée, et complète chaque chapitre par des considé- rations physiologiques et pathologiques. Il à tenu particulièrement à mettre au point d'abord les données récentes sur la fine structure du système nerveux d'après les méthodes nouvelles (il reste fidèle à la doctrine du neurone), puis la question des localisations cérébrales est traitée avec détail. Le Traité de Van Gehuchten” est bien connu, et son éloge n'est plus à faire. Mais, dans celte nou- velle édition, s'aidant des données fournies par les méthodes de Nissl et de Marchi particulièrement, l'auteur a retravaillé avec soin toute la question des voies nerveuses. Il en à même présenté la des- eription d'une facon nouvelle, en groupant à la fin toutes les voies descendantes, puis les voies ascendantes, pour terminer par l'étude des voies réflexes. Ce groupement offre un tableau d'en- semble plus net et facilite la lecture. 1 Cu. DEBIERRE : Alcan, 1407. 2 Van Genucurex : Anal. du système nerveux de l'homme, 4e édition, Louvain, 1906. Le cerveau et la moelle épinière. Paris, $ 2. — Ecorce cérébrale, centres d'association et sphères intellectuelles. Récemment (1905), en résumant des recherches en grande partie personnelles, Edinger ! à su fort heureusement mettre en lumière le développement graduel (à travers la série des Vertébrés} du pallium (manteau cérébral), c'est-à-dire de l'écorce grise du cerveau, et de la substance blanche qui en dépend. Il n'existe pas chez les Poissons osseux: le télencéphale antérieur) est réduit au ganglion basal, homologue du corps strié. Le pallium fait son apparition chez les Amphi- biens et les Reptiles; et ce premier rudiment est exclusivement en rapport avec le seul nerf centri- pète dépendant du télencéphale, le nerf olfactif. Les excitations olfactives sont les seules qui arrivent (cerveau \ jusqu'à l'écorce. Au point de vue psychologique, nous avons affaire à des animaux purement olfactifs. L'écorce grise s'agrandit chez les Oiseaux et se complique de connexions visuelles qui usurpent de suite la première place: nous avons maintenant un pallium olfactif et un pallium visuel. Chez les seulement s'accroil Mammifères, l'écorce davantage encore, par l'addition d'un pallium. non , mais le télencé- phale tout entier augmente rapidement de volume, à mesure qu'on s'élève dans là série, par linterca- lation, dans l'écorce, de zones d'association entre auditif et d'un pallium tactile les zones de projection, et par le développement du corps calleux, c'est-à-dire d'un très grand nombre de fibres commissurales nouvelles reliant les deux hémisphères. Pour continuer à s’accroitre dans ces proportions, le pallium est obligé de se plisser et de former des circonvolutions. Mais ce n'est guère que dans les groupes supérieurs que circonvolutions et zones d'association atteignent un grand déve- loppement, maximum dans le cerveau humain. Ces zones d'associalion viennent d’être récemment étudiées de nouveau. On croyait antérieurement que toutes les régions de l'écorce cérébrale envoient des fibres motrices dans les centres plus inférieurs et en recoivent des fibres sensibles (ou tout au moins possèdent l'une ou l'autre de ces deux variétés), en un mot que l'écorce, dans toute son étendue, est pourvue de fibres de projection. Flechsig (1894-1896) à cru pouvoir établir le contraire. Pour lui, il existe, plus ou moins entre- mélées dans l'écorce, deux sortes de régions ou de zones. Les unes sont pourvues de fibres de projec- tion centripètes et centrifuges, et constituent les zones sensitivo-motrices, où centres de projection, ou sphères sensorielles ;les autres, qui occuperaient 1 EnnGer : Berliner klinische Wochenschrilt, 1905. — Voyez aussi le Traité de Van Gehuchten. >? C'est-à-dire que maintenant toutes les excitations sen- sorielles arrivent jusqu à l'écorce. 978 E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE les deux tiers de la surface de l'écorce, seraient complètement dépourvues de ces fibres de projec- tion, et constitueraient les zones ou centres d'asso- ciation. Celles-ci sont donc complètement indépen- dantes des masses grises inférieures; les excitations ne leur sont pas directement transmises, et elles n'envoient pas d'ordres directs. Elles sont exclusi- vement en connexion, par des fibres d'association centripètes et centrifuges, avec les zones sensitivo- motrices où sphères sensorielles, « C'est dans les centres d'association que toute sensation percue laisse une empreinte ineffacable, qui constitue le souvenir. C'est là que ces sensa- tions sont comparées entre elles et comparées à des sensations antérieures. C'est là que l'esprit trouve les éléments indispensables à tous les actes de la vie intellectuelle et psychique. Les centres sont, en définitive, dans le cerveau de l'adulte, le substratum anatomique de ce qu'on appelle expé- rience humaine: savoir, connaissance, langage, sentiments esthétiques, moraux, ete... (Van Gehu- chten). » Ce sont encore, comme le dit Flechsig, « les centres intellectuels et les véritables organes de la pensée », Leurs fibres centripètes leur per- mettent de recevoir les impressions des centres de projection; leursfibres centrifuges, d'exercer sur eux une action inhibitrice; « c'est seulement par leur intermédiaire que l'esprit peut produire des mouve- ments véritablement volontaires » (Van Gehuchten). Les centres de projection président à la vie ani- male; par eux, «l'organisme n'aspire qu'à satisfaire les excitations des sens, qu'à obéir à ses instincts aveugles »; les centres d'association président à la vie intellectuelle et morale. Par eux, considérable- ment plus développés d'ailleurs, « l'organisme combat les sens par-la raison, les instincts aveugles par les idées morales » (Van Gehuchten). On concoit facilement l'importance des travaux de Flechsig. Mais les faits sur lesquels ils s’ap- puyaient ont été vivement discutés depuis, notam- ment par Sachs (1897), Déjerine (1897), Monakow (1898), Hitzig® (1900), Bianchi® (1903), Vogt (4906), etc. Ces auteurs trouvent des fibres de projection dans foutes les parties de l'écorce: elles seraient seulement bien plus rares dans les zones d'association. Cela réduit l'importance de ces der- nières, mais ne les renverse pas. Tout au contraire, cela a mis en garde Flechsig lui-même contre des conclusions un peu hâtiyes, et, dans une série de nouveaux travaux, en 1898, et surtout en 1903 et 190%, il à repris la question de fond en comble? * Hrrzic : Le Névraxe, 1900. ? Bfaxc : XIVe Congrès interne de Méd., 1903. * FcecusiG : VNeurologisches Centralblatt, 1903. — Bericht der. math. phys. K1. der Kün. Gesellsch. d. Wissensch., Leipzig, 1904. — Voir aussi le Traité de Van Gehuchten. Toutes ses recherches, on le sait déjà, sont basées sur ce fait, mis en lumière depuis longtemps : à savoir que les fibres nerveuses des différents faisceaux ne prennent leur gaine de myéline que successivement, et dans un ordre déterminé : à ce moment seulement, la fibre devient müre, c'est-à-dire prête à exercer sa fonction de conduc- tibilité (Flechsig). C'est en suivant ce développe- ment graduel que l’auteur allemand avait pu se convaincre de l'existence de régions dépourvues ou (commeil le reconnaît aujourd'hui) presque dépour- vues de fibres de projection. Dans ces nouvelles recherches, il concède, en effet, ce dernier point à ses adversaires; mais il confirme, en somme, ses pre- miers résultats, en les précisant davantage, et en se basant sur l'étude complète de 56 cerveaux de fœtus de 5 à 9 mois et d'enfants de 4 à 4 mois. La myélinisation du pallium commence à la fin du cinquième mois, dans une série de territoires pri- mordiaux ou précoces, et par de petites zones successives (au nombre de 12) qu'il appelle les champs corticaux myélogénétiques élémentaires, dont les uns restent isolés, les autres se groupant en zones composées. Ce sont, pour la plupart, des fibres de projection centripètes provenant de masses grises profondes, en connexion avec les organes sensoriels périphériques (fibres primaires). Puis, la myélinisation envahit successivement (en ce qui concerne la sphère tactile tout au moins) les fibres centrifuges où pyramidales, les fibres calleuses, les fibres d'association (fibres secondaires). Dans les autres sphères sensorielles, dont le développe- ment est indépendant, les fibres centripètes mû- rissent également les premières. Parmi les terri- toires primordiaux, il faut mettre en première ligne la région rolandique (circonvolutions frontale et pariétale ascendantes, lobule paracentral), puis l'extrémité antérieure de La 4% temporale, une partie de la circonvolution du corps calleux, la majeure partie de celle de l'hippocampe, et l'extré- mité antérieure des occipito-temporales, le pourtour de la scissure calcarine, etc. Aux territoires primordiaux, Flechsig oppose les territoires tardifs, qui ne se myélinisent qu'après la naissance, Il les divise encore en intermédiaires et terminaux. Les territoires intermédiaires, à part trois premiers" qu'i vaudrait mieux, semble- t-il, rattacher au premier groupe, sont caractérisés par l'absence de fibres de projection, jusqu'à la deuxième année tout au moins. Ils viennent border et souvent entourer les champs précoces (la région rolandique par exemple), de facon à leur former des zones marginales ; ils en recoivent leurs fibres, ? Constituant toute la large moitié postéro-supérieyre de la circonvolution frontale première ou supérieure; et prolon- geant ainsi en avant la région rolandique. E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE qui sont, par conséquent, des fibres d'association ; ils ne sont en connexion intime qu'avec eux, et eux seuls leur transmettent les excitations. Enfin, à partir du deuxième mois seulement, la myélini- sation gagne le reste du pallium. Il constitue les terriloires terminaux, caractérisés par leur richesse en fibres d'association longues qui les “relient aux terriloires précoces, et probablement par des fibres plus courtes qui les unissent aux zones marginales. Ils sont groupés, pour la plupart, en trois grands champs, occupant le centre des lobes frontal, temporal et pariétal (centres d’asso- ciation antérieur, moyen et postérieur). En résumé, les premières régions de l'écorce capables de fonctionner (territoires primordiaux) correspondent aux sphères sensorielles, et les pre- mières fibres mûres sont les centripètes. L'écorce commence donc tout d'abord par emmagasiner les excitations venues du dehors, sans pouvoir y répondre. Cela lui devient possible quand les fibres centrifuges mürissent à leur tour. Mais c'est seule- ment quand sont myélinisés les terrritoires tardifs, qui correspondent, zones marginales comprises, aux sphères intellectuelles, que l'intelligence et la volonté entrent réellement en jeu. Et ainsi se trouve- raient justifiés le vieil aphorisme : Mihil est in intel- lectu quid non prius fuerit in sensu, et les idées de Locke. Le cerveau de l'enfant est bien tout d'abord « une page blanche », sur laquelle s'inscrivent peu à peu les impressions sensorielles, qui pourront seule- ment plus tard être comparées entre elles et fournir la matière des diverses opérations intellectuelles. D'après ces nouvelles recherches de Flechsig, les régions pourvues de fibres de projection seraient primilivement moins étendues qu'il ne l'avait cru tout d'abord; c'est ainsi qu'il avait, à Lort, compris parmi elles les zones marginales de la région rolandique. De sorte que les centres d’associa- tion occuperaient chez l'homme non plus les 2/3, mais peut être jusqu'aux 4/5 de l'écorce grise. En revanche, les centres de projection s'augmentent d'un certain nombre de petits champs disséminés en diverses régions; enfin, l'auteur est obligé d'admettre que, chez l'adulte, un certain nombre de fibres de projection doivent avoir envahi secondai- rement les zones d'associalion elles-mêmes. Malgré ces corrections, les conceptions de Flechsig sont loin d'être universellement admises, et, tout ré- cemment encore, Oskar Vogtlesattaquaitvivement”. $ 3. — Localisations cérébrales. Nous ne saurions entrer ici à fond dans la ques- tion des localisations; nous ne pouvons cependant quitter l'écorce cérébrale sans signaler les attaques 1 Oskar Vocr : Verhandlungen der anatom. Gesellsch., Rostock, 1906, et Anatomischer Anzeiger, t. XXIX, 1906. 979 que subiten ce moment la doctrine elassique. La plus ancienne localisation, et l'une de celles qui parais- saient le mieux établies, celle du langage articulé, vient d'être niée, d'abord par Bernheim!, puis sur- tout par Pierre Marie”, et à sa suite par Dercum”, etc. Ce que ces auteurs combattent surtout, c'est le centre de Broca, c'est-à-dire le centre de mémoire des mouvements d'articulation des mots, ou encore la localisation de l’aphasie motrice. Chez l'apha- sique du type moteur, F. Bernheim avait montré que de vastes et assez profondes lésions sous-corti- cales s'ajoutent à celles de ce centre, et il en concluait à sa non-existence, Pierre Marie s'appuie sur ces observations et d'autres analogues, et surtout sur la critique de celles de Broca, qui n'avaient point toute la rigueur exigée, aujour- d'hui. Pour lui, l'aphasie est surtout la conséquence de troubles généraux de l'intelligence, et tient en partie à la destruction des fibres qui se rendent aux centres bulbaires des organes de la phonalion, à des lésions du noyau lenticulaire, etc... On ne saurait assigner au langage articulé un centre limité. À côté de l’aphasie motrice, ajoute Marie, on a localisé la cécité verbale (perte dela vision des signes de l'écriture); or, nos ancètres étaient, pour la plupart, des illettrés ; peut-on admettre qu'en trois ou quatre générations se soit formé un centre de la mémoire des images verbales! Ce sont évidemment des idées neuves et intéressantes qu'il était bon d'agiter; mais Déjerine*, Van der Hæœven , Grasset, et d’autres, sont venus défendre, non sans succès, la doctrine classique, qui semblait avoir recu la consécration du temps. La diminu- tion générale de l'intelligence chez les aphasiques, réplique notamment Déjerine, est un fait connu depuis longtemps, mais pourtant inconstant. Et comment se fait-il que cet affaiblissement n'affecte le langage chez les droitiers qu'à la suite de lésions du centre de Broca de l'hémisphère gauche, et que ce soit l'inverse chez les gauchers? Nous croyons pouvoir provisoirement conclure, avec Grasset, que la négation absolue de P. Marie est prématurée, mais qu'elle à eu l'avantage d'attirer l'attention sur la nécessité de faire des autopsies complètes et précises. E. Laguesse, Professeur d'Histologie à la Faculté de Médecine de Lille, 1 F. Berne: Thèse de Paris, 1900, et Semaine médicale, 7 novembre 1906. 2 P. MARIE : Semaine médicale, 23 mai, 17 octobre, 28 no- vembre 1906, ete. Revue de Philosophie, 1907. 3 Dercum : New-York médical Journal, 1906. 4 DéJERINE : Presse médicale, A1 juillet, 18 juillet, 17 no- vembre 1906. 5 VAN DER HOEVEN : neurol., 1907.) 5 GRASSET : Voir aussi le Traité de Debierre : Psych. Bladen, 1906. (Voy. Revue Revue de Philosophie, 1°r janvier 1907, etc. article localisations. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 4° Sciences mathématiques Charbonnier (P.), Chef d'Escadron d'Artillerie co- Joniale. — Balistique extérieure rationnelle. Tome I. Problème balistique principal. Tome 1l. Problèmes balistiques secondaires. — Æneyelopédie scienti- fique, publiée sous la direction du Dr Toulouse. Bibliothèque de Mécanique appliquée et Génie. — 2 vol. in-18 jésus. (Prix : 5 fr. chacun.) Octave Doin, éditeur. Paris, 1907. La librairie Doin vient d'entreprendre, sous la direction du D' E. Toulouse, la publication d’une vaste Encyclopédie qui embrassera dans son ensemble la totalité des connaissances scientifiques. Divisée en 40 sections ou bibliothèques, la nouvelle Encyclopédie se composera d'environ 1.000 volumes; ajoutons que, dans chaque bibliothèque, qui correspond à une divi- sion logique du savoir humain, l'unité de méthode et de rédaction sera assurée par la direction d'un spécia- liste autorisé. Les premiers de ces volumes viennent de paraître; sans préjuger de l’accueil définitif que l'avenir réserve à l'initiative du D: Toulouse et de la librairie Doin, Ja valeur des deux premiers ouvrages de la « Bibliothèque de Mécanique appliquée et Génie » permet lout au moins d'augurer favorablement de la réussite de leur vaste entreprise. ; Les volumes dont il s'agit, dus au savant balisticien qu'est le Chef d'Escadron d’Artillerie coloniale P. Char- bonnier, constituent, dans leur ensemble, un « Traité de Balistique extérieure rationnelle »: nous ne disons pas traité complet, car, intentionnellement et pour une raison que nous ignorons, l’auteur n'a pas cru devoir y faire figurer les tables des fonctions numéri- ques, indispensables pour la résolution des problèmes d'ordre pratique qui se posent journellement dans les polygones et Commissions d'expériences. Cette réserve faile, il convient de louer sans restrictions l'œuvre que nous présentons aux lecteurs de la Jerue. Le premier volume, divisé en cinq parties, est con- sacré à la solution du problème balistique principal, c'est-à-dire à l'étude du mouvement d'un projectile supposé sollicité uniquement par la pesanteur et par une résistance tangentielle fonction de sa vitesse. On admet, en outre, que la Terre est plane et immobile, l'atmosphère calme, la gravité constante en grandeur et en direction. Dans la première partie est traitée l'étude des cas limites du problème balistique, c'est-à-dire des cas où l'influence exercée par l’un des trois éléments en jeu gravité, résistance de l'air, inclinaison de la tangente à la trajectoire) disparaît entièrement. L'étude de ces divers cas est poussée très loin et comprend, outre les résultats classiques, des théorèmes nouveaux concer- nant notamment la forme et les propriétés de l’hodo- graphe. La deuxième partie, « Propriétés des trajectoires atmosphériques », traite des questions afférentes à la discussion des équations différentielles du mouvement et à la classification de leurs cas d'intésrabilité. Les trois dernières parties sont relatives à l'étude de ces derniers cas. Outre le souci, d'ailleurs énoncé par l’auteur, de « réunir par la trame serrée d’une division logique toutes les théories jusqu'ici éparses, indépendantes et parfois contradictoires », l'ouvrage tout entier est dominé par l'idée maitresse de conduire jusqu'au bout la solution des divers problèmes balistiques en respec- - de l'hodographe, prise sous l’une des deux formes | tant l'indétermination analytique de la fonction F (*} représentative de la résistance de l'air en fonction di la vitesse. Grâce à cette méthode, les problèmes abordés sont toujours résolus à l'aide de procédé | absolument généraux, et non à l'aide d'artifices d | calcul, basés sur le choix d'une représentation analy- tique, explicite de la fonction susvisée, représentalio qui ne peut, d’ailleurs, se rapprocher de la réalité qui la condition de se placer dans un domaine plus 6 moins restreint des valeurs de v. Les solutions obtenues par le C! Charbonnier, étant ainsi indépendantes de ] forme de la loi de résistance de l'air, seront donc tou- jours applicables, quelle que soit cette dernière. Cette nécessité de la conservation de la forme impli cite de F (v) n'avait pas échappé aux balisticiens; de Saint Robert et surtout Siacci tentèrent les premier de réaliser ce desideratum. Ce dernier y parvint, mais à la condition de donner à certaines variables figu rant dans les équations différentielles des valeurs cons= tantes moyennes. L'accord avec l'expérience était | ensuite réalisé par la détermination empirique de cer= tains coefficients (cos À, cos y des formules de Siacci) Les méthodes suivies par le C! Charbonnier sont, a | contraire, beaucoup plus directes. Partant de l'équatio équivalentes : ; d(vcosz) rvrF(v) (1) voor) Ru L dr qJ | own c u 9 . — += 5 — y COS (2) COST o 1 (=): u— COST, il examine les diverses hypothèses qui peuvent être faites quant à la grandeur des quantités figurant dans | ces diverses relations et aux conséquences qu'elles | entrainent pour les développements en série qui peuvent se déduire des formules (11 et (2). En parti= | culier, dans le cas du tir de plein fouet, qui est le cas | le plus général du tir des canons, l'angle = reste tou= jours voisin de 0 sur l'arc de trajectoire utilisé par l’artilleur, et, comme il n'entre dans la relation (2} que | sous le signe cosinus, en partant du développement de ces + par rapport à la valeur 0 : -2 20 QE AT on obtient pour développement de l'équation diffé= rentielle de l'hodographe, une série très convergenten dout le premier terme s'intègre aisément à l’aide des quatre fonctions D, À, J. S de Siacci. Douze autres fonctions auxiliaires, dont les tables ont été calculées, « permettent d'intégrer le second terme. Si l'on observe que la prise en considération du deuxième terme de la | série amène à ne négliger que des termes en +, on se rend compte de la haute approximation ainsi obtenue: A noter que ces douze fonctions se réduisént, d’ailleurs, à quatre dans les cas de la recherche des éléments du | point de chute et du sommet. Particularité remarquable : plusieurs des séries balis- | tiques, classées, comme il a été dit ci-dessus, en par- tant d'hypothèses initiales très différentes, ont cepen- dant des premiers termes presque identiques. Le second volume n'offre pas, au point de vue théo- rique, un intérêt moindre que le premier; c'est ainsi que la question des « effets de rolation de la Terre » est notablement perfectionnée, bien que l'étude clas- sique en eût été faite par Poisson. Le problème de la dérivation des projectiles oblongs, quoique déjà amené añtérieurement à un haut degré de perfection, voit sa solution généralisée dans le cas d’une résistance de Vair de forme analytique quelconque et dans le cas d'un départ irrégulier du projectile. En résumé, la solution des divers problèmes de Balistique pratique peut aujourd'hui être considérée comme à peu près définitive, grâce aux méthodes du Ct Charbonnier, et ce magnifique résultat, déjà consacré par l'Académie des Sciences, est encore confirmé par l'étude longue et minutieuse, que vient de faire la Commission de Gâvre, des nouvelles solu- tions proposées. Une telle œuvre devrait, d’ailleurs, avoir une portée autre que celle, purement scientifique, qu'elle doit à sa valeur intrinsèque. Au moment où se décide devant le Parlement la création d'un corps d'ingénieurs d’Artillerie Navale, il est plaisant de voir s'augmenter tous les jours le nombre des candidats au nouveau corps, persuadés que le seul fait d'avoir tiré le canon leur donne toute compétence pour traiter des innom- brables questions techniques relatives à la Balistique, à la Métallurgie, à la construction des bouches à feu et aux explosifs. La publication d'ouvrages comme celui dont nous venons de rendre compte devrait, semble-t-il, leur inspirer plus de modestie et de réserve dans la présentation bruyante de leurs demandes et de leurs titres. Il est, cependant, fort douteux que ce but soit atteint, la plupart d'entre eux, quelle que soit par ailleurs leur valeur à d'autres points de vue, ignorant la nature, sinon même l'existence des questions qui y sont traitées ! Az 2° Sciences physiques Fesquet (E.), Professeur au Collège et à l'Ecole des Mécanieiens de Dunkerque. — Cours pratique élé- mentaire d'Electricité industrielle. — 1 vo/. zu-8° de 242 pages avec 186 fig. (Prix: 6 fr.) H. Paulin et Cie, éditeurs, 21, rue Hautefeurlle. Paris, 1907. Nicolas (E.), Professeur à l'Ecole nationale proles- sionnelle d' Armentières. — Vingt leçons pratiques sur les Courants alternatifs. — 1 vo/. in-8° de 240 pages avec 222 fig. (Prix : 5 fr.) H. Paulin et Cie, éditeurs. Paris, 1907. Ces deux ouvrages se recommandent par le caractère pratique et expérimental des notions qu'ils exposent; ils peuvent être mis entre les mains d'ouvriers électri- ciens ayant une bonne instruction primaire, et leur rendront certainement service. A signaler, dans chaque volume, une série de problèmes-tÿpes, emprun- tés à la pratique courante, et dont un certain nombre sont résolus. Duchemin (R.). — La dénaturation de l'Alcool en France et dans les principaux pays d'Europe. — 1 vol. in-8° de 264% pages. (Prix : 7 fr. 50.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1907. M. Duchemin s'est proposé, dans cet intéressant ouvrage, d'exposer la question,si discutée, de la déna- turation de l'alcool. I était facile, dans cette question, de réunir en un recueil les documents officiels, jus- qu'ici épars et peu répandus, relatifs au problème de la dénaturation et de faire, en quelque sorte, une mono- graphie de la dénaturation de l'alcool en France et à l'étranger. M. Duchemin n'a pas négligé ce côté de la question; mais le principal mérite de son ouvrage est d'avoir fait suivre cet exposé d’une étude critique com- plète du problème de la dénaturation de l'alcool en France. Après avoir passé en revue les lois, décrets et règle- ments qui régissent la malière dans notre pays, el exposé la campagne qui a été entreprise, dans ces derniers temps surtout, en faveur des emplois indus- triels de l'alcool, M. Duchemin indique et discute les divers modes de dénaturation employés dans les pays étrangers. Un chapitre très documenté est con- sacré aux moyens à mettre en œuvre pour augmenter REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 19017. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 981 en France l'écoulement de l'alcool dénaturé. L'auteur aborde ensuite la question, si controversée, du dénatu- rant à adopter : il conclut que le méthylène type Régie, à dose massive, doit être considéré en France comme le dénaturant le plus sûr et le meilleur. Cette conclu- sion, qui ne sera évidemment pas admise par tous, est appuyée par une discussion très précise, dont la lecture est particulièrement recommandée à tous ceux qui désirent se faire une idée nette du problème. . L'ouvrage se termine par une revue des questions économiques qui se rattachent à la dénaturation et par un chapitre où l’auteur à eu l’heureuse pensée de réunir les circulaires relatives à l'alcool dénaturé et les procédés officiels d'analyse des alcools dénaturés et du dénaturant. Cet ouvrage constitue donc à la fois un recueil des lois, décrets, circulaires et règlements relatifs à la dévaturation de l'alcool en France et à l'étranger, un exposé très clair et très complet du problème de la dénaturation en France, et une étude critique de ce problème. On ne peut qu'en recommander la lecture à tous ceux qui désirent se documenter d'une façon précise sur cette importante question. E. BouLLAnGEr, Chef de Laboratoire à l'Institut Pasteur de Lille. 3° Sciences naturelles =. Leteur (F.), Préparateur à la Faculté des Sciences de Paris. — Traité élémentaire de Minéralogie pratique. — 1 vol. de 125 payes, avec 150 figures et 26 planches hors texte tirées en 15 couleurs. Ch. De- lagrave, éditeur. Paris, 1907. Dans la pensée de l’auteur, ce livre s'adresse surtout aux amaleurs soucieux de classer intelligemment les échantillons de leur collection; mais il pourra être lu avec profit par tous ceux qui désirent élargir le cadre de leurs connaissances générales. ÿ Dans un autre ordre d'idées, les étudiants de nos Facullés y puiseront des notions leur permettant d'aborder avec fruit et sans difficulté l'étude des ouvrages classiques. Le Traité de Minéralogie pratique comprend deux parties : un texte explicatif des planches en couleurs et un exposé théorique, réduit aux principes essentiels, comprenant : la description des formes minéralogiques, la délermination de la densité des minéraux, des principes de Cristallographie géométrique, une théorie élémentaire de l'Optique cristalline, un exposé des propriétés physiques et mécaniques des minéraux et des lois de leur constitution chimique, enfin des généralités sur la détermination et l'origine des miné- raux, les groupes et les associations, la classification des espèces et leur coexistence dans les roches. En un mot, tout ce qui, en Minéralogie, est essentiel, a été traité par l’auteur, qui a eu soin de donner à chaque sujet un développement en rapport avec son importance. Le chapitre qui traite de l'Optique cristalline est particulièrement intéressant. Il n'était pas aisé de présenter sous une forme simple et accessible des phénomènes dont l’étude entraine généralement l’'em- ploi des Mathématiques. E M. Leteur est parvenu à donner en quelques pages un sens physique très net des interférences, de Ja polarisation, de la double réfraction, et à fait très heureusement l'application des notions théoriques acquises aux cristaux uniaxes el biaxes. Tout cela est exposé sans un calcul, dans un style sobre, mais élégant, clair et précis. ù Il en résulte que la lecture du Traité élémentaire de Minéralogie, dont le caractère nettement scientifique écarte toute impression de vulgarisation, est des plus attrayantes. Les planches en couleurs sont, pour la plupart des espèces figurées, d'un réalisme saisissant, et il faut en féliciter l'éditeur, car ce genre de repré- D9%* 982 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX sentation est souvent défectueux. L'ensemble constitu e un ouvrage très séduisant, répondant bien à la pensée de l’auteur exprimée dans sa préface : « Les idées générales tombent dansle domaine commun et peuvent ètre exposées et comprises sans l’attirail encombrant des théories particulières. » E. TassiLLy, Professeur agrégé à l'Ecole supérieure de Pharmacie. Commission géographique et géologique de FEtat de Saint-Paul. — Exploration des ri- vières Feio et Aguapehy. Exploration de la rivière Tieté. — 2 vol. in-4° avec nombreuses gravures et cartes en couleurs.Imprimerie Rothschild, Säo-Paulo (Brésil). L'Etat de Säo-Paulo (Saint-Paul) est l'un des plus importants et des plus riches du Brésil. Géographique- ment, il peut être divisé en deux parties : une bande orientale montagneuse relativement étroite, bordant la côte de l'Atlantique, et un haut plateau occidental sillonné par de nombreux cours d’eau qui vont se jeter dans le Parana. Cette partie est la moins peuplée et la moins connue; aussi la Commission géographique et géologique de l'Etat de Saint-Paul en a-t-elle entrepris l'exploration méthodique par l'envoi de Missions bien organisées, qui doivent explorer le cours des prinei- pales rivières, en relever le tracé exact et étudier aussi les régions avoisinantes au point de vue de leurs richesses naturelles. Ce sont les premiers résultats de ces travaux qui sont aujourd'hui exposés en deux volumes relatifs aux ri- vières Feio, Aguapehy etTieté. Ceux-ci contiennent des renseignements très intéressants sur la topographie, la géologie, la flore et la faune des régions traversées. Au point de vue matériel, ils sont remarquablement exé- cutés : ils renferment de belles similigravures et des cartes en couleur sortant des ateliers de Säo-Paulo, qui ne le cèdent en rien à celles de nos maisons euro- péennes. Il n’y a donc qu'à se féliciter de voir le goût et la culture des études géographiques se répandre ainsi au Brésil. Perrot (Emile), Professeur à l'Ecole supérieure de Pharmacie de Paris. — Les Végétaux utiles de l'Afrique tropicale française. Fascicule II : Le Karité, l’Argan et quelques autres Sapotacées à graines grasses de l'Afrique. — 1 vol. in-8° de 195 pages. Challamel, éditeur. Paris, 1907. Nous avons déjà analysé ici le premier fascicule de la publication entreprise en 1905 par M. Aug. Chevalier. Le second fascicule, qui vient de paraître, a été rédigé par M. Perrot, l'ami et le collaborateur du vaillant explorateur de notre Afrique occidentale. Reparti en novembre 1906 pour la Côte d'Ivoire, M. Chevalier, à qui des missions successives n’ont pas permis jusqu'alors de mettre à jour toutes ses observa- üons, a confié à M. Perrot le soin de continuer, en son absence, l'œuvre commencée. Avec raison, M. Perrot a pensé que, parmi les pro- duits que nos colonies africaines peuvent fournir et que, dès maintenant, la Métropole a intérêt à mieux con- naître, les graines grasses se placent en bon rang; et son présent Mémoire est entièrement consacré à l'une des familles qui sont plus particulièrement riches en représentants oléagineux dans les pays chauds : la famille des Sapotacées, Le karité, notamment, est depuis longtemps bien connu, et la limitation de son habitat dans la zone soudanienne, loin des côtes, est la principale cause qui à toujours entravé le commerce de ses graines. Mais que la situation économique de l'intérieur de l'Afrique française se modifie, au fur et à mesure de l'extension progressive des voies ferrées et del’abaisse- mentdesprix de transportqui en sera la conséquence, et ces graines, dont la substance grasse concrète semble pouvoir être avantageusement employée pour la con- devenir un article régulier d'exportation. Il est dès lors de toute utilité de posséder sur la plante, sur sa végé- tation, sa répartition, ses modes possibles d'exploitation et la valeur exacte de ses produits, des renseignements complets. C'est cette documentation qu'a cherché à nous don- ner M. Perrot dans une longue et consciencieuse étude, qui représente plus de la moitié du volume. La seconde Sapotacée sur laquelle insiste ensuite l’auteur est l’arganier, aussi connu dans ie sud-ouest du Maroc que l’est le karité au Soudan. Sans doute, la production de l'huile d'argan restera toujours. limitée, et la dureté du noyau ne laisse guère espérer que le produit soit jamais à bas prix; mais c’est au Maroc même que l'élargissement de l'aire de dispersion de l'espèce, à travers des régions où ne eroit pas l'oli- vier et dont la mise en valeur est plutôt difficile, rendrait peut-être des services. « Et nous faisons actuellement tous nos efforts, dit M. Perrot, pour combler les lacunes qui existent encore dans l’état de nos connaissances. sur cet arbre singulier, objet de la curiosité des tou- ristes qui touchent à la côte occidentale du Maroc, vers Mogador ». Bien moins connues encore sont les autres graines grasses que M. Perrot passeaussien revue,etqui, celles-ci, proviennent de Sapotacées du Congo. Mais, précisément parce que nos connaissances sur ces autres espèces sont très incomplètes, et qu'il serait à souhaiter qu'elles s'étendissent, car les graines en question sont déjà appa- rues, à plusieurs reprises, dans le commerce ou dans les laboratoires, la mise au point momentanée tentée par M. Perrot rendra service en facilitant les recherches futures. Elle était d'autant plus nécessaire que les divers noms donnés successivement par Pierre à plu- sieurs de ces espèces, telles que le njavé, ont créé une synonymie bien confuse, heureusement débrouillée déjà par Engler. On ne saurait trop répéter que la détermination bota- nique d'une plante économique est le premier travail absolument indispensable pour l'étude du produit. Trop. souvent les chimistes se contentent des noms commer- ciaux ou indigènes, ou de provenance géographique, qui leur sont indiqués; ils oublient que chacun de ces termes peut désigner plusieurs substances d'origines botaniques diverses; et ainsi s'expliquent les différences considérables qu'on relève à tout instant, lorsqu'on compare, d'un traité à l'autre, les caractères physiques et chimiques attribués à une huile ou à un beurre. L'étude d'un produit végétal, quel qu'il soit, n’est durable et n’a de valeur et d'intérêt que si la plante productrice est bien spécifiée; en ce cas seulement, les résultats obtenus se rapportent à quelque chose de précis, de composition relativement fixe. Il faudrait donc que, le plus tôt possible, on püt faire, pour les autres Sapotacées congolaises, tout au moins l'histoire préliminaire que M. Perrot vient de tenter pour le njavé, le noumgou, et le moabi ou maniki. Eu attendant, l’auteur a très clairement exposé tout ce que nous savons actuellement — et mème plus que nous en savions antérieurement, puisqu'il y a dans l'ouvrage beaucoup de faits nouveaux — sur les Sapota- cées oléagineuses de l'Afrique occidentale. HENRI JUMELLE, Professeur à la Faculté des Sciences de Marseille. 4° Sciences médicales Combe (D' A.) Professeur à l'Université de Lau- sanne. — L'Auto-intoxication intestinale. —1 vol. in-8° de 565 pages. (Prix : 12 fr.) J.-B. Baillière et fils, éditeurs. Paris, 1907. Il y a deux parts à faire dans ce livre. L'une a trait à la pratique médicale de M. Combe, qui depuis long- temps déjà est connu par les cures qu'il accomplit chez les malades atteints d’entérocolite muco-membra- neuse. L'auteur nous expose la manière dont il pro- sommation où en stéarinerie, pourraient très bien ; cède pour instituer régime, hygiène et thérapeutique. né de BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 983 Les procédés sont très simples, très logiques; c’est le régime végétarien fondé principalement sur les pâtes alimentaires, les légumes en purée ou en potage, les bouillies de farine, ou bien le régime du lait pur et des laits fermentés, comme le képhir, le yoghourt, les laits -caillés. Les succès de Fauteur tiennent surtout à la manière dont il applique ces régimes, à une discipline sévère, à une surveillance attentive. Voilà ce qu'on ‘trouve à Lausanne. L'autre part du livre de M. Combe a trait à la des- cription symptomatique des phénomènes d’auto-intoxi- ‘cation intestinale, à l'appréciation clinique de ces phé- nomènes et à leur pathogénie. L'auteur fait jouer un grand rôle au régime carné, qui donne naissance à d'abondantes toxines résorbées par l'intestin. Il consi- dère la présence des sulfo-éthers dans l'urine comme l'indice de la putréfaction intestinale, et le dosage des sulfo-éthers comme un moyen d'apprécier le degré de la putréfaction et de l’auto-intoxication. 11 nous fait connaître une littérature médico-chi- mique extrèmement riche ayant trait à ces questions. Malheureusement l'exposé des résultats manque un peu de critique. Beaucoup de ces travaux allemands -ont été faits dans de mauvaises conditions, sans tenir un compte suffisamment exact du régime alimentaire. Des travaux récents faits en France ont montré que les sulfo-éthers sont en rapport avec la dégradation normale des albuminoïdes dans l'organisme, qu'ils se forment en dehors de l'intestin, et que leur quan- tité dans l'urine exprime, non le degré de l’intoxi- eation intestinale, mais la quantité des albumines dégradées dans l'organisme. D'ailleurs, les autres ques- tions d'analyse urinaire donnent prise à la même critique : pour l’excrétion des substances normales et anormales de l'urine, l’auteur n’a pas tenu assez compte des ingestions alimentaires; il nous effraie par le nombre et la variété des coefficients urinaires, dont Ja signification, plus ou moins fantaisiste, n'est pas dis- cutée. En somme, cette partie du livre de M. Combes æeprésente une science biologique superlicielle, bien que très compliquée; il est regrettable que l'auteur n'ait pas apporté, à l'exposé des notions scientifiques sur l'auto-intoxication intestinale, le même esprit judi- cieux qui fait de lui un observateur émérite et un habile praticien. M. LaBré, Médecin des Hôpitaux, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. 5° Sciences diverses Nardi-Greeco (Carlo). — Sociologia giuridica, — 4 vol. in-8°, de xxvin-#80 pages. (Prix : 12 fr.) Bocca frères, éditeurs. Turin, 14907. | Après l'ouvrage presque classique de Post : Grundzüge der Ethnologischen Jurisprudenz, le livre de M. Nardi- Greco vient à son heure. Il nous résume la plupart des faits ethnologiques se rapportant à ce que l'on appelle le droit, et, si les matériaux ethnologiques utilisés par l’auteur sont parfois vieillis et incomplets, la conclusion se détache néanmoins assez nettement. La méthode de M. Nardi est celle de son maître, le Professeur Asturaro; elle est, d'ailleurs, expliquée par ce dernier dans la préface à la « Sociologie Juridique ». Les rapports entre les phénomènes sociaux sont ou de cause où de coexistence.Le premier groupe comprend les rapports de condition ou économiques ; les rapports génésiques, c’est-à-dire qui surgissent de la filiation par naissance ; et enfin {é/éologiques, c'est-à-dire les rap- ports des moyens au but, rapports qui surgissent des volontés individuelles. Dans le second groupe, les rap- ports sont aussi de trois sortes : les rapports du moins urgent au plus urgent; ceux du plus général au moins général; et enfin les rapports du plus complexe au moins complexe. Le droit surgit des rapports du premier groupe, et surtout des phénomènes de condition, c'est-à-dire économiques, et des phénomènes génésiques, c'est- à-dire familiaux. En. somme, le droit n’est que la garantie des rap- ports normaux et constants. Quelle que soit la com- plexité des phénomènes économiques ou de parenté, partout le droit sert à conserver les biens économiques et à consolider les rapports génésiques ou familiaux. D'autre part, chronologiquement, le droit apparaît avant la guerre. : C'est en prenant pour base ces propositions que l'au- teur examine d'abord l'origine des phénomènes juri- diques dans les sociétés animales et dans les sociétés humaines primitives; puis il passe en revue ces phé- nomènes tels qu'on les observe dans les « commu-- nautés domestiques » (familiales), dans les commu- nautés de village (par exemple « le mir » russe). Il envisage enfin les phénomènes juridiques dans le domaine économique et dans le domaine politique (quand la fonction juridique est assumée par les pouvoirs publics), insistant surtout sur les phénomènes juridiques dans l’état individualiste. De tous ces examens, M. Nardi-Greco déduit les carac- téristiques générales du droit que j'ai données plus haut : garantir les biens et les activités soit de la totalité de la société, soit de certains groupes dans cette société. Il en déduit aussi la distinction entre le droit, d'une part, et la morale, la religion, et autres «normes » de la conduite sociale, d'autre part. En résumé, le livre de M. Nardi-Greco est un essai, une tentative intéressante pour baser la notion du droit sur les faits ethnologiques et d’après une méthode scientifique. A ce titre, il mérite d’être lu et étudié par les savants et surtout par les anthropologistes, les ethnographes et les sociologues. J. DENIKER, Bibliothécaire du Muséum national d'Histoire naturelle, Modestov (Basile). — Introduction à l'Histoire romaine. Préface de M. Sazouon Reacx, de l'Ins- üitut. Traduit du russe par M. Micnez DEeuNEs.— 1 vol. in-4k° de 472 pages avec 39 planches hors texte et 30 fig. dans le iexte. (Prix : 15 fr.) F. Alcan, éditeur. Paris, 1907. Depuis trente ans, les études préhistoriques et proto- historiques ont pris un essor extraordinaire en Italie, mais on n'avait pas encore présenté d’esquisse générale bien informée pouvant guider le savant spécialiste ou le débutant dans le vaste domaine de la préhistoire de ce pays. Cette œuvre a tenté M. Modestov, auquel un long séjour en Italie a permis d'étudier limmense matériel archéologique et palethnologique réuni à la suite des nombreuses fouilles pratiquées à Rome même et dans d’autres parties du pays. Grâce à ses études, il a pu faire reculer devant lui le point de départ de l’histoire romaine. Aux monts Albains, il a retrouvé les traces d’une période en grande partie antérieure à la vie historique de l'Esquilin et du Quirinal ; dans le sud-ouest de l'Etrurie, il a rencontré l'époque des Falisques, les plus proches parents des Latins. Les terramares de la vallée du Pô, les habita- tions sur pilotis en terre ferme et les palafites des lacs Vénètes lui ont présenté des vestiges des premières colonies aryennes établies sur le sol italien. Enfin, il à reconnu les traces des Sicules, signalés par les histo- riens comme ayant occupé ce territoire avant la race indo-europérenne, et les fouilles pratiquées en Sicile lui-ont révélé une civilisation se rattachant à l’époque néolithique. D'importants développements sont donnés x l'étude des Etrusques, qui occupent une large place dans l'Italie préhistorique et au sujet desquels M. Mo- destoy se trouve en désaccord avec Mommsen et d’autres savants. Les discussions sur ce point constituent une des parties certainement les plus originales et intéres- santes du livre. De nombreuses gravures reproduisent les objets et les monuments les plus instructifs qui servent de base à cette préhistoire. 984 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS .Séance du 48 Novembre 1907. L'Académie présente à M. le Ministre de l'Instruc- tion publique la liste suivante de candidats : a) pour le poste de directeur de l'Observatoire de Marseille : j° M. Bourget ; 2° M. Simonin; b) pour le poste de directeur de l'Observatoire d'Alger : 1° M. F. Gonnes- siat ; 2° M. L. Fabry. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — MM. Bassot, Ch. An- dré, B. Baillaud, E. Stephan, L. Picart et E. Esclan- gon, Th. Moreux, Bruck, Chofardet el Pernet pré- sentent respectivement leurs observations sur le pas- sage de Mercure sur le Soleil, faites le 13-14 novembre aux Observatoires de Nice, Lyon, Toulouse, Marseille, Bordeaux, Bourges et Besançon. — M. A. de la Baume- Pluvinel, par l'étude du spectre du Soleil dans le voi- sinage du bord de Mercure, a constaté que les radia- tions solaires ne paraissent nullement absorbées par leur passage à travers l'atmosphère de la planète. — M. H. Deslandres discute les résultats obtenus par l'observation de la comète Daniel 1907 d et propose un plan général d'organisation pour l'étude physique com plète des comètes. — M. G. Le Cadet a observé à Phu- Lien (Tonkin) la disparition complète des satellites de Jupiter dans la nuit du 3 au # octobre. — MM. Cirera et Balcelli déduisent de leurs observations qu'il y a très probablement un rapport de cause à effet entre l'activité solaire et les perturbations magnétiques. Cette influence solaire s'exerce ordinairement dans deux directions, radicale et tangentielle, et quelque- fois (aux paroxysmes solaires) dans des directions qui forment un angle très ouvert avec la direction radiale. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. C. Tissot et F. Pellin corrigent l'astigmatisme des prismes biréfringents en superposant à l'oculaire une lentille cylindrique de puissance convenable, orientée de manière que la sec- tion axiale coïncide avec le plan de symétrie du prisme. MM. H. Abraham et Devaux-Charbonnel étudient la propagation des courants téléphoniques sur les lignes souterraines. Au départ, la différence de potentiel et l'intensité du courant doivent présenter un écart de phase de 37/#, quelles que soient les con- stantes de la ligne et la fréquence du courant. — MM. A. Cotton, H. Mouton et P. Weiss ont éludié, avec le gros électro-aimant du Polytechnicum de Zürich, la biréfringence magnétique du nitro-benzène. Dans un champ uniforme, elle est proportionnelle au carré du champ; dans un champ non uniforme, mais très allongé, le phénomène devient extrèmement net. — MM. G. Sizes et G. Massol ont constaté que les diapa$ons mis en vibration émettent une série de sons partiels plus graves que leur son fondamental; cette série atteint plusieurs octaves et contient un assez grand nombre d'harmoniques intermédiaires. — M. F. Bordas a reconnu que les rayons Roentgen pro- voquent des changements dans la coloration des corin- dons analogues à ceux que produisent les rayons 7 du radium. — M. P. Gaubert a constaté que les sulfates de baryum et de strontium, cristallisant en solution sulfurique, donnent des formes semblables à celles u'on connaît dans la barytine et la célestine natu- relles: celles-ci sont identiques pour les divers sul- fates qui syncristallisent. — M. M. Daufresne a isolé de l'essence d'estragon l'aldéhyde p-méthoxycinnamique, Eb. 174° sous 15 mm. D'autre part, la fixation de HIO sur l'estragol lui a donné une monoiodhydrine du p-méthoxyphénylpropanediol. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Ch. Vaillant montre que le diagnostic de la mort réelle peut être établi, quant à présent, par l'examen radiographique des organes abdominaux, qui ne se devinent même pas sur le vivant et se dessinent très nettement sur le cadavre. — M. R. Robinson montre que les appen- dices épiploïques ou graisseux se retrouvent chez le fœtus et l'enfant; ils sont au gros intestin ce que le grand épiploon est à l'intestin grèle. Leur rôle est un rôle mécanique, hydrodynamique en mème temps que chimique. — M. L. Boutan à constaté que les larves de Xylotrechus quadrupes (borer indien) du caféier sont tuées à une température de 50° et que le caféier supporte sans inconvénient cette température. Il a construit une étuve pratique pour la destruction des larves sur l'arbre même. — M. Ducamp a observé, dans un champ servant aux exercices du Génie, de nombreuses anomalies sur les fleurs de trèfle blanc; elles sont dues au piétinement. — M. ïf. Molliard a constaté, chez des cultures pures d'Ulex europæus sur milieu gélosé contenant du glucose, que la formation des piquants allait en s’accentuant au fur et à mesure que la quantité de glucose augmentait. — M. L. Ber- trand à étudié les nappes de charriage nord-pyré- néennes et pré-pyrénéennes à l'est de la Neste. — M. E. Chaput montre que, à l'époque de la terrasse pliocène de 130 m., la Loire s'écoulait dans la Saône par la vallée de Chagny. Lorsque ce régime hydrogra- phique a cessé par une capture de la Loire-(vers Paray-le-Monial), la Saône et la Loire, dès lors indé- pendantes, ont creusé leurs vallées de la même quan- tité (130 m..) jusqu'au niveau actuel. — MM. F. Dienert et E. Bouquet, par l'étude de la radio-activité des eaux souterraines, ont reconnu que les eaux superficielles dissolvent rapidement dans le sol l'émanation qu'elles rencontrent. Séance du 25 Novembre 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. T. Lalesco présente ses recherches sur l’ordre de la fonction entière D (à) de Fredholm.— M. B.Heywood étudie quelques points de la théorie des fonctions fondamentales relatives à certaines équations intégrales. — M. P.Montel montre qu'une famille de fonctions analytiques ou harmo- niques, d'un nombre quelconque de variables, ne pre- nant, dans un domaine où elles sont continues, ni la valeur 0, ni la valeur 1, estune famille également con- tinue ; de toute suite infinie de ces fonctions, on peut extraire une suite nouvelle convergeant uniformément vers une fonction limite, — M. H. Dulac signale quel- ques propriétés des intégrales passant par un point singulier d’une équation différentielle. — M. G.Leveau présente ses déterminations des éléments solaires et des masses de Mars et de Jupiter d'après les observa- tions méridiennes de Vesta. — M. D. Eginitis a observé le passage de Mercure sur le disque du Soleil à l'Obser- vatoire d'Athènes par un ciel en partie couvert; il na pas remarqué d'aplatissement sensible de la planète. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M.J. Becquerel estime que la dispersion rotatoire magnétique des cristaux aux environs des bandes d'absorption est due entièrement à l'effet simultané de la dispersion anomale et de la séparation des bandes en deux composantes corres- pondant à des vibrations circulaires de sens opposés. — MM. A. Mayer, G. Schaeffer et E. Terroine mon- trent qu'en général l'addition de traces d'acides à des solutions colloïdales négatives, d’alcalis à des solutions posilives, augmente la grandeur des granules colloïdaux. — MM. L. Brunel et P. Woog ont réalisé la synthèse ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 985 : de l’ammoniac à partir de ses éléments en faisant ‘passer un mélange d'air et d'hydrogène en excès sur de loxyde de nickel à 1809-2009. — M. M. Guichard, par action de la vapeur d'iode sur de la fonte d'uranium à 500° en tubes scellés, a obtenu le tétraiodure d'ura- nium, Ul*, composé très instable. — MM.G. Bertrand et M. Javillier ont perfectionné leur méthode de dosage de très petites quantités de zinc en séparant le calcium et le zinc par HFS ; ils arrivent à doser 1/30.000.000° de zinc dansune liqueur. — M. L. Henry, en faisant réagir J'acide nitreux sur l'isobutylamine,a obtenu un liquide constitué pour les trois-quarts par de l'alcool butylique tertiaire. Cette isomérisation nitreuse paraît assimi- lable à celle que présentent les éthers haloïdes sous l'action de la chaleur. — M. P. van Romburgh a étudié les particularités que présente le lupéol lors- “qu'on le fond et les attribue à la formation de deux variétés hétéromorphes énantiotropes. — MM. Ch. Moureu et A. Valeur ont dédoublé la méthylspartéine provenant de la décomposition de l'hydrate de méthyl- . spartéinium en deux isomères : «, F. 309-319, [an — = 550,4, et B, Eb. 1810-1830 sous 16,5 mm., [a] — + 9°,9. — M. G. Blanc, en partant du 6-méthyl-adipate de méthyle, a réalisé la synthèse de la lactone de l'acide 2:4-diméthylcyclopentanol-2-acétique-1, Eb.127°-130° sous 42 mm.— M. M. Leprince est parvenu à isoler du gui un alcaloïde volatil, CH" Az, qu'il a obtenu à l’état de chloroplatinate. . 3° SCIENCES NATURELLES. — M. E. de Bourgade de la Dardye, à propos d'une note récente de M. Vaillant, signale qu'il a déja indiqué en 1898 la possibilité de reconnaître la mort réelle par la radiographie de l'in- testin. — M. J. Lignières montre qu'on peut diagnos- tiquer la tuberculose chez les animaux, en particulier chez les Bovidés, par l'emploi simultané de l'ophtalmo- et de la cuti-dermo-réaction, sans avoir recours aux injections sous-cutanées de tuberculine. — M. Moussu déduit de ses expériences de cultures de tuberculose 7n vivo que la réaction à la tuberculine n’est pas une réaction qui tient à la présence même de bacilles tuberculeux dans un organisme, mais bien une réaction d'imprégnation de cet organisme par des produits toxiques élaborés parle bacille de Koch.— M. C. Beck propose de réaliser la cure d'altitude appliquée au traitement de la tuberculose par la cure en ballon, qui offre, sur les stations de montagne, l'avantage d'une plus grande pureté chimique et bactériologique de l'air. — M.Foveau de Courmelles apporte 53 cas de régression des fibromes et de stérilisation ovarique chez la femme par l'action profonde des rayons X. — MM. C. Fleig et E. Jeanbrau ont reconnu que la marche du travail des deux reins n’est nullement pa- rallèle, soit pour l’excrétion de l’eau, soit pour l'excré- - tion des matières dissoutes, mais qu'elle est régie par uve série d'oscillations établissant un vrai balancement de l’un à l’autre. — M. L. Roule a étudié des colonies d’Alcyonaires provenant des Moluques et présentant des passages des colonies étalées aux colonies dressées et, parmi ces dernières, de la symétrie radiaire à la symétrie bilatérale avec répétition des pièces homo- logues. — M.J. Loeb répond à certaines critiques adressées par M. Delage à ses travaux. — MM. R. Gaultier et J. Chevalier montrent que l’action hypo- tensive exercée par l'extrait aqueux du gui est due, en presque totalité, à une action centrale exercée par la substance sur le système nerveux vasomolteur. — M. P. Claverie a fait l'étude anatomique de quelques Cypéracées textiles de Madagascar dans le but de déterminer l'origine des pailles qu'elles fournissent. — M. P. Becquerel signale un cas remarquable d’auto- tomie du pédoncule floral du tabac, provoquée par le traumatisme de la corolle. — M. Leclerc du Sablon a observé des figues réduites à un capitule de fleurs mâles toutes visibles de l'extérieur, qui lui paraissent devoir être considérées comme un retour à la forme primilive de la figue, correspondant à une époque où la symbiose entre le figuier et le blastophage n'existait pas. — M. L. Mangin distingue, dans la maladie du rouge du sapin, le rouge général du rouge partiel. Le premier est dû soit à la sécheresse, soit aux Bos- tryches, soit au Rhizomorphe; le second, qui ne com- promet pas la vie de l'arbre, est dû soit au traumatisme, soit au Phomia abietina, soit à l'Aecidium elatinum.— M. F. Pelourde montre que, chez les Marattiacées vivantes, les variations de structure du système fasci- culaire sont analogues à celles que l’on rencontre chez les Caulopteris fossiles. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 19 Novembre 1907. M. le Président annonce le décès de M. H. Folet, Cor- respondant national de l'Académie. — M. Ch. Moureu est élu membre titulaire dans la Section de Pharmacie. M. Ch. Fernet a étudié, d’après des statistiques de divers services d’'hôpitaux, la part qui revient à l’alcoo- lisme dans la mortalité générale. Sur un total de plus de 4.500 décès, l'alcoolisme intervient, comme cause de mort, dans le tiers des cas (33,81 °/,); il en est la cause principale dans le dixième des décès (10,2 °/,); il en est la cause adjuvante dans plus de deux autres dixièmes (23,61 2/4). Il intervient dans la moitié de la mortalité chez les aliénés. Son influence est plus marquée chez les hommes que chez les femmes.— MM. L. Landouzy et J. Troisier, chez un bébé de soixante-dix jours, atteint d'hérédo-syphilis et mort athrepsique, ont trouvé à l’autopsie les lésions suivantes : canal artériel persistant, aorte diminuée de calibre en aval de la sous- clavière gauche, rate grosse, foie augmenté de volume et présentant des lésions dégénératives et inflamma- toires, rein présentant des lésions inflammatoires. Séance du 26 Novembre 1907. M. F. Henneguy est élu membre titulaire dans la Section d’Anatomie et Physiologie. M. H. Vincent établit que les lésions du foie, plus particulièrement celles des cellules hépatiques, reten- tissent gravement sur les propriétés défensives, à la fois cellulaires et humorales, de l'organisme qui en est atteint. Les altérations importantes du foie provoquent une diminution du taux des leucocytes du sang, une atténuation du pouvoir opsonisant et une insuffisance notable de l’alexine du sérum, et font fléchir le niveau de la résistance aux germes infectieux, en particulier au bacille tétanique. — MM. G. Lemoine et Gérard communiquent un travail sur les conceptions diverses de l’action antitoxique du foie vis-à-vis des poisons tubereuleux. —- M. Leroux lit un travail sur l’adéno- pathie trachéo-bronchique dans ses rapports avec la tuberculose pulmonaire chronique chez les enfants. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 16 Novembre 1907. MM. A. Gilbert et M. Herscher n'ont pas trouvé de pigments biliaires dans les fèces de l'adulte ; on y ren- contre parfois de la stercobiline et toujours du sterco- bilinogène très abondant. Chez le nouveau-né, c'est exactement le contraire qui se passe. — MM. A. Des- grez et J. Posen ont constaté que le poids moyen de la molécule élaborée par le cobaye est légèrement augmenté par ingestion prolongée de petites doses d'acide phosphorique; il est, au contraire, diminué par les deux phosphates mono- el trisodiques. — MM. C. Parhon et C. J. Urechie ont vérifié les bons effets du chlorure de calcium dans le traitement de l’eczéma, — Mie A. Drzewina signale des faits qui lui paraissent contraires à l'existence d'une autotomie psychique chez les Crabes : en particulier, l’autotomie sans exci- tation violente peut se produire après isolement des ganglions cérébroïdes. — M.H. Piéron ne croit pas cette objection suffisante. Il a recherché l’aulotomie protec- trice réflexe chez les Orthoptères; il ne l’a pas cons- tatée chez les Mantides, mais on l’observe chez les ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Gryllides, les Locustides, les Acridides et les Forficu- lides. — M. A. Netter a observé également l’action favorable des sels de calcium dans le traitement de l'eczéma et aussi dans la tétanie expérimentale. Elle se justifie par leur action antagoniste vis-à-vis des sels de sodium. — M. E. Fauré-Frémiet a retrouvé le Trichorhynchus tunmotensis dans des mousses récol- tées aux environs de Marly-le-Roï; lorsque le milieu se dessèche ou s’altère, il forme des kystes de protec- tion très résistants, qui reviennent à la vie active dans l'humidité. — M. Ch. Porcher, dans les conditions normales, n’a jamais trouvé trace des chromogènes de l'indol et du scato! dans le lait de la chèvre, alors même qu'ils sont éliminés abondamment par l'urine. — MM. H. Cousin et H. Hérissey ont constaté que le thymol est oxydé par le ferment oxydant des champi- gnons avec formation de dithymol et d’autres pro- duits plus complexes. — M. A. Frouin a reconnu que les sucs pancréatiques sécrétés sous l'influence de diffé- rents régimes possèdent, à volume égal, des activités digestives sensiblement égales. — MM. A. Frouin et A. Mauté ont déterminé chez des chiens, par ingestion de sels de potasse, des lésions du rein, puis de la cir- rhose du foie et enfin l’ascite expérimentale. — M. L. Launoy à observé que la chromatine nucléaire de la cellule hépatique du lapin à jeun de vingt-quatre heures est très stable dans la solution de NaCI isotonique. — M. A. Wadoux a constaté que les leucocytes lavés, en l'absence de sérum, phagocytent, quoique faiblement, le bacille pesteux. Cette phagocytose devient d'autant plus intense qu'on ajoute plus de sérum antipesteux au milieu. — M. Ch. Hervieux caractérise l'acide gly- curonique dans les urines par sa réaction avec la p-bro- mophénylhydrazine, qui donne un précipité insoluble dans l'alcool absolu. — M. B. Bord a examiné dix-neuf syphilitiques en puissance d'accidents secondaires : douze présentaient des signes d’appendicite très évi- dents. — M. H. Dunschmann décrit une méthode simple de recherche du bacille typhique dans les garde- robes, basée sur l'emploi d’une solution de taurocholate. — M. C. Cépède présente une nouvelle cuvette à colo- ration à rainures mobiles. — MM. A. Gilbert et M. Chi- ray ont reconnu que le sang des cirrhotiques asci- tiques est dans un état constant d'hypoalbuminose. Séunce du 23 Novembre 1907. M. J. Nageotte décrit les variations du neurone sensitif périphérique (fenestrations, formation de pelo- tons péricellulaires, développement de fibres clavi- formes) qu'il a observées dans un cas d'amputation récente de la partie inférieure de la cuisse. — MM. H. Bierry, A. Pettit et G. Schaeffer ont préparé des sérums néphrotoxiques et hépatotoxiques par injec- tions intrapéritonéales à des lapins de nucléoprotéides de rein ou de foie (de chien), préalablement lavé par circulation d'eau salée dans les vaisseaux. — M. F. Arloing conclut, de nouvelles expériences sur des chiens et des veaux, que la cuti-réaction peut faire défaut sur des sujets tuberculisés. — MM. Chevrel et Roger ont isolé les hématoblastes en centrifugeant du sang de lapin reçu dans une solution hypertonique ; par injection de ces corps dans le péritoine, ils ont préparé un sérum antihématoblastique. — M. R. Du- bois montre que la chaleur est l'agent principal de transformation du distome immaturé de Gymnophallus margaritarum. — M. J. Salmon a constaté que les particularités que présente le système musculaire des ectroméliens sont en contradiction absolue avec l'hypo- thèse d’un arrêt de développement simple ou de cause mécanique. On observe plutôt des variations ostéogé- nétiques précoces avec adaptation du système muscu- Jaire. — M. G. Ravaut, par l’ophtalmo-réaction, a reconnu une fréquence très élevée de la tuberculose (43 °/,) parmi les aliénés de l'Asile d'Armentières. — M. J. Giaja n'a observé la présence de la raflinase, ni chez les Mollusques marins, ni chez les Crustacés marins, quoiqu'elle se trouve chez leurs congénères terrestres; seul, le Homarus vulgaris renferme de là lactase. — M. F. Henneguy a étudié le développement de la chorde dorsale chez l'Acanthias; aux dépens de la substance fondamentale se forment successivement des fibres élastiques, puis des fibres conjonctives, puis de nouveau des fibres élastiques. — M. L. Bory a vu une grande amélioration des symptômes, dans la tuberculose pulmonaire et la broncho-pneumonie infantile, succéder à l'injection sous-cutanée de glycé= rine au soufre. — M. F. Cathelin présente un nouvel instrument pour mesurer instantanément le volume intravésical de la prostate, en particulier celui du lobe médian. — M. G. Seillière a constaté que le coton traité par la liqueur de Schweitzer acquiert la propriété d'être digéré par le suc intestinal de l'escargot, même lorsqu'on le dessèche à 100°. — M. H. Piéron poursuit l'exposé de ses recherches sur l’autolomie chez les Décapodes. — M. A. Frouin montre que l'addition de peptone de Witte diminue l’action sécrétoire de HCGI sur la sécrétion pancréatique, tandis que les sucres lactose et saccharose augmentent cette action sécré- toire. — M. P. Wintrebert a constaté que la méthode de Powers pour déterminer la métamorphose des Axolotls, qui réussit en Amérique, n'a en France aucun succès. . M. L. Maillard est élu Membre titulaire de la Société. | RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 41 Novembre 1907. MM. J. Parisot et M. Lucien ont observé que l’ac- tion hypertensive des extraits de glandes surrénales de tuberculeux est moindre que celle des extraits de glandes normales. — M. G. Etienne signale les bons effets de l'injection d’Ag colloïdal électrolytique dans le tissu cellulaire sous-cutané sur l'infection strepto- coccique expérimentale chez le lapin. — MM. A. Harter et M. Lucien communiquent une observation d'éosi- nophilie dans un cas de blastomycose humaine géné- ralisée. — MM. J. Parisot et A. Harter, par ligature du cholédoque ou injection d'acide acétique dilué dans ce canal, ont obtenu, à côté de lésions cellulaires, des cirrhoses au début. — M. M. Perrin a reconnu que les cirrhoses du foie et les phénomènes d'hyper ou d'hypohépatie n'entraïnent pas nécessairement de modifications quantitatives des leucocytes, celles qui se produisent étant sous la dépendance des complica- tions. Quant aux modifications qualitatives, l'équilibre leucocytaire ne présente pas de grosses variations. SOCIÈTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 15 Novembre 1907. M. G. Boizard : Sur la conductibilité électrique dans les mélanges d'acide ou de base et d'eau. Dans les mélanges de bons électrolytes et d'eau fonction- nant comme solvants, l'addition d’un électrolyte, même fort, à l'état pur donne toujours une solution moins conductrice que le solvant correspondant, à partir d'une certaine concentration de ce dernier. Lorsque, par exemple, on dissout du bisulfate de potassium solide dans des mélanges d'acide sulfurique et d’eau, il se forme des solutions plus conductrices que le sol- vant correspondant, tant que celui-ci renferme moins de 20 °/, d'acide (20 grammes d'acide sulfurique pur pour 80 grammes d'eau) ou plus de 96°/,. Entre ces deux limites, l'addition de bisulfate abaisse la conduc- tibilité du solvant. Ce phénomène, découvert par M. Bouty en 1889, mais non publié, a déjà été décrit à la Société de Physique par M. Hollard (mai 1906) dans le cas des sulfates dissous dans les mélanges contenant de 10 grammes à 250 grammes d'acide sul- furique par litre. M. Boizard l'a étudié dans les mélanges d'acide sulfurique et d’eau de toutes concentrations, depuis l'eau pure jusqu'à l'acide pur, et généralisé dans le cas des mélanges avec l’eau des acides chlor- hydrique, azotique, phosphorique, ou des bases po-. 987 tasse et soude, ou même de sels tels que l’azotate d'ammonium. Il a de mème montré que la diminution de conductibilité s'observait par addition, outre les sulfates ou bisulfates, d'un bon électrolyte : acide minéral ou organique, ou sels divers : chlorures, azo- tates, acétates, phosphates, etc. Les variations de con- ductibilité, dans chaque solvant, en fonction de la quantité #1 de substance dissoute, peuvent être rame- nées à cinq types principaux; les deux plus fréquents sont caractérisés par une variation proportionnelle à m ou une variation moins rapide que 2». De plus, il n'y à isoconductibilité (c'est-à-dire variation nulle de la conductibilité du solvant par addition d'un électro- Ayte) que dans le cas où la dissolution n’est accompa- gnée d'aucune réaction chimique, et cette isoconduc- tbilité n’a lieu que pour deux pourcentages du solvant: lun faible, l’autre élevé. Pour SO“KH dans les mélanges d'acide sulfurique et d’eau, ces pourcentages sont 20/4 et 96°/,. Ces phénomènes s'expliquent simplement en ne faisant intervenir que les équilibres entre les ions ou les équilibres chimiques; ils permettent de se rendre compte des réactions qui peuvent se passer en solu- tion. C’est ainsi que, dans l’action de l'acide sulfu- rique sur le sulfate ou le bisulfate de potassium, il paraît se former un mélange de sulfate neutre et de . bisulfate tant que l'acide employé a une concentration inférieure à 20°/, ; de 20 °/, à 96 °/,, exclusivement du bisulfate; de 96 °/, à 100°/,, un mélange de bisulfate et de pyrosulfate acide; à 100 °/,, du pyrosulfate acide. La méthode employée peut être certainement généra- lisée pour l'étude des sels doubles par exemple. L'étude de SO“H? pur a permis, en passant, de constater que cet acide suit la loi des conductibilités moléculaires et donne des solutions meilleures conductrices que les solutions aqueuses correspondantes. — MM. A. Cot- ton et H. Mouton: Biréfrinçence magnétique de liqui- des organiques non colloïdaux. Dans leurs communica- tions antérieures, MM. Cotton et Mouton avaient montré que la biréfringence magnétique (Majorana), ainsi que d'autres phénomènes magnéto-optiques observés dans certaines liqueurs colloidales, pouvaient être expliqués, avec les caractères singuliers qu'ils présentent, par la présence dans ces liquides de particules ultramicros- copiques en suspension. Jusqu'ici les nombreuses recherches faites pour retrouver le même phénomène dans des liquides purs étaient restées infructueuses. MM. Cotton et Mouton, employant un champ plus intense et la méthode optique qui leur avait servi pour ‘étude des colloïdes, ont obtenu des résultats positifs. Le nitrobenzène possède nettement une biréfringence magnétique dont le signe est positif Dans un champ uniforme de 18.500 gauss, à la sortie d'une cuve de 4,2 d'épaisseur, une vibration rectiligne incidente, à 450 des lignes de force, est transformée en une vibra- tion elliptique, et l'angle $ dont la tangente mesure le rapport des axes est égal à 36! à la température de 24° (lumière jaune de l'arc au mercure). Cette biréfrin- gence varie proportionnellement au carré du champ magnétique, mème quand le champ dépasse 31.000 unités (mesures faites avec le gros électro-aimant du Polytechnikum de Zurich). Il n'y a donc pas d’indi- cation d'une saturation, comme on lavait observé pour l'hydroxyde de fer colloiïdal. Le phénomène ne peut être attribué à la présence de particules acciden- telles en suspension. MM. Cotton et Mouton ont retrou- vé la même propriété, plus ou moins marquée, dans tous les composés liquides de la série aromatique qu'ils ont étudiés. La benzine elle-même est active. Au contraire, les liquides de la série grasse étudiés (au nombre d’une vingtaine : carbures, alcools, éthers, ete., etc.\ se sont montrés inactifs. Le cyclohexane et -Ja cyclohexanone, composés cycliques sans doubles liaisons, se sont montrés inactifs, de même que l'essence de térébenthine. Les composés aromatiques et analogues se distinguent donc très nettement au point de vue de cette propriété nouvelle. Elle ne leur appartient cependant pas exclusivement : le sulfure de carbone présente, en effet, une biréfringence magné- tique, même quand on le filtre sur bougie ou qu'on le distille avant l'expérience; cette biréfringence est négative, son rapport à celle du nitrobenzène est — 0,19. Elle varie, elle aussi, proportionnellement au carré du champ. Elle ne peut être attribuée à une impureté accidentelle. — M. L. Bloch : Zonisation par barbotage. Lord Kelvin à fait voir en 1894 que l'air atmosphérique, après avoir barboté dans l’eau, pos- sède une charge électrique, négative lorsque l'air a barboté à travers l’eau pure ou presque pure, nulle ou positive quand l’eau est mélangée d'impuretés acides ou salines. Ce phénomène a été étudié depuis par d'autres expfrimentateurs, qui l'ont tous rapproché d'un phénomène analogue découvert par Lenard, l'électrisation de l'air au voisinage des chutes d’eau. Lorsqu'un jet d'eau se brise contre un obstacle, l'air avoisinant est électrisé. Sa charge est négative si l’eau est pure; elle s’inverse et devient positive lorsqu'on prend de l’eau salée. M. Bloch a repris l'étude systéma- tique des phénomènes de barbotage, en s’atlachant surtout au barbotage de l'air dans l’eau distillée. L'air employé est filtré sur un tampon de coton pour perdre toute trace de conductibililé antérieure pouvant pro- venir de la détente à l’orifice de la canalisation. Il est de lasorte privé de poussières, qui pourraient modifier la dimension des centres électrisés dus au barbotage. Contrairement à ce qu'on pouvait attendre, d’après l’'analogie généralement admise, le barbotage de l'air dans l'eau donne un résultat tout différent du phéno- mène des chutes d'eau, où barbotage de l’eau dans l'air. D'après Kühler et Aselmann, le phénomène est strictement unipolaire. L'eau distillée ne produit dans l'air que des ions d’un seul signe, des ions négatifs. Au lieu de cela, on trouve dans l'air, après barbotage, des ions des deux signes, en quantité comparable. La charge négative transportée par l'air n'est qu'un excès de charge négative sur une charge positive également présente dans le gaz. Une autre différence très impor- tante résulte des mesures de mobilité : on trouve, dans le cas du barbotage, des mobilités moyennes assez grandes, de l’ordre du millimètre, c’est-à-dire 10 fois moins grandes à peine que celles des ions du radium ou des rayons Rôntgen. Au contraire, dans le cas des chutes d'eau, on à observé des mobilités moyennes beaucoup plus faibles, qui rapprochent les ions pro- duits dans ces conditions des gros ions trouvés dans les gaz de la flamme par Langevin et Bloch. Il semble résulter de là qu'il ne faut pas considérer comme tout à fait comparables l'ionisation par barbotage et l'ionisa- tion par chutes d’eau. Dans le cas de l’eau distillée, il est possible de discerner une légère dissymétrie entre les ions des deux signes. Les mobilités moyennes ne sont pas tout à fait les mêmes, et, comme dans le cas des petits ions, ce sont les ions négatifs qui sont les plus mobiles. Si l'on remplace l’eau distillée par une solution d'acide sulfurique, une solution normale par exemple, les phénomènes observés sont tout différents : 1° la charge totale emportée par le gaz est positive; elle est, d’ailleurs, encore la différence entre deux charges de signe contraire, beaucoup plus grandes que leur différence; 2° les mobilités des ions des deux signes ont diminué dans des proportions énormes ; elles sont de l'ordre des mobilités des gros ions (1/300 de millimètre); 3° il n'est plus possible de trouver une dissymétrie de mobilité entre les ions des deux signes. Les solutions plus concentrées se comportent comme la solution normale. Les solutions moins concentrées se rapprochent peu à peu du type de l’eau pure. Elles donnent lieu à un accroissement continu des mobilités, en même temps que la charge totale s'annule pour une solution 1/64 normale et redevient négative pour les solutions extrêmement diluées. L’acide chlorhydrique présente des phéno- mènes analogues. Certains liquides organiques, comme l'alcool, présentent le phénomène d'ionisation par barbotage d’une manière intense. Par contre, l'huile 988 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de vaseline, le mercure ne donnent rien. Il ne semble pas que l'effet soit lié à la simple déformation des surfaces liquides. Pour avoir des effets constants, il est indispensable d'opérer à température constante. — M. M. de Broglie montre que la présence de centres neutres dans l'air qui barbote dans des solutions diluées a pour effet de faire varier l'effet d'ionisation et notamment de l’augmenter très fortement dans le cas des solutions très étendues. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 8 Novembre 1907. MM. P. Breteau et H. Leroux exposent une méthode relative au dosage rapide du carbone et de l'hydrogène dans les substances organiques. Après avoir indiqué comment les dispositifs de Dennstedt, Morse et Taylor, Carrasco et Plancher paraissent pourvoir à des exi- gences particulières de la combustion des matières, ils décrivent le dispositif utilisé, dans lequelinterviennent simultanément les organes auxquels les procédés pré- cités doivent séparément leur supériorité spéciale. Les résultats obtenus sont des plus satisfaisants. — M. Bre- teau, à propos de la note de M. Berg sur l'analyse d'alliages plomb-étain, etc., indique les très bons résultats de la méthode de fusion soufre et carbonate alcalin, qu'il emploie depuis longtemps et qu'on trouve dans le Traité de Frésénius. Il signale qu'il l’a décrite dans son ouvrage sur les falsifications alimentaires. — M. A. Valeur et Ch. Moureu exposent leurs recherches sur la spartéine. — M. H. Copaux décrit un silico-molybdate argento-potassique de couleur rouge. — MM. G. Griner et G. Urbain ont fait l'ana- lyse chimique et spectrographique de la substance appelée bauxium par M. Bayer et considérée par ce chimiste comme un nouvel élément. Il résulte de cette analyse que le bauxium est un mélange de vanadium et de tungstène. — M. G. Urbain, en poursuivant ses recherches sur les phosphorescences cathodiques des composés des terres rares, à constaté que le sulfate de gadolinium terbifère présente les bandes de phospho- rescence que sir W. Crookes a attribuées les unes aux méta-éléments G-B et G-à, les autres à des éléments nouveaux, ionium et incognitum. L'on ne saurait donc douter que ces éléments de sir W. Crookes s’identitient avec le terbium. Les faits observés n’éftablissent aucu- nement la complexité du terbium tel que M. G. Urbain l'a défini récemment. Ils s'interprètent suflisamment en admettant que le système phosphorescent, sulfate de gadolinium-terbium, change de phosphorescence lorsque l’on fait varier les proportions relatives du godolinium et du terbium. Les faits observés jusqu'ici proviennent de l'observation de termes consécutifs de fractionnements. Pour résoudre complètement ce pro- blème, l'auteur à entrepris une série d'expériences directes à partir du gadolinium pur et du terbium pur. Il publiera prochainement les résultats de ces expé- riences synthétiques. M. G. Urbain expose la longue série d'expériences et de mesures qui lui ont permis d'établir que l’ytterbium de Marignac est un mélange de deux éléments : le néo-ytterbium et le lutécium, qui diffèrent l'un de l'autre et par le poids atomique et par leurs spectres de lignes et de bandes. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 2% Octobre 1907. MM. A. G. Green et P. E. King ont réussi à prépa- rer les éthers carboxyliques colorés des phtaléines et de leurs éthers mono et di-méthyliques. Ils sont très instables, étant saponifiés rapidement, non seulement par les alcalis ou acides faibles, mais même par l'eau. Ils forment avec les acides des sels d'oxonium de cou- leur plus foncée. Tandis que les éthers de la phénol- phtaléine etde la monométhylphénolphtaléine s'obtien- nent à l'état libre, les éthers de la quinolphtaléine et de la monométhylquinolphtaléine ne peuvent être isolés qu sous forme de sels d'oxonium. Ces fails mettent hors d doute Ja structure. quinonoïde de ces substances. M. N. T. M. Wilsmore a étudié le gaz qui se forme par l’action d’un fil de platine chaud sur l'anhydride acétique ; l'analyse et la densité lui assignent la formule C?H°0. Il se combine avec l’aniline pour former l'acéta- nilide, avec AzH* liquide pour donner Facétamide et avec l'alcool pour fournir l’éther acétique. C'est um nouvel anhydride, de formule CHE : CO ou CH « C.0H, premier membre de la série des cétènes. — M. J. N. Collie montre que le groupe CH°.CO"(cétide) peut don- ner, au moyen de réactions simples, un grand nombre de composés intéressants; ainsi, par union de plusieurs de ces groupes, comme dans l’acétoacétate d'éthyle H(CH°.CO)*OH ou l'acide déhydracétique H(CH°.CO)0H, on obtient des polycétides, qui, par hydratation,« réduction, oxydation, perte de CO, etc., reproduisent beaucoup de composés trouvés dans les plantes. — MM. J. N. Collie et E. R. Chrystall, en chauffant un mélange d’acétoacétate d'éthyle avec C*HFONa et en traitant le résidu visqueux avec HCI, ont obtenu un composé cristallin C°H1#05,F. 169, donnant la réaction de l’orcinol; chauffé à 140° avec H?S0* concentré, ils décompose en CO, alcool, acide acétique et un com- posé C“#H*°0%,F. 2509, identique avecle produit de con— densation de l’orcinol et de l'acétoacétate d'éthyle. — M. J. Me C. Sanders présente un générateur à gaz simple pour les opérations analytiques. — M. J. G. Brown à préparé quelques ferrocyanures doubles de calcium avec le potassium et l'ammonium. — M. 3. Moir modifie sa méthode de détermination des halo- gènes dans les substances organiques en adoptant le procédé de Volhard de titration en retour par le thio- cyanate normal. — MM. Al. Me Kenzieet H. A. Muller ont constaté que, dans la saponification fractionnée du r-mandélate de /-menthyle, on peut obtenir un mélange d'acides mandéliques soit dextrogyre, soit lévogyre; le premier est normal, le second anormal. — MM. F. Buc- kney et H. O. Jones ont examiné de nombreux déri- vés de pyridinium et de quinolinium ayant un atome d’Az asymétrique et les ont trouvés dépourvus d’acti- vité optique. Seul le d-bromocamphosulfonate d’allyl- kairolinium parait dédoublable en deux sels de bases actives. — M. H. Henstock et M!° B. E. Woolley, en éliminant HCI de l’éther chlorotriméthylsuccinique, ont oblenu l'acide 1 : 2-diméthyleyclopropane-1 : 2-dicarbo- « xylique. —M.H. S. Raper a recherché si l’acétaldéhyde, par condensation, peut donner des composés à chaine droite conduisant aux acides gras supérieurs. L'aldé- hyde 6-hydroxybutyrique, premier produit de conden- satioh de l’acétaldéhyde, donne lui-même, en se conden- sant, un aldéhyde à 8 atomes de carbone en ligne droite. — MM. T.S. Patterson, A. Henderson et F. W. Fairlie ont étudié l'influence du fumarate, du maléate . et du succinate d'éthyle comme solvants sur la rotation du tartrate d'éthyle. — MM. J. Walker et H. H. Be-. veridge ont observé que la 5-toluidine cristallise de l'eau et de l'alcool aqueux à l’état de monohydrate, « F. 419,5, landis que la base anhydre fond à 432,5. Le ® monohydrate s'efflorise dans l'air; la base anhydre absorbe de l’eau et se transforme en monohydrate. — M. D. C. Crichton a préparé des solutions d'hydrale « de tétréthylammonium, tétrapropylammonium et tri M méthylsulfine par l'action de KOH sur les chlorures correspondants. Il a obtenu un tétra et un hexahydrate d'hydrate de tétrapropylammonium, cristallisant à basse température. — MM. A.-W. Gregory et J. Me | … Callum ont modifié la méthode au persulfate pour la détermination du chrome dans le fer et l'acier. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. | ' | Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 18° ANNÉE 30 DÉCEMBRE 1907 Revue générale des Sciences pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aäresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, 29, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux y compris la Suède, la Norvège et la Hollande CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE & 1. — Nécrologie Le Professeur Angelo Heilprio. — Le savant professeur américain Angelo Heilprin, qui est mort le 17 juillet 1907, s'était fait connaitre comme naturaliste, géographe et explorateur. Originaire de Hongrie, où il était né le 31 mars 1853 dans la petite ville de Sato- ralja-Ujhely, Angelo Heïlprin était fils d’un intime ami de Kossuth, Michel Heilprin, qui fut l'un des chefs des Polonais dans leur lutte pour l'indépendance. Il n'avait que trois ans quand sa famille, exilée de Pologne, se réfugia en Angleterre et de là en Amérique. S'étant tourné vers les sciences naturelles, et particulièrement vers la Géologie, il retourna en Europe pour y com- pléter son instruction, à Londres, à Genève et à Vienne. Angelo Heilprin revint alors en Amérique et il y poursuivit une brillante carrière scientifique. Il fut nommé, en 4880, professeur de Faléontologie (Inver- tébrés) et de Zoologie à l'Académie des Sciences natu- relles de Philadelphie; puis, en 1900, il accepta une chaire de Géographie physique à l'Université de Yale, à Newhaven. Fondateur et premier président de la Société de Géographie de Philadelphie, il a écrit de nombreux Mémoires dans son Bulletin. Il a pu faire, au cours de divers voyages, d'impor- tantes investigations dans le domaine de la Géographie et de la Géologie. En 1886, il fit une étude approfondie de la péninsule de la Floride. Deux ans plus tard, il explora le plateau central de Mexico ; en 4890, il fit un voyage aux Îles Bermudes ; en 1892 il conduisit une expédition de secours envoyée à Peary. Le Professeur Beilprin à consigné les résultats de ses travaux et de ses voyages dans toute une série d'ouvrages : the United States: Geographical and qeological dis- tribution of animals (1887); Explora.in s on the West coast of Florida and in the Okeechobee wilderness (1887) ; Animal life of our seashore ; Geological eviden- ces ol'evolution: Alaska and the Klondike (1899); The Bermuda Islands (1899) ; Principles of Geology; The Aretie Proëlem: Mont Pelée and the tragedy of Marti- nique (1903). Au sujet du projet de construction du canal de Nicaragua, Angelo Heilprin avait attiré l'atten- REVUE GÉNÉRALE DES SCIFNCFS, 1907. Contributions to the tertiary geology of | tion sur les dangers d'une pareille entreprise dans une région aussi volcanique. Gustave Regelsperger. $ 2. — Astronomie Les détails de la surface de Jupiter. — Les dessins relatifs aux détails des surfaces planétaires sont extrèmement nombreux : ceux que l’on publie com- munément sont les plus précis; mais, toute question de bonne foi mise à part, on sait aujourd'hui combien l'observateur doit se défier des apparences et de son désir fort légitime de percevoir des détails aussi fins et nombreux que possible. Mars fut une source inépui- sable de controverses : les uns y notaient les plus déli- cates apparences, fantasmagories peut-être, alors que l'expérience prouvait, sur des enfants naïfs, la com- plexité du problème et l'intervention inévitable d’une influence d'auto-suggestion. Adressons-nous maintenant à Jupiter, le monstre du système, sinon le plus près de nous. Pour se rendre un compte exact, sinon de ce que l'on doit, du moins de ce que l'on peut observer sur Jupiter à l'aide de divers instruments, il suffirait, semble-t-il au premier abord, que les observateurs se contrôlassent entre eux en | comparant un certain nombre de dessins pris, au même instant, avec les différents instruments : cette idée de collaboration simultanée fut mise en avant par M. Nicolas Poutiata, et communiquée à M. Flammarion, qui la transmit à la Société Astronomique de France en l'appuyant de son autorité. Un programme fut donc arrèté ; trente-six observa- teurs prirent part à ces travaux, et l'un d'eux, M. Jean Mascart, astronome à Paris, fut chargé de centraliser les dessins pour en tirer les enseignements utiles qu'ils pouvaient comporter. Le Bulletin de la Société Astro- nomique à publié, au fur et à mesure de ses numéros, les résultats de l'enquête et les conclusions, — le tout réuni en une intéressante brochure, — conclusions qu'il nous fallut attendre pour juger l'utilité d'une telle entreprise. La première chose qui frappe, c'est la dissemblance profonde de dessins qui devraient être très VOISINS — difficulté initiale qui n'échappa point à M. J. Mascart : >S 24 990 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE il s'efforce de montrer, dans un cas particulier, comment on pourrait utilement tirer parti de ces dessins, en formant un dessin composé. Mais, ici, surgissent de mul- tiples difficultés : faut-il photographier tous ces dessins, après repérage, sur une même plaque? ou sur des plaques différentes, mais sur le mème papier? Les durées de pose et d'insolation seront-elles constantes? ou proportionnelles au diamètre, à la surface de l'instrument correspondant à chaque dessin? Question de poids. Et, quel que soit l'attrait de ce chapitre spé- cial et les manipulations délicates qu'il entraina, nous n'irons mème pas aussi loin dans la connaissance de la surface. Or, parmi les figures des diverses publications astro- nomiques, demandons-nous, tout d'abord, comment on choisit celles qu'il est bon de publier. La réponse n'est pas douteuse : devant la multiplicité des observateurs et des reproductions, l’altention se porte nécessaire- ment, de préférence, sur les dessins les plus parfaits, les plus riches en détails singuliers, les plus complets, pourquoi ne pas le dire, /es plus habiles aussi. Dans la coopération qui nous occupe,rien de cet inconvénient: néophytes et professionnels, petits et grands instru- ments, tout est réuni — et, avant tout, il fallait se garder de faire un choix, de mettre en doute la sincérité des observateurs. Immédiatement l'examen de ces séries prouve qu'un dessin isolé ne saurait présenter aucun caractère de certitude scientifique ; la lecture des travaux effec- tués sur les diverses planètes tendait déjà à confirmer la défiance que nous devons avoir en nos propres observations, et montre qu'un contrôle sévère devient aujourd'hui utile, même indispensable. Si, au fur et à mesure que l'instrument est plus parfait, les dessins faits à la mème heure se perfectionnaient en gardant le même cadre général, les mêmes grandes lignes; si Les mêmes masses d'ombre et de lumière se détaillaient, se résolvaient de plus en plus en fines apparences, la mise en place n'en serait point influencée,le caractère général de la surface serait connu — et le problème serait près d'être résolu. Mais il est éclatant, en cette tentative, qu'une telle analyse progressive est très loin d'être réalisée : donc, dorénavant, la question doit être reprise de plus haut et, sans chercher encore à interpréter les détails, il faut s'efforcer avant tout d'établir nettement /es très grandes lignes des aspects planétaires. On peut aller plus loin : nous ne saurons rien, ou bien peu de chose, sur la surface des astres, tant que nous ignorerons comment l'œil fait l'intégration de détails situés au delà de la limite de visibilité pour ne per- cevoir qu'une seule tache plus ou moins diffuse, ou pour ne rien ressentir, tant que nous ne pourrons établir, précisément, les lois de passage entre deux observa- teurs, les règles de dégradation progressive d’un objectif puissant à un plus faible. Ce point est assez mystérieux à l'heure actuelle, et ne peut être éclairci que par des observations simultanées et nombreuses : ainsi, le rôle de chacun existe, et présente son utilité, puisque tout observateur peut concourir à établir nettement un des échelons, celui auquel correspondent ses moyens, et que la connaissance précise de tous les échelons pourra seule donner confiance dans les détails délicats mentionnés par de gros instruments. Ce genre de difficultés est très analogue à celui que l'on rencontre dans l'estimation des contacts, soit pour Vénus, soitpour Mercure, lors des passages sur le Soleil : apparence du pont, ligament ou goutte noire, appa- rence due à la diffraction de l'objectif, à la couleur du verre oculaire. Des travaux aussi importants, à cet égard, que ceux de savants tels que C. Wolf, C. André et A. Angot montrent encore la prudence avec laquelle il faut avancer en une matière aussi délicate, puisque certaines causes d'erreur sont absolues, inévitables et systématiques, inhérentes à la structure même des organismes mis en cause dans les observations. Nous ne suivrons point M. J. Mascart dans les dis- cussions de détails et dans les cons‘ils qu'il donne & observateurs : ceux-ci, la chose était à prévoir, n’ont voulu en faire qu'à. leur tête et, faute de discipline, 6m: partiellement compromis les résultats, tout en come pliquant beaucoup la besogne d'examen. Mais nous mentionnerons particulièrement un chapitre où, dans une très large leçon de physique, sont exposés, et ce qu'est un instrument, et comment il faut s'en servir à ces conseils étaient loin d’être inutiles, car, par exemple; c'est une illusion très répandue de croire que le gros sissement des images en améliore les qualités optiques, illusion qui fut une cause de trouble dans les obser= vations. 4 Cette première tentative de coopération, au premier abord, parait infructueuse. Mais faut-il oublier qu'elle est tentée ici pour la première fois? Et, même sans conduire à des connaissances formelles, les résultats, négatifs qu'elle apporte n'ont-ils pas leur importance expérimentale? En fait, à nos yeux, il n’y a pas de doute: cette tentative a bien prouvé que le problème posé est beaucoup plus difficile qu'on ne pouvait l'imaginer à priori; que l'influence de notre atmosphère et de son état local est considérable et que cette première cause de perturbation doit être écartée dès l'origine pars des comparaisons appropriées. La critique générale qui en est résultée montre que, dans une tentative ultérieure, il faudra diminuer, autant que possible, absolue dans tous les modes de notation et dans la facon d'utiliser des instruments très variés. Un autre point encore nous paraît bien établi. La syn- thèse des détails de la surface planétaire, par un instru- les causes de divergences, en acceptant une discipline | 4 L ment de plus en plus faible, nous permettra, seule, de M suivre en «rdre inverse l'analyse progressive des instru- ments puissants. La connaissance certaine des configu- rations planétaires est à ce prix : la valeur scientifique ! $ du résultat, sa haute portée philosophique. légitiment largement les collaborations futures et les bien modi- ques ressources qui seraient indispensables pour les « discuter intégralement, Nous ne savons donc rien : Mascart fut ingrate : pourrions, peut-ètre, nous instruire sur ce point — et c'est déjà quelque chose. soit. La tàche de M. J. S 3. — Art de l’Ingénieur La régénération de Fair dans les sous- marins. — Un sous-marin en plongée est complète- ment séparé de l'atmosphère, et son équipage respire un air confiné qui se vicie peu à peu. Le temps pendant lequel le sous-marin pourra rester sous l'eau est limité par cette viciation de l'air; comme, au point de vue militaire, il y a le plus grand intérêt à pouvoir rester immergé le plus longtemps possible, on s'est naturelle- ment inquiété-des moyens de renouveler ou de régé- nérer l'air enfermé dans la coque. Il ne faut, du reste, pas s’exagérer la rapidité avec laquelle cet air devient irrespirable. Quelques chiffres montreront que, si la plongée n’est pas par trop longue, on n'a besoin de s'inquiéter de rien sous ce rapport : dans un sous-marin de taille moyenne (125 tonueaux de déplacement environ), le cubage d'air est de 60 mètres cubes, dont 12.600 litres d'oxygène (21 °/o, proportion habituelle de l'air atmosphérique}. Chaque homme absorbe par heure 22 litres d'oxygène; si l'équipage se compose de 12 hommes (chiffre normal pour un bateau de cette taille), la quantité d'oxygène absorbée par heure sera de 264 litres; or, pour que la respiration devienne difficile, il faut que la teneur en oxygène tombe au-dessous de 19 °/,, c'est-à-dire que la quantité d'oxygène disparue soit de 1.200 litres : à 264 litres par heure, ce n'est donc qu'au bout de près de 5 heures que les hommes ressentiront une certaine gène, manifestée par une augmentation de l'amplitude et de la fréquence des mouvements respiratoires. A ce moment, 1.200 litres d'oxygène ont été rem- il nous enseigne comment nous « unes placés par un volume à peu près égal d'acide carbonique oduit par la respiration. La composition du mélange eux qu'est l'atmosphère intérieure est donc modifiée d'une facon profonde. Pour lui rendre sa composition primitive, on peut s'y prendre de diverses manières. … On peut d'abord lâcher à l'intérieur du bateau de Vair qu'on à préalablement comprimé dans des réci- pients ad hoc; c’est évidemment la solution la plus “Simple, et celle qui vient la première à l'esprit : Fulton y avait songé dès le siècle dernier, l'amiral Bourgeois avait appliquée sur son Plongeur en 1865, et les sous- “marins Holland, construits pour les marines anglaise et “américaine, l'emploient encore à l'heure actuelle. Afin “de ne pas augmenter la pression dans l'intérieur du “sous-marin, on aspire avec une petite pompe, de pré- “férence dans le fond du bateau pour se débarrasser de “l'acide carbonique; mais, bien que ce gaz, plus lourd, “doive théoriquement s'accumuler à la partie inférieure, il reste, en réalité, mélangé en forte proportion, et la “quantité qu'en renferme l'atmosphère de sous-marin “va en croissant assez rapidement. “ Pour l'absorber, on peut se servir de chaux vive : un - kilogramme de chaux vive se combine à un kilogramme “d'acide carbonique, c'est-à-dire à la quantité que les 12 hommes d'équipage produisent en deux heures et “demie: mais l'absorption est lente, et il est presque nécessaire de la hâter au moyen d'appareils agitateurs - qui mettent l'air en mouvement et le font porter sur la chaux vive. La soude, ou la chaux sodée, peuvent jouer le même rôle. Quant au renouvellement de l'oxygène, il peut encore être obtenu par l'emploi de ballons renfermant ce gaz sous pression (mais c'est là un procédé un peu encom- brant): on songe aussi à se servir de l'oxygène liquide, et c'estpeut-être là la meilleure méthode pour l'avenir, surtout lorsque, comme le font prévoir les découvertes récentes de Claude, on pourra fabriquer ce gaz liquélié en grandes quantités et à peu de frais. . Mais, pour le moment, il est encore préférable de demander la production de l'oxygène nécessaire à des corps qui le produisent facilement, par simple contact avec l’eau : nous voulons parler des oxylithes (peroxydes de sodium et de potassium) et du bioxyde de sodium, qui sont employés en France et en Allemagne, concur- remment avec la chaux sodée, pour l'absorption de J'acide carbonique. Un kilogramme de bioxyde de sodium produit envi- ron 140 litres d'oxygène : il en faut done un peu moins “de 2 kilogrammes pour rendre exactement à l'atmo- … ce grand avantage que les oxylithes f | : _…èc céohdtaot.: Lc sphère du sous-marin que nous considérions plus haut l'oxygène absorbé en une heure par ses 12 hommes d'équipage. C'est là un procédé pratique, à cause du peu d’encombrement qu'il représente; il à, en outre, non seulement produisent l'oxygène nécessaire, mais régénèrent cormn- plètement l'air vicié en absorbant par oxydation les vapeurs d'hydrocarbures, l'hydrogène sulfuré et autres impuretés dont l'accumulation deviendrait certaine- ment gênante au bout de quelques heures. Un homme est spécialement chargé de jeter dans un seau d’eau, à intervalles réguliers, les morceaux d'oxyde (qu'il ne faut pas faire trop gros à cause de l'intensité du bouil- lonnement, et de l’échauffement produit). Si l'on ne veut pas occuper constamment un homme à celte besogne, on peut combiner un appareil automatique auquel on confie le soin, non seulement de produire l'oxygène, mais de faire barboter l'air dans la chaux ou la soude pour absorber l'acide carbonique; mais un tel appareil, facile à imaginer, a l'inconvénient de prendre beaucoup de place et de n'être pas d’un fonctionnement tout à fait certain. $ 4. — Physique Le fonctionnement desgénérateurs d'ondes électromagnétiques, système Poulsen.— Dans un Mémoire communiqué au récent Congrès de l'Asso- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE ciation des Electriciens italiens, M. P. Barreca' décrit le dispositif dont il se sert pour la génération des ondes électro-magnétiques, suivant le principe indiqué par M. Poulsen. Ce dispositif comporte les pôles d'un électro-aimant, une électrode métallique refroidie artificiellement, une électrode de carbone tournante et un bain de benzine où plongent les électrodes. Les pôles magnétiques sont taillés en forme de cônes d’une ouverture de 120°; cet angle donne, en effet, le champ le plus intense lorsqu'on emploie un électro-aimant saturé. L'auteur a obtenu les meilleurs résultats en em- ployant l’électrode métallique refroidie comme ca- thode, à l'inverse de la plupart des expérimentateurs antérieurs. Après avoir établi, suivant la fréquence 7 désirée, une valeur donnée du produit NC (self-induc- tion du circuitoscillatoire multipliée par la capacité), il convient de choisir une capacité élevée (et une self- induction faible); la même règle s'applique, du reste, aux arcs Duddell ordinaires. Une fois que l'arc de Poulsen à été allumé, il brûle tranquillement sans engendrer d’oscillations, à moins que les conditions de résonance ne se trouvent réalisées par hasard. Afin de produire l'oscillation de l'arc, il faut déplacer, l’une par rapport à l'autre dans le dia- gramme vectoriel, la caractéristique v = /{ 1) — liant la tension v aux électrodes avec l'intensité de courant 1 dans l'arc parfaitement stationnaire — et la droite inclinée qui représente là résistance ohmique du circuit principal, jusqu'à tangence approximative des deux courbes. Ce résultat établit une relation entre les propriétés de l'arc oscillatoire et la caractéristique de lare à régime stationnaire, relation qui ne contredit en rien les expériences de Simon, suivant lesquelles les carac- téristiques, dans ces deux cas, seraient entièrement différentes. Pour réaliser la tangence des deux courbes, on peut, soit déplacer la droite parallèlement à elle-même, — c'est-à-dire diminuer graduellement la force électro- motrice de la source, — soit l'incliner vers le bas, = c'est-à-dire augmenter la résistance ohmique du cir- cuit, — soit enfin soulever les hyperboles Ayrton (c'est- à-dire éloigner les carbones) jusqu'à ce que l’une de celles-ci soit tangente à la droite en question. $ 5. — Électricité industrielle La corrosion électrolytique dans les cana- lisations souterraines. — Le Professeur Ganz à fait récemment à l'American Gas Light Assocration un Rapport des plus intéressants sur la corrosion électro- lytique et sur ses effets dans les canalisations souter- raines. L'eau pure offre une résistance tellement élevée qu'on peut la considérer pratiquement comme non conductrice de l'électricité; mais l'addition de sels ou d'acides, mème en faibles proportions. la rend conduc- trice. Les sols des rues, qui contiennent toujours une certaine dose d'humidité avec une proportion plus ou moins grande de sels ou d'impuretés dissous, consti- tuent donc des conducteurs électrolytiques.- De là, des conséquences que développe longuement le Professeur Ganz : Considérons les voies à trolley simple, où les rails servent de conducteurs de retour, dont la continuilé est assurée par l'assemblage des joints avec des fils de cuivre. Une partie du courant, appelé courant vai bond, dérive à travers le sol, en quantité proportion- nelle au potentiel des rails, qui, lui-même, augmente avec la distance de la station et le nombre des véhi- cules. Dans presque toutes ces voies, le fil est relié au pôle positif de la dynamo et les rails au pôle négatif. Si le terrain traversé par ces courants vagabonds contient des métaux de haute conductibilité, tels que des con- EE 1 L'Industria, 13 octobre 1907. 992 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE duites d'eau ou de gaz, ces courants se concentrent de préférence dans ces métaux. En général, dans les dis- tricts éloignés de la station productrice d'énergie, ils vont des rails aux conduites : de là le nom de districts négatifs donné à ces districts, et celui de conduites négatives donné aux conduites qui les traversent. Au contraire, dans les régions voisines de la station, les courants vont des tuyaux d’eau et de gaz aux rails : ces distriets sont appelés districts positits et les conduites correspondantes conduites positives. Dans les régions intermédiaires, appelées districts neutres, les courants vagabonds vont des rails aux conduites ou des con- duites aux rails, suivant la disposition des véhicules. Tout cireuit électrique devant être fermé, le courant qui s'échappe des rails dans le district négatif et qui va joindre les conduites, quitte ensuite celles-ci dans le district positif pour retourner au pôle négatif de la dynamo génératrice. Dans le district négatif, les rails, qui constituent les anodes, sont corrodés, tandis que les conduites, qui constituent les cathodes, ne le sont pas : dans le dis- tict positif, c'est tout le contraire. Si l’on a relié les rails au pôle positif plutôt qu'au pôle négatif, c'est pour concentrer dans le voisinage de la station le district posihif, et, par suite, les détériorations de conduites, de facon à pouvoir surveiller plus facilement ces avaries et y remédier; mais on na pas lardé à s’apercevoir que, mème dans les autres districts, l'électrolyse pro- «uit ses corrosions sur les tuyauteries souterraines. On peut dire que, partout où des courants vagabonds tra- versent le sol humide, ils donnent lieu à des phéno- mènes électrolytiques. Un fait à observer, c'est que, les conduites n'étant pas, en général, en contact uniforme avec le sol et étant souvent recouvertes de couches d'oxydes, mauvais conducteurs de lélectricicité, le courant se concentre sur les points où le contact est bien établi et où la con- ductibilité est la meilleure : cette concentration de l'action électrolytique sur certains points n’en est que plus nuisible et a pour conséquence la formation de trous le long des conduites. Il a été établi qu'en une année un ampère corrode 20 livres de fer et 74 livres de plomb ; de plus, des actions chimiques secondaires peuvent se produire et augmenter beaucoup ces proportions de métaux désa- grégés par l'électrolyse. Quant à la différence de poten- tiel nécessaire, il à été prouvé que, dans les conditions normales où se trouvent les conduites souterraines, il suffit qu'elle soit d'une fraction de volt pour entrainer des corrosions électrolytiques nuisibles. La substitution des courants alternatifs aux courants continus sur les lignes de tramways électriques pourra-t-elle empêcher ces accidents ? Il n’est pas pos- sible de se prononcer définitivement à ce sujet. L'em- ploi des courants alternatifs sur leslignes de tramways n'est pas de date assez ancienne pour qu'on puisse se baser sur des faits probants. On ne peut donc encore s'en référer qu'à des expériencesde laboratoire, d’après lesquelles les courants alternatifs peuvent aussi pro- duire lélectrolyse, avec cette particularité que les deux électrodes sont corrodées, mais donnent lieu à des phénomènes électrolytiques beaucoup plus faibles que ceux produits par des courants continus. La corrosion par les courants vagabonds a causé sur de nombreuses lignes de tramways électriques, notaim- ment en Amérique, de telles détériorations de con- duites d'eau et de gaz, que cette question a la plus haute importance au point de vue industriel. La ques- tion est d'autant plus complexe, ainsi que le fait remarquer le Professeur Ganz, que des surveillances consistant en simples lectures de voltmètre sont insuf- fisantes pour déterminer l'existence et l'étendue d’une corrosion électrolytique. La direction et la force des courants dans les différentes régions des canalisations sont des éléments qui, plus que la différence de poten- liel, ont leur influence en cette matière : alors que quelques volts où fractions de volt peuvent, produire jouer un rôle important dans le soulèvement des mon- de fortes corrosions, un courant à haute tension pe être inoffensif pour les conduites qu'il traverse. L seule chose indiscutable, c'est que, partout où d courants vagabonds sont amenés par l'humidité du & dans des conduites métalliques, il se produit une co rosion électrolytique, dont, l'importance dépend des causes et des circonstances les plus variées. Cela suffi pour attirer toute l'attention des compagnies de trac ton sur une question qui a de si graves conséquence au point de vue de l'exploitation des lignes de tram ways électriques. $S 6. — Géolcgie Radium et Géologie. — Le Professeur Joly, d Trinity College (Dublin), a traité cette question avec baute compétence. Voici les principaux résultats d ses intéressantes recherches : 1° Des roches du tunnel du Simplon contiennent des quantités de radium considérablement supérieures à la moyenne des roches ignées. Les roches du Simplon sont des sédiments altérés, pour la plus grande partie, depuis les terrains de l’âge archéen jusqu'à l'époque du Lias jurassique. La présence du radium semble suffi- sante pour expliquer les hautes températures consta- tées pendant le percement du tunnel. On sait, en effet, que la chaleur excessive des chantiers rendait le tra vail particulièrement pénible. La température de lan roche était de 55° centigrades, et atteignait mème 56% dans la partie sèche du tunnel, vers la sortie nord. + M. Fischer a trouvé, d'après les données de M. J.« Strutt, que le radium devait élever la température de ces roches dans la proportion de 1° centigrade pour 23,20 environ. > Les observations faites antérieurement dans les tun- nels du Mont-Cenis et du Saint-Gothard démontrent que des conditions spéciales agissent sur l'échelle des températures dans les chaînes de montagnes. Dans le: premier, M. Everett a évalué la hausse du thermomètre à environ {1° centigrade pour 432,35, avec correction. pour la convexité de la surface. Des variations remar- quables ont été observées dans le Saint-Gothard, et ces différences sont dues, très probablement, à l'influence du radium. Vers le centre du tunnel, la proportion a été trouvée de 1° pour 46%,60, et, à la sortie nord, dem 1° pour 20%,85; ce qui, pour la totalité du tunnel, donne une moyenne de 1° centigrade pour 312,85 approximativement. Le D' Stapff, qui dirigeait ies observations de température dans le Saint-Gothard, avait prédit une température maximum de 47° C. pour les roches du Simplon. On voit que les prévisions ont = été dépassées. Il y à lieu de penser que le radium, s’accumulant em de grandes épaisseurs sousles dépôtssédimentaires, peut € tagnes, en élevant la température à la base des masses accumulées. Il en résulterait, pour ces terrains, une résistance plus faible contre la pression intérieure. En résumé, il serait intéressant de déterminer, dans un examen ultérieur, jusqu'à quel point le radium (et aussi l'uranium) répandu dans les matériaux de la surface de la croûte terrestre, doit ètre considéré comme une source d'instabilité dans l'histoire géolo- gique, son transport par dénudation étant non seule-« ment un transport de matière, mais aussi une CONVeC— tion d'énergie; ù 2 Un échantillon d'argile rouge, provenant d'une profondeur d'environ 5.000 mètres dans l'Atlantique Nord, contenait seize fois plus de radium que la moyenne des couches ignées, etun spécimen de limon de globigérines, recueilli à une profondeur d'environ 3.640 mètres dans l'Atlantique Sud, surpassait à peu près six fois cetle moyenne. Ici se pose une question : Quelle est la provenance de tout ce radium? L'hypothèse de sir John Murray, indiquant la poussière cosmique comme origine, se présente tout de suite à l'esprit, et, prenant en consi- E— # “ération tous les faits, le Professeur Joly regarde les résultats précédents comme une preuve de plus en faveur de l'origine extra-terrestre d’une partie du fadium que nous trouvons sur la Terre. % $ 7. — Physiologie Sur la sécrétion gastrique. — Les physiolo- “sistes admettent, depuis les travaux de Pawlow et de son wcole, que la sécrétion du suc gastrique est pro- . voquée { par l'action gustative exercée par les “liments au niveau de la bouche; 2° par l’action chi- “ mique exercée par certains principes contenus dans les aliments au niveau de l'estomac. Ils admettent que ce sont là (exception faite, toutefois, dans une certaine mesure et pour quelques sujets, des influences exercées par la vue ou par l'odeur des mets) les seules causes * déterminantes de la sécrétion gastrique. Les cliniciens ont appliqué ces données dans le trai- tement de l’ulcère de l'estomac; ils ont substitué, au “ moins temporairement, à l'alimentation par les voies “ normales l'alimentation rectale, afin de supprimer, pendant quelque temps tout au moins, la production du suc gastrique et son action sur les tissus de l'ulcère. Or, on a prétendu que l'alimentation rectale provoque » chez l'homme une sécrétion gastrique, peu abondante sans doute, mais incontestable. S'il en est réellement ainsi, la conception actuelle des physiologistes est inexacte, et il conviendrait, tout au moins, de la com- pléter. Des expériences d'une grande précision viennent d'être entreprises, à cet effet, sur l'homme par le D: Conrad Michael, de Berlin. Après s'être assuré, par le tubage et le lavage de l'estomac, que la cavité de celui-ci était rigoureusement vide, ou ne contenait qu'un peu de salive, il injectait dans le rectum des sujets en observation une masse alimentaire composée de lait, d'œufs, avec un peu de sel, de sucre, de tropon et de sanatogène. Il examinait ensuite le contenu gas- {rique obtenu par tubage et lavage, une demi-heure et une heure après l'injection intrarectale. Les expériences ont été faites sur dix personnes, les unes en état de santé, les autres atteintes de lésions gastriques. Jamais le D' C. Michael n'a observé la moindre sécrétion gastrique. La conception actuelle des physiologistes est donc applicable à l'homme, comme elle est applicable aux animaux de laboratoire. Il n'y a d'autre sécrétion gas- trique que la sécrétion psychique et la sécrétion chi- mique, définies l'une et l'autre par les physiologistes : la sécrétion psychique provoquée par la vue, l'odeur et surtout le goût des mets, la sécrétion chimique pro- voquée par l'action, sur les nerfs centripètes de la muqueuse gastrique, de certaines substances contenues dans les aliments. : $ 8. — Géographie et Colonisation Le Télégraphe transsaharien. — Plusieurs Missions scientifiques et de nombreuses reconnais- sances militaires ont sillonné le Sahara durant les trois dernières années‘. Elles étaient absolument nécessaires pour arriver à connaître la valeur de cette immense région désertique, qui apparaît comme une entité géo- graphique et ethnique, destinée à former tôt ou tard une entité administrative distincte. L'inventaire éco- nomique que l’on commence à établir n'a encore révélé aucune richesse capable de justifier l'établissement coûteux d'une voie ferrée. Selon M. E.-F. Gautier, les bords du Niger semblent le seul coin de ce grand domaine que l’on puisse se représenter prospère, où plus justement capable de le devenir. Mais, en atten- dant, cette bande de terre, qui sépare deux de nos colonies les plus riches, pourrait être utilisée, mainte- nant surtout que la traversée en est relativement sûre, 1 Bulletin du Comité de l'Afrique française, mars 1907. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 993 à tel point que M. E.-F. Gautier a pu l’entreprendre sans autre escorte qu'une garde fournie par les Touareg eux-mêmes. Toutes les communications de la Métropole avec nos colonies de l'Afrique occidentale se font par l'unique câble Brest-Dakar, et l’on sait combien, en temps de guerre surtout, ce mode de communication est aléa- toire. Il n'est done pas étonnant que l'on ait songé depuis longtemps à l'idée d’un transsaharien télégra- phique, et qu'une Mission d'étude en ce sens ait été confiée, en 1905, à M. Etiennot, directeur des Postes et Télégraphes du département d'Oran. Ce technicien vient d'établir un projet aussi simple que peu coûteux qui, espérons-le, ne lardera pas à être mis en œuvre. La ligne sera aérienne, sur poteaux métalliques. distants de 100 mètres, le fil étant placé à une hauteur minima de 4,50 au-dessus du sol, de facon à permettre le passage d'un chamelier monté. D'Oran et d'Alger, deux fils s'enfoncent déjà au loin vers le Sud, et se terminent respectivement à Beni- Abbès et à Timmimoun. La première partie de la tâche sera de les prolonger tous deux jusqu'à Adrar, chef- lieu du territoire des Oasis, à 1.200 kilomètres de la côte. Adrar deviendra ainsi la tète du télégraphe trans- saharien. Et grâce aux deux lignes distinctes, venant d'Oran et d'Alger, ce centre aura la quasi-certitude d'être toujours en communication avec la côte et avec la Métropole, par conséquent. Adrar est le dernier point que nous occupions; de là, jusqu'au Niger, à Bourrem, le télégraphe parcourra 1.400 kilomètres environ, divisés en deux sections : l’une, algérienne, d'un millier de kilomètres, se terminera à Timissao; la seconde, soudanaise, ira de Timissao à Bourrem, qui est, de nouveau, un point occupé par nos troupes. Les 1.000 kilomètres du parcours algérien seront jalonpés par six fortins rudimentaires, à la fois dépôts de matériel de rechange et défense contre les attaques éventuelles. Suivant les exigences de l’eau, ils s'espa- ceront de $0 à 200 kilomètres les uns des autres. Or, un mehari frais peut faire 100 kilomètres dans une journée. Prenant l'hypothèse la plus défavorable, c'est- à-dire une rupture se produisant entre deux fortins distants de 200 kilomètres, et cette rupture étant située juste au milieu, on voit que la durée maxima d'une interruption ne pourrait dépasser une journée. Il n'en serait pas de même pour le câble Brest-Dakar, dont le rétablissement demanderait plusieurs mois. La com- paraison des frais n'est pas moins suggestive. Une réparation de càble se chiffre par dizaines de mille francs. Grâce au concours des indigènes, largement rémunérés à raison de 5 francs par jour, le personnel des six fortins ne coûtera pas ensemble plus de 1.000 francs par mois. Sur la section soudanaise, trois postes seulement sont prévus. Au terminus de Bourrem, deux embran- chements assureront la transmission des dépèches vers nos colonies de l'Afrique occidentale. L'un se dirigera, à l'Ouest, sur Tombouctou, où il se raccordera au réseau soudanais, desservant le Soudan, le Sénégal, la Guinée et la Côte d'Ivoire. Le second, à l'Est, ira rejoindre à Say une autre partie des lignes souda- naises. De là, il desservira le Dahomey, et aussi le Congo, en se dirigeant vers Zinder et le lac Tchad. A côté des avantages généraux, métropolitains, du télégraphe transsaharien, il faut signaler des avantages locaux, non moins importants. La police du Sahara sera facilitée, grâce aux avis que l'Algérie et le Soudan pourront échanger instantanément sur les déplace- ments des bandes de pillards. D'autre part, comme le trajet du fil est le chemin le plus court pour aller de l'Algérie au Niger, il deviendra probablement une route régulière de caravanes, grâce aussi à la sécurité et à l'eau qu'elles trouveront sur la ligne des fortins. Enfin, le. prix des télégrammes à destination de l'Afrique occidentale, qui se payent actuellement de 4 à 3 francs le mot, pourra être abaissé à 40 ou 50 centimes. 994 En tenant compte de la période de préparation pour répartir les matériaux sur les points choisis, tous délais et tous frais comptés, on prévoit que le trans- saharien télégraphique sera terminé en dix-huit mois, avec une somme qui ne saurait dépasser deux millions et demi. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon $ 9. — Enseignement Une École de Papeterie à l'Université de Grenoble. — Il nous est agréable de signaler que les jeunes Universités, rompant avec la tradition des anciennes qui se vouaient exclusivement aux cours académiques et à la préparation aux examens, de- viennent de plus en plus des Laboratoires où l'on s'efforce de pousser le plus loin possible les progrès des sciences et l'étude de leurs applications. Parmi elles, l'Université de Grenoble se fait remarquer par son ardeur à innover. Nous indiquions récemment le développement rapide de son Institut électrotechnique. Voici qu'elle crée une Ecole de Papeterie, C'est dans le Congrès tenu à Tours, pendant les vacances dernières, que l’Union des fabricants de papiers de France examina le projet de créer à Gre- noble «une Ecole francaise de Papeterie, école destinée à former des ingénieurs papêtiers, futurs directeurs d'industrie, et des conducteurs de machines, suscep- tibles de s'élever ultérieurement jusqu'à l'emploi de chef de fabrication ». Le projet fut adopté par une Commission à laquelle s'étaient adjoints MM. Brenier, président de la Chambre de Commerce de Grenoble, et Barbillon, directeur de l'Institut électrotechnique de l'Université. Ce nouvel Institut, construit sur de vastes terrains, va compléter les enseignements de sciences appliquées déjà donnés à Grenoble. Il sera prochainement ouvert. Une École mondiale à Bruxelles. — On parle de la création prochaine à Tervueren, près de Bruxelles, d'une Ecole mondiale qui serait une véri- table Université internationale. Les étudiants de tous les pays y seraient accueillis et les célébrités scienti- fiques de l'Etranger seraient appelées à y professer. Entin, cette Ecole serait en relation avec des Musées spéciaux, et de riches collections scientifiques seraient établies à Tervueren et à Bruxelles. Pour compléter cette œuvre, la personnalité civile serait accordée aux Associations scientifiques inter- nationales ayant leur siège à Bruxelles, On pense que c’est avec les ressources provenant de l'Etat du Congo que le souverain belge pourra réaliser ce grand projet. Les Étudiants en Allemagne.— L'Allemagne voit constamment croître le nombre de ses étudiants. Ce nombre à presque triplé depuis trente ans. Il est passé de 17.500 à 45.000. © En 1877, il y avait en Allemagne, pour 400.000 habi- tants, 37,5 étudiants ; il y en à maintenant 67,5. Le nombre des étudiants suivant les cours des Ecoles techniques est passé de 4.200 en 1891 à 43.269 en 1903. Dans les Facultés de Lettres, de Médecine et de Droit, les élèves sont de plus en plus nombreux. Ainsi, en 41890, il y avait 2.700 étudiants ès lettres ; il y en a cette année 8.464. Les professeurs de lycées attendent sou- vent jusqu'à l’âge de trente-cinqans un poste définitif. Et récemment, le Ministre de Bavière invitait les jeunes gens à ne plus choisirles carrières trop encombrées de médecin ou de magistrat. Seules, les Facultés de Théologie sont délaissées. Le nombre de leurs étudiants a baissé de 50 °/,. Les conséquences de celte augmentation de la popu- lation universitaire sont faciles à tirer. Le nombre de CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE places vacantes ne croissant pas dans la proportion d celui des demandes, il en résulte uue baisse de salaï Pour ceux qui ont choisi les carrières citées plus haut et surtout pour les ingénieurs et autres employés d l’industrie. | # À $ 10. — Sciences diverses La Science à l'Exposition franco-anglais de 1908. — On sait qu'une Exposition franco-anglais se tiendra à Londres en 1908, et les visiteurs qui pas sent aux environs d'Uxbridge Road ont pu constaté qu'une large surface de terrain réservée à cette expo sition se couvre rapidement de bâtiments. Suivant le programme des organisateurs, la science, les arts et les industries doivent ètre représentés cette manifestation. Or, la British Science Guilde vien de faire une démarche auprès du Comité exécutif de l'Exposition afin qu'une Section particulière soit entiè= rement consacrée à la science pure, principalement au recherches originales entreprises dans les laboratoires des établissements d'enseignement et des usines. Cette idée a recu un accueil très favorable, et un Comité anglais, ayant à sa tête Sir N. Lockyer, vient de se constituer pour la mettre à exécution en ce qui concerne l'Angleterre. Cette exposition de science pure sera subdivisée en trois sections : 1° Appareils historiques employés par d'éminents savants ou qui ont été le moyen d'élucider d'impor- tantes vérités ; 2° Instruments et méthodes employés pour les expé- riences et les observations de laboratoire: 3° Instruments et méthodes employés et résultats obtenus dans l'exploration du sol, de l’eau, de l'air, du ciel. Il serait hautement à désirer que, chez nous, un Comité semblable se constituât, afin d'assurer une représentation honorable à la Science francaise à l'Ex- position franco-anglaise de 1908. Le premier Congres international des In- dustries frigorifiques. — Un Congrès international des Industries frigoritiques se tiendra à Paris à la fin de 190$, sous la présidence d'honneur de MM. Emile Loubet et C. de Freycinet. Il sera divisé en six sections : 4° Les basses tem- pératures et leurs effets généraux; 2% Matériel frigo- rifique; 3° Application du froid à l'alimentation: 4° Application du froid aux autres industries; 5° Appli- cation du froid au commerce et aux transports ; 6° Législation. À L'idée de ce Congrès a été accueillie avec enthou- siasme, non seulement en Europe, mais en Amérique et jusqu'au Japon et en Afrique du Sud, où l'on se Congrès, au titre de membre titulaire, toute personne ou toute collectivité qui aura versé la somme de 20 fr. Pour tous renseignements, s'adresser au secrétaire général, M. J. de Loverdo, 10, rue Poisson, à Paris. Une nouvelle Revue : « Les Documents du Progrès. » — Une revue d'un caractère nouveau, les Documents du Progrès, vient de paraître simulta- nément en trois éditions : française, anglaise et alle- mande, à Paris, Londres et Berlin. Son but est de réunir les efforts jusqu'ici isolés des diverses nations. Elle veut répondre aux besoins de solidarité internationale qui s'affirment chaque jour davantage. Pour y parvenir, elle a groupé deux cent cinquante correspondants, disséminés dans toutes les. parties du monde, et elle concentre à Paris les rapports qui lui sont ainsi adressés sur les progrès accomplis dans les divers pays; elle ne retient que ceux qui peu- vent être donnés en exemple aux autres nations. prépare à envoyer des délégués. Peut faire partie du | | D: F. BLUMENTHAL — NOS CONNAISSANCES SUR LES AFFECTIONS CANCÉREUSES 995 / L'ÉTAT ACTUEL DE NOS CONNAISSANCES SUR LES CARACTÈRES ET L'ÉVOLUTION DES AFFECTIONS CANCÉREUSES : A L'aimable invitation du directeur de cette Zievue d'écrire un article sur l'état actuel des recherches Sur le cancer, j'ai répondu d'autant plus volontiers que j'estime que ces recherches sont arrivées à un point où elles commencent à projeter un rayon d'espérance sur la guérison de cette affection : « La vérité est en marche; rien ne l'arrètera. » Il serait cependant prématuré de fixer dès maintenant le moment où l'on parviendra à apporter la guérison aux malades atteints de cancer que le scalpel du chirurgien est impuissant à sauver. Mais la cure de cette maladie doit toujours rester le but que nous ne perdons pas du regard quand nous nous livrons à nos investigations. Les recherches modernes sur le cancer datent d'environ une dizaine d'années. Leur épanouisse- ment résulte, en première ligne, de la possibilité, acquise à celle époque, d'étudier le cancer sur les animaux: en seconde ligne, de l'explication des phénomènes chimiques qui se passent à l'intérieur des tumeurs cancéreuses. L'impossibilité de réaliser des progrès essentiels dans le domaine des recherches sur le cancer pro- venait. en effet, de ce qu'on ne pouvait étudier la maladie sur des animaux el, par conséquent, obtenir rapidement, par voie expérimentale, un grand nom- bre d'animaux cancéreux sur lesquels on eût recher- ché l'origine et les possibilités de guérison de l'affec- tion. La révolution qui s'est opérée sur ce point est due avant tout au mérite éminent du savant danois Jensen, de Copenhague. Il trouva par hasard une souris cancéreuse, — bonheur qui était échu à d'au- tres avant lui, par exemple à Morau, — mais il par- vint à transporter la tumeur cancéreuse d'une sou- ris à l'autre avec un tel succès qu'il produisit des générations de souris cancéreuses, qui devinrent à Berlin, Francfort, Paris, ete., le matériel de départ des recherches expérimentales sur le cancer. Jensen put montrer que, dans le cancer de la sou- ris, les cellules cancéreuses sont les porteurs de l'affection, -car, transportées d'un animal sur un autre, elles reproduisent la maladie de la même facon que les bactéries. Mais cette analogie du can- cer aves une maladie infectieuse va plus loin. Comme pour cette dernière, le traitement préventif d'un animal sain avec une matière infectieuse atté- nuée provoque une protection (immunité) vis-à-vis de la maladie considérée. Jensen, après avoir injecté à des souris des cellules cancéreuses tuées par tritu- ration ou par la chaleur, constata que les souris ainsi traitées étaient immunisées contre linocula- lion de cellules cancéreuses qui produisaient la maladie chez les animaux n'ayant pas subi de trai- tement préventif. En outre, il montra que des sou- ris cancéreuses, ayant recu des injections de sérum de lapins inoculés à diverses reprises avec des Lumeurs de souris cancéreuses triturées, pouvaient quelquefois être guéries de leur maladie. On avaient été mis en lumière antérieurement pour les avait donc démontré les mêmes faits qui maladies infectieuses — en particulier pour la diphtérie par les excellentes recherches de Beh- ringet Roux :—ilest possible; comme pour la diph- térie, d'immuniser les souris contre l'affection can- céreuse, et ensuite de produire chez les animaux des corps protecteurs contre le ‘cancer, qui peuvent ètre employés dans un but thérapeutique. Ces résul- tats. oblenus avec un matériel peu abondant el encore entachés d'incertitude, furent généralisés et mis à l'abri de tout doute par Ehrlich, Bashford, Borrel, L. Michaelis et d'autres. Cette analogie du cancer de la souris avec une maladie infectieuse connue a été considérée par plu- siours savants comme une confirmation de l’origine parasilaire des tumeurs cancéreuses. On ne peul Loutefois raisonner ainsi sans plus de réflexion : nous savons, en effet, qu'on peut produire des subs- lances immunisantes aussi bien contre les cellules de l'organisme animal que contre un bacille déter- miné, lesquelles empêchent la croissance desdites cellules. Nous ne devons done pas conclure, de a parenté entre les phénomènes de l'affection cancé- reuse et ceux des maladies infectieuses connues, que le cancer est aussi une maladie parasilaire. D'ailleurs, si c'était le cas, nous ne devrions obte- nir de succès, dans l'immunisation, qu'avec une substance contenant les parasites, tandis que, comme nous le verrons plus loin, on peut immuni- ser contre le cancer avec des tissus normaux et du sang d'animaux parfaitement sains. D'autre part, en ce qui concerne la découverte du bacille du cancer, nous n'avons à enregistrer que des résultats négatifs. Aueun de ceux qui ont étudié le cancer n'est encore parvenu à retirer des tumeurs ou d'une autre matière un organisme vivant, — que ce soit un parasite végétal ou animal, — au moyen duquel on puisse provoquer le cancer chez une 996 D' F. BLUMENTHAL — NOS CONNAISSANCES SUR LES AFFECTIONS CANCÉREUSES espèce antmale quelconque. Les tumeurs produites par quelques expérimentateurs avec des Blastomy- cèles ou des levures n'ont jamais eu d'analogie avec les tumeurs cancéreuses ou sarcomateuses : ce sont des tumeurs granuleuses, comme on en observe chez les animaux à la suite des diverses infections. Le fait même que ces parasites ont été trouvés après une culture soignée dans des tumeurs fermées, où l'accès des micro-organismes du dehors élait empêché, n’est pas encore une preuve de leur rôle dans l'étiologie du cancer. On sait maintenant que divers microbes peuvent émigrer de l'intestin, par exemple, dans des tissus éloignés et jusque dans des tumeurs fermées, et c'est peut-être ainsi qu'on doit s'expliquer la découverte, dans presque toutes les tumeurs, du Micrococeus neo{ormans considéré par Doyen comme l'agent du cancer. Si nous ne posons pas ce rigoureux critère, toute une série de microbes peuvent être rendus responsables de l’étiologie du cancer. Ainsi les résultats que Schmidt, de Cologne, a obtenus dans ses essais d'isolement de l'agent du cancer me paraissent douteux, au moins dans leur. interprétation. Schmidt croit avoir trouvé dans le Mucor racemosus un milieu nutritif approprié pour le parasite du cancer. Si l’on transporte de petites particules cancéreuses sur ce Mucor, celui-ci doit absorber l'agent du cancer, et ce dernier continue à vivre en symbiose avec le Jucor. Schmidt prétend qu'ilest parvenu, avec ces champignons nourris avec des matériaux cancéreux, à reproduire lecancerchez les souris. Dans une vérification faite à l'Institut pour l'étude du cancer à Heidelberg, on est arrivé une fois, parmi 70 essais négatifs, à produire le cancer chez une souris au moyen de tels champignons. Il se peut que, dans la culture, les levures aient absorbé des cellules de tumeur encore vivantes, qui produisent ensuite le cancer, ce qui permettrait d'expliquer ainsi facilement le seul résultat positif. Il est vrai que tous ces résultats négatifs ne peu- vent naturellement considérés comme une preuve certaine contre la théorie parasitaire, d'au- tant moins que nous ne pouvons pas élever en cul- être ture pure certains parasiles animaux, comme les Protozoaires, et que, d'autre part, les tumeurs can- céreuses sont très sélectives dans leur croissance, c'est-à-dire ne se laissent transporter que sur la même espèce animale: de la souris à la souris, du rat au rat, mais non de la souris au rat. On ne peut donc pas demander que des microbes extraits de cancers humains donnent des résultats sur les ani- maux d'expérience, car on doit leur supposer la méme sensibilité. La sensibilité des cellules cancé- reuses est méme telle que des tumeurs originaires de souris cancéreuses de Copenhague n’ont pu pro- duire des tumeurs analogues que sur des souris de Copenhague et non sur celles de Berlin, el vice- versa. La sensibilité d'une tumeur est très vas riable. Dans tous les cas, comme Bashford l'a mon: tré, une tumeur qui n'avait d'abord que peu de ten- dance à croitre peut, par inoculation répétée d'un animal à un autre, augmenter finalement sa capa-" cité de croissance à lel point qu'elle se transmet dans 100 °/, des cas. Nous voyons donc qu'en outre des cellules cancé- reuses il ÿ a encore quelque chose qui intervient dans la transmission de la tumeur cancéreuse. Les intéressants essais d'Ebhrlich nous ont apporté une explication sur ce point. Lorsqu'il inocule aux rats du tissu carcinomateux, celui-cise développe d'abord très bien; mais, au bout d'une semaine, la tumeur formée commence à régresser. Si les rats sont alors inoculés une seconde fois avec du carcinome de souris, la tumeur ne croit pas. De ces faits, Ehrlich croit devoir conclure à l'existence d'une forme par- ticulière d'immunité dans le cancer, l'immunité dite athrepsique, reposant sur cette hypothèse : que les cellules, placées dans un organisme d'espèce étran- gère, manquent d'une substance nutritive néces- saire à leur existence et, par conséquent, meurent après qu'elles ont utilisé la provision emmagasinée en elles-mêmes. Le savant allemand a été fortifié dans cette conviction par le résultat suivant : Si un carcinome de souris inoculé à un rat est transporté sur un second rat peu de temps avant qu'il com- mence à régresser, la tumeur ne se développe pas davantage, tandis que, retransportée sur la souris, elle se développe de nouveau normalement. C'est que, d'après Ehrlich, la substance de croissance, présente chez la souris et nécessaire pour amener le développement de la tumeur cancéreuse, fait défaut chez le rat. Un progrès très important dans nos connaissances sur les tumeurs à été réalisé à la suite d'autres expériences d'Ehrlich. Alors que les anatomo-patho- logistes ont toujours insisté sur l'autonomie absolue des diverses sortes de tumeurs :. carcinomes, sar- comes, elc., Ehrlich et Apolant ont montré — et Bashford et Lewin l'ont plus tard confirmé — que le transport du carcinome sur les souris peut don- ner lieu finalement, à la 2° génération, à une for- mation de sarcome. Il en résulte qu'il ne peut guère ètre question d'une différence biologique de prin- cipe entre les diverses sortes de tumeurs malignes. C'est dans ce sens qu'on doit aussi interpréter le fait qu'on peut immuniser des animaux contre le cancer par traitement préventif avec des sarcomes et même avec des chondromes malins presque aussi bien que si on les avait traités d'abord avec des tumeurs cancéreuses (Ehrlich et d'autres). De ces recherches étiologiques, nous avons done déduit jusqu'à présent trois points : PR D: F. BLUMENTHAL -— NOS CONNAISSANCES SUR LES AFFECTIONS CANCÉREUSES 997 1° Les microbes isolés des tumeurs Cancéreuses nese sont pas encore montrés capables de produire le cancer chez les animaux ; D Les tumeurs malignes(sarcome,carcinome,etc.) ne diffèrent pas biologiquement en principe; 9 Les cellules cancéreuses mêmes se montrent, par leur transmission, les agents de la maladie du cancer. IT Ce dernier fait a été l'origine d'une grande con- troverse entre les anatomo-pathologistes et les eli- niciens, qui y voient une preuve de la nature para- sitaire des cellules cancéreuses. Les anatomo-patho- logistes disent que, dans la produelion expérimen- tale du cancer par le transport de cellules cancé- reuses, il s'agit d'une transplantation de cellules qui ont conservé leur pouvoir vital, de la même facon qu'un lambeau de peau transporté sur une blessure se met à croître sur celle-ci. E. von Leyden a réfuté cette objection en montrant que, dans la transplantation de la peau et des organes, on observe toujours une croissance pénible des mor- ceaux transplantés, tandis que les cellules cancé- reuses transplantées, non seulement produisent finalement de grosses tumeurs, qui se laissent trans- porter avec toujours plus de succès à travers de nouvelles générations, mais en même Lemps intro- duisent avec elles l'affection cancéreuse entière dans le nouvel organisme. Cependant, il nous parail incompréhensible que des cellules issues de notre corps acquièrent des propriétés délétères qu'elles ne possédaient pas jus- qu'alors et qu'elles peuvent transmettre à d'autres organismes comme un agent d'infection. Cela nous conduirait de nouveau à admettre que la cellule cancéreuse est une cellule épithéliale, qui à recu du dehors un parasite, vivant avec elle d'une facon inséparable, en quelque sorte en symbiose, et qui lui communique son caractère infectieux; car, que la cellule cancéreuse soit infectieuse, c'est-à-dire puisse seule produire la maladie, cela peut déjà dif- ficilement être contesté après les essais de trans- plantation, et cela devient une certitude si nous examinons maintenant les autres expériences qui ont été tentées dans cette direction. Les travaux de Borrel et Haaland, à l'Institut Pasteur de Paris, et ceux de L. Michaelis, à Berlin, ont montré que, dans les élevages de souris, des souris saines peuvent s'infecter au voisinage des souris cancéreuses. Il s'agit probablement ici d'un contact direct. Les tumeurs cancéreuses ont l'habi- tude, chez les souris malades, de percer la peau et d'arriver au jour. Si alors des souris saines se frot- tent contre de pareilles tumeurs, les cellules cancé- reuses peuvent pénétrer dans la peau et causer le can- cer.Morau a également établi parl'expérience une in- téressante observation de ce genre. Il apporta dans unecage,danslaquellene se trouvaient que des souris saines, un grand nombre de punaises prises dans une autre cage renfermant des souris carcinomateuses; il observa, quelques mois plus tard, que presque tou- tes les souris avaient pris le carcinome. Cette trans- mission a lieu si régulièrement qu'il employa plus tard les punaises directement à l'inoculation. Les observations de Borrel sont aussi particulié- rement importantes. Borrel signale un élevage de souris dans lequel, parmi les 200 souris qui vinrent au jour dans une cage au cours de deux années, on constata 20 tumeurs. Si l'on ajoute que ces carci- nomes ne se présentèrent que chez de vieilles femel- les employées à la reproduction,et que la plupart des jeunes furent aussitôt vendues, on reconnait que le pourcentage des tumeurs est énorme. Les expé- riences faites par Sticker sur les chiens sarcoma- teux confirment ce qui précède. Sticker laissa des chiennes, porteuses d'un sarcome des organes géni- laux, s'accoupler avee des chiens sains, etilobserva ensuite l'apparition de sarcomes du pénis chez les chiens. Il s'agit également ici d'une inoculation mécanique de cellules sarcomateuses du vagin sur le pénis des chiens. Chez l'homme même, de tels essais de transmis- sion ont été pratiqués. Von Bergmann a fait savoir, déjà en 1875, qu'il était parvenu à transplanter avec succès le cancer d'un homme à un autre. Il s'agis- sait d'un homme atteint de gangrène du pied, chez lequel l'amputation de la jambe n'était qu'une ques- tion de jours; des particules cancéreuses, prove- nant d'une tumeur du sein, furent transplantées sur le haut de la cuisse et se développèrent en gros nodules. De ces résultats, assez incontestables pour bannir tous les doutes, découle la possibilité d'un trans- port du cancer et, par là, d’une origine ectogène de celui-ci. Mais ces ekemples montrent aussi que la capacité et la possibilité de contagion du cancer sont relativement faibles. Il faut que des cellules cancéreuses non lésées soient inoculées directe- ment: mais cela est toujours possible, en partieu- lier dans l'acte de l'accouplement. Cette transmis- sion a lieu par les cellules cancéreuses et seulement par elles. Toute autre cellule, même d'un orga- nisme cancéreux, ne peut pas provoquer le cancer. Que résulte-t-il done de la capacité des cellules sancéreuses de provoquer le cancer dans un nouvel organisme? Elles sont rendues identiques, dans leurs fonctions vitales, avec les propriétés vitales d'un agent d'infection. Nons devons donc considé- rer la cellule cancéreuse même comme un germe infectieux pour l'organisme. Jusqu'au moment où la cellule cancéreuse est définitivement formée aux 998 D: F. BLUMENTHAL — NOS CONNAISSANCES SUR LES AFFECTIONS CANCÉREUSES dépens de la cellule épithéliale, on peut se trouver en présence d'une dégénérescence cellulaire. Mais, une fois que la cellule cancéreuse est née, elle est devenue par son existence un germe qui infecte l'organisme entier et dont la pénétration dans l'or- ganisme d'un individu de la même espèce animale peut toujours provoquer la même maladie. Même détaché de son sol maternel originel, ce germe peut conserver ses propriétés malignes à travers de nom- breuses générations, comme les essais surle cancer des animaux le confirment toujours plus. Quand bien même la cellule cancéreuse dérive d'une cel- lule organique et que, comme telle, elle ne possède aucune propriété infectieuse, ce n'est certainement pas une raison pour refuser ces propriétés à la cel- lule cancéreuse terminée. En me basant sur ces considérations, j'ai proposé de caractériser le can- cer comme une Zufection cellulaire. Après moi, Rib- bert et Westenhoefer ont exprimé une conception analogue, et envisagé les cellules comme des para- sites animaux. Le progrès qui est résulté de cette manière de voir consisle en ce que nous compre- nons maintenant très bien les propriétés infec- lieuses du cancer. III Mais une question reste toujours pendante: Com- ment naît la première cellule cancéreuse? Com- ment cette cellule épithéliale normale devient-elle subitement maliyne? Pour résoudre ce problème, nous devons nous éclairer sur cette autre question : A quoi se distingue une cellule cancéreuse d'une cellule épithéliale normale? Car c'est une proposi- tion incontestable que la cellule cancéreuse doit dériver d'une cellule épithéliale. Récemment, Apo- lant a montré que les tumeurs cancéreuses de souris les plus diverses tirent leur origine d'un organe glandulaire, la mamelle. On peut observer le pas- sage direct du tissu glandulaire normal à une hypertrophie bénigne à disposition encore distine- tement glandulaire, qui conduit ensuite aux formes les plus variables de néoformations malignes. C'est donc toujours une cellule épithéliale qui devient finalement une cellule cancéreuse, mais la question du processus qui intervient n'est pas du tout réso- lue par là. Depuis Cohnheim, un grand nombre de savants admettent que les cellules cancéreuses sont des cellules embryonnaires qui ont persisté dans l'or- ganisme, qui ont conservé de leur vie embryon- naire une grande faculté de croissance et qui l'ont développée brusquement. En réalité, on peut con- sidérer comme très vraisemblable, pour quelques sortes de tumeurs malignes, une formation aux dépens de cellules embryonnaires: mais on doit dire, d'autre part, que la plupart des tumeurs qui | dérivent de cellules embryonnaires sont bénignes. | Ainsi, R. Meyer a montré que les inclusions embryonnaires certaines du tractus génital fémi- nin et des reins possèdent plutôt une tendance à la régression qu à l'hypertrophie, lors méme que, pen- dant un temps, elles croissent comme les autres issus à l'intérieur des organes qui les renferment. Nous savons également des dermoïdes qu'ils sont bénins. En outre, on nest jamais parvenu, par transport de tissu embryonnaire d'un embryon sur un animal de la mème espèce que cet embryon, à produire des tumeurs et spécialement ds tumeurs cancéreuses. | D'autre part, nous voyons, cependant, que les üssus embryonnaires se rapprochent biologique- ment du tissu cancéreux, car l'injection préventive de tissu embryonnaire confère aux souris une immunité relativement forte contre le cancer (Scholz). C'est une preuve de la parenté biologique du tissu embryonnaire et du tissu cancéreux, mais non de ce que chaque cancer doive naître d'un tissu embryonnaire. , Ribbert prétend alors que le tissu cancéreux peut | bien se développer aux dépens de cellules embryon- naires, mais que, d'autre part, des cellules épithé- liales ordinaires sont aussi capables, par hypertro - phie, de provoquer le cancer, et moins par une modi- fication de leurs propriétés biologiques, à l’origine, que par une lésion du tissu qui entoure ces cellules. | En règle générale, les cellules épithéliales sont, d'après lui, conservées dans le tissu environnant | comme des animaux sauvages dans une cage; mais quand le tissu — ou, pour continuer la comparai- son, la cage — n'est plus assez résistant, elles brisent leurs barrières et croissent dans le tissu. Si cette hypothèse était juste, on devrait pouvoir démontrer que les cellules cancéreuses sont équiva- lentes aux cellules épithéliales normales par leurs propriétés chimiques et surtout biologiques, et que l'organisme a simplement perdu des propriétés qui empêéchaient la croissance des cellules épithéliales. Cependant, on ne doit pas oublier que, dans le cancer, il ne s'agit pas seulement de multiplication et de croissance de cellules, mais aussi de propriétés | malignes qui conduisent finalement à l'anéantisse- | ment de l'organisme. D'après la conception de | Ribbert, l'organisme aurait donc été dépouillé, pour une raison quelconque, de la propriété quiempèche, chez les cellules épithéliales incluses dans les tissus, le déploiement d'une malignité qui existe déjà normalement. Or, j'ai apporté la preuve que le tissu cancéreux, dans sa composition chimique, s'écarte essentielle- ment des autres Lissus de l'organisme animal. Non le rapport des albuminoïdes simples entre eux est troublé, mais certains albu- seulement Corps D° F. BLUMENTHAL — NOS CONNAISSANCES SUR LES AFFECTIONS CANCÉREUSES 999 minoïdes des tissus cancéreux possèdent une com- position chimique différente de celle des albumi- noïdes normaux de l'organisme. Puis Neuberg et moi, simultanément, nous avons montré que les cellules cancéreuses, par suite de la présence d'un ferment, sont capables de solubiliser l'albumine du tissu environnant et même de tous les organes. Cette propriété, confirmée par tous les chercheurs, nous explique en grande partie la malignité des tumeurs cancéreuses ; elle nous montre, en effet, pourquoi la cellule cancéreuse, seule parmi toutes les autres cellules de l'organisme, est en état de se développer dans le tissu environnant, parce qu'elle le dissout grâce à la substance (ferment) qu'elle renferme. La faculté que possède ce ferment can- céreux de détruire l'albumine de tous les organes — faculté qu'on ne retrouve dans aucune autre cellule du corps — nous fait encore comprendre pourquoi les cancéreux maigrissent, puisqu'une décomposition continue de leur albumine orga- nique à lieu. Tandis que la cellule cancéreuse possède _elle- même un ferment qui est nuisible aux tissus de l'organisme, elle se comporte aussi, vis-à-vis des ferments produits par le corps, d'une facon diffé- rente des autres cellules. Elle est très facilement attaquée par le ferment tryptique,qui existe, en par- ticulier, dans la glande pancréalique, mais anssi dans d'autres organes, alors que les autres cellules de l'organisme sont, au contraire, très résistantes à ce ferment. Elle se comporte d'une facon inverse vis-à-vis du ferment peptlique : la cellule cancéreuse est très résistante à la digestion peptique, landis que les autres cellules ne le sont pas. Nous pouvons déduire de ces résultats que, dans le cancer, s'est établie une anaplasie chimique des cellules, sur laquelle reposent les propriétés biolo- giques malignes de la cellule cancéreuse. Cette ana- plasie ou dégénérescence de la cellule épithéliale s'opère progr malignité différente des divers cancers et le fait ssivement, ee qui nous explique la que beaucoup de cancers sont d'abord bénins et ne présentent que peu à peu leur malignité. Nous pou vons même dire dès maintenant que, plus le chi- misme de la cellule épithéliale devenue cellule can- céreuse s'est modifié, plus la cellule cancéreuse est maligne. Nous constatons, de plus, que l'organe qui est le siège d'une tumeur cancéreuse peut être également altéré dans ses fonctions chimiques. Ainsi nous trouvons que le rapport des divers albuminoïdes est troublé dans le foie cancéreux. Ce mode différent de se comporter de la tumeur cancéreuse vis-à-vis du tissu environnant, par rapport au lissu normal, ainsi que le rapport différent du tissu lui-même avec les cellules cancéreuses, qui apparait dans l'action de ses ferments, nous donnent une idée des troubles considérables des échanges qui doivent se manifester dans les affections cancéreuses. Ainsi Leyden et Bergell ont montré que le foie d'un animal sain possède une forte capacité de détruire les cel- lules cancéreuses, probablement par suite de sa leneur en un ferment détruisant les cellules. Cette faculté fait défaut, d'après Bergell et Lewin, au foie des animaux cancéreux (rats). Si cette observation se confirmait chez l'homme, on aboutirait à ceci : Une modilication dans les cellules épithéliales conduit au résultat que ces cel lules forment un ferment qui dédouble l'albumine des tissus. Puis, dans le foie, et peut-être dans d'autres organes, un processus s'accomplit, tel que la substance qui détruit les cellules cancéreuses disparaît chez le malade cancéreux; autrement dit, la capacité de résistance du foie, et peut-être d'autres organes, vis-à-vis du développement des cellules cancéreuses est amoindrie ou annulée dans l'organisme des cancéreux. La disparition du ferment destructeur des cellules cancéreuses joue certainement un grand rôle dans le développement du cancer, mais seulement dans les derniers stades, — où elle expliquerait la for- mation des métastases, c'est-à-dire la colonisation de cellules cancéreuses dans des organes éloignés qui ont perdu leur résistance, — et non à l'origine, où le cancer est strictement localisé. Aussi long- temps que cette première étape n'est pas franchie, nous devons admettre un bon fonctionnement des processus de défense; mais, lorsque ceux-ci vien- nent à faire défaut, le cancer doit devenir une maladie généralisée. Si le cancer se formait parce que le ferment anticancéreux a disparu dans les lissus, on ne verrait plus aucune raison d'enlever les tumeurs cancéreuses par l'opération, car l'ab- sence de la substance qui détruit les cellules cancé- reuses permettrait la néoformation de tumeurs à tout moment et à la même place ou en un autre endroit quelconque du corps. On doit cependant repousser cette conception, quoique les nombreuses récidives de cancer après l'opération ne la rendent pas tout à fait absurde. Le célèbre chirurgien Czerny, de Heidelberg, a, dans 10 °/, des cas de cancer qu’il a opérés, oblenu une guérison durable, c’est-à-dire une guérison qui à duré plus de dix ans. Autrement dit, dans 40 °/, des cas de cancer, malgré l'absence de la substance qui empêche la croissance des cellules, il n'a pas vu la maladie se reproduire. Contre l’origine du cancer à la suite de la dispa- rition primaire d'une substance défensive dans les organes, telle que l'antiferment, on peut invoquer aussi le fait suivant : expérimentalement, le cancer se développe mieux chezles jeunes animaux (souris 1000 D' F. BLUMENTHAL — NOS CONNAISSANCES SUR LES AFFECTIONS CANCÉREUSES et rats) que chez les vieux. Dans ce cas, on devrait admettre que la substance défensive se forme seu- lement au cours des ans, ce qui est contraire à toutes nos données. La découverte de telles subs- tances protectrices serait certainement d'une grande importance pour notre connaissance du cancer, car, comme nous l'avons dit, elles jouent certainement un role important dans le développement de la maladie et ce sont vraisemblablement elles qui empêchent que le cancer forme dès l'origine des métastases. Peut-être limmunité que nous produisons chez les animaux d'essai par l'injection d'organes déter- minés, en particulier de foie et de sang, repose-t-elle aussi sur l'introduction de ces substances protec- trices? Peut-être ces substances sont-elles appelées à jouer un rôle dans la guérison spontanée, car il n y à pour nous aucun doute que ces guérisons se présentent? Nous avons constaté, dans le transport des tumeurs chez les animaux, que souvent celles-ci, après un temps de développement, s'arrêtent subite- ment el sont finalement résorbées par le tissu envi- ronnant. Chez l'homme même, les observations de guérison spontanée ne peuvent plus être rejetées comme erronées ou être rapportées à de faux can- cers où sarcomes, depuis que l’on à trouvé qu'une tendance à la guérison se manifeste presque dans chaque tumeur cancéreuse (Orthi. On voit par là qu'une lutte prolongée se poursuit entre les cellules cancéreuses et les ferments des tissus qui les dé- truisent. Tous les faits, d'après lesquels les poissons — où l'on observe fréquemment le cancer (Behla) — ou les vers (Borrel) apparaissent comme les propagateurs du cancer doivent être interprétés dans ce sens que ces animaux sont les porteurs de cellules de tumeurs humaines, qui sont restées longtemps dans leur corps et y ont gardé leur caractère infectieux. Lors- qu'elles parviennent à cet état dans un organisme humain, elles peuvent s’y développer en tumeurs. Si nous résumons maintenant les conséquences de ces faits d'observation, nous voyons que, dans la genèse du cancer, il s'agit aussi bien d'une infection du dehors par la pénétration de cellules cancé- reuses parlaites que d'une dégénérescence chimique de cellules normales, conduisant à la formation de cellules cancéreuses et conditionnée par un trouble des échanges des cellules épithéliales, analogue à celui qu'on observe dans d'autres ma- ladies. La dégénérescence des cellules repose sur une déviation des albuminoïdes ; les causes de celle-ci peuvent ‘être des excitations physiques et chi- miques, ou même encore vivantes. Ainsi l'on voit le cancer naître après des lésions : cancer trauma- tique, cancer cicatriciel, cancer des ramoneurs, cancer des fumeurs, cancer des ouvriers qui tra- vaillent le goudron et la paraffine; on voit le cancer se développer après des ulcères de l'esto- mac; on constate encore que beaucoup de tumeurs bénignes deviennent malignes au cours du temps, surtoutaprès des blessures descoups, deschocs,ete., c'est-à-dire se transforment en cancer. De telles influences ne sont pas de nature parasitaire, mais se caractérisent par des troubles des échanges. On ne doit pas nier qu'un vrai parasite puisse ètre, aussi bien qu'une excitation chimique, la cause de la transformation de cellules épithéliales en cellules cancéreuses; mais nous ne le tenons pas pour démontré, et, quand cela serait prouvé, le parasite ne serait pas la cause unique. D'autres maladies des échanges, par exemple le diabète, se produisent aussi par le choc, la chute. Mais, tandis que, dans ces autres perturbations des échanges, nous constatons toujours la disparition de propriétés que l'organisme possédait aupara- vant, — ainsi, dans le diabète, la propriété de détruire le sucre, — nous pouvons, dans le cancer, soit trouver ces propriétés disparues, — la cellule stomacale cancéreuse à perdu la faculté de sécréter de l'acide chlorhydrique, — soit aussi les trouver conservées. Ainsi, une cellule cancéreuse de la vésicule biliaire, ou une cellule cancéreuse de la même origine qui s'est développée par métastase dans un autre organe (par exemple dans le cer- veau), a gardé la propriété de sécréter de la bile. Mais, d'un autre côté, la cellule cancéreuse a acquis de nouvelles propriétés, qu'elle ne possédait pas antérieurement : ainsi, celle de décomposer l'albu- mine d'autres cellules et de croître indéfiniment. Par cette dernière faculté, puis par la formation de métastases, et surtout parce qu'il est capable, transplanté sur un organisme du même genre, non seulement de s'y fixer, mais d'y croître et d'y reproduire la même affection, le cancer se distingue de tous les autres troubles connus des échanges, et il offre par là une propriété que nous retrouvons dans les maladies infectieuses. Jusqu'au moment où la cellule cancéreuse est complètement formée aux dépens de la cellule épithéliale, ‘11 s'agit d'une dégénérescence chimique. Maïs, une fois la cellule cancéreuse née, elle est devenue, par le fait de son existence, un germe qui infecte l'organisme entier et dont la pénétration dans un organisme de la même espèca animale reproduit toujours la même maladie. Le fait que la cellule cancéreuse dérive d'une cellule organique, qui, par elle-même, ne possédait aucune propriété infectieuse, n'est certes pas une raison pour dénier cette propriété à la cellule can- céreuse développée. Je vois donc dans le cancer une infection de l'organisme par ses propres cel- D' F. BLUMENTHAL — NOS CONNAISSAI CES SUR LES AFFECTIONS CANCÉREUSES 1001 lules dégénérées, une infection qui peut être trans- porlée sur d'autres individus de mème espèce. Je crois ainsi avoir fixé l’état actuel de nos connais- sances sur l'éliologie du cancer. Ehrlich voit aussi à l'origine du cancer une perturbation des échanges et en particulier un trouble de la nutrition. Il admet que les cellules épithéliales qui deviennent des cellules cancéreuses sont celles qui possèdent, pour les substances nu- tritives, une plus grande avidité que les autres cellules du corps. Normalement, toutes les cellules recoivent une même quantité de nourriture et se développent régulièrement, Mais, s'ilse produit un trouble dans la réception de la nourriture, de facon que quelques cellules soient trop nourries et d'autres pas assez, les premières se développeront ‘aux dépens des secondes. Les expériences d'Haaland nous montrent bien comment, au sens d'Ebrlich, la nutrition joue un rôle dans le développement du cancer. Haaland à observé que des souris, qui, à Paris, élaient récep- trices pour le cancer, avaient perdu cette récepli- vité en Norvège, et il établit que c'était le fait de la nourriture, car elles étaient nourries autrement à Paris qu'en Norvège. Cette preuve a été encore renforcée par le fait qu'en modifiant la nourriture il put à volonté faire varier l'immunité. IV J'arrive maintenant à la seconde question impor- tante de cette étude, celle de la marche de l'affection cancéreuse. I est aujourd'hui plus difficile que jamais de dire, dans un cas spécial, si l'on se trouve en présence d'un cancer où non. Autrefois, l'examen histologique était décisif; aujourd'hui, nous savons que l'évolution clinique décide seule, dans beaucoup de eas, si la tumeur est bénigne ou maligne. Déjà, dans l'expérimentation sur les ani- maux, on à constaté que cerlains cancers de la souris ne se laissent pas du tout transplanter, quelques-uns dans un nombre limité de cas, tandis que d'autres se montrent hautement infectieux (Ebrlich et Apolant). Un anatomo-pathologiste aussi éminent que Lubarseh a admis, pour de nombreux cas de tumeurs, l'impossibilité de résoudre par le microscope la question de l'existence de la tumeur cancéreuse; surtout au commencement de la mala- die, il est souvent difficile de faire un diagnostic exact. É Fischer à produit, par injections de carmin chez les lapins, des tumeurs qui, histologiquement, se distinguent à peine du cancer, mais auxquelles manquent, cliniquement, toutes les caractéris- tiques de celui-ci. Brosch et Futterer sont parvenus à provoquer, l'un sur la peau, l’autre sur la mu- queuse stomacale des lapins, des hypertrophies épithéliales profondes d'origine inflammatoire, mais qui, malgré une longue époque d'observation, ne sont pas devenues Lubarsch a observé la mème chose pour des muqueuses en- flammées,. cancéreuses. Nous ne trouvons aucun caractère véritablement distinctif pour les tumeurs malignes. Il en existe qui paraissent tout à fait semblables aux tissus normaux, tandis que d'autres ne possèdent aucune structure organique distincte, mais sont constituées par des développements cellulaires irréguliers. Mais, quand nous voulons diviser le cancer en cas bénins et malins, nous pouvons constaler tous les jours.. qu'un cas jusqu'alors bénin présente subitement une grande malignité, de sorte que, dans cette direction, il n'y a pas grand'chose à faire. Ce que nous désignons sous le nom de cancer, ce sont des épithéliomes hétérotropes, dont la ma- lignité peut être très variable. Nous ferons donc mieux de placer la malignité au milieu des re- cherches sur la marche de l'affection cancéreuse, c'est-à-dire de rechercher en quoi consiste alors la malignité des tumeurs. Car il est clair que toutes les hypertrophies prétendues atypiques, mème lorsque, pendant un temps, elles paraissent bé- nignes, deviennent finalement malignes. On peut désigner comme caractères de la mali- gnité la croissance indéfinie de la tumeur avec tendance à la formation d'ulcère, puis la formation de métastases et la cachexie cancéreuse. Cette der- nière consiste en ce que le cancéreux maigril, e est- à-dire qu'il détruit plus d’albumine qu'il n'en assimile par la nutrition. Aussi longtemps que ces caractères, où Fun d'entre eux, manquent à la tumeur cancéreuse, elle n'est pas maligne; mais dès qu'ils s'établissent, fül-ce même des années après le commencement de la maladie, elle revêt aussitôt le caractère pernicieux. Jusqu'à ces dernières années, on admettait très généralement que la eachexie se présente dans tous les cas de cancer, On considérait comme impossible qu'il y eût, chez le cancéreux, assimi- lation d'albumine; plus on lui en fournissait, plus il devait en détruire. Un grand nombre de recherches. que j'ai faites sur ce sujet montrèrent, cependant, que celte conception étaitinexacte, etqu'elle n'avait pu se faire jour que parce que tous les cas sur lesquels elle se basait étaient ceux de cancéreux arrivés aux derniers stades et condamnés à bref délai. Si l'on examine, par contre, des cancéreux à petites tumeurs, en particulier avec cancer du sein, on ne trouve jamais chez eux une augmentation de la destruction de l'albumine; bien plutôt, malgré l'existence d’une tumeur cancéreuse, ils deviennent 1002 D: EF. BLUMENTHAL — NOS CONNAISSANCES SUR LES AFFECTIONS CANCÉREUSES souvent plus riches en albumine et ils augmentent de poids. Quand donc se produit la redoutable cachexie cancéreuse, c'est-à-dire la disparition de l'albu- mine organique? C'est, avant tout, le cas quand le cancer atteint les fonctions d'un organe vital impor- tant. S'ilse porte, par exemple, sur le pancréas, ou sur le foie, les fonctions de ces organes sont lésées. L'attaque d'autres organes, qui ne sont pas importants pour la vie, comme les seins, la matrice, n'est jamais tout d'abord accompagnée de cachexie. Dans ce dernier cas, la cachexie ne se présente que si l'infection intervient. Des bactéries pénètrent dans la tumeur.cancéreuse de la matrice, la décom- posent, créent des ulcères dans lesquels se forment des toxines, et ces toxines, ainsi que la pénétration des bactéries des ulcères dans le courant sanguin, produisent ensuite une infection généralisée avec cachexie. Nous sommes alors ici en présence de la cachexie telle qu'on lobserve dans une infection générale du corps, mais ce n'est pas une cachexie cancéreuse spécifique. Il en est de mére, par exemple, quand le cancer du sein à détruit la peau et que les bactéries venant de l'air y produisent une infection généralisée. Le cancer produitencore lamaigrissement quand il empêche l'absorption de la nourriture, quand il siège dans l'æsophage, l'estomac ou l'intestin. Nous reconnaissons que celle déduction est exacte au fait que, lorsque la réception des aliments a été rendue possible par voie opératoire, même sans éloigne- ment de la tumeur cancéreuse, les malades repren- nent des forces : il y en à qui regagnent 20 à 30 li- vres en poids au cours de quelques mois. Il résulte de ces observations que, dans beau- coup de cas, la prétendue cachexie cancéreuse ne se produit pas dès qu'apparail une tumeur eancé- reuse, autrement dit qu'elle n'est pas un phéno- mène accessoire typique du cancer. Nous connais- sons, cependant, des tumeurs cancéreuses qui, sans siéger dans un organe vital important, sans avoir formé d'ulcères, sans empêcher l'absorption des aliments, provoquent très rapidement la déper- dition des forces, c'est-à-dire la cachexie cancé- reuse. Ce sont des cancers très mous. Dans ces cas, l'établissement de la cachexie doit s'expliquer ainsi: le fermant dédoublant l’albumine, dont Neuberg et moi nous avons démontré l'existence dans la tumeur cancéreuse, est résorbé dans la cireulation san- guine et peut manifester partout ses propriétés destructrices. En faveur de ma conceplion, je puis citer le fait que les cancers qui ne donnent pas lieu à une résorplion du ferment dans le courant san- guin ne produisent pas de cachexie : tels sont les cancers durs entourés d’un tissu conjonctif résis- tant (squirres). C'est ainsi qu'on doit comprendre l'apparition et l'importance de la cachexie cancé- reuse. Quels sont maintenant les progrès de nos con- naissances en ce qui concerne la croissance avec infiltration et la formation des métastases? Ici, la connaissance de l'existence d'un ferment destruc- teur de l'albumine dans la cellule cancéreuse peut nous conduire à des conclusions importantes. Ce ferment protéolytique cause une lésion du tissu de deux manières : d'abord sur place, puis au loin. Sur place, il parait plausible que, lorsqu'une cellule est en état d'attaquer le tissu voisin, c'est- à-dire de détruire son albumine, ce tissu environ- nant doit aussi perdre de sa capacité de résistance contre la croissance de la cellule cancéreuse ; nous pouvons ainsi nous représenter facilement que, par la seule perte de résistance du tissu, la cellule cancéreuse soit moins limitée que les autres cel- lules de l'organisme dans sa capacité de dévelop- pement, et cela nous explique sa croissance par infiltration. Au loin, ces ferments protéolytiques peuvent manifester ainsi leur action nocive : entrés dans la circulation, ils créent dans les autres tissus, par leur action digestive, des points de moindre résis- tance, propices à l'émigration des cellules cancé- reuses, et, d'autre part, comme nous l'avons déjà dit, par la destruction augmentée de l'albumine organique, ils prennent une grande part à l'établis- sement de la cachexie cancéreuse. y Il me reste à considérer la question la plus im- portante de cette étude : Quelles perspectives l'état actuel de nos recherches sur le cancer nous offre-t-1l sur la guérison de la maladie ? J'ai déjà rappelé que nos meilleurs chirurgiens estiment à 40°/, des cas opérés par eux la proportion des guérisons ; cela nous montre que nous perdons encore 60 ?/, des malades. Beaucoup de médecins et de profanes en sont toujours à cette conception que, lorsque le bistouri du chirurgien ne peut guérir le cancer, toute guérison est impossible; ils considèrent tout essai de cure autre que par voie chirurgicale comme du charlatanisme. Ce scepticisme est le plus grand ennemi du progrès dans le domaine thérapeutique. Ce pessimisme est-il donc justifié ? Je m'arrêlerai d'abord aux recherches de Jensen. Nous avons vu plus haut que Jensen et Ehrlich ont guéri des souris du cancer. Pour cela, ils se sont servis de plusieurs procédés. Avant que j'entre plus avant dans cette question, je dois d'abord exami- ner s'il est possible d'immuniser contre le cancer, c'est-à-dire de protéger artificiellement les animaux contre cette affection. D' F. BLUMENTHAL — NOS CONNAISSANCES SUR LES AFFECTIONS CANCÉREUSES 1003 Jensen, Ehrlich, Bashford, Borrel, ete., ont fait, à ce sujet, un grand nombre d'expériences. Is ont traité des souris avec des cellules cancéreuses atté- nuées, dont ils avaient diminué les propriétés vi- tales par la chaleur: ils leur injectaient sous la peau ces cellules atténuées, en suspension dans une solution de sel marin. Ces cellules ne donnent naissance à aucune tumeur cancéreuse; mais les souris ainsi traitées deviennent capables de résister à l'injection de cellules cancéreuses virulentes. Cette immunilé s'obtient non seulement par Pin- jection de cellules cancéreuses, mais même par celle de tissu normal d'animaux non cancéreux. Ainsi, l'injection de sang de souris confère déjà une certaine immunité. Cette immunité augmente quand on fait usage de tissu embryonnaire (fœætal), et récemment Bashford à montré que la peau tri- turée (c’est-à-dire du tissu épithélial) produit aussi une très forte immunité contre la transmission du cancer aux souris. De ces recherches, il résulte qu'on peut protéger des animaux d'expérience, souris et rats, — el mème actuellement des chiens, — contre le cancer et le sarcome, aussi bien par des cellules de turneurs alténuées que par divers tissus normaux. Il n'est done pas absurde de penser que, par le même moyen, on arrivera un jour à la guérison du cancer, ainsi que cela se passe déjà pour les maladies infectieuses. Nombreuses sont, d'ailleurs, les ten- tatives qui ont été faites dans cette voie. Celles-ci sont, en partie, antérieures aux recherches de Jensen et d'Ebrlich. En 1895, Ch. Richet et Héricourt annoncèrent qu'ils avaient injecté à des ànes et à des chevaux des extraits aqueux de tumeurs cancéreuses; après quelque temps, ils firent une prise de sang à ces animaux, avec lequel ils traitèrent des cancéreux. Leur idée était que l'excitation des cellules cancé- reuses chez les animaux d'expérience devait former des substances dissolvant les cellules cancéreuses et empêchant leur croissance (cytolysine). Les ré- sultats de ce traitement furent les suivants : La propagation du cancer fut arrêtée, les tumeurs diminuèrent, l'état général s'améliora, les injec- lions se firent sans danger, les douleurs s'apai- sèrent et linfiltration du tissu voisin diminua. Une année plus tard, Arloing et J. Courmont annoncèrent à l'Académie de Médecine de Paris qu'ils avaient traité avec le même succès des can- céreux au moyen du sérum sanguin d'ânes ayant recu diverses tumeurs cancéreuses où analogues. Plus tard, des travaux de même nature furent com- muniqués par Brunner, Dor, Charcot et d'autres. Les deux derniers, en particulier, sont remar- quables, d'abord à eause des résultats favorables, ensuite parce qu'ils entreprennent une différencia- tion des diverses tumeurs. Dans les essais anté- rieurs, toutes les tumeurs possibles avaient été injeetées, sans sélection. Dans les expériences de Dor, l'animal est immunisé avec une tumeur pro- venant du malade qui sera plus tard soumis à la sérothérapie. Dor extirpa à une patiente une partie d'un sareome de l'œil, l'injeeta à un animal sous la peau et, après quelque temps, enleva à ce dernier du sérum sanguin. Ce sérum fut administré à la malade en injection sous-cutanée et la guérit. Cet essai répond à toutes les exigences de la sérothé- rapie moderne, car la malade à été traitée avec un sérum contenant la substance immunisante contre la tumeur dont elle souffrait, C'est sur la même base que se fondaient les pro- cédés préconisés indépendamment par Borrel et par moi. Nous avons proposé de triturer les tumeurs enlevées par l'opération, de les inoculer à un animal sous la peau et de traiter ensuite le patient par le sérum de cet animal. Par ce moyen, Je voulais, au cas où des restes de tumeur persis- teraient, en particulier où il y aurait des glandes infectées dans le corps, les anéantir et empêcher la formation d'une récidive. Von Leyden et moi, nous avons employé cette méthode d'abord'chez le chien, puis chez l'homme. Nous avons transporté une partie de la tumeur d'un chien cancéreux sur d'autres chiens et nous avons inoculé une autre partie de la même tumeur sous la peau de lapins pendant plusieurs semaines. Un chien sur lequel la transplantation avait réussi, et qui présentait déjà une tumeur d'une certaine grosseur, fut traité par le sérum sanguin des lapins immunisés, et nous parvinmes, après plusieurs mois d'injections, à faire disparaître la tumeur chez ce chien. Nous avons alors appliqué à l'homme la même méthode de traitement. Des chèvres furent injectées, pendant plusieurs semaines, avec les espèces les plus diverses de carcinomes (du sein, du foie, de l'utérus, ete.), chaque animal recevant une espèce déterminée de cancer. Après plusieurs mois dé traitement, nous fimes des prises de sang à chaque chèvre, et nous traitàämes des carcinomes du sein et de l'utérus avec le sérum des chèvres ayant recu les produits correspondants. Les résultats, obtenus en divers endroits, furent analogues à ceux de Richet et Héricourt mais ils étaient tels qu'on peut admettre que, par ils ne nous satistirent pas, une amélioration de la technique, en particulier quand on sera arrivé à concentrer les substances immunisantes dans le sérum des animaux traités, on obtiendra des résultats meilleurs. Une seconde méthode, que von Leyden et mot nous avons expérimentée, consiste à inoculer aux animaux cancéreux des extraits de tumeurs Ccan- 1004 D' EF. BLUMENTHAL — NOS CONNAISSANCES SUR LES AFFECTIONS CANCÉREUSES céreuses, de facon à produire en eux-mêmes les substances protectrices contre les cellules cancé- reuses encore vivantes. Nous avons fait un essai de ce genre chez un chien porteur d'un carcinome ce chien fut guéri par injection ré- pélée d'extraits d'une partie de son propre cancer. de l'intestin : Celte méthode à aussi été appliquée à l'homme; l'idée fondamentale est de produire, par introduc- lion de matières de la tumeur cancéreuse, dans le corps du malade mème, les substances dissolvant la cellule cancéreuse. Nous en sommes encore aux latonnements du début. La voie à parcourir est encore longue, mais les succès obtenus avec les souris, les chiens el aussi certaines observations faites sur l’homme cancéreux, montrent qu'elle n'est pas dépourvue de perspectives intéressantes. ces méthodes ne sont certainement pas les seules qui permettent d'influer sur le cancer. Plus nous poursuivons nos recherches dans ce domaine, plus nous sommes élonnés des multiples Toutefois, possibilités d'agir sur les tumeurs malignes. Il y a quelques années, j'ai annoncé que les extraits pan- créatiques ont la propriété de dissoudre facilement les tumeurs cancéreuses. En Angleterre, on à étudié celte question de plus près et l’on est arrivé à la conclusion que c'est la trypsine renfermée dans le pancréas qui digère là tumeur. Ainsi s'est développé en Angleterre un traitement du cancer par la-trypsine. Lorsqu'on injecte une solution de trvpsine ou de pancréas dans la tumeur cancéreuse, on assiste à une disparition assez rapide de celle-ci. On peut obtenir le même effet par CIGAIE mais, à la suite de l'application de ces derniers, d'autres movens (arsenic, thermocautère, tandis que le tissu cancéreux est détruit, on observe à la périphérie une croissance tumultueuse de la tumeur dans le tissu environnant, de telle sorte qu'on à dù renoncer à l'emploi de ces procédés. Ce n’est généralement pas le cas pour l'extrait pan- créatique:; mais la difficulté réside ici dans l'impos- sibilité d'en limiter l'action au tissu cancéreux seul : l'extrait attaque souvent le tissu sain et con- chemin. essayé d'enlever son caractère délétère au ferment üinue irrésistiblement son On à alors contenu dans l'extrait pancréatique et de l'injecter dans des parties saines du corps. Avec une prépa- ralion de cette nature, Beard et Pinkus ont obtenu des résultats favorables chez homme, tandis que Bashford à échoué dans le cancer expérimental des souris. Cette action destructive sur la cellule cancéreuse appartient encore à d'autres organes : von Leyden et Bergell l'ont rencontrée dans le foie plus forte que dans le pancréas. Après injection d'extrait de foie dans la tumeur cancéreuse, la réaction est si considérable qu'après quelques jours la tumeur entière à disparu et que, parallèlement à cette dis- parition, des phénomènes d'intoxication prononcés se manifestent. Récemment, Bergell el Sticker ont annoncé quils étaient parvenus à guérir par l'extrait de foie des chiens sarcomateux naturelle- ment ou des chiens chez lesquels ils avaient produit expérimentalement le sarcome. : Cette méthode de traitement par un ferment détruisant la cellule cancéreuse, tel qu'on en a trouvé dans le pancréas et le foie, est certainement appelée à jouer un grand rôle dans l'avenir. La difficulté, qui ne doit pas être rabaissée, consiste en ce que, parallèlement à l'application du ferment actif, il faut préserver l'organisme de ses phéno- mènes d'intoxication. Cette intoxication est vrai- semblablement causée par la mise en liberté de substances nuisibles à l'organisme, dues à la décom- position rapide de la tumeur cancéreuse, et il ne s'agira peut-être que de ralentir la décomposition. Nous administrons maintenant, dans ce but, les extraits de foie et de pancréas par le rectum, et il découle des résultats déjà obtenus que les ferments dissolvants des cellules agissent aussi par cette voie. Comme nous l'avons dit, les substances actives sont très répandues dans l'organisme : on peut encore citer les essais de Bier, qui a observé des succès remarquables dans le traitement des can- céreux par le sang d'une espèce étrangère, surtout du porc. Sur le traitement par les rayons de Ræntgen et du radium, je rappellerai simplement qu'il a donné des résultats remarquables et décisifs pour les cancers superficiels, facilement accessibles, de la peau, des lèvres; mais, quand le cancer est situé en profondeur, on brüle le tissu sain en mème temps que la tumeur, ce qui a écarté jusqu'à main- tenant l'emploi de la ræntgénothérapie pour les cancers placés sous la peau. Une autre méthode thérapeutique se base sur les résultats obtenus par Ehrlich et Spiess, qui ten- tèrent, par des troubles de nutrition à l'intérieur de la tumeur, de provoquer une disparition de celle-ci. Les troubles de nutrition sont causés par les anes- thésiques. Spiess injecta de la novocaïne (succédané de la cocaïne) à des souris, dans la tumeur même, et vit celle-ci disparaitre. D'après quelques essais que j'ai faits sur l'homme, ce traitement, appliqué simultanément avec une injection de préparation arsenicale, notamment d'atoxyle, paraît avoir une action analogue à celle des rayons de Rœntgen. Pour les grosses tumeurs, il n’a aucun effet. \ÿii De toutes ces recherches, il résulte que nous pos sédons actuellement une série de méthodes qui, à CH.-ED. GUILLAUME — LES ÉTATS DE LA MATIÈRE côté de la méthode chirurgicale, sont capables d'influer sur le cancer et de l'amener à disparaitre. Mais toutes ces méthodes ne sont quen germe, tandis que la méthode chirurgicale nous donnera seule, dans le plus grand nombre des cas, un résultat cerlain. Nous devons donc nous placer sur ce terrain : aussi longtemps que la tumeur est opé- table, elle doit être opérée; ce n'est que lorsque le chirurgien se refuse à faire une opéralion qu'on peut tenter un essai avee l’une des thérapeutiques précédentes. Naturellement, cet essai sera dans chaque cas une sorte d'expérience. Nous devons cependant entreprendre de telles expériences pour perfectionner les pures méthodes de traitement. Je n'ai aucunement la pensée que seul le traile- inent par une des méthodes indiquées plus haut puisse amener la décomposition de la tumeur can- céreuse; je crois, au contraire, quil existe de nom- breux autres moyens d'arriver au même résultat. Aussi, à notre époque, où nous avons le moyen de LES ÉTATS DE Lorsque, dans une de nos paisibles vallées, s'al- lume, dans chaque maison, l’âtre familial, le regard aime à suivre les fumées ténues qui montent vers le ciel en gracieux tourbillons. Arrivée à une certaine hauteur, chacune de ces légères colonnes s'élargit, s'étale, et bientôt rejoint ses voisines; ainsi se constitue un nuage translucide, dans lequel Fœilne distingue plus ses séparations, si nettes encore l'instant auparavant. Mais que l'on observe atten- tivement ce nuage : bientôt on verra s'établir des couches de teintes un peu différentes, et l'étude détaillée de leur structure nous montrera qu'elles se sont étagées suivant les dimensions des minuscules grains de matière minérale entrainés du foyer. C'est souvent ainsi que procède la science. Le pre- mier groupement des phénomènes nous est donné par leur origine; puis, plus lard, c'est leur nature intime qui marque leur place, et la classification, qui était artificielle, devient une classification na- turelle. La Physique nous offre des exemples grandioses de ces deux étapes successives. L'étude du spectre en est peut-être. le plus vaste et le plus frappant. Je voudrais parler aujourd'hui d’une synthèse moins saisissante, moins populaire surtout, car d'admirables découvertes dans le domaine des ra- diations fascinent tous les regards. Mais la matière, avec son infinie complexité, appelle aussi de pro- fondes études. D'ailleurs, n'est-ce pas d'elle qué- mane le rayonnement? N'est-ce pas en elle quil REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1901. 1005 produire à volonté le cancer aussi bien chez les souris que chez les rats, nous sommes non seule- ment justifiés, mais obligés d’éprouver sur ces animaux tous les moyens qui peuvent conduire à la guérison de la maladie. Les recherches modernes sur le cancer, qui ne datent pas de dix ans, ont déjà conduit, je le crois, à une série de résultats importants : si nous ne pouvons pas encore présenter comme atteinte, à l'humanité souffrante, la guérison du cancer, notre but suprême, nous pouvons cependant considérer aujourd'hui ce problème avec plus d'espérance que jamais, et j'estime qu'une décade ne s'écoulera pas avant que nous ayons pu élever sensiblement la proportion des cancéreux auxquels nous procurons la guérison et qui, actuellement, n'est que de 40°}, par la méthode chirurgicale, D' F. Blumenthal. Professeur à l'Université de Berlin. LA MATIÈRE revient et qu'il se transforme? Par réciprocité, le rayonnement lui-même la modifie, et l'étude de l'un serait voué à une partielle stérilité, si l'étude de l’autre ne marchait pas de pair. L'observation immédiate, qui élablit des calégo- ries tranchées, avait conduit à la conception de trois états des corps, que l’on pourrait appeler massifs. Sir W. Crookes en dénomma un quatrième, l'état individuel ou ordonné de la matière raréfiée. Et déjà la brillante synthèse de van der Waals, fondée sur les conceptions d'Andrews, avait enseigné la conti- nuité de deux des états, dans le passage par le point critique, où la matière n'est ni un liquide ni un gaz, mais à partir duquel elle peut devenir l’un ou l’autre, par une modification infiniment faible de sa température. Des auraient pu, depuis longtemps, montrer la conti- nuité de l’état fluide et de l’état solide. Un liquide est, dit-on, un corps qui prend Ja forme du vase qui le contient. Mais, que l’on y re- garde de près. Si nous frappons un coup sec sur un morceau de glu marine, il éclate, et chacun de ses débris montre une cassure conchoïde; si nous le observations beaucoup plus élémentaires placons sur une table, nous le retrouverons tel au bout de quelques minutes, etces deux observations nous autorisent à dire que la glu marine est solide. 23% 1006 CH.-ED. GUILLAUME — LES ÉTATS DE LA MATIÈRE Abandonnons maintenant ce morceau de glu, et prenons, chaque heure, une photographie de sa forme, puis faisons défiler toutes ces photographies dans un cinématographe. Nous aurons l'impression nette de l'étalement d'une grosse goutte d'eau, à celte seule différence près que les phénomènes d'inertie n'interviennent pas. L'expérience est inté- ressante, au simple point de vue cinématique, puis- qu'elle nous donne une image de l'écoulement d'un liquide visqueux et dénué de masse. Une balle de plomb posée sur un plan ne se dé- forme pas visiblement. Mais empilons des balles de plomb dans un tube d'acier. Pour peu qu'il ait quelques kilomètres de hauteur, le fond du tube se remplira complètement, exactement comme si, au lieu d'y mettre du plomb, nous y avions versé de l'eau. Ainsi, solide ou fluide semble être une notion conventionnelle, qui dépend du temps ou des di- mensions. Un corps possèdera toutes les propriétés du solide ou toutes celles du liquide, suivant que | nous sommes un nain ou un géant, que nous sommes un homme pressé ou que nous possédons une patience à toute épreuve. Mais la notion des états solide et fluide n'est pas seulement, semble-t-il, de pure convention; si nous faisons intervenir la température, nous pouvons établir en plus la continuité. Un fil de quartz, dont | la merveilleuse élasticité, peut être chauffé graduellement, et atteindre l'état complète- ment fluide, sans qu'à aucun moment on puisse : ici il est solide, un peu plus haut il sera on connait dire liquide. IT Pour n'avoir pas voulu être dupes d'une illusion, ne nous sommes-nous pas trompés nous-mêmes? C'est ce qu'un examen plus approfondi des phéno- inènes va nous montrer. Si, au lieu de la glu marine, du plomb ou du fil de quartz, nous avions pris simplement un cristal de quartz, nous ne l'aurions vu s'écouler ni sous l'action du temps, ni sous un notable effort. Et si celui-ci avait dépassé une certaine limite, le cristal se serait brisé. Nous ne l’aurions pas vu davantage se ramollir graduellement sous l’action de tempé- ratures de plus en plus élevées; quelles que fussent les précautions prises pour le chauffer, nous l'au- rions vu, au contraire, à une certaine température, éclater et se réduire en poussière. Et c’est en agglo- mérant cette poussière au chalumeau que nous au- rions obtenu la matière première de ces fils dont M. C.-V. Boys a doté la Physique. Nous pressentons, à l'examen de cet exemple, que, si les définitions classiques de l'état solide et de l'état liquide sont manifestement insuffisantes, au moins peut-il exister des cas dans lesquels aucun doute n'est possible; il est certains corps pour les- quels l’état solide n’est pas une fiction. * Sur la pente de cette synthèse facile et séduisante, mais dangereuse, que nous venions de tenter, M. H. Le Chatelier a crié : Prenez garde! Et son argument, développé avec un talent consommé par M. Tammann, a apporté une subite clarté en un do- maine naguère encore très obscur. III Jusqu'ici, notre examen de la matière est resté limité à ses propriétés mécaniques; il est donc in- complet, et notre jugement s'en est ressenti. La matière dont est fait le fil de quartz se comporte, vis-à-vis des déformations permanentes tentées à la température ordinaire, sensiblement comme le cristal de quartz, et c'est seulement lorsque nous l'échauffons que la différence apparaît. Mais la raison pour laquelle elle s'est manifestée est préci- sément celle qui à servi à fonder une distinction bien tranchée entre deux états apparemment solides des corps : l'un des états du quartz est l'état eris- tallin, l’autre est l'état amorphe. ( C'est là qu'est la vraie discontinuité; c'est là que tous les genres d'investigation, pourvu qu'ils s'élè- vent un peu au-dessus de l'expérience la plus vul- gaire, font apparaitre des différences que rien n'éga- lise. La matière peut ètre ordonnée ou désordonnée. Ses molécules peuvent être disposées en des ensem- bles symétriques, ou bien elles peuvent être distri- buées suivant les lois du hasard, sans qu'aucun groupement déterminé se manifeste. Lorsqu'une ordonnance précise à présidé à la constitution du corps, toutes ses propriétés la révèlent. Les para mètres élastiques, le chemin que décrit la lumière, la propagation de la chaleur et de l'électricité, tout, jusqu'à la forme extérieure qui, la première, attira l'attention sur ces jeux de la Nature, indique une organisation supérieure, où tout concourt à lhar- monie de l'ensemble. La matière amorphe, c’est, de tous côtés, l'indif- férence complète. C'est la foule qui se groupe ou se disloque, grossit ou s'écoule, sans qu'une joie ou une douleur survienne. Le cristal, c’est le cercle de la famille, où l'on regrette l’absent, où la douleur est partagée, où la joie est intime. Et cette solida- rilé dans la matière cristalline est si frappante que M. Brillouin a pu émettre cette géniale hypothèse : les actions capillaires sont plus faibles au dehors d'un eristal qu'au contact du même corps à l'état amorphe. C'est que, dans le premier, comme au foyer familial, l'intérêt se concentre; il en reste moins pour l'extérieur. CH.-ED. GUILLAUME — LES ÉTATS DE LA MATIÈRE 1007 Mais quittons la fiction. Aussi bien, sans pour- suivre le parallèle, il se présentera de lui-même à notre esprit. J'ai tenté de montrer combien est souvent illu- soire la distinction élémentaire entre les états solid > et liquide. Celle que nous venons d'établir la rem- place par une distinction de nature plus élevée, qui souvent classe les corps comme autrefois, mais sou- vent aussi rompt les anciens groupements. Un corps peut exister sous un grand nombre d'états divers. Chacun d'eux possède un domaine particulier d'équilibre, défini par un ensemble de valeurs simultanées des agents extérieurs : pression, température, champ lumineux, champ électrique, champ magnétique. La plupart des recherches se sont limitées aux deux premières de ces actions, parce qu'elles sont les plus évidentes et les plus générales. L'expérience permet de tracer la courbe joignant les couples de valeurs de la pression et de la température qui séparent deux étals d’un corps. Dans le champ inférieur existera un certain cristal, dans le champ supérieur un autre cristal. Le champ qui surmonte tous les autres est générale- ment celui de l'état amorphe. Le passage est une ligne de transformation, dont la fusion proprement dite n’est qu'un cas particulier. Il semble que le passage à l'état amorphe, que nous nomimerons par extension la fusion, se pro- duise toujours dans les mêmes conditions, et sans aucun de ces retards très fréquents dans le retour à l’état cristallin. Pour produire le cristal, au con- traire, il faut un noyau, qui grossit aux dépens de la matière environnante ; les noyaux ont, en général, une très faible tendance à se former au voisinage de la température de fusion, et il faut descendre beaucoup plus bas pour les voir se produire en grand nombre. Au contraire, comme l'a montré M. Tarmmann, la noyaux augmente sans cesse à mesure que la tem- pérature s'élève, jusqu'au point de fusion lui- tendance à l'accroissement des même, où brusquement elle se renverse; les noyaux se détruisent alors, en mème temps que les cris- laux déjà formés. Le refroidissement rapide d'un corps peut lui permettre de traverser la région de facile eristalli- sation sans que les groupements se forment. La substance surfondue arrive alors à une température basse sans abandonner l'état amorphe, et peut devenir très dure par augmentation progressive de la viscosité. Le corps a toutes les apparences d'un solide, et il est réellement un solide dans le sens de l'ancienne définition; mais il n'est pas un solide vrai, parce qu'un échauflement le ramène, sans aucune transformation brusque, à l'état fluide. Telle est la condition d'existence du fil de quartz, qui, au point de vue physique profond, et non pour le chimiste ou le mécanicien, est beaucoup plus éloigné du quartz cristallisé, que du verre, de la glycérine ou même de l’eau. Ainsi s'explique, sans la plus légère difficulté, la fusion pâteuse, qui est la simple diminution gra- duelle de la conformément aux lois depuis longtemps connues dans les liquides. Le plus souvent, les corps présentent, aux tem- pératures basses, une complète inaptitude à chan- ger d'état. Si nous nous éloignons de la cristallisa- tion pour envisager la dissolution, les exemples abonderont. Un verre à l'or, refroidi brusquement, reste indé- finiment incolore. Réchauffé, il prend la belle cou- leur pourpre qui le fait rechercher, et qu'il doit aux viscosité, grains du précieux mélal, agglomérés en masses ultramicroscopiques séparées de la solution. La trempe de l'acier fixe, aux températures basses, la solution particulière de fer et de carbone stable au rouge, alors que le recuit, ou simplement le refroidissement lent, permet la transformation et livre des métaux doux. L'addition du tungstène à l'acier a pour effet de donner à la transformation une extrème lenteur, ce qui assure la conservation du carbone de trempe, même lorsque le passage par les températures de transformation s'est pro- duit par refroidissement à l'air. La multiplication des’ citations est superflue. qui précèdent constituent exemples de ce que peut l'instinct du praticien pour Celles d'intéressants enseigner des procédés industriels d'une grande importance bien avant que la science soit suscep- tible d'en donner la théorie complète. Toutefois l'investigalion scientifique, dans ce domaine, comme dans tant d’autres, n'a pas été superflue, el c'est avec le guide sûr du diagramme des états que l'on est arrivé, par exemple, à la découverte des propriétés industrielles du bronze trempé. la“ Revenons à la cristallisation. M. M. Spring, M. Tammann ont consacré, à la varia- tion de ce phénomène sous l’action de la pression, Amagat, d'admirables expériences, qui ont transformé nos idées sur les états de la matière. Je ne résiste pas au plaisir de citer deux résul- tats particulièrement frappants obtenus par M. Tam- maäann. Nous nous considérions comme suffisamment renseignés lorsque nous connaissions les trois états de l'eau : la glace, l’eau liquide et la vapeur d'eau. Mais, si l'on refroidit la glace jusque vers — 60°, et qu'en même Lemps on la soumette à une pression de l'ordre de 2.000 à 3.000 atmosphères, on voit, au bout d'un instant, sans que l’on ait modifié son 41008 volume, la pression s'abaisser graduellement de 600 à 700 atmosphères, el se fixer à une valeur nouvelle, indiquant qu'une transformation complète vient de s'accomplir. Effectivement, la glace ordinaire s'est alors muée en une variété plus dense que l'eau, glace normale, qui se rencontre avec la glace anormale ordinaire et l'eau elle-même en un triple point, dont les conditions sont définies par — 22° et 2.200 atmo- sphères. La température de fusion de cette glace nouvelle monte naturellement en même temps que elle atteint — 17° sous 3.501) atmo- qu'en poussant plus la pression ; sphères, et l'on peut prévoir loin l'expérience, on retrouverait son point de fusion à 0° un peu au delà de 10.000 atmosphères. L'autre expérience, également instructive, se rapporte à un corps beaucoup moins répandu : le chlorure de phosphonium. Aux pressions et aux températures ordinaires, ce corps est gazeux. Sous pression, il se soliditie et peut, comme l'acide carbonique, exister en cris- taux baignés dans leur vapeur; mais aussi il peut exister à l'état liquide, et M. Van't Hoff a fixé sa température critique à 50°. Or, M. Tammann à pu suivre sa courbe de fusion jusqu’à 102° et 3.040 at- mosphères, et rien n'indique la proximité d'un arrêt dans cette courbe. Voilà done un corps qui reste solide à une tem- pérature incompatible avec son état liquide. Le passage par sa température critique n'est, d'ailleurs, marqué par aucune inflexion dans la courbe de fusion, ce qui montre bien la réelle continuité des états liquide et gazeux. Ce résultat peut paraître paradoxal. Nous avons l'habitude d'admettre comme évident qu'un Corps ne peut pas être solide à une température au-des- sus de laquelle il lui est impossible d'exister à l'état liquide. Mais, pour peu que nous réfléchissions, nous nous apercevons que cette croyance n'est fon- dée sur rien, sinon sur un instinct qui, dans ce cas, était trompeur; le résultat de M. Tammann, si sur- prenant qu'il soit, n'a donc rien de contradictoire avec les faits connus, et doit même être très général. Dans ces deux expériences, ila suffi, sans s'écarter des températures atteintes avec la plus grande faci- lité. d'élever la pression jusque vers 3.000 atmos- phères pour découvrir un domaine nouveau, que rien ne faisait pressentir; pour voir l'eau, par exemple, que nous crovions si bien connaitre, de- venir protéique, et abandonner la forme cristalline dont l'anomalie possède, pour notre vie sur la terre, une importance capitale. Mais ce sont, dira-t-on, des conditions excep- tionnelles. et dont l'intérêt, de pure curiosité scien- est limité au laboratoire, puisque nous ne à la surface de la Terre, défpres- tifique, rencontrons pas, CH.-ED. GUILLAUME — LES ÉTATS'DE LA MATIÈRE sions comparables à celles qui ont produit ces sin- guliers phénomènes. Pensons-y un instant. S'il est vrai que la surface de notre Terre et son voisinage immédiat présentent pour nous le maximum d'intérèt, nous ne saurions laisser hors du domaine de nos investigations les couches profondes de notre Globe, où s'élaborent, comme en un gigantesque creuset, les substances qui, de temps à autre, transsudent au travers de ce qu'on est convenu d'appeler l'écorce terrestre, ce creuset dont les légers soubresauts causent les effrayants séismes qui rappellent à l'humanité combien est peu de chose sa puissance. 11 suffit de descendre à une dizaine de kilomètres au-dessous de la surface du sol pour rejoindre l'ère des pressions dont nous venons de parler. Mais que se passe-t-il à 100 kilomètres, à 1.000 kilomètres, au centre de notre globe, où la pression est de l'ordre d'un million d'atmosphères; au centre du Soleil, où elle est mille fois plus grande? Ce sont là des questions auxquelles notre con- naissance de la matière est impuissante à répondre ; et tout ce que nous pouvons faire, apres nous ètre humiliés de savoir si peu de chose, est de chercher à obtenir quelques vues latérales vers ce domaine que nous ne pouvons pas attaquer de front. Y Mais, avant d'aller plus loin, il convient de re- venir encore en arrière, et de nous demander si, en admettant maintenant la discontinuité des états cristallisé et amorphe, nous n'avons pas élé dupes des mêmes illusions qu'en voulant montrer la con- tinuité des états solide et liquide. Voici une expé- rience, exécutée il y a quelques années par M. Cle- mens Schäfer, et qui peut donner à réfléchir. On sait que, dans les liquides, ou dans les-corps qui éprouvent des déformations permanentes Sans réactions élastiques linéaires, le coefficient de Poisson, de la contraction transversale à l’allonge- ment, est égal à 1/2, condition nécessaire pour que la déformation se produise sans changement de volume. Or. si l'on détermine les variations des paramètres élastiques d'un fil métallique aux tem- pératures basses, et que lon extrapole jusqu à ce que le coefficient de Poisson atteigne la valeur 1/2, on trouve une température qui, aux incertitudes près de l’extrapolation, se confond avec la tempé- rature de fusion. La fusion, qui est un phénomène bien défini pour les métaux, serait donc une conséquence continue de la variation des paramètres élastiques. N'insistons pas, pour le moment, sur ce doute, et cherchons à l'éclaircir en étudiant d'autres expé- rieuces. CH.-ED. GUILLAUME — LES ÉTATS DE LA MATIÈRE 1009 Le regretté Kahlbaum exposail, à il y à environ six ans, les résultats extrèmement curieux obtenus par la compression d'échantillons de divers métaux. Il s'agissait de corps très purs obtenus par distillation dans le vide, suivant la belle méthode qu'il avait si complètement élaborée. Les échantillons, sous la forme de petits cylindres bien polis, étaient soumis, dans l'huile de ricin, à une compression poussée graduellement jusqu à 20.000 atmosphères. Or, après une augmentation de la densité sous les pressions de poussées jusqu'à parfois 10.000 atmesphères, il observa, dans la Fribourg, majorité des cas, sous des pressions plus fortes, une diminution consécutive de la densité, faible, mais bien supérieure aux erreurs possibles des observations. En méme temps, les corps avaient changé de forme que soumis à des pressions rigoureusement hydros- ils s'élaient allongés ou raccourcis, bien tatiques; leur surface s'était dépolie et présentait un aspect comme tourmenté. Kahlbaum ébaucha une théorie de ces phénomènes; mais le moment élait un peu prématuré, el la solution devait être attendue de nouvelles expériences. Elles furent entreprises, après entente avec Kahlbaum, par M. W. Spring, l'éminent professeur de Liége, auquel l'étude des hautes pressions est redevable de tant de contributions de premier ordre. Les expériences de M. Spring furent exécutées dans des conditions un peu différentes de celles de Kahlbaum. Les furent d'un petit Lrou, de manière à subir un pétrissage métaux forcés au travers sous d'énormes pressions. Les résultats de Kahl- baum furent d'abord brillamment confirmés : la densité des échantillons étudiés se trouva diminuée de quantités notables, atteignant par exemple 2 °/, dans le cas de l'argent. Un seul métal fit exception, le bismuth, dont la densité était aug- mentée. Ce métal, d'ailleurs, se comporta de la plus singulière facon. On sait combien il est aigre et cassant. Or, le fil sorti de la filière par compression était tellement souple qu'il put être noué sans manifester la moindre rupture. C'était un nouveau bismuth, encore inconnu, que M. Spring avait réalisé. Mais les métaux pétris pouvaient revenir à leur état primitif; il suffisait, pour cela, de les chauffer. Leur surface, polie, devenait alors rugueuse; la densité première se retrouvait sensiblement; bref, l'effet des compressions était complètement annulé. Ne sommes-nous point en plein paradoxe? Un métal passé à la filière sous une énorme pression est souple; le recuit le rend cassant. Un autre perd de sa densité par le fait de la pression; recuit, il la reprend. tendance à la Essayons done une hypothèse, que, d'ailleurs, confirment immédiatement les observations métal- lographiques de M. Beilby. Supposons que, par la triluralion sous forte pression, les mélaux passent, au moins dans une forte proportion, à l'état amor- phe. Le recuit devra les ramener à la structure cristalline, qui est leur forme naturelle aux lempé- ratures inférieures à celle de leur fusion. S'ils con- servent, en général, l'état amorphe, auquel le pé- lrissage les à amenés, c'est parce qu'aux basses températures les transformations sont d'une len- teur extrème. Si nous suivons les conséquences de cette hypo- thèse, le paradoxe s'évanouit, et Lout devient clair. On sait que les métaux étudiés diminuent de vo- lume en se solidifiant, à l'exception du bismuth qui se dilate; l'état amorphe apparemment solide élant continu avec l'état liquide, rien n'est plus mystérieux dans les résultats de M. Kahlbaum et de M. Spring. L'expérience de M. Clemens Schäfer n'éveille plus un doute de principe, et Lout ce qu'il reste à faire est de préciser l'état, insuffisamment défini, des fils dont il s'est servi. Le phénomène n'est pas simple, mais on ne peut plus l'opposer à l'idée de discontinuité des états cristallin et amorphe. Un diagramme de M. Tammann aurait pu faire pressentir les résultats que je viens de rapporter. Dans l'immense majorité des cas, le cristal est plus dense que l’amorphe dans lequel il prend naissance; mais ce dernier est plus compressible, de telle sorte que, sous de très fortes pressions, la différence des densités tend à diminuer. Comme conséquence nécessaire, la température de fusion monte, avec une rapidité décroissante, en même temps que la pression. Pour de très fortes pres- sions, un maximum pourra être alleint, où la den- sité du cristal et de l’amorphe seront égales; et, pour des pressions encore plus fortes, la tendance à la transformation sera du cristal vers le corps amorphe. Cette transformation pourra se produire sous une pression hydrostatique, mais elle devra être énorme. La trituration, qui, en faisant glisser des cristaux, provoque leur désagrégation, multi- plie fortement cet effet de la pression, et engendre les transformations que je viens de décrire. Peut-être le fil n'est-il amorphe que jusqu'à une faible profondeur; mais comme, dans les torsions, l’action des couches extérieures est prépondérante, ce sont elles qui impriment leur caractère au phé- nomène. M. Spring a poursuivi l'expérience. Il a trouvé que, entre le métal amorphe et la baguette cristal- line, il se produit un couple hydro-électrique, dans lequel le métal amorphe entre en dissolution. Or, dans l'immense majorité des cas, le cristal se forme 1010 CH.-ED. GUILLAUME — LES ÉTATS DE LA MATIÈRE avec dégagement de chaleur; cette expérience con- firme donc bien le fait que les métaux flués, dont l'énergie interne est moindre, sont amorphes. A ce point de vue, le bismuth était encore exceptionnel, comme il l’est dans toutes ses propriétés. Nous n'avons envisagé jusqu'ici que les corps Spring à montré que, sous pression, les combinaisons chi- miques se modifient. Les doubles décompositions s'opèrent sans difficulté, comme dans les dissolu- lions. Bien plus, l'étude des sulfates acides lui a montré, dans tous les cas où ils avaient été soumis à de fortes compressions et à une trituralion, une décomposition partielle, et souvent presque totale, en sulfate neutre et en acide sulfurique. Si l'on permet, pendant l'action mécanique, le dégagement de la partie la plus liquide des produits obtenus, on recueille le résidu. Sinon, la recombinaison s'opère, et le résultat échappe à l'observation. purs; abordons les corps composés. M. VI Il est à peine besoin de faire remarquer combien l'ensemble des expériences exécutées aux fortes pressions peut être précieux aux géologues *. Nous avons vu, sous une simple pression hydros- talique, les corps se déformer et céder, c'est-à-dire se comporter comme des liquides, puisque la dif- férence des efforts tout autour était insignifiante. C'est ainsi que tout doit se passer aux grandes profondeurs de notre Globe; les corps s'écoulent sans la moindre augmentation de l'effort, sous la plus petite dissymétrie. Il ne saurait, bien entendu, être question de creux et de vides; tout est absolu- ment compact. La question de solidité ou de flui- dité, dans le sens où nous l'entendons ordinaire- ment, est oiseuse; la viscosité peut être énorme, mais les efforts sont dans la même proportion, et il n'y a rien de contradictoire avec les faits à dire que l'intérieur de la Terre est fluide, et en même temps rigide comme l'acier. La considération de l'effet des fortes pressions est partout fructueuse dans les études géologiques. L'existence des éléments microscopiques, comme celle des mouvements généraux, s'en trouve singu- lièrement facilitée; c'est ainsi, par exemple, qu'on découvre, dans des roches qui ont flué, des cris- taux minuscules dont on a tenté d'expliquer l'ori- gine mystérieuse par une élévation locale de la température, peu probable en elle-même. On con- viendra que l'explication de M. Spring est plus plausible. ‘ I] convient de citer, à ce point de vue, comme pré- sentant un intérêt tout particulier, les belles expériences faites par M. C. Barus, dans le laboratoire du Geological Survey aux Etats-Unis. VITE Jusqu'ici, nous nous sommes tenus sur le terrain solide des faits, et si, par-ci et par-là, quelques hypothèses ont été énoncées, elles étaient immédia- tement accompagnées d'un tel cortège de vérifica- tions, qu'elles ont pu être considérées comme des conséquences nécessaires des faits eux-mêmes. Mais abordons d'autres phénomènes plus cachés. Celui qui domine l'époque actuelle, et dont la connaissance à le plus profondément modifié nos conceptions, la radio-activité, contient encore de profonds mystères. Découverte par M. Henri Becquerel, la radio- activité fut, pour les physiciens, la source d’une joie sans mélange, jusqu'au jour où la mort tra- gique de Pierre Curie vint enlever à notre admira- tive affection le grand savant qui, avec la coopéra- tion de son admirable compagne, en montra toute l'ampleur et toute la puissance. Dès le premier article de la Revue générale des Sciences, dans lequel M#° Curie exposait, en 1899. le travail noblement accompli à deux. les diverses hypothèses par lesquelles on essayer d'expliquer le mystère nouveau étaient déjà in- diquées. Il en est une qui à survécu, et dont beaucoup d'expériences faites depuis lors tendent à prouver l'exactitude. Les faits sont bien connus de tous: il suffit de les rappeler sommairement. Le radium, en émettant des rayons +, 8 et y, dont les deux premiers sont enlevés à sa propre substance, se détruit, en donnant naissance à une émanalion, qui subit à son des transformations en pe dernier terme de cette désintégration successive est l'hélium, suivant la brillante découverte de Sir W. Ramsay et M. Soddy. Depuis le radium jusqu'à l'hélium, les produits sont de nature matérielle, mais ils sont tous ins- tables, et rayonnent en se simplifiant graduelle ment. Le radium lui-même se détruit, et l'étude de sa radio-activité a montré qu'en 1.300 ans la moitié de toute parcelle de radium a été transformée‘ en des corps inférieurs. En 26.000 ans, une quantité donnée de radium est réduite millionième. Comment se fait-il, dès lors, qu'il existe encore, sur terre, des quantités appréciables de radium ? La Terre, tout entière supposée en radium, serait ramenée à 1 kilog, en mille siècles, période encore bien peu étendue dans la vie d'un monde. Méditons cette singulière constatation de M. Bolt- wood : dans tous les minerais d'uranium, la pro- portion de ce corps au radium est constante dans les limites des erreurs d'observation. pouvait tour cascade. äu { Voir RUTNERFORD: Radioactivity. K L CH.-ED. GUILLAUME — LES ÉTATS DE LA MATIÈRE Dès lors, l'explication est aisée; le radium est produit par l'uranium, comme lhélium par le radium, avec les stades intermédiaires. La période de destruction de la moitié de l'ura- nium est évaluée à 600 millions d'années. Puis vient, après un slade intermédiaire (lactinium?), et peut-être un deuxième, le radium, dont la vie est relativement longue, tandis que les corps suivants, jusqu'à l'hélium, ne font que passer. Telle est la raison expérimentale pour laquelle la recherche de la radio-activité dans l'uranium ne donne que du radium. Pour isoler les produits suivants, il faut pouvoir opérer déjà avec une forte concentration. Nan Si les constatations qui précèdent ne nous disent rien des causes profondes de la radio-activité, au moins sommes-nous renseignés sur la source du radium. Il se constitue sans cesse aux dépens de l'uranium, et la quantité que la Terre en contient dépend uniquement de la quantité de l'uranium et de la rapidité des deux désintégrations, dont l'une produit le radium, tandis que Pautre le détruit. Cette théorie nous montre la stabilité d'une trans- formation qui peut durer sans changement depuis bien des millions d'années. Une telle évidence pourrait nous trouver satisfaits de l'immense che- min parcouru en moins de dix ans, grâce à la sa- gacité d'un nombre très grand de chercheurs atta- chés à ces difficiles questions. Mais c'est de l'homme de science plus que de tout autre peut-être que l'on peut dire la parole du poète : « Borné dans sa na- ture, infini dans ses vœux ». Revenons done sur nos pas. Curie a montré que la radio-activité est pratiquement indépendante de la température entre des limites étendues. M. Schus- ter vient de constater que, jusqu'à 2.000 altmo- sphères, elle ne dépend pas de la pression. Qu'est-ce à dire? C'est que, dans l'intervalle dans lequel on a opéré, el au degré de précision des mesures, les variations du phénomène sont insensibles. Mais, pendant longtemps, on à ignoré la dilatation des métaux et même la compressibilité des liquides. Et pourtant, maintenant que nous savons opérer mièeux, nous voyons la chaleur et la pression pro- duire de considérables changements dans le vo- lume des corps, préludant aux transformations de leur structure. Pour trouver une action sur les phénomènes radio-actifs, il faudrait sans doute faire des mesures beaucoup plus précises, et pousser beaucoup plus loin les actions extérieures. Lorsque Kirchhoff et Bunsen eurent rassemblé et complété des observations éparses et créé l’ana- lyse spectrale, la Physique put vivre pendant un temps sur cel axiome : à tout corps correspond un IOLE spectre unique. Puis surgirent les variations des spectres. Alors intervint la théorie de la cloche; car, les physiciens le savent très bien : qui n'entend qu'une cloche entend plusieurs sons. Enfin l'étude des spectres stellaires montra la disparition cons- tante de certaines raies formant des séries régu- lièrement ordonnées, et l'on comprit que l'atome pouvaitsubir de grandes simplifications. Sir Norman Lockyer avanca la théorie des protométaux, corps dont l'atome est résulté, par une dissociation par- tielle, de ceux que nous connaissons. A la tempé- rature extrêmement élevée atteinte par une étoile telle que & de la Poupe, M. Pickering a pu observer une série de raies dont les positions sont rigoureu- sement rendues par la formule de Balmer, dans laquelle il suffit de remplacer par des nombres impairs les arguments pairs qui rendent si parfai- tement les raies de l'hydrogène terrestre". Les températures les plus élevées que nous puis- sions produire semblent impuissantes à engendrer les décompositions intra-alomiques; et, cependant, les astres brillants nous en offrent de nombreux exemples. Qui sait maintenant ce que peuvent produire les formidables pressions de l'intérieur des astres? L'uranium se trouve dans des terrains éruptifs, dont certaines parties peuvent remonter de très grandes profondeurs. Nous savons qu'à l'intérieur de notre globe, la viscosité est énorme, alors que la pesanteur diminue à mesure que l’on s'approche du centre. Des corps très denses peuvent donc être entrainés par des courants généraux dus soit à la contraction de l'écorce, soit aux actions newto- niennes des astres, soit même à des cristallisations produisant des changements locaux du volume de la matière. L'or, le platine, liridium sont rares dans les couches superficielles de la Terre. Si des remontées n'élaient pas possibles, ils en seraient absents. Venu de très grandes profondeurs, l'uranium aurait été soumis à de formidables pressions, et à une trituration dont nous ne pouvons nous faire au- cune idée. Qui nous empêche, dès lors, d'admettre, à titre de simple hypothèse, que ces pressions ont pu être la cause même de sa formation? Les pres- sions réalisées dans les laboratoires n'ont pas, il est vrai, modifié l'atome; mais combien elles sont infimes, comparées à celles que nous offre linté- rieur des Le rapport températures atteintes est beaucoup moindre dans les étoiles brillantes et dans l’are électrique que celui des astres ! des pressions réalisées par la Nature et celles que nous pouvons produire. Et, pourtant, les astres offrent à 1 M. W. Ritz a réussi à rendre compte, par un mécanisme simple, de la transformation du spectre de l'hydrogène. 1012 G. CONTREMOULINS — LA RADIOGRAPTHIE APPLIQUÉE AU DIAGNOSTIC MÉDICAL notre observalion des phénomènes que l'expéri- inentalion sur terre n'eùl pu nous laisser soup- conner. Si la pression était la cause principale de la for- malion de l'uranium, la prodigieuse énergie de la radio-activité serait une simple restitution. Elle ne serait autre qu'une petite partie de l'énergie de condensation de notre Terre, que l'on croyait à jamais dissipée par rayonnement, alors qu'une radio-activité extrêmement faible des roches sufi- rait à compenser la chaleur que la Terre perd con- slamment dans les espaces célestes. Ainsi, la Nature aurait fait une sage épargne. Elle se serait imposé à elle-même un taux de dépense prolongeant presque à Finfini la vie ter- restre. Il y a près de deux siècles, Buffon, étudiant le refroidissement d'une boule de fer et d'une boule de verre, voulut conclure à l'évolution des tempé- ratures de notre globe. Examinée dans nos idées modernes, cette expérience était enfantine, mais au moins c'était déjà une expérience; elle ne faisait pas remonter très haut la vie sur la Terre, et pré- voyait sa fin dans un avenir rapproché. Les eal- culs de Poisson, les théories énergétiques de Jord Dans sa séance du 16 janvier 1906, l'Académie de Médecine avait émis l'avis que l'application médicale des rayons Rüntgen devait être réservée aux seuls docteurs en médecine, officiers de santé ou dentistes diplômés (en ce qui concerne la pra- tique odontologique), parce que seuls ils seraient capables de tirer des résultats l'interprétation qui intéresse le diagnostic et le traitement des mala- dies, parce que l'emploi des rayons Rüntgen peut déterminer des accidents graves, et que certaines pratiques peuvent créer un danger social. I. —— LA QUESTION PENDANTE DEVANT L' ACADÉMIE DE MÉDECINE ET L'ACADÉMIE DES SCIENCES. Le danger social invoqué par la Commission chargée d'étudier cette question à l'Académie de Médecine consisterait dans la possibilité de stéri- liser des êtres humains par des applications de rayons X. Dans la discussion du Rapport de cette Commis- sion, M. Pinard montra que ce danger ne pouvait Kelvin et de Helmholtz nous ont donné de plus vastes espoirs, et ont révélé l'une des causes de la conservation des températures dans les astres : la contraction de leur matière due aux forces newto- niennes et les combinaisons chimiques ordinaires. On en était là il y a dix ans, lorsque l'étonnant phénomène de la radio-activité vint brusquement donner à nos réflexions une impulsion nouvelle et susciter de plus lointaines espérances. C'est ainsi que la science, avec ses tätonnements, avec ses erreurs mêmes, s'approche constamment de la vérité, et nous apporte le réconfort avec le savoir. L'ascension est souvent rude, le chemin se perd, puis se retrouve. Mais lorsque, du sommet atteint par tant de labeurs accumulés, nous apercevons au loin le point de départ, nous ne pouvons nous défendre d'un peu d'orgueil pour cette humanité qui, montant de plus en plus haut, découvrant les larges horizons des forces naturelles qu'elle apprend à asservir, accomplit sur terre sa glorieuse des- linée *. Ch.-Ed. Guillaume, Directeur-adjoint du Bureau international des Poids et Mesures. LES CONDITIONS D’EXERCICE LA RADIOGRAPHIE APPLIQUÉE AU DIAGNOSTIC MÉDICAL résulter des examens radiographiques effectués sur la femme. Le 6 août 1906, M. le Professeur Bouchard pré- sentait une Note de M. le D' Roulier, dans laquelle ce dernier concluait que la stérilité était vraisem- blablement impossible à déterminer chezla femme. La Commission s'était fondée sur des expériences dont les sujets étaient le rat, la lapine, et en avait généreusement étendu les conclusions à l'huma- nité, sans se préoccuper des conditions qui avaient présidé à ces essais, sans tenir compte des diffé rences que l’'Anatomie comparée a permis de cons- tater entre ces divers êtres. De même, au sujet des accidents graves, la Com- mission confondit la radiothérapie, la radiographie et la radioscopie sous le terme général de radio- logie. Cette confusion conduisit l'Académie de Médecine à émettre un avis assez mal fondé. En effet, « ce n'est pas exercer la médecine que de radiographier un sujet; et la personne qui, en ce: 1 Discours prononcé à la Réunion de la Société helvétique: des sciences naturelles, tenue à Fribourg, le 31 juillet 1907. ht hdmi 4 ; G. CONTREMOULINS — LA RADIOGRAPHIE APPLIQUÉE AU DIAGNOSTIC MÉDICAL 1013 faisant, contribue au diagnostic de la maladie, n'est pas plus répréhensible que le pharmacien ou - Je chimiste qui exécute l'analyse des urines, que l'histologiste ou le bactériologiste qui pralique l'examen d'une pièce, d'un liquide pathologique, de crachats' ». Personne ne conteste que la radio- thérapie, mode de traitement par les rayons X, ne soit essentiellement du domaine médical. Mais les opinions sont des plus diverses en ce qui touche les applications des rayons X au diagnostie, et la question vient d'être posée par le Gouver- nement à l'Académie des Sciences en ce qui con- cerne la radiographie. Or, cette question offre un très grand intérêt social. Le médecin, pour l'établissement de son diagnostie, doit utiliser tous les renseignements que peuvent lui fournir des sciences très diverses ; il recourt aux indications d'analyses chimiques qu'il peut ètre dans Fimpossibilité d'effectuer lui- même : il fait état des résultats des examens radio- graphiques; doit-on en conclure que toutes les sciences qui sont la base de ces procédés sont, comme le diagnostie et la prescription du traile- ment, exelusivement du domaine médical, ainsi que beaucoup de médecins le prétendent en ce qui concerne la radiographie? La radiographie est dangereuse ! disent-ils. Entre des mains inexpérimentées seulement, leur répond-on*. Et n'est-il pas évident que tel est le plus souvent le cas chez le médecin? II. — L'ÉDUCATION MÉDICALE CONFÈRE-T-ELLE AU MÉDECIN QUELQUE COMPÉTENCE DANS LA PRATIQUE DES SCIENCES « ACCESSOIRES »? En considérant l'éducation médicale, il est facile de constater que l'établissement du diagnostic repose principalement sur les signes cliniques, c'est-à-dire sur l'observation directe des symp- tômes. Aussi les praticiens demandent-ils surtout le pérfectionnement de l'enseignement clinique. Les médecins radiologistes, ainsi que l'Académie de Médecine elle-méme, concoivent l'application des rayons X comme un adjuvant que l’on ne doit appliquer qu'à la suite de l'examen clinique *. En toute occasion, c'est à cet examen ressortis- sant de leur compétence que les médecins accor- dent une importance dominante. L'investigation radiographique comme les recherches histologiques ou bactériologiques ne sont guère pratiquées que par un tout petit nombre de spécialistes, et seule- 1 Semaine médicale, 11 janvier 1906. 2 M. Revxier : Bulletin de l'Académie de Médecine. Séance du 16 janvier 1906. 3 Rapport de M. Chauffard. (Académie de Médecine, séance du 9 janvier 1906.) ment à titre d'enquêtes complémentaires. Il en est de même pour les analyses chimiques; sauf pour quelques analyses qualitatives en vue de déceler, par exemple, l’albumine dans les urines, les méde- cins, dès que le recours à la Chimie devient néces- saire, se voient obligés de faire appel aux chimistes de métier, seuls pourvus du savoir et de l'outillage scientifique requis. Aussi les médecins considèrent-ils la Physique, la Chimie, voire la Physiologie comme des sciences accessoires; ils ne cherchent à en connaitre que les éléments dont ils auront besoin dans la pra- tique courante, ce qui leur est strictement néces- saire à l'intelligence du fonctionnement de notre organisme. Ils effleurent l'Optique élémentaire pour acquérir un apercu du mécanisme de la vision, et l'Acoustique pour saisir certaines condi- tions de l'audition. Ils demandent à ces sciences le minimum indispensable, se réservant pour l'étude du malade, qui est leur véritable domaine. Le résultat d'une semblable préparation, est que le médecin muni de son diplôme vise, lors- qu'il se spécialise, l'application immédiate de mé- thodes physiques, chimiques et biologiques, que le plus souvent il n'a pas approfondies. Il prend en main un outil qu'il n'a pas suffisamment appris à manier. Lorsque l'emploi de ces armes est du domaine thérapeutique, quel que soit l'usage, même désastreux, qu'il en puisse faire, la loi lui accorde un pouvoir illimité; sa responsabilité n’est en cause qu'en cas de faute lourde. III. — COMMENT LES MÉDECINS PRATIQUENT L'APPLI- CATION DES RAYONS X AU DIAGNOSTIC, En ce qui concerne les analyses susceptibles de contribuer à l'établissement du diagnostie, Va loi n'a établi aucune restriction : elle a laissé le champ libre à toutes les ignorances. De même, chacun à le droit de pratiquer la radiographie sans éduca- tion préalable, et l'on a malheureusement constaté que l'exercice de ce droit, par des médecins insufti- samment éduqués en l'espèce, peut être grandement préjudiciable aux malades. Nous pensons donc qu'il y a lieu d'établir un principe général, réservant à des spécialistes, dont la formation serait une garantie pour l'exercice de leur fonction, les appli- cations des sciences aux analyses, que ces spécia- listes soient médecins ou non. Les précisions, les compléments d'information, les démonstrations diverses que les sciences dites adjuvantes de la Médecine peuvent apporter au diagnostic doivent être le résultat d'examens pra- tiqués en toute liberté d'esprit, sans aucun égard aux suggestions de l'examen clinique, et en dehors: de toute idée préconcue. 1014 G. CONTREMOULINS — LA RADIOGRAPHIE APPLIQUÉE AU DIAGNOSTIC MÉDICAL Si ce recours aux sciences auxiliaires est prati- qué par un spécialiste improvisé et que ce soi- disant spécialiste se trouve être un médecin, il sera toujours enclin à mettre l'enquête scientifique sous la dépendance de la clinique. Nous en avons un exemple, remarquable dans les applications des rayons X : tous les médecins ont multiplié leurs efforts pour donner la plus large place à la radio- scopie (lecture directe sur l'écran fluorescent) parce qu'ils s'ingénient à rechercher une confirmation des signes cliniques, sans se préoccuper des con- ditions physiques et géométriques de l'examen, conditions sans lesquelles la méthode risque sou- vent de perdre, avec sa correction, toute légitimité. Is oublient la partie scientifique de cette recherche pour ne porter leur attention que sur l'étude cli- nique du malade. Habitués à l'observation directe, ils concoivent mal l'intérêt de la mesure indirecte. C'est, tout au contraire, le principe suivant qui devrait être adopté : Toutes les fois que l’on applique les sciences à la détermination d'éléments ou d'états organiques ou à analyse de phénomènes biologiques, on ne doit en exprimer les résullats en langage médical qu'après les avoir établis par les seules méthodes scienti- liques, sans égard à la traduction clinique, aux con- séquences que le diagnostic peut en tirer. Il est intéressant d'examiner avec quelque détail les formes spéciales sous lesquelles peut étre appli- qué au diagnostic médical le principe général de la Radiographie, de comparer la valeur des différents procédés, de nous rendre compte des connaissances physiques requises pour opérer correctement et aboutir à des résultats dont le médecin puisse faire état. Nous allons aborder ces questions; nous nous demanderons ensuite dans quelle mesure les cliniciens, étant donnée leur éducation actuelle, sont capables de manier, dans le domaine radio- graphique, les méthodes et les appareils eux- mêmes. À Le médecin qui fait de la radioscopie cherche uniquement à voir « au travers du corps »; son but n’est pas, comme celui de l'homme de science, de réaliser la mesure de certains éléments orga- niques, mais seulement de constater « de visu » des anomalies qu'il a trouvées préalablement par les signes cliniques : auscultation, percussion, ete. La radioscopie ainsi utilisée est évidemment médicale, mais elle n'offre malade aucune garantie supplémentaire, et il est à craindre que, au si les applications des rayons X étaient réservées aux seuls médecins, elles soient réduites à ce pro- cédé empirique. La supériorité des analyses scientifiques consiste particulièrement en ce qu'elles fournissent des documents impersonnels. L'opérateur cherche | toujours à employer les procédés enregistreurs dans lesquels l'équation personnelle de l’« indi- vidu », cause si importante d'erreurs, se trouve réduite au minimum. C’est pourquoi, dans les applications des rayons X à l'organisme, tous ceux qui font de la science préconisent l'usage de la radiographie, inscription photographique, done objective des faits dans des conditions physiques et géométriques chaque fois déterminées. IV. — SUBDIVISION DE LA RADIOGRAPHIE. A ses débuts, la radiographie servit surtout à déceler la présence des corps étrangers dans l'or- ganisme; elle s'occupa bientôt des anomalies des formes du squelette. Procédant sans méthode, ignorant, les lois qui régissent la radiographie, on commença donc par effectuer des recherches ayant pour but une détermination topographique : ce n'est qu'après les travaux de MM. Benoist et Hur- muzescu que l’on comprit tout le parti que l'on pouvait tirer de la nouvelle méthode d'analyse, qui permet actuellement non seulement de connaître la position et la forme des éléments étrangers au milieu traversé, mais aussi d'évaluer les change- ments de ce milieu au point de vue de sa constitu- tion, lorsque ces modifications sont liées à des variations de son opacité aux rayons X. La radiographie fut alors appliquée à l'orga- nisme comme méthode d'analyse quantitative. | Tandis qu'au début on cherchait seulement à véri- fier l'intégrité d’un os dans sa orme, on put tenter de connaître l’état de cet os, s'assurer s'il était ou non modifié dans sa nalure, en appréciant, par exemple, sa teneur en calcium par comparaison avec la radiographie d’une même partie d'un sujet sain. Les applications de la radiographie à l'organisme peuvent done se subdiviser de la facon suivante : 1° Radiographie topographique. — L'opération a pour but de déterminer, soit une solution de con- tinuité dans les os du squelette (fracture), soit une modification plus ou moins complète des rapports qu'affectent normalement les surfaces articulaires entre elles (luxations), soit la présence de corps étrangers dans l'organisme ; 2° Métroradiographie. — L'opération à pour objet la détermination exacte de la distance de deux points du squelette ou de la position d'un corps étranger, par rapport à des points de repères pris sur l’organisr2e. Dans le premier cas, elle peut, par extension, être utilisée à la mensuration de tout organe susceptible d'être défini par la radiographie soit naturellement, soit artificiellement (exemple : l'estomac tapissé de sous-nitrate de bismuth). 3 Radiographie quantitative. — L'opération G. CONTREMOULINS — LA RADIOGRAPHIE APPLIQUÉE AU DIAGNOSTIC MÉDICAL 1015 réalise une analyse des milieux traversés par l'étude des opacités qu'ils présentent aux rayons X en fonction de leur épaisseur et de la qualité des rayons employés. Pour effectuer cette recherche avec précision, il faut examiner les clichés à l’aide d’un photomètre. V. — RADIOGRAPHIE QUANTITATIVE. Si Rüntgen put observer le squelette de sa main au travers des parties molles, c’est, ainsi qu'on le reconnut plus tard, à cause de la différence de poids atomique entre les tissus traversés par ses rayons; c'est donc l'examen quantitatif qui doit figurer au commencement de cette étude, puis- qu'il définit le principe sur lequel repose la nou- velle méthode d'investigation. La radiographie quantitative est fondée sur les travaux de deux physiciens francais, MM. Benoist et Villard. M. Benoist, en établissant les lois de cette méthode d'analyse, lui donna son principe; M. Villard en rendit l'application pratique par la réalisation de son tube de Crookes à osmo-régula- teur, au cours de ses belles recherches sur les rayons cathodiques. Les lois formulées par M. Benoist montrent que l'opacité spécifique que présentent les corps simples aux rayons X est fonction de leur poids atomique et de la qualité des rayons employés, quel que soit l'état de liberté ou de combinaison des alomes, quel que soit le mode de groupement atomique ou moléculaire des corps. M. Benoist définit ainsi la précision de ce mode d'analyse : « L'équivalent de transparence d'un corps simple, pour lesrayons X, pris dans des conditions bien déterminées, constitue une constante, absolu- ment caractéristique de ce corps simple, sous quelque forme, sous quelque état qu'il se présente. En un mot, l'opacité spécifique pour les rayons X représente une nouvelle propriété additive de la matière, comme la masse, le poids atomique, la capacité calorifique atomique, avec l'avantage d'être indépendante de toutes les causes qui font varier cette dernière”. » Toutes les fois qu'un état pathologique est lié soit à l'apport d'éléments de poids atomique diffé- rent de celui des constituants de l'organe, soit à la disparition d'éléments auxquels cet organe doit particulièrement son opacité aux rayons X (à cause de leur poids atomique), la radiographie quantita- tive renseigne utilement dès que l'on peut cons- tater ces modifications au travers de l'organisme. Elle permet done aussi de suivre, dans les mêmes conditions, l’évolution d’une affection. Ses princi- 1 Journal de Physique théorique et appliquée, 1901. pales applications sont actuellement aux affections pulmonaires, à certaines affections osseuses el aux affections de l'appareil urinaire. Enfin, elle est encore d'une grande utilité pour examiner soit un organe, soit des produits de con- crétion (calculs), extraits de l'organisme; elle four- nit, dans ce cas, un moyen d'étudier ces pièces en respéctant leur intégrité. Mais — et ceci est évident — cette recherche ne donnera des indications valables que s'il n'y à d'autre inconnue que celle de l’état organique à déterminer. Il est nécessaire que tous les facteurs qui participent à la formation de l'image soient définis chaque fois que le requiert l'interprétation du résultat; il est nécessaire d'en éliminer absolu- ment toutes les interventions latérales, tous les éléments qui risqueraient d'entraîner des erreurs dans la discussion de la signification des résultats. C'est pourquoi, en ce qui nous concerne person nellement, nous nous sommes efforcé tout d’abord de créer un dispositif permettant d'effectuer les examens de telle sorte que les causes d'erreurs provenant de l’opérateur soient réduites au mini- mum et que les causes perturbatrices pouvant résulter du sujet soient éliminées le plus complète- ment possible. Dans la réduction des causes d'erreurs provenant de l'opérateur, il y avait lieu de considérer l’im- pression radiographique et les manipulations pho- tographiques. En ce qui concerne l'impression radiographique, il est nécessaire, ainsi que cela découle des lois de M. Benoist, d'effectuer l'examen en utilisant une qualité moyenne de rayons X Dien définie et sur- tout, pour l'application à l'organisme, de pouvoir réaliser les examens de cas semblables dans les mêmes conditions. Il ne suffirait pas, en effet, de se placer dans des conditions différentes, rendues comparables entre elles par leur liaison suivant une loi déterminée, car, appliquées à ces recherches, les courbes d'isotransparence correspondant à des qualités différentes de rayons X nous apprennent que tels états pathologiques, qui se traduisent fré- quemment par de très faibles différences d'opacité entre éléments organiques, peuvent être à peine décelés avec une qualité À de rayons, alors qu'une autre qualité B bien définie les met en évidence. Exemple : la tuberculose pulmonaire au début ne sera pas décelée si, pour radiographier le sujet, on utilise des rayons X d'un pouvoir de pénétration élevé. La complexité de la recherche tient, en parti- eulier, à ce qu’elle doit être faite au travers de tout l'organisme; elle ne permettrait pas, dans le cas de conditions opératoires seulement comparables, d'ex- primer une conclusion. 1016 C'est mû par celle pensée que, dès 1900, nous avions tenté d'élablir un appareil de mesure des ravons X l'état des connaissances à cette époque, un appareil métroradioscope)!, c'est-à-dire, dans avant pour but de contrôler le rendement d'un tube de Crookes, de telle sorte que nous puissions main- tenir celui-ci pendant l'examen dans des conditions délerminées* et faire un nouvel examen correspon- dant à un cas semblable dans les mêmes condi- tions. Bien que nous estimions beaucoup la valeur du radiochromomètre de M. Benoist, qui fut créé vers la même époque, nous avons continué à utiliser le métroradioscope parce qu'il permet d'apprécier à tout moment non seulement la qualité moyenne des rayons X (pénétration), mais aussi la quantité de rayons émis par décharge. Nous lui avons adjoint un impressions radiographiques, que nous avons appelé totalisateur des radiophotomètre. Cet appareil comporte un chässis dans lequel on place une plaque photographique de même émulsion que la plaque placée sous le sujet. Cette plaque-échantillon, en quelque sorte, est impressionnée, pendant toute la durée de l'examen, au travers d'une échelle d'argent con- stituée par des lames dont l'épaisseur croit en pro- gression arithmétique. Nous la développons en méme temps et dans le même bain que la plaque utilisée pour le malade, et nous arrêlons l'action du réducteur sur cette dernière dès qu'une case, choisie à l'avance, de l'échelle enregistrée par la plaque radiophotométrique apparait au développe- ment. De cette facon, nous éliminons, dans les limites qu'impose la pratique, les écarts provenant de la différence qui existe entre les plaques photo- la qualité de l'émulsion choisie et aussi du mode de réduction graphiques suivant la nature et appliqué. Nous employons, d'ailleurs, toujours la méme formule de bain pour le développement et nous l'utilisons à une température constante de 182. Il suffit d'avoir étudié des clichés à l’aide d'un photomètre pour comprendre que ces précautions pense résultats de ces analyses doivent contribuer à l'établissement d'un diagnostic auquel est intime- ment liée la santé humaine, on reconnait que ce sont nécessaires el, quand on que les sont là affections les plus graves se traduisent fréquem- ment au début, en radiographie, par des aspects différant très peu de ceux qui correspondent à celui des conditions indispensables; car les du sujet sain. Nous venons d'exposer comment la plaque radio- photométrique sert de guide pour les manipulations 1 Annales d'Electrobiologie et de Radiologie, n° 6, 1905. ? A l’aide de l'osmo-régulateur de M. Villard. G. CONTREMOULINS — LA RADIOGRAPHIE APPLIQUÉE AU DIAGNOSTIC MÉDICAL photographiques. Elle peut encore être utilisée pour contrôler l'opération radiographique. M. Soret# avait démontré par l'analyse que, si l'épaisseur dm milieu traversé croit en progression arithmétique, la quantité de rayons X transmis décroit en pro- gression géométrique. Nous avons essayé de vérifier éxpérimentalement cette loi en utilisant ros échelles radiophotométriques et nous sommes. arrivés à cette conclusion : La progression géomé- trique obtenue est telle que le premier terme parañt être fonction de la quantité de rayons émis par la décharge et que la raison parait être fonction de la pénétration (fonction inverse)*. Cette conclusion explique comment nous pouvons, quand cela est nécessaire, vérifier si deux plaques. radiophotométriques ont été impressionnées par des rayons X de même qualité moyenne, puisque le métroradioscope nous permet de maintenir l'état du tube constant pendant la durée de l'examen. C'est aussi ce principe que nous avons appliqué pour établir des courbes définissant le temps de pose en fonction de l'épaisseur du sujet et de la région à examiner; et les nombreuses radio- graphies que nous avons réalisées d'après ces données sont venues confirmer nos prévisions. Pour rendre plus pratique et plus précise l'exécu- tion de l'examen radiographique, nous avons ex- primé les temps de pose en nombres de décharges, et un tachydécompteur-disjoncteur*, commandé par l'interrupteur, remplace ainsi la montre que l'opé- rateur devrait surveiller, tandis que cet appareil. sur lequel on marque à l'avance le nombre de décharges, rompt automatiquement le cireuit au moment voulu. Pour éviter les effets perturbateurs qu'apporterait la formation de halos (direct et secondaire), nous placons de chaque côté de l'organisme à radio- graphier des écrans métalliques qui sont constitués de facon à servir en même temps de moyen de contention, pour éviter tout déplacement du sujet au cours de l'examen *. Un autre facteur nuisible consiste dans l'in- fluence de la chaleur humide à laquelle est soumise la plaque photographique lorsqu'elle n'est isolée du malade que par un enveloppement de papier. Pour éliminer cette action, nous placons la plaque dans un châssis en bois; nous oblenons ainsi un isole- ment suffisant entre le sujet et la plaque. Une fois que l'examen radiographique propre- ment dit est effectué, il faut interpréter les ré- 1 Sorer : Le tube de Crookes. Applications médicales et chirurgicales des rayons de Rôntgen, 1903. ? Congrès international pour l'étude de la Radiologie et de l'Ionisation, Liége, 1905. 3 Annales d'Electrobiologie et de Radiologie, n° 6, 1905. # Ibid., n° 2, 1905. G. CONTREMOULINS __ LA RADIOGRAPHIE APPLIQUÉE AU DIAGNOSTIC MÉDICAL 4017 sultats; et comme ceux-ci se manifestent par des | différences d'opacité, l'interprétation ne peut en être vraiment précise que si l'on procède tout d'abord à une étude photométrique du cliché, puis que l'on formule des conclusions en fonction de la courbe d'isotransparence des milieux tra- versés correspondant à la qualité des rayons em- ployés et des courbes d'épaisseur. | On ne peut interpréter le résultat radiographique qu'à la condition de tenir compte des facteurs physiques et géométriques qui en ont régi l'obten- tion; par conséquent, cette interprétation, comme l'exécution de l'examen, exige les connaissances que possède le phy- sicien; elle ne peut s'exprimer en lan- gage clinique que par comparaison avec une r'adiogra- phie correspondant à un sujet sain, ou encore en Compa- raut le dernier exa- men à d'autres pré- cédemment eflec- le sujet, si l'on suil tués sur éme l'évolution de son affection . Dans tous les cas, le résultat de la ra- diographie quanti- tativene saurailétre exprimé par COMpa- (E raison directe avec î l'organisme ; car les Œ rayons X définissent Fig. 1 Fig. unétat de celui-cien fonction non seulement du poids atomique de sesélé- | ments, mais encore de la qualité des rayons utilisés. C'est pourquoi nous avons toujours soutenu qu'il y à lieu de considérer une anatomie et une patho- logie radiographiques différant essentiellement de celles qui sont enseignées au médecin. Quant aux manipulations que doit effectuer l'opérateur, elles correspondent aux travaux que l'on exécute dans les laboratoires de Physique et avec lesquels le | médecin n'est pas familiarisé. Le physicien, au con- traire, par sa formation scientifique, par ses con- naissances théoriques et pratiques des méthodes de mesure, est capable d'apporter dans la ualyse radio- graphique la précision et la prudence désirables. I faut cette précision et cette prudence pour que cette 1 Application de la métroradiographie aux affections des voies urinaires. Annales d'Electrobiologie et de Radiologie, 31 mai 1906, 31 janvier 1907 | recherche puisse éclairer le médecin traitant et l'aider à formuler son diagnostic. VI. — RADIOGRAPHIE TOPOGRAPHIQUE. MÉTRORADIOGRAPHIE. Dans la radiographie quantitative, l'exactitude de l'analyse, ainsi que nous venons de le montrer, est intimement liée aux connaissances physiques el chimiques de l'opérateur, Dans les recherches topo- graphiques, c'est la Géométrie qui occupe la place Là encore la Physique et la Chimie la mais celle-ci, quelle prépondérante. sont nécessaires obtenir radiographie ; pour que soit la beauté de l'épreuve, n'au- rait aucune valeur si l'opérateur n'a- vail pas tenu compte des lois géométri- ques qui régissent les projestions COo- niques. De mème qu'en étudiant l'analyse quantitative, nous avons été amené à considérer idéale- ment une anatomie et spéciales, où la dé- une pathologie finition de nos or- ganes diffère de celle (l que connaissent les ù médecins et varie Œ avec la qualité des 2 Fig. 3 rayons employés ; deméme, danslexa- men topographique, nous retrouvons une défini- lion des formes organiques qui nest pas celle de l'Anatomie et de la Pathologie médicales et qui varie aussi avec les conditions géométriques sui- vant lesquelles s'effectue l'examen. Pour présenter avec plus de simplicité l'étude des règles qui servent de base à l'examen topogra- phique, nous allons supposer que l'objet à radio- graphier est un cube. 9 Considérons la figure 2, dans laquelle ABCD représente le cube, PR le plan récepteur (plaque photographique où écran fluorescent) et F le foyer d'émission des rayons X; l'observateur se trouve, par rapport à l'écran PR, du côté opposé au foyer F. La face du cube figurée en AB, qui est la plus éloi- enée de l'écran, lui apparaitra suivant ab, landis que de correspondra à la projection de DCquitisure la face du cube la plus voisine du plan PR. Ces deux projec- 1018 G. CONTREMOULINS — LA RADIOGRAPHIE APPLIQUÉE AU DIAGNOSTIC MÉDICAL lions sont plus grandes que les parties correspondan- tes de l’objet, et cd'est elle-même plus petite que ab. Par conséquent, si l'observateur fait un examen radioscopique, il devra se rappeler que les parties de l'organisme paraissent toujours plus grandes qu'elles ne sont réellement, sauf celles qui sont au contact de l'écran, et que cet agrandissement va ent croissant au fur et à mesure que les parties consi- dérées sont plus éloignées du plan récepteur; c’est la perspective radioscopique et radiographique. Si, au contraire, l'observateur regardait ce cube en perspective aérienne, se trouvant en OE (fig. 1), il le verrait au travers du tableau TT, et les diffé- rentes parties de cet objet donneraient des images plus petites qu'elles, sauf pour celles qui seraient diminution serait d'autant plus accentuée que les parties considérées au contact du tableau; cette seraient plus éloignées du tableau. En effet, ici c'est a'/ correspondant à AB qui est plus petite que d'e! correspondant à DC. La perspective radioscopique ou radiographique est donc une traduction inverse de celle que donne la perspective aérienne. Or, tous instinctivement nous éprouvons quotidiennement cette dernière : c'est elle qui nous fait apprécier la distance qui nous sépare d'un point quelconque de l'espace. Lorsque l'observateur n'a pas recu une éducation préalable, il est tenté de lire l'image radioscopique ou l'épreuve radiographique comme une reprodue- tion de perspective aérienne, une photographie ordinaire; c'est ce qui explique pourquoi les méde- cins ne savent pas reconnaitre le côté droit et le côté gauche du sujet lorsqu'ils sont en présence des épreuves radiographiques. La figure 3 est le résultat de la superposition des figures 1 et 2; on peut y constater que nous avons placé le point d'observation OE sur la même droite que le foyer F; cette droite correspond au rayon perpendiculaire au plan récepteur (rayon normal). Comme cette question est très importante, nous avons, dans la figure 4, effectué le rabattement de plan et figuré en noir ce que donnerait la perspec- tive aérienne, en grisé la projection orthogonale. La plus grande image, marquée en traits pleins, représente la projection radiographique du cube. On peut observer, à l’aide du tracé en pointillé, qu'il y à véritablement inversion entre la traduction perspective et la projection radiographique. Ainsi, la perspective radiographique permet d'apprécier sur une épreuve la position qu'occu- pait l'organisme par rapport au plan récepteur au moment de l'examen. Il existe un second moyen de déterminer, d'après une épreuve, dans quel sens un organisme à été radiographié; comme le pré- cédent, il est fonction de la distance qui sépare l'objet du foyer d'émission, mais il est la consé- quence de la dimension de ce dernier. Le foyer des tubes de Crookes est constitué par une petite sur- face (1 à 322); de l'organisme est traduite par une image « floue » il en résulte que chacune des parties (sauf pour les parties qui sont au contact de la G. CONTREMOULINS — LA RADIOGRAPHIE APPLIQUÉE AU DIAGNOSTIC MÉDICAL 1019 plaque), et, pour une même distance du foyer à la plaque, le flou est d'autant plus accentué que la partie considérée est plus éloignée de ce plan récep- leur. Grâce à ces deux procédés qui se contrôlent mutuellement, on peut toujours, lorsqu'on est en présence d'une épreuve radiographique de mem- bres, par exemple, déterminer si la partie repré- sentée appartient au côté droit ou au côté gauche du sujet; et, si l'épreuve représente le thorax ou le bassin d'un malade, savoir si celui-ci a été radio- graphie dans le décubitus dorsal ou ventral. Mais, comme l'image radiographique est une projection sur un plan, une seule épreuve ne donne qu'une définition incomplète du sujet; aussi, toutes les fois que la région le permet, doit-on effectuer deux radiographies suivant deux plans de projections; pour faciliter l'interprétation, on choisit, en gé- néral, deux plans formant entre eux un angle de 90°. Lorsqu'il s'agit d'effectuer un examen des merm- bres et de la tête, on les radiographie de face el de profil; les figures que donnent: ces deux projec- tions définissent complètement un état de l'orga- nisme : on évite ainsi toute équivoque au moment de l'interprétation; de plus, ce sont les positions que l’on peut le plus facilement faire prendre au malade avec exactitude. S'il est possible d'effectuer deux radiographies pour les membres el la têle, cela est, en général, impraticable pour le thorax et le bassin, à cause de l'épaisseur des sujets; et, cela fût-il possible, que, dans bien des cas (articulations de la hanche et de l'épaule), la superposition des plans orga- niques rendrait l'interprétation des plus difficiles. Dans ce cas, il faut se rappeler, comme nous l'avons expliqué, que les parties de l'organisme les plus proches de la plaque donnent les projections les plus nettes. Cette règle est un guide précieux pour déterminer la position à donner au sujet; elle permet, en outre, de connaitre, grâce à l'étude du « flou croissant », l'ordre de succession des plans organiques, les rapports des différentes parties du squelette quand il s'agit d'interpréter ce résultat. C'est une lecture des plus délicates que doit eflec- tuer le spécialiste. Mais, si la recherche porte sur la position qu'oceupe un corps étranger où sur la mensura- tion d’un organe, il faut avoir recours à la métro- radiographie, qui permet, par l'exécution de deux radiographies (obtenues d'une manière analogue aux radiographies stéréoscopiques), de réaliser ma- tériellement l'épure dans l'espace. Les rayons issus des deux positions qu'avait occupées le foyer du tube au moment de l'examen sont réalisés par des fils, grâce à un dispositif que nous ne saurions décrire ici, et la position qu'occupait, pendant l'examen, soil un corps étranger, soit un point déterminé de l'organisme, est définie, par rapport à la plaque, par l'intersection des fils qui matéria- lisent les deux rayons projetants " S'il s'agit de la mensuration d'un organe, du squelette, on peut done, par cette méthode, trouver la distance vraie qui sépare deux points déter- minés de l'organisme et ainsi, de proche en proche, mesurer tous les diamètres utiles. Si le but de l'examen est de connaître l'emplace- ment d'un corps étranger, il sera possible, par ce procédé, de définir sa position par rapport à des points choisis sur l'organisme, Dans ce cas, afin de faciliter la recherche au chirurgien, nous avons créé un guide opératoire, constitué par un compas à trois branches, auquel on peut adjoindre une aiguille; l'extrémité de chaque branche correspond à un point de repère pris sur l'organisme. Le compas est relié d'une manière invariable au dis- positif général qui sert à effectuer les radiographies: il oceupe ainsi, pendant tout l'examen, une position constante par rapport au plan de réception. Lorsque la position du corps étranger est déler- minée dans l’espace, comme nous l'avons expliqué précédemment, l'aiguille que l’on ajoute au compas vient définir la situation du corps étranger par rapport aux trois branches de cet appareil et, par conséquent, par rapport aux repères choisis sur le sujet. On peut alors séparer le compas du dispo- sitif général, et, au moment de l'intervention ehi- rurgicale, il suffit de replacer les extrémités dés branches de ce guide opératoire au contact des repères marqués sur la peau du malade (position qu'il occupait au moment de l'examen radiogra- phique) pour que l'aiguille indicatrice fournisse au chirurgien la profondeur à laquelle se trouve le corps étranger dans la direction choisie? Cette méthode, qui a pour but de reconstituer réellement l'épure dans l’espace, utilise, ainsi que nous l'avons dit, deux projections obliques. De telles images ne sont toujours utilisables que dans ces recherches spéciales, parce que la position du foyer par rapport à la plaque est repérée et que la construction géométrique qui conduit au résultat peut être effectuée sans erreur. Mais il ne faut pas généraliser l'emploi des projections obliques; on ne doit les utiliser, en dehors de la métroradio- graphie, que comme des enquêtes complémen- laires. Pour que les résultats radiographiques soient comparables, iei comme dans l'analyse quantita- 1 Revue scientifique, 30 juillet, 17 septembre, 22 octobre 190%. 2 Revue scientifique, 30 juillet, 19 septembre, 22 octobre 190%. 1020 iive, il faut qu'ils aient été oblenus dans les mêmes conditions rigoureusement définies; les figures 5 à 7 montrent les aspects sous lesquels la radiographie peut traduire un même objet, un cube, suivant que le foyer du tube F est plus ou moins éloigné de la plaque photographique PR. Ce sont aspects que peut prendre la projection radiogra- les divers phique d'un même objet oblenue dans des condi- lions opératoires différentes qui ont fait dire à des médecins que la radiographie les « trompait » ! Un bassin normal, radiographié dans les condi- ions de la figure 7, donnera l'illusion d'un bassin oblique ovalaire, qui éveillerait à juste raison les craintes d'un ac- coucheur; il pré- sentera, de plus, une atrophie de l’un des fémurs ; radiographié conformément à la le méme bassin, figure 6, qui paraitrail normal avec la technique ex- primée par la fi- gure », semblera présenter une fracture du col du fémur. Si nous con- sidérons des ra- diographies de membres, nous pourrons, Ssui- vant la technique employée,croire, Fig. 5. en examinant les divers résultats que donnerait une méme fracture des deux os de la jambe, tantôt que les fragments supérieur el inférieur sont exactement dans le prolongement l'un de l’autre, tantôt que la partie inférieure du péroné est dans le prolongement de la partie supérieure du tibia, tantôt que les fragments chevauchent où qu'ils sont écartés, ainsi que nous l'avons démontré en 1900 à l’aide d’une fracture expérimentale (Académie de Médecine, 13 février). De plus, si nous considérons deux radiographies d'un membre exécutées sur deux plans de projec- ion comme nous l'avons expliqué, et dans les con- ditions de technique rationnelle représentées par la figure 5, il arrive fréquemment que des luxations, des fractures graves peuvent passer inapercues ou étre considérées comme parfaitement réduites sur l'une des deux épreuves, tandis que l’autre met la lésion complètement en évidence. G. CONTREMOULINS — LA RADIOGRAPHIE APPLIQUÉE AU DIAGNOSTIC MÉDICAL ——— a On comprend dès lors l’us2ge que certains opé- raleurs peu consciencieux peuvent tirer de ces cir= constances, lorsqu'ils sont appelés à fournir des épreuves aux tribunaux. Non seulement il est indispensable d'effectuer les deux radiographies, mais elles doivent étre interprétées en quelque sorte simultanément, puis- qu'une seule ne donne pas une définition com- plète de la partie examinée; pour cela, il faut avoir fait de la géométrie, de la descriptive: car il est nécessaire de savoir reconstituer l'épure de l'organisme, sous peine de commettre les fautes les plus graves dans l'interprétation. Mais des erreurs aucune que nous avons si- gnalées ne peut se produire si l'on emploie une techniqueration- mé- thode opératoire générale dont tous les éléments sont rigoureuse- ment définis. Alors, non seu- lement ces résul- fantaisistes nelle, une tats ne pourront plus obtenus, de plus, tous lesexamens mêmes seront compara- bles; il sera par conséquent pos- ètre mais, des cas Fig. 7. sible, en partieu- lier, de contrôler l'exactitude d'une épreuve, puis- que ses conditions d'obtention seront définies. Aussi, nous avons toujours préconisé l'observa- ion des règles suivantes en Radiographie : 1° Adoption d'une distance fixe du foyer d'émis- sion à la plaque pour tous les examens (75 em.) ; 2° Inscription radiographique de l'incidence normale à la plaque pendant l'examen; 3° Définition du plan suivant lequel l'organisme à été radiographié. — Examen des membres suivant deux plans de projections, formant entre eux un angle de 90°, eten général radiographie des membres dans leur totalité. La seule objection qui a été faite à ces proposi- tions, c'est que ces principes limiteraient la liberté opératoire du radiographe! ‘ Incidence normale, intersection du rayon normal et du plan récepteur. G. CONTREMOULINS — LA RADIOGRAPHIE APPLIQUÉE AUXDIAGNOSTIC MÉDICAL 1021 “— Ce n'est pas porter atteinte à la liberté de l’opé- ateur que de réclamer qu'il effectue tout d'abord examen du malade suivant une technique générale “ét définie; c'est seulement un moyen d'éviter les ‘interprétations fantaisistes, sans fondement, qui, même lorsque le radiographe est sincère, peuvent oujours être préjudiciables au malade. Ces propo- “itions, d'ailleurs, ne s'opposent nullement à lem- “ploi de techniques spéciales, à la condition que celles-ci soient complémentaires et non uniques. NII. — LES ERREURS DUES A L'IGNORANCE. Si les causes d'erreurs provenant du manque de définition des conditions opératoires peuvent dis- paraître par l'adoption d'une technique rationnelle bien établie, il reste celles qui peuvent résulter de - l'incompétence de l'opérateur; elles constituent un véritable danger social, dont les brülures (toujours évitables) ne sont qu'un cas particulier, moins fré- quent que les fautes commises dans l'interprétation des résultats. Nous avons exposé la difficulté qu'il y avait à obtenir et à interpréter les radiographies quanti- {atives: nous avons montré que, pour les applica- tions topographiques, il fallait être compétent non seulement en Physique, mais aussi en Géométrie; nous devons ajouter que l'inaptitude de la plupart des médecins aux sciences exactes, en particulier à la Géométrie (inaptitude à laquelle le baccalauréal ès sciences restreint a rendu un éclatant hommage), peut leur faire commettre des fautes graves dàäns l'interprétation des épreuves et les conduire parfois à des entreprises opératoires de conséquence funeste et irréparable. C’est pourquoi nous pensons qu'il importe, pour la sécurité de tous, malades et méde- cins ou chirurgiens traitants, de réserver cette bran- che de la Physique biologique à des physiciens — médecins où non — dûment spécialisés en vue de cette nouvelle fonction. Cela importe d'autant plus que les médecins ra- diologistes et la Commission de l'Académie de Mé- decine elle-même sont opposés à l'adoption d'une méthode générale, déclarant que le médecin doit être seul juge; après avoir reconnu que des épreuves « truquées » ont été fournies aux tribu- naux, ils ne craignent pas de proclamer la supé- riorité des techniques exceptionnelles, variant avec chaque opérateur, qui donnent, par conséquent, des documents dont on ne peut contrôler l'exactitude! VIII. — CONCLUSIONS. L'obtention de l'image radiographique nécessite des connaissances approfondies en Géométrie, en Physique et en Chimie. L'interprétation de l'image ne peut s'effectuer REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1901. qu'en appliquant préalablement au résultat obtenu les sciences précitées, car l'image radiographique traduit les formes anatomiques et les états patho- logiques de l'organisme en fonction des conditions géométriques de l'examen el de la qualité des rayons utilisés. Le maniement des appareils, particulièrement en ce qui touche les analyses quantitatives et les re- cherches métroradiographiques, ne peut étre confié sans danger qu'à des opérateurs expérimentés. Les physiciens, par leurs connaissances théori- ques et leur habitude d'employer les appareils de mesure, sont les mieux désignés pour celte spécia- lisation. La spécialisation est nécessaire parce que la radiographie est complexe, parce que les erreurs qui peuvent résulter de l'incompétence des opéra leurs, entraineraient les plus graves conséquences pour la santé et même la vie humaines. Le rôle social de la radiographie a été particuliè- rement établi au sujet des accidents du travail, par le fait que cette analyse met en évidence, dans de nombreux cas, l'état du blessé non seulement au point de vue de l'accident dont il à été victime, mais aussi du traitement qu'il a subi. Or, le rôle d'expert, qui peut ètre dévolu au spécialiste radio- graphe, impose à celui-ci la plus grande impartia- lité: il est indispensable de le choisir en raison de sa compétence en l'espèce, et cette considération vient s'ajouter aux raisons précédentes pour dési- gner le physicien. Le rôle du médecin est d'utiliser les analyses des spécialistes pour établir son diagnostic; sa fonction doit être limitée, dans l'intérêt publie, conformé- ment à ses connaissances; son véritable domaine est défini par la mise en œuvre des moyens clini- ques. Le D° Labbé à écril excellemment : « La Mé- decine ne s'apprend que par l'exercice régulier el contrôlé des sens; le médecin regarde, écoule, touche, palpe, etc.; el les sensations qu'il recueille au cours de l'examen des malades et qu'il emma gasine dans son souvenir constituent la meilleure partie de sa science * ». Si, en répondant à la question posée par le Gou- vernement, l'Académie des Sciences réservait l'ap- plication des rayons X aux seuls médecins, elle créerait un précédent qui, dans l'avenir, autoriserail le corps médical à réclamer l'usage exclusif des diverses formes de l'énergie et toutes les applica- tions de la Chimie à l'organisme comme méthodes d'analyse biologique. G. Contremoulins, Chef du Laboratoire principal de Radiographie des Hôpitaux de Paris. 1 M. Laggé, Chef de Laboratoire de la Faculté de Médecine de Paris: Revue générale des Sciences, 30 avril 1902. 2% ** BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Petit-Boïis (A.), Zngénieur des Mines à Liége. — Tafeln unbestimmter Integrale (Tauces D'ivré- GRALES INDÉTERMINÉES). — À vol. in-k de 15% pages. (Prix : 10 fr.) B.G. Teubner, éditeur. Leipzig, 1907. Les traités de Calcul infinitésimal renferment un grand nombre de résolutions d'intégrales indéter- minées ; mais, si l'on veut les y chercher, on perd géné- ralement beaucoup de temps. L'auteur a donc pensé qu'il serait utile de grouper ces formules en tables méthodiquement ordonnées: c’est cette collection qu'on trouvera dans l'ouvrage que nous présentons à nos lecteurs, C’est donc un livre essentiellement d'ordre pratique, qui facilitera le travail de tous ceux qui ont à appliquer le calcul intégral. Ajoutons que, bien que le titre soit en allemand, comme l'ouvrage n'est qu'une collection de formules, il peut être utilisé par n'im- porte qui et quelle que soit la langue qu'il parle. Weber (H.) et Wellstein (Rudolf J.). — Encyclo- pädie der Elementar-Mathematik. Tome 111. An- gewandte Elementar-Mathematik. — 4 vol. de xim- 666 pages, avec 358 figures. (Prix: 48 fr. 75.) B. G. Teubner, éditeur. Leipzig, 1907. Cette œuvre considérable a été conçue pour servir en première ligne à ceux qui enseignent les Mathéma- tiques, surtout dans les Établissements d'instruction secondaire. Elle se recommande autant par la richesse et le choix des matériaux mis en œuvre que par l'in- térèt de ses conceptions pédagogiques et philoso- phiques. Les auteurs ne cherchent pas à présenter et grouper les faits mathématiques d’une façon propre à faire ressortir des théories particulières, mais ils examinent loyalement les méthodes propres aux sciences exactes, serrant de près les origines de nos concepts, suivant et éclairant l'évolution de ceux-ci et établissant la valeur critique de nos connaissances. Le troisième volume, qui vient de terminer cette belle publication que le succès a déjà consacrée, con- tient les « Mathématiques appliquées ». Les auteurs y passent en revue la plupart des domaines de l'activité humaine qui emploient les Mathématiques; leur but est d'y instaurer, en un corps indépendant, toute la partie « Calculs et Constructions », logiquement, à l’aide des principes et des lois fondamentales données par la science. La Physique, par exemple, fournit le livre intitulé Electricité et Magnétisme, où la méthode vectorielle appliquée aux « Lignes de Force» permet de suivre pas à pas et facilement le développement des théories accessibles aux Mathématiques élémentaires. Les « Phénomènes de Capillarité » sont étudiés de méme, en application de la théorie des Maxima et Minima géométriques. Il va de soi que la majeure partie du volume est consacrée à Ja Mécanique, grâce à laquelle sont résumés ensuite quelques chapitres de Thermodyna- mique. Le livre important de la Graphique comporte toute la technique des projections centrale et parallèle et les éléments de la Géométrie descriptive. La Slatique graphique y est rapidement traitée et se termine par d'intéressantes applications : la Théorie de la Char- pente, le Problème de la tension, etc. Quelques pages sur le Calcul des Probabilités conduisent naturellement à l'examen raisonné des Fautes d'observation. On le voit, l'ouvrage vise à être complet. Pourquoi alors avoir négligé entièrement le domaine des Mathé- Imatiques qu'on pourrait appeler « financières et com- merciales », justifiables pourtant de l'Algèbre éléme taire et intéressantes à plus d’un titre? Un point encore. Les auteurs témoignent d'un ré souci de faire œuvre de praticiens et de réagir conf l'enseignement secondaire trop théorique et abstraf Rien n'est plus louable, en effet, que de mettre ] élèves à même d'appliquer dans les sciences d’exp rience et d'observation les connaissances acquises € Mathématiques pures, de les habituer aux calcul numériques, aux changements d'unités, de les pr parer, en un mot, non à la vaine jonglerie des belle formules, mais au- milieu pratique dans lequel beau coup d’entre eux seront forcément appelés à se déve lopper. E. Désouis, Professeur à l'Ecole professionnelle de Genève Cordemoy (C. de), Zngénieur des Arts et Manufae tures. — Ports Maritimes, {. | (Bibliothèque du Conducteur des Travaux Publics). Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1907. Le tome premier de l'ouvrage que M. de Cordemoy publie dans la Bibliothèque du Conducteur de Tra- vaux Publics, ouvrage qui comportera deux volumes, est un livre bien compris, clair et intéressant. Les sujets traités sont beaucoup plus nombreux et plus variés que le titre ne pourrait le faire supposer. Pour donner une idée de ce que le lecteur y trouvera con- densé, il est indispensable d'en résumer sommaire-" ment les principales matières ; ce sont les suivantes: : Profondeur, température et composition de la mer.“ Vents et cyclones, mesure de la vitesse et de la pres-« sion du vent, son influence sur le niveau de l’eau. Ondes liquides et vagues, théorie de la formation des vagues, puissance et profondeur de leur action. Effets des hauts fonds. Ressac. | Théorie des marées, établissement du port et uni- tés de hauteurs, marégraphes, courbes de marée. | Marées fluviales, mascaret. Courants. Erosion des côtes ; falaises et dunes, plages « de galets et de sable, côtes madréporiques. Barres et deltas. : Dragages, diverses espèces de dragues, dérochement, transport et mesurage des déblais. Protection des côtes, revêtements et épis. Etude d'un établissement maritime, ouvrages exté- rieurs des ports, jetées et digues, ports de refuge, ports de commerce, ports artificiels, avant-ports et rades. Ports à chasses naturelles, ports à môles convergents. Ports sur plage de sable, ports à jetée. Fleuves et estuaires, fleuves à marée et sans marée. Matériaux employésàlamer. Bois, métaux et mortiers. - Construction et éclairage des phares et des bouées. L'ouvrage se termine par un appendice d'une cen- taine de pages consacré à des notions de Cosmographie, de Navigation, d'Hydrographie, à la déscription des navires, et à quelques apercus sur leur stabilité, leur chargement et leur exploitation commerciale. C’est, en un mot, toute une petite encyclopédie mari- time que l’auteur a su rendre instructive et attrayante. Des figures nombreuses et bien faites, un grand nombre - de formules pratiques, des tableaux de chiffres bien choisis et souvent suggestifs ajoutent encore à l'inté- rêt du texte. Mème à propos de sujets qui ne peuvent ètre qu'elfleurés, comme ceux qui sont traités dans l'appendice, on trouve des renseignements précieux. Bref, le volume dont vient de s'enrichir la Biblio- thèque du Conducteur de Travaux Publics fait le plus grand honneur à son auteur, déjà bien connu par ses nombreuses études sur les ports maritimes. E 2 * BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 2° Sciences physiques \Vullner (A.), Professeur de Physique à l'Ecole technique supérieure d'Aix-la-Chapelle. — Lehrbuch der Experimental-Physik. T. 1 : Allsemeine Physik und Akustik. 6° édition, mise à Jour par MM. A. Wuzzuer el À. HaGensacu. — 14 vol. in-8° de 1058 pages avec 333 fiqures. {Prix : 20 fr.) B. Gi. Teubner, éditeur. Leipzig, 1907. L'éloge du Traité de Physique expérimentale de Wullner n’est plus à faire ; il jouit en Allemagne d'une réputation analogue à celle de l'ouvrage de Jamin et Bouty en France. Le premier volume de la 6° édition qui parait aujourd'hui à été soigneusement mis au courant des nouvelles recherches, jusqu'à la fin de 1906, par l’auteur, aidé de M. A. Hagenbach ; le côté du développement historique de la Physique a été également précisé. Stewart (A. W.), Lecturer on Stereochemistry 1n University Coilege, London. — Stereochemistry (Stéréochimie). — 1 vol. iu-8° de 583 p. (de la col- leetion des « Manuels de Chimie physique» éditée par Sir William Ramsay). (Prix : 143 {r. 25.) Loug- mans, Green et Cie, Londres, 1907. Cet excellent Manuel donne un exposé très clair de l’état actuel de la Stéréochimie et des directions variées dans lesquelles elle s’est développée en ces der- nières années; la mise au point est certainement excellente. L'ouvrage est divisé en deux seclions prin- cipales. La première concerne l'isomérie stéréochimi- que, subdivisée elle-même en deux parties : isomérie optique et isomérie géométrique; la seconde section traite des sujets qui, sans dépendre de l’isomérie, sont en relation avec la configuration stéréochimique : phénomènes d'opposition stérique, stabilité et possibi- lité de formation des corps cycliques, formule du benzène, etc. ; On voit, par ces quelques indications, que le Manuel de M. Stewart est tout à fait moderne. C'est certaine- ment, à l'heure actuelle, et sous une forme concise el claire, le meilleur traité à consulter pour se rendre compte de l'orientation générale de la Stéréochimie. PH.-A. GUYE, Professeur de Chimie à l'Université de Genève. Lezé (R.), Professeur à l'Ecole nationale de Grignon. — Utilisation des débris animaux. — 4 vol. 1n-12. Amat, éditeur. Paris, 1907. Quand on lit l'ouvrage de M. Lezé, on est frappé de la multiplicité des industries qui demandent leurs matières premières à l’abatage des animaux et à leurs déchets, et l’on se demande ce que deviendrait la vie si Pon parvenait un jour à rendre le corps des animaux entièrement alimentaire; nous n'aurions plus de cuirs pour nos chaussures, de laines pour nos vêtements, plus de savons ni de bougies pour nos besoins Jour- naliers. Ces industries sont donc les complémentaires de celles qui président à notre alimentation, et l'intérêt qui s'attache à elles vaut la peine qu'on les groupe dans une étude d'énsemble. Elles sont d’ailleurs peu enseignées, parce qu'elles s'adressent à un nombre restreint d'élèves, et parce que, comme pour beaucoup d'autres industries, il y a un préjugé qui fait admettre que « cela ne s’apprend pas ». N'en était-il pas de même autrefois de l'Agriculture? et l’on sait les richesses que l'enseignement agricole a déversées sur notre sol. Pour analyser le livre de M. Lezé, il n'y a qu'à repasser en revue les différents déchets de labatage des animaux, et rechercher leurs destinations. Le sang est utilisé pour l'alimentation du bétail, pour la fabri- cation de l'albumine et des engrais; — les peaux vont 1023 à la tannerie, à la mégisserie, à la chamoiserie, à la corroierie, et leurs déchets sont transformés en colle; — Ja laine est désuintée et lavée avant d'entrer à la filature. Les os sont prélevés aux abattoirs, aux bou- cheries et dans les cuisines par les tablettiers, les fabri- cants de noir animal, de gélatine, de poudres d'os el de superphosphates, — les graisses sont transformées en margarine, en bougies et en savons, — les cornes, les sabots, les ergots sont réclamés par l’aplatisseur et le tablettier; les intestins, les estomacs, les caillettes, par le boyaudier, le tripier, le fabricant de présure, etc. Enfin, il faut prévoir le cas où le cadavre de l'animal n'est pas comestible ou est contagieux; l'industrie de l'équarissage se charge de le transformer entièrement. Ces industries prennent en réalité des matières pre- mières très différentes d'aspect, de constitution et de composition chimique, pour les amener à l’état de pro- duits manufacturés n'ayant entre eux aucun rapport et destinés à des usages essentiellement variés; elles ne peuvent avoir de point commun que leur origine, et les procédés de transformation ne peuvent être les mêmes. Poursuivies dans des usines ou des ateliers spéciaux pour chacune d'elles, elles sont difficiles à connaître dans les détails. M. Lezé, à la fin de son livre, s'excuse, pour ainsi dire, et bien à tort, d'avoir peu puisé dans les ouvrages : « Nous avons préféré, dit-il, parler de ce que nous avons vu dans les usines de France et de l'Etranger, et la plupart des fabrica- tions sont décrites d’après des notes et des observa- lions recueillies sur place. » C'est le meilleur éloge que l'on puisse faire de ce livre, et j'ajouterai que, pour toute personne un peu compétente, M. Lezé pouvait se dispenser de le dire; cela se voit à chaque page. L. Linper, Docteur ès sciences, Professeur à l'Institut national Agronomique 3° Sciences naturelles Launay (L. De), Professeur à l'Ecole supérieure des Mines. — L'Or dans le monde. — 1 vol. in-18 de 265 pages. (Prix : 3 fr. 50.) Armand Colin, éditeur. Paris, 1907. La question de l'or ne touche pas seulement ceux qui s'occupent de son extraction ou qui participent à son industrie minière et métallique. Elle intéresse également quiconque désire se rendre compte des mouvements économiques et financiers, dont, avec la richesse mobilière, le contre-coup se manifeste aujourd'hui pour tous, des plus riches aux plus humbles. Le. développement considérable de l'extraction auri- fère est certainement un des traits caractéristiques de l'industrie minière à notre époque. Une industrie qui, en 188%, ne produisait pas 500 millions d'or par an et qui, maintenant, en extrait annuellement plus de deux milliards, se place, comme chiffre de rendement, avant toutes les industries métallifères, le fer excepté. P'ar- gent, qui ne dépasse guère 500 millions, joue, à côté de l'or, un rôle très restreint. Ce mouvement si singulier est examiné, dans ses causes et dans ses conséquences, par M. de Launay avec la compétence, le sens pénétrant et l'esprit philo- sophique que les lecteurs de la evue connaissent d'autant mieux qu'ils ont eu la primeur de ses travaux les plus originaux. Cette évolution si extraordinaire de l'industrie de l'or a entrainé des progrès rapides dans la connais- sance des gisements aurifères ainsi que dans les méthodes d'extraction industrielle, progrès qui rendent déjà les descriptions datant seulement de dix ans tout à fait démodées. M. de Launay — tout en restant dans les généralités — à su mettre. au point ces diverses questions. La première partie de l'ouvrage est consacrée à une courte étude géologique des gisements et aux conelu- sions nouvelles qui se dégagent des récents travaux de 1024 l'auteur sur la métallogénie. On se rappelle sa remar- quable étude, publiée ici même (année 1904, p. 386), où il montre que la superposition moyenne des élé- ments de notre planète, avant sa solidification, a dû se faire par ordre décroissant des poids atomiques, les atomes étant écartés du centre en raison inverse de leur poids atomique. A ce propos, l'auteur considère d’une part les gise- ments primitifs de l'or dans les roches et, de l’autre, les remaniements sédimentaires et alluvionnaires. Il fait observer que ces phases géologiques se sont suc- cédé dans l’ordre inverse de celui que présente l'his- toire des travaux miniers : En effet, « on a commencé par découvrir, d'ordinaire, les alluvions les plus ré- centes, où le travail naturel de préparation mécanique avait été poussé le plus loin et succédait à un enri- chissement par altération, lui-même particulièrement avancé. C'est dans ces alluvions que l'on à trouvé, au début, ces pépites d'or natif et cette poudre d’or, qui symbolisent, pour la plupart des gens, l’idée d'une mine d'or. Après quoi, ces alluvions épuisées, on à cherché les gîtes primitifs dans les filons ou les roches, mais encore pour attaquer au début Ja partie superti- cielle, l'affleurement, que les altérations oxydantes, produites par la circulation des eaux, ont habituelle- ment rendu plus riche en or libre ou aisément amal- gamable. Là encore, on a eu des conditions faciles qui disparaissent quand on pénètre un peu sérieusement dans la profondeur, comme on y est bien vite amené, dans chaque centre minier, par le progrès des travaux, et comme, pour l’ensemble de la Terre, l'exploration de plus en plus avancée du sol y conduit aussi. » Dans la seconde partie du livre, l’auteur examine la répartition géographique qui résulte de la formation géologique, et 1l le fait pour le passé comme pour le présent, en cherchant même, autant que possible, à prévoir le futur. M. de Launay tente de déterminer la proportion d'or qu'ont pu contenir, avant toute exploi- tation, les divers continents et les divers pays, et ce qu'il en reste vraisemblablement. L'extraction minière est traitée, dans la troisième partie, surtout au point de vue des perfectionnements récents, plutôt pour faire connaître les conséquences économiques à en attendre que pour en donner une description technique complète. Enfin, l'étude économique qui forme l'objet-essentiel de l'ouvrage vient tout naturellement après les trois premières parties qui en ont préparé les éléments. L'emploi monétaire, qui est conçu dans un esprit diffé- rent suivant les pays, est examiné et critiqué. L'auteur met en balance, avec les besoins de l'humanité, la quantité d'or qu'elle possède et celle que l'extraction minière peut lui fournir dans un délai restreint : ce qui l'amène à aborder la question des fluctuations : dans le pouvoir d'achat de l'or. Enfin, M. de Launay examine les causes et les conséquences de l'essor actuel, les probabilités de son prolongement futur et les résultats financiers, économiques ou sociaux que ce flot d'or, épanché par les mines à raison de deux milliards par an pendant quinze ou vingt ans, peut entrainer. Quand on a terminé la lecture de cet ouvrage capti- vant, on reste, malgré soi, étonné, presque stupéfait, du grand nombre de conclusions et de prévisions du plus haut intérêt auxquelles on à été conduit. C'est le même sentiment que celui qu'on éprouve après la iecture d'un traité de Géologie qui, avec des données relativement peu nombreuses, vous découvre l’histoire de la Terre. On se rappelle alors que M. de Launay est, avant tout, géologue, et cela vous donne confiance, d'autant que les chiffres et statistiques extrêmement nombreux, qui servent de bases à ses déductions, sont puisés à bonne source. AUGUSTE HoLLARD, Docteur ès sciences, Chef du Laboratoire central des Usines de la Compagnie française des Métaux. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Allemand (A.), Professeur au Collège Sadiki, Sous= Directeur du Laboratoire de Biologie marine de S{ax. — Etude de physiologie appliquée à la Spon- giculture sur les côtes de Tunisie. | 1hèse pré- sentée à la Faculté des Sciences de Lyon.) — 4 vol de 188 pages avec 19 planches. J. Picard, éditeur: Tunis, 1907. On sait que, sur les instances de M. le Professeur Raphaël Dubois. de Lyon, le Gouvernement tunisien a créé, il y a quelques années, à Sfax, un Laboratoire maritime pour l'étude de la physiologie des Eponges, appliquée à la spongiculture et à la réglementation de la pêche de ces précieux produits de la mer. Ce sont les résultats des premières recherches faites dans ce Laboratoire que M. Allemand a consignés dans le tra= vail dont nous présentons ici une courte analyse. $ Ce Laborätoire, construit à 1.500 mètres au large du port de Sfax, n’a rien d'architectural. C'est une simple maisonnette en bois, construite sur pilotis et mesu- rant 9 mètres de longueur sur 5 mètres de largeur. A cette modeste construction a été annexé un cantonne- ment de 450 mètres sur 350, pour les observations et les expériences. Placé dans ces conditions et aidé par le gardien arabe du Laboratoire, qui est un des meilleurs plon- geurs de la contrée, M. Allemand à pu poursuivre ses recherches avec courage et succès. Les résultats qu’il a obtenus sont intéressants au double point de vue scien- tifique et pratique, car les faits nouveaux qu'il a su mettre en évidence viennent heureusement compléter nos connaissances sur le développement et la culture des Eponges. C’est là un travail qui mérite d'être encou- ragé et achevé. Dans un premier chapitre, un peu long, Historique des études faites sur le pouvoir vital et la culture des Eponges, M. Allemand montre que, jusqu'ici, les auteurs qui ont étudié l'Eponge ont travaillé surtout l'anatomie et la systématique, en oubliant quelque peu sa biologie. Il est juste de reconnaitre les difficultés grandes de cette étude, la pêche de l'éponge étant pénible et coù- teuse. L'auteur fait judicieusement remarquer que c'est à la suite d’une étude de MM. Delage et Godefroy, publiée dans cette Revue*, et d'un ouvrage très appré- cié de M. G. Roché®, que l'attention des naturalistes fut attirée sur l'utilité de la connaissance de la physio- logie de l'Eponge. C'est en 1875 que Cavolini a montré, le premier, que l'Eponge peut vivre après la récolte, et que, détachée du fond, elle est capable de réparer ses tissus endom- magés et de continuer à croître. Mais les essais malheu- reux de Lamiral, qui, en 1861, avait essayé de trans- porter des Eponges de Syrie sur les côtes de Provence, dans la baie de Tamaris, découragèrent les chercheurs. Il a donc fallu la création du Laboratoire de Sfax et la volonté de M. Allemand pour que ces études fussent reprises et menées à bien. La première partie de ce travail est consacrée à l'étude des fonds à Eponges tunisiens, c'est-à-dire à l'étude du milieu biologique dans lequel se développe l'Hippospongia equina, qui est l'espèce commerciale exploitée dans cette région. Après avoir décrit la nature géologique du sol sous-marin, la faune et la flore, les conditions climatériques, l’auteur montre que cette Eponge atteint son maximum de production dans des fonds situés entre 10 et 26 mètres, dans des prairies de Zostères, et souvent fixée sur les rhizomes de ces plantes. C’est à la limite de cette zone que le Labora- toire de Sfax fut établi. Les procédés de pêche sont étudiés longuement. Sans doute, elle est intéressante cette étude; mais, à notre avis, sa place devait être ailleurs que dans un travail de thèse. On y trouve des détails sur la pêche à pied, à la plongée, au scaphandre, sur l'usage du 1 Y. Derace et Goverroy : L'état actuel de la biologie et de l'industrie des Eponges. Rev. génér. des Sc., 1898. 2 G. Rocué : La culture des mers, 1898. S « BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX « miroir de pêche » qui permet aux pêcheurs de dis- tinguer facilement les Eponges jusqu'à 8 et9 mètres de profondeur, sur la pêche au « signal », le signal étant une Zostère qui traverse l'Eponge et qui à pris un aspect particulier à son contact à cause du liquide alcalin que ce zoophyte sécrète. La partie vraiment originale du travail de M. Alle- mand se trouve dans l'étude du pouvoir vital des Eponges et du développement des larves.Par des expé- riences nombreuses et bien conduites, cet auteur à déterminé la température optima qui est inférieure à — 150. Il a montré que toute Eponge, même bien péchée, sans déchirures, ne peut se régénérer en aqua- rium; elle doit être placée en eau vive, sinon elle s'atrophie et meurt. Aucun développement d'Eponge n'a été obtenu par la culture du « lait » résultant de l'écrasement des Eponges; donc, contrairement à l’opi- nion des pêcheurs, l'écrasement ne peut servir à la repopulation des fonds, et l'on devrait prohiber les engins qui causent cet écrasement. M. Allemand reconnait qu'une Eponge est bien vivante quand elle donne, au toucher, l'impression d'une baudruche mouillée très tendue et non celle d'une masse gluante. Souvent aussi elle fait entendre un crépitement particulier, produit par un Crustacé du genre Typton, qui peuple ses cavités. Notons enfin les ingénieuses expériences faites sur la régénération et surtout sur la greffe de fragments. Les fragments libres peuvent se régénérer, se fixer et s'accroître ensuite, mais à l'ombre; les petites Eponges placées dans des corbeilles, en eau vive, poussent plus vite que les grosses. Des essais de transport et d'acelimatation d'Eponges de Sfax, sur les côtes de Tunis, ont donné de bons résultats. La partie biologique la moins connue est assuré- ment celle qui a rapport au développement de l'Eponge et à la biologie de sa larve. C'est à cette étude que M. Allemand s'est efforcé d'apporter une réelle contri- bution. Il a vu que les larves s'échappaient de lin mars à la troisième semaine de juin. Pendantle premier été, l'Eponge atteint la taille d'une petite orange; son accroissement se ralentit en hiver ; elle atteint la gros- seur commerciale (environ 30 centimètres de tour) vers la fin de la seconde année; ensuite laccroisse- ment se ralentit. Enfin, et c'est un fait important au point de vue pratique, les fragments se développent moins vite que les larves : ils n’atteignent la grosseur commerciale que quatre où cinq ans après leur fixa- tion, alors que celles-ci ne mettent que deux ans. _ La formation de l'œuf a lieu de novembre à janvier. Quant à la question de la fécondation, d'ailleurs fort délicate, elle n’a pas été élucidée par M. Allemand, qui ne manquera pas, car il est en situation pour le faire, de nous donner la solution de ce problème. La conclusion de ce travail, au point de vue pratique, c'est que les deux procédés de spongiculture, par /rag- mentation et par ensemencement, Sont possibles, et que le procédé de l'avenir consistera à combiner ces deux méthodes. On cultivera les fragments, non plus uniquement dans le but de les récolter quand ils auront atteint une taille commerciale, mais surtout pour uti- liser les larves qu'ils pourront émettre pendant leur croissance. Ce procédé mixte aura l'avantage de faci- liter la dissémination méthodique des larves. Malgré les quelques réserves faites plus haut, nous devons féliciter M. Allemand d’avoir rompu avec la tra- dition en introduisant dans une thèse de doctorat des résultats ayant un caractère essentiellement pratique. La valeur de ce premier travail, sorti du Laboratoire de Sfax, nous fait désirer qu'une fois les recherches de M. Allemand achevées, cet Etablissement soit con- servé et que les questions biologiques qui intéressent le Sud tunisien y soient mises à l'étude. E. CAUSTIER, Professeur de Sciences naturelles aux Lycées Saint-Louis et Henri LV 1025 4 Sciences médicales Debove (G.-N.), Doyen de la Faculté de Médecine de Paris, membre de l'Académie de Médecine; Achard (Ch.), Professeur agrégé à la Faculté de Paris, Médecin des hôpitaux, et Castaigne !{J.), Professeur agrégé à la Faculté de Paris. — Manuel des Maladies du tube digestif. Tome 1 : Bouche, pharynx, œsophage, estomac, Jäl MM. G. PAISSEAU, F. Rarmerv, J.-C. Roux. — 1 vol. de 725 pages, avec figures. (Prix : 1% fr.) Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1907. Ce volume fait partie d'une série destinée à rem placer le Manuel de Médecine, publié par MM. Debove et Achard, qui obtint, il y a quelques années, un Si vif succès. Ce n'est pas une réédition, mais un Manuel nouveau. Suivant les progrès rapides de la science médicale, les auteurs en ont fait un traité qui est au courant des plus récentes découvertes. On y trouvera, à côté des bons articles didactiques de M. Paisseau e° de M. Rathery, une très complète et très intéressante étude des procédés d'examen et des affections de l'estomac due à M. G.-1. Roux, qui possède pour ce sujet une haute compétence. M. LaBsé, Professeur agrégé . à la Faculté de Médecine de Paris. 5° Sciences diverses Boyer (P.), Professeur à l'Ecole des Languesorienteles, et Spéranski (N.) ancien Répétiteur à la même Ecole. — Manuel pour l'étude de la langue russe. — 1 vol. in-8& de 400 pages. (Prix : 10 fr.) Armand Colin, éditeur. Paris, 1907. Le nombre de personnes étudiant le russe en France est assez considérable, même parmi les savants, pour qu'un nouveau manuel de cette langue difficile soit accueilli avec intérêt. Celui de M. Boyer diffère com- plètement des autres. Au premier abord, cela parait n'être qu'une série de vingt-neuf textes assez courts, extraits des écrits de Léon Tolstoï et accompagnés de commentaires, le tout suivi d'un « appendice » et d’un vocabulaire. Mais, si l'on se donne la peine, comme je l'ai fait, de lire deux ou trois textes et tous les renvois aux commentaires ou aux « appendices » qui S'y rap- portent, on s’apercevra tout de suite que l'ouvrage de M. Boyer est tout autre chose. C'est un véritable cours moyen de la langue russe, destiné à faire connaître à celui qui possède les premiers éléments de cette langue trois choses importantes : 1° l'accentuation exacte des noms (une des plus grandes difficultés de la langue parlée), car tous les mots de tous les textes sont très soigneusement accentués (je n'ai pu découvrir une seule faute en une dizaine de pages); 2° les règles essentielles de la grammaire, à l'aide des commen- taires qui sont faits d'une manière systématique, en allant du plus simple au plus compliqué ; 3° un riche vocabulaire appris d’une façon raisonnée à l’aide du lexique et des notes; enfin 4° jusqu'à un certain point, les finesses et le génie de la langue russe, sur- tout grâce aux notes de l « Appendice », qui est le modèle d'une exposition claire et concise à la fois des différentes difficultés de cette langue. Les Russesmèmes, ou ceux des Français qui possèdent à fond la langue russe courante, auraient intérêt à lire cet appendice, ne serait-ce que pour systématiser leurs connaissances. En somme, cest une nouvelle application de la méthode directe qui a donné déjà tant de résultats brillants et qui fait déduire par l'élève lui-même les règles de la grammaire au fur et à mesure qu'il acquiert le vocabulaire et les tournures de la langue parlée et écrite. Le livre de M. Boyer, qui à paru aussi en édition anglo-américaine, devrait ètre sur la table de travail de toute personne qui étudie le russe ou qui s'intéresse à cette langue. J. DENIKER, Bibliothécaire du Muséum. 1026 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS 1907. Séance publique annuelle. M. A. Chauveau retrace la vie et l'œuvre des membres de l'Académie décédés au cours de l'année. Puis il est procédé à la proclama- tion des ne des prix décernés par l'Académie pour 1907. Enfin, M. G. Darboux lit une Notice sur Antoine d'Abbadie. Séance du 2 Décembre Séance du 9 Décembre 1907. 41° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Tzitzeica pré- sente ses recherches sur certaines surfaces réglées dont les deux branches de la ligne flecnodale sont con- fondues suivant la courbe de linfini de la surface. — M. A. Buhl étudie la permutation des intégrales d'un système d'équations différentielles. — M. T. Lalesco poursuit ses recherches sur la fonction D(à) de Fred- holm. — M. Riquier étudie les systèmes d'équations aux dérivées partielles auxquels conduisent : 4° l'étude des déformations finies d’un milieu continu Ans l’es- pace à » dimensions; 2 la détermination des systèmes de coordonnées curvilignes orthogonales à 7 variables. — MM. Eug. et Fr. Cosserat montrent qu'en élar- gissant la notion d'invariant différentiel de manière à y comprendre l'idée de paramètre différentiel, la Phy- sique théorique moderne devient un prolongement immédiat, au point de vue eulérien, de la Mécanique. — M. H. Deslandres décrit un appareil destiné à l'étude des astres formés de gaz et de particules et capable de donner séparément l’image de chacun des deux éléments. — M. J. Guillaume a constaté que l'anneau de Saturne était nettement visible le 23 no- vembre, quoique peu lumineux. — MM. Giacobini et Javelle ontretrouvé la comète Giacobini 1907 à, décou- verte le 9 mars et qui avait disparu depuis derrière le Soleil. — M. J. Comas Sola à observé le passage de Mercure du 44 novembre à l'Observatoire Fabra, à Bar- celone. — M. L. Dunoyer présente un compas électro- magnétique particulièrement propre aux blockhaus cuirassés el aux sous-marins. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. V. Schaffers montre qu'en assignant à N, nombre des electrons libres dans les métaux, des valeurs fonctions de constantes phy- siques conoues, la loi des forces électro-motrices de contact de Drude se vérifie d’une facon satisfaisante. — Mme S. Curie à reconnu que les particules de la radio- activité induite du radium ont la propriété de condenser la vapeur d’eau saturante et même la vapeur d'eau non saturante, soit par attraction électrostatique, soit par affinité chimique. — Me Gleditsch a constaté que la pechblende de Joachimstah]l, minéral radio-actif cupri- fère, contient une faible quantité de lithium. — M. Athanasiadis montre qu'une flamme manomé- trique convenablement réglée peut produire sans aucun soufflage un son perceptible à distance, dont le nombre des vibrations est égal au nombre des vibra- tions de la membrane manométrique. Une flamme manométrique peut même produire à la fois deux ou plusieurs sons. — M. J. Becquerel à observé que les bandes d'absorption des solutions se résolvent, aux très basses températures, lorsque les solutions sont solidifiées, en composantes fines, déplacables par le champ magnétique. — MM. H. Abraham et Devaux- Charbonnel poursuivent l'étude de la propagation des courants téléphoniques sur les lignes souterraines. — M. P. Weiss a trouvé que les intensités d’aimantalion à saturation du feret du nickel à la température ordinaire sont données par les nombres 1731 et 497, à 0,5 of près. — M. A. Pérot présente un manomètre précis pour pressions élevées, où il a mis à profit la loi de ‘écoulement des liquides à travers les tubes capillaires; Fe à Poiseuille. — M. A. de Gramont décrit un appa- reil pour la production des spectres d'étincelle di solutions : l'étincelle éclate entre deux gouttes. liquide à étudier, amenées l’une au-dessus de Lau aux extrémités de deux tubes capillaires en silic fondue. — M. L. Denayrouze propose l'emploi des hydrocarbures lourds à l'éclairage, qui réalise une éco- nomie de prix et une plus grande sécurité. — MM. Cou- riot et J. Meunier ont constaté que les fils incandes- cents sont incapables de provoquer la détonation des mélanges explosifs qui les entourent; ils attribuent le fait à la formation d'une gaine gazeuse, composée presque entièrement d'oxygène, autour du fil — M. Ph.-A. Guye estime que la méthode des densités- limites ne doit pas être prise en considération, du moins sous sa forme actuelle, pour l'établissement du poids atomique exact de l'azote. — M. Alb. Colson démontre qu'il n'existe, ni ne saurait exister aucun dissolvant commun pour le P blanc et le P rouge. — M. G. Charpy a reconnu que le graphite et le carbone graphitique de recuit dans les fontes constituent une seule phase, car ils peuvent tous deux être gazéifiés intégralement au contact de l'H à 1000°. — M. L. Vi- gnon montre qu'une houille donne d'autant plus de CO et de CO? par distillation qu'elle est plus oxygénée. Pour la température de 900°, un peu moins du tiers de l'O de la houille se retrouve dans CO et CO* des gaz de distillation. — M. A. Portevin a étudié par la mé- thode thermique l'équilibre du système nickel-bis- muth : l’état d'équilibre n’est atteint que parles alliages voisins des métaux purs; pour les autres, on obtient des complexes à trois et même à quatre phases, carac- térisant des systèmes binaires hors d'équilibre. — M. P. Lemoult, en faisant réagir PH* sur le chlorure et le bromure mercuriques, a obtenu les composés PHg*CI et P*Hg°Brt. — M. L. Pelet-Jolivet a étudié la dissociation des combinaisons de colorants acides et basiques par les substances absorbantes. En solution neutre ou peu alcaline, le solide absorbant fixe exclu- sivement l'élément basique; en solution acide, il fixe l'élément colorant acide. — MM. P. Sabatier et A. Mailhe, par hydrogénation directe sur le nickel réduit des diones aromatiques, ont obtenu dans tous les eas les hydrocarbures correspondants. — M. E. Léger, par l’action de la chaleur, a transformé la barbaloïne en un isomère, la $-barbaloïne, dont le dérivé chloré C#H'eCl0? cristallise. Une partie des aloïnes de l’aloès du Cap existe à l'état de B-barbaloïne. — MM. Ch. Mou- reu et A. Valeur ont constaté que, dans diverses con- ditions, les sels de l’a-méthylspartéine peuvent s'iso- mériser pour donner les sels d’une nouvelle base, l'isospartéine. — MM. Ph. Barbier et P. Sisley ont réalisé la synthèse de l’anilidophénosafranine symé- trique phénylée. — M. L. Guignard n’a pu constater la moindre trace d'acide cyanhydrique dans les hari- cots de Hongrie; les conclusions contraires d’autres auteurs proviennent d'un défaut de méthode. — M. G. Tanret a isolé de 1 kilog de baies fraiches du gui 12 gr. d'inosite inactive et 4 gr. d’inosite racémique. — MM. L. Arnoult et A. Goris ont reconnu que les basides des Lactaires et des Russules donnent avec le réactif sulfovanillique de Ronceray une coloration rosée, tandis que les cystides et les laticifères donnent une coloration bleu foncé. — M. E. Alilaire a constaté la présence de phosphore dans la graisse de presque tous les microbes; il paraît engagé dans des formes particulières de lécithine. — MM. A. Etard et A. Vila précisent les conditions dans lesquelles doit s'effectuer l’hydrolyse des protoplasmides. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. J.Amar a reconnu que l'excès de lumière, en dehors des accidents pathologi- ques, met les yeux dans des conditions fâcheuses pour fonctionner normalement. — MM. A. Broca et Polak montrent que la lumière ambiante, dans les conditions habituelles de l'observation, ne modifie que peu la distinction des signaux, puisque celle-ci exige toujours l'emploi de la fovea. — M. A. Terson étudie les fac- teurs pathogéniques du glaucome, qui sont l'hyper- ension artérielle, puis l'hypersécrétion, la rétention t l’oblitération des voies de filtration. — M. R. Robin- n montre que la mort subite des enfants par le thymus et dans l’anesthésie chloroformique est le résultat de la paralysie diaphragmatique (syncope respiratoire), suivie de la paralysie du pneumogastri- que et de ses ramaux cardiaques par des anastomoses nervo-nerveuses. — M. E. Gley à constaté que le système nerveux central des aninaux immunisés contre le sérum d’anguille n'a pas l’immunité, ou l'a très faiblement. L'immunité ne se manifeste que lorsque la toxine pénètre dans le sang, où elle est neutralisée par l'antitoxine formée dans l'organisme au cours de l’immunisation. — MM. A. Rodet et G. Vallet ont observé, dans le nagana expérimental, que, chez les animaux sans crises, le pouvoir trypanolytique du sérum croit graduellement, à partir du moment où il s'établit, jusqu'à la mort, tandis que, chez les animaux à crises, il se développe à la première crise et persiste jusqu’à la fin. — MM. Moussu et Goupil ont fait agir le chlore sur le bacille tuberculeux et ont constaté la disparition de l’acido-résistance et une modification de la constitution du bacille. — MM. G. Pays-Mellier et E. Trouessart présentent deux hybrides de Paon et de Poule cochinchinoise ; ils présentent des carac- tères des deux parents, l'influence du père étant pré- pondérante. — M.Ch. Janet a étudié l’histolyse des muscles de mise en place des ailes, après le vol nuptial chez les Fourmis; elle n'est pas accompagnée de phagocytose. — Mlle À. Drzewina a observé une varia- tion de quinzaine dans le signe du phototropisme chez les Pagures misanthropes soustraits aux oscilla- tions de la marée. — MM. A. Conte et L. Faucheron ont constaté la présence de levures dans le corps adipeux de divers Coccides; il s'agit là d’une sorte de symbiose. — M. Y. Delage répond aux critiques de . M. Lœæb sur ses travaux relatifs à la parthénogénèse expérimentale. — M. M. Dubard crée pour le Sphedam- nocarpus Madagascariensis de Baker un genre nouveau, le genre Tricomariopsis, qui forme une transition entre les Banistériées et les Tricomariées, et relie les Malpighiacées avec les Dialypétales méristémones. — M. W. Lubimenko à reconnu que la production de substance sèche par la plante verte augmente avec la lumière jusqu'à un certain maximum et diminue ensuite. — M. £. Demoussy à observé que, lorsque l'état hygrométrique, à 25°, est supérieur à 0,7, beau- coup de graines périssent rapidement; dans des atmosphères moins humides, la conservation est meilleure. — M. M. Javillier montre que de très petites doses de zinc exercent une influence favo- rable sur la culture du Sterigmatocystis nigra. — MM. I. Pouget et D. Chouchak ont reconnu que l’action nocive de l'extrait de terre de luzerne sur Ja végétation est due aux sécrétions de la luzerne elle- même, qui sont comparables à des toxines. — M. L. de Launay signale la rencontre du granite, à la profondeur de 641 mètres, dans la cheminée diaman- tifère de la mine de Beers, conformément à ses pré- visions. M. E.-A. Ritter a étudié le gisement de cuivre d’Evergreen (Colorado); il est en relation très nette avec une roche éruptive tertiaire. — M. L. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 1027 Joleaud a observé la présence du Trias dans les montagnes de Gigondas (Vaucluse); les dentelles de Gigondas sont le résultat de phénomènes de charriage. — MM. Ph. Négris et C. A. Ktenas mettent en évidence l'existence d’une nouvelle discordance qui se poursuit à travers une grande partie de l’Argolide entre le Néocrétacé (Angoumien) et les grès et con- glomérats. — M. G. Vasseur signale la découverte de Vertébrés fossiles caractéristiques de l’'Oligocène dans les mollasses du Fronsadais (bassin de la Gironde). — M. R. Zeiller décrit un cône de Lepidodendron (Lepidostrobus Laurenti) trouvé daus les gîtes de phosphates noirs de l'Estanque (Ariège). — M. P. H. Fritel a découvert deux Nymphéacées nouvelles, qui paraissent appartenir aux genres ANelumbhium et Nuphar, dans le Sparnacien de la région parisienne. — M. J. Thoulet donne la description d'un fond marin côtier provenant de la Manche ; c'est un sable fin, médiocrement calcaire, avec gravier fin de coquilles brisées. ” ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 3 Décembre 1907. M. Berger présente, au nom du D' André (de Péronne), une observation d’arrachement total du membre supé- rieur avec l’'omoplate (arrachement inter-scapulo-thora- cique) par une machine; on ne connait qu'un seul cas analogue dans la littérature chirurgicale. — M. P. Rey- nier montre, par une série d'observations, que, passé quarante ans, dans la seconde moitié de la vie, l'alcoo- hisme est la cause de 90 °/, des tuberculoses osseuses, des tuberculoses externes. — M. le D' Calot donne lecture d’un travail intitulé : Ce que doit être le traite- ment de la coxalgie. M. le D' Mareano lit un travail sur le diagnostic des abcès dysentériques de la con- vexilé du foie. Séance du 10 Décembre 1907. M. Troisier lit le Rapport général sur les Prix décer- nés par l’Académie en 1907. M. A. Gautier proclame ensuite les noms des lauréats. — M. Jaccoud prononce l'éloge de Léon Le Fort. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 30 Novembre 1907. MM. E. Rist et L. Ribadeau-Dumas, par injection intra-veineuse de micro-organismes anaérobies prove- nant d'une pleurésie putride, ont créé, non seulement des abcès du foie, mais encore des lésions d'angio- cholite. — MM. Ch. Porcher et Ch. Hervieux établis- sent que l’indoxyle urinaire est la forme extérieure, visible et mesurable, de lindol produit par les putré- factions qui se développent dans l'intestin. — M. L. La- picque montre que le centre de coordination primaire, pour la marche en avant chez les Crustacés décapodes, se trouve dans la masse des ganglions buccaux; l'unique centre de coordination pour la marche en arrière chez l’écrevisse, pour la marche latérale chez le crabe, est dans la masse des ganglions sus-æsophagiens. — G. Bohn à observé un phototropisme positif très net chez les Branchellions parasites de la Torpille; mais cette réaction normale peut varier sous diverses influences. — M. Ed. Retterer a constaté, par l'étude du sabot du cheval, qu'à mesure que la cellule épider- mique évolue vers la surface, son hyaloplasma élabore des tono-fibrilles noueuses ou chondriocontes. Ces fibrilles moniliformes produisent un réseau d'autant plus serré que la couche cornée devient plus dure et plus résistante. — M. E. Fauré-Frémiet a découvert un Vorticellide nouveau, l’'£pistylis Perrierr, présen- tant une différenciation sexuelle avancée. — M. H. Grenet considère l'insuffisance hépatique comme ca- pable de déterminer à elle seule une diminution des 1028 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES albumines du sérum sanguin. M. A. yon par l'action des sels neutres sur le plasma sanguin, y à fait apparaître des granules dont on peut se débarrasser par précipitation et filtration successives. — MM. A. Rodet et Lagriffoul montrent que leur sérum antity- phique est préventif à l'égard de l'infection éberthienne généralisée à forme septicémique par une propriété antitoxique, indépendante de toute action sur les bacilles eux-mêmes, celte action étant, suivant les cas, aidée dans ses effets par une action bactéricide ou plus ou moins entravée par un effet contraire. — M. M. Mirande montre que le sucre tégumentaire des Arthropodes n’a aucune relation avec une assimilation possible du CO? atmosphérique. — M. J. de Rey- Pailhade explique le rôle du philothion dans les hydratations intra-cellulaires. — MM. L. Le Sourd et Ph. Pagniez ont constaté que le sérum anti-hémato- blastique, qui provoque la disparition totale des héma- toblastes in vivo, n'a qu'une action faible ou nulle sur les autres éléments du s sang; ce fait serait en faveur de l'autonomie des hématoblastes. — MM. A. Gouin et P. Andouard fixent à 9,5 grammes par 100 kilogs l'importance des échanges” azotés de chaque jour chez les jeunes Bovidés. — MM. A. Gilbert et A. Lipp- mann ont étudié bactériologiquement le pus de deux abcès tropicaux du foie et ont trouvé, dans chaque cas, plusieurs microbes anaérobies. — MM. H. Bierry, A. Pettit el G. Schaeffer décrivent les lésions pro- duites par injection, au chien et au lapin, de sérums néphro- et hépatotoxiques. — M. J. Gaillard montre que la sécrétion interne des capsules surrénales est l'excitant physiologique normal du tonus cardio-vas- culaire ; leur hyperplasie est liée à l'hypertension arté- rielle, à la néphrite chronique et à l'athérome. — M. H. Piéron a observé que la sauterelle n’autotomise une de ses pattes que dans la mesure où l’autotomie permet sa fuite et ménage à peu près toujours sa deuxième patte sauteuse, l'une au moins étant indis- pensable pour permettre la fuite. — M. N. Fiessinger estime que tout sérum hépatotoxique n'est pas spéci- fique : il lèse le foie et le rein, tout en épuisant son action mieux sur le foie que sur le rein. — M. G. Gerber montre que les études sur l’action coagulante de la parachymosine doivent être faites entre 25° et 30°, température d'action normale de cette diastase. — M. G. Rosenthal décrit les caractères spéciaux de la sporulation du bacille du rhumatisme, qui per- mettent de le différencier des bacilles voisins. — MM. C. Fleig et P. de Visme ont constaté que la fumée de tabac, en inhalations, provoque chez le chien une forte chute de la pression carotidienne, suivie d'une élévation au-dessus de la normale, en même temps qu'une vaso-constriction intense du rein, suivie d’une vaso-dilatation. — MM. Léopold-Lévi et H. de Rothschild estiment que, dans quelques cas, l’eczéma se rattache indirectement au tempérament hypothy- roïdien, à titre de phénomène d'hyperthyroïdie: — MM. G. Guillain et A. Gy ont reconnu expérimenta- lement, sur la lapine, que le tabac exerce un effet nocif sur la gestation. Séance du T7 Decembre 1907. MM. H. Labbé et G. Vitry montrent que le lapin ne fait pas exception à la règle en ce qui concerne l'éli- mination de l’indican : celui-ci est sous la dépendance primordiale de la qualité de l’albumine ingérée et pos- térieurement de la quantité métabolisée. — MM. M. Vil- laret et L.Tixier ont observé une forte leucocytose du liquide céphalo-rachidien dans un cas d’éclampsie puer- pérale. — M. Ed. Retterer a constaté que l’épiderme muqueux est composé de cytoplasma avec des granules clairsemés (mitochondres); dans l’épiderme corné, ces granules deviennent plus denses et se réunissent par des filaments {chondriocontes). — MM. Ch. Achard et M. Aynaud ont observé directement les hématoblastes dans le plasma sanguin de divers animaux, recueilli et manipulé au contact de la paraffine. — MM. Ch. Au- bertin et J. Cluzet ont constaté une coexistence de l'hyperplasie médullaire des surrénales avec l'hyper- trophie cardiaque, plus spécialement du ventricule gauche. — MM. A. Gilbert el M. Herscher montrent que la présence de stercobiline dans les fèces témoigne de la pénétration des pigments biliaires dans l'intestin ; elle ne révèle pas une viciation du foie. — MM. L. Ri- badeau-Dumas et P.-J. Ménard ont ensementcé le sang de deux nourrissons atteints de forte diarrhée avec élé- vation de la température et ont obtenu des cultures de deux bacilles : lun analogue au colibacille, l'autre au typhimorphe. — MM. J. Nageotte et Lévy-Valensi ont reconnu que le nombre des lymphocytes, dans le liquide céphalo-rachidien normal, est plus élevé qu'on ne le croit : de 1/2 à 1 1/2 par millimètre cube. — M. P. Guéniot a constaté que le streptocoque, à l'in- verse du colibacille et du staphylocoque, se développe peu ou pas sur le placenta humain. — MM. H. Bierry et A. Rance décrivent une réaction sensible de la bili- rubine : coloration verte par le brome en solution dans le chloroforme, bleue par addition d'alcool, décolora- tion par les vapeurs d’'AzH*. — MM. CL Gautier et Ch. Hervieux ont obtenu une réaction indolique posi- tive avec le contenu du gros intestin du lapin soumis au jeûne. — M. R. Legendre a observé deux sortes de variations dans l'eau de mer littorale à Concarneau : les unes diurnes, intéressant la température et la teneur en 0 de l’eau, les autres synchrones de la marée, inté- ressant la densité. — M. E. Pinoy indique un procédé d'inoculation dans le coussinet plantaire chez le rat, le cobaye, etc., et dans la veine tibiale interne du pigeon. — M. Pariset a constaté une diminution de l’amylase urinaire à la suite de l'absorption d’eau thermale bicar- bonatée sodique forte. — M. G. Seïllière montre que l'Hel:x digère le xylane 22 vivo et que le pentose résul- tant de cette digestion peut être mis en évidence dans le sang par la phloroglucine. — Mi: L. Kalaboukof et M. E. F. Terroine ont observé que l’action lipasique des extraits glycérinés de muqueuse gastrique n’est pas moditiée par l'addition de lécithine; elle est retardée par les sels biliaires. La lipase intestinale n’est pas mo- difiée par la lécithine; elle est activée par les sels biliaires. — M. A. Frouin montre que le suc intestinal, ajouté au bouillon de coli-bacille, donne toujours une culture homogène, tandis qu'il peut agglutiner le bacille typhique. — M. G. Proca a constaté que les cultures en bouillon de plusieurs bactéries, stérilisées par la cha- leur, constituent des milieux propres au développement des anaérobies en présence de l'air. — M. A. Mayer estime que les propriétés générales des globulines sont dues uniquement à leur état physique colloïdal. — M. H. Vincent a reconnu que la bile possède in vitro une forte action neutralisante vis-à-vis de la toxine télanique; cette action est presque nulle in vivo. — M. C. Fleig montre que la forme de soufre qui se prête le mieux à l'injection sous-cutanée ou intra-veineuse est le soufre colloïdal. — MM. C. Fleig et P. de Visme ontconstaté que les phénomènes produits par les injec- tions d'extrait de fumée de tabac sont les mêmes que ceux qui s'observent sous l'influence des inhalations. — M. V. Pachon estime que les phénomènes signalés par MM. Fleig et de Visme ne s s'appliquent qu aux pre- mières inhalations; l’homme accoutumé à fumer ne présente plus ces réactions. — M. G. Froin a remarqué que AzH'CI, qui produit l'hémolyse des globules san- guins à de , est sans action à 0°, parce qu'il n'est plus fixé par l’alexine du sérum. — M. A. Branca, par l'étude du corps muqueux du thécorynque, a reconnu que la cellule malpighienne change de constitution au cours de son évolution : une structure filaire succède à une structure réticulée. — M. R. Dubois montre que l’action du venin de la glande à pourpre est abso- lument différente de celle de l’adrénaline. — MM. Gou- gerot el Laroche, en inoculant la peau épilée ou rasée par simple frottis avec des bacilles tubereuleux humains virulents vieillis, ont reproduit des tuberculides papu- lonécrotiques. ACADÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 22 Novembre 1907. MM. G. Urbain et C. Seal exposent à la Société chi- mique leurs recherches sur la phosphorescence du contenu des fluorines et répètent devant la Société quelques-unes de leurs expériences. — M. Rosenstiehl présente quelques considérations sur l’hydrolyse des sels. — M. A. Valeur communique, au nom de M. Ch. Moureu et au sien, la suite de leurs recherches sur la spartéine. L'hydrate d'a-méthylspartéinium CH*A7°. CH'OH se décompose au-dessous de 100° en donnant une méthylspartéine brute. Cette base est constituée par un mélange de spartéine et de deux méthylspar- téines isomériques : l’a et la B-méthylspartéine. L'a- méthylspartéine C''H#%AZ?(CH°) est un solide; elle fond à 30-31° et bout à 178-179 (corr.) sous 11 mm.; son pouvoir rotatoire est de an—— 549,4. La f-méthyl- spartéine C'H5A7#(CH5) est liquide et bout à 182-183° (corr.\ sous 13"",5; son pouvoir rotatoire est de an ——+90,9. Les deux bases diffèrent essentiellement l'une de l'autre par la propriété que possède seule l'«-méthylspartéine d'être isomérisée dans certaines conditions. C'est ainsi que le sulfate de cette base, chauffé en liqueur sulfurique, se transforme en le sul- fométhylate d'une base nouvelle, l'isospartéine. — M. M. Guichard décrit une méthode de préparation des iodures métalliques. — M. G. Wyrouboff dépose une note sur le bichromate de rubidium. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 22 Novembre 1907. M. S. Skinner présente deux échantillons de sable chantant, provenant des baies de Manchester (Mass.) et de Small Point (Maine). Ce sable émet des sons lors- qu'on introduit un corps dur dans une coupe en verre pleine de ce sable. Il faut supposer que le sable est formé de sphères égales, occupant un volume minimum à l’état de repos. Lorsqu'il est agité, la masse passe par une série de minima de volume avant de revenir au repos. — M. L. Bairstow présente un micromanomètre en usage au Laboratoire national de Physique pour la mesure des pressions dues aux courants d'air. — M. C. V. Boys présente un modèle de diabolo qu'il est impossible de faire tourner, parce qu'il a ses moments d'inertie identiques par rapport à l'axe de symétrie rotationnelle et par rapport à l'axe transverse. — M. H. A. Wilson présente un gyroscope illustrant le tramway monorail de Brennan. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance da 7 Novembre 1907. MM. H. B. Baker et M. Baker ont {trouvé que Az*0* liquide peut être mis sous l’état gazeux si on le des- sèche complètement. Les déterminations de densité par la méthode de V. Meyer montrent que le gaz est composé en partie de molécules simples Az*0*, en partie de molécules doubles Az'0°. Le liquide est vert à la température ordinaire, bleu au-dessous de 20: il se solidifie en cristaux bleu sombre dans l'air liquide. — MM. H. B. Baker et Al. H. Bennett ont essayé de dédoubler le tellure par dix méthodes de fractionne- ment; mais ils n'ont trouvé aucune différence entre les diverses fractions. Le poids atomique de cet élé- ment a été trouvé égal à 127,60. — M. M. H. Godby à préparé un sulfite double de sodium et de potassium cristallisé KNaSO*. Chauffé avec l'iodure d’éthyle, ül donne un sel qui cristallise de l'alcool bouillant et dont la composition est voisine de 4 (KC*H*S0*) Nal. — MM. M. O. Forster el Th. Jackson ont préparé, au moyen de l’aminocamphre et de CS, l'acide campho- ryldithiocarbonique, C°H%0. AzH.CS.SH, F. 1289, dont l'oxydation par l'acide nitreux fournit la camphorylthio- carbimide, CH%0. Az : GC : S, F. 106°,5. — M. R. T. 1029 Lattey a déterminé les tensions de vapeur de la trié- thylamine, de la 2 : # : 6-triméthylpyridine et de leurs mélanges avec l'eau. Pour ces derniers, la courbe présente un maximum quand la composition de la vapeur et celle du liquide sont identiques. — Le mème auteur déduit des tensions de vapeur, des constantes critiques et du coefficient thermique de l'énergie molé- culaire superlicielle que la triéthylamine est un liquide monomoléculaire. — MM. F. B. Power et F. Tutin montrent que les formules proposées par Mossler pour l'homoériodictyol (ériodyctionone) ne sont pas exactes, car elles n'expliquent pas la formation, signalée par eux, de phloroglucinol et d'acide férulique par traite- ment avec les alcalis. De plus, l'homoériodictyol n'est pas un composé optiquement actif. — MM. W. J. Pope et Ch. S. Gibson, en faisant réagir le bromure aurique sur C?H%MgBr, ont obtenu le bromure diéthylaurique (C#H5}AuBr, soluble dans les solvants organiques, F. 58° avec décomposition légère, se volatilisant dans le vide. — MM. P. C. Ray et P. Neogi, en faisant réagir le nitrite mercureux sur l'iodure de méthyle, ont obtenu le nitrite de méthyle et le nitrométhane. La réaction est générale avec les iodures d'alkyle. — MM. J. E. Marsh et R. de J.F. Struthers, en chauflant le camphre avec une solution alcaline de chlorure mercurique et précipitant par l'acide acétique glacial, ont obtenu le dimercuri-iodure de camphre, C'"H#O.Hg°1®. Du filtrat, on peut précipiter par KI le composé C"H®O.Hgl. — M. G. G. Henderson, en trailant le limonène par le chiorure de chromyle, a obtenu un produit d'addition qui, distillé par la vapeur, fournit : une aldéhyde C°H#0, Eb. 2219-222%, se convertissant à l'air en un acide C'°H0?, F. 172, oxydable par l'acide nitrique en acide p-toluique; une cétone, C°H®O, Eb. 112-1139 sous 15 mm., qui, chauffée en tube scellé avec le for- miate d'ammonium, fournit le dérivé formylique d’une amine C'H#AZIEF. — MM. A. Senier et A. Compton, par l’action de CH°CF sur les xylidines, avec où sans xylénols, ont préparé des méthylènediamines, qui, au moyen de la méthode d'Ullmann, sont transformées en acridines. — MM. M. Barroweliff el F. Tutin ont retiré des racines de Morinda longiflora un peu d'hydroxyméthoxyméthylanthraquinone et d’éther mo- noéthylique de Palizarine, des acides gras, un phyto- stérol C*7H%0, EF. 4309, et un sucre qui forme de la d-phé- nylglucosazone. L'extrait des feuilles renferme, en outre, un peu d’hentriacontane et un alcool cristal- lisé, CHSO%.OH,F. 2780, [an —+4-65°,9, que les auteurs nomment morindanol. — MM. A.R. Smith el J. K. Thorpe montrent que l'e-cyano-y-phénylacétocétate d’éthyle est un composé défini, F. 25°; Eb. 1789 sous 20 mm.: c'est un acide fort, décomposant les carbo- nates en donnant des sels stables. Le sel d’Ag, traité par CHSI, fournit un mélange d'a-cyano-y-phényl- a-éthyl-acétoacétale el d'a-cyano-B-éthoxy-y-phényl- crotonate d'éthyle. — M. W. O. Wootton à préparé diverses amides et imides de l'acide camphorique. — M. F. Tutin montre que la d-phénylglucosazone pure fond à environ 217° et non à 205°, comme l’a indiqué Em. Fischer. —MM. A. Lapworth el E. Wechsler étudient la constitution des produits obtenus dans la réaction de la cyanodihydrocarvone avec le nitrite d'amyle et CIF ONàa. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 30 Septembre 1907. M. L.-W. Austin adresse un Mémoire sur la pro- duction au moyen de l'arc vollaïque des oscillations électriques rapides. On sait que M. W. Duddell, en 1900, déerivait des expériences suivant lesquelles un son musical est engendré en insérant, en parallèle avec un courant continu, une self-induction et une capacité conveuables. Les causes de ce phénomène n'ont pas encore été parfaitement élucidées, bien que M. Duddell indique les conditions nécessaires pour produire ces oscillations. Suivant ce savant, le mécanisme du phéno- 1030 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES mène serait le suivant : Le shunt étant relié au circuit, disposé comme il à été dit, une partie du courant, se rendant dans le condensateur, est soustraite à l'arc voltaique; comme, cependant, la différence de potentiel s'accroît per une diminution de l'intensité du courant dans l'arc, la charge du condensateur est augmentée. Lorsque, par contre, le condensateur se décharge à travers l'arc voltaïque, l'intensité du courant étant aug- mentée, Ja différence de potentiel diminuera jusqu'à décharge complète; après quoi, le même jeu commen- cera de nouveau. Une autre théorie de ce phénomène est due à M. Maisel, suivant lequel le signe de dV/dJ dans l'arc voltaïque serait sans influence, la présence d'oscillations dépendaut exclusivement de la tem- pérature de lélectrode négative. Suivant ce savant, la température de l’électrode, le courant dans l'are vol- laïque étant affaibli par la charge du condensateur, tomberait jusqu'à extinction de l'arc, qui, un moment après, se remettrait à brûler, par le reflux de la charge du condensateur, pourvu que la température ne soit pas tombée trop bas. Le Professeur F.-A. Fessenden, en 1902, proposait l'emploi d'un éclateur alimenté par du cou- rant continu ou un arc vollaique, comme source de rayonnement, pouvant servir dans la télégra- phie sans fil, en insistant sur l'a- vantage d'un potentiel élevé et de la formation de l’are voltaique au sein d'une atmosphère com- primée. M. Simon vient de pu- blier une théorie du mème phé- nomène, basée sur sa théorie de l'arc voltaïque et qui concorde avec les déductions de Duddell et de Janet. Enfin, M. Poulsen, pos- térieurement au commencement du présent travail, a publié ses expériences faites pour la pro- duction d'oscillations nourries, d'une fréquence allant jusqu'à 1 000.000 par seconde, oscilla- tions qui ont été utilisées avec succès dans la télégraphie sans lil. M. Austin se sert, comme source de courant, d'une instal- lation à courant continu de 240 volts, remplacée parfois par une installation à 120 volts. La figure 1 représente la disposition de l’ex- périence : A est un ampèremètre, B un voltmètre, H un instrument à fil chaud, C une capacité se composant d'un ou de plusieurs petits condensateurs de mica, de 0,0% microfarad chacun, L une self-induction de 0,009 millihenry. Le circuit secondaire se compose d'un con- densateur variable à air C’, d'un instrument à fil chaud H!, d'une self-induction L' de 25 spires du même fil que la self primaire (qui en contient trois) et d’une bobine de self-induction variable employée parfois comme supplé- ment. D'accord avec les résultats de M. Salomonson, ces expériences font voir que l'arc musical ordinaire à électrodes graphitiques est capable d’engendrer des trains d'ondes de plusieurs centaines de milliers de vibrations par seconde. Dans le cas de l'arc à électrodes de graphite, les oscillations examinées dans le circuit secondaire présentent trois fréquences d'intensités décroissantes, correspondant, semble-t-il, aux trois harmoniques supérieures. Cela prouve que les ondes, loin d'être sinusoïdales, ne sont pas même symétriques. La fréquence s'accroit pour des intensilés croissantes du courant continu et pour des longueurs décroissantes de l'arc. La disposition en série de plusieurs ares vol- laïques diminue également la fréquence. Cette dernière, par contre, ne varierait pas avec l'intensité des vibra- tions. Il est impossible d'intercaler, dans le cireuit vibratoire en dérivation, une résistance sensible sans détruire les oscillations. L'énergie s'accroit fortement Arc voltaïque H C Fig. 4. — Dispositif de M. L.W. Austin. en formant l'arc voltaïque au sein de l'hydrogène ou de la vapeur d'eau. Lorsque l'arc voltaïque est formé au sein de l'air atmosphérique à la pression de 6 atmo- sphères, entre des électrodes d'argent ou de cuivre, Fin- tensité du courant continu étant inférieure à 0,2 am- père et la tension dans le circuit de 4.500 volts, l'aré voltaïque présente toutes les propriétés d’une décharge par étincelles très rapide. La fréquence, dans ce cas, est indépendante de l'intensité du courant continu et de la Jongueur de l'are, n'étant déterminée que par la sell-induction et la capacité du circuit vibratoire. L'au- teur ne détermine que la fréquence du son fondamen- tal; l'onde, semble-til, est sinusoïdale. A l'inverse de ce qu'on constate dans le cas des arcs à basse tension, on peut intercaler dans le cireuit dérivé des résistances dé plusieurs centaines d'ohms, privant, par là, les oscil- lations de plus de 60 °/, de l'énergie possible suivant les calculs. L'are à haute tension est presque exempt de bruits sibilants, tels qu'on les observe toujours dans le cas des bas potentiels. Aussi se prête-til de préfé- rence aux expériences de téléphonie sans fil. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE ue Séance du 7 Novembre 1907. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. N. Stucker, par une série d'essais, vérifie la formule, déduite de la théorie d'Helmholtz, donnant la position des nœuds dans un tuyau fermé d'un seul côté, et montre que le rapport des membres de correction aux rayons du tuyau cor- respondants n'est pas égal à z/4, mais à 0,583. — M. R. Wegscheïder propose une théorie de la saponi- lication des éthers glycériques, qui suppose une sapo- nification par degrés avec formation intermédiaire de mono- et de diglycérides isomères. 2° SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Spitz et G. Dyh- renfurth présentent leurs études sur la tectonique des dolomites de la Basse-Engadine centrale. — M. EF. Heritsch : Etudes géologiques dans la zone des grau- wackes des Alpes du Nord-Est. I: Les environs de Hohentauern. Séance du 14 Novembre 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Wieleitner : Sur quelques rapports entre les quartiques spéciales. — M. O. von Lichtenfels : Sur une formule de cuba- ture. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. K. Siegl a mesuré le pouvoir d'émission de quelques roches, de l’eau et de la glace au moyen d'une colonne thermique et a cal- culé, d'après la loi de Paschen, les constantes de rayon- nement. — M. V. F. Hess à analysé le rayonnement du radio-plomb. La diminution du rayonnement total des préparations présente, au bout de deux à trois semaines, la constante de RaF; auparavant, eile est plus rapide, sans atteindre la constante de RaE,. Cette perturbation à l'origine doit être attribuée à un rayon- nement restant, faible et peu pénétrant, dérivant du rayonnement de RaE,. La constante de diminution de moitié du rayonnement 8 de RaE à été trouvée égale à 4,9 jours dans les 15 premiers jours, puis à 6,2 jours ensuite; ce fait confirme l'existence de deux produits successifs RaË, et RaE, dans RaE. — M. G. Mossler, en chauffant les amides des acides gras «-bromés avec une lessive alcaline, a obtenu une élimination de HBr et de HCAZ avec formation de cétones ou d'aldéhydes suivant que l'atome de Br est lié à un carbone tertiaire ou secondaire. — M. M.Sameec à constaté que le musele du cou donne beaucoup moins de leucine pure qu'on ne le croyait; celle-ci, oxydée par le permanganate, fournit, entre autres, de l'acide valérique normal. — M. W. Traxl à reconnu que la désamidoédestine, obtenue par l'action de l'acide nitreux sur l'édestine, contient, à l'inverse des autres désamidoprotéines, plus d'azote que la matière originelle, tandis que la teneur en G,H et S à peu varié. L'hydrolyse ne onne hi bte si lim thon ét ot eus Été ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES - 1031 pas de lysine et beaucoup moins d'arginine qu'avec l'édestine. — M. J. Zellner à analysé le champignon Trametes suaveolens. contient relativement beau- coup de sulfate de chaux et peu d'acide phosphorique, une graisse, un ferment lipolytique, deux corps du groupe de l'ergostérine, du mycose, du glucose, des _hydrates de carbone amorphes, un pentosane, un peu d'albuminoïdes, un corps volatil à odeur d'anis et un corps semblable à lamanitol. Séance du 21 Novembre 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. R. Leitinger, par- fant du fait que le principe du moindre effort de Gauss, pour des coordonnées rectangulaires, se déduit très facilement des équations de Lagrange de première espèce, a recherché si, d'une façon analogue, on ne pourrait le faire dériver, en coordonnées généralisées, des équations de Lagrange de deuxième espèce sous la forme donnée par Boltzmann pour des coordonnées non holonomes. On y arrive très facilement pour Îles coordonnées scléronomes ; dans le cas des coordonnées rhéonomes, il faut utiliser la disparition d'un certain déterminant. — M. J. M. Pernter présente un Rapport au nom d'une Commission qui a exécuté diverses obser- vations et mesures au sommet du Sonnwendstein, pour reconnaitre si cette montagne répondait aux conditions d'établissement d'un observatoire solaire. La compa- raison des observations avec celles faites simultané- ment à Vienne montre que le Sonnwendstein constitue un point très favorable. 90 SciENCES PHYSIQUES. — M. À. Wassmuth à soumis à la torsion des barreaux de divers métaux et mesuré l'élévation de température pendant la détorsion. Dans les limites de l’élasticité, les valeurs obtenues concor- dent avec celles d’autres observateurs. Voici les valeurs de n X 10* qui s'en déduisent : acier 3,22; Ni 4,105; Cu 4,55; Au 4,35; Pt 2,22; Pd 2,9. — MM. J. Pollak et H..Feldscharek ont remarqué que, dans la distillation ou l’ébullition prolongée des acides-éthers-oxydes, nitrés ou non, il se forme toujours, en quantité va- riable, les éthers-sels de ces acides; ainsi, c'est le cas de l'acide mitrotriméthylpyrogallolcarbonique. La pré- sence de groupes nitrés ou de plusieurs restes mé- thoxyles favorise cette réaction. — MM. J. Pollak et J. Goldstein ont constaté que, dans l’action de l'acide ntirique sur l’éther triméthylique du pyrogallol, il se forme toujours à côté du dérivé nitré la quinone, tandis qu'avec l’éther triéthylique, si c'est générale ment aussi le cas, on peut, dans des conditions déter- minées, n'obtenir que le dérivé nitré. ACADEMIE ROYALE DES LINCEI Séances de Novembre 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Millosevich trans- met ses observations des comètes e Giacobini, d Da- niel et e Mellish 1907, exécutées à l'équatorial Steinheil- Cavignati de l'Observatoire astronomique du Collège Romain. — M.T. Boggio donne une méthode d'inté- gration de l'équation fonctionnelle relative à la chute d'une sphère dans un liquide visqueux, en supposant que, le liquide et la sphère étant soumis à l'action de la gravité, le premier se trouve dans un état déterminé de mouvement initial, et la sphère soit projetée verti- calement avec une vitesse initiale donnée. — M. L. Orlando et M. E. E. Levi s'occupent, dans deux notes différentes, de quelques équations intégrales. — M. G. Zappa étudie le choix le plus opportun des déclinai- sons stellaires pour déterminer les constantes des ins- truments, azimut et collimation, et l'erreur de l'horloge en faisant usage de l'instrument des passages au méri- dien sans inversion. 20 Sciences puysiques. — M. C. Viola indique la manière de déterminer les indices principaux de réfraction d’un cristal, à l’aide des plans de polarisation. — MM. A. Battelli et A. Stefanini reprennent leur étude sur la relation qui existe entre la tension super- ’ ficielle et la pression osmotique, pour répondre à des remarques que l’on à faites aux considérations théo- riques qui démontreraient que, pour des dilutions suf- fisammentétendues, on doit considérer comme iso-0smo- tiques les solutions qui ont un égal degré de tension superficielle. — M. L. Magri décrit quelques intéres- sants phénomènes lumineux présentés par l'étincelle électrique, lorsqu'on fait passer la décharge dans l'air comprimé; l’étincelle, avec une décharge oscillatoire, est très lumineuse, et montre une série de stratifica- tions analogues à celles que lon observe dans les tubes à vide, mais moins régulières ; on réussit à les fixer par la photographie. — M. P. Rossi rappelle que M. Zambonini avait déjà signalé la cotunnite comme un minéral du Vésuve qui présente une radio-activité plus grande que tous les minéraux volcaniques étudiés jusqu'ici; les observations de M. Rossi prouvent que la cotunnite ne renferme pas, au moins d’une manière appréciable, du radium. mais qu'elle est activée par les substances qui forment l'activité induite du radium à lente évolution (radio-plom®@) c'est-à-dire RaD, RaE, RaË. — M. B. L. Vanzetti, en étudiant la diffusion des électrolytes dans les solutions aqueuses et dans les gélatines, trouve confirmée l'hypothèse de l'existence d'une relation entre les mobilités électrolytiques des substances et leur vitesse de diffusion dans l’eau. — M. A. Colombano avait déjà, avec M. Oddo, émis des doutes sur l'identité de composition des solanines extraites des différentes variétés des Solanum, etmême à diverses périodes de végétation de la même plante. Des recherches expérimentales ont permis à M. Colom- bano d'établir que, pour une variété déterminée, le Solanum présente toujours les mêmes caractères, mais que la solanine du S. tuberosum est essentiellement différente de celle du S. sodomaeum. — MM. A. Colom- bano et C. Leonardi étudient quelques dérivés azoïques du gaïacol qu'ils ont préparés. — M.L.Cambi poursuit ses recherches sur les sels de Roussin, pour donner une base expérimentale à son hypothèse sur la consti- tution de ces sels. — M. C. Gialdini donne le résultat de ses recherches sur quelques sels complexes de liri- dium. — M. L. Mascarelli expose quelques considé- rations sur les équilibres dans des systèmes ternaires. — M. M. Padoa décrit ses observations sur la vitesse de cristallisation des mélanges isomorphes. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. R. Perotti décrit ses recherches sur la manière de se comporter de la chaux azotée comme engrais, qui confirment que, par une action biochimique, les produits toxiques de l’engrais sont ammonisés et rendus inoffensifs pour les plantes. ERNESrO MANGInI. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 26 Octobre 1907. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. C. H. Wind présente au nom de M. E. van Everdingen : ltelation entre la mortalité des enfants et les hautes températures. Dans les « Communications statistiques » de la Ville d'Am- sterdam, MM. Saltet et Falkenburg ont publié une étude : « La mortalité des enfants aux Pays-Bas (dans les années 4881-1905) ». Ces auteurs y constatent l’exis- tence d’un maximum prononcé de mortalité des enfants âgés de moins d'une année dans les mois d'été et cherchent une relation entre la valeur de ce maxi- mum, dans les diverses localités et les différentes périodes de temps, et les températures moyennes des mois. Leur résultat fut négatif. Ils disent : « Dans la plupart des cas, il n'y a pas de parallélisme entre les températures et la mortalité infantile. Les diagrammes montrent qu'il y a une relation entre l’état de l'air dans l'été et la mortalité des nourrissons. Mais ce n’est pas la hauteur de la température qui domine celte mortalité. » M. van Everdingen démontre, au con- traire, qu'une autre méthode d'investigation mène à un résultat positif bien prononcé; ses résultats sont : 1° Les oscillations de la mortalité infantile ne montrent 1032 pas de rapport sensible ni avec les moyennes men- suelles des températures pour ces mois, ni avec les moyennes des variations diurnes de la température; 20 Le nombre des jours à température maximum au-dessous de 25° (jours d'été), compté depuis le 16 mai au {5 juin, depuis le 16 juin au 15 Juillet, etc., montre des oscillations s'accordant, dans la plupart des cas, en signe avec les oscillations de la mortalité des enfants en juin, juillet, etc.; 3° En comparant les déviations du nombre des « jours d'été » et celles de la mortalité infantile pendant une période commencant et se terminant quinze jours plus tard (différence de phase), la mortalité des nouveau-nés augmente de 5 0/, à Groningue et de 4 °/, à Utrecht pour chaque jour d'été. — M. J. P. van der Stok : Analyse des courbes de fréquence de la température de l'air. La question de la manière dont les particularités caracté- ristiques de courbes de fréquence de différentes formes peuvent être rendues dans une forme analytique flexible a été étudiée en détail dans une publication récente de M. H. Bruns (Wahrscheinlichkeitsrechnung und Kollektivmasslehre). Dans cette communication- ci, M. van der Stok fixe l'attention sur la méthode d'opération recommandée par M. Bruns, et en fait ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES l'hypochlorite de potasse sur Tlamide de lacide cinna- inique. Seconde communication (pour la première, voir Rev. gén. des Se., t. XVII, p. 1044), qui paraîtra in exteuso dans le Recueil. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. L. Bolk : Le cheveu rouge forme-t-il une nuance ou une variété? On croit ordinairement que le type à cheveux rouges est en rapport intime avec la race blonde, caractérisée, quant à la pigmentation, par des cheveux blonds et des yeux bleus. Ainsi, d'après M. Topinard, le type rouge se développe du type blond « par une action de milieu ». M. Bolk a fait une statistique des écoliers à cheveux rouges des différentes provinces des Pays-Bas (com- parez la communication antérieure sur la distribution des types de blonds et de bruns, Æev. gén. des Se., t. XV, p. 572) pour connaître le pourcentage des types rouges par rapport à celui des types blond et brun. Ses résultats sont déposés dans le Tableau | suivant. Ils prouvent que, dans ces provinces, la distribution des types rouges est partout la même et ne varie pas avec le pourcentage du type brun. — M. C. A. Pekelharing présente en son propre nom et au nom de M. J. W. À. Gewin: La relation entre la pepsine et la chymosine. Les deux facultés du suc de l'estomac Tagceau |. — Répartition des types blond, brun et rouge en Hollande. PROVINCE Frise. Groningue . Drenthe . . Over-Ysel Gueldre : DAME Hollande méridionale. Hollande septentrionale. Utrecht. Zélande Le Brabant septentrional. Limbourg HUNUNNINNNA CHEVEUX BLONDS YEUX BLEUS CHEVEUX NOIRS CHEVEUX ROUGES YEUX BRUNS 566 446 205 6S9 .340 A (24 .191 528 834 .661 .013 D'Ur co WI à HUM RO RO = RO RO KO 9 19 RS RO 19 è Nes — A V2 4 ee 09 OI 9 19 LOL CLR 1 O D Ut O7 ee Of D =) Qù CE l'application aux nombres de fréquence se rapportant à la température de Pair, déduite d'observations faites six fois par jour, depuis 1882 jusqu'à 1904, à bord du bateau-phare Schonwenbank. 20 Scrences physiques. — M. P. Zeeman : Les 1nten- sités des composantes des raies spectrales décomposées par le magnétisme. Si un champ magnétique trans- forme une raie spectrale en triplet, les composantes extrèmes et la composante moyenne ont, en général, des intensités différentes. D'après la théorie elémen- taire du phénomène de la décomposition magnétique donnée par Lorentz, il y a un rapport simple entre ces 13 If Total ro e 3 2 intensités. On doit avoir I, — , Sont les intensités des composantes extrèmes, tandis que ], représente l'intensité de la composante moyenne. Seu- lement, on à observé beaucoup de cas où, au con- traire, l'intensité des composantes extrêmes surpasse celle de la composante moyenne. Ici M. Zeeman fixe l'attention sur une catégorie de cas où cette contradic- tion apparente s'expliquelen tenant compte d’une cir- constance, ignorée jusqu'à présent sous ce rapport: l'action polarisante!des réseaux de Rowland, qui varie avec la direction des vibrations par rapport aux canne- lures du réseau. 11 expérimente sur la raie 5769,4 du mercure; une planche en donne des reproductions agrandies trente fois. Le résultat est conforme à la loi de Lorentz, si une plaque de quartz tournant le plan de polarisation de 45° se trouve avant la*fente, ete. — M. P. van Romburgh : Le Jupéol. — M. S.'Hoogewerff présente au nom de M. R. A. Weerman : Action de celle de digérer de l'albumine et celle de coaguler le lait, sont attribuées souvent à la présence de deux enzymes différentes : la pepsine et la chymosine. Cette opinion se base sur des expériences faites par Ham- marsten. Cependant, dans les derniers temps, on à élevé des doutes sur ce point : en 190%, Pawlow et Parastschuk ont publié une étude où ils démontrent que la pepsine et la chymosine ne forment qu'une même substance ; au contraire, Bang et Schmidt- Nielsen ont défendu le point de vue de Hammarsten. Dans sa thèse, M. Gewin explique quelques contradic- tions apparentes remarquées par M. Bang dans l'étude de M. Pawlow; c'est ce que fait ressortir M. Pekelharing. — M. C. Winkler présente au nom de M. G.van Ryn- berk : Sur l'asservissement segmental de la peau par les nerfs du système sympathique chez les Vertébres, déduit d'expériences sur lasservissement des cellules de pigment par les nerfs chez les soles et celui des muscles moteurs des poils chez les chats. P. H. SCHOUTE. Enrarun : page 947 de ce tome, deuxième colonne, dans le compte rendu précédent : A échanger “ T Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. + Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES CONTENUES DANS LE TOME XVII DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES (DU 15 JANVIER AU 30 DÉCEMBRE 1907) I. — CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Astronomie et Géodésie. J. J. Lanorrer. — Le passage de Mercure sur le Soleil du 44 novembre 1907 . . . . . . . . . . - Détermination spectrographique des éléments de orbite terrestre RSS Me dre CO DA SINIUS = - e- 23 Re OC PEN ER EE Mesures sur les satellites des planètes. . Castor, étoile quadruple. . . Action d'une masse intra-mercurielle sur la longilude de la Lune. . faibles NRRTE La distance des étoiles fixes . . . . : - : - Les taches solaires et le magnétisme terrestre . . . Mouvement accéléré de la tache rouge de Jupiter . Sur un cas asymptotique du problème des trois corps. . CROLE HetcraleremLInné en. + «à - ie code CL Détermination des dimensions absolues des étoiles MT CAD le Se en Nu ie eee les he Les éléments de Vénus . . . . - - - - - - - Recherches sur les excentricités des comètes . La parallaxe de la 61° duCyYgne Crevasses lunaires et canaux de Mars . . Les albedos des planètes supérieures. . . . . . . - Découverte de l'étain dans [es atmosphères stellaires. Cadran solaire portatif . . . . . . . . . . . . + - : Les erreurs dans les mesures à l'estime . L'observation des surfaces planétaires. La variabilité des petites planètes. . . . Les détails de la surface de Jupiter . Botanique et Agronomie. Cuerert (Pierre). — La conservation deleau- "7" — La protection et l'aménagement de la montagne. — La production et la consommation du thé. . . FLenny (Ernest). — Tératologie végétale ; anomalies provoquées par quelques Urédinées 2 __ La variabilité des feuilles végétatives du Prunus SAONE ONE RC ORE OT ENOAEE SON L'influence des couleurs du spectre sur la sporulation des Saccharomyces RTE Applications de l'électricité à la culture . Chimie. Granenwrrz (A.). — Dispositifs industriels pour la fixation de l'azote . M LR Ne ee Lerurc (Emile). — La pasteurisation du vinaigre de VID Ramsay (W.). Dee REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. 220 264 651 179 180 Une chlorophylle animale. . . . . . . . . . . . Les actions électrolytiques dans le ciment armé. Un nouveau procédé d'extraction du fer. MES Un nouveau procédé de conservation des bois. . . . La Chimie à la Réunion annuelle de la Société helvé- tique des Sciences naturelles, à Fribourg (Suisse). Sur la synthèse de l'anhydride nitreux Distinctions et solennités scientifiques. Election de M. H. Douvillé à l'Académie des Sciences. Election de M. H: Le Chatelier à l'Académie des Sciences to ER -e Le Cinquantenaire de la Société Chimique de France. Les médailles de la Société Royale ile Londres . . . Elections à la Société Royale des Sciences d'Upsal. . Electricité industrielle. GravexwrrZ (Alfred). — Une station géante de télécra- phie/sansifile he CCE - — Expériences de téléphonie sans fil. . . . . . - . L'emploi des électro-aimants à la manutention des léces de feLe same er ono- Ne La traction électrique sur les chemins de fer. Emploi de conducteurs électriques en sodium . . . . Dispersion du brouillar | et des fumées par l'électricité. Un AouNel appareil pour l’étule des courants alterna- Nouvelle ligne électrique en ltalie . à bee 0 Les tramways électriques à trolley sans rails en Allemagne . Chemins de fer à d'eau. SAONE RES ST DRE La Jampe à arc à oxydes métalliques . Les automobiles électriques en Amérique .. Emploi de l'arc électrique pour couper l'acier . Emplois nouveaux du tantale. . . . . . . . Un nouveau système de téléphonie sans fil . . . . . Analyse des pertes éprouvées dans la conversion de l'énergie calorique du charbon en électricité . . . Les progrès du chauffage électrique aux Etats-Unis. . La télégraphie sans fil sur les navires de commerce. La corrosion électrolytique dans les canalisations sou- terraines. POP PR ORRUR COE DT DLNRÉ - © ROUE. VAT Enseignement, Universités et Sociétés. Tassinzy (E.). — Le 25° anniversaire de la fondation de l'Ecole de Physique et de Chimie industrielles detanille de PArTIS NC TE CN CE Projet de monument à Lamarck. ." L'Enseignement à la Guyane française. . . . . . . . Personnel universitaire. . 134, 222, 391, 570, 696, 137, Conservatoire des Arts et Métiers . . . . . . . . . . Bourses des Curie. . . . . . . . Cours de la Sorbonne. ue L'Institut Océanographique . . Le Muséum de la Réunion . . 1034 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES L'Enseignement scientifique dans les Lycées. . . . . 222 | Douxamt (H.). — Le Musée houiller de l'Université de Le Conseil de l'Université de Paris . - . . . 1-0 200 | CR PRET - Le prix Saintour au Collège de France. . . . . . . . 266 | Freurv (Ernest). — L'origine des phosphates de chaux Laboratoire uaritime de Wimereux. . . . . . . 266 naturels: : #19 0028. ER Universitéide Lausanne "Ce 07 266 ; Wyrougorr (G.). — A propos des bases de la Cristal- BureautdesLongitudes RE EU ne ce - 266 lographie 4% 4 CRE TO NEC Le Budget de l'Instruction publique de 1907. . . . . 305 | Forages artésiens en Algérie. . . . . . . . . . . .. L'Université de Par APR NON RE | LMI ÉeS forages artésiens dans le sud de l'Algérie . . . . L'échange international des professeurs. . «01306 |MRadium et géologie. "UV CCR EE Congrès international pour les études solaires. . . . 341 Apropos'des réformes}du PIG-IN Es 390 2 2 Un legs de quatre millions à l'Université de Paris. . 39 Mathématiques. Association deSaNAlOMISTES EE Le 391 L'entomologiste Latreille . . . . . . Lt. SIN PRECEeNIEs cpplicebons de la théorie des équations L'enseignement médical des hôpitaux . Re 434 intéprales- 120 na le ere ic oe CRPEREE Le concours de l'Ecole Normale Supérieure et des bourSeS\dellicence CERN 43% LE ; Association italienne pour l'avancement des Sciences. 434 Météorologie et Physique du Globe. La Revue de l'Enseignement des Sciences. . . . . . 482 Les Laboratoires scientifiques du Mont-Rose. . . 482 | Grapenwirz (A.). — L'Observatoire aéronautique de Es Britiéb)ScrenceNGUTIAe EME ON ON 482 Lindénberg.2Æft 7... 2 VON La Station de recherches de Meudon . . . . .. 570 — . ondes électriques au service de la Météorolo- Les nouveaux agrégés des Sciences anatomiques et. |! gietie 2200 D 'OTCNENNNRRS physiologiques dans les Facultés de Médecine . . 510 Radio- activité de la pluie RC te | - Les Amis de l’Université de Paris . . . . . . . . . . 613 | Verres colorés pour l'observation des nuages . . . . Les grandes bourses de voyage de l'Université de Une « grotte soufflante » au Puy- de-Dôme . . . .. RETIRE RC Ne ee Me le Me eee ae à + _ 696 | Projet d'organisation d'un réseau météorologique BrOJeLiUMYerStÉ RAA PR 737 mondial" "25 . 2e. OR EUR 4 Fe. Ecole de Médecine de Marseille. . . . . . . . . .. 711 Un Congrès d'étudiants à Bordeaux . . . . . . . .. 816 ë À L'Institut électrotechnique de l'Université de Grenoble. 859 Nécrologie. Au Congrès des médecins praticiens. . . . . . . . . 859 Le nouveau doyen de la Faculté de Médecine de Paris. 953 | Baxnuyzen (H. G. van de Sande). — H. W. Bakhuis La bibliothèque Carnegie à Edimbourg. . . . . . . . 953 RoûZeDOOM..4. FM .-tiee NICE Une Ecole de Papeterie à l'Université de Grenoble. . 994 GENTZ (A) = H=Moissan NN NN Une Ecole mondiale à Bruxelles. . . . . . . . . . . 994 | Hauy (Maurice). —-Maurice Lœwy. . . . . . . . . . Besétudiants en Allemaone. NS UN < 994 | Moreux (Abbé Th. À -- Miss Agua Mary Clerke . . . ; D'OcaGxe (M.). — Le colonel Laussedat. . .-. . . . . ERP PE REGELSPERGER (G.). — Le prof. Angelo Heïlprin. Génie civil. RÉvEILLE (J.). — Le colonel Mannheim. . . . . - .. AUDOUIN (E. ia: La Loire navigable. Essais du sys- ee —— Maicel Berre Re ESS téDEPRAULOUNI SERRE TENNIS il ER ES NA EE Pole Tésel 2 PROCESS GRADENwITZ (A.). — Les ballons captifs dans l'armée AURA Ps Bosnie TRS PR EE ET old 50 É SANT PET PEN CODES IR - 15 SÉNPENS Les récents progrès des moteurs à gaz et gazogènes. 130 SR LE : Le ne “2, DIV Les accidents. d'appareils à vapeur. . . . . . . . .. 2622) Men: Mo se TR RIRE La protection des théâtres contre l'incendie . . . . . 343 Edouard Hospital 1 ON RIRE Le mouvement de la navigation dans les ports francais VErdaltn 1e as JOE +. 212.120 ie NN ÉRPLODR NE CNE Mn EURE RENTE 881 | DUT Mesdsledie rs ou. 0 SE RTE SRE Lesmoteurs des souS Marins AE EL CU ON 430 A eur EE DATI ASE D 0 © ©: Les roulements à billes sur les voitures de chemins A FÉDN AR SER ESE RE CNRC AMEN 478 Physique. Le tonnage des cuirassés modernes . . . . . . . 225 : Les incendies à bord des navires. . . . . ....... . 566 ; : Le sauvetage des navires par l'air comprimé. 609 | Bou TR Sr La reproduction des couleurs par Le Concours chronométrique de Besancon. (50 DR PRE ércn e FT R EEPONDROERRNRE Re © = E Les turbines à vapeur de l'usine Moabit à Berlin. 694% CHANGE ee bee Re See électro Les PernierE perfectionnements de la torpille automo- " magnétiques, des écritures, dessins et photogra- PART a OT LT ON TE LA RES EE R S C CE La question des fumées à Paris . . . . . nE 905 ns \ ? < , La régénération de l'air dans les sous- marius . 990 ROUES BE AE EEE RTE gore Le eme international des industries fri- gos | Herr (E.). — Les appareils de démonstration pour MURS Ve me RS D ANT Fhér 4 fa les expériences de pression atmosphérique. La photosraphie adistance NRC Géographie et Colonisation. L'action ses oscillations électriques sur les corps aimantés”, 20% 1e NN ENENRRE É CrerGer (Pierre). — La transformation de l'Océanie . 6 | Un photomètre au sélénium. . . . . . . . - . . . = — La production et la consommation du cacao. . . 533 | Recherches bolométriques sur l'énergie des rayons X. — La question d'Abyssinie et le chemin de fer de Dji- Sur la conductibilité du cohéreur due à une action DOULL. LEP En SE PONS VAN NE LV 952 mécanique . . . . . . . + . . . + + . . . . - ile télégraphe trans-saharien . . . . . 993 | Un dispositif pour mesurer l'intensité des rayons X. REGELSPERGER (Gustave). — L'exploration du massif Un nouvel appareil de démonstration pour les expé- duxRouvenzori\ee. EN AU: HORS 122 riences de pression atmosphérique + . . . . . . — Les expéditions arctiques de Peary et d'Amund- Tanger de médailles produites par les rayons X et du SON Relier ee 346 ROUNTMRERE © o SRE © Se LENS RE — Les récentes explorations de l'Himalaya. 568 | Phénomènes présentés par les feuilles d'aluminium — L'Expédition du Dr Stein dans l'Asie centrale. 816 dans les champs électrostatiques . . . . . . MCE — L'Exposition agricole de Palime (Togo). . . . .. 909 | La conductivité électrique et la force thermo-élec- Les pigeons voyageurs aux colonies. . . . . 6 trique des composés de métaux lourds. . . . . . A la Société de Géographie de Paris. . . . . FR: 390 | Une modification du marteau électromagnétique . . . La Revue du Monde musulman. . . . . . . . .. 434 | Un nouveau dispositif pour étudier les rayons Bec- quérel 2: 6 ARR IEEE A à Be . 1 Sur l'anomalie des images dans la vision à travers Géologie, Minéralogie et Paléontologie. une lente étroite UMR ER URL TE Un photomètre photo-électrique. -. . .. . . . . . . CLerGer (Pierre). — L'action comparée de l'érosion La quatrième Conférence internationale des Poids et torrentielle et de l'érosion glaciaire . . . . . . . 133 Mesures MER RENE EE 527 526 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 1035 Le fonctionnement des générateurs d'ondes électro- magnétiques, système Poulsen . . . . . . . . . 991 Zoologie et Anatomie. Sciences médicales et Physiologie. Fceury (E.). — Les fourmis de l'Himalaya. . 265 Influences déterminant la sexualité des œufs ‘chez le Bruwsrex (L. et F.). — Robert Koch et la maladie du Dinophilus +. EE ee SAONE AR TE NN EUR EL 952 | Mimétisme olfactif . . . 52 GRADENWITZ (Alfred). = Enregistrement ‘cinématogra- La place réelle des Mésozoaires Trichoplax et : Trep- phique, au moyen des rayons X, de la séDaon toplax . . . . . . . + + + : DO 389 ÉTNC CNROETR PUR AN APNTVE PES: 716 | Le verdissement des huitres de Mareones SE 696 Doigts en lorynette chez un nègre du Soudan . . . 5 | Les jardins zoologiques à l'étranger . . . . 736 Les dangers du chien d' abattoir. . . . . . : 53 | La restauration des momies. . . . . . 909 La genèse de l’anthracose pulmonaire. . Be 132 Action des rayons X sur les glandes génitales : 182 ; : La lutte contre la maladie du sommeil. 265 Sciences diverses. lnmaladie ducsommel nu C0. : 389 e LE 7 Examen entaptique de la circulation rétinienne . 481 | Ccerorr (Pierre). — Les bases psychologiques de la pu- Valeur alimentaire des poudres de viande . 482 bite RE 266 Les parathyroïdes de la tortue . . . ; 530 — Les bases scientifiques de la Sociologie : l'institut La perception des mouvements minimes . 651 SOIVay er -r- et--ieict +. 906 La survie des têtes de poissons . . . . . S15 — La prevision des crises économiques. . PRE) La rétraction du caillot sanguin et les hématoblastes. 858 — La situation économique de la France en 1906 . 614 L'usage de l’opium en Indo-Chine . . . . . . . . 859 | La Science à l'Exposition franco-anglaise de 1908 . 99% Sur la sécrétion sosnoné, Un - 993 | Une nouvelle revue : Les Documents du Progrès. 99% II. — ARTICLES ORIGINAUX A rit à BounGoix (Ct P.). — L'organisation de la maison colo- Astronomie, Géodésie, Physique du Globe. niale moderne. 1r° partie : Organisation générale. N60 : L — 2e partie : Préservation des atteintes des facteurs BourGEors (LtC1 R.). — L'état actuel de la Géodésie . 54 pathologiques propres aux pays tropicaux. . … 928 Joroan (Ch.). — La propagation des ondes sismiques. CHANTEMESSE (A.). — La sérothérapie de la fièvre ty- Are partie : Etude de la première phase . . . 531 __ phoïde. Opsonisation antityphoïde. . . . : . . 138 — 2e partir : Etude des s-conde et troisième phases. 511 | Conrremouuns (G.). — Les conditions d'exercice de la SAUSSURE (Léopold de). — L'Astronomie chinoise dans Radiographie appliquée au diagnostic médical . 1012 l'Antiquilé . ue... . . 435 | Desrosses (P.). — Les ions et la Thérapeutique. . 229 : GLover (Jules). — Les moyens de culture physique de la voix au Conservatoire national de Jens et Botanique et Agronomie. de Déclamation. . . MOTS Henra Re ATOn EE — Revue annuelle de Chirurgie. 194 CT = s : ENRIET (H.). — L'atmosphère des villes 4 183 oil rs La distribution de la flore dans la 961 — Les causes et le RAC de l’altération de l'air ë ei ven UN 007 finé. 493 Kayser (E.). — Les levures sélectionnées . . 821 copane FER $ : Lezonp (M.-A.). — L'état actuel de l'AG griculture à Ater So = La mortalité tuberculeuse “chez les RAS RE 6 nel es gens de couleur et les nègres aux *e PÉCHOUTRE (F.): — Revue annuelle de Botanique. 234 WanseLue (Dr E.). Pre Manecure Sie s lo mas 19 ZouLa (D.. — Revue annuelle d'Agronomie - . 319 | Trér, (Gaston. ‘— Santé publique et Paris de joe 267 — La salubrité générale des territoires habitables 721 Chimie. eg Desrosses (P.) — Les ions et la Thérapeutique. 229 PES neRentE Durorr (P.). — Revue annuelle de Chimie physique . 365 Henrier (H).— L'atmosphère des villes. 183 | LAmarcoDIE (G. de). — - L'enseignement (CORNE de , — Les causes et le mécanisme de l'altération de l'air l'Electricité en France et à l'Etranger . . . . . . 39% confiné. 483 l HozzarD (A.). — La théorie des ions et ses critiques. 72 À . : : KL (André). — La tantomérie.1re partie : Historique. Géographie et Golonisation. Caractérisation de la taulomérie. . . 283 — 9e partie : Classification. Causes et mécanisme de Auensaca (Bertrand). — Le: peuplement national en la tautomérisation. . 311 Algérie (1871-1906) . . 307 Mains (A.). — Revue annuelle de ( himie minérale. 159 | Cnarccev | (Joséph). — Les tribus de la llaute Birmanie Marrenon (Camille). — Marcelin Berthelot . 348 et la politique, CHnosrephiane es Administration Pécueux (Hector). — Coutribution à l'étude des alliages britaunique. . . - . . . 135 de l'aluminium. . 409 | DEnIKER (J.). — Les us, coutumes et superstitions ‘de Tirreneau (M.). — Les transpositions de structure en l'Inde méridionale 276 Chimie organique. 583 LEeBconn (M.-A.) — L'état actuel de l'Agriculture à TscniRcH A.) — Les bases d'une chimie physiologique Madagascar. . . 675 des sécrétions végétales. 150 | VazLaux (Camille). — ‘Le nomadisme et l'émigration Wancouuer (G.). — Les méthodes scientifiques ‘dans en Basse-Bretagne . D : 754 l'iudustrie du cidre. . ! 2 718 ; Wozre (J.). — Expériences sur l'amidon . 459 Géologie, Minéralogie et Paléontologie. Chirurgie, Médecine, Hygiène. Frroez (G.). — Les bases de la Cristallographie et les théories sur la structure des cristanx . 198 BLumenraaL (F.). — L'état actuel de nos connaissances Jorpax (Ch.). —.La propagation des ondes sismiques. sur les caractères et l'évolution des affections ire partie : Etude de la première phase. -…. 531 cancéreuses. . D co PT JOUE 995 — 2: partie : Etude des seconde et troisième phases. 511 1036 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES OrrRet (A.). — Le X° Congrès géologique international Cxox (E. de). — Le labyrinthe de l'oreille considéré deMEXICO Re ee CP 502 comme l'organe des sens mathématiques de l'es- Réviz (J.). — Revue annuelle de Géologie. . . . . . . 884 pace, du temps et du nombre. .» . .. : . . STEINMANN (G.). — Le Diluvium dans DRNIQue du Rocer (H.). — La sécrétion salivaire . . . . . . . . . SUR US Ce ME d'od GLOTOARE 626 u Ÿ Physique. Mathématiques. » Créteu (Victor). — Le problème de la gravitation . . OcaGxe (Maurice d). -- Les progrès récents de la Ganpiczor (Maurice. — Le débat sur la gamme. Les méthode nomographique des points alignés . . 392 conceptions de Pythagore et de Descartes . . . . PAINLEVÉ (P.). — Un traité de Géométrie inédit d'Ar- GuiLLaunE (Ch. Ed.). — lestétats del materet h chimède . . . . . . . . . . . - .. ess ee + A | Lamarcone (G. de). — Le régime futur de l'électricité PLayousr {Charles — Une page de l'Histoire des BParis 202 2 rdc .r 0) SNS L Mathématiques en France au xvit siècle . . . . . 550 =. L'enseignement technique de [Electricité on Renacu (Th.). — Un traité de Géométrie inédit d'Ar- France et à l'Etranger. . . . . . . . .. 11000 chimède . ......... Ds © ACNONOEONC 913, 954 — Les usines hydro-électriques en France . . . . . Sr (E.). — Re HÉLLTE de l’air et 3 - ni _ ‘extraction de l'oxygène de l'atmosphère . . . FRERE CS SET Q GTA Mes (Georges). — La Es Menton de certains phé- BourGoix (P.). — L'étude expérimentale des poudres nomènes affectés d'un signe. A propos des phéno- de : Lab : mènes de dichroïisme magnétique . . . . . . . . guerrerau-Laboratolre EN CNE 93 M G D t ralod : Gurzcet (L.). — Les méthodes modernes d'essais méca- ILHaUD (G.). — Descartes et la loi des sinus. . . . . niques des produits métallurgiques. 1re partie $ Essais à la traction et méthodes pouvant s’y sub- Zoologie et Anatomie NON orgue jo 1% RE ae OR IEE 615 É — 2e partie : Essais au choc par flexion et rupture. 66 , < : : Hosrecer (G.). — Les nan AO de l'Energé- CAULLERY (M). — Revue annuelle de Zoo EE HQE SEMESTRE 487 Jousi (L.). = L'ostréiculture dans le Morbihan . . . LamarcopIE (G. de). — Les usines hydro-électriques en HAGURSSE (E.). — Revue annuelle d'Anatomie. . . . . DOCS LUN RON IDR PAUL NE ME RUE 65% | Marixesco (G.). — Le mécanisme de la régénérescence — Le projet d'adduction à Paris des forces motrices nerveuse. re partie : Dégénérescence et régéné- : AUAREONE AN RUE ENS ER RUE 188 rescence des nerfs. = - « LS sust 0 CANCER 145 TurPaIx (A.). — De la presse à bras à la linotype et VE 22 pie : ne tanspaneNanenenen DA EE Li à l'électrotypographe. 1° Les presses à tpitesr sir | Mesxir (F.). — Revue annuelle de Zoologie . . . . . — 20 Les machines à composer. . . . . . . .. . 867 Revues annuelles. Nécrologie. CauLLERY (M.). — Revue annuelle de Zoologie . . . . S33 MATIGNON (Camille). — Marcelin Berthelot . . . 348 | Durorr (Paul). — Revue anvuelle de Chimie physique. 365 HakrManx (H.). — Revue annuelle de Chirurgie. + 194 ; k LAGUESSE (E.). — Revue annuelle d'Anatomie. NME Physiologie. Maine (A.). — Revue annuelle de Chimie minérale. . 159 MEsxiL (F.). — Revue annuelle de Zoologie. . . . . . 833 ALQuiEr (J.). — Les aliments de l'homme. {re partie : PÉCHOUTRE (F.). — Revue annuelle de Botanique . . . 234 Principes scientifiques des tables alimentaires . . 356 | Révir, (J.). — Revue annuelle de Géologie . . . . . . 898 — 2° partie : Applications pratiques . . . . . ; 406 | Zozra (D.). — Revue annuelle d'Agronomie. . . . . . 319 III. — BIBLIOGRAPHIE 1° SCIENCES MATHEMATIQUES LEATHEM (J.-C.). — Volume and surface integrals used In PDYSICS AS EN EEE ss 293 : : Lévy (Maurice). — La Statique graphique et ses appli- Mathématiques. cations Se constructions. 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Nicocas (E.). — Vingt leçons ‘pratiques sur les cou- Thermodynamique, Mécanique générale fente elteRoatifs 2 ts 6e le Me nent et Mécanique appliquée. NIEWENGLOWSKI (Paul). — “Précis d'Electricité. . . . - Pécueux (H.).— Mauipulations et mesures magnétiques : D . se ebrÉleCtLIQUES EE RC Pen} — Marine française et Marines étran- js | Rour (M. von). — Théorie des instruments d'Optique. ÉRURÈR RE ON EE RS ee MRC Ne CAR PS ; I. Formation des images dans les instruments BECHMANN. — Commission du ciment armé. Expé- : : D Ont: RER es apports et propositions. ThaLructione gopuque au point de vue de l'Optique géomé- ministérielles relatives à l'emploi du béton armé. 768 DES LERROASE CARE OC SR ne nr cer D qe BiorcixG (Philip R.).— British progress in pumps and SR LT EE NICE AE arr IREM EME pumping engines Loto ob ina ob CO MO ORS 249 : ON Are ren er ec Etee RÉ CAEN (Julien). — © Le contremaitre mécanicien. . . 418 | Ne AE Memoir and! scientific} corres SUES RO NES TE 10 MOIS Jo vue de 0 NOS 0 CE NNEne Es) DL rationnelle. Taomson (J.-J.). — ‘Conduction of electricity through v Q DERCS ER ce elec cer Ce CL A a its et renseignements “0 | Turraix (Albert). — Lecons élémentaires de Physique. usuels. Partie pratique de l'Aide-mémoire des in- W GENRE A.). — Lehrbuch der Experimental-Physik. CÉDIEUTSNEMANCIITECIES eee eee ce 899 RE ER ses ces RE SA : Copron (C.). — Expériences sur le travail des machines- Wiontz (Hi): Les obturateurs. Achat, essai, usage. GULISIPOUNUESNÉLAUX + Re 71 Coxsinène. — Commission du ciment armé. Expé- Chimie. riences, rapports et propositions. Instructions RE Le a Lempo du béton armé ATTE BALLAND GE — 1 aliments (chimie, analyse, exper- É SR ARBRE ECT EAU A 0 AMEN En ET tise, valeur alimentaire) . . . . . . . RÉ A ee Bentiaux (L.). — Metall Analyse auf electrochemischen HRIGRER (ME) = ARIVELASE NN 804 Rev Nr laut (1). — Méthodes ee de combustion 166 | Biscuor |Carl). — Les Eiles réfractaires: Béanens LowsarD (Joanny). — Le contremaître mécanicien . . 418 ie point de vue des Aou (es ue ls production etlutiiss 9,9 | BÜCKMANN (Fred.). — Le celluloïd; camphre, cellulose, I ne SRE RC ET RC nitrocellulose, celluloid:.. Cars oo Sr AIDE: Etude dynamique des voitures auto 168 | CAM60x (Victor). — Fabrication des colles animales . Raeur. — Commission du ciment armé. Expériences, Goux (He de RE , & et +. — Jonisation par barbotage . . Isomorpnisue. — Contribution à l'étude de l’Isomor- EE En ME BIO LC LOI CLSC MON NIONONE Isornenues. — Isothermes de gaz biatomiques et de leurs mélanges binaires. PA Ce J Janoins. — Les Jardins zoologiques à l'étranger . . Juritren. — Occultations et éclipses mutuelles des satellites de Jupiter en 1908. . . . — Mouvement accéléré de la tache rouge ‘de Jupiter. — Disparition apparente des quatre satellites de Jupiter. . : ARCS — Les détails de la surface de Jupiter 7 L Lagonarotre., — Laboratoire maritime de Wimereux. — Les Laburatoires scientifiques du Mont-Rose . Lagvrnrne. —- Le labyrinthe de l'oreille considéré comme l'organe des sens mathématiques de l'es- pace, du temps et du nombre : Lacs. — Les lacs alpins suisses. Etude chimique et physique . ; Larr. — bLa- fermentation lac tique dans le lait. — Le lait, la crème, le beurre et les fromages Be LAMPES A ARC. — La lampe à arc au mercure de M. Siedentopf. MS BAT — La lampe à are à oxydes métalliques : LEpre. — On leprosy and fish eating . . Levures. — Les levures sélectionnées . . . . Lieu. — Sur le lieu-des points de rebroussement d'un système linéaire triplement infini de cubiques planes à six points-de base. — Sur le lieu des couples de points communs de n + 1 faisceaux de variétés Vas 8 n — 1 dimensions dans l'espace Eh à n dimensions. . . — Sur le lieu des points du plan dont la somme des distances à n droites données est constante, et les problemes analogues daus les espaces à trois et à plusieurs dimensions. - Lioxe. — Nouvelle ligne électrique en Italie. . LiQUÉFACTION. — La Tiquéfaction industrielle de l'air et l'extraction de l'oxygène de l'atmosphère. Lor. — Descartes et la loi destins Ne | Loire. — La Loire navigable. Essais du système Audouin . Lumière — Rec berches sur l'intensité de la lumière réfléchie par les substances transparentes . Luxe. — Action d'une masse intra-mercurielle sur la longitude de la Lune . RE 650 251 s27 Luxe. — Crevasses lunaires et canaux de Mars . . . Lycées. — L'enseignement scientifique dans les lycées. Macnines-ourics. — Expériences sur le travail des machines-outils pour les métaux. Forage . . MADAGASCAR. L'état actuel de l'Agriculture à Madagascar ere MER ERA Macnénise. — Les ‘taches solaires et le magnétisme LES 0 dE NOR OPEL OCDE 2 EM Lite. LA GTS Maison. — L' organisation ‘de la maison coloniale mo- derne. {re partie : Organisation générale. . . — 2e partie: Préservation des atteintes des facteurs pathologiques propres aux pays tropicaux. . . Mazante. — La lutte contre la maladie du sommeil . — Les maladies vénériennes et la règlementation de la prostitution au point de vue dhygtengis sociale. — La maladie du sommeil — Robert Koch et la maladie du sommeil . Maxcue. — Les falaises de la Manche. . . . . MaxiPuLaTIONS. — Manipulations et mesures magné- tiques et électriques . . . . 2.7: Maxowèrre. — Manomètre de grande sensibilité . MARINE. — Marine francaise et marines étrangères. Mans. — Crevasses lunaires et canaux de Mars : MARTEAU. Une modification du marteau électro- MAPNÉtIQUE MN MN Ne Maruéwariques.— Les principes des Mathématiques, avec un appendice sur la philosophie des Mathé- matiques de Kant. . : . . — Une page de l’histoire des Mathématiques ‘en France au xvie siècle. . . = — Encyclopaedie der Elementar-Mathematik. T. III. Marière. — Les états de la matière. ; Mécanicrex. — Le contremaitre mécanicien. + Mépaicces. — Les médailles de la Société Royale ‘de Dondres MP RTE ACC MÉLANGES. — Contribution à la ‘théorie des mélanges DinaEs Eee Lee AE te 299, 524, S64, — La cristallisation spontanée des mélanges binaires. Expériences sur le salol etle bétol. Mercure. — Le passage de Mercure sur le Soleil du 14 novembre 1907 . . . . . Mésozoanes.— La place réelle des Mésozoaires Tricho- plax et Treploplax 2 MN EME Le MéraBoLisue. — Le rapport des reins avec le métabo- STE MAR Le ee Méraux. — Recherches : sur l'état trempé et l'état doux chez les métaux ductiles.. MéréoroLoGie.— Les ondes électriques au service ‘de la Météorologie. .1....1.1. — Projet d’ organisation d'un réseau météorologique mondial Mexique. — Le Mexique, Son évolution sociale. : — Le X° Congrès géologique international de Mexico. Mraoesmra. — La Miadesmia membranacea Bertrand, nouveau Lycopode paléozoïque . MiIcROMANOMÈTRE. — Un micromanomètre compensé Microscope. — Le microscope de mesure de M. Lüwe. Minérisue. — Mimétisme GMactife Minerais. — La séparation électromagnétique et élec- trostatique des minerais . . . . . . . . - . . . MiNÉRALOGIE. — Traité élémentaire de Minéralogie pratique DS Mirose. — Sur la mitose dans l' épithélium prolifér ant. Mouies. — La restauration des momies . . MonraGxe. — La protection et l'aménagement de la montagne . . sale MONUMENT. — Projet de monument à | Lamarck. ë Monraziré. — Relations entre la mortalité des enfants et les hautes températures . Morgurs. — Les récents DIÔgIes des moteurs à gaz et gazogènes . ARR RARES | 5 —_ Les moteurs des sous- “marins : . — Moteurs électriques à courant continu et alternatif. Thédrie et construction. "mu TN Mouvements. — La perception des mouvements mi- nimes ; Muscces. — L'innervation réciproque des muscles antagonistes . . MUsCOXE. — L'absorption de l'odeur de la ‘muscone sur les surfaces des. différentes substances. DS éEe. — Le Musée houiller de l'Université de Lille . J — Le Muséum .de la Réunion. Mu sique. — Les éléments de l'Esthétique musicale. MusuLuan. — La Revue du Monde musulman, 17 550 1022 1005 41S 1048 NaviGariox. — Le mouvement de la navigation dans les ports francais en 1905 Navires. — Balances et navires auto-amortis. . . . . — Les incendies à bord des navires. . . . . . . . . — Le sauvetage des navires par l'air comprimé. . . Nécrocoëre. — Le Colonel Mannheim Alexandre Herzen. . . . . . ; ErnestolCeSaro Re ER ee Marcel Bertrand | Ilenri Moissan ouis-Emiledaval PC EC - ae Marcel Bertrand et son œuvre géologique . . . . EdouardiHospitaler RER EME Mort de Marcelin Berthelot HMoissans #6 Ce ce H-W. Backhuis Roozeboom. . . . . . . . J:e ColonelhLaussedaf en 0. NarcelnSBertheloLE NE ll Mendéléet ne PR 0 Miss Agnes Mary Clerke. . . . . . Maurice Læwy — AngelolHe@Iprin ee CET SE Nerrs. — Structure des fibres nerveuses. . . . . . . — Le mécanisme de la régénérescence nerveuse. Âre patte : Dégénérescence et régénérescence des DOTIS Ie el ee CN CE TT — 2e partie : Les transplantations nerveuses . , . . — vins et le système nerveux. Hygiène et patho- ogie NEURASTHÉNIE. — Cure marine de la tuberculose pulmo- naire, de la neurasthénie, des suites du surme- noces dellanémie EL NN Tee NickeL-FER.— L'analyse thermomagnétique des alliages nickel-fer météoriques et artificiels . . . . . . . NitRiFicaATION. — Nitrification des eaux d'égouts . . . NomanisMe. — Le nomadisme et l’émigration en Basse- HREVAE ohoto 6 EE MO oc lp cg no D De 2 Nougre. — Psychologie du nombre et des opérations élémentaires de l'Arithmétique . . . . . . . . . — Introduction à la Théorie des nombres transcen- dants et des propriétés arithmétiques des fonc- CLOUS RE NoxoGrapuie. — Lex progrès récents de la méthode nomogra, :: Jue des points alignés. . . . . . . . Nores.— Notes et formules de l'Ingénieur et du Cons- fnucte ur imMÉCanICien EE CRE EE NuaGes. — Verres colorés pour l'observation des NUAGES 2 fe eue eee NE CNE NEC NuGLÉATION. — A continuous record of atmospheric PUCIEATION EEE EE EC CE — The nucleation of the uncontaminated atmo- NOMME Ne Tr ar os onde o 0 0 0 à 8 [0 OBsERVATOIRE. — L'Observatoire aéronautique de Lin- JenDer LE EC el CRC TE — Annales de l'Observatoire national d'Athènes. . . OgruraTeurs. — Les obturateurs. Achat, essai, usage. OcÉANIE. — La transformation de l'Océanie. . . . . . Opeurs. — Sur les affinités des odeurs. . . . . . . . OExoLocie. — Notice sur les instruments de précision appuqués a lOEnOloie re. ce Oxpes. — L'unité des longueurs d'ondes lumineuses. 3 — La pronAeGHOn des ondes sismiques. {re partie : Biudede lapremière phase CE — 2e partie : Étude des seconde et troisième phases. Les ondes électriques au service de la Météoro- lODAÉ E E NT e TRE me Or LR La transmission, au moyen des ondes électro- magnétiques, des écritures, dessins et photogra- PRIS A TS PORN REINE CLS ER Le fonctionnement des générateurs d'ondes élec- tromagnétiques, système Poulsea . . . . . . . OPHTALMOLOGIE. — Précis d'Ophtalmologie . . . . . . Oricu. — Mangeurs et fumeurs d'opium. . . . . . . — L'usage de l’opium en Indo-Chine . . . . . . PS OPsoxINES. — Sur les opsonines en relation avec les cellules rouges du sang. . . . . . UE — Sur les propriétés de combinaison de l’'opsonine d'UN SÉTUMAMIUNISANT. 0.1. he ice. OpTiQue. — Sur quelques instruments d'Optique d'un usage courant dans les Laboratoires. . . . . . . TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES 1 A 1 [°,2] 44,4 Oprique.— Théorie des instruments d'Optique. 1. For- mation des images dans les instruments d'Op- tique au point de vue de l'Optique géométrique. Or. — Sur l'or vert et l'or bleu . . . . . ROME - Tar dans letmonde CCE RER ET Onsrre. — Détermination spectrographique des élé- ments de l'orbite terrestre. ... .. … . . — Les orbites périodiques du type Hestia. . . . . . Oscizcareurs. — Emploi d'oscillateurs magnétiques (fermés) comme. radiateurs dans la télégraphie » sans: fil.4% 1-6 CENTRE CNE . Oscizcarions. — L'action des oscillations électriques sur les corps aimantés. . . . . sachet sNCCNCIERES —— Un moyen. d'obtenir des oscillations électriques continues avec l'arc Poulsen . . . . . . . #4 — Analyse des oscillations électriques au moyen de l'oscillographe à effluves ..""" " Osrrércucture. — L'Ostréiculture dans le Morbihan. . Ovarre..— Corrélation des fonctions ovarienne et uté- MINE et RP EE DOI TA ni e-c.c OxvGÈne. — La liquéfaction industrielle de l'air et l'extraction de l'oxygène de l'atmosphère. . . . . P Pazwiers. — Recherches anatomiques et chimiques sur la germivation des Palmiers. . . . . . . . . . . Pacunisue. — Traité du Paludisme. . . . . . . . . . Parererie. — Une Ecole de Papeterie à l'Université de Grenoble M RENE Sr 0 ParaLLaxe. — La parallaxe de la 61° du Cygne. . . Pararayroïnes. — Les parathyroïdes de la tortue. . . Paris. — Santé publique et Paris de demain. . . . . — Le projet d'adduction des forces motrices du Rhône à Paris PasreurISATION. — La pasteurisation du vinaigre de A A de = - : - c Pécue. — Sur les conditions de la pêche en Algérie. . Persixe. — La relation entre la pepsine et la chymo- Siné. c- cs PesanTEeur. — Bestimmung der absoluten Grôsse der Schwerkraft zu Potsdam. . . . . . . + + - . PeupemenT. — Le peuplement national en Algérie (1871-1906) Puacocyrose. — Recherche expérimentale sur la na!ure des substances du sérum qui influencent la pha- gocytose : — Action inhibitrice pour une phagocytose subsè- quente, produite sur un sérum acli: normal par un sérum inactif normal à travers lequel on a fait passer des bacilles — La phagocytose. . . . . Jake er IEEE PAANÉROGAMES. — La symétrie longitudinale chez les Phanérogames Paénomèxe. — Mesures du phénomène de Zeeman sur les raies bleues du zinc — La classification de certains phénomènes affectés d'un signe, à propos des phénomènes de di- chroïisme magnétique. . . . . SE PuospnaTes DE caaux. — L'origine des phosphates de chaux naturels RC se telle PuorocRapmie, — La photographie à distance. . . . . — La théorie des processus photographiques. II. L'image latente et sa destruction . . . . . . . . — ‘lraité pratique de Photographie stéréoscopique . — La reproduction des couleurs par la photographie Paoromèrre. — Un photomètre au sélénium . . . . . — Un photomètre photo-électrique. . . . . - - - Æ Paysique. — Volume and Surface Integrals used in PhySICS RER CEA ele LS SERRE — La Théorie physique, son objet, sa structure. . . — Lecons élémentaires de Physique . - . . . . . - — Troisième supplément au Cours de Physique de l'Ecole Polytechnique. . . . . . - : + + - Dee — Quelques. dispositifs utilisés au Laboratoire de Physique de la Sorbonne . . . . . - . + + + + — Lehrbuch der Experimeutal-Physik . . . . . . . Picroxs. — Les pigeons voyageurs aux Colonies Pcawères. — Mesures sur les satellites des planètes — La figure des planètes. . . . . . . + - - + « - + — Les albedos des planètes supérieures. . . . . + - — La variabilité des petites planètes . . . . . . "Ce PLarre. — Nature des changements qui se produisent dans la fabrication et la prise du plâtre de Paris. PLure. — Radio-activité de la pluie . . . . . . . + . Porps. — La Table internationale des poids atomiques pour 4907. 20. NEO NE E CNRS + à REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1907. C2] 1] ] , TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES Porssoxs. — Contribution à l'étude des poissons fos- Reis. — Le rapport des reins avec le métabolisme siles du nord de la France et des régions voi- Résines. — La distillation des résines et les produits SIDESS Er - PA PO D To 375 qui en dérivent. __ La survie des têtes de poissons © . 815 | RÉSISTANCE. — Influence exercée sur la résistance du Poures. — British Progress in pos and pumping bismuth et du nickel par la DEEE et une engines . Un: è 5 te 249 aimantation transversale . . . .:. . Porrs. — Ports maritimes. re 1022 | Résonance. — Sur les phénomènes de résonance dans Porenrie. — Sur les égaliseurs de potentiel . she 215 le cas des transformateurs à circuit magnétique Poupres. — L'étude expérimentale des poudres. de ouvert et leur utilité pour la production de fortes guerre au Laboratoire. . . 53 étincelles . Préarpes. — Les Préalpes maritimes. 11. Paléonto- RESPIRATION. — Enregistrement cinématographique, logie. Stratigraphie . . ste 419 au moyen des rayons X, de la respiration PRESSION. — Influence de l'augmentation de pression humaine : barométrique sur l'homme : 216 | RÉTINE. — Examen ‘entoptique de la circulation réti- — Un nouvel appareil de démonstration pour les nienne . AU expériences de pression atmosphérique . . . 262 | Réunion. — Le Muséum de la Réunion. . . — Les appareils de démonstration pour les expé- Revre. — Revue annuelle de Chimie minérale. riences de pression atmosphérique 345 — Revue annuelle de Botanique . Prisue. — Un mécanisme pour maintenie un tr. in de — Revue annuelle d'Agronomie . prismes rigoureusement au minimum de déviation. 603 — Revue annuelle de Chimie physique. Prix. — Le Prix Saintour au Collège de France . 266 — La Aevue du Monde musulman . . Proresseurs. — L'échange international de profes- — La Revue de l'Enseignement des Se iences . seurs . A ur Ne 2e Tee SUD —— Revue annuelle de Chirurgie. ProsecriLe. — Formule indiquant l'espace parcouru — Revue anuuelle de Zoologie . dans un temps donné par un projeclile se mou- — Revue annuelle de Géologie. vant dans l'air . . . Dei 605 — Revue annuelle d'Anatomie . Prosrrruriox. — L'évolution de la prostitution . 296 — Une nouvelle Revue : Les Doc uments du progrè se — Les maladies vénériennes et la réglementation de Ru£oGrapne. — . Rhéographe à induction Abraham- la prostitution au point de vue d' hygiène sociale. 296 Carpentier; modèle de projections. Pnorérnes. — La chimie des protéines et leurs rela- Ruôxe. — Le projet d'adduction à Paris des forces tions avec la Biologie. . . 562 motrices du Rhône . . Pugcicrré. — Les bases psy chologiques ‘de la publicité. 266 | Riverace. — Rivetage. . PyroxÈnes. — Die Enstalitaugite. Recherches sur les RouLEM« — Les roulements à billes sur les voi- pyroxènes monocliuiques à petit angle des axes tures de chemins de fer. . . . optiques et pauvres en chaux . 1e 640 | ROCvENzouI. — FAUNE NE du massif du Rou- venzori . : Russe. — Manuel pour l'étude de la langue russe. R Rapro-acriviré. — Recherches récentes sur la trans- S formation des corps radio-aclifs . 255 — Radio-activité de la pluie. . . 430 | SABLE. — Expériences sur la formation des ondula- RapioGrapnie. — Les conditions d'exercice de la tions, de sable sur le bord de la mer. Radiographie appliqué: au diagnostic médical. .4O4% | Saccuanouyces. — L'influeuce des couleurs du spectre RapiomèrRE. — Sur l'emploi du radiomètre pour l'ob- sur la sporulation des Saccharomyces . servation des basses pressions dans les gaz. . . . 131 | Sauara — Le télégraphe trans-s saharien. 4e Ravro-Pvromèrre. — Radio-pyromètre à dilatation . . 426 | Samnr-Pauz. — Comnission géographique et géolo- Rapruw. — Effet de la température sur l'activité du gique de l'Etat de Saint-Paul. Exploration des radium et ses produits de transformation : 126 riviéres Feio et Aguapehy.. Exploraëiüfi te ln — Quantités relatives d'ionisation produites par les rivière Tieté. CE: AUPLERIONE particules « du radium © dans les différents gaz SALIVAIRE. — La sécrétion salivaire . . - et vapeurs. . . : : : 251 | Sacusriré. — La salubrité générale des territoires — Radium et géologie . ete 992 habitables - Raxoxs. — Recherches bolométriques ‘sur l'énergie SANTÉ. — Santé publique ‘et Paris de demain . Ë des rayons X . . 2.0 91 Sarecires — Occultations et éclipses mutuelles des Action des rayons °X sur les glandes génitales ne L182 satellites de Jupiter en 1908. —, Un dispositif pour mesurer l'intensité des rayons X. 219 — Mesures sur les satellites des planètes : - — Un nouvel emploi des rayons Roentgen . . . 299 — Disparition épparente des quatre satellites de Ju- — Images de médailles produites par les rayons X piter: et du radium . . . 304 | SAvONS. — Etudes sur la constitution ‘des savons du — Une hypothèse sur l'origine ‘des rayons Rôntgen. 383 commerce PCT rer — Nouveau procédé de réglage des tubes à rayons X. 413 | SCIENCES. — Sciences naturelles (Anatomie et Phy- — Rayons secondaires cathodiques des rayons & . . 646 siologie animales et végétales. Paléontologie, — Un nouveau DApOeLE pour étudier les rayons Hygiène) 2: Becquerel. . 650 — La « Bristish Science Guilde ». — Recherches sur ‘la vitessse des particules” catho- Scrertes. — Les scieries et les machines à bois diques émises par divers métaux sous l'influence Sécrérion. — La sécrétion salivaire ë des rayons Roentgen . 131 _— Les bases d’une chimie physiologique ‘des sécré- — Enregistrement cinématographique, au moyen des tions végétales. . . rayons X, de la respiration humaine 7176 — La pression de la sécrétion biliaire et le mécanisme Rayons-canaAL. — Effets mécaniques des rayons- “canal. 689 de l'absorption de la bile dans l'obstruction du Ravonxemenr, — Sur la marche annuelle de l'intensité conduit biliaire. - BD roi du rayonnement solaire à Varsovie, et sur la _ su la sécrétion gastrique. ; théorie des appareils employés . . .. 168 | SéLéniuu. — Un photomètre au Sélénium . . Réronnes. — A propos des réformes du P. €. 390 Dr — Réactions GRioiqueS entre les sels à l'état REÉYRACTION. La réfraction astronomique es solide , . une distribution atmosphérique de la température SENs. — Le labyrinthe de l'oreille considéré comine déduite à l’aide d'ascensions en ballon. . . UNS l'organe des sens mathématiques de l’espace, du — Surla dispersion ‘lela double réfr actionartificielle. 474 temps etdu nombre. à — Nouvelle méthode pour mesurer directement la SÉROTHRRAPIE. — La sérothérapie ‘de la fièvre typhoïde. double réfraction dans le verre soumis à une Opsonisation antityphoïde. tension. ... 131 | Séru. — Augmentation de la teneur en ‘complément — La dispersion ‘de la double réfraction et ses rap- du sérum sanguin frais . SRE REP d orts avec la structure cristalline . . . . + 904 — Sérum gastrotoxique ans NÉRESCENCE. — Le mécanisme de la régénéres- SEXUALITÉ. — Influences déterminant la sexualité des cence nerveuse. {'e partie Dégénérescence et œufs chez le Dinophilus. . . régénérescence des nerfs ; 443% | Sruice. — Sur l'action de l'hydrogë ne sur Le silicium — 2e partie : Les transplantations nerveuses . 190 et la silice 1050 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES SIRIUS — SINUS ES À ne RE URL 50 | Tanrare. Des points de fusion du tantale et du tung- SociÈTÉ. — A la Société de Géographie de Paris . . . 390 stone ns Le Ce PT EN EIRE RS EEE 2 560 — Le cinquantenaire de la Société chimique de — Emplois nouveaux du tantale. . . . . 136 FTANCO EMEA US Le UNSS nee 417 | TauroméRIE. — La tautomérie. {re partie : Historique, — Ja Chimie à la Réunion annuelle de la Société hel- caractérisation de la tautomérie. . . . . . . .. 283 vétique des Sciences naturelles à Fribourg(Suisse). 695 — 2° partie : Classification, causes et mécanisme de SocioLoGiE. — Les bases scientifiques de la Sociologie : Ja automériISalion EE PEER 311 l'Institut Solvay. - LOMME ET 306 | TécéGrapaie. — Une station géante de télégraphie sans — Esquisse d’une Sociologie. Instituts Solvay. Tra-. |" D ME CRI EN REERRS 3 vaux de l'Institut de Sociologie. Notes et mémoires. 598 — Vitesse de fonctionnement des appareils Érees — Sociologia giuridica. … - 51... 1. 983 phiquestrapides CE PE 381 SODIUM. — Emploide conducteurs électri iques en sodium. 388 — La télégraphie sans fil sur les navires de com- SoeiL. — Recherches sur la température effective du Mer Ce" is ER EP ENT LENS 951 SOLEIL LR TR ARE fo CN OR NE ARS | 173 — Le télégraphe trans-saharien . . . 993 — Mouvement du Soleil relativement aux étoiles les TÉLÉPHONIE. — Expériences de téléphonie sans fil . . 131 plus faibles MEPMCR PARERENEREERA A EUEE 149 — Rendement acoustique du téléphone et la sensi- — Effets magnétiques de UC totale du Soleil bilité/absolue del'oreille Re EE er. AZ AUS TAOULAIOSURE EE" NE ROMANE Ne 366 — Un nouveau système de téléphonie sans fil. ASE — Congrès international pour les études solaires. 347 | TeupéraTurEe. — Recherches sur la température effec- — Essai d'une explication du mécanisme de la pério- tive du Soleil. "ES NENORERRE 173 dicité dans le Soleil et les étoiles rouges variables. 524 — La mesure de températures très basses . . . 176 SOLUTION. — Equation exacte reliant la pression osmo- TÉRATOLOGIE. — Tératologie végétale : anomalies pro- tique et la tension de vapeur d'une solution. 689 voquées par quelques Urédinées. .. * JMS + SOMMEIL, — La maladie du sommeil. + 265, 389 | Terrains. — Terrains polygonaux des contrées po- — Robert Koch et la maladie dun sommeil , . , . 952 lairéss. tee SRE PE #12 SORBONNE. — Cours de la Sorbonne . . . . . . . 134 | Tran. — Luterre arable OC ON ONE 728 Sources. — Sur l'origine des gaz dégagés par les Tertiaire. — Structure et origine des grès du Tertiaire SOBCCESMMINÉTO ES NES Ce 731 parisien. Etude des gites minéraux de la France. 321 Sous-warins. — Les moteurs des sous-marins. . : : : 430 | Taazcium. — Les relations du thallium avec les métaux — La régénération de l'air dans les sous-marins . . 990 alcalins. ete ET ENS EEE 647 SPECTRE. — Origine des rayons continus observés Taé. — La production et la consommation du thé. . 775 dans le spectre d'étincelle des métalloïdes et de TaéaTRes. — La protection des théâtres contre l'in- quelquesimétaux Lu UN. 45 CERTES PEER EE 343 — Sur une nouvelle formule spectrale empirique. 8S | TuéorrE. — Zahlentheorie (Versuch einer Gesamtdars- — Recherches sur quelques spectres métalliques tellung dieser Wissenschaft in ihren Hauptteilen). DIÉTASTOULÉS EM EEE EN PER LA 127 Allgemeine Arithmetik der Zahlenkôrper. 166 — Sur le spectre des étoiles nouvelles : : : : ! . 303 — Théorie des fonctions analytiques uniformes. 166 — Longueurs d'onde des maxima d'émission et — Récentes applications de la Théorie des équa- d' absorption dans le spectre ultra-rouge trouvées tionsuintécrales MM NE 303 antérieurement . . HU Ado Ce ic 383 | TuérareuriQue. — Les ions et la Thérapeutique. ... 229 — Sur les spectres de l'hydrogène. : 465 | Taorranire. — Composition de la thorianite et radio- — Sur la thermo-chimie des spectres de flammes à activité relative de ses constituants. . . . . . . 45 des températures élevées. . + + 518 | Topocrapnie. — Topographie pratique de reconnais- — L'effet de la pression sur le “spectre de l'arc. 904 sance et d exploration, suivie de notions élémen- — Les intensités des composantes des raies spectrales taires pratiques de Géodésie et d'Astronomie de décomposées par le magnétisme. . . . . . . . 1032 campagne ed in à: à 899 SPECTROGRAPHE, — Un spectrographe de MM. Pulfrich Toneize. — Les derniers perfectionnements de la tor- et Lüwe pour les radiations visibles et ultra- pile automobile PER ER 733 violettes 53 E 336 | Tonricous. — Traité des torticolis spasmodiques SOC SPECTROPHOTOMÈTRE. — Spectrophotomètre pour ‘l'étude TorTuE. — Les parathyroïdes de la tortue . . . . . . 530 des gaz incandescents. . . . . . . . 646 | Tracriox. — La traction électrique sur les chemins SPONGICULTURE. — Etudes de physiologie appliquée à de fer /. 2/5 2 ele) EEE Le AU LES OR 263 la spongiculture sur les côtes de Tunisie. . . 1024 | Tramways. — Les tramw. ays ‘électriques à trolley sans STABILITÉ. — La stabilité gravitationnelle de la Terre. 519 rails ten Allemagne PEN RP RE 527 Srariox. — La Station de recherches de Meudon . . . 510 | TransronmaTEUR, — Transformateur électrolytique des — Anvales de la Station aquicole de Boulogne-sur- courants alternatifs en courants redressés ondu- Mer (Pêches et Biologie marine). . . . . . . . . 807 lafoires- + 173 STATIQUE. — La Statique “graphique etses applications — Les diagrammes indicateurs des transformateurs. 57 aux constructions. Tome 1er : Principes et oi — Sur les phénomènes de résonance dans le cas cations dé Statique graphique pure . . . 726 des transformateurs à circuit magnétique ouvert STÉRÉOCHIMIE. — Stereochemistry. . . . . . . . . . . 1023 et leur utilité pour la production de fortes étin- STÉRÉOSCOPIE. — Sur la stéréoscopie avec de longues celles. 381 HRnes deb EE ER UN 414 | Transronmisue. — Le transformisme appliqué ar Agri- SroyAÎxE. — L’anesthésie chirurgicale parla stovaine. 597 culture . 167 SUCRERIE. — L'analyse chimique en sucrerie et raffi- TRANSPIRATION. — Recherches sur le courant de trans- nerie de cannes et de betteraves. . . . . . S05 piration dans les plantes . . . . . 174 SURCHAUFFE. — La surchauffe SPPIQUSS à la machine TRraNsPosITIONs. — Les UE de structure en d'YApeUE eau PRE 293 Chimie lors aniqUeE PR EE NEC 583 Surrace. — Contribution à la connaissance de la sur- TRIGONOMÉTRIE. — Principes et formules de Trigono- face Y de van der Waals. XIIL. Un gaz qui coule au métrie rectiligne et sphérique. . . . . . . . 293 foud d'un liquide À UV NE EN: 88 TRYPANOSOMA. — Existence d'une enkystation du Try — Une remarque sur la théorie de la surface Ÿ des panosoma Grayi dans l'intestin postérieur de la MÉIENPESIDINAITES EE RE EU 127 GIossina\ Papa NE CE OR EE 46 — Contribution à la connaissance de la surface y de TRyPANOSOMIASE. — Le traitement expérimental de la van -der (Waals-# Mu 128, 175, 176, 300, 383 trypanosomiase chez les rats . . . . . . . . . . 904 — L'observation des surfaces planétaires. . . . . . 905 | Tuse. — Formation des bulles gazeuses dans les parois SURVIE. — La survie des têtes de poissons. . . . . . 815 des tubes à décharge chauffés. . . . . . . . . s12 SYNTONIE. — Réalisation de la syntonie par l'emploi Tusencozeux. — La mortalité tubereuleuse chez les des détecteurs bolométriques . . . . . . . . . . 172 blancs, les gens de couleur et les nègres aux SypriLis. — Syphilis du pouon chez l'enfant et chez Antilles: 20:10 410 PATENT RES es. LT aQuICe Un CSN INRP EE CEE 468 — Hygiène alimentaire du tuberculeux. : . : : : - 683 TUBERCULOSE PULMONAIRE. — Cure marine de la tuber- culose pulmonaire, de la neurasthénie, des suites T du surmenage, de l’anémie, ete. . . . . 641 TUuMEURS. — Technique du traitement des tumeurs Tacues. — Les taches solaires et le magnétisme ter- pianbhes us TRE NOIRE RER 41 PERDUE ENTREE TEE PSE CRE 219 | TunGsTÈNE. — Des points de fusion du tantale et du < — Mouvement accéléré de la tache rouge de Jupiter. 219 tungstène. UMR TEE CINE SE TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES Tunis. — Etude sur le climat de la Tunisie. , . . . — La Tunisie et l'œuvre du Protectorat francais. . . — Etudes de physiologie appliquée à la spongiculture SUnNES COTES TeNDUNISIE EE Te - - rne TURBINES. — Les turbines à vapeur . . . . . . . . . — Les turbines à vapeur dans les usines électriques. — Les turbines à vapeur de l'usine Moabit à Berlin. Turquie. — La Turquie économique. (Développement et mise en valeur des ressources de l'Empire ottoman). U UcrramicroscOPEs. — Les ultramicroscopes et les agents HHACROSCODIQUES EEE TE Université. — Le Conseil de l'Université de Paris . . — Université de Lausanne . . . . . SRE LES Universite de Paris EN Le — Un legs de quatre millions à l'Université de Paris. iestamis.de l'Université deParis — Les grandes bourses de voyage de l'Université de Pan ER Meme) ci 2La Mode Mob Mere ee Po delete — Projet d'Université à Alger. . . . . . . . . . . . — Personnel universitaire. 134, 222, 391, 570, 696, 137, Uréninées. — Tératologie végétale : anomalies provo- quées par quelques Urédinées. . . . . . . GES USinEs. — lustallation des ateliers et usines . . — Les usines hydro-électriques en France . . . . . Urérus. — Corrélation des fonctions ovarienne et uté- A 4 or NET SOUS TOME MEN EN NC ne Vareur. — Les accidents d'appareils à vapeur. . . . — Sur la conductivité électrique des vapeurs salines. — Sur deux modes de condensation de la vapeur d'eau sur les surfaces de verre... "1. 209 684 102% 553 567 69% 333 VéGéraux. — Les végétaux utiles de l'Afrique tropi- cale francaise. Il. Le Karité, l'Argan et quelques autres Sapotacées à graines grasses de l'Afrique. VENT. — Sur le traitement des observations du vent . MÉNuS, Les éléments delVÉNUS ee VERRES. — Verres colorés pour l'observation des RE CCSN I lo 2 lo 0e RU e — Nouvelle méthode pour mesurer directement la double réfraction dans le verre soumis à une ten- SOI MO ETAT do che tolote D VERTÈBRES. — Sur l'existence de vertèbres cartilagi- neuses dans le développement du crâne des MISCAUX NC LA EP EE ICE VraAnpE. — Valeur alimentaire des poudres de viande. VigrarTions. — Appareil destiné à l'étude graphique de la composition des vibrations circulaires. . . Vie. — Les phénomènes de la vie. La fécondation et PHÉéTÉdUE.S Len se More CR RCE ViNalGRE. — La pasteurisation du vinaigre de vin . . Vis. — Méthode simple pour déterminer les défauts périodiques des vis micrométriques . . . . . . . Viscosiré. — Lecons sur la viscosité des liquides et désirez. MR la socleeneliete (ON QE Vision. — Sur l’anomalie des images dans la vision à travers une fentelétroite ER OENRC- CUE Viresse. — Encore quelques remarques sur la quan- tité H et la distribution de la vitesse d'après Marwel EE Eee Ci UE M CIE Voix. — Les moyens de culture physique de la voix . Z Zinc. — Mesures du phénomène de Zeeman sur les DaeSbleues AU ZINC RE CR RE — Essais de traitement des minerais de zinc dans un fouriélectriqueler- re ce - ie CT CIE Zoococie. — Revue annuelle de Zuologie. . . . TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS" A Abeille (Léonce), 118. Abel (E.), 946. Abel (O.), 692. Abelous (J.-E.), 255, 558. Abraham (H.), 112, 422, 410, 472 560, 643, 646, 984, 1026. Abraham (M.), 38. Abrami (P.), 646, 688, 903. Achard (Ch.), 124, 471, 943,:1025, 1028. Adams (F.-D.), 605. Adhémar (Robert d'), 639. Adil-bey, 43. Âggazzotti (A.). 88. Agostinelli (C.), 81, 384. Aigner (F.), 86. Albahary (J.-M), 515, 643. Alezais, 336, 517, 603. Alglave, 255, 297. Alilaire (E.), 1026. Allemand (A.), 1024. Allen (H. St.), 84. Allen (T.-B.), 606. Almansi (E }), 310, 732. Alpers (W.-C.), 606. Alquier(J.). 356 13635, 406 à 41%. Alquier (L.), 516, Le Amar (J.), 110, 253, 1027. Ambard (L. , 124, ÊT ane (L.), Ancel (P.), 123, 954, EST, Anderson (H. se ), 605. Andouard (P.), #16, 1098. Andoyer (H.), 851. André (Ch.), 645, 984. André (Dr), 10217. André (G.), 171, 213. Aofreville, 213. Angeli (A.), 340, 38%. Anthony (K. ), 470, S09. Apfelbeck (V.), 86, 523. Appleyard (R à 561. Archbutt (L.), 561 Argyropoulos ( T), 493. Ariès, 250. Arloing (F.), 602, 603, 688, 986. Arloing (S.), 318. Armagnac, 171. Armaignac, 213. Armand-Delille (P.), 123 Armstrong (A.), 648. Armstrong (H.-E.), 648, 855. Arnoult (L.), 1026. Arrivaut (G.), 253. Arrous (J.), 319, 380, Arsonval (A. d'), 212, Arth (G.), 294, 852. Arthaud (G.), 600. Astou (F.-W.), 336, Astruc (A.), 558. Asvadourova (Mile), 559. Athanasiadis, 1026. Athanasiu (J.), 688. Atkinson (E.-F.-J.), 338 688. 195, ATA. 5958, 809. 904. { Les noms imprimés en caractères gras sont ceux des auteurs des articles originaux. s chiffres gras reportent à ces ar- _—— Aubertin (Ch.), , 216, 645, 687 943, 1028. Auché (A.), 336. Auché (B.), 688, 810. Auclair (J.), 171. Audibert (V.), 335. Audoin (E.), 2. Auerbach (Bertrand), 30% à 3114. Auger (V.), 170, 253, 256, 298, 902, 942 Auld (S.-J.-M.), 338, 520, 604. Austin (L.-W.), 1029. Austin (P.-C.), 606. Austin (T.-J.), 475. Autonne (Léon), 71. Auvwers (A.), 607. Aynaud (M.), 1028. Ayrton (Mme), 690. Azambuja (L. d’), 170. Babès (V.), 371, 643, 644. Babington (F.-W.), 338. Bachmann (P.), 166. Backmann (E.-L.), 172. Baekeland (L.-H.), 691. Baeyer (0. von), 339. Bagnera (G.), 416, 942. Bailey (H. -d.) 421. Baillaud (B. ), 31, 514, 902, 984. Baillaud (J rs 170. Bain (A.-W.), 338, 561. Bainbridge (F.-A.), 216. Baire (R.), 212. Bairstow (L.), 1029. Baker (F.), 561, 690. Baker (H.-B.), 1029. Baker (H.-E.), 85. Baker (M.), 1029. Bakhuyzen (H.-G. van de Sande), 127 175, 303, 948. Balbiano (L.), 476. Balcelli, 423, 984. Bale (F.), 520. Ball (L. de), 947. Balland (A.), 43, 899. Ballenghien, 470. Balthazard (V.), 645. Baly (E.-C.-C.), 561, 690. Bar, 515, 601. Barbé, 516. Barbier (Ph.), 600, G85, 1026. Barbieri (G.-A.), 384, 476. Barbieri (N.-A.)', 515, 558, 643. Bardet, 410. Bardier (E.), 471. Bariou (Paul), 296. Bargellini (G.), 259. Barger (G.), 257. Barlow (W.), 175, 520. Barot, 43. Barratt (J. PNA A 16, 648, 944. Barrau (J.-A. Barré (E.), 377, 102 470, 557, 643. Barré (A), 334. Barrett (E.), 175. Barrowcliff (M.), 337, 4175, 1 Barthe (L.), 601. Barus (Carl), 18 Basch (A.), 947. Bashford (E.-F.), 518. 1029. , 688, | Béhal (A.), | BOIRE A.-E.) Basset (J3.), 82, 125, 214, Bassett (H. jun.), 84, 338. Bassin (N.), 603. Bassot, 984. Bastelica (Costa de), 558. Bataillon (E.), 472, 516. Battelli (A.), ST, 340, 384, 1031. Battelli ( 516, 559. Battez (G.), 688. Battier, 43. Baubigny (H.), 558. Baud (E.), 555, 686. Baudeuf (Mme), 22. Bauer, 517, 603. Baume (G.), 212. Baume-Pluvinel (A. de le), 3 Baylac (J Beauchamp | P. de), 254,551, 942. Beaulard (F.), 422. Beauverie (J.), 556. -Beauvy (A.), 943. Bechmann | G.), 120. Beck (C.), 985. Beck (Th. CAS Beck von Managetta (G.) Becke (F.), 87, 563, 691. Becker e) 689. Béclère, 470, 515. Becquerel ( 1. ), 81, 253, 334, Becquerel (J.), 4, 2h 558, 559, 130, 984, 1026. Becquerel (P.), 43, 985. Beddard (A.-P.), 216. Bedford (C.-H.), 258. ee He 422. Beilby (G.-T.) ” 282. Belley (G.) , 688. | Bellion (Mie), 688, he Bellucci (1.), 239, 384, er af (G.), 645 Belot (Em.), 49, 429, Bément (A.), 67. Bemmelen (J.-M. van), 176, 383. Bemmelen (W. van), 48. Benham (W.-B.), 605. Benjamin (H.), 515. Bennesch (E.), 563. Bennett ( AL. -H.), ! es Bennett (H.-G.), 85, 258, 561. Benoit (R.), 410. Benoit-Gonin, 125. Benson (M.), 690. Bentley (W.-H.), 84, 946. Bérard (L.), 124. Berger (E.), 42, 83. Berger (P.), 171. Bergeron (J. , 318, 493, 514,942 Bergonié | (J.), 81,195, 214, S09. Bergtheil ( C.), 338. Bériel, 168. Berkeley (Comte de), 84, 33 Berlemont (G.), 377, 4173. Bernard (A.)., 730. Bernard (Léon), Se Berndt (G.-M.), S11. Bernouilli (A. “L.), 322 Bernstein (S.). 469. Berry (A.-J.), 84 Berthaud (J.), 42 255, 471, .), 213, 214, 253, 254, Sn 688 F.), 44, 214, 255, 335,:379, 471, TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Berthelot (Alb.), 687. Berthelot (D.), 122, 686, 942. 170, 171, 601, 64%, Berthelot (M.), 42, 122, 212, 253,,334, 335, 336. Berthon (P.), 514. Bertiaux (L.), ne Bertillon FE Bertrand (G 1 “2 126, 298, 557, 600, 604, 686, 985. Bertrand (L. ) À 81, Sa 984. Bertrand (L.-E Bertrand (Marc An 5. Bertrand (P.), 557, 643, 912 Berwerth (F.), 563, 692. Berzolari (L.), 732. Besnier (E.), 644. Besredka (A.), 298, 517, 855. Besson (L.), 514 Beusekom (J. van), 856 Bevan (E.-J.), 209, 382. Beveridge (H.-H.), 988. Béville OH. de), 5 Beyerinck qe -W. Bianchi |L.), 132. Bickel (A.), 562. Biegon von Czudnochowski (W.), 127, 428, 521, 522, Bierry (H.), 297, 559, 688, 986, 1028. Bierry (L.), 424. Bigourdan ( 854, 902. Bilancioni (Guglielmo), 40. Billet (A.), 83, 603, 645 Binet (A.), 112. Binet (E:), 214. Binet du Jassoneix, 42, 215, 422, 604, 643, 685. Biquard, 83. Bischof (Carl), 640. LUS -R.), 249. Blache, 94: Black to. _ 946. Blaise (E.-E.), 122, 297, 601. Blake (F. 2C.), 812. Blakesley (TER 382. Blanc (A.), 377, 384. Blanc (G.), 123, 558, 601, Blanc (J.), 44, 8. Blanchard (R.), 423, 424. Blaringhem Ur, s1. Blaserna (P.), 259. Bloch (L À 81, 5: Blondel (A.), 381. Bloxam 5) Blum (G.), 212. Blumenthal (A.), Hlumenthal (F B umstein (F.), 952. Blumstein (L.), Se Blyth (M.-W.), 85. Blythswood (Lord), 605. Bocat (L.), 559. Bückmam (Fr.), 294. Bockwinkel (H.-B.-A.), 383. Bodroux (F.), 515, 600. Bœdtker (E.), 686. Bæœke (J.), 1176, 564. Bœr (M.-G. de), 383. Boëseken (J.), 176. Boggio (T.), 122, S54, 1031. Bohn (G.), 44, 82, 124, 17: 298, #7, 517, 602, 1027. Boidin (L je 855, 903. Boinet (E.), 854. Bois, 685. Boizard (G.), 986. Bolk (L.), 48, 1032. Bolton (Ch.), 518, 856. Bonaparte (Roland), 170. Bongiovanni (A.), 87, 416. Bonnaire, 515. Bonnier (G.), 122, 683. Bounier (J.), 644. Bord (B.), 986. Bordas (F.), 90£ Bordas (L.) s Bordet (J.), 903. 721, 902, 985. 686, 942, 987. CA 7, (601, 196, 258, 475, 946. 559. 1 12 19 = En 12 © St G.), 81, 193, 170, 318, 551, Borrel (A.), 212, 559. Borrelly, 902. Bory (L.), 986. Bosc (Em.), 81. Bose (F.-J.), 43, 82. Bosier (J ), 854. Botelho (C. jun.), 645. Bottomley (J.-T.), 519. Bouchard (Ch. b, 558. Bouchonnet (A. EE Boudouard (0.), Bouffard (G.), Bougault (J.) Bouin (P.), 254 , 255. Boulanger (A s» He 118, 639. Boulanger (Ch.). 5 Boulanger (E.), Ge Boule (M.), 318, 942. Boulud, 172, 469, 559, 942 Bounhiol (J.), 253, 254. Bouquet (E.), 984. Bourcart SL 19 Bourdier (L.), 903. Bourgade de la Dardye (E. de), 985. Bourgeois (Léon), 899. Bourgeois (Lt CR), 54 à 64, 311, 809. Bourget (Ho), 37,686, 984. Bourget (Louis), 853. Bourgoin (P.),, 93 à 109, 860 à 866,928 à 937. Bourion (F.), 601, 685. Bourquelot (Em.), 297, 471. Boussac (J.), 123, 171, 730. Boussinesq (J.), 334, 335, 601, 643. Boutan (L.), 600, 731, 984. Boutroux (P.), 212, 601, 902. Bouty (E.), se 685. Bouveault ( 126, 298, 318, 422. Bouvier EU 42 212, 423, 810. Bouvier (H.), 522. Bouyer fils, 644. Boveri (P.), 559, 602, 645. Boyer (Jacques), 595. Boyer (P.), 1025. Boys {C.-V.), 1029. Braak (C.), 48, 128, 176, 856. Brachin, 83. Bradshaw (L.), 518. Bragg (W.-H.), 257, 605. Branca (A.), 687, 1028. Brandeis, 125, 214, 472. Brasil (L.), 254. Braun (L.), 260. Braus (H.), 339. Bréguet (Jacques), 09. Bréguet (Louis), 809. Bréon (R.), 371. Brester (A.) JRUÉE P: Breteau (P a 12, 809, 988. Breton (J.-L.), 424. Breton (M.), 215, 516, 855, 903. Briggs (F.-J ), 382. Briggs (R.-V.), 338. Brillouin (M.), 514, 593. Brindeau (A.), 516, 517. Briner (E.), 335, 422, 685. Briot (A.), 214, 514, 517, 556, 603. Brioux (Ch.), sl. Brislee GEL 691, Brissaud (E.). nt 603. Brissemoret (A ), 255, 298, 380. Brissy (G.), 559. Brizi (M.), 132. Brizi (U.), 260. Broca (A.), 410, 809, 943, 1027. Brochet (A.), 854. Brœk (A.-J.-P. van der), 48. Broglie (Maurice de), 297, 514, 643, 988. Bromwich (T.-J. 1’A.), 293. Bronson (H.-L.), 126. Brossard, S55. 603, Brown ) Bruck (P.), 334, 984. 1053 Brücker (E.), 168. Brückner (C.), 692. Bruel (A.), 80. Brubhl (J.-W.), 84. Brulé (M. à 903. Brumpt (E.), 687. Bruvel (L,), 984. Brunet (Louis), 87, 167, 692. Brunhes (Bernard), 209, 422, 710. Brunhes (J.), 422. Bruni (G.), 259. Bruninghaus (L.), 318, 469. Brunon (R.), 111, 470. Brunswic-le- Bihan. 423. Bruntz (L.), , 123, 255. Bruschi Gite b ), 87, 260. Bruyant (F.), 424. Bruyant (L.), 380, 687. Buchner (E.-H.), 45. pucEmaeter (G.-A.), 45, 518, 944 Buckney (F sh 988. Bucquo Budin tou 260, 564, 608, ), tone Buhl (A.), 335, “0 1026. Buisson (A.), 2 Buisson (H.), à Burdett DE ), 4 Burgatti (P ) Burgess ((G.- Burnet (Et), 602 Burrows (H.), 2 RUE (H.), Byloff (K.), 522. Cabannes (E.), 425. Cabot (G.-L.), 69. Caen (Julien), 418. Cahn-Speyer (P.), 563. Cain (J.-C.), 560. Caldwell (R.-J.), 338, 648, 855. Caldwell (W.), 175, 298. Calleudar (H.-L), 216. Calmette (A.), 125, 517, 558, 686, 855, 903. Calot (F.), 41, 1027. Cambi (L.), 38%, 1031. Cambier (R.), 214. Cambon (Victor), 852. Cameron (A. =T.), 605, 946. ARR nel (A.), 920, 732, 945 Camus (J.), Hs 644, 855, 944 Camus Que }, 516, 687. Candlisch (D.-M.), 561. Candlot (E.), 640. Carovetti, 469. Cantacuzène (J.), 43, 903, 943, 94% Canton (M.), 732. Cantor (Mathias), 691. Cany, #10. Capitan (L.), 171. Caqueray (Gas de), 119. Cr PSN (C.), 514, 643. Carda (K.), 946. Cardoso (E.) \ 422 Carle (P.), 170. Carles (Georges), 333. Carles (P., 82. 253, 515. Carmichael (E.-S.), 648. Carnevali (F.), 416. Carnot (P.), 335, 422, 602. Carpentier (1.), 110, 253, 423, 469. Carr (F.-H.), 257 Carrasco (E.), 87. Carré EE }, se 214, 255, 471, 688. Carré (P.), 82 Carrel (Al.), 12 4, 51T, 602. Carrière (G.), 943. Carrieu, 43. Cartan (E. ), 469. Carulla (F.-J. 2RAN 338. Cassie (W.), 216. Cassuto (L.), 259. ot (J.), 1025. 1054 Castelain (F. ), Ê Castellani (V.), 732. Cathcart (E. P), s11. Cathelin (F.), 986. Caudwell (B.), 338. Caullery (M.), 122, 124 854, 941. Caustier (E.), 1025. Cavalié, 5 Cavasse (A.), 1 Cayeux (L.), 727. : Cazalbou (L.) Cépède (C.), Cerletti (N. ), Cerletti (U. \ 416. Cermak (P.), #28 692. Cernovodeanu (Mie (DYE 425, 559. Cesari (L.), 124. Cew (J.-A. de), 561. Chablay (E.), 170. Chabrié (C.), 378, 644 Chabrier (J.), 645. Chadwick (S.), 475. Chaigne (J.), 412. Chaiïlley (osephl 435 à 452. Chamagne (G.), 298, 335. Champtassin (de), 171. Champy (Ch.), 125, 559. Lhantemesso (A.), 515, 644, 338 à 50. Re (D.-L.), 84, 475. Chapman (H.-G.), 810. Chaput (E.), 984. Chaput (H.), 645. Charabot (Eug.), 644. Charbonnier (P.), 980. Chardonnet (de), 643. Charpenan (E.), 471. Cherpenet | (R.), 855. , 833 à S50, 83, 255, 380, 123, 253, 318, 419 , Charpy | G.), 42, 1026. Charrier (H ), 336. Charrin (A.),.122, 124, 170, 172, 213, 253, 471. Chassagny, 215. Chatin (A.), 514. Chatin (J.), 171, 809. Chattaway (F. ED) 605, 606, Chatton (Ed.), 1924, 471; 335: Chauffard (A.), 903. Chauveau (A), 170, 171, 334, 318, 1026. Chauvel, 213, 558, 644. chauve 686. Chechia-Rispoli (G.), 87. Chella (S.), 87. Chéneveau, 643. Chesneau (G.), 902. Chevalier (Aug.), 685, 686. Chevalier (J.), 123, 645, 686, 985. Chevrel, 986. Chifflot, 377. Chio (M.), ve Chiray (M. 12, 688, 986. Chirié (J. Te 4 4, 254, 319, 943. Chodat (R.), 71 Chofardet (P.), rh 130, 902, 984. Chouchak (2 ), 1027. Chree (C. 216. Chrétien H.), QU Christiani (H.), Chrystail EUR) 988. Chudeau (R.), 378, 558, 601. Chwala (A.), 260. Ciamician (G.), 259, 732. Cipolla (M.), 416. Cirera, 423, 984. Ciuca, 411. Ciusa (R.), 87, 259, 384. Clairin (J.), 4. Claret, 255. Clarke (R.-W.-L.), 382. Claude (A.), 125. Claude (G.), 469, 730. Claudel (J.), 899. Clavari (E.), 476. Claverie (P.), 254, 985. Clay {J.), 856, 948. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Clerget (Pierre), 6, #1 266, 306, 434, 530, 614, 994. Clerici (E.), 340, 384. Clifford (W.), 691. Cluzet (J.), 125, 214, 336, 1028. Coates GR), F2 174: Cobb (J.-W.), 476. Coblentz ne js 52 271. Codron (C.), he Coffignier (C.), 473. Coggia, 469. Cohen (Ed.), 338. Cohen (J.-B.), 520. Cohen (N.-H.), 88. Colardeau (E.), 29%. Colefax (A.), 945. Coleman (W.-H.), 85. Colfox (W.-P.), 648. Colin (Ed.-El.), 42, 514, Collie (J.-N.), 382, 988. Collin (R.), 425. Colomba (L.), 87. Colombano (A.), 87, 1031. Colson !{A.), 685, 1026. Combault (A. dk 20 471, 516, 688. Combe ee AS Compton | je oo. Connaught (duc de), 45. Contardi, 132. Conte (A°), 1027. Contremoulins (G Cooper (W.-R.), 216. Copaux (H.), 253, 988. Corbino (0.-M.), 340. Cordemoy (C. de), 1022. Cornet (P.), 903. Cornil {V.), 170, Corou (F.), 941. Cosmovici (L.-0.), 379. Cosserat (Eug.), 1026. Cosserat (Fr.), 1026. Cossman (M-). 419. Costantin (J.), 167, 268; 685. cosrarel “1 À 902. Cotte { .), 1042 à 4021. Courmon Courtade GE Je Courtauld (S. | 338, 648. Cousin (H.), 218, 986. Coustet (Ernest), JEIs Couteaud, 602, Coutière (H.), 379, 514, 855. Couturat (Louis), 71. Couvreur (E.), 172, 903. Coux (H. de La), 419 ES Couyot, S09. Coyne (P.), 4 Craîfts, 604. Cramer ! W.), 518. Crane (J.-E.), 428. Crémieu (Victor), 72, 559, 810. Crété (L.) , 124. Crichton | ID. -C.), 29, Croft (W. B.), 427. Crommelin (C. A.) Cross (Ge F.), 209, me Cross (W. E), 520. Crossley (A .M.), 605. Crossley (A. W.), 46 ; Crouzon (0.), 855. Crova (A.), 600. Cruchet (D. R.), 171. ES PE 253, 297. Cruv CURE (E} 516. Cuénod, 42 Cuénot (L.), Culmann (P.), Cuniasse, 21: Curie (Mme $S.), 730, 809, 1026, Cushny (A. R.), 605. Cyon (E. de), 318, 634 à 638. CS , 53, 169, 182, 259, 176, 910, 953, 122, 110, 242, 334, 422, 647, 213, 253, 493, 494, 855. 7 à 13, 173, 423, 25, 168, 425, 683, 853, 901. D Dainelli (G.), 259. Dalhuiïzen (A. F. H.), 176 Dalous (E.), 124. Damoiseau (P.), 600. Daniel (L.), 600, 942. Darboux (G.), 1026. Daremberg (G.), 171. Dareste de la Chavanne (J.), 686. Darier, 410, 644. Darwin (F.), 174. Darzens (G.), 212, 215, 470. Dastre, 601, 943. Daublebsky von Sterneck (R.), 694. Daufresne (M.), 173, 422, 558, 854, 984. Dautriche, 469. Davidson (Allan A.), 210. Daviers (J. H.), 561. Davis (O. C. M.), 945. Davis (W. A.), 648, 691. Dawson (H. M.), 338. Dean (Georges), 648. Debove (G.-N.). 1025. Decolle (W.), 563. Decréquy, 213. Defacqz (Ed.), 3178, 600. Defant (A.), 947. Degrais, 854. Dehérain (Henri), 120. Dehon (M.), 423, 646. Dehorne (A.), 683. Dejust Ge TL). 1557 Delage (Y.), 685, 131, Delamare (G.), 297. Delange (R.), 1% 551. Delassus (Et.), 854. Delbet, 43. Delcourt (A.), 123. Delépine (M }), 318, 427, 470, 473. Delezenne (C.), 213, 254, 646, 687, 688, 943. Delorme (E.), 254, 3179. Demanche (R.), 471, 688. Demangeon (Alb.), 512. Demenge (Emile), 120, 250. Demole (Eug.), 297. Demolis (E.), 293, 465, 1022. Demolon (A.), 644. Demoussy (E.), 1027. Denayrouze (L.), 1026. Denigès (G.), 12h, 336. Deniker (1.), 276 à 282, 983, 1035. Denjoy (A.), 643. $ Depéret (Ch.), 43, #19. Deprat, 122, 558, 644, 943. Deprez (M.), 469. Déré (Ch.),44. ŒTR Derome (E.), 470. Derrien (E.), 380. Desbouis (G.), 44, 645. Desfosses (P.). 229 à 233. Desgrez (A.),424, 855, 985. Desländres (H.), 81, 170, 172, 297, 423, 130, 984, 1026. Desmoulières (A.), 514. Dessarmet (E.), 171. Dessauer (F.), 299. Deussen (E.), 260. Devaux-Charbonnel, 381, Dévé (F.), Pr 855, ‘903. Dewar (Sir J.), 337, 643, 731. Dhéré (Ch.), 82, 681. Didsburg, 602. Diener (C.), 563. Diénert (F.), 120, 296, 900, 984. Diesselhorst (H.), S12. Dieulafoy. 64%. Dilthey (W.), 86. Dintzl (E.), 563. Dionneau (R.), 643. Dixon (A. E.), 84,475. Dixon (H. H.), 174, 518. Dobbie J J) , 421. 810, 942, 1027. 514, 984, 1026. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 1055 Doléris, 410. Dollfus (R.), 42. Dombrowski i (S.), 810. Donau (F.), 563. Dongier (R.), 560. Donnini (F.), 384. Dopter (Ch.), 378, 471, 904. Dorlencourt, 81. Douvillé (H.), 378, 422. Douxami (H.), 376, 613, 170. Dowson es ED 167. Doyon (M.), à EC 214, 254, 255, 297, 335, 380, 471, 516. Dreaper (W. P. ), 606. Dreyer (G.), 423, 685, 686, 810. .), 516, 603, 646, 943. Re (G. Drucbert (J. Drude (Pa |. Drzewina (Mile A.), 471, 517, 602, 985, 1027. Dubard (M.), 469, 854, 1027. Duboin (A.), 902. Dubois (Ch.), 424. Dubois (R.), 44, 123, 124, 172, 213, 214, 297, 334, 380, 424, 471, 903, 986, 1028. Duboscq (O.), 423, 942. Dubrisay, 83. Dubruel (E.), 333. Ducamp, 984. Ducceschi (V.), 88. Ducelliez (F.), 600, 130, 809. De Ein (R..). 981. Duclaux (J-), 942. Ducretet (E.), 643. Duddell (W.), 605. Duffield (W. G.), 904. Dufour (A.), 172, 465, 643, 942, Dufour (Dr), 255, 425. Dunoyer (L.), 1026. Dunschmann (H.), 986. Dunstan (A. E.), 46, 945. Dunstan (A. He 175. Dunstan (W.R.), 298, 561, 604. Duparc (L.), 371, 551, 942. Dupont (Ch.), in. Dupont (G.), 8 Dupont (M) Durand (E.), 6 Durège (H )} 726. Dutoit (Paul), 3635 à 372. Duval (H.), 515. Duval (Mathias), 254. Dybrenfurth (G.), 1030. À 2h. E Eberhard 122, 854. Eginitis (D.), 938, 984. Ehrenhafñft (F.). 340, 946. Ehrlich (R.), 563. Einthoven (W.), 856. Eisenberg (Ch.), 298, 335, 379, Elder (H. M.), 216. Ellis (W.), 381. Elsler (H.), 941. Emich (F.), L Emile- on (LE , 124. Engler (A.), sé, 339. Enriques ( (F. Su 476. Enriquez (E. Ercolini (G.), 87, Erdheim (J.), 692. Eredia (. Ù 476. Eredia (F.), 34 Ermen DWLF A), PAIE Erréra (L.), 295. Escard (Jean;, 39. Esclangon (E.), 334, 130, 98%. Espine (A. d'}; 171, 644. Ron (M.) E 298. Etard (A je 422, 1027. Etévé (A.), 334. Etienne (G.), 425, 986. Everdingen (E. van), 1031. Ewans (W.-Ch.), 561. EN .-{.). 689. Exver (F.), : 022, 691. Eyre (J.-V.), 855. F Fabius (G.-H.), 564. Fabre (Ch.), 293. Fabris (U.), 132. Fabry (Ch.), 470, 514, 643. Fabry (Eug.), 601. Fabry (L.), 984. Fairlie (F.-W.), 988. Fantham (H.-B.), 254, Fanto :R.), 340. Farabeuf, 558. Faria (O0. de), 1173. Fassin (Mlle L.), 255, 298, 380. Faucheron (L.), 1027. Fauré-Frémiet (E.), 125, 214, 904, 986, 1027. Fauvel (Ps 124, 422, 424, 425. Favraud (A.), 422, Favrel (G.), 644 Fayet, 643, 645. Féjer (L.), 643, 730. Feldscharek (H.), 1031. Felgentraeger (W. \, 842. Fenton (H:- d.- Ï. )b ‘382. Ferber (F.), 122, 334. Féré QE ), 424. Féret (R.), 465. Éenbe h (A.), 334, 601, 685. Fernet (Ch.), 171, 985. Ferraniui (A.), 82. Ferrié (G.), 809. Ferrier (P.), 601, 645. Féry (C.), 426. Fesquet (E.), 981. Feuillié (E.), 380, 424, 471, Fèvre (J.), 250. Ficaï (G.), 688. Ficaï (J.), 516, 517. Fierz (H.-E.), 415. 945. Fiessinger (N.), Filloux (L.), 557. Filon (L.-N.-G.), 474, 731. Findlay (Al.), 415. Finger (E.), 523. Fischer (Ernest), 469, 514, 562. Fischer (Em.), 382, 608. Fischer (F.), 476. : Flamand (G.-B.-M.), 558, 644. Flaschner (0.), 260. Fleig (C.), 213, 214, 601, 687, 688, 903, 943, 944, 985, 1028. Fleischmann (F.- Fleming (J.-A.) : Fleury (Er uest), 22 291, 265. Flooh (A.), 563, Flooh (J.), 946. Flurscheim (B.), 561, Foix, 334, 602, 131. Folet (H.), 985. Follet (L.), 380, 425. Fonvielle (W. de), 643. Forcrand (de), 558, 600, 902. Forel (A.), 210. Forgeot (E.), 378. Forster (M.-0.), 427, 474, 475, 945, 1029. Fortin (E.-P.) 122, 123, 244, 255, 516, 616, 686. Fortineau (L.), 603. Fosse (R.), 334, 644, 942. Fouard (E.), 254, 256, 298, 558. Foucaud (J.), 298. Fouquet (Ch.), 172. Fourneau (E.), 130, 335, 517, 213, 380, 855, 903, 1028. 602, 645, 685, Fournier (Alb.),212. Fournier (Alfr.), 423. Fournier (H.), 212. Fourrey (E.), 465. Foveau de Courmelles, 985. Fowler (A.), 855. Fowler (G.-J.), 691. Fox (J.-J.), 520, 690. Francesconi (L.), 87. Franchimont (A.-P.-N.), 176. Franchis (M. de), 87, 476, 942. Franck (J.), 522, Francois (M. .), 297, 318. François-Franck (Ch. -A.), 193, 297, 380, 516,588, 559, 604, 645, 687. Frank (J se 339. Franke (A.), 608. Frankel (E.), 260. Frankland (P.-F.), 338. Fraser (Malcolm A.-C.), 555. : Fréchet (M.), 122, 600. Freundler (P.), 126, 171, 173, Friedel (G.), 198 à 20%. Friedl (A.), 84, 946. Friedlaender (P ), 260, 692. Frison (Mile S.). 602, 688. Fritel (P.-H.), 1027. Fritsch (E.-F.), 174. Fritsch (J.), 682. Frobenius (G.), 608. Froin (G.), 254, 2 Fron (G.), 13, 55! Frouin (A.), 44, 124, 195,172, 255, 986; 1028. Fubini (G.), Funck, 44. Furtwängler (Ph.), 727 215, 604. , 298, 855, 1028. 340, 476. Gabet (G.), 122. Gaitte, 810. Gaillard (J.), 335, 1028. Gaillard (L.), 124, 943. Gain (Ed.), 333, 901. Gain (G.), 42, 514, 551. Galesesco, 688. Galimard (J.), 43. ‘ Gallarotti (A.), 384. Gallo (G ds re 384. Gawmbier (B.), 318, 423. Gamble F- -W.), 605. Gandillot (Maurice), 509, 44 à 324. Ganguli (A.-C.), 606. Gard, 515, 643. Ga: dner (J.-A.), 45, 518, 94%, Gardner (H.-D.), 946. Garelli (K.), 476. Garner (1h.-Ed.), 475. Garnier (C.), 318, 730. Garnier (M.), 380, 471, 516, 688. Garnier (R.), 686. Garrelon (L.), 43, 602, 687. Garrelon (P.), 424. Garret (A.-E.), Gastine (G.), Le Gatin (Ch.), 334. Gatin (C. Et M201E Gatin-Gruzewska (Mme Z.), 82,645, 688. Gaube, 903. Gaubert (P.), 42, 375, 317, 640, 686, 902, 98%. Gaudechon (H.), 557, 600, Gauducheau (A.), 214. Gault (H.), 6435. Gaultier (René), Gaunt (P.), 691. Gautié (A.), 424. Gautier (A.), 43, 411, 1027. Gautier (CL), 82,424, 195, 172, 213, 214, 254, 97, 335, 380, 516, 688, 1028. Gautier (J.), 12: , 125. Gautrelet (J.), 125, 336, 472, 559, 600, 94%. Gaver (F. van), Gazdar (M.), 690. Gebhard (N.-L.), 258. 376, 411, 985. 83, 214, 336. 1056 Gehrcke (E.), 339, 522. Geikie (Sir A.), 474. Gellé (E.), 319, 903. Gengou (0.), 255, 424; 646, 903. Gentes (L.), 44, 336, G8S. Gentil (L.), 82, 122. Geôcze (Z. de), Géraudel (Ew.), 172. Gerber (C.), 517, 558, 603, 685, 809, S10, 902, 943, 102$. Gewin (J.-W.-A.), 1032. Ghigi (A.), 732. Giacobini, 297, 33%, 557, 1026. Giaconi (J.), 523. Giaja (J.),-297,.559, 602, 986. Gialdini (C.), 1031. Giard A). 44, 82, 212, 254, 558, 902, 903, 944. Gibson (Ch. S.), 1029. Gibson (J.-A.), 606. Giglioni, 476. Giglio-Tos (Ermanno), 40. Gilbert (A.); 43, 516, 517, 645, 687, 943, 985, 986, 1098. Gill (A.-H.), 338. Gimingham (C.-Th.), 298. Gin (G.), 81. Gineste en) ), PRER Ginestous (G.), 209. Girard Ch) 473. Girard (Jul: ), 7 710. Girard (P.), 516. Girardin (P.), Giraud (A.), 21 Girtler (R.), 34 Gius (L.), 947. Glangeaud (Ph.}, 1 Glasser (E.), 42. Glassner ae ), 399. Glatzel (Gr.), 521. G loditsch (Mie), 1026. Gley (E.), 44, 82, 687, 1027. Glinkiewicz (Mlle A.), 340. Glover (Jules), 528 à 583, 644. Gobert, 255. Godby (M.-H.), 1029. Godchot (Marcel), 83, 253, 256, 423. 601, 681. Godeaux (L.\, 948. Godin (P.), 6S7. Gold (E.), 257. Golding (J.), 521: Goldschmiedt (G.), 340, 946. Goldstein (E.), 126, 213, 812. Goldstein (J.), 1034. Goldziher (Ch.), 422. Gombault (A.), 379. Gompel (M.), 602. Conan (R.). 612. Gonnessiat (F.), 643, 984. Gorczynski (Ladislas), 768. Goris (A.), 124, 514, 686, 1026. Gorlani (M.), 340. Gotch (Francis), 519. Gougerot, 1028. Gouin (A.), 516, 1028. Goupil, 122, 130, 253, 1027. Gourdon (E.), 515. Gourdon (J.), 854. Goursat (E.), 208, 514, 9 Gradenwitz ( AIf. ANS 221, 259, 299, 339, 428, 522, 114, 711, 812, 9. 8, 1030. Graeber, 86. Graffgny (H. de}, 80. Graig- “Smith | R.), 475. Gramont (A. de), 466, Grancher (J.), 644. Graudeau (L.), 332, 900. Grandidier (G.), 334. Granger (A.), 469, 604. 02, 2 ‘4 21, 608, 132, 694, #10, 685, 1026. Grasset (J.), 683. Grassi (U.), eu Gravellat (H.), 125, 600. Gr: avier (Ch. he 253, 600 Gray (R. ue , 415 Green (A. 174, 988 REA (M) 216, 6 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Gregory (A. W.), 988. Gréhant (N.), 171, 297, 493, 854. Grenet (H.), 1027. Griffon (Ed.), 81. - Grignard (V.), 558, 685. Grimal (+m.), 253. Grimbert, 810 Griuer {G.), 988. - Groom (Percy), 519. Groot (G. J. de), 384. Grund (A.), 86. Guebbard (A.), 170, 419, 942. Guégen (F.), 471, 646, 941. Guende (Mie B.), 424. Guéniot (P.), 923, 1028. Guépin (A.), "854. Guerbet (M.), 213, 855. Guglielminetti, 43. Guglielmo, 87. Guichard (M.), 600, 604, 942, 985, 1029. Guieysse (A.), 603, 645. Guignard (L.), 1026. Guillain (G.), 855, 903, 943, 1028. Guillaume (Ch.-Ed.), 256, 332, 472, 180, 727, 40035 à 4042. Guillaume (J.), 212, 470, 551, 902, 942, 1026. Guillemard (H.), 42, 83, 424, 425, 471, 943. Guilleminot (H.), 902, 943. Guillet (L.), 3717, 378, 469, 473, 615 à 626, 664 à 674, 656, 899. Guilliermond (A.), 124, 685, 688, 942. Guinchant (J.), 601, 686. Gunther, 810. Guntz, 44. Guthnick (L.), 607. Guttimann (0.), 606. Guye (C.-E.), 643. Guye (Ph.-A.), 81, 423, 558, 1023, 1026. Guyénot (E.), 44, 516, 517, 602. Guyot (A.), 44, 45, 423, 469, 410, 515. Guyot (J.), 378, 469. Gy (A.), 943, 1028. 410, 687, 122 223 173, Haas (P.), 690. Hadamard (J.), 42, 166, 209, 469. Haldane (R.-B.), 45 Hall (A.-D.), 298. Haller (A.), 219, 254, 334, 493. Hailion (L.), 645, 687, 688. Hallion (M.),-943. Hallopeau, (H.), : Halluin (M. d'), 42 Hamburger (H.-J Hamonet (J.), Hamy (M.), 601, 603, 854, Hanausek (T.-F.) ÿs 260. 950. Hann (J.), 563. Hanni (L.), Hauriot(M.), 123, 126, 254, 255, 297, 334, 3351 492. Hansky (A.), 557. Hanssen (0.), 685, 686, Harcourt {R.), 338. Hardt-Stremayer (R. von), 260. Hardy (G.-H.). 293. Hargreaves (W.-A.), 732. Harreveld (Ph. van), 384. Hart (W.-B.), 521. Harter (A.), 986. Hartley (W. -N.), 45, 258, 518. Hartmann (H. , 294 à S03. Haschek (E.), 522. Hasenührl (F. = Hasslinger (BR. Haudié | TE.) Haug (E.), 318, 942. Hauser (le 250. Haushalter (P.), 425. Havelock (T. 2H). 257, Hawthorne (J.), 84. 810. 904. Hay (J.-G.), 945. Heathcote (H.-L.), 811. Hébert (A.), 168,686, 729 Hébert (P.), 645. Hechler (W.), 298. Heckel (Ed.), 81, 515, 942. Heckel (E.),°941. Hedley (E.-P.), 258. Hekma (E.), 856. Helbronner (P.), 377, 854. Hemmelmayr (F. von); 947. Hemsalech (G. A.}, 110, 335, 317, 3S0, Henderson (A.), 988. Henderson (G.-G.), 1029. Henderson-Smith (J.), 689. Henneguy (F.), 903, 985, 986. Henri (V.), 44, 83, 214, 253, 255, 380, 425, 688. c Henriet(H.), 483 à 490,498 à 502. Henry (Ch.), 334, 854. Henry (E.), 345, 903. Henry (L.), 81, 212, 297, 515, 600, 604, 644, 730, 131, 809, 810, 985. Henry (T.-A.), 604. Henstock (H.), 258, 988. Herbette (Jean), 374. Hergesell (H.), 514. Héricourt (J.), 941. Hérissey (H.), 297, 298, 425, 4 Heritsch (F.), 523, 1030. Herlitzka (A.', 88. Hérouard (Edg.), 854: Herrgott (K.-J.), 297, 335. Herring (P.-T.), 855. lerscher (M.), 16, 517, 687. 985, 1028. Hervienx (Ch.), 172, 380, 412, 516, 686, 685, 986, 1027, 102$. Herwerden (Mlle M.-van), 384. Herz, 601. Herzig (J.), 692. - Hess (V.-F.), 260, 946, 1030. Hesse (E.), 601. Hewitt (J.-T.), 174, 520, 561, 605. Heywood (B.), 984. Hickmans (Mlie E.-M.), 475. Hitisel (Th.-P.), 474, 258, Bill (E. -G.), 945. Hill (L:), 216, 604. Hillebrand (K.), 692. Hilleret (G.), 334. Hinard, 381. 71, 986. 382, 561, Hinckley (J.-F.), 607. Hinrichs (G.-D.), 42, 253, 423, 515, 558, 601, 902. - Hird (J.-M.), 945. Hirst (G.-S.), 4145 à 141%. Hirtz, 43. Iitzel (E.), 419. Hobart (H.-M.) 465. Hocevar (F. Hoche (L.), 44. Hochbstetter (F.), 522. Hodsman (H.-J.), 520. Hœgner | paul), 166. Hofbauer (G.), 522. Hoff (J.-H. van't), 607. Hôhnel (F. von), 340, 563. Holborn (L.), 85. Holdhauss (K.), 523 Holl (M.), 260. Hollard /A.),, 22 à 36, 555, 1024. Iolleman (A.-F.), 12$. Holmes (J.), 945. Homer (Mlle A.), 382. Hommell (R.), 729. Hônigschmid (0.), Hopfner (F.), 339. Hopkinson (B.), 382. Horrocks (Major W.-H.), 473. Horton (Frank), 382. 608, 946. Hostelet (G.), 483 à 497%. Houdard (M.), ‘81, 318, 470, 553, Houle neue (L.), 646. Howles (F.), 382. Hubert (H.), 902, 942. Hubner (J.), 520. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Hubrecht (A.-A.-W.), 383. Huchard (4 JE Ve Hudellet (G 7 4 195. RneDerE (Es) s pe 601, 902. Hunt ( S. he 45. ÉRENe FA , 122. Husnot ( B)/5 DORE On A.-V. d Fe Hutchinson (H B.), 521. Hutchinson (M 5 2517 Hutting.r (K.), 563. Hutton (R.-S.), 519. Imbert, 517. Ingham (H.), 338. Inglis (I. K. H.), 606, 690. Inmann, 380, 424, 425. Innes (P. D.), 73+. Irvine (J. C.), 298, 945. Jrwin (J. T.), 690. Isaac (Mile F.), 605. - Iscovesco (H.), 4%, 83, 298, 319, 424, 471, 472 2) Lveagh (Vicomte), 45. Izart (J.), 166. 123, AT, 214, 516, 603, 645. J Jaccard (P.), 964 à 967. Jaccoud, 1027. Jackson (C.-G.), 338. Jackson (Th.), 1029. Jacob (A.), 122, 422. Jacob (Ch.). 19, Jacobesco (N.), 297. Jacquet (L.), 515, 644. Jaeger (F. M.), 88, 300. Jasger (J. M.), 48. Jahan (J.), 947. James (C.), 475. Jammes (L.), 82, 123, 124. Janet (Ch.), 213, 469, 1027. Janssonius (H. F1.) 128. Jaquerod (A.), 122. Jarricot, 380. Jaumann (f.), 522. Javal (E.), 123, 124. Javelle, 1026. Javillier (M.), 83, 686, 985, 1027. Jeanbrau (E.), 985. Jeancard (P.), 419. eIre P.), 255, 425. Jeanselme (E.), 49 à 36, 516. Jenks (R. L.), 258. Job (A.), 469, 551. Jobin (A.), 125. Johnson (W. Mec A.), 691. Joleaud (L}), 212, 1027. Jolles (Mlle T. C.), 176. Jolly (J.), 379, 681. LE 123. Joly (A D 643. Joly (H.), 297. Jones (Fo) he 561. Jones (G. C.), 475. Jones (H. O.), 331, 606, 988. Jonker (H. pu 48. 127. Jordan (Ch.), 531 à 544, ET à 579. Josué (0.), 51 Fe 551, 602, 555, 903. Jouaust (R.), 335. Joubin (L.), 65 à 22. Jouffret (E.), 249. Jouguet, 983, 297, 334, 809. Jourde (Ant.), 688. Jousset (A.), 603, 646, 687. Jovitschitsch (M. Z.), 947. Jowett (A. D.), 84. Joyce (CG. M.), 428. Julius (W. H.), 41, 383. Jumelle (H.), 600, 685, 809, 982. Jungano (M.), 350, 494, 8 53. Jungfleisch (E.), 253, 422, 423, 600, 601, 686. K Kahn, 515. Kahn (H. Morel), 170, 422. Kailan (A.), 260, 523, 563, 608, 692, 940. Kalaboukotf (Mlle L.), 903, 1028. Kalischer (0.), 562. Kapteyn (W.), 88. Karl (A.), 318. Karl (G. Kaye (J.), 3N2. Kayser (E.), 297, à 833, 900. Keane (Ch. A.), 258. Keating-Hart (de), 214, 644, 687. Keesom (W. H.), 128, 115, 300, 383, 56%, 948. Kelsch, 335, 644. Kempe (A. B.), 174. Kendirdjy (L.), 197. Kenyon (J.), 415, 520. Kermorgant, 82, 213. Kerschbaum (F.), 563. Khotinsky (Eug.), 110. Kielhauser (E.), 86. Kilian (W. h 82, 122, Kimpflin (G.), 123. Kipping (F. S.), 174, 382. Kirmisson (E.), 171, 509. Kirpal (A.), 523. Kirton (T. N.), 521. Kittl (E.), 947. Kleeman (R. D.), 519. Klein (GC. A.), 691. Klein (J. F. C ), 686. Kling (André), 283 à 292, 314 à 348, 470. Kling (P. E ), 988. Klobb (T.), 686. Kluyver (J. C.), Knight (Mile L. ES Koby (F.), 449. 335, 644, 686, 827 419. Kœænigs (G. d Kærner (G.) Kæssler ( K.). Kohn (M:), : Kollmann M.) 112. Kolowrat (L.), 130. Kôünig (B.), 260. Koorders (S. H ), 564, 856. Korda (Désiré), 119. Korn (A.), 600, 643. Kowal:ki (J. de), 170, 318, 730. Krassousky (K.), 942. Kraus (R.), 692. Kremar (J.), 523. Krebs, 371. Kremann (R.), 563, 697, 947 Krempf (A.), 123. ee (H.),-423. 380. 5123, 608, 692, 946. Kruppa (E.), 691. Krygowski (Z.), + Ktenas (C. A.) 335, 1027. Kühnen (F.), 721. Kunckel d'Herculais (J.), 213. Kuostler (J.), 82, 214, 253, 3178, 41 Kuss (G.), 123, 124, 380. 2, 688. L Laar (J..J. van), 524, 856. Labbé (H.), 171, 424, 471, 687, 903, 944, 1028. Labbé (M.), 121, 376, 421, 471, 556, 853, 900, 983, 1025. Labrouste, 601. Laby (T. H.), 519. Lacomme (L.), 43, 319. Lacroix (A.), 110, 551, 600, 809, 943. Ladenburg (E.), 522. Laederich (L.), 424, 470. Lafforgue, 471, 602. Lafite-Dupont, 125. 559, 602, 645, Lafon (G.) Lafont (F. Lagarde (L.), Fe Lagrange, 82. Lagrave (Coste de), 683. Lagrifroul, 43, 123, 944, 1028. Laguesse (E.), 568 à 9279. Laignel-Lavastine, 855. Lainé (E.), 254. Laisant (C.-A.), 313, 681. Lalesco (T.), 534, 984, 1026. Laloue (G.), 123, 253, 378, 644 Lamarck (J. B.), 9%1. Lamarcodie (G. de), 43 à 49, 395 à 405, 654 à 664, 788 à 794. Lambert (MI), 615. B = Lambert (A .), 110. Lambert (J. } 419. Lambert (M.), 123. Lamotte (M. î SJ ROLE Lampa (A.), 86, 692. Lampel (H.), 563. Lams ,H.), 213, 298. Lamy (H.), 645, 646. Lancereaux (E.), 43 Lancien (A.), 600. Lauder (G. D.), 520. Landerer (J. J.), 951. Landini (G.), 340. Landouzy (L.), 410, 985. Landrieu (Ph.) 253. Het (K.), 523. Lane (J.), 258, 607. Lang (V. von), 692. Lang (W. R.), *5, 606, 691. Langelaan (J. "W.), 127. Langlois (J.-P.) : 43. 44, 687, 943. Lannelongue, Lapersonne (Ge) Lapicque (L.), 82, 600, 645, 944, 1027. Lapicque (Mme L.), 12 Lapie La 291. Lapie (Paul), 712. Laporte (F.), 335. Lapparent À. de), 469. Lapworth (A.) 175, 382, Larminat (E de), 899. Larmor (J.), 74. Laroche, 1028. Larter (A. T.), 167. La Sante (P. Xaxier de), Laske (V.), 692. Lassablière (P.), 43, 380, 515. Lattey (R.-T.), 1029, Launay (L. de), 3718, 942, Launay (L.), 298, 602, 986. Laurent (L.), 853. Laussedat, 334. Laveran (A.), 151, 686, 687, 810, 942. Lavergne (Gérard), 465, 639, 768. Law (H.-D.), 174, 338. Lazennec (1.), 81,83, 254, Leach (F.-P.), 46. Leathem (J.-C.\, 293. Leathes (J.-B.), 811. Léauté (H.), 250. Lebar (L.), 211. Le Bas (Mile G.), 84, 475. Lebeau -(P.), 422, 377. 318, 469, 558, 600, 60%, 644, 685, 810. Lebel (A.), 422. Lebesgue (H.), 212, 334, 340, 38% Lebeuf (A.), 639, 130, +51, 938. Leblond (M.-A.), 675 à 680. Le Cadet (G.), 422 ; 984. 42%, 602, G45, 410, 943. 1. 319, 380, 424, 516, k, SAT. 415, 561, 1029. 296. 1023, 1027. 297, 213, 513, GO, 378, 413, #51. Lécaillon (A.), 44, 254, 319, 380. Lecène (P.), 297. Le Chatelier (H.), 425, 422. Lecher (E.), 86, 260, Le Clerc, 171. Leclerc du Sablon, Lecornu (L,). 42, 81, Le Dantec (A.), 688. Ledebt (Mile S.), 810. Le Dentu, 82. 123, 334, 985. 334. 1058 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Ledingham (J.-C.-C.), 689. Leduc (A.), 557, 601, Leduc (S.), 82. Leenhardt (E.), 193. Lees (C.-H.), 605. Lees (F.-H.), 690. Lees (N.) 606. Lefebvre (Ch.), 425. Legendre (R.), 214, 516, 517, Léger (E.), 170, 254, 855, 1026. Léger (L.), 193, 601, 943, 943. Leithauser, (G.), 562, Leitinger | R.) 1031. Lelieuvre | (M), 329, 509, Lelièvre (A.), 194, 335, 150. . Lely (C.), 176, 383. Lemaire (H.), 687. Lemaire (J.), 855, 903. Lemierre (A.}, 688. Lemoine (G.- -H.), 123, 212, 985. Lemosy d'Orel, 602, 645. Lemoult (P.), 686, 1026. Le Noir (P.), 855. Leon (A.), 86, 947. Leonardi (C.), 1031. Léopold-Lévi, 83, 124, 213, 379, 424, 516, 1028. Lepage (L -), 43, 336, 319, 474. Lépine (J.), Fe 855, 903. Lépine (R.), 172, 469, 559, 942. Leprince (M.), 985. Leprince-Ringuet (F.), 212. Leriche (M.), 315, 730. Leriche (R.), 82, 335, 854. Leroide (J.), 371, 647. Leroux (Dr), 985. Leroux (H:), 423, 600, 809, Lesage (A.). 602. Maure (PA X°); 493; Lesieur (Ch.) : 82, 297, 602. Lesne (P.), 545. Lesné, 603. Le Sourd (L.), 516, 102$. Lespieau (R:);:83, 123,544: Le Sueur (H. R.), 690. Letalle, 903. Leteur (F.), 981. Létienne (A.), 468. Letulle (M.), 43, 471, 472, 516, 602. Leture (Emile), 265. 988. Levaditi (C.;, 319, 380, 424, 425, 559. Leveau (G.), 984. Levi (B.). 87. Levi (E.-E. ds 259, 1031. Levi (G. NAS Levi- Cite Gi. ), 130: Lévy (Mie), 82. Lévy (D.-M.), 904. Lévy (Maurice), 726. Lévy-Franckel, 213. Lévy-Valensi, 1028. Lewandowski (Maurice), 252, Lewkowitsch joe 606. Leys (A.), 64 Lezé (R.), 596, “68, 943, 1023. Lichtentéls O. von), 1030. Ligniéres (J.), 903, 985. Lilienfeld (G. RS ), 126. Lilienfeld (J. -E.), 428 Linden (Mie von), 255, 297. Lindet (L.), 596, 647, 685, 1023. Lindner (J.), 692. Linossier (G.), 123. Linsbauer (K. et L.), 87. Liouville (R.), 81. Lippmann (A.), 43, 645, 943, 1098. Lippmann (G.), 422, 514, 643, 685. Lisbonne (M.), 602. Litschauer (V.), 563. Littlebury (W.-0.), 258. Livon (Ch.), 603. Livon (J.), 517. Llobet (A.-F.), 81 Lo Bianco (S.), 476. Lobstein (E.), 123, 124, Lock (R.-H.), 216. Locquin (R.), 216, 378, 810. 380. 942, 1028. 380, 471, = Loeb (J.), 985. Lœæper (M.), 516, 517, 559, G02, 688. Loewy, 514, 527, 902. Loiseleur, 516, 517. Lombard (Joanny), 418, Lorand (A.), 124. Lorin | [Hene:). 120. Lortet (L.), 601. Loth GÉNIE 684. Louise (E.), 644. Love (A.-E.-H.), 519. Loverdo (J. de 82, 601, Lovisato (D.), 416. Lowe (F BH 475. Lowi (E 564. Lowry (T.-M.), 690. Loyez | (Mile M.), 495. Lubimenko (W .), 170, 297, Lucas (A.), 601. Lucas (C.-P.), 466. Lucas-Championnière (J.), 515. Lucerna (R.), 947. Lucien (M.), me 986. Ludendortf (H.), ne Ludre (Mme de), 4 Luizet (M.), 942. Lumsden (J.-S.), 46. Lunge (G.), 710. Lunt (J.), 336. Lutz (L.), 296, 468. Lyle (T.-R.), 257. Mac Alpine (D.), 682. Mac Bain (J.-W.), 945. Macbride (E. W.), 814: Mc Callum (J.), 988. Macchia (Fc), 259. Macchia (P.), 476. Mac Connan (J.), 115. Macdonald (J.-S. js 46. Mc Gyll (A.), 691. Mach (E.), 692. Machat {J.), 684. Mache (H.), 86, 692. Maciag, 645. Me Intosh (J.), 559. Mackenzie (Al.), 415, 606, 958. Maclaud, (Ch.), 120, Maclaurin (R.-C.), 45, Me Leod (J.), 258. Mac Mahon (P.-A.), 174. Mc Millan (A.), 298. Me Sanders (J.-C.), 988. Maddocks (W. -H.), 7126 Magnan (A.), 469, 470. Magri (G.), 340, 884. Magri (L.), 81, 340, 1031. 251. Mabheu (J.), 852. Maige (A.), 170, 297. Maignon (F.), 123, 686, 902. Maïlhe (A.) 470, 601, 682, 1026. Maillard (L- “C). AE MST, Maillet (Edm.), 212, 469, Maire (M.), 192, 297, 601. Makower (W.), 520. Malaquin (A.), Malassez fé ), 44. Malclès (L.), 170. Malhtens (G.), Mallein, 603. Mallock (A.), 474, 519, 605, 811. Malvoz (E.), 379. Manceau (E.), 686. Mancini (Ernesto), 416, 132, 1031. Mangin (L.), 425, Mann (A.-E.), 42 Mann (E. A 52 “ae Y.), 688, 956. 595,942. 469, 985. a 4. 691. 2413 Manning ( MAO R EN ( Manquat, F8. Mantoux (Ch.), 9 QE ; Mantoux (Paul), 252. 469, 1027. 459 à 165, 318, 423, 88, 260, 340, 384, Maquenne (L.), 167, 210. Mar (A.), 124. Marage, 470, 514, 903, 943. Marcano, 1027. Marchal {P.), 903. Marchand (H.), 297, 335, 686. Marchand (Le), 123, 494. Marchetti (G.), 384, Marchi (L. de }), 384, 416. Marchis | (L.), 949. Marchoux | (E.), 319, 853. Marcolongo (R.), 732. Marie (A.), 125, 112, 380, 471, 559, 602, 688, 855, 904, 944. Marie (C.), 315, 601, 643. Marie (P.\ 424. Marinesco (G.), 145 à 1459, 490 à 4198, 213, ee 334, 422, 645, 688, 810. Marioi (G.), Marini (L. ); . Marino (L.), 340. Marmoreck (A.), 124. Marples (M.- EE AñE Marquis (R.), 42. Marsden (Mile E.-G.), 690. Marsh (J.-E.), 415, 1029. Marshall (H.-A.), 648, 946. Martel (E.-A.), 934, 601, 644, 809. Martel (H.), 557. Martelli (A.), 384. Martens (F.-F.), 85, 428. Martin (A.), 82, 123, 124. Martin (G.), 379. Martin (J.), 425, Martin (J.-B.), 810. Martin (L.), 213, 810. Martin (W.:B.-M.), 473. Martinand (V.), 558, 685. Martinelli (M.), 340. Martinet (Alf.), 421. Martinez (A.-B.), 252. Martyr (G.-H.), 689. Mascarelli (G.), 732. Mascarelli (L.), 87, 340, 1031. Mason (W.-H.), 474. Massaglia (A.), 810, 902. Massart (J.), 466. Massau (J.), 686. . Massol (G.), 984. Masson (0.), 415. Matha, 730. Mathias (E.), 697 à 714. Matignon (Camille), 348 à 356, 899, 902. Matza (A.), 44, 171, 603, 645. Maublauc, 903. Mauguin (Ch.), 83, 557. Maurel (E.), 2. 172, 255, 298, 335, 472, 516, 602. 645. Maurenbrecher | (A.-D.), 300. Mauté (A.), 124, 986. Mauthner (J.), 692. Mayer (A.), 83, 124, 914, 255, 335, 379, 424, 495, 644, 645, 646, 687, 984, 1027, 1028. Mayerhofer (E Maygrier, 515. Mayr (G.), 340. Mazé (P.), 42, 643. Mazzucchelli (A.), 87, Medici (S.), 384. Meet J.-H.), 176. Mees (C. “E. -K.), ÂT4. Meige (H.), 211, 597, 683. Meillère (G.), 339, 601, 855, 903. Meldola (R.), 46, 945. Meldrum (A.-N.), 561. Mellor (J.-W.), 427, 475. Ménard (P.-J.), 1028. Mendeléeff (D.-J.), 170. Mendola (L.), 732. Mercadier (E.), SL2- Mercalli (G.), 12 Mercier (L.), 44, : Merczyng | H.) Merklen (Fr. ); Merlin (J.), 81. Meslin (G.), 212, 335, 452 à 459. .), 523. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEU RS 1059 esnil (F.), 833 à 850. Messel (R.), 427. estrezat (W. d 685, 688. Metchnikoff (E.), 420. Mettler (E.), 335. Meunier (F.), 643. Meunier (J.), 311, 410, 854, 1026. Meunier (L.), AA. Meunier (St.), 81. Meurice (J.), 598. Meyer (A.), 563. Meyer (F.), 942. Meyer (H.), 86, 260, 946, 947. Meyer (J. de), ‘904. . “Meyer (S.), 522. Meyer (W.-F.), 522, 523 Micheels (H.), Micklethwait Mieli (A.), ot Miers (H.-A.), 605. Milhaud (G.), 223 à 228. Miller (W. FRS 338. Millochau (G Eh 1713, 212, 311. Millosevich (E.), 384, 476, 132, 1031. Millosevich (F.), 259, L16, 132: Minchin (E.-A.), 45. Minea (J.), 253, one 129, 645, 688, 810. Minet (Ad.), 2 Mirande (M), an 809, 810, 943, 1028. Mironescu (Th.), 43. Mitchell (H.-V.), 605. Mobius, 607. Modestov (Basile), 983. Mogendorff (E.-E.), 88. Moir (J.), 988. Moissan (H.), 82, 126, 213, 253, 334, 371. Mola (P.), 601. Molisch (H.), 563. Moll (W.-J.-H.), 127, 383. Moll (J.-W.), 128. Molliard (M.), 469, 984. Monaco (Prince A. de), 422. Monier-Vinard, 44, 123, 172. Monod (Ch.), 123, 558. Monod (V.), 335. Montel (P.), 984. Monti (V.), 732. Monvoisin, 681. Moodie (Mile A.-M.), 298. Moog (A.), 943 Moog (R.), 424, 425, 471 Moore (T -S.), 520. Morax (V.), 901. Moreau (B.), 124. Morel (A.), 82, 124, 125, 214, 254, 255, 335. Morel (Ch.), 124 Morel (L.), 944. Morell (R.-S.), 382. Morera (G. 259. Moreux (abbé Th.), 430, 984 Morgan (E.), 561. Morgan (G.-T.), 251, 338, 605, 945. Morgenstern (0. 523. Morbardt BE 296. Morrow (J.), 945. Mosenthal (H. de), 521. Mosny (E.), 121. Mossler (G.), 692, 1030. Mosso (U.), 384. Motet, 644. Mouilpied (A.-Th. de), 174. Moulin (M.), 646. Moulin (P.), 600. Moullin (Marcel), 215. Mouneyrat (A.), 469, 515. Moure, 644. Moureaux (Th.), 8 Moureu (Ch.), 81, 43 167, 173, 254, 378, 429, 4173, 515, 557, 903, 942, 985, 988, 1026, 1029. Moussu, 687, 985, 1027. Mouton (H.), 373, 685, 688, 984, 987. Mudge (G.-P.), 174. Muir (M.-M.-P.), 690. Muir (Robert), 473. Muller (H.), 946, 988. Muller (P.-Th.), 315. Mulon (P.), 472. Munk, 339. Muntz (A.), 254. Murat (Louis), 641. Murat (Paul), 641. Muratet (L.), 380. Murray (J.-A.), 518. Muskens (L.-J.-J.), 524, 564. Mutermilch (W.), 557, 600, 604. Myller (A.), 942. Nabias (B. de), 4 Nachet (A.), 422. Nageotte (J.), 124, 214, 255, 319, 602, 645, 986, 1028. Nalepa (A.), 523. Nansouty (Max de), 901. Napper (S.-S.), 382. Nardi-Greco (Carlo), 983. Nasini (R.), ST, FRPX Nathan (M.), 903. Nattau-Larrier (L.), 516, 517, 645. Neesen (F.), 522. Nègre (L.), 904. Negri (A.), 132. Négris (Ph.), 1027. Nélaton, 9%3. Nelli (B.), 259. Neogi (P.), 1029. Nepper (H.), 687, 688, 944 Nepveu (A.), 410! 645, 646. Nernst NE }, 86. Netter (A.), 43, 171, 254, 255, 298, 335, 319, 380, 428, 645, 687, 688, 986. Neuville (H.), 81, 122, 170. Neveu-Lemaire (M.), 855. Niccolini (G.), 732. Nicholls (H.-A. Alford), 682. Nichols (W.-W.-S.), 258. Nicklès (R.), 297. Nicloux (M.), 43, 44, 82, 123, 172, 212, 602, 688, 943. Nicolardot (P.), 318, 381, 427. Nicolas (E.), 981. Nicolas (G.), 4170. Nicolétis, 124. Nicolle on 213, 423, 687, 130. Nicolle (M.), 45, 645. Nielsen (N.), 253, 553. Mierstrasz (Y. -E.) 564. Niesel von et (G.), 260. Nieuwenbuyze (P.), 176. Niewenglowski (Paul), 639. Nobécourt (P.), 379, 904. Nodon (A.), 809. Noica, 602. Noirel, 371. Nordmann (Ch.), 18, 336. Nordmeyer (P.), 522. Normand (J.-A.), 42. Novitzky (A.), 685. Nussbaum (F.), 469. 124, 195, [eo] Obermayer (A. von), 563. Oberthur, 4171. Ocagne (M. d’), 170, 342, 392 à 395, 499, 469, 126. Occhialini (A.), 87, 259. Oddo (B.), se Oddo (G.), Oddone E 334, EH Oechsner de Coninck (W.), 317, 470. Offret (A.), 502 à 508. Ofner (R.), 260. Olivari (F.), 476. Ollivier (H.), 517, 600. Onnes (H. Kamerling), 48. 88, 128, 175, 136, 300, 383, 564, 856, 918. Orchardson (J.-A.), 126. Orlando (L.), 259, 1031. Ornstein (Mile S.), 45. Ortoleva (G.), 132. Orton (K.-J.-P.), 46, 174, 561, 945. Oss (S.-L. van), 383. Oudemans (J.-A.-C.), 42, 88, 127. P Pachon (V.), 425, 469, 516, Pacottet (P.), Gi3. Padoa (M:), 103 Paddison (W. nt 855. Pagniez (Ph.), 516, 944, 1028. Painlevé (P.), 29, 911 à 913. Palazzo (F.-C.), 416. Pamard, 943. Papillon (H.), Paraf-Javal, Me Pardé (L.), 512. Pardo R)! 260. Parhon (C.), 985. Paris (L.), 171. Pariset, 602, ne Parisot (J.), Sa Parker (J. de Ve Parravano (N. È 87, 259, Parrozzani Ge ), 87. Parsons ee =) 810 Pascal (E.), 81. Pascalis, 126. Pastureau, 122. Patein (G.), 645, 854, 943. Paterno (E.), 340, 416. Patterson (Th.-S.), 298, 382, 988. Pauchet, 515. Paul (D. Mec L.), 258, Paulesco (G:}, 254. Paulesco (N.), 123, 253. Pays-Mellier (G. ), 1027. Peachey (S.-J.), 382. Pearce A, EI Pearce (F.), TE Pécheax (Hector), 109 à 444, 291, 854. Péchontre (F.), 234 à 248. Peckham (SF) SE Pedler (Sir A.), 4 Peju (G.), 43, D, 471, PeLelRerine (C.-A. 2e Pélabon (H.), 514, 643. Pelet-Jolivet (L.), 1026. Pellat (H.), 253, 311, 422, Pellegrin (J.), 514, 686. Pellin (F.), 172, 984. Pelourde (F.), 985. Pénières (L.), 43. Pensa (Henri), 169. Perdrix (L .), 214, 517. Pérez (Ch.), 412, 559, 689, 944. Perkin (A.-G.), 258, 298, iT5, 4 116, 946. Perkin . -M.), 174, 250. Perkin (Sir W. -H.), 491, 4714. Perkin (W.-H. jun.), 46, 298, 475, 520, 561, 690. Perman (E.-P.), Pernet, 984. Pernter (J.-M.), 260, 1031. Pérot (A.), 470, 1096. Perotti (R.), 340, 1031. Perrier (L.), 298. Perrier de la Bathie (H.), Perrin (Jean), 374, 426. Perrin (M.), 986. Perrot (Ew.), 40, 251, 171, 982. Perrot (F.-L.), 122. Perrotti (P.), 259. Perry (J.), 216. Perusini (G.), 88. Pervinquière (L.), 728. Pesloüan (Ch. Lucas de), 509. Petavel (J.-E.), 519, 605. Petit (G.), 125, 213. 516, 855, 903. Petit-Bois (A.), 1022. Petot (Alb.), 168 Petri (L.), 260, 732. 559, 603, 1028. 2, 516, 944. 423, 902. 561, 647. 600, 685, 809. 1060 Pettit (A.), 44, 42 Peyron, 3 6. Philibert ( A.), 493. Philip ( J-Ch ) fé 382. Philoche (Mile), Phisalix Mme M 174, 253. Picard (Em.), 42, 469. Picart (L.), 984. Picciati (G.), 732. Pick (G.), 86. Pickard (R.-H.), 258, 475, 520. Pickering E.-C.), 686. Pickering (S.), 258. Picqué (L.), 254, 687. Pictet (Amé), 170, 685. Piéron (H.), 43, 4%, 82, 194, 172, 242, O4, 254, 255, 494, 411,479; 516, 538, 944, 985, 986, 1098. Pietschmaun (V.), 941. Piet're (M.), 254, 558, 641. Pignet, 45. Pigorini (L.\, 384. Pinard (A.), 644. Pincherle (S.), 340. Pincussobn (L.), 562. Pinoy (E.), 43, 213, 1028. Piola (F.), 87, 340. Pionchon (J.), 2943. Piot-Bey, 810. Piquind, 516, 646, 943. Pirani (von), 258. Pittard (Eug,), 43. Pizzetti (P.), 340, 416. 4, 903, 986, 1028. Place (T.) 116. Plancher iG- ), 181, 259; 340. Planck (M.), 126, 259. Plate (A.-G.), 770. Playoust (Charles), 550 à 552. Plimmer (H. G.), 336, 904. Pochettino (A.), 87. Pochin, 382, Pocklinglon (H.-C.), 605. Poebhl (Al. de), 809. Poh!l (R.), 339, 522, 812, Poincaré (H.), 42, 686. Poirier (P.), 424. Poisot, 213. Poisson (H.), 469. Poizat, 122, Polack, 943, 1027. Policard (A.), 255, 471, 516, 559. Pollacci (G.), 340. Pollachi (Capitaine P.), 851. Pollak (J.), 1031. Pompilian (Mile M.), 4 Poncet (A.), 82, 335, do 854. Pond (F.-J. ï 427. Ponti (U.), 340. Pope (W.-J.), 175, 382, 520, 1029. Popof (V.-S.), 903. Popovici (C.), 318, 942. Popovici-Baznosanu (A.), 123. Porak, 6#4. Porcher (Ch.), 380, 516, 686, 986, 1027. Porter (T. -C.), 474, 648. Porter {W.-A.), 689. Portevin (A.), 1026. Portheim (L. von), 916. Portier !P.), 44, 379. Posen (J.), 985. Postma (O.), 127. Pottevin (H.), 371. Pouchet (G.), 335. Pouget (1.), 1027. Poulenc (C.), 721. Power (F.-B.), 337, 475, Pozzi (S.), 681. Pozzi Escot (Em.), 254%, 730. Praetorinus (A.), 563. Prenaut (A.), 41, 125, 211, 559, 599. Pribram (K.), 523. Price (Th.-S.), 338. Price (W.-A.), 382. Prideaux (E.-B.-R.), 945. Prillieux :E.), 903. Proca(G.), 1028. Procter (H.-R. Puiseux (P.), 31 1029, Pulle (A.). 128. Purdie (Th.), 258. Pussenot, 254. Putzeys (A.), 688. Pyman (F.-L.), 84, 606. Q Quartaroli (A.), 476. Quensel (P.-D.), 86. Quéry, 255. Queva (C.), 378. Quidor (A.), 422. Quinton, 558. Rabaté (E.), 555. Radcliffe (L.-G.), 126. Rajat (H.), 43, 425, 472, 516, 944. Ramhaud, 334, 600. Ramsay (Sir William), 427, 475, 515, 605, 651, 946. Ramsbottom (E.), 475. Ranc (A.), 214, 298, 1028. Raper (H. S.), 988. Rathery (F.), 424, 425, 646. Ravaut (G.), 986. Ravaut (P.), 602. Raveau (C.), 255. Ravenna (C.), 259. Rawles (W.-H.), 606. Ray (P.-C.), 382, 475, 561, 606, 1029. Ray Lankester (E.), 901. Rayleigh (Loru), 174, 731. Raymond (K.), 335, 687. Razous (Paul), 639, 726. Rebel (H.), 692. Rechinger (C.), 9#1. Recoura (A.), 600. Reed (W.-W.), 945. Regaud (CI.), 44, 83, 172. Regelsperger (Gustave), 121, 570, 816, 910, 989. Regnault (Félix), 296. Reichenheim (C.), 339. Reichenheim (Q.), 522. Reid (CI.), 564. Reid (G.), 173. Reid (Mme E.-M.), 564. Reid (W.-F.), 258, 521. Reina (V.), 259, 476, 132. Reïinach (Th.), 943 à 928, 954 à 961. Remlinger (P.), 44, 123, 213, 255, 494, 425, 516. Rémoundos (G.), 122, 509, 730. Rémy (Dr), 903. Remy (Ch.), 516. ), 253, 334. Renaut (J.), 603. Rengade (E.), 42, 216, 377, 381, 422, 685. Renouf (N.), 46. Repelin (J.), 419, 641. Répitou (F.), 254, 517. Requier, 380. Retterer (Ed.), 124, 172, 255, 297, 687, 943, 1027, 1028. Réveille (J.), 50. Révil (J.), 219, 420, 641, SS4 à S98. Reynier (P.), 644, 1021. Rey-Pailhade (J. de), 1.028. Ribadeau-Dumas (L.), 213, 319, 645, 687, 688, 1027, 1028. Ricco (A.), 87, 685, 130. Richard (A.), 643. Richardson (A.), 475. Richardson (F. W.), 126, 258. Richardson (L. F.), 945. Riche (A.), 43. Richelot (GA 424. Richer (Paul), 596 Richet (Ch.), 43, 82, 255, 380, 809. Richon (L.), 255, 425. Ricôme (H }), 809. 134, 347, TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Ridley (H. M.), 605. Riederer (H. L.), 521. Riemann lugo, 2411: Riesz (F.), 33, 377, 600. Riesz (M.), 854. Rimini (E.), 87, 476. Ripgelmanu (M.), 514. Ringer (W. E.), 176. Riollot (J.), 681. Riquier, 1026. Rist (E.), 82. 1027. Ritter (E. A.), 1027. Ritz (W.),.334, 643. Rivet (L.). 379. Roberts (R. J. P.), 45. Robertson (R.), 382 Robin (A.), 319. | 0,131, 984, Robinson (R.), 46,84, 297, 520, 1027. Rochard, 171. Roché (J ), ee ee 5. RO ), 18 Rodet (A.), 685, 944, 1028. Roger (H); 4%, 471, 516, 517, 544 à 549, 556, 986. Rohr (M. von). 938. Rôll (M. F.), 515. Rolla (L.), 340. Rollett (H.), 86. Rollinat, 43. Romburgh (P. van), 300, 856, 985, 1052. Romme (R.), 296, 641, 941. Ronchèse (A), 425, 471, 641. Roozeboom (H. W. Bakhuis), 48. Rosati (A.), 340, 384, 476. Rosenstiehl (A.), 551, 360, 1029. Rosenthal (G.), 297, 319, 425, 516, 511, 559, 601, 687, 1098. Rosinger (H.), 608. Rossello (H.), 944. Rossi (P.), 1031. Rossuim (A. van), 564. Rotch (L.), 371. Rothschild (H. de), 83, 124, 213, 379, 380, 424, 471, 516, 1028. Rothschild (M. de), 81, 122, 170. Roubarnd (E.), 335. Roule (L.), 600, 985. Roullet-Ché y (Lucien), 333. Rousseaux (Eug.), 81. Roussy (B.) 643. Rowe (W. T \,. 132. Rowell (H. W.), 85. Roy (P.), 470. Rozic (J.), 260. Rubegni ;S.), 259. Ruhemann (S.), 84, 475, 690. Rule (Al.), 174. Rusby (H. H.), 427. Russ (S.), 331. Russell (A.), 216. Russo (A.), 384. Rutten (L.), 384. Rynberk (G. van), 1032. Rziha (K.), 563. S Sabatier (P.), 378, 422, 423, 410, 604, 1.026. Sabotier, 425. Sabrazès (J.), 380, 424, 559. Sacquépée (E.), 516, 517, 903, 944. Sageman (P. G.), 945. Saggio {G.), 859. Saguac (G.), 640. Salet (P.), 42, 514. Salimbeni (A.), 379. Salinat (L.), 298. Salmon (J.), 254, 471,645, 986. Salmon (P.), 82, 213, 298, 379, 902. Salomonsen (C. J.), 425. Samec (M.), 563, 692, 1030. Sand (H. J_ S.), 257. Sanger (Ch. R.), 606, 946. Santerre (S.), 373. Sarasin Ed.) }, 130, 809 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 1061 Sartory (A.), 112, 687, 688. Saussure nt ‘de). 4135 à 144. Sauton, 212,254, 422, 810. Sauvage (E ), 6 686. Sauvageau OR 1à Sauvé (L.), 44. Savin (L.-H ), 419. Savornin (J.), 557. Sbrana (U.), 259. Sca! (C.), 81, 558, 1029. . Scarpa (0.), 340. } 424, 688, 984, 986, 1028. Schaelfer (G Schaffers (V. | 1026. - Scheel (K.), do. Schidrowitz (Ph.), 258 Schlagdenhauff n, 644. Schlegl (K.), 523. Schmidt (Ad.), 607, 946. . Schmidt (G.-C.), 126, 298. Schmidt (R.), 428 Schneider (R.), 523. Schænflies (A.), 81 Schorn (F.), 340. Schoute (P 176, 300, 34, 24, Schrader (F.), 686. Schreinemakers (KF.-A. H.), 176. Schrotter (H.), 946. SCAUSRENOUS | (R.-C.), 427. Schuh (F.), 88, 127, 1175 Schulten (A. de), 9%. Schulze (F E.), 562. Schwantke (A.). sf. Schwarz (H.-A.), 607. Schweidler (E. van), 522, 563 Schweizer (V.), 552. Scott (Al.), 427. Searle (G.-F.-C.), 811 Sébileau, 44. Sedgwick (A.), 216. Seefried (F.), 692. Séguier (de), 6S6. Seillière (G.), 986, Sellier (J.), 380. Senderens (J.-B.), 212, 470. Senier (A.), ne 1029. Senouque (A.), 253. Senter (G.), 298. Sérégé (H.), 336, 380. SERBen! (E. } 297. Serra (A.), 384. Settimi (Luigi) 941. Seux (E.), 122, Sève (P.), 514, 518, 600. Severi (K.), 259 476. Éeuiatre (A.), 903: Seyewetz (A nu Le Sheppard (S.-E.), 174. Sherrington (C. 2S 605. Short (A.), 606. Sicre (A.), 5117. Siebenrock (F.), 523, 692. Siegl (K.), 522, 10 0. Sierra (Just), 40. Silber (P.), 259, 732. Silvester (H.), 33. Simon (I.), Fe 564, 836, , 383, 523. 1028. Simon (L 516, 517, 688. Simon (L. : PER PE LENE Simon (M “Est. Simon M. 95. Simon (Th). 561. Simonin, vu Simonsen | L.). 46, 690. Simpson fs. ), 835: Sinigaglia (Franeuis), 293. Sirkar (A.- p. \, 945. Sisley (P.), 1026 Sitter (W. de), 564, Sü6. Sizes (G.), 984. Skinner RE 1029. Skrab 1 ( "4 Skraup GA 522, 523, 946 Slade (R.-E.) 520 Slatinéano (A) üSS Smedley (Mile J. Smiles *s. ), 474, 561, 945. Smith (Mlle A.-E.), 174. On 336, 472, 559, 689, .-H.), 46, 48, 88, 198, 175, 948, 1032. Smithells (A.), 427. Snyders (E.-P. ), 856. Soddy (F.), 84. Sôhngen (N.-L.), 128. Sola (J. Comas), 557, 1026. Sollas (Mile J.), 810. Sommelet, 83. Sonies (F.), 524. Soubies (J.), 855. Soubrane, 603. Soulé, 688. Soulié (A.), 125, 687. Soulié (H.), 688. Soulima (A.), 645. Soulima (H ), 645. Southerns (L. ), 45. Suyer (Ch.), 559, 687, 658. Spallino (L.), 340. Speranski (N.), 1023. Speroni, 172. piment (L.), 425 Spitz (A.), 1030. Sprankling (Ch.-IT.-G.), 258. Springer (Maurice), 738. Stacey (C.-E.), 421. Starke (H,), 521. Stassano (H.), 172. Steele (B.-D.), 94 Stefanescu (Ml!e E.), 471. Stefani (C. de), 384. Stefanik (M.), 469, 557. Stefanini (A.), 340, 1031. Stefano (G. di), 384. Steindachner (F.), 87, 522, COS, 692, 941. Steindachner (H.), 563. Steinmann (G.), 626 à 6353. Stekloff (W.), 317, 551. St: phan (E.), 984. Stephan (P.), 83, 336. Sterba (J.), 340. Stern (M'ic L.), 2 516, 559. Stewart (A.-W.), 174, 690, Stiasny (G.), 86. Stiennon (T.), 319, 380, Stodel (G.), 82, 214. Stodola (A.), 553. Stuk (J.-P. van der). 299, Stokes (Sir G.-G.), 851. Strahl (H.), 300, 3x4. Strakosch (S.), 563. Strampelli (N.), 87, 340. Strigl (M.), 692. Stritar (M.), 340. Stroohant (P.), 730. Struthers (R.de J.-F.), Strutt (R.-J. ke 131. Struve (Q.), 85 Stucker IN 52 5 Stummer (R.), 522. Stumpf, 339. Sturany (R.), 608. Suchard (E), 297. Sudborough (J.-J), S*, 475, 520. Sulzer (D.-E.), 158, 901. Sutherland (W.), 381. Swellengrebel (N -H.), 172. Swinton (A.-A.), 474, +89. Swyngedauw (R.), 294. Sy, 334, 600, 902. Szilard (B.), 42, 730, Szreter (1.), 644, 647. Szydlowski (L.), 563. 1023. 425, 688. 1032. , 1029. 563, 1030. 731, 809. T Taboury tee 600. Tiboury FA Tagger (J. Tannery Jules NO, Tannhauser (F.), 86. Tanon, 644 14, 253, 335, 319, 474, " Tutton AE, Tanret (G.), 1026. Tassart (L.-C.), 809. Tea te 371, 647, 653, 982. Tattersall (G.), 298. Taylor (J.), 475. Tchelinzetf (W.), 81, 122. Tchougaeff (Z.), 902. Teeple (J.-E.), 691. Teisserenc de Bort (L.), 1170, 253, 377, 423, 643. Ter- Gazarian (G 81 Termier (P.), 378, 942. Terroine (E.-F.), 124, 214, 2 984, 1028. Terson (A.), 1027. Tesch (P.), 856. Thaon (P.), 380, Theuvenv (L.), 516 Thévenin (A.), 551. Thévenot (L.), 124, 379. Thierry (E.), 254, 558. Thiroux (A.), 213, 601, Thoinot, 43. Thole (F.-B.), 175, 945. Thomas (E.-R.), 520. Thomas (J.), Thomas (P.), 172. Thowas (V.), Ê Thompson (H.-B.), #15. Thomson (J.-D.), 904. Thomson (J.-J. ), 149. Thorpe (J.-F.), 258, 338, 520, 946, 1029. Thorpe (J.-H. k 606. Thoulet nie Threlfall (R.) Tieri, 87. Tifeneau (M.), 81, 173, 422, 5N3 à 594, 602, Tinkler (Ch. K.), 475. Tissié (Ph) 1059! Tissot (C.), 170, 172, 380, 685, 984. Tissot (J.), 514, 5317. Titherley (A.-W.), 945. Tixier (L.), 517, 580! 644, Tizzoni (G.), 87, 476. Todaro (F.), 416. Toldt (M.-C.), 692. Tomkins (J.-A.), 427. Tommasina (T.), 311, 130, S09. Toostein (Mile M. 4% Torres (L.\, 423. Toulouse (Ed.}), 43, 82, 255. Tourneux (F.), 687. Trabert (W.), 608. Trabot (J.), 335. Travers (M.-W:), 519. Traxl (W.). 1030. Trebitseh (R.), 86. Trélat (Gaston), 263 à 236, 324 à 2725. Trémolières (F.), 729. Trépied (Ch.), 600. Tribondeau (L.\, 125, 21 Tribot (J.), 854, 903. Tricht (B. van), 524. Trillat (A.), 84, 219, 254, 810. Troisier (J.), 43, 603, 646, Trotman (S.-R.), QE Trouessart E.-L.), 43, 82, 809, 854, 1027. Trouton (E.-T.), 337, 689. Tsakalotos (D.-E.), 81, 212, 470. Tscherning, 471. Tschirch (A.), 750 à 255. Tsoucalas (P.), 122, 170. Tuck (W.-B.), 298, 690. Tucker ( Rat 497. Tuffier (Th.), 124 Tur (J.), 254, 123 Turnau (R.), 261 Turner (T.), ET Turner | W.-E-S. oBle Turpain (Al), 418, "4% à S2%, à SS4. Turro (R.), sat 68 Tutin (K.), 257, 47 , 646. 686, 810, 942 3, 422, 469, 1027. 1, #14. 427, 558, 130, 854, 942 1028. 4, 326, 688. 380, 422, 600, 687, 985, 1027. , 602. S67 1. 0: a 102 6% 1062 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Twort (F.-W.), 604. | Tzitzeica (G.), 557, 1026. Ubissch (G. von), 299. Ublig (V.), 87. Ulpiani (C.), S7. Ultée (A.-J.), 88. Upson, 560. Urbain (G.), 81, 558, 942, 988, 1029. Urban (G.), 339. Urechie (C.-J.), 985. V Vaillant (Ch.), 984. Vaillard, 378. Valentiner (5) ), 85. Valette (P , 335. Res (AD 942, 985, 988, 1026, 1029. Vallaux (Camille), 254 à 767. Vallée (A.), 379. Vallée (H.), 4%, 515, 558, 644 Vallet (G .), 325, 685, 4027. Vallette, 45. Vanzetti (B. ), 259, 1031. Vaquez (H.), 516. Variot, 558. Vaschide (N.), 81. Vassal (J.- -dJ:), 255, 297. Vasse (G.), 557. Vasseur (G. J'AO2HÉ Veen (W.-E. van der), 858. Véley (V.- H.), 84, 605. Venturi SE }, 250. Vérain (L.), 125. Verdun (P.), 380, 424, 687. Verger (H.) 125, 214, 472, 683. Vernon (H.-M.), 648. Versluys (W.-A.), 41. Vidal (E.), 123, 601, 602, 644, 903, Vieille (P.), 81. Vigier (P.), de 854. Vignon (G.), à Vi ignon (L.), 199, 1026. Vigouroux (Em.), 122, 253, 334, 335, 422, 515, 558, 685, 686, 130. Viguier (C.), 556, 600. Viguier (R.), 423, 854. Vila (A.), 254, 558, 647, 1027. Villard (J.), 557. Villard (P.), 311, 318, 381, 413, 130. Villaret (M. }, 517, 1028. Villatte, 902. Ville (J.), 380, 688. Villemin (F.); 82, 123, 254, 687.688. | Villepontoux (L.-F.), 418. Vincent (H.), 125, 169, 213, 252, 333, 425, 513, 516, 601, 602, 855, 943, 982, 1028. Viola (C.), 1031. Visme (P. de), 944, 1028. Viterbi (A.), 87 Vitry (G.), 172, 424, 559, 602, 687, 903, 944, 1028. | Vivanti (G.), 166. j Vlahavas (J.), 122, 170. Vlès (F.), 214, 334, 685. Voërman (G. L.), 128. Vogel (H. C.), 730. Vogel LS K.), 607. Volk (R.), 692. Volpino (A.), 384. Vonwiller (0. U.), 474. W Waals (J. D. van der), 127, 299, 383, 524, 564, 856, 948. Wachsler (E.), 475. Wadoux (A.), 986. Waelsch (E.), 170. Wagner (R.), 260, 523, 691, 692, 947. Wahl (A.), 170, 297, 422, 644 Wahl (Walther), 640. Waidner Œ sut 560. Waldeyer (W.), 339. Walker (C. E ), 811. Walker (J.), 988. Walker (N)), 561. Wall-rant (F.), 42, 378, 558, 942. Wallich, 515. Walter (H.), 523. Warburg (E.), 562. Warcollier (a 123, 38 à 287. Wassmuth (A.), 1031. Watanabe (T.), #2. Watson (J.-A.), 855. Watson (W.), 216. Watteville (C. de), 558. Waxweiler (Emile). 598. Weber (A.). 495, 645, 688. Weber (H.), 1022, Weber (M.), 127. Wechsler (E.), 1029. Weerman (R.-A.), 1032. Wegscheider (R.); 260, 523, 563, 1030. Weill-Hallé }, Ne Weiïinberg (M.), 44, 124, 172, 214, 645. Weir (J. je 945. Weiss (E.), 260, 523. Weiss (G:). 4%, 470, 558. Weiss (P.), 42 81, 122, 425, 984, 1096. Weizmann (Ch. à 84, 212, 96. Wellstein (R.-J.), 4022. Welsh (D. A.), 810. Werner (E. A.), 175, 298. Werner (F.), 260. Wertheimer (E.), 43, 688. Wesson (D.). 606. Wheldale (Mi: M.), 519. Whitehead CE Ne Whitehouse (N.), 648. Whiteley Qu M. A.), 605, 945. Whymper (R.), 855. Wichman (A. }, 856. Wickham, 854 Widal (F. je 293, 602, 687, 903. W ieleitner (H.), 4030. Wieringa (J H.), 856. Wijhe (J. W. van), 524. Williams (G.), 520. Williams (R. S.), 124. Williams (W. C.), 520. Wilsmore (N. T. M.), 988. Wilson (A.), 606, 689. Wilson (F. BR. TA 84. Wilson (H. A.), 1029. Wilson (R. W.), 46, 520. Wind (C. H.), 176, 383. Winkler (C.), 176. Winmill (Th. F.), 520. | Wintrebert (P.), 81, 559, 602, 645, 68 68%, 943, 944, 986. Wirtinger (W. JL 691. Witt (R.), 523. Witz (Aimé), 166, 219, 293, 377, 4 954, 596 Wolff (J.), 334, 459 à 464, 558, 60! 685 “ J. Wologdine, 514. Wolterson (P.), 128, 564. Wood (S. H.), 126. Woodworth (C. W.), 853. Woog (P.), 42, 643, 984. Woolley (M° B. E), 988. Wootton (H. A.) 606. Wootton (W. O. ), 605, 1229. Worden | (E. GC); 248 Wren (H.), 606. W CHE (C H.) } 562. Wullner (A.), 1023. Wurtz (H.), 681. Wyler (M), 946. Wynne (W. P.), 427. Wyrouboff (G.), 304, 1029. Wythoff (W. A.), 127. . Y Yakimoff (W. L.), 44. Yégounov (M.), 685. Young (G.), 338. Young (W. H.), 60%. Young (W. J.), 298. Yule (G. U.), 474. Z Zahn (H.), 4 home (. fe 2 Zambonini (E. ), 8 Zappa (G.), 476. 1031. Zavri-ft (D. “ 730. Zébrikoff (L.), 643. Zebrowski (B.), 319, 380. Zeeman (P ), 1032. Zeiller (R.), 514, 1027. Zeipel (H. von), 212. Zeise (O.), S6. Zellner (J.), 1031. Zeuner (G. A.), 902. Zimmermaon (H.), 85, 563, 607. Zolla (D.), 319 à 328. Zwaardemaker (H.), 128, 564, 856, 948 Zwiers (H. J.), 88. . PARIS. — L. MARETHEUX, IMPRIMEUR, 4, RUE CASSETTE — re D x Trees à sn be =. D RE